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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 010 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 septembre 2011

[Enregistrement électronique]

(1130)

[Traduction]

    Bienvenue à tous. Merci d'être des nôtres. Nous avons voté ce matin, nous ne nous y attendions pas. C'est la raison de notre retard et nous vous prions de nous en excuser.
    Cette séance est la dixième du Comité permanent des finances pour cette session.
    Conformément à notre ordre du jour et au paragraphe 83.1 du Règlement, nous débutons les consultations prébudgétaires de 2001 pour le budget de l'an prochain.
    Nous vous remercions tous d'être venus ce matin.
    Nous avons parmi nous, M. Marc Lavoie, professeur titulaire, Département de science économique, Université d'Ottawa; M. Douglas Porter, économiste adjoint en chef, BMO Marchés des capitaux; M. Sylvain Schetagne, économiste principal du Congrès du travail du Canada; M. Glen Hodgson, premier vice-président et économiste en chef, Conference Board du Canada; et M. Carlos Leitao, économiste en chef, Valeurs mobilières Banque Laurentienne.
    Bienvenue. Merci à tous d'être venus.
    Chaque intervenant dispose de cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire, à la suite de quoi les membres du comité poseront des questions.

[Français]

    On va commencer par M. Lavoie.
     Je dois d'abord préciser que je ne suis pas un prévisionniste. Ce que je vais vous dire repose sur mes sentiments, mon expérience et ma compréhension des lois macroéconomiques.
    Brièvement, il n'y a aucun doute dans mon esprit que nous nous dirigeons vers une récession économique ou, à tout le moins, vers une situation de croissance près de zéro. À mon avis, on va observer ce que j'appellerais la « nipponisation » de l'économie occidentale, c'est-à-dire une croissance voisine de zéro ou une croissance négative pendant plusieurs années.
    Depuis plusieurs mois, on observe que toutes les grandes agences révisent leurs prévisions de croissance économique à la baisse. En se basant sur le consensus des économistes, le ministère des Finances annonçait, dans le budget présenté au mois de mars et au mois de juin, un taux de croissance de 3 p. 100 pour cette année et l'année prochaine au Canada et aux États-Unis. Quand on lit les dernières prévisions du Fonds monétaire international, on remarque qu'on est maintenant passé de 3 p. 100 à 2 p. 100 pour le Canada, et de 3 p. 100 à 1,5 p. 100 pour les États-Unis.
    Or on sait que les prévisionnistes sont généralement encore trop optimistes lorsque l'économie est en train de dégringoler. Par exemple, comme vous le savez, la chute de Lehman Brothers a eu lieu le 15 septembre 2008. Pourtant, le 13 octobre 2008, le consensus prévisionnel, ou la prévision consensuelle, était encore que le Canada allait croître à des taux d'environ 1 p. 100 pour 2008 et 2009, alors qu'en réalité, on a eu une croissance négative de 2,5 p. 100 en 2009. Pour les États-Unis, la prévision consensuelle était que le taux de croissance serait de 0 p. 100 pour 2009. En fait, les États-Unis ont connu un taux de croissance négatif de 3,4 p. 100 en 2009.
    Or, depuis plusieurs mois, on vit une période d'incertitude très similaire à celle vécue en 2008. En effet, il y a au moins quatre ou cinq nouvelles stupéfiantes ou inquiétantes par semaine. Aux États-Unis, la reprise économique ne se fait pas vraiment. Le plan de consolidation budgétaire que veut adopter le gouvernement américain va ralentir la croissance économique, s'il ne l'a pas déjà fait. De plus, le nouveau plan de relance du président Obama a peu de chances de se réaliser. Il y a donc peu d'espoir de ce côté.
    La situation européenne dont tout le monde parle est encore plus inquiétante, en particulier la crise de la dette souveraine pour les pays de l'euro. En mai 2010, la Banque centrale européenne est intervenue en achetant pour la première fois des titres gouvernementaux, chose qu'elle s'était refusé de faire pendant les 10 premières années de son existence. On a créé un Fonds européen de stabilisation financière, mais il est clair — et il était déjà clair à ce moment-là — que c'était trop peu et trop tard. La crise en Europe me semble donc irréversible, d'autant plus que les politiciens européens pensent qu'il vaudrait mieux poursuivre des politiques de restriction budgétaire. Comme l'exemple de l'Irlande et du Royaume-Uni le démontre, ces politiques ne vont pas avoir l'effet escompté. À mon avis, il y a une crise structurelle pour la zone euro. En effet, celle-ci a été créée selon l'hypothèse qu'il n'y aurait jamais de crise et que les marchés financiers avaient toujours raison. Aujourd'hui, on sait que les marchés financiers n'ont pas toujours raison et on est en plein milieu de la crise.
    Pour conclure, le Canada ne pourra pas par magie échapper à la crise financière lorsque celle-ci va avoir lieu en Europe. Lorsqu'il va y avoir ce tremblement de terre en Europe, nous serons donc frappés par un tsunami qui va toucher toute l'Amérique du Nord, les États-Unis et le Canada.
(1135)
    Évidemment, compte tenu du commerce que nous faisons avec les États-Unis, nous allons être touchés par cette situation. Par conséquent, je suis d'avis que le gouvernement canadien doit d'ores et déjà renoncer à l'objectif d'équilibre budgétaire qu'il s'était fixé pour 2014-2015; deuxièmement, il doit renoncer aux restrictions budgétaires déjà annoncées; troisièmement, il doit mettre sur pied dès maintenant un nouveau plan de relance axé sur les infrastructures.
    Merci, monsieur Lavoie.

[Traduction]

    Nous donnons maintenant la parole à M. Porter.
    Je remercie les membres du comité de m'avoir invité à venir ici aujourd'hui.
    Depuis le début de 2011, il ne fait aucun doute que l'économie mondiale a fait face à de nombreux défis. Cela a commencé cette année avec la crise ou l'agitation politique qui secoue le Moyen-Orient et qui a entraîné une hausse des prix de l'énergie. Puis, bien sûr, ont suivi les trois catastrophes au Japon qui ont créé des problèmes au niveau de la chaîne d'approvisionnement dans le monde. Ensuite, durant l'été, nous avons connu le débat sur la limite de la dette américaine. Un débat qui a perturbé les marchés financiers de façon plus générale. Mais encore, le problème sous-jacent à tous ces défis était bien la crise continue de la dette en Europe qui menace probablement le plus les perspectives économiques internationales.
    Tous à leur façon, ces facteurs ont fait collusion pour assombrir les perspectives économiques et d'une manière ou d'une autre, ils ont ébranlé la confiance des consommateurs, des entreprises et des investisseurs.
    Nous continuons à croire que le Canada et les États-Unis enregistreront une certaine croissance, mais cette croissance sera très modeste, dans le meilleur des cas. Nous avons récemment revu à la baisse nos prévisions pour 2012 pour les PIB du Canada et des États-Unis. Une baisse de 1,5 à 2 p. 100. Ces prévisions ne sont pas très différentes de celles de la situation décevante de 2010 submergée par une multitude de problèmes. Les prévisions accusent une baisse d'un point de pourcentage par rapport à ce que nous avions prévu pour le Canada et les États-Unis aussi récemment qu'il y a quatre mois.
    Au vu d'une croissance aussi modérée, il ne suffirait que d'un seul autre choc — par exemple, une grave erreur politique qui serait commise dans l'une des principales économies ou une crise similaire à celle que nous avons vue en 2008 avec la faillite de Lehman Brothers — pour plonger l'économie dans une récession totale.
    En ce qui concerne particulièrement le Canada, au cours des cinq dernières années, nous avons été plus performants que les Américains et que la plupart de nos homologues internationaux. En moyenne, l'économie canadienne a enregistré une croissance supérieure d'environ 0,5 p. 100 à celle de l'économie américaine, je tiens à souligner que la différence se situe au niveau du pourcentage et pas de l'orientation. Il n'en reste pas moins que si les États-Unis et plus largement l'économie mondiale rencontraient de graves difficultés, le Canada serait malheureusement touché immédiatement après.
    D'ailleurs, un problème économique européen peut se transmettre à l'économie canadienne en passant par différents canaux de propagation. Il y a le canal direct des exportations. Il est vrai que l'Europe n'est pas un gros importateur de produits canadiens, mais elle importe tout de même environ 8 p. 100 de la totalité de nos exportations, ce qui n'est pas rien.
    Il faut également tenir compte du canal du marché financier. Comme nous l'avons constaté ces dernières semaines, les marchés des actions internationaux sont plus que jamais interdépendants. Chaque tendance baissière forte, même pour les actions européennes, peut avoir un effet direct sur les actions canadiennes, et ce, le même jour.
    Des interdépendances financières existent dans le secteur bancaire. Si les banques européennes rencontraient de graves difficultés, l'économie de l'Amérique du Nord pourrait en souffrir.
    Finalement, les prix des marchandises ont un effet indirect. Nous l'avons certainement constaté ces dernières semaines. Les préoccupations liées à l'économie mondiale peuvent se traduire par des prix beaucoup plus bas des marchandises. C'est quelque chose que nous avons vu très clairement ces semaines passées avec la baisse considérable des prix des marchandises. Bien évidemment, le Canada étant un producteur et exportateur important de marchandises, son économie peut également être affaiblie par une forte diminution des prix des marchandises.
    Autrement dit, même si nous faisons tout comme il faut et même si toutes nos politiques sont bonnes, nous pouvons être durement frappés par un problème qui surgirait dans l'économie mondiale.
    En outre, ainsi que nous l'avons vu ces dernières semaines, le dollar canadien est vulnérable à la baisse des prix des marchandises.
    Dans ce contexte, je dirais aux décideurs que le mot d'ordre est la prudence. Nous avons bien vu que la Banque du Canada n'a pas changé de politique monétaire depuis un an. Nous pensons que la Banque du Canada ne changera probablement pas les taux d'intérêt jusqu'à la fin de 2012. Elle restera très prudente dans ce genre de situation économique.
    En matière de politique financière, je pense qu'il est important de faire preuve de souplesse pour le moment. Je ne crois que la situation se soit détériorée au point de devoir changer de politique, mais les décideurs doivent être prudents dans ce genre de contexte qui comporte de très gros risques. Nous avons, sous nos yeux, les risques qui se manifestent dans les marchés financiers. C'est comme s'il y avait, chaque jour, un débat au sein des marchés financiers pour deviner s'il y aura une autre récession mondiale ou si, oui ou non, l'économie mondiale continuera à enregistrer une croissance modeste.
    Dans ce contexte très incertain, il me semble que la politique financière doit demeurer souple. C'est le message principal que je voudrais faire passer.
    Je vous remercie de votre attention.
(1140)
    Merci beaucoup, monsieur Porter.

[Français]

    Monsieur Schetagne, vous avez la parole.
    Au nom des 3,2 millions de membres du Congrès du travail du Canada, j'aimerais vous remercier de nous offrir l'occasion de présenter notre point de vue sur l'économie mondiale, l'économie canadienne et le prochain budget fédéral.
    On l'entend de plus en plus: des économistes qui proviennent des banques, de l'OCDE, du Fonds monétaire international et de l'OIT sont de plus en plus inquiets par rapport aux perspectives économiques des pays avancés, notamment le Canada.
    Aux États-Unis, en Europe et au Canada, on pourrait retomber dans une récession technique ou, à tout le moins, dans une période de reprise économique très lente et une période où le taux de chômage est très élevé. Pourquoi? On a déjà parlé de plusieurs raisons expliquant les problèmes de l'économie mondiale. Je vais rapidement en toucher cinq qui sont à la source des problèmes que l'on vit aujourd'hui.
    Premièrement, tout ce qui constitue des investissements gouvernementaux tire à sa fin. Ces investissements ont contribué, dans la période de reprise de 2008-2009, après la grande récession, à tout le moins à amoindrir les effets et à repartir l'économie. Malheureusement, ces investissements publics tirent à leur fin ou sont déjà terminés, comme c'est le cas au Canada. Ce qu'on constate de plus en plus, c'est un transfert des gouvernements vers des politiques d'austérité et de compressions, au lieu du maintien des investissements publics dans le but de soutenir l'économie.
    Le deuxième problème important que l'on constate aussi à l'échelle internationale, c'est bien sûr la mise à l'arrêt, souvent par l'entremise du G8, des réformes fondamentales de notre système financier qui sont nécessaires, certes, pour corriger le tir et empêcher le genre de problèmes qu'on a eus en 2008. L'absence de ces réformes fait en sorte que les grandes banques et les fonds spéculatifs continuent de spéculer sur les marchés.
    Le troisième élément qui est très important pour nous et qui explique la problématique actuelle, c'est la question de la dette des ménages qui est très élevée, notamment la dette liée au prix des maisons, soit les dettes immobilières. Comme on le sait, aux États-Unis, cela a donné lieu à une crise immobilière, tout comme ce fut le cas en Angleterre et également dans d'autres pays.
    Aujourd'hui, de plus en plus, les dettes totales des ménages font en sorte que les ménages consomment moins et, dans une situation où les gouvernements se tournent vers des politiques d'austérité, les gouvernements également contribuent moins à la croissance économique.
    Le quatrième problème que l'on a constaté est plus fondamental et on ne s'y attaque pas souvent: c'est la question des balances commerciales entre les pays. Certains pays ont des balances commerciales très positives — je pense à la Chine et à l'Allemagne — et, en raison de leurs politiques, empêchent l'augmentation des salaires ainsi que l'importation, alors qu'ils devraient importer de plus en plus de produits et services provenant de pays qui, eux, ont des balances commerciales négatives ou de hauts taux de chômage.
    De ce fait, on constate que plusieurs pays en développement dans le monde continuent à croître, notamment la Chine, mais que d'autres comme les États-Unis, le Canada et une partie de l'Europe ont de la difficulté à exporter et à ainsi repartir leur secteur manufacturier.
    Le dernier grand problème fondamental dont on ne discute pas beaucoup, c'est celui qui existait avant même la crise de 2008, c'est-à-dire l'augmentation constante des inégalités, les augmentations faramineuses des profits ainsi que des revenus des plus riches. Ces éléments, combinés à une stagnation des revenus de la classe ouvrière, créent plusieurs problèmes.
    Le principal problème, c'est que la croissance qui était en place avant 2008 venait essentiellement de la croissance de l'endettement des ménages et de bulles spéculatives, contrairement à une croissance que nous aimerions davantage fondée sur l'investissement réel dans une économie équilibrée, une économie qui crée des emplois, une économie de développement durable qui crée des investissements réels et qui augmente la productivité, laquelle est ensuite partagée relativement à des augmentations de salaire et ainsi de suite.
    Il faut donc s'attaquer à cinq grands problèmes qui sont plus fondamentaux que les simples court terme et long terme.
    Au Canada, on voit très clairement que la croissance économique ralentit très rapidement. Cette année, on a connu un premier trimestre positif, mais c'était surtout lié à l'augmentation des inventaires. Le deuxième trimestre était négatif. Probablement que le troisième trimestre sera négatif lui aussi.
    Pendant ce temps, pour ce qui est du nombre total d'emplois au Canada, on est revenu à la situation dans laquelle on était avant la grande récession. Quant au taux de chômage, il demeure élevé à 7,3 p. 100, comparativement à 6 p. 100 avant la récession. Le nombre de chômeurs est d'un quart de million plus élevé qu'il ne l'était avant la récession. Le taux de chômage chez les jeunes est deux fois celui des travailleurs de 25 à 54 ans: il se situe à 14 p. 100. Le taux de chômage réel, quand on compte ceux qui ont abandonné le marché du travail et ceux qui travaillent à temps partiel de façon involontaire, tourne autour de 11 p. 100.
    Quant à la situation du marché du travail cet été, il n'y a pas eu création d'emplois. Encore plus grave — ce sur quoi je mets l'accent —, les salaires réels ont commencé à diminuer.
(1145)
    L'enquête sur la population active montre que, pour le mois d'août, le salaire horaire moyen a augmenté de 1,4 p. 100 alors que l'inflation, elle, était au cours des mois précédents de 2,7 p. 100, 3 p. 100 et 3,7 p. 100. On constate donc une diminution du salaire réel des travailleurs. Selon nous, cette diminution risque d'avoir à court terme des impacts négatifs, notamment sur la consommation. Cette dernière était au rendez-vous lors de la crise économique et elle a contribué à maintenir notre croissance. Or, étant donné que les salaires réels sont à la baisse, on risque de voir une diminution de la consommation et, par la suite, de l'économie canadienne.
    Maintenant, que peut-on faire? On fait face à la situation suivante: pour que l'économie canadienne continue à croître, il y a essentiellement trois options. Nous pouvons augmenter nos exportations et diminuer nos importations; les compagnies peuvent investir davantage; nous pouvons investir davantage en ayant recours à l'investissement public. Comme le Canada est un pays exportateur, nous savons que l'investissement des entreprises est lié à l'exportation. Or, comme nos clients n'achètent pas nécessairement nos produits, les possibilités ne sont pas très prometteuses. Alors, que nous reste-t-il? La dernière option, c'est-à-dire les investissements publics.
     Aujourd'hui au Canada, le coût d'emprunt pour un bon de 10 ans est, pour le gouvernement canadien, de 2,5 p. 100. C'est un coût très bas. Notre endettement, en tant que pays, est également bas, soit de 33 p. 100, ce qui représente la moitié de la moyenne de l'OCDE. On a les moyens d'emprunter afin de se concentrer dans l'investissement public. Ça ne coûte pas cher. Nous recommandons donc de continuer à opter pour l'investissement public par l'entremise d'un programme d'infrastructures. Ça inclut les ponts, les trains, etc., mais aussi l'infrastructure sociale, notamment les garderies et les soins aux personnes âgées.
    Merci.
(1150)
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Hodgson.
    Ma déclaration préliminaire porte essentiellement sur trois points.
    Tout d'abord, pour ce qui est de la situation mondiale, nous nous trouvons en ce moment au beau milieu d'une crise de confiance qui est le résultat de la politique inadéquate appliquée en réponse à la situation qui prévaut en Europe ainsi qu'à la situation budgétaire des États-Unis et à la reprise dans ce pays. Je n'entrerai pas dans les détails à ce sujet, mais je pense que cela indique clairement que l'objectif premier de la séance du comité aujourd'hui et de l'ensemble de l'élaboration de la politique économique du Canada serait de rétablir la confiance. Il faut avant tout redonner confiance aux Canadiens, en tant que consommateurs, investisseurs et personnes qui croient réellement que notre avenir économique sera prospère.
    Je pourrais expliquer en détail ce qu'est la solution pour l'Europe, par exemple, mais je ne le ferai pas. J'ai passé les dix premières années de ma carrière au ministère des Finances et trois années et demie au FMI, je connais donc ce genre de situation. J'ai l'impression de voir un mauvais film pour la deuxième fois, et c'est vraiment tragique, mais il existe des solutions; la situation n'est pas désespérée. Ce sera aussi un processus très douloureux, particulièrement pour les contribuables de pays comme la Grèce qui est très loin de ne pas pouvoir se relever. Donc, la confiance est la pierre angulaire.
    Deuxièmement, en ce qui concerne nos perspectives économiques, le Conference Board avait, en fait, eu l'une des plus faibles prévisions prébudgétaires. Au premier trimestre de cette année, nous avions prévu une croissance de 2 p. 100 pour cette année et une croissance légèrement supérieure pour 2012. Je sais que nous sommes au bas de l'échelle, malheureusement, nous pensons que l'avenir sera ainsi. Nous faisons des prévisions chaque trimestre et nous venons de terminer celles du troisième trimestre, nos prévisions de croissance au Canada pour cette année sont actuellement de 2,1 p. 100 et d'environ 2,5 p. 100 pour l'an prochain. Le problème est que ces prévisions ne sont pas symétriques car je ne pense pas que l'éventail des risques qui y sont liés soit le même: je crois que la tendance sera plus à la baisse, il y aura plus de choses négatives que de choses qui amélioreraient la situation. Ce qui signifie que vous devez inclure un avertissement de prudence pour les futures prévisions financières car la croissance est, me semble-t-il, vraiment compromise pour le moment. La croissance de notre économie est inférieure à la normale que nous avions il y a neuf mois. Par exemple, les exportations sont probablement inférieures de 30 à 40 milliards à ce qu'elles pourraient être si notre économie tournait à son plein potentiel. Et bien sûr, la croissance nominale est l'élément essentiel de génération de recettes publiques. Par conséquent, nous ne devrions pas être surpris du tout si les recettes publiques sont légèrement inférieures à ce que M. Flaherty indique dans son budget, et ce, en raison d'une plus petite croissance des revenus nominaux.
    Ce qui me mène à mon troisième et dernier point: l'élaboration de la politique budgétaire que nous faisons maintenant. La situation est exceptionnelle. Le rétablissement de la confiance doit être notre point d'ancrage. Voilà l'objectif essentiel du prochain budget. Pour moi, cela signifie qu'il faut être prêt à changer de cap en cours de route, être très pragmatique, faire preuve de prudence et ne pas s'attacher à une seule façon de voir les choses, car les circonstances ont clairement changé à l'étranger et nous devons trouver des façons de s'adapter au changement. Cela ne veut pas dire nécessairement qu'il faut plus de plans de stimulation économique, car les données dont nous disposons actuellement ne nous permettent pas de déterminer s'il y a eu un ralentissement de l'économie; ça ne veut pas dire non plus qu'il ne faut rien faire.
    Je pense, compte tenu de la faible croissance des revenus nominaux, que si nous devions réduire d'un an ou deux le délai imparti pour équilibrer le budget — une adaptation tout à fait logique au changement de la situation économique —, nous devrions être prêts à le faire. S'il faut, à un certain moment, stimuler plus encore l'économie, nous devrions faire preuve d'ouverture d'esprit à l'égard d'une telle mesure. Toutefois, le Conference Board ne souhaite certainement pas que l'on ajoute quoique ce soit d'exceptionnel aujourd'hui. Il ne s'agit donc pas seulement de garder le cap, mais d'être prêt à prendre des décisions logiques pour changer de cap en fonction des besoins de l'économie.
    Monsieur le président, je vais soulever deux autres points.
    Un article que j'ai rédigé sur les dépenses fiscales a été publié il y a environ un mois dans près de la moitié des journaux canadiens. Alors que le gouvernement fédéral fait un travail de réflexion sur l'examen de toutes les dépenses gouvernementales, n'oublions que les dépenses fiscales représentent pour le gouvernement un sacrifice qui se chiffre à environ 100 milliards de dollars en recettes. Le régime d'impôt sur le revenu des particuliers compte actuellement 190 exemptions. Faisons au moins preuve d'ouverture d'esprit et considérons que les dépenses fiscales font partie de tout examen global des dépenses car, ce faisant, nous pourrions trouver des sources de revenus qui permettraient de contourner la nécessité de réduire autant les dépenses.
    L'autre point que je veux soulever, et là je rejoins les propos des autres intervenants, c'est que l'infrastructure est le meilleur moyen d'accroître la stimulation économique. Nous avons fait toute une série d'études pour plusieurs gouvernements à travers le pays pendant la reprise et il y avait une volonté de donner un peu plus de possibilités au sein de la structure, compte tenu même du niveau des dépenses actuel, alors la réorientation des dépenses vers l'infrastructure stimulerait l'économie et répondrait à un réel besoin. Ceux qui parmi vous empruntent le pont Champlain à Montréal comprennent exactement ce que je veux dire en parlant de besoin urgent d'investissement dans l'infrastructure de notre pays.
    Je m'arrête là, monsieur le président.
(1155)
    D'accord, merci infiniment monsieur Hodgson.
    La parole est à M. Leitao, s'il vous plaît.
    Je vous remercie à nouveau de m'avoir invité à comparaître au comité.
    J'ai le plaisir d'être le dernier, donc je ne vais pas répéter beaucoup de choses qui ont été dites. Je suis généralement d'accord sur le fait que l'économie mondiale a effectivement subi un grand ralentissement. La croissance économique est aujourd'hui beaucoup plus faible aux États-Unis et en Europe, ainsi que dans le monde entier, que nous le pensions il y a seulement deux ou trois mois. Nous devons nous adapter à cette situation.
    Il peut y avoir une récession en 2012. Nos prévisions n'en font pas état. Nous pensons encore qu'elle peut être évitée, mais il faut bien accepter que c'est une possibilité. Cependant, contrairement à 2008, quand nous avions été durement touchés par la récession qui nous a frappés presque à l'improviste, cette fois-ci nous pouvons la voir venir. J'estime que la récession n'est pas inévitable pour la bonne raison que les décideurs aux États-Unis et en Europe savent parfaitement ce qu'il faut faire pour l'éviter.
    Comme vous le savez tous, la démocratie est un processus délicat et il n'est pas toujours possible de faire immédiatement ce qui doit être fait, mais je ne ferai pas fi de la capacité qu'ont les appareils gouvernementaux européens pour redresser la situation. Cela prendra du temps. Ils attendront probablement jusqu'au dernier moment possible, mais je pense qu'ils sont capables d'éviter un manquement important, comme par exemple le manquement désordonné de la Grèce pour payer sa dette. La situation est grave et très dangereuse, mais je ne suis pas prêt à supposer que ce pays va forcément s'effondrer.
    Bon, parlons du Canada. Évidemment, comme il a été dit, cette fois-ci nous n'échapperons pas à une récession qui se déclarerait à l'extérieur de nos frontières. C'est une évidence. J'irais même plus loin en ajoutant que la dernière fois, en 2008-2009, nous avons évité en grande partie les effets de la récession pour deux raisons essentielles. La politique monétaire en était une: les taux d'intérêt avaient chuté très rapidement. Deuxièmement, le gouvernement fédéral et les provinces avaient mis en place des plans financiers pour régler ces problèmes.
    Cette fois-ci, nous ne pourrons pas réagir de la même façon. Les taux d'intérêt sont déjà très bas. Je ne pense pas qu'ils peuvent diminuer encore plus. Je ne crois pas que la Banque du Canada réduira le taux de financement à un jour; je ne crois pas que ça servira à quelque chose. Les taux du marché sont très bas. Les taux de rendement à dix ans sont actuellement de 2 p. 100 ou proches de ce pourcentage. Historiquement, ce taux est très bas, donc nous avons pris ces mesures.
    Pour ce qui est des consommateurs qui viendraient à la rescousse comme ils l'ont fait en 2008-2009 en empruntant massivement, en faisant des prêts hypothécaires et certaines autres choses. De nouveau, considérant le niveau actuel d'endettement des ménages très élevé, je pense que nous ne devons même pas penser à l'aide des consommateurs. C'est une aide dont il ne faut pas abuser.
    Que nous reste-t-il? Les exportations et l'investissement dans les entreprises. Le gouvernement peut envisager des façons de stimuler et de promouvoir l'investissement dans les entreprises privées. L'investissement est également bienvenu à ce moment, et je pense que nous, le gouvernement, devons être prêts à accélérer peut-être la réalisation de certains projets. D'autre part, moi aussi je n'accorderais pas trop d'importance à ces projets.
    Glen, vous avez mentionné le pont Champlain. Ces travaux doivent être faits, donc si nous décidons de reconstruire le pont, ce sera parce qu'il doit être reconstruit et non pas dans le but de stimuler l'économie. Il s'agit d'un grand projet qui va coûter environ 1,5 milliard de dollars sans pour cela contribuer beaucoup à la croissance du PIB durant le premier trimestre de 2012. Mais il faut faire ces travaux et les taux d'intérêt sont très bas, donc le moment est opportun pour la mise en chantier d'un tel projet.
    Finalement, en matière de politique financière, nous devons, en songeant au prochain budget, faire preuve de flexibilité car nous ne savons pas exactement ce que l'avenir nous réserve. Nous devons être capables de penser en termes de rétablissement de la confiance, de maintien de la confiance du consommateur et du renforcement de la confiance des entrepreneurs. Voilà ce qui est essentiel, à mon avis. En outre, si nous devons rehausser la confiance, il y a peut-être des mesures qui peuvent être appliquées très rapidement et qui gonfleraient le portefeuille des Canadiens, car, il est vrai que les revenus sont bas et les salaires faibles, ce sont des mesures que nous devons donc prendre en considération.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie beaucoup de votre exposé.
    J'aimerais simplement rappeler aux témoins et à mes collègues que nous disposons de très peu de temps pour les questions et les réponses; je vous demande donc d'être concis.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par Mme Nash.
    Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui. Vos exposés étaient très intéressants. Nous sommes heureux de pouvoir profiter de votre expérience et de vos compétences.
    Il y a des similitudes dans ce que chacun de vous considère être le problème. Il y a aussi des divergences dans les propos de M. Schetagne et de M. Lavoie en ce qui concerne la probabilité d'une récession. D'autres disent qu'on ne sait toujours pas et que nous devrions conserver une certaine souplesse.
    Nous avons beaucoup débattu à la Chambre et au comité du bien-fondé des mesures d'austérité que préconise à ce moment-ci le gouvernement, par rapport à l'importance d'investir dans l'économie, notamment dans les infrastructures. Chacun de vous en a parlé d'une façon ou d'une autre.
    Ma question est la suivante: Risquons-nous de nuire davantage à notre économie en choisissant la voie de l'austérité, c'est-à-dire en coupant 4 milliards de dollars par année et en réduisant les services? Ne devrions-nous pas plutôt investir dans la construction d'infrastructures nécessaires maintenant, au lieu d'attendre qu'une autre crise nous frappe? Ne faudrait-il pas chercher à éviter les problèmes dans l'avenir?
(1200)

[Français]

    Commençons par vous, monsieur Lavoie, si vous voulez bien commenter.
    Lorsqu'un gouvernement poursuit des politiques qui mènent à des déficits, d'un point de vue purement macroéconomique, l'effet est immédiatement positif. Si le gouvernement dépense davantage dans l'économie, c'est comme si les consommateurs ou les entreprises dépensaient davantage dans l'économie.
    La seule raison pour laquelle un renversement de la politique d'austérité pourrait avoir des effets négatifs, c'est l'effet psychologique. Certains de mes collègues ici ont mentionné l'idée de confiance. C'est sûr que si les consommateurs et les entreprises pensent qu'un déficit plus élevé du gouvernement pourrait avoir un effet négatif sur l'économie, ce genre d'anticipation peut s'autoréaliser. Toutefois, d'un point de vue purement économique, si on n'a pas cet effet psychologique... En tous cas c'est clair que, dans la situation actuelle, c'est la seule porte de sortie.
    Certains ont mentionné que la consommation des Canadiens ne peut pas vraiment augmenter parce que les ménages canadiens sont déjà endettés. L'investissement des entreprises au Canada est au point mort. Il ne se passe rien. Alors, nos exportations vont chuter. Aux États-Unis, ça ne se passe pas bien et ça ne se passe pas bien en Europe non plus. Il ne reste donc que le côté des dépenses publiques.

[Traduction]

    Merci.
    Si d'autres personnes souhaitent donner leur opinion, je les invite à le faire.
    Monsieur Schetagne.

[Français]

    Je suis d'accord sur cette analyse. J'irais même plus loin.
    Premièrement, quelle est l'origine de la situation du gouvernement fédéral en ce qui a trait à la balance de ses livres? Il y a une diminution de revenus non seulement parce qu'il y a une diminution de l'activité économique, mais également parce qu'il y a une diminution du taux d'imposition. Cela fait en sorte que le gouvernement fédéral se prive de revenus.
    Or il faut voir ce qu'on peut faire par rapport à ces revenus dont on se prive. Quelles décisions s'offrent à nous? On a les deux choix suivants.
    D'abord, on a celui de donner, par des réductions d'impôt, plus d'argent à des compagnies profitables. Ces compagnies, on le sait aujourd'hui, n'investissent pas dans l'économie réelle. Lorsqu'elles investissent, qu'est-ce que cela donne? Où investissent-elles?
    Ensuite, on a aussi le choix de garder et de récupérer cet argent et de l'investir dans des programmes d'infrastructures qui recréent des emplois. Des calculs nous démontrent qu'un milliard de dollars investis moyennant une diminution du taux d'imposition des corporations créent 3 000 emplois, alors qu'un million de dollars investis dans des programmes d'infrastructures publiques ou sociales créent 17 000 ou 18 000 emplois.
    À titre de société, que veut-on faire? Créer des emplois au pays et répondre aux besoins, dans une situation où on a besoin d'emplois afin de rétablir la confiance des consommateurs, des travailleurs, etc. La meilleure solution est claire pour nous. Dans la situation actuelle, il ne faut pas couper; il faut investir davantage et créer davantage de bons emplois au pays.

[Traduction]

    Merci.
    S'il reste du temps, M. Hodgson pourrait répondre.
(1205)
    Vous avez environ 10 secondes, monsieur Hodgson.
    Monsieur le président, je crois que nous sommes maintenant engagés sur la route et que nous devrions éviter d'appuyer sur l'accélérateur ou sur le frein. Il faut nous informer davantage. Selon moi, il serait malvenu de retirer davantage de mesures de stimulation de l'économie par des restrictions financières, mais je ne pense pas qu'il soit approprié d'en ajouter non plus. Dans un budget fédéral d'un quart de billion de dollars, on peut toujours déplacer des fonds.
    Merci, madame Nash.
    Nous allons donner la parole à M. Adler.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence ce matin.
    Ma question s'adresse à M. Porter.
    Si on se reporte au 2 mai, la grande priorité lors de la campagne électorale était de soutenir l'économie et de continuer à faire preuve de prudence. La population a choisi d'élire un gouvernement conservateur majoritaire national fort et stable, pour qui l'économie était la grande priorité. De nombreuses organisations économiques internationales, comme le FMI, le Forum économique mondial et l'Economist Intelligence Unit, ont reconnu que le Canada possède l'économie la plus vigoureuse de tous les pays du G7.
    De votre point de vue, à la lumière de tous ces facteurs, comment évalueriez-vous le leadership du premier ministre et de notre ministre des Finances sur le plan économique?
    Je dirais que comparativement à ce qui se fait dans les autres pays, l'élaboration des politiques économiques au Canada est exemplaire. Selon moi, il n'y a pas eu d'erreurs de parcours dans les dernières années.
    La seule chose que je dirais — et cela nous ramène un peu à la question précédente —, c'est que d'après les messages que nous envoient actuellement les marchés financiers, on s'inquiète surtout de la faible croissance économique. On ne met pas particulièrement l'accent sur le déficit budgétaire des États-Unis ni du Canada. On ne s'inquiète pas de l'inflation. On s'inquiète de la faible croissance à laquelle notre économie et l'économie mondiale seront possiblement confrontées. Lorsqu'on a des coûts d'emprunt d'État à long terme d'environ 2 p. 100 au Canada et aux États-Unis, ainsi qu'en Allemagne et au Royaume-Uni, dans un contexte où l'inflation atteint presque 2 p. 100, cela donne à penser que le marché des obligations connaîtra une croissance très faible dans les années à venir. Je crois que c'est vraiment là le défi de taille auquel sont confrontés les décideurs dans le monde en ce moment.
    Il vous reste deux minutes et demie.
    Il y a sans contredit un certain nombre de dangers qui nous guettent. Diriez-vous, à la lumière de vos commentaires, qu'il reste suffisamment de marge de manoeuvre aux décideurs canadiens pour faire face à toute situation imprévue qui pourrait se présenter?
    À mon avis, il y a actuellement plus de marge de manoeuvre au Canada que dans presque tous les autres grands pays industrialisés. En matière de politique monétaire, il est tout de même possible de faire davantage, évidemment. On peut réduire les taux d'intérêt. Je crois que la Banque du Canada n'est pas près de les réduire, mais il y a là une certaine latitude. Même lorsque les taux d'intérêt sont ramenés à zéro — et la Banque du Canada en a déjà parlé —, il y a encore des options, des mesures que peut prendre la Banque du Canada.
    Sur le plan financier, j'appuie entièrement les propos de Glen. Je ne vois pas la nécessité d'un changement en ce moment. Notre cote de crédit triple A n'est pas remise en question. Dans cette situation économique mondiale très difficile, les décideurs canadiens ont une certaine marge de manoeuvre.
    Pour terminer, je crois que dans une situation de récession mondiale, nous verrons le dollar canadien s'affaiblir, ce qui profitera à nos secteurs manufacturier et touristique. Il nous est impossible de contrôler directement cela, mais il s'agirait d'un sous-produit naturel du déclin de l'économie mondiale.
    En bref, je pense que nous avons de la latitude ici, ce qui n'est pas le cas dans bien d'autres grandes économies.
    Merci, monsieur Adler.
    Nous allons donner la parole à M. Brison.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être venus témoigner devant notre comité en ces temps difficiles.
    L'une des choses qui a aidé le Canada à traverser la dernière récession, c'est la demande assez constante de produits de base. Cela nous a aidés durant cette période et durant la reprise. Étant donné que la Chine en est à son troisième mois de contraction dans le secteur manufacturier, craignez-vous que ce pays ne soit pas en mesure de contribuer à la reprise au Canada ou que nous nous séparions de nos partenaires commerciaux en raison des différences dans les tendances actuelles?
(1210)
    Nous ne faisons pas de prévisions officielles en ce qui concerne la Chine, mais nous examinons les prévisions moyennes. Selon d'autres prévisionnistes dans le monde, la Chine réussira tout de même à faire croître son économie d'environ 8 p. 100 cette année, à un demi-point de pourcentage près. C'est tout à fait vrai qu'il y a eu un certain repli dans le secteur manufacturier au cours des derniers trimestres, et ce, en raison de la baisse de la demande mondiale.
    Le plus grand défi de la Chine, actuellement, est de se défaire d'une dépendance presque excessive à la demande externe, soit les exportations, pour apprendre à renforcer sa base de consommation à l'échelle nationale. Il y a des facteurs de risques partout. On peut penser aux bulles immobilières à Shanghaï, par exemple. Ou au fait que les Chinois ont un système financier sous-développé et qu'ils en sont encore à élaborer des instruments. Mais dans l'ensemble, la plupart des prévisionnistes estiment que la Chine réussira tout de même à maintenir son taux de croissance, pas à plus de 10 p. 100, mais à environ 8 p. 100. Selon moi, cela donnera lieu à une pression extrêmement forte sur le prix des produits de base, car avec la Chine, nous avons maintenant une toute nouvelle source de demande mondiale.
    Est-ce risqué? Absolument. La Chine devra subir une transformation interne, mais nous la considérons comme une force positive sur le prix des produits de base.
    Vous avez dit que le gouvernement ne doit pas réduire ses dépenses en ce moment.
    Monsieur Porter, vous avez indiqué que le mot d'ordre est la prudence et qu'il ne devrait pas y avoir de diminution à ce stade-ci sur le plan des dépenses gouvernementales.
    Monsieur Schetagne, vous avez dit que le moment est mal choisi pour réduire les dépenses.
    Monsieur Hodgson, vous avez déclaré qu'il ne fallait pas appuyer sur le frein ni imposer de restrictions financières.
    Monsieur Leitao, vous avez affirmé la même chose.
    De plus, Sherry Cooper, votre collègue, économiste en chef de BMO Nesbitt Burns, décrit la situation ainsi: « La croyance erronée voulant que la voie vers la prospérité économique passe par le resserrement budgétaire à court terme, comme le préconise [...] le premier ministre Harper [...] montre que nous n'avons rien appris de la réponse de Herbert Hoover à la Grande Crise. »
    Est-il juste de dire que vous croyez tous que ce n'est pas le bon moment pour réduire les dépenses gouvernementales au Canada?
    Certainement. Toutefois, quand nous parlons d'austérité budgétaire et que nous voyons ce qui se passe en Grèce, au Portugal, au Royaume-Uni et possiblement aux États-Unis, nous estimons qu'en comparaison, les mesures d'austérité budgétaire dont il est question ici au Canada ne sont pas très sévères. Il y aura encore un déficit dans notre pays l'an prochain, un déficit modeste, et on procède à quelques changements dans les dépenses gouvernementales, mais dans l'ensemble, la politique budgétaire canadienne n'est pas aussi austère ni restrictive que celle des autres pays.
    Ce que certains de mes collègues ont souligné, c'est que nous avons encore la possibilité, au besoin, de faire marche arrière au début de 2012. Nous pourrions le faire. Mais je pense que les mesures d'austérité du Canada ne sont pas comparables à celles de la Grèce.
    À certains égards, vous feriez un bon politicien.
    Des voix: Oh, oh!
    L'hon. Scott Brison: Est-ce le moment de réduire les dépenses gouvernementales au Canada, étant donné la possibilité d'une contagion dans le secteur banquier européen, les crises de la dette souveraine en Europe, et l'incapacité politique et financière de régler la situation aux É.-U.? Est-ce le moment de réduire les dépenses gouvernementales au Canada et de changer de cap?
    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Un changement de cap? Non. Des réductions massives des dépenses? Non.
    Ce qui serait prudent à l'heure actuelle en matière de politique serait d'augmenter les dépenses du gouvernement, d'oublier la notion de « finances saines » et de mettre en oeuvre une politique budgétaire expansionniste. Ce serait prudent, compte tenu de tous les signes négatifs que nous avons.
(1215)
    Merci, monsieur Brison.
    Malheureusement, son temps est écoulé. Nous allons devoir passer à une autre série de questions.
    La parole est à M. Hoback.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être venus cet après-midi. Je suis désolé du retard qu'a entraîné le vote. Je suis heureux d'entendre ce que vous avez à dire sur l'économie et ce que devrait faire le Canada.
    Je viens de la Saskatchewan, où le taux de chômage se situe aux environs de 4 p. 100. Notre économie est florissante. Ceux qui parlent de récession ou de possibilité de récession se font regarder de travers. À bien des égards, il m'est difficile de dire s'il faut dépenser ou ne pas dépenser, surtout en ce qui concerne un budget qui sortira en février ou en mars de l'an prochain. J'essaie de trouver des faits, pour que nous puissions nous demander: « Qu'avons-nous de concret à ce stade-ci à mettre de l'avant? »
    La plupart d'entre vous avez dit qu'il fallait faire preuve de souplesse, mais aussi de prudence. Il me semble que l'on approuve ce que nous faisons actuellement, et que nous devrions être prêts ou garder une certaine souplesse au cas où les choses s'aggraveraient. Nous n'avons pas de boule de cristal. Je crois que le premier ministre et le ministre des Finances ont toujours dit qu'il doit toujours y avoir une certaine souplesse lorsqu'on va de l'avant. Mais le gouvernement peut tout de même faire certaines choses pour nous rendre plus compétitifs, pour améliorer notre productivité. J'aimerais avoir votre opinion sur les obstacles ou les règlements qui pourraient ou devraient quand même être supprimés.
    Je sais, monsieur Hodgson, que vous avez parlé d'un pont, je crois, à Montréal, le pont Champlain, qui devrait être remplacé non pas du fait des mesures de relance, mais tout simplement parce qu'il doit être remplacé. Y a-t-il quoi que ce soit au gouvernement actuellement qui devrait être remplacé uniquement parce que c'est nécessaire, qu'il s'agisse de règlements ou de programmes qui ne répondent plus à la demande ou qui ne sont plus pertinents? Y a-t-il, selon vous, des fardeaux réglementaires ou autres choses du genre que nous devrions examiner?
    Monsieur Hodgson, je vais commencer par vous.
    Merci beaucoup.
    Nous avons en fait rédigé un document d'information environ trois semaines après l'élection pour offrir gratuitement des conseils au nouveau gouvernement majoritaire. Il s'agissait d'un document fort bien étayé. Nous y traitions des politiques macroéconomiques, à savoir de la politique budgétaire sous toutes ses formes, comme nous le faisons aujourd'hui, mais nous examinions aussi certaines modifications nécessaires sur le plan microéconomique. Je vous en parle, parce que l'objectif du programme de recherche du Conference Board est essentiellement d'accroître le potentiel réel du Canada et d'augmenter sa productivité et sa prospérité. La liste est assez longue. Nous devons, par exemple, ouvrir nos horizons au sujet du libre-échange et négocier avec d'autres régions du monde. Nous avons réalisé d'énormes progrès en Amérique latine, et nous discutons actuellement avec l'Inde et l'Union européenne. J'aimerais également que le Canada devienne membre de l'Accord de partenariat transpacifique. Malheureusement, la gestion de l'offre au Canada nuit à notre adhésion. Voilà le genre de barrières qui empêchent en fait le Canada d'atteindre son plein potentiel en ce qui concerne le libre-échange.
    Nous croyons que les investissements dans l'infrastructure au Canada sont grandement insuffisants. Nous n'avons pas compilé les données, mais d'autres l'ont fait, dont des ingénieurs et la Fédération canadienne des municipalités. Selon leurs données d'il y a cinq ans, je crois qu'il était question d'un déficit d'environ 130 milliards de dollars dans ce domaine. Ces données laissent croire que nous avons beaucoup à faire pour rétablir les priorités du gouvernement en matière de dépenses et nous assurer que suffisamment d'argent est investi dans les routes, les ports et les ponts pour garantir, par exemple, le bon rendement de l'économie montréalaise. Pouvez-vous imaginer les répercussions qu'auraient la fermeture complète du pont Champlain et l'interruption des activités commerciales entre la Rive-Sud et le centre-ville de Montréal? Le PIB de Montréal et celui du Canada en souffriraient grandement.
    À la lumière de ces éléments, une réforme est donc possible à bien des égards. Je pourrais vous distribuer le document d'information, et nous pourrions en discuter plus en détail. Il se trouve sur notre site Web, en passant, mais je vais le remettre à la greffière pour qu'elle vous le distribue.
    Votre intervention est intéressante, parce que vous avez mentionné le pont de Montréal. Il y a un pont dans ma circonscription, Prince Albert, qui est dans un état semblable. Seulement deux voies sont ouvertes à la circulation, alors qu'il y en a normalement quatre.
    Encore une fois, on doit parfois remplacer ou réparer une partie de l'infrastructure, parce qu'il le faut. Il n'est pas nécessairement question de mesures de relance; il s'agit seulement de mesures normales prises par un bon gouvernement.
    J'aimerais vous entendre, notamment, sur la création d'un organisme unique de réglementation des valeurs mobilières au Canada.
    Auriez-vous des commentaires à ce sujet, monsieur Hodgson?
    Certainement. Nous demandons publiquement depuis déjà un certain temps la création d'un tel organisme. Au moins deux provinces, le Québec et l'Alberta, ne sont pas chaudes à l'idée. Voilà pourquoi les ministres des Finances n'arrêtent pas de mentionner le plan B, soit le régime de passeport, qui ressemblerait à un organisme national de réglementation.
    Nous avons toutefois déjà affirmé publiquement qu'il faut éliminer les diverses barrières entre les provinces et harmoniser davantage les règlements entre le fédéral et les provinces. Prenons, par exemple, les règlements environnementaux. Des programmes fédéraux et provinciaux abordent souvent la même question, alors que le mieux serait évidemment d'établir une norme nationale et d'avoir un programme beaucoup plus efficace qui continuerait de protéger l'environnement.
(1220)
    Seriez-vous prêt à tenir le même langage au sujet de l'évaluation des compétences, à savoir qu'un plombier québécois serait reconnu comme tel en Saskatchewan?
    Absolument. De plus, on devrait permettre aux travailleurs québécois de réparer des routes en Ontario. Les gouvernements provinciaux en ont déjà discuté, mais l'important est d'harmoniser le plus possible les pratiques entre les provinces, et entre le fédéral et les provinces, parce que c'est ainsi que nous augmenterons la productivité.
    D'accord. Merci.
    Passons maintenant à M. Mai, s'il vous plaît.

[Français]

    Tout d'abord, je vous remercie d'être ici.
    J'aimerais remercier plus particulièrement M. Hodgson et M. Leitao qui ont parlé du pont Champlain. Il est situé dans mon comté. Je suis député de Brossard—La Prairie et je travaille très fort pour que le gouvernement investisse dans ce dossier.
    Comme on l'a vu, des rapports indiquent que l'économie de Montréal pourrait perdre 740 millions de dollars. Il est aussi question d'une perte de productivité de 1,3 milliard de dollars par année, à cause des problèmes de circulation.
    La question se pose à tous les témoins et experts en économie. Y a-t-il une raison économique pour ne pas investir dans le pont Champlain maintenant?
    Il n'y a ni raison économique ni raison logique. Je ne vois pas quelle en est la raison. Je ne vois pas pourquoi on retarde ça.
    Encore une fois, je pense qu'il est important de faire cet investissement, mais ce n'est pas dans une optique de stimuler l'économie, mais bien parce qu'il faut le faire. C'est un lien extrêmement important pour l'économie régionale.
    C'est tout à fait exact.
    Parlons de création d'emplois. En ce qui a trait à la situation actuelle de l'économie canadienne, le gouvernement continue de dire que le plan d'action créé il y a quelques années est toujours valide et qu'il n'a pas besoin d'ajustement spécifique.
     Sans parler de stimulus, j'aimerais reprendre les mots de M. Porter, mentionnés dans l'article de The Gazette d'hier:

[Traduction]

Les gouvernements ne devraient pas diminuer leurs dépenses de manière draconienne, lorsque l'économie est à bout de souffle. C'est certainement la mauvaise approche.
    Est-ce bien vos paroles?
    J'ai raté un bout. Désolé.
    En gros, vous dites que les gouvernements ne devraient pas diminuer leurs dépenses de manière draconienne, lorsque l'économie est à bout de souffle, et que c'est la mauvaise approche.
    C'est semblable à ce que Sherry Cooper, votre économiste en chef, a affirmé dans un autre article. Elle a soutenu que les politiques économiques préconisées par le premier ministre Stephen Harper et d'autres en réponse à la crise de la dette européenne pourraient bien mener à une autre récession mondiale et à une autre crise financière.
    Croyez-vous que le gouvernement devrait lancer un nouveau plan qui établirait au moins les objectifs et peut-être même les priorités, dans le cas de l'infrastructure? Selon vous, devrions-nous le faire?
    Comme je l'ai précédemment mentionné, je crois qu'il est un peu tôt pour changer d'approche. Cela étant dit, c'est possible que nous assistions, dans les prochains mois, à des changements économiques majeurs. À mon avis, les États-Unis sont au bord d'un nouveau ralentissement économique. Selon les plus récentes données que nous avons examinées, je vous dirai, par contre, que la plus grande faiblesse est, notamment, la confiance des gens envers les marchés financiers. En ce qui concerne ce que les gens achètent et produisent aux États-Unis, il n'y a pas encore vraiment de changements prononcés. Donc, nul doute que l'économie américaine semble encore progresser lentement, mais on ne parle pas encore officiellement d'un ralentissement, selon les données sur les dépenses de consommation et la production. C'est la même situation qui prévaut au Canada.
    Je crois donc qu'il est encore trop tôt pour modifier notre approche. Ensuite, concernant mon commentaire sur la diminution draconienne des dépenses, je ne pense pas que nous considérons sérieusement cette option au Canada. Mon commentaire portait en fait sur les États-Unis, parce que certains avancent que leur salut passe par une contraction importante du budget. À mon avis, ce n'est pas ce dont les Américains ont besoin en ce moment.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Schetagne.
    On dit que l'optique du gouvernement actuel est de réduire le taux d'imposition des grandes entreprises sous prétexte que ça crée des emplois. Vous avez abordé cet aspect.
    Pouvez-vous nous dire quel effet auront ces réductions d'impôt pour les grandes entreprises, relativement à la création d'emplois? Est-ce vraiment le chemin à suivre?
    La réponse à votre question est non. Ce n'est pas le chemin à suivre, parce que les réductions d'impôt profitent essentiellement aux compagnies qui font des profits. Lorsque ces compagnies paient moins d'impôt, elles font plus de profits. Ces profits sont-ils réinvestis pour créer des emplois? On constate maintenant que ces entreprises ne le font pas vraiment.
    Nous disons que nous devons faire un choix. Donne-t-on un milliard de dollars, en réductions d'impôt, aux corporations pour créer, selon nos calculs, environ 3 000 emplois ou utilise-t-on ce milliard pour créer 16 000 ou 17 000 emplois, que cela soit en infrastructures ou dans la réforme de l'assurance-emploi? Il est clair pour nous que ce milliard de dollars serait beaucoup mieux investi en adoptant des politiques ciblées adaptées à la problématique actuelle de l'emploi.
    J'aborderai rapidement une deuxième chose. On se demande si c'est le temps aujourd'hui de mettre en place un nouveau plan au cas où il y aurait une récession. Selon nous, il va y avoir une récession, et il existe des mécanismes qui sont là pour s'ajuster automatiquement lorsque se produit une récession. Un mécanisme très connu est celui de l'assurance-emploi. On pourrait et on devrait, aujourd'hui, se pencher sur le programme d'assurance-emploi pour le réformer afin que celui-ci fasse son travail lorsque va frapper la récession.
    Seulement 39,6 p. 100 des chômeurs, aujourd'hui, ont droit à l'assurance-emploi. C'est un problème.
(1225)
    Merci.
    Merci, monsieur Mai.

[Traduction]

    Je cède la parole à M. Van Kesteren, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence.
    Qu'en pensez-vous, monsieur Hodgson? Croyez-vous que nous devrions empêcher les entreprises de réaliser des profits?
    Oh, absolument pas.
    Des voix: Oh, oh.
    M. Glen Hodgson: Nous avons publiquement affirmé que les modifications fiscales des trois dernières années ont grandement aidé les entreprises à s'adapter à la nouvelle réalité commerciale d'une très forte... Nous sommes devenus la Suisse de l'Amérique du Nord en ce qui a trait au taux de change.
    Selon nous, le dollar canadien demeurera fort encore bien des années, en raison du prix des produits de base, comme M. Brison l'a fait valoir. Nous pensons que l'harmonisation de la taxe de vente, l'élimination de l'impôt sur le capital et les réductions de l'impôt sur les bénéfices ont véritablement aidé les entreprises canadiennes à s'adapter.
    Le gouvernement doit tout de même engendrer des revenus. Pour ce faire, nous avons également affirmé publiquement que le Canada devait adopter une taxe nationale sur le carbone pour appuyer ce que les provinces accomplissent déjà à cet égard.
    Je suis un ardent défenseur de la réforme fiscale. J'aimerais vraiment revenir témoigner pour en discuter davantage.
    Par contre, vous êtes d'accord... J'ai toujours eu l'impression que le gouvernement générait le gros de ses revenus auprès des entreprises rentables. C'est donc relativement important que nos entreprises le demeurent, et c'est une bonne chose qu'elles le soient.
    Oui. Actuellement, je crois que les entreprises canadiennes ont vraiment besoin d'un environnement qui leur permet d'être les plus concurrentielles possible. L'appréciation du dollar canadien a probablement été le plus important bouleversement des cinq dernières années; les entreprises se sont adaptées à cette nouvelle réalité. Dans bien des cas, elles ont vraiment dû revoir leur façon de commercer au Canada, sous peine de devoir mettre la clé sous la porte.
    J'aimerais maintenant discuter de commerce. Le Canada est un pays commerçant. C'est la première fois que nous sommes aux prises avec une telle conjoncture internationale; nous sommes tous dans le même bateau.
    Quelle est l'importance des échanges commerciaux? Nous avons signé des accords commerciaux avec divers pays. Est-ce la bonne approche? Devons-nous continuer dans cette direction? Faut-il en signer d'autres?
    En un mot: oui. Selon moi, l'expansion du libre-échange est une bonne chose. On peut ainsi avoir accès à d'autres marchés et augmenter la concurrence au Canada, ce qui est aussi bénéfique pour notre économie. Les entreprises sont obligées d'adapter continuellement leurs pratiques. Le libre-échange permet vraiment aux entreprises canadiennes, à mesure qu'elles adaptent leur modèle d'entreprise, de tirer profit de ce qu'on appelle les chaînes d'approvisionnement mondiales ou les chaînes de valeur mondiales.
    Encore une fois, nous avons affirmé publiquement être très favorables à toute forme de libre-échange, qu'il soit bilatéral, régional ou multilatéral. À mon avis, le Canada retire un avantage d'avoir accès à un plus grand nombre de marchés dans le monde.
    Parmi les points positifs depuis la crise financière, on constate que très peu de barrières ont été mises en place, parce que les entreprises et les économies nationales sont de plus en plus intégrées en raison de la mondialisation. Les gens comprennent qu'en adoptant une disposition comme le Buy American, on se tire dans le pied. On affaiblit alors sa propre économie en érigeant une barrière.
    Je ne peux qu'encourager le gouvernement à signer d'autres accords de libre-échange en Asie et en... J'ai mentionné plus tôt l'Accord de partenariat transpacifique. Pour ce faire, nous devrons d'abord nous pencher sur l'élimination de certaines barrières qui nous empêchent actuellement d'avoir un accès complet au libre-échange.
    Eh bien, je ne veux pas m'acharner sur vous...
    Oh, allez-y.
    ... mais vous avez mentionné que nous devons être flexibles. Croyez-vous que ce serait prudent d'investir, par exemple, dans des projets d'infrastructure nécessaires, tout en conservant une certaine flexibilité? Le gouvernement devrait-il endetter davantage l'État et augmenter ses dépenses pour aider le pays à se sortir de cette situation?
    Selon moi, c'est très important non pas seulement de rétablir le rapport dette-PIB, mais aussi de se fixer un objectif à moyen terme pour renouer avec l'équilibre budgétaire. Comme vous le savez, on peut en fait afficher un déficit budgétaire et constater une diminution du rapport +dette-PIB. Selon moi, ce n'est pas suffisant; par contre, c'est difficile à expliquer aux gens.
    Se fixer un objectif est très important, peu importe si c'est en 2014, en 2015, ou une ou deux années plus tard. Le ralentissement de la croissance mondiale a joué sur la croissance des revenus nominaux. Voilà ce que je vous conseillerais de réexaminer pour atteindre votre objectif.
    Je ne pense pas que l'économie a actuellement besoin d'autres mesures de relance, mais je n'y serais pas opposé, si les conjonctures européennes et américaines sont pires que ce que nous entrevoyons actuellement.
(1230)
    Êtes-vous d'accord, monsieur Leitao?
    De manière générale, oui. Toutefois, j'aimerais faire valoir que nous pouvons construire des ponts sans nécessairement augmenter la dette nationale. Nous pouvons examiner les diverses façons de financer la construction d'un pont. Divers partenariats s'offrent à nous.
    Loin de moi l'idée de vouloir implanter des postes de péage, mais nous devons étudier toutes les options.
    M. Dave Van Kesteren: Merci.
    Merci, monsieur Van Kesteren.
    Passons à M. Marston, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins. Excusez-nous encore une fois de l'attente. Nous devions procéder à un vote.
    Monsieur Hodgson, vous avez fait allusion à la mobilité des gens de métier au Canada. Connaissez-vous le programme du Sceau rouge? Ce programme permet de maintenir une certaine norme d'apprentissage pour chaque métier. La dernière chose dont nous avons besoin, c'est d'avoir des gens de métier moins qualifiés. Il s'agissait davantage d'un commentaire que d'une question.
    Voici ma question. Le Conference Board a récemment publié un très bon rapport, très détaillé, sur la croissance des inégalités au Canada. J'aimerais que vous nous parliez des répercussions négatives que ces inégalités ont non seulement sur la justice sociale, mais aussi sur l'économie. La consommation et la demande en subissent les contrecoups. J'aimerais vous entendre à ce sujet.
    Eh bien, on dirait une question posée pour la forme, mais je vous remercie d'avoir mentionné le rapport.
    Nous dressons un bilan de la performance du Canada intitulé « Les performances du Canada ». Tout se trouve sur notre site Web. Nous avons examiné les inégalités dans les grands pays de l'OCDE au cours des 20 dernières années.
    Malheureusement, en raison de la mondialisation, les inégalités s'accentuent dans la majorité des pays. Au Canada, le rythme est plus rapide qu'aux États-Unis, ce qui est pour le moins surprenant. Nous n'en avons pas analysé en détail les effets économiques, mais je crois que nous commençons à les constater. Par exemple, si le revenu d'une personne à faible revenu ne croît pas au même rythme que la croissance du revenu dans l'économie, la demande potentielle diminue. Souvent, les gens achètent des produits locaux; ils n'importent pas de BMW, même s'il n'y a rien de mal à le faire.
    Nous nous demandions si le gouvernement en faisait assez pour s'assurer que les Canadiens tirent profit de la croissance économique. Que nous parlions du manque de sécurité d'emploi ou des retraités qui ont un revenu insuffisant, la pauvreté qui couve est l'ulcère de l'économie, et je suis d'accord pour dire qu'elle réduit le potentiel de croissance.
    Nous examinerons ce sujet dans nos prochaines recherches, parce que nous ne sommes pas entrés en détail dans les causes, mais j'aimerais bien le faire.
    Je crois qu'il est important que vous surveilliez la situation. Je vous remercie.
    Monsieur Porter, à l'heure actuelle, nous entendons dire que 500 milliards de dollars dans les entreprises ne sont pas investis. Nous sommes dans une situation où le secteur privé s'est retiré.
    À notre avis, les investissements publics sont essentiels. Je crois savoir que le Globe and Mail vous a cité hier et que selon vous, l'idée de M. Harper de prendre des mesures d'austérité n'est pas la bonne solution à ce moment-ci. Voudriez-vous revenir brièvement là-dessus? En ce qui me concerne, je suis plutôt d'accord avec vous. Il est temps que le gouvernement investisse. Ce n'est pas le temps pour lui de se retirer si le milieu des affaires l'a déjà fait.
    Je parlais davantage de l'économie mondiale en général et surtout des États-Unis. Ce qui me préoccupe en ce moment, c'est que les États-Unis ne se concentrent pas beaucoup sur la maîtrise de leur déficit budgétaire, étant donné que leur économie s'essouffle et que la croissance de l'emploi est très faible au pays depuis environ un an.
    Pour ce qui est des liquidités accumulées dans les entreprises, je dirais que c'est malheureusement, mais naturellement, en quelque sorte une conséquence de la crise financière que nous avons vécue en 2008-2009, alors que l'argent comptant était roi et que le marché des capitaux a pratiquement eu une crise cardiaque à l'automne 2008. Pour éviter ce genre de quête extrême d'argent, selon ce que nous avons observé, et pas seulement au Canada — mais vraiment partout dans le monde —, les entreprises croient qu'elles doivent ériger ces grands murs de défense et essentiellement disposer de plus de liquidités. Comme je l'ai dit, c'est malheureusement l'une des conséquences de la crise financière.
    Pour ce qui est de l'investissement des entreprises, je veux souligner qu'au cours de la dernière année, cela a été l'un des meilleurs secteurs de l'économie. En fait, nous avons observé une reprise importante des dépenses en capital.
(1235)
    D'accord.
    Monsieur Schetagne, je crois comprendre que le CTC recommande une politique d'investissement pour les aînés. Nous faisons la même chose à la Chambre des communes depuis deux ans; nous parlons d'augmenter le Supplément de revenu garanti. Des aînés vivent dans la pauvreté au pays, et nous n'avons obtenu qu'une modeste hausse de 50 $ par mois. Selon nous, ce devrait être près de 200 $ par mois. J'aimerais connaître votre point de vue à cet égard, s'il vous plaît.
    Oui, je serai bref.
    Nous devons penser à court terme, mais aussi à long terme, et trouver les moyens de permettre aux gens de vivre décemment pendant leur retraite. La question de maintenir le pouvoir d'achat nous préoccupe, et nous devrions l'étudier maintenant, car pour favoriser l'épargne, il faut le faire maintenant. Nous avons deux propositions. Tout d'abord, bien entendu, il faut augmenter le SRG pour les aînés qui vivent présentement dans la pauvreté. Les mesures qui ont été prises ne sont pas suffisantes. Elles ne permettront pas à tous de se sortir de la pauvreté. Il faut en faire davantage.
    Ensuite, nous ne devons pas oublier les travailleurs qui sont présentement endettés et qui n'épargnent pas suffisamment pour leur retraite. En ce sens, nous proposons de doubler les prestations du RPC.
    D'accord, merci.
    Merci, monsieur Marston.
    Nous passons à Mme McLeod. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais également remercier les témoins.
    En gros, d'après ce que j'entends, on révise à la baisse les prévisions initiales, mais ce n'est pas énorme. De plus, je crois comprendre qu'il nous faut être très vigilants. En général, on suggère qu'il nous faut faire preuve de pragmatisme et de souplesse. Je crois aussi avoir compris qu'à long terme, l'endettement constitue un problème considérable et qu'il nous faut rétablir l'équilibre budgétaire. C'était certainement un élément important.
    Si l'on regarde la voie que le gouvernement est en train de suivre pour la réduction de ses dépenses, j'ai en fait examiné les chiffres. Je crois que nous parlons de 0,02 p. 100 du PIB, et donc de 4 milliards de dollars, du gouvernement et de ses dépenses.
    Je dirais donc tout d'abord à M. Hodgson et peut-être à M. Porter, que 5 p. 100 de ce qui pourrait constituer des dépenses non judicieuses dans différents secteurs de dépenses du gouvernement, cela semble tout à fait faisable à mon avis et avec très peu de répercussions. Le gouvernement devrait donc chercher à ne pas dépenser pour des programmes qui ne sont plus efficaces.
    Avez-vous des commentaires?
    Eh bien, il y a la question des dépenses structurantes, mais je vais commencer par votre premier élément. La croissance des revenus nominaux, parce que c'est ce que le gouvernement impose, est moins forte que ce que nos prévisions indiquaient il y a 18 mois.
    J'ai parlé avec mon collègue Matthew Stewart, qui était ici, de la capacité du gouvernement d'équilibrer le budget d'ici 2015; c'était ce dont il était question à ce moment-là. Nous avons dit que c'était tout à fait faisable. Nous révisons présentement ces prévisions à la baisse; cela ne représente pas beaucoup, mais il s'agit de quelques milliards.
    Cela signifie que selon nos prévisions, le gouvernement sera maintenant en mesure d'équilibrer son budget en 2015-2016, et je ne crois pas que c'est nécessairement mauvais que ce soit un an plus tard. Cela ne fera pas gonfler énormément l'encours de la dette du Canada. De plus, nous devons être attentifs au pourcentage.
    Cependant, je ne recommande pas de mettre fin aux mesures de stimulation. Donc, ne vous en tenez pas à votre plan parce que vous en avez un. Placez-le dans le contexte mondial réel, où nous avons ces secousses exceptionnelles de l'extérieur, et ensuite, apportez des corrections en cours de route tout en ne perdant pas le plan final de vue.
    Je crois que c'est ce que le premier ministre et notre ministre ont dit: nous avons présentement un plan, mais nous devons être vigilants. Il nous faut faire preuve de souplesse et de pragmatisme. Je crois qu'il est peut-être toujours bon pour un gouvernement de faire le point sur sa façon de dépenser l'argent des contribuables et de s'assurer qu'il est efficace.
    Monsieur Porter, voulez-vous intervenir?
    Je pense que le plan financier en général était plutôt raisonnable jusqu'au deuxième budget au début de juin. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je crois que le paysage économique mondial a changé depuis environ quatre mois — et il peut changer encore beaucoup plus. Toutefois, je le répète, il est présentement trop tôt pour changer de cap de façon importante.
    Je n'approuve peut-être pas toutes les mesures, mais je crois que le plan en général était plutôt raisonnable.
    Merci.
    Nous avons également parlé des réductions d'impôt et de la grande importance qu'elles peuvent avoir pour les entreprises. Ce qu'on a dit, c'est que certaines entreprises restent en marge. En plus de la question des impôts, qu'est-ce que le gouvernement peut faire pour inciter les entreprises à investir, selon vous?
    Monsieur Leitao.
(1240)
    Eh bien, comme on l'a déjà dit à plusieurs reprises, il y a l'idée d'étendre le libre-échange à d'autres pays pour accéder à de nouveaux marchés. L'une des choses dont nous nous rendons compte maintenant, malheureusement, c'est que nous dépendons encore grandement des États-Unis; 75 p. 100 de nos exportations se font aux États-Unis. Pour cette raison, se tourner vers d'autres marchés et essayer de conclure des accords de libre-échange représentent une option valable.
    De plus, il y a des barrières intérieures à la circulation des biens et des travailleurs. Le Canada est une fédération, et sa façon de faire circuler les biens et les services au pays n'est pas tout à fait idéale. Nous devrions également examiner ces barrières pour améliorer un peu la circulation.
    Merci.
    Très brièvement, monsieur Schetagne.
    Très brièvement, nous pourrions également centrer nos efforts sur le secteur manufacturier et accorder des crédits d'impôt aux entreprises qui investissent dans la machinerie et l'équipement et dans la recherche et développement, ainsi que dans la formation des travailleurs. Ce secteur a besoin d'aide. Il a connu des difficultés profondes au cours des 10 dernières années et il a besoin d'aide.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Giguère, vous disposez de cinq minutes, s'il vous plaît.
    Je vous remercie beaucoup d'être venus présenter vos points de vue devant le Comité permanent des finances.
    Statistique Canada révélait cet été que l'encaissement des entreprises privées était à hauteur de 500 milliards de dollars. Actuellement, ce sont des fonds détenus par les entreprises. La revue du système financier présentée par la Banque du Canada indique que ces fonds ne sont pas investis. Il y a une très légère hausse des investissements, mais elle est grandement insuffisante.
    Parallèlement à ces sommes d'argent emmagasinées, nous avons vu au cours des dernières années la perte de 300 000 emplois au Canada dans le secteur manufacturier. Notre productivité est à la baisse. Notre recherche et développement est à la baisse. L'ensemble de ces emplois qui sont bien rémunérés sont remplacés par des emplois moins bien rémunérés. Cela explique que, malgré une création de 600 000 emplois, on voit une grande détérioration de la situation des ménages canadiens. Leur situation financière est devenue critique. Statistique Canada révélait que leur endettement était à hauteur de 147 p. 100, ce qui est une moyenne canadienne. Il y a des iniquités régionales massives. En Colombie-Britannique, dans certaines régions, 80 p. 100 du salaire des gens est utilisé uniquement pour la rubrique « Payer le loyer », soit pour tout ce qui se rapporte au loyer.
    Pourriez-vous me dire comment éviter que le Canada, par des réductions d'impôt, engraisse encore cette masse de capitaux inutilisés, comment faire pour qu'on récupère notre industrialisation et comment faire pour qu'on cesse de voir une diminution réelle de nos revenus?
    Ma question s'adresse à l'ensemble des intervenants.
    Il y a plusieurs volets à votre question. En ce qui a trait à l'excès de liquidités détenues par les entreprises maintenant, comme mon collègue l'a mentionné tout à l'heure, il me semble qu'en partie ce soit temporaire. Cette situation évolue étant donné l'énorme incertitude, surtout en Europe, où le système bancaire subit le même genre de stress qu'on a subi ici, en Amérique du Nord, il y a trois ans. Les entreprises sont donc extrêmement prudentes, mais cela est temporaire. Une fois que cette phase aiguë de la crise financière européenne se dissipera — je pense qu'elle va se dissiper au cours des prochains mois —, les entreprises seront un peu plus prêtes à investir.
    En ce qui a trait au secteur manufacturier, comment peut-on le regagner? C'est complexe. C'est un phénomène mondial qui est en cours depuis très longtemps. Au Canada, pendant plusieurs années, nous avons été un peu isolés par rapport à cela parce que notre monnaie a été trop à la baisse trop longtemps. C'est un vieil argument. Ces grandes tendances ont donc été un peu obscurcies par cela, et l'ajustement s'est fait très rapidement au cours des dernières années. Des mesures pourraient être prises par le gouvernement pour soutenir le secteur manufacturier, bien sûr, mais il faut toujours prendre en considération que nous faisons partie d'une économie mondiale. Or il y a des choses qui peuvent être faites et d'autres choses que le gouvernement n'a pas le loisir de faire. C'est certes un enjeu important qui mérite d'être débattu.
(1245)
    En réponse à votre question, je dis que la situation n'est pas tout à fait temporaire en ce sens que, depuis une dizaine d'années, les entreprises canadiennes font plus de profits qu'elles n'investissent. Finalement, ce sont les entreprises qui prêtent aux ménages depuis une dizaine d'années alors que, normalement, on s'attendrait à ce que ce soient les ménages qui prêtent aux entreprises.
    Pour ce qui est du secteur manufacturier, je vais revenir sur la question du libre-échange dont on a parlé tout à l'heure. À mon avis, le libre-échange est une bonne chose quand on a atteint le plein emploi, sans quoi le libre-échange n'est pas nécessairement une bonne chose. En fait, cela a mené aux inégalités plus grandes dont on a parlé tout à l'heure.
    Voici une suggestion pour améliorer la productivité au Canada — question qui devrait intéresser beaucoup les députés du gouvernement —: il me semble que si on augmentait les salaires réels, soit le salaire minimum des employés, cela forcerait les entreprises à être plus productives afin de conserver leurs profits.

[Traduction]

     Merci, monsieur Giguère.
    Madame Glover, allez-y s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les témoins qui sont parmi nous aujourd'hui.

[Traduction]

    J'ai trois questions brèves et je vais tenter de les poser durant les cinq minutes dont je dispose.
    J'ai écouté attentivement, monsieur Leitao, et j'aimerais savoir si vous êtes d'avis que les bouleversements économiques auxquels le Canada fait face actuellement sont causés par des secousses extérieures. Est-il juste de dire qu'il ne s'agit pas de problèmes intérieurs?
    C'est ce que je crois, oui.
    C'est ce que vous croyez. Merci.
    Monsieur Hodgson.
    Je suis de cet avis.
    Vous êtes de cet avis.
    Monsieur Schetagne.
    Il y a des problèmes, comme le déséquilibre commercial entre les pays et notre façon de faire du commerce, qui ont des répercussions sur nous. Comme ils sont liés à la façon dont nous interagissons avec d'autres pays, il ne s'agit pas uniquement de facteurs extérieurs.
    Monsieur Porter.
    Je suis d'accord avec vous.
    Monsieur Lavoie.
    Moi aussi.
    C'est votre avis. Merci.
    J'ai une autre question brève. Pour clarifier les choses, des députés de l'opposition laissent fortement entendre que l'économie du Canada se contractera cette année et l'année prochaine. Quelqu'un parmi vous prévoit-il une croissance négative cette année ou l'année prochaine?
    Monsieur Leitao.
    Pas pour cette année. Rien n'est impossible, mais je ne le crois pas.
    Pour l'an prochain, en 2012, il y a le risque que si l'économie mondiale entre en récession — surtout aux États-Unis, qui pour nous, pour ce qui est des liens directs, est beaucoup plus important que l'Europe —, ce sera le cas du Canada également.
    Et si elle ne...?
    Si les États-Unis n’entrent pas en récession, alors notre croissance économique sera toujours de l’ordre de 1,5 à 2 p. 100.
    Très bien
    Monsieur Hodgson.
    Nous prévoyons une croissance d’un peu plus de 2 p. 100 cette année et d’environ 2,5 p. 100 l’an prochain, mais ce sont que des estimations approximatives en raison des risques considérables auxquels nous faisons face dans l’économie mondiale.
    Très bien.
    Monsieur Porter.
    Nous prévoyons une croissance d’un peu plus de 2 p. 100 cette année et d’un peu moins l’an prochain. Nous estimons que les risques d’une récession sont de 35 p. 100 pour l’an prochain; il ne fait aucun doute que c’est plus haut que la normale.
    Je sais que je n'ai plus beaucoup de temps, alors je vais poser ma troisième question.
    Dans le cadre de notre examen, nous nous penchons sur des programmes inefficaces. Certains ont parlé de la nécessité pour le gouvernement de peut-être faire preuve de souplesse et de réduire les dépenses. Y a-t-il une bonne ou une mauvaise façon de réduire les dépenses? Je ne comprends pas pourquoi nous devrions maintenir des programmes inefficaces qui ne stimulent pas l'économie plutôt que d'investir cet argent ailleurs. Je me demande donc comment des programmes inefficaces peuvent soutenir l'économie.
    Monsieur Leitao.
    Par définition, un programme inefficace ne soutient rien. C'est un genre de microgestion des dépenses gouvernementales et je n'ai heureusement pas l'expertise nécessaire pour le faire. Mais lorsque nous disons qu'il faut être flexible, nous voulons dire que le gouvernement doit accepter un déficit plus important en cas de récession.
    Cela a été mentionné ici et je pense que c'est très important. Si nous entrons en effet en récession, les dépenses du gouvernement vont augmenter à coup sûr et il serait certainement inapproprié de ne pas faciliter l'accès au programme d'assurance-emploi, qui serait très important. Il faudra accepter que le déficit augmente plutôt que de le combattre.
(1250)
    D'accord, mais pour revenir à nos moutons, nous croyons que certains programmes n'en donnent pas pour leur l'argent aux contribuables. Le gouvernement serait irresponsable — et je vous demande votre opinion — s'il n'examinait pas et ne supprimait pas les programmes qui n'emploient pas à bon escient les fonds publics, surtout dans ces temps difficiles pour l'économie. Êtes-vous d'accord?
    En tant que contribuable, oui. Je pense que le gouvernement doit toujours examiner les programmes. Si quelque chose ne tient pas debout à l'heure actuelle, il faut le supprimer.
    Il vous reste une minute.
    Merci.
    Monsieur Hodgson, qu'en pensez-vous?
    Je suis avant tout d'accord avec Carlos, mais j'examinerais aussi les dépenses fiscales, car elles représentent une perte nette de 100 milliards de dollars pour le gouvernement. Il importe autant d'en avoir pour son argent concernant les dépenses fiscales qu'en ce qui a trait aux dépenses en tant que telles. Mais je dirais qu'avant tout, un gouvernement bien géré doit examiner régulièrement toutes ses dépenses pour optimiser les ressources.
    Merci.
    Voulez-vous dire qu'il faut supprimer ce qui est inefficace?
    Il faut supprimer ce qui est inefficace, mais nous devons aussi être conscients des conséquences macroéconomiques. Cela importe autant que les compressions elles-mêmes.
    D'accord.
    Monsieur Porter.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Merci.
    Monsieur Lavoie.
    Je dirais que le premier programme inefficace qu'il faut supprimer, c'est les réductions d'impôt accordées aux entreprises.
    Très bien, merci.
    Monsieur Schetagne, qu'en pensez-vous?
    Pour être bref, je répète que de rechercher l'efficacité fait partie de la bonne gestion du gouvernement, mais le faire pour équilibrer le budget le plus vite possible avant d'augmenter la limite du CELI et de permettre le fractionnement du revenu, deux ou trois ans plus tard, n'est pas la meilleure décision.

[Français]

    Merci.
    Merci, madame Glover.

[Traduction]

    Monsieur Jean.
    Merci, monsieur le président.
    Bien sûr, si on augmente les impôts et on exige des salaires élevés, les sociétés s'installent dans des pays plus compétitifs. Vous serez sans doute d'accord avec moi, monsieur Lavoie. Cependant, je pense que M. Hodgson a parlé du déficit, annoncé en 2006, d'environ 123 milliards de dollars dans le programme d'infrastructure de la Fédération canadienne des municipalités. Notre gouvernement a bien entendu réagi à cela et à la crise économique et il a investi environ 47 milliards, sans parler évidemment de tous les programmes et des fonds des municipalités et des provinces. La fédération essayait de recueillir entre 120 et 150 milliards de dollars.
    En fait, je veux rappeler aux témoins d'aujourd'hui que le programme n'est même pas encore terminé et que les dépenses continuent. Néanmoins, je ne dirais pas que tout l'argent a été dépensé. À vrai dire, très peu des fonds ont été engagés, car les factures ne sont pas arrivées. Je pense que le programme se poursuit jusqu'à la fin du mois prochain.
    Il me paraît juste de dire que toutes les économies sont des pendules qui, si on les pousse ou on leur permet d'aller trop loin dans un sens ou l'autre, peuvent entraîner des problèmes comme l'inflation excessive ou, dans une économie trop peu stimulée, une baisse de l'emploi. Ai-je raison?
    Nous ne parlons pas de pendule, mais de cycle. L'économie suit des cycles.
    Je comprends, mais on peut dire sans se tromper que la stimulation excessive ou insuffisante de l'économie peut entraîner d'autres problèmes.
    Si vous parlez de mauvaise gestion de l'économie, c'est très juste. Cela explique en partie pourquoi la Grèce est dans le pétrin. Le gouvernement a longtemps appliqué de très mauvaises macromesures et cela lui joué des tours.
    Tout à fait. Donc, non seulement le gouvernement doit rester flexible, mais le plus important est d'être attentif à ce qui se passe dans le monde, n'est-ce pas?
    Absolument, il faut prendre en compte toutes les circonstances. Nous sommes nombreux à l'avoir dit dès le départ.
    M. Schetagne a entre autres proposé d'encourager le privé à investir davantage et à accumuler moins de liquidités. Pouvons-nous adopter d'autres mesures, comme des incitatifs fiscaux pour accélérer la dépréciation, qui ont bien sûr fonctionné dans les sables bitumineux et d'autres secteurs au pays?
    Avez-vous d'autres suggestions, monsieur Schetagne?
    Oui, il y a différentes façons de rendre un pays plus productif. Je répète qu'on peut bien sûr aider le secteur manufacturier et accorder des crédits d'investissement pour la recherche et le développement. Cela s'applique non seulement aux sociétés, mais aussi aux organisations partout au pays, comme les universités, et à la formation des travailleurs.
    Certaines questions sont liées à la formation des travailleurs et au renouvellement des effectifs, même si le programme du Sceau rouge améliore la mobilité entre les provinces, qui ne pose pas de problème à mon avis. Cependant, nous pouvons en faire plus. Les sociétés profitent de l'infrastructure, et un pont qui menace de s'effondrer n'est pas une bonne chose, mais il faut aussi compter sur assez de travailleurs qualifiés pour être productif.
    Nous pouvons aussi prendre d'autres mesures. Concernant l'infrastructure sociale, la population active est vieillissante et nous souhaitons que plus de Canadiens travaillent, comme les femmes et les autochtones. Nous pouvons mettre en oeuvre des programmes, comme le programme de garderie, pour permettre aux femmes de retourner au travail, améliorer la participation de la population active et faire en sorte que les entreprises puissent compter sur des travailleurs lorsqu'elles en ont besoin.
    Donc, nous pouvons faire davantage que seulement aider les sociétés. Certains projets d'infrastructure publique peuvent nous aider à...
    Je comprends, mais pour être honnête, ma question porte plutôt sur la sortie des capitaux qui se trouvent dans les comptes en banque et ce genre de choses... Je me demande comment nous pouvons inciter les sociétés à le faire, parce que l'argent est déjà là et c'est bien entendu la première mesure que nous pourrions prendre dans l'avenir proche; voilà ma question.
    Monsieur Lavoie, ma dernière question s'adresse à vous. Vous avez publié, en 2007, un livre intitulé Money, Income, Production and Wealth, qui porte sur une méthode convergente liée aux flux et aux stocks. Peut-on s'enrichir grâce à ce livre? Je vous le demande simplement, car mes actions connaissent des fluctuations très importantes à l'heure actuelle et je perds le fil des choses.
    Vous avez environ 45 secondes.
(1255)
    Le livre ne porte pas sur la bourse, mais plutôt sur la distinction à établir entre les flux, le revenu et les stocks, l'importance de la dette, le capital et ce genre de choses.
    Mais pour répondre à la question que vous venez tout juste de poser sur le fait d'encourager les sociétés à investir pour bâtir l'avenir, je dirais que les dirigeants de sociétés doivent croire qu'il y aura une demande globale et des acheteurs pour leurs produits. Si la demande ne vient plus des consommateurs, comme je l'ai dit au début de l'exposé, le gouvernement doit prendre le relais, parce qu'elle ne viendra pas d'Europe ou des États-Unis, l'an prochain.
    Merci.
    Au moins deux témoins doivent partir à 13 heures précises.
    Compte tenu de nos discussions sur une période de stimulation et la période d'austérité actuelle, j'ai examiné le budget que nous avons adopté en juin. Il contient un crédit d'embauche temporaire et la prolongation du programme de travail partagé, de la déduction pour amortissement accéléré dans le secteur manufacturier et du programme des 14 meilleures semaines de l'assurance-emploi. Nous avons amélioré le Supplément de revenu garanti et plus d'argent est consacré aux travailleurs de la santé dans les régions rurales. Nous investissons davantage dans le programme d'aide à la recherche industrielle, les chaires d'excellence en recherche du Canada et dans les conseils subventionnaires fédéraux. Les transferts aux provinces ont augmenté de 6 p. 100 dans la santé et de 3 p. 100 dans l'éducation et l'aide sociale.
    Deux d'entre vous recommandent une stimulation accrue. Glen, vous recommandez de poursuivre dans cette voie. Mais quant aux deux autres témoins, associez-vous une période d'austérité à des augmentations de 6 et de 3 p. 100 et à des investissements supplémentaires dans la recherche et le développement et le secteur manufacturier?
    Je répète que, concernant l'austérité au gouvernement, M. Brison a dit que je serais un bon politicien. Nos mesures d'austérité ne se comparent pas du tout à celles de la Grèce.
    L'opportunisme importe aussi et, si l'économie mondiale connaît en effet une récession en 2012, nous devrons en faire plus et hausser encore les dépenses.
    Monsieur Porter.
    À notre point de vue, il n'y a pas vraiment eu d'austérité, cette année. Le budget de 2011 était surtout une transition entre la stimulation et les compressions. Donc, non, je suis loin de dire que nous avons connu une année d'austérité. Nous avions prévu que certaines compressions modestes seraient réalisées cette année. Je ne pense pas que c'est forcément de l'austérité.
    Dans ce cas, puis-je vous demander des précisions, à vous deux, car je connais la position des trois autres témoins.
    Conseillez-vous au gouvernement du Canada de poursuivre l'examen stratégique des dépenses de 80 milliards de dollars dans la politique fiscale pour économiser 4 milliards durant les quatre prochaines années, oui ou non?
    Des économies de 4 milliards de dollars ne me posent pas de problèmes. Si l'économie mondiale connaît bel et bien des ratés, nous voudrons peut-être réaffecter cet argent. Mais je ne vois aucun mal à ce qu'on fasse des économies pour l'heure.
(1300)
    Monsieur Leitao.
    Moi non plus, cela ne me pose aucun problème. Mais il faut être prêt à dépenser davantage en 2012, si nécessaire.
    S'il le faut, d'accord.
    Merci à tous. Je vous présente encore mes excuses pour le début tardif de la séance, qui était très instructive. Merci à mes collègues et aux témoins de leur présence.
    Nous nous reverrons jeudi.
    La séance est levée.
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