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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 28 avril 1998

• 1531

[Traduction]

Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Bonjour, chers collègues.

Cet après-midi, nous recevons le général Baril, le général Wendy Clay et le premier maître Meloche, qui nous parleront des problèmes économiques auxquels font face les membres des Forces canadiennes.

Général, j'ai la certitude que vous savez comment nous procédons. Vous avez entre 10 et 15 minutes pour faire votre exposé, après quoi nous passerons aux questions.

Je crois savoir que vous et le général Clay avez des exposés à faire. Après vous avoir écoutés tous les deux, nous passerons à la période des questions.

Général, nous vous écoutons.

[Français]

Général J.M.G. Baril (chef d'état-major de la Défense, ministère de la Défense nationale): Merci, monsieur le président, et bonjour.

Mesdames et messieurs, membres du comité, deux principales raisons ont motivé ma décision de comparaître devant vous ici aujourd'hui. La première, c'est que je tenais à vous présenter ce qui constituera le premier exposé d'une série de quatre audiences prévues sur les soins donnés aux militaires blessés et à la retraite, exposé que j'aborderai dans les quelques minutes qui suivront.

[Traduction]

La seconde, c'est que je désirais, par ma présence, vous démontrer et bien vous souligner que le règlement des questions concernant la qualité de vie des militaires constitue l'enjeu numéro un des Forces canadiennes et du ministère de la Défense nationale.

Jusqu'à maintenant, vous avez entendu le témoignage du sous-ministre adjoint du personnel, des chefs d'état-major des armées, des spécialistes en la matière, de soldats et de généraux, et de tous ceux qui sont entre les deux. Il va sans dire que les questions liées à la qualité de vie des militaires exigent que nul autre que le chef d'état-major de la Défense lui-même se penche sur la question. C'est pourquoi j'ai tenu à me présenter devant vous. J'aimerais maintenant vous souligner à quel point cette cause me tient à coeur.

[Français]

Au cours des dernières années, les besoins conflictuels au niveau du financement ont entraîné des répercussions profondes sur la qualité de vie des militaires. Nous avons eu beaucoup de pain sur la planche, sans mentionner les compressions budgétaires et d'effectifs auxquelles notre ministère a été soumis. Aux prises avec des bouleversements institutionnels, les Forces canadiennes et le ministère ont dû consacrer leurs efforts à des questions autres que celle de la qualité de la vie. Votre comité a d'ailleurs pu constater et saisir toutes les conséquences de ce manque d'attention de notre part.

[Traduction]

Parce qu'elle est devenue critique, la situation reçoit finalement l'attention qu'elle mérite. Le travail effectué par votre comité sur la qualité de vie et les efforts inlassables que vous avez fournis démontrent clairement que vous vous préoccupez des Forces canadiennes.

Tout comme vous, au cours des 18 derniers mois, les Forces canadiennes ont redirigé leurs efforts afin d'aborder les questions liées à la qualité de vie.

[Français]

En premier lieu, je voudrais vous mentionner que nous sommes en train d'examiner les politiques internes du ministère. Guidés par les plaintes des hommes et des femmes qui sont soumis à ces politiques, nous avons commencé à modifier les politiques qui entrent inutilement en conflit avec la vie de nos militaires ou placent un fardeau sur leurs épaules.

[Traduction]

Par exemple, nous avons réussi à modifier la politique sur l'indexation des rentes viagères versées aux membres des Forces canadiennes qui sont licenciés pour raisons de santé. Auparavant, un membre qui était licencié en vertu de l'article 3a, c'est-à-dire que le membre était inapte à s'acquitter de ses fonctions à titre de membre des forces armées, avait droit à l'indexation immédiate de sa rente.

Inversement, un membre de la même unité qui était licencié en vertu de l'article 3b, ce qui veut dire que le membre était inapte à s'acquitter de ses fonctions dans le cadre de son métier ou de son emploi et n'était pas employable autrement, n'avait pas droit à l'indexation immédiate.

• 1535

C'était injuste. Je suis heureux de vous dire que tous les membres qui sont maintenant licenciés en vertu des articles 3a et 3b ont droit à l'indexation immédiate de la rente dès le licenciement.

[Français]

Voilà un exemple de l'approche que nous prenons à l'égard des politiques courantes. Si des politiques doivent être modifiées, je n'hésiterai pas à le faire dans quelque circonstance que ce soit, et peut-être serai-je obligé de demander pardon après le fait.

[Traduction]

M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): J'invoque le Règlement, monsieur le président.

Général, nous n'avons rien de ce que vous dites dans nos notes. Pouvez-vous nous donner copie de votre texte?

Gén J.M.G. Baril: Avant d'arriver ici, on m'a dit que vous aviez une copie de mon texte.

M. Bob Wood: Nous en avons une copie, mais ce que vous disiez à l'instant n'y figure pas.

[Français]

Le président: Les propos que vous venez de tenir ne figurent pas dans votre mémoire. Vous pourrez peut-être nous en remettre une copie plus tard.

Gén J.M.G. Baril: Certainement. Je m'en excuse, monsieur le président.

[Traduction]

Dans la mesure du possible, nous attribuons également des fonds à des secteurs qui ont une incidence directe sur les conditions de service de nos militaires.

Les derniers rajustements salariaux effectués, qui se chiffrent à 155 millions de dollars, sont maintenant versés aux membres de la force régulière et de la réserve sur les budgets existants. Les fonds du Programme d'amélioration des conditions professionnelles des militaires de la force de réserve, une initiative de l'ordre de 61 millions de dollars, seront aussi puisés dans les budgets existants. Enfin, les améliorations qui seront apportées au service de soutien aux familles, évaluées à 75 millions de dollars sur cinq ans, proviendront également des budgets existants.

Dans notre recherche visant à trouver des fonds pour les projets sur la qualité de vie, aucun programme au sein du ministère n'a été à l'abri d'un examen minutieux. Ces mesures attestent que nous sommes prêts à faire face à nos obligations en matière de relèvement de la qualité de la vie. Je ne sais pas au juste combien d'argent nous pouvons nous permettre de consacrer à cet effort, mais nous ne pouvons, de toute évidence, continuer à ignorer le problème.

Ce ne sont là que quelques-unes des centaines d'initiatives mises sur pied par le ministère. Afin de s'assurer que le ministère réalise des progrès au moment voulu et que son élan se poursuive, le Conseil des Forces armées vient de créer un bureau de projet sur la qualité de vie. Au début, le bureau de projet s'occupera de la mise en oeuvre des programmes internes, en d'autres termes, des initiatives qui sont de notre ressort. Ensuite, lorsque le temps sera venu, le bureau sera responsable de la mise en oeuvre des changements découlant de votre rapport.

Cela dit, je voudrais vous exhorter à ne pas interpréter les efforts internes du ministère comme une tentative d'anticiper le rapport et les recommandations du comité. Bien que nous comptions sur le comité pour nous aider à régler les problèmes que nous sommes impuissants à régler, il est de mon devoir de chercher constamment des solutions aux problèmes qui sont dans les limites de mon champ de compétence et à mettre en oeuvre ces solutions.

Nos tâches se complètent. C'est la raison raisonnable d'agir. Nos buts sont les mêmes. Par conséquent, le travail en cours au ministère ne devancera pas le rapport final du comité ni n'entrera en conflit avec celui-ci.

[Français]

J'aimerais vous glisser quelques mots au sujet de l'autre raison qui m'amène devant vous aujourd'hui. Les soins médicaux donnés au personnel militaire dans les garnisons ou dans les théâtres d'opération à des militaires malades ou bien portants sont la responsabilité fondamentale et absolue des Forces canadiennes, du gouvernement et du pays. Il n'y a rien à ajouter sur l'importance de ce sujet.

Vous entendrez aujourd'hui la directrice générale des Services de santé des Forces canadiennes. Plus tard cette semaine, au cours de la deuxième séance consacrée à cette question, l'auteur de l'étude sur les soins donnés aux militaires blessés et à leurs familles, le lieutenant-colonel Rick McLellan, viendra vous en donner un bref exposé. Je suis très heureux également de constater qu'au cours des séances trois et quatre, des groupes d'anciens combattants et des fonctionnaires du ministère des Anciens combattants vous présenteront leur point de vue.

[Traduction]

Je crois que les discussions que vous aurez avec tous ces témoins préciseront plusieurs des questions qui ont été soulevées durant vos rencontres avec les militaires des bases à travers le pays. De mon côté, j'aimerais attirer votre attention sur un point particulier: le défi que représentent des lois démodées.

Les définitions juridiques des termes «anciens combattants» et «zone de service spécial» ont, à l'heure actuelle, un effet négatif sur notre capacité de prendre soin des militaires canadiens qui sont blessés lorsqu'ils servent leur pays.

Selon la loi en vigueur, le Canada ne comptera plus aucun ancien combattant à moins qu'il n'entre officiellement en guerre. Mais nous continuerons d'affecter des Canadiens dans des zones de guerre pour appuyer notre politique étrangère. Depuis 1990, le Canada a dépêché ses militaires dans les milieux les plus horribles, les plus violents et les plus instables que l'histoire ait connus. Plus de 20 000 militaires ont été déployés dans le golfe Persique, en Bosnie, à Haïti, en Afrique, au Cambodge, entre autres. En ce moment même, il y en a encore 2000 qui sont en poste quelque part. Malgré cela, si l'on se rapporte à la loi, nous ne comptons même pas un ancien combattant pour en témoigner.

• 1540

La loi actuelle est également injuste envers les membres des Forces canadiennes qui sont blessés lorsqu'ils servent en territoire canadien. Le caporal Guay, qui a perdu une main lors de l'opération ASSISTANCE, au Manitoba, a fait le même sacrifice que le soldat Anderson, qui a perdu une jambe lorsqu'il était affecté à la FORPRONU, dans l'ex-Yougoslavie. Mais comme l'un des deux était affecté dans une zone de service spécial, ses droits étaient différents de ceux de l'autre.

Ces politiques ne sont pas celles d'un pays qui reconnaît l'empressement de ses militaires à tout sacrifier pour lui. Elles ne sont pas celles d'un pays qui prend au sérieux ses obligations pour assurer le bien-être de ses combattants. Elles ne sont certainement pas celles d'un pays qui espère donner à ses militaires une meilleure qualité de vie.

Je pense que ce que vous entendrez au cours des quatre prochaines audiences vous convaincra de la gravité de la situation. J'attendrai vos recommandations sur ces questions avec impatience.

[Français]

En terminant, je voudrais vous soumettre trois suggestions. La première, c'est que les solutions aux principaux problèmes auxquels nous faisons face sont étroitement apparentées à la reconnaissance des ressources pertinentes et à l'amélioration de la coordination de nos politiques avec d'autres ministères et organismes fédéraux et, dans certains cas, avec d'autres gouvernements, nos gouvernements provinciaux. Cela dit, je tiens à vous mentionner que la coopération entre notre ministère et celui des Anciens combattants a atteint des sommets inégalés. Ainsi, nous avons mis en place un programme d'échange de cadres supérieurs en vue de faciliter les relations de travail entre les deux organismes, et je suis heureux de vous signaler que les fonctionnaires des Anciens combattants du Canada m'accompagnent ici aujourd'hui.

[Traduction]

Ma seconde observation, c'est qu'on ne peut se mettre en devoir de traiter les problèmes plus difficiles à cerner, tels que les sentiments de peur, de méfiance, d'amertume et d'indignation éprouvés par le personnel, tant que les obstacles liés aux politiques et à l'organisation n'auront pas été écartés. Autrement dit, tant que les fonctionnaires ne seront pas à notre service, et non l'inverse.

En troisième lieu, je tiens à vous souligner qu'en cherchant des solutions, il est hors de question de faire des compromis touchant la qualité des conditions de vie. Les services de garde d'enfants, par exemple, ne peuvent être sacrifiés au profit de meilleurs logements. L'efficacité opérationnelle des Forces canadiennes est liée à la qualité des conditions de service des militaires, à leur qualité de vie. Et on ne peut mettre de côté aucun des éléments que recouvre l'expression «qualité de vie» sans éroder la confiance que le militaire et la militaire ont placée dans les engagements des Forces canadiennes envers eux et sans, non plus, amener une détérioration de l'ensemble des conditions de service.

Alors je le répète, en tentant de trouver des moyens de résoudre les problèmes, on ne peut pas faire de concessions en ce qui a trait aux différents aspects de la qualité de vie.

[Français]

Finalement, toujours dans la recherche des solutions, rappelez-vous que dans le passé, les Canadiens ont donné aux membres des Forces canadiennes le soutien dont ils avaient besoin. Le défi à relever est de sensibiliser l'opinion publique aux besoins des militaires. Les médias se sont beaucoup intéressés aux travaux du comité, et les catastrophes naturelles des 18 derniers mois ont amené les militaires chez nous, dans nos communautés. Le public canadien est maintenant conscient de la réalité militaire et je sais qu'il est favorable au changement.

[Traduction]

C'est maintenant avec plaisir que je cède ma place au major-général Wendy Clay, directrice générale des Services de santé des Forces canadiennes.

Bien que cette série d'exposés s'intitule «Soins donnés aux militaires blessés», le texte du major-général Clay vise à vous donner une idée des difficultés auxquelles font face tous les membres du personnel militaire lorsqu'ils utilisent leur système de santé, que ce soit en cas de blessure ou de maladie ou à l'occasion d'un examen médical de routine. Cet exposé ouvrira la voie à la discussion que vous aurez ensuite avec le lieutenant-colonel McLellan, laquelle sera axée tout particulièrement sur les soins donnés aux blessés.

[Français]

Monsieur le président, merci.

Le président: Merci beaucoup, général.

[Traduction]

Général Clay.

Le major-général Wendy Clay (directrice générale des Services de santé et médecin-chef des Forces canadiennes, ministère de la Défense nationale): Merci, monsieur le président, membres du comité.

C'est véritablement un plaisir de comparaître devant vous aujourd'hui. D'autres orateurs qui se sont présentés devant vous ont parlé du rapport direct qui existe entre la qualité de vie de nos militaires et leur moral, ainsi que leur rendement opérationnel. J'oserais dire qu'en aucun autre secteur cela n'est plus évident que dans celui des services de santé, souvent perçu comme un droit sacré.

Durant vos visites, vous avez entendu exprimer des préoccupations quant à la disponibilité des services de spécialistes, il a été question des soins donnés à nos soldats blessés, et plusieurs vous ont demandé pourquoi ils ne pourraient pas «tout simplement obtenir une carte de santé et aller chercher leurs services en ville»

Durant vos séances, vous avez aussi entendu parler de la nécessité d'améliorer le rapport entre les combattants et la logistique. Compte tenu des restrictions budgétaires imposées au ministère, il est tout à fait opportun que les ressources humaines et financières soient axées sur le secteur opérationnel. Cela veut dire, cependant, que les services de soutien, comme les services médicaux et dentaires, sont scrutés à la loupe dans l'optique de peut-être les confier à des civils ou d'en diversifier les modes de prestation.

• 1545

Avant d'aller plus loin, il serait peut-être bon de vous rappeler le mandat aux termes duquel les membres des Forces canadiennes reçoivent des services de santé. Comme vous le savez sans doute, la responsabilité des soins de santé incombe aux provinces en vertu de la Loi constitutionnelle. En même temps, la Loi canadienne sur la santé définit l'assuré comme suit: un «habitant d'une province, à l'exception... des membres des Forces canadiennes...». Ainsi, si les soins de santé aux militaires n'étaient pas fournis par du personnel militaire, le ministère serait obligé d'acheter ces services du secteur civil.

Comme les soins de santé relèvent de la responsabilité des provinces, il peut forcément y avoir des différences d'un bout à l'autre du pays en ce qui a trait à la disponibilité, aux normes et au coût des services. Et je suis persuadée que personne n'ignore les inquiétudes des Canadiens quant à l'incidence des restrictions budgétaires sur la qualité et la disponibilité des soins de santé.

En regard de ces faits, j'aimerais vous décrire certains des changements qui ont été apportés dernièrement à la prestation des services de santé dans les Forces canadiennes. Vous entendrez parler, dans le cadre d'un autre exposé, de questions entourant les soins offerts aux soldats blessés. J'aimerais pour ma part examiner certaines répercussions de ces changements sur la prestation des soins médicaux de tous les jours: pour nos patients, c'est-à-dire les hommes et les femmes en uniforme, pour les personnes à leur charge, pour les commandants et, enfin, pour les membres du personnel médical.

[Français]

De tradition, le Service de santé des Forces, le SSFC, fournissait des soins médicaux dont la qualité exceptionnelle était reconnue d'un bout à l'autre du pays. Nous avons établi des hôpitaux militaires à Cold Lake, à Ottawa, à Valcartier, à Halifax et à Lahr, en Allemagne. Certains d'entre vous ont peut-être entendu parler du Centre médical de la Défense nationale ici, à Ottawa, que l'on appelait le Taj Mahal. Il s'agissait peut-être d'une exagération, mais l'hôpital offrait effectivement une gamme complète de spécialités et de sous-spécialités.

[Traduction]

Tout cela a changé, cependant, lorsque le vérificateur général a fait remarquer dans son rapport de 1990 que le système de soutien médical des FC n'était pas conçu pour répondre aux exigences du temps de guerre; il avait évolué de façon à combler principalement des besoins du temps de paix. On indiquait aussi dans ce rapport que le coût de fonctionnement des hôpitaux militaires était généralement élevé comparativement à celui des hôpitaux civils. Des vérifications et des évaluations ultérieures sont arrivées à des conclusions semblables.

À la suite de ces constatations, et vu l'importance croissante accordée à la capacité opérationnelle dont je viens de parler, on a ordonné au SSFC d'entreprendre en 1994 un exercice de planification stratégique dans le but d'établir à l'intention des Forces canadiennes un système de soutien médical axé sur les opérations, viable et rentable.

Je vous épargnerai les détails de cet exercice, dont le parcours est plutôt sinueux. Je me contenterai de dire que notre concept de fonctionnement actuel a été élaboré en collaboration avec les équipes de planification responsables et qu'il se fonde sur une entente commune quant aux services que le SSFC doit être en mesure de soutenir et quant aux conditions qui doivent prévaloir. Notre objectif était de préciser la capacité chirurgicale et médicale élémentaire requise pour sauver des vies (rôle 3), à l'appui des forces déployées qui seraient chargées d'accomplir n'importe quelle tâche prévue dans le Livre blanc de 1994. On a déterminé qu'un hôpital chirurgical de campagne de 400 lits représente le niveau supérieur de la capacité médicale requise pour exercer le rôle 3 en déploiement, à l'appui des Forces canadiennes qui mèneraient des opérations de combat d'intensité moyenne.

Il demeure cependant impossible d'établir la totalité de cette capacité médicale dans le contexte financier d'aujourd'hui. Nous élaborons par conséquent une organisation dont la pierre angulaire serait un hôpital de campagne de 100 lits. Cette organisation pourra soutenir les tâches prévues dans le Livre blanc dans le cadre d'opérations autres que de guerre, et elle comportera les éléments de base nécessaires à la mise en place d'une plus vaste organisation en cas de besoin.

Dans cette nouvelle optique opérationnelle, la principale raison d'être du personnel médical en uniforme aujourd'hui est le soutien des opérations. Si ces personnes n'ont pas à se déployer, elles peuvent être en principe des civils. Par exemple, nous avons identifié ce que nous appelons les spécialistes «essentiels» qui seraient déployés en même temps que l'hôpital de campagne. Ce sont notamment des chirurgiens généraux et orthopédistes, des anesthésistes, des spécialistes de la médecine interne, des psychiatres et des radiologues. Pratiquement tous les autres spécialistes et sous-spécialistes ont été libérés des Forces canadiennes, et leurs services sont obtenus du secteur civil.

Il reste toutefois un nombre restreint d'autres professionnels, comme les officiers biotechniciens, dont les services ne sont pas aisément accessibles dans le secteur civil, et les techniciens de médecine préventive, les travailleurs sociaux et les physiothérapeutes, dont le maintien en uniforme peut se justifier par une analyse de rentabilisation. Ces personnes sont également incluses dans le SSFC.

À la suite de ces initiatives, la taille du SSFC a été réduite d'environ 500 personnes, pour se situer à 2496 membres de la force régulière, et l'éventail de cette profession a été sensiblement modifié.

Un autre changement majeur qui est survenu, en partie à cause des transformations dans le secteur civil des soins de santé, mais principalement à cause de la réduction de la taille des Forces canadiennes à 60 000 membres, c'est la fermeture de nos hôpitaux militaires.

• 1550

Même si nous conservons des installations de santé dotées d'un nombre très restreint de lits réservés aux malades hospitalisés, ces centres sont surtout destinés aux interventions chirurgicales non urgentes et aux chirurgies d'un jour. Toute mesure prise afin de maintenir ces installations en tant que centres permanents de soins tertiaires ne serait manifestement ni rentable, ni prudente du point de vue clinique. Un excellent exemple est l'ancien Centre médical de la Défense nationale, dont la capacité était autrefois de 300 lits. Comme on n'a plus de population militaire permettant de le soutenir, et comme le gouvernement de l'Ontario n'exige plus le maintien de lits supplémentaires réservés aux hospitalisés, le centre ne compte plus que 40 lits, et le reste des locaux servent aux soins ambulatoires et aux cabinets médicaux.

[Français]

Que signifient ces changements pour nos patients, c'est-à-dire les hommes et les femmes des Forces canadiennes? Même si notre personnel médical offre des services en garnison lorsqu'il n'est pas en déploiement ou à l'instruction, il est évident que nous comptons davantage sur le secteur civil pour obtenir des services professionnels ou des services auxiliaires comme ceux de laboratoire, de physiothérapie et d'imagerie diagnostique, et bien entendu pour l'hospitalisation. Cette dépendance s'établit à une époque où le secteur civil est lui-même en période d'ajustement à divers degrés à la suite des restrictions budgétaires des provinces.

[Traduction]

Pour faciliter la prestation de soins de santé à nos membres lorsqu'ils ne sont pas en déploiement, nous avons mis à l'essai sur la côte est le Régime des soins de santé des Forces canadiennes. La pierre angulaire de ce régime est le concept d'un tiers administrateur, dont le rôle principal consiste à établir un réseau de fournisseurs prioritaires de soins de santé qui serviraient de renforts pendant les déploiements du personnel médical militaire. La portée de ce régime de soins de santé se définit par la gamme des services qui est établie par mon bureau, et elle est à peu près équivalente à ce qui est offert en vertu du Régime de soins de santé de la fonction publique.

L'ampleur de la dépendance à l'égard du secteur civil variera selon l'emplacement de la base militaire. Dans les régions plus isolées, comme celles de Goose Bay et de Cold Lake, par exemple, des fournisseurs de soins militaires continueront de dispenser la majorité des services de santé, tandis que dans les zones urbaines une plus grande part des services sera offerte par le secteur civil. Par conséquent, l'ampleur des changements que remarqueront les militaires pourra varier selon l'emplacement de leur affectation actuelle, et ces changements seront tout particulièrement visibles dans des régions comme Ottawa, étant donné la nouvelle vocation du Centre médical de la Défense nationale.

On ne s'attend pas à ce que la qualité des soins soit affaiblie, mais il est possible que certains patients n'aient plus l'impression d'être soignés «dans la famille» et que la situation soit particulièrement difficile pour une personne qui s'adapte par exemple à une maladie grave comme le cancer.

Les personnes à charge des militaires sont moins touchées par ces changements, car leurs soins étaient généralement couverts par des régimes provinciaux d'assurance-maladie. La réduction des effectifs du SSFC est toutefois l'une des principales raisons qui expliquent que nous ne sommes plus en mesure de fournir des soins de santé aux personnes à charge dans les bases les plus éloignées, telle Cold Lake, comme cela était la norme par le passé. Cet inconvénient a été perçu comme une réduction de service, et il ne fait aucun doute que cela a été un important facteur de mécontentement pour les militaires aussi bien que pour leurs familles.

Les commandants ressentiront également les changements apportés à la prestation des soins en garnison. Il est fort possible que les périodes d'attentes, pour certains services s'allongent—là encore selon l'emplacement et le service requis. On pourrait avoir l'impression qu'il y a des injustices quant aux services de santé offerts à l'échelle du pays. C'est là une conséquence inévitable du fait que les soins de santé relèvent de la responsabilité des provinces.

[Français]

Enfin, nous ne devons pas oublier l'incidence de ces changements sur les fournisseurs de soins de santé eux-mêmes. Pour simplifier les choses, mes commentaires se limiteront à la situation des médecins militaires, mais ils s'appliquent à des degrés divers à d'autres professionnels de la santé, tels les infirmiers, les pharmaciens et les dentistes.

[Traduction]

En raison de la diminution du nombre de patients, il faut prendre des mesures particulières pour assurer le maintien de la compétence professionnelle. À Edmonton, par exemple, un accord a été conclu avec les autorités des services de santé de la capitale (la Capital Health Authority), en vertu duquel un détachement médical militaire a été intégré à l'Hôpital général Sturgeon. Dans d'autres circonstances, on a conclu des ententes individuelles afin que des spécialistes puissent travailler, à temps plein ou à temps partiel, dans des installations civiles. À cause de l'augmentation des contacts avec le secteur médical civil, les médecins militaires doivent être autorisés à exercer leur profession dans la province où ils sont affectés à l'heure actuelle, alors qu'autrefois ils n'avaient besoin que d'une licence de n'importe quelle province canadienne, à condition de ne traiter que des militaires. Cette nouvelle obligation de détenir une licence de la province où ils exercent leur profession ajoute un fardeau administratif important, car les médecins militaires sont normalement mutés tous les trois ou quatre ans, et la transférabilité des titres de compétence est limitée, chaque province appliquant ses propres règlements relatifs aux permis d'exercice des professions.

Le maintien des médecins militaires dans le SSFC demeure une source de préoccupation. Un important facteur de mécontentement est la fréquence des déploiements opérationnels, compte tenu en particulier du nombre restreint de chirurgiens et d'anesthésistes. Les périodes de travail à l'extérieur des unités d'appartenance augmenteront également, car on mettra en place de nouvelles initiatives de maintien de la compétence qui nécessiteront, par exemple, l'affectation à d'autres installations militaires ou civiles.

• 1555

Une préoccupation constante des médecins militaires demeure leur aptitude à pratiquer la médecine à l'emplacement de leur choix à l'expiration de leur période d'engagement dans les Forces canadiennes. Ce ne sont pas toutes les provinces qui sont prêtes à considérer comme équivalentes une période de service pour sa patrie (dans les FC) et une période de service en région isolée, ce qui a pour conséquence que les médecins militaires craignent d'avoir de la difficulté à obtenir des numéros de facturation dans la province de leur choix.

La question du recrutement est liée à celle du maintien des effectifs. Les injustices perçues en ce qui concerne la rémunération, les incertitudes quant à la portée et à la qualité de la pratique clinique et la restriction de la progression de la carrière ont eu pour effet d'affaiblir l'attrait que présentait autrefois le service médical militaire.

J'estime toutefois que l'on doit compter parmi les principaux facteurs qui influencent le recrutement des médecins militaires les changements apportés dernièrement pour ce qui est des permis temporaires d'exercer, selon lesquels les étudiants en médecine doivent maintenant choisir entre la pratique générale et une spécialité avant d'avoir terminé leurs études de médecine. Ces étudiants sont en effet moins portés à s'engager à accomplir une période de pratique générale au sein du SSFC s'ils n'ont aucune garantie qu'on les admettra ultérieurement à la formation dans la spécialité de leur choix.

Monsieur le président et membres du comité, le SSFC se trouve en plein coeur d'une période de transformation qui constitue probablement la plus importante de son histoire. Étant donné que nous accentuons nos activités opérationnelles, nous établissons des partenariats avec la communauté civile des soins de santé et nous comptons de plus en plus sur ce secteur, qui a ses propres défis à relever. Des «sanctuaires» comme les hôpitaux militaires sont en voie de disparition, et les professionnels des soins de santé sont moins portés à accepter des périodes de service prolongées en milieu militaire.

Nonobstant ces observations, je suis d'avis que le SSFC a repris le chemin de sa véritable raison d'être, soit la prestation de services de soutien médicaux à nos forces déployées. Le défi que nous devons maintenant relever consiste à continuer d'offrir des services de santé de qualité supérieure, au Canada comme à l'étranger, aux hommes et aux femmes de l'Armée de terre, de la Marine et de la Force aérienne.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous parler de ce sujet de la plus haute importance.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, général. Nous passons maintenant à la période de questions.

Monsieur Benoit.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Merci, monsieur le président, et bonjour à vous tous.

Ma première question porte sur certaines observations que vous faites dans votre mémoire, général Baril. Vous parlez des soins de santé dispensés au personnel militaire, en garnison, en théâtre d'opérations, lorsqu'il est malade ou en bonne santé, et vous dites que c'est une responsabilité fondamentale des Forces armées canadiennes.

Il y a un sujet qui a été soulevé fréquemment pendant les déplacements du comité, et Mme Huffman, qui, je crois, est la femme du colonel Calvin, nous en a parlé encore hier. Elle comparaissait devant notre comité, et elle nous a dit qu'elle souffrait de névrose post-traumatique à la suite d'une situation particulièrement grave dans laquelle son mari s'est trouvé, comme vous le savez tous.

Vous nous avez parlé des soins de santé destinés aux membres des forces armées, mais je me demande s'il y a des circonstances où des services sont prévus pour les familles de ces membres, des services autres que ceux du système de santé normal.

Gén J.M.G. Baril: Je vais demander au général Clay de vous parler des aspects légaux du système de santé dans tout le pays, mais auparavant j'aimerais vous donner mon opinion, en ma qualité de soldat qui s'est trouvé dans de très mauvaises situations dans certaines parties du monde.

Lorsque les gens reviennent de ce genre d'endroits, il y a un phénomène qui fait qu'ils sont brisés mentalement, mais ils ne le savent pas ou ils refusent de le reconnaître. Ces gens-là ne se rendent pas compte à quel point leurs familles ont souffert; il leur faut beaucoup de temps pour comprendre cela. Si on remonte à 1993—vous vous souviendrez que c'était l'année de l'enclave de Medak—à cette époque-là on continuait à penser que les gens qui souffraient du syndrome de la guerre du Golfe étaient une bande de lavettes qui se plaignaient pour un rien. Comme on ne trouvait pas ce qui n'allait pas chez eux, on disait qu'ils souffraient de stress.

Il y a longtemps que nous nous sommes heurtés à un problème d'une telle ampleur dans nos forces armées. Beaucoup de ces gens-là devaient avoir une croix jaune sur le dos pendant la Première et la Seconde Guerres mondiales, et certains d'entre eux ont été fusillés alors qu'ils souffraient du stress du combat.

Mais pour nous, à l'heure actuelle, c'est un accident de bataille. Nous avons des gens qui sont gravement blessés, et nous avons des mécanismes pour traiter les hommes et les femmes qui reviennent du combat avec de telles blessures. Ces mécanismes ne permettent pas de les détecter tous, car ce genre de maladie est très difficile à détecter. C'est la même chose. Nous avons probablement oublié les familles également.

• 1600

Je crois que le général Dallaire a dit qu'il avait été traité à l'époque. Je ne sais pas si j'ai le droit d'en parler, mais il ne m'en voudra probablement pas. Il ne vous a pas dit à quel moment on a commencé à l'aider. Il ne vous a pas dit à quel moment on a commencé à aider sa famille. Il a fallu que ses amis, ses subordonnés et ses supérieurs insistent énormément pour qu'il se décide à demander de l'aide. C'est ce qu'il a fait au printemps 1997, c'est-à-dire trois ans plus tard, et c'est à ce moment-là aussi que sa famille a demandé de l'aide.

M. Leon Benoit: Cela témoigne d'un problème très grave. Je suis heureux que le général et sa famille aient obtenu de l'aide, mais cela m'amène à ma question suivante.

Pour commencer, est-ce que les autres membres des forces armées, à des échelons inférieurs, sont aidés dans la mesure où ils en ont besoin? Notre comité a voyagé, et pendant ses audiences publiques officielles, et également pendant nos séances entre les audiences, plusieurs personnes sont venues nous dire que cela posait des problèmes considérables.

Il y avait une dame à Petawawa; je n'oublierai jamais son témoignage. Son mari menace sans cesse de se suicider, et il vit tout à fait en marge de sa famille. Il était jadis un bon père de famille, très affectueux. Quand j'entends cela, je me demande si cet homme-là et sa famille reçoivent une aide comparable à celle dont le général Dallaire et sa famille ont bénéficié.

Gén J.M.G. Baril: Je ne peux même pas dire que je l'espère. Je dois être certain que c'est le cas. Il ne saurait y avoir de différence de qualité dans les services offerts aux gens qui servent leur pays, quel que soit leur grade. Lorsqu'ils sont blessés, c'est pour la même raison.

Il y a peut-être des gens qui sont un peu plus débrouillards ou plus chanceux et qui réussissent à subvenir aux besoins de leur famille, selon la province dans laquelle ils habitent. Toutefois, je ne peux pas courir le risque que cela se produise dans la province; j'ai besoin d'un mécanisme propre aux forces armées pour me permettre de subvenir aux besoins non seulement des intéressés, mais également de leur famille, comme vous devez le savoir.

Dans les bases, nous avons des centres de soutien des familles, nous avons des conseillers qui informent les gens avant leur départ en mission et à leur retour, qui leur expliquent comment ils peuvent déceler ces anomalies, qui leur donnent des conseils lorsqu'ils reviennent dans une famille qu'ils ne reconnaissent plus. La famille ne reconnaît pas le soldat qui revient. Nous avons des services, mais pour donner...

M. Leon Benoit: Vous nous dites qu'à votre avis ce genre de service fonctionne déjà?

Gén J.M.G. Baril: Ce genre de service existe, mais je ne sais pas si c'est parfait. Nous avons commencé à organiser cela quand nous nous sommes rendu compte qu'il y avait de gros problèmes avec les gens qui revenaient de mission.

Je ne prétends pas que le système est parfait, mais nous sommes en train de l'améliorer.

Au cours des 12 derniers mois, depuis octobre, je suis allé dans toutes les bases du Canada, à très peu d'exceptions près. Je suis allé dans tous les centres de soutien des familles, et j'ai constaté que nous consacrons beaucoup de ressources et de soins... Nous avons beaucoup de bénévoles...

M. Leon Benoit: Mais les centres de soutien des familles, vous devez le savoir, général, n'offrent pas le genre d'aide dont ces hommes, et apparemment dans certains cas leur famille également, ont besoin lorsqu'ils souffrent de cette maladie extrêmement grave.

Pour commencer, j'aimerais que vous répondiez à la question sur la famille du général Dallaire: est-ce que sa famille a reçu de l'aide de l'armée, ou bien a-t-elle dû s'adresser exclusivement à...

Gén J.M.G. Baril: Le général et sa famille ont reçu de l'aide de l'armée, et également du système médical provincial au Québec.

M. Leon Benoit: Je suis heureux qu'on les ait aidés.

Toujours à Petawawa, un adjudant, je crois, s'est plaint d'avoir été mal traité lorsqu'il souffrait de cette maladie. Il ne m'a certainement pas semblé que c'était quelqu'un qui se plaignait pour un rien. La dame qui me parlait de son mari ne semblait pas non plus se plaindre pour un rien, et je pourrais vous citer une longue liste de cas.

Gén J.M.G. Baril: Les gens qui portent ce genre de cas à votre attention ou à la mienne ne sont certainement pas des gens qui se plaignent pour un rien. Toutefois, je dois dire à regret qu'en 1993 il est très souvent arrivé qu'on ne les croie pas.

Beaucoup de gens ne savaient pas qu'un soldat pouvait rentrer de mission brisé mentalement. En fait, les intéressés eux-mêmes n'étaient pas conscients de la gravité des dommages qu'ils avaient subis. Et n'oubliez pas que c'est souvent beaucoup plus tard, six mois plus tard, ou trois ans plus tard, que les symptômes apparaissent, et c'est la même chose pour la famille. Le système doit faire beaucoup mieux que par le passé.

M. Leon Benoit: Je comprends cela. Dans cette affaire, ce qui s'est produit par le passé est secondaire, bien qu'on puisse en tirer des leçons; ce qui est important, c'est ce qui se produira à partir de maintenant.

• 1605

Pouvez-vous assurer aux gens de l'armée qu'ils peuvent dorénavant espérer être beaucoup mieux traités lorsqu'ils souffrent de cette maladie?

Gén J.M.G. Baril: C'est probablement la raison pour laquelle je suis ici aujourd'hui, pour assurer au comité et à tous les hommes et à toutes les femmes qui sont dans les forces armées...

M. Leon Benoit: J'ai une question à poser à ce sujet; ce témoin de Petawawa a parlé d'un établissement aux États-Unis qui aurait pu la soigner bien mieux qu'elle aurait pu l'être au Canada. Si vous ne pouvez pas offrir l'aide nécessaire au Canada, avez-vous l'intention de permettre à ces gens-là, du moins ceux qui sont le plus gravement atteints, de fréquenter ces cliniques américaines? Autrement dit leur donner ce qu'ils méritent, c'est-à-dire le meilleur traitement possible.

Gén J.M.G. Baril: Je vais demander à notre chef des services de santé de fournir ce service à nos soldats en uniforme, ou sinon nous achèterons le service ailleurs. Pour les conjoints ou les enfants à charge qui sont affectés, il n'y a rien que je puisse faire. Ils relèvent des services provinciaux, et, comme vous le savez, il y a beaucoup de domaines, comme les blessés au cerveau, qui sont mieux traités aux États-Unis. Cela a fait l'objet de pas mal de débats publics.

Je suis sûr que certains membres à charge seront touchés et qu'il y aura une demande. Je le soutiendrai, et s'il y a quelque chose que nous pouvons faire, nous le ferons.

Cela dit, vous devez comprendre que légalement, c'est un service que je ne peux pas payer.

M. Leon Benoit: Évidemment, il y aurait une autre possibilité—et j'y venais justement—c'est que le personnel médical militaire canadien—et également le personnel médical de l'extérieur—se familiarise le plus possible avec les méthodes américaines, pour que ce service soit disponible ici, du moins dans l'avenir. On se rend compte de plus en plus que cette névrose post-traumatique n'est pas quelque chose de nouveau; cela existe probablement depuis que les guerres existent.

C'est, je crois, le commandant de la base de Petawawa, lorsque nous l'avons rencontré, qui nous a dit que les anciens combattants américains du Vietnam qui se sont suicidés après leur retour étaient plus nombreux que les soldats tués pendant les combats. Je ne suis pas certain que ce soit le commandant de la base, mais j'en suis presque sûr. C'est une statistique absolument renversante. De toute évidence, c'est un problème depuis très longtemps, et il faut y trouver une meilleure solution. Jusqu'à présent, le traitement n'a pas été satisfaisant, du moins dans nos forces armées.

Gén J.M.G. Baril: Je crois que nous avons agi très rapidement. Lorsque nous avons commencé à nous en occuper, les spécialistes canadiens étaient très en demande aux Nations Unies et ailleurs pour organiser un programme, car c'était tout à fait nouveau. Cela ne s'était jamais fait, par exemple, pour les employés des Nations Unies. Cela a commencé en 1994. Or, les Canadiens offraient ce service au Kenya, et par conséquent nous étions en terrain connu.

Je crois que notre personnel médical mérite des félicitations, car il a agi très rapidement. Mais quand on agit sur une telle échelle, certains sont oubliés, et ils en subissent les conséquences.

Le président: Merci.

[Français]

Monsieur Lebel.

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Bonjour, général. Je vous remercie de votre exposé.

Vous venez de faire une affirmation que je n'avais pas à l'esprit et qui me frappe. Vous dites que le militaire dépend des Forces armées canadiennes, alors que sa famille, sa femme et ses enfants relèvent de la compétence provinciale sur le plan constitutionnel. Je trouve quand même curieux que les provinces, qui n'ont pas un mot à dire dans le déploiement de nos forces dans le monde, aient à en assumer les conséquences sans avoir pu mettre leur nez dans l'affaire.

Il me semble que, par voie de conséquence, la famille du militaire devrait relever également de la compétence du Canada ou des Forces armées; c'est une résultante de l'engagement du mari. Je ne veux pas m'engager dans un débat juridique avec vous, mais je trouve cela étrange.

D'abord, je vous félicite d'une chose: vous semblez avoir pris conscience de l'état grave du moral de vos militaires. Je peux vous dire qu'il n'est pas beau. Il semble y avoir certains comportements répréhensibles à plusieurs endroits. En effet, ce qui revient souvent, en cours d'audiences, c'est l'attitude adoptée vis-à-vis des personnes affectées, malades ou déprimées: «Si tu n'es pas content, fous le camps.» On nous a rapporté partout de tels propos.

• 1610

Quand un militaire insiste pour obtenir des soins, que ce soit pour lui ou sa famille, on lui répond de demander à être réformé. C'est vraiment agréable.

Nous avons rencontré un militaire de Trenton qui a un petit enfant de trois ans qui est paraplégique. Le seul espoir, dans la vie de cet enfant, c'est qu'il puisse apprendre à parler. Le père demande des soins pour son enfant à Trenton. Il n'y a pas d'éducateur dans sa langue. La réponse faite au père est qu'il n'a qu'à s'en aller. Or, ce père a 17 ans de service. Ne trouvez-vous pas une telle attitude condamnable de la part d'une autorité qui a profité de l'engagement du militaire pendant 17 ans?

En tout cas, je ne trouve pas cela correct et c'est une attitude très répandue chez vous. On dit au militaire de foutre le camp s'il n'est pas content. Cela nous a été rapporté souvent et on se l'est fait dire.

Monsieur souligne ici le cas du stress post... Je ne sais pas comment vous l'appelez. À Petawawa, nous avons reçu un jeune militaire, dont le cas est un autre exemple de ce que je viens d'affirmer, un jeune militaire touché par ce syndrome. À un moment donné, alors qu'il était dans un état de faiblesse, alors qu'il avait besoin de soins et n'était pas en état de comprendre ce qui lui arrivait, on a réussi à lui vendre l'idée de sortir des Forces armées en lui disant que cela vaudrait mieux pour lui. Ensuite, une fois qu'il en est sorti, on ne l'a plus.

Ne pensez-vous pas qu'il serait temps que madame qui est à côté de vous commence à amener les intervenants à adopter une attitude plus humaine et plus responsable envers les militaires? Il ne suffit pas de leur demander de risquer leur vie. Nous avons, en contrepartie, une obligation envers nos militaires.

Gén J.M.G. Baril: Cela ne relève pas d'elle, mais de moi.

M. Ghislain Lebel: Bon, d'accord.

Gén J.M.G.Baril: C'est à moi et à tout le monde de changer d'attitude et surtout de s'assurer que personne ne se fait dire de foutre le camp. Mais c'est à moi de m'occuper de celui qui dit une telle chose.

Il y a toujours des problèmes d'attitude qui se posent un peu partout, des abus d'autorité, des abus de pouvoir. Malheureusement, celui qui est victime de tels abus ne connaît pas ses droits. On ne leur a pas expliqué suffisamment leurs droits afin que personne ne se fasse bousculer ainsi. Personne ne se fait jeter en dehors d'une école, pas même en dehors d'une prison, j'imagine. Je ne peux donc pas comprendre qu'on s'imagine pouvoir, en les bousculant, jeter les gens en dehors des Forces canadiennes. La procédure est plus compliquée que cela.

Malheureusement, certains, parce qu'ils sont terrorisés, se croiront forcés de prendre des décisions qu'ils n'ont pas à prendre parce qu'on leur conseille de le faire, alors qu'ils sont dans leur droit. C'est inacceptable et j'ose croire que, même si vous l'avez beaucoup entendu à travers le Canada, ce n'est pas quelque chose qui se produit tous les jours.

Dans tous ces cas que vous rapportez, comme dans celui de Trenton où on n'est pas capable de donner les soins requis à un enfant à cause de sa langue ou à cause de sa particularité, il existe un mécanisme du côté du médecin, du côté du travailleur social et du côté du commandement qui permettra de muter le militaire à un autre endroit pour une période de deux ans ou plus afin qu'il puisse prendre soin de sa famille. Il existe un processus qui le permet. Le chef qui ne s'en sert pas est un chef qui ne devrait pas être en poste. Les mécanismes sont en place...

M. Ghislain Lebel: Allez voir le caporal Paquet...

Gén J.M.G. Baril: Donnez-moi le nom du caporal Paquet, s'il n'est pas encore arrivé. Nous examinerons d'abord si l'histoire que vous avez entendue est complète, ce que je ne mets pas en doute. Ensuite, nous verrons quels sont les mécanismes en place. Enfin, si ces mécanismes n'existent pas, nous verrons quels sont les moyens à notre disposition. Si tout cela ne fonctionne pas, il reste toujours moi et, si cela ne fonctionne pas non plus, il reste l'appel au ministre. On réglera cela aussi vite que l'on peut.

Toutefois, j'admettrai avec vous qu'il m'est plus facile à moi, qui ai des étoiles sur les épaules qui me donnent un peu de pouvoir, de dire que personne ne viendra me bousculer. Le caporal qui pose des questions n'obtient pas des réponses aussi vite que moi. Notre organisation est énorme, comporte des gens qui viennent de partout au Canada, qui ont des antécédents sociaux différents. Leur l'entraînement, leur développement, etc. améliorent la situation. Nous n'aurons de cesse que nous ayons instauré un système acceptable pour la population canadienne.

M. Ghislain Lebel: Général Baril, j'ai ici un résumé des interventions que nous avons entendues. On y parle d'un major qui se fait couper les deux jambes. Un peu plus loin, on parle du décès d'un militaire en poste, dont la femme a reçu les médailles par la poste après avoir appris son décès par les journaux.

• 1615

Pensez-vous que de tels événements contribuent à développer un sentiment d'appartenance et la fierté d'être militaire au Canada actuellement?

Gén J.M.G. Baril: Cela ne se produit plus. La Silver Cross Mother était envoyée par courrier, probablement depuis la Première Guerre mondiale, alors que c'était la seule façon de le faire. Il en a été de même pendant la Deuxième Guerre mondiale, pendant la Guerre de Corée et pour les premières morts qui se sont produites en 1993. Vous faites sans doute allusion à la mère de Daniel Gunther qui a été tué par un obus antichar. Dans son cas, la médaille est arrivée par le courrier. Je trouve cela absolument épouvantable. Mais c'était dû au système en place, que personne n'avait arrêté. C'est bien désolant mais c'est ainsi.

Quand une mère, une épouse ou des frères apprennent indirectement que leurs proches ont été tués, c'est parce qu'il y a eu un manquement quelque part, parce que notre procédure est serrée. Il nous arrive des accidents presque à chaque jour. Nous avons eu des problèmes la semaine dernière en Bosnie; un a été causé par le feu et la situation de nos gars qui sont à Drvar. S'assurer que les familles ici apprennent la nouvelle en premier, de même que les bonnes nouvelles, est un de nos premiers soucis. Quand nous ne sommes pas au courant, nous le disons, et nous faisons tout pour qu'ils n'apprennent pas la nouvelle par Internet, par la radio ou par une personne qui téléphone à sa mère.

Il y a toujours des erreurs de parcours. Un de nos officiers est décédé la semaine dernière à Trenton, accidentellement. Son épouse était en vacances en Saskatchewan et il nous a fallu presque deux jours pour la retrouver. À ce moment-là, tout le monde commençait à savoir, à la base, qu'il y avait eu un décès accidentel. Je pense que, malgré tout, nous avons réussi à rejoindre la famille avant qu'elle ne l'apprenne par le reste du monde. Donc, ce peut être très difficile. Ces choses absolument inacceptables que vous nous rappelez ne se produisent plus, du moins je l'espère.

M. Ghislain Lebel: Mes collègues députés et moi sommes confrontés presque quotidiennement, je dirais, à d'anciens combattants. Il en reste de la Deuxième Guerre mondiale. Je dois porter à votre attention le rapport que j'ai ici. Je comprends la grosseur de votre organisation et je comprends qu'on ne puisse pas tout voir et que certaines choses tiennent à des individus. Toutefois, dans le rapport que j'ai ici, on lit: «Le rapport fournit davantage de preuves du mépris par lequel ces gens ont été traités». On parle des militaires affectés et touchés.

J'ai eu connaissance du cas d'un monsieur qui avait fait la Deuxième Guerre mondiale et qui avait besoin de souliers orthopédiques depuis longtemps. C'était un homme de 75 ans. Du jour au lendemain, le ministère des Anciens combattants lui adresse une lettre lui apprenant que, dorénavant, c'en est fini des souliers orthopédiques. Il a répondu en disant qu'il n'avait vu aucun médecin, qu'aucun médecin ne l'avait examiné.

J'ai donc entrepris des démarches, comme tous les députés ici le font, pour avoir des éclaircissements sur ce dossier. Eh bien, oui! Un médecin, quelque part dans les Maritimes, avait lu le dossier et avait décidé qu'il n'avait plus besoin de souliers orthopédiques. Je trouve étrange qu'un médecin porte un jugement sur l'état de santé d'un patient sans même le voir, sans même l'examiner. Ce médecin n'est certainement pas un caporal. C'est certainement quelqu'un d'assez haut gradé chez vous.

Donc, il y a une attitude méprisante. Si on veut supprimer le mépris envers les plus petits, je pense que vous êtes bien placé pour y travailler, général. Il n'y en a pas beaucoup au-dessus de vous dans cette armée-là. Il faudrait peut-être faire des recommandations dans ce sens.

Gén J.M.G. Baril: Je pourrais vous demander de signaler ce point particulier aux membres du ministère des Anciens combattants lorsqu'ils viendront ici. Cela relève directement d'eux. Cela ne relève pas de moi, malheureusement. Mais, comme vous, je trouve cela inadmissible, particulièrement s'il s'agissait d'un de mes oncles.

Nous avons le dos large, mais ce reproche ne peut malheureusement nous être adressé.

M. Ghislain Lebel:

[Note de la rédaction: Inaudible]

Gén J.M.G. Baril: C'est parce que c'est à moi que ces reproches parviennent. Il y beaucoup d'anciens combattants qui me téléphonent chez moi, parce que mon numéro est dans l'annuaire, pour me rapporter ces faits. Je pourrais légalement leur répondre d'en parler à d'autres.

Mais nous avons des mécanismes de liaison, comme je l'ai mentionné. J'ai maintenant un officier supérieur qui est au ministère des Anciens combattants et vice versa: ils ont un des leurs chez nous. Nous sommes très liés à la Légion canadienne. Ils vont m'assermenter comme membre de la Légion. Je leur ai dit que j'était prêt à devenir membre de la Légion s'ils voulaient bien travailler avec nous. Et ils m'ont fait la même chose.

On ne peut pas bâtir un pont qui ne s'appuie pas aux deux bouts. Quand le Canada a fini d'employer des hommes et des femmes, il faut qu'il y ait un pont solide muni de garde-fous de chaque côté pour être certain qu'ils relèvent à l'avenir de l'autre ministère. On ne peut pas les laisser tomber.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lebel.

• 1620

[Traduction]

Monsieur Proud.

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Merci, monsieur le président.

Avant de commencer, je veux dire que si mon collègue d'en face souhaite porter ce cas à mon attention, je m'en occuperai certainement pour le compte des anciens combattants.

Général Baril, vous dites dans votre exposé, au milieu de la page 2: «Dans notre recherche visant à trouver des fonds pour les projets sur la qualité de vie, aucun programme... n'a été à l'abri d'un examen minutieux.» Voilà qui me fait plaisir. C'est une question que j'ai soulevée très souvent à cette table même depuis quelques années. Même avant le début de cet examen, nous avons entendu certaines histoires parfaitement horribles. Vous avez dû les entendre vous-même, des choses qui étaient impossibles, pas d'uniformes, etc.

Je suis donc heureux de vous voir prendre ces mesures. Je suis parmi ceux qui pensent qu'on doit vous donner les fonds nécessaires pour faire ce genre de choses. Tant que je serai ici, je ferai certainement tout ce qui est possible pour faciliter ce genre d'action.

Je suis heureux également de vous entendre dire que les gens dont on disait jadis qu'ils se plaignaient pour un rien sont aujourd'hui pris au sérieux. Trop souvent, c'est des années plus tard que les gens se rendent compte que quelque chose ne va pas, et que peuvent-ils faire?

Plus loin dans votre exposé, vous dites: «Les définitions juridiques des termes "anciens combattants" et "zone de service spécial" ont, à l'heure actuelle, un effet négatif.» J'en suis convaincu.

Je suis en train de réfléchir à haute voix—et c'est aussi à l'intention de mes collaborateurs des Anciens combattants, qui sont dans le fond de la salle—mais je pense que le comité et le gouvernement doivent absolument étudier toute cette question de façon approfondie, étudier le statut des hommes et des femmes qui quittent les forces armées.

Je disais justement au général Richardson que vous et lui seriez considérés comme personnel militaire en temps de paix si on s'en tenait tient aux critères de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée, mais vous savez très bien que cela n'a pas toujours été le cas.

Le gouvernement devrait étudier sérieusement la possibilité de changer le statut des anciens combattants, car très souvent le statut d'une personne qui s'est contentée de participer à un exercice et qui a été blessée est différent du statut de celui qui est allé en ex-Yougoslavie, ou dans un endroit de ce genre. Tout cela doit être réexaminé.

D'autre part, à la page 4, vous faites une seconde suggestion. Vous dites: «On ne peut se mettre en devoir de traiter les problèmes plus difficiles à cerner...» J'aimerais que vous m'expliquiez cela un peu mieux.

À l'intention du général Clay, dans mon bureau, s'il y a des questions qu'on me pose souvent qui concernent l'armée et les Anciens combattants, ce sont les questions relatives à la transition de personnel militaire à Anciens combattants. Au cours de ces dernières années, il y a eu diverses opérations militaires et déploiements, et beaucoup de gens sont venus me voir dans mon bureau.

Je précise cela à l'intention de ceux qui ne me connaissent pas, car à Charlottetown mon bureau se trouve juste en face des Anciens combattants. C'est donc particulièrement facile de venir me voir.

D'autre part, lorsque nous étions dans l'opposition, j'étais le porte-parole des Anciens combattants, et c'est un domaine dont je m'occupe depuis des années.

J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Un jeune homme est venu ici il y a quelque temps; il ne réussissait pas à obtenir sa libération des forces armées, et par conséquent il n'arrivait à rien avec les Anciens combattants.

Savez-vous si le processus s'est amélioré depuis quelque temps, s'il n'a pas changé, ou si la situation est encore plus grave?

Mgén Wendy Clay: Je crois pouvoir dire que la situation s'est améliorée. Mon bureau, et en particulier le bureau du directeur des Services médicaux, le colonel Cameron, qui est parmi nous aujourd'hui, travaille en étroite collaboration avec le ministère des Anciens combattants. Depuis deux ans, nous avons établi des rapports beaucoup plus étroits que par le passé. Cela dit, il reste des secteurs à problèmes, et malheureusement il y a encore des gens qui sont assis entre deux chaises.

Pour moi, il est absolument obligatoire—c'est une obligation morale—de s'assurer qu'un membre des forces armées qui est libéré et qui a un problème médical est renvoyé au service approprié, de s'assurer que lorsque la province le prend en charge sur le plan médical, par exemple, il est bien traité s'il souffre de névrose post-traumatique. Dans un tel cas, nous pouvons le renvoyer à un médecin civil, qui se charge de son traitement. Nous sommes dans l'obligation de suivre son cas jusqu'au moment où ce transfert devient possible.

Cela dit, effectivement, nos relations avec les Anciens combattants se sont améliorées au cours des deux dernières années.

• 1625

Gén J.M.G. Baril: J'aimerais parler des aspects du problème qui sont plus difficiles à cerner. Les gens, quel que soit leur rang, qui demandent quelque chose et à qui on refuse un traitement en citant la loi ou les règlements, éprouvent beaucoup de frustration et de colère. Par le passé, et c'est une attitude qui n'a pas encore complètement disparu, ils finissaient par dire: «Eh bien, je suis désolé, ce n'est pas possible, j'abandonne.» On se heurtait à un mur de briques; il était impossible de le surmonter. Ce mur de briques, ce n'est pas seulement la loi; ce sont les règles du Conseil du Trésor, les règlements, l'impôt sur le revenu, etc. Parfois j'entends des arguments parfaitement logiques, tout à fait acceptables, et nous avons suffisamment d'argent, mais je dois dire: «Désolé, je ne peux pas rembourser cela».

Nous essayons de changer les lois—et d'ailleurs nous l'avons fait—et en particulier les règles relatives aux congés à domicile pour tous les gens qui sont en poste à l'étranger. Jadis, nous payions le transport jusqu'à Terre-Neuve, la toute première terre canadienne, tout comme Christophe Colomb lorsqu'il a vu l'Amérique. Nous les amenions jusque-là. Ensuite, ils devaient payer eux-mêmes l'avion jusque chez eux, sauf pour les gens qui habitaient au-delà de Winnipeg; ceux-là, nous les déposions à Vancouver, et ensuite ils devaient se débrouiller. Je ne sais pas d'où venaient ces règles, mais de nos jours nous renvoyons les gens chez eux pendant 15 jours, et nous payons l'aller-retour jusqu'à l'endroit où ils habitent. Nous avons d'autres dispositions particulières, mais c'est le genre de choses que nous...

Tout le système de vente et d'achat de maisons, d'hypothèques, etc., est également très complexe. Et je vois tous ces cas-là. Il y a un gros tampon rouge qui est apposé sur le dossier lorsque je le reçois: «Désolé, patron, mais vous n'avez pas le pouvoir de donner suite à ce dossier, pas plus que le ministre.»

Ces gens-là n'ont pas choisi eux-mêmes de vendre leur maison ou de l'acheter, mais c'est nous qui les envoyons en poste. C'est la réalité de notre bureaucratie, et vous pouvez imaginer la situation lorsque les dispositions avec les provinces, les dispositions relatives à l'impôt sur le revenu, etc., changent. Je suis un maillon de la chaîne; je ne peux rien faire. Vous devez me couvrir avec votre arme si vous voulez que j'attaque.

M. George Proud: Je comprends bien cela. C'est justement le problème. Ce n'est pas seulement l'armée. C'est un problème des organismes des Territoires du Nord-Ouest. Vous devez vous rendre dans certains endroits par avion, que cela soit logique ou pas. C'est la réalité des choses. Je comprends cela.

J'ai une autre question à vous poser, à l'un ou à l'autre. On a parlé du stress éprouvé par les gens après leur mission dans certaines régions. Les gens en parlent, et vont voir un médecin, par exemple, mais supposons qu'ils quittent les forces armées après leur mission; que deviennent-ils? C'est cela qui m'inquiète. J'ai parlé du «statut d'ancien combattant». Dans 10 ans, que deviennent cet homme ou cette femme après qu'ils ont quitté les forces armées? Que font-ils lorsqu'ils commencent à avoir des problèmes de santé qui ont leur origine dans ces missions spéciales? Est-ce qu'à ce moment-là ils ont le droit de s'adresser aux Anciens combattants? C'est un des problèmes actuels, n'est-ce pas, lorsqu'ils n'ont pas ce droit-là?

Mgén Wendy Clay: Là encore, je ne peux pas répondre au nom des Anciens combattants, mais au sujet de cette névrose post- traumatique, c'est une maladie qui n'a pas toujours eu le même nom, selon les guerres. À l'heure actuelle, on parle de névrose post- traumatique, et c'est un phénomène assez récent. En fait, notre programme s'est développé au cours des six dernières années.

Un des problèmes, dans les grades inférieurs, c'est qu'il y a encore beaucoup de gens qui refusent d'admettre qu'ils souffrent de stress, c'est-à-dire d'un désordre nerveux. Ils hésitent donc à demander de l'aide. Je pense que dans la hiérarchie de certaines unités il y a encore des gens qui n'acceptent pas entièrement la réalité de cette maladie. C'est un problème d'attitude, mais c'est en train de changer.

Je reviens à votre question. Techniquement, le traitement n'est pas différent selon les grades, mais dans les grades inférieurs on hésite peut-être un peu plus à demander de l'aide; c'est une question d'attitude. Les choses sont en train de changer, et nous essayons de mieux informer les membres des forces armées et leurs familles.

Quant à ce qui adviendra d'ici 10 ans, je ne saurais vous le dire, car au ministère de la Défense nous ne sommes guère en mesure de suivre ces personnes. Mais si la définition d'ancien combattant est modifiée, par exemple,—car on reconnaît à présent qu'à la suite de certains de nos déploiements certains sont affligés de névrose post-traumatique—il ne serait alors pas difficile de prouver qu'il y a là une relation avec les conditions d'emploi. Si tel était le cas, ces personnes-là pourraient être admissibles à la pension, mais là encore je m'aventure sur un terrain qui n'est pas de ma compétence.

• 1630

Le président: Il nous reste trois minutes, monsieur Wood: est- ce que vous avez quelque chose à ajouter en conclusion?

M. Bob Wood: Je voulais simplement revenir sur ce que disait mon collègue.

À qui incombe-t-il, général, de modifier la loi sur les anciens combattants? Qui est en mesure de le faire? La question est-elle de votre compétence, ou relève-t-elle de la loi canadienne? Je reviens sur un passage de votre discours:

    Plus de 20 000 militaires ont été déployés, dans le golfe Persique, en Bosnie, à Haïti, en Afrique, au Cambodge, entre autres. Malgré cela, si l'on se rapporte à la loi, nous ne comptons même pas un ancien combattant pour en témoigner.

Gén J.M.G. Baril: Il n'est assurément pas en mon pouvoir de modifier la loi: c'est une décision du gouvernement, et c'est probablement au ministère des Anciens combattants d'en prendre l'initiative. De notre côté nous avons pris les mesures qui s'imposaient pour saisir de la question le ministère et lui demander de se pencher là-dessus.

M. Bob Wood: C'était simple curiosité.

Vous mentionniez, major-général Clay, que vous avez récemment ramené le service médical des Forces canadiennes à environ 2 500 médecins. Vous disiez également, dans votre discours, qu'en tête des priorités venaient la capacité opérationnelle et le déploiement. Dites-moi quel est le pourcentage approximatif de votre personnel qui, à tout moment donné, se trouve en opération. Tous vos membres sont-ils en principe considérés comme pouvant être déployés?

Mgén Wendy Clay: Oui, en principe ils le sont tous. Le nombre exact de ceux qui se trouvent actuellement en terrain d'opération est sans doute relativement limité. À l'heure actuelle, en Bosnie, nous avons un centre chirurgical d'avant-poste qui compte entre 30 et 40 personnes, et quelques militaires sont postés en Afrique, mais cela ne représente pas un grand nombre.

Un certain nombre de personnes se trouvent dans les unités opérationnelles. Autrement dit, tous nos membres qui sont dans les ambulances de campagne—nous en avons trois dans le pays—sont considérés comme étant des unités opérationnelles, de même que ceux qui sont à bord de vaisseaux. En ce sens, on peut dire qu'ils sont opérationnels.

Je voudrais donner une précision en ce qui concerne le nombre de postes actuels: nous n'avons pas 2 500 médecins, loin de là. Le personnel médical et paramédical comprend 2 500 personnes, ce qui inclut les médecins, infirmières et assistants médicaux, toute la gamme, et à l'heure actuelle ce nombre s'élève à environ 2 100.

M. Bob Wood: Monsieur le président, il a été beaucoup question, ces derniers temps, de l'efficacité de la vaccination du personnel canadien déployé outre-mer. Major-général, est-ce que nous pratiquons nos propres tests pour veiller à ce que les vaccins soient efficaces, ou bien est-ce que nous nous basons sur ce que font les Américains, ou d'autres, pour vérifier cela? Avons-nous des stocks de vaccins pour les déploiements en cas de conflits dans des régions où l'on peut craindre certaines maladies ou agents biologiques? Y a-t-il des plans d'urgence pour se procurer rapidement ces vaccins en cas de besoin?

Mgén Wendy Clay: Est-ce que nous pratiquons nos propres tests? Non, pas directement si nous obtenons le vaccin, par exemple, des États-Unis. Nous avons plusieurs groupes d'études multilatéraux qui mettent au point ensemble les procédures réglementaires. Nous avons un certain stock, mais je ne peux vous dire en quoi il consiste à l'heure actuelle. Toute cette question de réglementation est effectivement d'actualité. Nous travaillons en liaison étroite avec Santé Canada pour tirer certaines questions au clair. Vous savez sans doute que nous avons utilisé certaines substances pour lesquelles il nous fallait obtenir une permission spéciale, au cas par cas, de Santé Canada. C'est une question que nous essayons de tirer au clair à l'heure actuelle.

Malheureusement, avec les effectifs que nous avons et les besoins tels qu'ils se présentent à certains moments, il ne serait guère rentable pour nous de fabriquer certains de ces vaccins, ou d'en faire nous-mêmes l'essai.

M. Bob Wood: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Wood.

Monsieur Price.

• 1635

M. David Price(Compton—Stanstead, PC): Je vous remercie, monsieur le président.

Je vous souhaite la bienvenue, messieurs. Je suis heureux de pouvoir vous poser des questions.

Vous devez sans doute savoir comment se sont déroulées nos audiences, et ce qu'on nous a dit, et certains points ont dû retenir votre attention. Nous avons constaté certains problèmes que vous avez mentionnés aujourd'hui, et d'autres qui dépendent de vous nous ont été signalés. Nous connaissons maintenant assez bien l'étendue des problèmes, et nous voudrions maintenant nous orienter vers des solutions.

Cela m'amène à une question qui vient de se poser aujourd'hui, à savoir le rapport du vérificateur général, dans lequel il est dit, entre autres, qu'alors que les soldats canadiens sont censés combattre aux côtés des plus braves, contre les plus braves, les moyens manquent pour les équiper et pour moderniser les forces. Le vérificateur général demande également que le Canada accorde aux forces armées les ressources nécessaires pour leur permettre de faire ce qu'on attend d'elles.

Il est donc dit très clairement que vous n'avez pas les ressources suffisantes pour remplir votre mission, et que les services médicaux pâtissent également de ce manque de ressources. Nous voyons là une grave lacune.

Il n'y a pas si longtemps les services médicaux aux familles étaient assurés par du personnel médical de l'armée, n'est-ce pas?

Mgén Wendy Clay: Seulement dans certaines bases isolées, comme Cold Lake, à l'étranger en Allemagne, et à Goose Bay.

M. David Price: Vous avez dû restreindre vos services parce que les effectifs de l'armée ont été comprimés. A-t-on envisagé la possibilité d'aller en direction opposée—d'améliorer les conditions et de prendre avec les provinces des dispositions aux fins de faire bénéficier les familles des services de l'armée? En effet, avec les membres des forces armées qui reçoivent les services à la base même, et les familles ailleurs, cela pose des problèmes et crée de la confusion. Le médecin lui-même trouve sa tâche facilitée quand il connaît toute la famille. Une possibilité pareille a-t-elle été envisagée par votre ministère?

Mgén Wendy Clay: Du point de vue purement professionnel je serais d'accord avec vous: ce serait idéal de pouvoir donner notre soutien à toute la famille. Mais avec la diminution des effectifs militaires et la priorité donnée, comme je le disais tout à l'heure, aux considérations financières—c'est une question dont le général Baril devra vous parler—nous nous voyons dans l'obligation de limiter notre personnel militaire. À l'heure actuelle, comme on vous l'a dit, nous ne sommes même pas en mesure de toujours assurer les soins nécessaires aux membres mêmes des forces armées, et nous n'avons vraiment pas la possibilité, avec des ressources humaines aussi limitées, de nous charger des familles.

M. David Price: Mais là encore, si les familles faisaient partie de votre charge vous pourriez vous permettre, mettons... et bien entendu l'aide financière devra venir de quelque part.

Gén J.M.G. Baril: Vous parlez là d'une situation idéale. Pendant deux ans j'ai vécu avec ma famille en Allemagne, et nous avions tous les services, mais même alors nous devions nous adresser aux Allemands pour certains des services que les Forces canadiennes ne pouvaient pas fournir. Mais l'intention n'a jamais été de faire de même au Canada, parce que dans tout le pays il y a d'excellents services médicaux.

Ce qui est ma responsabilité, et celle des forces armées, c'est de veiller à ce que toutes les familles de ceux qui servent le pays, où que ce soit, aient un accès garanti à la même qualité de services, qu'ils se trouvent à Goose Bay, Halifax, Montréal ou dans l'Ouest. Je demande qu'on me donne les ressources nécessaires pour faire cela. S'il y a des membres des forces armées qui sont stationnés à Winnipeg et qu'on ne trouve pas dans cette ville les services nécessaires, je devrais être autorisé à dépenser de l'argent pour que leur famille puisse obtenir ces services.

Ce n'est pas une question d'avoir ou non des ressources à consacrer aux familles; on ne me le permet pas. Ce sont les règles du Conseil du Trésor.

M. David Price: On nous a aussi dit que les services médicaux offerts aux soldats en déploiement étaient bien différents de ceux qu'ils reçoivent sur la base. Il semble que ces services soient bien meilleurs sur le théâtre d'opérations que sur les bases.

Gén J.M.G. Baril: C'est certainement ce que croient les soldats s'ils le disent. Il faudrait demander au médecin, mais lorsque des gens sont en service à Ottawa, ils ont les services des hôpitaux civils. C'est la même chose à Québec et dans les autres grands centres, parce que c'est un choix que nous avons fait. Il est difficile de justifier la dépense d'argent canadien pour des services médicaux qui sont disponibles tout près. Ici, il y a trois hôpitaux juste à côté du Centre médical de la Défense nationale.

• 1640

Je peux toutefois vous assurer que pour les services médicaux que nous procurons à nos soldats en ville et dans tout le Canada, il n'y a qu'une seule norme. Peu importe qui vous êtes. Les autorités médicales de l'hôpital dont nous achetons des services vous traitent en fonction de vos problèmes. Votre chambre est choisie en fonction de ce que nous payons. On me donne des instructions très claires à ce sujet: nous devons payer la même chose pour tous. Peu importe que vous soyez un général ou un simple soldat. Vous aurez accès aux mêmes services que tout civil ayant de l'assurance et accès à une chambre semi-privée. Mes soldats ne peuvent se le payer, et ce n'est pas moi qui verserai le dollar, mais il faudra que je paie la facture de toute façon.

M. David Price: Mais on nous a dit que le service sur les bases elles-mêmes est inférieur à la norme.

Gén J.M.G. Baril: Permettez-moi de signaler que certains services sur les bases ont été réduits. Valcartier avait un hôpital régional, de même que Halifax. On a réduit les services, et le nombre de lits et de spécialistes, parce qu'on était au centre-ville. Ces hôpitaux prennent soin des militaires vivant dans la collectivité. D'un point de vue financier—je n'aime pas tellement ce mot—nous pouvons acheter les services localement. C'est l'objectif.

Il faut toutefois que je me fie à mon personnel médical pour m'assurer que nous achetons les meilleurs services qui soient, et si on ne peut le faire dans la communauté, on les importe. Comme j'essayais de le dire, cela s'applique non seulement aux militaires, mais aussi à leur famille.

M. David Price: Peut-on voir les choses par l'autre bout de la lorgnette? Si vous êtes dans une région donnée, comme Cold Lake, où il n'y a pas d'hôpital local, pourriez-vous offrir vos services médicaux à la communauté? La communauté pourrait par conséquent aider à financer l'hôpital de la base.

Mgén Wendy Clay: Oui. Nous l'avons d'ailleurs envisagé, et nous avons des spécialistes qui montent régulièrement à Cold Lake. Notre chirurgien actuellement en poste à Edmonton, par exemple, va à Cold Lake environ deux fois par mois, si je ne m'abuse. Il y va pour deux ou trois jours, et offre un service de clinique où il reçoit des civils, y compris les personnes à charge des militaires. Lorsque nous avons des spécialistes, nous nous efforçons donc d'offrir leurs services.

J'aimerais aussi demander une chose aux membres du comité: si vous entendez des plaintes précises sur les bases au sujet des services médicaux, veuillez m'en faire part. Il y a une chose qui me préoccupe fort: c'est quand on me dit que les médecins sont indifférents, froids, qu'ils ne posent pas le bon diagnostic, etc. La courtoisie professionnelle et la compassion ne coûtent pas un sou à notre époque. Ce sont des valeurs que nous essayons de transmettre dans le cadre de la formation de nos médecins. Nous n'y arrivons pas toujours, visiblement, mais c'est une de mes principales préoccupations.

M. David Price: Vous pourriez le constater en relisant les comptes rendus de nos déplacements. Nous avons souvent entendu des choses de ce genre.

Vous avez travaillé à l'intégration communautaire; il y a donc un dialogue en cours. On peut envisager d'aller dans l'autre sens, dans le cadre de vos efforts de consolidation et d'obtention des services médicaux de l'extérieur, ou en les offrant de l'intérieur—d'une façon ou d'une autre—là où ce sera le plus pratique. Par exemple, il y a certainement beaucoup de services médicaux à Edmonton, et on pourrait trouver une solution qui permette aux militaires d'utiliser uniquement les services de l'extérieur ou...

Mgén Wendy Clay: Je dirais qu'avec le temps les cloisons entre les militaires et les civils s'aminciront et seront levées, parce qu'on nous force à entretenir des liens de plus en plus étroits avec la communauté civile. Ainsi, nous avons des médecins spécialistes qui travaillent dans des cliniques civiles, en y recevant des patients civils, y compris les familles de militaires. L'accroissement du nombre de partenariats estompera les distinctions. Nous sommes certainement prêts à envisager des choses de ce genre, mais c'est tout nouveau.

M. David Price:

[Note de la rédaction: Inaudible]... des négociations ouvertes.

Mgén Wendy Clay: Ailleurs qu'à Edmonton et Cold Lake, où on a sans doute fait le plus de progrès.

M. David Price: Merci.

Le président: Merci, monsieur Price.

Chers collègues, nous passons maintenant aux tours de cinq minutes. Commençons par M. Benoit. Auparavant, je vous rappelle que la séance sera levée à 17 h 15 ce soir plutôt qu'à 17 h 30, en raison du vote.

Monsieur Benoit, vous avez cinq minutes, et je vous ai à l'oeil.

M. Leon Benoit: Merci, monsieur le président.

• 1645

Encore une fois, j'aimerais poser quelques questions au sujet du rapport du vérificateur général, mais je vais d'abord revenir sur certains propos de M. Wood. Il a demandé si nous avons le pouvoir de changer des choses au ministère des Anciens combattants.

Il me semble que les Libéraux oublient trop souvent que c'est leur gouvernement qui a le pouvoir. C'est leur gouvernement qui a choisi de réduire le budget total de la défense en le faisant passer de 12,5 milliards de dollars en 1992, quand j'ai commencé à examiner sérieusement la situation, à 9,3 milliards de dollars. N'oublions pas qui est au pouvoir.

Cela m'amène à formuler un commentaire avant de parler du rapport du vérificateur général. Général Baril, vous avez affirmé que la Défense nationale devait nous servir, et non le contraire, ou quelque chose d'approchant. Je pense que vous exprimez ainsi votre frustration au sujet de la participation des fonctionnaires aux décisions se rapportant aux militaires. Est-ce bien là ce que vous vouliez dire? Vous avez dit cela après...

Gén J.M.G. Baril: Non, pas du tout. Ce n'est pas du tout ce que je voulais dire.

M. Leon Benoit: Que disiez-vous alors?

Gén J.M.G. Baril: Nous faisons partie du ministère de la Défense nationale. Le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes, c'est tout pareil. Nous devons aussi nous occuper d'une bureaucratie substantielle comptant 60 000 militaires et 20 000 civils. Nous sommes lents et lourds. Nous nous sommes améliorés, mais il y a encore de la place pour l'amélioration.

Trop souvent, je constate que les règles sont appliquées par ce que j'appelle des bureaucrates sans coeur. Nous avons besoin d'eux, bien entendu, parce qu'il faut bien que quelqu'un applique une norme partout au sein des forces armées. Mais une fois que les règles sont appliquées, il faut faire preuve de compassion et de leadership. Il faut pouvoir constater l'incidence des règles sur les humains avec lesquels nous traitons. Peu m'importe, au fond, à la condition que le bureaucrate n'ait pas le dernier mot.

M. Leon Benoit: Vous constatez donc ce problème même au sein des Forces armées canadiennes, chez les militaires, disons, que chez...

Gén J.M.G. Baril: Non. Ce que j'essaie de dire, en fait, c'est que dans toute lourde bureaucratie, il y a de la bureaucratie.

Nous en avons une qui s'est beaucoup améliorée. On en a réduit la taille et on l'a restructurée. Nos règles et règlements sont revus, modifiés, simplifiés ou supprimés. Les choses se sont beaucoup améliorées.

M. Leon Benoit: J'espère que c'est le cas, mais je ne suis pas tout à fait convaincu.

Dans son rapport, le vérificateur général fait des déclarations très sérieuses, surtout lorsqu'il déclare que les dépenses au titre des biens d'équipement destinés aux forces de première ligne ont diminué de 20 à 14 p. 100, selon l'angle sous lequel on examine les chiffres. Cela signifie que les troupes reçoivent maintenant moins de nouvel équipement, alors que celui-ci est éminemment nécessaire.

Ce sont des observations que nous avons entendues à plusieurs reprises. Voyez ce qui s'est produit en Croatie au chapitre du mauvais équipement. J'ai posé la question hier au colonel Calvin. Il ne m'a pas vraiment répondu, mais il n'a pas dit en tout cas que l'équipement est meilleur maintenant. S'il s'était senti plus à l'aise pour exprimer son opinion, il aurait sans doute dit que l'équipement ne s'est pas amélioré au cours des quatre dernières années, ce qui est à mon avis un problème grave. En fait, les choses ne se sont pas améliorées même si les soldats qui sont littéralement aux premières lignes ont fait savoir il y a quatre ans qu'il fallait régler ce problème.

Gén J.M.G. Baril: Si vous me le permettez, je préfère ne pas discuter du rapport du vérificateur général, qui a été rendu public aujourd'hui. Je n'ai pas eu l'occasion de le consulter, et je ne saurais donc discuter des éléments que vous en avez extraits. Je suis certain, monsieur le président, que notre ministre répondra à vos questions à ce sujet la prochaine fois.

Pour ce qui est des améliorations à apporter à notre équipement, je suis d'accord avec vous: nous n'avons pas le meilleur équipement du monde, mais la majeure partie a été améliorée grâce à l'ajout de blindage, à une meilleure protection des armes à feu, à de meilleures munitions et à une meilleure formation. Nos gens sont mieux protégés. Il y a donc eu des améliorations de ce côté. Si Jim Calvin n'a pas cité l'équipement, c'est qu'il ne l'a pas jugé nécessaire. Je le connais depuis longtemps, et il ne mâche pas ses mots. Il est comme ça.

Nous avons reçu du nouvel équipement et nous en attendons d'autre. Il nous est assez difficile d'acquérir des systèmes d'équipement importants. Si je dis que c'est assez difficile, ce n'est pas parce que c'est cher. Nous avons sans doute l'un des meilleurs véhicules de reconnaissance. Ce véhicule sera utilisé sur des théâtres d'opérations dès qu'il sera prêt à fonctionner et que nous aurons toutes les pièces de rechange. Ce ne sera pas pour le prochain cycle, mais pour celui d'après. Les TTB sont en cours de production et serviront également aux opérations. Tous les véhicules que nous conserverons seront améliorés. Je ne parle que des véhicules qui servent aux opérations de maintien de la paix. L'équipement a beaucoup changé, à commencer par le casque.

• 1650

Le président: Vos cinq minutes sont écoulées, monsieur Benoit.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Le colonel Calvin nous a dit entre autres, hier, que les soldats, lors de l'opération de l'enclave de Medak, se sentaient rassurés et réconfortés de savoir qu'une unité chirurgicale mobile française avait été établie derrière les lignes pour les aider lorsqu'il y avait des blessés.

Dans votre exposé, général Clay, vous avez expliqué ce que les Forces canadiennes ne pouvaient pas faire dans le contexte du Livre blanc. Ce qui m'intéresse, c'est ce qu'elles peuvent faire, surtout dans des cas comme celui de l'enclave de Medak, ou dans des opérations de moyenne à haute intensité. Combien d'unités médicales et chirurgicales mobiles peut-on placer sur le terrain pour aider les soldats qui se trouvent dans des situations assez critiques?

Mgén Wendy Clay: Nous pouvons en tout temps mettre sur pied trois centres chirurgicaux avancés dotés d'un personnel d'environ 30 à 40 personnes, selon le nombre de lits. Nous pourrions, à mon avis, en maintenir deux pendant de longues périodes.

Ce que nous essayons de mettre en place, comme je l'ai dit, c'est un hôpital de campagne de 100 lits auxquels s'ajouteraient d'autres centres chirurgicaux qui pourraient faire partie de l'hôpital de campagne ou constituer un complément. Cela ne nous permettrait toutefois pas de soutenir des opérations de combat de moyenne intensité. Pour cela, il nous faudrait un hôpital de campagne de 400 lits. À l'heure actuelle, nous essayons de soutenir des opérations autres que des guerres, des opérations de maintien de la paix.

Gén J.M.G. Baril: Vous avez fait un commentaire très intéressant, lorsque vous avez dit que les soldats se sentaient en sécurité du fait qu'il y avait sur place une équipe chirurgicale française. C'était bien le but de la chose. Ce n'est pas un hasard. Si cette unité a été déployée, c'est qu'il y avait des installations médicales françaises.

Nous avons actuellement des troupes en Afrique qui peuvent compter sur d'autres installations médicales françaises, les meilleures au monde, qui ont accès au service Medevak à partir de l'Europe, si c'est nécessaire. Nos troupes au Koweit n'ont pas de ressources chirurgicales avancées, puisque les Américains fournissent ce service sur place. Je ne permettrai toutefois jamais à mes troupes, à nos troupes, d'être déployées sans le soutien d'installations médicales adéquates. C'est une condition sine qua non.

M. David Pratt: Vous voulez dire que nos troupes ne seraient pas déployées autrement? De toute évidence...

Gén J.M.G. Baril: C'est disponible dans une certaine mesure...

M. David Pratt: Dans une certaine mesure. C'est ce que j'essaie de comprendre. Il semble qu'il existe des limites quant à ce qui est disponible. Notre travail sur le terrain est limité en fonction des services médicaux dont nous disposons.

Gén J.M.G. Baril: Pas nécessairement. On nous confie la tâche de déployer une brigade et nous avons pour cela des installations médicales partout dans le monde.

M. David Pratt: Vous parlez des situations de combat à haute intensité?

Gén J.M.G. Baril: Non, dans les situations de moyenne intensité.

M. David Pratt: D'accord. Ce qu'on nous a dit hier, c'est qu'au départ, l'opération semblait probablement de faible intensité lorsque le commandant de l'ONU a demandé aux Canadiens... ils y sont allés et la chose a rapidement tourné, pour eux du moins... Je ne sais pas s'il s'agit d'opérations de moyenne intensité ou d'intensité élevée. Pour ma part, je parlerais plutôt d'intensité élevée.

Gén J.M.G. Baril: Il s'agit d'opérations de moyenne intensité. Mais peu importe la catégorie, lorsque les balles sifflent à vos oreilles. Dans une telle situation, peu importe l'intensité. Mais pour préciser la définition, il s'agit là de combat de moyenne intensité.

Mgén Wendy Clay: Également, nous n'avons pas à fournir les services médicaux nous-mêmes. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos alliés de l'OTAN. Je sais par exemple que d'après certains rapports, nous avons reçu des services d'hôpitaux allemands et britanniques, et nous veillons à ce qu'il y ait compatibilité de nos normes, de nos procédures et de notre équipement. Pour ma part, je fais entièrement confiance aux soins que fournissent les équipes médicales d'autres pays.

• 1655

M. David Pratt: Je suis bien prêt à partager votre confiance dans les services fournis par ces autres pays, mais ne devrait-on pas appliquer comme principe fondamental que les Canadiens blessés dans les opérations de ce genre devraient être soignés par les Canadiens? Ne devrions-nous pas nous fonder sur ce principe?

Gén J.M.G. Baril: Bien sûr, mais la plupart du temps ce n'est pas personnel. Dans bien des cas, nos troupes ont le soutien de l'artillerie d'un autre pays. Depuis jeudi dernier, par exemple, nos troupes à Drvar sont appuyées par des hélicoptères français, américains et britanniques ainsi que par une compagnie du British Warrior entraînée à la répression des émeutes. C'est de cette façon que se battent des troupes de coalition. Nous ne sommes pas tout seuls; nous aidons les autres et ils en font autant. J'ai été blessé à quelques reprises dans des opérations et je n'ai jamais été soigné par des Canadiens.

M. David Pratt: Oui, mais les soins aux blessés diffèrent de l'appui de l'artillerie, de l'appui aérien et de l'appui naval. Si vous êtes blessé, il est peut-être essentiel de pouvoir parler à quelqu'un de votre propre pays plutôt que de devoir se faire interpréter ce que dit un médecin français, allemand ou autre.

Gén J.M.G. Baril: Je suis tout à fait d'accord. Normalement, on ne reste pas très longtemps dans l'installation médicale. On finit par se faire évacuer vers son unité ou vers le Canada et, à ce moment-là, c'est nous qui nous en occupons. Nous avons cependant toujours des services médicaux partagés.

Le président: Merci, monsieur Pratt.

M. David Pratt: Est-ce que cela fait cinq minutes?

Le président: Cela fait plus de six minutes.

Monsieur Richardson.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Nous avons un président généreux.

Général Baril, général Clay et... Chef, je suis heureux de voir que vous soyez reconnu. Tout le monde vous donnait le rang de général et je sais que vous êtes très fier d'être adjudant-chef des forces armées. Je suis heureux que vous soyez ici.

Gén J.M.G. Baril: Voyez-vous l'or...

M. John Richardson: Je le vois, en effet. Il le porte très fièrement et cela lui va bien.

Je voulais vous remercier d'être venu et d'avoir été aussi franc, général, comme vous l'êtes toujours quand vous témoignez devant notre comité. Je peux cependant vous dire que, pendant nos déplacements un peu partout dans le pays et après avoir vu les changements qui surviennent maintenant, je peux vous dire que nous avons quelque chose qui date de 1945 à 1954, sauf à Namao, où c'est vraiment très bien. Le meilleur endroit ensuite était Valcartier, qui devait au départ loger une brigade, et c'est évident.

La marine est mal logée à Esquimalt à cause des nombres. Quand on a passé à un arrangement de près de 50-50 pour la marine, on n'a pas pu loger tout le monde, même si la marine a repris les vieilles baraques des régiments Princess Patricia et Queen's Own Rifles. Nous avons pu constater la détérioration des locaux et je suis certain que c'est la même chose dans toutes sortes d'immeubles. C'est une situation qu'il faudrait rectifier et nous devrons peut-être nous en occuper.

Une chose que nous disent les militaires... Quand les jeunes soldats, les aviateurs et les marins viennent nous parler, ils mentionnent des problèmes dont on ne s'occupe pas. On ne s'en occupe pas probablement parce qu'ils sont... Ils savent qu'il y a un travailleur social sur la base, mais ils voudraient probablement parler à... Nous avions l'habitude d'avoir l'heure du commandant de peloton une fois par semaine. Je ne sais combien de gars j'ai dû sortir d'un pétrin financier, combien de gars j'ai dû empêcher de se marier quand ils n'y étaient pas prêts et à combien de gars j'ai évité la prison... Ils m'écrivent encore. Ils se rappellent de moi et me remercient d'avoir pris le temps d'écouter. Nous pouvions résoudre les problèmes immédiatement. La situation ne s'envenimait pas au point d'atteindre un état de crise ou de causer un trouble psychologique quelconque ou du stress aux militaires, et il y avait beaucoup de stress.

On a assaini l'armée et c'est la même chose pour la marine et l'aviation. Les recrues sont passées au crible beaucoup plus soigneusement qu'à mon époque. Je pense que j'avais un peloton complet de 39 militaires. Si je me rappelle bien, 27 avaient été renvoyés à l'armée par le tribunal: «Enrôlez-vous, sinon vous ferez 30 ou 60 jours de prison.» C'étaient d'excellents soldats et ils nous étaient reconnaissants de régler leurs dettes et de résoudre leurs autres problèmes. Ils n'étaient peut-être pas aussi bien entraînés que les soldats d'aujourd'hui et ils n'avaient certainement pas le même genre de matériel. Cependant, ils avaient régulièrement accès à leur commandant de peloton ou à leurs sergents. Je ne peux vous parler que de l'infanterie. Cela faisait partie de notre travail. Nous apprenions à connaître nos gens et nous savions que nous pouvions appliquer des mesures disciplinaires équitables et que les soldats ne nous en voudraient pas.

• 1700

J'ai l'impression que, parce qu'ils sont maintenant plus au courant de ce qui se passe, ils peuvent faire des comparaisons en gravissant les échelons et ont l'impression qu'ils ont le droit de s'exprimer sans avoir résolu les problèmes au départ.

J'ignore s'il est possible de reculer et je ne voudrais pas que les forces fassent marche arrière. Je suis très fier de ce qui se passe maintenant. Je sais que certains se plaignent du matériel, mais je n'ai pas vu tellement d'armées mieux équipées que nous le sommes maintenant, si nous pouvons obtenir tout ce qui a été prévu.

Je pense que nos soldats sont fiers. Ils semblent l'être; ils se comportent dignement. En réalité, ils sont presque aussi fiers que la personne à mes côtés que je suis fier de connaître. Je pense que nous essayons de nous occuper d'eux le mieux possible. Nous tenons toujours compte de ce que nous entendons. Je connais vos antécédents; je sais quel genre de soldat vous étiez. Vous êtes vous-même sensible aux besoins de non gradés.

J'ignore quand nous obtiendrons l'argent nécessaire pour relever le niveau des services pour les femmes, par exemple améliorer les logements familiaux, mais quand j'ai vu les casernes pour militaires célibataires à Petawawa... n'essayez pas de me dire que les Américains sont mieux logés que les militaires canadiens. J'ai trouvé cela très impressionnant, notamment les salles de repas. Je ne sais pas comment on pourrait faire beaucoup mieux. Je pense que les militaires de Petawawa devraient aller visiter les autres bases de temps à autre et voir ce qui se passe parce que j'ai trouvé qu'ils étaient très bien logés.

Il y a certains endroits à Petawawa... je veux dire que Petawawa a bien changé depuis ma jeunesse. Je n'ai pas vu tellement d'immeubles blancs. J'ai vu des immeubles nouveaux et tout à fait modernes pour les militaires. Les seuls à être logés dans les anciens immeubles étaient les quartiers généraux de la brigade.

Je voulais simplement vous dire que tout n'était pas mauvais à Petawawa. L'infrastructure est en piteux état et c'est une chose dont nous allons devoir nous occuper.

D'après moi, nous avons peut-être trop réduit les effectifs des gestionnaires de carrière parce que, si ce qu'on nous a dit est vrai, quand nous avons posé la question à savoir que les gestionnaires de carrière donnent des réponses malpolies du genre: «Vous n'avez pas le choix, vous vous êtes enrôlé dans l'armée, la marine ou l'aviation; c'est là où que vous irez».

Nous ne l'avons pas imaginé. Il y a eu des notes de ce genre. Je l'ai mentionné au général Dallaire à l'époque parce que je pensais qu'il devait le savoir. Quand quelqu'un sait qu'il va être posté quelque part et qu'il veut l'être et qu'il reçoit une réponse comme celle-là... Les gestionnaires de carrière que j'ai moi-même connus écoutaient les militaires et essayaient de les aider si possible.

Je sais que je donne peut-être l'impression que je vous fais la leçon, mais je tiens à vous dire que je suis fier de 99 p. 100 des choses que je vois ici. Ce sont les petites choses qui risquent d'être scandaleuses.

Tout ce que je veux dire, c'est qu'il faut continuer de la même façon.

Le président: Merci, monsieur Richardson.

Monsieur Lebel.

[Français]

M. Ghislain Lebel: Général, tout comme vous, je n'ai pas lu le rapport du vérificateur général du Canada, mais je m'inquiète après avoir entendu les propos de mes deux collègues ici. Je me demande si, au cours des dernières années, dans les dépenses militaires, on n'a pas trop mis l'accent sur l'équipement, la formation et une foule d'autres choses alors qu'on s'occupait très peu des ressources humaines. Je me dis que lorsqu'on aura fini d'acheter des camions, des sous-marins, des avions neufs et des hélicoptères neufs, on va enfin passer aux ressources humaines.

Les observations contenues dans le rapport du vérificateur général m'inquiètent et je crains qu'encore cette fois-ci, les militaires passent leur tour. Comment effectuerez-vous un meilleur dosage dans l'affectation de vos ressources et comment les répartirez-vous entre l'équipement, la formation et l'aspect humain de notre armée, ce qui, à mon avis, devient urgent?

• 1705

Gén J.M.G. Baril: Je vous remercie de vos commentaires. J'éprouve une grande confiance envers mon pays. Je crois que le Canada va prendre soin des hommes et des femmes qui l'ont servi depuis si longtemps.

Il ne faudrait pas oublier que jusqu'en 1995-1996, tous les salaires étaient gelés d'un bout à l'autre du Canada. Tous les citoyens canadiens souffraient de la même façon. On a relancé la machine et on songe à recommencer à prendre soin de nos gens, mais il faut avoir une base très solide pour réussir à s'attaquer au problème. Depuis des années, we were poking, on touchait à la question du bout des doigts. Mais il faut commencer à se fermer le poing et à foncer. Je crois que c'est vous qui allez nous donner le poing, nous permettre de foncer, nous donner une base solide et nous aider à obtenir la reconnaissance nationale.

Les groupes que vous avez entendus hier vous ont dit que ça les écoeurait de ne pas être reconnus nationalement. Ils sont allés en service et ont risqué leur vie, mais on ne les reconnaît pas nationalement. Oui, je conviens qu'ils désirent un meilleur salaire et une maison, mais ils veulent aussi que le Canada les reconnaisse. Je dois avoir une base solide pour être en mesure de payer leurs salaires, de leur fournir des avantages sociaux, de prendre soin des familles, de les aider au niveau du logement, et de prendre soin des blessés, de ceux qui se font tuer et des anciens combattants.

Il faut qu'on me donne une base solide, qu'on ajuste et adoucisse les règlements et qu'on modifie les règles de taxation. Cela coûtera évidemment un peu cher de prendre soin de 60 000 militaires réguliers et de 30 000 réservistes. Mais si on me donne les ressources, je vais vous donner des forces opérationnelles.

Si on ne prend pas soin de l'élément essentiel des Forces canadiennes, des hommes et des femmes qui servent, je ne serai peut-être pas capable de maintenir à l'avenir cette compétence et cette capacité opérationnelles, lesquelles, me dit-on, sont questionnées dans le rapport du vérificateur général, que je n'ai pas étudié en détail.

Jusqu'à maintenant, cela s'est avéré un exercice d'équilibre extrêmement difficile. J'ai une chaudière percée à 15 endroits, mais je n'ai que 10 doigts. Il faudrait que le comité ou le gouvernement me donne une chaudière à 10 trous où on pourra se planter les doigts et arrêter les fuites qu'il y a partout actuellement. Il est très difficile d'avoir la science nécessaire pour prendre soin des gens. Et mon but demeure la défense de notre pays.

M. Ghislain Lebel: Vous savez, général Baril, il n'y a pas que l'aspect humain qui ne va pas dans votre armée. On nous dit qu'un soldat de Trenton attend depuis huit mois qu'on lui donne une paire de bottes, tandis qu'un autre attend depuis plusieurs mois ses culottes pour aller à Alert. On n'invente rien là. J'avais répondu à la blague que le soldat aurait dû se faire engager par la GRC parce que, toujours selon le vérificateur général, elle a 4 000 chapeaux de trop sur ses tablettes. Cela témoigne du fait qu'il y a quelque chose qui ne va pas et que ce n'est pas seulement au niveau des ressources humaines.

Gén J.M.G. Baril: On entend tout le temps toutes sortes d'histoires. Aussitôt qu'on bouge quelque chose, ça cause des remous. Dans l'armée, on vient de changer les uniformes que nos réservistes réguliers ont le droit de porter en permanence, soit l'uniforme de combat. Un déséquilibre temporaire s'est produit lorsqu'on a dû demander à une foule de militaires de nous remettre leurs uniformes de combat, lesquels sont une pièce d'équipement opérationnelle à laquelle ils n'avaient pas droit, mais qu'il leur était agréable d'avoir. Il nous fallait redistribuer ces uniformes parce que nous n'en avions pas assez, que certains avaient subi trop d'usure et que la demande était trop grande. Évidemment, c'est une grosse machine. Des contrats ont été accordés et des mesures sont maintenant en place pour régler ce problème.

Ce monsieur de Trenton qui attend sa paire de bottes depuis huit mois a de grands pieds ou est très patient. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans notre organisation si un gars ne peut pas avoir de bottes au bout de huit mois et doit aller dire au SCONDVA qu'il lui manque des bottes. Il faut qu'il y ait un manque de confiance plutôt dramatique envers la chaîne de commandement.

Le président: Merci beaucoup, général. Monsieur Benoit.

[Traduction]

M. Leon Benoit: Merci encore, monsieur le président. Tellement de questions et si peu de temps.

Je voudrais revenir au rapport du vérificateur général. Je sais que vous n'en connaissez pas encore tout le contenu, mais je voudrais vous poser une question au sujet de la réunion du comité d'hier. Cela a trait à ce qui s'est passé en Croatie il y a environ quatre ans et demi.

Le général Leach avait fortement recommandé que l'on décerne une nouvelle décoration ou un nouveau titre à l'unité, mais rien ne s'est fait jusqu'ici. Est-ce parce qu'on a jugé qu'il s'agissait d'une opération d'intensité moyenne, je pense que c'est l'expression que vous utilisez, plutôt qu'une opération de grande intensité? Est-ce pour cela que l'on n'a rien fait?

• 1710

Gén J.M.G. Baril: Non, pas du tout.

M. Leon Benoit: Ce n'était pas mérité?

Gén J.M.G. Baril: Non, pas du tout.

Puis-je vous donner quelques détails?

Lors de cette intervention armée en 1993, une unité canadienne a tenu tête à une unité croate et l'état-major de l'époque, et je n'étais pas au Canada à ce moment-là, a probablement jugé que le fait d'accorder des honneurs de guerre à une unité canadienne qui avait plus ou moins battu l'une des parties en cause dans le conflit dans son propre pays alors qu'il y avait encore des Canadiens dans ce pays, et soit dit en passant, il y en a toujours, n'aurait peut-être pas été bien reçu par les militaires là-bas, surtout le général qui avait participé à cette opération et qui aurait entendu dire que notre unité avait reçu des honneurs nationaux pour l'avoir battu alors qu'il était encore dans le champ de sa propre artillerie. Cela n'aurait pas été très sage à cette époque-là.

Cela dit, cette opération militaire a pris fin. Nous sommes encore impliqués avec les Croates en Bosnie et à Zagreb. Nous y étions jeudi et vendredi derniers—il y a eu quelques chaudes alertes, et des échanges de feux. Samedi soir en Croatie, on a tiré à bout portant sur un de mes soldats, qui revenait de Zagreb. La balle a percé le pare-brise de sa voiture. Nous intervenons encore dans cette région-là.

C'est moi qui ai introduit la proposition du commandant de l'armée, parce que d'après moi il fallait faire quelque chose de plus pour reconnaître notre intervention dans ce nouveau genre de conflit en accordant par exemple des honneurs de guerre, ou une citation comme une mention présidentielle ou une mention élogieuse du CED.

La recommandation du commandant de l'armée a été rejetée par le comité des citations et des décorations, mais c'est moi qui ai lancé tout ceci quand j'étais là, et je change rarement d'avis quand je change de chapeau. Maintenant que le comité relève de moi, je découvrirai les motifs de ce refus.

M. Leon Benoit: Rapidement? Bientôt?

Gén J.M.G. Baril: Normalement, je réagis très rapidement. Je suis un fantassin et je n'ai guère de patience.

M. Leon Benoit: Je vais garder l'oeil ouvert.

Gén J.M.G. Baril: Entendu.

M. John Richardson: C'est une menace?

Des voix: Oh, oh!

M. Leon Benoit: Non, c'est une promesse.

Dans son rapport, le vérificateur général signale que le ministère a souvent acheté et payé du matériel avant même de l'essayer. Cela entraîne donc des coûts élevés quand le matériel est de qualité inférieure. Il y a aussi des témoins qui ont dit la même chose. Par exemple, ils ont dit que le matériel qu'ils ont reçu de Bombardier—je parle des véhicules personnels, des petits véhicules pour la circulation locale, qui ressemblent beaucoup à des voitures ou des camions—étaient de la camelote. Ils ont dit que certains des voitures Fiat étaient de la camelote. Ces véhicules n'auraient jamais dû être achetés, et personne ne comprends pourquoi ils l'ont été. Voilà l'une des préoccupations exprimées.

Il est vrai que le gouvernement veut rééquiper les forces armées, ce qui exigera 11 milliards de dollars mais hélas on n'a prévu que 6,5 milliards, et tout cela va prendre vraiment très longtemps.

On nous dit aussi que le gouvernement n'a pas planifié l'allocation de son budget de défense. Il ne se base pas sur des politiques ou de la recherche, mais sur leur instinct.

Général, il doit être très frustrant de voir un gouvernement choisir du matériel de cette façon. Ça ne peut être que frustrant. Cela nous ramène d'ailleurs à la tenue de combat.

Le président: Soyez bref, s'il vous plaît.

M. Leon Benoit: Vous savez très bien ce qui se passe avec la tenue de combat. Selon beaucoup de témoins il s'agit encore d'une préoccupation importante.

J'ai soulevé la question en décembre, quand le général Leach a comparu devant ce comité. Le général nous a dit que malgré les températures extrêmes que courait le Canada, nous n'avons toujours pas trouvé l'argent pour équiper nos soldats avec des vêtements d'avant-garde. En Bosnie, il a vu des soldats qui portaient des bottes achetées à un magasin d'équipement pour la chasse, parce qu'ils ne pouvaient pas en obtenir par l'entremise des forces armées.

Le journal des Forces armées canadiennes, La feuille d'érable, mentionne que l'approvisionnement en vêtements constitue un grave problème, jusque dans son numéro de mars. Dans certaines notes de synthèse obtenues de la BFC de Petawawa, on mentionne que les soldats s'inquiètent beaucoup au sujet des vêtements.

Cela veut dire donc qu'une question très fondamentale—celle des vêtements de combat et de la trousse de combat—n'a pas encore été réglée. Il y a deux ans déjà que la campagne d'urgence visant à procurer des vêtements aux soldats a été lancée. Je crois qu'on avait affecté 500 millions à cette campagne. De plus, il y a quatre ans et demi...

Le président: Merci pour cette brève question, monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Pas de quoi.

Le président: Monsieur Wood.

• 1715

M. Bob Wood: J'ai une question très brève. Je n'allais pas rien dire à ce sujet, général, mais c'est probablement la seule occasion que j'aurai pour vous exprimer mon mécontentement. Je tiens à vous faire connaître mon opinion au sujet des gestionnaires de carrière et des plaintes que nous avons entendues depuis le début de nos délibérations en janvier. Je suis parfaitement d'accord avec les propos de M. Richardson. Ces gestionnaires de carrière sont sans nul doute doivent être les gens les plus cruels et insensibles que j'ai jamais vus.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Dans ma circonscription, une dame de la BFC de North Bay a franchi toutes les étapes à saisir que les travailleurs sociaux, les commandants et les prêtres de la base ont recommandé qu'on accepte sa demande d'affectation pour motifs personnels. Elle a remis tous les papiers, et on a refusé cette demande sans la moindre explication. Je connais le nom de la dame qui est sa gestionnaire de carrière, elle n'a donné aucun motif pour son refus. Quand j'ai été voir le commandant, il a dû téléphoner pour demander pourquoi on avait refusé la demande de cette dame. D'après moi, il n'y avait aucun motif pour ce refus.

Je propose, général—et ce n'est là qu'une suggestion—que vous et le général Dallaire convoquent tous ces gestionnaires de carrière à une réunion pour leur faire un petit laïus. Il faut qu'ils comprennent ce qui se passe. Il faut que quelqu'un le leur dise, et les amène à agir convenablement.

Gén J.M.G. Baril: Je suis tout à fait prêt à leur faire une semonce mais d'après moi ils ne sont pas tous cruels. On ne peut pas vraiment...

M. Bob Wood: J'espère que non, mais...

Gén J.M.G. Baril: Mais vous avez dit qu'ils sont tous cruels.

M. Bob Wood: C'est vrai, je commence à croire qu'ils le sont tous.

Gén J.M.G. Baril: En se fondant sur quelques exemples ou peut- être beaucoup d'exemples... Il y a eu beaucoup de rationalisation. Nous avons réduit les effectifs de 14 000 personnes. Nous avons perdu un tas d'experts, et nous essayons de faire ce qu'on faisait avant. Je pense que j'en suis au point où nous devons commencer à changer nos méthodes. Il y a eu des coupures unilatérales de 50 p. 100 dans toutes les sections, y compris parmi les gestionnaires de carrière.

On a probablement pratiqué des coupures trop sombres. Maintenant, il y a des gens qui ont simplement trop de travail, ou qui ne sont pas ceux qu'on aurait dû garder. Il y a des gens qui vont sur le terrain, et d'autres qui reviennent. Je suis sûr que certaines personnes abusent du système, comme dans toute organisation, mais il y en a beaucoup qui font du très bon travail, même si ce n'est pas le cas de tous.

M. Bob Wood: J'espère que vous avez raison, mais on ne nous en a jamais parlé. Ces gestionnaires de carrière qui vont sur le terrain et qui en reviennent—quelle sorte de formation ont-ils en relations inter-personnelles? Est-ce qu'ils reçoivent leur formation ici? On dirait que non, puisqu'on parle à maintes reprises des gestionnaires de carrière et de leur manque de sensibilité. Est-ce qu'ils font ce travail pendant quelques mois sans préparation, pour aller ailleurs après?

Gén J.M.G. Baril: Non. Je pourrais peut-être demander au premier maître de vous parler de notre système de gestionnaires de carrière. Il est assez bien développé. On ne peut pas tout simplement blâmer le sous-officier ou le jeune officier qui est là à un certain moment. Les responsabilités de gestion de carrière commencent avec moi, et vont jusqu'au bas de l'échelle. Nous gérons les carrières des hommes et des femmes qui servent dans les forces armées, tout le temps.

Il y a certainement des gens qui ne sont pas très heureux de leur affectation, mais en fin de compte la décision des forces armées doit prévaloir.

Ici, nous parlons d'une affectation pour motifs personnels, pour motif de compassion, qui a été refusée. Cela m'a énormément troublé quand c'est arrivé.

M. Bob Wood: Mais on se plaint beaucoup de cette sorte de choses. On ne dit pas vraiment que les gestionnaires de carrières font du mauvais travail; on dit qu'ils sont cruels, et insensibles. Ce sont leurs décisions sous forme d'obturateur, «c'est à prendre ou à laisser» qui irritent les gens. On refuse des demandes sans la moindre explication. La dame en question a peut-être refusé cette demande pour de bonnes raisons, mais cette raison n'a pas été exprimée. La décision était péremptoire.

Gén J.M.G. Baril: Je suis d'accord. Il y a de meilleures façons de faire les choses.

Premier maître Terry Meloche (ministère de la Défense nationale): À la décharge des gestionnaires de carrière, monsieur Wood, je dois dire que c'est le groupe qui travaille le plus fort. Il a toujours été difficile d'attirer des gens pour faire ce genre de travail. Une fois qu'ils sont là, ils y consacrent beaucoup d'heures. Ils commencent avec les cheveux noirs et ils finissent avec des cheveux gris.

• 1720

Je vous le dis, j'arrive au travail avant 7 heures du matin, et je vois les gestionnaires des carrières s'en allant au travail. Je ne pars pas qu'après 18 heures, et ils y sont toujours. Je peux les appeler le vendredi après-midi, et je sais qu'ils sont toujours là.

C'est peut-être une des choses dont on vous parle. Quand j'entends les questions qui ont été soulevées, il me semble que c'est ma boîte vocale que vous écoutez.

Je fais ce travail depuis trois ans, et je l'ai fait pendant deux ans pour la flotte. C'est toute ma vie. Je me souviens quand les questions de qualité sont devenues le nouveau mot d'ordre. Bien, c'est comme cela que j'ai gagné ma vie toutes ces années. Il s'agit de choses que nous faisons.

Est-ce que nous les faisons correctement? C'est cela que ce comité-ci...

Je ne crois pas que le gestionnaire des carrières a l'autorité de dire non, car on vient tout juste de le dire ici. Il faut que cela vienne d'un rang supérieur. Je sais que vous avez peut-être entendu dire...

M. Bob Wood: Oh, j'ai le document, et j'ai le nom de la dame. On dit non; refusé.

Pm Terry Meloche: Je ne crois pas qu'un sergent puisse dire non. Quoique dans l'occurrence, il faut que cela vienne d'un peu plus haut.

Je suis un peu à l'aveuglette ici, puisque je n'ai pas le dossier.

M. Bob Wood: Non, je le sais. Je m'en servais en tant qu'exemple.

Le président: Merci, monsieur Wood. Une très bonne question.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt: Merci, monsieur le président.

Général Baril, je veux revenir à votre observation selon laquelle «aucun programme au sein du ministère n'a été à l'abri d'un examen minutieux», dans le contexte des questions de qualité de vie. Je veux certainement vous croire quand vous dites avoir fait cela, mais une chose que nous avons entendue ces dernières années c'est que les choses ont tendance à se manifester en cycles. On nous parle maintenant de la qualité de vie parce que le ministre nous a demandé de nous pencher sur cette question. Nous avons certainement entendu beaucoup de témoignages au cours des derniers mois.

Si on accorde toute l'attention voulue aux questions de qualité de vie, il y aura peut-être des insuffisances au niveau de l'exploitation et de l'entretien de l'équipement ou des installations. D'autres hauts gradés militaires nous ont dit que lorsque ce comité aura émis ses recommandations et lorsqu'on aura établi des priorités, il va falloir qu'on injecte plus de fonds pour s'assurer que l'armée, l'aviation et la marine sont en mesure de faire ce qu'on leur a demandé de faire au Canada et à l'étranger.

Est-ce que vous en êtes d'accord avec cette observation?

Gén J.M.G. Baril: Mais c'est évident que si nous allons faire un changement important au niveau de la qualité de vie de nos membres, il y aura des coûts. J'espère certainement que l'argent ou que les ressources nécessaires pour s'occuper de notre personnel proviennent de fonds ajoutés à la base, à ce que ça nous coûte pour notre personnel, tout comme une augmentation salariale devrait provenir du fonds central.

J'ai bonne confiance que cela proviendra des fonds centraux. Sinon, il faudrait examiner la possibilité que vous venez d'évoquer.

M. David Pratt: Pour ce qui est de colmater les brèches dans les digues juste pour essayer de garder...

Gén J.M.G. Baril: Eh bien, nous essayons d'optimiser chaque dollar. C'est cela que nous essayons de faire. Nous essayons d'en avoir le plus pour notre argent.

De ma perspective, je ne suis pas disposé à compromettre la qualité de vie des hommes et des femmes dans le service.

M. David Pratt: Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. David Pratt: L'autre question que j'aimerais poser, général Baril, concerne l'affirmation que vous faites à la dernière page de votre mémoire, le fait que «Le seul défi à relever est le suivant: sensibiliser l'opinion publique aux besoins des militaires».

Pour revenir au témoignage du Col Calvin hier, il semblerait, de toute évidence, pour une personne comme moi, que les militaires ont vraiment fait un travail affreux pour faire passer le message concernant l'enclave de Medak, et tout le travail qui a été fait là-bas.

Il me semble que si vous voulez encourager l'appui du public pour le travail fait par les militaires et l'importance de leur rôle, que vous devriez pouvoir raconter ces faits en temps opportun et non plusieurs années après coup, comme c'était le cas pour cet événement.

Seriez-vous prêt à admettre que les forces armées, en général, n'ont pas très bien réussi à faire passer le message—et je sais que la question de la Somalie joue évidemment un rôle ici?

• 1725

Gén J.M.G. Baril: Je crois que vous l'avez bien dit; cette opération s'est passée tout de suite après la Somalie, lorsque les militaires essayaient de savoir où tout cela allait mener.

On a cherché à éviter la publicité pendant plusieurs années, mais je crois que nous sortons de l'ombre, et ce d'une façon définitive. Vous nous avez vus parce qu'on nous a appelés, mais vous nous avez vus. Nous ne sommes pas timides. Nous n'avons pas honte. Nous sommes assez fiers de vous présenter tout aspect que la population canadienne veut bien voir—notre façon de mener les combats, notre entraînement, nos loisirs. Nous sommes disponibles. Vous allez nous voir davantage, cet été, à de nombreuses reprises dans tout le pays. Donc, nous nous présentons.

Il est malheureux que ces événements n'ont pas pu être appréciés et reconnus à l'époque, mais le chapitre n'est pas encore terminé. J'espère que les autres réussites seront reconnues plus rapidement. Je donne toujours des médailles pour la Somalie.

M. David Pratt: C'est toutes mes questions, merci.

Le président: Merci, monsieur Pratt.

Cela met fin à la séance d'aujourd'hui, général. Je sais que vous allez revenir.

S'il y en a parmi vous qui ont d'autres questions, je sais que le général doit revenir jeudi matin, alors vous pouvez garder les questions pour cette réunion. Je suis certain qu'il se fera un plaisir de répondre à vos questions.

Encore une fois, j'aimerais vous remercier tous les trois d'être venus cet après-midi.

La séance est levée.