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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 111 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(0815)

[Français]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 111e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
    Je vais commencer par faire quelques rappels. La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, je précise que la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le jeudi 8 février 2024 et le mardi 24 septembre 2024, le Comité reprend son étude portant sur les conséquences des ajustements à la frontière pour le carbone et de la réciprocité des normes sur l'agriculture canadienne.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au groupe de témoins que nous recevons pour la première heure de la réunion.

[Traduction]

    De l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, nous accueillons Michael Harvey qui en est le directeur général.
    Nous accueillons René Roy, président, et Katerina Kolemishevska, du Conseil canadien du porc qui connaît bien ce comité et ses membres.
    De Fermiers pour la transition climatique, nous accueillons Geneviève Grossenbacher, directrice des politiques.
    Bienvenue à tous. Merci pour votre présence. Nous sommes ravis de vous accueillir.
    Vous connaissez la procédure. Chaque organisme aura cinq minutes pour sa déclaration liminaire, après quoi, nous passerons aux questions des députés.
    Je vais commencer par vous, monsieur Harvey, pour un maximum de cinq minutes. Allez-y.
     Merci, monsieur le président. Je crois que c’est la première fois que je participe à une réunion présidée par un résidant du comté de Hants, comté que je connais pour avoir fréquenté l’école secondaire de Hants West dans les années 1980.

[Français]

    Je remercie le Comité d'avoir invité l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, soit l'ACCA, à lui faire part de ses points de vue dans le cadre de son étude.
    L'ACCA est une coalition d'organisations nationales qui milite en faveur d'un environnement commercial international plus libre et plus équitable pour le secteur agricole et agroalimentaire.
    Les membres de l'ACCA comprennent des agriculteurs, des éleveurs, des transformateurs, des producteurs et des exportateurs des principaux secteurs commerciaux tels que le bœuf, le porc, les céréales, les oléagineux, le sucre, les légumineuses, le soya et les aliments transformés.
    Un environnement commercial international équitable et ouvert pour le secteur agroalimentaire est dans l'intérêt économique du Canada. L'agroalimentaire représente un emploi sur neuf au Canada, et la majorité de ces emplois sont dans le secteur agroalimentaire axé sur l'exportation. En 2022, le Canada a exporté pour 92,8 milliards de dollars de produits agricoles et alimentaires. Plus de la moitié de notre production agricole est exportée ou transformée pour être exportée.

[Traduction]

     Les ajustements à la frontière pour le carbone, les AFC, sont un excellent exemple de la nécessité, pour les exportateurs canadiens de produits agroalimentaires, de participer à des discussions nationales et internationales sur la durabilité et le commerce. Nous croyons que le commerce est important non seulement pour ce qu'ils apportent sur les plans économique et social à l’échelle mondiale, mais aussi pour ce qu'ils représentent en termes d’amélioration des résultats nationaux et internationaux en matière de durabilité.
    Le 6 août, nous avons répondu à cet impératif en l'établissant, au niveau de l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, l'ACCA, des principes du commerce durable afin de définir une approche structurée en vue des actuelles discussions stratégiques qui sont au cœur du commerce et de la durabilité, et de leurs répercussions sur le secteur agroalimentaire.
    Tandis que le monde est aux prises avec le double défi de nourrir une population croissante et de protéger l’environnement, les principes de l’ACCA offrent une feuille de route claire pour équilibrer ces priorités essentielles. Nous sommes d'avis que le commerce est essentiel à la réalisation du développement durable et à l’amélioration de la sécurité alimentaire mondiale. Les agriculteurs, les transformateurs et les exportateurs canadiens font croître notre économie grâce au commerce. Il est essentiel que les mesures de durabilité ne deviennent pas des obstacles à un commerce agroalimentaire international plus juste et plus libre et qu’elles ne servent pas de couverture à des politiques commerciales protectionnistes. Nous devons veiller à ce que les efforts que nous déployons pour promouvoir la durabilité ne donnent pas lieu à des obstacles ou à des fardeaux excessifs non désirés.
    Les politiques de durabilité et les mesures climatiques liées au commerce ne doivent pas imposer des fardeaux réglementaires, des restrictions ou des coûts de conformité inutiles aux producteurs ou à l’ensemble de la chaîne de valeur. L’application des principes du commerce durable de l’ACCA aux AFC fait apparaître certaines complexités d’un concept initial relativement simple.
    L’ACCA n’a pas élaboré de position institutionnelle sur les AFC. Nous surveillons l’évolution de la situation à l’échelle internationale. Les membres du comité ont examiné le mécanisme d’ajustement à la frontière pour le carbone, le MAFC, de l’UE qui, à l'avenir, pourrait inclure des secteurs tels que l’agriculture. L’ACCA craint que le MAFC de l’UE ne devienne un obstacle commercial utilisé de façon discriminatoire au nom du protectionnisme.
    La mesure de l’empreinte carbone des produits alimentaires peut être plus complexe que dans d’autres secteurs d'activité, en raison de facteurs comme les diverses pratiques agricoles, les distances de transport et les changements dans l’utilisation des terres. Les exportateurs de produits agroalimentaires s’inquiètent des coûts et des défis techniques liés au suivi et à la déclaration des émissions dans diverses chaînes d’approvisionnement agricoles.
    Nous sommes également préoccupés par l’absence de normes harmonisées de comptabilisation du carbone dans tous les pays. Cette incohérence pourrait provoquer une certaine confusion et des différends sur la façon dont les émissions sont calculées et vérifiées, ce qui alourdirait le fardeau administratif. De plus, le respect de la réglementation sur le carbone et la fourniture de la documentation nécessaire pour vérifier les émissions feraient augmenter les coûts pour les exportateurs de produits alimentaires.
    Par ailleurs, les exportateurs devront naviguer dans des processus de certification complexes pour prouver la durabilité de leurs pratiques agricoles, ce qui risque de s'avérer long et coûteux. De telles exigences pourraient ralentir les échanges commerciaux, perturber les chaînes d’approvisionnement et ajouter d’importants fardeaux financiers. Les AFC pourraient provoquer des différends commerciaux, surtout si les exportateurs de produits agricoles dans les pays où la réglementation environnementale est plus faible considèrent ces mesures comme protectionnistes. Il pourrait en découler des tarifs réglementaires ou des différends au niveau de l’OMC.
    Malgré ces difficultés, force est de constater que d’autres pays hors UE envisagent d'appliquer des AFC. Les sénateurs américains ont apporté des idées novatrices à l'étape de l'examen de la loi, et nous avons récemment constaté que le département américain de l’Énergie a annoncé un projet pilote de collecte de statistiques sur les émissions de certains produits industriels. Selon l’administration, cela devrait éclairer le groupe de travail sur le climat, le commerce et la compétitivité industrielle récemment mis sur pied par la Maison-Blanche sur le climat, dans ses relations avec ses partenaires commerciaux.
    Dans ce contexte international changeant, le Canada pourrait finir par décider d'adopter un régime d'AFC, mais avant cela, il conviendra d'examiner soigneusement les répercussions possibles sur le commerce international. Lors de l’étude récente par le gouvernement des mesures visant à contrer les importations chinoises de véhicules électriques, l'ACCA a fait valoir que notre pays devrait adopter une approche conforme à ses obligations envers l’OMC, en soulignant l’intérêt du Canada pour un régime commercial fondé sur des règles mondiales et sur l'atténuation du risque de représailles.
    Nous entendons continuer d’insister pour que l'adoption de telles approches se fasse au vu du risque de contestations commerciales internationales. Les AFC représentent un domaine où le Canada peut travailler avec des partenaires internationaux de façon multilatérale à l’OMC ou dans des groupes régionaux ou avec des pays aux vues semblables comme ceux du G7, afin de gérer le commerce international d’une manière stratégique qui serve notre intérêt national général.
(0820)

[Français]

    Je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
    Merci.

[Traduction]

    Je ne m’attendrais à rien d’autre de la part de quelqu’un du comté de Hants et qui a terminé dans les temps. Merci, monsieur Harvey.

[Français]

    Monsieur Roy, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonjour, monsieur le président.
    Merci de cette invitation.
    Je remercie aussi tous les membres du Comité de leur travail dans ce dossier.
    Je m'appelle René Roy et je suis président du Conseil canadien du porc. Ce matin, je suis accompagné de Katerina Kolemishevska, qui est notre directrice responsable des politiques et du développement durable.
(0825)

[Traduction]

     J’exposerai les principales préoccupations de l’industrie porcine au sujet de l’introduction de l’ajustement à la frontière pour le carbone et de la réciprocité des normes, ainsi que nos recommandations visant à assurer une approche équilibrée et efficace.
    Je précise à l'intention des membres que le Conseil canadien du porc soumettra un mémoire après sa comparution pour donner une réponse plus détaillée. Nous ne pourrons pas tout couvrir en une heure.
    Voici quelques-unes de nos principales préoccupations.
    La première concerne les représailles commerciales et le risque lié au marché d’exportation. Les mesures envisagées pourraient entraîner des représailles par nos principaux partenaires commerciaux, par exemple sous la forme de droits de douane ou de restrictions sur les exportations de porc. C’est particulièrement important et préoccupant, étant donné que 70 % du porc canadien est exporté.
    La deuxième préoccupation est l’augmentation du fardeau administratif et de la conformité. L’introduction des AFC et de la réciprocité des normes imposera des fardeaux administratifs supplémentaires à nos producteurs, surtout à cause de la nécessité de produire des rapports et de vérifier la conformité à la réglementation environnementale. Ces fardeaux accrus, qui ne se traduisent pas toujours en valeur financière, pourraient avoir une incidence disproportionnée sur les producteurs, ce qui augmenterait leurs coûts d’exploitation et entraverait leur fonctionnement et leurs réactions face à la concurrence.
    Quand on augmente le fardeau réglementaire, on réduit le nombre de producteurs de porc, parce que c’est souvent l’exploitant qui assume le fardeau de la déclaration et de la mise en œuvre de ces règlements supplémentaires au détriment de l’exploitation de son entreprise. La réduction du nombre de producteurs réduit également l’activité économique dans nos régions rurales et la résilience de notre industrie.
    D'autres aspects nous préoccupent, comme l’augmentation de la production et des coûts des intrants, ainsi que l’harmonisation et la perturbation du commerce, mais permettez-moi de terminer par quelques recommandations.
    La première concerne la mise en œuvre graduelle et le soutien transitoire. Nous exhortons le gouvernement à adopter une approche progressive pour la mise en œuvre des PCA, car les producteurs et les partenaires internationaux auront ainsi le temps de s’adapter à la nouvelle réglementation.
    Il faudra aussi apporter une aide financière et technique aux producteurs. Les mécanismes de soutien comme les subventions ou le financement à faibles taux d'intérêt allégeront le fardeau financier des producteurs et encourageront l’innovation dans les pratiques agricoles durables. En effet, l’analyse comparative de l’UE et des États-Unis ne tient pas compte de la différence dans le soutien financier. C’est un point très important.
    Nous avons d’autres recommandations, dont certaines sur l’harmonisation internationale et la diplomatie commerciale et sur l’établissement de lignes directrices claires et de processus simplifiés de déclaration, mais nous vous en ferons part dans notre mémoire.
    Bien que les AFC et la réciprocité des normes offrent d’importantes possibilités sur le plan de l’uniformisation des règles du jeu et de promotion de la durabilité, il est essentiel de tenir compte des risques pour le commerce, des coûts de conformité et de la compétitivité des producteurs de porc canadiens.
     Nous exhortons le gouvernement à adopter une approche équilibrée pour assurer un avenir prospère et durable à l’agriculture canadienne.

[Français]

    Merci.
    Nous sommes prêts à répondre aux questions.
     Merci beaucoup, monsieur Roy.
    Madame Grossenbacher, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Monsieur le président et distingués membres du Comité, je vous remercie de me donner la possibilité de témoigner aujourd'hui.
    Je représente Fermiers pour la transition climatique dont je suis la directrice des politiques. Je suis aussi agricultrice, puisque j'ai une exploitation dans les environs de Gatineau, de l'autre côté de la rivière.
    Bien que le concept d'ajustement à la frontières pour le carbone, ou AFC, en soit encore à ses débuts au Canada et qu'il ne s'agisse pas d'un domaine que nous avons étudié directement, nous nous réjouissons de cette importante discussion.
    En plus de mes remarques, j'ai remis, à la greffière du Comité, un mémoire dont j'espère que vous tiendrez compte dans votre étude; il donne des informations complémentaires qui devraient vous être utiles.
    Aujourd’hui, je souhaite souligner trois points.
    Premièrement, les mécanismes d’ajustement à la frontière pour le carbone sont de plus en plus courants et sont en train de remodeler la dynamique des échanges commerciaux. Les AFC ne sont pas seulement théoriques: ils sont déjà mis en œuvre au sein de l’Union Européenne, et de nombreux autres pays, comme les États-Unis, songent activement à les adopter. Ces ajustements ont commencé à remodeler la dynamique des échanges et à influencer les décisions de nos partenaires commerciaux.
    Deuxièmement, il est essentiel de réduire l’intensité carbone, comme, je crois, vous l'ont dit des témoins il y a deux jours. Quelle que soit la situation des AFC dans le monde, il est impératif et pressant de se concentrer sur la réduction de l’intensité carbone du secteur agroalimentaire canadien. Bien que les agriculteurs canadiens excellent dans la production à faibles émissions de certains produits, notre compétitivité n'est pas excellente et nous devons corriger cette situation.
    Plus important encore, d’autres pays — comme les États-Unis — investissent beaucoup plus que le Canada dans la réduction des émissions et dans la résilience climatique. Selon la Fédération canadienne de l’agriculture, nous devrions investir 2 milliards de dollars par an sur cinq ans pour combler l'écart. Nous apprécions qu'en 2021, le Canada ait commencé à investir 1,5 milliard de dollars en agriculture et dans la lutte contre les changements climatiques, mais il faut faire davantage.
    Troisièmement, nous devons aider les agriculteurs et les éleveurs à demeurer compétitifs face aux changements climatiques. Un récent sondage national que nous venons de réaliser avec la firme Léger auprès des agriculteurs et des éleveurs révèle que les personnes interrogées considèrent que les changements climatiques sont leur principale préoccupation pour la prochaine décennie. De plus, une grande majorité — 79 % — craignent que leurs revenus diminuent. Soixante-dix pour cent d'entre eux ont fait état de pertes de rendement et 69 % de problèmes en matière de santé mentale chez leurs employés.
    Le mémoire que nous vous avons déposé renferme plus d'informations au sujet de ce sondage. Il est clair qu'il faut renforcer le soutien aux agriculteurs et aux éleveurs pour les aider à réduire leur intensité carbone tout en améliorant leur viabilité
    La bonne nouvelle, à mes yeux, c'est que nous sommes en train d'étudier les meilleures façons de réduire les émissions, ainsi que de renforcer la résilience climatique des agriculteurs et la viabilité des exploitations. La recherche est sur le point d'aboutir, mais nous savons déjà que les 16 pratiques exemplaires que nous avons isolées pourraient nous permettre de réduire les émissions de près de 16 millions de tonnes d’équivalent CO2 grâce à des pratiques éprouvées comme la réduction du travail du sol, l’utilisation de fertilisants azotés plus efficaces, l’ajout de légumineuses dans les rotations, les cultures de couverture et le pâturage en rotation, Ces pratiques existent, elles sont éprouvées, rentables et elles ont un impact positif sur les revenus agricoles et sur l'environnement. Elles sont avantageuses pour les agriculteurs, pour leur portefeuille, pour l’environnement et pour l'économie.
    Que les AFC deviennent ou non une réalité partout dans le monde, nous devons donner la priorité à un financement et à un soutien accru aux agriculteurs et aux éleveurs au titre de la réduction de leur intensité carbone et de l’amélioration de leur compétitivité. Il existe un consensus fort au sein du secteur agricole — et il en a été question hier à la conférence de l'Institut canadien des politiques agroalimentaires — quant à la nécessité urgente que le fédéral investisse dans des incitatifs économiques, des services-conseils et des transfert de connaissances, ainsi que dans la gestion des données à la ferme. Ces investissements sont essentiels pour aider les agriculteurs et les éleveurs à adopter des pratiques de climato-résilience et de faibles émissions.
    Les discussions au sein du Comité consultatif sur la Stratégie pour une agriculture durable, les conclusions de notre sondage national et les résultats énoncés dans ce rapport pointent dans le même sens.
    Agissons maintenant pour doter nos agriculteurs et nos éleveurs des ressources dont ils ont besoin pour prospérer dans un climat en évolution. Ensemble, nous pouvons assurer un avenir durable et compétitif à l'agriculture canadienne.
    Merci.
(0830)
    Merci beaucoup, madame Grossenbacher.
    Nous allons maintenant passer à la période des questions.
    Je cède la parole à M. Barlow pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins de leur présence.
    Mardi, nous avons entendu des témoignages de fonctionnaires, et surtout celui de M. Webb du Global Institute for Food Security qui nous a dit qu’il y a beaucoup d’inconnues en ce qui concerne cette politique.
    Monsieur Harvey, je comprends évidemment votre position de représentant de l’ACCA quant à l’importance du commerce agricole. Je partage bon nombre des préoccupations que vous avez exprimées, à savoir que ce serait simplement... Tout d’abord, tout cela est hypothétique. À notre connaissance, personne ne parle d'appliquer ce régime à l’industrie agricole. L'UE va faire quelque chose en 2026, mais l’agriculture ne sera pas visée.
    En ce qui concerne notre relation antérieure — et je parle précisément du bœuf canadien, du blé dur et de certaines de ces choses —, je considère qu’il s’agit d’une mesure protectionniste ou potentiellement protectionniste: nous pensons qu'il s'agira d'une norme que nous serons censés respecter avec les pays de l’UE.
    Cependant, quand le moment sera venu, les Européens proposeront un système tel qu’il n’y aura pas moyen de respecter la norme, ou chaque membre de l’UE, par exemple, aura ses propres règles en fonction de ses marchés de niche.
    Si cela devait se produire, dans quelle mesure serait-il essentiel d’avoir une norme reconnue à l’échelle internationale, une norme pour mesurer les différents éléments, qu’il s’agisse de la séquestration du carbone ou de la santé du sol? Qui, au bout du compte, superviserait ou administrerait ce système pour s’assurer qu’il est équitable pour tous?
    L’ACCA a-t-elle fait du travail à ce sujet?
(0835)
     En fait, nous ne l’avons pas encore fait. Quand nous avons reçu l’invitation, certains d’entre nous pensaient qu’il était un peu tôt, alors nous n’avons pas pris position à ce sujet. Nous avons élaboré des principes de commerce durable qui nous ont fourni un cadre d'examen des questions liées au commerce durable. En fait, nous voulons empêcher que les mesures de durabilité deviennent des obstacles au commerce.
    Permettez-moi de parler des endroits où le travail serait effectué. Premièrement, nous n’en sommes pas encore arrivés au point de penser que c’est nécessairement une bonne idée de faire ce travail. Nous voulons éviter que les pays adoptent des mesures différentes source de beaucoup d’incertitude sur les marchés internationaux. À l’échelle mondiale, l’Organisation mondiale du commerce est au cœur du système commercial fondé sur des règles.
    Comme la plupart des échanges agricoles sont régis par l’OMC, chaque fois qu’on peut avoir des règles de l’OMC, c’est de loin la meilleure approche. Si ce n’est pas possible, des partenaires aux vues similaires — parfois des groupes comme le G7 — peuvent permettre que les amorces de solution, les idées et les approches soient traitées multilatéralement. Cependant, quand les décisions ne sont pas prises à l’OMC, on se retrouve presque inévitablement avec des règles disparates, ce qui pose problème.
    Merci.
     Je comprends tout à fait que l’ACCA n’ait pas encore pris position à ce sujet, et c’est un bon point. Je pense qu’il est un peu tôt pour nous attaquer à ce problème.
    J’ai plus un commentaire qu’une question. Nous devons commencer à envisager des partenariats entre pays de tradition rurale, aux vues similaires, comme le Canada, les États-Unis, l’Australie et les membres du PTP, le Partenariat transpacifique, cela afin de commencer à faire pression sur l’Union européenne pour qu’elle améliore sa gestion des relations commerciales. Encore une fois, le blé et le bétail sont un excellent exemple des dangers que présente la voie proposée, qui est davantage fondée sur l’idéologie que sur la science.
    Monsieur Roy, ce serait le point de départ si nous devions parler des obstacles au commerce et de la réglementation sur l’harmonisation. La Proposition 12 en Californie est maintenant reprise à l'échelle des États-Unis, mais chaque État change les règles du jeu.
    Quelle incidence cela aura-t-il sur les producteurs de porc canadiens? Commencez-vous à voir les répercussions de cela sur notre besoin de nous aligner sur nos partenaires commerciaux les plus fiables, alors que vous voyez les assemblées législatives des États changer les règles?
    Je commencerai par souligner que nous sommes aussi confrontés à un problème de taille du côté de l’exportation de nos produits du porc vers l’Union européenne, et nous tenons à ce que cela soit retenu au nombre de nos préoccupations. Notre bœuf, notre blé et notre le porc ne peuvent pas facilement être écoulés en Europe.
     Pour ce qui est de la Proposition 12 et de toutes les barrières non tarifaires qu'elle comporte, nous sommes, là aussi, très inquiets. Nous croyons devoir nous y opposer. Il y a vraiment de s'inquiéter quand de nouvelles règles sont ajoutées, comme les plans pour relatif aux AFC
    S’il nous reste 30 secondes, je demanderai à Mme Kolemishevska de vous parler de nos préoccupations d'ordre financier.
    J'estime que le Canada doit s'arrêter à mieux définir la durabilité et ce que veulent dire les normes dont nous parlons, parce que la définition elle-même est très mal comprise, ce qui pose problème surtout avec nos partenaires américains.
    Dans les études de l'OCDE, on constate que le Canada fait beaucoup plus sur le plan de la durabilité que d’autres pays d’où l’Union européenne importe son porc et son bœuf. Nous aussi devrions nous livrer à ce genre d’analyse pour voir où nous en sommes et comment nous représentons, mesurons et rendons compte de la durabilité. Je pense que nous nous trouverions alors en posture favorable.
    Quant à l’étude elle-même et aux aspects financiers, je pense qu’il est très important pour nous de réfléchir à la façon dont les normes seront appliquées. Nous savons que l’Union européenne fait déjà des analyses et dispose de statistiques à ce sujet. Je pense qu’il est en outre très important que nous examinions les projections financières associées aux normes et la façon dont elles s’appliqueront aux producteurs et au secteur. Une telle démarche ne doit pas concerner uniquement les producteurs, mais toute la chaîne de valeur. C’est très important.
    Merci.
(0840)
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer par Mme Taylor Roy, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d’être ici. Veuillez excuser mon léger retard. En cours de route, je me suis entretenue avec des éleveurs de dindons.
     Je dirais que l'étude que nous avons entreprise ne consiste pas, pour le moment. à nous pencher sur la mise en place de mécanismes d’ajustement à la frontière. Il s’agit en fait de nous intéresser à ce qui se passe ailleurs dans le monde, dans l’Union européenne et aux États-Unis. Il s'agit d'examiner les mécanismes à la frontière et la façon dont nous pouvons aider nos producteurs à demeurer concurrentiels sur les marchés mondiaux.
    Mme Kolemishevska, je comprends ce que vous avez dit au sujet de nos agriculteurs qui se débrouillent très bien en ce qui a trait à la durabilité et à la nécessité de mieux définir ce concept.
    Ma question s’adresse à vous, madame Geneviève Grossenbacher.
    Certains disent que, si l'on devait adopter un régime d'AFC, il faudrait examiner la situation sous un certain angle, la question n'étant plus de savoir « si », mais plutôt « comment ». J'ai cru comprendre que les 73 mécanismes de contrôle des émissions de carbone que les gouvernements nationaux et infranationaux du monde entier sont en train de mettre en place ont été formulés par l’OCDE. Cela, je pense, représente l'orientation que suit le monde entier.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez indiqué que vous menez une étude comportant 16 recommandations. Je n’ai pas saisi dans quelle mesure l'application de certaines pratiques, que nos agriculteurs utilisent déjà dans bien des cas, pourrait donner lieu à une réduction des émissions de CO2.
    Merci beaucoup de la question que j'apprécie.
    Notre étude sera bientôt publiée. En fait, nous avons étudié 44 pratiques dont la plupart coulent de source et sont rentables. Il conviendrait de les mettre en œuvre. Seize d'entre elles donneraient lieu à une réduction de 16 millions de tonnes d’ici 2050.
    Nos recherches ont montré que, d’ici 2030, nous pourrions parvenir à une réduction des émissions de 15 à 16 millions de tonnes de CO2, moyennant un soutien approprié. C’est essentiel. D’ici 2050, cette réduction serait plutôt de l’ordre de 31 à 51 millions.
    Ce que vous avez dit est fondamental. Les 16 pratiques dont je parlais et qui peuvent mener à une réduction de 16 millions de tonnes de CO2 sont des pratiques que les agriculteurs utilisent actuellement et qui ont fait leurs preuves, comme la réduction du labour. L’amélioration de l’efficacité des engrais est également essentielle. Nous nous pourrions vraiment agir à cet égard.
    Ce qui manque, c’est le soutien. Les agriculteurs qui sont en plein saison des récoltes subissent les effets de ce manque de soutien. Ils sont aux premières lignes des changements climatiques. Ils ont besoin d'appui pour adopter ou généraliser ces pratiques.
     Merci.
     J’entends dire haut et fort qu’il faut plus de soutien. Même si l'on parle déjà de 1,5 milliard de dollars, cela ne semble pas suffisant. Nous y travaillons et nous nous rendons compte que c’est une dimension très importante pour le secteur agricole.
    S'agissant de la mise en place de normes à l'échelle de la planète et de la façon dont celles-ci pourraient concerner le Canada, si j'ai bien compris, vous dites tous qu'il faudrait sans doute s'en remettre à la définition de la durabilité et à une approche multilatérale articulée par l’OMC.
    Je sais qu’il existe déjà des lignes directrices. Je ne me souviens pas de leur nom. Je pense que c'est un nom latin. Pour l’heure, certaines exigences sont nécessaires pour la réglementation phytosanitaire. Envisageriez-vous d’ajouter les exigences en matière de durabilité au même genre de cadre que celui actuellement utilisé par l’OMC?
    Michael, vous pourriez peut-être répondre à cette question.
     Nous n’avons pas encore décidé si c’est une bonne idée ou pas, mais dans le contexte où différents pays adoptent cette idée, il est de loin préférable d'agir multilatéralement afin que tout le monde travaille selon les mêmes règles et que l'on évite les différends. Cela étant, la voie de l’OMC semble être la meilleure.
    Les solutions multilatérales, comme le G7, sont mieux que rien, mais elles ne valent pas celle de l’OMC, pour différentes raisons. D'abord, l’OMC dispose d'un ensemble de règles de base qu'il est plus facile de compléter. C’est un organe juridique. Ensuite, l'OMC représente quasiment le monde entier. Nous faisons du commerce avec des gens qui ne font pas partie du G7, comme la Chine et l’Inde et nous appuyons sur l’OMC pour cela.
    Merci.
    Ma dernière question s’adresse à M. Roy. Soit dit en passant, j’aime votre nom de famille.
    Nous nous sommes déjà rencontrés et, comme je vous l’ai dit, j’ai des cousins qui travaillent dans l’industrie porcine. Vous avez parlé du fardeau administratif et réglementaire imposé aux agriculteurs. Je pense que les grande exploitations agricoles sont sans doute mieux à même de composer avec ce genre de situation. C’est toujours un problème, mais ça l'est plus pour les petits agriculteurs. Que pourriez-vous nous recommander quant au type d'aide à apporter aux agriculteurs face à ces fardeaux, à ces nouveaux règlements administratifs qui découleront probablement de la mise en œuvre du RAFC par l’UE et par d’autres pays?
(0845)
     Voilà qui méritait d'être mentionné, soit que tous les exploitants agricoles n'ont pas la même compréhension de cette problématique et n'en sont pas au même niveau de mise en œuvre, outre que la taille de l’exploitation détermine leur capacité à s’adapter aux nouveaux règlements ou aux nouvelles exigences.
    Nous suggérons notamment de débloquer des sommes en argent sonnant et trébuchant. Nous avons une taxe sur le carbone. il avait été promis que les revenus agricoles ne seraient pas touchés, en ce sens que l’industrie pourrait réinvestir une partie des subsides. Il serait possible de mettre sur pied une infrastructure de gestion de l’information pour alléger le fardeau des exploitations appelées à faire les nouvelles déclarations exigées. Ce faisant, tout le monde serait en mesure de bénéficier de l'application des nouveaux règlements.
    Merci.
    Je veux certainement veiller à ce que nos agriculteurs qui réussissent si bien sur le plan des normes de durabilité en profitent, et je pense que nous le ferons de façon concurrentielle dans le monde.
    Merci de votre contribution.
     Merci, madame Taylor Roy.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être parmi nous ce matin.
    Monsieur Roy, je vais vous permettre de continuer sur votre belle lancée.
    Vous proposez d'avoir une infrastructure d'information pour aider à uniformiser les choses. Cependant, on a déjà des barrières. Vous avez mentionné l'Europe, où votre viande ne peut pas entrer. Personnellement, j'entrevois la possibilité que la viande du Brésil, par exemple, puisse commencer à entrer au Canada, alors qu'elle est produite selon des normes complètement différentes, que sa qualité est complètement différente et que sa production a assurément des répercussions environnementales beaucoup plus grandes.
    Pourriez-vous me dire comment on peut s'assurer que ce sera équitable pour tout le monde quand on commencera à ajouter des normes? Je pense que c'est assez inévitable: ces normes vont arriver.
    Je pense que toute la question de la réciprocité des normes est un très bon aspect à soulever.
    J'aimerais attirer votre attention sur un point qui fait l'objet de discussions entre producteurs, soit la question de l'écoblanchiment, dont traite le projet de loi C‑59. Il y a un lien à faire entre cette question et celle que ce comité étudie ici. Dans les deux cas, on impose une obligation de résultat à notre industrie. Nous devons éviter de faire de l'écoblanchiment lorsqu'il s'agit d'informer le consommateur sur le travail que nous faisons. Cependant, les produits brésiliens ou américains seront-ils soumis à cette même contrainte? Nous en doutons fortement, parce que le Canada a un pouvoir limité en la matière.
    Nous considérons que ce genre de pression exercée sur notre industrie peut nous désavantager et accentuer le déséquilibre sur le plan de la concurrence.
     Merci. C'est un élément très intéressant.
    Mme Grossenbacher a parlé de l'importance d'assurer un soutien équivalent aux producteurs. Je suis sûr que M. Harvey va aimer ce que je vais dire: nous savons tous que l'agriculture aux États‑Unis est beaucoup plus soutenue qu'elle ne l'est au Canada. C'est un exemple, mais il y en a d'autres.
    Pouvez-vous me dire, en 30 secondes, ce que vous en pensez?
    Madame Kolemishevska, voulez-vous répondre à la question?

[Traduction]

     Oui. Merci.
    J'aimerais simplement ajouter un point très important à la discussion. Même avec le projet de loi sur l'écoblanchiment, nous ne sommes pas censés avoir des revendications qui ne sont pas conformes à certains processus de vérification, alors que, en tant que pays, nous avons aussi de la difficulté avec ce que nous déclarons. Quels sont les indicateurs nationaux? Quels indicateurs devrait‑on prendre en considération? Que mesurons-nous?
     Je vais prendre l'exemple du rapport d'inventaire national. Chaque fois que nous discutons avec le gouvernement de toutes les répercussions et de tous les changements que nos producteurs ont apportés à la ferme, on nous répond habituellement que le rapport d'inventaire national ne comprend pas nécessairement les pratiques agricoles.
     Il y a un écart énorme entre ce que nous déclarons, ce que notre méthodologie nationale exige et ce que nous faisons à la ferme. Il doit y avoir une stratégie de gestion des données pour la production de rapports nationaux sur les pratiques agricoles et le mode de rapport suivi. C'est très important.
    M. Roy a mentionné que nous avons besoin de soutien. Nous avons besoin de connaissances, de perfectionnement des compétences et d'une infrastructure de données pour aider les producteurs à déterminer la manière d'effectuer ces mesures.
(0850)

[Français]

     Merci beaucoup, madame Kolemishevska.
    Madame Grossenbacher, j'aimerais entendre vos commentaires sur les mêmes questions.
     Je vous remercie d'avoir soulevé cet élément.
    Comme vous l'avez dit, il y a effectivement plusieurs disparités. La Banque Royale du Canada a étudié la question de la disparité entre les États‑Unis, l'Europe et d'autres pays au chapitre des investissements pour l'agriculture, les changements climatiques, la résilience climatique et l'agriculture durable. Selon les conclusions de cette étude, pour arriver à la parité avec les États‑Unis, il faudrait investir 2 milliards de dollars par année pour les cinq prochaines années. Cela fait partie aussi des recommandations soumises par la Fédération canadienne de l'agriculture dans le cadre du budget de 2025.
    Je comprends les réalités fiscales du gouvernement, on a beaucoup investi et maintenant on a moins d'argent que d'habitude, excepté que chaque dollar qu'on investit maintenant en agriculture va porter ses fruits.
    On est en train d'investir cet argent, mais de différentes façons. Par exemple, au cours des trois dernières années, les paiements pour les programmes d'assurance-récolte ont presque triplé. On est passé de 1,67 milliard à quelque 3,88 milliards de dollars par année. Dans ce contexte, les producteurs ont besoin d'être soutenus.
    Pour notre part, ce que nous demandons, ce n'est pas de mettre fin aux programmes d'assurance-récolte, mais d'investir intelligemment pour bâtir la résilience climatique des producteurs. Comme je le disais, pour arriver à une parité, pour pouvoir avoir des règles du jeu équitables, il faudrait investir 2 milliards de dollars par année pendant cinq ans.
    Vous dites qu'il ne faut pas enlever l'assurance-récolte, mais on pourrait l'améliorer, par contre, car tout le monde ici s'entend pour dire que les programmes ne marchent pas.
    Il va vous rester environ 30 secondes pour répondre à ma prochaine question, mais nous pourrons y revenir lors de mon prochain tour de parole de deux minutes.
    Comment pouvons-nous faire pour reconnaître ce que les producteurs ont déjà fait? Je soulève souvent cette question dans ce comité. Je ne veux pas que, demain matin, on commence à se comparer à un fermier du Brésil dont l'impact environnemental est épouvantable et atroce, et qu'on demande les mêmes efforts aux producteurs canadiens. Comment pouvons-nous faire cela?
    Je vous demanderais de répondre en 30 secondes, s'il vous plaît.
    C'est une bonne question.
    Il faut absolument soutenir les producteurs, et une façon de les soutenir est de s'assurer qu'il y a un marché pour leurs produits. En fait, il faut d'abord mettre en place des mesures incitatives, pour qu'il ne soit pas trop décourageant de faire la bonne chose.
    Je suis désolée, je m'exprime mal. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a plein de choses qu'on pourrait faire pour améliorer nos programmes de gestion de l'offre, bâtir la résilience climatique et s'assurer que les producteurs en touchent des retombées positives, au lieu qu'ils soient découragés de faire la bonne chose.
    Je me suis peut-être mal exprimée, mais nous pourrons en reparler tantôt.

[Traduction]

     Monsieur Cannings, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci à tous d'être ici ce matin. Certains sont des visages bien connus du Comité du commerce international.
    Je vais commencer par vous, madame Grossenbacher. Vous avez mentionné les États‑Unis, comme tout le monde, je crois, pour des raisons évidentes. C'est probablement l'un de nos principaux objectifs en matière d'exportation pour l'ensemble de notre agriculture. Vous avez mentionné que les États‑Unis envisageaient un mécanisme d'ajustement à la frontière ou quelque chose du genre. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Qu'est‑ce que les États‑Unis envisagent de faire?
     Merci de la question.
    Je ne suis pas une experte des aspects commerciaux. Peut-être que les autres témoins peuvent en parler. Tout ce que je sais, c'est que les États‑Unis songent à mettre en œuvre un ajustement à la frontière semblable à celui de l'Union européenne. C'est en fait à son tout début. Il semble qu'ils l'appliqueraient de la même façon que l'Union européenne, en se limitant à l'acier, l'aluminium, les engrais et d'autres choses, sans viser la totalité du système agricole.
    Je faisais cependant allusion au fait que, depuis quelques années, les États‑Unis investissent massivement dans la résilience climatique et son renforcement dans les exploitations agricoles. C'est ce que nous n'avons pas fait de notre côté, et... Eh bien, non, ce n'est pas vrai; nous l'avons fait, et nous sommes vraiment reconnaissants des 1,5 milliard de dollars qui ont été investis, mais nous avons besoin de beaucoup plus. Je ne saurais assez insister là‑dessus. Plus nous nous adaptons aujourd'hui, moins cela coûtera cher demain.
    C'est ce que nous espérons pouvoir faire.
     Vous avez énuméré diverses pratiques agricoles. Comme vous l'avez dit, certaines sont parfaitement logiques et la plupart des agriculteurs les suivent de toute façon.
     Vous pourriez peut-être nous donner plus de détails. Si nous avions une augmentation de 2 milliards de dollars sur cinq ans, où cela irait‑il? Quels sont les meilleurs endroits où le gouvernement peut aider les agriculteurs à faire la transition — ce n'est peut-être pas le bon mot — vers des pratiques agricoles plus durables pour trouver des solutions aux problèmes climatiques?
(0855)
    Je vous remercie de cette question.
    Nous sommes en train d'examiner cela un peu plus en détail.
    Nous avons proposé quelque chose pour le budget de 2025 qui, nous l'espérons, pourra être mis en œuvre dans l'Énoncé économique de l'automne. Je sais que nous demandons beaucoup d'argent. Nous avons une proposition pour 861 millions de dollars pour une année. Elle vise précisément à renforcer la résilience aux changements climatiques.
    Nous pensons qu'il faut trois choses. Encore une fois, il s'agit d'établir ce que vous avez dit être les priorités du secteur, c'est‑à‑dire l'aide technique ou le transfert des connaissances. Nous pensons qu'une grande partie devrait être consacrée à cela. Je pourrais vous donner la ventilation plus tard. Une bonne partie de l'argent devrait servir à encourager les agriculteurs à adopter les pratiques exemplaires. Ensuite, on pourrait utiliser un peu d'argent pour mesurer les données au niveau de la ferme.
    Je n'ai pas la ventilation complète en ce moment, mais je pourrais la communiquer au Comité plus tard. Il s'agit d'environ 861 millions de dollars. On peut beaucoup faire avec un tel montant.
     Je vais m'adresser à M. Roy.
    Les États‑Unis sont l'une des principales destinations de vos exportations de porc, tout comme le Japon, si j'ai bien compris.
    Avez-vous suivi ce que les États‑Unis ont envisagé à cet égard, qu'il s'agisse d'un mécanisme d'ajustement à la frontière ou d'un autre moyen de favoriser leur secteur agricole? Cela pourrait‑il nuire à nos échanges commerciaux?
    Oui, nous avons surveillé la situation.
     À l'heure actuelle, ce qui nous préoccupe le plus, ce sont les barrières non tarifaires liées au bien-être des animaux, comme la Proposition 12. Cela dit, il est déjà question d'ajustements à la frontière pour le carbone ou d'autres mesures de ce genre. Comme nous avons amplement accès à ce marché, nous travaillons avec nos homologues américains, les producteurs de porc. Nous tenons à l'harmonisation des règles avant leur mise en œuvre. La traduction des mesures environnementales doit être claire avant d'amorcer le processus. Autrement, il faudra s'attendre à moult perturbations et frictions dans le secteur.
    Comme nous le proposons, il est essentiel d'avoir des lignes directrices claires. Il faudrait établir des normes avant d'adopter de telles mesures.
     D'accord.
     Je cède maintenant la parole à Mme Kolemishevska.
    Vous avez parlé de données. Mme Grossenbacher a parlé des données que les agriculteurs fournissent au gouvernement sur leurs activités, et vice versa.
     Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Quels types de soutien aimeriez-vous voir pour rendre la collecte de données plus facile et plus efficace?
     Pas de problème.
     En un premier temps, il s'agira de déterminer certains indicateurs communs à l'ensemble de l'industrie. Nous savons que nous avons des industries et des secteurs différents. Cependant, si nous relevons des points communs parmi les pratiques de gestion exemplaires, nous pouvons en énumérer plusieurs qui peuvent faire partie de ces indicateurs de mesure et de collecte de données.
    Un autre aspect important qui a également été mentionné par des collègues, c'est qu'il nous faut de meilleures pratiques de gestion. Il y en a une, particulièrement exemplaire, mais souvent oubliée, qui peut s'appliquer à tous les producteurs. On n'en parle pas beaucoup au Canada, et on n'a pas fait beaucoup de recherche là‑dessus. Je parle de l'agriculture de précision. C'est une pratique très utile, un domaine où l'Union européenne s'est révélée très forte. C'est coûteux, mais ça fonctionne. Cette pratique fournit des données qui sont le gage de la rentabilité, et tout le monde peut en profiter.
    Je pense qu'investir dans la recherche pour voir comment l'agriculture de précision peut aider les producteurs du secteur agricole peut profiter à tout le monde, y compris aux sociétés de recherche. Nous faisons des études sur les préférences musicales des animaux. C'est bien. Je trouve ça adorable. On peut toutefois se demander si c'est une priorité pour tout le monde. Je ne le pense pas. Il me semble qu'il y a d'autres aspects très importants sur lesquels nous devrions nous concentrer et qui aideront les gouvernements fédéral et provinciaux à communiquer les données et à les diffuser à l'échelle nationale.
     Nous allons devoir en rester là.
    Monsieur Cannings, vous avez 40 secondes de plus, alors je m'attends à figurer sur votre liste d'envoi de cartes de Noël cette année. Le président s'est montré généreux.
    Allez‑y, monsieur Barlow. Je crois que c'est vous qui allez commencer le deuxième tour.
(0900)
    Oui, merci. Je vais partager mon temps avec M. Lehoux.
    Monsieur Roy, vous avez soulevé une question que je n'ai pas eu le temps de poser au premier tour. Très rapidement, l'an dernier, le Global Institute for Food Security a réalisé une étude incroyable sur l'efficacité de l'agriculture canadienne par rapport à celle d'autres pays.
    Le projet de loi C‑59, qui porte sur l'écoblanchiment, empêcherait les agriculteurs canadiens de parler des choses incroyables que nous avons accomplies. En parlant d'un ajustement à la frontière pour le carbone ou de ce genre de politiques, en quoi ce projet de loi vous empêcherait‑il de parler de ce qui se fait dans votre industrie, et comment pourrez-vous respecter certaines de ces lignes directrices si vous n'êtes pas en mesure de parler de vos réalisations?
    Monsieur Harvey, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose, mais je vais commencer par M. Roy.
     Oui, pour nous, c'est une préoccupation. J'en ai discuté avec certains de mes collègues du secteur agricole, et nous étions tellement préoccupés par ce projet de loi que certains d'entre nous avons modifié ou carrément supprimé toutes les bonnes choses que nous faisions et que nous affichions sur notre site Web. Nous craignons notamment les poursuites qui pourront être entamées contre nous si des gens décident de sonner l'alarme dès qu'ils perçoivent un problème.
    Cela a une incidence réelle sur notre capacité de communiquer les bonnes choses que nous faisons. Comme on l'a mentionné, nous sommes parmi les chefs de file en matière de durabilité, mais nous voulons nous prononcer contre une norme qui n'existe même pas, celle de l'écoblanchiment, qui est nécessairement problématique, puisqu'elle est si vaste et si floue.
    Merci.

[Français]

    Je laisse M. Lehoux continuer.
    J'aimerais que M. Harvey réponde aussi à cette même question.
    En fait, je suis peut-être ce dossier d'actualité un peu plus que le citoyen moyen, mais notre organisation n'a pas d'avis officiel sur la question.
    Merci.
    Monsieur Roy, pour conclure votre allocution d'ouverture, vous nous avez fait part de quatre recommandations. La troisième portait sur l'harmonisation commerciale mondiale. Je pense qu'on y adhère, du moins c'est mon cas.
    Comme on le sait, le Canada exporte environ 70 % de ses produits, mais ses importations sont quand même de l'ordre de 40 %. Comment peut-on harmoniser les règles, sur le plan commercial, pour nous assurer que ces 40 % de produits qui sont importés satisfont à des exigences équivalentes à celles que nous demandons aux producteurs canadiens de respecter?
    En tant qu'entrepreneur, je commencerais par proposer qu'on n'ajoute pas de règles qui sont impossibles à respecter.
    Ensuite, il faut s'assurer que le commerce international respecte ce que nous faisons. Comme on l'a vu, on a eu des problèmes dans le cas de certains pays asiatiques. Il faut qu'une communication soit faite avant qu'on commence à appliquer ces règles. Les règles du jeu doivent être connues d'avance et bien établies sur le plan international, sinon nous serons perdants.
    Cela veut dire que, en plus d'avoir besoin d'une meilleure harmonisation avec nos partenaires étrangers, il faut s'assurer qu'ici, avant d'imposer une règle supplémentaire, les gens sur le terrain en sont informés. À mon avis, il s'agit d'un élément très important. Souvent, on met une règle en place, mais on n'avise personne sur le terrain. Or, comme on le sait, dans le milieu de l'agriculture, il y a un certain délai avant qu'une mesure soit mise en application concrètement.
    J'aimerais maintenant parler des risques. Vous avez abordé le sujet en mentionnant des problèmes assez sérieux que nous avons eus par le passé avec certains partenaires commerciaux asiatiques. Comment pourrait-on restreindre ces imbroglios?
    On a vu ce qui s'est passé lorsque le Canada a appliqué une interdiction relativement aux autos électriques produites en Chine. Celle-ci a immédiatement dit qu'il n'y aurait plus de canola canadien qui entrerait sur son territoire.
    La situation sera difficile à gérer. Comment entrevoyez-vous cela?
    Il y a un aspect politique qui peut être plus difficile à circonscrire et à contrôler.
    Cela dit, j'aimerais porter l'attention du Comité sur l'entente commerciale entre le Canada et l'Europe, qui devrait être basée sur la science. Or, lorsqu'on applique cette entente, les règles sont asymétriques, ou encore l'Europe décide d'imposer d'autres règles qui ne sont pas scientifiques.
    Si on s'entend sur des règles scientifiques, celles-ci doivent être appliquées de part et d'autre, et non d'un seul côté.
(0905)
    Merci.
    C'était tout le temps dont vous disposiez. Merci.

[Traduction]

     Ce sera maintenant au tour de la fierté de Malpeque. Vous avez la parole, monsieur MacDonald.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais revenir au premier tour. J'ai entendu deux ou trois choses qui me donnent l'impression que nous essayons de prendre les devants.
    Monsieur Harvey, vous avez dit que vous n'étiez pas encore certain, que nous nous attaquions peut-être à cette question trop prématurément. Je siège au gouvernement depuis neuf ans et je peux vous dire qu'il n'est jamais trop tôt pour le gouvernement, parce que la bureaucratie n'avance pas très rapidement, monsieur Harvey. Je crois donc qu'il est important de prendre les devants.
    De toute évidence, il y a beaucoup de questions sans réponse. Nous abordons certaines questions théoriques, mais je pense qu'il est extrêmement important que les industries et les gouvernements se concertent à tous les niveaux. Personne ne parle des gouvernements provinciaux, mais je pense qu'ils ont un rôle de premier plan à jouer à cet égard également, et il faut évidemment que tous les échanges commerciaux se fondent sur des données scientifiques.
    Je l'ai déjà dit devant ce Comité, mais si les États‑Unis prennent des mesures à cet égard, nous aurions intérêt à être prêts, car je crois que le porc que nous exportons chez eux dépasse à lui seul le milliard de dollars.
    Il est compréhensible qu'il y ait beaucoup de questions, mais il est également compréhensible que nous puissions agir d'ores et déjà au lieu d'attendre que vous reveniez un jour nous dire qu'il vous faut plus de temps. Je pense que c'est vraiment important. Je pense aussi — et M. Lehoux en a parlé un peu — que nos agriculteurs au Canada — que tout le monde le reconnaisse ou non, et c'est d'autant plus rare dans les médias, évidemment — sont en très bonne position. Il suffit de voir ce qui se fait ailleurs dans le monde au chapitre de la durabilité et des changements climatiques pour constater que nos agriculteurs sont des chefs de file. À mon avis, oui, les affaires sont les affaires, et le Conseil du porc n'a pas fini de se heurter à des obstacles de la part de l'Union européenne et de certains pays, mais si nous comparons nos agriculteurs à n'importe qui dans le monde, je pense que nous sommes vraiment bien placés.
    Il y a une chose qui n'a pas été dite et qui, à mon avis, pourrait être très injuste si nous ne sommes pas prêts à agir — ou cela pourrait être très avantageux —, c'est que si nous ne respectons pas nos obligations commerciales vis‑à‑vis des tarifs transfrontaliers à l'égard d'un autre pays, les tarifs que nous payons à ces pays reviennent à ces industries. Personne ne parle vraiment de cela, et je pense que c'est quelque chose que le gouvernement et les groupes que vous défendez devraient certainement préconiser, et nous pourrions peut-être atteindre les 2 milliards de dollars assez rapidement.
    N'importe qui peut répondre à ma question. Quelles sont les possibilités pour nos agriculteurs au Canada si cela se produit, comme nous le supposons?
    Allez‑y, monsieur Roy.
     Je dirais d'abord qu'il est essentiel d'avoir une infrastructure d'information adéquate pour pouvoir démontrer à nos partenaires commerciaux toutes les bonnes choses que nous faisons. C'est beaucoup plus du côté de la fonction publique, parce que c'est une infrastructure et ça ne peut pas être privé. Il doit s'agir de quelque chose qui est commun, qui est réglementé, qui est normalisé et qui nous aide, nous les producteurs, à montrer les bonnes choses que nous faisons et à quel point nous sommes des chefs de file mondiaux.
    Pour nous, c'est un peu frustrant, car beaucoup de gens se plaignent que nous ne nous y prenons pas toujours comme il faut, alors qu'en réalité, nous sommes des étudiants brillants, si vous voulez. Nous savons en effet que c'est bien beau d'avoir des points d'avance, mais qu'il ne faut pas relâcher nos efforts pour autant, car il s'agit de demeurer comparables à d'autres dans le monde, de montrer que nous avons de quoi rester à la hauteur, sans nous abaisser à chercher la petite bête.
    Quelqu'un d'autre voudrait‑il ajouter un commentaire?
     Je conviens que nous devons être à la hauteur, mais pour l'instant, nous en sommes à l'étape de la surveillance. Je ne représente pas le secteur des fruits de mer, n'empêche que je vais me régaler d'une bonne douzaine d'huîtres de Malpeque demain soir — mais ce n'est pas une question de commerce international.
    Qu'est‑ce qu'une question de commerce international? Aujourd'hui, le mécanisme européen d'ajustement à la frontière pour le carbone, le MAFC, ne couvre pas les huîtres de Malpeque ni les produits agroalimentaires canadiens. Nous surveillons ce qui se passe, car il est question de l'acier, du ciment et des engrais, et cela commence à se rapprocher de l'agriculture, mais nous n'y sommes pas encore. Ainsi, si le Canada adoptait aujourd'hui un ajustement sur le carbone à la frontière pour des produits comparables en provenance d'autres pays, il ferait cavalier seul et ferait quelque chose qui restreindrait le commerce et compliquerait nos relations avec nos partenaires.
    Les gens en parlent, mais nous n'avons pas de position définie parce que nous n'y sommes pas confrontés aujourd'hui, mais je lis les blogues commerciaux américains, Substacks et d'autres publications pour bien faire mon travail. Je vois que certains sénateurs américains ont discuté de la question. Ce n'est pas tout à fait clair pour moi. Je n'ai pas engagé quelqu'un pour étudier si un projet de loi est sur le point d'être adopté et s'il est de ceux qui sont d'initiative parlementaire et qui ne sont que très rarement adoptés. Je sais que les Américains en parlent, alors nous en sommes à l'étape de la surveillance.
    Si le monde commence à se diriger vers cela, le Canada devrait s'abstenir d'être une figure de proue qui lance des différends commerciaux pour un oui ou pour un non. Si divers pays s'y prenaient de la sorte, nous finirions par conclure que nous devons nous entendre avec nos partenaires et non pas faire cavalier seul, car nous tenons invariablement à renforcer un système commercial bien réglementé et non pas à le démanteler.
(0910)
    Votre temps est écoulé.
    Je me contenterais de dire, monsieur Harvey, que nous avons reçu des fonctionnaires mardi, et la position des ministères est qu'il y a de la réflexion et qu'il y a du travail qui se fait à cause de ce qui se passe dans d'autres pays.
    Cette étude ne partait pas de l'idée que le gouvernement devait nécessairement établir sa position. Il s'agissait plutôt de songer à la façon dont le Canada devrait réagir face à ce qui pourrait devenir une réalité à l'avenir. Je veux simplement m'assurer que c'est clair.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Grossenbacher, je vais revenir vers vous et vous laisser les quelque deux minutes qu'il restera pour m'expliquer ce que vous vouliez m'expliquer tantôt.
    Juste avant, cependant, j'aimerais m'adresser à l'ensemble des témoins qui auraient des propositions ou des recommandations à faire. M. Roy, entre autres, semblait en avait plusieurs à nous soumettre. Il serait important de les faire parvenir par écrit au Comité, pour que nous puissions en prendre connaissance et les inclure dans notre rapport.
    Je vous écoute, madame Grossenbacher.
    Je vais remettre en contexte votre question. Vous vous demandiez comment on pouvait récompenser les producteurs. Il s'agit d'une bonne question.
    En tant que producteurs — et c'est d'autant plus vrai pour moi, qui suis une productrice de légumes —, nous aimons plus les carottes que les bâtons.
    Des voix: Ha, ha!
    Je vais maintenant revenir à la question de M. MacDonald.
    Si on met en place des ajustements à la frontière pour le carbone, il faut être prudent et faire en sorte qu'il y ait plus de carottes que de mesures punitives.
    Cela dit, nous pensons que la meilleure défense contre la réglementation, c'est de s'assurer d'être prêt. Je conviens que, en matière de résilience climatique et de compétitivité, nous réussissons bien pour plusieurs grains, mais ce n'est pas le cas pour d'autres. La réalité sur le terrain, c'est que les producteurs ont besoin d'aide. Nous faisons de bonnes choses, mais nous avons quand même besoin de soutien et d'incitatifs. Par exemple, Agri-investissement pourrait accorder un montant complémentaire aux producteurs qui ont de bonnes pratiques. Ce serait une bonne façon d'encourager les producteurs à adopter de bonnes pratiques et de continuer dans cette voie.
    Beaucoup de producteurs et de productrices nous disent qu'ils ont besoin de plus de soutien ou d'assistance technique pour passer au prochain niveau. M. Roy l'a mentionné tantôt. Au Québec, par exemple, on a accès à des services-conseils. De plus, il y avait des programmes, qui fonctionnaient super bien, qui offraient une couverture améliorée lorsqu'il était question de production biologique ou de relève, par exemple. Le même genre de programme pourrait être établi à l'échelle fédérale. Par exemple, le programme pourrait permettre à un producteur qui adopte telle ou telle technique d'avoir encore plus de soutien ou un plus grand accès à des services-conseils.
    À la base, il faut que plus d'agronomes soient formés pour aider les producteurs et les productrices à s'adapter aux changements climatiques. Il y a vraiment un manque à cet égard. Je vais vous donner un exemple, si le temps le permet. Pour ma part, je suis une productrice de légumes, et une agronome vient de Montréal pour visiter ma ferme. En fait, elle visite sept fermes en deux jours. Si on est chanceux, elle vient deux ou trois fois par été, pour une visite d'une heure chaque fois. Mes voisins, eux, qui sont des producteurs de maïs-grain, reçoivent la visite d'un agronome plusieurs fois par semaine, pendant plusieurs heures. Le soutien que nous recevons n'est donc pas le même. Très peu d'agronomes savent comment appuyer les producteurs en matière d'adaptation aux changements climatiques. Il faut donc leur donner des formations et ensuite le soutien nécessaire pour qu'ils se rendent sur les lieux, à la ferme.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Cannings.

[Traduction]

     Je vais donner la parole à M. Harvey.
    Nous avons entendu dire aujourd'hui que ces ajustements à la frontière n'ont été mis en œuvre nulle part pour l'agriculture. Il y a une liste d'autres secteurs qui les utilisent et qui les étudient, et il semble que ce sont des secteurs beaucoup plus faciles à mesurer. Les avantages que le Canada pourrait en tirer en empruntant cette voie sont beaucoup plus clairs.
     D'après ce que nous avons entendu lors de notre dernière réunion et de celle‑ci, il semble que l'agriculture serait un secteur très difficile et compliqué à intégrer à un mécanisme d'ajustement à la frontière pour le carbone, parce que chaque ferme est différente.
    Je veux vous poser la même question que j'ai posée aux autres. Pour nous aider dans nos échanges avec les États‑Unis, qui sont notre principal partenaire commercial, où pensez-vous que le Canada devrait investir ses efforts et son argent pour appuyer l'agriculture au pays?
     Je viens d'une circonscription agricole qui est inondée de produits américains. Nous cultivons des fruits et pourtant, tous les fruits que nous trouvons dans nos épiceries viennent des États‑Unis.
    Pourriez-vous nous dire de façon générale où nous devrions investir nos efforts et notre argent pour appuyer l'agriculture canadienne sur le plan commercial?
(0915)
    À l'heure actuelle, nous devrions nous préparer à l'examen de 2026 de l'Accord Canada‑États‑Unis‑Mexique, l'ACEUM. Les efforts du Canada en matière de commerce dans ce cadre devraient généralement viser à garder cet examen aussi étroit que possible, car un examen trop vaste comporterait beaucoup de risques politiques pour notre pays.
    Cependant, en même temps, le Canada devrait préparer une liste d'éléments qui, selon nous, ne fonctionnent pas aussi bien qu'ils le pourraient avec les États‑Unis, parce que si la discussion s'élargit, nous devrions être prêts à en discuter.
    Nos efforts au départ devraient être d'essayer de garder la discussion aussi étroite que possible, parce qu'il y a beaucoup de risques politiques pour le Canada si nous entamons cette discussion.
    Merci.
    Le président a une brève question à poser.
    L'un des aspects intéressants de cette étude, c'est ce que j'ai entendu constamment de la part des témoins — et je suis d'accord avec eux — que l'agriculture canadienne serait soit en tête de liste, soit même supérieure par rapport à la plupart des autres produits agroalimentaires dans le monde, en tout cas selon un indice d'intensité en carbone. Nous avons entendu dire qu'environ 10 % des émissions au Canada sont liées à l'agriculture, alors que la moyenne mondiale est de 30 %. Même par rapport aux pays comparables, je pense que le Canada s'en tire très bien.
    De toute évidence, l'un des éléphants dans la salle a été la tarification du carbone. Nous en avons entendu parler. C'est en grande partie exempté, mais, monsieur Roy, vous parlez de choses comme le gaz naturel et le propane qui existent encore. Qu'il s'agisse ou non de la tarification du carbone ou, pour revenir à ce que disait Mme Grossenbacher, l'idée d'une augmentation des subventions gouvernementales et donc de l'argent du contribuable, représente un coût réel pour le Trésor.
     Comment en tenons-nous compte? Je pense que c'est ce que le Comité essaie d'établir. Comment pouvons-nous nous assurer que la supériorité canadienne de certains de ces produits est prise en compte, tout en demandant à notre industrie nationale de faire partie de la solution pour réduire les émissions?
    Je crois que les données scientifiques montrent clairement que nous devons le faire dans divers secteurs pour les pays qui choisissent de ne pas demander à leurs industries nationales d'y participer.
    Monsieur Harvey, je comprends qu'il est tôt. Les politiciens sont rarement accusés de cela. Je pense que c'est probablement une bonne chose que nous réfléchissions un peu à l'avenir. S'il ne s'agit pas d'un mécanisme d'ajustement à la frontière pour le carbone, y a‑t‑il un autre type de politique que vous jugez important pour protéger la compétitivité du Canada dans un climat où nous demandons à l'industrie nationale de faire partie de la solution et d'en assumer les coûts, qu'il s'agisse d'une tarification du carbone ou de subventions supplémentaires qui, au bout du compte, viendront du contribuable canadien?
     Comment comptabilise‑t‑on cela dans le système? S'agit‑il de suivre une approche digne d'un club? Faut‑il soit faire de quoi pour ne pas être assujetti à un tarif, soit y être assujetti comme un vilain qui n'a rien fait?
     Comment pouvons-nous y arriver? Qu'en pensez-vous?
    Du point de vue de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, l'ACCAA, nous avons un ordre commercial mondial fondé sur des règles qui fonctionne très bien pour le Canada et qui lui a permis d'exporter dans le monde entier. La majorité de l'agriculture canadienne est axée sur l'exportation, et tout ce que nous faisons devrait tenter de renforcer ce système, et non de l'affaiblir.
     Si nous pensons qu'il est très important de prendre certaines mesures nationales pour des raisons intérieures, ce qui cause des problèmes au système commercial, nous devrions le faire de façon multilatérale et essayer de les régler de concert avec d'autres pays. Autrement, si tous les pays se débrouillent seuls, nous allons nous diviser en blocs — ou pire, en une myriade de pays concrets — et nous serons tous plus pauvres.
     Une certaine position concernant le commerce est importante. Je pense que c'est la façon dont nous comptabilisons cela, et c'est là que la question se pose, soit de demander plus d'argent du contribuable, soit d'opter pour la tarification...
    Y a‑t‑il d'autres observations rapides?
(0920)
     Je pense qu'un aspect très important de tout ce dont nous discutons est la gestion de l'information. Si nous sommes en mesure de mieux gérer notre information et de ne pas travailler en vase clos, je pense que nous aurons 95 % des réponses. Au lieu d'être sur la défensive, nous pouvons en fait prendre position.
    Je vais vous donner un exemple tout simple. Nous avons des programmes de subventions que les provinces offrent aux producteurs, ce qui signifie la mise en œuvre de pratiques de gestion exemplaires. Avons-nous de l'information sur la surveillance de la mise en œuvre et sur ce qui se passe avec les pratiques de gestion bénéfiques? Non. Les données se trouvent dans l'inventaire sur place, et il n'y a pas de suivi.
    Si nous parvenons à travailler avec les provinces pour transmettre aux producteurs l'information provenant de ce qui est mis en œuvre dans le cadre des programmes de subventions et à suivre chaque subvention que les producteurs reçoivent à cet effet, nous comprendrons beaucoup mieux ce qui se fait dans les fermes. C'est un exemple simple.
    Même au sein de nos établissements, grâce à la collaboration intersectorielle, il y a beaucoup de données disponibles sur la vaccination et la santé animales, mais elles ne sont pas nécessairement intégrées aux données et aux renseignements sur la durabilité. Nous pouvons utiliser cela et travailler avec eux. Il y a énormément d'information, et nous faisons énormément de choses, mais tout se fait en vase clos.
    Cela nous ramène à la question de l'établissement de normes internationales.
     Il s'agira davantage d'une approche semblable à celle que l'on suivrait dans un club. Il faut démontrer quelque chose de concret pour atteindre ou ne pas atteindre un niveau de référence, car je pense que ce sera très difficile autrement.
    Quoi qu'il en soit, cette conversation a été intéressante. Je vous remercie encore une fois, chers collègues, de votre indulgence. Je vais, en votre nom, remercier nos témoins de leur participation aujourd'hui et de leur contribution à l'agriculture.
    Nous allons suspendre brièvement la séance pour accueillir nos deux prochains témoins. Merci.
(0920)

(0925)
     Chers collègues, nous sommes de retour pour le deuxième groupe de témoins.
     Nous accueillons M. Tyler McCann, directeur général, de l'Institut canadien des politiques agroalimentaires. Il connaît bien le Comité. Nous l'avons rencontré plus d'une dizaine de fois au fil des ans, c'est certain.
    Nous accueillons également M. Rick White, président-directeur général de la Canadian Canola Growers Association. Il se joint à nous par vidéoconférence.
    Merci, messieurs. Je m'excuse du léger retard. Le premier groupe a pris un peu plus de temps que prévu. Il y a eu de bonnes discussions dans la salle, mais nous en parlerons.
    Je vous cède la parole, monsieur McCann, pour cinq minutes, après quoi ce sera à votre tour, monsieur White.
     Ma déclaration préliminaire est en français et en anglais.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président.
    Je vous remercie de m'avoir invité à me présenter devant le Comité ce matin. Je vous suis toujours reconnaissant de me donner l'occasion de contribuer à votre travail.
    Le lien entre commerce international et durabilité est une question sur laquelle l'Institut canadien des politiques agroalimentaires, ou ICPA, a travaillé pendant des années. J'aimerais vous présenter mes réflexions sur l'intersection ou la collision de ces deux éléments.

[Traduction]

    Il est impératif d'articuler toute conversation sur le commerce durable autour de quelques faits essentiels. Le monde fait face à une insécurité alimentaire croissante. L'offre, la demande et les stocks de produits de base clés se resserrent. Il y a moins d'exportateurs nets et plus d'importateurs nets. Tous les aliments ne sont pas égaux. Leur nature et leur mode de production jouent un rôle important dans leur empreinte écologique. Le transport, en particulier le fret maritime, a en fait une très faible incidence sur l'empreinte écologique de la plupart des aliments.
    Par conséquent, le commerce sera de plus en plus essentiel pour que les aliments puissent être acheminés du petit nombre de pays où ils peuvent être produits en abondance et de façon plus durable vers les pays qui n'en produisent pas suffisamment pour répondre à la demande.
    Bien que les économistes et les avocats spécialisés en droit commercial vous donneront des tas d'explications à ce sujet, les ajustements à la frontière pour le carbone sont là pour garantir des règles du jeu équitables entre les pays, mais la façon de mesurer le carbone et de savoir si les règles sont équitables est immensément plus compliquée que cela. Il est peu probable que ces ajustements soient un problème pour le système alimentaire dans un avenir prévisible.
    L'Union européenne va de l'avant avec ses ajustements, mais la couverture est limitée à six produits exposés aux échanges à forte intensité d'émissions visés par son système d'échange de quotas d'émission, le SEQE. Les engrais sont le seul produit agricole touché par les ajustements. La production agricole n'est pas couverte par ce système, et il n'y a pas de dialogue sérieux sur son éventuelle couverture ou les ajustements correspondants.
    Le monde a du mal à trouver une solution au problème du carbone à la frontière. C'est incroyablement compliqué, et les solutions ne sont pas évidentes. Il est peu probable qu'un ajustement de la tarification du carbone à la frontière soit la solution à ce problème.
     Bien qu'il ne s'agisse pas d'un produit agricole, il importe de reconnaître l'impact qu'un rajustement à la frontière pour le carbone est susceptible d'avoir sur les engrais canadiens. Luter Atagher, titulaire d'un doctorat récemment obtenu de l'Institut canadien des politiques agroalimentaires, l'ICPA, a publié un excellent article explorant l'impact potentiel d'un tel ajustement sur les engrais.
    Les récents tarifs sur les importations canadiennes d'engrais ont prouvé à quel point ils peuvent nuire aux agriculteurs canadiens et comment le Canada doit être assez motivé pour chercher une approche différente.
    Mis à part les engrais, pour la plupart des exportations agricoles canadiennes, la réglementation de l'Union européenne sur la déforestation représente un défi beaucoup plus grand qu'un ajustement à la frontière théorique. C'était bien de voir hier qu'ils ont été retardés d'un an, mais il reste encore beaucoup de travail à faire.
    Bien qu'une grande partie de l'attention accordée à la collision entre la durabilité et le commerce porte sur les mesures réglementaires et frontalières, il importe de ne pas perdre de vue l'impact que les politiques nationales et les dépenses vertes pourraient avoir sur les exportations canadiennes dans le monde.
    Le recours croissant aux subventions vertes aux États‑Unis est un excellent exemple de mesures de durabilité qui pourraient avoir des répercussions négatives sur les exportations canadiennes. À l'Organisation mondiale du commerce, OMC, la catégorie verte n'est généralement pas perçue comme ayant un effet de distorsion sur le commerce, mais c'est une vision obsolète du monde.
(0930)

[Français]

    J'aimerais aussi faire quelques commentaires sur la réciprocité des normes.
    Il est facile de comprendre pourquoi les producteurs canadiens sont inquiets et appuient le concept de réciprocité. Ils produisent des aliments d'une très haute qualité et ne veulent pas être forcés de rivaliser avec des produits importés qui ne sont pas de qualité équivalente. Les producteurs ne veulent pas non plus rivaliser avec des produits fabriqués ou cultivés à l'aide d'intrants non disponibles sur le marché canadien.
    Encore une fois, bien qu'il soit facile de comprendre les inquiétudes soulevées, il n'est pas aussi simple de trouver des solutions.
    D'abord et avant tout, le gouvernement canadien a les pouvoirs nécessaires pour s'assurer que les aliments importés sont propres à la consommation et conformes aux exigences canadiennes. Quant à savoir s'il a les ressources, c'est une tout autre question.
    La question de la réciprocité des normes est effectivement une question de compétitivité, et non de salubrité des aliments. Au-delà des conflits potentiels entourant les règles du commerce international, la réciprocité des normes reste une approche difficile à mettre en œuvre sans que des coûts soient ajoutés et sans que cela crée des frictions dans la chaîne alimentaire.
    Une meilleure approche serait d'encourager une plus grande harmonisation des normes, des règlements et des approbations des intrants agricoles. Par exemple, le projet de loi C‑359 crée des conditions qui peuvent assurer un accès aux technologies concurrentielles sans créer une frontière plus épaisse et un commerce international moins fonctionnel.

[Traduction]

     Il est clair qu'il faut élaborer des solutions qui continuent d'améliorer la durabilité agricole tout en favorisant le commerce et l'abordabilité des aliments. Cependant, l'ajout de taxes et d'obstacles à la frontière n'aura probablement pas l'effet souhaité. C'est grâce à la coopération entre les gouvernements, les agriculteurs et les producteurs d'aliments du monde entier — et non aux obstacles, aux taxes et à la réglementation — que nous trouverons les solutions nécessaires pour faire croître la productivité et en arriver aux systèmes alimentaires économiques et durables sur le plan environnemental et social dont le monde a besoin.
    Merci.
    Merci, monsieur McCann.
    Nous allons passer directement à M. White.
     Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le Comité pour discuter des répercussions des mécanismes d'ajustement à la frontière pour le carbone.
    Comme le président l'a indiqué, je m'appelle Rick White et je suis président-directeur général de la Canadian Canola Growers Association. Je travaille ici, à Winnipeg, et nous avons aussi une équipe à Ottawa.
    La CCGA est l'association nationale qui représente quelque 40 000 producteurs de canola du Canada sur les enjeux, les politiques et les programmes qui ont une incidence sur le succès de leurs exploitations.
    Développé au Canada, le canola est un élément essentiel de l'agriculture canadienne, ainsi que de la science et de l'innovation. Aujourd'hui, il s'agit de la denrée la plus cultivée au Canada et qui rapporte le plus de tous les produits agricoles, soit plus de 13,7 milliards de dollars en 2023.
    Chaque année, le secteur du canola contribue 29,9 milliards de dollars à l'économie canadienne et fournit plus de 200 000 emplois. Les producteurs de canola sont fortement tributaires du commerce, puisqu'ils exportent 90 % de ce qu'ils cultivent sous forme de graines, d'huile ou de farine, tout en important des intrants essentiels comme les engrais, les produits phytosanitaires et la machinerie et l'infrastructure agricoles. À elles seules, les exportations étaient évaluées à 15,8 milliards de dollars en 2023.
    Nous exhortons le gouvernement à faire preuve de la plus grande prudence lorsqu'il envisage un mécanisme d'ajustement à la frontière sur le carbone et à faire preuve de diligence raisonnable pour s'assurer que ce mécanisme ne va pas à l'encontre des principes du commerce international fondé sur des règles. Il est impératif que nous fassions l'équilibre entre les ambitions du Canada sur le plan des changements climatiques et notre compétitivité économique ainsi que notre réputation et nos engagements en matière de commerce mondial.
    De plus, toute conception devrait tenir pleinement compte des engagements du Canada envers l'Organisation mondiale du commerce et respecter nos accords bilatéraux de libre-échange. L'organisation sert de cadre à notre système commercial international, offrant des règles claires et prévisibles concernant les échanges commerciaux. La conception et les détails du mécanisme détermineront la conformité commerciale, et tout écart par rapport à cela pourrait exposer le Canada à des différends commerciaux ou à des accusations de protectionnisme, ce qui minerait les objectifs déclarés du mécanisme.
     Nos partenaires de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, l'ACCAA, ont déclaré devant le Comité, la semaine dernière, qu'il est essentiel que les mesures de durabilité ne deviennent pas des obstacles au commerce équitable et libre et ne servent pas de couverture aux politiques commerciales protectionnistes. La CCGA est tout à fait d'accord avec cet énoncé. L'ACCAA a également élaboré des principes de commerce durable, ce qui serait une excellente ressource pour votre Comité.
    Bien que d'autres pays puissent avoir des objectifs semblables pour réduire les gaz à effet de serre et atteindre la neutralité carbone, les approches en matière d'ajustement à la frontière pour le carbone ne sont pas normalisées et ne sont probablement pas facilement harmonisées. Un ensemble hétéroclite de régimes a le potentiel réel d'imposer des barrières et de perturber le commerce, d'accroître la possibilité d'une double tarification du carbone et de créer de nouveaux régimes de reddition de comptes possiblement lourds pour le gouvernement et l'industrie. La participation au début du processus de conception augmente les chances d'une approche multilatérale et de la reconnaissance de l'approche du Canada comme étant équivalente à celle des États‑Unis et de l'Union européenne, entre autres.
    Comme le commerce international est l'élément vital de notre secteur, les producteurs de canola doivent demeurer concurrentiels sur les marchés mondiaux. Tout mécanisme doit tenir compte de l'augmentation des coûts des produits importés et atténuer les répercussions sur les utilisateurs en aval. Les engrais, les carburants, les aliments et les boissons, ainsi que l'acier et l'aluminium sont considérés comme des secteurs à forte intensité d'émissions et tributaires du commerce. Les agriculteurs comptent sur les importations d'engrais pour des nutriments particuliers qui ne sont pas produits au Canada afin de cultiver et de produire des récoltes, tandis que l'acier et l'aluminium sont nécessaires pour produire des tracteurs, de l'équipement et des bacs d'entreposage. Par exemple, le ciblage de la production d'acier primaire pourrait potentiellement déplacer le coût vers des produits finis comme les moissonneuses-batteuses. Les agriculteurs sont ultimement responsables de toute augmentation des coûts. Comme il s'agit du dernier maillon de la chaîne de valeur et que les prix des céréales sont fixés à l'échelle mondiale, ils ne peuvent pas répercuter ces coûts accrus.
    Bien que la CCGA comprenne l'engagement du Canada à atteindre des cibles ambitieuses en matière de changements climatiques, nous nous méfions également des répercussions négatives que ce mécanisme pourrait avoir sur le libre-échange et, par conséquent, sur les agriculteurs. Compte tenu de l'enquête commerciale que la Chine a lancée sur le canola en réponse aux tarifs imposés par le Canada sur les véhicules électriques, l'acier et l'aluminium, les producteurs de canola — maintenant plus que jamais — ont besoin de voir le gouvernement canadien suivre les principes commerciaux internationaux fondés sur des règles.
    Compte tenu de ces considérations, la CCGA recommande au gouvernement de faire preuve d'une extrême prudence et d'examiner attentivement les conséquences imprévues de la mise en œuvre des mécanismes d'ajustement à la frontière pour le carbone. Tout mécanisme canadien doit maintenir notre compétitivité à l'échelle mondiale et être conçu pour s'aligner sur nos principaux partenaires commerciaux et être reconnu par eux.
(0935)
     Merci.
    Merci, monsieur White.
    À titre de précision, parce que cela a été soulevé dans certains témoignages, au sujet de l'idée que le gouvernement lui-même essaie d'établir un mécanisme canadien... Non, je pense que l'origine de l'étude concernait davantage la possibilité que d'autres pays s'engagent dans cette voie et la meilleure façon d'y réagir.
    Je vous remercie de votre témoignage.
     Je vais céder la parole à M. Barlow pour commencer, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Nous avons reçu hier une représentante du ministère des Finances, et je lui ai posé une question semblable. Elle a répondu que la mise en œuvre d'un ajustement à la frontière pour le carbone et toute l'administration qui s'y rattache exigeraient des coûts et des efforts intenses. Nous savons maintenant que l'administration du programme de la taxe sur le carbone coûte environ 83 millions de dollars. Près de 500 bureaucrates administrent ce programme. Nous savons que la taxe sur le carbone coûte aux agriculteurs environ 150 000 $ en moyenne par ferme, et qu'un milliard de dollars en revenus seront perdus pour les agriculteurs canadiens d'ici 2030.
    Monsieur McCann ou monsieur White, quel serait le coût d'un ajustement à la frontière pour l'agriculteur et le coût sur le plan de l'administration, non seulement en dollars, peut-être, mais aussi en efforts pour mettre en œuvre un programme qui serait navigable, disons?
(0940)
     Je pense que la réponse courte est que nous ne le savons pas, mais cela pourrait être assez important.
    Les paramètres de conception d'un éventuel ajustement de la tarification du carbone à la frontière pourraient exiger des rapports assez intenses de la ferme à l'exportateur. Nous n'avons pas les systèmes en place. On fait beaucoup de bon travail pour mettre en place des systèmes efficaces de vérification et de rapport des mesures, mais on est encore loin d'avoir quelque chose de convivial à mettre en place.
    Malheureusement, chaque fois que le gouvernement a dû intervenir pour ajouter sa touche à ces systèmes, l'expérience n'a pas été positive. Nous devons reconnaître qu'il y a tout lieu de craindre que cela peut devenir un fardeau.
    Je veux dire qu'il y a déjà de fortes chances que cela devienne un fardeau pour le secteur, c'est sûr, un fardeau difficile à gérer, mais à en croire notre expérience récente, il risque d'être encore plus lourd que ce que nous pensons.
    Allez‑y, monsieur White.
    C'est une excellente question, monsieur Barlow. C'est difficile; je ne peux pas vraiment me prononcer sur les coûts d'administration. Je ne peux qu'imaginer à quel point ce serait coûteux et compliqué. Encore une fois, je n'ai aucune expérience dans ce domaine.
    Pour répondre à votre question sur l'impact sur les agriculteurs ou sur les prix, ce qui nous inquiète, c'est que si l'on adopte une approche globale, il y aura des gagnants et des perdants. Je crois que les agriculteurs finiront par perdre sur les importations d'intrants essentiels comme les engrais, la machinerie et les produits phytosanitaires. Nous importons beaucoup de ces produits. S'ils sont assujettis à des taxes, le coût de nos intrants augmente, nos marges s'effondrent et nous allons de mal en pis.
    Nous avons déjà la question de la Chine. C'est un gros problème pour nous. La dernière chose dont les agriculteurs ont besoin, c'est d'une plus grande incertitude quant au coût et à la disponibilité de leurs intrants. Nous ne connaissons pas les détails, et ce sont justement les détails qui posent problème. Force est de procéder avec prudence. Pensez à toutes les circonstances des gagnants et des perdants. C'est très risqué, à notre avis.
    Une fois de plus, il est difficile de faire des commentaires sur des questions qui demeurent théoriques pour l'instant, mais lorsque le temps viendra, nous serons en mesure d'y répondre de façon plus détaillée.
     Je comprends, monsieur White. Merci.
    Le coût des engrais a augmenté de plus de 100 %, et c'est directement attribuable à la taxe sur le carbone actuellement en vigueur. Il y a un tarif de 35 % sur les engrais en provenance de l'Europe de l'Est, et il y a peut-être aussi, maintenant, un ajustement carbone à la frontière pour les engrais, mais peut-être pas nécessairement s'ils proviennent de l'Europe. Tous ces coûts supplémentaires sont refilés directement au producteur en raison de la taxe sur le carbone et des tarifs qui ont été imposés.
    Monsieur White, l'autre question intéressante qui a été soulevée est le projet de loi  C-59 sur l'écoblanchiment. Je sais que les producteurs canadiens de canola ont été mis en vedette dans l'étude du Global Institute for Food Security sur les gains d'efficacité et les réalisations incroyables de l'agriculture canadienne. En ce qui concerne le canola, je crois que notre empreinte carbone est de 67 % inférieure à celle du canola cultivé ailleurs dans le monde.
    Si vous tentez d'atteindre les normes établies par un ajustement à la frontière pour le carbone, sans pouvoir parler des succès incroyables de l'agriculture canadienne en raison du projet de loi sur l'écoblanchiment, quel fardeau cela vous impose‑t‑il en tant qu'organisation représentant des milliers d'agriculteurs, si vous n'êtes pas en mesure de parler des succès incroyables que les agriculteurs canadiens réalisent déjà et qui établissent la norme à l'échelle mondiale?
     Nous devons raconter notre histoire, car c'est une histoire de succès et de réussite. C'est l'aboutissement de l'ingéniosité des agriculteurs, de la recherche et de l'innovation, et de l'adoption rapide de technologies comme la culture sans labour, la machinerie de semis direct et l'agriculture de précision; c'est tout cela. Les agriculteurs cherchent à réduire au minimum leurs coûts et la perturbation de l'environnement dans leur production.
    C'est une histoire qu'il faut raconter. Si nous ne pouvons pas la raconter à cause du projet de loi sur l'écoblanchiment, je ne pense pas que nous servirons nos clients partout dans le monde. Nous ne répondons pas à leurs questions. Je pense que cela nuirait grandement à notre capacité de raconter notre histoire et d'expliquer ce que nous faisons, comment et pourquoi, en matière de durabilité, et toutes les bonnes choses que nous faisons pour les environnements individuels de nos exploitations. Je pense qu'il manque des éléments d'information essentiels dans la conversation à l'échelle mondiale.
(0945)
    Merci, monsieur Barlow.
     Monsieur White, pour que les choses soient bien claires pour le Comité, d'après vous, le projet de loi actuel ne vous permet pas de parler de la culture sans labour? C'est simplement pour que nous comprenions bien ce projet de loi. Est‑ce bien ce que vous affirmez?
    Je pense que nous sommes préoccupés par les aspects juridiques de ce que nous pouvons dire et de ce que nous ne pouvons pas dire. Nous n'allons pas courir le risque d'enfreindre les lois canadiennes sur l'écoblanchiment. Nous ferons preuve d'une extrême prudence. Cela limiterait notre capacité d'en parler.
    C'est vraiment le risque de... Ce n'est pas que nous essayons de faire de l'écoblanchiment. Nous ne ferions jamais cela, et nous n'avons pas à le faire. En même temps, nous devons garder à l'esprit qu'il faut être prudent dans ce que l'on dit publiquement en raison des risques que cela fait planer.
    Merci.
    Monsieur Drouin, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci beaucoup à nos témoins.
    Je vous remercie tous de comparaître devant le Comité sur une question qui n'aura sans doute pas de répercussions sur la communauté agricole demain, mais qui en aura dans 5 à 6 ans si nous ne commençons pas à nous préparer.
    Je ne parle pas de l'imposition d'ajustements aux frontières du Canada pour le carbone; je parle des autres pays. Cela va devenir une réalité — et je pense qu'il y a eu des témoignages à ce sujet — pour l'industrie de l'acier, l'industrie du ciment et l'industrie canadienne des engrais qui exporte vers l'UE. Tout cela deviendra une réalité immédiate dans deux ans. Je sais que des vérificateurs de l'Union européenne évaluent actuellement la chaîne d'approvisionnement de notre industrie sidérurgique au Canada.
    Je sais que le plus grand obstacle à l'imposition d'ajustements à la frontière pour le carbone est la façon dont nous mesurons le carbone. Il y a beaucoup d'universités canadiennes qui travaillent là‑dessus. Les universités du monde entier y travaillent.
    Les agriculteurs exercent beaucoup de pressions dans le monde entier sur leurs propres assemblées législatives. Si la France n'a pas encore adopté l'AECG, c'est parce que ses propres agriculteurs ont protesté massivement, et les agriculteurs de l'Union européenne ont également protesté massivement contre ce qu'ils appellent des clauses miroirs. Cependant, ce sont des clauses de réciprocité. Une partie de la discussion porte sur l'imposition des MACF à des pays qui n'ont peut-être pas de lois environnementales semblables à celles de l'UE.
     C'est pourquoi il me semble important d'avoir cette conversation maintenant. C'est pour que nous puissions nous préparer, afin de ne pas nous faire prendre les culottes baissées, dans cinq ou dix ans, parce que la transition prend du temps.
    Je conviens que les agriculteurs canadiens font un travail extraordinaire. Nous devons mieux le faire savoir. Nous devons nous assurer que la façon dont nous mesurons notre empreinte carbone est fondée sur des données scientifiques et qu'elle est appuyée et acceptée partout dans le monde.
    Chez notre principal partenaire commercial, les républicains et les démocrates parlent d'imposer des ajustements à la frontière pour le carbone. Deux projets de loi ont déjà été présentés au Sénat à ce sujet.
    Je sais que cela peut sembler improbable pour certains d'entre nous, mais cela va devenir une réalité. Je peux le voir. Si nous continuons à commercer dans le monde, il y aura plus de pressions pour mettre fin à la délocalisation des émissions de carbone.
    Il ne s'agit pas pour le Canada d'imposer des mécanismes d'ajustement à la frontière pour le carbone; il s'agit de savoir comment nous préparer et comment nous assurer que le Canada sera fin prêt à faire face à cela. Bien sûr, nous avons nos mécanismes commerciaux et nos institutions commerciales que nous pouvons utiliser pour lutter contre l'OMC, etc., mais comment pouvons-nous faire en sorte que le Canada soit prêt à mieux outiller nos agriculteurs ici, au Canada?
    Je peux commencer par M. McCann.
     Je pense qu'il vaut la peine de revenir sur un commentaire que vous avez fait et que le président a fait plus tôt.
    L'été dernier, le gouvernement du Canada — le ministère des Finances — a mené des consultations au sujet de l'approche du Canada à l'égard des ajustements à la frontière pour le carbone. Il me semble parfaitement légitime que les parties prenantes qui essaient de voir et de comprendre ce que le gouvernement pourrait faire à cet égard pensent que c'est peut-être une possibilité qu'il envisage. Je crois que la dernière chose que le ministère des Finances a faite était une consultation demandant si le Canada devrait faire cela. Je tiens à le souligner.
    L'un des effets positifs de cette étude, je crois, est de nous rappeler que le Canada n'est pas une île. Ce que nous faisons dans le secteur agricole canadien fait partie d'un système mondial. Des règles du jeu équitables et la nécessité d'être concurrentiels, tant du point de vue environnemental qu'économique, sont vraiment importantes. Par conséquent, je crois que nous devons réfléchir davantage à ce que nous faisons aujourd'hui pour nous préparer à l'évolution du paysage à l'avenir.
    Le carbone pourrait en faire partie. On parle de biodiversité. La réalité, c'est que pendant tout ce temps, les mesures continuent d'être axées sur les subventions, pour lesquelles nous ne sommes pas concurrentiels, ou il y a très peu de mesures efficaces.
    Je pense que nous essayons tous de nous y retrouver. Comment réagissez-vous à ce genre de discours sur la nécessité d'agir et sur le fait que le Canada est l'un des pays qui ont été les plus agressifs? En ce qui concerne la taxe sur le carbone et ses répercussions sur l'agriculture, il est important de garder à l'esprit que l'agriculture canadienne est l'un des rares systèmes agricoles au monde qui paie un prix pour le carbone de cette façon. C'est l'une des différences.
     Nous devons vraiment réfléchir davantage au fait qu'il s'agit d'un paysage complexe et changeant et que le paysage va changer à l'avenir.
    Nous devrions faire preuve de leadership quant aux solutions possibles. Le monde a besoin d'une pensée créative et de nouvelles approches qui réconcilient la durabilité économique et environnementale, et qui améliorent notre système alimentaire durable tout en assurant la rentabilité et les moyens de subsistance des agriculteurs du monde entier. Bon nombre des instruments dont nous disposons aujourd'hui sont assez rudimentaires et peu efficaces. Je pense que le Canada pourrait faire beaucoup plus pour dire: « Voici à quoi ressemble l'approche canadienne. » Je ne pense pas que le Canada se penche autant qu'il le pourrait sur cette question.
(0950)
    Le problème tient en partie au fait que le monde a changé. Il y a quelques années, nous avions une présidence américaine qui n'avait pas peur d'imposer des tarifs. Toutes les parties se sont entendues sur les tarifs sur les VE et l'acier au Canada, alors le monde est en train de changer. Je dirais que ce sont des instruments qui ne sont pas des barrières au commerce ou des entraves au commerce, et les élus n'ont pas peur de les utiliser.
    Le G20 parle d'ajustements à la frontière pour le carbone. Il en parle. Cela fait partie de la conversation à la COP. Je ne sais pas s'ils en sont à la COP28, à la COP29 ou à la COP30, mais ils en parlent. Ces idées partent de de là, puis elles y reviennent et se répandent ensuite.
    Je crains simplement que si nous ne commençons pas à nous assurer de fournir les outils appropriés pour répondre à cela, nous laisserons nos agriculteurs dans une position non concurrentielle dans un proche avenir.
    Nous ne devrions pas réduire cela aux ajustements à la frontière pour le carbone. Nous avons beaucoup plus d'outils à notre disposition et nous devrions avoir une discussion beaucoup plus réfléchie sur ce à quoi ressemble le paysage concurrentiel.
    C'est pourquoi nous faisons cette étude.
    Je vois que vous levez la main, monsieur White. Le temps est écoulé, mais je vous permettrai de faire un bref commentaire, si vous le souhaitez.
    Merci, monsieur le président, de votre indulgence.
    Très brièvement, j'aimerais simplement dire que nous ne devrions pas oublier l'OMC. Cette question a été soulevée au cours des cinq dernières années, à la suite du sommet sur les systèmes alimentaires à Rome, et j'ai présenté ces arguments à maintes reprises. C'est ce qui s'en vient.
    Plutôt que d'essayer d'harmoniser ou de coordonner les ajustements à la frontière pour le carbone, nous devons nous en occuper à l'OMC dans le cadre d'un accord commercial afin que tout le monde respecte les mêmes règles et que ces règles ne deviennent pas des barrières commerciales déguisées et faussent le commerce.
    Nous devons consacrer le plus de temps possible à l'OMC et à son amélioration afin qu'elle puisse traiter les plaintes commerciales que cela entraînera. Nous devons veiller à ce que les règles soient fondées sur des données scientifiques et probantes et que cela puisse être mesuré scientifiquement, afin que tous les pays s'y conforment. J'aimerais simplement que nous n'oubliions pas l'OMC e son renforcement. Nous devrions mener la charge à cet égard.
    Merci.
    Merci, monsieur White.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur McCann, je vais commencer par vous.
    Avec le groupe de témoins précédent, nous avons parlé des façons dont on peut arriver à reconnaître ce qui a déjà été fait par les producteurs agricoles, lorsqu'il est question de mettre en œuvre de nouvelles politiques ou de nouvelles normes. Vous dites qu'il faut être vigilant et que les normes dont on parle actuellement ne sont pas encore en place, mais ce n'est pas une mauvaise idée de les étudier avant qu'elles soient en place, justement.
    Je vous écoute nous en parler davantage.
    Je reviens à ce que j'ai soulevé, c'est-à-dire qu'on devrait être vigilant à l'égard de tout ce qui se passe sur le terrain. Nous faisons face aujourd'hui à plusieurs éléments qui peuvent avoir une incidence sur la compétitivité, sur nos exportations et sur nos importations. On a parfois l'habitude de regarder seulement une partie du problème, alors que l'enjeu est plus grand. La durabilité et le commerce international sont de très grands enjeux qui comportent beaucoup d'aspects. On devrait être plus conscient de la manière dont tous ces éléments fonctionnent ensemble. Il faut être plus conscient du fait que, encore une fois, toutes les politiques nationales, non seulement au Canada, mais aussi aux États‑Unis et en Europe, ont une incidence sur le commerce durable.
(0955)
    J'aime bien l'aspect que vous soulevez, c'est-à-dire qu'il faut avoir une vision globale.
    J'entends beaucoup les gens exprimer la crainte que cela devienne des barrières non tarifaires. Nous savons que cela pose déjà énormément de problèmes. Nous en avons parlé tantôt avec les producteurs de porc. Les viandes ne peuvent pas entrer en Europe. Elles étaient censées pouvoir y entrer, mais ce n'est pas le cas. On ne veut pas non plus tomber là-dedans.
    M. White a soulevé l'idée d'entamer des discussions avec l'Organisation mondiale du commerce. Je ne sais pas si j'ai bien saisi ses propos, mais il pourra me le confirmer dans un instant.
    Comment voyez-vous cela? Ces discussions devraient-elles avoir lieu à l'international? C'est la première chose.
    Ensuite, comment pouvons-nous soutenir nos producteurs? Vous le savez, nos producteurs agricoles rivalisent avec des gens qui reçoivent beaucoup plus de soutien qu'eux. C'est déjà inégal, alors comment faire pour éviter que cette inégalité se creuse encore plus?
    En premier lieu, je pense qu'il est évident que le Canada devrait être un champion de l'Organisation mondiale du commerce. Le Canada devrait être l'une des voix les plus fortes pour appuyer tout ce qui se passe là-bas et renforcer le rôle de l'OMC aujourd'hui.
    Je pense que nous devrions être plus conscients de nos façons de faire. Encore une fois, ce matin, Mme Grossenbacher a dit que les producteurs aimaient plus l'approche de la carotte que celle du bâton. Les autres pays semblent aimer l'approche de la carotte plus que nous. Je pense qu'ici, au Canada, nous aimons l'approche du bâton, peut-être un peu trop, parfois. Nous devrions avoir de meilleurs réflexes pour trouver des façons de mieux soutenir et encourager le secteur, c'est-à-dire utiliser l'approche de la carotte au lieu d'utiliser l'approche du bâton.
    Nous sommes d'accord sur cela. Nous préférons tous les carottes, sauf celles provenant de la Chine qui entrent ici à bas prix et qui viennent faire concurrence à nos producteurs.
    Pouvez-vous me dire, en 30 secondes, comment faire pour reconnaître ce qui a déjà été fait?
    Je ne crois pas qu'on ait trouvé une bonne solution pour assurer cette reconnaissance.
    En fait, cela dépend vraiment du type de reconnaissance dont il s'agit. Parle-t-on d'une reconnaissance sur le plan fiscal? Est-ce qu'on veut soutenir les gens? Lorsqu'il est question d'ajustements à la frontière pour le carbone, est-ce qu'on veut assurer un équilibre dans la manière dont on mesure les émissions de carbone ici et ailleurs? Cela représente un défi.
    Dans certains cas, par exemple en ce qui concerne les pratiques sans travail du sol, il est évident que les producteurs eux-mêmes ont bénéficié de cet investissement et de ces pratiques.
    Parfois, le travail de reconnaissance est difficile. Je pense que cela manque et qu'il faut tenir des débats plus importants sur cette question.
    Merci, monsieur McCann.
    Monsieur White, quels sont vos commentaires sur ces mêmes questions?

[Traduction]

     Merci.
    Encore une fois, je veux simplement m'assurer que nous voyons les choses plus globalement et que l'accord commercial multilatéral que nous avons déjà est en mesure de nous aider et d'aider d'autres pays à déterminer ce qui est un obstacle au commerce et ce qui ne l'est pas.
    La difficulté, si les ajustements à la frontière pour le carbone se répandent dans le monde entier, sera de déterminer l'équivalence. Qui va arbitrer cela? Nous en avons déjà fait l'expérience avec l'UE. Si nous ne faisons pas les choses à sa façon, elle nous ferme la porte. Ce n'est pas vraiment fondé sur la science, et j'ai l'impression que cela va se produire dans ce cas‑ci, et que la situation va empirer. Nous avons besoin d'une OMC forte, d'une formulation et peut-être d'une entente sur un chapitre à ce sujet. Je ne sais pas ce que ce sera, mais il faut qu'il y ait un semblant de points communs et de règles pour que le commerce ne soit pas entravé.
    Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter quelque chose. Cela ressemble à du protectionnisme, et cela se produit partout dans le monde. C'est un exemple d'ajustement protectionniste. On pourrait appeler cela un ajustement correctif, mais je le qualifierais de protectionniste, parce que les commerçants le considéreront comme du protectionnisme si cela nuit à leur capacité de commercer.
    C'est ce que nous constatons actuellement pour le canola avec la Chine. Une mesure protectionniste du Canada a déclenché une attaque venimeuse contre notre industrie, et les agriculteurs vont payer cher la décision du Canada d'imposer des droits de douane à la Chine. Les agriculteurs ne méritent pas cela. C'est un grave problème. C'est un exemple de ce que nous voulons éviter.
(1000)
     Merci, monsieur White.
    Malheureusement, le temps est écoulé, mais je voulais m'assurer que vous étiez en mesure de faire valoir vos préoccupations au sujet du protectionnisme et du commerce.
    Monsieur Cannings, vous avez la parole.
    Merci.
     Je vais commencer par M. McCann.
    Je pense que nous parlons ici d'une situation hypothétique. À l'avenir, il pourrait y avoir des ajustements à la frontière pour le carbone dans le secteur agricole. Nous avons entendu dire que ce sera très compliqué et que cela ne se produira certainement pas dans un avenir très rapproché, comme l'Union européenne le fait dans d'autres secteurs.
    L'un des thèmes de votre déclaration préliminaire était l'harmonisation et le fait que, à bien des égards, la meilleure façon de nous préparer est d'essayer d'harmoniser nos pratiques avec celles de nos principaux partenaires commerciaux, en particulier les États-Unis.
    Vous avez parlé du projet de loi C-359. Je ne veux pas couper l'herbe sous le pied du président, car il voudra peut-être vous poser directement des questions à ce sujet, mais pourriez-vous mentionner quelques-unes des principales façons dont nous pourrions harmoniser nos pratiques agricoles, nos subventions et toutes les choses que nous faisons pour soutenir l'agriculture avec celles des États-Unis, afin de commencer à préparer un avenir qui pourrait inclure un ajustement à la frontière pour le carbone?
     J'aimerais commencer par dire qu'il est bon de prêter attention à ces questions qui vont se poser à l'avenir, mais que nous avons aujourd'hui d'autres questions à résoudre, comme celle du règlement de l'UE sur la déforestation, qui ne reçoivent peut-être pas toute l'attention, tout le soutien et tous les efforts quelles méritent.
    L'un des points que je veux faire valoir, c'est que nous devons nous assurer de régler adéquatement les problèmes dont nous sommes saisis aujourd'hui avant de trop nous inquiéter des problèmes qui nous attendent à l'avenir.
    Si vous considérez le besoin de redynamiser les approches multilatérales et la collaboration entre les pays, nous avons vu les États-Unis faire preuve de leadership dans le cadre d'une coalition sur la croissance durable de la productivité qui vise à accroître le dialogue et la collaboration entre les pays au sujet des outils dont nous aurons besoin pour mettre en oeuvre une croissance durable de la productivité et des pratiques qui peuvent être utilisées. C'est un exemple d'effort.
    Nous avons tenu une conférence, hier et aujourd'hui. Hier matin, le directeur général adjoint de l'Inter-American Institute for Cooperation on Agriculture est venu nous parler de la nécessité de mieux harmoniser les approches dans les Amériques. Il y a énormément de choses que le Canada pourrait faire pour assurer un leadership, appuyer le renforcement des capacités et les investissements et établir une meilleure coordination et une plus grande uniformité entre les politiques. Il y a, malheureusement, une certaine tendance à détourner le regard du bon travail que font des groupes comme l'IICA et que nous pourrions appuyer davantage, ce qui favoriserait proactivement et positivement des règles du jeu plus uniformes et équitables.
    Encore une fois, nous pourrions utiliser des carottes à l'échelle internationale, au lieu de compter sur le bâton.
    Merci.
    Nous avons également entendu plusieurs témoins mentionner — je suis sûr que vous l'avez entendu — l'importance d'avoir de meilleures données sur tout cela. Lorqu'on propose un système complexe, c'est une chose de calculer l'intensité en carbone de la production d'acier, mais c'en est une autre de le faire pour la production de boeuf, quand on a du bétail dans les champs, du bétail dans les parcs d'engraissement et du bétail qui est expédié d'un endroit à l'autre.
    J'ai entendu quelqu'un d'autre mentionner à quel point les données sont importantes lorsqu'on prend des légumes venant de diverses fermes et de divers endroits et qu'on les met dans le même sac — elles le sont en général, mais certainement dans ce genre de cas — et la façon dont le gouvernement pourrait appuyer cela pour le secteur agricole à l'échelle du pays de toutes sortes de façons, que ce soit par l'entremise de Statistique Canada ou autrement.
     Le gouvernement a une occasion en or de faciliter et de permettre plus de travail autour des mesures et des rapports et de le faire de manière à réduire le fardeau que cela pourrait imposer.
    En Europe, nous constatons que l'une des raisons pour lesquelles la Commission européenne n'est pas si agressive à l'égard d'un système d'échange de droits d'émission pour l'agriculture, c'est qu'il est très difficile d'obtenir des mesures justes, exactes et fiables.
    Ce n'est pas seulement une question de mesure. L'une des choses qui ont une incidence énorme sur l'empreinte carbone des émissions du secteur agricole chaque année, c'est le fait qu'elles soient sèches ou humides dans les Prairies. Même si vous pouvez vraiment mesurer l'empreinte carbone, que faites-vous pour votre ajustement à a frontière lorsque, tout à coup, nous avons une année très humide et que l'empreinte carbone de nos cultures de l'Ouest canadien augmente?
    Ces systèmes ne se prêtent pas aux mêmes types de mesures et d'approches qu'une aciérie. Ce sont des systèmes fondamentalement différents. Le système biologique qui existe en agriculture est si différent que ce n'est pas seulement une question de mesure. Même une fois que vous avez les données, qu'en faites-vous et comment pouvez-vous les utiliser de manière à obtenir ces résultats? C'est vraiment difficile.
(1005)
     Merci d'avoir mentionné la pluie. Je me disais, intuitivement, que si vous aviez une année pluvieuse dans les Prairies, l'empreinte carbone diminuerait parce qu'il y aurait plus de séquestration du carbone, mais cela vous montre à quel point je suis ferré sur ces questions.
    Monsieur White, pourriez-vous nous parler de l'harmonisation avec nos principaux partenaires commerciaux?
    Cela pourrait‑il prendre environ 30 secondes, monsieur White? Je sais que vous êtes capable.
    Merci. Je vais faire de mon mieux.
    Il faut une harmonisation. Il faut savoir ce que l'on mesure. Il faut savoir pour quoi on s'ajuste.
    Ma lacune conceptuelle est la suivante. Quel est le problème que nous essayons de régler ici? Je ne sais pas exactement ce que nous essayons de corriger ou de freiner. Est‑ce philosophique? Est‑ce la protection de certains aspects de notre industrie? Si le but et l'objectif étaient clairs, nous pourrions déterminer les mesures et les outils nécessaires pour régler le problème.
    Je ne sais pas exactement s'il s'agit d'un exercice théorique ou non, mais je suis entièrement d'accord avec M. McCann: nous avons besoin de données. Nous n'avons pas les données nécessaires, pas plus que les autres pays, pour faire les choses correctement.
    Merci.
     Je vais céder la parole à Mme Rood pour cinq minutes.
     J'aimerais également souligner que M. Epp, de Chatham-Kent—Leamington, siège au Comité. C'est une belle circonscription agricole, et il en est un bon défenseur.
    Nous allons passer à vous, madame Rood.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Monsieur White, j'ai bien aimé ce que vous avez dit tout à l'heure à mon collègue, M. Barlow, lorsque vous avez déclaré que les agriculteurs font tout ce qu'ils peuvent pour minimiser leurs coûts. Nous constatons que les coûts augmentent d'année en année pour les agriculteurs, et la taxe sur le carbone joue un rôle important à cet égard, surtout dans les Prairies, où nous transportons beaucoup de céréales, et de canola en particulier, des champs jusqu'à la ferme. Ces camions de transport, bien sûr, doivent utiliser du carburant. Le carburant diesel utilisé dans ces camions n'est pas exonéré de la taxe, contrairement à certaines des croyances exprimées par d'autres parties.
    Nous avons vu, d'après les données sur la taxe sur le carbone qui ont été publiées, même d'après les propres données du gouvernement libéral, que depuis que cette taxe a été imposée, nous n'avons pas constaté de réduction des émissions. Nous parlons maintenant d'ajouter une autre couche avec les ajustements à la frontière pour le carbone.
    Ce qui me préoccupe, c'est que nous n'avons pas vraiment parlé de l'aspect sécurité alimentaire de ces nouvelles mesures. Nous savons que le recours aux banques alimentaires a augmenté considérablement au cours des dernières années.
    Ma question s'adresse à M. McCann ou à M. White. Je suis simplement curieux de savoir quels sont, selon vous, les principaux secteurs alimentaires qui sont les plus susceptibles d'être touchés négativement, et si ces pressions inflationnistes auront un effet d'entraînement sur les marchés alimentaires ailleurs, ce qui pourrait mener à une plus grande insécurité alimentaire?
     C'est une excellente question.
     Je n'avais pas vraiment pensé à la sécurité alimentaire, parce que nous sommes inondés de nourriture. Pour ce qui est du canola, nous en cultivons beaucoup plus que ce que nous consommons au pays, alors s'il s'agit de notre sécurité alimentaire nationale, les résultats sont bons. S'il s'agit de la sécurité alimentaire à une échelle plus mondiale, ils ne sont peut-être pas aussi bons, parce que notre produit nourrit beaucoup de gens dans le monde.
     Pour ce qui est de la taxe sur le carbone, c'est un aspect que le gouvernement doit revoir, surtout pour les agriculteurs. Le projet de loi C-234 allégerait le fardeau des agriculteurs — pour revenir au bâton dont M. McCann à parlé plus tôt.
    Ce que je dis, c'est que la Chambre sera de nouveau saisie de cette question le 26 octobre. Le projet de loi C-234, dans sa forme originale, est notre approche préférée. Cependant, la réalité de la situation — et sans trop faire confiance au Sénat —, c'est que nous recommandons l'adoption du projet de loi C‑234 modifié. Cela n'aidera pas autant d'agriculteurs, mais aidera ceux qui sont en difficulté en ce moment, et nous avons besoin d'une récolte hâtive pour que ces agriculteurs obtiennent un allégement fiscal.
    Les émissions ne diminuent pas parce que les agriculteurs n'ont pas d'autre solution, et cela devient une taxe pure et simple. Ce bâton agit sur les agriculteurs comme une massue, et ils ne peuvent rien faire d'autre que de l'accepter et de réduire leur bénéfice net.
    S'il vous plaît, adoptez le projet de loi C-234, et soulagez ces agriculteurs. Un bon nombre d'entre eux subissent actuellement les contrecoups de la Chine, et ils en ressentiront beaucoup plus au cours des six prochains mois.
(1010)
     Merci.
     Je cède la parole à M. McCann.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion de faire des commentaires à ce sujet, car je crois que la dernière fois que j'ai comparu devant le Comité, certains membres ont fait preuve de créativité en ce qui concerne certaines des choses que j'ai dites au sujet des données et de la taxe sur le carbone.
    La prémisse de base d'une taxe sur le carbone est de rendre les choses plus coûteuses. Si la taxe sur le carbone n'a pas fait augmenter le prix des aliments, c'est parce qu'elle n'a pas atteint ses objectifs stratégiques. Je pense qu'il faut appeler un chat un chat lorsqu'il s'agit de la prémisse de cet objectif.
     Je pense qu'en réalité, cela n'a pas d'impact. Il existe de bien meilleures solutions. Si nous nous soucions vraiment des émissions en agriculture, il existe de meilleures approches qui auront un meilleur impact au bout du compte.
     Je cède ma dernière minute à M. Epp.
    Il vous reste environ 40 secondes, monsieur Epp.
     Nous avons beaucoup parlé aujourd'hui de l'impact, principalement sur les produits primaires à l'extérieur de la ferme, qui passent peut-être par une étape minimale, avant de se retrouver sur les marchés internationaux.
    Pour ceux d'entre vous qui ont déjà acheté un sac de légumes surgelés produit dans le sud de l'Ontario, le chou-fleur est souvent cultivé au Mexique; il est parfois divisé en fleurons aux États-Unis, congelé, expédié au Canada et mélangé à des carottes cultivées en Ontario. Le petit maïs sucré que vous obtenez vient habituellement de la Thaïlande, en fait. Les carottes viennent du Canadas. Le brocoli peut provenir du Canada ou des États-Unis. Le tout est mélangé dans le sud de l'Ontario et surgelé. Le produit est principalement commercialisé sur le marché national, mais il est souvent exporté, parfois aux États-Unis. Pensez‑y un instant lorsque vous envisagez un ajustement à la frontière pour le carbone.
    Deuxièmement, Red Gold, l'un des plus importants transformateurs privés de tomates de l'Illinois et de l'Indiana, est en fait le plus grand importateur de pâte de tomate de la Californie aux États-Unis. Les tomates sont cultivées dans deux systèmes de production totalement différents. L'un d'eux est dans un désert aride de Californie, et ces tomates sont mélangées avec des tomates du Midwest, qui sont cultivées de façon assez semblable à nos tomates. Red Gold vend à une petite entreprise appelée Walmart, qui est probablement omniprésente. N'est‑ce pas exact?
    Comment mettre en œuvre le...
    Merci, monsieur Epp. Ne me faites pas sortir mon maillet. Vous avez fait valoir votre point de vue.
    Madame Murray, c'est à vous pour cinq minutes.
     Merci beaucoup. C'est avec plaisir. Quelle conversation intéressante.
    Je remercie les témoins de leur présence. Je vais simplement poser quelques questions pour essayer, en tant que citadine, de comprendre les points de vue que vous apportez.
    Monsieur White, vous avez posé une question au sujet de la tarification du carbone et vous avez demandé ce que nous essayons de corriger. Je dirais, de façon générale, que nous voulons limiter notre impact sur les changements climatiques, et c'est l'élément essentiel qui sous-tend les discussions d'aujourd'hui.
    Monsieur McCann, vous avez dit qu'il y a de meilleures approches, au bout du compte, que de mettre un prix sur le carbone pour réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'agriculture, alors que proposez-vous?
    J'hésite toujours à prendre la parole avant M. White parce que j'ai l'impression que j'empiète beaucoup sur son temps. Je peux peut-être dire, très rapidement, qu'il existe de très bons documents sur les pratiques en cours dans le monde pour soutenir et encourager, par exemple, les solutions de la chaîne de valeur au problème de la durabilité, en reconnaissant que si vous êtes un éleveur de bovins, ce que vous devez faire pour réduire vos émissions est très différent de ce qu'un producteur de canola doit faire.
    Ce que nous devons faire, d'abord et avant tout, c'est créer des systèmes qui reconnaissent ces différences et qui donnent aux chaînes de valeur, aux agriculteurs, aux transformateurs et aux autres les outils dont ils ont besoin pour encourager l'action.
     Je vais vous en dire un peu plus à ce sujet. Merci.
    En ce qui concerne les agriculteurs, ils n'ont aucun moyen de répercuter les coûts de ces choses. Ils n'ont pas d'autres sources d'énergie. En théorie, une taxe fonctionnerait si vous aviez des solutions de rechange pour modifier leur comportement. Ils n'ont tout simplement pas accès à la technologie qui leur permettrait d'abandonner le système axé sur les combustibles fossiles qu'ils ont actuellement. Sans solution de rechange pour leurs besoins énergétiques, ils n'ont qu'à payer la taxe, et les émissions ne vont pas bouger, parce qu'ils vont continuer à faire ce qu'ils doivent faire pour cultiver leurs champs et produire leurs récoltes.
    Ils pratiquent une agriculture durable. Ils ont beaucoup réduit leurs émissions et leur empreinte environnementale, surtout dans la production de canola, qui est passée à la culture sans labour et à la haute technologie — tout ce qu'ils peuvent faire —, mais s'ils doivent sécher leur grain...
(1015)
    Excusez-moi, mais j'ai encore quelques questions.
    Cela me semble être une excellente réponse, à savoir que cela les a incités à innover et à se tourner vers l'agriculture sans labour. Cela semble être un résultat positif de la tarification du carbone, même si ce n'est pas aussi direct.
    Je crois avoir entendu dire que le système d'échange européen ne couvre pas le carbone agricole, de sorte que l'ajustement à la frontière pour le carbone ne couvrira probablement pas non plus les questions liées au climat. Je n'ai pas compris cela, et j'aimerais savoir comment on pourrait mettre en place un système de tarification international qui contribuerait à stimuler la productivité et à réduire les émissions. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
     L'une des raisons pour lesquelles on l'a fait pour l'acier, par exemple, c'est qu'il y a un prix sur le carbone en Europe pour les producteurs d'acier. Cependant, il n'y a pas de prix sur le carbone en Europe si vous êtes un producteur agricole. Vous ne pouvez donc pas utiliser un ajustement à la frontière pour le carbone pour égaliser les règles du jeu s'il n'y a pas un prix à payer d'un côté.
    Encore une fois, l'approche des Européens en matière d'agriculture a tendance à reposer sur une multitude de carottes. Si vous regardez ce qu'ils essaient de faire en ce qui concerne le carbone du sol, par exemple, vous verrez qu'ils cherchent à encourager une agriculture favorisant la captation du carbone dans le sol et cela de façon positive.
    Encore une fois, ils ont tendance à le faire dans des conditions difficiles. Les agriculteurs européens ont de nombreuses doléances. Cependant, la prémisse est différente en ce sens qu'ils n'abordent pas cela sous la forme d'une taxe; ils cherchent à faire un meilleur travail en créant des incitatifs très généreux pour encourager la transition.
    D'accord, c'est donc...
    Puis je apporter une rectification à votre commentaire, madame?
     L'innovation que les agriculteurs ont mise en œuvre avec la culture sans labour et en atténuant considérablement leur empreinte écologique s'est produite il y a 20 ans. Cela n'avait rien à voir avec la taxe sur le carbone. Les agriculteurs innovent et innovent bien, même en l'absence de cette taxe.
    Malheureusement, nous n'avons plus de temps. Je pense qu'une bonne question à propos de tout cela est de savoir comment faire connaître nos succès sur le marché international.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur White, je vais continuer avec vous.
    Vous venez de demander qu'on adopte le projet de loi C‑234. La façon de l'adopter rapidement, c'est de l'adopter dans la forme sous laquelle il est revenu du Sénat, afin d'éviter qu'il soit renvoyé là-bas, car on sait qu'il pourrait y passer beaucoup de temps, si on se fie au projet de loi C‑282, qui y est depuis plus d'un an. Le Bloc québécois est d'accord pour adopter tel quel le projet de loi C‑234. Je lance donc l'appel à mes collègues pour qu'il soit adopté la semaine prochaine et qu'il soit en vigueur immédiatement.
    Par ailleurs, comment fait-on pour établir des réglementations visant une amélioration du rendement? Vous avez parlé de le faire à travers l'Organisation mondiale du commerce, et cela a bien de l'allure.
    Cela dit, mon souci est de tenir compte de ce qui a déjà été fait. Prenons l'exemple d'un producteur qui utilise le semis direct ou qui fait déjà de la rotation des cultures, par rapport à un autre producteur qui ne fait pas cela et qui utilise plus de pesticides et d'herbicides. On sait qu'il y a une quantité qui est nécessaire, mais des efforts peuvent être faits. Comment fait-on pour reconnaître ce qui a déjà été fait au Canada et au Québec, par rapport aux pays étrangers avec lesquels on fait du commerce? Ce n'est pas une chose facile.

[Traduction]

    Vous avez tout à fait raison. Ce n'est pas facile, car il n'y a pas de comparaison directe. Même dans l'Ouest canadien, les choses sont différentes d'une exploitation à l'autre, d'une région à l'autre et d'une municipalité à l'autre. Lorsqu'on commence à faire des comparaisons avec d'autres systèmes dans le monde, il devient très difficile de normaliser cela, parce qu'il n'y a pas de solution universelle ou de solution unique pour l'ensemble du Canada. Il est difficile d'adopter une approche universelle à la frontière en raison de toutes ces différences.
    Je n'essaie pas de trop compliquer les choses, mais c'est la réalité pratique de la façon dont les systèmes sont conçus.
     Je crois fermement qu'en matière de durabilité, les agriculteurs savent ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas dans leur exploitation. Chacun d'entre eux pense aux générations à venir, parce qu'il veut laisser les terres en meilleur état qu'il ne les a reçues. L'incitation à l'amélioration continue de la durabilité est donc dans leur ADN, dans leurs modèles d'affaires et dans l'avenir de leurs familles. Il est très difficile d'essayer de normaliser cela au moyen de la réglementation. C'est un très gros défi.
(1020)
     Merci, monsieur White.
    Merci, monsieur Perron.
    M. Cannings est le suivant.
     Merci.
    Je vais m'adresser à vous, monsieur White, parce que vous avez été traité sans ménagement toute la journée, alors je vais commencer par vous.
    Vous avez mentionné certains des défis que tous les secteurs doivent relever en matière de commerce international. Votre secteur en particulier a été touché par la décision d'imposer des droits de douane élevés sur les VE chinois, l'acier et l'aluminium qui entrent au Canada, parce que la Chine a immédiatement infligé des représailles à l'un des grands secteurs du Canada, celui du canola.
    Vous avez également mentionné les répercussions qu'un ajustement à la frontière pour le carbone pourrait avoir sur les coûts supplémentaires pour vos agriculteurs. Si nous imposons un ajustement à la frontière pour le carbone visant l'acier et l'aluminium, cela pourrait faire augmenter le coût de la machinerie agricole, par exemple. Je dirais que si vous cherchez de l'acier bon marché, il viendra de la Chine, et ce pourrait ne plus être le cas désormais avec ces tarifs.
    Je me demande si vous pourriez nous en dire davantage à ce sujet et sur les complications. C'est compliqué, et c'est un autre aspect de la question.
     Droite. Je vous remercie d'avoir parlé de nouveau de la Chine.
     Je profite de l'occasion pour dire que la CCGA participe à l'enquête antidumping de la Chine sur le canola. C'est une grosse affaire [Note de la rédaction: difficultés techniques]

[Français]

    Monsieur le président, il y a un problème de connexion.

[Traduction]

     Il y a peut-être un problème, monsieur White, avec votre connexion Internet.
     Pouvez-vous m'entendre maintenant?
    Continuez, et nous verrons si nous avons l'interprétation.
     J'allais parler de la question de la Chine. La CCGA, avec les 40 000 membres que nous représentons, participe et s'est inscrite à...
    Je suis désolé, monsieur White. Il y a une certaine instabilité Internet en ce moment avec votre connexion. Je suis désolé, mais nous allons devoir faire une pause.
     Monsieur McCann, voulez-vous intervenir brièvement pendant 30 secondes?
     Je me contenterai peut-être de souligner encore une fois à quel point cette question est cruciale et à quel point elle souligne la nécessité d'adopter une approche beaucoup plus réfléchie à l'égard des relations du Canada avec ses partenaires du monde entier, tant les États-Unis que la Chine. Encore une fois, je pense qu'il n'y a pas de solutions faciles pour le Canada, mais nous devons être beaucoup plus conscients des conséquences.
    Cela n'aurait pas dû être une surprise. Il semble que, parfois, cela ait pris certaines personnes par surprise. Nous devons mieux nous préparer et être prêts à réagir.
     Merci, monsieur Cannings.
    Je n'ai qu'une brève question à poser.
    Monsieur White, nous pouvons voir si votre problème d'Internet est réglé.
     Je pense qu'il est très clair, d'après les témoignages, que la complexité d'un mécanisme d'ajustement à la frontière sera très difficile pour l'agriculture, tant du point de vue de l'importation que de l'exportation. Bien. Qu'en pensez-vous?
     Monsieur White, votre organisation, par l'entremise des producteurs de grains et d'autres, a pour objectif de réduire les émissions et de continuer à favoriser la durabilité. Cela a un coût.
     Monsieur McCann, vous avez parlé de plus de carottes et peut-être moins de bâtons, mais cela a un coût pour les contribuables canadiens et pour le Trésor public. Comment est‑ce comptabilisé?
    Nous avons également entendu dire, et nous le savons, que l'agriculture canadienne est concurrentielle sur le plan de l'intensité des émissions de carbone. Êtes-vous d'avis que nous ne tenons tout simplement pas compte de cela à l'échelle internationale, que le Canada n'est pas en mesure d'avoir un avantage concurrentiel dans cette conversation, ou que nous devrions simplement continuer à subventionner massivement pour obtenir des résultats environnementaux sans jamais que cela soit comptabilisé par des pays qui ne font pas la même chose à l'échelle internationale? Est‑ce une approche de club, avec un club de pays qui font quelque chose et qui ne sont peut-être pas assujettis à un certain type de tarif, et ensuite les pays qui ne font manifestement rien devraient payer?
    Si je parlais aux agriculteurs de tout le pays, ils me diraient: « Je comprends que c'est important pour la durabilité environnementale, mais je ne veux pas être désavantagé sur le plan de la concurrence dans le monde. » Comment concilier ces deux choses? S'il n'y a pas de mécanisme d'ajustement pour le carbone, y a‑t‑il un leadership? Y a‑t‑il des considérations quelconques? Essayons-nous simplement de dissocier complètement ces deux éléments?
(1025)
    Je pense que c'est important. Vous avez parlé de qui allait payer. Il n'est pas nécessaire que ce soit les gouvernements. Cela peut être les consommateurs. Cela peut être d'autres personnes qui aident les agriculteurs à faire les investissements nécessaires. Je pense qu'on attribue une valeur aux aliments à faible teneur en carbone, qui n'existe probablement pas.
    L'un des défis, c'est qu'il est difficile pour nous de regarder ce qui se fait ailleurs dans le monde et de voir quels pays sont prêts à dépenser davantage pour les aliments canadiens en raison de leur faible empreinte carbone. C'est une chose d'avoir cette rhétorique de vouloir [Note de la rédaction: difficultés techniques], mais la réalité est qu'il est très difficile de trouver des gens qui sont prêts à payer pour des résultats plus durables.
     Monsieur White, je pense que nous avons encore des problèmes avec votre son.
     Nous allons nous arrêter ici.
     Nous avons légèrement dépassé le temps alloué, mais je pense que cela reflète les bonnes conversations que nous avons eues et l'intérêt général que suscite le sujet.
     Chers collègues, nous y reviendrons mardi après-midi.
    En votre nom, j'aimerais remercier M. McCann et M. White de leurs témoignages, de leur contribution et de leur leadership en agriculture.
     Nous nous reverrons mardi.
    La séance est levée.
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