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PRHA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 9 mars 1999

• 1109

[Traduction]

Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): La séance est ouverte. Nous ne sommes pas ici pour discuter de questions relatives à la télévision.

Chers collègues, nous commençons aujourd'hui à nous pencher sur le mandat que nous a confié la Chambre des communes en date du mercredi 17 février 1999 et du jeudi 18 février 1999, relativement au fait que M. Pankiw, député de Saskatoon-Humboldt, a été malmené et relativement aux piquets de grève établis pour gêner l'accès à l'enceinte parlementaire.

Toutefois, avant de passer à notre témoin, je vous dresserai un tableau du déroulement prévu de nos travaux. Mais, d'abord, permettez-vous à Lynn Myers, le président de notre Sous-comité des affaires émanant des députés, de déposer son rapport? Cela vous convient-il?

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Tout à fait.

Le président: Très bien.

Lynn, à vous, je vous en prie.

• 1110

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai l'honneur de déposer le troisième rapport du Sous-comité des affaires émanant des députés. Il porte en particulier sur les échanges de positions. Je pense qu'à la fin de la séance la greffière distribuera ces documents.

Je vais vous lire les deux motions. La première prévoit que le Règlement soit modifié afin de limiter les députés à au plus une demande d'échange pour chaque affaire inscrite à leur nom dans l'ordre de priorité, à moins qu'en raison d'événements survenus à la Chambre un changement n'ait été apporté dans les cinq jours de séance précédant la date prévue de l'étude de cette affaire.

La deuxième motion prévoit que le Règlement soit modifié de manière à permettre au Président d'organiser au nom des députés un échange de la deuxième ou de la troisième heure de débat sur une affaire votable lorsqu'un échange est demandé.

Ces motions ont été proposées au comité et appuyées à l'unanimité. Je pense que cela régularise le processus et assure qu'il soit équitable pour tous.

Je dépose donc ce rapport.

J'ai trois autres questions à aborder, et j'aimerais en traiter.

Le président: Quelles sont ces trois questions? Sont-elles extrêmement brèves? Lynn, mon intention est de vous permettre de le déposer; nous allons donc le recevoir et, ensuite, nous allons passer aux travaux prévus pour aujourd'hui.

M. Lynn Myers: Je serai donc très succinct. Le sous-comité est également parvenu à un consensus relativement à un rapport qui avait été déposé le 26 mai 1998, sur la réduction des critères utilisés pour la sélection du caractère votable des projets de loi d'initiative parlementaire. Comme vous le savez, nous avons 11 critères actuellement, et nous voulons les faire passer aux cinq critères qui figuraient dans le rapport du 26 mai 1998. Le comité tient à souligner cela, à appuyer ces critères, et nous demandons au comité plénier quelle est la situation relative à ce rapport et quand nous pouvons nous attendre à connaître ses réactions.

Troisièmement, nous avons tenu la table ronde sur les affaires d'initiative parlementaire le 18 novembre dernier. Nous avons un rapport, rédigé par M. Robertson, qui donne l'idée de ce qui s'est passé au cours de cette excellente réunion. Ce rapport va être distribué ici et présenté à tous les députés de la Chambre des communes; en ce moment, nous surveillons avec beaucoup d'attention la façon dont se déroulent les choses.

Enfin, il y aura un tirage au sort jeudi, à 13 h 15, dans la salle 139-nord.

Le président: Très bien, cela signifie que les membres du comité ont maintenant reçu la documentation, y jetteront un coup d'oeil et en feront l'étude ultérieurement.

Merci beaucoup. Au nom du comité, merci de poursuivre vos travaux sur les affaires émanant des députés. Cela est d'une très grande importance.

Chers collègues, permettez-moi de revenir à la question à l'ordre du jour; nous sommes ici aujourd'hui, vous vous en souviendrez, pour écouter Mme Diane Davidson, lui poser éventuellement des questions, afin d'obtenir conseil sur cette question de privilège touchant la Chambre des communes.

Demain, nous recevons M. Joseph Maingot encore une fois—dans le même but, mais dans une perspective plus générale, je crois. Diane est avocate générale des services juridiques de la Chambre des communes, et M. Maingot est une sorte de gourou sur ces questions. Ensuite, jeudi, nous passons à l'examen du Budget principal des dépenses de la Chambre des communes; mardi, nous convoquons les deux collègues concernés par les renvois à notre comité; ensuite, mercredi, nous convoquons des représentants de l'AFPC. Voilà donc ce qui nous attend.

Diane, nous tenons à vous souhaiter la bienvenue. Nous vous savons gré d'avoir pris le temps de venir nous parler; je suis sûr que les membres du comité vous écouteront avec intérêt.

Chers collègues, je vous rappelle que nous avons également la note d'information de Jamie Robertson.

Mme Diane Davidson (avocate générale, Services juridiques, Chambre des communes): Merci, monsieur le président; bonjour, mesdames et messieurs.

Comme vous le savez tous, et comme le président vient de le dire, l'ordre de renvoi de la Chambre à ce comité porte sur les piquets de grève qui ont été dressés le 17 février, gênant l'accès des députés et de leur personnel à la colline du Parlement et aux édifices parlementaires.

Dans les deux décisions qu'il a rendues, le président de la Chambre a déclaré qu'il existait des présomptions suffisantes d'outrage à la Chambre des communes. Il a convenu du fait que les députés en question s'étaient vus empêchés, de diverses manières et à divers degrés, de s'acquitter de leurs fonctions du fait qu'on leur refusait accès à l'enceinte parlementaire, et du fait qu'il y avait, dès lors, présomption suffisante d'outrage au Parlement. Le président a immédiatement rendu sa décision au sujet de l'allégation portant sur l'utilisation de la force pour intimider un député et l'empêcher d'accéder à son bureau. Après examen des faits présentés par d'autres députés, et notamment du fait que les grévistes avaient rendu difficile à un député d'accéder à son bureau en installant des piquets de grève à l'entrée de la colline du Parlement ou avait nui au fonctionnement habituel des bureaux de deux autres députés en refusant aux députés en question et à leur personnel d'accéder auxdits bureaux, le président a également statué que les allégations étaient assez graves pour qu'il estime qu'il y a présomption suffisante d'outrage à la Chambre.

• 1115

On m'a demandé, en ma qualité d'avocate générale de la Chambre des communes, de donner des conseils au comité sur son rôle et ses pouvoirs, ainsi que certaines opinions sur d'autres questions en cause.

Tout d'abord, je voudrais faire quelques brèves observations sur le rôle et les pouvoirs du comité. Ensuite je traiterai d'autres questions de droit soulevées par cette affaire. En raison du lien qui existe entre les deux ordonnances, je crois qu'il serait possible que le comité examine les deux questions en même temps.

Le rôle du comité est de décider, après examen des faits dans les deux cas, s'il y a eu outrage au Parlement. Essentiellement, le comité doit décider si les actes des grévistes de l'AFPC ont constitué un obstacle placé devant les députés et une manifestation de mépris à l'endroit de l'autorité de la Chambre des communes de nature suffisante pour qu'il y ait outrage au Parlement. Le comité doit également décider si le droit de libre accès à la Chambre est non seulement accordé aux députés et aux fonctionnaires de la Chambre, mais s'étend également à toute autre personne qui travaille dans l'enceinte de la Chambre, y compris le personnel des députés.

Si, après examen des faits, le comité statue qu'il y a eu outrage au Parlement, il envoie un rapport à la Chambre contenant les réparations recommandées, les mesures disciplinaires ou des recommandations et directives générales pour empêcher que des incidents similaires ne se produisent à l'avenir. En fait, la Chambre jouit d'une grande latitude pour ce qui est d'exercer son autorité et de faire respecter sa dignité par l'utilisation de son pouvoir de décréter l'outrage au Parlement. L'existence de ce pouvoir permet à la Chambre de discipliner toute personne jugée coupable de mauvaise conduite à la Chambre ou dans un comité.

Toutefois, le comité devrait noter que l'outrage au Parlement ne se limite pas à la mauvaise conduite pendant les délibérations parlementaires ni à l'enceinte parlementaire. Cela inclut tout acte qui, directement ou indirectement, tend à empêcher la Chambre des communes ou ses députés de s'acquitter de leurs fonctions.

La définition de «outrage au Parlement» d'Erskine May se lit comme suit:

    [...] tout acte ou toute omission qui empêche l'une ou l'autre Chambre de s'acquitter de ses fonctions, ou qui empêche un des membres ou des fonctionnaires de l'une ou l'autre des deux Chambres de s'acquitter de ses fonctions; tout acte ou toute omission qui pourrait, directement ou indirectement, avoir des répercussions qui pourraient être traitées comme outrage au Parlement même s'il n'y a pas vraiment de précédent à cet égard. Il est donc impossible de présenter une liste de tous ces actes qu'on pourrait interpréter comme outrages au Parlement; toute sanction à prendre dans ces circonstances découle donc d'un pouvoir discrétionnaire.

L'atteinte au privilège associée à l'entrave et à l'ingérence, au fait d'essayer d'intimider ou de bousculer un membre qui cherche à s'acquitter de ses fonctions s'inspire du droit fondamental de la Chambre de bénéficier de la présence et des services de ses membres. La Loi sur le privilège prévoit donc que tout acte ou ingérence vise les fonctions parlementaires et législatives, et non pas le travail que le député fait pour sa circonscription électorale.

La Loi sur le privilège indique également clairement qu'il y a atteinte au privilège si on empêche les députés et les fonctionnaires de la Chambre d'accéder librement à l'enceinte du Parlement. L'enceinte désigne les endroits où se fait l'administration du pays et où l'autorité législative joue son rôle au sein de notre système politique. L'enceinte inclut, sans se limiter, la partie où se trouvent la Chambre ou les comités et les autres endroits où se déroulent des débats parlementaires. Les immeubles et locaux dont est responsable le président afin d'assurer que les membres peuvent s'acquitter de leurs responsabilités parlementaires sans ingérence ont par tradition été jugés partie intégrante de l'enceinte du Parlement. Dans Maingot on définit l'enceinte du Parlement comme l'édifice du Centre où se trouvent la Chambre et les salles des comités, la Bibliothèque du Parlement ainsi que tous les autres bâtiments ou locaux sur lesquels la Chambre des communes exerce son contrôle. Aujourd'hui cela comprend l'édifice de l'Ouest, l'édifice de la Confédération, l'édifice de l'Est, l'édifice Victoria, l'édifice Wellington et la majeure partie de l'immeuble La Promenade.

Le Règlement prévoit que le sergent d'armes maintient l'ordre dans les tribunes, corridors, couloirs et autres endroits. Cette responsabilité exclusive sur l'enceinte du Parlement laisse entendre que les services de sécurité doivent prendre les mesures qui s'imposent pour protéger les édifices, et donc demander l'aide de la GRC ou de la police locale pour assurer l'application des dispositions de droit pénal ou de toute autre mesure législative dans l'enceinte. L'aide des forces policières lors d'incidents dans l'enceinte parlementaire est souvent nécessaire lorsqu'on envisage d'intenter des poursuites pour intrusion, lorsqu'il existe une menace grave ou lorsqu'il existe un problème de sécurité particulier.

• 1120

Les terrains de la colline du Parlement ne font pas partie de l'enceinte; ainsi, c'est la force policière fédérale, soit la GRC, qui est responsable de la protection des terrains de la colline du Parlement. La GRC est responsable de la protection du terrain de la colline du Parlement, puisqu'il s'agit là d'une propriété de l'État. La colline du Parlement désigne en fait les terrains situés du côté nord de la rue Wellington.

La GRC est administrée par le commissaire de la GRC, qui relève du solliciteur général et qui doit rendre des comptes pour la colline du Parlement au gouverneur en conseil et au Parlement. Il importe de noter que le rôle de la GRC n'inclurait pas la protection des terrains entourant d'autres édifices parlementaires qui ne se trouvent pas sur des propriétés de la Couronne. Les forces policières locales seraient responsables de l'application de la loi devant l'édifice Wellington, l'édifice La Promenade, l'édifice Victoria et les autres édifices situés du côté sud de la rue Wellington.

Il est intéressant de noter qu'au Royaume-Uni, au début de chaque session, les deux Chambres ordonnent que pendant la session le commissaire de police de la métropole assure que les rues menant au Parlement sont libres de circulation afin que rien n'empêche les députés ou les lords de se rendre à la Chambre. Ce décret ne touche pas les rues autour des édifices du Parlement, mais facilite l'accès sans entrave ou ingérence des membres qui veulent se rendre au Parlement.

J'aimerais rappeler qu'il n'appartient pas à votre comité de déterminer s'il y a eu infraction au droit pénal ou civil le 17 février. Dans le cadre de notre système constitutionnel, seuls les tribunaux peuvent déterminer s'il y a eu infraction à la loi ou s'il y aura injonction dans un cas particulier. Cependant, il est également évident que seule la Chambre peut déterminer s'il y a eu outrage à la Chambre des communes. Les tribunaux ont habituellement accepté la décision de la Chambre lorsque cette dernière a imposé des sanctions dans des cas d'outrage ou d'atteinte et ont jugé qu'il était parfaitement raisonnable que les institutions parlementaires prennent les mesures qui s'imposent dans de telles circonstances.

Le comité ne peut peut-être pas se prononcer sur le caractère légal des incidents qui ont eu lieu le 17 février ou déterminer si le comportement des grévistes représente une infraction au droit civil ou pénal, mais il serait peut-être utile au comité de mieux comprendre le cadre juridique des relations de travail et de mieux comprendre la nature de la grève des membres de l'Alliance de la fonction publique. Cela permettra peut-être à la Chambre d'éviter de tels incidents à l'avenir.

Une atteinte au privilège ou un cas d'outrage peut être puni par la Chambre en fonction du caractère sérieux de l'infraction. Par le passé, dans les cas plus graves, la Chambre a pris des mesures allant de l'expulsion des individus coupables à leur incarcération pendant une période ne dépassant pas la durée de la session. Dans les circonstances normales la Chambre a plutôt imposé une série de sanctions pour des infractions moins graves, comme l'exclusion de l'enceinte du Parlement, la censure, la réprimande, et même dans certains cas on demande de présenter des excuses par écrit ou en public.

À mon avis, après avoir étudié la jurisprudence dans ce domaine, la Chambre n'a pas actuellement le pouvoir d'imposer des amendes, car ce pouvoir n'existe pas clairement au Royaume-Uni et parce que l'article 18 de la Constitution limite les privilèges, immunités et pouvoirs parlementaires à ceux qui sont possédés et exercés au Royaume-Uni. Le pouvoir d'imposer des amendes pourrait être inclus si l'on modifiait la Loi constitutionnelle de 1867.

Cependant, rien n'empêche la Chambre d'étudier une affaire d'atteinte au privilège même si la question est à l'étude devant les tribunaux pour infraction présumée au droit pénal ou civil. Je dois cependant ajouter que la pratique veut que le Parlement attende qu'un tribunal se prononce sur une cause en litige avant de se prononcer lui-même. Ces restrictions que s'impose la Chambre sont tout particulièrement respectées lorsqu'il s'agit d'affaires pénales; ainsi on n'étudie pas les questions dont ont été saisis les tribunaux, de crainte de causer un préjudice aux prévenus ou d'influencer les tribunaux.

• 1125

[Français]

Je voudrais maintenant me pencher sur les droits d'enquête du comité lorsqu'on lui renvoie une question d'outrage. Les vastes pouvoirs dévolus à un comité parlementaire n'étant pas très bien compris, ils ne sont pas toujours respectés. Jetons un coup d'oeil sur les pouvoirs des comités permanents qui sont énoncés au paragraphe 108 du Règlement de la Chambre des communes. Il y est prévu entre autres que les comités sont autorisés à convoquer des personnes et à exiger la production de documents et de dossiers. La formulation ne fait aucune distinction entre les différents types de documents, ni entre les diverses catégories de témoins.

Cela signifie, bien entendu, qu'un comité dispose de pouvoirs pratiquement illimités pour forcer des témoins à comparaître et ordonner la production de documents, à condition que sa demande soit reliée à un sujet du ressort du Parlement et qu'elle soit dans les limites de son propre ordre de renvoi.

Les obligations et les droits des témoins se résument assez facilement. Quand un comité décide qu'il serait opportun d'entendre quelqu'un, il peut charger son greffier d'inviter la personne à comparaître ou, au besoin, adopter une motion ordonnant à cette personne de venir témoigner devant lui.

Un témoin peut être tenu de prêter serment ou de faire une affirmation solennelle, mais on le fait plutôt rarement, car mentir, induire en erreur ou donner un faux témoignage constitue nettement un outrage à la Chambre des communes et une atteinte à ses privilèges, même s'il n'y a pas eu d'assermentation. Cependant, on pourrait soutenir que dans certains cas, les témoins chercheront à s'abriter derrière l'immunité qui les protège contre l'usage de leur déposition verbale ou écrite dans une procédure ultérieure. Le problème serait réglé si les témoins étaient assermentés puisque toute déclaration fausse ou diffamatoire de leur part les rendrait susceptibles d'être accusés de parjure en vertu du Code criminel.

Lorsqu'on comparaît devant un comité parlementaire, on n'a pas automatiquement le droit d'être représenté par un avocat. Cependant, les comités étant maîtres de leur propre procédure, ils ont la latitude voulue pour autoriser un témoin à se faire accompagner par un avocat qui le conseillera et l'assistera tout au long des délibérations, surtout si un comité mène une enquête sur une affaire comportant une allégation d'inconduite.

Dans la plupart des délibérations de cette nature en comité, le rôle de l'avocat se borne à conseiller son client plutôt qu'à le représenter.

En outre, au cas où un comité parlementaire exigerait qu'un témoin livre un témoignage préjudiciable à lui-même ou à des tiers, certaines garanties constitutionnelles et juridiques sont prévues. Tout d'abord, il existe des protections dans le droit parlementaire. Un témoin comparaissant devant un comité jouit de la même liberté de parole qu'un député à la Chambre ou en comité. De plus, l'article 9 du Bill of Rights de 1689 empêche les tribunaux de faire enquête sur les délibérations de la Chambre ou de ses comités.

Selon certains auteurs, toutefois, lorsqu'un comité a été chargé d'examiner une question qui pourrait ultimement avoir une incidence sur les droits d'un individu, par exemple entraîner son emprisonnement pour outrage, ce qui serait rare, il serait préférable qu'il mène ses délibérations en s'inspirant des règles de justice naturelle. L'équité procédurale, dont s'assurent généralement les comités depuis des années, veut que les témoins reçoivent un préavis suffisant de leur comparution, qu'ils en soient informés et qu'ils soient informés du mandat du comité et mis au courant de tous les détails possibles concernant la nature du témoignage que recherche le comité.

Qu'arrive-t-il si un comité est aux prises avec un témoin récalcitrant ou si l'on refuse de lui remettre un document dont les députés estiment avoir besoin pour faire progresser leur enquête? Il commence par adopter une motion ordonnant la production des renseignements requis ou la comparution du témoin, puis il fait rapport du refus à la Chambre. Comme les comités ne sont pas investis du pouvoir de sanction pour outrage, ce sont les Chambres elles-mêmes qui devront décider des mesures à prendre. Selon Erskine May, la Chambre pourrait contraindre un témoin à produire les documents en sa possession même s'ils se trouvent, par exemple, sous la responsabilité d'un client qui lui a demandé de ne pas les communiquer sans son autorisation expresse. Il faut toutefois signaler que cela s'est rarement produit dans de telles circonstances.

[Traduction]

J'aimerais passer maintenant à quelques questions qui éclaireront peut-être le comité dans le cadre de son étude.

Le comité voudra sans aucun doute s'assurer dans son rapport à la Chambre qu'il existe des mesures administratives et sécuritaires appropriées pour éviter ce genre d'incidents à l'avenir. Il voudra également sans aucun doute se pencher sur les moyens légaux dont disposent les forces de sécurité qui ont pour mandat d'assurer que les parlementaires et les fonctionnaires du Parlement ont libre accès au Parlement.

• 1130

Le Code criminel prévoit certaines protections juridiques pour les cas où on a cherché à intimider le Parlement ou à commettre d'autres infractions, comme participer à un attroupement illégal, occasionner une nuisance, causer du désordre ou des méfaits. Vous voudrez peut-être avoir recours à ces dispositions. Il est également possible d'obtenir une injonction lorsqu'on juge qu'il pourrait y avoir un incident grave ou qu'un événement pourrait sérieusement nuire au fonctionnement du Parlement. Il serait peut- être bon de se pencher sur ces dispositions.

Le tribunal à qui on demande d'accorder une injonction étudiera les mérites du cas afin de s'assurer du bien-fondé de la requête. De plus, il déterminera si le requérant subirait un préjudice irréparable si la demande était refusée. Enfin, on déterminera laquelle des parties subirait le préjudice le plus important selon que l'on accède à la requête ou qu'on la rejette.

Par ailleurs, lorsqu'en 1996 le président de l'Assemblée législative de l'Ontario a demandé à la division générale de la Cour de l'Ontario de confirmer ses privilèges en accordant une injonction pour empêcher toute autre obstruction de la part des fonctionnaires en grève devant les édifices du Parlement à Toronto, le juge Winkler a reconnu que les députés devaient pouvoir entrer dans les édifices du Parlement et en sortir, comme c'est le cas lorsqu'il y a des piquets devant un palais de justice. Il a cité la décision du juge Dickson dans une cause devant la Cour suprême, lorsque la Cour suprême du Canada a estimé que l'effet des piquets qui interdisaient ou limitaient l'accès du public aux tribunaux, sauf avec la permission des piqueteurs, nuisait considérablement à l'administration de la justice. Le juge Winkler a donné raison au président de l'assemblée, qui affirmait que les barrières érigées autour des édifices de l'Assemblée législative de l'Ontario dans le but d'empêcher les députés et le personnel essentiel d'entrer librement dans les édifices et d'en sortir, ce qui avait pour effet d'interrompre les travaux de l'assemblée, constituaient une violation du privilège parlementaire et par conséquent un outrage aux principes fondamentaux de notre système politique. Ce sont les mots employés par le juge Winkler.

L'avocat représentant l'assemblée a argué que, comme dans le cas de cours de justice, le pouvoir législatif fait partie intégrante de notre système de gouvernement et constitue un élément clé de la règle de droit. Le juge Winkler a conclu que le fait de retarder les députés et le personnel essentiel, ou de les empêcher d'avoir accès à l'assemblée législative, portait un coup au coeur même de notre société et qu'un tel geste était inacceptable.

Au moment d'accorder l'injonction, la cour n'a pas jugé nécessaire de déterminer si les gestes posés par les grévistes étaient illégaux, mais elle a trouvé suffisant d'établir qu'une prétention prima facie d'outrage au privilège parlementaire avait été établie et qu'un préjudice irréparable s'ensuivrait si les institutions parlementaires n'étaient pas pleinement opérationnelles.

Enfin, comme on demande au comité de se prononcer sur la légalité des mesures prises par les grévistes, il importera que le comité détermine si les grévistes exerçaient un droit légal dans le contexte d'un conflit de travail. Même si le piquetage paisible constitue une forme d'expression protégée par l'article 2b) de la Charte, les tribunaux, y compris la Cour suprême, ont toujours estimé que l'accès sans entrave aux tribunaux avait préséance sur un droit ou une liberté protégée par la Constitution, et qu'une ligne de piquetage dressée devant un tribunal avait pour effet d'entraver l'accès à ces lieux.

De même, selon moi, comme le prouve l'injonction accordée par la cour dans la cause de l'Assemblée législative de l'Ontario, l'accès sans entrave au Parlement aurait préséance sur les droits et la liberté de parole prévus dans la Charte. Il faut que le comité sache que c'est afin d'assurer la protection des droits légaux et constitutionnels des députés et des citoyens du Canada qui les ont élus que les employés de la Chambre des communes, du Sénat et de la Bibliothèque du Parlement n'ont pas le droit de grève. En promulguant des lois régissant les relations de travail avec les employés parlementaires, le Parlement était conscient que le droit de grève nuirait probablement à son fonctionnement efficace et que les intérêts particuliers des syndicats qui représentent ses propres employés ne pouvaient avoir préséance sur l'intérêt public dans le fonctionnement du Parlement.

• 1135

Dans ce cas, même si la grève des employés de l'AFPC est légale, la loi ne reconnaît pas nécessairement aux grévistes le droit d'installer des piquets devant les édifices du Parlement, non seulement du point de vue du droit parlementaire, mais aussi strictement du point de vue du droit du travail. La Chambre des communes, en tant qu'employeur distinct, n'est pas partie au conflit entre l'alliance et le gouvernement du Canada. La Chambre est un employeur distinct; les conditions d'emploi et les conflits n'ont rien à voir avec la Chambre.

Cela met fin à mon exposé. Je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions.

[Français]

J'aurai le plaisir de tenter de répondre à vos questions. Merci.

Le président: Diane, je vous remercie beaucoup. Votre présentation a été très intéressante.

[Traduction]

Avant de passer à la liste, nous avons la décision Winkler sous les yeux. Je propose que Jamie fasse un résumé de la situation à Queen's Park, et nous allons le distribuer.

Deuxièmement, Diane, au sujet de l'emploi du terme molestation, dans cet ordre de renvoi, je sais que c'est peut-être un terme usuel en droit, mais en anglais il a aujourd'hui une forte connotation. Je crois comprendre qu'il signifie dans ce cas quelque chose de très précis. Il semble être établi dans la jurisprudence.

Mme Diane Davidson: Oui, c'est le cas. Je crois qu'il a le sens d'empêcher physiquement un député de participer à des délibérations parlementaires. C'est très précis...

Le président: Si je moleste quelqu'un maintenant, ce terme a un sens très actuel, très précis. Dans le cas qui nous intéresse, il renvoie précisément au privilège parlementaire et à l'obstruction dont vous parlez.

Mme Diane Davidson: C'est juste.

Le président: On ne parle pas de molestation dans le sens moderne.

Mme Diane Davidson: Non, cela se limite au sens parlementaire.

Le président: D'accord.

J'ai dans l'ordre Stéphane Bergeron, Randy White, Chuck Strahl, Marlene Catterall et Lorne Nystrom.

Stéphane.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Mon intervention sera très brève, madame Davidson. Vous avez décrit plusieurs éléments que nous devons garder en tête dans cette analyse, notamment la question plus générale du privilège parlementaire. Par la suite, vous avez décrit de façon très minutieuse les responsabilités de la Chambre par rapport aux édifices parlementaires, celles de la GRC par rapport aux terrains du Parlement et celles de la police d'Ottawa par rapport aux alentours des autres édifices, qui sont du côté sud de la rue Wellington.

Est-ce que cela a une importance, sur la base du principe du privilège parlementaire, que quelqu'un empêche un parlementaire d'exercer ses fonctions, quel que soit l'endroit où se produit un tel incident? Est-ce que cela a une importance que le parlementaire soit empêché de se rendre à la Chambre pour exercer ses fonctions de parlementaire ici même? Est-ce que cela a une importance que l'incident ait lieu sur les marches de l'édifice du Centre, sur les terrains attenants, du côté nord, à l'édifice du Centre ou, du côté sud, face à l'édifice Wellington?

Mme Diane Davidson: Je crois que vous avez parfaitement raison de dire que cela n'a pas d'importance. Peu importe l'endroit, que ce soit à l'intérieur des édifices ou à l'extérieur, ou encore devant un édifice parlementaire ou l'autre, on peut commettre un outrage.

Il peut être important de tenir compte de la question de la juridiction ou de la compétence des forces policières dans un contexte où on songe à établir des mesures préventives pour assurer l'accès le plus libre possible aux édifices parlementaires en particulier.

M. Stéphane Bergeron: Mais, quant à l'étude d'une question de privilège en particulier, l'endroit n'a absolument aucune importance.

Mme Diane Davidson: Vous avez parfaitement raison.

M. Stéphane Bergeron: Merci.

[Traduction]

Le président: Randy White.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Merci, Diane, de nous avoir présenté un exposé assez exhaustif de la situation.

Je ne crois pas que les députés hésiteront à reconnaître que nous devrions défendre le droit des particuliers de s'organiser et de faire la grève. Je ne pense pas que ce soit remis en question.

• 1140

Ayant participé à bon nombre de conflits de travail moi-même, j'aimerais savoir si vous estimez, et vous en avez parlé, si ces piquets constituaient des piquets secondaires, ce qui était ma perception à l'époque. Les piquets secondaires sont essentiellement ceux qui ne sont pas dressés devant le principal lieu de travail.

Mme Diane Davidson: J'ai préparé quelques notes sur les piquets secondaires au cas où vous me poseriez la question, et j'ai la définition...

M. Randy White: Suis-je prévisible ou quoi?

Mme Diane Davidson: C'est exactement ce que vous avez dit. Les piquets secondaires sont dressés devant une tierce partie qui n'est pas visée par le conflit entre les grévistes et leur employeur. Il s'agit habituellement du piquetage d'une entreprise, syndiquée ou non, qui n'est pas en conflit de travail avec le syndicat, mais qui fait affaire avec le principal employeur qui est partie au conflit de travail, l'objectif étant d'entraîner une rupture de contrat ou de nuire aux activités de l'employeur secondaire.

Dans ce cas, comme je l'ai mentionné dans mon exposé, il existe des précédents qui laissent entendre que même les piquets secondaires qui empêcheraient les députés d'avoir accès aux édifices nuiraient au fonctionnement du pouvoir législatif de telle manière à causer un préjudice irréparable, selon les tribunaux. En particulier dans la décision de la Cour de l'Ontario, on a considéré que le piquetage était à première vue inacceptable.

M. Randy White: Dans les cas comme celui-ci, les sentiments s'échauffent de part et d'autre—chez l'employeur et chez les employés. Dans les situations de ce genre, à moins de mener une véritable enquête, et encore, il est presque impossible de savoir qui a dit quoi, dans quelle mesure ils l'ont dit, et ce genre de choses. Il me semble qu'il ne s'agit pas nécessairement d'une violation d'un privilège ou d'un outrage à qui que ce soit, mais qu'il s'agit plutôt d'établir les règles de fonctionnement pour l'avenir. Je voulais simplement avoir votre avis à ce sujet.

Mme Diane Davidson: Je crois que c'est indubitablement une bonne démarche. Comme je le disais à M. Bergeron, il est certainement justifié d'examiner les mesures de sécurité actuelles, le rôle des différentes forces policières et les mécanismes que la loi met à la disposition des députés pour assurer leur libre circulation.

M. Randy White: Un des termes qui ont été employés à la Chambre le jour où la question de privilège a été soulevée, c'est molestation, comme vous l'avez dit. Cependant, c'est un terme qui a été soufflé au député lorsqu'il a essayé de formuler sa résolution. Comme le président l'a dit, je ne crois pas que nous connaissions alors avec certitude le sens de ce terme. Je crois qu'il exprime des connotations qui ne sont pas exactes, et je n'aime pas son emploi dans ce cas.

Le président: Puis-je vous interrompre? Ce que je veux dire est important, et j'ai lu diverses notes à ce propos. Au XVIIIe siècle, il était question d'un empêchement physique; c'est de cela que l'on parlait. C'était le sens de l'expression. Et c'est toujours le sens qu'elle a dans la jurisprudence: il s'agit d'empêcher physiquement quelqu'un de passer.

J'insiste sur ce point pour les mêmes raisons que Randy. L'expression a une certaine connotation en anglais—je ne suis pas certain de ce qu'il en est en français—qui est différente aujourd'hui de ce qu'elle était au XVIIIe siècle.

Mme Diane Davidson: Je crois que cette connotation existe toujours, si vous regardez la signification du mot; il faut un contact physique ou une obstruction physique.

Le président: Si j'élève une barricade... Excusez-moi, Randy, est-ce que je peux continuer?

M. Randy White: Vous avez deux minutes.

• 1145

Le président: Si j'élève une barricade à l'occasion d'un piquet de grève, elle sera considérée comme un obstacle physique. C'est un simple exemple. J'essaie simplement de nous éloigner du sens péjoratif de molestation; c'est tout.

Mme Diane Davidson: C'est au comité de décider de la signification de l'expression dans le contexte moderne. Je reconnais avec vous qu'au départ la molestation impliquait une obstruction physique perpétrée contre les députés. Est-ce que le fait d'élever une barricade constitue davantage une obstruction, par son caractère dissuasif, en fait... Je pense qu'une ligne de piquetage a elle aussi un effet dissuasif. Celui qui voit un piquet de grève n'est pas tenté de le franchir. On comprend immédiatement qu'il signale une interdiction de passer.

Le président: Je dois redonner la parole à Randy.

Excusez-moi, Randy.

M. Randy White: Merci. J'aurai une seule question à poser, monsieur le président.

J'ai soulevé cette question de vocabulaire parce qu'à mon avis il existait ce jour-là trois formes différentes de restrictions d'accès. La première, c'est lorsque les employés en grève ont empêché par la force les députés de pénétrer dans l'édifice; ils disaient essentiellement: ne passez pas. La deuxième, c'est lorsque des policiers ont interdit l'accès des édifices à des députés. La troisième, c'est lorsque les autobus qui desservent la colline ont refusé de franchir des piquets de grève dans la rue.

Il y a donc eu en réalité trois formes différentes d'obstructions, et nous devons nous occuper des trois, et non pas d'une seule. Êtes-vous d'accord?

Mme Diane Davidson: Oui, je suis d'accord, et je crois que le comité devrait étudier conjointement ces trois formes d'outrages. Comme je l'ai dit dans mon exposé, elles varient quant au degré d'intervention et d'obstruction, mais dans les trois cas il s'agit de savoir si ces différentes formes d'obstructions constituent un outrage au Parlement.

M. Randy White: En dernier lieu, je voudrais savoir s'il existe dans la convention collective avec les employés syndiqués à l'AFPC des dispositions concernant l'endroit où ils peuvent dresser des piquets de grève et les motifs pour lesquels ils peuvent le faire. On trouve généralement un article sur les piquets de grève. J'aimerais savoir s'il y a une disposition de ce genre dans la convention collective sur les endroits où les grévistes peuvent établir des piquets de grève.

Mme Diane Davidson: Je n'ai pas étudié la convention collective de ce point de vue, mais je suppose que ces détails doivent figurer dans la loi.

Le président: Je donne ensuite successivement la parole à Chuck Strahl, à Marlene Catterall, à Lorne Nystrom et à Lynn Myers.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie pour votre excellent exposé, qui a répondu d'emblée à bon nombre de questions.

Je m'interroge encore sur diverses choses. Il me semble qu'une ligne de piquetage a pour objet d'intimider, à moins qu'il ne s'agisse d'un piquet d'information. Mais pour l'essentiel, une fois que la ligne est établie et que les policiers sont intervenus, les grévistes et les policiers conviennent que personne ne doit franchir la ligne de piquetage. Autrement dit, c'est une tactique d'intimidation. C'est le but de l'opération. Les grévistes peuvent donner de l'information, mais en l'occurrence il s'agissait non pas d'information, mais bien d'intimidation.

L'intimidation est-elle suffisante à elle seule pour qu'on puisse parler d'outrage? Ceux qui essayaient de passer... en particulier les membres du personnel, évidemment, en étaient empêchés, et ce fut également le cas de quelques députés, du moins au début. Ils ont dû revenir une demi-heure ou une heure plus tard pour essayer de passer de nouveau. Est-ce que l'existence même du piquet de grève et son caractère d'intimidation suffisent à en faire un outrage au Parlement?

Mme Diane Davidson: Devant un tribunal, certainement. Le simple fait de dresser un piquet de grève devant un tribunal serait considéré comme une intimidation, une ingérence et un outrage. C'est ce qu'indique très nettement une décision de la Cour suprême. Comme vous l'avez indiqué, une ligne de piquetage provoque chez les citoyens une réaction quasi universelle et automatique: ils savent qu'il ne faut pas passer. La cour a jugé que cela suffisait à justifier l'interdiction des lignes de piquetage devant ces bâtiments, puisqu'en fait la simple présence d'une ligne de piquetage empêche d'y accéder.

• 1150

M. Chuck Strahl: Quel recours avons-nous? Je sais que le président de la Chambre et son personnel sont chargés de la sécurité, mais ce n'est pas véritablement une atteinte à la sécurité; c'est un problème de liberté d'accès.

Si les juges décident qu'il y a intimidation et qu'on a effectivement empêché au moins quelques députés de passer, le recours consiste-t-il à obtenir une injonction pour faire enlever cette ligne de piquetage? Que peut-on faire d'autre? Est-ce qu'on peut obtenir une injonction?

Mme Diane Davidson: C'est effectivement une voie de recours.

M. Chuck Strahl: Que pourrait-on faire d'autre? Je pose cette question parce que l'Assemblée législative ontarienne a été contrainte de demander une injonction, et elle l'a obtenue. Faudrait-il faire la même chose ici si nous voulions faire enlever ces lignes de piquetage?

Mme Diane Davidson: Comme je l'ai dit, on pourrait envisager des mesures préventives, des accords préalables avec les autorités policières chargées d'assurer la protection de la colline du Parlement et de faire appliquer toutes les autres lois pertinentes dans de telles circonstances.

M. Chuck Strahl: Un certain nombre de députés se sont sentis fortement intimidés, de même que leurs adjoints, qui n'ont pas pu passer non plus. Et évidemment, le moment choisi était crucial... c'était juste au lendemain du dépôt du budget, avec tout ce que cela comporte. Les députés qui ne peuvent accéder à leurs bureaux avec leurs collaborateurs dans le brouhaha postbudgétaire en éprouvent une vive contrariété. Ils ne peuvent pas faire leur travail, c'est-à-dire réagir au budget ou faire sortir un discours de l'ordinateur de leur adjoint. Tout cela devient impossible.

Est-ce que nous pouvons décider d'inclure les adjoints des députés dans cette démarche?

Mme Diane Davidson: Oui, je le crois.

M. Chuck Strahl: Nous pouvons en décider.

Actuellement, comme vous le savez, lorsque les adjoints ne peuvent entrer dans l'immeuble, ils se promènent dans la rue et cherchent un endroit bien chauffé pour se réfugier. Les députés ont fini par passer, au prix de quelques efforts, mais les adjoints ont dû rester dehors.

En ce qui concerne mon autre question, vous avez parlé de l'outrage et de la façon dont nous pouvions y réagir. Certaines des sanctions dont vous avez parlé m'ont donné l'impression qu'elles étaient réservées aux députés, comme l'interdiction directe, la censure et diverses autres mesures. Est-ce qu'on pourrait recommander l'application des mêmes sanctions à un syndicat non affilié? Est-ce que nous pourrions interdire l'accès de la colline du Parlement aux syndiqués de l'AFPC? Ou est-ce qu'on pourrait les censurer ou leur imposer d'autres mesures?

J'ai eu l'impression que ces mesures étaient applicables non pas à un syndicat, mais à un député.

Mme Diane Davidson: Cela peut être l'expression de la réprobation de certains actes, l'expression publique de cette réprobation, accompagnée d'une demande d'excuses. La réprimande ne vise pas uniquement les députés.

M. Chuck Strahl: Bien; et aucune de ces mesures n'est punitive au même titre qu'une amende. Ce sont là tous les mots que nous pourrions employer.

Si nous le voulons, pouvons-nous aller jusqu'à dire qu'il faudrait leur imposer une amende s'ils bloquent l'accès?

Mme Diane Davidson: Comme je l'ai dit, vous n'avez pas le pouvoir d'imposer une amende. Cela exigerait un changement législatif. La Chambre devrait à la fois modifier la Constitution et légiférer pour avoir ce pouvoir.

M. Chuck Strahl: Pour m'assurer d'avoir bien compris, nous pourrions...

Mme Diane Davidson: Vous auriez le pouvoir d'emprisonner, mais ce pouvoir n'a pas été utilisé depuis 1913, et, dans le contexte moderne, je doute que le comité juge cette solution acceptable.

Le président: D'accord.

Mme Diane Davidson: Mais ce pouvoir existe. Il ne peut pas vraiment être utilisé dans ces circonstances.

Le président: D'accord. C'est au tour de Marlene Catterall, puis ce sera Lorne Nystrom, Lynn Myers, Gar Knutson et Stéphane Bergeron.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Je vous remercie de cet exposé très approfondi et très bien préparé dans lequel vous avez abordé la plupart des questions sur lesquelles nous désirions nous pencher.

Pourriez-vous m'apporter une précision? Si l'on décidait, à la fin de cette grève, qu'il y a lieu d'imposer une réprimande ou une punition quelconque, à qui incombera la responsabilité si le piquet de grève n'a pas été situé au bon endroit ou si les choses ne se sont pas déroulées de façon appropriée? Le comité devrait-il se tourner vers le syndicat ou les personnes en cause?

• 1155

Mme Diane Davidson: Je suppose que ce sera sans doute la personne qui a décidé des endroits où placer les piquets de grève. Ces décisions sont probablement prises par un responsable. Un syndicat est une organisation structurée, et si les grévistes établissent un piquet de grève à un endroit donné, c'est sans doute parce qu'on leur a demandé de le faire.

Mme Marlene Catterall: Il faudrait donc que nous nous renseignions.

Mme Diane Davidson: En effet. Ce serait la chose à faire.

Mme Marlene Catterall: Ne pourrions-nous pas voir s'il n'est pas possible de prévoir un autre accès pour les députés ou pour le personnel? Lors d'une grève antérieure, une autre entrée n'avait pas été bloquée par les piquets de grève. Devrions-nous envisager cette possibilité?

Mme Diane Davidson: C'est une possibilité, mais le comité ne devrait pas donner son approbation à ces mesures et s'abstenir de faire valoir ses privilèges dans ce genre de circonstances. Si la Chambre ne fait pas respecter ses privilèges quand les circonstances le justifient, cela pourrait lui être préjudiciable.

Mme Marlene Catterall: Le cas qui s'est produit en Ontario et dont vous avez parlé m'a beaucoup intéressée. Ce n'est pas clairement établi dans la jurisprudence, mais vous établissez certainement le parallèle entre les privilèges du Parlement et les privilèges des tribunaux. C'est sans doute une bonne comparaison. Compte tenu de cette décision, dans quelle mesure la police municipale est-elle obligée d'assurer l'accès?

Mme Diane Davidson: Étant donné cette décision, si les députés se voient interdire l'accès aux édifices parlementaires, la police se chargerait sans doute d'appliquer la loi. Si elle a des motifs raisonnables et probables de croire que la conduite des grévistes enfreint la loi, elle sera autorisée à intervenir et à porter certaines accusations.

Mme Marlene Catterall: Merci.

Le président: La parole est à Lorne Nystrom, suivi de Lynn Myers.

M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): La rigueur de cet exposé m'a vivement impressionné. Je voudrais vous poser une ou deux questions concernant un ou deux domaines différents.

Premièrement, la grève de l'Alliance de la fonction publique était une grève légale, et des employés de l'alliance travaillent à l'édifice Wellington. Même si le conflit n'est pas directement relié à la Chambre des communes, il existe un conflit entre l'employeur et les employés. J'aimerais donc que vous nous en disiez un peu plus sur les règles qui régissent ce piquet de grève.

Ces employés sont en situation de grève légale. Ce n'est pas une grève illégale. Ils ont décidé de tenir un piquet de grève devant leur lieu de travail. Mais des députés travaillent au même endroit. Pourriez-vous nous en dire davantage sur les problèmes qui peuvent se poser du fait que des députés travaillent au même endroit?

• 1200

Mme Diane Davidson: C'était exactement la même chose dans l'affaire présentée devant la Cour suprême que j'ai examinée. Les parties en cause étaient des employés du gouvernement de la Colombie-Britannique et le procureur général de la même province. Certains des employés du tribunal étaient en grève légale, ce qui n'a pas empêché le tribunal de décider qu'il n'y aurait pas de piquet de grève devant le palais de justice.

Supposons que vous ayez raison et qu'il y ait des employés de l'édifice Wellington qui soient membres du syndicat et donc en situation de grève légale. La Cour suprême a néanmoins déclaré qu'il n'était pas acceptable de tenir des piquets de grève devant les tribunaux.

Comme je l'ai mentionné, les employés du Parlement n'ont pas le droit de grève; ils n'ont même pas le droit de tenir des piquets d'information devant les édifices. Il serait un peu étrange que l'on permette la tenue d'autres piquets de grève dans certains cas alors que le Parlement a légiféré pour limiter le droit de ses employés dans ce domaine et leur a imposé un arbitrage exécutoire en cas de différend de travail.

M. Lorne Nystrom: Mais le Parlement n'est pas un tribunal.

Mme Diane Davidson: C'est tout à fait exact, ce n'est pas un tribunal. Le tribunal a examiné la position du Parlement de la même façon que s'il s'agissait d'un tribunal, dans une demande d'injonction. Compte tenu de la situation constitutionnelle de la Chambre des communes, le tribunal a dit qu'il était très facile de faire cette analogie. Il ne faut pas empêcher le fonctionnement du Parlement, tout comme on ne peut pas empêcher l'administration de la justice au profit des intérêts privés d'un syndicat particulier. L'intérêt public doit avoir préséance.

M. Lorne Nystrom: Il faudrait donc savoir comment définir le mot «empêcher». Comment peut-on déterminer si le fonctionnement est empêché? Devons-nous entendre des témoins des deux camps, les faire comparaître devant nous?

Par exemple, mon bureau est dans ce même édifice, et je peux vous raconter ce qui m'est arrivé. Lorsque je suis arrivé sur place, j'ai vu qu'il y avait un piquet de grève. J'ai rencontré le chef du piquet, qui m'a dit que les députés avaient le droit de traverser la ligne. Je pouvais traverser la ligne de piquetage pour me rendre à mon bureau sans difficulté. J'ai décidé de ne pas traverser la ligne de piquetage. Je n'avais pas l'intention de traverser cette ligne, et je ne l'ai pas fait. Je le lui ai expliqué et lui ai offert mes meilleurs voeux pour qu'il obtienne un bon contrat de travail. Il m'a répété de nouveau: «Vous pouvez y aller. Les députés peuvent passer. Nous disons aux députés qu'ils ont entièrement accès à l'édifice. Nous n'empêchons pas les députés de passer; allez-y.» Il m'a même fait signe de la main, mais j'ai refusé poliment de traverser le piquet.

C'est ce qui s'est produit dans mon cas, de même que dans le cas d'une autre députée, Angela Vautour, qui est arrivée avant ou après moi. D'autres députés relatent une situation différente.

Comment peut-on prouver qu'on leur a bloqué le passage? Est-ce leur parole contre celle des piqueteurs? Devons-nous faire un contre-interrogatoire comme devant un tribunal? Il existe une contradiction dans les réalités décrites. On m'a dit très clairement que les députés avaient le droit de passer, et j'ai des témoins qui peuvent corroborer mon expérience.

Mme Diane Davidson: Si votre comité décide de ne pas examiner ce qui s'est produit, il a le droit de le faire. Dans le cas d'un tribunal, le simple fait d'établir une ligne de piquetage devant le palais de justice était suffisant pour être considéré comme une obstruction. Le tribunal a déclaré qu'il était interdit d'établir un piquet de grève devant le palais de justice.

La question n'est pas de savoir si cela a en fait gêné le tribunal, s'il laissait passer les employés du tribunal ainsi que les fonctionnaires et le public. Le simple fait de monter un piquet de grève devant le tribunal a été considéré comme une obstruction. Ce n'est peut-être pas une analogie qui vous semble bonne dans le contexte parlementaire, et ce sera au comité de décider.

M. Lorne Nystrom: Ce serait une décision assez importante aussi. Si nous considérons la perception que l'on a des droits des citoyens, est-ce que nous sommes tellement spéciaux et tellement au-dessus de la loi pour nous considérer comme un tribunal? Cela s'est passé en dehors de l'enceinte parlementaire, sur le trottoir devant un édifice parlementaire, si je ne m'abuse. La police était là. Je ne pense pas que ce soit aussi évident, du fait du lieu où cela s'est produit. D'autre part, on ne semble pas s'entendre sur les faits. Je sais que les piqueteurs et l'alliance ont des témoins qui contestent les faits rapportés par les deux députés qui ont soulevé la question. Je me demande simplement comment nous pouvons procéder.

• 1205

Le président: Puis-je essayer de faire suite à la question de Lorne.

À propos du tribunal, pour notre gouverne, de façon plus abstraite, Diane, si l'on vous interrogeait sur cette analogie entre le tribunal et la Chambre des communes et que l'on ne s'occupait pas de cette situation, vous estimez que c'est plus qu'une analogie, qu'en fait la Chambre des communes est une forme de tribunal. Est-ce exagéré?

Mme Diane Davidson: Ma foi, c'est certainement une entité constitutionnelle équivalente par son importance et son pouvoir. Dans notre Constitution, il y a le pouvoir judiciaire, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire doivent être en mesure de fonctionner pleinement, à mon avis, et c'est une protection qu'il faut garantir. Il faut veiller à ce que le pouvoir législatif ait toutes les protections nécessaires pour fonctionner. Que vous vouliez appliquer ou non les mêmes restrictions que les tribunaux, c'est à la Chambre de décider, mais je puis vous dire que le tribunal a tout de suite fait la comparaison, en invoquant le droit et la Constitution, et a déclaré qu'à son avis cette analogie était tout à fait appropriée, et a ainsi accordé l'injonction dans le contexte particulier de la grève des employés du secteur public qui voulaient faire du piquetage devant l'Assemblée législative de l'Ontario. Certes, c'était une grève massive; il y avait des démonstrations massives devant les édifices, et les députés avaient beaucoup de mal à accéder auxdits édifices.

C'est peut-être une question de degré.

Le président: Lorne Nystrom, brièvement.

M. Lorne Nystrom: J'ai un peu de mal à faire la distinction. Qu'entend-on quand on parle d'«empêcher», de «gêner»? Si on ne laisse pas entrer un député dans une certaine enceinte, c'est une chose, mais qu'en est-il du personnel? Qu'en est-il d'autre chose qui pourrait me gêner dans mes relations avec mes électeurs? Il y a une grève des taxis; je ne peux arriver à l'aéroport. Il y a une grève des transports aériens; je ne peux rentrer dans ma circonscription. Il y a des tas de choses qu'on pourrait imaginer. Où doit-on faire la distinction quand on commence sur cette voie? Les choses ont changé par rapport à il y a 100 ans.

Mme Diane Davidson: Je crois que quand on parle de l'enceinte parlementaire, il est très facile de savoir ce que cela représente. Les députés essayaient d'entrer dans la cité parlementaire, dans ce cas particulier, et on a tenté de les en empêcher. Dans certains cas, il semble que l'on ait fait obstacle lorsqu'ils ont voulu accéder à l'enceinte.

M. Lorne Nystrom: Vous dites qu'il semble qu'on leur ait opposé certains obstacles. Avant, vous disiez qu'on leur en avait opposé. Est-ce que nous savons s'il y a vraiment eu obstacle?

Mme Diane Davidson: Ce sont les allégations et les éléments prima facie...

Le président: Lorne, je crois que nous nous écartons un peu de la question. Diane est ici non pas comme témoin, mais comme expert, ou quelque chose de ce genre. Nous n'avons pas à lui demander son avis personnel. J'ai essayé d'en finir avec votre question.

Brièvement, Randy White.

M. Randy White: Monsieur le président, Lorne semble partir du principe qu'il ne s'agit là que de deux personnes. Comme je le disais tout à l'heure, il y a des autobus qui ne pouvaient venir; il y avait des policiers qui disaient qu'il serait préférable de ne pas approcher. Il s'agit là d'une situation beaucoup plus grave que ce qu'il ne semble vouloir laisser entendre.

Le président: D'accord.

Lorne, peut-on continuer? Nous avons du temps, nous avons demain, etc. Passons maintenant à Lynn Myers, Gar Knutson et Stéphane Bergeron.

M. Lynn Myers: Merci beaucoup, monsieur le président.

Je voulais, madame Davidson, vous dire qu'à mon avis votre exposé était excellent, car c'est une question très complexe.

Vous nous avez parlé de la cité parlementaire. J'aimerais savoir si le terme est élastique ou non. Jusqu'où cela peut-il aller? Est-ce que cela peut aller jusqu'aux bureaux du personnel, par exemple? Est-ce cela peut aller jusqu'aux bureaux des groupes parlementaires? Est-ce que cela peut aller jusqu'à d'autres immeubles auxquels nous ne pensons pas forcément parce que théoriquement ou historiquement ils ne font pas partie de la cité parlementaire?

Mme Diane Davidson: La cité est définie de deux façons. Tout d'abord, c'est là où se déroulent les délibérations du Parlement. C'est à mon avis la définition facile que l'on peut en donner. Le Parlement mène ses délibérations à la Chambre et en comités. C'est très clair. C'est cela la cité parlementaire. D'autre part, cette enceinte est définie géographiquement. Ce sont les immeubles ou les parties d'immeubles sur lesquels le président de la Chambre a compétence, sur lesquels le sergent d'armes exerce ses responsabilités de protection, si vous voulez. La cité parlementaire inclurait ainsi certainement les immeubles où, par exemple, se trouvent les bureaux des députés et où se déroulent les délibérations parlementaires. Il est facile de savoir quels sont ces immeubles. Comme je le disais, cela inclut les immeubles qui se trouvent sur la colline ainsi que ceux qui sont au sud de la rue Wellington où il y a des bureaux de députés.

• 1210

M. Lynn Myers: Le privilège parlementaire s'applique-t-il également aux réunions des groupes parlementaires?

Mme Diane Davidson: Je crois que les réunions des groupes parlementaires se déroulent habituellement sur la colline, si bien que ces immeubles sont considérés comme appartenant à la cité parlementaire. Tout ce qui se déroule dans l'enceinte tombe dans cette catégorie. Les réunions des groupes parlementaires seraient ainsi protégées.

M. Lynn Myers: En répondant à M. Strahl à propos du personnel, vous avez indiqué qu'il appartiendrait à ce comité de décider si nous voulons ou non les inclure—du moins c'est ce que je crois vous avoir entendu dire.

Mme Diane Davidson: Quand il a décidé d'accorder une injonction, le tribunal ne s'est pas limité à dire que les députés seulement étaient gênés dans leur travail et que c'était seulement cela qui représentait une atteinte au privilège. Il a aussi dit que les grévistes devaient laisser passer le personnel essentiel et les députés. Il a été jusqu'à inclure le personnel.

J'ai personnellement du mal à imaginer comment un député pourrait s'acquitter de ses fonctions parlementaires dans le contexte moderne sans son personnel. Seuls les députés peuvent répondre à cette question. Toutefois, essentiellement, cette protection s'applique aux députés, tout d'abord et avant tout aux députés, et le député a besoin de son personnel pour faire son travail. Il me semble donc évident que...

M. Lynn Myers: C'est à la fois la façon dont vous interprétez la loi et la recommandation que vous feriez.

Mme Diane Davidson: Je préférerais que le comité ait la possibilité d'examiner toute la question avant de conclure. Mais je crois vraiment que l'on peut dire que le personnel est essentiel aux activités d'un député.

M. Lynn Myers: Monsieur le président, c'est ma dernière question. Les piqueteurs ont de toute évidence choisi de piqueter, mais ils auraient pu aussi choisir de manifester sur la colline, n'est-ce pas?

Mme Diane Davidson: C'est exact.

M. Lynn Myers: Y a-t-il une différence?

Mme Diane Davidson: La seule différence s'ils avaient manifesté devant la colline du Parlement, c'est que cela aurait relevé d'un autre service de police. La GRC est chargée de protéger la colline parce qu'il s'agit d'une propriété de l'État. Les autres immeubles au sud de la rue Wellington relèvent de la compétence de la police d'Ottawa, de la police locale.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: J'aimerais que vous poursuiviez sur la question de M. Myers au sujet de la Cité parlementaire.

[Traduction]

Mme Diane Davidson: Mais lorsqu'il s'agit de savoir si cela gêne l'accès à l'enceinte parlementaire, peu importe que cela se passe sur la colline en tant que telle ou de l'autre côté de la rue.

M. Lynn Myers: Merci beaucoup.

Le président: Gar Knutson, et ensuite Stéphane Bergeron.

M. Gar Knutson: Merci beaucoup, monsieur le président.

Madame Davidson, je veux comme les autres vous féliciter de votre exposé.

J'entends un certain nombre de choses qui me troublent toutefois. D'une part, il me semble que, sauf amendement constitutionnel, les gens qui sont venus gêner mon accès au Parlement, qu'il s'agisse de moi ou de mon personnel, devraient s'en tirer sans réprimande aucune, puisqu'on leur demandera au mieux de présenter des excuses. J'estime que lorsque l'on enfreint la loi, on devrait s'attendre à certaines conséquences.

Cela dit, supposons pour les fins de la discussion que la police se soit comportée de façon entièrement appropriée et ait jugé qu'étant donné la foule et les circonstances, il était préférable de ne pas procéder à des arrestations. Il me semble—il est évident que nous ne demandons pas que quiconque aille en prison pour cela; ce n'est pas suffisamment grave—il me semble donc que si nous voulons nous assurer que cela ne se reproduise pas, on pourrait envisager une amende. Vous avez dit que nous ne disposons pas du pouvoir d'imposer une amende. Y a-t-il un autre pouvoir, qu'il s'agisse de la législation du travail fédérale ou provinciale, qui nous permettrait de porter plainte et de demander que l'on fasse payer une amende au syndicat?

• 1215

Mme Diane Davidson: Il faudrait que j'examine la question. Je suis désolée, je n'ai pas examiné ce point particulier. C'est possible, mais il va me falloir faire quelques recherches à ce sujet.

M. Gar Knutson: Très bien.

Le président: Stéphane Bergeron.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, j'aimerais encore une fois souligner la qualité de la présentation de Mme Davidson et surtout la qualité des réponses qu'elle nous donne. J'aimerais peut-être qu'on approfondisse la question que posait M. Nystrom il y a quelques minutes.

Vous me corrigerez si je fais erreur, madame Davidson, mais n'est-il pas vrai que la Chambre a le pouvoir de se transformer, dans des cas très spécifiques, en un genre de tribunal?

Mme Diane Davidson: Oui, tout à fait. Lors de l'étude de questions relatives à un outrage à la Chambre, la Chambre devient en quelque sorte un genre de tribunal et elle a des pouvoirs de nature pénale pour s'assurer que ses privilèges ne sont pas violés.

M. Stéphane Bergeron: D'accord. N'est-ce pas là un autre élément sur lequel le lien entre un tribunal et le Parlement peut être établi?

Mme Diane Davidson: Tout à fait. Le tribunal ne viendra pas examiner l'exercice du pouvoir de la Chambre pour punir pour outrage, tout comme la Chambre n'ira pas questionner le pouvoir d'une cour de punir pour outrage. En ce sens, les deux entités ont des pouvoirs de nature judiciaire, si je puis dire, en ce qui concerne les questions qui constituent des outrages.

M. Stéphane Bergeron: Cela aurait donc pour effet de soutenir encore davantage le jugement qui a été rendu par une cour ontarienne par rapport au cas que vous portiez à notre attention tout à l'heure.

Mme Diane Davidson: Je crois que ce cas est très certainement pertinent aux événements qui ont eu lieu.

M. Stéphane Bergeron: Dans la perspective d'agir, il y a bien sûr la prévention. Vous avez soulevé cette question tout à l'heure en insistant sur les forces policières qui sont responsables de chacun des éléments géographiques de la Cité parlementaire. On pourrait prendre des mesures de prévention, mais dans l'éventualité qu'une situation semblable survienne à nouveau et que la Chambre ait jugé qu'il s'agit d'un outrage ou d'un bris du privilège parlementaire, cette dernière aurait-elle l'autorité de faire elle-même injonction pour demander une intervention du service de sécurité ou des forces policières pour empêcher ce genre de situation de se reproduire?

Mme Diane Davidson: Comme je vous le faisais remarquer, accorder une injonction est un pouvoir qui relève des tribunaux. Je ne pense pas que la Chambre ait déjà exercé ce pouvoir. Face à ces recours extraordinaires, la Chambre n'a pas établi de procédure en matière d'injonction.

M. Stéphane Bergeron: Il n'en existe pas, mais puisqu'il a été établi dès le départ que la Chambre a, dans des cas exceptionnels, le pouvoir de se transformer en tribunal, pourrait-elle dans un cas semblable faire injonction?

Mme Diane Davidson: Dans le même ordre d'idées et peut-être pour apporter une approche qui atteindrait les mêmes fins, nous pourrions, comme vous avez commencé à le souligner, faire des arrangements avec les forces policières afin qu'elles interviennent dans l'éventualité où des événements que la Chambre juge outranciers se produiraient à nouveau. Comme je l'ai mentionné, la GRC a compétence sur la colline du Parlement. Si les circonstances étaient telles que la Chambre se voyait entravée dans l'exercice de ses fonctions, la GRC pourrait immédiatement passer à l'exécution des termes d'une entente possible.

M. Stéphane Bergeron: Je pense que vous venez de souligner ici l'éventualité la plus probable d'une entente entre les services de sécurité de la Chambre des communes et les forces policières environnantes au niveau des actions et réactions dans l'éventualité où la Chambre jugerait qu'il y a outrage.

• 1220

Poursuivons pendant quelques instants l'exercice théorique auquel je me livre actuellement. Dans le cas où les forces policières n'agiraient pas, est-ce que la Chambre, compte tenu du fait qu'elle a le pouvoir de se transformer en tribunal dans des cas exceptionnels, aurait le pouvoir de décréter une injonction?

Mme Diane Davidson: Je ne le crois pas, mais je vous donne cette réponse sous toute réserve. Je n'ai pas, à vrai dire, réfléchi à la question en ce sens-là, mais je crois qu'une injonction est un recours extraordinaire et est normalement accordée par les tribunaux. La cour suit un test très particulier et doit être convaincue de certaines choses. Je ne crois pas que la Chambre se soit jamais engagée dans ce genre d'exercice et je ne crois pas que la Chambre soit susceptible de le faire.

M. Stéphane Bergeron: Aurait-elle le pouvoir de le faire éventuellement?

Mme Diane Davidson: C'est une question qu'il faudrait étudier davantage.

[Traduction]

Le président: Bob Kilger, brièvement.

[Français]

M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Je voudrais que nous parlions brièvement des trois corps policiers qui assurent la sécurité de la Cité parlementaire. Elle est assurée à l'interne, dans les édifices de la Cité parlementaire, par nos constables des Services de sécurité de la Chambre des communes, et à l'externe, par la GRC et les forces policières municipales.

Y aurait-il intérêt à ce que nous discutions du partage des responsabilités entre ces trois corps policiers et que nous songions à y apporter des changements? En d'autres mots, est-ce qu'on pourrait concevoir que la GRC puisse assurer la sécurité dans l'édifice Wellington?

Une voix: La chicane va prendre et on devra appeler la police.

Mme Diane Davidson: Si le comité songeait à une telle possibilité, je crois qu'il faudrait modifier la loi en vue d'étendre la compétence et la juridiction de la GRC à des terrains autres que les terres de la Couronne. Je n'ai pas examiné la question sous cet angle. Il faudrait que je revoie la loi qui donne à la GRC le pouvoir d'agir et de protéger la colline du Parlement et que je puisse déterminer s'il n'y a pas d'autres aspects qui pourraient faire en sorte que son champ de compétence soit étendu.

Mais il faut faire attention parce que la compétence en matière d'administration de la justice relève des provinces. La colline du Parlement étant un terrain de la Couronne, on pourrait invoquer comme argument que c'est la police fédérale qui se soit se charger de sa protection.

Il y a plusieurs éléments qu'on doit examiner avant de se demander si la GRC peut se charger de la sécurité relative aux édifices au sud de la rue Wellington. Il faudrait sans doute que nous examinions des questions juridiques assez sérieuses avant de nous engager dans cette voie.

M. Stéphane Bergeron: Sur le plan provincial.

[Traduction]

M. Bob Kilger: Écoutez, j'accepte très volontiers ce que propose notre témoin, Mme Davidson. D'un côté, par exemple, nous disons que l'édifice Wellington fait partie de l'enceinte parlementaire, pour les questions d'accès et autres, mais lorsqu'il s'agit de la compétence de la police et de ceux à qui nous voulons confier la responsabilité de notre sécurité, nous disons: non, cela ne fait plus partie de l'enceinte.

Je me fais l'avocat du diable. Est-ce vrai ou faux? Autrement dit, l'enceinte comprend Wellington, mais, pour la police, Wellington ne fait pas partie de l'enceinte.

Mme Diane Davidson: Vous parlez des services de police à l'intérieur des bâtiments?

M. Bob Kilger: Non, à l'extérieur. Dans ce cas, il s'agit d'un incident qui s'est produit à l'extérieur. Je ne veux pas juger de l'incident lui-même.

Mme Diane Davidson: Vous avez raison, il y a deux services de police. La police fédérale lorsqu'il s'agit d'incidents se produisant sur la colline, et lorsque cela se produit au sud de la rue Wellington, c'est la police locale.

• 1225

M. Bob Kilger: D'accord. Monsieur le président, si nous pouvions un instant nous en tenir à l'enceinte. Évidemment, la définition d'enceinte ne s'applique pas... cela n'a pas le même sens pour nous parlementaires que pour les responsables de l'application de la loi. L'enceinte parlementaire ne s'étend pas à tous les immeubles où il y a des bureaux, de la même façon ou avec les mêmes droits et privilèges...

Mme Diane Davidson: Je dirais que l'accès à l'enceinte est différent, selon les services de sécurité responsables de veiller à ce que cet accès à l'enceinte parlementaire ne soit pas gêné. Mais l'enceinte elle-même n'est pas différente. L'édifice Wellington est considéré comme faisant partie de la cité parlementaire. La seule question ici est de savoir qui est responsable d'assurer l'accès à l'immeuble en question. Si votre bureau se trouve sur la colline, ce n'est pas le même service de police qui vous en assure l'accès que s'il se trouve à l'édifice Wellington. C'est exact.

M. Bob Kilger: À votre avis, est-ce qu'on peut dire, d'après la jurisprudence ou pour d'autres considérations, que l'action de la police est uniforme? Nous recherchons tous l'uniformité, et je suis sûr qu'il en va de même pour les différents corps de police. Mais quelle que soit notre recommandation, y a-t-il des obstacles à l'uniformité de l'action de la police? Ne devrions-nous pas nous préoccuper d'obtenir l'avis des corps de police?

Le président: Vous pouvez donner une réponse, mais j'ai l'impression, Bob, qu'il faudrait poser cette question à M. Cloutier lorsqu'il comparaîtra devant nous. Mais allez-y, Diane.

Mme Diane Davidson: Je suis tout à fait d'accord pour dire que M. Cloutier serait en mesure de vous répondre. Est-ce que cela peut changer quelque chose pour les députés... Par exemple, il y a des délibérations parlementaires qui se déroulent à différents endroits... quelle serait la situation idéale? Est-ce qu'il serait préférable que les bureaux des députés soient situés du côté nord de la rue Wellington, compte tenu de tous ces problèmes de sécurité? Peut-être que M. Cloutier pourra répondre à cette question.

Le président: Si vous me le permettez, Diane, je voudrais vous dire, au nom de mes collègues, que nous avons grandement apprécié votre exposé et vos réponses à nos questions. Nous vous avons interrogée sur les limites de l'enceinte parlementaire, les limites entre les différentes compétences, etc., mais en fait nous traitons ici de deux droits tout à fait fondamentaux dans notre régime démocratique. Le premier est le droit de faire grève et de dresser des piquets de grève, l'autre porte sur le privilège parlementaire. Nous avons toutes sortes de détails à régler, mais j'espère que quand nous aurons fini, nous aurons contribué à protéger ces droits. Vous nous avez aidés à le faire, et nous vous en sommes reconnaissants.

Chers collègues, avant de terminer, je voudrais vous rappeler, car je sais qu'on a tendance à l'oublier, que nous avons une séance supplémentaire demain à 15 h 30. Nous accueillerons M. Maingot. Ensuite, nous avons une réunion comme prévu jeudi prochain pour parler du budget de la Chambre des communes. La semaine prochaine, nous siégerons encore mardi. Nous avons aussi une réunion mercredi, mais mardi prochain nos collègues mentionnés dans l'ordre de renvoi vont comparaître devant nous.

Stéphane Bergeron.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, avant que nous soyons placés devant le fait accompli, pourrions-nous avoir plus de détails sur ce que signifie le terme «boisson légère»?

[Traduction]

Le président: Sur cette note, nous terminons la séance.