La séance est télévisée. À l’ordre du jour, conformément à l’ordre de renvoi du mercredi 7 décembre 2011, nous examinons le projet de loi .
Il s’agit de notre deuxième séance sur le sujet.
Nous entendrons six témoins aujourd’hui. Il y aura dans l’ordre l’Alliance de consommateurs de vin canadien; le British Columbia Wine Institute; Château des Charmes; les Grape Growers of Ontario; le Wine Council of Ontario; et Winelaw.ca.
Je vous remercie de votre présence. Nous vous accorderons cinq minutes chacun pour faire votre exposé, puis nous passerons aux séries de questions.
Madame George, vous avez la parole en premier, s’il vous plaît.
Au nom des Canadiens, particulièrement des amateurs de vin, nous sommes heureux que vous ayez demandé à l’Alliance de consommateurs de vin canadien de venir vous faire part de son point de vue. Nous sommes un organisme bénévole et communautaire qui est surtout connu pour sa campagne « Free My Grapes ».
Nous existons pour une seule raison. Nous voulons qu’il soit légal pour les Canadiens d’acheter du vin directement des établissements vinicoles canadiens et de le faire livrer d’une province à une autre pour usage personnel. Nous parlons dans ce cas de ventes de vin directement des établissements vinicoles aux consommateurs. Nous accordons notre soutien au projet de loi , qui tiendrait compte idéalement de notre amendement. J’ai cinq points à faire valoir, ainsi qu’une importante proposition de modification.
Tout d’abord, les Canadiens veulent l’élimination des restrictions concernant l’importation interprovinciale de vin. Nous sommes d’avis qu’il devrait y avoir un seul marché canadien et que tout devrait être accessible par le Web. Le projet de loi offrira aux consommateurs un plus grand choix de produits et la possibilité de visiter un établissement vinicole, de faire livrer le vin à son domicile, d’en commander de nouveau, de devenir membre de clubs du vin et de commander par Internet du vin dont des connaissances leur ont parlé ou dont on vante les mérites sur un blogue local.
Les Canadiens n’acceptent pas une telle loi archaïque à tendance prohibitionniste dont on se moque dans les grands journaux nationaux et locaux, à la radio et même aux bulletins nationaux de fin de soirée. Des Canadiens de toutes les provinces et de tous les territoires appuient notre cause. Ils ont signé notre pétition, ont fait parvenir des lettres à leur député, ont joint notre page Facebook et nous suivent sur Twitter. Il y a même un Canadien, Terry David Mulligan, qui s’est dit prêt à aller en prison en protestant contre la loi.
Deuxièmement, c’est abordable. Notre demande concernant la vente de vin directement des établissements vinicoles aux consommateurs a été soigneusement rédigée pour minimiser les effets sur les recettes provinciales. Selon notre analyse qui se fonde sur les données de ShipCompliant — une société qui suit l’effet des ventes directement des établissements vinicoles aux consommateurs aux États-Unis, où c’est légal dans 38 des 50 États d’expédier du vin vers un autre État —, seulement 0,6 p. 100 de 1 p. 100 du vin produit aux États-Unis est transporté d’un État à un autre. Si nous transposons ces données au Canada et que nous présumons que le changement n’apportera pas d’avantages économiques, ce qui se veut une hypothèse très prudente, 0,6 p. 100 de 1 p. 100 représente de 0,001 à 0,015 p. 100 des recettes des régies des alcools. Les pertes possibles aux trésoreries provinciales ou territoriales varieraient d’un minimum de 44 $ au Nunavut à un maximum de 619 000 $ en Ontario. Ces sommes peuvent facilement être récupérées par des économies de coûts. Par exemple, la vente de vins directement des établissements vinicoles aux consommateurs et une augmentation de 0,01 $ du prix des bouteilles de vin entraîneraient une augmentation des revenus dans toutes les provinces et tous les territoires.
Pour ce qui est des avantages, nous croyons que les taxes, les emplois et les autres avantages économiques qui se feront sentir dans les provinces seront amplement suffisants pour couvrir les coûts et que les provinces productrices de vin feront des gains considérables en raison de l’augmentation du tourisme et des ventes de vin et de raisins. Étant donné que les frais d’expédition seront élevés, l’achat de vin directement des établissements vinicoles ne sera rentable que pour les produits qui ne sont pas déjà disponibles sur le marché local. De plus, cela servira principalement à l’achat de vins haut de gamme. Comme aux États-Unis, 98 p. 100 du vin continuera d’être acheté localement.
Troisièmement, la grande majorité des vins canadiens ne sont tout simplement pas accessibles aux Canadiens. Allez jeter un coup d’oeil dans l’allée de votre magasin d’alcools et vous verrez clairement que très peu des quelque 450 établissements vinicoles canadiens y sont représentés. De plus, les magasins disposent d’un espace limité; c’est donc impossible d’offrir des produits de tous les établissements vinicoles.
Quatrièmement, le plus grand avantage sera pour les PME en milieu rural. La situation américaine démontre que chaque État qui a permis la vente de vin directement des établissements vinicoles aux consommateurs a vu augmenter les ventes de ses vins locaux, et la majorité des petits établissements vinicoles ne peuvent pas vendre leurs produits par l’entremise des régies des alcools ou ne le font pas. De plus, le tourisme culinaire et vinicole connaîtra une hausse.
Enfin, le présent projet de loi n’ébranle pas la nécessité ou la capacité des provinces de réglementer adéquatement la vente de vin. Les provinces décideront encore des règlements ou des restrictions relativement aux changements concernant la vente de vin directement des établissements vinicoles aux consommateurs. Elles continueront de s’assurer de protéger les mineurs, par exemple, en octroyant des permis aux entreprises de transport et en exigeant une preuve d’âge à la livraison.
Plus tôt, j’ai mentionné un élément qui nous préoccupe, et je vais conclure avec ce point. L’amendement tel qu’il est rédigé actuellement permettrait aux régies des alcools de faire fi de la volonté des parlementaires et de n’apporter en fait aucun changement. Étant donné que les régies des alcools n’ont pas voulu collaborer avec les négociants en vins et élaborer un cadre régissant la vente de vin directement des établissements vinicoles aux consommateurs et que les provinces ont refusé de répondre positivement à l’invitation du ministre Gerry Ritz pour venir discuter des changements nécessaires, rien ne nous laisse présager, sauf dans le cas de la Colombie-Britannique, que les provinces accepteront de tenir compte du projet de loi . Ce résultat décevrait et enragerait les Canadiens qui croient majoritairement que le projet de loi C-311 est utile. Autrement, pourquoi gaspillerions-nous temps et argent à ce sujet?
Dans la version anglaise, nous demandons d’ajouter le mot « reasonable » avant le mot « quantity » et d’enlever le mot « and » qui suit.
La jurisprudence démontre qu’un tel changement n’entraînerait pas les problèmes soulevés par M. Albas, et les provinces auraient toujours la capacité de limiter les quantités. Cette modification ne ferait que les encourager à permettre plus que deux bouteilles par année, comme c’est le cas actuellement dans certaines provinces. M. Hicken sera en mesure de vous en parler davantage.
Bref, nous vous demandons d’adopter le projet de loi en tenant compte de notre modification.
Merci.
:
Bonjour et merci de nous donner l’occasion de venir vous présenter le point de vue du British Columbia Wine Institute.
Le British Columbia Wine Institute est un organisme composé de membres bénévoles qui représentent 95 p. 100 de l’ensemble de la production de vin de la province. L’organisme est entièrement financé par les ventes de ses membres. Le BCWI défend les intérêts de la B.C. VQA — soit les vins produits entièrement en Colombie-Britannique — en assurant la commercialisation, la diffusion et la promotion des produits auprès de tous les intervenants sur le marché.
En particulier, l’industrie vinicole de la Colombie-Britannique a connu une croissance fulgurante au cours des cinq dernières années, avec une augmentation moyenne de quatre millions de dollars par année, soit une augmentation d’environ 9 p. 100 pendant cette période. L’industrie vinicole en Colombie-Britannique est petite; il y a environ 10 000 acres de raisins. Comparativement à l’Ontario avec ses 15 000 acres ou à Napa avec ses 40 000 acres, nous avons une industrie artisanale. Le projet de loi nous aidera beaucoup à étendre notre marché. Parmi les 210 établissements vinicoles détenant un permis dans la province — 24 autres personnes ont signifié leur intention de démarrer un établissement vinicole dans l’avenir —, environ 80 p. 100 produisent moins de 10 000 caisses, et la majorité des établissements vinicoles sont des entreprises familiales qui produisent moins de 5 000 caisses par année.
En janvier 2012, 25 p. 100 des ventes de bouteilles de vin portant le sceau B.C. VQA ont été faites par l’entremise de la LDB, et 24 p. 100 de ces ventes ont été réalisées directement dans les établissements vinicoles. Le reste a été vendu dans des magasins d’alcools privés, des restaurants, etc.
Même s'il est difficile d’évaluer le nombre de ventes directement effectuées dans les clubs du vin et de livraisons directes dans la province, la majorité des établissements vinicoles de la Colombie-Britannique offrent ce type de services, puisqu'il s'agit là d'une stratégie efficace de commercialisation et de distribution, en particulier pour les petits producteurs. Il est raisonnablement permis de croire qu'une minorité d'établissements vinicoles expédient illégalement du vin directement à des clients d'autres provinces au détriment évident de la majorité d'entre eux qui respectent la loi.
L’industrie du tourisme vinicole en Colombie-Britannique a connu une croissance incroyable au cours des dernières années, particulièrement depuis les Jeux olympiques de 2010. De nombreux établissements vinicoles ont consenti d'importantes dépenses en immobilisations au titre notamment de l'hébergement et de la restauration. Le reste est allé à l’accroissement de l’industrie du tourisme vinicole en Colombie-Britannique.
Le tourisme vinicole en Colombie-Britannique est évalué à 75 millions de dollars, selon une étude réalisée en 2003, mais on s’entend pour dire que la valeur de l’industrie est considérablement plus élevée. Le tourisme vinicole est un atout majeur pour l’industrie touristique en Colombie-Britannique.
Comme vous le savez, la Loi sur l'importation des boissons enivrantes ne prévoit pas d’exemption dans le droit fédéral concernant l’importation interprovinciale, même s'il ne s'agit que d’une petite quantité de vin pour usage personnel. La LIBE interdit à un consommateur canadien de vin de transporter dans une province du vin qui n'a pas été acheté par la régie des alcools de cette province ou qui ne lui a pas été consigné. La loi empêche également un consommateur de commander directement du vin d'un établissement vinicole situé dans une autre province que la sienne après avoir visité la région vinicole de la Colombie-Britannique.
Depuis juin 2011, plusieurs régies des alcools ont adopté des politiques permettant aux consommateurs de ramener dans leur province d'origine une quantité de vin pour usage personnel. Même s’il s’agit d'une amélioration, ces politiques n'ont de véritable intérêt que pour les résidants des localités frontalières et ne sont pas vraiment utiles pour les consommateurs de vin ou les touristes de la Nouvelle-Écosse, par exemple, qui visitent la région vinicole de la Colombie-Britannique une fois tous les deux ou trois ans.
Selon nous, le projet de loi sera très avantageux pour l'industrie vinicole de la Colombie-Britannique. Le nombre d'établissements vinicoles en Colombie-Britannique a augmenté de 281 p. 100 au cours de la dernière décennie. La majorité des établissements sont de petites entreprises familiales concentrant leurs opérations sur de petits vignobles. Les investissements consentis dans l'industrie vinicole de la province traduisent l'intérêt croissant des gens pour le vin de la Colombie-Britannique et le tourisme.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais livrer mes remarques en anglais, mais si des membres du comité préfèrent me poser des questions en français par suite de ma présentation, je pourrai répondre en français.
[Traduction]
Je vais poursuivre mon exposé en français.
Je m’appelle Paul Bosc. Je suis président de Château des Charmes; l’entreprise est située à Niagara-on-the-Lake. J’ai passé toute ma vie adulte au sein de cette entreprise. Mon père a lancé l’entreprise en 1978. Ma famille a quitté la France pour venir s’établir au Canada dans les années 1960. Mon père est la cinquième génération, et je suis la sixième génération de ma famille à cultiver le raisin et fabriquer du vin dans un but commercial. Nous avons fait du vin sur trois continents.
J’ai eu la chance au cours de ma carrière de visiter des établissements vinicoles un peu partout dans le monde. J’ai noué des amitiés et des relations avec des établissements vinicoles de partout dans le monde.
Je témoigne devant vous pour vous dire que je crois fermement que le statu quo est anticoncurrentiel et désavantage fortement l’industrie vinicole canadienne par rapport à ses concurrents étrangers qui tirent profit des avantages que leur confère la vente de vin directement aux consommateurs de leur marché national. Je peux vous assurer que les Français ne tiennent pas d’audiences en France pour se demander si un établissement vinicole à Bordeaux peut expédier du vin à ses clients à Paris. En fait, un établissement vinicole français peut vendre ses produits directement aux consommateurs partout dans l’UE; cela représente un marché potentiel de 400 millions de consommateurs. Comme Shirley-Ann l’a si bien noté, 38 États américains permettent la vente de vin directement aux consommateurs, ce qui touche environ 82 ou 85 p. 100 de la population américaine.
Pourquoi sommes-nous désavantagés? Lorsqu’on élimine l’intermédiaire, le grossiste ou le détaillant et qu’on assume le rôle du détaillant, cette pratique devient très lucrative. Les établissements vinicoles dans le monde qui adoptent ce système voient s’accroître leur part de leur marché intérieur, ce qui leur permet de devenir de sérieux exportateurs. On ne peut pas devenir un puissant exportateur, à moins de détenir une très grande part de son marché intérieur. Je vais encore une fois me servir de l’exemple français. Les Français occupent 90 p. 100 de leur marché intérieur. Ils se trouvent dans une excellente position pour percer un marché étranger comme le Canada.
En grande majorité, c’est le tourisme qui motive l’engouement des gens pour la vente de vin directement aux consommateurs. Le Canada est un très grand pays. C’est en très grande partie en raison des gens qui font parfois des milliers de kilomètres pour visiter nos établissements vinicoles. Ils viennent d’Alberta, de la Saskatchewan, de la Colombie-Britannique ou de la Nouvelle-Écosse et ils voudraient nous acheter deux ou trois caisses de bouteilles de vin. Ils aimeraient avoir de l’aide pour les expédier à la maison. C’est aussi simple que ça. Selon moi, ce que les touristes font à Niagara-on-the-Lake, y compris l’achat de deux ou trois caisses de bouteilles de vin, ça ne regarde aucunement leur province d’origine ou la régie des alcools de leur province.
J’ai déjà mentionné qu’il s’agissait de transactions lucratives. On produit du vin dans maintenant six provinces canadiennes. On compte plus de 400 établissements vinicoles au Canada, et ce sont majoritairement des entreprises familiales.
Le Grape Growers of Ontario appuie le projet de loi . Nous nous réjouissons de voir que tous les partis sont en faveur de l'idée d'accroître la culture et l'utilisation de raisins de cuve canadiens. Le projet de loi est bien intentionné et, s'il est bien appliqué, il pourra être d'une grande utilité pour nos membres. L'excellente réputation des vins canadiens fait du bruit partout dans le monde. Tous les Canadiens devraient, légalement, être en mesure de savourer nos merveilleux vins ontariens. Les établissements vinicoles devraient avoir autant de facilité à expédier leurs vins vers Memphis que vers Montréal.
Loin de nous l'idée de nous opposer à cette initiative emballante, mais il faut nous assurer que les modifications proposées dans le projet de loi C-311 permettent d'atteindre l'objectif de la façon la plus optimale ou la plus sûre. À l'instar de nos partenaires en Nouvelle-Écosse, nous estimons que l'initiative ne devrait s'appliquer qu'aux vins fabriqués entièrement à partir de raisins canadiens. Toutefois, nous sommes conscients qu'aux termes des règles de l'OMC, il faut donner une possibilité égale aux vins provenant de tous les membres de l'OMC. Les entreprises canadiennes de coupage et d'embouteillage de vins importés seraient-elles laissées à elles-mêmes? La chaîne Costco pourrait-elle offrir sa gamme de vins Julia Cellier — des vins de cépages étrangers, embouteillés au Québec — dans l'ensemble du pays? Nos membres craignent que le projet de loi C-311 favorise davantage les vins importés que les vins entièrement canadiens. Risquons-nous de perdre plus que de gagner?
La Loi sur l’importation des boissons enivrantes accorde aux régies des alcools le droit de premier destinataire. La modification de cette loi pourrait attirer l'attention des pays membres de l'ALENA et de l'OMC. Si le Canada devait faire l'objet d'une contestation en ce qui concerne la façon dont l'ensemble des provinces ou les principales provinces mettent en oeuvre le projet de loi , alors les régies des alcools pourraient se faire contester pour d'autres pratiques, voire toutes les pratiques fondées sur la LIBE.
Vers la fin des années 1980 et au début des années 1990, les pratiques des régies des alcools ont fait l'objet de deux contestations aux termes du GATT, et le Canada a perdu les deux fois. Il y a quelques années, il y a eu une autre contestation de la part de l'Union européenne dans le cadre de l'OMC et, pour régler le différend, il a fallu faire plus de concessions. Ces décisions ne portaient pas seulement sur la majoration de prix. Elles condamnaient également des pratiques canadiennes relatives au point de vente et à la livraison directe, sujets dont nous sommes saisis aujourd'hui.
La semaine dernière, vous avez demandé si les pratiques américaines avaient suscité des contestations. En fait, le Canada a contesté les États-Unis au sujet d'un large éventail de pratiques américaines liées au vin et à la bière. Le Canada a eu gain de cause. Dans le rapport adopté par le GATT en juin 1992, on a condamné plusieurs pratiques liées à l'utilisation de vins de raisins ou de fruits locaux. Les contestations antérieures devant le GATT et l'OMC avaient été réglées au moyen de négociations ou de compromis. L'OMC est plus logistique que le GATT. De nouveaux litiges pourraient coûter cher aux établissements vinicoles et aux viticulteurs canadiens.
Selon moi, espérer que les modifications apportées en vertu du projet de loi C-311 passeront inaperçues ou ne susciteront aucune contestation n'est pas une saine pratique commerciale. D'ailleurs, nous savons que l'Union européenne surveille de près ce dossier, d'après le témoignage de M. Dunning.
Nous sommes en faveur du projet de loi C-311. C'est sans doute une mesure législative plus séduisante sur le plan politique qui pourrait être bien accueillie — nous en sommes conscients —, mais il faut examiner attentivement certains risques et inconvénients éventuels pour être sûrs que nous n'ouvrons pas une boîte de Pandore.
Merci.
Je m'appelle Hillary Dawson. Je suis présidente du Wine Council of Ontario. Au nom de nos membres, je suis très honorée d'avoir été invitée à participer aujourd'hui aux audiences du comité.
Le Wine Council of Ontario, ou le WCO, est le grand défenseur des vins authentiques locaux de l'Ontario portant la mention Vintners Quality Alliance, ou VQA. Nous défendons également la promotion des régions vinicoles comme destination touristique. À titre d'association commerciale sans but lucratif, le WCO représente plus de 80 établissements vinicoles dans l'ensemble des régions vinicoles désignées de la province. Parmi nos membres, on compte des viticulteurs, des fabricants et des chefs de file en matière de tourisme local. Nous sommes l'avenir de l'industrie vinicole de l'Ontario, qui est une source de nouveaux investissements, d'emplois et de vins primés. De plus, le Wine Council of Ontario fait la promotion des qualités uniques des vins fabriqués localement en Ontario grâce à sa marque Wine Country Ontario, qui rejoint les consommateurs.
Fervent partisan du projet de loi , le Wine Council of Ontario se réjouit de l'appui qu'a récolté cette mesure législative auprès de tous les partis à la Chambre. Décidément, il y a consensus sur l'idée qu'il est grand temps de moderniser nos relations commerciales avec les consommateurs.
Les établissements vinicoles membres de notre association tiennent à ce que le projet de loi soit adopté, entre autres, à cause des défis liés à notre marché. En Ontario, les établissements vinicoles VQA peuvent actuellement vendre leurs vins aux points de vente suivants. Premièrement, il y a les ventes par l'entremise de la LCBO. C'est le seul moyen de distribuer en masse des vins en Ontario. La LCBO compte deux secteurs d'activité: d'une part, les vins vendus par la LCBO en grand volume à prix réduits et, d'autre part, ceux vendus par Vintages, qui est le principal mécanisme de vente des vins haut de gamme à prix élevés. Bien que la LCBO soit un excellent partenaire de la vente au détail et un grand partisan de la vente de vins VQA de l'Ontario, les établissements vinicoles de l'Ontario qui produisent des vins de qualité VQA ont surtout du mal à rejoindre les consommateurs au niveau des prix élevés, à défaut d'occasions.
En moyenne, Vintages lance sur le marché moins de 200 vins VQA par année au moyen de ce mécanisme. En outre, ces mises à la vente peuvent compter aussi peu que 20 caisses, mais en général, elles en comptent environ 125. Par conséquent, les établissements vinicoles VQA misent sur d'autres moyens pour vendre des vins VQA haut de gamme à prix élevés.
Un autre mode important est la vente dans d'autres provinces par l'entremise des régies des alcools. Le Wine Council of Ontario et ses établissements vinicoles membres cherchent activement à encourager les régies des alcools partout au Canada à accroître la présence de vins VQA sur les tablettes. Des réseaux, comme la Société des alcools du Manitoba, ont établi des partenariats avec l'industrie afin de promouvoir les vins VQA, ce qui a entraîné une grande variété de choix sur ce marché.
Il est à noter que ces occasions fonctionnent le mieux lorsqu'il y a des conditions de marché qui favorisent des résultats positifs à la fois pour les établissements vinicoles et les détaillants. Ce ne sont pas toutes les provinces qui souhaitent développer ce marché de cette façon, mais l'industrie travaille activement à faire participer le plus grand nombre possible de provinces, et continuera de le faire en vue d'assurer une forte présence de vins entièrement canadiens pour les consommateurs canadiens.
Le troisième mode pour les vins VQA est la vente directe au commerce. Quand ils ont l'occasion de vendre directement aux consommateurs, les établissements vinicoles VQA de l'Ontario affichent d'excellents résultats sur le plan des ventes au commerce dans cette province. Selon nous, la leçon à tirer au chapitre de la livraison directe est que nos établissements vinicoles sont prêts à investir et à augmenter les ventes dans ces circuits de vente, où il existe une concurrence féroce et, grâce à ce service personnalisé, nous pouvons faire croître nos entreprises et ce, malgré la présence de vins importés et de prix de consignation.
Quatrièmement, il y a l'exportation des vins. Ce mode continue de présenter une excellente occasion pour les vins canadiens, particulièrement les vins de glace. En collaborant sous l'égide d'une stratégie nationale en matière d'exportation, les établissements vinicoles VQA continuent de faire connaître les vins de glace et les vins de table haut de gamme à l'étranger.
Enfin, et par-dessus tout, il y a les ventes à partir des caves à vin. Pour la vaste majorité des établissements vinicoles en Ontario, les transactions à même les vignobles constituent le principal mécanisme de ventes. À l'heure actuelle, en Ontario, on compte environ 130 établissements vinicoles actifs sur le plan commercial qui produisent et qui vendent des vins VQA. Ces ventes sont principalement attribuables au grand nombre de touristes qu'attirent les régions vinicoles vers notre marché. C'est dans les caves à vin que les consommateurs établissent un lien affectif important avec l'expérience vinicole et les vins. C'est ce que les consommateurs veulent vivre et ramener chez eux. Qu'il s'agisse d'une transaction sur place ou d'une commande renouvelée d'un produit, on ne peut pas répondre directement à cette demande lorsqu'on a affaire à des consommateurs canadiens vivant à l'extérieur de la province. Voilà qui est embarrassant pour les établissements vinicoles et exceptionnellement frustrant pour les consommateurs.
Ces derniers, en tant que grands amateurs de vins, s'attendent à pouvoir entretenir en tout temps cette relation très intime avec leur établissement vinicole favori. La capacité de les servir directement permettra aux établissements vinicoles d'établir une relation commerciale avec leurs clients de façon analogue à celle qu'ils ont avec pratiquement tous les magasins et fournisseurs.
J'ai hâte aux discussions d'aujourd'hui. Sachez que le Wine Council of Ontario appuie les amendements proposés par la Canadian Vintners Association. Ainsi, on s'assurera d'atteindre les résultats escomptés du projet de loi et de préciser les possibilités qu'il accorde aux consommateurs de vins canadiens.
Les ventes directes aux consommateurs donneront aux établissements vinicoles VQA de l'Ontario l'occasion de poursuivre les relations avec leurs clients les plus intéressés et les plus avertis. L'adoption du projet de loi sera le premier geste important et essentiel pour pouvoir cultiver ces relations dans un contexte commercial moderne. Cela viendra s'ajouter aux efforts que déploient sans cesse les établissements vinicoles de l'Ontario pour accroître leur présence et leurs ventes à la LCBO et auprès d'autres régies des alcools canadiennes.
Merci.
:
Merci de m'avoir invité à parler de cette question importante. J'aimerais brièvement passer en revue quatre points, qui sont également traités dans le mémoire que je vous ai remis.
Le premier concerne l'effet juridique de la loi actuelle. Contrairement à ce que vous avez peut-être entendu, la loi actuelle interdit complètement l'expédition de vin directement à des particuliers dans d'autres provinces et le transport interprovincial de vin pour usage personnel. À cet égard, il est très utile de noter que la disposition canadienne relative à l'interdiction de transport diffère de la loi américaine équivalente qui stipule que les expéditions entre les États sont illégales, seulement si elles enfreignent les lois dans l'État de destination. L'interdiction absolue au Canada pose problème, surtout si une province souhaite autoriser l'importation de vin d'autres provinces. J'en parlerai en détail tout à l'heure, particulièrement en ce qui concerne les lois en Alberta.
Il est également important de noter qu'en vertu de la Constitution, cette question est de compétence fédérale. On parle ici de commerce interprovincial, qui relève exclusivement de la compétence fédérale en vertu de la Constitution.
Le deuxième point dont je voudrais parler découle du premier, et j'aimerais expliquer pourquoi nous avons besoin d'une réforme fédérale en citant des exemples de...
Le deuxième point dont je voudrais parler découle du premier. J'aimerais expliquer pourquoi nous avons besoin d'une réforme fédérale en citant des exemples de mesures prises récemment par les régies provinciales des alcools. Les médias se sont grandement intéressés à la question — surtout à la suite de l'annonce faite par Terry David Mulligan qu'il allait transporter du vin entre la Colombie-Britannique et l'Alberta. Plusieurs régies des alcools sont d'avis qu'il est en fait légal pour un particulier de transporter du vin d'une province à l'autre, mais qu'il est illégal pour des établissements vinicoles d'expédier du vin directement à des consommateurs. Par exemple, l'Alberta et l'Île-du-Prince-Édouard ont interprété leurs propres lois à cet effet et, en juin 2011, la LCBO a diffusé un énoncé de politique dans le même sens.
À mon avis, la politique de la LCBO est tout simplement mal fondée en droit. La Loi sur l'importation des boissons enivrantes, ou la LIBE, ne fait aucune distinction entre le transport pour usage personnel et l'expédition d'alcool. Les deux sont interdits. Selon mon opinion juridique, une régie provinciale des alcools n'a pas la compétence constitutionnelle pour annuler une interdiction pénale fédérale en mettant en oeuvre une politique.
On pourrait débattre de la question de savoir si une province peut changer l'effet de la LIBE en adoptant ses propres lois concernant l'importation. Toutefois, d'après la citation que j'ai incluse dans mon mémoire, pas plus tard qu'en 2009, l'Alberta Gaming and Liquor Commission a soutenu le contraire, même si les lois provinciales de l'Alberta permettent clairement l'importation pour usage personnel.
Par conséquent, il faut une mesure fédérale parce que nous nous retrouvons maintenant dans une situation lourde de conséquences juridiques. Premièrement, les gouvernements provinciaux et les régies d'alcool semblent si embarrassés par la loi actuelle qu'ils font des distinctions bizarres entre le transport pour usage personnel et l'expédition de vin, alors que rien dans les lois pertinentes ne justifie ces distinctions.
Deuxièmement, les gouvernements provinciaux, comme l'Ontario, essaient de passer outre à la loi fédérale au moyen d'énoncés de politique, ce qui, selon moi, est inadmissible.
Troisièmement, il y a maintenant des conflits entre les lois fédérales et provinciales, comme en Alberta, ce qui cause des niveaux injustes d'incertitude tant pour les consommateurs que pour les établissements vinicoles.
Le troisième point que je voulais aborder concerne les conséquences probables sur les recettes des régies provinciales des alcools, advenant l'adoption des modifications proposées par le projet de loi . Je me contenterai de dire que je partage tout à fait l'avis de Shirley-Ann George sur la question.
Je passe maintenant à mon dernier point. S'il est possible d'apporter des amendements au projet de loi, je crois que la Chambre devrait envisager d'ajouter, à l'exemption, une définition de la quantité minimale raisonnable pour usage personnel. Le libellé actuel du projet de loi laisse aux provinces le soin d'établir ces définitions. Le cas échéant, cela risque de créer un système incohérent d'exigences réglementaires, comme celui des États-Unis. Ou encore, comme Shirley-Ann l'a dit tout à l'heure, cela risque de ne pas changer grand-chose à la situation actuelle.
Si nous avions une norme nationale concernant la quantité minimale, les établissements vinicoles pourraient expédier leurs produits conformément à cette norme sans avoir à composer avec de nouveaux fardeaux réglementaires. Les provinces seraient alors libres d'y ajouter leurs propres règlements complémentaires. Un tel système, s'il était mis en place, serait supérieur à celui des États-Unis et se rapprocherait des normes que l'on trouve ailleurs dans le monde, notamment en France, comme M. Bosc l'a dit plus tôt.
Voilà, c'est tout ce que j'avais à dire pour le moment. Je serais heureux de répondre à vos questions.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de comparaître aujourd'hui. Je les remercie de leurs mémoires et présentations.
On doit observer ce qui existe présentement, c'est-à-dire une structure qui permet aux provinces d'exercer un certain contrôle, et d'un autre côté, on a les consommateurs et les producteurs de vin. Il faut trouver un équilibre.
Monsieur Hicken et madame George, vous avez parlé de la même chose que la Canadian Vintners Association. Vous proposez des amendements qui feraient en sorte que le fédéral intervienne encore plus et donne des indications supplémentaires aux provinces, alors que l'idée est quand même que, si le fédéral sort de ce programme, il laisse les provinces agir.
Monsieur Hicken et madame George, croyez-vous qu'en utilisant le terme « raisonnable », on impose aux provinces des critères qui sont, selon eux et selon la Constitution, de leur propre ressort?
:
Je vous remercie de votre question.
Les consommateurs sont littéralement perplexes. Ils ne comprennent pas pourquoi la loi existe. Les commentaires que j’ai entendus… Même lorsque j’ai été interviewée aujourd’hui dans le cadre de l’émission CTV News, ni l’une ni l’autre des personnes auxquelles je parlais ne savait que la loi existait.
Des études montrent que 75 p. 100 des Canadiens pensent que la loi devrait être modifiée, et un pourcentage presque égal de Canadiens avouent, en fait, avoir transporté du vin d’une province à l’autre ou s’être fait livrer du vin d’une autre province. C’est donc une loi qui n’est pas observée de nos jours et que les Canadiens n’appuient pas. Compte tenu de la façon dont nous avons formulé notre demande, les modifications n’auront pas d’importantes répercussions financières sur les provinces. En fait, leur incidence sera minime. Donc, nous nous sommes efforcés de trouver l’équilibre qui s’impose, selon vous.
Comme nous avons recommandé d’ajouter le mot « raisonnable », les provinces ne seront pas forcées de fixer une quantité précise bien qu’idéalement, elles devraient le faire. Encore une fois, nous estimons avoir essayé de trouver un équilibre approprié. Le mot « raisonnable » encourage simplement les provinces et les territoires à réviser la quantité qu’ils ont fixée et à être prêts à justifier le caractère raisonnable de celle-ci. Nous pensons que cela suffira à inciter les provinces à établir une limite plus élevée qui sera moins ridicule que deux bouteilles de vin par année, par exemple.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd’hui.
C’est une mission que bon nombre d’entre nous se sont donnée, et j’aimerais remercier Shirley-Ann d’avoir lancé l’initiative Free My Grapes. Je pense qu’après avoir quitté la Chambre de commerce du Canada pour prendre votre retraite, nous n’imaginiez pas entreprendre un tel travail par amour. Je vous remercie d’avoir, au cours des dernières années, donné généreusement de votre temps et d’avoir préparé le terrain en collaboration avec mon adjointe législative, Lynne Nicolson. Je me joins aussi à Dean Allison, à mon collègue, Dan Albas, qui parraine le projet de loi, et à tous les députés de la Chambre afin de remercier les instituts du vin locaux et provinciaux ainsi que la Canadian Vintners Association des efforts qu’ils ont déployés.
Donc, je poserais d’abord la question suivante à Mme George. Vous avez mentionné l’importance d’ajouter le mot « raisonnable ». Pourquoi cet amendement revêt-il une telle importance?
:
En ce qui concerne la quantité minimale raisonnable, vous pouvez examiner ce que font les États-Unis. Manifestement, cette question pourrait faire l’objet d’un débat. Personnellement, je dirais qu’elle devrait correspondre à une ou deux caisses par mois par personne. Ce serait ma définition personnelle d’une quantité raisonnable. C’est probablement une question juridique qui doit être discutée plus en détail. Mais, comme Shirley-Ann l’a déclaré, il est très important d’ajouter cette précision au projet de loi parce que, dans le passé, les régies des alcools ont montré qu’elles n’étaient pas particulièrement réceptives aux changements qui devaient être apportés.
Si l’on examine l’expérience des États-Unis à ce sujet, on constate que de nombreux États ont tenté de limiter radicalement la capacité des établissements vinicoles d’expédier des vins dans d’autres États, en imposant des limites étrangement basses et d’autres exigences que les établissements vinicoles avaient du mal à satisfaire. Je suppose que c’est ma réponse à votre première question.
En ce qui concerne votre deuxième question, selon moi, les amendements au projet de loi, tels qu’ils sont formulés à l’heure actuelle, ou les amendements qui ajoutent le mot « raisonnable » respectent nos accords commerciaux. Avec tout le respect que j’ai pour la passion exprimée par Mme Zimmerman, je ne pense pas que vous pourriez modifier le projet de loi de sorte qu’il s’applique uniquement aux vins produits entièrement à partir de raisins canadiens. J’estime que cela enfreindrait clairement le GATT et l’ALENA. Si vous le faisiez, le respect des accords commerciaux serait gravement compromis.
:
En ma qualité de membre du Comité du commerce international depuis six ans, c’est également ce que je crois comprendre.
Monsieur Prodan, comme vous habitez la Colombie-Britannique, je vous suis reconnaissant d’être venu témoigner, tout comme je remercie Josie Tyabji, qui a donné un exposé au cours d’une séance du comité de réduction de la paperasse que ma collègue, Mme McLeod, a organisée à Kamloops.
Peut-être pourriez-vous nous fournir des précisions sur l’incidence que le projet de loi d’initiative parlementaire aurait sur les petits viticulteurs non seulement de la Colombie-Britannique, mais aussi du reste du Canada, qui produisent 3 000 ou 4 000 caisses de vin et qui, par conséquent, ne sont pas en mesure aujourd’hui d’approvisionner les régies des alcools.
Absolument. Comme mes collègues l’ont indiqué, je pense que la Colombie-Britannique est une petite région productrice et que le Canada est un petit pays producteur. L’aspect touristique de cette industrie est d’une importance primordiale, et il ajoute une énorme valeur.
Le fait est qu’en Colombie-Britannique, la régie des alcools est très favorable à l’enregistrement de nos viticulteurs, tout comme le sont les autres sociétés des alcools du Canada. Toutefois, compte tenu des petites quantités qu’ils produisent, les petits producteurs de vin, qui forment le gros des viticulteurs, ne sont pas en mesure de maintenir les contingents requis pour faire des affaires avec les régies des alcools. Ce n’est simplement pas un moyen viable de développer leurs activités commerciales.
S’ils souhaitent se développer, ce qui est le cas, il est important qu’ils aient accès à la clientèle. La seule façon pratique d’y arriver est de faire affaire directement avec les consommateurs.
:
Merci. À mon avis, nous sommes venus aujourd’hui parce que nous avions le sentiment qu’il était important de soulever cette question. Manifestement, notre industrie est d’origine canadienne. Ce qui importe pour nous, c’est que nous conservions la possibilité de croître au sein de notre propre marché.
La raison pour laquelle j’ai soulevé la question et, à mon avis, elle est valable, c’est que nous ne tenons pas à ce que les Ontariens pensent qu’ils peuvent commander leurs bons vins européens d’une société des alcools de l’Alberta et à ce qu’un tel commerce commence à réduire notre part de marché.
Voilà ce qui nous préoccupe. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons soulevé la question aujourd’hui. Si le projet de loi avait pu être formulé de manière à indiquer qu’il s’appliquait seulement aux vins issus de raisins entièrement cultivés au Canada — manifestement, nous siégeons en ce moment à la Chambre des communes à Ottawa, au Canada —, nous aurions aimé que ce soit fait.
Voilà les questions qu’à notre avis, nous devions soulever pour prévenir les problèmes futurs que nous pourrions avoir. Ces enjeux sont importants et, si nous avions pu éviter les situations de ce genre, nous aurions aimé que le projet de loi les prévoie. Nous avons soulevé la question à plusieurs reprises.
:
J’essaie de mettre l’accent sur la diversité de l’industrie vinicole. Je sais que dans votre collectivité, dans la ville de Lincoln, disons, les établissements vinicoles sont les plus importants contribuables industriels de la collectivité. Ils sont très importants et ils sont là pour rester.
Dans ces collectivités, les gens ont consacré des dizaines de millions de dollars aux dépenses en immobilisations et aux investissements dans le secteur manufacturier. Nous devons créer un marché favorable à leur croissance qui leur permettra d’avoir accès à des consommateurs très connaisseurs. Ils sont très frustrés par le fait qu’ils font partie des rares secteurs où les gens ne sont pas autorisés à faire ce qu’ils font habituellement, c’est-à-dire passer des commandes directes, soit passer des commandes de la maison, par téléphone ou sur Internet, et entretenir ces relations commerciales très modernes.
C’est frustrant. Les investissements sont là, le potentiel de croissance est là, tout comme la demande des consommateurs. Nous essayons simplement de profiter le plus possible de ces occasions d’affaires, ce qui sera avantageux pour l’Ontario et le Canada.
:
Même s’il ne s’agit que de 2 p. 100 de l’ensemble du marché canadien du vin, je crois qu’une majorité écrasante des parts de marché sera occupée par les vins VQA de qualité supérieure et haut de gamme entièrement canadiens. Sur le marché intérieur, les vins que je viens de décrire détiennent 6 p. 100 du marché. Si 2 p. 100 du marché intérieur reviennent aux vins VQA, cela a une incidence énorme sur les petits producteurs de vin de qualité supérieure, mais dans l’ensemble du marché intérieur, cela ne s’élèvera qu’à 2 p. 100.
Nous avons aussi parlé d’une limite raisonnable. Il y a peu de temps, un homme d’affaires assez riche de Hong Kong, je suppose, a passé une commande de 20 caisses de vin de glace à la boutique, au prix de 18 000 $. En vertu de ce qu’on appelle une « exemption personnelle », la seule exigence des autorités était de confirmer que c’était destiné à des fins de consommation personnelle.
Je crois comprendre qu’il l’a fait parce que le vin a été exempté. Cette transaction, assez rare, malheureusement — nous n’en voyons pas assez — a généré plus de 3 000 $ en taxe de vente pour l’Ontario et le gouvernement fédéral. Il est extrêmement frustrant — et pas uniquement pour les producteurs de vin canadiens — de pouvoir faire une transaction de ce genre avec un homme de Hong Kong, mais de ne pas pouvoir en faire autant avec un compatriote canadien.
Je joue un autre rôle au sein de cette industrie. Je suis le président de la Canadian Vintners Association et j’ai parlé de ce problème avec des producteurs de vin de partout au pays, de grands, moyens et petits producteurs. Je n’ai pas encore rencontré un dirigeant d’un établissement vinicole qui ne pense pas que cela doit être réglé. Dans une industrie aussi diversifiée à l’échelle nationale, il est difficile de faire l’unanimité sur quelque question que ce soit, mais c’est le cas sur cette question.
:
Dean, je pense que vous savez très bien que la dernière fois que nous avons eu un important surplus en Ontario était en 2008, et nous avons laissé 8 000 tonnes de raisin sur le terrain.
Ce qui est sous-entendu dans le projet de loi — passer à des vins entièrement canadiens —, c’est que nous ne voulons jamais refaire une telle chose. Je pense que la raison pour laquelle nous sommes peut-être excessivement prudents, et certains diront que nous sommes un peu émotifs, c’est que plusieurs de nos vignobles n’ont manifestement pas les moyens de se retrouver dans la même situation qu’en 2008. Nous pouvons seulement aller de l’avant.
Donc, oui, utilisons cette capacité. Nous ne voulons pas qu’elle soit submergée par les produits importés qui entrent au Canada et en Ontario. Toutefois, comme l’ont dit mes deux collègues, je pense qu’en raison de la croissance de l’industrie, les possibilités existent. Donc, nous appuyons le projet de loi avec circonspection.
:
Je pense que ce qu’il est important de comprendre, c’est qu’actuellement, lorsque nous créons nos marques de qualité supérieure — du moins en Ontario —, ils sont principalement vendus à nos celliers ou dans les succursales de la LCBO, par l’intermédiaire de Vintages.
Chaque année, très peu d’unités de gestion de stock pour les vins VQA de l’Ontario sont accordées — moins de 200 —, et ce, pour l’ensemble des 130 établissements vinicoles commerciaux. Quand on pense qu’il y a 130 établissements vinicoles et qu’il y a cinq, six ou dix UGS qui sont en concurrence sur le marché de Vintages, cela signifie qu’il y en a beaucoup qui sont laissés pour compte.
On peut être mis en marché chez Vintages une année et ne pas l’être les deux années suivantes. Or, les vignobles produisent toujours et les vins de qualité supérieure existent toujours. Voilà pourquoi nous sommes toujours à l’affût de nouveaux marchés pour ce vin: nous voulons avoir la possibilité de le vendre de façon plus constante parce que nous le produisons chaque année.
:
Je pourrais parler de la Colombie-Britannique. Par rapport à nos établissements vinicoles de production de vins VQA, nous sommes dans une situation très similaire. Heureusement pour nous, nous vendons la majeure partie de notre production. Or, nous n’avons que 19 p. 100 du marché de la province. Donc, nous avons une très bonne marge de croissance.
Nous observons un début de plafonnement. Nous avons atteint un plateau, mais on plante plus de vignes, ce qui signifie que nous pourrons créer plus de produits.
La question est l’ouverture du marché. On parle de marché d’exportation et on regarde du côté de la Chine et de l’Asie, mais en réalité, le véritable marché d’exportation de la Colombie-Britannique, c’est l’Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba. Voilà où nous voulons vraiment être en mesure de croître.
Comme Hillary l’a indiqué, l’obstacle similaire est lié aux régies des alcools de ces provinces. On a simplement limité l’espace d’étalage. On n’a tout simplement pas d’espace physique pour garder le produit en stock, peu importe s’il vient de l’Ontario ou de la Colombie-Britannique.
Premièrement, je tiens à dire qu’au cours des 30 dernières années, j’ai été impressionnée par la croissance de notre industrie vinicole, particulièrement en Colombie-Britannique. La qualité du vin produit est vraiment formidable et, je dirais, très compétitive sur le marché international. C’est l’avis d’une personne qui n’est pas une grande spécialiste, mais j’ai trouvé une bonne variété de ce que j’appelle mes vins préférés de Colombie-Britannique.
Ma question porte davantage sur l’Accord sur le commerce intérieur, l’ACI. Dans le cadre de l’ACI, prévoit-on des recours que pourraient utiliser les producteurs de vin qui doivent affronter des obstacles pour la mise en marché de leurs produits au Canada?
:
Certainement. Vous vouliez savoir quel effet cela aurait. Comme l'a dit Hillary, notre avenir réside dans la croissance de la VQA, ou du vin canadien à 100 p. 100, de toute évidence, parce que cela a un effet économique direct.
Si nous pouvons établir un équilibre entre ce qui est canadien et ce qui est importé, il y aura une croissance. Elle ne sera pas considérable, mais il s'agit de donner au consommateur accès à un produit qui est en majorité canadien, nous l'espérons. Il y aura des occasions de croissance entre les provinces, cela ne fait aucun doute.
De l'autre côté, les sociétés des alcools peuvent présenter leur propre analyse de ce qu'elles pourraient perdre en taxes. Nous pensons que les occasions économiques sont là, tant et aussi longtemps qu'elles vont dépasser le nombre de produits importés qui pourraient tirer avantage du projet de loi.
:
Merci d'avoir participé à la réunion.
Madame George, il est agréable de vous voir dans une autre capacité et de vous voir utiliser vos talents pour une entreprise louable.
Je viens de la région la plus au sud du Canada. Pour quelqu'un qui l'ignorerait, il s'agit de Pointe-Pelée, évidemment, et nous avons, dans cette région, un certain nombre d'établissements vinicoles. Ils ne sont pas tous situés dans la circonscription que je représente, mais nous avons Smith & Wilson. Je vois tout le monde hocher de la tête. Cet établissement offre d'assez bons vins.
Je ne suis pas un connaisseur, mais je pense que je suis un Canadien typique qui prend un verre de vin et qui dit soit « Pouah! » soit « Ça alors, c'est vraiment bon ». C'est vraiment le marché auquel nous nous adressons. Êtes-vous d'accord?
Des voix: Oh, oh!
M. Dave Van Kesteren: Ce serait merveilleux si tous nous connaissions exactement les textures et toutes les autres choses dont parlent les gens lorsqu'ils boivent du vin, mais la plupart d'entre nous veulent seulement pouvoir profiter de quelque chose qui goûte bon.
J'ai posé une question la semaine dernière — je crois que c'était la semaine dernière — lorsque nous avons accueilli des témoins pour ce projet de loi. J'ai commencé premièrement par une affirmation disant que c'était Costco, et je pense que c'était Mme Zimmerman ou quelqu'un d'autre qui a dit Costco. Je vous dis que Costco aux États-Unis a un meilleur choix de vins que la LCBO. Évidemment, c'est en Ontario, et je ne peux parler pour le reste des provinces, mais c'était quelque chose de profond.
Pendant que nous parlons de cette question — et, madame Zimmerman, vous avez dit que vous étiez un peu protectrice à l'égard des viticulteurs et je ne vous pose pas une question en ce moment — je détesterais nous voir nous embourber avec cette question comme centre de la discussion. J'aimerais voir notre industrie vinicole croître au point où nous ferions essentiellement ce qu'on fait aux États-Unis. Je sais que nous n'avons pas leur population, mais nous sommes, comme je le dis toujours aux gens de ma région, à une journée de route de 200 millions de personnes; alors, nous avons une occasion extraordinaire.
Peut-être que je pourrais faire un tour de table rapidement et vous demandez si nous allons dans cette direction, parce que j'ai goûté certains vins excellents dans ce pays. Nous avons eu une dégustation des vins de Nouvelle-Écosse, par exemple, et ils étaient exceptionnels. Je sais que nos vins sont bons. Les gens de la Colombie-Britannique vous diront que les leurs le sont également, et même Dean semble penser que ses vins sont meilleurs que les nôtres, alors, nous savons que nous avons vraiment certains bons vins. Mais est-ce que cela nous amènera dans cette direction, où nous pouvons vraiment commencer à prendre de l'expansion et à nous éloigner de ce piège dans lequel, je pense, nous, les Canadiens, nous nous enfermons, en ce sens que nous voulons protéger ce que nous avons plutôt que d'exploiter ce que nous avons?
Madame George, je vais commencer par vous. Qu'en pensez-vous?
Nous pourrions dire qu'il pourrait y avoir des conséquences imprévues. Cependant, nous avons insisté sur le fait que nous aimerions que ce projet doit s'applique uniquement aux Canadiens. Nous avons été informés des limites qui s'imposent en raison des exigences de l'OMC, et nous avons été prévenus par nos spécialistes du commerce, qui ont également soulevé certaines questions auprès de nous. Mais je ne suis pas une spécialiste du commerce. Je peux seulement dire que nous avons l'intention de soulever la question aujourd'hui, de dire que nous appuyons le projet de loi. Toutefois, à titre de viticulteurs ontariens, nous ne voulons pas que notre marché soit touché par les importations. Si ce n'est que les marques du segment premium, ce serait excellent, parce qu'alors, nous ne ferions pas qu'expédier des quantités massives de vins importés entre les provinces.
Je ne sais pas comment vous pouvez contrôler cela. Il appartiendra aux spécialistes du commerce de s'en occuper.
En tant que président, je vais prendre le prochain tour. Je veux essayer de discuter, au cours de mes cinq minutes, des deux questions que sont le mot « raisonnable » et l'expression « raisins canadiens à 100 p. 100 ».
Concernant le mot « raisonnable », la question s'adresse à Mme George.
Comme vous le savez, nous avons travaillé ensemble pendant de nombreuses années sur de nombreuses questions différentes. J'ai beaucoup de respect pour vous et pour votre organisme. Je comprends l'intention de votre amendement visant à ne pas permettre aux provinces de limiter le commerce interprovincial ou le mouvement interprovincial du vin.
Toutefois, j'ai la même préoccupation que M. Albas, à savoir que la distribution des boissons alcoolisées est une responsabilité provinciale en vertu de la Constitution et, en tant que gouvernement fédéral, nous devons le reconnaître. Quelle est votre réponse à cela?
Changeons rapidement de sujet, car les cinq minutes passent trop vite. Parlons du libellé du projet de loi.
Étant donné la forme actuelle du projet de loi, s'il n'y a pas d'amendements ou qu'aucun amendement n'est adopté, pensez-vous pouvoir vous entendre avec vos administrations locales pour trouver des quantités raisonnables compte tenu de ce que nous avons dit aujourd'hui au sujet du but recherché?
Parlez-moi de vos préoccupations ou de vos idées sur vos rapports avec les administrations provinciales — pour être plus précis, qui va fixer les quantités?
:
Il ne s'agit pas seulement de ce qui est « raisonnable »; mais aussi des modes de transaction, n'est-ce pas? Essayons de trouver un contexte dans lequel nous pouvons avoir avec notre client des rapports commerciaux modernes, des rapports du XXI
e siècle; et franchement, la question du « transport pour usage personnel » ne résout rien.
Oui, effectivement, il va falloir un dialogue permanent, non seulement avec les commissions des alcools, mais aussi avec le gouvernement de l'Ontario — et ceux de tout le Canada d'ailleurs, car, franchement, nous voulons pouvoir desservir la clientèle d'autres provinces et nous approvisionner chez elles.
M. Dean Allison: C'est vrai.
Mme Hillary Dawson: Cela demande un effort national et un effort permanent de notre part. Nous espérons que les commissions des alcools seront réceptives, parce qu'il ne s'agit pas simplement de limites, mais de modalités.
:
Je vous prie de reprendre vos places, chers collègues, la séance reprend.
Les témoins sont libres de rester à titre d'observateurs.
Chers collègues, nous sommes saisis du projet de loi et d'une motion de M. Mai.
On vient de m'informer qu'il y aura un appel de la sonnerie à 15 h 15. Je pensais que nous aurions un peu plus de temps, mais il faudra se presser.
Nous connaissons tous le projet de loi . Nous avons un article.
Je n'ai pas d'amendement en tant que président.
Y a-t-il des commentaires sur l'article 1 du projet de loi?
(L'article 1 est adopté.)
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Le projet de loi est-il adopté?
Monsieur Giguère.