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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 7 juin 2017

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Conformément à l'ordre de renvoi reçu de la Chambre le mercredi 2 novembre 2016, le Comité reprend l'étude de la motion M-39 sur l'immigration au Canada atlantique.
    Notre premier groupe de témoins comprend Mme Alaina Lockhart, députée de Fundy Royal. Bienvenue.
    Nous avons aussi, par vidéoconférence, M. Ray Ivany, président et vice-chancelier de l'Université Acadia. Bienvenue, monsieur Ivany.
    Nous accueillons aussi l'honorable Frank McKenna, vice-président du Groupe financier Banque TD.
    Bienvenue à tout le monde.
    Madame Lockhart, vous avez sept minutes; allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie le Comité de se pencher sur cet enjeu et d'entendre le témoignage complet de témoins experts qui font de longs trajets pour venir faire une différence pour le Canada atlantique.
    Je tiens également à remercier chaque député qui a voté en faveur de cette motion en novembre dernier à la Chambre des communes. L'unanimité du vote à la Chambre des communes prouve à chaque Canadien de l'Atlantique que la région, sa culture, sa langue, son histoire et sa société sont importantes pour tous les Canadiens.
    On me demande souvent pourquoi j'ai choisi l'immigration comme sujet de ma motion d'initiative parlementaire. La question est valide, car ce n'est pas tous les jours que mes électeurs me parlent d'accroître l'immigration. Ils me parlent plutôt de leurs soucis quotidiens au sujet de la durabilité et de la croissance de nos collectivités et de l'économie locale.
    Mes électeurs se disent préoccupés par leurs écoles rurales, les fermetures de magasins du coin qui n'ont pas suffisamment de chiffres d'affaires, et la perte de membres de leurs organisations, pour ne nommer que ces choses-là. En même temps, les propriétaires d'entreprise dans les secteurs du camionnage, du tourisme, des soins à domicile et de la fabrication me parlent de leurs difficultés de recrutement, et des possibilités de croissance limitées que cela entraîne.
    En tant qu'ancienne professionnelle des ressources humaines et propriétaire d'entreprise, j'ai connu les effets de la contraction et du vieillissement de la population. Ces problèmes sont symptomatiques d'un problème plus vaste, qui comprend le décalage de l'immigration entre le Canada atlantique et le reste du Canada.
    Comme vous l'avez entendu dans le témoignage limité de Mme Hunter la semaine dernière: « En 2014, 6,7 % de la population canadienne vivait au Canada atlantique, mais cette région n'a accueilli que 3,1 % des nouveaux immigrants. »
    Nous sommes passés le point où nous pouvons repeupler la région sans intervention. Notre société ne se rajeunira pas naturellement. Notre main-d'oeuvre ne prendra pas d'expansion naturellement. Les investissements ne viendront pas facilement dans notre région si nous maintenons le cap.
    L'immigration est-elle la solution miracle? Non, mais elle est un volet important d'une stratégie plus vaste destinée à revitaliser le Canada atlantique et à en assurer la durabilité.
    En plus du programme pilote de l'immigration, la stratégie de croissance pour l'Atlantique met l'accent sur quatre autres domaines d'intervention: l'innovation, la croissance propre et les changements climatiques, le commerce et l'investissement, ainsi que l'infrastructure. Ensemble, les gouvernements fédéral et provinciaux appliquent la stratégie à long terme de la prospérité durable du Canada atlantique pour les générations à venir.
    J'aimerais bien croire que ma motion ainsi que le travail de chacun des 32 députés du Canada atlantique sont reflétés dans l'aide et l'intervention constantes du gouvernement pour accroître la performance économique du Canada atlantique.
    Considérant l'annonce de la stratégie de croissance pour l'Atlantique, après le dépôt de ma motion, mais avant que la Chambre puisse en débattre, j'ai demandé un amendement visant à articuler le travail du Comité sur l'examen de la fixation et de l'établissement des immigrants, pour la formulation de recommandations et de pratiques exemplaires.
    Les amendements à la motion ont élargi la portée de l'étude. Ils n'ont pas rétréci sensiblement la portée de la motion débattue. En étudiant simultanément les facteurs touchant la fixation, le Comité non seulement étudierait la fixation découlant des initiatives pilotes, mais encore contribuerait au succès du projet pilote et à l'amélioration de la fixation dans les autres provinces et territoires.
    Le gouvernement a pris des mesures pour accroître l'immigration, mais ce n'est qu'un premier pas. Il nous faut des immigrants qui resteront, et il faut les aider à prospérer.
    Le Comité entreprend une étude qui, je l'espère bien, cernera les problèmes que comporte le processus, y compris les obstacles que pose notre bureaucratie, de même que les pratiques exemplaires en matière de recrutement. Le Comité doit se pencher sur l'intégration des nouveaux immigrants et les moyens de la réaliser en ralliant les entreprises et offrant une aide à l'établissement et à l'intégration.
    En étudiant les facteurs d'accroissement des taux de fixation des nouveaux venus, le Comité non seulement contribuerait au succès du projet pilote du gouvernement, mais encore établirait un point de référence pour les pratiques exemplaires. Les pratiques pourraient alors être partagées à l'échelle du Canada. Les projections démographiques font voir que toutes les régions du Canada souffriront du vieillissement de la population. Le Canada atlantique est la première région à s'en ressentir.
    Des mesures de fixation énergiques et efficaces aideront à faire en sorte que le Canada atlantique demeure une région de choix et c'est probablement par elles que passera la maximisation des avantages sociaux, culturels, économiques et communautaires de l'immigration.
    C'est un appel crucial à l'action, au moment où les Canadiens de l'Atlantique cherchent des moyens de se donner un avenir plus prospère, un avenir qui permettra le rapatriement de nos jeunes, la croissance économique et la durabilité des collectivités de toute la région.
    Je m'arrête là, monsieur le président. Lorsque le Canada atlantique va mieux, le Canada tout entier va mieux.
    Merci.
    Merci, madame Lockhart.
    Monsieur Ivany, vous avez la parole pour sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma perspective de cette question découle de mon expérience à la présidence d'une commission en Nouvelle-Écosse qui a débuté ses travaux en 2012 et a présenté son rapport en février 2014. Le gouvernement provincial nous avait confié pour mission de faire un examen approfondi de l'économie de la Nouvelle-Écosse et de nos perspectives d'avenir. Il nous avait aussi chargés de faire participer la population à ce processus.
    Nous avons eu deux rondes de consultations à l'échelle de la province. Dès le début de nos travaux, nous nous sommes penchés sur les ensembles de données économiques et démographiques et, bien sûr, comme partout ailleurs au Canada, l'économie et la démographie sont très liées dans notre histoire économique. Je viens du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse. Pendant les années d'exploitation des aciéries et des mines de charbon, il y a eu des vagues d'immigration, si bien que ces deux choses-là ont toujours été liées.
    Le problème s'est précisé, par contre, lorsque nous avons fait une extrapolation à partir de l'année de référence 2009 et que nous nous sommes penchés sur une projection, fondée sur la persistance des mêmes tendances des migrations interprovinciales, des niveaux d'immigration, etc., que nous avons établies pour 25 années. Il en est ressorti une réalité très sombre, que je vais partager avec vous.
    Notre projection annonçait un recul de l'ordre de 4 % de la population totale de la Nouvelle-Écosse. Malheureusement, la cohorte des 18 à 64 ans, celle de la population active, allait reculer d'entre 15 et 20 % sur la même période. En outre, nous avons analysé la situation dans le monde, objectivement, aux niveaux infranationaux — dans les provinces — qui avaient connu ne serait-ce qu'une fraction de ce genre de compression de leur marché du travail, et n'avons trouvé aucun facteur de stimulation économique de la productivité ou de l'innovation qui aurait pu compenser ce type de contraction de son marché du travail.
    La démographie, en l'occurrence, ne concerne pas seulement l'âge. C'est un changement fondamental de la capacité de réussite à long terme de notre province et de la région. Le démographe canadien David Foot nous a souvent rappelé de ne pas nous surprendre que la population vieillisse d'une année une fois par année. Après avoir atteint le point, comme l'a indiqué Mme Lockhart, d'une tendance démographique au Canada atlantique qui est en quelque sorte le précurseur de ce qui se produira dans les autres régions du Canada, ce genre de pondération par l'âge changera fondamentalement tout le reste.
    Dans le rapport de notre commission économique, nous proposions 19 objectifs, et ce n'est pas par hasard que la première recommandation était de tripler l'immigration en Nouvelle-Écosse. L'objectif peut paraître ambitieux, compte tenu surtout du point où nous en étions alors en 2014, mais je rappellerai au Comité que le nombre correspondait à notre part par habitant des admissions d'immigrants au Canada à cette époque.
    Il faut mettre l'accent sur l'immigration. Manifestement, les liens économiques sont tout aussi importants, mais je pense que le Comité sait bien que la performance des immigrants au Canada, en général, et plus particulièrement en Nouvelle-Écosse, est très positive pour ce qui est de leurs niveaux d'emploi, de leurs niveaux supérieurs de scolarisation comparativement à l'ensemble de la population canadienne, et de leurs initiatives de lancement d'entreprises et des succès qu'ils en ont faits avec le temps.
    Nous avons la conviction que nous devons mettre un accent concerté sur l'immigration, compte tenu surtout de la dynamique du Canada atlantique, et que cet effort doit se faire de concert avec les genres d'éléments d'un programme d'innovation et le succès des nouvelles entreprises que nous avons observés, surtout dans la région de Halifax. Mais, honnêtement, il s'agit d'une circonstance et je crois aujourd'hui ce que je croyais en 2014, soit que, à moins d'un accroissement considérable de la capacité d'immigration, l'avenir économique du Canada atlantique sera extrêmement difficile.
(1540)
    Merci, monsieur Ivany.
    Monsieur McKenna, la parole est à vous.

[Français]

     Je suis ravi d'être parmi vous.

[Traduction]

    Je suis ravi d'être des vôtres aujourd'hui et flatté d'avoir été invité à témoigner, surtout avec ma bonne amie Alaina Lockhart, à qui j'attribue tout le mérite d'avoir inspiré cet effort, et Ray Ivany, l'expert très respecté en la matière dans notre région.
    Comme ils ont dit exactement ce que je voulais dire, je vais aller plus loin et adopter un discours beaucoup plus provocant. Je n'ai pas l'expertise, mais je suis motivé par le fait que j'habite la région, que j'ai des yeux dans notre région, et que j'ai toujours été passionné par le coin où je suis né. Je ne serai utile, je pense, que si je rapporte, sans détour ni nuances, les faits tels que je les vois.
    Nous ne saurions faire justice à la question de l'immigration au Canada atlantique sans parler des travailleurs étrangers temporaires et de l'assurance-emploi. C'est inextricablement lié; il ne reste qu'à bien situer le problème.
    Il n'est pas exagéré de dire que si la démographie détermine le destin, le Canada atlantique est engagé dans une lente spirale de la mort. Les faits ne sont pas contestables: 10 % des Canadiens vivaient au Canada atlantique en 1966; aujourd'hui, il y en a 6,6 %. Les chiffres de 2015 de Statistique Canada ont révélé que le Nouveau-Brunswick avait eu plus de décès que de naissances pour la première fois depuis que ces statistiques sont produites. L'ensemble de la région a eu le deuxième taux de fécondité au Canada. Nous avons perdu 40 000 personnes ces 30 dernières années. Ce n'est pas que la population s'en va; c'est qu'elle vieillit. Dans la région de l'Atlantique, la population a vieilli deux fois plus vite qu'en Alberta depuis 1971. L'âge moyen est aujourd'hui huit ans de plus qu'en Alberta.
    Cette semaine, Statistique Canada a publié des chiffres encore plus alarmants. La région du Canada qui connaît la plus lente croissance est le Canada atlantique. Le Nouveau-Brunswick vient au dernier rang, étant la seule province ayant connu un taux de croissance négatif; la Nouvelle-Écosse suit immédiatement. Saint John, au Nouveau-Brunswick, est la seule ville au Canada dont la population a régressé au cours des cinq dernières années.
    Nous voyons les conséquences défiler dans cette spirale de la mort qui n'en finit plus. Les populations vieillissantes coûtent plus cher, le recul de la base démographique signifie moins de péréquation, moins de transferts pour la santé et l'éducation, moins d'argent provenant de l'impôt sur le revenu et de la taxe à la consommation, sans compter que les coûts de soins pour une population vieillissante sont en progression exponentielle.
    Les résultats sont on ne peut plus clairs: les universités s'arrachent les étudiants, nos écoles secondaires sont parfois à moitié vides et, bien sûr, chacun se bat pour remplir son école et tous nos hôpitaux ont des malades qui monopolisent des lits.
    Ce cercle vicieux ne s'arrête jamais. Les déficits provinciaux explosent et, dans un effort désespéré pour stopper l'hémorragie, les gouvernements provinciaux ont compliqué le problème en augmentant les taxes à la consommation et les taux marginaux d'imposition, au point où la fiscalité a atteint sa capacité maximale dans presque toutes nos provinces. Pis, nos travailleurs qualifiés qui vont travailler dans l'Ouest pourraient en venir à conclure qu'ils auraient avantage à s'y installer pour de bon et à profiter de taux d'imposition plus avantageux que s'ils restaient chez eux.
    Pour compliquer le problème pour les provinces, c'est le gouvernement fédéral qui détient tous les leviers: l'assurance-emploi, l'immigration, le programme des travailleurs étrangers temporaires.
    Commençons par l'immigration. Le Canada atlantique en particulier et une bonne part du Canada rural en général arrivent mal à attirer des immigrants parce qu'ils n'ont pas de base d'immigrants. Les immigrants vont là où sont les immigrants; ils veulent faire partie d'une collectivité. Nous n'avons pas de ces collectivités pour la peine. C'est pourquoi 70 % des immigrants au Canada vont à Montréal, à Vancouver et à Toronto; 65 % de tous les immigrants aboutissent à Toronto. Toronto est en plein essor, elle a des grues à tous les coins de rue. C'est bon pour Toronto, mais nous n'avons pas ce carburéacteur dans notre économie.
    La politique publique favorise les centres qui ont une masse critique. Avez-vous déjà connu un ministre de l'Immigration originaire du Canada atlantique? Les faits sont les faits; le Canada atlantique n'accueille que 2,5 % des immigrants. Nous n'avons pas notre juste part, et, sans base plus vaste, nous n'avons pas la masse critique pour en attirer davantage. C'est un cycle négatif qui se renforce sans cesse.
    L'augmentation de l'immigration au Canada atlantique, disons-le clairement, n'est pas sans susciter la controverse. Même les citoyens du Canada atlantique ne sont pas très enthousiastes à l'idée d'accroître l'immigration. Ils me demandent souvent pourquoi je tiens à accueillir des immigrants; ils n'ont pas d'emploi pour les gens d'ici.
    La récente crise des réfugiés syriens a donné une lueur d'espoir. Les Canadiens de l'Atlantique ont accueilli un nombre disproportionné d'entre eux. Bien souvent, c'était pour des raisons humanitaires, mais dans de nombreux cas c'était aussi la reconnaissance flagrante du gros problème démographique qu'est le nôtre.
    Que signifie tout cela? Cela signifie que le Canada atlantique a non seulement une population active vieillissante et en régression, mais aussi une grave pénurie de travailleurs qualifiés, une pénurie chronique de travailleurs désireux de prendre les postes disponibles. En corrigeant le problème, nous devons corriger l'hémorragie. Ce qui nous amène au programme des travailleurs étrangers temporaires. Tout le monde a un besoin désespéré de ce programme, les opérateurs de machine, les travailleurs à la production, les travailleurs du secteur de l'hôtellerie, tout le monde. Des milliers d'emplois risquent de rester vacants, et une bonne part de la production est envoyée ailleurs, à cause d'un manque de travailleurs. Ce n'est pas une menace en l'air. Les changements apportés au programme il y a quelques années ont fait naître une crise qui a coûté des centaines d'emplois à nos collectivités.
(1545)
    Les provinces et les employeurs sont cruellement piégés: même si le chômage est élevé sur papier, ils n'ont pas de prise sur le régime d'assurance-emploi, et ils n'arrivent pas à trouver assez de travailleurs pour répondre à leurs besoins de main-d'oeuvre. La suspension du programme des travailleurs étrangers temporaires compromettrait au moins 1 milliard de dollars dans la seule industrie des fruits de mer.
    Cela nous amène au troisième élément du dilemme. Le pourcentage du chômage dans la région avoisine les deux chiffres; comment pouvons-nous être en pénurie de travailleurs dans ce cas? Eh bien, voici le vilain petit secret. Pour de nombreux travailleurs, l'assurance-emploi n'est plus un trampoline, mais un piège. Un certain pourcentage de bénéficiaires chroniques sont tellement asservis à l'opiacé de l'assurance-emploi qu'ils ne veulent même pas de travail à temps plein.
    Le caractère saisonnier d'une partie de l'économie atlantique aggrave le problème. L'assurance-emploi de facto est devenue un programme de revenu annuel garanti pour des industries saisonnières. C'est un fait. Malgré les efforts bien intentionnés des gouvernements fédéraux qui se sont succédé, le problème s'aggrave plutôt que de s'améliorer. Des décennies de dépendance chronique ont atrophié la qualification de cette main-d'oeuvre et détruit sa détermination à travailler. La drogue de l'assurance-chômage a drainé l'énergie de nombreux intervenants de notre économie, leur permettant d'éviter les difficiles décisions en matière de mobilité, et a favorisé les piètres pratiques de travail, chez les employeurs comme chez les employés.
    Nous n'avons pas vu la volonté politique au niveau fédéral d'y faire quoi que ce soit. Dans la seule province du Nouveau-Brunswick, les prestations d'assurance-emploi représentent environ 800 millions de dollars par an.
(1550)
    Conclusion dans 20 secondes, s'il vous plaît.
    Des décennies d'assurance-emploi ont laissé ces travailleurs sans qualification et sans motivation. On ne saurait blâmer les victimes; elles ont pris ce qu'on leur offrait.
    Selon moi, il nous faut adopter une démarche en trois temps: traiter de l'assurance-emploi; tenter de créer des plans d'intervention pour les nouveaux venus sur le marché du travail pour les intégrer dans les programmes d'apprentissage, d'éducation, etc.; continuer d'utiliser les travailleurs étrangers temporaires pour combler la lacune actuelle.
    De même, régler le problème du programme d'immigration. Il nous faut une plus grande part du gâteau qu'à l'heure actuelle. Je serai heureux de faire quelques suggestions à ce sujet pendant la période des questions.
    Merci beaucoup, monsieur McKenna.
    Monsieur Harvey, prenez sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    En premier lieu, je voudrais vous remercier, monsieur McKenna, de votre présence aujourd'hui. Selon moi, vous présentez une perspective tout à fait particulière, en tant que serviteur du public qui a été un ardent promoteur du Canada atlantique, et en tant que personne qui a travaillé dans le secteur privé. Cela vous donne une vue bien équilibrée de la situation du Canada atlantique.
    Ayant passé toute ma vie dans le secteur privé avant d'accéder à une charge publique, j'ai eu recours au programme des travailleurs étrangers temporaires au Canada atlantique, et je l'ai utilisé dans l'industrie de la transformation. J'ai longtemps dit que je ne crois pas qu'il existe une corrélation directe entre le domaine du chômage dans une région géographique donnée et la nécessité de travailleurs étrangers temporaires ou d'une filière d'immigration pour jouer les rôles dont l'industrie a besoin. Selon moi, cela tient dans une large mesure à ce dont vous avez parlé — l'absence de perfectionnement des compétences par suite de décennies de régression de la population et d'absence d'industrie.
    Je me demande donc comment vous voyez le rôle à jouer par le gouvernement fédéral avec les provinces et le secteur privé pour faire avancer ce programme d'immigration au Canada atlantique. Où pouvons-nous être le plus efficaces pour le recrutement et la fixation de ces travailleurs au Canada atlantique lorsqu'ils sont là?
    Je dirais que la rétention représente une part du problème que nous avons. Les collectivités, la province et les associations doivent consacrer davantage d'efforts à la question de la rétention. Nous devons établir une base.
    Je dirais aussi que de nombreuses mesures commencent à avoir un effet. La Stratégie de croissance pour l'Atlantique fait partie de la solution au problème. Le nouveau Programme pilote d'immigration au Canada atlantique qui y est associé représente un grand pas dans la bonne direction. Nous devons faire beaucoup plus à ce chapitre.
    Nous avons besoin qu'un plus grand nombre d'entrepreneurs viennent s'établir ici; nous avons besoin de personnes qui arrivent ici sans emploi, mais qui créeront un emploi, des centaines d'autres emplois, comme ce qui se passe dans le reste du Canada. Nous avons besoin de gens comme cela.
    Nous avons besoin d'un processus en lien avec nos universités. Je dirais que 20 % au moins — et Ray le saurait probablement — de nos diplômés universitaires sont des étudiants internationaux. Nous devons leur permettre de demeurer dans notre région pendant quelques années après l'obtention de leur diplôme, afin qu'ils puissent créer des plans d'affaires et de nouvelles industries. Nous avons besoin de tout cela.
    Et croyez-vous...?
    Nous avons aussi besoin, soit dit en passant, d'un processus pour les travailleurs étrangers temporaires. Lorsqu'une personne travaille dans notre collectivité depuis quatre ou cinq ans, elle la connaît bien, elle l'apprécie et elle représente probablement le meilleur choix d'immigrant à retenir.
    Absolument. Dans le contexte du transport, je sais que de nombreux chauffeurs viennent s'installer dans la région de l'Atlantique et y travailler, et qu'ils s'inscrivent dans le processus d'immigration avec l'intention de demeurer ici à plus long terme. Je suis absolument d'accord avec vous pour que cela devienne une stratégie à plus long terme pour l'immigration.
    Croyez-vous que nous avons besoin d'une approche plus globale pour aborder certains des enjeux qui se posent dans la région de l'Atlantique, dans le cadre de la Stratégie de croissance pour l'Atlantique, outre l'immigration? Cela pourrait contribuer à résoudre d'autres problèmes touchant la croissance économique et l'innovation. Croyez-vous qu'il s'agisse de la voie appropriée à suivre? Êtes-vous d'avis que la Stratégie de croissance pour l'Atlantique cible les bons secteurs?
    Oui. Je crois que nous allons dans la bonne direction, mais nous faisons face au dilemme de la poule et de l'oeuf. Beaucoup de gens vous diront qu'il n'est pas logique de faire venir des immigrants ici tant que nous n'avons pas d'emplois à leur offrir. Toutefois, dans nombre de cas, ce sont les immigrants qui créent les emplois. Ils enrichissent nos collectivités et nos populations, ainsi que notre main-d'oeuvre. Toutes ces mesures doivent être menées de concert.
    La semaine dernière, j'ai annoncé la création de 600 postes à Moncton. Je sais que nous ne pouvons pas les pourvoir tous localement. Nous allons devoir faire venir des gens d'ailleurs au Canada, ou d'autres pays, pour pouvoir les pourvoir. À mon avis, nous devons coordonner tous ces efforts pour réussir.
(1555)
    Merci.
    Avant que mon temps de parole soit écoulé, monsieur Ivany, dans le cadre de votre étude de cette question, quels sont les domaines particuliers d'emploi dans lesquels l'immigration peut nous être utile dans la région de l'Atlantique, et quelles sont les compétences particulières détenues par les nouveaux immigrants ou arrivants dans le Canada atlantique qui n'existent pas déjà dans notre main-d'oeuvre actuelle? Comment ces immigrants peuvent-ils compléter la main-d'oeuvre déjà en place?
    À peu près dans tous les domaines, à mon avis, le recours à l'immigration est parfois motivé par le besoin d'ensembles de compétences très rares et spécifiques. Je suis aussi d'accord avec M. McKenna. Je crois que nous assistons depuis longtemps à un afflux d'immigrants entrepreneurs, ce qui fait que l'immigration ne sera pas nécessairement axée sur les compétences, sauf celles nécessaires pour créer une entreprise qui générera de l'emploi pour les Canadiens de la région de l'Atlantique.
    Je suis d'avis que nous sommes en présence d'un meilleur appariement entre les compétences et les besoins, un domaine dans lequel le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral doivent travailler main dans la main. Je sais que notre service d'immigration, ici en Nouvelle-Écosse, a adopté une approche extrêmement dynamique et a atteint ou dépassé l'ensemble de ses objectifs.
    Il arrive souvent que le problème se situe où vous l'avez mentionné, monsieur Harvey. Il s'agit de l'appariement entre les compétences recherchées par une entreprise particulière et celles que possède un immigrant. Il faut aussi se rappeler que les entreprises doivent d'abord déterminer qu'elles sont incapables de trouver un Canadien compétent pour pourvoir un poste, le ministère de l'Immigration les aidant par la suite à trouver la bonne personne grâce à l'un des volets.
    Nous avons entendu des critiques, je serai honnête avec vous, dans le cadre de nos travaux, selon lesquelles la présence ou les efforts du gouvernement dans ce processus d'appariement se résument souvent à un numéro 1-800. Je vous dirais franchement que cela n'est pas suffisant. Il faut une présence du ministère fédéral de l'Immigration, je crois, dans l'ensemble des provinces de l'Atlantique, susceptible, encore une fois, de collaborer très étroitement avec les ministères provinciaux pour trouver cet appariement parfait entre les débouchés et les immigrants individuellement.
    Merci, monsieur Ivany.
    Avant que je manque de temps, j'aimerais poser une autre question.
    Madame Lockhart, vous avez parlé dans votre allocution d'ouverture du soutien unanime reçu par la motion à la Chambre, l'automne dernier. Quel type de signal cela envoie-t-il aux Canadiens de la région de l'Atlantique, selon vous, et aux Néo-Brunswickois, en parallèle, que cette motion ait été adoptée à la Chambre? Quel type de message cela envoie-t-il selon vous au Canada atlantique?
    Vous avez 30 secondes.
    Merci, monsieur Harvey.
    Je crois que le fait que l'ensemble de la Chambre des communes reconnaisse qu'il existe un problème envoie un signal très fort aux Canadiens de la région de l'Atlantique. J'ai été très heureuse du soutien accordé par tous les partis à cette question, qui permettra des efforts concertés. Je crois qu'il s'agissait d'un signal très fort de l'importance de cette question pour le Canada atlantique, ainsi que des répercussions de la prospérité de cette région sur celle de l'ensemble du Canada.
    Merci, madame Lockhart.
    Madame Rempel, vous avez sept minutes. Si je ne me trompe pas, vous allez partager votre temps de parole avec M. Tilson.
    Oui. Merci, monsieur le président.
    Madame Lockhart, nous avons entendu beaucoup de témoignages jusqu'à maintenant concernant la nécessité d'assurer une économie forte dans les provinces de l'Atlantique, afin de disposer d'un moteur durable pour l'immigration au fil du temps et, certainement, de favoriser la rétention. Êtes-vous d'accord avec cette caractérisation?
    Absolument. J'ai mentionné dans mon allocution d'ouverture que cela doit faire partie d'un plan plus large. L'immigration comme telle ne résoudra pas les problèmes du Canada atlantique, mais lorsque des entreprises disent que cela constitue un obstacle à la croissance, je crois qu'il faut réellement s'en occuper. Comme vous l'avez dit, nous avons entendu de nombreux témoignages aujourd'hui, ainsi que précédemment, selon lesquels c'est effectivement le cas.
    Êtes-vous au courant d'un rapport du Conference Board du Canada qui a été commandé en vue de procéder à l'analyse économique du projet d'oléoduc d'Énergie Est? Selon ce rapport, plus de 3 771 emplois seront créés dans le cadre de ce projet, au Nouveau-Brunswick plus particulièrement, avec près d'un milliard de dollars de revenus fiscaux, apparemment, pour le Nouveau-Brunswick. Êtes-vous au courant de ce rapport?
    Je ne suis pas au courant de ce rapport particulièrement, mais je connais les répercussions possibles d'Énergie Est.
    Excellent. En février de l'an dernier, une motion a été soumise à la Chambre et se lisait comme suit:
Que, compte tenu de la présente période d’incertitude économique, la Chambre: a) reconnaisse l’importance du secteur de l’énergie pour l’économie canadienne et soutienne son développement de manière écologiquement viable; b) convienne que les pipelines constituent la façon la plus sûre de transporter le pétrole; c) reconnaisse l’opinion favorable que les gouvernements de l’Alberta, de la Saskatchewan, de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick ont exprimé à l’égard du projet Oléoduc Énergie Est; d) exprime son appui au projet Oléoduc Énergie Est actuellement à l’étude.
    Quel a été votre vote sur cette motion?
(1600)
    Je n'ai pas voté sur cette motion. Comme vous le savez sans doute, le projet Énergie Est est actuellement à l'étude par le CNE. Nous avons affirmé clairement que notre gouvernement appuie le transport de nos ressources vers les côtes, mais nous devons le faire de façon responsable, et un processus est en place à cet effet.
    Si le CNE se prononce en faveur du projet, allez-vous l'appuyer?
    Oui.
    Quel est votre avis au sujet d'autres projets de pipeline, comme le projet Gateway, qui a été approuvé par le CNE, mais rejeté politiquement par le gouvernement?
    Je crois que le gouvernement doit prendre des décisions sur une base individuelle, en tenant compte des circonstances particulières. De toute évidence, le projet Énergie Est est celui qui est le plus susceptible d'avoir des répercussions importantes pour le Canada atlantique, ce qui fait que c'est sur lui que j'ai concentré mon attention, mais oui...
    Vous êtes donc d'accord pour que l'oléoduc d'Énergie Est soit approuvé et aille de l'avant, mais que le projet Gateway soit rejeté par le gouvernement.
    Ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit, ou ce que je voulais dire, si je n'ai pas été claire, c'est qu'il existe un processus et que nous devons le respecter. Je respecte le processus. Si, dans le cadre de ce processus, il est jugé que le projet Énergie Est est un bon projet, et il est recommandé d'aller de l'avant avec ce projet, j'appuierai le gouvernement dans sa décision de le faire.
    Est-ce que vous appuieriez le gouvernement s'il décidait de rejeter le projet comme il l'a fait avec Gateway?
    Je crois que vous avez pu constater par le passé que mes collègues et moi-même, nous les 32 députés, avions la possibilité de discuter avec le gouvernement des répercussions possibles que vous avez mentionnées. Selon les circonstances à ce moment-là, le gouvernement prendra la décision.
    C'est donc dire que le caucus libéral de l'Atlantique appuierait le projet Énergie Est, en dépit d'une décision du Cabinet de le rejeter...
    Je ne peux pas prédire l'avenir. Ce que je vous dis, c'est que je soutiens le processus qui est actuellement en cours.
    Cela me semble être un « je ne sais pas » définitif concernant 3 700 emplois.
    Je vais maintenant parler d'un autre rapport. Quatre de vos collègues ont rédigé un rapport intitulé Rapport du Sous-comité de l'innovation de la Stratégie de croissance pour l'Atlantique, dans lequel on lit ce qui suit:
Quatre ou cinq mois peuvent paraître une éternité pour une entreprise, surtout s'il s'agit d'une entreprise en démarrage. Après approbation d'une demande
     — et cela concerne l'APECA —,
il peut falloir de 2 à 12 mois pour finaliser l'entente de contribution connexe, ce qui empêche encore une entreprise de réussir.
    À votre avis, un ministre de Mississauga, qui est responsable de l'APECA, est-il le mieux placé pour surmonter cet obstacle particulier à la croissance économique dans le Canada atlantique?
    En tout respect, madame Rempel, nous parlons aujourd'hui d'immigration. C'est vraiment le domaine sur lequel je veux mettre l'accent, et je crois que nous avons assisté à des perturbations au sein de ce comité et à une utilisation à mauvais escient du temps prévu pour les témoignages. J'aimerais réellement mettre l'accent sur l'immigration aujourd'hui.
    Je constate votre susceptibilité à ce sujet, mais vous avez mentionné, au tout début de vos observations, que vous reconnaissiez qu'il existe un lien entre la rétention des immigrants et la croissance économique. L'APECA est supposée être un outil devant favoriser la croissance économique dans le Canada atlantique. Si selon le groupe que vous représentez et vos collègues, le processus d'approbation des subventions de l'APECA constitue un obstacle à la croissance économique, seriez-vous d'accord pour dire qu'un ministre responsable de l'APECA qui provient de Mississauga constitue un obstacle à la croissance économique et, par conséquent, à la rétention des immigrants?
    Non, je ne dirais pas cela du tout. En fait, j'aimerais préciser. Je crois que ce qui était mentionné dans le rapport concernait la rétroaction recueillie par mes collègues pendant cette étude.
    En fait, je viens de citer un énoncé déterminant.
    Je ne crois pas.
    Je répète cet énoncé:
Quatre ou cinq mois peuvent paraître une éternité pour une entreprise, surtout s'il s'agit d'une entreprise en démarrage. Après approbation d'une demande, il peut falloir de 2 à 12 mois pour finaliser l'entente de contribution connexe, ce qui empêche encore une entreprise de réussir.
    Aimeriez-vous apporter des précisions?
    Non, mais j'aimerais rappeler que l'APECA a toujours été un outil de croissance économique dans le Canada atlantique, et je crois qu'elle maintiendra son importance à l'avenir. Comme je l'ai mentionné dans mon...
    Êtes-vous d'accord avec le fait que le ministre responsable de l'APECA soit de Mississauga, en Ontario, et que cela a entraîné des retards?
    En fait, je ne répondrai pas à cette question, qui présuppose toutes sortes de choses que je n'ai pas dites.
    Merci. Je laisse la parole à M. Tilson.
    Monsieur Tilson, vous avez une minute.
    Monsieur McKenna, le Nouveau-Brunswick avait un programme pour les étudiants postsecondaires qui offrait un rabais sur les droits de scolarité aux diplômés qui demeuraient dans la province pendant un certain temps après l'obtention de leur diplôme. Le gouvernement actuel a annulé ce programme, à titre de mesure de réduction des coûts. Je ne sais pas si vous le savez, mais par suite de cela, il semble que les diplômés soient moins incités à demeurer au Nouveau-Brunswick. Pouvez-vous commenter?
    Mon mandat comme premier ministre remonte à loin.
    Je suis certain que vous vous tenez au courant.
    Vous avez 20 secondes, s'il vous plaît.
    Je me tiens au courant. J'essaie aussi de me tenir informé au sujet du projet Énergie Est dont, soit dit en passant, j'ai été l'un des architectes.
(1605)
    Monsieur McKenna, ne changez pas du sujet...
    Je peux changer du sujet tant que je veux...
    Non, vous ne le pouvez vraiment pas.
    ... en réponse à votre question.
    La réponse est la suivante. Selon ce que je comprends, dans le cadre d'un programme global de réduction des frais de scolarité, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a modifié cette orientation.
    J'aimerais réitérer ce que j'ai dit et ce que Ray Ivany et moi-même croyons. Le secteur universitaire, peu importe la façon dont il est structuré, doit faire partie de la solution dans ce cas. On y trouve un bassin immense d'étudiants internationaux, dont de nombreux se plaisent bien dans nos collectivités et aimeraient y demeurer.
    Personne n'est satisfait du statu quo à l'heure actuelle. Nous voulons tous voir des améliorations. Nous proposons quelques idées modestes sur la façon de retenir ces personnes dans nos collectivités.
    Merci, monsieur McKenna.
    Madame Kwan, vous avez la parole pour sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leurs exposés.
    J'aimerais aborder un certain nombre de questions, mais je commencerai par la suivante. Nous avons entendu les groupes de témoins précédents nous parler de l'importance de l'immigration et du rôle qu'elle peut jouer pour raffermir l'économie de nos collectivités. Évidemment, nous avons aussi entendu que cela comporte des limites.
    Je crois fermement que l'immigration peut contribuer à l'édification d'une nation. En fait, l'immigration a contribué à l'édification de notre nation, et je suis très fière de cela, surtout dans le contexte de notre 150e anniversaire. En ce qui a trait aux provinces de l'Atlantique, certaines mesures sont en place à cet effet.
    Ma première question pour les témoins est la suivante. Seriez-vous d'accord pour ouvrir davantage l'immigration? À l'heure actuelle, notre plan en ce qui a trait aux niveaux est limité à 300 000. Le propre groupe d'experts du gouvernement a recommandé, après consultation, 450 000. Je me demande si vous seriez d'accord pour aller au-delà de la limite de 300 000. Les témoins pourraient peut-être me répondre rapidement à ce sujet.
    Je vais commencer avec vous, madame Lockhart.
    Merci, madame Kwan.
    Dans le Canada atlantique, nous avons eu la chance, grâce au projet pilote, de pouvoir accepter 2 000 demandes additionnelles. Ainsi, des familles pourront venir s'installer avec les nouveaux arrivants dans cette région.
    Nous avons un mécanisme en place à l'heure actuelle. Je crois qu'il s'agit d'une bonne façon de vérifier ce qui fonctionne et de déterminer les répercussions économiques. On parle de 2 000 personnes...
    Désolée, puis-je intervenir ici? Êtes-vous d'accord que les niveaux prévus dans notre plan devraient être supérieurs à 300 000?
    Je crois que nous devons adopter une approche équilibrée.
    Cela veut-il dire oui ou non? Désolée, je suis confuse. Pourriez-vous préciser votre pensée?
    Évidemment.
    Je crois que la démarche doit être menée de façon appropriée. Si les choses sont faites de la bonne façon, il pourrait être possible d'augmenter ces niveaux.
    Monsieur McKenna, allez-y.
    J'ai consulté votre témoignage précédent et j'apprécie le soutien que vous apportez à la situation particulière de la région de l'Atlantique. Je suis aussi d'accord avec votre affirmation. Je n'ai pas les mêmes contraintes que les députés élus à ce sujet, mais je crois que l'augmentation de l'immigration serait une bonne chose pour notre pays.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Ivany, par vidéoconférence.
    Merci.
    Ma seule réserve à cet égard est que nous avons besoin d'une analyse robuste de notre capacité de recevoir ces immigrants. Il serait de toute évidence inacceptable pour nous d'augmenter les niveaux si nous n'avons pas la capacité nécessaire pour que ces personnes puissent s'établir.
    Mis à part cette réserve, je suis du même avis que M. McKenna.
    Merci.
    Je vais passer à une autre question, rapidement.
    Nous avons une Stratégie de croissance pour l'Atlantique. Les premiers ministres de quatre provinces et cinq ministres du Cabinet fédéral siègent au sein de ce comité ou de cet organisme, le Comité de direction.
    Monsieur McKenna, vous avez mentionné que la question de l'immigration, ainsi que celle des travailleurs étrangers temporaires, sont des éléments clés. Toutefois, aucun des ministres responsables de ces questions n'est représenté à cette table. Cela me semble étonnant et curieux. Croyez-vous que cette représentation devrait être modifiée?
    Il s'agit là d'enjeux clés. Si ces personnes ne sont pas présentes à la table pour piloter ce dossier... J'ai déjà fait partie du Cabinet. Il faut piloter les dossiers pour faire avancer les choses. Autrement, rien ne bouge.
    En ce qui a trait aux travailleurs étrangers temporaires, devrions-nous élargir la définition? Comme vous l'avez dit, monsieur McKenna, ces personnes qui reviennent année après année ne sont pas des travailleurs temporaires. Soyons réalistes et appelons-les par leur nom: résidents permanents. Ne devrions-nous pas créer immédiatement un processus à ce sujet?
    Oui. En ce qui a trait au dernier élément de votre question, je crois que nous devrions créer un processus. Les personnes qui ont passé des années à travailler dans nos collectivités sont probablement les premières à cibler parmi celles que nous voulons attirer et retenir.
    En ce qui a trait à votre premier point, je ne suis pas certain de bien le comprendre. Au total, quatre ministres du Cabinet font partie de la Stratégie de croissance pour l'Atlantique. Ils siègent tous au Cabinet fédéral, et grâce à leurs travaux, ils ont pu mettre sur pied cette initiative pilote dans l'Atlantique, qui nous permet d'étudier les demandes de 2 000 immigrants de plus que l'an dernier.
(1610)
    En fait, ce que je veux faire valoir à cet égard, c'est que le ministre de l'Immigration n'est pas présent à cette table, pas plus que le ministre responsable du Programme des travailleurs étrangers temporaires, ce qui me semble être deux éléments assez essentiels de...
    Vous voulez dire qu'ils soient présents à la table de la Stratégie de croissance pour l'Atlantique?
    C'est bien cela. Le Comité de direction.
    En effet, il s'agit d'un point intéressant.
    Je suis au courant parce que j'en ai fait partie. Le ministre de l'Immigration a participé aux réunions initiales des premiers ministres et des ministres de l'Atlantique sur une base régulière. Tous croient, je le crois, et nous croyons tous que le dossier de l'immigration sera la pierre angulaire des progrès dans ce domaine.
    Qu'ils siègent ou non officiellement à cette table, ils sont présents aux réunions.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, j'aimerais maintenant soulever une autre question.
    J'aimerais en fait présenter une motion.
    Monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité et les témoins, nous avons de nombreux enjeux essentiels devant nous. On parle d'enjeux qui ont occasionné la mort de quelqu'un. Je n'ai pas pu convaincre ce comité de même débattre de la question suivante, sans parler de l'étudier. Mon objectif n'est pas de désavouer les travaux qui se déroulent ici. Ils sont réellement importants, et je veux qu'ils se poursuivent. Mais je souhaite aussi soumettre la motion suivante:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne immédiatement une étude de la situation actuelle de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR), compte tenu de ses contraintes de financement actuelles, de son arriéré de cas qui augmente de 1 000 par mois, de sa situation actuelle en ce qui a trait aux 60 postes de membres qui sont vacants, ainsi que de l'augmentation significative du nombre de demandes d'asile au Canada en 2017. Que cette étude comprenne au moins trois réunions, que le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté participe à au moins une réunion, que le président de la CISR participe à au moins une réunion, que l'étude soit menée à terme, que le Comité rende compte de ses conclusions à la Chambre et, compte tenu de l'urgence de la situation, que ces réunions aient lieu avant le 23 juin 2017.
    Monsieur le président, je dépose cette motion en mon nom. J'apprécierais donc vraiment que les membres du Comité se prononcent à ce sujet. Je soulève ce point parce que nous venons de parler d'immigration. Nous venons d'entendre M. McKenna en souligner l'importance et mentionner les réfugiés et leur contribution au renforcement de l'économie des collectivités.
    Toutefois, à l'heure actuelle, la CISR est réellement dans une impasse. Elle ne peut pas traiter de cas. Elle n'a pas les ressources pour le faire. Tout un défi se pose à nous. En outre, dans ce contexte, nous avons appris le décès d'une personne qui tentait de traverser la frontière pour se rendre au Canada.
    À mon avis, cette motion est très importante. Nous devons procéder à l'étude de ce sujet le plus rapidement possible. Cela ne veut pas dire que l'étude que nous menons actuellement n'est pas importante aussi. Elle l'est, évidemment. Toutefois, compte tenu de l'urgence de cette question, et pour des raisons de vie et de mort, je crois qu'il est essentiel que nous l'abordions en comité.
    Je m'excuse auprès des témoins qui étaient là aujourd'hui pour discuter d'une autre question.
    À mon avis, le Comité a la responsabilité d'examiner les enjeux pressants sans délai. Comme nous l'avons vu, et comme je l'ai mentionné, des vies sont en jeu, le gouvernement continuant de refuser de reprendre le débat sur ma motion en vue d'étudier les passages illégaux à la frontière.
    Monsieur le président, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, l'UNHCR, a souligné qu'à la fin de 2015, 24 personnes en moyenne à la minute étaient forcées de quitter leur foyer en raison de la guerre et des persécutions. On a dénombré au total 65,3 millions de personnes déplacées à la fin de 2015. Par comparaison, un an plus tôt, ce chiffre était de 59,5 millions. Il s'agit de la première fois dans l'histoire de l'organisation...
    J'invoque le Règlement et j'invite ceux qui aimeraient détourner l'attention de cette étude du Canada atlantique à éviter de l'attaquer dans leur tentative de se faire valoir ou de mousser leur avenir politique. Nous avons une étude devant nous. Nous avons des témoins qui viennent de très loin. Je crois que cette attitude est antidémocratique, en plus d'être très déplacée et impolie.
(1615)
    Monsieur Sarai, malheureusement, il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement.
    Madame Kwan, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis d'accord avec les délibérations des membres du Comité, mais j'aimerais beaucoup que cette motion soit approuvée. Je souhaiterais entendre les arguments des membres du Comité qui croient que la motion que je soumets n'est pas urgente. J'apprécierais beaucoup qu'un tel débat ait lieu.
    Une voix: La motion à la Chambre n'était pas unanime.
    La question dont nous traitons est importante, et il faut poursuivre.
    Tout cela est ridicule.
    À l'ordre, s'il vous plaît.
    Madame Rempel.
    J'invoque le Règlement en ce qui a trait au décorum. Je crois que vous avez statué que ma collègue avait la parole et devait pouvoir parler sans être interrompue.
    Oui.
    Madame Kwan, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Il s'agit de la première fois dans l'histoire de l'organisation que quelque 60 millions de personnes sont déplacées, et il s'agit du nombre le plus élevé de personnes déplacées depuis la Deuxième Guerre mondiale. Parmi les 7,4 milliards d'habitants de la terre, 1 sur 113 à l'échelle mondiale est un demandeur d'asile, une personne déplacée à l'intérieur de son pays ou un réfugié. C'est en raison de ce niveau sans précédent de déplacements forcés que nous devons examiner nos systèmes.
    Au mois de mai de cette année, j'ai eu le plaisir de rencontrer Mario Dion, président de la CISR. M. Dion est fier du travail accompli par la CISR, mais il est conscient de ses limites. Au cours de cette réunion extrêmement éclairante, le président m'a expliqué plusieurs nouvelles mesures visant à augmenter l'efficacité. Elles comprennent la création d'un nouveau processus appelé processus d'audience courte, en vertu duquel les demandes d'asile en provenance de pays dont le taux d'acceptation est de 80 % ou plus seront immédiatement mises au rôle par la Section de la protection des réfugiés.
    La raison qui justifie ce processus est que, après une audience de 90 minutes, un membre de la CISR peut, dans la majorité des cas, déterminer que la demande est fondée et devrait être approuvée. Cette audience plus courte pourra permettre de traiter les cas plus évidents plus rapidement dans le système. Si le membre de la CISR a des doutes au sujet de la demande, celle-ci sera renvoyée au processus courant. On vise ainsi à faire en sorte que l'intégrité du système soit maintenue. C'est ce que m'a confirmé le président de la CISR.
    J'ai aussi été informée de l'augmentation du nombre de pays admissibles au processus de traitement accéléré de la CISR. Ce processus, qui a été établi dans sa forme actuelle il y a quelques années, permet le traitement des demandes en provenance de certains pays, sans audience et seulement au moyen des documents soumis. À l'origine, seules les demandes de la Syrie, de l'Iraq et de l'Érythrée étaient admissibles à ce processus. En date de juin 2017, l'Afghanistan, le Burundi, l'Égypte et le Yémen se sont ajoutés parmi les pays d'origine admissibles à une demande accélérée. Tout comme pour le processus d'audience courte, si un membre de la CISR exprime un doute concernant la demande, celle-ci fera l'objet d'une audience complète afin d'en déterminer l'authenticité.
    Ces mesures permettront de traiter plus rapidement les cas les plus évidents des demandeurs d'asile au Canada, ainsi que de consacrer plus de temps et de ressources aux cas moins évidents, afin d'assurer le maintien de l'intégrité du système.
    Malheureusement, en raison du silence injustifiable du gouvernement en ce qui a trait à l'augmentation des demandes d'asile au Canada, et plus particulièrement des demandes présentées dans un bureau intérieur, par suite de passages illégaux des États-Unis au Canada, la rhétorique anti-immigrant et anti-réfugié a continué à se propager.
    Lorsque la CISR a annoncé ces mesures d'efficience, on lisait, parmi les titres des éditoriaux dans les médias traditionnels: « Les libéraux souhaitent stopper les demandeurs d'asile potentiellement dangereux ». J'ai été déçue à de trop nombreuses occasions par les envolées grandioses du gouvernement sur la scène internationale, qui ne donnent pas lieu à des mesures concrètes au pays. Cela fait en sorte que cette désinformation continue de se répandre.
    Nous avons ici deux exemples clairs de la façon dont la CISR augmente ses niveaux d'efficience. M. Dion m'a aussi fait part d'un graphique montrant le nombre de nouveaux cas acceptés par la SPR de 2013 à décembre 2016. Je ne peux pas soumettre le graphique au Comité. Nous pouvons peut-être demander à M. Dion de nous en présenter une version bilingue, afin que nous puissions examiner les chiffres et comprendre ce qu'ils signifient, ce à quoi la CISR fait face, et pourquoi nous devons lui fournir des ressources pour qu'elle puisse faire son travail.
    Si la CISR ne réussit pas à réduire le nombre de demandes et à traiter les cas, et que cela crée un arriéré de 1 000 cas par mois, cela posera un problème pour l'intégrité de notre système, qui devra être résolu.
    Si nous voulons parler d'immigration et de ses répercussions dans les provinces de l'Atlantique, ainsi que de la façon de réaliser des progrès à ce chapitre, nous devons nous assurer que la CISR dispose des ressources appropriées pour faire son travail.
    Ce graphique était frappant pour deux raisons, monsieur le président. La première est liée à l'augmentation importante et constante du nombre de cas réglés par la SPR mensuellement. En décembre 2013, le nombre de cas réglés par la SPR se chiffrait à environ 700. En décembre 2016, il atteignait environ 1 200. La tendance est évidente, et même avant ces nouvelles initiatives, force est de constater que la CISR a déployé beaucoup d'efforts pour améliorer le traitement des cas.
(1620)
    Malheureusement, le deuxième aspect frappant vient atténuer ces augmentations de l'efficacité. Comme j'y ai fait allusion dans mon allocution d'ouverture, nous voyons actuellement un nombre sans précédent de déplacements forcés partout dans le monde. Cela a pour résultat une augmentation marquée du nombre de demandes soumises à la SPR. Par exemple, en décembre 2013, le nombre de nouveaux cas soumis à la SPR se chiffrait à environ 900. En décembre 2016, il était de 2 200.
    M. Dion m'a affirmé clairement, en termes non équivoques, qu'aucune mesure d'efficience ne pouvait être prise par la CISR, en raison du manque de financement et des 60 postes de membres qui sont vacants. D'autres membres doivent être recrutés et des ressources doivent être affectées, compte tenu des tendances qui se dessinent à l'échelle mondiale en matière de déplacements forcés.
    Cette situation persistante et injustifiable concernant les anciennes demandes crée une autre série de problèmes pour la CISR. Les demandes qui n'ont pas été réglées avant le remaniement du système d'octroi de l'asile en 2012 sont considérées comme des anciennes demandes. Étant donné qu'elles ne sont pas assujetties aux délais réglementaires en ce qui a trait aux dates d'audience qui s'appliquent aux demandes soumises après le remaniement, elles sont constamment mises de côté pour augmenter la probabilité de respecter les délais réglementaires s'appliquant aux nouvelles demandes.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je croyais que nous étions ici pour l'étude du Canada atlantique. Nous avons des invités, dont un très important ancien premier ministre, parmi nous. Je crois que le dépôt de cette motion constitue un manque de respect. Je suis plus que disposé à en discuter à une date ultérieure, mais je crois qu'il s'agit réellement d'une perte énorme de temps. Je ne sais pas si nous aurons la chance de nous entretenir à nouveau avec le premier ministre. Je crois qu'il est très important que nous entendions les témoins. Il s'agit d'une étude de premier plan pour le Canada atlantique, et il est essentiel que nous respections notre obligation d'entendre tous les témoins qui se présentent ici.
    Monsieur Anandasangaree, vous amorcez un débat. À moins que vous ne puissiez invoquer le Règlement particulier auquel vous faites référence, je vais vous rappeler à l'ordre et redonner la parole à Mme Kwan.
    Madame Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais prendre un moment pour me pencher sur cette question. Je comprends bien que nous avons des invités parmi nous. Je comprends aussi que des tâches importantes doivent être accomplies, et c'est ce que nous faisons. Nous avons prévu 10 réunions pour cette étude, mais il y a d'autres questions pressantes aussi.
    Monsieur le président, je sais que les membres du Comité ne veulent pas le reconnaître, mais le fait que la CISR ne fonctionne pas correctement nuit à l'ensemble de notre système. Cela nuit à l'intégrité de notre système d'immigration et, à l'heure actuelle, nous avons un problème majeur, selon moi. La CISR a 1 000 nouveaux cas accumulés en traitement, 1 000 cas par mois. C'est vrai que nous voulons que des gens s'installent dans les provinces de l'Atlantique pour soutenir l'économie, et que nous souhaitons faire tout ce qu'il faut pour que cela se produise.
    Je ne sais pas si nous y arriverons si la CISR demeure dans cette impasse. Nous venons d'entendre M. McKenna parler de la valeur des réfugiés pour les provinces de l'Atlantique et du fait que les réfugiés sont les bienvenus ici. Si nous voulons nous assurer que ce processus se déroule bien, nous devons faire en sorte que la CISR soit capable de gérer ces questions avec efficience et efficacité, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle. Cette motion comporte un niveau d'urgence et nous devons y donner suite, car autrement, tout le reste échouera. C'est le pourquoi de ma démarche, monsieur le président.
    J'aimerais revenir à mon point concernant la situation à laquelle la CISR fait face. On y traite actuellement les anciennes demandes. Le ministre a demandé à la CISR de se charger du traitement des anciennes demandes, sans lui donner les ressources nécessaires pour le faire. Il reste environ 5 500 anciennes demandes en suspens, ce qui signifie qu'environ 5 500 demandeurs attendent dans les limbes depuis 2012, sans savoir ce qui adviendra de leur vie, où ils iront et où ils se situent. Ils sont actuellement dans l'inconnu, et cette situation perdure depuis 2012.
    Je crois que nous pouvons tous convenir que cela est tout à fait inacceptable, mais il s'agit de la réalité pour ces personnes, et le gouvernement a choisi de ne pas donner de ressources à la CISR pour traiter ces demandes. Une absence de volonté politique a mené au traitement de ces demandes d'asile, au mieux comme des demandes de deuxième catégorie. M. Dion a été clair dans le rapport sur les plans et priorités de 2016-2017 en disant:
La CISR avait réaffecté des ressources internes disponibles afin de réduire le nombre d'anciens cas faisant partie de l'arriéré et de faire passer ce nombre de 32 000 à 6 500 depuis l'entrée en vigueur du nouveau système d'octroi de l'asile. En 2016-2017, la capacité de la Commission de réaffecter des ressources à l'interne sera grandement limitée, particulièrement s'il y a une augmentation soutenue de cas à la SPR. En conséquence, il faudra revoir les engagements pris par la Commission en ce qui touche les demandes d'asile qui ne sont pas assujetties à des délais réglementaires, par exemple les 6 500 anciennes demandes d'asile restantes, à moins que la CISR puisse disposer d'un financement temporaire supplémentaire.
    Malheureusement, monsieur le président, la demande a été ignorée. La CISR a plutôt été forcée à nouveau de réaffecter des sommes à l'interne, ce qui pèse sur son budget. Récemment, la CISR a annoncé la création du groupe de travail pour le traitement des anciennes demandes. En affectant 3 millions de dollars par année pendant deux ans et 25 membres ETP de la Commission, cette dernière espère finalement éliminer cette injustice permanente. Cela signifie que 3 millions de dollars sont retirés d'un secteur dont la CISR voulait s'occuper, parce qu'aucune nouvelle somme ne lui a été affectée dans le budget de 2017.
    M. Dion a expliqué que les 25 membres de la Commission figurent parmi les plus expérimentés de son effectif. Même s'il serait bien d'éliminer les anciens cas, cela aura de toute évidence des répercussions sur les activités de la CISR pour l'avenir...
(1625)
    Monsieur le président, j'invoque rapidement le Règlement pour souligner ma déception quant à l'incapacité du Comité de fonctionner de façon appropriée. Je siège moi-même à deux comités permanents...
    Qui sont ces personnes qui viennent perturber notre réunion? Il y en a une table complète là-bas. Vous ne devriez pas être ici...
    Pour moi, qui ai l'occasion de siéger à deux comités très actifs, il est très malheureux de devoir renoncer à tous les témoignages pertinents que nous pourrions entendre aujourd'hui...
    L'hon. Michelle Rempel: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Le président: Monsieur Harvey...
    ... à cause de l'intervention de mon honorable collègue. Je comprends sa passion pour le sujet à l'étude.
     Monsieur Harvey...
    Finalement, ce n'est ni le moment ni le lieu pour soulever cette question.
     Monsieur Harvey, vous vous êtes lancé dans un débat. Comme je disais précédemment...
    Il interrompt notre réunion.
    ... à moins que vous puissiez invoquer un article qui a été enfreint, votre recours au Règlement est irrecevable.
    J'aimerais dire qu'en qualité de Canadien de l'Atlantique et député d'une autre circonscription de notre pays, je trouve très décourageant...
    Merci, monsieur Harvey.
    Je vais redonner la parole à Mme Kwan.
    Mais avant, madame Kwan, je demande votre indulgence pendant une minute.
    Je voudrais remercier les témoins et leur donner congé. Je sais que certains sont venus de très loin. Je sais que la liaison de vidéoconférence sera interrompue d'un moment à l'autre. Je remercie les témoins de nous avoir livré le fond de leur pensée. Nous serons heureux d'entendre toute autre réflexion qu'ils voudront bien nous faire.
    Au nom de tous les membres du Comité, merci.
    Les témoins peuvent se retirer et la parole est à vous de nouveau, madame Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Si notre système d'immigration est miné à la base, comme il l'est actuellement avec la CISR qui manque de ressources pour traiter les demandes efficacement et sans accumuler un arriéré, nous ne rendons service à personne, y compris aux provinces atlantiques, qui ont besoin elles aussi d'un système qui fonctionne bien.
    Il est clair que la CISR fait tout ce qu'elle peut. Comme M. Dion l'a expliqué, elle a besoin de ressources pour être capable de répondre aux exigences qu'on lui impose.
(1630)
    À l'ordre, s'il vous plaît.
    Je comprends que certaines personnes veuillent se rattraper, mais je vous demande de le faire à l'extérieur de la salle.
    Merci.
    Madame Kwan, c'est à vous.
    Pour l'instant, la CISR ne peut pas répondre à la demande. Lors de ma rencontre avec M. Dion en mai, elle avait 24 000 dossiers en retard. Je répète pour que les membres du Comité puissent entendre haut et fort: la CISR accuse actuellement un arriéré de 24 000 dossiers. Cet arriéré augmente de 1 000 dossiers par mois. Je répète à nouveau pour que ce soit bien clair aux yeux de tout le monde: l'arriéré augmente de 1 000 dossiers chaque mois.
    Pour diverses raisons, la moitié seulement des dossiers sont traités dans les délais prévus par la loi. La CISR est à court de moyens financiers et aucun gain d'efficacité ne peut y remédier. Devant ce même comité, j'ai questionné le ministre au sujet des anciennes demandes et du besoin de ressources à la CISR. Il a reconnu le problème en disant que la solution serait d'avoir à la fois des gains d'efficacité et des ressources. Il ressort malheureusement aussi que le ministre ne fait pas sa part et n'attribue pas les ressources nécessaires.
    Pis encore, pas plus tard qu'hier, on a entendu que la CISR était financée adéquatement en réponse à une question que j'avais posée au ministre. Qu'est-ce qui a provoqué ce revirement? Le ministre a-t-il mal prononcé? Était-il sérieux quand il disait que la CISR était financée adéquatement? Ce n'était pas l'avis de son président. La CISR accuse actuellement un arriéré de 24 000 dossiers, auxquels s'ajoutent encore 1 000 dossiers chaque mois. Franchement, dans quel monde le ministre vit-il pour affirmer que la CISR dispose de ressources suffisantes?
    Il y a des dossiers qui traînent depuis longtemps, où des gens sont condamnés aux oubliettes durant des années sans savoir s'ils peuvent ou non obtenir la résidence permanente dans notre pays. Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous, mais si j'étais coincée dans cette situation sans savoir ce que l'avenir me réserve, chaque jour me paraîtrait une année. Ces gens-là y sont coincés année après année. Avec un arriéré qui augmente de 1 000 dossiers par mois, nous allons créer sous le régime actuel une toute nouvelle catégorie d'« anciens dossiers ».
    Le financement n'a pas changé. En fait, nous savons que des fonds internes ont été redistribués, ce qui aggrave encore les contraintes imposées au système. En écho aux graves préoccupations exprimées par les députés de l'autre opposition, nous voulons que le ministre comparaisse devant le Comité afin que nous puissions l'interroger. Le financement de la CISR se présente dans une optique tout autre. Les membres du Comité ont le droit de savoir pourquoi. Plus longtemps le gouvernement restera aveugle aux problèmes, plus l'intégrité du système sera menacée dans un contexte mondial sans précédent de déplacements forcés et de discours anti-immigrants et anti-réfugiés. Le Canada ne peut pas se permettre de laisser aller les choses.
    Et pourtant, nous voici siégeant à ce comité qui refuse de reconnaître les problèmes du système et qui continue de voter contre même l'idée de discuter de ma motion concernant la tenue d'une étude sur les traversées illicites de la frontière. On dit que je perturbe les travaux du Comité. Je ne comprends pas pourquoi les membres ne peuvent même pas voter sur une simple motion.
    Des voix: Bravo!
    Mme Jenny Kwan: J'ai déposé une motion. Donnez-nous une réponse. Êtes-vous d'accord pour étudier la situation quasiment critique qui se pose avec les traversées illicites de la frontière? Les membres du Comité ne l'admettront pas. Ils vont retarder le débat et ne pas vraiment répondre à la question.
    C'est sans rapport avec la discussion en cours. Je ne crois pas que...
    Pardon?
    La députée a le droit de présenter des arguments en faveur de sa motion, mais cela nous amène à une autre motion complètement. Nous ne discutons pas de deux motions, seulement de celle qui est devant nous.
    Nous nous lançons à nouveau dans un débat.
    Madame Rempel, vous avez un rappel au Règlement.
(1635)
    On conteste la pertinence des propos tenus. En tant que membre du Comité qui écoute Mme Kwan, je trouve que son raisonnement sur l'incapacité du Comité à adopter des motions a un rapport avec son argument sur les raisons d'adopter cette motion. Je suis donc d'avis que son argument est pertinent. J'aimerais beaucoup l'entendre continuer.
    Nous nous lançons dans un débat une fois de plus.
    Revenons à vous, madame Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais vous dire exactement comment la question des traversées illicites touche au travail de la CISR. C'est elle qui doit traiter les demandes d'asile et elle ne peut pas bien faire son travail sans disposer des ressources nécessaires. Nous faisons face à une crise. Une femme vient de mourir en tentant de passer la frontière depuis les États-Unis. Nous pouvons faire comme si de rien n'était, mais des vies sont en jeu. La CISR a une tâche absolument cruciale et elle a besoin de financement pour s'en acquitter. Voilà pour la pertinence, monsieur le président.
    Ces traversées illicites amènent chez nous des réfugiés de l'intérieur et le nombre croissant de demandes d'asile qui en découlent contribue à aggraver les tensions exercées sur la CISR. Au cas où des gens ne comprendraient pas comment le processus fonctionne, je le dis tout net: il y a un lien direct avec la CISR. Comme les autres demandes d'asile, celles des réfugiés de l'intérieur doivent être entendues dans les délais prévus par la loi et ne font que grossir encore l'arriéré. C'est ce qui se passera si on n'y met pas les ressources nécessaires. Les dossiers en retard ne feront que s'accumuler.
    Depuis l'arrivée de l'administration Trump, on a vu grimper en flèche le nombre de demandeurs d'asile qui traversent la frontière depuis les États-Unis à des points de passage non autorisés. Entre janvier et avril 2017, les autorités canadiennes en ont arrêté 2 719, contre 2 464 pour toute l'année 2016. Si la tendance se maintient, il faut s'attendre à en intercepter plus de 8 000 cette année, plus de trois fois le nombre enregistré en 2016. Imaginez les répercussions pour la CISR. Si elle n'a pas les ressources pour traiter ces dossiers, que nous arrivera-t-il? Comment allons-nous préserver l'intégrité de notre système d'immigration? Nous ne pouvons pas nous permettre d'en arriver là.
    Il est de notoriété publique que les budgets de la GRC et de l'ASFC dans les localités les plus touchées sont étirés à la limite. La pire conséquence à redouter serait que le gouvernement soit incapable de seulement reconnaître le problème. Voilà qui mine la confiance des Canadiens en leur système d'immigration et nous ne pouvons pas laisser pareille chose se produire dans le contexte actuel.
    L'argument selon lequel les traversées illicites de la frontière permettent aux demandeurs d'asile de « déjouer le système » ou de « passer devant la file d'attente », comme disent certaines personnes, est complètement erroné. Les réfugiés de l'intérieur font partie d'une catégorie spécifique dans le plan annuel des niveaux d'immigration. Le gouvernement du Canada a un objectif d'établissement de 15 000 personnes protégées, la catégorie qui comprend les réfugiés de l'intérieur, en plus des 25 000 places réservées aux réfugiés pris en charge par l'État, parrainés par des particuliers ou désignés par un bureau des visas en vertu de ce qu'on appelle le Programme mixte. Tout réfugié qui arrive au Canada par des voies non autorisées n'enlève donc aucune chance d'établissement à un autre qui cherche à entrer par les voies habituelles.
    De même, les demandes d'asile des réfugiés de l'intérieur sont traitées suivant leur propre échéancier et ne viennent pas grossir l'arriéré de dossiers des autres catégories de demandeurs. Cela dit, chaque flux de réfugiés accumulera un arriéré si la CISR n'est pas financée à la hauteur des besoins, ce à quoi nous devrions mettre fin.
    On a tort de penser que traverser la frontière...
    Monsieur le président, si vous permettez.
    Madame Kwan, je pense...
    S'agit-il d'un rappel au Règlement?
    Je crois que nous en avons assez entendu, monsieur le président.
    Je suis désolé.
    Nous en avons entendu suffisamment de la part de la députée.
    Nous sommes prêts à passer au vote.
    J'invoque le Règlement.
    Madame Rempel.
    Je le fais parce que c'est arrivé plusieurs fois, monsieur le président.
    Je lis ici à la page 1052 de ma version de Bosc et O'Brien un article qui dit:
Un membre d’un comité peut proposer une motion à n’importe quel moment dans le cours normal d’une séance, pourvu que:
la période d’avis, le cas échéant, ait été respectée.
    Il y a une longue liste d'autres raisons, mais étant donné que c'est l'article applicable et que l'avis a été donné en bonne et due forme, je crois que la motion de ma collègue est recevable.
    Vous avez entièrement raison.
    Madame Kwan, c'est à vous.
(1640)
    On a tort de penser que traverser la frontière de façon illicite pour demander l'asile équivaut à commettre un crime, monsieur le président.
    Le Canada a signé des conventions qui permettent cela en vertu du droit international. Par exemple, la Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés déclare ce qui suit:
Les États contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée au sens prévu par l'article premier, entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation, sous la réserve qu'ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables de leur entrée ou présence irrégulières.
    Le Canada a signé cette convention en 1969, monsieur le président.
    Il est faux de prétendre aussi que les vannes sont ouvertes et que les réfugiés s'y engouffrent sans contrôle en nombre tel que le système canadien est incapable de les absorber. C'est toutefois un problème auquel il va falloir s'attaquer. Le gouvernement ne peut pas simplement fermer les yeux et dire qu'on n'a pas besoin de financer la CISR pour qu'elle puisse bien s'en occuper.
    Le premier ministre ne peut pas dire et écrire dans les médias sociaux que nous accueillons les réfugiés sans fournir les moyens nécessaires à cet accueil. Il faut y voir absolument si on veut honorer la parole du premier ministre.
    L'inaction ne fera que continuer de peser lourd sur les ressources des organismes gouvernementaux touchés, de grossir les arriérés de dossiers et de miner la confiance du public dans ses institutions. Si cela dégénère en crise, ce sera entièrement de notre faute.
    Le hic est que nous laissons le problème grossir plus qu'il ne devrait. Il y a déjà eu un décès. Une femme de 57 ans est morte d'hypothermie en tentant la périlleuse traversée depuis les États-Unis jusqu'à Emerson, au Manitoba. Cette mort aurait pu être empêchée. Malheureusement, en dépit de belles paroles et de beaux messages de bienvenue sur Twitter, la réponse du gouvernement a été surtout de laisser faire. Quand il daigne enfin intervenir, sa réponse est insensible et truffée de fausse information.
    Prenez par exemple le ministre de la Sécurité publique. Il a déclaré qu'il était important de suivre les règles et de traverser la frontière de façon légale et régulière et que les gens ne devaient pas s'imaginer qu'il existe une porte arrière ou une porte de côté pour entrer librement dans le pays.
    Monsieur le président, je crois que la plupart d'entre nous ici aujourd'hui, ainsi que le ministre lui-même, savons que ce n'est pas vrai. Cette femme ne pouvait pas traverser à un point d'entrée autorisé, à cause de l'Entente sur les tiers pays sûrs. Son seul recours était de traverser sans autorisation et de faire une demande d'asile en tant que réfugiée de l'intérieur.
    Depuis le revirement spectaculaire de la politique humanitaire aux États-Unis après l'élection de Donald Trump, j'affirme que l'Entente sur les tiers pays sûrs doit être suspendue, comme le demandent depuis longtemps des experts en droit de l'immigration et des groupes de défense des réfugiés.
    J'ai un exemple qui illustre bien le magnifique travail dont la CISR est capable lorsqu'elle dispose des fonds et des commissaires dont elle a besoin. À la veille de Noël 2016, Seidu Mohammed, un demandeur d'asile ghanéen dont la demande avait été rejetée aux États-Unis, a traversé à pied la frontière canadienne pour arriver à Emerson. Des températures glaciales lui ont causé de graves engelures et la perte de huit doigts. Le 17 mai, la CISR acceptait sa demande d'asile. M. Mohammed a déclaré que sa demande avait été rejetée aux États-Unis pour des raisons semblables à celles invoquées par le programme de droit de l'immigration de Harvard, par des spécialistes et des étudiants du droit de l'immigration canadien, par des associations des libertés civiles et humanitaires et par tant d'autres pour exiger encore et encore la suspension de l'Entente sur les tiers pays sûrs. Durant sa longue détention punitive, il n'avait pas accès à un avocat et ne pouvait pas préparer adéquatement son entrevue. Chez nous, il a pu le faire.
    La CISR fait du bon travail; il faut lui donner les moyens de continuer. Si on ne le fait pas, les dossiers en retard vont s'accumuler, comme cela se produit déjà au rythme de 1 000 par mois, par-dessus un arriéré déjà énorme de 24 000 dossiers. M. Mohammed aurait pu présenter sa demande sans perdre ses doigts si le gouvernement avait suspendu l'Entente sur les tiers pays sûrs.
(1645)
    Dans les réponses qu'il me fait, le ministre de l'Immigration emploie souvent en anglais le mot « orderly » pour décrire des choses, ce qui signifie « ordonné ». Qu'y a-t-il d'ordonné à priver de leurs doigts des demandeurs d'asile qui ont finalement gain de cause? Qu'y a-t-il d'ordonné à trouver dans un fossé une femme morte d'hypothermie? Vous savez ce qui est ordonné: traverser à un point d'entrée autorisé et faire une demande d'asile.
    À cause de l'inaction du gouvernement, ce sont des ONG qui prennent le relais et qui viennent combler le vide, des ONG eux-mêmes sous-financés par l'État.
    J'ai rencontré récemment des représentants de l'Inland Refugee Society of B.C., une société qui dessert les demandeurs d'asile depuis 1984 et qui est leur premier recours pour l'aide d'urgence et les besoins d'installation, comme l'orientation, l'information, les références, les cours d'anglais à l'arrivée au Canada. Ses services s'adressent aux réfugiés de l'intérieur.
    La société a vu augmenter le nombre d'arrivées au cours des deux dernières années, plus particulièrement depuis janvier de cette année. Elle a vu son volume de travail bondir de 300 % par rapport à la même période l'an dernier. Ses ressources ne suffisent plus à la tâche. Si le flux de demandeurs se poursuit au rythme actuel, les fonds vont lui manquer avant la fin de l'année financière et elle devra fermer ses portes. Déjà en mai 2017, elle a dû couper dans l'aide au transport et au logement et ne peut plus maintenant payer que les salaires correspondant à deux postes et demi et le loyer de son local.
    Il faut une intervention immédiate pour que les demandeurs d'asile continuent de recevoir l'aide à l'installation et à l'intégration dont ils ont besoin. Sinon, ils se retrouvent en état de vulnérabilité, souvent sans abri, et la transition vers l'autosuffisance est retardée.
    Présentement, les centres d'accueil sont pleins dans ma localité. Ils ont placé 32 familles dans un motel financé par la Croix-Rouge. Ces familles commencent à manquer de vivres et ont désespérément besoin d'aide.
    L'Inland Refugee Society of B.C. lutte pour survivre. En passant, elle ne reçoit pas un sou du gouvernement fédéral pour faire cet important travail. Les demandeurs d'asile n'ont pas droit au bien-être social et ne peuvent compter que sur l'aide d'organismes comme l'Inland Refugee Society, qui reçoit d'ailleurs les demandeurs que lui envoient l'ASFC et d'autres services d'établissement. Il vaut la peine de signaler...
     Monsieur le président, nous sommes saisis d'une motion. Celle-ci est très précise. Nous sommes en train de nous faire imposer un discours très élaboré sur les organismes d'aide à l'établissement des réfugiés, mais qui n'a rien à voir avec la motion.
    Monsieur le président, j'estime que le débat doit porter sur un point précis et, à plusieurs reprises, la personne a débordé du sujet. Puis-je vous demander de veiller à ce que la discussion se limite à la motion.
    Vous soulevez donc une question de pertinence.
    Oui, je parle de la pertinence.
    Je crois qu'au stade où nous en sommes, cette discussion a encore un rapport avec la motion qui a été déposée.
    Madame Rempel, vous vouliez faire un rappel au Règlement?
    Oui, monsieur le président, et pour ce rappel au Règlement, je voudrais évoquer la décision rendue par le Président de la Chambre, la semaine dernière. Plusieurs questions avaient été soulevées relativement à la pertinence et le Président avait fait remarquer qu'on accorde généralement beaucoup de latitude aux intervenants. Le plus souvent, à un moment donné, la personne qui a la parole finit par revenir à son sujet. J'estime que ce que dit Mme Kwan est pertinent. De toute façon, au regard de la décision rendue par le Président, je dirais que ses arguments sont pertinents.
    Effectivement. En général, les présidents accordent une certaine latitude aux députés pour qu'ils en viennent à leurs propos.
    Madame Kwan, je vous en prie, poursuivez.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je crois que ce que j'ai dit était tout à fait pertinent et je vais établir les liens nécessaires pour le député afin qu'il voie clairement là où je veux en venir.
    Comme je le disais, il convient de remarquer que, selon la Inland Refugee Society of B.C., quelque 70 % des demandeurs obtiennent gain de cause. Par ailleurs, à cause du manque de ressources de la CISR, la moitié des cas sont renvoyés et ne sont pas auditionnés dans les délais.
    Que signifie tout cela? Eh bien, ces familles se retrouvent dans les limbes et elles doivent s'en remettre à des groupes comme la Inland Refugee Society of B.C. pour avoir de l'aide. De plus, comme leurs causes n'ont pas été entendues, ces familles ne peuvent pas se prévaloir des autres ressources normalement disponibles. Elles ne peuvent pas trouver d'emploi et c'est un gros problème.
    Tout cela est donc lié. Je sais que les députés sont ennuyés parce que je parle de tout cela. Mais ce sujet a aussi un rapport avec ce que nous faisons. C'est ce que nous devons faire. Nous devons veiller à ce que notre gouvernement — votre gouvernement — s'attaque à ce genre de problème afin que le système de l'immigration ne soit pas affaibli.
(1650)
    Je veux faire un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Pour le moment, la CISR ne peut pas faire correctement son travail à cause d'un manque de ressources, monsieur le président.
    Vous vouliez faire un rappel au Règlement, monsieur Harvey.
    Je tiens à exprimer mon mécontentement par rapport aux commentaires de la députée aujourd'hui, car tout ce qu'elle dit n'a pas vraiment de rapport avec la motion ni avec son contenu, mais davantage avec la limite de temps prévue pour la motion.
    Je trouve très déconcertant qu'on parle de cela maintenant. Il y a péril en la demeure. Nous approchons de la fin de la session et les comités travaillent d'arrache-pied pour conclure leurs études.
    Monsieur Harvey, je n'ai pas entendu de rappel au Règlement dans ce que vous venez de dire et je vais donc rendre la parole à Mme Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C'est plutôt fâcheux ce que fait le Comité, parce qu'il ne veut pas se pencher sur ces questions critiques. Si les députés avaient écouté ce que j'ai dit, ils concluraient que mon intervention a un rapport avec ma motion.
    Soyons clairs à propos de ce que vise ma motion, monsieur le président. Permettez-moi d'en refaire la lecture pour les députés qui ne l'ont peut-être pas entendue:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne immédiatement une étude sur la situation actuelle qui prévaut à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, la CISR, compte tenu des contraintes financières...

    J'ai un autre rappel au Règlement.
    Elle va répéter sa motion et je pense qu'il existe un article du Règlement qui traite des répétitions. Je ne pense pas que nous soyons ici pour entendre des redites. Je voulais simplement signaler mon agacement.
    Encore une fois, il faut accorder une certaine latitude à la personne qui a la parole. Merci beaucoup d'avoir fait cette remarque.
    Aucune latitude, cependant, pour les répétitions.
    Répétition et pertinence sont deux éléments très importants.
    Je vous en prie, madame Kwan, poursuivez. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Si je me suis mise à relire ma motion, c'est que, selon moi, les députés ne l'ont pas entendue. Ils étaient en train de remettre en question la pertinence de mes arguments, tandis que mon raisonnement confirmait précisément qu'il faut entamer cette étude sans tarder.
    Je vous demande un peu d'ordre. Madame Kwan.
    Je crois que vous avez vos notes d'intervention et je vous invite à poursuivre si vous le souhaitez. Vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma déclaration est tout à fait pertinente à la motion qui pointe dans le sens de l'urgence d'entreprendre une étude parce que le CISR, sous la pression de contraintes financières, a vu son arriéré de cas augmenter de 1 000 par mois. On ne peut plus tolérer la situation actuelle où 60 postes de commissaire sont vacants et où l'on assiste à une importante augmentation du nombre de demandes d'asile au Canada en 2017. Il faut que nous fassions venir ici le ministre et les hauts fonctionnaires afin d'examiner ces questions avec eux et comment les régler.
    Les Inland Refugee Services...
    Je fais un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Monsieur Harvey, j'espère vraiment qu'il s'agit bien d'un rappel au Règlement cette fois.
    Monsieur le président, je tiens simplement à dire que mon mécontentement n'est pas lié à la pertinence du contenu de sa motion. J'estime plutôt que ce contenu est tout à fait pertinent à la motion qu'elle a présentée, mais je suis déconcerté par le choix du moment pour cette motion.
    Merci.
    Ce n'était pas un rappel au Règlement, mais je vous remercie.
    Madame Kwan, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Les députés auront l'occasion de voter à ce propos. J'en suis certaine. J'arrive au terme de mes remarques à ce sujet et les membres du Comité sauront que, quand je formule ce genre de remarque, ce n'est pas pour jouer la montre, mais plutôt pour bien être comprise. J'espère que les députés le comprendront et j'ai hâte de savoir comment les membres du Comité vont voter au sujet de cette motion.
    Comme je le disais, monsieur le président, toute cette situation est source de stress pour la CISR et pour des ONG comme la Inland Refugee Society of B.C. En cas de retard des audiences, les demandeurs demeurent dans le système de la CISR qui n'a tout simplement pas la capacité nécessaire pour composer avec cette charge de travail, par manque de financement.
    Les demandeurs du statut de réfugié sont des gens résilients, prêts à s'intégrer, mais ils se heurtent à des obstacles qui retardent leur implantation et le moment où ils pourront compter sur les services sociaux. Si l'on pouvait apporter un meilleur appui aux demandeurs du statut de réfugié, d'entrée de jeu, c'est-à-dire quand ils sont les plus vulnérables, nous favoriserions leur établissement et leur transition au sein de la société canadienne, dans des conditions optimales. N'est-ce pas ce que voulait dire le premier ministre quand il a tweeté « Bienvenue au Canada »?
    Toutes ces situations pourraient être évitées. Le gouvernement doit se sortir la tête du sable et prendre acte qu'il y a des problèmes à régler. Une bonne façon de s'y prendre à ce comité consisterait à commencer par appuyer cette motion préconisant l'étude du phénomène. Nous pourrions étudier la tendance en matière de franchissement irrégulier de la frontière et voir quels changements il faut apporter à la CISR. Nous pourrions faire un rapport de nos recommandations au gouvernement que nous pourrions exhorter à agir sur ce plan. Tout pourrait débuter par notre comité.
    J'espère très sincèrement que les députés du côté gouvernemental appuieront ma motion aujourd'hui, monsieur le président.
    Sur cela, je vais conclure et j'ai maintenant hâte d'entendre les remarques des membres du Comité sur le fond de ma motion et de passer au vote. Allons-y, mettons-nous au travail.
    Des voix: Bravo!
(1655)
    Merci, madame Kwan.
    Monsieur Sarai, vous avez la parole.
    Je propose que l'on mette fin au débat maintenant.
    Voilà un exemple de ce que je disais.
    Très bien.
    Que tous ceux qui sont en faveur lèvent la main.
    Je demande un vote par appel nominal.
    Un vote par appel nominal.
    Il est proposé que l'on mette fin au débat maintenant.
    Non.
    C'est un vote par appel nominal.
    Il a dit « mettre fin au Comité ».
    Vous voulez parler de lever la séance?
    Non, je propose que l'on mette fin au débat maintenant.
    Vous avez dit « Comité ».
    Non, je n'ai pas dit « Comité », j'ai dit « débat ».
    Je pense que vous avez dit « Comité ».
    La greffière et l'analyste ont tous deux entendu « débat ».
    Eh bien, je dois entendre des voix.
    Des voix: Oh, oh!
    Une voix: C'est sans doute le cas, mon cher.
    J'ai consulté notre personnel de soutien et tout le monde me dit avoir entendu « débat ». Nous allons donc passer au vote par appel nominal.
    Il est proposé que l'on mette maintenant fin au débat.
    (La motion est adoptée par 5 voix contre 4.)
    Je vais suspendre pendant deux ou trois minutes afin de permettre à nos prochains témoins de s'approcher.
(1655)

(1700)
    Nous reprenons la séance.
    Je remercie nos témoins de s'être déplacés pour venir nous voir aujourd'hui, ainsi que pour leur patience.
    Nous accueillons Peter Halpin, directeur exécutif de l'Association des universités de l'Atlantique; Sofia Descalzi, présidente de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants de Terre-Neuve-et-Labrador, et Natasha Clark, conseillère auprès des étudiants internationaux à l'Université Memorial de Terre-Neuve, qui est en vidéoconférence.
    Bienvenue à vous trois.
    Monsieur Halpin, je pense que c'est vous qui allez commencer. Vous avez sept minutes. Allez-y.
    Bonjour et merci de m'avoir invité à venir témoigner devant votre comité sur un sujet si important pour l'avenir du Canada atlantique, je veux parler de notre capacité à attirer et à retenir de nouveaux Canadiens dans la région.
    Je m'appelle Peter Halpin et je suis directeur exécutif de l'Association des universités de l'Atlantique, l'AUA. L'AUA est un organisme de pression qui agit pour le compte des présidents et des étudiants des 16 universités de notre région. Je vais citer certaines données sur la capacité de notre région d'attirer des étudiants étrangers et de les inciter à inscrire, sur l'apport de ces étudiants dans nos campus, sur les plans social et culturel, sur les répercussions économiques qu'ils ont dans la région ainsi que sur leur désir éventuel de demeurer sur place après avoir obtenu leur diplôme ce qui, je pense, est en lien direct avec le débat d'aujourd'hui. Je vous dirai aussi ce que les universités font afin de positionner le Canada atlantique en tant que destination d'enseignement de choix dans le monde et je vous expliquerai les efforts collectifs que nous déployons en vue d'amener les employeurs à l'idée d'embaucher des diplômés d'origine étrangère.
    Au cours des 10 dernières années, le nombre d'inscriptions d'étudiants étrangers dans nos universités a augmenté de plus de 100 %. Aujourd'hui, nous comptons plus de 13 000 étudiants d'origine étrangère dans les universités du Canada atlantique. Ces étudiants représentent près de 20 % des inscriptions à temps plein dans les universités de notre région. Or, comme la population d'origine canadienne continue de diminuer régulièrement chez nous, les étudiants étrangers sont d'autant plus importants pour garantir la viabilité de nos établissements. Les universités du Canada atlantique sont des aimants à talents et elles constituent la meilleure source d'immigration dans la région. Nos universités travaillent plus fort que jamais pour promouvoir la région et nos établissements auprès d'étudiants étrangers, en nous présentant dans le monde entier comme une destination accueillante pour faire des études.
    Grâce au Programme de promotion du commerce international de l'APECA, l'AUA a pu diligenter une recherche en marketing numérique sur les étudiants étrangers, pour le compte du secteur de l'enseignement postsecondaire de la région. Les résultats de cette étude constituent, pour nos universités et nos collèges, une source sûre d'informations pratiques et utiles sur les principaux marchés cibles à l'étranger ainsi que sur les nuances culturelles, sur les cibles qu'il convient de viser sur ces marchés et sur le choix du moment, du lieu et de la façon d'aborder des étudiants éventuels. À l'heure où je vous parle, plus de 150 pays sont représentés sur nos campus. Cette diversité culturelle et ethnique a eu une répercussion positive très importante sur le vécu de tout le milieu universitaire, tant au plan éducatif que social. Par exemple, l'Université Saint Mary's de Halifax est considérée comme l'université la plus internationale au Canada, puisque les étudiants détenteurs d'un visa y représentent près de 35 % de la population estudiantine. Le fait que l'on compte plus de 13 000 étudiants étrangers dans la région n'est pas sans avoir des répercussions économiques marquées. En 2009-2010, les étudiants étrangers ont généré une activité économique de 565 millions de dollars dans la région. Le Conseil atlantique des ministres de l'Éducation et de la Formation, le CAMEF, est en train d'actualiser cette étude dont les résultats sont attendus pour l'automne.
    En 2016, l'AUA a fait une étude du niveau de rétention des diplômés de nos universités et collègues communautaires, dans toute la région. Le résultat est étonnant: 75 % des étudiants étrangers qui ont participé à la recherche ont indiqué qu'ils aimeraient rester dans la province où ils ont étudié, après l'obtention de leur diplôme, si on leur en donnait la possibilité. Je dis bien 75 %. Par ordre d'importance, ils ont indiqué que la qualité de la vie dans le Canada atlantique est pour eux le facteur le plus motivant pour rester sur place, devant les débouchés d'emploi. Avec le soutien généreux de l'APECA et de sa Mesure de recherche stratégique visant la région de l'Atlantique, l'AUA est en train d'effectuer une étude de suivi auprès des étudiants étrangers qui ont répondu au sondage de 2016 afin de déterminer ce qu'ils sont devenus, un an après l'obtention de leur diplôme. Nous devrions connaître les résultats d'ici la fin juin.
(1705)
    Nos dirigeants d'université estiment que nous avons un rôle important à jouer pour attirer davantage d'étudiants étrangers dans la région. Nous sommes, par ailleurs, déterminés à collaborer avec les gouvernements, le secteur privé et d'autres pour parvenir à retenir ces étudiants — ces futurs professionnels, entrepreneurs et citoyens dont nous avons tant besoin pour peupler notre région.
    Le 10 juillet, l'AUA accueillera le Sommet des dirigeants de l'Atlantique à Halifax. Celui-ci rassemblera des universitaires, des dirigeants d'entreprise, des leaders communautaires, des responsables du mouvement étudiant, des dirigeants gouvernementaux et des dirigeants politiques que nous inviterons à examiner les obstacles qui empêchent de retenir les diplômés étrangers dans le Canada atlantique. Le conférencier d'honneur lors de ce sommet sera l'honorable Ahmed Hussen, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Il parlera du projet pilote sur l'immigration dans l'Atlantique de même que du pilier immigration de la Stratégie de croissance de l'Atlantique.
    Pour résumer, je dirais que l'AUA est déterminée à collaborer avec d'autres institutions afin d'améliorer la position du Canada atlantique et de nos universités en tant que destinations pour des étudiants du monde entier. De plus, nous collaborons avec d'autres acteurs clés afin de retenir, dans les collectivités de la région, le plus grand nombre possible d'étudiants étrangers ayant obtenu leur diplôme.
    Encore une fois, merci beaucoup pour votre invitation et je suis maintenant prêt à répondre à vos questions et à participer au dialogue.
    Merci, monsieur Halpin.
    Madame Descalzi, vous avez la parole pour sept minutes. Allez-y.
    Merci de m'avoir invitée aujourd'hui. Je suis la présidente désignée de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants — Terre-Neuve-et-Labrador. Notre fédération représente plus de 600 000 étudiantes et étudiants de niveau postsecondaire partout au Canada sur 80 campus différents, incluant toutes les étudiantes et tous les étudiants aux études postsecondaires à Terre-Neuve-et-Labrador.
    La motion M-39 d'initiative parlementaire vous demande d'étudier la question de l’immigration au Canada atlantique. Entre autres, elle vous demande de vous pencher sur le défi de retenir les nouveaux immigrants et les projets de recommandations sur les moyens d'accroître l’immigration au Canada atlantique. La recherche démontre que le Canada atlantique a besoin de plus d'immigrantes et immigrants, et les étudiantes et étudiants internationaux forment un groupe idéal pour devenir de nouvelles citoyennes et nouveaux citoyens. Cependant, pour y arriver, nous devons éliminer les pratiques discriminatoires à l'échelle fédérale et provinciale. À l'échelle fédérale, nous avons besoin d'une plus grande certitude en ce qui a trait aux voies menant à la citoyenneté canadienne. À l'échelle provinciale, nous devons éliminer les pratiques discriminatoires envers le recrutement international, les frais de scolarité, l’assurance santé et les normes d'emploi. Si nous respectons les étudiantes et étudiants internationaux, et que nous arrêtons de les considérer et traiter comme des vaches à lait, ils et elles peuvent aider le Canada atlantique à répondre aux difficultés associées avec une population vieillissante.
    Je suis ici en tant qu'étudiante internationale. Je viens de l'Équateur et j'ai récemment obtenu mon diplôme avec double majeure en psychologie et en français à l'Université Memorial, au campus de Grenfell. J'ai voulu venir au Canada pour de nombreuses raisons. Mon pays est en situation d'instabilité politique, les universités sont principalement privées, et les employeurs embauchent majoritairement des gens qui ont obtenu leur diplôme à une université à l'extérieur du pays.
    Par contre, je n'avais pas la chance d'étudier à l'étranger puisque ma mère est devenue veuve quand j'avais 11 ans et que nous avions des difficultés financières. Un recruteur de l'Université Memorial est venu à mon école secondaire et m'a parlé de leur programme de théâtre et du gel des frais de scolarité pour tous les étudiants. Quand on m'a offert une bourse à Memorial pour couvrir les frais de scolarité de ma première année, j'ai pris la direction du Nord.
    Je ne m’étais pas rendu compte à quel point les prochaines années allaient être marquées par l'anxiété et par la peur. Par exemple, une fois arrivée au campus de Grenfell, on a dit que je ne pouvais pas faire une mineure en théâtre, même si j'avais communiqué plusieurs fois avec mon conseiller avant mon arrivée. Mon séjour au Canada ne partait pas du bon pied.
    Depuis 2014, j'ai eu de longues conversations avec ma mère pour décider si j'allais continuer mes études puisque le gel des frais de scolarité pour les étudiantes et étudiants internationaux était menacé. Aucune université équatorienne n'aurait accepté mes crédits à cause de la langue, donc ces deux années auraient été perdues si les frais avaient augmenté.
    Les nouveaux frais afférents de Memorial empêchent les étudiantes et étudiants internationaux de continuer leurs études puisque bon nombre d'entre eux ne peuvent tout simplement pas se permettre un autre 600 $ par année. Selon les règlements de l'immigration, nous ne pouvons que travailler à temps partiel, donc nous ne pouvons même pas obtenir un emploi à temps plein ou deux emplois à temps partiel pour subsister. Entre-temps, c'est nous qui utilisons les banques alimentaires sur les campus en plus grand nombre; nous avons déjà de la difficulté à joindre les deux bouts, et nous ne pouvons même pas manger convenablement, surtout lorsque de nouveaux frais entrent en vigueur.
    L'augmentation des frais de scolarité de l'Université Memorial qui entrera en vigueur en 2021 décourage aussi les étudiantes et étudiants potentiels; ce qui est le cas dans ma famille. J'ai des cousins et des cousines qui aimeraient faire une demande pour étudier à l'Université Memorial, mais qui ne peuvent se permettre les coûts additionnels. Ils n'auront pas accès aux prêts du gouvernement du Canada, ni à ceux de l'Équateur s'ils choisissent de venir au Canada. Par conséquent, ils devront rester en Équateur pour avoir accès à de l'aide financière. Les prêts privés ne sont pas une bonne option non plus puisque les taux d'intérêt sont très élevés. Alors, mes cousines et cousins pensent maintenant aller en Allemagne ou rester en Équateur.
    De plus, personne ne m'a dit que le système de transports en commun ne circule pas les soirs ni les fins de semaine, les seuls moments où je peux aller à l'épicerie. Le recruteur ne m'avait pas dit que je ne pourrais trouver d'emploi qu'en dehors du campus à condition de ne plus dire aux gens que je venais de l'Équateur, et que bon nombre d'employeurs ne m'embaucheraient pas parce que mon accent est trop prononcé.
    Mes étés étaient donc aussi remplis d'angoisse. Même si j'étais reconnaissante de vivre dans une des provinces qui offre l’assurance santé aux étudiantes et étudiants internationaux, j'étais toujours angoissée par l'arrivée de l'été puisque mes cours du printemps allaient se terminer et que je ne serais donc plus couverte par l’assurance médicale. II n'y avait pas de cours d'été offerts pour mon programme et je ne pouvais pas renouveler mon assurance-maladie, parce que je n'étais inscrite à aucun cours, et je ne pouvais pas retourner en Équateur parce que je ne pouvais pas me le permettre. J'étais piégée; je devais travailler pour économiser pour le prochain semestre tout en espérant que rien ne m'arrive parce que je n'avais pas d'assurance santé.
(1710)
    Malgré les obstacles, j'ai fait ma vie dans cette province et je tiens à y rester, mais je sais également qu'il est extrêmement difficile d'immigrer à Terre-Neuve-et-Labrador, compte tenu de la situation actuelle.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je viens de vous raconter une simple histoire personnelle, mais je ne suis pas la seule. Il y a des centaines de milliers d'étudiants internationaux qui vivent ces problèmes tous les jours et il convient de mettre fin à ces problèmes, si nous voulons qu'ils restent dans cette région et consolident nos collectivités. C'est un honneur pour moi d'avoir été choisie par mes collègues pour me faire la porte-parole du renouvellement de notre secteur postsecondaire et nous avons des idées pour faire en sorte que les étudiants internationaux soient traités avec respect.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir invitée. Je serais très heureuse de répondre à vos questions.
    Merci, madame Descalzi.
    Madame Clark, vous avez la parole pour cinq minutes.
    [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Nous ne pouvons pas entendre le témoin par vidéoconférence. Nous reviendrons à Mme Clark lorsque ces problèmes seront résolus et nous allons commencer un tour de questions.
    Nous allons commencer par M. O'Regan. Vous avez cinq minutes, allez-y.
(1715)
    Tout d'abord, madame Clark, je sais que vous m'entendez; je vous demande donc de bien vouloir nous excuser du fait que nous ne pourrons entendre votre exposé. Je suis seulement un membre invité du Comité, mais je suis sûr que ce comité est composé de personnes généreuses qui vont faire en sorte que vous puissiez participer à ses travaux à un moment donné.
    Madame Descalzi, je vais peut-être commencer par vous et vous souhaiter la bienvenue au Comité.
    Vous avez parlé des difficultés que vous avez rencontrées en tant qu'étudiante internationale et des choses qui manquaient, notamment sur le plan de l'accueil et de la possibilité pour vous de vous exprimer complètement. Racontez-moi donc quelle a été votre expérience d'immigrante. Nous avons déjà entendu l'ancien premier ministre M. McKenna et Mme Lockhart, et tous les députés du Canada atlantique, qui souhaitent désespérément accueillir davantage d'immigrants dans cette région et je crois que c'est ce que souhaitent également la plupart des Canadiens.
    C'est certainement le souhait qu'a exprimé la Chambre des communes, qui a appuyé de façon unanime la stratégie. Comment attirer davantage de Sofia et comment faire pour qu'elles restent ici? Autrement dit, comment pourrions-nous vous faciliter la vie pour que vous décidiez de rester dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador?
    Merci d'avoir posé la question.
    Une des choses que j'ai mentionnées est de faciliter la transition entre le statut d'étudiant international et celui de résident permanent. C'est ce que je suis en train d'essayer de faire à l'heure actuelle.
    Par exemple, il faut présenter des états de compte bancaires qui établissent que vous avez 2 000 $ dans vos comptes bancaires. Je suis étudiante internationale et je n'ai pas 2 000 $ dans mon compte bancaire, comment vais-je cocher cette case alors? Il y a aussi le fait qu'on ne sait pas très bien quel est le programme qu'il convient de choisir.
    Il y a plusieurs possibilités et nous ne recevons pas beaucoup de conseils sur la façon d'entamer ce processus. Les étudiants internationaux essaient de bien faire tout ce qu'ils doivent faire. Vous savez, nous venons ici, nous connaissons la langue, et nous sommes néanmoins obligés de suivre un processus très lourd pour obtenir notre résidence permanente. Il faudrait revoir tous ces mécanismes.
    Pour ce qui est de rester dans le Canada atlantique, il faut qu'il y ait des possibilités d'emploi pour les nouveaux immigrants. Il faut que la population n'ait pas peur des personnes qui viennent d'ailleurs et qu'elle ne fasse pas de la discrimination en se fondant sur l'accent d'une personne, sur la couleur de sa peau ou sur ses origines.
    Les gens de Terre-Neuve devraient être les derniers à faire des commentaires sur votre accent. Je vous prie de les excuser.
    Monsieur O'Regan, il semble que Mme Clark soit maintenant en ligne et vous souhaitez peut-être lui poser une question; faisons-en donc l'essai.
    Madame Clark, pouvez-vous nous dire quelques mots?
    Merci.
    J'avais arrêté le chronomètre, mais je vais le redémarrer lorsque vous serez prêt, monsieur O'Regan.
    Pouvons-nous donner à Mme Clark le temps de présenter un exposé?
    Elle dispose de sept minutes. Nous pouvons soit écouter sa déclaration maintenant et reprendre avec vous le tour de questions...
    Je m'en remets à vous, monsieur le président. Quelle est la formule habituelle?
    Je pense qu'il serait utile que vous posiez quelques questions.
    M. Seamus O'Regan: Oui.
    Le président: Madame Clark, vous avez la parole pour sept minutes.
    Monsieur le président et chers membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée.
    Je travaille comme conseillère auprès des étudiants internationaux à l'Université Memorial de Terre-Neuve depuis 2005. Au cours de cette période, cette université a vu augmenter sensiblement le nombre des étudiants internationaux. Au cours des années pendant lesquelles j'ai été conseillère auprès de ces étudiants, j'ai vu beaucoup d'étudiants passer. Certains restent et la plupart aimeraient bien rester aussi. J'ai connu les nombreux changements qui ont été apportés au système d'immigration canadien, dont certains ont permis de réaliser ce rêve et d'autres ont créé des obstacles.
    À titre de contexte, je mentionne que l'Université Memorial est la seule université qui existe dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Elle a été créée à la mémoire des soldats de Terre-Neuve qui ont perdu leur vie au cours la Première et de la Deuxième Guerre mondiale.
    L'Université Memorial est une université qui possède plusieurs campus; elle offre des programmes dans de nombreuses disciplines, elle est publique et elle s'occupe d'enseignement et de recherche. Cette université compte plus de 18 500 étudiants, 5 200 professeurs et personnel répartis entre quatre campus et près de 85 000 anciens étudiants. Étant donné que c'est la seule université de Terre-Neuve, elle a des obligations spéciales envers la population de la province, et elle essaie parallèlement à être reconnue mondialement et à accueillir des étudiants et des chercheurs de tous les coins du monde.
    L'Université Memorial accueille 2 500 étudiants internationaux provenant de plus de 80 pays. À l'Université Memorial, les étudiants internationaux représentent environ 13 % de tous les étudiants et ce pourcentage ne fait qu'augmenter.
    Dans mon travail de conseillère d'étudiants internationaux, je leur fournis des conseils sur tous les aspects de leur adaptation à leur nouveau pays, sur la culture, le système juridique, et principalement, sur le droit de l'immigration. En tant que consultante canadienne en immigration agréée, les étudiants me posent de nombreuses questions sur les moyens d'obtenir la résidence permanente.
    Le Bureau canadien de l'éducation internationale effectue régulièrement des sondages au sujet de la population étudiante internationale au Canada. D'après son dernier sondage, 51 % des étudiants internationaux souhaitent demander la résidence permanente. Dans mon travail auprès des étudiants internationaux, je constate tous les jours que ce chiffre est exact. Plus de la moitié de toutes mes réunions avec les étudiants au sujet de l'immigration portent sur les moyens de demeurer au Canada après l'obtention de leur diplôme et des conditions à remplir pour obtenir la résidence permanente.
    Je rencontre de nombreux étudiants qui remplissent les conditions exigées pour participer au programme fédéral des travailleurs qualifiés ou pour se prévaloir de la catégorie de l'expérience canadienne, mais qui n'obtiennent pas de très bonnes notes avec le système de classement global. Je rencontre également de nombreux étudiants qui souhaitent présenter une demande dans le cadre du programme des candidats des provinces, mais qui éprouvent de la difficulté à obtenir des emplois spécialisés dans leur domaine de compétences, ce qui est exigé pour participer à ce programme.
    Heureusement, notre service a une excellente relation de travail avec l'Office of Immigration and Multiculturalism du gouvernement provincial. Ce gouvernement a reconnu que les étudiants internationaux font partie du bassin des candidats à l'immigration; la province souhaite les attirer et elle a désigné un membre du personnel qui est chargé de faire la liaison avec les étudiants qui souhaitent demeurer dans la province. C'est une ressource très précieuse, puisqu'elle donne un point de contact aux étudiants internationaux dès le début du processus qui les mènera à la résidence permanente et qui leur fournit des conseils en matière d'immigration et de marché du travail.
    Il demeure néanmoins des difficultés. Le gouvernement provincial en a résolu un certain nombre dans son plan d'action sur l'immigration. Les étudiants internationaux représentaient un élément important de la stratégie d'immigration lancée en 2008 et sont au centre de l'action du gouvernement dans le document sur l'immigration à Terre-Neuve-et-Labrador qui a été récemment publié et s'intitule Way Forward, c'est un plan d'action quinquennal rendu public en 2017.
    Dans ce plan, le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador s'engage à continuer à travailler en étroite collaboration avec les institutions postsecondaires de la province pour élaborer un programme destiné à aider les étudiants internationaux à obtenir des stages et à explorer de nouvelles catégories de candidats des provinces reliées à l'entreprenariat. Le plan d'action quinquennal est ambitieux. La province souhaite attirer 1 700 immigrants d'ici 2022. En 2014, le chiffre total était de 899. La stratégie de croissance de l'Atlantique aidera certainement, d'après moi, la province à atteindre cette cible.
    Voici les idées que j'aimerais vous présenter parce qu'elles touchent les questions soumises au Comité dans son étude sur l'immigration au Canada atlantique.
    Premièrement, pour ce qui est des difficultés associées au vieillissement et à la diminution de la population, cela se traduit, pour les institutions postsecondaires, par un rétrécissement du nombre des étudiants potentiels. Il me paraît important de continuer à se concentrer sur le recrutement des étudiants internationaux et sur la création d'une marque en matière d'éducation pour le Canada atlantique.
    Deuxièmement, pour ce qui est de la rétention des résidents actuels et des difficultés rencontrées pour retenir les nouveaux immigrants, les deux principales difficultés auxquelles font face ces étudiants sont le manque de possibilités d'emploi, les difficultés à pénétrer sur le marché du travail, l'absence de passerelles permettant aux étudiants internationaux de devenir des résidents permanents. Avec la catégorie de l'expérience canadienne et même avec les nouveaux changements apportés au système de classement global, l'étudiant international qui obtient un baccalauréat et qui a un an d'expérience de travail au Canada n'obtient pas toujours des notes suffisantes pour être compétitif dans le bassin des candidats à l'Entrée express.
    Troisièmement, pour ce qui est des recommandations que l'on pourrait faire pour augmenter l'immigration dans la région et régler ces difficultés, je félicite le gouvernement de Terre-Neuve de projeter d'établir un partenariat avec les employeurs pour créer des possibilités d'emploi pour les étudiants internationaux et lancé un programme pilote My First Newfoundland and Labrador Job pour les diplômés internationaux.
(1720)
    Il me paraît important de chercher de nouvelles passerelles débouchant sur la résidence permanente, en particulier dans le domaine de l'entreprenariat et des emplois non spécialisés. Il y a beaucoup d'employeurs qui m'ont dit qu'ils avaient du mal à embaucher suffisamment d'employés non spécialisés. Il semble que cette réalité fait ressortir l'incohérence du système d'immigration actuel, qui recherche principalement des immigrants qualifiés.
    J'ai rencontré de nombreux étudiants internationaux qui ont l'esprit d'entreprise et notre institution a mis sur pied divers programmes qui visent à les appuyer dans cette voie. Il est toutefois très difficile pour eux d'immigrer en qualité d'entrepreneur. Il n'y a pas de catégorie provinciale qui s'applique à eux, et au niveau fédéral, il y a bien sûr le programme de dispense de visa pour les start-up. Mais cela pose des difficultés dans cette province parce qu'il n'existe qu'une seule entreprise qui incube les jeunes pousses dans le domaine de haute technologie.
    La plupart de nos étudiants aimeraient créer des petites ou moyennes entreprises, ce qui aurait pour effet de créer des emplois dans l'économie de Terre-Neuve. Mais ils n'ont guère la possibilité d'immigrer dans cette province.
    J'ai rencontré plusieurs étudiants qui ont vendu leurs avoirs et leurs titres de propriété pour travailler dans une entreprise de façon à pouvoir immigrer comme travailleur qualifié fédéral.
    Bien entendu, une autre raison pour laquelle les catégories entrepreneuriales jouent un rôle aussi important est qu'en l'absence de possibilités d'emploi, ou face à un ralentissement économique ou à une récession, la plupart des gens envisagent de gagner leur vie en lançant des entreprises commerciales.
    Enfin, voici la conclusion de mon analyse des initiatives pilotes en matière d'immigration dans le Canada atlantique associées à la stratégie de croissance dans l'Atlantique. J'estime que les possibilités qu'offrent l'AIPP pour les immigrants non qualifiés...
(1725)
    Il vous reste 20 secondes.
    ... est une excellente chose pour les étudiants internationaux, parce que la plupart d'entre eux peuvent occuper des postes d'entrée dans la catégorie C. Les étudiants récemment diplômés ont du mal à trouver des emplois qualifiés. Ne pas exiger d'expérience en milieu de travail est une excellente chose, parce qu'un bon nombre d'entre eux ne possèdent pas beaucoup d'expérience de ce genre.
    Je vous remercie de votre attention et de m'avoir donné la possibilité de m'adresser au Comité.
    Merci, madame Clark.
    Monsieur O'Regan, vous avez deux minutes et 15 secondes.
    Madame Clark, si vous deviez faire une autre recommandation, que serait-elle? D'après votre expérience, si l'on prend la stratégie de croissance de l'Atlantique, les choses que nous avons faites et les choses que nous espérons faire, qu'est-ce qui pourrait, d'après vous, réduire les difficultés et peut-être attirer davantage d'immigrants pour conserver ceux que vous rencontrez régulièrement?
    Je pense qu'il serait très utile d'insister sur le volet entreprise. Au sein du programme pilote d'immigration de l'Atlantique, plutôt que d'exiger une offre d'emploi de la part d'un employeur désigné, on pourrait tenter d'associer ces candidats à des sociétés ou à des entreprises qui les aideraient à mettre sur pied une entreprise. Ils créent bien souvent des emplois en le faisant.
    Ce sont eux qui créent les emplois.
    Dites-moi s'il existe encore des idées fausses dans la population au sujet des possibilités qu'offrent les immigrants dans la province ou est-ce que ces idées sont en fait en train de disparaître?
    Bien évidemment, j'ai dit qu'une des difficultés que rencontraient la plupart de nos étudiants était l'emploi. En particulier, nous avons divers programmes éducatifs en alternance. Les étudiants internationaux éprouvent souvent de la difficulté à être compétitifs sur ces marchés du travail. Ils ont fait des études secondaires et dans leur culture, on attache beaucoup d'importance aux études et aux connaissances techniques; ils se retrouvent maintenant face à des étudiants canadiens qui ont travaillé pendant leurs études secondaires, qui ont fait du travail bénévole et acquis des habiletés.
    Je crois que cela constitue un obstacle. Nous avons des programmes qui visent à les aplanir. Nous les aidons à acquérir des compétences professionnelles et des compétences en communication. Les employeurs ne savent pas toujours très bien ce qu'il faut faire pour embaucher un étudiant international. Ils sont tout à fait employables. Leur permis d'étude les autorise à travailler. Ils peuvent obtenir un permis de travail après avoir obtenu leur diplôme, de sorte qu'il serait bon que cet aspect soit mieux connu.
    Il vous reste 20 secondes.
    Merci.
    Je demande à nos trois invités de nous excuser, je le mentionne en passant, pour les temps de parole écourtés, mais j'aimerais que le compte rendu mentionne que le Canada atlantique et Terre-Neuve-et-Labrador ont pu intervenir devant le Comité, mais que d'autres ont décidé de les en empêcher pour d'autres raisons. Nous sommes habitués à tout cela. Veuillez noter la date, l'heure, et prendre des noms.
    Je vous remercie tous.
    Merci.
    Monsieur Saroya, vous avez cinq minutes, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'avoir bien voulu nous expliquer ce qui pourrait être fait.
    J'aimerais poser une question à Sophia.
    Sophia, j'entends constamment les étudiants de Toronto se plaindre du fait que les droits universitaires sont trop élevés. On m'a dit que les droits pour les étudiants internationaux étaient trois fois plus élevés que pour les autres étudiants. Ils ne peuvent pas trouver du travail et ils sont parfois obligés de travailler pour se nourrir. Il leur arrive de travailler à 5 $ de l'heure au noir. Avez-vous vu des choses de ce genre?
    Ma question s'adresse à vous, mais les autres peuvent également intervenir.
    À mon avis, les droits plus élevés que doivent payer les étudiants internationaux constituent le premier obstacle qu'ils rencontrent pour venir ou immigrer au Canada atlantique. En tant qu'étudiante internationale, je peux vous dire que cela me paraît très injuste. Cela montre simplement que les étudiants internationaux qui veulent venir ici pour y vivre ne sont pas respectés. Nous payons des droits différents qui sont trois fois et demi plus élevés que les autres, et nous ne pouvons travailler qu'à temps partiel, c'est donc nous qui sommes les plus grands utilisateurs des banques alimentaires. En fait, à l'Université Memorial 60 % des sacs sont remis à des étudiants internationaux.
    Je ne peux pas vous parler des étudiants qui sont payés de main à mains sans contrat, mais je peux certainement vous dire que les étudiants internationaux ont beaucoup de mal à survivre. Nous ne sommes pas riches. Il faut arrêter de croire que les étudiants internationaux sont riches. Nous ne le sommes pas. Nous venons ici pour fuir différents aspects de nos pays d'origine et pour faire notre vie dans ce pays. Il faudrait traiter de la même façon tous les étudiants, si nous voulons qu'ils demeurent au Canada.
(1730)
    Madame Clark, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Non.
    J'ai une question pour vous ou pour Peter.
    Que faut-il faire pour que les gens qui viennent sur la côte Est y demeurent; j'ai connu personnellement des gens qui sont venus en Saskatchewan, qui ont obtenu un numéro de téléphone de cette province, qui ont obtenu un numéro de case postale et qui sont ensuite partis à Toronto.
    Bien évidemment, il y a une grande différence entre les endroits où les immigrants devraient résider et ceux où ils résident en réalité. Que proposez-vous que le gouvernement provincial ou fédéral fasse pour que ces gens demeurent là où ils doivent être, que ce soit dans le Canada Atlantique ou dans une autre région du pays? Que devons-nous faire pour y parvenir?
    Peter, allez-y.
    C'est une excellente question. Je pense que la situation des étudiants internationaux n'est pas très différente de celle des étudiants nationaux au moment où ils obtiennent leur diplôme postsecondaire. Leur première mission est de trouver du travail. Trouver un emploi ou démarrer une carrière, en particulier dans un domaine qui correspond à leurs études, est un aspect essentiel.
    C'est pourquoi j'ai mentionné notre Atlantic Leaders' Summit. Nous allons nous occuper de cette question, parce qu'il faut savoir quels sont les obstacles qui empêchent les employeurs d'embaucher le nombre d'étudiants internationaux que nous aimerions voir embauchés. Sofia a très bien décrit les difficultés que rencontrent les étudiants internationaux, non seulement pendant qu'ils étudient, mais une fois leur diplôme obtenu.
    Il faudra vraiment étudier ces questions de façon très approfondie. Comme je l'ai mentionné dans mes remarques, il s'agit essentiellement de collaboration, et c'est une chose que nous faisons très bien dans notre région. Il y a à l'heure actuelle un effort concerté, par le biais de la stratégie de croissance de l'Atlantique, qui se penche vraiment sur cette question clé. Un des piliers est l'immigration et ce que nous pouvons faire pour mieux accueillir les nouveaux Canadiens ainsi que pour conserver nos étudiants internationaux.
    Sofia, combien connaissez-vous d'étudiants qualifiés qui n'ont pas trouvé d'emploi dans leur domaine, premièrement, ou même un autre emploi?
    Il est tout à fait irréaliste que les étudiants internationaux s'attendent, une fois leur diplôme obtenu, à trouver un poste dans leur domaine, en particulier s'il s'agit d'un poste de direction. C'est une des conditions à remplir pour pouvoir demander la résidence permanente. Je ne peux pas vraiment vous dire que j'en connais. Les gens essaient de trouver des liens entre leurs programmes et leur nouvel emploi, mais...
    Merci. Votre temps de parole est écoulé.
    Madame Kwan, vous avez cinq minutes, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de nous avoir présenté leurs exposés.
    Je pense que la question des étudiants étrangers est un élément important de l'augmentation des niveaux d'immigration.
    Les frais de scolarité à l'université sont très élevés et ils constituent, si j'ai bien compris, un grave obstacle, d'après ce que vous avez dit, madame Descalzi.
    Premièrement, que devrait-on faire, d'après vous, à ce sujet?
    Deuxièmement, pour ce qui est de la politique d'immigration actuelle à l'égard des étudiants étrangers, pensez-vous que les modifications apportées sont suffisantes? Le système des points a été modifié, notamment. Cela va-t-il permettre de retenir les étudiants internationaux ou pensez-vous qu'il faudrait faire davantage? Si vous pensez qu'il faudrait faire davantage, que faudrait-il faire alors?
(1735)
    Merci pour vos questions.
    Je crois que la réponse à la première question est fort simple. Il suffirait simplement de supprimer les droits de scolarité pour les étudiants étrangers. Il faut que les universités arrêtent d'augmenter leurs droits de scolarité, un aspect qui n'est aucunement réglementé, parce qu'elles ajoutent des frais accessoires et toutes sortes de frais pour les étudiants internationaux, et même pour tous les autres, en fait.
    La réponse à la deuxième question est que non, cela n'est pas suffisant. Je pense que nous devrions nous efforcer d'améliorer les formulaires de demande et leur traitement. Il devrait y avoir un mécanisme accéléré pour les étudiants étrangers, étant donné qu'ils se trouvent déjà au pays, qu'ils connaissent déjà la langue et qu'ils se sont déjà adaptés à la culture.
    Le système de points est très complexe. Il s'applique à moi et j'ai beaucoup de difficulté avec ce système. Il serait peut-être utile qu'il soit mieux expliqué.
    À un moment donné, les étudiants internationaux pouvaient immédiatement présenter une demande de résidence permanente. À l'heure actuelle, ils doivent subir la concurrence de leurs pairs, ainsi que celle des autres candidats, qui présentent également des demandes. Ce qu'on appelle le système d'Entrée express a en fait créé de graves obstacles, parce qu'il faut d'abord remplir les conditions exigées pour être choisi dans le bassin des candidats avant de présenter une demande de résidence permanente fondée sur le système de points. Cela ralentit en fait le système. Certains m'ont dit qu'il serait préférable d'annuler carrément le système d'Entrée express. Il n'améliore pas la situation. Et il est loin d'être express.
    Pouvez-vous faire un bref commentaire à ce sujet?
    Je ne connais pas très bien tous les aspects des systèmes d'entrée ou leur historique, mais je peux vous garantir qu'il serait possible de l'améliorer pour permettre aux étudiants internationaux de rester plus facilement au pays.
    Quelqu'un veut-il faire un commentaire sur le système d'Entrée express?
    À l'heure actuelle, ce processus empêche les gens de se joindre au bassin des candidats à l'immigration, de sorte qu'il n'est pas possible de présenter immédiatement une demande de résidence permanente. Si nous voulons vraiment que ces étudiants restent au Canada en utilisant le système actuel, ne devrait-on pas les autoriser à présenter immédiatement une demande de résidence permanente?
    On dit souvent: « Si vous êtes assez bons pour travailler, vous êtes assez bons pour rester au Canada. » Si vous êtes assez bons pour étudier, vous devriez être assez bons pour pouvoir rester.
    Je pense également que cela est insuffisant. Ces changements ont évidemment été utiles, mais ils n'aident pas suffisamment les étudiants internationaux et il conviendrait de créer davantage de passerelles vers la résidence permanente. En particulier, le programme de permis de travail postdiplôme est basé sur la durée du programme d'étude. Ceux qui participent à des programmes de deux ans et plus sont avantagés parce qu'ils peuvent obtenir un permis de travail de trois ans. Ceux qui étudient moins longtemps, dans des programmes d'un an, peuvent uniquement obtenir un permis de travail postdiplôme d'un an.
    Il y a à l'heure actuelle à l'université une tendance qui favorise les programmes de maîtrise d'un an. Je pense que ces étudiants sont tout aussi utiles et qualifiés pour ce qui est de la résidence permanente que ceux qui suivent des programmes de quatre ans. Ils doivent alors respecter ce permis de travail postdiplôme d'un an, pour obtenir une expérience canadienne d'un an, et ensuite, obtenir de très bonnes notes avec le système de classement global.
    Lorsque la catégorie de l'expérience canadienne a été créée, elle était distincte de l'Entrée express. Mais lorsqu'on a ajouté l'Entrée express et exigé que les demandeurs obtiennent plus de 480 points pour y participer, cela a soulevé de graves difficultés. Je ne pense pas qu'il y ait eu beaucoup de demandeurs dans la catégorie de l'expérience canadienne qui ont bénéficié de l'Entrée express, parce que ces possibilités sont offertes aux travailleurs qualifiés du programme fédéral, aux candidats des provinces, à ceux qui avaient des offres d'emploi...
    Il vous reste 20 secondes.
    ... à ceux qui ont bénéficié de l'exemption basée sur l'EIMT.
    Je ne pense pas que la catégorie de l'expérience canadienne ait donné les résultats que l'on espérait. Il y a eu des difficultés dès le début et avec l'Entrée express, il y a toujours des difficultés.
    Merci.
    Je vais terminer en disant qu'il faut veiller à ne pas compromettre l'intégrité de notre système d'immigration; d'où ma motion sur la CISR. Il faut agir si nous voulons que le système fonctionne pour toutes les provinces, y compris pour les provinces de l'Atlantique.
    Merci, madame Kwan.
    Monsieur Harvey, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par mentionner les avant-dernières remarques de Mme Kwan qui disait que « Si vous êtes assez bons pour travailler, vous êtes assez bons pour rester au Canada » et « Si vous êtes assez bons pour étudier, vous devriez être assez bons pour pouvoir rester ». Je suis tout à fait d'accord avec elle au sujet de ces remarques et de la plupart des questions qu'elle a abordées.
    Monsieur Halpin, pourriez-vous nous en dire davantage sur les véritables possibilités qui existent dans le Canada atlantique pour mieux utiliser nos étudiants internationaux et mieux les équiper pour qu'ils s'intègrent à notre économie lorsqu'ils ont obtenu leur diplôme dans cette région?
(1740)
    C'est une excellente question. Merci de l'avoir posée.
    La recherche que nous avons effectuée auprès des étudiants internationaux nous a permis de constater qu'ils aimaient beaucoup étudier dans notre région. Nous avons des universités tout à fait uniques, qui sont parmi les plus anciennes au Canada, et nous avons de nombreuses petites universités résidentes d'arts libéraux.
    Je pense que, dans l'ensemble, les étudiants internationaux aiment beaucoup l'accueil qu'ils reçoivent. Je sais que Sofia a mentionné qu'il n'était pas très bon, mais je pense que, dans l'ensemble, les étudiants internationaux apprécient l'hospitalité du Canada atlantique ainsi que la cordialité et la sincérité des gens. D'après ce que j'ai constaté, je crois aussi qu'ils aiment beaucoup se sentir en sécurité dans nos campus et dans nos collectivités. Je pense que, dans l'ensemble, ils aiment beaucoup leur vie étudiante. Il y a bien sûr des problèmes. Il faut l'admettre. Il n'est vraiment pas facile de venir d'une région du monde pour aller étudier dans une autre région qui en est très éloignée.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, si nous voulons conserver ces étudiants, il faudrait que tous les paliers de gouvernement, le secteur privé et le secteur de l'éducation postsecondaire, collaborent étroitement. Je suis convaincu que le moment est particulièrement favorable pour agir. Je n'ai jamais vu dans cette région une volonté aussi forte de réussir dans ce domaine. C'est un sujet qui est prioritaire à l'heure actuelle pour tout le monde.
    Je pense que le moment est particulièrement bien choisi pour adopter une approche axée sur la collaboration de façon à ce que Sofia et les autres étudiants internationaux puissent plus facilement demeurer dans la région.
    Lorsque je travaillais dans le secteur privé, je disais aux gens des RH de l'entreprise pour laquelle je travaillais que je n'accordais aucune importance au pays d'où venaient mes employés. Je voulais simplement qu'ils soient les meilleurs. Je ne m'intéressais pas du tout à savoir d'où ils venaient.
    Je pense que cela serait encore vrai si je me trouvais dans le secteur privé, parce que c'est ce qui est bon pour l'entreprise pour laquelle je travaille, c'est ce qui est bon pour la collectivité, et ce qui est bon pour l'ensemble de la province.
    J'ai étudié en Nouvelle-Écosse, sur le campus de l'agronomie à Dalhousie. Cela fait maintenant près d'une douzaine d'années de cela, mais à l'époque, le fait de regrouper les étudiants internationaux sur ce campus avait créé certaines inégalités. Je crois qu'ils ont fait de grands progrès pour régler cette question. Je peux comprendre que les étudiants internationaux aient besoin de se réunir entre eux, mais il faut également qu'ils soient acceptés par l'ensemble des étudiants.
    Madame Descalzi, j'aimerais tout d'abord faire remarquer que votre anglais est excellent, et je crois qu'il est même bien supérieur à mon anglais du Canada atlantique, parce qu'il n'est pas très bon.
    Que ce soit le gouvernement fédéral ou...
    Il vous reste 20 secondes.
    ... ou le gouvernement provincial, ou le secteur privé, dites-moi rapidement quels sont les outils qui faciliteraient la transition des étudiants vers le marché du travail?
    Si nous ne parlons pas du gouvernement fédéral ni du gouvernement provincial, alors...
    Ce pourrait être provincial ou fédéral.
    Très bien. Excusez-moi. Je n'avais pas compris la question.
    Il faudrait que le statut de ces étudiants soit plus stable. Je me répète constamment, mais il est très important pour nous les étudiants d'avoir une assurance-maladie dans toutes les provinces, une assurance qui n'expire pas tous les quatre mois, parce que cela nuit beaucoup à nos études et à nos activités.
    Il faudrait également nous traiter avec le même respect que celui dont vous faites preuve à l'égard des autres Canadiens et ne pas dire qu'on « utilise » les étudiants, parce que c'est un peu...
(1745)
    Merci.
    Je vous remercie.
    Voilà qui termine notre séance.
    J'aimerais remercier les témoins pour leurs exposés, leurs témoignages et leur patience.
    Je parle maintenant au nom de tous les membres du Comité — et cela s'adresse en particulier à vous, madame Descalzi — lorsque je dis que vous incarnez les valeurs et les traits de caractère que nous aimerions voir chez les immigrants qui viennent au Canada. Je sais qu'au cours des années à venir, Terre-Neuve-et-Labrador et, en fait, le Canada tout entier vont profiter du fait que des étudiants comme vous immigrent dans ce pays.
    Je vous remercie.
    La séance est levée.
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