FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 13 juin 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Chers collègues, nous allons commencer nos discussions, conformément à l'article 108(2) du Règlement au sujet de l'initiative canadienne de financement du développement.
Ce matin, nous sommes avec Diana Noble, présidente et directrice générale de CDC Investment Works; Simon Maxwell, associé de recherche principal; et Paddy Carter, agrégé supérieur de recherche, de Overseas Development Institute.
Bienvenue à nos témoins du Royaume-Uni.
Comme le veut la tradition, le Comité donnera aux témoins la possibilité de présenter un court exposé, puis nous passons directement aux questions et réponses.
Je vais céder la parole à Diana Noble. Diana, voulez-vous commencer votre exposé?
Laissez-moi commencer par apporter une petite précision. Vous avez dit que le nom de notre organisation était CDC Investment Works. En fait, c'est seulement CDC. « Investment Works » est le titre d'appel de l'organisation. Nous sommes l'institution de financement du développement du Royaume-Uni. CDC investit dans les pays émergents et les pays en difficulté depuis 1948. Voilà le contexte.
En ce qui me concerne, j'ai été embauchée en novembre 2011 pour entreprendre une très grande transformation du CDC, et je dirais que nous en sommes à la moitié. Le projet est en cours, mais mon témoignage sera surtout axé sur l'expérience que j'ai acquise au cours des six dernières années.
À bien des égards, j'ai beaucoup d'affinités avec une institution qui commence son cheminement, parce qu'en 2011, nous voulions vraiment innover et faire les choses différemment.
Mes commentaires seront divisés en six thèmes qui toucheront les questions un, quatre, cinq et six. Mes réponses ne seront pas particulièrement pertinentes pour les Canadiens. D'autres témoins seront en mesure de le faire nettement mieux que moi.
Le premier thème concerne le conseil que j'aimerais donner au Comité: vous ne devriez pas être trop rigide à cette étape-ci en ce qui a trait à votre stratégie tant et aussi longtemps que le poste de PDG et peut-être certains de vos postes de cadre supérieur ne sont pas comblés.
Quant à moi, j'ai accepté certains des conseils qu'on m'a donnés, mais un grand nombre des idées préliminaires dont on m'a fait part n'étaient pas acceptables et exigeaient qu'on y repense de façon importante. Je suis d'avis que, en fin de compte, la réussite de l'institution dépend surtout du calibre des gens que vous êtes capables d'attirer, vu la stratégie et le mandat que vous leur confiez. Selon moi, il faut leur laisser une certaine souplesse pour établir la stratégie qu'ils pensent pouvoir mettre en oeuvre. Bien entendu, je comprends la nécessité de clarifier la stratégie à l'heure actuelle, mais je pense que ce serait de fausses précisions. Voilà pour le premier thème.
Le deuxième thème — et je suis certaine que je prêche à des convertis — tient au fait qu'un double mandat est intrinsèquement difficile. Lorsque vous avez pour objectif d'obtenir un rendement financier et de générer des retombées en même temps, cela crée ce qu'on appelle à CDC un état de paranoïa perpétuel, car on craint de se diriger de façon excessive dans un sens ou dans l'autre. Vous n'avez qu'à regarder l'histoire de CDC pour vous rendre compte qu'à certaines occasions, CDC a généré des retombées aux dépens du rendement financier et a fait l'objet de critiques, ou a obtenu un rendement financier aux dépens des retombées, et a été critiqué. Il est vraiment difficile d'essayer de viser le juste milieu.
Comment y arriver? Je pense que deux ou trois éléments sont extrêmement importants.
Avant tout, vous devez vous assurer que le sens commercial est au coeur des compétences de votre organisation. Nous avons eu beaucoup de chance parce que nous sommes situés dans la ville de Londres, et par conséquent, il y a beaucoup de groupes auprès desquels nous pouvons recruter. J'ajouterais également que l'IFD du Canada présente un avantage fondamental puisque le Canada peut compter sur d'excellentes institutions de financement commerciales au sein desquelles elle peut recruter des gens: l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, l'OIRPC, le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario, le RREO, la Caisse de dépôt. Ce sont vraiment des organismes d'investissement de qualité supérieure.
À mon avis, vous ne devriez pas faire de compromis sur ce point. Votre objectif principal est de mettre sur pied un organisme d'investissement de qualité supérieure, avec tout ce que cela comporte. Si vous y arrivez, vous générerez réellement des retombées.
Puis, en ce qui concerne les retombées, vous devez être clair à propos de votre objectif. Les retombées, comme vous le diront mes bons amis de l'Overseas Development Institute, l'ODI, j'en suis certaine, peuvent être très diversifiées, et si vous ne faites pas attention, vous pouvez vous retrouver avec une longue liste d'objectifs que vous aimeriez atteindre. À moins que vous n'ayez une perspective stratégique, votre équipe sera en mesure de justifier n'importe quel investissement, parce que tout investissement dans un pays où il est difficile de faire des affaires génère certaines retombées. Vous devez être clairs à propos de ce à quoi vous allez dire oui et ce à quoi vous allez dire non, et bien sûr, à propos de ce que vous allez mesurer.
Sur le même thème, comme il s'agit d'un mandat difficile, vous ne devriez pas le rendre trop difficile. Oui, il n'y a pas suffisamment de jeunes entreprises dirigées par des femmes en Afrique rurale, mais ce n'est pas une stratégie réalisable. Il est incroyablement important de se rappeler qu'à moins que les entreprises ne connaissent du succès, il n'y a aucune retombée. Le fait de pénétrer des territoires inexploités semble un principe intéressant parce qu'ils sont inexploités, mais ils sont inexploités parce que les autres gens pensent qu'il est trop difficile d'y réussir. Voilà pour le deuxième thème.
Le troisième thème, qui concerne de nouveau les gens, réside dans le fait que la rémunération est réellement importante. Payez les membres de votre équipe trop cher, et cela devient toxique. Ne payez pas suffisamment les membres de votre équipe, et vous ne réussirez pas à embaucher les gens qui possèdent les compétences commerciales dont vous avez besoin. Il s'agit d'un exercice d'équilibre très délicat. Vous devez déterminer qui peut gérer cet équilibre et attirer les bonnes personnes. Il faut attirer des gens très qualifiés. Ce doit être des ambassadeurs commerciaux de premier ordre parce que, en toute franchise, il s'agit du type d'investissement le plus difficile à réaliser. Les candidats doivent faire preuve de jugement commercial, mais ils doivent aussi se réjouir de ne pas toucher un revenu correspondant aux revenus du marché en raison de l'inspiration et de l'intérêt que présente la mission. Ce genre de personnes existent — je pense que nous l'avons prouvé — mais elles ne sont pas nombreuses. Vous devez les trouver, puis établir une culture au sein de laquelle les gens voudront rester. Le principe des portes tournantes minera votre mission. Voilà pour le troisième thème.
Le quatrième thème tient au fait que vous devez être réaliste quant à votre objectif de rendement minimal. Vous devrez établir l'objectif financier que l'équipe devra atteindre. Les rendements commerciaux globaux — et toutes vos caisses de retraite vous le diront — sont vraiment bas à l'heure actuelle, comme nous le savons tous. Manifestement, une IFD doit être au-dessous de cela. Et pensez à long terme. Nous prenons une mesure mobile sur 10 ans, parce qu'il y a tellement d'instabilité à court terme. Et vous voudrez détenir vos investissements longtemps, puisque les capitaux patients sont au coeur d'une IFD durant de nombreuses années.
Le cinquième thème porte sur le même sujet: l'extrême patience. Nous devons penser en décennies, et non en années, et par conséquent, les parties intéressées de l'IFD doivent savoir qu'il faudra beaucoup de temps avant que les résultats, qu'il s'agisse de rendement financier ou de retombées, se fassent sentir. Ce serait un désastre de perdre patience à mi-parcours, disons après cinq ans.
Le dernier thème se rapporte à cela. La structure de gouvernance que vous mettez en place doit offrir une couverture politique. Rien ne mine davantage la réalisation d'une mission que les écueils en matière de politique. Pensez aux fonds souverains. On a intégré cela à la gouvernance pour empêcher les politiciens ayant un programme politique à court terme de modifier la politique à long terme de leurs fonds souverains. Il doit y avoir un cadre pour assurer l'uniformité à long terme. Cela ne veut pas dire qu'il ne doit pas y avoir de contrôle rigoureux, bien évidemment, mais le contrôle doit être effectué par des gens qui comprennent les organismes d'investissement de qualité supérieure.
Je vais m'arrêter ici.
Avant tout, merci de nous avoir invités.
L'ODI est très heureux d'être présent. Je suis Simon Maxwell. J'ai occupé plusieurs postes, notamment celui de directeur de l'Institut et, jusqu'à l'élection, j'étais le conseiller spécialisé d'un comité comme le vôtre au Parlement britannique, soit le comité spécial de développement international de la Chambre des communes.
Nous sommes vraiment ravis des possibilités qu'offre l'IFD au Canada.
L'ODI a accompli beaucoup de travail à faire en ce qui concerne deux aspects pertinents. D'abord, ce que veulent les pays en développement en matière de finances, un programme qui s'appelle « The age of choice », qui démontre qu'ils ne sont pas effrayés par le fait d'avoir de multiples offres de différentes personnes et que manifestement, les pays en développement ont besoin de capitaux. Puis, il y a le programme qui porte sur l'avenir des agences de développement, qui est également pertinent, parce que nous demandons souvent aux organismes de développement pourquoi ils font ce qu'ils font et quels sont leurs avantages comparatifs.
Ce serait très facile pour le Canada de ne pas avoir d'IFD. Parfois, je me dis qu'une IFD, c'est un peu comme une entité que mettent en place les pays pour lancer un appel à la vertu, un peu comme un jeu informatique dans lequel il faut ramasser une épée, une cape d'invisibilité et un élixir de vie; puis on met en place une IFD en même temps. La forme doit suivre la fonction.
C'était très intéressant de lire la lettre de mandat qu'a envoyée votre premier ministre à la ministre Freeland lorsqu'elle a été nommée, puis de lire la nouvelle stratégie de développement. Il m'apparaît évident que toutes les vertus que nous associons au Canada — votre engagement à l'égard du multilatéralisme et un ordre international fondé sur les règles, et l'expertise approfondie que vous possédez en matière de développement à Affaires mondiales Canada, mais aussi au Centre de recherches pour le développement international, le CRDI, et à l'égard de la recherche et des ONG au Canada — vous apportent les bases nécessaires pour que vous puissiez faire entendre votre voix unique et distinctive sur la scène mondiale. Cela se reflète dans la nouvelle stratégie de développement par les thèmes comme le genre, la dignité humaine, la croissance, l'environnement, la gouvernance et la paix.
Si vous êtes investi de ce genre de mission, alors il est vraiment utile de pouvoir compter sur une institution financière de développement qui complète le programme bilatéral. Pour être conscient de sa mission, en d'autres mots, il est vraiment important de penser au rôle de cette nouvelle institution, même avec une somme d'argent relativement peu élevée, 350 millions de dollars canadiens, et avec certaines restrictions quant à ses activités, parce qu'il semble qu'elle n'offrira pas beaucoup sous forme de financement à des conditions de faveur. Toutefois, la combinaison de prêts, de garanties de prêt et de financement par actions vous donne la possibilité d'atteindre les objectifs.
Ce que nous nous demandons, et je suis certain que vous vous poserez la question en tant que comité, c'est pourquoi ne pas simplement donner tout l'argent aux autres institutions multilatérales. Pourquoi ne pas le donner précisément à la Société financière internationale de la Banque mondiale, qui offre des services très semblables? La réponse doit résider dans le fait que, en utilisant cet argent, vous pouvez stimuler des investissements supplémentaires de votre propre budget d'aide et tirer parti du secteur privé canadien.
Je pense que nous sommes à l'aube d'une nouvelle révolution industrielle animée par l'action climatique, l'automatisation et la réponse à la crise de la mondialisation, tous des facteurs qui nous forceront à revoir complètement la façon dont l'économie mondiale fonctionne et à encourager l'investissement. La nouvelle IFD au Canada aide à tirer parti des atouts du Canada dans cette sphère, et ce ne peut être qu'une bonne chose. J'ai d'autres commentaires à formuler à propos de certains détails, mais je les garderai pour plus tard.
Vous savez probablement que le gouvernement du Royaume-Uni a pris un nouvel engagement énorme à l'égard de l'organisation de Diana Noble, en élevant son plafond de prêt à 6 milliards de livres, avec une possibilité d'aller même jusqu'à 12 milliards de livres, donc une échelle très différente de celle du Canada. Le gouvernement a fait cela parce que certaines des priorités de la stratégie de déploiement du Royaume-Uni chevauchent les vôtres, mais elle place la croissance et les emplois tout au centre.
Si vous lisez la nouvelle stratégie d'aide qui date de la fin de 2015, puis que vous en faites la lecture en fonction de l'examen du développement bilatéral qui a été publié à la fin de l'année dernière, vous verrez que le gouvernement britannique tient vraiment à la croissance et aux emplois, et, par conséquent, les investissements de CDC visent à soutenir cela.
Votre comité peut contribuer en partie aux discussions futures au Canada en expliquant clairement pourquoi vous avez besoin de cette IFD.
Paddy, allez-y.
Bonjour. Je m'appelle Paddy Carter. Je suis agrégé supérieur de recherche ici, à l'ODI, où je m'intéresse aux IFD. J'ai précédemment été économiste universitaire.
Je vais passer en revue les questions que vous avez posées pour essayer de cerner les éléments qui n'ont pas déjà été très bien abordés par Simon et Diana. Je vais commencer par votre orientation au sujet des femmes et des jeunes entrepreneurs, et je vais aussi parler de la réalité du budget que vous avez établi. Ces choses me portent à croire que vous envisagez probablement un modèle d'affaires fondé sur des intermédiaires, c'est-à-dire qui est fondé sur la prestation d'une ligne de crédit en vue de la réaffectation des prêts à une organisation locale, peut-être une ONG ou une entité commerciale, qui va ensuite, par exemple, prêter de l'argent à de petits agriculteurs ou quelque chose du genre.
Selon moi, une des innovations de Diana chez CDC, c'est la réorientation de l'organisation en ce qui concerne les investissements directs. Vous devez vous demander si, dans le budget que vous avez établi, il serait approprié d'essayer aussi de prévoir un secteur d'activités d'investissement direct.
Vous allez peut-être vous demander pourquoi, parce qu'il y a déjà beaucoup d'argent fourni aux IFD. L'enveloppe budgétaire de CDC augmente. Il y a le nouveau volet du secteur privé de la Banque mondiale. En même temps, on entend souvent parler du fait qu'il n'y a pas suffisamment de projets susceptibles d'être financés. La question de savoir si le marché est peut-être presque saturé est toujours dans l'air. Il n'y a peut-être pas de projets qui réunissent tous les éléments que vous voulez: ils sont additionnels, ce sont des choses que le secteur privé ne ferait pas par lui-même et ils respectent aussi votre mandat en matière de développement. Peut-être qu'il n'y en a pas assez dans le monde.
Cependant, si vous misez davantage sur les PME, alors ces inquiétudes ne sont peut-être pas nécessairement si préoccupantes que ça pour vous. Si vous regardez dans le monde entier, il y a beaucoup d'exemples de grandes réussites de petits fonds ciblant les PME dans des endroits précis. Tout le monde cherche peut-être de l'argent pour pénétrer dans de nouveaux territoires. Par exemple, le monde n'est certainement pas saturé d'organisations qui prêtent de l'argent à des petits agriculteurs. Par conséquent, vous pourriez peut-être très bien demander à votre équipe de commencer par regarder ce qui se fait dans le monde entier pour trouver des exemples de fonds qui ont du succès dans d'autres modèles et dont vous pourriez soutenir l'expansion.
L'autre chose que les IFD disent souvent, c'est qu'elles décident d'investir ou non, mais elles ne peuvent pas créer les occasions d'investissement. Cette situation reprend peut-être une des choses que Diana a dites. Si vous demandez à votre IFD d'aller sur le terrain et de soutenir des entreprises qui sont dirigées par des femmes ou qui, d'une façon ou d'une autre favorisent l'autonomisation des femmes, il faudra peut-être reconnaître qu'il y en a seulement un nombre limité. Il n'y a qu'un certain nombre de telles occasions sur le terrain, et si vous mettez seulement l'accent sur ces occasions, concrètement, cela pourrait vous empêcher de faire d'autres choses. Cela ne fera pas en sorte que vous en ferez plus à cet égard, parce que les occasions ne sont plus là.
Cette situation soulève la possibilité de collaboration et de coopération avec d'autres composantes de l'architecture canadienne du développement, l'un des thèmes soulevés dans vos questions. Cela donne à penser que, peut-être, d'autres composantes d'Affaires mondiales Canada pourraient s'efforcer d'accroître l'offre pour ce qui est de l'aspect du problème qui concerne les femmes entrepreneures, puis l'IFD pourrait être considérée comme une source de fonds pour financer ces nouvelles entrepreneures.
J'aimerais parler rapidement de la transparence. Puisque vous commencez à zéro, vous avez l'occasion d'être un chef de file mondial en ce qui a trait à la transparence des opérations de l'IFD. Toutes les autres IFD du monde s'en vont rapidement dans cette direction de toute façon, mais vous pouvez commencer avec une longueur d'avance. Cela signifie qu'il devrait être possible pour les citoyens canadiens de savoir là où vous avez investi, de comprendre la justification des investissements, de déterminer s'il y a des questions à poser au sujet des arrangements fiscaux liés à ces investissements, de pouvoir connaître la nature des arrangements fiscaux et de pouvoir cerner la propriété effective. C'est une chose délicate, parce qu'il y a parfois, peut-être, des raisons pour lesquelles une IFD n'est pas en mesure d'insister pour que l'identité de tous les propriétaires d'un investissement soit publique. Vous pouvez malgré tout trouver des façons de faire avancer les choses à cet égard. Vous pourriez peut-être faire une expérience et exiger la prestation des renseignements sur la propriété effective comme exigence de vos investissements.
La dernière chose que je veux mentionner avant de passer à la période de questions et de réponses, c'est l'avantage comparatif du Canada. Les données probantes révèlent que la vaste majorité des entreprises dans les États fragiles et où il y a des conflits sont exploitées par des membres de la diaspora qui reviennent au pays. Bien sûr, chaque pays a un avantage comparatif dans la mesure où il possède des liens avec les communautés de la diaspora dans ses frontières. C'est quelque chose que vous devriez envisager d'exploiter.
Je vais m'arrêter ici.
Merci, monsieur Carter, monsieur Maxwell et madame Noble.
Nous allons passer directement aux questions et réponses, en commençant par M. Allison.
Merci, et merci à nos témoins d'être là aujourd'hui.
Madame Noble, je vais commencer par vous. Vous avez parlé du fait que le mandat a changé à deux ou trois reprises dernièrement. Parlez-nous du processus de réflexion. Je comprends la question des gains à court terme et des gains à long terme et ce genre de choses. Pour une nouvelle IFD, le mandat est très important.
Parlez-vous de capitalisation. Vous savez, 300 millions de dollars ce n'est vraiment pas beaucoup. Vous travaillez dans le domaine depuis beaucoup plus longtemps. Devrait-on se tourner vers les marchés, ici, qu'on parle d'obligations ou de créances, quel que soit le cas? Devrait-on tenter d'obtenir plus de capitaux? Évidemment, plus de capitaux permettront d'avoir une incidence plus importante. J'ai aussi fait référence au commentaire de M. Maxwell sur le fait de donner ces fonds à plus d'organisations multilatérales, ce qui a pour effet d'atténuer l'impact qu'on a.
Comme je l'ai dit, 300 millions de dollars canadiens, ce n'est pas vraiment beaucoup sur une période de cinq ou six ans. Au bout du compte, si nous voulons avoir plus d'incidence, nous allons devoir trouver des façons d'aller chercher plus d'argent et pour découvrir — comme vous l'avez fait — des façons d'avoir, justement, un impact. Avez-vous des choses à nous dire à cet égard?
Les organisations d'investissement sont toujours composées de ce que j'appelle la Sainte Trinité des accords: il y a le marché ciblé — peu importe la stratégie choisie —, les gens et les fonds pour soutenir les activités. Il doit y avoir une uniformité. On a un choix. Plus on veut donner d'argent, plus les gens qu'on embauche doivent être ambitieux, et plus le marché ciblé est large, plus on peut faire de choses.
Il est probablement plus sage d'être relativement prudent au départ afin de voir comment vont les choses. Pour une nouvelle équipe, la pression d'investir, si je peux m'exprimer ainsi, peut être très lourde à porter. Personne au sein d'une organisation d'investissement de haute qualité ne veut se retrouver à la table du comité d'investissement et avoir l'impression qu'il faut faire quelque chose parce que l'influx n'est pas suffisant et il n'y a pas assez de choix. Il faut trouver un juste équilibre entre toutes ces choses.
Pour le dire très simplement, plus l'organisation reçoit d'argent au fil du temps, plus elle peut en faire et plus son impact est important.
Pouvez-vous nous parler rapidement de votre expérience au Royaume-Uni et de quelle façon a évolué le mandat changeant?
Je vais essayer de répondre brièvement, parce que c'est une longue histoire.
Le CDC a été créé en 1948. Son impact a été important, et l'organisation a acquis une excellente réputation de pionnier, particulièrement en Afrique. Si vous vous promenez en Afrique de nos jours, vous verrez des plantations, des institutions financières et des usines de ciment qui n'existeraient tout simplement pas sans CDC. Si on retourne en arrière, cependant jusqu'à la fin des années 1990, CDC était devenu une très grande organisation très peu commerciale. CDC faisait des investissements à très long terme, des plantations et des choses du genre.
Tony Blair et son équipe se sont penchés sur cette question et ont constaté qu'ils pouvaient assurément améliorer le caractère commercial de l'organisation et ont suggéré la création d'un PPP. Ils voulaient attirer des capitaux commerciaux en plus des capitaux du gouvernement. Le moment qu'ils ont choisi n'était vraiment pas le bon. On était tout juste après la crise asiatique, et toutes les sources de capitaux commerciaux ont examiné la situation de CDC et ont affirmé que son bilan était beaucoup trop risqué pour eux. Ils ont donc rejeté l'idée d'investir en partenariat avec le gouvernement.
Puisqu'ils ont mis en place une équipe de nature très commerciale pour réaliser le processus, cette équipe n'aimait pas le statu quo et a créé un plan B, qui consistait à séparer CDC en deux entités. Essentiellement, l'équipe nous a séparés en fonction des normes d'investissement privées. L'équipe a créé une nouvelle organisation d'investissement appelée Actis, qui, à partir de là, s'est accaparée quasiment tout le personnel et s'est occupée de tous les investissements directs. Il ne restait qu'un petit groupe de personnes dont le mandat continuait de miser sur la propriété publique et la prestation de capitaux à des fonds, y compris Actis. On avait aussi créé Aureos au sein de CDC. Durant la période de 2004 à 2011, tout ce que CDC a fait, c'est de soutenir le marché des capitaux privés dans les marchés émergents.
On a fait beaucoup de bien, même si, au fil du temps, ce modèle est devenu impopulaire, parce que les politiciens de l'époque estimaient qu'il ne mettait pas suffisamment l'accent sur le développement, du fait que les capitaux étaient donnés à des tierces parties qui prenaient les décisions d'investissement au nom de l'organisation. Par conséquent, il était peu probable, vu que ces administrateurs de fonds obtenaient aussi des capitaux de fonds commerciaux tiers, qu'ils allaient s'attaquer aux choses les plus difficiles.
En 2011, on m'a embauchée et on m'a demandé de continuer les activités de financement — parce que c'est un excellent domaine qui mise beaucoup sur le développement —, mais de recommencer à faire des investissements directs, et de recommencer à zéro, puisque CDC avait perdu son lien direct avec le marché. C'était le principal élément du mandat.
On m'a aussi demandé de limiter l'étalement géographique des marchés — plus de Chine, plus d'Amérique latine et plus d'Asie du Sud-Est — et de vraiment mettre l'accent sur les régions les plus pauvres du monde. Il s'agissait d'un important changement de mandat. Pour l'essentiel, le gouvernement estimait que CDC pouvait avoir un impact beaucoup plus important. C'est vraiment ce que nous avons tenté de faire au cours des cinq dernières années.
Merci, monsieur le président.
Merci à vous trois de nous avoir présenté vos observations ce matin.
Mme Noble a mentionné l'accent mis sur les pays les plus pauvres. Les témoins que le Comité a rencontrés la semaine dernière ont dit que l'IFD devait oeuvrer surtout dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire plutôt que dans les pays les plus pauvres. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec cette affirmation et j'aimerais savoir de quelle façon l'IFD pourrait améliorer son approche pour encourager le secteur privé à investir plus dans des pays plus vulnérables.
Je vous lance les questions à tous les trois.
Si vous me permettez, monsieur Sidhu, pour commencer, en ce qui a trait à CDC, vous devriez faire une recherche dans Google sur CDC — et je suis sûr que Diana ne m'en voudra pas de le dire — simplement pour voir à quel point les genres de décisions dont elle parle peuvent être controversées; c'est la raison pour laquelle il est si important de bénéficier de la protection politique dont elle a parlé.
CDC a été beaucoup critiqué, et ce, pour un certain nombre de raisons. Le niveau de rémunération des administrateurs de fonds était l'un de problèmes, mais il y avait aussi exactement l'enjeu sur lequel vous avez mis le doigt, c'est-à-dire la question de savoir où va l'argent. Dans certaines périodes antérieures, les fonds de CDC n'étaient pas destinés aux pays les plus pauvres — appelons-les comme ça —, y compris l'Inde et la Chine, et ce, de façon disproportionnée. De plus, l'argent était utilisé pour investir dans des choses qui ne semblaient pas vraiment à même de beaucoup réduire la pauvreté. Il y a eu un grand débat au Royaume-Uni quant à savoir si le fait d'investir dans des centres commerciaux en Afrique de l'Ouest — c'était au Nigéria, je crois — peut être comptabilisé comme un investissement visant à réduire la pauvreté ou non, même si une importante leçon tirée de cette expérience, c'est qu'on a besoin d'une stratégie d'investissement extrêmement claire qui est conforme au mandat général de la nouvelle politique de développement féministe au Canada, ce qui sera à même de définir tant les zones géographiques visées que le contenu sectoriel du programme.
Et là, Paddy a soulevé un point très important. Vu la quantité d'argent que vous avez à portée de main, vous n'allez pas être un détaillant, ou il est très peu probable que vous en soyez un, ou, si vous en êtes un, vous allez être un genre de grande ONG dans un contexte canadien.
Ce que les IFD ont à offrir dans un contexte où il y a de multiples donateurs et de multiples intervenants, c'est qu'elles envoient un appel à la vertu aux autres investisseurs possibles. Le fait que la nouvelle IFD a donné son sceau d'approbation à un programme signifie qu'il est approprié pour d'autres investisseurs de se joindre à la partie. Là où ce genre d'incitatif est particulièrement utile, c'est dans les pays les plus pauvres et dans les États fragilisés, parce que c'est dans de tels contextes que beaucoup d'investisseurs privés ont de la difficulté à obtenir l'information nécessaire et où les risques semblent, à tout le moins, être beaucoup plus élevés. Le fait d'avoir le sceau de l'IFD signifie qu'il semble possible pour d'autres joueurs de se joindre à la partie, que ce soit sous forme d'un copartenariat ou de mesures de financement mixtes.
Afin de s'acquitter de ce rôle, il faut connaître les marchés et il faut connaître les environnements politiques et sociaux où l'on travaille. Je crois qu'une des tâches les plus importantes des IFD — par l'intermédiaire de leurs travaux de vérification préalable, c'est de s'assurer que les projets sont solides et que les intermédiaires sont à la hauteur. C'est très difficile, et l'une des choses dont vous aurez besoin dans votre nouvelle IFD, c'est un groupe de personnes pouvant réaliser ce genre d'analyse.
Mon dernier conseil est le suivant: ne vous exposez pas à la critique selon laquelle votre nouvelle IFD investit seulement dans des casinos et des centres commerciaux de pays relativement riches. Ce n'est pas la raison pour laquelle le Canada veut une telle institution, et vous devez donc rédiger la stratégie d'investissement de façon à vous assurer que les fonds et les efforts et les activités de renseignement sont tels que vous les voulez.
Non, pas maintenant. Je vais laisser Diana répondre à cette question, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
Si vous me le permettez, j'ajouterais deux ou trois choses sur les pays les plus difficiles. D'une certaine façon, c'est quasiment devenu le domaine dans lequel CDC se spécialise au cours des six dernières années. En fait, nous avons un portefeuille qui met beaucoup plus l'accent sur les pays les plus difficiles que toute autre IFD. C'est pas mal ce que nous faisons depuis que nous nous y sommes mis, il y a six ans.
C'est difficile, cependant. Premièrement, il n'y a pas beaucoup d'occasions d'investissement appropriées immédiates dans ces pays. Prenons par exemple l'Éthiopie qui, en fait, n'est pas le pays le plus difficile, vraiment pas, où nous investissons. Au Royaume-Uni, il y a 10 000 entreprises affichant des recettes de plus de 50 millions de dollars. En Éthiopie, je crois qu'il y en a sept, et on ne peut donc pas tout de suite, en sortant de l'avion, dire « Quelle entreprise bien établie et relativement sécuritaire puis-je faire croître, ici? » L'autre chose, c'est que, quand on sort de l'avion, on constate que ce sont des environnements très difficiles. Il faut créer des réseaux de confiance et acquérir une réputation de façon à ce que les bonnes personnes viennent aussi vous voir, et c'est quelque chose qui prend du temps. C'est très facile, dans ces pays, de faire un faux pas, et une fois qu'on est embourbé, il n'y a pas de recours juridique non plus dans la plupart de ces pays. Il faut du temps.
De plus d'une façon, il est plus facile de travailler avec des entreprises établies pour les encourager à créer des entreprises dans ces endroits difficiles plutôt que d'essayer de bâtir à partir de ce qui est déjà là. Nous avons aussi eu beaucoup de succès de cette façon.
Je vais m'arrêter ici. C'est faisable, mais il faut beaucoup d'efforts. Dans le cas de bon nombre de nos investissements, il faut parfois une année ou deux après avoir cerné une occasion — quand un investissement est tout à fait inapproprié — pour en arriver à un point où on estime avoir assez bien arrangé les choses pour y investir de l'argent.
Des témoins précédents se sont aussi dits préoccupés par le fait que les IFD sont traitées davantage comme des agences d'aide que des investisseurs institutionnels. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette impression des témoins précédents. Jugez-vous aussi que c'est problématique?
En fait, je crois que c'est un commentaire qui a été formulé tantôt. Selon moi, les responsables des intervenants d'une IFD devraient considérer leur institution comme une organisation d'investissement de haute qualité. C'est une question terminologique, parce que si, essentiellement, l'entité appartient à un organisme d'aide, la terminologie est très différente de celle d'une organisation d'investissement de haute qualité. Les organismes d'aide et les organisations d'investissement travaillent de façons très différentes en ce qui a trait à la génération des occasions, la sélection et les mesures de contrôle permettant de vraiment avoir un impact. Ce sont des choses tout à fait différentes.
Assurément, je dirais, en tant que PDG d'une IFD, que c'est vraiment bénéfique lorsque les responsables de la gouvernance connaissent et comprennent vraiment le milieu de l'investissement.
Je peux peut-être formuler quelques commentaires, ici. J'aimerais parler de la question de savoir si vous reconnaissez ce que l'IFD fait au chapitre de l'aide publique au développement. Et là, les règles à cet égard ne sont pas encore coulées dans le béton. Naturellement, il peut y avoir un impératif politique d'essayer d'annoncer ou de déclarer le plus d'APD possible afin de s'approcher le plus possible de la cible de 0,7 %; c'est quelque chose que tout le monde veut faire, mais cela peut créer des problèmes.
Au Royaume-Uni, on a décidé de déclarer tous les fonds affectés à CDC comme de l'aide au moment où les fonds sont octroyés, 100 % des montants initiaux. C'est une option qui s'offre aussi à vous. Ce que cela signifie, cependant, c'est que, au Royaume-Uni, chaque livre attribuée à CDC à ce moment-là est une livre qui ne pourra pas être attribuée au budget d'aide publique du DFID, en raison du plafond des dépenses établi à 0,7 %. Cette situation a pour effet de changer l'attitude du reste des membres du milieu du développement à l'égard de l'institution de financement du développement, parce que, pour eux, l'argent qui va là, c'est de l'argent qui ne pourra pas être consacré ailleurs.
Il n'est pas nécessaire que les choses soient ainsi. Je ne sais pas de façon détaillée de quelle façon les comptes nationaux canadiens fonctionnent ni quels sont les chiffres importants du point de vue politique que les gens regardent, mais, au Royaume-Uni, l'argent affecté au CDC est comptabilisé comme étant des dépenses non budgétaires. Ces fonds ne viennent pas faire augmenter la dette nationale, parce qu'il y a un actif qui contrebalance l'emprunt que vous avez peut-être engagé pour financer le tout.
En principe, il n'y a aucune raison pour laquelle la quantité d'argent que vous décidez d'attribuer à votre IFD doit avoir une incidence sur la quantité d'argent que vous pouvez consacrer aux autres activités de développement du Canada. Faites cependant attention — c'est une possibilité — de ne pas créer implicitement ce lien par les décisions quelconques que vous prenez sur la façon de comptabiliser le financement comme de l'assistance. On pourrait faire valoir qu'il serait plus facile pour vous de ne pas essayer de comptabiliser tous les fonds que vous affectez à l'IFD comme de l'aide, mais je comprends que c'est un fait établi.
Pardonnez-moi. Merci.
Chers collègues, est-ce que les gens à l'autre bout de la ligne nous entendent lorsque nous parlons?
Une voix: Oui.
Le président: Nous allons passer au prochain député. Nous essayons de respecter une certaine structure. M. Sidhu a utilisé tout le temps qu'il avait en plus du temps de ses collègues.
Des députés: Ah, ah!
Le président: Je vais passer à M. Aubin, s'il vous plaît.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie nos invités de ce matin.
Comme je suis de la partie francophone de ce pays, je vais poser mes questions en français. Si jamais il y a un problème d'interprétation, n'hésitez pas à lever la main.
Ma première question s'adresse à vous, madame Noble, mais, messieurs Maxwell et Carter, sentez-vous bien à l'aise de faire des commentaires.
Dans une étude précédente, nous nous sommes penchés sur l'approche du Canada en aide internationale par pays ciblés, et le Royaume-Uni revenait souvent comme un modèle de pays ayant délibérément choisi d'atteindre l'objectif de 0,7 % en aide internationale. Ce fait a-t-il une quelconque incidence sur la capacité de votre institut à générer des revenus ou sur la recherche d'administrateurs?
Madame Noble, dans vos propos préliminaires, vous avez parlé du défi de recruter des administrateurs aux compétences reconnues, mais qui accepteraient de travailler à un salaire moindre. Pour votre institut, le fait que le pays soit un chef de file en matière d'aide internationale facilite-t-il ce recrutement et la collecte de fonds?
[Traduction]
Je crois que, en fait, vous avez posé deux questions: est-ce que le fait que le Royaume-Uni est un chef de file en matière d'aide nous aide à obtenir du financement, et si ce rôle de chef de file nous aide à attirer les bonnes personnes?
Bien sûr, les deux questions sont interreliées. Le fait que le Royaume-Uni possède un important budget d'APD a assurément un impact sur la quantité de capitaux que le gouvernement britannique veut donner à CDC. La seule question concerne la proportion du budget de l'APD que le gouvernement veut consacrer au développement du secteur privé et quelle proportion il veut consacrer à des activités d'aide. À nos yeux, les deux sont tout à fait complémentaires. Je ne dirais jamais qu'investir dans le développement du secteur privé peut remplacer les subventions en tant que telles ni que ces investissements sont mieux que les subventions. On a besoin des deux.
Pour ce qui est du fait d'attirer des gens de haute qualité, oui, bien sûr, les gens constatent que l'organisation croît. S'ils voient que l'organisation bénéficie d'un bon soutien politique et d'un réel soutien d'un intervenant quant à la direction choisie, alors des gens de haute qualité sont beaucoup plus susceptibles de prendre cette importante décision et de quitter le secteur privé pour travailler pour CDC et vraiment passer leur carrière ici.
Je crois que les deux sont complémentaires et cohérents.
[Français]
[Traduction]
J'aimerais dire très rapidement qu'une des choses qui se passent lorsqu'on met sur pied une IFD, c'est qu'on peut commencer à générer notre propre financement. Pendant de nombreuses années, CDC a été en mesure d'autofinancer beaucoup de nouveaux investissements parce qu'elle recevait des remboursements de prêt ou qu'elle vendait des parts. L'organisation a maintenant reçu un nouvel apport important de fonds, ce qui lui permet de croître plus rapidement.
Je voulais aussi vous dire de rejeter, s'il vous plaît, toutes les affirmations ridicules selon lesquelles l'IFD n'est pas une organisation de développement, parce que c'en est une. La nouvelle IFD doit être au service de l'impératif de développement général de l'aide canadienne.
[Français]
Ma deuxième question a trait aux investissements directs, et non aux fonds.
Lorsqu'un institut du financement du développement comme le vôtre ou d'autres que vous connaissez décide de faire des investissements directs dans des entreprises, est-il doté d'un code d'éthique qui l'empêcherait de soutenir des entreprises basées dans des paradis fiscaux?
[Traduction]
Nous utilisons des paradis fiscaux seulement lorsque nous investissons indirectement par l'intermédiaire de fonds en tant que mécanisme de mise en commun, parce que les investisseurs viennent de différents endroits et ont besoin d'un endroit neutre sur le plan fiscal où réunir leurs capitaux. Nous investissons, directement ou indirectement, en fonction d'un code strict de ce que nous appelons l'investissement responsable. Ce n'est pas seulement une question d'imposition. Cela inclut beaucoup de choses, comme la santé et la sécurité, l'environnement, les droits terriens et ainsi de suite. C'est extrêmement important. Ce doit être au coeur des activités des IFD. Les institutions ne doivent pas seulement fournir des capitaux au secteur privé en manque de capitaux des pays les plus pauvres, mais aussi fournir des normes et de l'expertise afin d'aider les entreprises à adhérer au bon genre de normes.
[Français]
[Traduction]
Il y a une distinction à faire. Y a-t-il des paradis fiscaux dans l'organisation entre les investisseurs et les entreprises sous-jacentes dans lesquelles vous investissez? Puis, séparément, est-ce que les entreprises sous-jacentes servent à une société multinationale à avoir recours aux paradis fiscaux dans le cadre de ses opérations?
Certains responsables d'IFD européennes à qui j'ai parlé commencent à adopter une position plus proactive envers le comportement des entreprises sous-jacentes et le fait qu'elles ont recours aux paradis fiscaux pour détourner des profits. Cela signifie qu'il faut investir dans un expert en fiscalité capable d'examiner une structure fiscale et de dire qu'elle semble louche même si elle est légale. C'est toute une zone grise. Ce ne sont pas toutes les IFD qui le font. Je suis conscient du fait qu'une ou deux IFD européennes ont maintenant pris l'initiative d'aller encore plus loin. Le fait de se demander si c'est légal ne leur suffit pas. C'est une chose que vous pourriez aussi envisager de demander à votre IFD.
[Français]
Merci beaucoup de votre présence.
Monsieur Carter, je vais commencer par vous, car j'ai lu un rapport que vous avez rédigé en octobre dernier, dans lequel vous distinguez très clairement deux sortes d'IFD. Vous avez mentionné CDC et ses réalisations en Sierra Leone, en collaboration avec la Standard Chartered Bank; on s'efforçait de s'assurer que les PME touchées par l'épidémie d'Ebola dans ce pays étaient financées et que la croissance reprenait. Vous avez parlé de l'OPIC, l'Overseas Private Investment Corporation, une IFD américaine, qui s'est intéressée à la sécurité nationale en Géorgie en 2008, où elle a stabilisé le marché résidentiel et commercial.
Vous avez cerné deux utilisations distinctes des IFD. Si on examine notre orientation stratégique, comment devrions-nous harmoniser notre sécurité nationale et nos intérêts humanitaires? Qu'est-ce qui devrait avoir préséance? Quels paramètres devrions-nous examiner? Si vous avez des commentaires généraux à formuler, cela m'intéresserait de les entendre.
Je crains devoir commencer par admettre que les sections de l'article que vous avez lu doivent avoir été rédigées par mes coauteurs. Ce n'est pas moi qui étais chargé de le faire.
À juste titre, énormément de gens demandent quel rôle les IFD peuvent jouer afin de stabiliser les situations où il y a de très grandes populations de réfugiés et des sources d'instabilité. À part donner une réponse générale en disant que l'une des choses que vous pourriez demander à votre IFD de faire dans ce type de situation, c'est d'examiner les possibilités de créer des entreprises, je ne crois pas qu'une harmonisation plus rigoureuse soit nécessaire.
Je déduis de votre question que les États-Unis ont eu l'impression qu'il avait un intérêt stratégique particulier concernant la Géorgie. Si le Canada a l'impression d'avoir des intérêts stratégiques particuliers concernant des territoires spécifiques, on pourrait demander à l'IFD d'examiner s'il y a des possibilités à ces endroits précis. Toutefois, vous devez vous rappeler que, encore une fois, les IFD ne peuvent pas créer de possibilités d'investissement.
J'ai su que d'autres IFD se sont plaintes du fait qu'on leur a demandé d'agir au chapitre des crises de réfugiés ou de l'instabilité, et elles ont conclu qu'elles ne pouvaient pas faire grand-chose. Le responsable d'une IFD m'a même dit que l'organisme subit parfois des pressions pour inventer une histoire selon laquelle elle a fait quelque chose d'utile, alors que ce n'est pas vraiment le cas. Ce n'est qu'une mise en garde concernant ce que l'on peut attendre d'une IFD dans ce type de situations.
D'accord.
La deuxième chose que j'aimerais souligner, c'est qu'avec les IFD, on a une possibilité, sur le plan du modèle de projet, de décider du résultat en matière d'emplois, d'investissements et de climat social, mais il semble y avoir un problème lié au fait d'évaluer de quelle façon elles contribuent à l'ensemble du système d'entraide mondiale, plus particulièrement pour ce qui est de tracer la voie à suivre relativement aux objectifs de développement durable pour 2030. Y a-t-il une meilleure façon d'évaluer leur contribution afin que l'on s'assure que le projet s'harmonise avec une orientation plus générale?
Vous mettez le doigt sur une question terriblement difficile parce que, partout ailleurs dans le monde en développement, tous s'attendent avec raison à ce que l'on soit rigoureux quant aux retombées, mais, partout ailleurs, on fait des choses en essayant d'avoir un effet plutôt défini sur un groupe de personnes plutôt défini. Par exemple, si on ouvre une clinique dans une région qui n'en avait aucune avant, on devrait s'attendre à pouvoir constater que la santé des personnes qui y habitent s'améliore. Le domaine de l'investissement est très différent. Il est très rare qu'on ait un groupe de personnes bien défini pour lequel on peut s'attendre à être en mesure d'évaluer les avantages, car les économies sont intégrées. Si on ouvre un nouveau restaurant à Toronto, une série d'événements peut faire en sorte que quelqu'un à Ottawa obtient un emploi qu'il n'aurait pas pu avoir avant.
Dans un modèle économique simple — ce n'est pas réaliste, mais ce n'est pas un mauvais point de départ —, le fait d'ajouter un investissement à l'économie fait légèrement augmenter les salaires dans l'économie entière. C'est très difficile pour quiconque d'évaluer la contribution des IFD au développement durable. Je crois qu'aucune personne sensée ne doute du fait qu'il faut accumuler des investissements pour qu'un pays pauvre et non productif devienne riche et productif. On sait que la seule façon de cesser d'être pauvre, c'est d'accumuler les investissements, et je crois donc qu'on peut être certain qu'une IFD contribue aux objectifs de développement durable, mais il demeure difficile de trouver la façon d'évaluer et de préciser cette contribution.
Pour le moment, toutes les IFD ont recours à ce qu'on appelle... et j'ai noté l'acronyme. Elles se sont entendues afin d'harmoniser un ensemble d'indicateurs, lequel pourrait être délicat à adopter pour une IFD canadienne, à mon avis. Toutefois, trouver des façons de saisir la portée de leur contribution à la transformation des économies dans lesquelles elles investissent fait actuellement l'objet d'un débat très animé au sein de toutes les IFD.
J'ai une dernière question pour Mme Noble.
Lorsqu'on examine CDC, comme vous l'avez mentionné, deux éléments ressortaient. L'un était le fait d'investir dans un modèle de « fonds de fonds », dans le cadre duquel le taux de rendement était très élevé, puis, l'orientation a changé, et le taux a chuté très bas. Je crois que le taux de rendement que vous visez généralement tourne autour de 7 à 8 %. Ai-je raison?
Essentiellement, je me demande si vous avez déterminé un taux de rendement, si vous visez un chiffre approximatif. Il ne sera pas toujours précis, mais, de façon générale, en avez-vous un? Ce n'est que pour nous donner une idée des chiffres auxquels nous devrions nous attendre au moment d'investir à certains endroits.
Nous avons un seuil minimal qui est lié à notre schème de rémunération à long terme, et que nous ne voulons donc pas trop traiter à la légère. Si quelqu'un ne se fait pas payer, il ne restera pas.
Le minimum que nous souhaitons atteindre sur un horizon de 10 ans est 3,5 %, mais nous souhaitons manifestement obtenir davantage, probablement de 5 à 7 %. Ces choses sont très difficiles à prédire, et s'il faut être précis, c'est ce que je dirais.
Nous avons passé en revue nos rendements passés, entente par entente, et, bien sûr, la répartition va dans tous les sens. Cela dépend autant du taux d'échec, du nombre de personnes qui, en réalité, perdent tout leur argent, que de la façon d'organiser chaque entente et les attentes relatives à celle-ci.
Merci à tous de vos conseils très clairs. C'est très bien.
Dans toute chose, c'est la loi des conséquences inattendues qui prévaut, et le gouvernement a mis l'accent, à juste titre, selon moi, sur ses points de vue féministes.
Monsieur Carter, si vous permettez, vous avez parlé de certaines capacités ou notions limitées, en disant qu'elles ne mènent pas très loin. Je me demandais si vous pouviez préciser votre pensée à ce sujet.
Je crois que l'une des difficultés réside dans le fait qu'on pense en matière d'ententes assez importantes dans lesquelles une IFD peut investir directement. Dans ce cas, dans n'importe quel pays, à n'importe quel moment, on peut compter ces occasions sur les doigts d'une seule main. Si ce n'est pas le cas, pensons-nous davantage aux microentreprises, aux entreprises qui ont une poignée d'employés et qui cherchent à prendre de l'expansion? En ce qui concerne les microentreprises, il est plus facile de croire qu'il y a des régions dans le monde où il y a un sous-financement, et qu'il y a de petites, ou jusqu'à un certain point, de moyennes possibilités d'investissement, sans que ce soit nécessairement par l'intermédiaire d'une banque ou d'un fonds d'actions privé.
Si vous observez le tout, il y a une incroyable diversité de modèles d'affaires, certains presque sans but lucratif, qui comportent des éléments commerciaux ciblant les PME. Ce sont des organisations qu'une IFD pourrait appuyer. Il est plausible de penser que, si nous investissons plus d'argent, des dirigeantes d'entreprises chercheront à en obtenir, et nous pouvons préciser que nous voulons les cibler au moyen de ce fonds. Elles seront en mesure de trouver des investisseurs, et cela fonctionnera bien.
C'est plutôt lorsqu'on pense aux propositions plus importantes... et il y en a un nombre limité. Un représentant d'IFD m'a dit que, dès que ses actionnaires ont commencé à lui fixer des objectifs — « nous voulons que vous concluiez ce type d'entente » —, ils ont commencé à en éliminer qui ne leur satisfaisaient pas, mais sans en ajouter d'autres qui leur conviendraient.
Il ne serait pas juste de résumer en disant que vous voulez conclure des ententes plus importantes, que la question des femmes peut devoir être mise de côté pour l'instant, et que, si l'on souhaite conclure des microententes, c'est plus facile à faire que d'atteindre les objectifs concernant les femmes. Est-ce une bonne façon de résumer?
Je crois que c'est une bonne façon, si on présume qu'on a déjà fait tout en notre pouvoir pour conclure des ententes d'investissement auprès de dirigeantes à grande échelle, lorsque l'occasion se présente.
Vous avez fait un deuxième commentaire que je n'ai pas bien compris concernant le retour de la diaspora, juste à la fin de votre commentaire. Nous avons de très grandes diasporas dans notre pays qui représentent un énorme avantage pour nous. Que voulez-vous dire par le « retour de la diaspora »?
J'examinais une partie d'une recherche qui a été faite dans des pays comme le Soudan du Sud, la Somalie et la Sierra Leone. On a approché toutes les entreprises possibles pour leur demander où elles avaient obtenu leurs fonds et qui elles embauchaient. L'un des faits que cela a révélés, c'est qu'un très grand pourcentage d'entre elles étaient dirigées par des personnes qui revenaient des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France ou du Canada. Elles revenaient dans leur pays de naissance pour y fonder une entreprise.
Selon ma compréhension du modèle d'IFD, il pourrait s'agir d'une chose avec laquelle une IFD pourrait interagir directement. Il y a peut-être d'autres parties du secteur du développement, comme des ONG partenaires avec lesquels l'IFD pourrait collaborer, afin de tirer profit du potentiel des personnes qui sont venues au Canada, qui voient la possibilité d'y retourner et de fonder une entreprise et d'obtenir l'argent pour le faire. Ce n'est que l'un de vos avantages. Vous avez cette grande communauté dont vous pouvez tirer profit.
Merci de le dire. C'est une observation intéressante. La circonscription que je représente comprend des gens d'à peu près tous les groupes de population connus. Je n'oublierai pas ce bon conseil.
Ma dernière question s'adresse à Mme Noble.
Vous avez parlé d'interférence politique ou de couverture politique. Tous les politiciens ont un programme à court terme. Je ne sais pas exactement quel est le programme à court terme des Britanniques, étant donné votre climat politique actuel, mais comment se fait-il que, par sa structure, votre organisme soit inoculé contre les impératifs des programmes à court terme, voire des programmes qui peuvent même se contredire?
Il y a deux choses. Il y a la structure de gouvernance, mais il y a aussi l'investissement dans les relations. Je vais d'abord parler de cela.
Aucune structure de gouvernance ne réussira à vous protéger si vous n'allez pas sur le terrain pour expliquer aux gens importants ce que vous faites et pourquoi vous le faites. J'ai un excellent exemple à vous donner: le projet de loi en faveur du nouveau capital de CDC a suscité, avec raison, beaucoup d'intérêt au cours de l'année qui vient de s'écouler. C'est uniquement parce que nous connaissons beaucoup de gens; nous avions expliqué ce que nous faisions, et les gens étaient nombreux à apprécier ce que nous faisions et le fait que nous nous en soyons tirés intacts. Dans une institution comme celle-là, ce n'est même pas la peine d'essayer de se faire des amis si on est déjà sur la défensive. Investir dans les relations, franchement, c'est important pour les deux parties.
La structure de gouvernance a de toute évidence elle aussi son utilité. Depuis les 20 ou 30 dernières années, à coup sûr, la structure de gouvernance du CDC n'a à peu près pas changé. Nous avons un actionnaire — le gouvernement britannique —, mais il a délégué ses responsabilités à un conseil d'administration indépendant. Il n'est pas représenté, à ce conseil, ni au comité des investissements; il ne participe donc pas aux décisions touchant les investissements. Les membres du conseil d'administration se considèrent comme les seuls responsables des activités, et ils s'assurent que l'équipe de la direction, dont je fais moi-même partie, s'acquitte de son mandat et met en oeuvre notre stratégie le mieux possible.
C'est en fait le conseil d'administration qui joue un rôle supplémentaire d'intermédiaire, si je puis m'exprimer ainsi, entre les besoins de la direction, qui doit assurer sa continuité pour que les choses puissent se passer, et les discussions qui ont lieu avec le gouvernement et des politiciens, lesquels peuvent suivre un programme à court terme. Le conseil est en mesure d'expliquer que, même si les suggestions des politiciens semblent pleines de bon sens sur papier, elles ne respectent pas nécessairement au mieux les intérêts du Royaume-Uni ou de l'institution.
Pour finir, M. Carter et M. Maxwell ont cherché à savoir si les investissements dans une IFD constituaient ou non une aide. À titre de présidente et directrice générale de cette organisation, vous êtes bien placée pour répondre à la question: est-il important que cet investissement soit compté dans le 0,7 %?
Ma question s'adresse à Mme Noble.
Les choses étaient différentes avant que l'on passe d'un système où chacun de nos investissements et chacune de nos recettes étaient comptabilisés à un système où le seul chiffre important est inscrit au moment où nous recevons du capital. Comme le Royaume-Uni a fixé une cible de 0,7 % par année, vous vous imaginez à quel point il était difficile pour nos actionnaires et pour nous-mêmes, en décembre, de fournir des chiffres exacts, alors que nous faisons énormément d'investissements, sur lesquels, bien souvent, nous n'exerçons aucun contrôle, et que nous recevons énormément de recettes, sur lesquelles, encore une fois, nous n'exerçons pas toujours de contrôle. Le mois de décembre a fini par représenter une période d'incroyable tension entre nous et nos actionnaires, qui s'attendaient à ce que l'on gère le tout, alors que, dans bien des cas, ce n'était pas gérable.
Le passage à un système dans lequel l'APD n'est comptabilisée qu'au moment où nous touchons le capital a été très bénéfique pour nous. Nous avons adopté une politique très méticuleuse sur la question des liquidités, et nous n'acceptons pas de capital si nous n'avons pas l'intention de l'investir avant un certain temps. Nous ne voulons pas prendre du capital sans rien n'en faire, alors que d'autres personnes pourraient s'en servir. C'est vraiment important pour nous, et je dois avouer que notre mode de fonctionnement actuel est bien plus gérable.
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins.
Je n'aime vraiment pas l'idée que le gouvernement s'immisce dans des domaines dans lesquels le secteur privé peut être bien plus efficace. Nous observons depuis une vingtaine d'années que le secteur privé prend de plus en plus de place, dans ce secteur.
Vous avez parlé d'aider les entrepreneures, je dis bien les femmes entrepreneures. Peu importe en fait que ce soit des femmes ou des hommes, les entrepreneurs qui ont de vraiment bonnes idées, des idées brillantes, vont trouver du soutien dans le secteur privé.
Je regarde vos chiffres, ici, et je vois que vous avez déjà affiché un rendement de près de 8 %, alors qu'aujourd'hui il n'est plus que d'un peu plus de 2 %. Je crois que c'était en raison du fait que les entreprises privées découvrent avant vous ces bonnes idées et qu'elles les soutiennent, ce qui fait que le gouvernement n'a accès qu'aux deuxième ou troisième choix, ce qui expliquerait la baisse de son rendement.
Je ne suis pas certain que le gouvernement devrait s'occuper de cela; alors, ne pensez-vous pas que les entreprises du secteur privé mettent la main avant vous sur le meilleur des projets et vous supplantent dans ce secteur d'activités, actuellement? Notre activité dans ce secteur peut sembler contradictoire. Soit il s'agit de faire de l'argent, et nous devrions à ce moment-là le faire en tant qu'entreprise privée, soit il s'agit d'aide internationale, et il faudrait considérer cette activité strictement sous cet angle. Si, selon votre mandat, vous jouez sur les deux plans, je ne sais pas comment vous faites.
Pourriez-vous parler un peu de ce qui se passe du côté des entreprises privées? Est-ce que c'est ce qu'elles font? Est-ce qu'elles obtiennent un meilleur rendement parce qu'elles coiffent le gouvernement au poteau? Est-ce que le gouvernement voit son rendement baisser parce qu'il n'a plus accès aux meilleurs projets?
Vous avez brossé un tableau assez fidèle, et c'est une bonne nouvelle; nous voulons tous que ça se passe ainsi, que le secteur privé finisse pas supplanter les IFD. Nous serons au septième ciel quand ce sera le cas. Toutefois, il reste qu'il existe toujours un immense écart, et que les IFD restent nécessaires, cela ne fait aucun doute. Il est vrai que nous devrions avoir des lignes directrices sur l'additionnalité, comme nous le disons, selon lesquelles, chaque fois que nous faisons un investissement, nous devrions pouvoir le justifier et montrer que nous faisons quelque chose que le secteur privé ne ferait pas. C'est vraiment important. Dans le cas du Canada, ces lignes directrices doivent être strictement appliquées, quand on y pense.
Parlons maintenant de la dette à long terme de l'Afrique. Les banques commerciales n'y touchent pas. Les banques locales non plus. C'est l'affaire des IFD, qui répondent à un besoin évident et comblent un écart immense. Les investisseurs commerciaux n'investissent pas dans les petites entreprises et ils n'établissent pas de normes touchant l'environnement ou la société... j'en ai déjà parlé.
Notre rôle est certainement de plus en plus difficile, et c'est parfait comme ça, à mon avis. C'est en raison de cette pression nécessaire que nous nous rendons, par exemple, en Éthiopie, où il n'y a pas suffisamment de grandes entreprises, et nous misons sur des débouchés qui ne donneront rien avant un an ou deux.
Je peux vous dire que les responsables de vos gros fonds de pension n'investiraient même pas, en deux ans, en Éthiopie ou en RDC. Ils n'auraient pas avancé du capital, en même temps que la Standard Chartered Bank pendant la crise de l'Ebola. Personne n'investissait au Sierra Leone pendant la crise de l'Ebola, sauf des IFD comme la nôtre.
Il est évident qu'il y a un écart. Est-ce que c'est difficile? Oui, c'est difficile. Est-il difficile de réaliser un rendement? C'est pour cette raison que les responsables doivent être des gens formidables; mais le rôle lui-même reste toujours important.
Nous vivons dans un monde de marchés déficients. Si les marchés étaient parfaits, nous n'aurions probablement pas besoin d'organisations comme votre IFD ou comme le CDC. Cependant, il y a des lacunes au chapitre de l'information, des malentendus quant au risque et un manque de coordination, dans les marchés; les IFD aident à combler ces lacunes.
Un des problèmes, c'est que nous vivons dans un monde où la technologie évolue très rapidement. Dans le secteur des énergies renouvelables, par exemple, le prix de l'énergie solaire a baissé de plus de 90 % en cinq ans environ. Ce sont les premiers investisseurs, qui peuvent souvent compter sur le soutien de l'État, qui ont pu ainsi créer le marché et élaborer le cadre réglementaire grâce auquel les investisseurs de la deuxième vague peuvent à leur tour intervenir et faire un profit supérieur. Je ne suis donc pas en désaccord avec ce que Diana a dit, mais je crois qu'en fait, les IFD ont un rôle de pionnier à jouer dans les secteurs où les marchés sont souvent déficients et où les technologies sont omniprésentes.
L'un des grands avantages des IFD de propriété publique, c'est qu'elles peuvent travailler avec d'autres volets du programme d'aide. Je ne veux pas dire par là qu'il y a, d'une part, le programme d'aide et d'autre part, une IFD qui travaille de façon tout à fait indépendante. Voyez-vous, quand nous parlons de construire le secteur privé, de composer avec les contraintes réglementaires, de construire l'infrastructure dont ont besoin les entrepreneurs privés et de créer une autre génération d'entreprises digne d'intérêts pour les investisseurs, la collaboration entre une IFD et les autres volets du programme d'aide peut se révéler particulièrement précieuse.
Merci à vous tous d'avoir bien voulu discuter avec nous ce matin.
Ma question fait suite à vos derniers commentaires, monsieur, en fait.
Le gouvernement a assez clairement exposé ses priorités quant aux objectifs du développement, et je crois même qu'il a récemment déclaré, en s'attachant à l'émancipation économique des femmes et à la réduction de la pauvreté, qu'il mettait l'accent sur les femmes et les filles et aussi sur la croissance économique, la création d'emplois, des choses du même genre.
En ce qui a trait à l'accent mis sur les femmes, nous avons reçu des témoins, la semaine dernière, et il a été question de savoir s'il existait un mécanisme approprié, à un échelon modeste, grâce auquel on pourrait demander à une IFD de traiter en priorité des projets visant à émanciper et habiliter les femmes entrepreneures, les femmes de la région qui agissent sur le terrain. Selon certains, il faudrait craindre qu'une orientation trop stricte ne crée un obstacle artificiel à la réussite de ce type de projet; de toute évidence, c'est l'aspect lié au marché qui en assure la réussite.
Y a-t-il, peut-être dans l'exemple britannique, une petite orientation concernant ce type de priorité? Encore une fois, est-ce que les objectifs de développement conviennent aux IFD? Ces choses-là ne se passent pas en vase clos. Que pensez-vous de la possibilité qu'il y ait jusqu'à un certain point un accent sur cette priorité? Est-ce que cela pourrait constituer un obstacle? Si vous êtes d'accord avec cette idée, à quel niveau serait-il approprié que l'orientation soit donnée? J'aimerais tout simplement qu'on discute de la question.
Je vais commencer, mais vous allez voir, dès que j'aurai commencé, Diana va vouloir compléter ma pensée. À mon avis, le CDC dispose d'un excellent moyen d'évaluer ses décisions touchant des investissements, un moyen dont la grande qualité est la simplicité. Il dispose de ce qu'on appelle une grille. Vous pouvez chercher sur Google, vous verrez bien. Les investissements sont sélectionnés en fonction de seulement deux critères. Premièrement, jusqu'à quel point la situation de la région où les investissements vont être faits est-elle difficile? Deuxièmement, les investissements sont-ils générateurs d'emplois, c'est-à-dire combien d'emplois vont-ils permettre de créer? Les responsables vont donc situer chaque investissement sur cette grille et calculer ce que ça donnera au bout d'un an. Ils peuvent dire par exemple: « nos investissements moyens étaient de 4,2, cette année. »
Imaginez que votre IFD dispose d'un mécanisme simple pour l'évaluation de ses possibilités d'investissement, un mécanisme qui mesurerait, entre autres dimensions, les projets contribuant à l'émancipation des femmes. Toutefois, comme il ne s'agit pas de la seule dimension à mesurer, lorsqu'il se présente d'autres projets, qui ne sont pas nécessairement dirigés par des femmes, qui sont bien cotés au regard des autres dimensions, vous choisirez ces autres projets. C'est en quelque sorte un moyen de récompenser et d'encourager un certain style d'investissement sans être trop prescriptif, sans dire voici la cible à atteindre, voici de quoi il faut que ça ait l'air. C'est peut-être une façon prometteuse de voir les choses.
Permettez-moi d'intervenir avant que Diana ne termine.
C'est un instrument parmi tant d'autres. La dernière fois que j'ai consulté les documents sur le travail du ministère du Développement international dans le secteur privé, j'ai vu qu'il y avait quelque chose comme 30 ou 40 différents instruments possibles, certains importants, d'autres plus modestes. Un grand nombre de grosses entreprises essaient d'examiner leurs chaînes d'approvisionnement, par exemple, ou leurs réseaux de distribution afin de créer des débouchés pour les femmes, par ces moyens.
Coca-Cola, par exemple, cherche des moyens de faire participer les femmes entrepreneures au commerce des denrées au dernier maillon. Le ministère du Développement international propose des subventions monétaires pour ce type de programmes, qui sont assez nombreux et assez diversifiés dans le secteur alimentaire. Il y a du travail à faire dans le secteur de la fabrication. Il se fait déjà des choses, comme je viens de le dire, chez Coca-Cola et dans d'autres entreprises.
Diana voudrait peut-être répondre à la question de savoir quelle est la valeur ajoutée qu'apporte une IFD au-delà de ces financements-défis? C'est probablement — je m'exprime en son nom — l'engagement à long terme et les investissements à long terme dont elle parlait plus tôt. Cela confirme le fait que les IFD doivent être considérées comme un outil parmi tant d'autres, quand il s'agit d'aider les femmes entrepreneures à faire des affaires.
Je crois que c'est faisable. C'est plus facile, évidemment, lorsque l'investissement n'est pas très élevé. Nous investissons chaque année entre 1 milliard et 1,5 milliard de dollars dans une région relativement petite. Si toutes les entreprises dans lesquelles nous investissons devaient respecter certaines normes, ça serait beaucoup plus compliqué.
Dans votre cas, avec un petit capital, il vous est tout à fait possible de faire certaines choses. C'est en quelque sorte une échelle mobile. La chose la plus facile à faire, c'est d'intégrer à votre processus de diligence raisonnable un mécanisme qui vous empêche de faire des investissements qui seraient discriminatoires à l'égard des femmes. Ce serait le point de départ. Ensuite, vous pourriez encourager votre équipe à faire des investissements qui seraient d'une certaine façon avantageux pour les femmes, mais sans l'exiger. L'idée que les femmes dirigent plaît à tout le monde, mais il ne faut pas que les femmes gestionnaires soient proportionnellement plus nombreuses qu'il ne le faut, dans un secteur. Il pourrait s'agir d'employer davantage de femmes. Il pourrait s'agir d'embaucher davantage de femmes dans les chaînes d'approvisionnement, ou de réduire le nombre de consommateurs...
Un des investissements les plus fructueux que nous ayons faits, dans le passé, c'était pour Celtel. Quand nous avons fait nos premiers investissements, il s'agissait de fournir la téléphonie mobile à l'Afrique. Tout le monde pensait que c'était un article de luxe pour les gens d'affaires et que ce serait un minuscule marché. Voyez ce qu'il en est aujourd'hui. L'une des principales retombées concerne le réseau des vendeurs de temps d'antenne, qui sont dans une grande proportion des femmes. C'est pour elles un débouché économique.
Je vous encouragerais à ouvrir votre esprit quand vous pensez à la façon dont une entreprise peut améliorer la vie des gens. Ce n'est pas nécessairement évident.
Merci beaucoup.
J'aimerais prendre un instant et poser une question à laquelle je crois que nous avons tous pensé. En 2010, lorsque le Royaume-Uni a fait un examen, en réaction à quelques critiques selon lesquelles vous vous étiez écartés de votre chemin et vous ne vouliez plus prendre des risques, comme certains de mes collègues l'ont laissé entendre ce matin, vous avez commencé à vous concentrer sur les affaires. Je lisais récemment les commentaires de l'honorable Andrew Mitchell, qui était à ce moment-là le ministre responsable. Il disait que le CDC viserait l'optimisation du développement, non pas l'optimisation des profits, que cette entreprise se ferait plus audacieuse et d'avant-garde, dans son approche à l'innovation et au risque.
J'aimerais que vous commentiez la chose. Est-ce que le CDC est vraiment un chef de file, pour les autres pays, et son approche en matière d'innovation et de risque est-elle d'avant-garde? Il me semble que ces organisations, une fois sur leur lancée, ont de moins en moins peur du risque.
Si l'organisation que nous voulons créer n'est pas en mesure de gérer le risque, nous ne pourrons pas réaliser le mandat que les politiciens demandent, c'est-à-dire d'aller dans les pays les plus pauvres et de travailler avec les gens les plus pauvres, qui se trouvent être des femmes et des enfants, en général. C'est l'argument du programme féministe, selon lequel dans les pays les plus pauvres, ce sont les femmes qui sont les plus pauvres. Elles ne vont pas à l'école. On leur donne généralement à faire des tâches manuelles, et ça continue comme ça.
Il y a deux aspects selon notre comité. Y a-t-il dans le monde des endroits où l'accent est mis sur la gestion ou sur la prise de risques? Bien sûr, les politiciens sont eux-mêmes prudents, face au risque, parce que l'opposition pourra toujours leur dire: « voyez combien d'argent vous avez perdu, dans cette organisation, parce que vous avez pris un risque trop élevé. »
Si le monde des affaires ne veut pas aller dans les pays les plus pauvres parmi les pauvres, et que le gouvernement croit à l'aide publique au développement et à toute cette initiative d'aide au développement, nous devons trouver un moyen de discuter, d'être transparents et responsables, et nous assurer que le pays et ses citoyens soutiennent le risque qu'une organisation comme celle-là est autorisée à prendre.
J'aimerais que vous nous disiez si, depuis le changement du mandat, en 2010, les politiciens et les citoyens du Royaume-Uni discutent davantage du risque et de l'importance du risque, puisque le risque suppose que vos résultats, en pourcentage, vont baisser. J'aimerais beaucoup savoir ce que vous en pensez, vu que toutes les organisations — et cela fait 20 ans que je suis en politique — commencent en acceptant un risque assez élevé, mais que, plus le temps avance, plus le gouvernement ou la bureaucratie recule et renonce au risque.
Il existe au Canada une Banque fédérale de développement dont nous étions très fiers, mais son mandat a été modifié, et elle n'intervient plus dans les régions rurales comme la mienne. C'est maintenant une banque comme toutes les autres, mais lorsqu'on l'a créée, c'était pour qu'elle prenne des risques là où les banques refusaient de le faire, dans les régions rurales du Canada. C'est un simple exemple.
Ça se passe à peu près ainsi dans le cas qui nous occupe. En tant que politicien, je dois m'assurer que mes amis du Parti conservateur et du NPD acceptent le risque et qu'ils ne tomberont pas sur le dos des parlementaires en raison des risques que nous voudrions prendre. C'est une question qui m'intéresse beaucoup. Je crois que c'est important, étant donné que la ministre vient d'annoncer notre politique féministe, selon laquelle dans les 30 pays auxquels nous nous intéressons, le risque sera exceptionnellement plus élevé, parce que ce sont des pays pauvres et que les femmes sont concernées. J'aimerais beaucoup connaître votre opinion à ce sujet.
Madame Noble, voulez-vous commencer ou préféreriez-vous le faire plus tard?
Non, je veux bien commencer.
Oui, vous décrivez ce que nous appelons la paranoïa perpétuelle des dirigeants d'une IFD. Je dirais que les intervenants pensent aux retombées, toujours aux retombées. Ils ne pensent pas en premier lieu au risque qu'il faut assumer pour obtenir ces retombées. Je crois, pour cette raison, que votre question est très judicieuse, parce que les choses sont beaucoup plus faciles pour l'institution si ses intervenants comprennent les risques qu'il faut prendre pour obtenir ces retombées. Le risque n'est pas seulement lié à un faible rendement financier ou à des pertes, il est aussi lié à la réputation.
Nous savons que nous travaillons avec les mauvaises personnes, qui font de mauvaises choses, et nous savons aussi que dans les pays où nous travaillons, c'est la plupart du temps ce qui se passe. Nous savons qu'au Royaume-Uni, les gens sont incroyablement peu disposés à accepter le risque.
Comment pouvons-nous gérer ça? Je crois qu'il y a deux choses. Comme je l'ai déjà dit, il est important d'embaucher des gens qui ont le sens du commerce, des gens qui peuvent évaluer une situation et comprendre le risque qu'ils prennent, l'atténuer, le structurer, et qui peuvent également dire non. Il y a énormément de gens ici, au CDC, qui ont le sens du commerce et travaillent dur, pour cette raison, et qui peuvent refuser de faire quelque chose parce que les risques sont trop élevés.
À titre d'exemple de ce soutien, nous n'établissons pas de cible annuelle touchant le volume, parce que nous voulons toujours pouvoir dire non et ne pas nous sentir obligés de faire de mauvais investissements. C'est incroyablement important.
Ensuite, en plus des gens, il faut établir d'excellents processus touchant le risque. Nous avons un comité du risque. Nous avons une structure de risque. Nous travaillons à partir de la base. Nous en parlons beaucoup. Le risque, c'est notre affaire, et nous devons bien faire les choses.
Il y a une façon très simple de voir les choses: prendre les moyens de diversifier le risque dans votre propre portefeuille, étant donné que vous avez toutes sortes d'investissements différents. Une petite entité, par exemple, peut faire face au risque en ayant toute une brochette de tout petits investissements, de façon à ne pas tout perdre en même temps, puisque, si vous faites de gros investissements, votre exposition au risque est de toute évidence beaucoup plus importante.
Je ne devrais peut-être pas mentionner son nom, mais il y a eu une petite IFD européenne qui s'était fait dire de prendre davantage de risques et de faire davantage d'affaires dans les endroits difficiles. Elle a perdu une somme énorme. Les responsables ont dit à leur gouvernement qu'ils avaient besoin de plus d'argent. Les politiciens leur ont répondu: « que faites-vous? Vous n'êtes pas censés perdre de l'argent. » Et des choses comme ça risquent vraiment d'arriver.
Dans le cas où, en réalité, une IFD du Canada n'a pas vraiment le goût de prendre des risques, elle devrait peut-être se tourner vers les partenariats. Par exemple, il y a un peu partout dans le monde, aujourd'hui, une dizaine d'universités et d'entreprises en démarrage qui travaillent à petite échelle à des technologies de dessalement à faible coût. C'est un investissement idéal pour une IFD, et ce serait fantastique, pour le monde entier, qu'elle découvre laquelle de ces technologies fonctionne. Vous pourriez chercher à commercialiser une dizaine de technologies de ce genre, et si vous faisiez tout cela, vous risqueriez probablement, à l'échelle du portefeuille, de perdre beaucoup d'argent.
Il se peut cependant que la Fondation Bill & Melinda Gates soit très impatiente de voir arriver ce type de technologie de dessalement, et elle pourrait offrir du capital de risque de dernier rang; en conséquence, si les choses tournent mal, ce n'est pas vous qui essuyez toutes les pertes. Si vous cherchez des moyens de réaliser des projets plus risqués, sans demander à une entité relativement trop petite de prendre trop de risques, la façon de faire consisterait à trouver des gens avec qui travailler, des gens capables d'avancer de l'argent pour vous aider.
J'ai trois petites choses à dire.
Premièrement, il y a une différence entre l'appétit pour le risque et l'imprudence; vous devez donc montrer que vous avez une bonne procédure d'évaluation du risque et un bon dossier à ce chapitre.
La deuxième chose, c'est qu'il ne faut jamais sous-estimer la valeur des politiciens bien informés et actifs. Vous avez un comité de ce type, au Canada. Au Royaume-Uni, le comité spécial sur le développement international constitue le dernier rempart entre la presse populaire, d'un côté, et ce qui nous semble parfois un processus décisionnel intelligent, de l'autre côté.
La troisième chose concerne une autre innovation de Andrew Mitchell. Il a mis en place un mécanisme d'évaluation tout à fait indépendant, que l'on appelle la commission indépendante sur les retombées de l'aide, laquelle relève non pas du gouvernement, mais du comité spécial. Cette commission a pu évaluer la stratégie du ministère du Développement international dans le secteur privé, par exemple, et elle constitue un autre moyen d'assurer une évaluation intelligente et, au besoin, de servir de paravent à certaines personnes.
J'ai une dernière question qui a trait à la notion selon laquelle un pays qui a une IFD accepte la structure de risque élevé et le mandat qui est donné, ce qui veut dire que les gouvernements, les politiciens et le public doivent savoir qu'il y aura de temps à autre des versements de capitaux, étant donné les risques qui sont pris.
C'est un bon investissement, quand on verse un peu de l'argent réservé à l'aide au développement, qui dans votre cas représente 0,7 %, je crois, certaines années. C'est une bonne stratégie, car vous faites également intervenir le secteur privé. Supposons que la somme de 300 millions de dollars que le Canada verse n'est qu'un début, et que, dans quelques années, nous en verserons encore. Nous reconnaissons que c'est une stratégie légitime, car nous pouvons mobiliser le secteur privé beaucoup plus efficacement que si nous versions cette somme directement à des ONG.
Est-ce un argument réaliste que l'on pourrait formuler d'emblée, sans prétendre que d'une façon ou d'une autre ça s'autofinancera, une fois qu'on aura versé de l'argent? Bien sûr, il faudra que des politiciens, dans 10 ans, se penchent de nouveau sur la question et restructurent le tout, parce que ça ne fonctionnera peut-être pas de la manière prévue. J'aimerais beaucoup savoir ce que vous pensez à ce sujet.
Il est vrai, c'est certain, que l'on peut croire que le secteur privé versera aussi beaucoup d'argent en contrepartie. On parle souvent d'un ratio de 20 pour 1, dans le domaine climatique, par exemple, où, chaque fois que le gouvernement verse une livre, le secteur privé peut en verser 20. En principe, vous récupérerez cet argent, alors, la question de savoir s'il faut recapitaliser... Si vous obtenez des rendements comme ceux dont Diana a parlé, vous ne devriez pas avoir à recapitaliser, sauf si vous voulez élargir vos activités, mais, dans ce cas, si vous cherchez des rendements encore plus élevés, vous devrez verser encore de l'argent.
J'hésite; comme bien des gens, tous pays confondus, j'ai l'impression que ma capacité de deviner ce qui plaît aux électeurs est à peu près nulle. Je sais qu'il y a des gens qui sont sceptiques quant aux arguments touchant le financement de contrepartie. Il y a beaucoup d'IFD en activité, et il y a des gens qui croient que le même dollar est versé plusieurs fois à une IFD. Il y a peut-être du scepticisme, au sein du petit groupe de spécialistes et des ONG engagées. Je ne suis pas certain que ce scepticisme s'étend au grand public. Mais je n'ai pas répondu à votre question. Je ne sais pas si votre argument sur le financement de contrepartie vous aidera à faire accepter par le public ce que font les IFD.
Je crois qu'il est vraiment utile d'établir pour commencer de très modestes attentes. Ainsi, l'équipe que vous embauchez trouvera facilement le moyen de dépasser ces attentes. N'oubliez pas non plus, quand vous aurez à décider si vous devez investir ou accorder une subvention, que l'argent d'une subvention disparaît complètement, mais si vous investissez dans une IFD, votre intention est bien sûr d'obtenir un rendement, que vous pourrez inscrire de nouveau dans votre budget. En outre, vous aurez beau essuyer quelques pertes, le rendement sera quand même meilleur que si vous aviez tout perdu. Je crois que vous devez accepter qu'il y aura un risque à prendre, laisser le temps faire son oeuvre et vous attendre à un rendement raisonnablement modeste; c'est la meilleure façon de préparer un magnifique terrain où vous pourrez construire dans 10 ans.
En terminant, dans le cadre du nouveau mandat que le gouvernement vous a donné en 2010, pour ce qui concerne les pays les plus pauvres, y a-t-il un programme plus général? Auriez-vous des statistiques à nous soumettre, qui montreraient les progrès que vous réalisez? Cela fait maintenant sept ans, et il nous serait utile de voir où cela vous a menés, à la lumière du mandat de risque plus élevé que vous avez reçu en 2010.
Oui, bien sûr. Nous pouvons vous montrer de quoi avait l'air notre portefeuille en 2011, quand je suis arrivée, où le capital est passé, et vous montrer comment les choses se présentent aujourd'hui. C'est un changement spectaculaire.
C'est très bien. Merci.
Chers collègues, ce sera tout pour nous aujourd'hui.
Je tiens à remercier M. Carter, M. Maxwell et Mme Noble de nous avoir fait part de leurs réflexions. Il s'agit évidemment de notre première tentative, et nous comprenons les frustrations et les défis que vous avez vécus ces dernières années. Comme l'a laissé entendre M. Mitchell, nous allons, espérons-le, trouver une nouvelle orientation qui nous permettra peut-être de faire changer un peu les choses dans le monde.
Je tiens à vous remercier tous les trois d'avoir bien voulu passer du temps avec notre comité, ce matin, ou plutôt cet après-midi, même ce soir, pour vous. Nous l'apprécions énormément.
Merci, chers collègues.
Chers collègues, nous avons terminé pour aujourd'hui. Nous nous reverrons jeudi. Bonne journée
La séance est levée.
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