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La 41
e séance du Comité permanent des Finances est ouverte.
Nous continuons notre étude des incitatifs fiscaux pour les dons de bienfaisance, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement. Aujourd'hui, six témoins prendront la parole.
[Français]
Nous recevons Mme Brigitte Alepin, qui est comptable agréée.
[Traduction]
Nous accueillons John Waters, vice-president de BMO Nesbitt Burns. Nous accueillons Gregory Thomas, de la Fédération canadienne des contribuables. Nous accueillons également Adam Aptowitzer à titre personnel, mais en lien avec le C.D. Howe Institute. Nous accueillons Malcolm Burrows, chef Services-conseils en philanthropie, Groupe Gestion privée Scotia, et nous accueillons également Craig Alexander de retour au comité, Groupe financier TD.
[Français]
Vous disposez de cinq minutes pour faire votre présentation.
Nous allons commencer par Mme Alepin.
La lacune la plus évidente et la plus facilement compréhensible en regard du système fiscal des organismes de bienfaisance a été soulignée dans un des commentaires contenus dans le rapport de 2010 du vérificateur général du Canada. On y indiquait qu'il n'y avait que 40 vérificateurs d'impôt pour les 85 000 organismes de bienfaisance au Canada alors que l'agence comptait 41 000 employés.
Il y a aussi d'autres problèmes importants relatifs au système fiscal des organismes de bienfaisance au Canada. Aujourd'hui, je vais cibler un problème plus particulier. Il a trait au régime fiscal applicable aux fondations privées de bienfaisance. C'est un problème financier et, en période de crise ou de pré-crise, je pense qu'il devient de plus en plus pertinent de le souligner.
Ce problème vient du fait que, fondamentalement, l'entente fiscale conclue entre les contribuables canadiens et les fondateurs des grandes fondations privées est inappropriée, surtout en temps de crise. Voici l'entente dont il est question. D'un côté, les contribuables canadiens accordent des économies d'impôt aux fondateurs et aux fondations privées. Cette économie d'impôt dépasse 50 p. 100 du capital du don dans la première année au chapitre de la mise en place de la fondation privée.
D'un autre côté, la fondation privée devrait injecter suffisamment de fonds dans la société canadienne, sous la forme d'activités charitables, pour permettre aux finances publiques d'être équilibrées. Or, ce n'est pas le cas. En réalité, selon nos lois fiscales actuelles, les fondations privées sont obligées de dépenser chaque année, à des fins charitables, l'équivalent de 3,5 p. 100 du capital de la fondation.
Prenons un exemple concret. Je vous invite à remarquer le déficit fiscal dans l'équation ou dans l'entente qui a été mise en place. Qu'arrive-t-il lorsqu'il y a un don de 100 millions de dollars? D'un côté, le fondateur et la fondation privée reçoivent, dès la première année, une économie d'impôt totalisant plus de 52 millions de dollars.
D'un autre côté, la société canadienne ne reçoit de la fondation privée que 3,5 millions de dollars en contributions sociales charitables, puisque c'est le montant minimum imposé par les lois fiscales et que les fondations de charité dépensent rarement plus que ce que les lois fiscales leur demandent de dépenser à des fins charitables.
J'aimerais attirer votre attention sur le fait qu'il fut un temps où ce montant minimum était plus élevé au Canada. En 2010, il a été réduit à 3,5 p. 100 par le gouvernement Harper à cause de la réduction des taux de rendement sur le capital, afin de refléter la réduction des taux de rendement sur le capital.
Aux États-Unis, cette obligation minimale de dépenser à des fins charitables est de 5 p. 100. Présentement, le gouvernement Obama étudie des façons de modifier cette entente qui désavantage les contribuables. Beaucoup d'organismes de pression étudient la question et proposent une façon de régler le problème en augmentant cette obligation de dépenser annuellement à des fins charitables.
En terminant, si le temps me le permet, j'aimerais attirer votre attention sur deux questions. Les règles sont faites de la façon suivante, c'est-à-dire qu'on demande aux fondations privées de dépenser uniquement le rendement sur le capital pour respecter le souhait des fondateurs qui souhaitent que leurs grandes fondations privées soient perpétuelles et qu'elles existent pour l'éternité. En temps de crise et de pré-crise, je pense que c'est le moment opportun de réexaminer cette autorisation qu'on accorde aux grands fondateurs des fondations.
Pour terminer, compte tenu que, selon les dernières statistiques de l'Agence du revenu du Canada, environ 20 milliards de dollars étaient gelés dans des fondations privées au Canada, en faisant passer de 3,5 p. 100 à 8 p. 100 l'actuelle obligation annuelle de dépenser — ce qui s'est déjà fait —, on pourrait injecter dans certains secteurs particuliers comme la santé et l'éducation une somme annuelle totalisant environ 1 milliard de dollars.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président.
Au nom de BMO Groupe financier, je suis heureux de me joindre aujourd'hui à mes collègues pour discuter de la question des incitatifs fiscaux pour les dons de bienfaisance.
Je me présente ici cet après-midi avec deux points de vue. Premièrement, celui de quelqu'un qui travaille pour une entreprise, BMO, qui a donné plus de 28,2 millions de dollars à des organismes caritatifs canadiens en 2011, et dont les employés ont donné près de 12,8 millions de dollars dans le cadre de leur campagne annuelle de dons. Deuxièmement, celui d'un fiscaliste de BMO Nesbitt Burns, qui soutient nos services de planification financière et qui aide les particuliers et les familles à atteindre leurs propres objectifs en matière de dons de bienfaisance.
Tous ceux qui sont ici cet après-midi ont un objectif commun, celui de faire en sorte qu'il soit plus facile pour les Canadiens de faire des dons de bienfaisance, et c'est avec plaisir que BMO fait part de ses réflexions sur les façons d'atteindre cet objectif au moyen du système fiscal.
Comme plusieurs d'entre vous le savent déjà, la proportion de Canadiens qui réclament des déductions pour leurs dons de bienfaisance a diminué régulièrement au cours des deux dernières décennies, passant de 30 p. 100 en 1990 à seulement 23,4 p. 100 en 2010. À titre de comparaison, je mentionne que cette proportion s'élève actuellement à 26,6 p. 100 aux États-Unis.
En outre, la valeur totale des dons de bienfaisance déclarés a elle aussi diminué. S'il est vrai que les dons ont augmenté de 6,5 p. 100 en 2010 et ont atteint 8,25 milliards de dollars, ce chiffre demeure inférieur à ceux de 2006 et 2007, alors qu'ils avaient atteint chaque fois plus de 8,5 milliards de dollars. Les dons représentaient juste un peu plus de 0,6 p. 100 du revenu total et, encore une fois, les Américains nous devançaient à ce chapitre grâce à leur taux de 1,3 p. 100.
D'après mon expérience auprès des clients, le système actuel peut être quelque peu déroutant. Les dons inférieurs à 200 $ donnent droit à un crédit à un certain taux, tandis que les dons de 200 $ et plus bénéficient d'un taux différent. À BMO, nous aidons les gens à prendre les meilleures décisions financières. Par exemple, nous avons créé des programmes comme la Formule futée BMO et nous nous sommes engagés à hausser le niveau de littératie financière des Canadiens. En fait, nous avons soutenu activement et avec enthousiasme les efforts du pour faire du mois de novembre le Mois de la littératie financière.
Depuis quelque temps déjà, je suis d'avis qu'un taux unique pourrait simplifier les incidences fiscales des dons de bienfaisance. J'ai donc demandé aux économistes de BMO d'examiner cette question. Et ils ont convenu que ce changement, tout en ayant peu ou pas d'incidence sur les donateurs de sommes importantes, contribuerait à encourager ceux qui font des dons moins élevés à être plus généreux, car l'avantage fiscal atteindrait presque le double pour les dons de moins de 200 $. Il en résulterait non seulement une plus grande parité entre les Canadiens, grâce à un taux standard pour tous les dons de bienfaisance sans égard à leur montant, mais aussi plus de transparence et de simplicité dans le régime fiscal.
Étant donné que le don de bienfaisance moyen en 2010 était de 260 $ — comparativement à un don moyen de 1 437 $ — nous croyons que de nombreux donateurs pourraient bénéficier d'une uniformisation de taux. Évidemment, un tel changement comporterait un coût fiscal, notamment des pertes de revenus liées aux dons qui bénéficient actuellement du crédit d'impôt le plus bas, et des pertes de revenus liées aux crédits octroyés pour les nouveaux dons supplémentaires.
Nos économistes estiment que le coût global serait inférieur à 200 millions de dollars — même si, à la suite de ce changement, plus de 1,5 million de Canadiens se mettaient à donner plus généreusement. Il ne faut pas sous-estimer l'incidence que l'augmentation des dons de bienfaisance aurait sur le secteur des organismes à but non lucratif, surtout en cette période où les gouvernements, à tous les niveaux, cherchent à réduire leurs dépenses.
Nous reconnaissons que le gouvernement fait face à des réalités budgétaires; c'est pourquoi nous recommandons de mettre ce changement en oeuvre seulement lorsque la situation des revenus se sera améliorée et que la situation financière sera plus près de l'équilibre.
Monsieur le président, nous sommes heureux de pouvoir exprimer notre point de vue dans le cadre de cet important débat et c'est avec plaisir que je me joindrai à la discussion de cet après-midi avec mes collègues.
Merci.
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Je vous remercie monsieur le président et membres du comité.
Au nom de nos 70 000 membres d'un océan à l'autre, la Fédération canadienne des contribuables aimerait vous remercier de nous avoir invités aujourd'hui pour discuter des incitatifs fiscaux pour les dons de bienfaisance. Notre organisme est le groupe de défense des contribuables le plus important et le plus ancien au pays. Depuis notre création il y a de cela 22 ans, nous avons promu une réduction d'impôt, une diminution du gaspillage et une meilleure reddition de comptes de la part du gouvernement.
Nous appuyons une politique de longue date qui cherche à empêcher le gouvernement d'imposer du revenu donné à des organismes de bienfaisance au cours de l'année d'imposition. Nous sommes d'avis que les Canadiens continueront à tirer profit de cette politique et à l'appuyer si celle-ci est aussi juste et facile à appliquer que possible. Nous voulons un système d'impôts plus faibles, plus simples et plus uniformes qui ne comprendrait pratiquement aucune des exemptions, déductions et crédits qui existent actuellement. Nous croyons que les Canadiens font des dons de bienfaisance de façon plus efficiente et efficace que le gouvernement. Selon nous, aucun don de bienfaisance dans une année donnée ne devrait être assujetti à l'impôt sur le revenu.
Le système actuel de crédits d'impôt pour les dons de bienfaisance fait en sorte que les contribuables qui font des dons annuels de moins de 200 $ sont moins à l'abri des impôts que les plus grands donateurs. Malheureusement, les gens qui ont peu de sous à donner ont ainsi moins d'incitatifs pour faire des dons, toute proportion gardée, que les plus grands donateurs. Les incitatifs à faire des dons diminuent et on encourage moins de Canadiens à appuyer des organismes de bienfaisance. Selon le directeur parlementaire du budget, moins de 5,6 millions de déclarants ont demandé un crédit d'impôt pour dons de bienfaisance en 2009. Seulement 23 p. 100 de déclarants ont fait des dons dont la moyenne s'élevait à 389 $, et les allègements fiscaux consentis s'élevaient à 58 $, ce qui représentait une réduction d'impôt total de 323 millions de dollars.
Il ne fait aucun doute que les contribuables au revenu élevé sont les mieux protégés quand ils font des dons imposables à des organismes de bienfaisance. Un taux unique aussi élevé que possible pour les crédits d'impôt serait idéal pour les Canadiens puisque tous les dons de bienfaisance seraient traités de la même façon grâce à une simple formule facile à comprendre et facile à expliquer aux donateurs potentiels. Vous pourriez étudier les avantages d'un système où les dons de bienfaisance seraient tout simplement déductibles contrairement au système de crédits d'impôt actuellement en place. Nous félicitons le gouvernement d'avoir décidé d'éliminer graduellement la taxe sur les votes ou les subventions aux partis politiques pour chaque vote reçu. Nous vous encourageons à passer à la prochaine étape et à réduire les crédits d'impôt pour les dons aux partis politiques au même niveau que celui consenti aux organismes de bienfaisance. Il est tout à fait honteux qu'on puisse avoir droit à un crédit d'impôt de 75 $ pour avoir financé à raison de 100 $ des publicités diffamatoires et des appels automatisés alors qu'on reçoit seulement 15 $ en crédits d'impôt pour avoir donné 100 $ à la recherche sur le cancer.
Nous aimerions parler brièvement de la situation fiscale par rapport aux déductions pour les biens immobiliers et les parts de sociétés privées. Nous croyons qu'on devrait encourager tous les types d'organismes de bienfaisance et que les dons donnés directement à ces organismes apporteront plus d'avantages à la société que si on impose ces mêmes dons et qu'on les achemine aux organismes par le biais de l'appareil gouvernemental. Cela étant dit, nous exhortons le comité à insister sur l'importance des dons en argent et des transactions qui permettent d'avoir des renseignements sur la valeur réelle des dons aux organismes de bienfaisance. Malheureusement, l'ARC doit depuis longtemps retracer des dons frauduleux qui impliquent l'estimation et l'évaluation de dons qui n'ont pas été faits en argent. C'est coûteux pour l'ARC.
En somme, un reçu devrait être émis seulement si un organisme de bienfaisance vend un don en immobilier, en parts de sociétés privées, en oeuvres d'art ou autres à un acheteur indépendant, et ce lors d'une transaction bien documentée. Sinon, ça donne lieu à une trop grande latitude et à trop de tentation pour les arnaqueurs de ce monde. Les autres méthodes peuvent aussi jeter le discrédit sur la pratique d'offrir une protection fiscale aux dons de bienfaisance.
En conclusion, j'aimerais dire aux députés que la Fédération canadienne des contribuables n'est pas un organisme caritatif. Nous n'émettons pas de reçus d'impôt pour les oeuvres de bienfaisance. Nous percevons et nous payons la TPS et la TVH. Nous n'avons jamais reçu un seul sou du gouvernement, nous n'en recevrons jamais, et c'est ce qui nous convient.
Bonjour monsieur le président et membres du comité.
Je pratique le droit au sein du cabinet d'avocats Drache-Aptowitzer LLP. Nous pratiquons le droit des organismes de bienfaisance et le droit fiscal, et nous sommes confrontés au quotidien aux menus détails et aux aspects techniques des dons de bienfaisance et des réglementations s'y rattachant.
À cet égard, nous nous intéressons aussi aux politiques publiques puisque nous étudions le droit des organismes de bienfaisance et écrivons à ce sujet depuis de nombreuses années. Nous félicitons le Parlement de se pencher sur la question des organismes de bienfaisance puisque, par le passé, il a porté très peu d'attention à certains aspects depuis que la Loi de l'Impôt de Guerre sur le revenu, 1917, prévoit un traitement spécial pour certains organismes de bienfaisance en temps de guerre.
Nous adhérons à ce que les témoins du ministère des Finances ont dit à l'effet que, d'un point de vue fiscal, le système actuel est assez généreux; nous ne proposons donc pas que des mesures supplémentaires voient le jour pour accroître la générosité des crédits d'impôt. Mais en somme, un système d'incitatifs doit comprendre deux facteurs. Premièrement, les Canadiens doivent comprendre le système pour prendre les décisions appropriées. Deuxièmement, les moyens de dissuasion doivent être éliminés du système autant que faire se peut. À cet égard, la méfiance larvée associée au secteur de bienfaisance, qui est loin d'être bien réglementé, constitue le plus grand facteur dissuasif pour les donateurs potentiels.
Dans notre mémoire écrit, nous formulons cinq propositions pour améliorer le système d'incitatifs tout en renforçant la confiance du public dans la gestion des organismes de bienfaisance. Voici ce que nous proposons.
Tout d'abord, il faut créer un taux unique pour le calcul des crédits d'impôt afin de remplacer le système actuel où deux taux coexistent.
Deuxièmement, il faut repousser la date limite avant laquelle les donateurs peuvent bénéficier de crédits d'impôt pour leurs dons faits entre le 31 décembre et la fin de février. En séparant la date butoir pour les avantages fiscaux des cadeaux de celle du temps des Fêtes où l'on est porté à donner, les organismes de bienfaisance pourraient profiter de la nouvelle date limite pour s'attirer de nouveaux dons et pour mieux informer les donateurs à propos des incitatifs fiscaux rattachés aux dons.
Troisièmement, il faut bonifier les déductions aux crédits maximaux pouvant s'appliquer aux dons de 75 à 100 p. 100 afin d'encourager les entreprises sociales.
Quatrièmement, il faut établir par voie législative une définition d'« organisme de bienfaisance » afin de s'assurer que de tels organismes peuvent être créés pour répondre aux besoins de la société moderne. Nous aimerions souligner qu'on a discuté de cette question au Parlement dans les années 1930 et que l'idée a été remise en question au Sénat dans les années 1970, mais, à notre connaissance, la question n'a pas fait l'objet d'une étude sérieuse depuis la mise en oeuvre du système actuel d'impôt sur le revenu. Il est important de déterminer ce que constitue un organisme de bienfaisance dans notre pays, et nous devons nous attarder à cette définition.
Cinquièmement, le gouvernement fédéral devrait entamer des pourparlers avec les provinces pour les faire participer à la réglementation des organismes de bienfaisance.
De ces cinq suggestions, j'estime que la cinquième est celle qui nécessite le plus d'explications. Les membres du comité seront peut-être surpris d'apprendre que la compétence constitutionnelle pour la réglementation des organismes de bienfaisance relève des provinces, mais comme celles-ci ont bel et bien renoncé à cette compétence, le Parlement a utilisé son pouvoir de taxation pour imposer un certain niveau de réglementation dans le secteur. Malheureusement, la compétence fédérale relative aux organismes de bienfaisance se limite à ce qui peut être justifié de façon raisonnable pour maintenir un impôt sur le revenu; le Parlement est ainsi assez restreint quant aux types de règles qu'il peut imposer. En conséquence, certains volets du secteur sont mal réglementés ou tout simplement pas réglementés.
Par exemple, il n'existe aucune réglementation législative pour les dépenses de collecte de fonds des organismes de bienfaisance, et l'ARC reconnaît, dans ses orientations au secteur, qu'elle n'a aucune autorité légale à imposer de telles réglementations et ce, même au niveau administratif. Comme vous le savez peut-être, les médias parlent assez souvent de controverse quant aux coûts des collectes de fonds, et la méfiance causée par le manque de réglementation de ces activités et d'autres constitue un important dissuasif pour donner à un organisme caritatif.
Dans notre mémoire, nous proposons que les provinces, en tant qu'autorités constitutionnelles investies du pouvoir de régir les organismes de bienfaisance, fassent partie d'un organe de réglementation mixte pour qu'on puisse rédiger des réglementations appropriées. Bien entendu, cet organe régirait à parts égales les questions de financement, de transparence et de représentation politique des organismes caritatifs. Dans un article publié en 2009 par l'Institut C.D. Howe, j'explique beaucoup plus en détail les problèmes relatifs à la structure de réglementation actuelle ainsi que la solution que je propose. Mon article a suscité beaucoup d'intérêt et s'est valu beaucoup d'appui, mais aucune solution au problème de la réglementation des organismes de bienfaisance n'est possible sans un accord au Parlement. J'ai envoyé par courriel un exemplaire de mon article à la greffière du comité pour que vous puissiez en prendre connaissance.
Je serai heureux de répondre à vos questions quant à notre mémoire, mais pour l'instant je m'en tiens à ce que je viens de dire.
Merci.
:
Merci monsieur le président.
Je m'appelle Malcolm Burrows et je suis chef des services-conseils en philanthropie pour le groupe Gestion privée Scotia, la division de Scotia Bank au service des clients nantis. Je suis planificateur de dons de bienfaisance. Je suis aussi un expert en politiques fiscales des organismes de bienfaisance, un domaine que j'ai le plaisir d'étudier depuis 15 ans, et ce au sein des divers organismes.
J'ai grandi dans le milieu des organismes de bienfaisance et j'y ai travaillé pendant 13 ans avant de commencer à travailler à Scotia Bank. J'ai travaillé, entre autres, pour Imagine Canada, l'Association canadienne des professionnels en dons planifiés — vous avez rencontré ses représentants plus tôt cette semaine — et pour l'Institut C.D. Howe.
J'ai grandement travaillé à l'élaboration de trois propositions, y compris le crédit d'impôt allongé, qui a reçu l'appui d'un certain nombre de groupes. J'ai présidé le comité d'Imagine Canada qui a conçu la proposition de ce crédit d'impôt allongé. J'ai également rédigé un article pour l'Institut C.D. Howe qui présentait certains des principes de base proposés pour éliminer les gains en capital sur les dons des actions d'entreprises privées et de biens immobiliers imposables.
Cela étant dit, ces propositions sont assez bien définies, et mes propos vont donc se concentrer sur le cadre de ce qui constitue une politique fiscale favorable dans le secteur des organismes de bienfaisance. Je vais parler de l'état du système canadien, des plafonds des mesures fiscales pour les dons et finalement, de trois facteurs pour évaluer les incitatifs fiscaux pour les dons aux organismes caritatifs.
Tout d'abord, j'aimerais dire que nous avons probablement le système fiscal le plus généreux au monde pour l'appui des dons aux organismes de bienfaisance. Trois éléments appuient cette idée.
Comme d'autres témoins l'ont dit, le crédit d'impôt est mal compris, mais il est très généreux. Pour la première tranche de 200 $, les donateurs, à titre de contribuables, se voient rembourser la totalité en épargne sur l'impôt et ce, même au taux de 15 p. 100. En Colombie-Britannique, si vous gagnez 65 000 $ par année, vous payez 20 p. 100 d'impôt et on vous accorde un taux combiné de 20 p. 100 pour la première tranche de 200 $. Puis, ça passe à 43 p. 100. C'est différent du système américain où on ne dépasse jamais son taux d'imposition; il s'agit d'un système de déductions. Notre système est donc beaucoup plus généreux que celui des États-Unis.
Nous avons des plafonds de don, qui correspondent au montant que l'on peut donner et demander en remboursement chaque année par rapport à notre revenu annuel net. Nos plafonds sont les plus élevés au monde. Ils représentent 75 p. 100 du revenu pendant la vie et 100 p. 100 lors du décès. Lors du décès, on peut éviter de payer des impôts en donnant un montant suffisant à des organismes de bienfaisance. C'est un concept unique au monde.
Nous avons des incitatifs supplémentaires pour les dons en biens en immobilisation. Il s'agit d'un régime qui a été mis au point au cours d'un certain nombre d'années et qui est axé sur les dons de valeurs mobilières publiques. Ce régime revêt une énorme importance et a permis d'injecter beaucoup d'argent dans le système. Il s'agit d'incitatifs supplémentaires généreux.
Depuis quelques années, et particulièrement depuis le milieu des années 1990, nous nous sommes efforcés d'étendre la portée de ce système, et nous avons maintenant un système très bien pourvu. Que pouvons-nous faire de plus?
J'aimerais mentionner au passage les plafonds d'incitatifs fiscaux. Au Canada, on a tendance à croire qu'on fait des dons pour des raisons fiscales seulement. Ce n'est pas le cas. Les dons ne sont pas d'abord et avant tout une transaction fiscale. Il faut tenir compte du rôle de l'altruisme. Un don, c'est quelque chose qu'on donne sans rien attendre en retour. Quand on fait un don, on s'appauvrit. On fait des dons parce qu'on veut aider la société. Si on exerce trop de pressions inflationnistes sur le système fiscal, on va, entre autres, édulcorer le rôle de l'altruisme et de la philanthropie.
Il y a aussi le volet de la motivation des donateurs. Comme le professeur Paul Reid vous l'a dit la semaine dernière, il existe deux types d'incitatifs fiscaux qui sont utiles à certains types de dons et qui le sont moins à d'autres. Pour les petits montants, les remboursements d'impôt constituent un très faible facteur de motivation. La plupart des gens ne sont pas au courant des incitatifs fiscaux. Cela dépend de la transaction. Si votre nièce de 10 ans vous demande de faire un don pour appuyer un événement auquel elle participe, calculerez-vous les avantages fiscaux? Mais non!
Le montant médian des dons est de 260 $. La plupart des gens ne pensent pas du tout aux avantages fiscaux. En fait, l'Alberta a bonifié son crédit d'impôt pour atteindre 50 p. 100, soit beaucoup plus que partout ailleurs au Canada. La somme totale de dons n'a pas augmenté davantage qu'en Colombie-Britannique. Le Manitoba a toujours un taux de participation plus élevé.
Par contre, c'est utile pour les dons en actifs, un volet important du système. On doit donc tenir compte de trois facteurs. Tout d'abord, pour ce qui est des incitatifs, il faut s'assurer que le gouvernement est protégé. Est-ce que davantage d'argent est injecté dans le système pour le montant investi? Deuxièmement, y a-t-il un incitatif, qui ne soit pas déraisonnable, pour le donateur? Troisièmement, les organismes de bienfaisance sont-ils protégés?
Pour poursuivre dans la lancée de M. Aptowitzer, si des incitatifs existent, il faut s'assurer que les organismes de bienfaisance peuvent traiter des dons comme des actions d'entreprise privée et des biens immobiliers imposables. J'appuie les trois propositions, mais il faut tenir compte du cadre qui les englobe.
Merci.
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Merci beaucoup de me permettre de comparaître devant vous aujourd'hui.
Il est selon moi bien à propos que le comité se penche sur les incitatifs fiscaux pour les dons de bienfaisance. En réalité, la demande s'accroît pour les organismes de bienfaisance depuis quelques années, mais leur capacité financière n'a pas suivi. Il ne faut pas se leurrer, l'économie canadienne s'est sortie remarquablement bien du récent cycle de crise financière, de récession et reprise — mieux que la plupart des pays —, grâce à une politique monétaire et financière très judicieuse. Cependant, la reprise n'a pas profité également à tous. Le taux de chômage national se situe aujourd'hui à 7,6 p. 100, alors qu'il s'élevait à 5,9 p. 100 avant la récession. On compte maintenant 367 000 chômeurs de plus qu'avant la récession, ce qui porte leur total à 1,4 million de Canadiens.
L'activité sur le marché du travail a diminué d'un point de pourcentage, ce qui indique que de nombreux Canadiens ont renoncé à chercher un emploi rémunérateur. La durée moyenne des périodes de chômage a considérablement augmenté. Le nombre de personnes au chômage pendant plus de 27 semaines est passé de 130 000 à 270 000. Si vous n'aimez pas les chiffres économiques ennuyeux et arides, vous pouvez vous tourner vers les statistiques sociales, qui sont plus vivantes, et qui montrent que le nombre d'assistés sociaux dans les provinces grimpent en flèche. En outre, les banques alimentaires sont encore plus sollicitées qu'avant la récession.
Malheureusement, et cela me peine de le dire, les perspectives de croissance économique à court terme risquent d'être plutôt modestes. Les organismes de bienfaisance seront encore très sollicités.
D'un autre côté, leur situation financière est difficile. Les organismes de bienfaisance reçoivent plus de 50 p. 100 de leur revenu des gouvernements; or, au Canada, tous les niveaux d'administration se concentrent sur la lutte au déficit et l'équilibre budgétaire. C'est la bonne chose à faire, et il s'agit là d'une politique budgétaire responsable, mais les transferts au secteur caritatif risquent d'en souffrir.
Par ailleurs, de nombreux Canadiens sont surpris d'apprendre que les dons et cadeaux ne représentent que moins de 20 p. 100 des revenus des organismes de bienfaisance. Certes, les Canadiens pourraient faire montre d'une plus grande générosité. En 2010, le nombre de donateurs était moindre que celui de 2006. En ce qui concerne la valeur des dons, de 2007 à 2010, elle a enregistré une baisse de 4,6 p. 100. Si on tient compte du taux d'inflation, pour comprendre ce qu'il est advenu au pouvoir d'achat de ces dons, on constate que la réduction est en fait de 14,2 p. 100. Comme je l'ai déjà indiqué, seulement 23 p. 100 des contribuables déclarent sur leur formulaire d'impôt avoir fait des dons. C'est une diminution de 30 p. 100 par rapport à 1990.
De nombreuses études ont essayé de déterminer exactement dans quelle mesure des changements apportés au crédit d'impôt pourraient augmenter le volume de dons. Par exemple, l'Enquête nationale sur le don, le bénévolat et la participation a montré que seulement 11 p. 100 des Canadiens ont fait des dons pour obtenir un crédit d'impôt. Toutefois, l'enquête a également montré qu'une personne sur trois aurait donné davantage si le crédit d'impôt avait été plus généreux, et 45 p. 100 des plus grands donateurs — qui sont à l'origine de plus de 80 p. 100 des dons — ont dit qu'ils seraient plus généreux si les incitatifs fiscaux étaient plus importants.
Je suis économiste, pas expert en fiscalité. Si je comprends bien, le comité étudie trois politiques distinctes, qui portent sur les dons de biens immobiliers, les dons d'actions d'entreprise privée et l'élargissement du crédit d'impôt.
À mon avis, il faudrait mieux insister sur les dons de biens immobiliers et d'actions d'entreprise privée puisqu'ils seraient des plus logiques d'y appliquer les mêmes règles qu'aux dons d'actions d'entreprise publique. C'est une question d'uniformité. J'aimerais vous faire remarquer que certains groupes s'inquiètent du fait que si on offre le même traitement fiscal aux biens immobiliers, le traitement fiscal préférentiel accordé aux dons de terres écosensibles disparaîtra. Je ne crois pas que cet argument devrait empêcher l'application de ces règles à tous les biens immobiliers, mais il faudrait peut-être envisager d'autres incitatifs afin d'encourager le don de terres écosensibles à des fiducies foncières, par exemple.
En ce qui concerne l'élargissement du crédit d'impôt, honnêtement, j'aime l'idée, en principe, d'encourager les gens à être plus généreux, mais je pense qu'il serait difficile, sur le plan administratif, de mettre cette mesure en place. Comme on l'a dit plus tôt, je serais d'accord pour qu'on élimine le minimum de 200 $, ou le traitement fiscal différent pour la première tranche de 200 $. J'imagine que c'est pour l'instant trop coûteux.
Si l'élargissement du crédit d'impôt est difficile à mettre en oeuvre et n'a rien d'idéal, elle pourrait inciter les gens à donner plus, étant donné que les options sont limitées.
Je suis désolé d'avoir dépassé mon temps de parole.
Je vous remercie tous d'avoir pris le temps aujourd'hui de participer à nos délibérations.
Je vais me lancer, mais par la suite, chacun de nos députés s'intéressera à un aspect différent. Lorsque j'aurai posé mes questions, quelqu'un devra peut-être me corriger. Nous vous poserons à tous des questions diverses.
C'est une tâche contrariante que d'essayer d'établir un équilibre tout en encourageant le don: cela en vaut-il la peine? Le gouvernement peut-il se le permettre? Comment éviter l'abus? Comment utiliser judicieusement l'argent des contribuables et des mesures fiscales? Il s'agit là de questions intéressantes, et d'autres se posent également. Vos exposés ont certes été bien utiles.
J'aimerais revenir sur certains points. Ma question s'adresse à M. Aptowitzer. Je pense que l'idée d'une coordination ou d'une commission fédérale-provinciale a du mérite. Je reconnais la compétence provinciale en matière de réglementation, mais je suis convaincu que vous savez que la Cour suprême a récemment statué que le gouvernement fédéral ne peut pas créer d'organisme national de réglementation des valeurs mobilières.
Je pense que votre idée a du mérite, parce que c'est une question de confiance à de nombreux égards, et les provinces ont un rôle à jouer dans la surveillance des organismes de bienfaisance.
De façon réaliste, quelle est la possibilité qu'on réussisse à combiner les responsabilités provinciales et fédérales à l'égard des organismes de bienfaisance?
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Je vous remercie de votre question, madame McLeod.
Je n'y avais pas pensé précisément. Pour les discussions d'aujourd'hui, je me suis concentré davantage sur les particuliers et l'incitation aux dons personnels.
Comme vous le savez probablement, les incitatifs qui existent pour les sociétés sont très semblables à ceux à la disposition des particuliers pour ce qui est des épargnes fiscales possibles, et, en particulier, j'imagine, au moyen d'incitatifs plus récents, soit le don de titres cotés, par exemple.
Ce n'est pas une question que j'ai abordée ou à laquelle j'ai pensé dans le cadre de ma préparation pour aujourd'hui. Je pourrais peut-être vous revenir là-dessus. Je pourrais y penser dans l'optique des sociétés, ou des incitatifs du point de vue des sociétés également, si vous voulez.
Je comprends certainement, monsieur Aptowitzer, la question de la définition concernant les organismes caritatifs. On nous a aussi dit plus tôt que nous devions mieux définir les dons. Je crois que c'est une autre chose que nous avons entendue: qu'il y a souvent des difficultés à trouver la définition précise du don.
Nous avons encore entendu parler de l'élargissement du crédit d'impôt. Je crois qu'il y a division quant au caractère approprié de cette mesure en particulier.
Je crois, monsieur Thomas, que vous ne seriez pas en faveur, et peut-être M. Waters...
Pour les gens qui ne croient pas que l'élargissement du crédit d'impôt est une bonne idée, je me demande si vous pouviez nous donner vos explications. Nous pouvons aussi entendre les deux points de vue.
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Nous avons récemment fait des travaux sur l'assurance-emploi. L'école d'études supérieures Mowat Centre for Policy Innovation à l'Université de Toronto a publié un rapport qui précise que les mesures du gouvernement du Canada les plus populaires sont celles dont tous les Canadiens peuvent profiter également. Si on prend par exemple les prestations de maternité, peu importe votre lieu de résidence, votre code postal, votre province ou le taux de chômage dans votre région, dès que vous avez un enfant, vous avez droit aux mêmes prestations.
La sécurité de la vieillesse — et je vous prie de m'excuser de toucher une corde sensible — est en fait très populaire, tout comme le Régime de pensions du Canada, parce qu'il s'agit de programmes assez simples. En tant que Canadiens, nous sommes tous assujettis aux mêmes règles; nous investissons tous le même montant, et nous recevons les mêmes prestations.
Vous avez tous participé à des campagnes de financement politique. Vous dites, « achetez ce billet pour un repas. Il coûte 100 $ et vous obtiendrez un crédit d'impôt de 75 $. » C'est super simple. Ce serait extraordinaire d'avoir des mesures simples concernant les organismes caritatifs, qui puissent être expliquées en un instant.
J'aimerais que vous me donniez tous votre opinion sur certaines des recommandations du Groupe d'étude canadien sur la finance sociale et l'émergence de ce type d'approche en matière de finance sociale. Je crois que la Banque Royale a récemment créé un fonds de 25 millions de dollars à cette fin.
Le groupe d'étude a fait certaines recommandations précises concernant des réformes fiscales des incitatifs fiscaux: « Pour encourager les investisseurs privés à offrir les capitaux à coût plus bas et les capitaux patients dont les entreprises ont besoin pour maximiser leurs résultats sociaux et environnementaux ». Le groupe a cité certains exemples aux États-Unis avec le nouveau crédit d'impôt sur les marchés. J'aimerais avoir vos points de vue là-dessus. Il me semble que c'est un développement passionnant dans le secteur de la philanthropie, en particulier la responsabilité, les jalons et l'approche disciplinée de liste de conditions presque traditionnelle aux dons.
J'aimerais beaucoup avoir vos points de vue, parce que le comité n'a pas encore eu d'écho de la table ronde, mais j'aimerais prendre les devants et entendre ce que vous avez à dire aujourd'hui.
Monsieur Burrows disait que les grandes fondations privées donnaient, en pratique, plus que 3,5 p. 100. Pour ma part, je n'ai connaissance d'aucune étude à ce sujet. Toutefois, si on consulte les rapports annuels produits par les grandes fondations privées, dans presque tous les cas, c'est toujours à peu près égal au contingent des versements. Si on prend l'exemple de la Fondation Lucie et André Chagnon, qui est la deuxième plus grande fondation privée au Canada, on voit qu'elle a débuté avec 1,4 milliard de dollars et qu'elle a, aujourd'hui, un capital de 1,5 milliard de dollars. La façon dont le système des grandes fondations privées fonctionne veut que l'on s'arrange pour préserver le capital initial. En effet, les grands fondateurs recommandent souvent que l'on s'assure que la fondation puisse se perpétuer dans le temps.
Vous avez probablement remarqué que dans le contexte économique actuel, il y a autant de chômeurs qu'en 2008. Cette situation est particulièrement pénible pour de très nombreux Canadiens qui vivent les effets de cette récession depuis bientôt quatre ans.
Présentement, des groupes religieux accaparent 46 p. 100 des dons et leur taux est exactement le même que celui des banques alimentaires. À ce sujet, j'ai compris que vous étiez aussi favorable à un taux unique pour les dons inférieurs à 200 $ et ceux supérieurs à 200 $, mais ne faudrait-il pas considérer la possibilité de mieux cibler les organisations caritatives qui aident véritablement les gens qui sont le plus en difficulté? Les banques alimentaires sont vraiment essentielles pour de très nombreux Canadiens. En revanche, on peut dire que certaines organisations ne sont pas véritablement, au chapitre des dons de charité, des organismes de bienfaisance. Cela remet en question la façon dont on définit un organisme de bienfaisance.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins également.
Monsieur Thomas, j'ai été un petit peu surpris par vos commentaires sur le financement des élections. J'aimerais y revenir brièvement si vous le permettez.
L'adoption de la Loi sur la responsabilité est l'une des premières mesures concrètes prises par notre gouvernement. Maintenant, nous éliminons les dons des entreprises et des syndicats et les subventions accordées aux partis politiques en fonction de leur part du vote.
J'ai peur que la politique canadienne s'américanise. J'ai pour ma part participé à quatre campagnes et vu les deux côtés de la chose, et j'estime que la meilleure option c'est de faire ce que nous faisons relativement aux grosses donations. Les Canadiens ne veulent pas faire de dons aux partis politiques, mais ce n'est pas au gouvernement de payer la note. Je ne pense pas que l'argent des contribuables devrait servir à financer les partis politiques.
Selon vous, quelles mesures nous permettraient de limiter la participation des syndicats et des grosses entreprises à la sphère politique tout en s'assurant de financer adéquatement les campagnes électorales? Par rapport à ce qui se fait aux États-Unis, et dans la plupart des démocraties, bien franchement, les campagnes menées au Canada ne coûtent pas très cher. Dites-nous brièvement ce que vous recommanderiez à cet égard.
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D'accord, je comprends. Je pensais que vous auriez quelques mots de sagesse, c'est ce que je demandais.
L'élimination de l'impôt sur les gains en capital sur des actions d'entreprises privées m'intéresse énormément, car je crois que c'est une excellente idée, certainement meilleure que l'élargissement du crédit d'impôt. Il existe d'excellents rapports sur l'élargissement du crédit d'impôt, notamment, Why the Proposed Stretch Tax Credit for Charities Should be Rejected , par Adam Parachin, professeur agrégé, Faculté de droit, Université de l'Ouest de l'Ontario.
Mais je remarque qu'un membre ici présent, je pense que c'était M. Aptowitzer, a mentionné qu'on pourrait utiliser la règle de monétisation de cinq ans et l'étoffer, et j'aimerais savoir comment on pourrait y ajouter des garde-fous tout en maintenant la simplicité de l'idée.
Peut-être était-ce vous, monsieur Burrows?
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Merci, monsieur le président.
Madame Alepin, j'ai eu beaucoup de plaisir à feuilleter votre mémoire et à vous entendre parler. Les impacts sur notre système démocratique des diverses mesures qui sont prises sont pour moi une préoccupation depuis fort longtemps. Les questions fiscales m'intéressent aussi depuis un bon moment. J'avais d'ailleurs reçu à l'époque Mme Carole Presseault, qui est CGA et qui est également une partisane acharnée de la simplification de notre déclaration de revenus.
Votre mémoire cible l'influence potentiellement négative des grandes fortunes sur le processus démocratique. J'ai trouvé cela très intéressant. À ce sujet, vous suggérez justement de faire passer le quota des débours obligatoires de 3,5 p. 100 à 8 p. 100 pour accélérer la récupération des dons des contribuables sur le plan fiscal. Tout dernièrement, on a parlé dans l'actualité d'un site Web évangéliste qui avait enfreint la Loi électorale. On peut parler d'un éventuel cheval de Troie et supposer que l'organisme évangéliste profite de dons de bienfaisance.
Expliquez-nous alors en quoi l'augmentation de ce quota pourrait réduire une éventuelle atteinte à la démocratie? Le pouvoir de dépenser, dans l'absolu, est en effet un pouvoir. Je me demande donc si le fait d'augmenter le volume des débours n'entrerait pas en contradiction avec cela ou si, au contraire, la dépense à un rythme plus rapide du capital accumulé permettrait de contrer cette menace à la démocratie.
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On pourrait en parler longtemps. Si on regarde nos systèmes démocratiques, on constate qu'ils fonctionnent. C'est vrai et on peut le constater. Quand on examine le processus du début à la fin, on voit que tout s'enclenche et que ça va bien. Le problème survient quand une fortune est tellement considérable — qu'elle soit entre les mains d'une fondation privée ou d'un individu — que ses détenteurs ont plus de pouvoirs que les élus sur les questions publiques, en termes financiers. Pour ce qui est de l'exemption des gains en capital relative aux dons d'actions de sociétés privées, par exemple, il s'agit souvent de fondations privées à qui on transfère des actions de sociétés privées. Il est rare que des organismes de bienfaisance publics soient en cause dans de tels cas.
Il faut vraiment être attentif à ce que je suggère ici et s'assurer de ne pas mettre en vigueur un régime relatif aux fondations privées. Vous savez sans doute qu'une fondation privée est un organisme dont le contrôle est entre les mains d'une personne ou de personnes liées, et non entre les mains du public. Il faut donc être prudent. Si on instaure un régime d'imposition selon lequel l'argent qui se trouve dans une fondation privée provient majoritairement de fonds des contribuables et que cette fondation privée est contrôlée par une personne non élue, on joue avec la démocratie. On prend des risques avec le pouvoir public. Heureusement, les grands fondateurs des fondations privées semblent être de bons garçons.
En terminant, je vais vous donner un exemple. Aux États-Unis, où le régime relatif aux fondations de bienfaisance est semblable à celui du Canada, 600 milliards de dollars vont se retrouver entre les mains de 40 personnes dans le cadre de l'initiative Giving Pledge. Cette initiative d'envergure mondiale porte sur la pauvreté et la santé. Cette somme de 600 milliards de dollars est nettement supérieure au budget de l'Organisation mondiale de la Santé ou à celui du ministère québécois de l'Éducation. Quand on parle d'un système relatif aux fondations privées, il faut faire attention et éviter qu'une fondation privée donne un pouvoir absolu à une personne non élue pour traiter de questions d'ordre public avec l'argent des contribuables.
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Merci de le rappeler, et je suis très heureux de faire partie de cette étude des plus importantes.
Je remercie tous les témoins de leur présence et de leurs exposés aussi utiles qu'intéressants.
J'ai des questions précises pour des personnes en particulier.
Monsieur Aptowitzer, j'ai bien aimé votre façon de présenter votre exposé en catégories d'incitatifs et de moyens de dissuasion. L'une de vos suggestions a retenu mon attention, à savoir de reporter la date limite jusqu'à laquelle les Canadiens peuvent faire des dons de bienfaisance. Vous avez proposé de la reporter jusqu'à la fin février. Ce qui coïncide avec la date limite pour les contributions aux REER. J'imagine que ce n'est pas une coïncidence.
Pourriez-vous nous dire pourquoi vous pensez que ce report de date serait utile? Avez-vous modélisé les impacts éventuels sur le comportement en matière de don?
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Merci beaucoup de la question.
Je travaille avec Arthur Drache. Arthur Drache est celui qui a rédigé un grand nombre des propositions à l'examen aujourd'hui — les dispositions législatives. Je lui ai demandé s'il y a une raison en particulier pourquoi la date limite actuelle est le 31 décembre. Il m'a répondu que personne n'y avait jamais réfléchi.
Je n'ai pas de modélisation pour la fin février, mais je ne crois pas qu'il en existe pour le 31 décembre non plus. Si je propose l'idée, c'est parce que nos amis ici derrière, les témoins, ont pris beaucoup de temps pour éduquer et informer leurs donateurs sur les aspects fiscaux des contributions aux REER. Si l'on veut que les gens comprennent bien les programmes incitatifs, ce qui est important dans le cas où il y aura de tels programmes, il faut que nous les informions mieux sur ce sujet. Si votre date limite coïncide avec la saison de Noël, il faut faire des pieds et des mains pour faire passer la campagne de sensibilisation.
Mon idée était plus qualitative que quantitative. Je n'ai pas de modélisation, et franchement je ne pense pas que j'aurais réussi à en faire. Je pense que les choses sont mieux ainsi.
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Il y a plusieurs éléments. Premièrement, les garde-fous dans le système canadien. Il y a beaucoup de restrictions sur ce que les fondations privées peuvent détenir et faire. Certains pensent dans le secteur caritatif qu'on va trop loin et qu'on limite les contributions philanthropiques.
Le problème avec les contingents de versements, c'est qu'on ne peut pas les augmenter arbitrairement à cause d'un conflit des lois. Là, on tombe dans le droit des fiducies. Par exemple, j'ai parlé de la fondation qui remonte aux années 1950. Cette fondation avait été créée en tant que structure de revenu uniquement, par opposition à l'utilisation de capital. Donc, pour obtenir ce 8 p. 100, il faudrait user du capital. Il y a des éléments complexes dans le secteur qui pourraient vous empêcher de le faire.
La grande majorité des fondations modernes privées sont organisées de façon à dépasser largement les 3,5 p. 100, ce qui représente d'énormes apports de capital. J'ai, en fait, collaboré avec l'une de ces fondations qui n'a existé que pour deux ans, le temps de faire passer l'argent à la communauté et à des organismes caritatifs remarquables. L'on voit là qu'il y a également l'autre extrême.
Monsieur Alexander, vous avez dit être préoccupé par le fait qu'en rendant l'affaire plus attrayante, on diminue en quelque sorte l'altruisme. Je comprends ce sentiment; cependant, ayant travaillé au sein de la collectivité pour tenter de lever des fonds pour de très bonnes causes, on se demande: « Est-ce que cela a de l'importance? Peu importe l'instrument utilisé, l'important c'est de trouver l'argent nécessaire pour que l'organisme de charité puisse faire son travail, voilà ce qui est important. »
Je voulais donc dire cela, et je voulais également vous demander de confirmer votre position sur le crédit d'impôt bonifié, car cela n'était pas clair pour moi.
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Je vais maintenant poser des questions.
Je voudrais revenir sur ce débat quant à savoir s'il est préférable de mettre en oeuvre un crédit d'impôt bonifié ou de passer à un crédit.
Lorsque j'ai posé la question à l'organisation Imagine Canada, leur réponse a été essentiellement la même que la vôtre, monsieur Burrows, c'est-à-dire que cela ne va pas encourager davantage les dons et que ça va ajouter un coût fiscal additionnel considérable au gouvernement.
Dans votre déclaration, monsieur Waters, vous avez dit clairement que les économistes de BMO ont dit que cela encouragerait les dons des petits donateurs. Êtes-vous en quelque sorte en désaccord l'un avec l'autre? Ou bien dites-vous que cela aurait un impact modeste sur les petits donateurs, mais que cela n'aurait pas beaucoup d'impact en général pour ce qui est de changer le comportement en ce qui a trait aux dons de charité?
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais que vous me parliez du coût réel de l'exemption d'impôt sur les gains en capitaux dans le cas du don de titres cotés en bourse, par exemple.
À notre première séance sur cette question, les fonctionnaires du ministère des Finances nous ont dit que les coûts étaient de 34 millions de dollars par année, si je ne m'abuse, en présumant que les titres auraient été vendus de toute façon. Je leur ai posé des questions sur la méthodologie. En effet, s'il n'y avait pas eu de vente, si le titulaire de ces actions bancaires après les avoir gardées très longtemps n'avait pas décidé de les vendre pour faire ce don, cela n'aurait rien coûté au Trésor. Je crois donc que le coût attribué à cela par le ministère des Finances pourrait dépasser de beaucoup le coût réel pour le gouvernement.
Il est important de le savoir, dans le cadre de cette discussion sur les mesures fiscales en période de compressions budgétaires. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, parce que je crains qu'on exagère les coûts pour le gouvernement de ce type de dépenses fiscales. Qu'en pensez-vous?
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Jusqu'ici, dans le cadre de ces audiences, vous vous êtes exprimé de manière très claire sur ce point.
En grande partie, les biens immobiliers sont détenus aussi longtemps que possible, et ils ne sont pas assujettis à la fiscalité. Souvent, un don déclenche une dépense fiscale lorsque l'autre possibilité aurait été de ne rien faire et de garder les biens. Puisqu'ils servent l'intérêt public, est-ce vraiment une dépense fiscale?
Ayant travaillé avec des donateurs, je dirais au sujet des titres boursiers qu'environ 50 p. 100 des cas sont des dépenses qui allaient avoir lieu de toute façon, pour diverses raisons fiscales, il peut y avoir une fusion-acquisition, etc.
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Merci, monsieur le président. Je suis ravi de pouvoir poser encore des questions.
J'aimerais revenir à ce qu'on a entendu la dernière fois, soit que 9 p. 100 des donateurs font 62 p. 100 des dons au Canada. Je veux me concentrer sur eux, parce qu'à mon avis, c'est une ressource insuffisamment exploitée. Je crois que la plupart des gens donneraient davantage, s'ils y étaient incités plus efficacement, surtout dans ces cas-là. Je parle principalement des revenus et non du capital.
Quelles sont les occasions à saisir? Dans vos mémoires, je me suis intéressé à la question de la motivation. Essentiellement, d'après vous, l'incitatif ce n'est pas la possibilité d'obtenir un meilleur crédit d'impôt. J'aimerais savoir pourquoi. Je connais beaucoup de gens qui donnent beaucoup d'argent et qui tiennent compte précisément de cela. Ils planifient leurs dons, d'année en année. Ils font leurs dons en fin d'exercice, ou à la fin de décembre, en fonction de ce qui est le plus avantageux pour eux. Voilà pourquoi je pense que le crédit d'impôt bonifié ne serait pas nécessairement une bonne chose. Je pense que ça manipulerait les dons et que ça manquerait de cohérence pour les oeuvres caritatives.
Quelles idées avez-vous pour obtenir plus d'argent de ces gens, qui représentent 9 p. 100 des donateurs, de manière qu'au lieu de donner 62 p. 100 des dons, ils en donnent 70 p. 00 ou 75 p. 100? Comment tirer plus d'argent de ces donateurs?
Monsieur Thomas.
Je tiens à vous remercier tous d'être venus ici, aujourd'hui.
[Français]
Je vous remercie beaucoup de vos présentations et de vos réponses à nos questions.
[Traduction]
Encore une chose, à l'attention de M. Aptowitzer. Si vous avez autre chose à dire au comité sur votre définition des oeuvres de charité, nous sommes prêts à considérer cette idée intéressante. Si vous pouvez nous transmettre d'autres observations, nous l'apprécierions.
Si l'un ou l'autre d'entre vous a quelque chose à ajouter, veuillez l'envoyer à la greffière. Nous nous assurerons que ce soit distribué à tous les membres du comité.
Un petit message, chers collègues. Vous avez reçu une ébauche de calendrier. J'ai essayé de planifier nos séances, dans la mesure du possible. Ce n'est qu'une ébauche et s'il y a quelque chose à changer, faites-le-moi savoir. Il y a une rencontre avec Cisco lundi matin à 9 h 30. Veuillez aviser la greffière de votre présence à cette rencontre.
Bien, merci beaucoup.
La séance est levée.