CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 21 avril 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte. Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 21 mars 2016, le Comité procède à l'examen du projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et une autre loi en conséquence.
Nous recevons trois témoins. Ils feront des exposés dans l'ordre figurant dans l'ordre du jour. Notre premier témoin est M. Shimon Fogel, président-directeur général du Centre consultatif des relations juives et israéliennes.
Il sera suivi de Mme Elke Winter, professeure agrégée de sociologie au Département de sociologie et d'anthropologie de l'Université d'Ottawa, qui témoigne à titre personnel.
Nous entendrons enfin M. Peter Edelmann, avocat du cabinet d'avocats Edelmann and Company, qui témoigne également à titre personnel.
Monsieur Fogel, vous avez la parole pour sept minutes.
Merci. Je suis enchanté de comparaître pour représenter le Centre consultatif des relations juives et israéliennes, l'agent de défense des droits de la Jewish Federations of Canada, afin de traiter du projet de loi C-6.
Comme je l'ai souligné lorsque j'ai témoigné devant vous à propos du projet de loi C-24, la citoyenneté canadienne est l'un des statuts les plus précieux et des plus respectés du monde, mais ce n'est pas qu'un statut prestigieux à acquérir, loin de là. Au Canada, la citoyenneté est un ensemble sans égal de droits et de responsabilités équilibrés fondé sur un ensemble de valeurs fondamentales pour assurer la dignité, la liberté et l'égalité de tous. Je suis certain que tout le monde ici conviendra que les immigrants figurent parmi les patriotes et les bâtisseurs les plus fiers de ce pays, et constituent une source de vitalité culturelle et de force économique.
Malgré la sombre époque à laquelle le Canada avait une politique d'immigration et de protection des réfugiés voulant qu'« un juif, c'est encore trop », nous sommes venus des quatre coins du monde pendant plus de 200 ans. Notre communauté, comme bien d'autres groupes, a apporté une contribution positive à l'histoire canadienne. Comme eux, nous sommes reconnaissants d'avoir la chance et le privilège extraordinaires d'être Canadiens.
Nous nous réjouissons que le projet de loi C-6 autorise de nouveau la prise en compte du temps passé au Canada à titre de résident temporaire dans le temps exigé pour obtenir la citoyenneté. Cela sera particulièrement bénéfique en permettant de conserver au pays les étudiants étrangers talentueux qui viennent au Canada pour parfaire leur éducation et leurs compétences tout en s'intégrant parmi leurs pairs canadiens. Il me semble qu'ils seraient des candidats idéaux à la citoyenneté, et ils ne devraient trouver aucun obstacle superflu sur leur chemin.
La norme de résidence exigeant le maintien d'une présence effective au pays pour obtenir la citoyenneté est un important principe qui peut accroître l'intégration et atténuer la marginalisation des nouveaux immigrants. Comme le ministre McCallum l'a souligné, il peut également contrer le problème de la citoyenneté de complaisance. Le projet de loi C-6 maintiendra également les tests de langue et de connaissances générales administrés dans le cadre des demandes de citoyenneté. De pair avec la présence effective, ce critère peut faire beaucoup pour empêcher l'entrée de personnes ayant des opinions antisémites et extrémistes qui, quoique marginales au Canada, sont malheureusement encore monnaie courante dans bien des régions du monde.
Nous sommes très satisfaits que le projet de loi C-6 ne cherche pas à abroger les dispositions simplifiées du projet de loi C-24 prévoyant la révocation de la citoyenneté de ceux qui l'ont obtenue grâce à la fraude ou à une fausse déclaration. Ces dispositions renforcent un processus qui est fréquemment exploité par ceux qui cachent leur passé nazi quand ils arrivent au Canada, comme l'affaire Helmut Oberlander l'illustre fort bien. Oberlander est un membre décoré de la sauvage unité mobile nazie responsable du meurtre de plus de 90 000 hommes, femmes et enfants juifs. Quand il a présenté une demande pour entrer au Canada en 1954, il a fait une fausse déclaration quant à ses occupations pendant la guerre et a frauduleusement obtenu la citoyenneté canadienne. Il évite la révocation définitive de sa citoyenneté et son renvoi du Canada depuis plus de 20 ans en exploitant les failles du système.
Cette affaire montre que les dispositions du projet de loi C-24 en matière de révocation doivent être maintenues, et l'engagement du gouvernement à cet égard devrait recevoir un appui universel.
À ce propos, j'aimerais profiter de l'occasion pour remercier le gouvernement d'avoir demandé l'autorisation de porter en appel la dernière décision de la Cour d'appel fédérale au sujet de la révocation de la citoyenneté d'Oberlander devant la Cour suprême.
Le projet de loi C-6 vise également à abroger d'autres dispositions qui, selon moi, devraient d'être examinées davantage. Nous avons appuyé l'adoption de mesures pour garantir que ceux qui demandent la citoyenneté canadienne aient effectivement l'intention d'y maintenir un lien concret. Les dispositions relatives à l'intention de résider au Canada que le projet de loi abrogera sont un élément important à cet égard et pourraient continuer d'avoir une incidence en réduisant le problème de la citoyenneté de complaisance.
Cela dit, la formulation de cette disposition ouvre la porte à une mauvaise utilisation. Il faut instaurer des mesures de précautions pour empêcher un ministre d'entamer une procédure de révocation contre quelqu'un qui a déclaré son intention de résider au pays, mais qui se rend à l'étranger pour étudier, travailler ou prendre soin d'un proche malade. Les gens ne devraient pas craindre d'être pénalisés pour des gestes aussi éminemment raisonnables, même si les risques qu'un ministre agisse de la sorte sont minces.
En ce qui concerne cette disposition, le ministre McCallum a fait la remarque suivante quand il était membre du Comité au cours de la législature précédente:
... la question de la citoyenneté de complaisance. Nous voulons des mesures dissuasives à cet égard. Je suis en principe d'accord avec le but visé. Nous voulons des mesures dissuasives à cet égard. Je suis en principe d'accord avec le but visé.
Plutôt que d'abroger la disposition relative à « l'intention de résider », on pourrait modifier la loi existante pour mieux harmoniser la teneur de la disposition avec son principe. On pourrait procéder en limitant le pouvoir discrétionnaire du ministre et en l'obligeant à demander une déclaration de la cour dans les cas de fausse déclaration à l'égard de l'intention de résidence, comme on le fait dans d'autres affaires de fraude.
Lors de ma dernière comparution devant le Comité pour traiter du projet de loi C-24, je me suis prononcé en faveur de la révocation de la citoyenneté des personnes ayant la double nationalité qui commettent certaines infractions, y compris des actes liés au terrorisme. Cette position témoignait du fait que nous croyons que dans certains cas de crimes politiques particulièrement odieux, l'auteur est en fait coupable de deux infractions distinctes. Il est d'abord coupable du crime précis qu'il a commis, mais il est également coupable d'avoir fondamentalement trahi les valeurs de base sur lesquelles la citoyenneté canadienne s'appuie.
Nous appuyons cette disposition parce que nous souhaitons punir non seulement le crime, mais également l'insulte grave faite au Canada et à l'identité canadienne. Voilà pourquoi nous préconisons l'élargissement des dispositions de révocation afin d'englober les personnes déclarées coupables de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide.
D'accord. Il me reste un paragraphe, en fait.
Le gouvernement a adopté une autre position à ce sujet. Nous respectons le fait qu'il a reçu le mandat pour le faire et prenons acte des arguments convaincants présentés pour expliquer la raison pour laquelle la loi ne devrait pas faire de distinction entre les citoyens ayant la double nationalité et les autres Canadiens. J'encourage toutefois les membres à réfléchir à cette autre facette, celle de l'insulte faite au Canada, et de voir comment ils pourraient en tenir compte dans leur approche à l'égard des gens qui se trouvent dans cette situation.
Merci.
Merci, monsieur Fogel.
Je laisserais maintenant la parole à Mme Winter.
Vous disposez de sept minutes, madame.
C'est un grand honneur que de témoigner de nouveau devant cette chambre. Merci beaucoup de me donner l'occasion de vous parler du projet de loi C-6.
À titre de sociologue, j'étudie la législation relative à la citoyenneté dans le cadre des efforts que le gouvernement déploie pour édifier une nation. Mes propos se fondent sur des recherches antérieures et actuelles. Aujourd'hui, je voudrais mettre l'accent sur trois points.
Je commencerais par féliciter le ministre d'avoir proposé l'abrogation du paragraphe 10(2) de la Loi sur la citoyenneté, lequel énumère les motifs pouvant mener à la révocation de la citoyenneté pour des raisons de sécurité nationale. J'aimerais formuler trois observations à l'appui de cette abrogation.
Tout d'abord, du point de vue de l'édification d'une nation, la révocation de la citoyenneté ne constitue pas une solution à un problème social, puisque cela signifie qu'on renvoie des criminels potentiels dans des pays qui ne peuvent pas mieux les traiter que le Canada. Ces pays pourraient les condamner à mort, les incarcérer dans des conditions inhumaines ou, plus probablement, être incapables de les empêcher de commettre des actes terroristes à l'étranger. À mon avis, aucune de ces possibilités n'est souhaitable pour le Canada.
En outre, les recherches tendent à démontrer que les peines sévères dissuadent rarement les auteurs de commettre des crimes odieux. Même la peine de mort ne les décourage pas, et les terroristes potentiels se ravisent rarement parce qu'ils risquent de perdre leur citoyenneté.
Enfin, et c'est probablement le point le plus important, nos recherches ont montré que d'anciennes dispositions législatives ont contribué, peut-être de façon non intentionnelle, à stéréotyper les musulmans canadiens. Avec l'aide d'une subvention du ministère de la Sécurité publique, les chercheurs de l'Université d'Ottawa ont étudié la couverture que font les médias traditionnels et sociaux de la révocation de la citoyenneté des personnes ayant la double nationalité qui avaient été condamnées parce qu'elles menaçaient de commettre des actes de trahison, d'espionnage et de terrorisme.
Sachez que les médias se montraient septiques à l'égard de la mesure de révocation. Malgré ce scepticisme, ils en parlaient d'une manière qui appuyait l'idée voulant que ce soit généralement parmi les musulmans canadiens, ainsi que parmi les Canadiens ayant la double nationalité en général, que des terroristes sont plus susceptibles de se trouver. Voilà qui n'est guère favorable à l'édification d'une nation multiculturelle.
J'en arrive maintenant à mon deuxième point important. D'après ce que j'ai lu dans le projet de loi C-6 dans sa forme actuelle, cette mesure législative harmonisera de nouveau la loi canadienne avec le principe selon lequel la naturalisation et l'obtention de la citoyenneté ne sont pas le point final ou la récompense de l'intégration, mais plutôt une étape importante vers l'intégration des immigrants.
Or, des recherches comparatives montrent que cette approche non seulement favorise bien plus l'intégration des immigrants dans la trame socio-économique du pays, mais contribue également à gagner leur coeur et leur esprit, ce qui est le but ultime quand on édifie une nation.
Permettez-moi de présenter, une fois de plus, trois arguments à l'appui de cette affirmation. Les compétences linguistiques sont importantes pour faciliter la participation au sein de la société, mais la citoyenneté officielle l'est aussi. Le rétablissement des limites d'âge pour les tests de langue et de connaissances générales, et la modification du niveau de langue dans la trousse de demande réduiront les obstacles pour les personnes qui sont moins instruites, qui ne parlent pas une langue européenne et qui sont économiquement vulnérables.
Nous savons bien que les tests universitaires sont stressants, particulièrement pour les gens âgés et les membres de la famille qui les accompagnent, souvent des femmes.
Comme le témoin précédent l'a déjà souligné, le rétablissement du crédit de 50 % du temps passé au pays avant la résidence permanente comptant pour l'obtention de la citoyenneté constitue un incitatif important pour les personnes ayant vécu au Canada, comme les étudiants, les réfugiés et les anciens travailleurs temporaires. Cela confirme l'interprétation voulant que la citoyenneté officielle soit une étape d'un voyage plus long conduisant à une intégration complète.
De plus, le fait de modifier les exigences relatives à la résidence pour demander que les personnes soient restées au pays trois ans au cours des cinq années précédant la demande permettra, selon moi, de garder au pays les immigrants hautement qualifiés et très mobiles, qu'on appelle les meilleurs cerveaux du monde et que le Canada et d'autres pays veulent attirer. Cette mesure leur permet d'obtenir la citoyenneté également, même s'ils peuvent être appelés à travailler à l'étranger pendant certaines périodes et ne pas être physiquement présents au pays. Cela leur accorde une plus grande souplesse.
Mais mon argument principal ne concerne pas le projet de loi C-6 dans sa forme actuelle. J'incite fortement le gouvernement à envisager d'appliquer une recommandation formulée par la Commission de vérité et de réconciliation, soit la révision du serment de citoyenneté pour y inclure le respect des traités intervenus entre la Couronne et les peuples autochtones.
Les entrevues que j'ai réalisées auprès de nouveaux citoyens canadiens montrent que la cérémonie et le serment de citoyenneté constituent à leurs yeux des éléments très importants et significatifs du processus de naturalisation. Comme le présent gouvernement, fort de son objectif d'édifier une nation, s'est déjà engagé à tenir compte des recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation, c'est peut-être le moment propice pour renforcer les relations entre les Néo-Canadiens et les citoyens les plus anciens de notre pays.
En résumé, le Canada a, depuis longtemps, coutume de choisir des immigrants qui apportent une contribution économique à notre pays, raison pour laquelle il fait d'ailleurs l'envie du monde. Cet objectif doit toutefois s'accompagner d'un accueil chaleureux des nouveaux Canadiens. Je pense que, dans sa forme actuelle, le projet de loi permettra de mieux faire cadrer la loi avec cette intention.
Merci.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie, membres du comité, de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
J'avais eu l'occasion de discuter avec vos collègues du Sénat dans le cadre de l'étude du projet de loi C-24. J'avais alors émis de sérieuses réserves à l'égard de ce projet de loi, qui a ensuite été adopté par le Parlement. Or je suis heureux de voir que beaucoup de changements sont proposés dans le projet de loi que vous étudiez aujourd'hui.
Je suis né au Canada, mais mes parents étaient des immigrants suisses. J'ai droit à la citoyenneté suisse, et il en va de même pour mes deux fils. Comme bon nombre de Canadiens, nous avons accès à une autre nationalité. Or, en vertu du projet de loi C-24 et de la loi dans sa forme actuelle, nous courons un risque que les autres Canadiens ne courent pas, ce qui n'est pas juste.
Quand j'étais devant le Sénat, la sénatrice Eaton m'a dit que, pour ne pas perdre ma citoyenneté, je n'avais qu'à m'abstenir de commettre des crimes liés au terrorisme. La question n'est pas de savoir si, oui ou non, je veux commettre des crimes liés au terrorisme. Celui qui commet un crime renonce à son autre citoyenneté pour conserver la stabilité de sa citoyenneté canadienne. Ce n'est pas une solution.
Je suis donc vraiment heureux qu'on traite aujourd'hui de ce changement à la loi.
[Traduction]
J'aimerais également traiter un peu plus en détail aujourd'hui de certaines choses qui, selon moi, contribueraient à pousser le projet de loi un peu plus loin, soit en revenant au système antérieur, soit en apportant certaines modifications proposées par d'autres témoins ayant comparu devant le Comité. Je m'attarderai sur la question de la révocation.
Il importe de comprendre que dans un monde d'États-nations, et tant que nous vivons dans un tel monde, la citoyenneté constitue un des statuts les plus fondamentaux. C'est le statut en vertu duquel vous pouvez faire partie de ce comité. C'est le statut qui permet de choisir les gens qui font partie du Comité. C'est le droit d'avoir des droits, le droit de jouir de tous les droits accordés aux membres faisant partie de la société canadienne. C'est un statut fondamental profondément important pour ses détenteurs. Un grand nombre de Canadiens et de vos collègues sont des citoyens naturalisés. Pour ces citoyens, la révocation de ce statut constitue une des pertes les plus fondamentales qu'ils puissent subir.
Il y a actuellement plus d'équité procédurale dans la loi régissant les amendes de stationnement que dans celle qui concerne la perte de la citoyenneté. En vertu de la présente loi, la décision de révoquer la citoyenneté revient à un seul fonctionnaire. La personne visée reçoit par la poste une lettre où on lui demande pourquoi on ne devrait pas lui retirer sa citoyenneté. Cette personne envoie ses arguments au fonctionnaire, qui décide s'il veut ou non tenir une entrevue. Il est libre de le faire ou non. Les gens peuvent recevoir une lettre leur indiquant simplement qu'ils ont perdu leur citoyenneté. Ils ne sont alors plus citoyens canadiens. Ils peuvent s'adresser à la Cour fédérale pour lui demander d'entendre leur cause et de procéder au contrôle judiciaire de la décision du fonctionnaire, mais ils le font à titre de non-citoyens. À ce moment, ils peuvent bien faire l'objet d'une mesure de renvoi. Je parlerai de la situation des résidents permanents à cet égard. Ce processus, très rapide et fort peu transparent, comprend très peu de garanties procédurales.
Avant l'adoption du projet de loi C-24, le processus était très différent. Les gens recevaient un avis par la poste et avaient la possibilité de convaincre le ministre en lui expliquant pourquoi il devrait ou ne devrait pas réclamer la révocation de leur citoyenneté. Ils pouvaient ensuite se tourner vers la Cour fédérale, qui décidait si la fausse déclaration ou la fraude leur ayant permis d'obtenir la citoyenneté était suffisamment grave pour justifier la perte de cette citoyenneté. C'était finalement le gouverneur en conseil qui décidait de révoquer ou non la citoyenneté.
Il existe des exemples de causes qui ont pris beaucoup de temps. Dans l'affaire Oberlander ou d'autres causes, les délais s'expliquent par un certain nombre de raisons, mais le processus lui-même n'exige pas autant de temps.
Les garanties procédurales sont bien plus rigoureuses en ce qui concerne la perte de la résidence permanente. Dans la vaste majorité des cas, le résident permanent qui va perdre son statut recevra un avis et aura l'occasion de se défendre. Il aura ensuite une audience devant la Section d'appel de l'immigration, où il pourra non seulement faire entendre ses arguments pour expliquer pourquoi il ne devrait pas perdre son statut, mais également présenter des motifs d'ordre humanitaire ou des raisons valables pour expliquer qu'il ne devrait pas perdre son statut même s'il a fait une fausse déclaration.
Les fausses déclarations ne sont pas toutes égales. Certaines sont très graves, alors que d'autres sont relativement bénignes. Ce qu'il faut se demander, c'est si un seul fonctionnaire devrait prendre une décision aussi fondamentale que celle dont nous parlons.
La loi actuelle comprend un problème particulier concernant les personnes trouvées coupables d'avoir fait une fausse déclaration pour obtenir la résidence permanente.
Avant l'obtention de la citoyenneté, si les gens sont trouvés coupables d'avoir fait une fausse déclaration pour obtenir la résidence permanente, ils peuvent s'adresser à la Section d'appel de l'immigration. Ils peuvent alors présenter des motifs d'ordre humanitaire et dire que même s'ils ont fait une fausse déclaration il y a 20 ans, ils ont maintenant une famille et des enfants ici. En vertu de la loi actuelle, une fois la citoyenneté obtenue, les gens trouvés coupables d'avoir fait une fausse déclaration pour obtenir la résidence permanente redeviennent immédiatement des étrangers désignés. Ils ne redeviennent pas résidents permanents, mais directement étrangers désignés. Leur statut est donc plus précaire une fois qu'ils sont citoyens canadiens que lorsqu'ils étaient encore résidents permanents.
Je recommanderais fortement au Comité d'apporter certaines modifications à propos de ces deux points.
Merci de m'avoir écouté.
Merci, monsieur Edelmann.
Nous allons maintenant passer à la première série de questions pour nos témoins.
Madame Zahid, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais profiter de l'occasion pour remercier tous nos témoins de leur précieuse contribution à notre étude.
Ma première question s'adresse à vous, madame Winter. Dans votre témoignage devant notre Comité sur le projet de loi C-24, vous avez fait allusion aux recherches que vous meniez sur les soupçons grandissants à l'égard de la double nationalité et de l'incidence négative de mesures législatives telles que le projet de loi C-24 sur certaines communautés, et plus particulièrement sur les musulmans et les Canadiens d'origine arabe. Vous avez parlé des nombreuses diatribes contre les musulmans dans la presse écrite, les forums en ligne et les médias sociaux, et sur le fait que le projet de loi C-24 intensifie et amplifie ces stéréotypes négatifs.
En tant que musulman canadien, j'ai été témoin de ces stéréotypes. Pourriez-vous nous parler de ces recherches et des conclusions que votre équipe a tirées?
Oui. En fait, j'ai passé en revue cette déclaration, et nous venons de terminer l'étude, alors je peux vous en parler.
Le mandat que nous a confié Sécurité publique était d'examiner dans quelle mesure la politique gouvernementale contribuerait aux stéréotypes à l'égard des musulmans. Nous avons étudié la loi telle qu'elle a été rédigée. Nous avons pris connaissance des discussions que vous avez eues au Parlement et à la Chambre des communes. Nous avons ensuite parcouru les articles parus dans les journaux grand public. Mes étudiants m'ont dit de regarder dans les médias sociaux.
Ce que l'on peut voir, c'est que même si la loi s'applique évidemment de la même façon pour tout le monde, et que les discussions à la Chambre des communes et au Parlement étaient assez équilibrées, on peut voir plus de ces stéréotypes dans les journaux et encore plus dans les médias sociaux.
Toutefois, je dois féliciter les médias canadiens, et c'est rare que je le fais. Ils craignaient que cette mesure législative ciblerait les musulmans. Ils l'ont critiquée, dans la plupart des cas. Toutefois, en supposant toujours que cette mesure législative a été présentée parce que les terroristes étaient musulmans, et même si tous les musulmans ne sont pas des terroristes, on présumait qu'on trouverait des terroristes parmi eux, si bien que cela a contribué à créer des préjugés envers un groupe vulnérable.
Je pense que cela montre qu'une loi qui ne cible pas forcément un groupe particulier peut donner lieu à ce genre de situation. Une fois que le processus est enclenché — la révocation en tant que moyen légitime pour pénaliser et punir quelqu'un —, il est très difficile de faire machine arrière.
Merci, madame Winter.
Je pense que nous détestons tous le concept des prétendus citoyens de convenance. Comme vous le savez, la Charte des droits accorde à tous les Canadiens le droit à la mobilité. Ce droit fait partie de la Charte des droits. La disposition sur l'intention de résider semblerait être symbolique et inapplicable.
Comment peut-on concilier cette disposition avec la Charte?
Je pense qu'aucune des questions qui sont soulevées sont très simples ou se prêtent à des solutions simples. Ce que vous laissez entendre jusqu'à présent est correct car nous voulons établir un équilibre entre le fait d'avoir dans une certaine mesure l'assurance que ceux qui ont exprimé l'intérêt d'obtenir la citoyenneté canadienne ont l'intention de participer pleinement à la société canadienne, et le fait de reconnaître qu'il y a tout un autre ensemble de facteurs qui empêchent une personne d'être physiquement présente au Canada en tout temps.
À titre d'exemple, je vais citer la crise entre le Liban et Israël en 2006 ou en 2007, où quelque 15 000 Canadiens ont été évacués par avion du Liban et ramenés au Canada, alors qu'ils vivaient là-bas depuis de nombreuses années. Ils sont restés au Canada pour une très courte période avant de retourner au Liban.
Lorsque nous sommes confrontés à ce genre de réalité, nous devons nous poser une question importante. Comment un seul Canadien peut-il enrichir l'expérience canadienne? Habituellement, c'est en participant à la société et en faisant partie intégrante du tissu social de la société canadienne.
Je ne sais pas s'il existe une solution toute simple. Je pense qu'il est important d'intégrer la disposition sur l'intention de résider, tout en n'oubliant pas le problème lié à la citoyenneté de convenance auquel je crois que nous sommes confrontés en tant que pays.
Merci.
Vous appuyez la révocation des dispositions du projet de loi C-24. Comment pouvez-vous justifier l'appui à une disposition qui semble cibler des groupes minoritaires précis et qui sème des doutes et suscite de la méfiance à l'égard de nombreux groupes minoritaires?
Je ne suis pas indifférent à ce problème et à l'échange que vous avez eu avec Mme Winter. J'admets que c'est aussi un problème difficile. Je reconnais également le mandat du gouvernement actuel et son intention à l'égard de ce problème.
Pour nous, c'est presqu'un problème philosophique. Pour faire une analogie, je vais parler du mariage, si vous le permettez.
Une personne qui s'unit à une autre dans le cadre d'un mariage, d'une sorte de partenariat, s'engage à respecter un ensemble de valeurs. Si ces valeurs ne sont pas respectées, la solution qui s'impose plus souvent qu'autrement est le divorce, car les personnes, par leurs actions, ont rejeté les valeurs essentielles qui les ont amenées à consentir à cette union.
Pour un ensemble particulier de crimes — et nous avons dressé une liste de quels étaient ces crimes, à notre avis —, nous avons jugé qu'une personne s'est rendue coupable non seulement du crime en soi, mais aussi d'un crime contre le Canada.
Monsieur Fogel, votre temps est écoulé, malheureusement. Merci.
Monsieur Saroya, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
Merci. Monsieur le président, je vais partager mon temps de parole avec Michelle.
Merci au groupe de témoins. Nous entendrons les points de vue des deux côtés. Ma question s'adresse à M. Fogel.
Votre point de vue semble être totalement différent de celui de M. Edelmann. Vous dites que les gens qui ont commis des crimes odieux contre le pays ou les citoyens canadiens, des personnes innocentes, sous les ordres d'autres individus qui commettent des crimes dans d'autres pays, devraient être expulsés du pays pour protéger les Canadiens.
Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
J'ai écouté très attentivement ce que M. Edelmann a dit. Je ne suis pas indifférent ou insensible aux arguments qu'il soulève. Je ne dis pas que ce sont des questions faciles qui ont des solutions faciles.
Je n'oublie pas également la déclaration de Mme Winter, que je n'ai pas considérée pleinement pour être honnête, selon laquelle l'expulsion peut avoir des répercussions non seulement sur la personne, mais aussi sur l'environnement ou la localité où elle se trouve. C'est pourquoi je pense, comme je l'ai reconnu dans mes remarques, que la position du gouvernement offre des arguments convaincants en sa faveur, ce qui comprend, comme M. Edelmann l'a dit, de ne pas faire de distinction entre les différents Canadiens, ceux qui sont nés au pays et ceux qui ont été naturalisés.
Je ne peux faire fi du problème philosophique fondamental qui se présente lorsque nous parlons d'une personne qui fait le choix de se convertir à une religion par rapport à une autre qui est née dans une religion donnée. Cette personne affirme que, pour toutes sortes de raisons, cette foi l'interpelle. Elle veut adhérer à cette religion.
Lorsque des gens commettent un acte qui va fondamentalement à l'encontre des valeurs de la communauté religieuse ou, dans notre cas, des valeurs du Canada en tant que société et pays, il faut réagir. Il doit y avoir des conséquences. La révocation n'est peut-être pas la solution. D'autres recours pourraient être envisagés. Mais lorsqu'on insulte le Canada, il faut le reconnaître et appliquer des mesures correctives.
D'accord.
Madame Winter, pouvez-vous nous parler de l'incidence des compétences linguistiques sur la réussite de l'intégration des gens au Canada, surtout la connaissance de l'anglais et du français?
Je pense que les recherches ont clairement démontré que les compétences linguistiques sont importantes. Je n'ai pas besoin de dire aux Canadiens que la langue est un moyen d'intégration civique, économique et culturelle. Nous vivons près du Québec, alors nous le savons. Je pense que c'est un fait important.
Toutefois, je pense également que les tests linguistiques ne suffisent pas. L'idée qu'en étant résident pendant une période donnée, les gens apprendront la langue, n'est qu'un prétexte. Il faut interagir avec d'autres pour acquérir les compétences linguistiques.
Si le temps me le permet, j'aimerais revenir sur cette question.
Ma question s'adresse à MM. Fogel et Edelmann. Nous avons reçu des témoins au Comité qui nous ont dit que nous devrions peut-être aller plus loin que les mesures prévues dans le projet de loi concernant la révocation de la citoyenneté, notamment pour pouvoir révoquer la citoyenneté d'une personne si elle a été obtenue par des moyens frauduleux.
Je me demande, monsieur Fogel, si vous pensez que c'est nécessaire — et, le cas échéant, quel amendement vous suggéreriez — ou non, surtout à la lumière de l'affaire Oberlander.
Monsieur Edelmann, j'aimerais savoir, à la suite de ce que vous avez dit, comment nous pouvons empêcher une personne de présenter des renseignements frauduleux et d'échapper au système d'examen, ce qui arrive parfois... C'est la raison pour laquelle cette disposition existe. Comment pouvons-nous empêcher qu'une personne obtienne la citoyenneté canadienne par des moyens frauduleux?
Je pense que les mesures prévues contre ceux qui commettent sciemment une fraude dans le processus de demande sont plus directes et plus faciles à appliquer. Je pense que la capacité de consolider le processus pour ce qui est des appels pouvant être présentés par le défendeur serait utile pour veiller à ce que justice soit rendue en temps opportun.
Mais je pense qu'il est non seulement important, mais qu'il est aussi impératif sur le plan juridique et moral de maintenir ces dispositions qui, à mon avis, sont différentes en tous points du débat sur la révocation. Une personne qui a l'intention de faire de fausses déclarations ou de commettre une fraude ne peut pas bénéficier de l'issue de la fraude qu'elle a commise.
Je ne suis pas contre la proposition de révoquer la citoyenneté lorsque de fausses déclarations ont été faites. Cette mesure est prévue dans le traité sur l'apatridie également.
Ce que je dis — et l'exemple de la résidence permanente est peut-être un bon exemple —, c'est que dans le passé, nous avons révoqué le statut de résident à beaucoup plus de résidents permanents que de citoyens. Le processus est assez simple. Le ministre fait une allégation. On s'adresse à la division de l'immigration. Si elle juge que vous avez fourni de faux renseignements, une ordonnance est émise et vous pouvez vous adresser à la Section d'appel de l'immigration.
Mais les cas de fausses déclarations ne sont pas tous pareils. Si, disons, il y a 25 ans, vous êtes arrivé ici en prétendant être un ingénieur et que votre diplôme en ingénierie était faux, et que vous oeuvriez plutôt dans un corps de métier, durant ces 25 ans, vous avez eu des enfants et des petits-enfants. Vous êtes établi ici. Il y a de nombreuses raisons de ne pas retirer la résidence permanente à une personne dans ces cas-là à l'heure actuelle.
Merci, monsieur Edelmann. Votre temps est écoulé.
Madame Kwan, on vous écoute, pour sept minutes, s'il vous plaît.
Je veux remercier tous les témoins de leurs déclarations.
Pour donner suite à la question de la révocation et à la question des fausses déclarations ou de la fraude, je crois savoir que ce qu'il faut faire, monsieur Edelmann, c'est de s'assurer qu'un processus est en place pour l'examen des cas, n'est-ce pas? Je ne dis pas que si une personne fournit de faux renseignements, sa citoyenneté devrait automatiquement être révoquée, mais il faut simplement s'assurer d'avoir un processus adéquat et juste en place. Est-ce que j'ai raison de dire que c'est ce que vous voulez que le Comité examine?
C'est exact.
Je ne pense pas qu'il devrait y avoir révocation dans ces cas-là, mais il devrait y avoir un processus plus rigoureux pour que les gens ne se retrouvent pas dans une situation plus précaire lorsqu'ils deviennent citoyens. Dans l'exemple que j'ai donné au sujet de l'ingénieur qui a fourni de faux renseignements il y a de cela 25 ans, lorsque cette personne se présente à mon bureau et me demande si elle devrait obtenir la citoyenneté sachant qu'elle a fourni de faux renseignements et que ses options sont limitées, le conseil que je lui donne est de ne pas devenir citoyen, car sa situation deviendra plus précaire lorsqu'elle le sera. Lorsqu'une personne devient citoyen, si un agent décide qu'elle a fourni des renseignements erronés, elle redeviendra un ressortissant étranger — un ressortissant étranger inadmissible —, et elle peut être expulsée.
Dans la même veine, cet argument pourrait-il s'appliquer également à ceux qui ont un casier judiciaire à l'étranger? Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-6 n'a pas apporté de changement au projet de loi C-24, ce qui fait que si vous avez un casier judiciaire à l'étranger pour avoir commis un acte criminel, votre dossier sera automatiquement rejeté. Vous ne deviendrez pas citoyen du Canada.
Nous avons vu des situations comme celle de M. Fahmy où, dans d'autres pays, le système judiciaire peut être différent. Il pourrait y avoir d'autres facteurs à prendre en considération. J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet et savoir s'il devrait y avoir un processus approprié pour traiter ces cas plutôt qu'une décision automatique.
Je pense que c'est une étape différente dans le processus. À ce moment-là, on parle de l'obtention ou de l'attribution de la citoyenneté ou des obstacles à l'attribution de la citoyenneté. À mon avis, le problème, c'est qu'un mécanisme est déjà prévu dans la loi pour gérer ces cas. Un résident permanent qui a commis un crime grave ou qui a été condamné pour un crime grave à l'étranger peut perdre son statut de résident permanent et ne peut pas devenir citoyen.
Le problème si l'on intègre ce mécanisme dans la Loi sur la citoyenneté, c'est qu'on ne peut pas tenir compte du contexte. On ne peut pas examiner s'il s'agit en fait d'un crime grave ou si l'on devrait refuser la citoyenneté à la personne. On dit simplement que si une personne est condamnée pour avoir commis ce type de crimes à l'étranger, elle ne peut pas obtenir la citoyenneté. À mon avis, le processus approprié devrait être que si le crime est suffisamment grave, alors on retire le statut de permanent résident. Si le crime n'est pas suffisamment grave pour que la personne perde son statut de résident permanent, alors on la laisse continuer à s'intégrer à la société canadienne et à devenir un citoyen.
À mon avis, il y a déjà assez de mécanismes dans la LIPR pour régler ces situations, et si l'on en ajoute d'autres à la Loi sur la citoyenneté, cela créera des problèmes au lieu de régler quoi que ce soit.
Merci.
J'imagine que vous demandez que cette disposition soit modifiée ou supprimée du projet de loi.
Puis-je aborder la question de la langue?
Le Comité a entendu des témoignages sur les deux critères, particulièrement pour les immigrants dont les compétences linguistiques... Ils doivent faire l'examen sur les connaissances sur le Canada en français ou en anglais. On estime que deux critères sont évalués et j'aimerais entendre votre opinion là-dessus.
Je pense que les deux critères pour devenir citoyen consistent à passer le test linguistique et à atteindre le niveau 4 des NCLC. Évaluer les connaissances et évaluer les compétences linguistiques sont deux critères distincts qui ont été établis par le Parlement, et nous pouvons en débattre la portée notamment, mais les connaissances et les compétences linguistiques devraient être évaluées séparément. Vous évaluez les connaissances.
Ce qui se passe en ce moment, c'est que l'examen des connaissances, qui doit être fait en anglais ou en français, devient un deuxième examen des compétences linguistiques. On peut avancer que c'est un examen qui peut être difficile pour une personne qui peut autrement atteindre le niveau 4 des NCLC. Ces gens ont du mal à passer l'examen des connaissances en raison des compétences linguistiques, et non pas en raison de leurs connaissances.
Je recommanderais d'évaluer les connaissances et les compétences linguistiques séparément.
Quel était le système avant le projet de loi C-24?
Vous pouvez faire le test linguistique avec l'aide d'un interprète, alors on évalue les connaissances et les compétences linguistiques séparément. Vous évaluez les connaissances de la personne sur le Canada, mais à l'aide d'un interprète.
Vous pouvez connaître parfaitement l'histoire du Canada, mais si vous ne pouvez pas faire l'examen en anglais, vous ne le réussirez pas, même si vous avez une très bonne connaissance de l'histoire canadienne.
Merci.
Je vais parler de la question des motifs humanitaires. Vous en avez parlé dans votre exposé.
Pouvez-vous me dire pourquoi ils devraient être pris en considération lorsqu'une demande de citoyenneté est révoquée?
Dans certaines situations, le problème, c'est qu'il n'y a pas de délai de prescription dans les cas de fausse déclaration.
L'exemple de fausse déclaration dans une demande présentée en 1954 qu'a donné M. Fogel est très grave. Nul doute que dans une telle situation, il est tout à fait légitime de poursuivre une personne qui a fait une fausse déclaration il y a 60 ans. Toutefois, dans d'autres cas, si quelqu'un... Prenons l'exemple de l'ingénieur que j'ai utilisé plus tôt. S'il a fait une fausse déclaration il y a 60 ans et que depuis, il est devenu ingénieur et s'est établi ici, il y a peut-être des facteurs qui font en sorte qu'il serait injuste de lui retirer sa citoyenneté, même si en principe, il a fait une fausse déclaration.
Il y a une grande différence entre la portée des fausses déclarations dont nous parlons dans le contexte de la situation d'une personne — depuis combien de temps la personne vit-elle et est établie ici? Je dirais que ces facteurs sont pertinents et qu'ils devraient être pris en considération.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Fogel, vous avez donné de vrais exemples pour expliquer pourquoi vous êtes pour la révocation de la citoyenneté, et comme vous le savez, le projet de loi C-6 permettrait toujours de révoquer la citoyenneté d'une personne pour fraude ou fausse déclaration. Vous semblez être convaincu que ces motifs devraient être maintenus pour les gens qui commettent une fraude de façon délibérée. Comment détermine-t-on qu'une fraude qui a été commise de façon délibérée?
Certains opposants ont dit que dans le cadre des dispositions actuelles, un agent d'immigration a le pouvoir de décider si la citoyenneté sera révoquée pour ces motifs. Il me semble que c'est une décision plutôt subjective. Qu'en pensez-vous?
Je ne suis pas en désaccord avec vous. Je pense qu'il est impératif d'établir des protocoles qui garantiraient que bien qu'on assure une certaine latitude afin de faire une distinction entre, avec une certaine nuance, différents types de fausses déclarations, de situations, etc., on adopte également des mesures contre le type de décisions arbitraires qui pourraient être prises par les gens qui évaluent les dossiers.
À mon avis, il y a lieu de mettre en place le type de mécanismes qui feraient en sorte que la personne est protégée par la loi sans miner les principes fondamentaux qui sont à la base de la Loi sur la citoyenneté.
Appuieriez-vous l'idée d'une audience complète ou d'un droit d'interjeter appel dans les cas où la citoyenneté a été révoquée pour fraude ou fausse déclaration?
Bien.
À l'heure actuelle, deux organismes ont entrepris des poursuites. Ils disent que le processus actuel de révocation de citoyenneté, dans le cadre du projet de loi C-24, non seulement pose problème en ce qui concerne les motifs liés à la sécurité nationale, mais contrevient à la Charte des droits et libertés. Ils croient que les éléments de la loi actuelle sont incompatibles avec une société libre et démocratique.
Que pensez-vous de leurs revendications?
Je n'ai pas une connaissance suffisante de leurs arguments pour donner mon opinion. J'en suis désolé.
Concernant les positions défendues par les autres organismes, je ne suis pas certain de les connaître.
D'accord. Pour l'essentiel, ils croient que le processus de révocation de la citoyenneté actuel, ce dont nous parlons, et en particulier les motifs de révocation de citoyenneté liés à la sécurité nationale, contreviennent à la Charte des droits et libertés.
Je peux dire que les dispositions actuelles ont été contestées dans le cadre de plusieurs poursuites en justice — et notre cabinet a participé à au moins l'une d'entre elles — parce que l'on considérait que le fait de révoquer la citoyenneté sans qu'une audience n'ait lieu constitue un problème — et notre cabinet a participé au moins à l'une d'entre elles. C'est un problème d'équité procédurale. Retirer un droit aussi fondamental constitue un problème.
Les droits liés à la citoyenneté sont intégrés dans la Charte, pour ce qui est des droits fondamentaux liés au vote, à la mobilité. On enlève un statut fondamental sans tenir d'audience.
Oui, j'ai entendu les mêmes revendications. Puisque je ne suis pas avocate, je vais laisser mes collègues juristes vous répondre.
Quelle est la solution de rechange à la révocation de la citoyenneté? Qu'en est-il des autres pays? Doivent-ils le faire également? Où cela mène-t-il? Il semble y avoir une course visant à retirer cela, et des gens en paient le prix. C'est vraiment comme si l'on disait à quelqu'un qu'il n'a plus de pays, et dans un monde d'États-nations, il s'agit d'une peine sévère.
Je veux revenir sur des observations de M. Edelmann par rapport aux langues, au sujet des tests de connaissance. Certains disent qu'il est important que les gens qui s'établissent au Canada et qui font le choix de devenir citoyens canadiens aient un certain niveau de connaissances sur le pays. Vous avez parlé du problème que constitue faire passer un test de connaissance en anglais ou en français. Certaines personnes pourraient trouver qu'il est difficile de le faire, non pas parce qu'elles ne connaissent pas le pays, mais parce que leurs notions de base ne sont pas suffisantes, ce qui va peut-être au-delà des exigences du test de connaissance linguistique.
Quelle est votre solution, si vous en avez une à proposer, pour faire en sorte que les néo-Canadiens aient une connaissance de base suffisante du pays?
Excusez-moi, mais je veux préciser que ce que je critique, ce n'est pas le test de connaissance en tant que tel, mais le fait qu'il doit être fait en anglais ou en français.
Je vais prendre mon parcours scolaire comme exemple. J'ai étudié en français. J'ai appris les mathématiques et les sciences en français. Il m'a fallu des années avant de pouvoir dire « théorème de Pythagore en anglais, soit « Pythagorean theorem », parce que c'est un terme qui est difficile à dire. Encore aujourd'hui, c'est difficile pour moi. J'ai appris l'anglais au fil des ans, mais ce n'est pas aussi facile pour moi de comprendre les notions de sciences et de mathématiques en anglais. Ce n'est pas que je ne comprends pas les concepts — quoique ma compréhension des concepts n'est pas à un niveau particulièrement élevé —, mais je les comprends mieux en français qu'en anglais, parce que je les ai appris en français.
Il s'agit davantage du test de connaissances. On peut bien connaître l'histoire du Canada et comprendre les principes et les droits démocratiques, et ce genre de choses, mais la langue utilisée pour les expliquer correspond souvent à un niveau plus élevé que NCLC 4.
Merci, monsieur Edelmann.
C'est ce qui conclut votre tour.
J'aimerais poser une brève question aux trois témoins. L'un des principes fondamentaux de notre système de justice, c'est que tous les citoyens doivent être traités également devant la loi. La question est assez simple, et vous pouvez y répondre par oui ou par non. Souscrivez-vous à ce principe?
Monsieur Fogel.
Pour moi, cela reflète vraiment des impératifs divergents. Je vois la force de cet argument, de la position défendue par le gouvernement. Je continue de croire que dans certaines situations, le non-respect est tellement fondamental qu'il faut que d'autres solutions soient mises en place.
Je souscris à ce principe. Je pense que la révocation de la citoyenneté cible les gens ayant la double nationalité. Parce que ce sont les seules personnes qui peuvent être ciblées, à cet égard, elles ne sont pas traitées équitablement, bien que je comprends ce type de dilemme philosophique.
Je dirais que oui. Ils doivent être traités également devant la loi.
Je veux revenir à l'exemple de M. Fogel sur le mariage et dire qu'un exemple plus juste, c'est une situation où un couple a un enfant. Il est très rare qu'un parent renonce à son enfant. Un grand nombre de mariages éclatent, malheureusement. Le fait est que...
La différence entre les deux situations, c'est que l'enfant est le produit de l'union. Dans le cas dont nous parlons, c'est l'individu qui prend la décision de faire des choses qui constituent un affront à l'union qui avait été établie.
Mme Elke Winter: Puis-je...?
Puisque vous avez abordé le sujet, du point de vue de la sociologie, nous dirions aussi que les gens n'agissent pas seulement de leur propre initiative. Je n'approuve pas les actes de violence ou de terrorisme, mais nous devons tenir compte du contexte, et je crois que dans ce cas, nous sommes peut-être tous coupables.
J'invoque le Règlement, monsieur le président. Ce n'est pas la première fois que vous le faites. Vous prenez comme par hasard le temps réservé aux membres conservateurs pour poser des questions. Vous avez le droit de poser des questions, mais pas au détriment des membres du Comité. Votre travail consiste à prendre des décisions. Vous pouvez poser des questions de temps en temps, mais c'est ce qui se passe à presque toutes les réunions, et je vous demande de cesser de le faire.
À ce sujet, à la page 1067 de l'O'Brien-Bosc, on dit ceci: « à l'occasion, le président peut également participer à l'interrogatoire des témoins ».
Je le sais bien, mais vous ne le faites pas « à l'occasion », mais bien à chaque réunion. Je veux seulement le faire remarquer. Je n'aime pas que vous utilisiez le temps d'intervention réservé aux conservateurs.
Si vous le faites encore, je le soulèverai de nouveau, monsieur le président, et je prendrai plus de temps.
Merci.
J'aimerais suspendre nos travaux deux ou trois minutes pour permettre aux témoins de partir et au prochain groupe de s'installer.
Merci.
Nous reprenons.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins. Nous accueillons M. Richard Kurland, avocat et analyste politique, qui comparaît à titre personnel; Mme Avvy Go et M. Vincent Wong, qui sont respectivement directrice de clinique et avocat-conseil à l'interne de la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic; et M. Stephen Green, avocat et associé de Green and Spiegel, s.r.l., qui comparaît lui aussi à titre personnel.
Merci.
Monsieur Green, vous pouvez commencer. Vous disposez de sept minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité aujourd'hui.
J'aimerais parler d'une disposition très précise du projet de loi. Elle porte sur la résidence.
Bien sûr, je félicite le gouvernement qui, dans le cadre du projet de loi, réduit à trois ans sur cinq la période. Cependant, je vous demanderais d'examiner l'exigence de présence effective. Au cours des 30 dernières années, environ, la présence effective n'a pas été le critère au Canada. Nous avons permis à des gens de demander la citoyenneté alors qu'ils n'avaient pas vécu ici, selon certaines circonstances. Je pense que les nouvelles mesures qui sont entrées en vigueur en juin, l'an dernier, ont fait mal à beaucoup de gens à qui, en tant que Canadiens, nous ne voulons pas faire de tort.
Je vous dirais ce qui suit. Est-ce qu'un journaliste de CBC qui est affecté à l'étranger doit choisir entre devenir citoyen ou accepter cette affectation? Un résident permanent qui a été accepté au MIT ou à Harvard — qui pourrait avoir un parcours d'études remarquable et revenir au Canada pour nous aider — doit-il choisir entre poursuivre ses études ou devenir un citoyen? Je crois que bon nombre d'entre vous prendront conscience d'une chose en écoutant ce que je vais dire maintenant. Les députés de la Chambre des communes ne sont pas moins des résidants parce qu'ils travaillent ici, à Ottawa. Vous passez du temps à Ottawa, mais où votre mode de vie est-il centralisé? Je dirais que c'est dans vos circonscriptions respectives. Pourquoi? Parce que vous y avez un toit et peut-être une famille. Vous y avez un réseau social, des comptes de banque. Parce que les députés passent du temps à Ottawa, sont-ils moins des résidants du Manitoba ou du Québec pour autant?
Je vous dirais que c'est ce que le projet de loi actuel vous demande, et je ne pense pas que ce soit ce que vous voulez. Il faut prévoir des exceptions aux dispositions sur la présence effective. Comme bon nombre d'entre vous le savent peut-être, avant juin de l'an dernier, nous avions essentiellement trois critères qui servaient à déterminer si une personne respectait les anciennes exigences en matière de résidence.
L'un d'entre eux était purement lié à la présence effective. Un autre était désigné comme la décision Papadogiorgakis, soit l'histoire d'un étudiant de la Nouvelle-Écosse. Il vivait dans un autobus au Massachusetts et était aux études. La cour a dit que la centralisation du mode de vie habituel d'une personne au Canada permet de compter cela comme du temps de résidence.
Le dernier critère, qu'on appelait le critère Koo, était un critère évalué par six questions qu'avait formulées la juge Reed. Je vous en nomme quelques-unes. Passez-vous plus de temps à l'étranger qu'au Canada? Êtes-vous allé à l'étranger de façon volontaire? Êtes-vous revenu au pays après être allé à l'étranger?
Ces trois critères étaient utilisés. Le problème, c'est que les tribunaux ont statué que tant qu'un juge de la citoyenneté choisit l'un des trois, il n'a pas commis d'erreur, de sorte que, très franchement, c'était comme jouer au casino: une personne savait qu'elle allait obtenir sa citoyenneté, ou non, selon le juge sur lequel elle tombait.
Il nous faut adopter un système qui ne comportera plus ce manque de transparence et qui permettra au moins aux gens d'étudier ou de travailler à l'étranger.
Cela se passe dans d'autres pays. Je vais vous donner seulement deux exemples. Le premier concerne les États-Unis. Dans ce pays, il faut être présent pendant 30 mois en cinq ans. Nous réduisons cela — c'est intéressant... Une personne mariée à un citoyen américain doit montrer qu'elle a résidé au pays pendant 18 mois sur une période de trois ans, mais il y a des exceptions. Quelles sont-elles en partie? Eh bien, une personne qui travaille à l'étranger pour une entreprise américaine peut compter ce temps dans le calcul pour le critère de présence effective. Travaillez-vous pour un organisme médiatique? Travaillez-vous pour un organisme religieux? Aux États-Unis, il y a des exceptions et nous devons les examiner.
On retrouve le même type de critères au Royaume-Uni. Les demandeurs doivent y avoir résidé trois années sur cinq, mais encore une fois, il y a des exceptions. Quelles sont-elles en partie? On demande aux demandeurs où se trouve leur famille. Où mènent-ils principalement leurs activités? Où est leur réseau social? Vous pouvez constater que des exceptions sont prévues au Royaume-Uni et aux États-Unis, et je pense qu'il devrait en être de même ici.
Quelles sont donc mes recommandations?
Si nous conservons l'exigence liée à la présence effective dans le projet de loi actuel, je recommande de prévoir des exceptions. Certaines de ces exceptions devraient s'appliquer, par exemple, aux personnes qui travaillent pour une entreprise canadienne à l'étranger, aux étudiants à temps plein à l'étranger ou peut-être aux missionnaires qui travaillent à l'étranger. Nous devons prévoir certaines exceptions, car je crois qu'au bout du compte, le Canada perdra des gens formidables qui devraient faire partie de notre communauté canadienne.
Vous pourriez même utiliser notre Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. En effet, l'article 28 de cette Loi porte sur les personnes qui peuvent renouveler leur résidence permanente. L'une des exceptions liées à la présence effective pendant deux années sur cinq concerne une personne qui travaille temporairement pour une entreprise canadienne à l'étranger. Encore une fois, nous tenons compte de cela dans le cas des résidents permanents. Je crois que nous devrions également en tenir compte lorsqu'il s'agit de nos citoyens.
Enfin, si les membres du Comité décident de ne pas examiner la recommandation liée à l'élimination du critère de la présence effective, dans ce cas, oui, nous avons le paragraphe 5(4), dans lequel une disposition précise que si la personne ne satisfait pas nécessairement aux critères de résidence, le ministre peut tenir compte de plusieurs autres raisons. Toutefois, le problème, c'est que nous ne trouvons pas cette mesure assez transparente. Si on offre une telle mesure, elle doit être transparente.
Merci.
Merci, monsieur Green.
La parole est maintenant à Mme Go et à M. Wong, qui disposent de sept minutes pour les deux exposés combinés. Merci.
Je m'appelle Avvy Go. Je suis directrice de clinique à la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, un organisme communautaire à but non lucratif qui fournit gratuitement des services juridiques aux personnes à faible revenu dans la région du Grand Toronto. Je suis accompagnée de Vince Wong, avocat-conseil à l'interne pour notre clinique. Nous sommes très heureux d'être ici et nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de formuler des commentaires sur le projet de loi.
À notre avis, la Loi sur la citoyenneté est l'une des lois les plus importantes de notre pays. En effet, la citoyenneté définit notre peuple et ainsi, elle définit aussi le Canada en tant que nation. Il est important de pouvoir devenir un citoyen canadien, surtout pour de nombreux immigrants, car notre système juridique réserve certains avantages, droits et privilèges à ceux qui détiennent la citoyenneté, ainsi que le droit le plus important, c'est-à-dire le droit de vote.
La citoyenneté donne également aux immigrants qui s'installent au Canada un sentiment d'appartenance et elle réaffirme leur place dans un pays où ils se considèrent chez eux. De nombreux clients de notre clinique — un grand nombre d'entre eux sont racialisés, et un grand nombre d'entre eux ne sont pas citoyens — doivent avoir l'assurance que notre Loi sur la citoyenneté ne favorise pas l'injustice et l'exclusion. En fait, je ferais valoir que c'est dans l'intérêt de tous les Canadiens que notre loi sur la citoyenneté indique à tous nos immigrants que la société canadienne est un endroit accueillant pour tous, peu importe leur race, leur sexe, leur situation socioéconomique, etc.
Nous sommes heureux de constater que le projet de loi C-6 abroge de nombreuses dispositions qui étaient contenues dans le projet de loi C-24, en rétablissant, par exemple, les exigences en matière de langue et de connaissances pour qu'elles s'appliquent seulement aux demandeurs âgés de 18 à 54 ans, en abrogeant la disposition relative à l'intention de résider et en rétablissant le crédit d'une demi-journée pour le temps passé au pays avant d'obtenir le statut de résident permanent. Ces changements et d'autres sont positifs, mais le cadre actuel présente toujours de nombreux problèmes épineux. Je vais donner la parole à mon collègue afin qu'il vous parle de certains de ces problèmes.
Merci. Je vais aborder directement les problèmes.
Tout d'abord, nous sommes d'avis — et nous appuyons les arguments éloquents de M. Green à cet égard — qu'une application trop rigide du critère de présence effective empêcherait injustement des demandeurs qui le méritent d'obtenir la citoyenneté. Cela arrive tout le temps dans le cas de clients qui passent du temps à l'étranger pour les affaires ou les études, mais ce que j'aimerais souligner, c'est que cela s'applique également aux situations liées aux soins de compassion, c'est-à-dire lorsque des clients retournent chez eux pour prendre soin de leurs parents malades.
Ainsi, nous recommandons que peu importe le critère jugé approprié par le Comité dans cette situation, qu'il s'agisse du critère énoncé dans la décision Koo ou du mode d'existence centralisé, il devrait vraiment offrir la souplesse nécessaire dans les situations où c'est justifié. Nous croyons que l'ajout d'un critère de résidence réputée qui se concentre sur l'analyse du mode d'existence centralisé ciblerait également les préoccupations liées aux soi-disant citoyens de complaisance. Nous pensons également que l'ajout d'un critère de résidence présumée équilibrera les intérêts liés à la précision juridique et au traitement efficace d'un côté, et les préoccupations liées à la justice et à l'équité de l'autre.
Deuxièmement, nous recommandons de rétablir le droit d'appel pour toutes les décisions en matière de citoyenneté. Auparavant, la Loi sur la citoyenneté conférait automatiquement le droit de porter essentiellement toutes les décisions en matière de citoyenneté en appel à la Cour fédérale. Le projet de loi C-24 a remplacé ce droit d'appel automatique par un examen judiciaire beaucoup plus limité obtenu seulement avec la permission ou l'autorisation du tribunal. Nous jugeons qu'il est extrêmement important, dans le cadre de la primauté du droit, que toutes les décisions en matière de citoyenneté soient soumises à un examen juridique approprié, afin de confirmer qu'elles sont solides sur le plan juridique et que le pouvoir discrétionnaire a été exercé de façon raisonnable. Ce processus est possible seulement lorsqu'il existe des moyens efficaces de contester ces décisions.
Enfin, mon troisième point concerne l'exigence de passer un examen linguistique pour prouver les compétences linguistiques dès le départ afin d'obtenir la citoyenneté. Nous recommandons d'éliminer complètement cette exigence, car elle nuit doublement aux immigrants en créant non seulement un obstacle linguistique, mais également un obstacle financier à l'obtention de la citoyenneté. En effet, dans cette situation, les demandeurs seraient tenus de payer des frais pour faire un examen avant même que leur demande soit traitée par CIC. Nous recommandons d'avoir recours à un système qui existait avant le projet de loi C-24, et qui permet aux décideurs de vérifier le niveau de connaissances linguistiques par l'entremise d'un examen oral ou d'une entrevue.
Nous recommandons également l'abrogation de l'exigence selon laquelle l'examen écrit sur les connaissances doit être fait en français ou en anglais, car cette exigence représente essentiellement un second examen linguistique, comme nous l'avons entendu un peu plus tôt. Nous sommes d'accord avec l'affirmation de l'ABC selon laquelle « la compétence linguistique nécessaire pour faire un examen de connaissances est sensiblement différente de celles nécessaires pour vivre et travailler au Canada. » Auparavant, les exigences linguistiques ont toujours été axées sur les compétences pratiques relatives à l’écoute et à l’expression orale. Exiger que les demandeurs réussissent un examen écrit en anglais ou en français crée des exigences supplémentaires en matière de compréhension de lecture et de langue écrite, même si avant le projet de loi C-24, ces compétences n'étaient pas jugées nécessaires pour la naturalisation.
Je comprends que des membres du public animés de bonnes intentions souhaitent promouvoir l'apprentissage de l'anglais et du français chez les immigrants, afin de leur permettre d'améliorer leur situation socioéconomique. Nous convenons que l'apprentissage d'une langue est un objectif important qui contribue à la réussite de l'établissement. Toutefois, il s'agit d'une situation dans laquelle on a déjà la carotte et où il est inutile d'utiliser le bâton. L'utilisation du bâton entraîne des conséquences imprévues. En effet, de nombreux immigrants et réfugiés qui arrivent au pays se trouvent tout en bas de l'échelle socioéconomique. Lorsqu'ils doivent occuper plusieurs emplois et prendre soin d'une famille, ils n'ont pas le temps de passer des examens linguistiques officiels.
J'aimerais soulever deux points. Tout d'abord, la modification à l'article 5 de la Loi qu'on propose présente une faille titanesque. Deuxièmement, le projet de loi présente un défaut de conception stratégique.
Tout d'abord, avant de commencer, j'aimerais vous dire à quel point je suis heureux d'avoir l'honneur et le privilège de comparaître encore une fois devant votre Comité. Je vous remercie de m'avoir invité ici.
L'inclusion de références aux déclarations remplies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu avait pour objectif de résoudre la situation ironique dans laquelle une personne pouvait être un résident du Canada à des fins d'immigration, mais pas à des fins fiscales. Si vous habitez au Canada et que vous profitez des avantages du système canadien, vous devez payer pour ces avantages.
Je suis heureux de voir que cet élément de la loi actuelle a survécu à la transition électorale, mais il contient une énorme faille. En effet, la modification proposée, dans sa forme actuelle, néglige d'inclure quatre petits mots. Je vais lire la phrase. Voici la partie pertinente:
a rempli toute exigence applicable prévue par la Loi de l'impôt sur le revenu de présenter une déclaration de revenus pour trois des années d'imposition.
Il faut ajouter « à titre de résident du Canada ». Autrement, une personne peut remplir une déclaration d'impôt sur le revenu sans être un résident, ce qui va à l'encontre de l'intention principale du Parlement selon laquelle si une personne souhaite être un citoyen canadien, elle doit être un résident du Canada, non seulement à des fins d'immigration, mais également à des fins fiscales.
Le deuxième point est lié à notre processus de révocation de la citoyenneté. En termes simples, actuellement, les citoyens ont accès à un nombre moins élevé de garanties procédurales que les résidents permanents. Il faut repenser cette disposition. Sur le plan structurel, il est possible de former une nouvelle division au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Cela pourrait, sur le plan structurel, soumettre les questions en matière de citoyenneté à l'arbitrage dans une instance quasi judiciaire. L'autre solution, sur le plan structurel, consiste à réduire le statut de la personne visée de celui de citoyen à celui de résident permanent, afin que cette personne puisse avoir accès à un minimum de justice.
Ce sont les deux points que je souhaitais soulever. Je devais deux minutes au président pour avoir dépassé le temps qui m'avait été imparti l'an dernier. Je lui redonne donc ce que je lui dois.
Je sais que l'ancien président vous en est très reconnaissant.
Merci.
Monsieur Ehsassi, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier tous les témoins. J'ai eu l'occasion d'examiner tous vos exposés, et il est évident que chacun d'entre vous fournit une grande expertise. Vous avez également eu la chance de lire le projet de loi et ses dispositions pour vous assurer que nous avons un bon projet de loi C-6, et qu'il ne présente aucune lacune ou faille, etc.
J'aimerais savoir si vous convenez tous que jusqu'ici, la disposition sur la révocation ne contient pas de mécanisme de surveillance des procédures adéquat. Êtes-vous d'accord avec cette observation? À votre avis, que faut-il faire pour renforcer cet élément particulier du projet de loi C-6? J'aimerais que les trois témoins répondent à la question.
Je peux répondre en premier.
Je ne crois pas que le système de révocation actuel prévoit un nombre suffisant de garanties procédurales. Vous savez sûrement qu'actuellement, une importante poursuite en recours collectif a été intentée relativement aux changements qui ont été apportés l'an dernier, et je crois que le tribunal devrait exercer une surveillance appropriée pendant le processus. De plus, c'est intéressant, car la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés nous a donné une Commission d'appel de l'immigration qui traite les questions liées aux réfugiés et à l'arbitrage. Il existe donc, actuellement, une commission en mesure d'exercer une surveillance sur les questions liées à la citoyenneté. Vous pourriez donc envisager de lui confier cette tâche.
J'aimerais formuler un bref commentaire au sujet de la révocation. L'une des affaires devant les tribunaux concernait la situation d'une famille de quatre personnes. On allègue que le demandeur principal aurait fait une fausse déclaration dans le cadre de sa demande d'immigration, et tous les enfants sont également visés. C'est le problème dans cette situation: on n'exerce pas une surveillance appropriée. Un seul agent examine la demande et prend une décision. À mon avis, nous devons exercer la surveillance appropriée, et ce n'est pas ce que nous faisons dans le système actuel.
Je suis tout à fait d'accord avec cette évaluation. C'est un peu ironique que nous ayons davantage le droit d'interjeter appel si nous recevons une contravention de stationnement que si notre citoyenneté est révoquée.
On a formulé de nombreuses suggestions judicieuses, notamment la possibilité d'étendre la compétence de la CISR pour inclure les affaires liées à la citoyenneté. De plus, on pourrait tenir compte de certaines questions liées aux facteurs d'ordre humanitaire dès le départ, lorsqu'un agent décide si un cas fera l'objet d'une audience ou non.
Manifestement, au bout du compte, il nous faut une surveillance judiciaire, qu'il s'agisse du droit d'interjeter appel à la Cour fédérale ou de soumettre une décision à un examen judiciaire mené par un groupe telle la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je crois que ce sont de très bonnes suggestions.
Le rôle du témoin est d'aider à améliorer le projet de loi proposé. En principe, il sera adopté. Visiblement, nous passons de la philosophie consistant à compliquer l'obtention de la citoyenneté et à faciliter sa révocation à la philosophie consistant à faciliter son obtention et à compliquer sa révocation. Dans ce contexte, le processus de révocation doit être remanié. Fondamentalement, le système de justice pénale du Canada existe pour punir les comportements inappropriés en imposant des conséquences pénales. Mais ce n'est pas la fonction d'une loi sur la citoyenneté.
J'aimerais seulement ajouter qu'en principe, on évalue toujours l'importance des conséquences liées à la révocation de ces droits. Si ces conséquences sont concrètes — et je ferais valoir que dans le cas d'un droit à la citoyenneté, elles sont fondamentales pour toute personne qui est assujettie à sa révocation —, les garanties procédurales doivent être très élevées. Si ces conséquences ne sont pas importantes ou qu'elles ne sont pas concrètes, la marge de manoeuvre est plus grande. Mais je conviens certainement que la CISR s'occupe souvent de cas de fraude et de fausse déclaration pour les résidents permanents, et qu'il faudrait donc peut-être envisager la possibilité d'avoir recours à son expertise dans ce type de questions liées à la citoyenneté.
Merci.
Étant donné que mon temps est limité, j'aimerais poser une question à Mme Go et à M. Wong sur la partie C de leur mémoire, qui porte sur le refus d'octroyer la citoyenneté dans les cas de condamnations et de déclarations de culpabilité rendues à l'étranger.
Dans cette partie, vous avez formulé, selon moi, un argument très convaincant pour expliquer que même si de nombreuses personnes ont tendance à fusionner les lois sur l'immigration et les lois pénales, cette conception est foncièrement erronée, car chaque système est censé fonctionner de façon indépendante. Je vous serais donc reconnaissant de nous parler de ce point.
Bien sûr. Cette tendance à fusionner les lois sur l'immigration avec celles sur la citoyenneté nous préoccupe, mais l'autre chose qui nous préoccupe, c'est que même si, au Canada, nous respectons la primauté du droit et nous avons une constitution et une Charte, ce n'est pas toujours le cas dans de nombreux autres pays.
Notre clinique accueille surtout des clients de la Chine et du Vietnam. Je crois qu'on peut facilement démontrer que la primauté du droit n'est pas toujours présente dans ces systèmes. Cela représente donc un problème de taille lorsqu'on commence à établir des équivalences entre les condamnations rendues à l'étranger et celles rendues au Canada, par exemple, et lorsque nous utilisons le processus de citoyenneté pour pénaliser doublement une personne qui a peut-être — ou peut-être pas — été condamnée à tort dans un autre pays.
C'est pourquoi nous sommes donc très préoccupés à cet égard.
D'accord. J'ajouterais brièvement au mémoire de mon collègue qu'il est tentant de croire que ces gens sont des criminels, que ce sont de mauvaises personnes, et qu'il faut les punir.
Nous voulons utiliser toutes sortes de moyens pour les punir, mais c'est un terrain glissant, car notre pays est doté d'un bon système de justice pénale. Il prévoit des garanties procédurales. Lorsqu'on ajoute une sanction pénale à une sanction liée à l'immigration ou à la citoyenneté, on enfreint un grand nombre de ces garanties procédurales.
Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais poser une question à M. Green et à M. Kurland, en particulier, au sujet du paragraphe 1(8) du projet de loi C-6, qui élimine l'exigence d'avoir l'intention de résider au Canada en vue d'obtenir la citoyenneté. Cette disposition figurait dans le projet de loi C-24. Craignez-vous que des personnes qui veulent obtenir une citoyenneté de convenance demandent la citoyenneté canadienne, sans toutefois avoir l'intention d'habiter au Canada une fois qu'ils l'auront obtenue?
Il semble que bien des gens obtiennent leur citoyenneté puis vont vivre ailleurs. Ils vont s'établir en Arabie saoudite, où ils peuvent faire beaucoup plus d'argent. L'Arabie saoudite n'est qu'un exemple; je veux seulement faire valoir qu'ils vont s'installer dans un autre pays où ils peuvent faire considérablement plus d'argent.
Un des témoins du premier groupe que nous avons reçu a donné l'exemple du Liban. En juillet 2006, 34 navires ont servi à évacuer des citoyens canadiens qui vivaient au Liban. On parle de navires, et non pas de personnes. Au total, 34 évacuations ont été effectuées par navire et 65 par avion. Il est intéressant de savoir qu'un grand nombre des personnes qui ont été évacuées par avion, même si cela se faisait aux frais du gouvernement canadien, voulaient obtenir des points de voyage. Le gouvernement a évacué environ 15 000 Canadiens, ce qui lui a coûté environ 75 millions de dollars. Un bon nombre des personnes évacuées sont retournées au Liban lorsque le calme était revenu. Ce n'est qu'un exemple.
On a éliminé cette disposition. Je crois que M. Wong a abordé la question de la citoyenneté de convenance. C'est merveilleux d'avoir un passeport canadien. Bien des gens sur la planète voudraient détenir un passeport canadien.
Voilà la question que je pose à M. Green et à M. Kurland.
Je vous remercie.
Je suis heureux qu'on élimine cette disposition. Premièrement, d'un point de vue pratique, je ne crois pas que nous pourrions gérer cela. Si une personne devient un citoyen canadien, et qu'elle quitte le pays au bout d'un mois, est-ce acceptable? Et si elle quitte après six mois? Je ne crois pas que c'est applicable.
Selon moi, si une personne satisfait aux exigences établies par le gouvernement en ce qui a trait à la résidence, alors elle peut devenir un citoyen canadien. C'est ce que nous voulons. Êtes-vous un Canadien? Faites-vous partie de la population canadienne? Je crois que c'est l'objectif de la citoyenneté. La mondialisation fait en sorte que les gens déménagent et travaillent ailleurs. Je ne crois pas que cette disposition avait sa raison d'être.
Quant à l'exemple du Liban, cela n'a rien à voir à mon avis avec l'intention de résider au Canada. Il s'agissait de citoyens canadiens qui vivaient à l'étranger. Nous avons décidé de les aider. Si cette disposition avait été en vigueur, elle n'aurait rien changé à cette situation. Je suis heureux qu'on l'élimine.
Monsieur le président, le problème c'est que de nombreuses personnes qui obtiennent le passeport canadien — je n'ai cependant pas les statistiques sous les yeux — quittent le pays.
Monsieur Kurland.
Parlons d'argent. Si une personne qui possède un passeport canadien ne vit pas au Canada pendant 10 ou 20 ans, elle ne coûte rien au gouvernement canadien. Cependant, elle a le droit de bénéficier de services diplomatiques d'urgence. Le passeport est assorti d'une assurance. La première solution serait d'appliquer le principe d'un régime d'assurance collectif. Les personnes qui n'habitent pas au Canada pendant cinq années consécutives devraient payer une prime ou celles qui ne présentent pas de déclaration de revenus pendant une certaine période. Le problème serait réglé si on instaurait des droits de 1 000 à 5 000 $ pour les Canadiens non résidents qui détiennent un passeport.
La deuxième solution — qui ne sera pas populaire du tout chez les biens nantis — serait d'adopter la règle fiscale américaine, qui consiste à établir les impôts en fonction de la citoyenneté et non pas du lieu de résidence. C'est une autre solution.
J'ai une question très brève pour tous les témoins, pour qui voudra bien y répondre. Je veux que les choses soient claires. Certains témoins ont dit que les condamnations criminelles devraient être prises en compte lorsqu'on examine une demande de citoyenneté. Est-ce que vous laissez entendre que les condamnations au criminel à l'étranger ne devraient pas être prises en compte lorsqu'on examine l'admissibilité à la citoyenneté?
Si c'est le cas, je dois dire que souvent la citoyenneté est révoquée ou la demande de citoyenneté est rejetée lorsqu'une personne n'a pas divulgué cette information dans sa demande. Pouvez-vous expliquer vos commentaires dans le contexte de ce genre de situation, car je crois que bien des gens diraient que, si une personne souhaite être acceptée pour des motifs d'ordre humanitaire, alors elle devrait divulguer cette information dans sa demande initiale.
Si la personne, volontairement, n'inclut pas cette information dans sa demande, que se passe-t-il? Que fait-on?
Ce qui nous préoccupe, c'est que les condamnations à l'étranger peuvent avoir été infligées à tort. Il y a trop de facteurs. Cela rendra le processus de demande de citoyenneté beaucoup plus coûteux, car il faudra davantage de ressources pour déterminer quelles condamnations seraient prises en compte et lesquelles ne le seraient pas.
S'il s'agit d'une exigence et qu'on oblige les gens à divulguer cette information, alors si une personne ne le divulgue pas, il s'agirait d'une fausse déclaration. Je crois que dans l'ensemble il y a trop de facteurs et trop de condamnations discutables pour que nous puissions justifier qu'il devrait s'agir d'une exigence.
Je remercie beaucoup tous les témoins pour leur exposé.
J'aimerais aborder un point dont il n'a pas été question aujourd'hui, même s'il figure dans le mémoire de M. Wong et de Mme Go. Il s'agit des obstacles à l'obtention de la citoyenneté. Vous parlez de la langue et de l'exigence de présenter d'emblée une preuve de la compétence linguistique. Vous recommandez d'éliminer cette exigence ainsi que le deuxième examen.
Il y a aussi d'autres obstacles à l'accès à la citoyenneté, notamment l'obstacle financier. J'aimerais que vous abordiez cette question.
Certainement. Au cours des dernières années, les frais de traitement des demandes de citoyenneté ont augmenté de plus de 500 %. On justifie bien sûr ces frais par la nécessité de disposer des sommes nécessaires pour assumer le coût du traitement des demandes. C'est donc une question d'argent. On observe toutefois des problèmes importants à long terme. De toute évidence, les personnes à faible revenu, les immigrants et les réfugiés ne peuvent pas facilement verser 2 000 $ pour que les demandes de leur famille soient traitées.
Nous souhaitons que les frais soient réduits ou que des exonérations soient appliquées lorsque c'est justifié.
L'autre chose, et j'aimerais que le Comité réfléchisse à cela, c'est que, si on crée ces obstacles financiers ou ces obstacles linguistiques ou tout autre obstacle à l'obtention de la citoyenneté, on prive bien des gens déjà marginalisés, qui ne peuvent peut-être pas atteindre le niveau de compétence linguistique exigé parce qu'ils travaillent beaucoup ou qu'ils n'ont pas l'argent nécessaire. Ils sont toutefois ici au Canada. Ils sont des résidents permanents. Ils vivent, ils travaillent et ils ont des enfants ici. Ils contribuent à leur collectivité. Essentiellement, on les prive et on les marginalise davantage. Nous savons que s'ils n'ont pas le droit de vote, les politiques ne refléteront pas leurs intérêts.
C'est ce cycle que nous essayons de briser.
Je vous remercie beaucoup.
Si des personnes sont jugées apatrides et qu'elles sont dans cette situation pour diverses raisons, est-ce que selon vous il faudrait modifier le projet de loi C-6 pour tenir compte de ces personnes.
N'importe qui peut répondre.
Dans notre clinique, bien des gens apatrides sont d'anciens citoyens du Vietnam. Bon nombre d'entre eux vivent au Canada depuis longtemps. Certains, pour une raison quelconque, ont perdu leur statut de résident permanent à un moment donné. Ils sont nombreux à souffrir de problèmes de santé mentale. Ces problèmes les ont amenés à commettre des actes criminels, ce qui a entraîné la perte de leur statut de résident permanent. Ils sont alors devenus apatrides, car il n'y a aucun pays où ils peuvent retourner.
Il y a d'autres situations également. Le CCR, par exemple, s'est dit préoccupé par les cas de mineurs non accompagnés au Canada, qui ne peuvent pas obtenir la citoyenneté parce que leurs parents ne sont pas ici.
Je crois qu'il n'existe pas une solution unique à ce problème. Il y a différentes situations, et certaines d'entre elles doivent être réglées par l'entremise non pas de la Loi sur la citoyenneté, mais plutôt de la Loi sur l'immigration.
Il est certain que nous devons nous attaquer au problème. Je ne peux proposer une seule solution qui réglera tous les problèmes liés à l'apatridie, car toutes sortes de situations font en sorte qu'une personne devient apatride.
Il faut se pencher attentivement sur ce problème pour des raisons de sécurité. Si j'étais responsable du recrutement au sein d'un groupe mal intentionné au Moyen-Orient qui veut faire du tort au Canada ou à nos alliés, je concentrerais mes efforts sur les apatrides qui se trouvent au Canada. Ils sont très réceptifs. Nous devons recueillir les données empiriques et suivre soigneusement la trace de ces gens. Nous ne pouvons pas les laisser dans cette situation.
Par exemple, certaines personnes sont considérées apatrides parce qu'elles font partie de la deuxième génération de Canadiens. Si elles ont des enfants à l'étranger, on ne leur accorde pas la citoyenneté canadienne. Que pensez-vous de cette situation? Devrait-on leur accorder la citoyenneté canadienne?
Oui, il faudrait améliorer cela.
Par exemple, il y a un couple dans ma famille dont le mari est né au Canada, mais la femme est née à l'étranger. Ils sont tous les deux citoyens. Je leur ai expliqué que si leurs enfants naissent à l'étranger, il faut que ce soit le père qui présente la demande de citoyenneté, car si c'est la mère qui le fait, leurs enfants ne pourraient pas devenir citoyens canadiens. Je crois que cet exemple met en évidence l'iniquité qui existe. Je recommande vivement que cette disposition soit modifiée.
Monsieur Kurland, pouvez-vous me donner une courte réponse? J'ai une autre question à poser, si le temps me le permet.
Je répondrai rapidement que ce problème nécessite une solution structurelle qui consiste à attribuer le pouvoir discrétionnaire de prendre une décision selon chaque cas.
Je vous remercie.
Les mineurs qui sont au Canada sans un parent — pour diverses raisons — ne peuvent pas, en vertu du projet de loi C-6, présenter une demande de citoyenneté. D'autres témoins ont affirmé qu'il faudrait créer une disposition pour régler ce problème ainsi que celui des personnes handicapées.
Il me reste probablement moins de 30 secondes, que vous pouvez vous répartir.
Il y a une contradiction entre l'amendement proposé et les droits de l'enfant, les droits internationaux de l'enfant.
Je vous remercie, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec M. Tabbara.
Je tiens à remercier les témoins de comparaître devant nous aujourd'hui.
Ma question s'adresse à vous, madame Go et monsieur Wong. Je tiens d'abord à féliciter la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic pour le travail qu'elle effectue sur le plan notamment de la défense des intérêts des immigrants. Je sais que la majorité de vos clients sont d'origine chinoise. Je m'exprime en tant que membre du Comité mais aussi en tant que Canadien d'origine chinoise. Je sais qu'un système où il y a deux catégories de citoyens ne fonctionne pas. Nous savons que des Chinois sont arrivés au Canada à la fin du XIXe siècle et qu'ils étaient assujettis à la taxe d'entrée imposée aux Chinois ainsi qu'à la Loi sur l'exclusion des Chinois et qu'ils ont été traités comme des citoyens de deuxième classe. Je dis toujours que nous devons utiliser l'histoire pour apprendre de nos erreurs commises dans le passé et pour nous guider dans l'avenir.
J'aimerais savoir ce que nous pouvons faire selon vous pour mieux soutenir ces personnes marginalisées qui viennent au Canada. Les Chinois sont venus au Canada pour participer à la construction du chemin de fer, un travail que les Canadiens à l'époque ne voulaient pas faire. Comme nous le savons tous, la Chambre a présenté des excuses officielles il y a une dizaine d'années. Le dernier crampon, qui avait été présenté au premier ministre de l'époque, avait été égaré, mais il a été retrouvé récemment. Il symbolise le fait qu'on n'a pas offert aux Chinois une voie d'accès à la citoyenneté et qu'on ne les a pas traités comme des citoyens égaux.
Nous savons que bien des gens viennent au Canada en tant qu'aides familiaux résidants et travailleurs temporaires. Croyez-vous que le projet de loi C-6 va suffisamment loin pour leur permettre de devenir des citoyens à part entière?
En ce qui concerne les travailleurs étrangers temporaires et les aides familiaux résidants, je crois que la voie d'accès à la citoyenneté a été bloquée par la Loi sur l'immigration. Je crois que cette loi doit être modifiée pour leur permettre de devenir des résidents permanents, de sorte qu'ils puissent ensuite présenter une demande de citoyenneté.
Pour ce qui est du soutien à l'égard de la communauté chinoise, dans le contexte de la citoyenneté, je veux souligner deux points. Premièrement, il faut investir davantage dans la formation linguistique. Je conviens, comme bien d'autres, qu'il est préférable que les immigrants acquièrent les compétences linguistiques afin qu'ils puissent réussir, mais si vous êtes un petit salarié et que vous devez subvenir aux besoins de vos enfants, il s'écoulera beaucoup de temps avant que vous ne puissiez suivre une formation linguistique. D'ailleurs, nous allons publier lundi un rapport sur les employés de restaurants chinois, qui révèle qu'un grand nombre d'entre eux travaillent de très longues heures en dessous du salaire minimum. Je crois qu'il est très important d'investir davantage dans la formation linguistique des immigrants.
Deuxièmement, il faut faciliter l'accès à l'emploi. Une des raisons pour lesquelles un grand nombre de nos clients doivent quitter le Canada et aller s'établir dans un autre pays, c'est qu'ils ne parviennent pas à trouver un emploi dans leur domaine au Canada. Leurs titres de compétence ne sont pas reconnus au Canada. Je me souviens d'une cliente qui travaillait pour IBM en Chine. Elle n'avait pas réussi à obtenir un emploi chez IBM au Canada, alors elle a dû déménager aux États-Unis pour obtenir un emploi chez IBM là-bas.
Je crois qu'il faut régler ces problèmes.
Je vous remercie tous d'être ici aujourd'hui.
Ma question s'adresse à Mme Go et à M. Green.
Certains de mes électeurs sont des immigrants. Parfois, tous les membres de la famille sont des citoyens canadiens, à l'exception de l'un d'entre eux malheureusement, car il se trouve souvent à l'étranger. Pouvez-vous donner au Comité des exemples de demandeurs qui méritent d'obtenir la citoyenneté mais qui ne peuvent pas l'obtenir en raison des restrictions et des exigences liées à la résidence effective contenues dans le projet de loi C-24?
Je peux vous donner deux exemples de situations que nous voyons souvent à la clinique. Le premier concerne l'accès à l'emploi. Habituellement, c'est le mari qui ne trouve pas d'emploi décent au Canada. La femme et les enfants sont au Canada. Les enfants vont à l'école au Canada, mais souvent, le mari doit déménager ou aller à l'étranger pour obtenir un emploi suffisamment bien rémunéré pour lui permettre de subvenir aux besoins de la famille. Bien sûr, dans certains cas, ils ne peuvent pas conserver leur statut de résident permanent, car ils ne travaillent sans doute pas pour un employeur canadien. En fin de compte, il faut se demander s'il existe au Canada un système centralisé pour ce qui est de la résidence.
Le deuxième exemple concerne les étudiants qui fréquentent un établissement d'enseignement dans un autre pays. Je crois que quelqu'un a parlé d'une personne qui va étudier à Harvard ou à Yale. Ce n'est pas nécessairement Harvard ou Yale, ce peut être une autre université, mais il reste que sa famille est ici, ses parents sont ici. Les jeunes vont étudier à l'étranger, mais ils reviennent au Canada. Ensuite, il leur faut beaucoup plus de temps pour pouvoir obtenir leur citoyenneté. Est-ce que retarder le moment où ils peuvent présenter une demande de citoyenneté est réellement dans l'intérêt du Canada?
Je ne crois pas qu'il y ait au Canada une autre personne que moi, à l'exception d'un juge de la citoyenneté, qui ait assisté à un plus grand nombre d'audiences de citoyenneté. Je peux vous dire que normalement les gens d'affaires possèdent des entreprises prospères au Canada, ils exportent des produits canadiens, ils voyagent à l'étranger et leurs partenaires et leurs enfants sont admissibles à la citoyenneté, mais, en vertu de la nouvelle loi, eux-mêmes ne peuvent pas l'obtenir. Ils doivent alors décider s'ils vont restreindre leurs activités commerciales afin d'obtenir leur citoyenneté, ce qui ne serait pas une bonne chose pour le Canada. C'est le cas typique, et je ne crois pas que c'est une bonne décision à prendre. Il y a quelques années, ce problème-là n'existait pas, mais maintenant la loi a été modifiée. Ces gens pourraient démontrer qu'ils ont payé leurs impôts, que leurs enfants vont à l'école et qu'ils ont créé des emplois au Canada, mais cela n'a plus d'importance maintenant.
Cela met leurs...
Je vais poser rapidement une question à M. Green.
Vous vous êtes occupé du cas d'un immigrant de Chypre. Il s'agissait d'un étudiant nommé Papadogiorgakis, je crois. Pouvez-vous nous parler un peu de sa situation?
Je vous remercie. Cela met fin aux questions.
Je tiens à remercier tous les témoins d'avoir comparu devant le Comité.
Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes pour permettre à nos témoins de quitter. Ensuite, nous examinerons une question de procédure à huis clos.
Je vous remercie encore une fois.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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