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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 090 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 février 2024

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Français]

     Je déclare la séance ouverte.
    Chers collègues, bienvenue à la 90e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
    Je vais commencer par quelques rappels. La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité. Bien sûr, les captures d'écran ou la prise de photos de votre écran ne sont pas autorisées.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 19 octobre 2023, le Comité reprend son étude des efforts de stabilisation du prix des aliments.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins. Aujourd'hui, du Bureau de la concurrence Canada, nous accueillons Anthony Durocher, sous-commissaire, Direction générale de la promotion de la concurrence, et Bradley Callaghan, sous-commissaire délégué, Direction de la politique, de la planification et de la promotion.

[Traduction]

    J'aimerais également souhaiter la bienvenue au Comité à M. Williams qui, je pense, se joindra à nous dans un instant à la place de M. Steinley. Voici M. Williams. Soyez le bienvenu au Comité.
    Aujourd'hui, M. McLeod remplace M. MacDonald. Bienvenue, monsieur McLeod.
    Chers collègues, nous serons avec le Bureau de la concurrence pendant la première heure de notre étude, puis nous passerons à huis clos pour les travaux du Comité.
    Merci aux représentants du Bureau de la concurrence du Canada. Nous allons leur accorder cinq minutes. Nous avons une certaine marge de manœuvre, alors si vous avez besoin d'un peu plus de temps, je me montrerai flexible. Nous passerons ensuite aux questions.
    Messieurs, c'est à vous.

[Français]

    Je m'appelle Anthony Durocher. Je suis sous-commissaire à la Direction générale de la promotion de la concurrence. Je suis accompagné de mon collègue Bradley Callaghan, sous-commissaire délégué à la Direction de la politique, de la planification et de la promotion.
    J'aimerais avant toute chose reconnaître l'importance de votre étude. Nous croyons qu'elle a grandement contribué à influencer et à faire progresser le discours public sur la question du prix des aliments. Les témoignages présentés devant ce comité ont profité au Bureau de la concurrence dans ses efforts pour protéger et promouvoir la concurrence dans le secteur de l'épicerie.
    Le Bureau de la concurrence est un organisme indépendant d'application de la loi qui protège la concurrence et en fait la promotion au profit des consommateurs et des entreprises du Canada.
     Nous faisons ce travail parce que la concurrence favorise la baisse des prix et l'innovation, tout en alimentant la croissance économique. Nous assurons et contrôlons l'application de la Loi sur la concurrence en menant des enquêtes et en prenant des mesures pour lutter contre les pratiques commerciales anticoncurrentielles qui nuisent aux consommateurs, à la concurrence et à l'économie.

[Traduction]

     En juin 2023, le Bureau a publié son rapport d'étude sur le marché de l'épicerie de détail. Notre rapport a révélé que les prix des produits d'épicerie ont augmenté à leur rythme le plus rapide en plus de 40 ans et que, depuis la fin de 2021, ils ont largement dépassé le taux d'inflation général de l'économie canadienne. En outre, le secteur de l'épicerie de détail est devenu beaucoup plus concentré au fil du temps. Aujourd'hui, la plupart des Canadiens achètent leurs produits alimentaires auprès de quelques géants de l'alimentation qui exploitent la plupart des bannières d'épicerie, y compris les principales chaînes de magasins de vente au rabais.
     Notre rapport formule un certain nombre de recommandations fondées sur des principes à l'intention des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux afin d'améliorer la concurrence dans le secteur de l'épicerie. Il s'agit notamment de stimuler l'innovation, de soutenir la croissance des épiciers indépendants et d'encourager l'entrée des épiciers internationaux par l'intermédiaire de politiques et de programmes gouvernementaux, de limiter, voire d'interdire, les contrôles de propriété et, enfin, de fixer des exigences accessibles et harmonisées concernant l'affichage du prix unitaire.
     Nous continuons à travailler activement avec les décideurs politiques sur les conclusions et les recommandations de notre rapport.
     Nous sommes conscients que l'inflation du prix des aliments reste un problème important pour les Canadiens et que nous devons poursuivre notre travail dans le secteur de l'épicerie avec une vigilance et des efforts de surveillance accrus pour faire en sorte que les Canadiens bénéficient d'un plus grand choix et de produits d'épicerie plus abordables. Cela passe notamment par le fait de mener des enquêtes approfondies et rapides sur les allégations d'actes répréhensibles. C'est dans cette optique que nous menons actuellement une enquête dynamique sur l'application de la loi dans le secteur de l'épicerie concernant l'utilisation des contrôles de propriété.
    Les récentes modifications apportées à la Loi sur la concurrence, notamment par le truchement du projet de loi C‑56, ont donné plus d'outils pour permettre au Bureau de la concurrence de protéger et de promouvoir la concurrence au Canada. Ces modifications marquent une étape clé dans la modernisation du droit de la concurrence au Canada. Le Bureau s'est engagé à utiliser ces nouveaux outils dès que cela deviendrait nécessaire pour protéger la concurrence. De plus, comme vous le savez, le projet de loi C‑59 propose plusieurs autres modifications qui, se elles sont adoptées, renforceront davantage la Loi sur la concurrence du Canada.
     Avant de répondre à vos questions, j'aimerais souligner que la loi oblige le Bureau à mener ses enquêtes en privé et à protéger la confidentialité des renseignements qu'il recueille. Cette obligation pourrait nous empêcher d'être en mesure de discuter d'enquêtes passées ou en cours.
     Je tiens à remercier le Comité de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui. Sachez que nous serons ravis de répondre à vos questions.
(1105)
    Merci beaucoup, monsieur Durocher et monsieur Callaghan.
    C'est exactement ce que nous allons faire. Nous allons commencer par M. Williams, pour un maximum de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue au Bureau de la concurrence à ce comité.
    Pour ceux qui nous écoutent à la maison, je compare toujours le Bureau de la concurrence au bureau du shérif. Nous avons le shérif et, aujourd'hui, nous avons l'adjoint. C'est un plaisir de vous recevoir au Comité, messieurs.
    J'aimerais d'entrée de jeu parler des fusions et des acquisitions. Soit dit en passant, le rapport de votre étude sur les épiceries est très bien fait. Un point saillant est qu'en 1986, nous avions huit chaînes d'épicerie appartenant à des Canadiens, alors qu'en 2024, nous en avons trois qui détiennent 80 % du marché et deux autres, américaines, qui ont fait leur entrée sur le marché canadien depuis 1986, c'est‑à‑dire Walmart et Costco, qui détiennent chacune environ 10 % du marché.
    Au cours de votre mandat, vous avez toujours agi dans le respect des lois et des pouvoirs qui vous ont été conférés pour examiner ces fusions et acquisitions. En regardant ce qui s'est passé au cours des huit dernières années, nous constatons que vous en avez examiné trois en particulier. La première était l'achat de Jean Coutu par Metro. Ensuite, il y a eu Sobeys, qui a fait l'acquisition de Farm Boy et de Longo's. Avez-vous approuvé ou recommandé d'approuver chacune de ces fusions?
    Le Bureau examine les fusions, mais il ne les approuve pas nécessairement. Notre rôle est plutôt d'évaluer s'il y a lieu de s'y opposer ou de les contester.
    Ces dernières années, il y a eu des fusions que nous n'avons pas contestées faute de preuves. Dans d'autres cas — par exemple, pour l'acquisition de Shoppers par Loblaws, l'acquisition de Safeway par Sobeys, ou même avant cela, l'acquisition de Provigo par Loblaws —, nous avons eu recours à des mesures correctives et à des désinvestissements — la vente de magasins ou d'actifs — pour essayer de préserver la concurrence.
    Parlez-nous d'un cas où vous êtes intervenus directement au cours des deux dernières années. Avez-vous approuvé la fusion de Rogers et Shaw, oui ou non?
    Il s'agit d'une transaction que nous avons tenté de bloquer devant le Tribunal de la concurrence, mais ce dernier a statué en faveur de la fusion. Il a rejeté notre demande. Par conséquent, la fusion a bien eu lieu, malgré notre tentative de la bloquer.
    Là où je veux en venir, c'est que nos recherches ont montré que les fusions et les acquisitions entraînent une hausse des prix. Au début du mois dernier, Rogers a annoncé qu'il augmentait les tarifs de téléphonie cellulaire de ses clients de 9 dollars par mois. Les données pour l'Amérique du Nord montrent que les fusions et les acquisitions entraînent des prix plus élevés dans 95 % des cas. Étant donné les pouvoirs dont dispose votre bureau pour examiner les fusions et les acquisitions et considérant la consolidation massive qu'il y a eu dans ce secteur entre 1986 et 2024, le fait qu'il n'y ait plus que trois entreprises canadiennes en concurrence est probablement une explication très plausible de l'augmentation des prix. Êtes-vous d'accord avec ce constat?
    Lorsque nous parlons de l'examen des fusions, nous disons souvent qu'il s'agit de la première ligne de défense de la concurrence dans l'économie. Les fusions peuvent en effet se traduire par des changements structurels dans les industries et, conséquemment, par une plus grande concentration et un recul de la concurrence. Les fusions préjudiciables se traduisent généralement par des prix plus élevés, moins d'innovation et un choix plus restreint.
    Bien entendu, tout dépend des éléments de preuve recueillis lors de l'examen de chacune d'elles.
    Il ne reste plus beaucoup d'épiciers indépendants. Il n'en reste environ que 6 000 à l'échelle du Canada. L'un d'entre eux est Freson Brothers, en Alberta. Je parle souvent à ces gens. C'est l'un de ceux que nous aimerions voir se développer. C'est une épicerie canadienne dont nous aimerions voir la part de marché augmenter. Le plus gros problème que nous avons actuellement, c'est l'intégration verticale. Certains de ces grands épiciers, Sobeys et Loblaws en particulier, contrôlent également le marché de gros. La concurrence ne se joue donc pas seulement au niveau de l'épicerie, mais aussi dans le commerce de gros.
    Pensez-vous qu'il serait aussi nécessaire de nous pencher sur cet aspect du secteur, c'est‑à‑dire pas seulement l'épicerie et le commerce de détail, mais aussi la façon dont le marché de gros dicte les prix?
(1110)
    Oui, c'est assurément un aspect que notre rapport indique comme étant prioritaire pour les épiciers indépendants, c'est‑à‑dire le fait que, dans de nombreux cas, ces derniers sont obligés d'acheter leurs produits auprès de concurrents intégrés verticalement — leurs plus grands concurrents —, parce qu'ils n'ont pas l'envergure voulue pour faire ces achats eux-mêmes.
    Bien sûr, certains se joignent à des groupes d'acheteurs pour être en mesure de faire ces achats, mais nous sommes conscients du fait qu'il existe une intégration verticale tout au long de la chaîne et que les indépendants n'ont parfois pas le choix de composer avec elle. Nous devons être vigilants à l'égard des comportements anticoncurrentiels potentiels qui prennent la forme d'une fermeture de l'accès aux intrants ou d'un préjudice causé aux concurrents du fait que le fournisseur est conscient que ces derniers dépendent de ses intrants pour être concurrentiels.
    Un autre phénomène qui s'est produit récemment — cela se produit depuis un certain temps, mais c'est plus présent maintenant —, c'est celui de la réduflation, c'est‑à‑dire la fabrication de contenants de plus en plus petits. Lorsque nous parlons de vente en gros, nous parlons également de la façon dont Loblaws et Sobeys fabriquent également des produits — ce sont les marques Choix du Président et Compliments. La réduflation a également eu une incidence sur la situation actuelle.
    L'une des recommandations de votre rapport est de rendre cette pratique illégale. Lorsque le gouvernement a présenté son projet de loi visant à renforcer les pouvoirs de la Loi sur la concurrence, vous a‑t‑il consulté? Pourquoi n'a‑t‑il pas rendu la réduflation illégale?
    Notre rapport ne s'attaque pas de front à ce phénomène, même si nous y reconnaissons qu'il s'agit d'un problème. De nombreux Canadiens nous en ont parlé. À bien des égards, la réduflation peut s'apparenter à une augmentation des prix ou à l'exercice d'un pouvoir de marché sur le marché.
    De notre point de vue, la concurrence est une solution clé pour empêcher cela, car en fin de compte, plus il y a de concurrence sur un marché, y compris entre les fabricants, moins les entreprises ont la possibilité d'augmenter les prix ou de réduire la valeur des produits, y compris par la réduflation.
    Votre temps est écoulé. Merci beaucoup, monsieur Williams.
    Merci, monsieur Durocher.

[Français]

     Monsieur Drouin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs les témoins, je tiens à vous remercier. Ce n'est pas votre première comparution devant notre comité.
    Depuis la dernière fois que vous êtes venus ici, des PDG de grandes chaînes d'alimentation nous ont dit à maintes reprises de ne pas nous inquiéter et qu'ils allaient donner au Bureau de la concurrence tous les documents nécessaires pour qu'il puisse bien analyser les prix et déterminer si de trop grands profits avaient effectivement été réalisés sur la vente de nourriture. À maintes reprises lors de son témoignage, M. Weston a dit que son entreprise n'avait pas réalisé de profits plus élevés sur la nourriture, mais plutôt sur les médicaments, ce qui n'est pas nécessairement plus honorable.
    Lors de votre dernière comparution devant notre comité, vous disiez que vous n'aviez pas le pouvoir d'exiger des documents de ces entreprises. Maintenant que le projet de loi C‑56 a été adopté, est-ce que vous l'avez?
    Effectivement, le projet de loi C‑56 nous donne dorénavant le pouvoir d'effectuer des études et d'obtenir des ordonnances visant la production de documents.
    Dans le cadre de notre étude de marché, la coopération des grands épiciers a grandement varié selon les parties prenantes et, de manière globale, elle a été inadéquate. Cela dit, il était important pour nous d'étudier les données financières de cette industrie et d'analyser ses marges brutes pour en isoler les profits découlant de la vente d'aliments, puisque les détaillants vendent aussi plusieurs autres catégories de produits.
    Selon l'information que nous avons reçue, en étudiant l'évolution des marges brutes pour les cinq années couvrant la période de 2017 à 2022, nous sommes persuadés que ces marges des grands épiciers ont augmenté de manière modeste, mais quand même notoire. Nous constatons des augmentations de 1 à 2 %, ce qui est quand même modeste, puisque c'est vraiment le volume qui compte dans une industrie comme celle-là. Cependant, ces augmentations peuvent être importantes pour les Canadiens et les Canadiennes.
(1115)
    D'accord.
    Cette semaine, un professeur nous a parlé de la concentration du marché, qui peut éventuellement mener à une situation de position dominante au détriment des consommateurs. Lorsqu'il est question d'une telle position dominante, quelles sont les différences entre les pouvoirs que vous donnait l'ancienne version de la Loi sur la concurrence et ceux que vous donne désormais la nouvelle version de la Loi? Quels sont ces nouveaux pouvoirs, et qu'est-ce que la nouvelle version de la Loi vous permet de faire maintenant que vous ne pouviez pas faire auparavant?
    Des changements importants ont effectivement eu lieu avec l'adoption du projet de loi C‑56 à ce sujet. Par le passé, pour prouver un cas d'abus de position dominante, il fallait satisfaire trois critères: premièrement, montrer qu'une compagnie ou un groupe de compagnies dominent le marché; deuxièmement, prouver l'existence d'agissements anticoncurrentiels; et, troisièmement, démontrer que ces agissements ont des répercussions sur le marché.
    En vertu de l'article 79 de la nouvelle version de la Loi sur la concurrence, il faut encore prouver qu'il y a dominance. Cependant, il n'est maintenant nécessaire de prouver qu'un seul des deux autres critères, c'est-à-dire qu'il existe des agissements anticoncurrentiels ou qu'il y a des répercussions sur le marché. Le cas échéant, le Bureau de la concurrence peut demander une ordonnance d'interdiction auprès du Tribunal de la concurrence pour faire cesser les agissements en question. Il s'agit quand même d'un changement important à la Loi.
    L'article 79 de la nouvelle version de la Loi apporte aussi des changements sur le plan des sanctions administratives pécuniaires. De plus, avec les études de marché que nous pouvons dorénavant effectuer, l'élimination de la défense reposant sur l'argument de l'efficience dans le cadre de l'examen d'une fusion va améliorer la situation. En effet, le Bureau de la concurrence sera dorénavant mieux positionné pour protéger la concurrence dans le cas de fusions.
    D'accord.
    J'ai entendu dire que la nouvelle version de la Loi va empêcher une entreprise de vendre un produit en deçà de son coût de production, une stratégie de mise en marché qu'emploient souvent les épiciers avec leurs produits d'appel. Je ne sais pas si c'est vrai, et j'aimerais que vous confirmiez si la nouvelle version de la Loi va effectivement empêcher le recours à de telles stratégies.
    Non. Il n’y a pas de changement à la capacité des compagnies de recourir à des stratégies comme celle des produits d'appel. Cette pratique a toujours existé dans la Loi.
    Par contre, une pratique d'agissement anticoncurrentiel pouvant constituer un abus de position dominante est celle du prix d'éviction.
    Cette pratique consiste à fixer un prix inférieur au coût du produit. Le but est d'éliminer un concurrent plutôt que d'avoir une concurrence saine en matière de prix. On veut voir des compagnies se faire concurrence et baisser le prix, mais, dans certaines circonstances très particulières, le prix demandé pourrait être un prix d'éviction visant vraiment à éliminer un concurrent. Il est possible que de tels cas soient considérés comme des cas d'abus de position dominante.
    Puis, selon…
    Malheureusement, monsieur Drouin, votre temps de parole est écoulé.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Drouin.
    Je cède maintenant la parole à M. Perron pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs les témoins, merci d'être parmi nous aujourd'hui. Nous sommes contents de vous revoir.
    La situation a beaucoup changé depuis que nous nous sommes vus la dernière fois, puisque le projet de loi C‑56, dont vous parliez avec M. Drouin, a été adopté.
    Ce projet de loi était-il suffisant pour vraiment changer la donne ou manque-t-il encore quelque chose?
     Le projet de loi C‑56 a été très important pour nous. Il a vraiment permis des changements importants qui permettront de ramener le Canada à un niveau comparable à celui d'autres pays en ce qui concerne l'application de la loi.
    À notre avis, il y a toujours quelque chose à faire pour renforcer la Loi sur la concurrence et s'assurer qu'elle est vraiment moderne et efficace. Le projet de loi C‑59 propose lui aussi des modifications importantes à la Loi. Lors des consultations du gouvernement, le Bureau a d'ailleurs formulé plus de 50 recommandations qui visent à améliorer la Loi. On a franchi des étapes importantes.
(1120)
    Merci.
    Vous dites que vous êtes satisfait du projet de loi C‑56, que le projet de loi C‑59 va être bon, et que vous avez fait des recommandations au gouvernement. Pouvez-vous en formuler deux ou trois, qui seraient vos recommandations phares, essentielles, pour renforcer la Loi? Nous pourrions les inclure dans le rapport que nous présenterons au gouvernement.
    Plusieurs recommandations qui ne visent pas le projet de loi C‑59 me viennent en tête.
    Pour revenir aux questions de M. Williams, je crois que les dispositions législatives sur les fusions sont importantes, notamment celles concernant la protection de la concurrence lors de fusions.
    L'exemple que je peux vous donner est celui concernant le test visant à corriger des transactions qui ont un effet anticoncurrentiel sur le marché. Les mesures correctives et le test juridique qui s'appliquent en ce moment lorsqu'une transaction entraîne une diminution substantielle de la concurrence doivent seulement viser à ce que cette diminution ne soit plus substantielle. Que la concurrence diminue n'est pas mauvais en soi, mais il ne faut pas la corriger de façon à la ramener au niveau où elle était avant la fusion. C'est une des recommandations que nous avions faites dans le cadre des consultations.
    D'autres recommandations concernent les seuils de concentration et visent à tenir compte des présomptions de concentration dans le cadre de fusions afin de s'assurer de ne pas dépasser un certain seuil. Il revient aux compagnies de prouver qu'une transaction n'est pas anticoncurrentielle. Cette pratique est similaire à celle en vigueur aux États‑Unis.
    Quel serait le seuil idéal dans un marché?
    Ça dépend vraiment du marché.
    Premièrement, je vous remercie de ces trois éléments, dont nous allons nous assurer qu'ils feront leur chemin.
    Je vous écoute parler et vous me semblez des gens très bien informés qui ont de bonnes intentions. Toutefois, j'ai l'impression que, jusqu'à maintenant, votre structure a été davantage une structure d'apparence qu'une structure d'efficacité. On est en train de cheminer, mais on n'est pas encore rendu. Malheureusement, il y a plusieurs choses au gouvernement qui fonctionnent ainsi: on fait semblant de bien faire les choses, mais, finalement, il ne se passe rien. C'était mon petit commentaire éditorial.
     En ce qui concerne les fusions, je vous écoute très attentivement lorsque vous me dites qu'il faut faire attention, entre autres. Par contre, si j'examine l'historique des fusions dans le secteur de l'alimentation, je ne peux pas faire autrement, comme citoyen — même pas comme député —, que de me demander ce qui s'est passé. En effet, il y a eu des fusions en 1986, en 1990, en 1992 et deux fois en 1998. Il y en a eu d'autres en 2003, en 2005, en 2009, en 2013, en 2017, en 2018 et en 2019. À chacune de ces années, il y a eu des transactions, ce qui a fini par faire passer le nombre de chaînes d'épicerie canadiennes de 13 en 1986 à trois aujourd'hui. Heureusement, il y a aussi deux chaînes américaines, qui font passer le total actuel à cinq. Pourtant, même là, à cinq, on est devant un oligopole. Peu importe ce que nous diront les PDG, on est devant un oligopole extrêmement puissant.
    Je trouve vraiment déplorable qu'on ait laissé faire cela. Je sais que le Bureau avait moins de pouvoirs à l'époque, mais il existait. Je ne vous accuse pas personnellement, mais je remets en cause les structures.
    J'écoutais les questions de mon collègue conservateur tantôt et je trouve qu'on ne peut pas faire autrement que de s'énerver un peu quand on entend de tels propos.
    Corrigez-moi si je me trompe: venez-vous de dire que vous vous êtes prononcé contre la fusion de Rogers et de Shaw?
    Oui.
    Pourtant, elle a quand même lieu. Qui décide? À qui revient la faute?
    C'est le Tribunal de la concurrence qui décide.
    Dans le cas de Rogers et de Shaw, le Bureau de la concurrence a présenté au Tribunal de la concurrence une demande visant à bloquer la transaction. Ce tribunal fonctionne vraiment comme une cour: il entend des témoins et examine des preuves. En fin de compte, il a décidé que la transaction pouvait aller de l'avant.
    Ce qu'il faut faire alors, c'est changer les lois interprétées par ce tribunal, parce que ça n'a pas de bon sens. Nous sommes déjà en train d'étudier une situation qui est totalement inacceptable pour tous les citoyens, et une situation semblable est en train de se passer dans un autre secteur. Je suis désolé de m'énerver comme ça ce matin, mais la situation me scie les jambes.
    Si vous avez des recommandations que vous jugez essentielles quant aux changements qu'on devrait apporter à la Loi — je pense que vos trois recommandations de tantôt portaient là-dessus —, vous pouvez les soumettre par écrit au Comité. Nous vous en serions vraiment très reconnaissants.
    Encore une fois, je vous remercie beaucoup de votre belle collaboration avec le Comité.
     Merci beaucoup, messieurs Durocher et Perron.

[Traduction]

     Je vais me faire l'écho de ce qu'a dit M. Perron. Je pense qu'il serait utile au Comité de disposer de certaines des recommandations qui n'ont en fin de compte pas été intégrées à la loi, en particulier les plus pertinentes. C'est peut-être une proposition que vous pourriez faire, indépendamment de votre témoignage d'aujourd'hui.
    Nous passons maintenant à M. MacGregor, pour six minutes.
(1125)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les deux d'avoir accepté de comparaître devant notre comité.
    Depuis que nous avons commencé cette étude à la fin de 2022, les activités se sont multipliées. Nous avons vu plusieurs projets de loi. Nous avons vu votre bureau s'activer. Cette question a suscité un intérêt considérable auprès du public et sur le plan politique.
    Après des décennies de déférence excessive à l'égard des entreprises de la part des gouvernements successifs, tant libéraux que conservateurs, je pense que nous assistons enfin à un retour du balancier. C'est une bonne chose pour les consommateurs.
    Vous faites partie de la direction de la promotion de la concurrence du Bureau de la concurrence. Mes collègues ont expliqué comment trois entreprises ont, en quelque sorte, avalé leurs concurrents au cours des dernières années. Il suffit de regarder toutes leurs filiales. Nombre d'entre elles sont d'anciens concurrents.
    Étant donné l'ampleur de la concentration à laquelle nous avons assisté au fil des ans, je me demande quels sont les problèmes que vous rencontrez lorsque vous tentez de promouvoir la concurrence dans ce type d'environnement. Nous avons tous vu la direction que cela prenait.
     Compte tenu de tout ce qui est arrivé, que faites-vous pour encourager la concurrence dans le secteur de l'alimentation?
    Je vous remercie beaucoup de la question.
    Je pense que nous ne cessons jamais d'encourager la concurrence. Nous essayons d'être aussi persuasifs que possible, car nous pensons que les faits parlent d'eux-mêmes. La concurrence est bénéfique pour les consommateurs. Elle fait baisser les prix et favorise l'innovation. La concurrence est bonne pour l'économie. Notre pays a un problème de productivité. Nous croyons fermement — et les preuves à cet égard sont sans équivoque — que la concurrence est la clé pour sortir de cette impasse et stimuler la croissance économique.
    Je dirais que mon collègue M. Callaghan et moi-même avons pour mission de promouvoir la concurrence. La dernière année nous a donné beaucoup de signes encourageants. On dirait vraiment que les choses se sont mises à bouger, non seulement sur le plan de la loi et de son renforcement, mais aussi en ce qui a trait aux choses que l'on entend. Nous commençons à voir des parlementaires — eux, en particulier — parler de concurrence et demander des comptes aux entreprises. Cela fait une différence. C'est ce que nous voyons. Le Globe and Mail a publié un très bon éditorial il y a quelques jours. Son comité de rédaction a parlé de ce changement de culture et de ton au Canada en ce qui a trait à la priorité que l'on accorde à la question de la concurrence.
     Nous voulons que cette tendance se poursuive. Nous allons travailler très fort pour nous assurer que ces discussions continuent d'avoir lieu au Canada, car elles sont très importantes.
    Je pense que vous avez raison. Par exemple, Loblaws a dû renoncer à sa décision dénuée d'empathie de réduire les rabais de 50 à 30 %. Bien sûr, il y a eu ensuite le recul de Manulife et de Loblaws en raison, je crois, de l'attention soutenue dont ces entreprises font l'objet en ce moment.
    Vous avez mentionné quelques projets de loi du gouvernement, à savoir le projet de loi C‑56, qui a reçu la sanction royale, et le projet de loi C‑59, qui est toujours en cours d'élaboration. Un autre projet de loi a été voté en deuxième lecture hier. Il s'agit du projet de loi C‑352 du chef du NPD, Jagmeet Singh. Il y a quelques similitudes avec les précédents, mais l'un des aspects intéressants de ce projet de loi, qui concerne principalement le Tribunal de la concurrence, c'est qu'il exigerait que ce dernier « rende une ordonnance visant à dissoudre un fusionnement réalisé ou à interdire sa réalisation si celui‑ci se traduirait par une part de marché combinée excessive ».
    J'aimerais savoir ce que le Bureau de la concurrence pense de l'expression « part de marché combinée excessive » qui est utilisée dans la loi. Comment interprétez-vous cette expression particulière?
    Il nous faudrait y réfléchir attentivement. Si nous comparaissons devant le Comité permanent de l'industrie et de la technologie pour l'étude de ce projet de loi, nous voulons que notre interprétation de ce texte soit aussi pertinente que possible.
    Une partie de ces questions relève d'un aspect que nous avons défendu, à savoir l'avantage potentiel des présomptions structurelles. C'est ainsi que la jurisprudence américaine en matière d'antitrust a évoluée. Il s'agit essentiellement de l'idée qu'au‑delà d'une certaine augmentation de la concentration et d'un certain seuil, il incombe aux entreprises de prouver qu'elles ne sont pas anticoncurrentielles. Il ne fait aucun doute que c'est une discussion qui mérite d'avoir lieu.
    Le projet de loi C‑59 comporte des modifications importantes à cet égard. Il supprime une exigence qui existait à l'article 92 et qui faisait en sorte que nous ne pouvions pas contester les fusions sur la base des parts de marché ou des seuils. L'examen des parts de marché et de la concentration pourrait jouer un rôle plus important dans notre travail.
    Bien entendu, d'autres facteurs seront toujours pertinents, tels que les entraves à l'accès, la concurrence réelle restante et le rôle de l'innovation sur les marchés. Nous entendons dire que la concentration dans l'économie canadienne suscite de vives inquiétudes. Nous pensons qu'il est important de débattre de ces questions, en particulier lorsque nous nous penchons sur le cadre que nous utilisons pour examiner les fusions et sur les lois en la matière.
(1130)
    Je pense que les chaînes d'épiceries, en raison de leur concentration, savent que de nombreux Canadiens sont des créatures d'habitude, et qu'ils continueront de revenir au même magasin. En un sens, ils constituent une clientèle captive une fois qu'ils sont coincés à l'intérieur du magasin.
    Très brièvement, nous avons ajouté un deuxième volet à notre étude parce que le ministre Champagne a beaucoup parlé de sa déception et des efforts qu'il fallait déployer pour renouer avec la stabilité. Je fais ici référence à sa dernière lettre, datant de la fin du mois de janvier. Quelles mesures le Bureau de la concurrence a‑t‑il prises lorsqu'il a vu la lettre du ministre Champagne?
    Vous parlez de sa lettre de la semaine dernière, soit du 29 janvier. Évidemment, nous avons pris cette lettre très au sérieux. Je dirais que le Bureau de la concurrence est un organisme indépendant, mais je pense que nos intérêts sont très semblables. Nous voulons protéger la concurrence et en faire la promotion dans ce secteur.
    Dans notre travail, nous établissons vraiment les priorités à deux égards. Il y a d'abord les conclusions et les recommandations de notre étude de marché. Nous continuons à travailler très activement avec les décideurs, ce qui inclut les gouvernements provinciaux et territoriaux, dans l'espoir que certaines de ces recommandations soient mises en œuvre. Elles changeront la donne.
    L'autre élément concerne notre rôle en matière d'application de la loi. Assurer l'application de la loi et veiller à ce que le tout fonctionne dans le secteur de l'épicerie constituent vraiment une priorité. Comme je l'ai mentionné, nous menons une enquête dynamique dans le secteur de l'épicerie sur les contrôles de propriété ou les clauses restrictives. Nous continuerons d'accorder la priorité à ce travail.
     C'est une lettre que nous avons prise très au sérieux. Je pense que nous nous entendons sur l'idée d'accorder la priorité aux questions des prix et de la concurrence dans le secteur de l'épicerie.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Nous passons maintenant à M. Barlow, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Encore une fois, merci d'être présents. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Je sais que vous n'examinez pas spécifiquement la question du code des épiceries, mais dans votre rapport, vous mentionnez qu'il serait utile parce qu'il permettrait une meilleure reddition de comptes. Lorsque M. Weston, de Loblaws, a comparu devant ce comité, il a déclaré que le code de conduite des épiceries coûterait 1 milliard de dollars à Loblaws.
    Dans le cadre des travaux du Bureau de la concurrence, avez-vous vu des données concernant le code de conduite des épiceries qui viendraient confirmer cette observation, à savoir que les coûts seraient dévastateurs pour les chaînes d'épicerie?
    Nous sommes certainement au courant de ces déclarations. Pour répondre directement à votre question, nous n'avons rien vu qui puisse inquiéter le Bureau à cet égard. Je crois que si nous pensions que le code pourrait entraîner d'importantes augmentations de prix, le Bureau de la concurrence serait inquiet et nous le dirions. Pour l'instant, nous demeurons au fait de ce qui se passe au sujet du code. Nous en parlons avec les parties prenantes et nous avons examiné la question attentivement. Nous n'avons pas vu de signaux d'alarme.
     Notre rôle, tel que nous le concevons, à propos du code, consiste à défendre la concurrence et à fournir un éclairage en ce sens dans le cadre de la mise en œuvre du code, si elle devait avoir lieu. De notre point de vue, si le code peut améliorer les choses sur le plan de la prévisibilité, de la transparence et de la certitude pour les fournisseurs en particulier quant à la façon de faire les choses dans ce secteur, cela peut être bon pour les consommateurs.
    Le ministre de l'Innovation a dit qu'il cherchait à attirer des entreprises internationales au Canada pour accroître la concurrence. C'était intéressant. Dans le même article, j'ai vu que lorsque l'entreprise Target est venue au Canada, sa présence était énorme, elle a investi 8 milliards de dollars et a duré moins de trois ans, même si elle avait tous les emplacements de Zellers. Comment est‑il possible qu'une entreprise comme Target...? Le ministre de I'Innovation dit que nous allons simplement faire venir une autre entreprise pour ajouter de la concurrence, mais on a déjà essayé de le faire et cela a échoué. Comment peut‑on s'attendre à ce qu'une petite entreprise albertaine comme Freson se développe et ait une incidence?
     Selon vous, quels sont les obstacles qui empêchent certaines de ces entreprises d'entrer, puis de réussir à long terme?
    L'expérience de Target a certainement été soulevée. Nous la mentionnons dans notre rapport comme étant un sujet dont les épiciers internationaux nous ont parlé en ce qui concerne le marché canadien. Nous leur avons demandé quels étaient les obstacles qui les empêchaient de s'implanter. Quelles en sont les raisons? L'exemple de Target a été mentionné, mais il y a aussi d'autres facteurs qui y sont liés.
    L'un d'entre eux que je pourrais peut-être mentionner, en réponse à votre question, est celui des clauses restrictives, des contrôles de propriété. C'est quelque chose qui peut vraiment constituer un obstacle majeur à l'entrée et au développement d'une épicerie sur le marché canadien. On ne peut pas ouvrir une nouvelle épicerie si l'on n'a pas accès au terrain. C'est un facteur qui nous a été signalé par les épiciers indépendants en particulier comme étant problématique. C'est pourquoi l'une des recommandations que nous faisons dans le rapport consiste à faire comme un certain nombre d'autres pays — soit, envisager de limiter le recours à des clauses restrictives ou à les interdire complètement dans le secteur de l'épicerie, car elles peuvent nuire à la concurrence.
     Bien entendu, nous nous intéressons également à l'application de la loi en la matière.
(1135)
     Dans le même ordre d'idées, je ne sais pas si vous avez eu ce genre de conversations, mais dans certains de vos travaux, vous dites que vous essayez de promouvoir la concurrence, ce qui est essentiel. D'autres entreprises examinent-elles le contexte au Canada en ce qui concerne les modifications de l'étiquetage sur le devant des emballages, l'avis P2 sur l'interdiction de plastiques, les taxes sur le carbone? Compte tenu de certaines exigences réglementaires, constatent-elles qu'elles ne peuvent pas entrevoir clairement le succès au Canada?
    Il est difficile de répondre à cette question, car le calcul que fait chaque industrie, chaque entreprise, lorsqu'elle examine les perspectives d'investissement et d'entrée au Canada, est différent. Au Bureau, nous croyons fondamentalement à l'importance d'une réglementation favorable à la concurrence et nous essayons constamment de conseiller tous les ordres de gouvernement à cet égard.
    Dans certains cas, il s'agit de supprimer des règlements; dans d'autres, il s'agit de s'assurer que les règlements sont bien pensés et qu'ils favorisent la concurrence. Le système bancaire ouvert en est un exemple. De notre point de vue, on parle d'une réglementation sensée et importante pour favoriser la concurrence dans les services financiers.
     Tout cela pour dire que je pense que la manière dont les entreprises évaluent la viabilité de l'entrée par rapport à la réglementation varie d'une industrie à l'autre. Notre travail consiste à essayer de plaider en faveur d'une réglementation bien pensée qui favorise la concurrence et d'abaisser les barrières à l'entrée lorsque nous le pouvons.
    Merci beaucoup, monsieur Barlow.
    Merci beaucoup, monsieur Durocher.
    C'est maintenant au tour de Mme Taylor Roy, qui dispose de cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup d'être ici. C'est en effet une bonne nouvelle que de constater que la tendance a changé et que les prix des aliments baissent davantage en fonction de l'inflation générale et que le projet de loi C‑56 a été utile.
    En outre, le projet de loi C‑59 est actuellement à l'étude et vous avez mentionné que certains aspects de ce projet de loi seraient, selon vous, très utiles dans la lutte contre la concentration et les problèmes liés à la concurrence. Quels sont ces aspects en particulier?
    Voulez-vous dire spécifiquement pour le secteur de l'épicerie ou de façon plus générale?
    Je veux dire de façon générale, mais si cela a une incidence sur les épiceries... Je pense que ce qui nous importe, c'est de veiller à ce que les Canadiens bénéficient d'une réduction du prix des aliments.
    L'un des changements les plus importants qui découlent du projet de loi C‑59, c'est que l'on modifie la Loi sur la concurrence pour élargir le champ d'application des recours privés, de sorte que le Bureau de la concurrence ne soit pas la seule autorité qui puisse porter une affaire devant le tribunal. Il y a là des changements qui, je pense, suscitent beaucoup d'intérêt de la part des parties prenantes dans le domaine de la concurrence. Le rôle des recours privés et le critère pour l'obtention de l'autorisation ont été clarifiés, de sorte que nous pourrions voir émerger un cadre plus solide dans lequel les acteurs privés, et pas seulement le Bureau de la concurrence, peuvent porter des affaires directement devant le tribunal.
    Comme je l'ai mentionné, certains changements importants ont été apportés au sujet des fusionnements. L'un d'entre eux consiste à pouvoir mettre davantage l'accent sur des éléments relatifs à la part de marché et à la concentration. D'autre part, des changements importants ont été apportés à l'article 90.1 — qui est la disposition de la Loi sur la concurrence qui porte sur la collaboration du concurrent — avec la possibilité d'examiner les comportements antérieurs, ce qui permet également d'élargir l'éventail des recours. Ce sont là des exemples.
    Par ailleurs, pour donner un exemple, un changement très intéressant concerne les représailles. Le projet de loi ajoute une nouvelle disposition civile qui interdirait à une partie d'exercer des représailles à l'encontre d'une autre personne pour sa coopération. Il s'agit d'un changement très intéressant et qui pourrait être important, car chaque fois que des entreprises se plaignent auprès de notre bureau, elles craignent toujours des représailles. Si vous vous plaignez des actions de l'un de vos partenaires commerciaux, il est évident que la confidentialité est primordiale dans notre travail. C'est une chose que nous prenons très au sérieux et que nous protégeons, mais il est important de disposer de mesures de protection supplémentaires et d'avoir l'esprit tranquille en réduisant le risque de représailles.
    Ce ne sont là que quelques exemples, mais il y a beaucoup à dire sur le projet de loi C‑59.
(1140)
    Nous essayons de faire adopter le projet de loi C‑59 depuis l'automne, mais le Parti conservateur y est très opposé. Récemment, nous avons découvert que Jenni Byrne, qui conseille le Parti conservateur et qui se joint à son caucus pour conseiller le chef, est en fait une consultante ou une lobbyiste, pourrions-nous dire, pour Loblaws. Je m'interroge... Il me semble que Loblaws pourrait ne pas être en faveur de certains des changements proposés, mais il semble que le projet de loi C‑59 soit très important. Recommanderiez-vous, d'après le point de vue du Bureau de la concurrence, que le projet de loi C‑59 soit adopté afin que nous puissions mettre ces mesures en place?
    La façon dont nous allons procéder concernant le projet de loi C‑59, c'est que si nous sommes convoqués devant le Comité, nous donnerons certainement notre point de vue.
     Comme je l'ai mentionné et comme nous l'avons indiqué dans notre déclaration préliminaire, le projet de loi contient d'importantes améliorations à la Loi sur la concurrence. Ce que nous voulons vraiment faire, c'est informer les parlementaires et fournir au Comité tous les éléments possibles pour alimenter les délibérations.
    Au sein de ce comité, nous nous intéressons aux prix à l'épicerie. Nous avons vu des progrès, mais nous voulons qu'ils continuent de baisser et nous voulons de la stabilité.
     Selon vous, serait‑il utile, dans le cadre de cette étude, de recommander l'adoption des changements prévus dans le projet de loi C‑59? Cela permettrait‑il de répondre à certaines de vos préoccupations?
    Je pense qu'il est juste de dire que certaines des modifications à la Loi sur la concurrence que propose le projet de loi C‑59 sont souhaitables et qu'elles correspondent, à vrai dire, à une partie des recommandations que nous avons faites dans le cadre des consultations que le gouvernement a menées sur le projet de loi.
    Merci beaucoup.
    Me reste‑t‑il du temps, monsieur le président?
    Vous disposez d'environ 15 secondes, mais...
    Je vous les rends.
    ... vous pourriez avoir l'amabilité de nous les rendre.

[Français]

     Monsieur Perron, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Durocher, comme vous le savez, nous avions déjà reçu les PDG et nous venons de les recevoir de nouveau. La première fois que nous les avions reçus, nous savions que vous alliez faire une étude sur le secteur de l'épicerie. Je leur avais demandé de s'engager formellement à vous fournir certains chiffres, et ils m'avaient tous dit qu'ils allaient vous les donner. Vous comprendrez donc ma grande déception quand j'ai vu dans votre rapport que le Bureau n'a pas été en mesure dans bien des cas d'obtenir des données financières complètes et précises malgré ces demandes répétées.
    Vous ne pouvez probablement pas me dire qui ne vous les a pas transmises, mais j'ai eu bien du plaisir à recevoir ces gens de nouveau et à leur rappeler qu'ils s'étaient engagés à vous transmettre ces chiffres, mais que, selon le rapport du Bureau, cela n'avait pas été fait par tout le monde. Je leur ai aussi demandé qui les avait transmises et — c'est drôle — tous m'ont répondu qu'ils l'avaient fait.
    Pouvez-vous nous renseigner davantage à cet égard? Pouvez-vous nous dire qui ne les a pas transmises? J'ai des doutes, parce qu'il y a des gens qui ne veulent pas adhérer au code de conduite des épiceries, ce que je trouve un peu louche. Sinon, quelle est la nature des documents qu'ils ont refusé de vous donner? La nouvelle version de la Loi fait-elle qu'ils vont être obligés de vous les donner la prochaine fois que vous allez les leur demander?
    Je dirais que le niveau de coopération a vraiment beaucoup varié. D'un côté, certaines compagnies ont coopéré de bonne foi et nous ont donné de l'information. D'autres avaient toutes sortes d'excuses pour ne pas nous donner l'information demandée. La plupart nous ont donné de l'information, mais ce n'était pas nécessairement celle que nous avions demandée. Il y a eu de grandes différences en matière de coopération, certaines compagnies ne nous ayant donné aucune information ou alors seulement de l'information qui était déjà du domaine public.
    Nous avons tout de même jugé que nous avions reçu l'information requise pour prendre nos décisions et pour formuler de bonnes recommandations…
    Excusez-moi de vous interrompre, mais ne pouvez-vous pas nous dire qui ou quels groupes?
    Non, je ne le peux pas.
    Nous comprenons. Cela dit, votre réponse est claire.
    Il y a des groupes qui ne veulent pas adhérer au code de conduite des épiceries. D'ailleurs, la plupart de ces groupes n'étaient même pas à la table des négociations, ou ils s'étaient fait représenter par d'autres organisations. Ils se présentent maintenant à la fin du processus pour faire dérailler le projet.
    Que pensez-vous d'un code qui ne s'appliquerait pas à 100 % du marché? Pensez-vous qu'il pourrait être mis en oeuvre, ou serait-il voué à l'échec?
    Il est très difficile pour nous de dire ce qui serait faisable ou non. Je peux comprendre que des compagnies aient des réserves et se demandent si celles qui adhèrent au code pourraient avoir un avantage concurrentiel sur les autres. C'est possible.
    Nous surveillons ce qui se passe avec le code, mais nous n'avons pas étudié la question de savoir s'il faut que l'adhésion à celui-ci soit obligatoire ou non. Nous coopérons et nous parlons du code avec nos partenaires du gouvernement. Nous verrons comment les choses vont se dérouler.
(1145)
    Merci beaucoup, messieurs Durocher et Perron.
    Nous allons bientôt entamer le troisième tour de table.

[Traduction]

    Monsieur MacGregor, je ne vous ai pas oublié. Nous allons passer à vous et vous disposez de deux minutes et demie. Je voulais seulement prévenir tout le monde.
    Merci, monsieur le président.
    Les deux ou trois dernières années ont été incroyablement frustrantes pour de nombreux Canadiens en raison de l'augmentation constante des prix des aliments. Ils peuvent voir dans les données publiques de Statistique Canada, que nous a fournies l'un de nos témoins, soit Jim Stanford, que les bénéfices des détaillants de produits alimentaires ont doublé depuis 2019, et même les marges.
    Chaque fois que les gens font leurs courses, ils constatent une augmentation des prix. Personnellement, j'ai remarqué que le poids net de nombreux produits alimentaires que j'achète a diminué alors que le prix est resté constant ou a parfois augmenté. C'est un double affront. La frustration est immense.
    En ce qui concerne l'étude qui a été publiée en juin 2023, en quoi aurait-elle été différente ou en quoi pensez-vous que vos conclusions auraient été différentes si vous aviez eu les pouvoirs que vous avez maintenant grâce à l'adoption du projet de loi C‑56? Pensez-vous qu'au Bureau de la concurrence, vous aimeriez réexaminer cette étude et peut-être utiliser les nouveaux pouvoirs conférés par la loi? Pouvez-vous expliquer quelles sont les différences maintenant?
    Maintenant, grâce aux modifications qui ont été apportées, nous pouvons demander une ordonnance du tribunal pour obtenir les renseignements nécessaires à la réalisation d'une étude. Il est difficile d'émettre des hypothèses sur la façon dont les choses auraient pu être différentes. Essentiellement, je pense que nous étions d'avis que nous avions obtenu suffisamment de renseignements du marché par rapport à ce que nous demandions — nous n'avons pas tout obtenu, mais c'était suffisant pour nous permettre de formuler des conclusions et des recommandations valables.
     À l'heure actuelle, je pense que ce que nous voulons, au sein de l'organisation, c'est passer à l'action en mettant en œuvre les recommandations et en collaborant avec les décideurs pour ce faire, ainsi qu'en nous concentrant sur le travail d'application de la loi dans le secteur pour protéger la concurrence.
    Avez-vous l'intention de réexaminer la question? Le public canadien peut‑il s'attendre à voir d'autres études à l'avenir? Est‑ce un sujet auquel vous travaillez activement?
    Nous n'écartons aucune option en ce moment quant à notre travail dans le secteur de l'épicerie.
    L'une des questions qui se posent est de savoir où nous pouvons apporter une valeur ajoutée aux Canadiens. Notre organisation ne dispose pas de ressources illimitées. Nous donnons la priorité au secteur de l'épicerie afin de tirer le maximum d'une enquête. Encore une fois, nous nous concentrons actuellement sur les solutions. Nous nous concentrons sur la mise en œuvre de nos recommandations découlant de l'étude ainsi que sur le travail d'application de la loi à cet égard, et nous faisons avancer les choses, mais rien n'est exclu. Évidemment, nous n'oublions pas la lettre du ministre Champagne de lundi dernier, dans laquelle on nous demande d'établir les priorités et on mentionne la possibilité de mener une étude complémentaire.
     Je pense que tous ces éléments sont sur la table, mais nous voulons vraiment nous concentrer sur les solutions plutôt que de poursuivre l'étude du secteur. Rien n'est exclu.
    Merci.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Nous allons passer à Mme Rood pour environ cinq minutes, puis ce sera au tour de M. Louis par la suite.
    Merci, monsieur le président.
     En décembre 2020, au comité de l'industrie, j'ai eu l'occasion de poser quelques questions à M. Matthew Boswell, le commissaire à la concurrence. J'ai dit au commissaire que le premier ministre avait déclaré qu'il allait demander au Bureau de la concurrence d'enquêter sur les frais que les géants de l'alimentation imposent aux producteurs et aux transformateurs. J'ai demandé au commissaire s'il avait lancé une enquête. M. Boswell a répondu que le Bureau était bien au fait de ces questions concernant les détaillants et leurs fournisseurs, qu'il collaborait déjà avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à ce sujet et qu'il apportait son expertise sur les questions relatives à la concurrence.
    Y a‑t‑il eu une enquête sur les frais que les détaillants en alimentation imposent aux producteurs et aux fournisseurs? Dans l'affirmative, quelles en ont été les conclusions?
    Aux environs de 2017, nous avons mené une enquête très approfondie sur Loblaw pour déterminer si ses politiques et les frais qu'elle impose à ses fournisseurs pouvaient être considérés comme étant des abus de position dominante.
    Pendant que nous faisions enquête, Loblaw a mis fin à bon nombre des pratiques en question. Nous avons conclu l'enquête et publié un énoncé de position assez détaillé afin d'assurer une plus grande transparence quant à la nature de notre examen tout en précisant dans quels cas une entreprise peut dépasser les bornes dans ses transactions avec des fournisseurs à un point tel qu'elle contrevient à la Loi sur la concurrence.
    Depuis, des efforts ont été consentis aux fins de l'élaboration du code de conduite des épiceries dans le but bien concret de régler cette problématique. Nous avons été tenus au fait de l'évolution de ce travail, et nous nous sommes efforcés d'y contribuer en mettant à profit nos connaissances au sujet de l'industrie à la suite de l'enquête que nous avons effectuée. La ligne de démarcation est mince entre un déséquilibre dans le pouvoir de négociation entre les parties et un abus de position dominante. Une grande partie des gestes posés dans ce secteur pourraient être davantage associés à un déséquilibre dans la position de négociation et à certaines des difficultés qui en découlent, plutôt nécessairement qu'à un problème lié à l'application du droit de la concurrence.
    Nous continuons de travailler avec tous les ordres de gouvernement pour essayer de les informer et de leur faire profiter de notre expérience relativement à certains des enjeux mis au jour dans ce secteur.
(1150)
    À ce sujet, le commissaire a indiqué à l'époque, et je le cite, que « le droit de la concurrence au Canada ne prévoit pas d'outil pour réglementer les déséquilibres en matière de pouvoir de négociation ». Le Tribunal de la concurrence a‑t‑il maintenant le pouvoir d'enquêter sur les déséquilibres dans le pouvoir de négociation et de réglementer le tout? Sinon, de quels outils auriez-vous besoin pour le faire?
    En général, le droit de la concurrence, non seulement au Canada, mais partout dans le monde, ne vise pas vraiment à corriger les déséquilibres dans le pouvoir de négociation lorsqu'une grande entreprise traite avec ses fournisseurs ou ses clients. Si une grande entreprise fixe des prix ou exige des frais injustifiés de ses fournisseurs ou impose des prix élevés à ses clients, ce n'est pas contraire à la Loi sur la concurrence. Il est toutefois répréhensible d'abuser de sa position dominante en prenant des mesures visant à miner ses concurrents, notamment en leur faisant obstacle ou en les neutralisant carrément.
    La ligne est mince entre les deux, mais le droit de la concurrence ne vise généralement pas à corriger les déséquilibres dans le pouvoir de négociation.
    Vous avez parlé du code de conduite pour les épiceries. Je me demande si le Bureau de la concurrence croit que ce code devrait être d'application obligatoire ou volontaire.
    Nous n'avons pas étudié en profondeur la possibilité ou la pertinence de nous donner un code permanent. Nous savons qu'un code semblable existe au Royaume-Uni. Au départ, c'était sur une base volontaire, puis c'est devenu un code obligatoire pour assurer une plus grande conformité.
    Nous demeurons disposés à apporter notre contribution relativement à la forme que ce code pourrait prendre au Canada en nous assurant qu'il est aussi favorable à la concurrence que possible. En revanche, je dois vous avouer que nous ne nous sommes pas vraiment penchés sur la question consistant à savoir si cela devrait être obligatoire ou volontaire.
    Merci.
    Nous avons parlé de la nouvelle interdiction des plastiques suivant l'avis P2 du gouvernement et de son incidence sur les Canadiens et le coût de l'épicerie. Nous avons entendu dire que cette mesure pourrait coûter plus de 6 milliards de dollars. Nous importons les deux tiers de nos fruits et légumes frais. J'aimerais savoir si le Bureau de la concurrence s'est intéressé à cette proposition d'interdire les plastiques utilisés dans le secteur des fruits et légumes frais et sur l'incidence qu'elle pourrait avoir sur la concurrence qu'on se livre pour que les fruits et légumes se retrouvent sur les tablettes des épiceries canadiennes ainsi que sur les prix.
    Ce n'est pas une question que nous avons étudiée.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, avant de céder le reste de mon temps de parole, j'aimerais prendre un moment pour déposer une motion. De nombreux témoins nous ont dit que l'interdiction des plastiques aura un effet très marqué sur les prix des aliments pour les Canadiens. Pendant que notre comité s'interroge sur les moyens à prendre pour réduire ces prix, le gouvernement met de l'avant des politiques qui vont les faire grimper.
    Voici donc ma motion dont je peux transmettre une copie à notre greffière dans les deux langues officielles. Je propose:
Que le Comité entreprenne une étude des répercussions de la réglementation existante et à venir sur les emballages plastiques d'aliments primaires en ce qui concerne la production, la transformation, le transport, la commercialisation au détail, la vente, les coûts et la sécurité des produits alimentaires, et de l'impact sur l'accès à des aliments sains et abordables et sur la sécurité alimentaire pour les Canadiens.
Que le Comité alloue un minimum de six réunions pour entendre des parties prenantes comme témoins;
Que le Comité fasse rapport de ses conclusions et recommandations à la Chambre au plus tard le 1 er juin 2024.
(1155)
    Merci, madame Rood.
    Je sais que nous devons étudier le secteur horticole au cours des prochaines semaines. Notre comité décidera s'il souhaite ou non aller de l'avant avec votre motion, ou si l'étude proposée pourrait être intégrée au plan de travail déjà établi. Quoi qu'il en soit, je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer à M. Louis pour un maximum de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Il est important de pouvoir échanger ainsi avec les représentants du Bureau de la concurrence.
    Nous entendons beaucoup le mot « déséquilibre ». Suivant ce que vous avez dit, vous cherchez à déterminer dans quelle mesure on abuse de cette position dominante.
    Pour façonner le projet de loi que nous avons présenté ainsi qu'un autre qui a été adopté, de vastes consultations ont été menées. Je pense qu'il y a eu quelque 400 mémoires et une douzaine de tables rondes. Il a fallu environ 18 mois pour ces consultations très ciblées, qui ont permis de dégager un consensus coalisant de nombreux points de vue, y compris ceux des représentants de l'industrie, des universitaires et des groupes de défense.
    Si je comprends bien, votre capacité limitée d'exiger la production de documents par les chaînes d'épicerie est l'un des obstacles auxquels vous vous êtes heurtés dans le cadre de votre enquête sur la concentration dans ce secteur.
    Le projet de loi C‑56 donnera au Bureau de la concurrence la capacité de le faire, en plus de lui conférer des pouvoirs accrus pour ce qui est des études de marché et des assignations à comparaître. Vous pourrez ainsi obliger ces grandes chaînes à fournir plus de renseignements, ce qui remédiera au manque de transparence que nous constatons de la part de ces géants de l’alimentation qui nous ont soumis des rapports et de l'information avec divers degrés de transparence et de rigueur.
    Comment ces nouveaux pouvoirs pourront-ils aider votre bureau à formuler des recommandations plus contraignantes et à prendre des décisions mieux éclairées?
    Je pense que les nouveaux pouvoirs d'examen nous seront utiles pour mener des études de marché complètes et approfondies dans tous les secteurs de l'économie où de telles études sont justifiées parce qu'il y a des problèmes de concurrence ou parce que nous voulons intensifier la concurrence en sachant exactement de quoi il en retourne. Ces mesures vont tout à fait dans le sens de celles que bon nombre de nos homologues étrangers retrouvent déjà dans leurs propres lois sur la concurrence. À n'en pas douter, ce sera un outil précieux qui nous permettra de formuler des recommandations et de prendre des décisions en toute connaissance de cause.
    Êtes-vous à même de constater que plus ces entreprises sont grandes, plus il est facile pour elles d'éviter la transparence, et que ce phénomène s'exacerbe au fur et à mesure des fusions et regroupements?
    Chaque entreprise a son propre mode d'interaction avec le Bureau de la concurrence. Certaines font montre d'une plus grande ouverture. Les incitatifs qui entrent en jeu peuvent varier d'une entreprise à l'autre.
    Nous en sommes venus à constater qu'il est important d'avoir un mécanisme de recours à notre disposition. Dans le cadre de notre travail d'application de la loi, nous avons toujours eu la capacité d'émettre des assignations à comparaître ou de nous adresser aux tribunaux pour les obtenir. Parfois, il n'est même pas nécessaire de le faire, car les entreprises sont au fait de cette possibilité et acceptent alors de nous offrir leur pleine collaboration.
    De toute évidence, le projet de loi C‑56 va changer la donne dans le cas des études de marché. Jusqu'à maintenant, la coopération des entreprises se faisait sur une base volontaire et nous n'avions aucun recours lorsque l'une d'elles décidait de ne pas collaborer totalement. Ce nouvel outil nous sera donc certes utile.
    C'est bon à savoir. Le simple fait que vous ayez cet outil à votre disposition incitera de nombreuses entreprises à accéder à vos requêtes. C'est en fait tout ce que les Canadiens demandent: de la transparence et une saine concurrence qui fera baisser les prix.
    Dans votre rapport, vous recommandez de stimuler l'innovation, de soutenir la croissance des épiciers indépendants, d'instaurer des exigences quant à l'affichage du prix unitaire et de limiter les contrôles de propriété. C'est justement de ces contrôles de propriété dont je souhaite traiter, car il est important de protéger nos épiciers indépendants. Vous avez parlé des clauses immobilières restrictives qui limitent la concurrence locale en empêchant des épiciers indépendants d'ouvrir leurs portes dans nos collectivités. On se retrouve ainsi avec une concurrence moindre et, du même coup, moins de choix et des prix plus élevés pour les consommateurs.
    En quoi la possibilité pour le Bureau de contester ces contrôles et ces ententes comme les clauses restrictives favorisera‑t‑elle la concurrence dans le secteur de l'épicerie?
    Vous avez tout à fait raison, et c'est un sujet sur lequel nous nous sommes penchés dans notre rapport.
    Comme M. Durocher l'a mentionné, ce sont essentiellement des dispositions qui limitent ce qu'un propriétaire peut faire de sa propriété. Souvent, elles sont incluses dans des baux ou des ententes de cette nature. En fin de compte, elles peuvent simplement faire en sorte qu'il soit plus difficile pour un concurrent de s'installer à proximité. Cette restriction peut s'appliquer au centre commercial lui-même ou à une zone géographique plus vaste. L'impact demeure toutefois inchangé: il peut être plus difficile pour un nouveau venu d'entrer sur le marché et de soutenir la concurrence.
    Nous réfléchissons à quelques pistes de solution en vue d'améliorer la concurrence dans ce secteur. La première consisterait à exercer notre mandat d'application de la loi. Comme M. Durocher l'a mentionné, nous menons actuellement une enquête dans ce domaine.
    Nous avons également recommandé que l'on envisage des options législatives qui permettraient aux gouvernements de limiter le recours à ces contrôles de propriété ou de les interdire complètement. Cette mesure aurait bien évidemment un effet beaucoup plus général que le travail du Bureau qui est nettement plus axé sur l'examen des faits au cas par cas pour déterminer si l'on a bel et bien contrevenu à la Loi sur la concurrence.
(1200)
    Merci beaucoup.
    Comme notre étude a également fait ressortir l'importance de protéger nos épiciers locaux indépendants, je vous remercie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Chers collègues, je vous prie de bien vouloir m'accorder quelques minutes.
    J'ai trouvé les questions de M. Williams particulièrement intéressantes. Il a parlé des fusions et des acquisitions qui peuvent être considérées comme des pratiques qui sont anticoncurrentielles, ou qui pourraient du moins l'être. Je note que vous avez précisé, monsieur Durocher, que cela pouvait dépendre de la situation dans une industrie donnée.
    Comme on a beaucoup parlé de la consolidation dans le secteur de l'épicerie au Canada, pourriez-vous indiquer au Comité dans quelle mesure ce phénomène est comparable à ce que l'on peut observer ailleurs dans le monde? J'imagine qu'il y a eu également consolidation au sein de ce secteur dans les autres pays. Ai‑je raison de penser cela, ou est‑ce que je fais fausse route?
    Je pense que c'est juste. J'aurais peut-être deux ou trois choses à dire.
    La première, c'est que plusieurs autres pays avaient au départ des lois plus rigoureuses que le Canada quant à l'examen des fusions, de sorte qu'il leur était possible de s'attaquer à la concentration en prenant des mesures plus vigoureuses que celles à notre disposition avant cette modernisation législative.
    Par ailleurs, dans le contexte de notre étude de marché sur le secteur de l'épicerie, nous avons communiqué avec un certain nombre de nos homologues étrangers pour avoir une idée de ce qui se passe dans leurs pays respectifs. Les considérations liées à la concentration des épiceries et aux prix sont au premier plan des préoccupations dans un certain nombre d'autres pays. Leurs autorités en matière de concurrence se penchent également sur ces questions. La réalité, c'est que le Canada n'est pas laissé à lui-même. Nous discutons entre nous.
    C'est vraiment pour la petite proportion de fusions qui sont dommageables que nous voulons nous assurer d'avoir les bons outils pour nous attaquer au problème. La grande majorité des fusions ne nuisent pas à la concurrence. C’est seulement pour un faible pourcentage des cas, surtout dans les secteurs où il y a concentration, que nous voulons nous assurer que notre bureau dispose de tous les outils nécessaires pour mettre au jour les situations problématiques et les régler rapidement.
    Permettez-moi de vous poser une brève question sur la défense fondée sur les gains en efficience. Je crois que le gouvernement travaille à son élimination progressive.
    J'ai une formation en commerce. J'estime intéressant de voir deux éléments entrer ainsi en opposition. Il est vrai que les économies d'échelle peuvent faire diminuer le coût unitaire de production et éventuellement le prix pour le consommateur. En revanche, je comprends que cela peut aussi mener à une situation dans laquelle les prix peuvent être contrôlés par une poignée d'entreprises qui exercent une emprise sur le marché et se retrouvent dans une position dominante.
    Comment trouver le juste équilibre entre, d'une part, les volontés légitimes liées aux économies d'échelle et à la capacité de répartir le coût des investissements sur une plus grande portion de marché afin de faire baisser le prix unitaire, et d'autre part, une défense fondée sur les gains en efficience qui peut aussi avoir des visées monopolistiques? Où se situe cet équilibre? Pouvez-vous essayer d'expliquer cela au Comité?
    Convenez-vous avec moi qu'une certaine concentration peut être bénéfique étant donné les économies d'échelle qui en découlent, mais qu'on court ainsi le risque d'aller trop loin dans l'autre direction?
    La défense fondée sur les gains en efficience n'existe plus. L'adoption du projet de loi C‑56 a sonné le glas de ce type de défense.
    L'un des problèmes — il y en a plusieurs — liés à la défense fondée sur les gains en efficience, c'est qu'elle permettait des fusions préjudiciables. Il s'agissait de fusions pour lesquelles nous pouvions prouver qu'elles allaient réduire la concurrence, faire augmenter les prix et nuire aux consommateurs et à l'économie. Quoi qu'il en soit, l'évolution de la jurisprudence a fait en sorte que l'on pouvait avoir gain de cause en invoquant cette défense. À ce titre, le régime canadien se démarquait pour les mauvaises raisons.
    On peut certes envisager d'éventuelles fusions favorables à la concurrence, comme dans les cas où deux entreprises mettent en commun leurs ressources. De telles actions peuvent être profitables pour les consommateurs parce qu'elles peuvent stimuler la concurrence.
    Chaque cas est différent quant à l'effet net, à la façon dont les ressources sont utilisées et aux arguments avancés pour faire valoir que c'est en fait favorable à la concurrence. Toutefois, depuis l'adoption du projet de loi C‑56, la perception des gains en efficience a changé du tout au tout.
(1205)
    J'ai une dernière question.
    M. MacGregor a parlé de la possibilité que les assurés de Manuvie soient contraints de faire leurs achats dans une pharmacie Shoppers. À première vue, s'agissait‑il d'une proposition non propice à la concurrence?
    M. MacGregor a indiqué que l'entreprise a fait marche arrière et qu'il est possible que l'on renonce à cette possibilité, mais pouvez-vous nous dire si le Bureau de la concurrence serait intervenu, le cas échéant? Est‑ce que cette pratique aurait été à l'encontre du droit de la concurrence?
    Je vous remercie de la question.
    À n'en pas douter, c'est un dossier qui s'est retrouvé sous les projecteurs et qui a suscité de nombreux commentaires la semaine dernière. Nous surveillons la situation de très près, et nous avons également reçu beaucoup de demandes de renseignements des médias.
    En raison de nos obligations en matière de confidentialité, tout ce que je peux dire au sujet de cet accord, c'est qu'il était bel et bien dans notre ligne de mire, notamment parce que la protection de l'accès aux médicaments d'ordonnance et le maintien de leur abordabilité sont des priorités absolues pour les Canadiens. Ce sont des enjeux qui ont été pris très au sérieux dès qu'ils ont été mis au jour.
    Pour revenir à la question de M. MacGregor à ce sujet, j'ajouterais que ce fut l'occasion de constater, à la lumière du discours public et des réactions suscitées, l'importance prioritaire accordée à la concurrence au sein de notre économie. De notre point de vue, c'est assurément un changement bienvenu.
    Merci beaucoup, chers collègues. J'ai trouvé que les questions étaient excellentes de part et d'autre.
    Merci à M. Durocher et à M. Callaghan d'avoir été des nôtres pour représenter le Bureau de la concurrence.
    Chers collègues, nous allons maintenant poursuivre à huis clos pour discuter des travaux du Comité. Je vais donc suspendre la séance, et nous reviendrons dans deux ou trois minutes.
    Monsieur McLeod et monsieur Carr, assurez-vous d'utiliser l'autre lien en mode virtuel.
    Chers collègues, nous nous reverrons dans deux ou trois minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos. ]
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