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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 089 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 février 2024

[Énregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

     Je suis content de vous revoir tous en pleine forme après la pause des Fêtes. J'espère que vous avez passé de beaux moments en famille et avec les résidants de votre circonscription.
     Nous reprenons le collier. Bienvenue à la réunion no 89 du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes. Comme ce n'est pas votre première réunion, je ne passerai pas en revue toutes les instructions. Je vais seulement vous demander de bien vous comporter.
    Avant d'aller plus loin, je vous mentionne que le budget a été affecté pour l'étude que nous avons entreprise sur les efforts de stabilisation du prix des aliments. Je suppose que le budget ne pose pas de problème et que celui‑ci est adopté.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Merci.
    Chers collègues, M. Epp remplacera M. Barlow de midi à 13 heures.
     Nous avons hâte de voir M. Epp, mais vous nous manquerez, monsieur Barlow.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 19 octobre 2023, le Comité reprend son étude sur les efforts de stabilisation du prix des aliments.
     J'aimerais souhaiter la bienvenue au premier groupe de témoins. Nous recevons un habitué du Comité qui est bien connu également au sein de la communauté agricole, M. Sylvain Charlebois, directeur principal, Agri-Food Analytics Labs de l'Université Dalhousie. Il est accompagné de Mme Stacey Taylor, doctorante, qui se joint à nous par vidéoconférence. Nous accueillons, de la Fédération canadienne de l'agriculture, M. Keith Currie, président, et M. Scott Ross, directeur exécutif, qui se joint à nous par vidéoconférence. Du Conseil canadien du commerce de détail, nous avons Mme Diane Brisebois, présidente-directrice générale, et M. Karl Littler, vice-président principal, Affaires publiques.
    Je suis heureux de vous voir tous. Merci de votre présence.
    Nous recevons un excellent groupe de témoins aujourd'hui. Nous allons amorcer la séance avec les déclarations préliminaires de cinq minutes.
    Monsieur Charlebois, je vais commencer avec vous, puis nous passerons aux représentants de la Fédération canadienne de l'agriculture. La parole est à vous.
     Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de m'avoir invité à témoigner.
    Je suis accompagné aujourd'hui d'une membre estimée de l'équipe du laboratoire, Mme Stacey Taylor, experte reconnue en comptabilité et en prévision des prix alimentaires au Canada. N'hésitez pas à lui poser des questions sur les prévisions relatives aux prix des aliments.
    Dans le cadre des travaux que poursuit le Comité sur la stabilisation des prix alimentaires, nous allons traiter aujourd'hui de trois grands problèmes: les profits abusifs des détaillants, la coordination des prix et le code de conduite des détaillants.
    Je vais commencer par les profits abusifs des détaillants.
     Nous continuons à mettre l'accent sur l'absence de données probantes qui prouveraient que l'industrie de la vente au détail alimentaire engrangerait des profits abusifs. Pour faire suite aux conclusions de notre rapport de l'année dernière, il est important de noter que selon les audits, les marges brutes des trois grands détaillants alimentaires sont constantes depuis plus de cinq ans. Dans la plupart des cas, la croissance des ventes dans les mêmes magasins est tombée sous le taux d'inflation du prix des aliments à l'échelle du pays.
    Certains experts, y compris ceux qui ont témoigné récemment devant le Comité, ont fait remarquer que les profits record que ne cessent de déclarer les détaillants donnent parfois lieu à des titres sensationnalistes dans les médias. Cela dit, il faut absolument comprendre qu'en période d'inflation, il est normal que les entreprises déclarent des profits en dollars nominaux qui augmentent d'une année à l'autre. Les accusations de profits abusifs dans ce contexte sont des distractions inutiles. Si nous voulons régler les vrais problèmes, nous devons mettre fin au débat sur les profits des détaillants.
    Un problème majeur que nous avons dégagé est la culture dominante de l'imitation, de la coordination des prix et de l'alignement des rabais au sein du secteur de l'épicerie. Je pense par exemple à la décision prise par Loblaw de mettre fin à sa politique des rabais de 50 % en invoquant la nécessité d'aligner les rabais avec la concurrence.
     D'autres pratiques peuvent influer sur les prix de détail, notamment la période du « gel des prix » de trois mois, pendant laquelle les épiciers demandent aux fournisseurs de ne pas hausser leurs prix. Le président et chef de la direction de Metro, Eric La Flèche, a admis que le prix de certains aliments augmentera en février, une fois la période de gel terminée. La volatilité accrue des prix qui en découlera est contraire aux résultats souhaités pour les Canadiens. Il y a aussi le scandale persistant du prix du pain, où trois des entreprises impliquées ont admis leur culpabilité après presque neuf ans. C'est inacceptable. Le Bureau de la concurrence devrait surveiller de plus près les comportements qui paraissent anticoncurrentiels.
    Enfin, je sais que de nombreux témoins ont déjà souligné devant le Comité l'importance de mettre en œuvre un code de conduite obligatoire dirigé par l'industrie. Nous n'insisterons jamais trop sur le caractère crucial de cette mesure. Dans le témoignage qu'il a livré avant les Fêtes, M. Galen Weston a peut-être mal expliqué le fonctionnement du code de conduite australien et le coût qu'il pourrait occasionner pour les Canadiens. Ses propos demandent des clarifications. La mise en œuvre du code de conduite doit être considérée comme prioritaire si le Comité souhaite vraiment voir une stabilisation des prix à long terme, comme le souligne le Rapport sur les prix alimentaires au Canada 2024.
    Merci de nous avoir permis de présenter nos recommandations. J'ai hâte de tenir une discussion productive avec le Comité sur ces affaires pressantes, monsieur le président.
(1105)
    Monsieur Charlebois, madame Taylor, merci beaucoup.
    Je cède la parole à M. Currie, de la Fédération canadienne de l'agriculture, pour cinq minutes.
    Je suis ravi de revenir témoigner devant le Comité. Je reconnais très bien certains visages.
    Pour ceux qui ne me connaissent pas — comme le président l'a mentionné au début de la réunion —, je m'appelle Keith Currie et je suis le président de la Fédération canadienne de l'agriculture, ou FCA, qui représente 190 000 agriculteurs et fermes familiales aux quatre coins du pays. Je suis accompagné du directeur exécutif de la FCA, M. Scott Ross, qui répondra en ligne aux questions difficiles que vous pourriez avoir.
    Au cours des dernières années, les Canadiens ont tous été aux prises avec un taux d'inflation du prix des aliments supérieur à la pression inflationniste déjà élevée qui s'exerce sur le coût de la vie. Même s'il a diminué au cours de la dernière année, le taux d'inflation du prix des aliments cause à juste titre des inquiétudes chez tous les Canadiens.
    Dans ma déclaration d'aujourd'hui, je veux dissiper ce que je considère comme des idées fausses qui sont véhiculées sur cette question.
    La première perception erronée est la corrélation entre l'augmentation du prix des aliments et l'augmentation des profits des agriculteurs. Il faut pourtant savoir que les coûts de production actuels des aliments que nous mangeons sont bien plus élevés qu'avant la pandémie. Regardons par exemple les changements du prix de bon nombre des intrants agricoles. Que ce soit la machinerie, le carburant, l'engrais, le bétail ou les produits alimentaires pour le bétail, les prix payés par les agriculteurs se sont accrus de près de 40 % depuis 2019. Même si les données les plus récentes de Statistique Canada montrent une hausse des revenus agricoles pendant cette période, le montant des dépenses outrepasse l'augmentation des recettes monétaires agricoles. Même si le prix des produits de base sur le marché commence à fléchir, le prix des intrants agricoles reste élevé.
    La deuxième idée fausse vient de ceux qui prétendent que le prix à la ferme conditionne le prix des aliments au détail. Une étude récente menée par l'Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan révèle que le prix sous-jacent des produits de base n'est pas le seul élément responsable de l'augmentation du prix des produits alimentaires finaux. Il jouerait le plus souvent un rôle mineur, puisque la part du prix de détails revenant aux fermes représente en moyenne moins du quart de la valeur des produits finaux, selon l'échantillon examiné dans l'étude.
    J'insiste sur les preuves irréfutables du rôle mineur des prix demandés par les agriculteurs dans les hausses des prix de détail. Cela dit, des mesures pourraient être prises immédiatement pour atténuer la hausse des coûts de production des aliments au Canada.
    D'abord, des exemptions devraient être appliquées pendant une période donnée pour l'utilisation du gaz naturel et du propane dans les exploitations agricoles. C'était l'objet du projet de loi C‑234. Ces exemptions devraient viser non seulement le séchage du grain, mais aussi le chauffage et la climatisation des étables, des serres et d'autres installations de production. Selon les résultats de notre enquête sur les conséquences de la taxe sur le carbone sur les fermes d'élevage, les fermes de cultures et les serres partout au Canada, cette taxe compterait pour plus de 40 % du montant des factures d'énergie dans certains secteurs.
    Ensuite, le mémoire que nous avons déposé en prévision du budget de 2024 — cette année — renferme un certain nombre de recommandations qui visent la diminution du coût de production et l'amélioration de la dynamique de la chaîne d'approvisionnement du secteur agricole. Par exemple, nous demandons au gouvernement de mener des consultations de même que de mettre au point une stratégie sur les intrants agricoles essentiels en s'inspirant de la stratégie sur les minéraux critiques. La nouvelle stratégie assurerait un approvisionnement stable et à long terme d'intrants agricoles essentiels dont les agriculteurs canadiens ont besoin pour offrir des produits agricoles et agroalimentaires de grande qualité.
    Enfin, il faut mettre en œuvre un code de conduite dirigé par l'industrie pour le secteur des épiciers. Ce code aurait pour objectif d'assurer la prospérité de l'industrie et d'instaurer la confiance, l'équité et la collaboration dans toute la chaîne de valeur. Le code permettrait également de renforcer la certitude commerciale et de mettre en place un processus de règlement des différends efficace et équitable. Il contribuerait à améliorer la dynamique de la chaîne d'approvisionnement, mais ne combattrait pas l'inflation du prix des aliments. L'industrie a consacré énormément de temps et de ressources à l'élaboration d'un code de conduite dirigé par elle et acceptable pour toutes les parties. Nous sommes reconnaissants de l'attention et du soutien du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux et territoriaux tout au long de la préparation du code et nous espérons que ce soutien perdure jusqu'au bout.
    Je vais répondre avec plaisir à vos questions.
    Je mentionne au passage que le vendredi 9 février, nous soulignerons la Journée d'affranchissement des dépenses alimentaires. C'est à cette date que les ménages canadiens à revenu moyen auront gagné l'argent nécessaire pour payer leur facture d'épicerie de l'année entière.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Currie.
    Nous allons passer à Mme Brisebois ou à M. Littler, du Conseil canadien du commerce de détail.
    Monsieur Littler, la parole est à vous pour cinq minutes.
    Merci.
     Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de m'avoir invité à témoigner de nouveau devant le Comité.
    Si vous le permettez, nous allons partager notre temps de parole. Je vais parler de l'inflation du prix des aliments, des causes de l'inflation ainsi que de la trajectoire actuelle. Mme Brisebois, la présidente-directrice générale du conseil, va parler brièvement du code de conduite, qui suscite un intérêt généralisé.
    Dans un autre contexte que celui‑ci, Al Gore a qualifié de « vérités qui dérangent » les faits que certaines personnes préfèrent ne pas reconnaître pour ne pas avoir à prendre les mesures qui s'imposent. Dans le cas qui nous occupe, certains politiciens opportunistes préfèrent ne pas admettre le caractère très ténu du lien entre les épiciers et l'inflation du prix des denrées alimentaires. Ils n'admettent pas non plus que la majeure partie de la hausse du prix des aliments se produit plus en amont dans la chaîne d'approvisionnement, au stade de la production et de la transformation.
    Il ne faut pas pour autant blâmer les producteurs ou la vaste majorité des transformateurs. Quelqu'un a mentionné plus tôt l'énorme pression qu'ont exercée sur les producteurs les coûts des intrants tels que les aliments pour animaux, le carburant et l'engrais. Ce phénomène mondial se superpose à la hausse des taux d'intérêt et des autres coûts tels que la main-d'œuvre. Ces coûts sont transférés aux fabricants, qui se retrouvent seuls avec le fardeau des coûts additionnels. Toujours est‑il que presque 80 % du prix des aliments vendus dans les épiceries augmentent au stade du fournisseur, bien avant d'arriver sur les rayons.
    Parmi les autres vérités qui dérangent, il faut mentionner le fait que le taux d'inflation du prix des aliments au Canada est le deuxième plus bas des pays du G7. Mentionnons également la diminution de plus de 50 % du taux d'inflation du prix des aliments par rapport à son niveau la dernière fois que le Conseil canadien du commerce de détail a témoigné devant le Comité. N'occultons pas non plus la réduction de plus de la moitié, sinon des deux tiers, de l'écart entre l'inflation du prix des aliments et l'inflation totale mesurée au moyen de l'IPC. Il faut comprendre enfin que puisque leur marge brute et leur profit net se situent dans une fourchette de 2 % à 5 %, les épiciers enregistrent un des pourcentages de profit minimes par rapport aux profits affichés par les grands fabricants mondiaux de produits de consommation emballés, qui ne cessent de transférer les augmentations de coûts aux autres maillons de la chaîne.
    Malgré les faits que je vous ai exposés — les vérités qui dérangent —, de nombreux observateurs essaient de dépeindre les épiciers comme les méchants de service. En véhiculant ces faussetés, ils évitent délibérément de prendre des mesures pour tenir responsables les autres joueurs de la chaîne d'approvisionnement. Les dirigeants politiques devraient présenter aux Canadiens un tableau complet de l'inflation du prix des aliments et reconnaître ouvertement que ce phénomène est causé par la conjoncture mondiale et par la chaîne d'approvisionnement. Ils doivent également cesser de prendre pour bouc émissaire le secteur de l'alimentation au détail, qui s'efforce continuellement de stabiliser les prix pour les Canadiens.
    Je vais céder la parole à ma collègue, Mme Brisebois.
(1110)

[Français]

    La création d'un code de conduite menée principalement par l'industrie est une tâche colossale. Bien qu'il reste du travail à faire, le comité directeur, dont nous faisons partie, est encouragé par les progrès réalisés à ce jour.
    Un code de conduite n'est pas un document unique. Il s'agit d'un ensemble de mesures intégrées qui fonctionnent ensemble pour promouvoir le commerce équitable et éthique ainsi que la certitude contractuelle. Il est aussi important de noter que ce code diffère des codes qui existent dans d'autres pays. Celui qui est proposé au Canada est réciproque et inclut tous les intervenants, soit les petites, moyennes et grandes entreprises qui font partie de la chaîne d'approvisionnement.
    Bien que certaines grandes entreprises de notre secteur aient indiqué qu'elles avaient des préoccupations quant au code actuel, nous avons regagné confiance et sommes persuadés que notre industrie sera en mesure d'en arriver à une résolution qui, nous l'espérons, répondra concrètement aux préoccupations des parties prenantes concernées. Nous tenons présentement des discussions avec certaines entreprises afin d'en arriver, comme je viens de l'énoncer, à une entente qui répondra aux besoins de l'ensemble des intervenants.
    C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Brisebois.
    Nous passons maintenant aux questions des membres du Comité.
    Madame Rood, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur contribution à notre étude importante. Vous avez tous parlé du code de conduite des épiciers, mais selon des perspectives très différentes.
    Tout d'abord, monsieur Currie, si le code est mis en œuvre, pourriez-vous dire au Comité comment cet outil protégera les agriculteurs, les producteurs et tous ceux qui fournissent les produits aux chaînes de vente au détail? Selon moi, la plupart des gens ne saisissent pas — nous l'avons entendu aujourd'hui — que la finalité du code est en fait d'aider les agriculteurs. Ce dernier n'aura pas nécessairement d'incidence sur le prix des aliments dans les épiceries.
    Pourriez-vous expliquer quelles seront les répercussions du code sur les prix?
    Je vais formuler quelques commentaires avant de céder la parole à mon collègue, M. Ross, sur Zoom. M. Ross connaît très bien le processus d'élaboration du code de conduite pour les épiciers.
    Nous voulons évidemment instaurer une forme d'intégrité dans le système pour que les règles du jeu soient observées. Nous savons tous que les entreprises à tous les maillons de la chaîne d'approvisionnement doivent faire des profits pour survivre. Je vais vous donner quelques exemples. M. Epp, qui arrivera un peu plus tard, vit dans une région qui compte beaucoup de serriculteurs. Il arrive très souvent que les serriculteurs apprennent au moment de mettre leurs produits dans le camion qu'ils obtiendront 2 cents de moins la boîte. Nous voulons instaurer cette stabilité et nous assurer que les gens font ce qu'ils ont promis. Nous voulons seulement rassurer les agriculteurs au sujet de la stabilité des prix.
    Monsieur Ross, vous qui avez été très impliqué dans le processus, voulez-vous ajouter quelque chose?
(1115)
     Je pense que vous avez répondu à ma question, monsieur Currie.
    Très bien. D'accord.
    Je vais poursuivre avec le code de conduite des épiciers. Ma question s'adresse à Mme Brisebois ou à M. Littler.
    En décembre dernier, des détaillants en alimentation sont venus témoigner devant le Comité. Je crois savoir que votre organisme représente des épiciers tels que Sobeys, Metro, Loblaws et Walmart. Loblaws et Walmart sont les deux seuls grands épiciers qui n'ont pas encore signé le code de conduite. J'ai posé la question au président du conseil d'administration de Loblaws lors de son passage devant le Comité avant Noël.
    Pourriez-vous nous dire comment le Conseil canadien du commerce de détail se positionne sur la question de l'approvisionnement des épiciers indépendants?
    Nous appuyons le code de conduite. J'ai d'ailleurs partagé avec le directeur exécutif de la FCA un siège au comité directeur, qui est devenu depuis le conseil provisoire du code de conduite. Nous sommes en faveur du code.
    Par contre, comme je l'ai dit dans ma déclaration, le code est inédit parce qu'il est le seul à inclure tout le monde. Alors que les codes du Royaume‑Uni et de l'Australie visent surtout les grandes chaînes d'épicerie et les grands fabricants, au Canada, nous avons choisi d'inclure tous les joueurs. Des valeurs comme les pratiques équitables, la transparence et la sécurité contractuelle doivent se trouver à tous les maillons de la chaîne d'approvisionnement.
    Il est normal que cela prenne du temps. Il est normal que quelques joueurs soulèvent des préoccupations au sujet de certains des éléments du code. Sachez que le Conseil canadien du commerce de détail déploie tous les efforts possibles pour répondre aux inquiétudes de ces joueurs et pour rallier tout le monde autour du code. Ce serait un très bon signe pour les Canadiens si ces derniers voyaient que tous les acteurs de la chaîne d'approvisionnement travaillent ensemble.
    Merci.
    Monsieur Charlebois, dans votre « Rapport sur les prix alimentaires au Canada 2023 », on mentionne que dans l'ensemble, le prix des aliments augmentera de 5 à 7 % cette année, et qu'une famille de quatre personnes verra sa facture d'épicerie augmenter de plus de 1 000 $ en 2024. Votre rapport fait allusion à des coûts de production plus élevés, ce dont M. Currie a parlé. Les agriculteurs et les producteurs sont confrontés à des coûts de production plus élevés. L'augmentation des coûts de transport aura une incidence sur le prix des aliments. Voici une citation directe de votre rapport: « ce qui incitera les producteurs à transférer ces frais aux consommateurs, dans le but de maintenir leur rentabilité ». Le prix du carburant pour le transport des aliments par camion représente une grande partie des coûts de production. Il faut payer la taxe sur le carbone, et le gouvernement NPD-Libéral veut quadrupler cette taxe. De fait, elle va augmenter le 1er avril.
     Étant donné que la taxe sur le carbone va inévitablement augmenter le coût du transport des marchandises vers les épiceries, pensez-vous qu'elle aura une incidence directe sur les familles canadiennes et qu'elle sera liée aux prix plus élevés des aliments que nous constaterons bientôt dans les épiceries?
    C'est une bonne question.
    Tout d'abord, je voudrais vous corriger brièvement. Il s'agit du rapport de l'année dernière. Le rapport de cette année — 2024 — indique que nous nous attendons à ce que le prix des aliments augmente de 2,5 à 4,5 %. Pour une famille de quatre personnes, cela représente 700 $. Les choses s'améliorent, si l'on peut dire. Certes, l'année 2023 a été une année très difficile.
    En ce qui concerne la taxe sur le carbone, nous avons réalisé des études en laboratoire. Nous ne pouvons pas établir de corrélation entre ce qui se passe avec la taxe sur le carbone et le prix des aliments au détail. Cependant, j'ai mentionné au comité des finances, je crois que c'était il y a trois mois, que nous sommes préoccupés par la compétitivité. En raison du fardeau financier imposé aux agriculteurs, aux transformateurs et aux détaillants, nous nous attendons à ce que la compétitivité de l'industrie s'affaiblisse au fil du temps par rapport à ce que nous observons aux États-Unis.
    Je vous remercie.
    J'ai mentionné le rapport de 2023 parce que nous avons constaté une augmentation considérable en 2023 avec la mise en œuvre d'une taxe sur le carbone. Cette taxe a entraîné une augmentation des prix en 2023. Nous sommes en 2024, et je ne vois pas comment cette situation ne pourrait pas se reproduire cette année. C'est la raison pour laquelle j'ai cité ce rapport.
    C'est vrai, on a dit qu'il y aurait une augmentation de 700 $ en 2024. Cela n'en demeure pas moins une somme importante pour les familles canadiennes. Les Canadiens se présentent en nombres records aux banques alimentaires: plus de deux millions de personnes y ont recours. Nous essayons de trouver des moyens de réduire le prix des aliments pour les Canadiens, mais il semble que les politiques de ce gouvernement et le coût des intrants contribuent énormément, je le répète, aux coûts de production associés aux aliments.
(1120)
    Très brièvement, ce que j'ai recommandé au Comité des finances, c'est de suspendre la taxe sur le carbone pour toutes les entreprises liées à l'industrie alimentaire en général, parce que nous ne savons pas exactement quelle en sera l'incidence sur la compétitivité de l'industrie au fil du temps. Nous ne le savons tout simplement pas.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Charlebois et madame Rood.
    Nous passons maintenant à Mme Taylor Roy pour un maximum de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je pense que je vais continuer dans cette même veine, car vous avez dit, monsieur Charlebois, que vous ne pouvez pas établir de lien entre le prix des aliments et la taxe sur le carbone. D'ailleurs, la taxe sur le carbone est plus élevée cette année qu'elle ne l'était l'année dernière. Elle a augmenté d'un certain montant de façon prévisible. Il y a eu des investissements chaque année.
    Comment expliquez-vous alors que cette année, l'augmentation du prix des aliments oscillera entre 2,5 et 4,5 %, alors que l'année dernière cette augmentation était beaucoup plus élevée, si, en réalité, la taxe sur le carbone augmente et ne diminue pas?
    La rhétorique au sujet de la taxe sur le carbone est un peu trompeuse. La plupart des gens parlent du commerce de détail, mais beaucoup de choses peuvent se produire dans ce secteur. Le comportement des consommateurs peut avoir une incidence sur le prix des aliments. Les conditions météorologiques peuvent avoir une incidence sur le prix des aliments. Il est très difficile d'établir un lien entre le prix de détail et des politiques comme la taxe sur le carbone.
    Nous avons examiné les prix industriels. Ce que nous avons découvert, c'est que pour les prix industriels au Canada — tout au long de la chaîne alimentaire, de la ferme à la transformation —, l'écart entre l'Indice des prix des produits industriels du Canada, ou IPPI, et celui des États-Unis, s'accroît. Cela signifie que nous pourrions graduellement mettre en péril la sécurité alimentaire du Canada si nous ne permettons pas à l'industrie alimentaire de s'adapter et d'adopter des technologies vertes pour réduire son empreinte carbone.
    Nous devons décarboniser l'économie, cela ne fait aucun doute. Je pense que tout le monde s'entend là‑dessus. La question a trait au rythme auquel nous le faisons à l'heure actuelle, et à l'imposition de cette taxe. Ce que nous disons, c'est que l'industrie est peut-être étouffée par tout cela.
    Je vous remercie.
    Nous savons que les États-Unis n'ont pas imposé la tarification du carbone à l'échelle du pays, mais que de nombreux États ont adopté des mesures équivalentes à la tarification du carbone. Nous savons également qu'un grand nombre d'accords commerciaux vont inclure une certaine forme de tarification du carbone.
    Vous parlez de compétitivité. La perspective de l'application de droits de douane en l'absence d'un programme de tarification du carbone n'entraîne‑t‑elle pas elle aussi des inquiétudes relatives à la compétitivité au Canada?
    Selon moi, il est important que nous suivions l'exemple de nos partenaires commerciaux à ce sujet. Nous pourrions faire très mal... Je pense que nous nuisons aux agriculteurs. Le projet de loi C‑234 n'a pas été bien accueilli par les agriculteurs. M. Currie pourrait certainement en parler.
    Nous devons penser à la transformation. Beaucoup de transformateurs souffrent. Les représentants du Conseil canadien du commerce de détail ont dit que les coûts augmentent dans la vente au détail et la distribution, et ils ont tout à fait raison. Aujourd'hui, nous constatons davantage d'investissements dans le « kilomètre intermédiaire ». Metro et Loblaw y font tous deux des investissements, ce qui est très bien, mais les choses progressent très rapidement.
    Vous faites allusion au rythme du changement. Je vois.
    Avez-vous examiné l'incidence des événements climatiques au Canada sur le coût des aliments? Cela peut être à n'importe quel maillon de la chaîne, mais surtout chez les agriculteurs. Les sécheresses que nous avons connues récemment, les inondations, les incendies de forêt...
     Avez-vous fait faire des estimations sur ce que ces phénomènes ajoutent au coût des aliments ou aux coûts pour les agriculteurs?
    Chaque année, lorsque nous rédigeons le « Rapport sur les prix alimentaires », les changements climatiques sont le facteur principal. C'est la variable inconnue. Pendant quelques années, c'était la COVID et les changements climatiques. Les changements climatiques sont vraiment un facteur important. Cela ne signifie pas qu'ils entraîneront une augmentation des prix, mais ils rendent les choses plus imprévisibles.
    Dans le cadre de son étude sur la stabilité du prix des aliments, je pense que ce comité devrait examiner la volatilité des prix, et pas nécessairement l'inflation du prix des aliments. L'inflation est nécessaire pour faire croître l'économie. À mon avis, démoniser l'inflation est une perte de temps. Nous devons nous concentrer davantage sur la volatilité des prix, et c'est certainement ce qu'entraînent les changements climatiques.
    La volatilité augmente.
    Vous avez dit que les changements climatiques n'auraient pas nécessairement pour effet de faire augmenter les prix.
(1125)
    Ce ne serait pas toujours le cas, non.
    Toutefois, de toute évidence, les sécheresses, les inondations, etc. ne les feront pas baisser, quand nous...
    Les conditions climatiques stimulent parfois la production, comme on le voit.
    Avons-nous vu cela au Canada au cours des cinq dernières années?
    Il ne faut pas oublier que nous effectuons beaucoup de recherches pour aider les agriculteurs à accroître leur productivité. Les rendements augmentent, etc. Il faut poursuivre ces recherches. Nous aidons, en outre, l'industrie à composer avec les changements climatiques dans l'ensemble.
    C'est très bien. Je vous remercie beaucoup.
    Il vous reste environ une minute, si vous souhaitez l'utiliser, ou vous pouvez partager votre temps.
    C'est bien.
    J'aimerais savoir ce que Stacey Taylor pense de la volatilité des prix. J'ai vu quelque part que le prix des aliments serait plus stable l'an prochain. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez et pourquoi, selon vous, ce sera le cas?
    Pour préparer nos prévisions, nous utilisons essentiellement toute l'information disponible à ce moment‑là. Nous procédons à une multitude de scénarios pour tenter de prévoir ce qui va se passer. Comme il y a beaucoup d'inconnus inconnus — pour reprendre une expression bien connue —, nous essayons d'estimer ce qui pourrait arriver en utilisant les données sur ce qui s'est déjà produit. C'est de cette façon que nous établissons nos prévisions sur le prix des aliments pour l'an prochain, comme nous le faisons toujours.
    Ce qui présente un défi pour nous notamment, c'est que Statistique Canada dispose de données limitées. À titre d'exemple, dans le Nord, nous avons des données sur l'alimentation pour les Territoires du Nord-0uest et le Yukon, mais pas pour le Nunavut. Les données sont en outre très limitées. Si on veut que l'information soit pancanadienne, il faut inclure toutes les régions. Le Nord est une région du pays très importante. Nous devons avoir une meilleure idée des défis que ses habitants doivent relever par rapport au reste du Canada.
    C'est bien. Cela nous amène...
     C'est bon à savoir.
    Je vous remercie.
    C'est bien.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie beaucoup les témoins de s'être rendus disponibles pour être des nôtres aujourd'hui.
    Monsieur Charlebois, ma première question s'adresse à vous et je tenterai de vous la poser rapidement.
    Vous avez mentionné que, selon vos études et votre analyse, le fait de dire que les grands épiciers sont abusifs dans la réalisation de leurs profits, c'est du populisme. Pourriez-vous nous expliquer davantage votre raisonnement?
    Comment expliquez-vous les gros chiffres qu'on nous montre? En effet, on nous montre des chiffres énormes. C'est donc facile d'embarquer dans le train.
    C'est très facile.
    En fait, je suis d'accord avec les représentants du Conseil canadien du commerce de détail sur le fait qu'on a politisé l'inflation alimentaire. Pour politiser l'inflation alimentaire, on utilise de gros chiffres pour représenter les profits en dollars.
    Pour notre part, nous avons publié trois rapports sur la cupidiflation et nous avons démontré que les marges bénéficiaires brutes étaient à peu près les mêmes depuis cinq ans. Nous croyons que c'est une mesure importante à regarder, parce qu'il s'agit de calculer les revenus moins les coûts des produits. Donc, lorsque les coûts changent en amont de la chaîne, on le voit. C'est un indicateur assez clair.
    L'autre chose à considérer concerne les ventes de produits alimentaires. En effet, il faut isoler les produits alimentaires des produits pharmaceutiques et cosmétiques. L'augmentation des ventes de produits alimentaires dépasse rarement l'inflation alimentaire. Il y a eu deux ou trois cas: chez Metro, c'est arrivé quelques fois, de même que chez Loblaws. Cependant, en général, depuis trois ans, c'est très rare. Donc, ces compagnies font beaucoup d'argent à vendre autre chose que de la nourriture.
    C'est ce que ces gens nous ont dit aussi.
    Le seul problème pour nous, les parlementaires, qui essayons d'étudier la question, c'est qu'il nous est impossible d'avoir des chiffres et une ventilation des données, parce que ces épiciers sont en concurrence.
    Ça, c'est un autre problème.
    Nous leur avons alors demandé de fournir leurs chiffres au Bureau de la concurrence et ils nous ont dit qu'ils allaient le faire. Or, par la suite, nous avons reçu le rapport du Bureau et celui-ci nous apprenait, dans les premières pages, que ces épiciers n'avaient pas donné leurs chiffres.
    D'une certaine façon, ils courent un peu après les problèmes.
    Il y en a qui sont plus transparents que d'autres, soit dit en passant.
    C'est exact. Je fais un commentaire un peu éditorial, mais je pense que nous sommes tous les deux d'accord là-dessus. Ils ont du travail à faire sur ce point. D'ailleurs, je suis content que vous nous parliez du Bureau de la concurrence.
    J'aimerais également que vous nous parliez des dernières sorties médiatiques du ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, dans lesquelles il demande à notre comité de convoquer à nouveau les présidents-directeurs généraux des grandes épiceries, alors que nous les avons déjà rencontrés au printemps dernier.
    Pensez-vous que cela pourrait donner quelque chose, au bout du compte? Avez-vous vu des résultats à la suite de leurs comparutions, vous qui étudiez les prix presque quotidiennement?
    En fait, j'ai accompagné le ministre Champagne à la réunion des cinq grands acteurs de la distribution qui s'est tenue en octobre à Ottawa. On m'avait demandé d'y faire une présentation. J'ai parlé des choses importantes, comme le code de conduite et la fameuse période de gel des prix. À mon avis, certaines pratiques sont obsolètes. Notamment, la culture de fixation des prix dans l'industrie doit être réglée. On l'a vu en ce qui concerne le pain et il y a des soupçons pour d'autres produits aussi. Or, je n'entends pas le ministre en parler dans son message. Le ministre parle de réduflation, de déqualiflation et de ce genre de choses, mais je pense qu'il faut aller plus loin. La question des profits, à mon avis, détourne l'attention du vrai problème à régler, soit celui de la volatilité.
    Je vous ai produit un tableau. Je n'en ai pas parlé tantôt, mais ce tableau démontre clairement que les prix sont beaucoup plus volatils entre novembre et février, et ce, depuis 30 ans. Nous avons fait l'analyse sur 5 ans, 10 ans, 15 ans, 20 ans et 30 ans. Depuis 30 ans, ce sont les mois de novembre, de janvier et de février qui sont très volatils. Le mois de mai est volatil aussi. Pourquoi? C'est en raison des frais. J'ai fourni dans mon rapport une lettre venant de Loblaws qui annonce aux fournisseurs qu'à partir du 28 avril, les frais allaient augmenter. Que va-t-il se passer, selon vous?
(1130)
    Les prix vont monter.
    Les prix vont augmenter, les fournisseurs vont augmenter leurs prix pour compenser les frais supplémentaires, et c'est le consommateur qui va écoper.
    Je vous ai laissé parler longtemps parce que vous êtes allé directement là où je voulais aller et ça m'intéressait. Je voudrais maintenant revenir sur le code de conduite.
    S'il n'y a pas d'abus relativement aux marges bénéficiaires, il peut y avoir des abus ailleurs. À cet égard, le code de conduite est essentiel. Comme ça a d'ailleurs été évoqué tantôt, il faut que tout le monde y participe.
    J'aimerais connaître votre avis d'expert là-dessus.
    Sur la base des informations que les gens ont bien voulu nous donner, à notre comité, nous sentons que Loblaws et Walmart ne veulent pas signer le code de conduite. Or, corrigez-moi si je me trompe, mais ces deux entreprises représentent à peu près 50 % du marché.
    Quelles seraient les conséquences si un code de conduite était instauré, mais que la moitié du marché n'y adhérait pas? Comment pouvons-nous régler ce problème?
    À mon avis, la question n'est même pas à débattre: le code ne fonctionnera pas sans la participation obligatoire de l'ensemble des acteurs de l'industrie. Personnellement, je ne vois pas comment un code pourrait fonctionner sans Walmart et Loblaws. Nous avons besoin qu'Ottawa et les provinces fassent preuve d'un peu de leadership. À mon avis, il vaut mieux ne pas avoir de code du tout si Loblaws et Walmart n'y participent pas.
    Vous n'entrevoyez donc pas la possibilité que les acteurs de moins bonne volonté se rallient au code après quelques mois.
    Non.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur MacGregor, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être avec nous.
     Monsieur Littler, j'aimerais commencer par vous.
    Je comprends que nous ne tirons pas les mêmes conclusions sur la nature des profits dans le secteur de l'épicerie de détail, mais dans votre déclaration liminaire, je crois que vous avez parlé de « démonisation » de l'industrie et du fait que les épiciers sont parfois dépeints de façon caricaturale comme les vilains.
    Vous êtes le vice-président des affaires publiques, et je dirais que cette caricature s'est imposée d'elle-même. Quand on regarde l'industrie, les trois principaux détaillants en particulier et leurs différentes enseignes, on se rend compte qu'ils ont absorbé ces enseignes qui, autrefois, étaient leurs concurrents. C'est un marché qui manque donc carrément de concurrence.
    M. Charlebois a parlé de la culture au sein de l'industrie. Nous avons entendu parler de la fixation des prix du pain, de l'entente récente entre Loblaws et Manuvie — même s'ils ont dû faire marche arrière. Il y a aussi le fait que Loblaws a réduit les rabais sur les produits presque périmés, etc., et le fait que les employés ont dû faire la grève parce qu'ils n'avaient pas les moyens de faire leurs courses là où ils travaillaient.
    J'aimerais savoir si, à votre avis, l'industrie doit assumer un peu la responsabilité de son image publique, de la façon dont elle est perçue. Ce n'est pas sorti de nulle part.
     Je vais soulever quelques points. Tout d'abord, je ne suis pas d'accord avec votre affirmation selon laquelle il ne s'agit pas d'un secteur hautement concurrentiel.
     Je dirais ensuite que nous nous sommes retrouvés dans une situation où des politiciens de diverses allégeances, certains très chevronnés, ainsi que des analystes et certains médias ont tenté de lier dans l'esprit de la population les profits des épiciers à l'inflation des produits alimentaires dans les magasins. C'est une comparaison totalement infondée. D'aucuns ont, ce faisant, pour le dire franchement, supprimé de l'information relative à la contribution générale. Je dirais que votre comité, dans son rapport, a fait preuve d'une perspective beaucoup plus équilibrée, mais sur la twittosphère ou dans certaines déclarations politiques pendant les conférences de presse, il y a eu une tentative délibérée et répétée de lier l'inflation alimentaire aux activités des épiceries, aux profits des épiceries et...
(1135)
    Je comprends cela, mais ma question visait essentiellement à savoir si vous étiez d'avis que les épiciers devaient assumer une part de responsabilité à propos de gestes publics bien documentés qu'ils ont posés. Cette perception n'est pas sortie de nulle part.
    Tout d'abord, je pense que si on discute de chaque question séparément, on peut avoir des discussions raisonnables.
     Ce qui me frustre, et ce qui fruste, à mon avis, ceux qui travaillent dans l'industrie de l'alimentation, c'est de voir des dirigeants politiques faire porter délibérément la responsabilité de l'inflation alimentaire aux épiciers, alors que toutes les preuves montrent que ce n'est pas le cas. Des experts en la matière, notamment la Banque du Canada et Statistique Canada, l'ont mentionné très clairement aux commentateurs. Malgré cela, ils ont tenté à maintes reprises d'établir un lien entre les activités, les décisions et les profits des épiciers et l'inflation des denrées alimentaires, alors que ce lien est fallacieux.
    Monsieur Charlebois, sur le même sujet, vous avez parlé de la culture au sein de l'industrie.
    Loblaw a assurément été vertement critiquée publiquement après avoir décidé dernièrement de réduire les rabais sur les articles presque périmés de 50 % à 30 %. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette culture? À mon point de vue, il semble que cette entreprise soit incapable de prendre le pouls de la situation et que son service de relations publiques est déconnecté de la réalité.
    Je partage vos préoccupations.
    Le rabais de 50 % a fait les manchettes, en fait, parce que nous avons envoyé un courriel à Loblaw en janvier pour leur dire que nous entendions des rumeurs à ce sujet. Nous leur avons écrit essentiellement pour leur demander si c'était vrai que le rabais de 50 % prenait fin. Ils ont confirmé que ce serait le cas en date du 14 janvier, si je me souviens bien. Je leur ai demandé la permission d'afficher le courriel sur X. Je leur ai demandé la raison. Ils ont dit essentiellement vouloir harmoniser leur politique avec celle de leurs concurrents.
     À mes yeux, cela soulevait de nombreux drapeaux rouges pour deux raisons. Premièrement, ils disaient ouvertement ce qu'ils faisaient. Deuxièmement, Loblaw m'a donné l'autorisation d'afficher le courriel sur les médias sociaux, sans même penser à la façon dont le message serait perçu par les gens.
    Je suis les activités de l'industrie depuis 25 ans. Je constate que certains problèmes ne cessent de revenir. Il ne devrait pas y avoir de période de gel des prix. Il n'y a pas de raison d'en avoir une. Eric La Flèche a dit lui-même que les prix augmentent bel et bien en février. C'est ce que nos données montrent également.
    Il y a alors toujours des magouilles au sein de la chaîne alimentaire, et ce sont les consommateurs qui finissent par en payer le prix.
    Cela me rapproche. Merci.
    Je vous remercie, monsieur MacGregor, pour ces 15 secondes.
    Nous passons à M. Barlow pendant cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Charlebois, j'aimerais que vous clarifier un de vos commentaires. Vous avez dit que les agriculteurs n'étaient pas heureux du projet de loi C‑234, mais je pense que vous parliez des amendements qui y ont été apportés.
    Pourriez-vous préciser cela rapidement pour le Comité?
    Vous avez raison, en effet. Je parlais des amendements. L'esprit du projet de loi était important pour eux, mais les amendements n'étaient pas une bonne nouvelle.
    Je vous remercie. Je voulais m'assurer que ce soit clairement mentionné.
    Oui.
    Je viens de voir le regard de M. Currie s'enflammer.
(1140)
    Les choses deviennent compliquées parfois.
     Je comprends.
    Aujourd'hui, lors de la conférence de presse sur les prix des aliments, le ministre de l'Innovation a déclaré que nous tirions des leçons de l'Union européenne. C'est un commentaire qui m'inquiète.
    Je veux vous parler d'un article que vous avez écrit et qui s'intitule en anglais « Farming's breaking point », ou l'agriculture au point de rupture. Vous avez parlé de ce qui se passe en Europe, des manifestations des agriculteurs en France, en Allemagne et dans d'autres pays. Vous avez parlé en particulier des taxes, de la réglementation, des décisions non fondées sur la science concernant les pesticides et les intrants.
    Si le Canada persiste sur cette voie, quelles pourraient être les répercussions sur la viabilité économique de nos fermes, par exemple, sur leur nombre, sur le prix des aliments et sur notre sécurité alimentaire? Pouvez-vous nous donner votre point de vue à ce sujet?
    J'ai écrit cet article parce que je pense que l'Europe nous envoie un message. C'est une situation qui pourrait se produire un jour au Canada si nous persistons à faire la sourde oreille aux preneurs de prix. Les agriculteurs n'ont aucun contrôle. Ils sont très vulnérables. Ils doivent être entendus, et ce qui est plus important encore, ils doivent être compris.
    Je pense que beaucoup de politiques sont axées sur le centralisme urbain, si on veut. Dans l'article, j'en ai donné quelques exemples au cours des dernières années. À l'heure actuelle, les agriculteurs sont perçus comme faisant partie du problème. Sans agriculteurs, il n'y a pas de nourriture et il n'y a pas de villes. Je pense qu'on a un peu oublié cela.
    Il faut mieux comprendre l'agriculture. Les gens aiment les agriculteurs, mais ils remettent en question les pratiques agricoles.
    Merci pour ces précisions.
    Vous vous êtes également montré critique à l’endroit des affirmations de la Banque du Canada quant à l’impact que la taxe sur le carbone peut avoir sur l’inflation. La Banque a soutenu que la suppression de cette taxe ferait baisser de 0,6 point de pourcentage le taux d’inflation qui se situait à ce moment‑là — en octobre, si je ne m’abuse — à 3,8 %. On pouvait donc alors en conclure que l’inflation était attribuable à la taxe sur le carbone dans une proportion de 16 %.
    Peut-être pourriez-vous nous éclairer davantage sur les éléments qui vous ont amené à tirer une telle conclusion. Que pouvez-vous nous dire au sujet de la taxe sur le carbone et de son impact sur l’inflation?
    Nous avons discuté avec les gens de la Banque du Canada de la façon dont ils en sont arrivés à cet impact correspondant à 0,15 point de pourcentage. Comme ils n’ont considéré que trois composantes de l’indice des prix à la consommation, j’ai jugé leur méthode de calcul plutôt simpliste. Bien des gens ont été surpris de faire le même constat lorsque nous avons affiché ce calcul sur la plateforme X avec l’autorisation de la Banque.
    Je réitère que c’est la raison pour laquelle je recommande que l’on suspende l’application de la taxe carbone pour l’ensemble du secteur alimentaire, de la ferme jusqu’aux restaurants, en passant par les épiceries. En effet, personne, et j’inclus la Banque du Canada dans le lot, ne semble bien comprendre à quel point cette mesure pourrait en venir à mettre en péril la sécurité alimentaire au Canada.
    Je vous remercie de votre réponse.
    J'aimerais passer à M. Currie. Vous avez mentionné un pourcentage. Vous avez des membres qui disent à quel point le projet de loi C‑234 est important, que la taxe sur le carbone équivaut à 40 % du montant de leurs factures d'énergie. Nous avons même vu des factures dans différentes régions au pays sur lesquelles, dans certains cas, le montant de la taxe sur le carbone était plus élevé que celui du gaz naturel facturé. On sait que la taxe sur le carbone augmentera le 1er avril et qu'elle quadruplera au cours des prochaines années. Quelles sont les répercussions de cela sur la santé financière de nos exploitations agricoles au Canada?
    Pourquoi le projet de loi C‑234 est‑il si important?
    Comme vous l'avez mentionné, le coût le plus important que nous devons assumer, en particulier pour ce qui est du chauffage, est la taxe sur le carbone. L'un des membres de notre conseil d'administration, qui réside juste à l'extérieur d'Ottawa — et je pense que beaucoup d'entre vous ont probablement entendu parler de lui — exploite la ferme Carleton Mushroom. L'an prochain, il devra payer 450 000 $ rien qu'en taxe sur le carbone. Comment peut‑on rentabiliser une exploitation agricole quand on paie une telle somme?
     L'impact se fera sentir lorsque les agriculteurs devront prendre une décision, soit réduire leur production ou peut-être mettre la clé sur la porte. C'est à ce moment‑là que l'on commencera à voir l'impact sur l'approvisionnement alimentaire, ce qui, inévitablement, aura un impact sur les prix. Nous pourrons peut-être remplacer cette offre, mais à un coût beaucoup plus élevé, car elle ne sera pas produite ici, au Canada. Elle viendra d'ailleurs.
     Comme l'a mentionné M. Charlebois, nous sommes des preneurs de prix. Nous ne pouvons pas fixer le prix de notre produit. Pour l'essentiel, il est basé sur les marchés internationaux, et nous devons donc absorber tous ces coûts. Nous ne pouvons en absorber que jusqu'à un certain point avant d'atteindre le point de rupture.
    Je vous remercie, monsieur Currie.
    Je vous remercie, monsieur Barlow.
    Nous allons passer à M. MacDonald qui est en ligne. Vous avez cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Je vous remercie. Je vais passer directement à M. Currie.
    Monsieur Currie, vous avez abordé le sujet, et nous avons entendu de nombreux exemples de relations acrimonieuses entre fournisseurs et détaillants en l'absence d'un code. Je me demande si vous pourriez nous expliquer le rôle que joue cette relation dans le prix de certains produits que l'on voit sur les tablettes des épiceries.
    La plupart des agriculteurs n'ont pas de contact direct avec les détaillants. C'est plus fréquent dans le secteur horticole, où les contrats peuvent être établis directement avec les grandes épiceries, pour ainsi dire. Ils leur arrivent d'être touchés si tout à coup, le contrat qui a été signé n'est pas honoré, que quelqu'un leur offre moins d'argent ou passe au suivant.
    C'est pour cette raison que les agriculteurs trouvent l'idée d'un code intéressante. Nous avons alors la sécurité, la transparence et de bons rapports commerciaux tout au long de la chaîne d'approvisionnement, et nous sommes récompensés pour ce que nous faisons. Lorsque les agriculteurs font des profits, ils ne mettent pas l'argent dans leurs poches, mais le réinvestissent dans leur entreprise, comme le font toutes les petites entreprises, alors c'est bon pour l'économie. On oublie souvent de parler du développement économique dans les discussions.
(1145)
    Je vous remercie.
    Je voudrais revenir sur les tarifs douaniers. Mme Roy en a parlé. L'année dernière, les États‑Unis ont adopté la politique climatique la plus importante à ce jour et, au cours de l'année écoulée, nous avons vu des républicains et des démocrates — qui ne s'entendent pas toujours, comme nous le savons — se faire l'écho des pressions pour que l'on mesure les émissions de gaz à effet de serre de certains produits fabriqués aux États‑Unis. Ils espèrent que les données vont motiver la création d'un tarif douanier sur les importations de produits à forte intensité de carbone provenant d'autres pays. Nous savons qu'un ancien président dans la course s'est servi de cette mesure comme d'une arme géopolitique. Nous savons que l'Union européenne met également en œuvre, ou envisage de le faire, des droits de douane sur le carbone pour les pays qui ne disposent pas d'un mécanisme reconnu de tarification du carbone.
     Nous sommes dans une position difficile. Si nous ne mettons pas en place un mécanisme de tarification du carbone et que nos partenaires commerciaux commencent à appliquer des droits de douane, qu'arrivera‑t‑il si nous devons faire face à certains de ces enjeux qui pourraient survenir relativement rapidement? C'est parfois déjà le cas.
     Monsieur Currie, avez-vous une opinion à ce sujet?
    C'est un sujet très complexe. Nous avons déjà entendu ce matin des commentaires sur les accords commerciaux internationaux et la tarification du carbone, et il est vrai que les ajustements carbone à la frontière vont devenir une réalité très prochainement. Il en est toujours question dans les discussions sur les accords commerciaux. La conférence ministérielle aura lieu à la fin du mois, et ce sujet occupera certainement une grande place au programme.
    Au sujet des États‑Unis — et cela a déjà été mentionné ici aujourd'hui —, nos agriculteurs sont désavantagés sur le plan de la concurrence, car les agriculteurs américains bénéficient de nombreux programmes de soutien financier. Nos agriculteurs peuvent être fâchés, car le fait est que le gouvernement américain soutient bien mieux financièrement ses agriculteurs que le nôtre le fait. Je pense que c'est là où se heurte la compétitivité de nos produits. Nous pouvons produire des produits de qualité sur un pied d'égalité avec eux, mais quand les points de vue et les politiques divergent et nuisent à notre façon de cultiver ou à la possibilité de le faire, c'est là où le bât blesse pour nous.
    En fait, pensez-vous qu'il est pertinent de se préparer à la tarification du carbone à la frontière et que cela sera appliqué? Quels préparatifs les gouvernements devraient-ils entreprendre dès maintenant? Je sais que le budget de l'agriculture a augmenté de 25 %. Ce n'est sans doute pas suffisant selon certains. Cependant, je voudrais savoir ce que l'industrie et les secteurs font pour se préparer à l'imposition de droits de douane sur certains de nos produits.
     On entend parler de l'abandon de la tarification du carbone et de l'abandon des mécanismes qui l'entourent au Canada, mais je ne pense pas que ce soit ce vers quoi se dirige le monde. Je veux le savoir pour pouvoir parler directement aux agriculteurs de ma circonscription et leur dire: « Voici ce que nous devons faire ».
     J'essaie de vous renvoyer la balle. Que devrions-nous dire aux représentants du gouvernement — à nous-mêmes —, au ministère et à nos partenaires commerciaux? Où en sommes-nous?
    Je pense que ce qui est très frustrant, de mon point de vue, c'est que personne ne vient nous parler avant de mettre en place des politiques. Ce n'est pas que les agriculteurs ne veulent pas faire ce qu'il faut ou aller au bon endroit dans les discussions sur le climat ou sur la tarification du carbone, mais on ne nous donne jamais l'occasion d'apporter une contribution significative ou de travailler avec le gouvernement en place pour créer le bon cadre de réglementation, où nous pouvons établir une tarification efficace du carbone sans nuire aux agriculteurs.
    N'oublions pas que les deux éléments les plus importants pour les êtres humains sont la nourriture et le logement, et que la sécurité alimentaire l'emportera chaque jour sur la tarification du carbone. J'espère que nous ne nous y prendrons pas trop tard.
(1150)
    D'accord.
    Si je peux ajouter brièvement à cela — je ne sais pas si j'ai un moment —, j'ajouterai simplement que nous, en tant qu'organisations agricoles, travaillons au niveau international avec nos homologues sur la nécessité de veiller à ce qu'il y ait une discipline appropriée à l'OMC pour veiller à ce que toutes ces mesures soient mises en oeuvre en se fondant sur des données scientifiques et que nous ayons des bases cohérentes sur lesquelles elles sont élaborées. Je pense que, de notre point de vue, c'est absolument primordial. Si nous voulons que des mécanismes de ce type soient utilisés, il faut qu'il y ait des cadres juridiques internationaux qui les obligent à rendre compte des données scientifiques et qui garantissent qu'ils sont élaborés en s'appuyant sur des données scientifiques et factuelles vraiment solides.
    Merci, monsieur Ross. J'ai été un ministre du Commerce au niveau local, et je me souviens que l'ancien président, M. Trump, a supplanté l'OMC sur les questions que vous évoquez. Je pense que nous devons nous préparer.
    Merci.
    Merci, monsieur MacDonald.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Perron pour deux minutes et demie, je vous prie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Brisebois, j'aimerais poursuivre avec vous la série de questions que j'ai posées tantôt.
    Dans votre allocution d'ouverture, vous avez mentionné que vous aviez des discussions avec deux de vos membres — nous devinons lesquels — et que vous êtes optimistes.
    Croyez-vous vraiment arriver à faire signer le code de conduite par tout le monde? Dans l'optique où ça n'arriverait pas, envisageriez-vous de l'instaurer quand même?
    Nous préférons ne pas nous concentrer sur la possibilité que ça n'arrive pas. Notre planification est axée sur un engagement de la part de tous les intervenants. Comme je l'ai dit au début, monsieur Perron, c'est un énorme projet parce que nous incluons tout le monde. Nous nous attendions d'ailleurs à ce que certaines parties prenantes aient des préoccupations.
    L'objectif du comité directeur est vraiment d'essayer de trouver des solutions. Nous voulons inviter à la discussion toutes les compagnies importantes et comprendre leurs préoccupations à l'endroit du code pour ainsi augmenter nos chances qu'elles en arrivent toutes à le signer. Le but premier est de trouver une solution.
    Est-ce que certaines personnes craignaient que ce processus accouche d'un code de conduite dilué ou moins efficace? Est-ce que ces craintes pourraient être fondées?
    Vous soulevez un très bon point.
    Le gros défi, c'est que plusieurs organisations pensent que ce code devrait être comme celui appliqué en Angleterre, tandis que d'autres organisations pensent que l'adhésion au code devrait se faire de façon volontaire et réciproque.
    Même si on parle d'une ou deux compagnies, il faut savoir qu'énormément de groupes ont fait part de leurs préoccupations, et ce ne sont pas seulement les détaillants. Comme les préoccupations sont nombreuses, il y a encore beaucoup de travail à faire. Plusieurs rencontres auront lieu au cours des prochains mois pour essayer de trouver une solution qui satisfera tout le monde.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur MacGregor, vous avez la parole pour deux minutes et demie.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Charlebois, beaucoup de travail a été fait à ce comité au sujet de la tarification du carbone. En ce qui concerne l'intervention de M. Currie sur le projet de loi C‑234, je pense que les dispositions de ce projet de loi sont conformes aux exemptions déjà prévues par la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Vous pouvez déjà voir les exemptions pour la machinerie agricole, les carburants agricoles et les activités agricoles.
    Vous parliez de fluctuations. Le prix est fixé par litre, mais bien entendu, nous avons constaté des fluctuations extrêmes du prix du carburant diesel. Je pense qu'en Colombie-Britannique, en 2022, certaines régions affichaient un prix d'environ 2,30 $ le litre. Aujourd'hui, nous en sommes à une moyenne de 1,70 $ le litre, ce qui montre les fluctuations extrêmes du prix du diésel. C'est très important, car il s'agit d'un carburant destiné au transport.
    Je crains cependant que l'état de notre discours ne rende pas service au problème global, car on se concentre trop sur la tarification du carbone. Nous savons que les compagnies pétrolières et gazières ont certainement vu leurs comptes bancaires très bien se porter ces dernières années, et qu'il y a d'incroyables fluctuations sur une source de carburant. Avez-vous quelque chose à ajouter sur la fluctuation des prix?
    La question du prix des carburants doit-elle faire l'objet d'une attention un peu plus soutenue de façon générale?
(1155)
    Je suppose que vous parlez de l'instabilité des prix au détail, n'est‑ce pas?
    Oui.
    D'accord.
    Nous ne constatons pas de fluctuations immédiates causées par la tarification du carbone au Canada. En fait, si l'on considère les mois au cours desquels la taxe augmente — c'est-à-dire en avril, mai et juin —, les fluctuations sont faibles, et nous n'en voyons donc pas la preuve. Toutefois, comme je l'ai dit, au fil du temps, sur plusieurs années, nous pourrions effectivement contraindre les entreprises à voir leurs coûts augmenter et à devenir moins compétitives. Comme nous avons accès à des données au niveau de l'entreprise — nous ne pouvons malheureusement pas les communiquer pour des raisons évidentes —, nous constatons que certaines entreprises ont beaucoup plus de difficultés financières en raison de faibles marges.
    Vous faites référence à l'industrie pétrolière. Comme vous le savez certainement, les marges sont beaucoup plus importantes dans ce secteur que dans l'industrie alimentaire. De la ferme à l'assiette, les marges sont extrêmement faibles, si bien que la politique de la tarification du carbone peut avoir une incidence énorme sur une industrie où les marges sont incroyablement faibles.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Chers collègues, je vais juste prendre deux ou trois minutes pendant que nous accueillons nos témoins.
    Ce sont les représentants de la Fédération canadienne de l'agriculture.
    Combien de temps pensez-vous...? Je n'essaie pas d'être facétieux, mais il s'agit d'un processus concernant le code de conduite qui dure depuis un an et demi, et peut-être même plus longtemps. La Fédération canadienne de l'agriculture et M. Charlebois nous ont dit qu'il s'agissait d'un mécanisme très important. Nous sommes assis autour de la table en tant que parlementaires et, à un moment donné, si l'industrie n'est pas en mesure de se rassembler et de trouver la voie à suivre, il y aura de plus en plus de pressions pour que nous imposions et légiférions nous-mêmes un code.
    Combien de temps pensez-vous qu'il soit raisonnable d'attendre, en tant que parlementaires, avant d'aller de l'avant et peut-être de légiférer?
    Il est difficile de répondre à cette question, monsieur le président.
    Je pense que les différentes entreprises et organisations qui ont exprimé certaines préoccupations ou qui ont besoin d'éclaircissements sont de bonne foi. Je pense que nous travaillons tous à l'élaboration et au lancement d'un code de conduite. Nous devons veiller à ce qu'il n'y ait pas de conséquences involontaires.
    En fait, nous y travaillons depuis le début de 2021. Je ne saurais vous dire combien de réunions auxquelles j'ai assisté. Il y a beaucoup de travail. Évidemment, lorsque nous avons fait rapport aux ministres fédéral, provinciaux et territoriaux, nous espérions lancer le code à un moment donné en 2024. Nous restons optimistes que ce sera le cas.
    M. Weston a comparu devant notre comité avant Noël. En tant que député, je ne me préoccupe pas tant de savoir si PepsiCo, Coca-Cola ou Procter & Gamble ont une certaine disposition sur laquelle ils peuvent compter. Ce sont des acteurs suffisamment importants sur le marché pour pouvoir mener cette bataille commerciale avec les entreprises Loblaws, Empire et Metro du monde entier. Je m'inquiète pour les petites et moyennes entreprises de Kings—Hants qui disent que c'est très important. Nous savons que ce ne sera pas la panacée, mais nous avons besoin d'une disposition sur laquelle nous pouvons compter dans les cas où nous pensons qu'il y a presque un traitement inéquitable.
    Le Conseil canadien du commerce de détail entrevoit‑il un monde où l'on exempterait les grandes multinationales qui n'ont peut-être pas besoin de la protection d'un code de conduite en matière d'alimentation, mais où l'on agirait en faveur des PME pour lesquelles il s'agit peut-être d'un mécanisme et d'un élément important pour une certaine transparence?
    Je vous suggérerais peut-être de vous joindre à notre comité de direction.
    Je vais peut-être devoir le faire.
    C'est un concept intéressant. Il est indéniable que les grandes entreprises peuvent négocier. Il s'agit avant tout de protéger l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. Je pense que mon collègue a parlé des petits agriculteurs, des petits transformateurs, des grossistes et des petits détaillants. Ils sont extrêmement importants pour la santé du code.
    Nous ne sommes pas rendus au stade, monsieur le président, d’exclure qui que ce soit, mais ce pourrait être une discussion à envisager.
    Je pense que ce comité, comme M. Charlebois l'a dit... et ce n'est pas un élément partisan. Je pense que tous les partis commencent à en arriver au point où, si nous ne parvenons pas à trouver cette voie, l'opposition et même les députés d'arrière-ban de notre caucus libéral exerceront des pressions croissantes pour que nous nous mettions à l'œuvre.
    Je sais qu'il est difficile de savoir comment les choses se dérouleront dans les différentes provinces, mais c'est l'impression que je constate à ce comité et sur la colline du Parlement.
    Très rapidement, monsieur Charlebois, vous avez parlé de l'Europe. Vous avez parlé du fardeau réglementaire, de certains défis et des protestations des agriculteurs. Je pense que M. MacDonald a posé une question intéressante, dans la mesure où nous commençons à envisager l'idée d'un mécanisme d'ajustement aux frontières pour le carbone. Je suis de ceux qui pensent que, si nous ne commençons pas à en tenir compte, il y a une limite à ce que nous pouvons demander à notre propre industrie nationale de supporter en termes de prix avant de devenir non concurrentiels — comme vous l'avez souligné.
    Que pensez-vous de ce qui se passe en Europe et de ce que voit l'Administration Biden? Pensons-nous qu'il y aura un moment où cela commencera à faire partie du mécanisme commercial pour la circulation des produits agricoles dans le monde? Quels seraient les avantages pour le Canada? Notre industrie est tout à fait durable. Je vois un monde dans lequel, si cela était pris en compte, nous pourrions en fait être sur une base solide.
(1200)
    Oui, je dirais que la décarbonisation de notre économie agroalimentaire pourrait devenir un avantage concurrentiel au fil du temps.
    Il faudrait évidemment débattre de la façon d'y parvenir. Pour être honnête, je suis plus partisan de la carotte que du bâton. Je pense que nous avons besoin d'un mélange des deux. Pour l'instant, tout ce que nous voyons et, je dirais, probablement tout ce que l'industrie voit, c'est un bâton. Je pense que nous avons besoin des deux.
    Rapidement, ce sera la dernière chose que je demanderai. Je ne veux pas trop mettre mes collègues à l'épreuve.
    Dans quelle mesure est‑il important qu'un organisme tel qu'ECCC puisse mettre en place des protocoles de crédits compensatoires permettant aux agriculteurs de percevoir des revenus pour leurs pratiques durables — la carotte contre le bâton? Que recommanderiez-vous au gouvernement pour qu'il s'engage dans ce protocole afin que les agriculteurs puissent voir les deux côtés de la médaille au lieu de les considérer comme une simple menace potentielle?
    Oui, absolument. Ma collègue Stacey Taylor a mentionné tout à l'heure l'importance de la collecte de données et de bonnes données. C'est quelque chose qui fait défaut au Canada. Pour créer un dialogue et obtenir l'adhésion de tous sur une question aussi importante que l'environnement, il faut des données. À l'heure actuelle, il y en a peu. Il y a un énorme manque de données au Canada pour pouvoir comprendre les émissions de carbone, qui fait quoi et quelles sont les répercussions au fil du temps. Il y a beaucoup de désinformation, et cela doit cesser.
    Je vous remercie.
    Merci de votre indulgence, chers collègues.
    Voilà qui nous amène à la fin de notre premier groupe de témoins. Merci beaucoup à M. Charlebois, à Mme Taylor, à M. Currie, à M. Ross, à Mme Brisebois et à M. Littler.
    Nous allons faire une pause quelques instants, et nous accueillerons notre deuxième groupe de témoins.

(1205)
    Chers collègues, je sais que tout le monde est encore en train de devoir se déplacer, mais bon retour. Nous devons poursuivre nos travaux.
    Nous avons notre deuxième groupe, et nous accueillons trois excellents témoins. De la Sprott School of Business, de l'Université Carleton, nous accueillons Ian Lee. De l'Institut canadien des politiques agroalimentaires, nous recevons Tyler McCann, et des Producteurs de fruits et légumes du Canada, nous accueillons M. Marcus Janzen.
    Monsieur Lee, vous êtes en ligne. Je vais vous accorder au plus cinq minutes pour commencer. Vous pouvez faire vos remarques tout de suite.
    La parole est à vous.
    Tout d'abord, je tiens à dire que je n'appartiens à aucun parti politique et je ne fais aucun don d'argent à un parti politique. Ensuite, je suis un professeur titulaire, payé par l'Université Carleton depuis 37 ans, et j'enseigne le cours de stratégie de base qui évalue la compétitivité et la création de valeur des industries et des entreprises. Je ne consulte personne, où que ce soit. Enfin, immédiatement après l'effondrement du mur de Berlin en 1989, j'ai enseigné, de mars 1991 à 2020 — plus de 100 fois sur le terrain, pas par Zoom — dans d'anciennes économies centralement planifiées, dont la Russie, la Pologne, l'Ukraine, la Roumanie et, plus tard, Cuba, l'Iran et la Chine, où les prix des aliments étaient entièrement ou en grande partie fixés par l'État. Un autre fait à propos de moi que les interprètes n'ont pas — je ne l'ai pas mis dans le mémoire —, c'est que j'ai grandi dans une ferme dans les années 1960, une vraie ferme, dans le canton de Beckwith, dans le comté de Lanark, situé dans l'Est de l'Ontario, et je sais donc très bien ce qu'est la vie dans une vraie ferme, pas dans une ferme d'agrément.
    Au cours des 18 derniers mois, une légende urbaine a émergé parmi certains acteurs politiques d'Ottawa, selon laquelle les détaillants en alimentation imposeraient des prix abusifs, feraient des profits et créeraient une « cupidiflation ». Au cours des six derniers mois, j'ai témoigné à deux reprises devant le comité des finances de la Chambre. J'ai fourni les données statistiques empiriques réelles de Statistique Canada et les états financiers audités des entreprises Loblaws, Sobeys et Metro — avec lesquelles je n'ai aucune relation, si ce n'est que j'y achète des produits d'épicerie. Ces documents montrent que la vente au détail de produits d'épicerie au Canada et aux États-Unis est une industrie à marge bénéficiaire nette notoirement faible depuis trois quarts de siècle, avec une moyenne de 3,2 à 3,5 %.
    Mesdames et messieurs les députés, il est temps de retourner à l'école. Deux cent cinquante ans de théorie et de pratique économiques et plus de 50 prix Nobel d'économie nous ont appris qu'une économie décentralisée de décideurs privés qui prennent des décisions privées, et non politiques, sur la chaîne de valeur de toute entreprise — investissement en capital, recherche et développement, production, fixation des prix — est à l'origine de l'incroyable niveau de vie des pays à revenu élevé. C'est documenté par la Banque mondiale.
    Joseph Schumpeter nous a appris le pourquoi et le comment: la concurrence pousse les entreprises à innover sans cesse pour se distinguer et tenter d'obtenir un avantage concurrentiel durable, le Saint-Graal de toute entreprise privée, ce qui provoque des vagues de destruction créative.
    Au centre de cet édifice appelé économie de marché ou capitalisme se trouve la découverte des prix. C'est pourquoi le contrôle des prix, quel qu'il soit, est mortel et destructeur. Il tue la découverte des prix et donc les décisions de prix efficaces prises par les forces impersonnelles du marché privé, qui sont remplacées par la pire forme de prise de décision politique: la prise de décision politique et bureaucratique fondée sur la croyance erronée de personnes qui n'appartiennent pas au marché — y compris des professeurs comme moi — en leur connaissance supérieure des prix marginaux de millions de produits et de services chaque minute sur le marché.
    Cela explique pourquoi le lauréat du prix Nobel Friedman avait raison de noter qu'aucun pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire n'est jamais devenu, dans l'histoire de l'humanité, un pays à revenu élevé sans passer à un processus de prise de décision économique décentralisé. En effet, aucun des 37 pays à revenu élevé de l'OCDE n'a adopté le contrôle des prix des aliments comme politique à long terme. En revanche, le contrôle des prix, en particulier des prix des aliments, est réglementé, fixé et contrôlé dans de nombreux pays pauvres.
    L'exemple parfait de la fixation des prix des aliments est Maduro, au Venezuela, où l'inflation atteint désormais 283 %, mais n'oubliez pas l'Argentine, de Perón aux Kirchner, où l'inflation atteint désormais 211 %, ou Erdogan, en Turquie, où l'inflation est de 65 %. Chacun d'entre eux contrôle les prix des aliments.
    Passons rapidement à l'économie la plus importante et la plus prospère du monde depuis les années 1880. Je parle bien sûr des États-Unis. Le Congrès ou l'administration libérale de Biden sont-ils en train de discuter d'une réglementation officielle des prix des aliments ou d'une fixation déguisée des prix des aliments en ordonnant aux PDG des épiceries de baisser les prix? La réponse est un « non » retentissant. Pourquoi, alors, certains députés et le gouvernement tentent-ils d'adopter un contrôle de facto des prix des aliments, à l'instar du Venezuela, de l'Argentine, de la Turquie et d'autres pays pauvres en développement dont le bilan économique désastreux engendre la pauvreté, au lieu d'imiter la politique économique des États-Unis, qui consiste à ne pas intervenir dans l'établissement des prix?
    Je vais maintenant terminer sur une note très personnelle. Il est probable que certains députés qui nous écoutent penseront, « Voilà encore un universitaire de la tour d'ivoire qui cite tous les livres et qui ne connaît pas le monde réel », alors je veux parler du monde réel.
(1210)
    À partir de mars 1991 et tout au long des années 1990, j'ai vécu à Varsovie de quatre à cinq fois par année, dans un appartement privé. La Pologne a réglementé le prix des aliments jusqu'en 1995. J'ai essayé d'acheter des aliments dans les épiceries locales à plusieurs reprises, mais les files d'attente étaient très longues. Les rayons étaient souvent vides...
    Monsieur Lee, nous n'avons malheureusement plus de temps. Je vais vous laisser terminer votre réflexion sur l'idée de ne pas réglementer les prix des aliments, mais rapidement, parce que le temps est écoulé.
    Il ne me reste que deux phrases.
    Les files d'attente étaient très longues et la nourriture, dégoûtante. Pourquoi? Les prix étaient fixés par l'État qui ne comprenait aucunement les coûts marginaux. En effet, il y avait une suffisance — c'est le mot choisi par M. von Hayek, lauréat du prix Nobel — chez les politiciens et les bureaucrates qui pensaient pouvoir mieux déterminer les prix optimaux de millions d'aliments que le marché décentralisé de la détermination des prix.
    Non, nous qui formons le secteur public ne pouvons mieux les déterminer que le marché décentralisé.
    Je terminerai en disant qu'aucun cerveau au monde, même pas ceux du président Xi et de ses millions de subalternes, ne peut traiter les billions d'octets d'information quotidiens dans une économie de prix et de rareté aux marges.
    Mesdames et messieurs les députés, Pogo nous a avertis: « Nous avons rencontré l'ennemi, et c'est nous, » pas les détaillants en alimentation.
    Merci.
    Merci, monsieur Lee.
    Nous allons maintenant passer à M. McCann, pour un maximum de cinq minutes.

[Français]

    Monsieur le président, membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
    Le travail fait par le Comité sur les questions liées à l'inflation du prix des aliments est essentiel pour approfondir nos connaissances et pour proposer des solutions.
(1215)

[Traduction]

    Il y a environ un an, j'ai comparu devant le Comité et j'ai recommandé que le gouvernement en fasse davantage pour publier des données et des analyses afin d'améliorer notre compréhension des facteurs entraînant l'inflation du prix des aliments. Je suis ravi que le Comité ait formulé cette recommandation dans son rapport et que le gouvernement y ait donné suite l'automne dernier. Le Carrefour de données sur les prix des aliments de Statistique Canada et l'attention accrue accordée à la question à Agriculture et Agroalimentaire Canada sont un pas dans la bonne direction, mais on peut déployer beaucoup plus d'efforts pour fournir des données et des analyses publiques qui éclaireront le débat sur les politiques.
    Aujourd'hui, j'aimerais formuler plusieurs observations et une autre recommandation.
    Premièrement, les décideurs n'ont habituellement pas l'occasion d'obtenir des données aussi concordantes que celles que nous voyons sur l'inflation du prix des aliments. La Banque du Canada, les universitaires, les chercheurs et les institutions publiques des États-Unis et de l'Union européenne soulignent tous que l'inflation alimentaire est alimentée par une longue liste de causes. La plupart concluent que l'inflation ralentira lorsque ces causes — notamment la guerre de la Russie et la hausse des taux d'intérêt — se régleront. Les données convergentes montrent que l'augmentation du prix des aliments n'est pas attribuable à un seul facteur et que sa stabilisation nécessitera de multiples mesures.
    Deuxièmement, le secteur de l'alimentation au détail au Canada est plus concurrentiel que nous n'avons tendance à le reconnaître. Même le rapport du Bureau de la concurrence de l'année dernière — dans lequel on concluait que les marges bénéficiaires des épiceries ont augmenté de façon modeste, mais appréciable — précisait que le secteur de l'épicerie est concurrentiel et offre de faibles marges de profit. Le Bureau fait état de détaillants étrangers qui admettent qu'il pourrait être difficile d'offrir des prix concurrentiels au Canada.
    Troisièmement, l'inflation du prix des aliments est un défi lié à la chaîne de valeur qui exige des solutions axées sur la chaîne de valeur. La situation est mise en évidence lorsqu'un détaillant gèle ses prix, puis transfère ce gel à ses fournisseurs. La tension entre les fournisseurs et les détaillants peut être une force saine pour contenir l'inflation du prix des aliments lorsque les freins et contrepoids appropriés sont en place. Un code de conduite efficace et pertinent peut être l'un de ces freins et contrepoids.
    Quatrièmement, les épiceries sont de grands espaces complexes, et les aliments dans un chariot d'épicerie ne sont pas soumis aux mêmes influences. On accorde beaucoup d'attention à l'inflation des aliments les plus touchés, mais lorsqu'on scrute la situation de plus près, on constate que, en décembre, le poisson, certains légumes et les bananes coûtaient moins cher qu'il y a un an. Bien que personne ne s'attende à une déflation de l'indice global du prix des aliments, la variabilité des prix dans le panier d'épicerie témoigne des différentes causes de l'inflation et de la nécessité de trouver différentes solutions pour stabiliser les prix.
    Enfin, il est difficile de porter un jugement en se fiant uniquement aux données. Si vous annonciez que le revenu net des détaillants en 2022 était de 31 % supérieur à la moyenne des cinq années précédentes, certains pourraient conclure à des profits excessifs. Si vous constatiez une augmentation de la valeur nette de plus de 10 % entre 2019 et 2021, en pleine pandémie, certains s'inquiéteraient de l'incidence sur les prix des aliments. Or, ces chiffres ne proviennent pas du secteur canadien de la vente au détail. Ils viennent des exploitations agricoles canadiennes. Personne ne devrait prétendre que les revenus des agriculteurs augmentent trop rapidement, mais la situation montre à quel point on peut faire fausse route si on tire des conclusions sur les facteurs de l'inflation alimentaire sans comprendre beaucoup plus en détail le contexte global de toute la chaîne d'approvisionnement.
    Le gouvernement a adopté une approche plus réfléchie à l'égard de tels enjeux. Lors des perturbations de la chaîne d'approvisionnement mondiale, le gouvernement a mis sur pied un groupe de travail national sur la chaîne d'approvisionnement dans le but de formuler des recommandations indépendantes sur des mesures à court et à long terme pour atténuer la congestion de la chaîne d'approvisionnement.
    Je recommande que le gouvernement mette sur pied un groupe de travail sur la chaîne de valeur alimentaire, qui aurait trois mandats prioritaires. Premièrement, il devrait s'inspirer du Carrefour de données de Statistique Canada pour produire une analyse détaillée des facteurs d'inflation du prix des aliments aux différentes étapes de la chaîne de valeur. Deuxièmement, il devrait formuler des recommandations concrètes pour les secteurs public et privé en mettant l'accent sur les domaines où les Canadiens peuvent agir. L'accent devrait être mis sur le commerce de détail, mais aussi sur un examen des problèmes systémiques — y compris la fluidité de la chaîne d'approvisionnement, le fardeau réglementaire, les taxes, le sous-investissement en recherche et en développement et le déclin de la croissance de la productivité —, ce qui permettrait au groupe de travail de formuler des recommandations pour réduire ces coûts.
    Enfin, ce groupe de travail devrait se pencher sur les mesures que le gouvernement peut prendre pour aider les Canadiens les plus durement touchés par la hausse des prix des aliments. Banques alimentaires Canada a attribué au Canada la note D+ dans son premier bulletin sur la pauvreté et a souligné que l'inflation du prix des aliments est un problème de pauvreté plus vaste qui nécessite des solutions dépassant la portée du système alimentaire.
    Malheureusement, le Groupe de travail sur la chaîne d'approvisionnement a démontré que la rédaction du plan d'action peut être la partie facile. Il est beaucoup plus difficile de passer à l'action. Les questions complexes ne se prêtent pas toujours aux solutions miracles que les gouvernements semblent préférer. Même s'il est facile de dire que toutes les options sont possibles pour stabiliser les prix, on semble mettre l'accent sur le secteur de la vente au détail. Or, d'autres changements de politique plus délicats, mais potentiellement plus efficaces, sont écartés.
    Comme le montre l'inflation alimentaire, bon nombre de ces problèmes et pressions systémiques persisteront. Même si la pression politique diminuera au même rythme que l'inflation du prix des aliments, il sera toujours possible de poser des gestes concrets. Ce ne sera peut-être pas une mince affaire, mais l'effort en vaudra la peine.
    C'était presque parfait — vous avez parlé pendant quatre minutes et 59 secondes. Bravo, monsieur McCann. Vous n'en êtes pas à votre première comparution devant le Comité, alors...
     Un député: Nous pourrions en tirer des leçons.
     Le président: Oui, nous pourrions en tirer des leçons, comme le dit notre collègue.
    Monsieur Janzen, vous disposez d'un maximum de cinq minutes.
(1220)
    Je m'appelle Marcus Janzen et j'ai le privilège d'être le vice-président des Producteurs de fruits et légumes du Canada. Pendant la journée, je m'occupe aussi de ma serre de poivrons juste à l'extérieur de Vancouver, à Abbotsford, en Colombie-Britannique.
    Je comparais devant vous pour discuter de la question urgente de la stabilisation des prix des aliments au Canada, une préoccupation qui touche profondément les producteurs canadiens de fruits et légumes, ainsi que tous les citoyens canadiens. Notre association représente environ 14 000 exploitations agricoles qui produisent 120 types de cultures et qui contribuent à l'économie canadienne à hauteur de 6,8 milliards de dollars.
    Un sondage mené en 2022 par notre organisation a révélé que près de 44 % de nos producteurs fonctionnent actuellement à perte et que les trois quarts ont du mal à compenser les augmentations des coûts de production liées notamment à la taxe sur le carbone, au programme sur les plastiques P2, aux droits de douane sur les engrais et aux objectifs ambitieux de réduction des émissions provenant des engrais. Ces défis, y compris le projet de loi C‑234, menacent l'abordabilité et la durabilité du secteur à l'avenir.
    Le projet de loi C‑234 se trouve à un point critique. Comme l'ont exprimé les témoins précédents, l'élimination des exemptions pour le chauffage et la climatisation des serres et des granges compromet notre compétitivité, surtout par rapport aux États-Unis.
    Nous proposons une série de mesures qui comprendraient ce qui suit: rejeter les amendements proposés au projet de loi C‑234; éliminer le programme sur les plastiques P2 afin de l'évaluer plus en détail, en particulier en ce qui concerne les appels de prix, les répercussions imprévues sur les coûts et, par conséquent, sur les prix des aliments; et éliminer les droits de douane sur les engrais afin de ne pas nuire de façon disproportionnée aux producteurs canadiens. Encore une fois, nous devons avoir une conversation plus cohésive avec le gouvernement sur la réglementation avant la mise en place des politiques. Nous souhaiterions l'adoption rapide du projet de loi C‑280, qui vise essentiellement à rétablir la fiducie s'apparentant à celle prévue dans la loi américaine Perishable Agricultural Commodities Act, ou PACA.
    Enfin, nous appuierions une détermination accrue à mettre en œuvre le code de conduite pour les épiceries.
    Voilà qui conclut mes observations.
    Merci, monsieur Janzen.
    Nous allons maintenant passer aux questions, chers collègues. Nous allons commencer par notre série de questions de six minutes, puis je vais accorder quatre minutes aux conservateurs et aux libéraux, et deux minutes de ce côté. C'est la seule façon de respecter l'horaire.
    Je crois que c'est M. Steinley, du Parti conservateur, qui va débuter.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    J'ai du mal à m'y retrouver parce que nous parlons de l'augmentation du prix des aliments dans les épiceries partout au Canada, mais les politiques que M. Janzen vient de mentionner — les plastiques P2, la réduction des engrais, la taxe sur le carbone — sont toutes des mesures que le gouvernement libéral a mises en place.
    Je n'ai jamais entendu un gouvernement débattre autant des politiques qu'il a mises en place alors qu'elles fonctionnent. Le résultat souhaité d'une taxe sur le carbone est d'augmenter les prix pour que la population modifie son comportement. Tous les libéraux ont pris la parole à la Chambre des communes pour réitérer l'objectif; la taxe sur le carbone a donc l'effet escompté sur le prix des aliments. Le gouvernement libéral a augmenté le prix des aliments et changé le comportement des gens partout au pays, parce que la population n'a pas les moyens de manger autant qu'avant l'entrée en vigueur de la taxe sur le carbone.
    J'aimerais poser cette question à M. McCann: l'augmentation des prix et le changement du comportement des consommateurs ne sont-ils pas le but précis de la taxe sur le carbone créée par le gouvernement libéral?
    C'est certainement le principe qui sous-tend la taxe sur le carbone, c'est‑à‑dire d'ajouter au prix total le coût lié aux émissions d'un produit. C'est l'intention. Je pense que c'est pratiquement le libellé employé sur le site Web du gouvernement.
    C'est un fait: le système alimentaire est une source d'émissions, et la production alimentaire au Canada et dans le monde représente environ 10 % des émissions mondiales. Il existe des possibilités de réduire ces émissions. Quand on se demande quelle approche est la plus efficace pour réduire les émissions dans les exploitations agricoles, on peut penser à différentes approches au Canada et dans le monde. Je pense qu'il y a d'autres façons, dont quelqu'un a parlé plus tôt, de favoriser la décarbonisation du système alimentaire.
(1225)
    Le Global Institute for Food Security, basé en Saskatchewan, vient de publier une étude en partenariat avec l'Université de la Colombie-Britannique. On y chiffre les émissions totales du secteur agricole canadien. Au Canada, l'agriculture représente 8 % des émissions totales. Dans toutes les autres administrations, les émissions provenant de l'agriculture représentent environ 25 % ou plus des émissions totales.
    Ne serait‑il pas préférable pour nous de faire rayonner nos pratiques durables dans le monde entier et d'aider les autres pays à réduire leurs émissions plutôt que de continuer à punir les travailleurs qui produisent des aliments au Canada? Comme je le disais, il est très étrange qu'un gouvernement soit si contrarié que la politique qu'il a mise en œuvre fonctionne à merveille et que les prix des aliments augmentent en raison de ses politiques.
    Je pense que plus d'un élément peut être vrai en même temps. Nous pouvons avoir l'un des systèmes de production alimentaire produisant le moins d'émissions au monde, sans pour autant nous empêcher de réduire davantage nos émissions. Souvent, ceux qui retirent le plus d'avantages de la réduction des émissions sont les agriculteurs canadiens eux-mêmes. Les émissions provenant des engrais sont causées par les engrais que les agriculteurs ont payés et qui ne donnent pas les résultats escomptés.
    Je pense que la question est de savoir quelle est la bonne approche pour tirer parti de cet avantage concurrentiel. Comment transformer notre agriculture à faibles émissions en un avantage concurrentiel et en un outil pour le bien commun? Je pense qu'il y a de nombreuses approches qui pourraient aider les agriculteurs et contribuer à accroître l'avantage canadien que nous avons.
    Comme vous êtes agriculteur, je tiens à vous remercier de votre travail. Je vous suis reconnaissant de vos réponses à mes questions.
    Merci.
    Nous savons que l'étiquetage sur le devant des emballages coûtera 8 milliards de dollars. Nous vous avons entendu dire plus tôt que la nouvelle interdiction des plastiques P2 entraînera également des coûts supplémentaires pour les agriculteurs.
    Je me demande, monsieur Janzen, si vous pouvez nous en parler. Nous avons entendu dire que la nouvelle interdiction des plastiques P2 coûtera plus de 6 milliards de dollars. Vous avez parlé des autocollants pour les appels de prix. Quelles seront les répercussions sur le coût, la disponibilité et le gaspillage des aliments?
    Je pense que le secteur est tout à fait disposé à examiner les possibilités fondées sur la science pour réduire l'utilisation des plastiques. Nous l'avons déjà constaté au cours des 10 dernières années, par exemple avec les contenants à double coque compacts qui nécessitent moins de plastique.
    Je pense que les intervenants de l'industrie sont d'avis qu'il nous fait un meilleur système, non seulement pour réduire l'utilisation du plastique, mais aussi pour le réutiliser. Ils ne croient pas que les plastiques doivent être éliminés du système. La réalité, c'est qu'il n'y a vraiment pas de solution de rechange pour transporter efficacement des produits particulièrement périssables au Canada, étant donné les distances à parcourir. Le plastique sous une forme ou une autre est essentiel.
    Merci.
    Monsieur McCann, des témoins nous ont dit, en 2023, que cette interdiction n'aurait peut-être pas d'incidence sur nos partenaires commerciaux et sur le commerce avec nos partenaires commerciaux. Notre voisin du Sud est notre partenaire commercial le plus proche. On nous a dit que les Américains ne veulent en rien participer à cette interdiction des plastiques, et qu'ils rejettent l'approche.
    Quelles seraient les répercussions de cette interdiction des plastiques P2 pour les fruits et légumes frais sur nos partenaires commerciaux et sur nos relations commerciales, et par conséquent sur l'importation des aliments dont nous avons besoin au Canada?
    La frontière relativement ouverte avec les États-Unis est l'un des plus grands avantages de notre système alimentaire. La possibilité de transporter les aliments tant vers le nord que le sud est importante pour la sécurité alimentaire des Canadiens, la prospérité économique de l'Amérique du Nord et la durabilité environnementale. Toute nouvelle mesure imposée à la frontière a une répercussion à cet égard.
    Je cherche toujours à savoir qui parle de cette question pour me situer. Mes homologues des instituts de politique publique aux États-Unis ont fait part de leurs préoccupations quant à l'interdiction des plastiques. De toute évidence, ils s'inquiètent des répercussions de cette interdiction à la frontière et de l'impact additionnel sur les exportateurs américains qui sont une source de sécurité alimentaire pour le Canada.
    Merci.
    Merci.
    La parole est à vous, monsieur Louis.
    Vous disposez de six minutes, cher ami.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres.
    Mes premières questions s'adresseront à M. McCann de l'Institut canadien des politiques agroalimentaires.
    Dans vos remarques liminaires, vous avez suggéré la création d'un groupe de travail sur l'abordabilité alimentaire — qui s'apparenterait à notre groupe de travail national sur la chaîne d'approvisionnement — et la manière dont nous pourrions prendre davantage de mesures dans ce domaine. Vous avez entre autres énuméré des recommandations sur la vente au détail, la chaîne d'approvisionnement, les questions réglementaires et les baisses de productivité. Nous cherchons tous à protéger nos agriculteurs et les Canadiens au bout de la chaîne, qui sont les clients. Nous nous attardons donc au prix des aliments. Comment un tel groupe de travail pourrait‑il aborder ces enjeux, selon vous?
    Pourriez-vous également nous parler davantage des Canadiens qui souffrent d'insécurité alimentaire et qui sont les plus affectés par le prix élevé des aliments?
(1230)
    Il faut partir du principe qu'il s'agit d'un défi systémique. Le prix des aliments n'est pas un problème de détaillant ou d'agriculteur; c'est un problème de chaîne alimentaire. Nous devons chercher des solutions systémiques. Il peut être difficile d'avoir certains débats plus réfléchis sur les défis et les différents outils dont nous disposons pour les résoudre, pour le meilleur ou pour le pire.
    Je pense qu'un groupe de travail pourrait vraiment se pencher sur ces différents facteurs, sur les diverses approches potentielles et sur l'impact de certains de ces éléments sur l'inflation des prix des aliments. Nous l'avons vu récemment.
    Je crois qu'il existe des solutions faciles et à court terme, mais aussi des solutions à plus long terme. J'aime beaucoup parler de R‑D. Nous ne reconnaissons pas souvent l'importance de l'augmentation de la productivité d'un système alimentaire dans la réduction des coûts et dans le maintien d'une alimentation plus abordable. En réalité, nous n'investissons pas autant qu'avant dans la R‑D au Canada. Une partie de cet avantage nous échappe.
    Je pense que nous avons maintenant l'occasion de nous pencher sur certaines de ces causes à long terme et pas seulement sur les enjeux à court terme évoqués.
    Je vous remercie de cette réponse. Vous parlez d'une conversation plus approfondie alors que j'ai réglé le minuteur parce que je n'ai que quelques minutes pour vous parler, ce qui en dit long.
    Beaucoup tourne autour de la durabilité de l'agriculture. Nous devons aider les agriculteurs à renforcer leur capacité de résistance pour faire face au changement climatique et nous devons le faire de sorte à les aider à produire davantage tout en étant plus rentables. Vous avez évoqué la R‑D.
    Quels types de mesures fonctionnent présentement? Que devrait‑on multiplier comme mesures?
    Le Canada n'a pas investi davantage dans la R‑D. Parmi les héros méconnus dans la lutte pour la durabilité et l'abordabilité des aliments, on compte nos phytogénéticiens. Ils font du très bon travail; ils cherchent à créer des variétés plus productives et durables. Nous n'en faisons pas assez présentement pour créer les conditions nécessaires à la poursuite de ce travail. Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.
    J'aimerais revenir sur la question de la pauvreté, cela dit. Je pense que nous perdons souvent cela de vue. Ici nous en parlons dans le contexte d'une discussion sur l'agriculture, puisque c'est le comité de l'agriculture qui tient ces audiences.
    Ces enjeux existent. Les Canadiens qui sont les plus affectés par la situation actuelle vivent un large éventail de problèmes qui exigent, en fin de compte, un ensemble de solutions différentes et à plus grande échelle.
    Nos banques alimentaires subissent des pressions considérables. La demande est plus forte qu'elle ne l'a jamais été, du moins de mémoire récente. L'analyse du rapport de Banques alimentaires Canada dresse un portrait très exigeant de notre approche face à cet enjeu. Nous devrions repenser nos outils et songer à en utiliser d'autres au‑delà des solutions des systèmes alimentaires pour aborder la question de l'abordabilité et de l'accessibilité alimentaires.
    Merci.
    Nous avons également le potentiel d'aider à nourrir le monde. Je sais que vous avez effectué de nombreuses recherches sur la transformation de la durabilité agricole en un avantage concurrentiel pour le Canada. Si nous arrivions à concrétiser une telle chose, nous pourrions non seulement réduire le prix des aliments pour les Canadiens, mais aussi nous donner une chance d'exporter nos produits.
    Quels types de mesures pourrions-nous prendre pour aider à nourrir les Canadiens et des citoyens du monde entier?
    Bien qu'il s'agisse de deux objectifs différents, j'estime qu'ils revêtent ultimement la même importance.
    Les défis liés à l'agriculture ne sont pas simples. En fin de compte, le système agricole est un régime économique et organique complexe. Je crois qu'il faudrait d'abord reconnaître le rôle stratégique que joue l'agriculture dans l'économie canadienne. Nous ne reconnaissons pas son importance présentement. Nous ne la traitons pas comme le secteur stratégique essentiel qu'il devrait être. Je pense qu'il faut commencer par reconnaître que l'agriculture est différente. Il s'agit d'un atout considérable pour le Canada. Elle peut également être un atout en matière d'innovation, de géopolitique et de durabilité. Nous devons penser autrement.
    Malheureusement, nous risquons de manquer certaines occasions. Je pense que la Stratégie pour une agriculture durable a du potentiel. Cela dit, je crois que l'on craint de plus en plus qu'elle ne soit pas aussi ambitieuse et stratégique qu'elle pourrait l'être. Je pense qu'il est important d'aborder cette question d'une manière différente que celle utilisée par le passé.
    Merci.
    Monsieur Janzen, j'aimerais poser une brève question aux Producteurs de fruits et légumes du Canada avec la minute qu'il me reste.
    Vous avez brièvement parlé du code de conduite du secteur de l’alimentation au détail dans vos remarques liminaires. Comme l'a dit M. McCann, les défis de la chaîne de valeur exigent des solutions de la chaîne de valeur.
    Quelles seraient les attentes des Producteurs de fruits et légumes du Canada à propos de ce code de conduite pour le secteur de l'alimentation au détail? En quoi un tel code aiderait‑il nos agriculteurs?
    Je pense qu'ultimement, nous aimerions que le gouvernement envisage sérieusement de légiférer à ce sujet.
(1235)
    Il vous reste 15 secondes, monsieur Louis. Je vais vous les reprendre.

[Français]

    Je cède maintenant la parole à M. Perron pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Pour une fois, ce n'est pas moi qui perds 15 secondes. Voilà qui est bien.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Monsieur Janzen, j'aimerais vous donner l'occasion de compléter ce que vous avez soulevé plus tôt.
    Vous avez mentionné l'importance d'adopter un code de conduite. Comment envisagez-vous la possibilité que ce code ne soit pas mis en application dans l'industrie ou qu'il ne soit appliqué que partiellement? Pensez-vous que ça peut être viable?
     Avez-vous vraiment besoin que ce code soit mis en application?

[Traduction]

    Je n'ai pas entendu la question.

[Français]

    Pouvez-vous répéter votre question?
    Oui, je vais la répéter.
    Vous avez dit tantôt qu'il était important pour votre industrie d'avoir un code de conduite. Comment entrevoyez-vous la possibilité que le code de conduite soit mis en place, mais que certains acteurs refusent d'y adhérer? Jugez-vous important qu'un tel code soit mis en place de façon obligatoire?

[Traduction]

    Oui, je crois que le seul choix possible pour l'industrie serait de rendre le système obligatoire si les participants ne parviennent pas à un consensus. Je suis conscient des défis que cela représente à l'échelle interprovinciale.
    Cela dit, ce n'est pas parce que c'est compliqué que cela ne peut pas être fait et que ce n'est pas la bonne chose à faire.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur McCann, vous avez mentionné, vous aussi, qu'il était important de mettre en place un code de conduite. L'épicerie, c'est complexe; on y trouve différents produits.
    Comment entrevoyez-vous ça, compte tenu des données dont vous disposez actuellement? Est-il possible qu'un code de conduite soit instauré partiellement et que les acteurs récalcitrants y adhèrent plus tard, ou faut-il vraiment proposer un code obligatoire dès le début?
    Quand on examine la situation dans d'autres pays, on observe qu'il y a très souvent une évolution. Certains commencent peut-être par mettre en place un code volontaire ou plus limité, mais ils finissent habituellement par adopter un code obligatoire assez détaillé.
    Il est assez facile de comprendre que, si tous les acteurs de la chaîne n'adhèrent pas au code, son incidence sera plus minime que s'il était plus détaillé et que tous y adhéraient. Je pense que nous allons finir par en arriver là.
    Je suis entièrement d'accord pour dire que le fait qu'une chose soit difficile à faire ne doit pas servir d'excuse pour ne rien faire. En effet, la réalité des champs de compétence au Canada est complexe. Le processus obligeant les provinces à s'entendre sur la mise en place d'un code obligatoire n'est peut-être pas si simple à suivre, mais c'est faisable. Il suffit que toutes les parties fassent preuve de volonté.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Lee, j'ai bien aimé votre allocution d'ouverture. Vous brassez un peu des affaires et c'est intéressant.
    Je suis d'accord avec vous sur la majorité des éléments de votre discours. Il est bien évident que les gouvernements ne peuvent pas tout dicter. Par contre, le capitalisme est un système qui fonctionne bien, à la condition qu'il soit réglementé. Prenons l'exemple des taux d'imposition: ils sont graduels et tiennent compte du revenu, pour essayer de rééquilibrer les choses.
    Vous dites que l'État ne peut pas intervenir dans la fixation des prix. Pensez-vous que l'instauration d'un code de conduite est, oui ou non, une bonne chose?
    Sinon, avez-vous d'autres suggestions à nous soumettre aujourd'hui?

[Traduction]

    Merci, monsieur Perron.
    Je ne suis pas un libertarien qui croit que le gouvernement n'a pas de rôle à jouer. Mon père, aujourd'hui décédé, a passé 43 ans au service du gouvernement du Canada et la moitié de ma famille y travaille. Le gouvernement du Canada est l'un des plus qualifiés, des mieux formés et des plus compétents au monde. J'utilise exclusivement Statistiques Canada et d'autres données gouvernementales dans mes cours. Je ne remets pas en doute la qualité de son travail. Ce n'est pas ce que je voulais dire.
    Ce que je veux dire, c'est qu'il y a des problèmes de chaîne de valeur. Je ne pense pas que les parlementaires devraient essayer d'entrer dans la chaîne de valeur d'une entreprise et de microgérer les décisions stratégiques concernant le marketing, les investissements en R‑D, l'emplacement des usines et la fixation des prix, car ce n'est pas leur rôle. Le rôle du gouvernement est d'être l'arbitre du match de hockey. Il n'est pas censé dire à Sidney Crosby quand tirer la rondelle, à quel moment du match, à quelle hauteur et à quelle vitesse.
    C'est ce que vous faites lorsque vous vous concentrez sur les aspects microéconomiques plutôt que sur les questions plus macroéconomiques telles que la réduction des barrières à l'entrée pour dissuader ou réduire la concentration élevée dans le secteur de l'alimentation au détail. Ce secteur n'a pas le niveau de concentration le plus élevé, certes. Celui du secteur des télécommunications, des banques et des compagnies aériennes est supérieur. J'utilise ce ratio chaque semaine dans mes cours, et il est élevé dans le secteur de l'alimentation au détail. Nous devons encourager les investissements étrangers. Ils viendront probablement des États-Unis compte tenu de l'importance des capitaux nécessaires pour entrer dans ce secteur.
    J'aimerais ajouter autre chose brièvement avant que mon temps ne soit écoulé. Le Bureau de la concurrence en a parlé dans son excellent rapport, mais je ne pense pas qu'on l'ait suffisamment fait à Ottawa, y compris au sein de votre comité.
    Je pense que la vente au détail de produits d'épicerie en ligne va constituer une force perturbatrice dans la fixation des prix de ces produits. Nous savons que le commerce en ligne rend le secteur plus compétitif parce que les prix sont beaucoup plus transparents. N'importe qui peut s'asseoir sur sa chaise en peignoir et comparer littéralement les prix de toute une série d'entreprises, plutôt que d'aller au magasin pour savoir ce que coûtent les pommes ou les concombres. La concurrence des épiceries en ligne va changer la dynamique en la matière dans le secteur de l'alimentation au détail au Canada.
(1240)
    Merci beaucoup à vous deux. Le temps est écoulé.
    Nous allons maintenant passer à M. MacGregor pendant six minutes. Allez‑y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être de retour devant le Comité, monsieur McCann.
    Il est souvent question de la tarification du carbone au Comité. Oui, c'est vrai. Vous tentez d'utiliser un mécanisme basé sur le marché pour changer les comportements. Certains disent que si le comportement change, le coût sera nécessairement moins élevé.
    Dans vos remarques liminaires, vous avez pris soin de nous souligner que nous ne devrions pas utiliser des renseignements individuels lorsque nous parlons de l'inflation du prix des aliments. Vous dites que nous devrions examiner la situation dans son ensemble. En ce qui concerne la taxe sur le carbone et la volatilité du prix des carburants, j'ai mentionné aux témoins précédents que le prix du carburant diésel avait atteint 2,30 $ le litre en 2022. Aujourd'hui, il est redescendu à 1,70 $. Nous avons constaté des fluctuations massives du prix de l'énergie, qu'il s'agisse du gaz naturel, du propane, de l'essence ou du diésel.
    Comment situeriez-vous la tarification du carbone dans le contexte volatile actuel? N'est‑il pas aussi important de garder cela à l'esprit et de tenir compte du fait que les bénéfices du secteur des hydrocarbures ont été substantiels depuis 2019? Une grande partie de cette richesse semble aller aux investisseurs et servir à payer des dividendes plutôt que de contribuer à l'économie canadienne.
    Nous devrions garder quelques éléments importants à l'esprit lorsque nous réfléchissons à la taxe sur le carbone dans le secteur agricole et agroalimentaire, parce que ces choses sont légèrement différentes.
    Tout d'abord, le gouvernement a décidé d'exempter le système alimentaire de la TPS parce qu'il est différent. Je pense qu'il s'agit là d'un précédent intéressant auquel il faut réfléchir. Aurait‑on dû traiter l'alimentation différemment lors de l'instauration de la taxe sur le carbone?
    La taxe sur le carbone représente aujourd'hui une contribution relativement faible, mais ce montant augmente et nous nous attendons à ce que son impact continue de croître. À l'heure actuelle, la grande majorité des émissions provenant du secteur agroalimentaire sont exemptées de la tarification du carbone, mais pas toutes. La tarification du carbone est utilisée comme un outil politique efficace, mais elle nous pose notamment problème en raison de la grande incohérence dans son application. Les producteurs de céréales ne sont pas traités de la même manière que les serristes. Les éleveurs de bétail sont eux aussi traités différemment. L'environnement politique de cet enjeu est vraiment difficile. Nous nous rendons également compte qu'il existe probablement de meilleurs moyens de réduire réellement les émissions dans le secteur agricole en regardant ce qui se fait à l'étranger.
    Le prix des carburants est volatil, mais cette volatilité ne concerne pas seulement ces produits. Le prix des engrais a également été volatil et cela a eu un impact sur les agriculteurs. Les agriculteurs doivent faire face à ce défi. Tel que mentionné, les agriculteurs n'ont pas beaucoup d'options. Les coûts augmentent et la situation est volatile, mais ils ne peuvent pas refiler ces coûts à d'autres. L'augmentation des coûts gruge souvent leurs propres revenus et leurs propres moyens de subsistance.
    Si vous cherchez à trouver des solutions à long terme pour lutter contre la volatilité, vous pourriez aider les agriculteurs à abandonner les combustibles fossiles et à se tourner vers d'autres sources d'énergie. Cela pourrait être une façon très efficace de les aider à gérer la volatilité du prix des hydrocarbures. Cela dit, j'estime qu'il existe un ensemble d'outils politiques qui pourraient les aider à atteindre cet objectif outre cela.
(1245)
    Merci.
    C'est une excellente transition vers ma question pour M. Janzen.
    En ce qui concerne le projet de loi C‑234, j'ai été heureux de l'appuyer lors de la troisième lecture avec le Parti vert et le Bloc québécois. Selon mon interprétation — et comme l'a mentionné M. McCann —, il est conforme à l'esprit de la première Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, en ce sens qu'il y a déjà des exceptions pour les carburants, la machinerie et les activités agricoles. Je considère que les dispositions du projet de loi C‑234 sont conformes à l'esprit de la loi originale. En 2018, les libéraux ont reconnu que les activités agricoles avaient une place spéciale dans notre société. Je pense que le projet de loi C‑234 abonde dans le même sens. J'ai été heureux de l'appuyer en troisième lecture, et je pense que je voterai à nouveau en ce sens à la prochaine étape.
    Monsieur Janzen, la volatilité du prix des carburants peut avoir des répercussions considérables. La Chambre des communes a prévu une disposition de temporarisation. En ce qui concerne le secteur des serres, envisagez-vous des possibilités prometteuses au cours de la prochaine décennie qui permettraient aux exploitants de serres de passer à une source de combustible ou à un mécanisme plus stable pour chauffer leurs serres? Existe‑t‑il une lumière au bout du tunnel qui permettrait de vous soustraire à cette volatilité?
    J'aurais du mal à dire que l'industrie des serres pourrait se passer complètement des combustibles fossiles d'ici 10 ans. Cela dit, je pense qu'il y a des pistes très prometteuses en phytogénétique. Il y a des traits génétiques particulièrement efficaces sur le plan énergétique, qui permettent de cultiver des plantes dans un climat nordique; c'est le défi actuel.
    Beaucoup de recherche se fait sur ce qu'on appelle les systèmes de serre « fermés », qui consistent au fond à utiliser une pompe à chaleur de grande taille, évidemment. Le défi, c'est que le coût en capital reste concurrentiel dans un marché où l'on entre en compétition avec la Californie et le Mexique, surtout durant certaines saisons.
    Je vais vous parler de mon expérience personnelle. Lorsque j'ai commencé dans le domaine des serres, il était considéré très efficace d'utiliser de 42 à 45 mètres cubes de gaz par mètre carré. On en est maintenant à 36 à 38. Nos meilleurs cultivateurs descendent à 33 mètres cubes. Nous pouvons encore nous améliorer. La difficulté, c'est que la taxe sur le carbone augmente bien plus vite que la science et la technologie n'avancent.
    Je vous remercie tous les deux.
    Je vous ai donné un peu de temps de plus, monsieur MacGregor. Je m'attends donc à recevoir une carte de bons voeux à Noël prochain.
    Allez‑y, monsieur Epp. Vous disposez d'un temps réduit à quatre minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins de leurs témoignages.
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Lee. Au printemps dernier, vous nous avez dit que les données de Statistique Canada — on en a déjà parlé — montraient des hausses dans les coûts de camionnage et dans le prix du diésel, des engrais et des produits de protection des cultures. À la lumière de mes discussions avec les gens de l'industrie, j'ajoute les coûts d'emballage et les intérêts à la liste des coûts qui frappent l'industrie. Les frais d'intérêt diffèrent des autres coûts. Je pense que ce sont les seuls de ces coûts qui ne sont pas visés par la taxe sur le carbone.
    Passons à l'abordabilité des aliments, monsieur Lee. Compte tenu de la discussion précédente sur le succès de la taxe sur le carbone, devrions‑nous supprimer cette taxe pour ces quatre autres coûts ou l'ajouter aux intérêts et produire du carbone là aussi?
    J'écoutais la conversation au tour précédent et dans celui‑ci, et je vais vous répondre indirectement. Pour tout dire, je crois aux taxes de Pigou, professeur à Cambridge, il y a 100 ans, qui a dit que pour dissuader les gens d'acheter ou de faire quelque chose, il faut le rendre plus cher avec une taxe. Les taxes sur l'alcool sont des taxes de Pigou, tout comme ce que nous appelons maintenant les taxes sur le carbone et les taxes sur les cigarettes. Le principe existe depuis très longtemps. Si l'on rend une chose plus dispendieuse, les gens vont moins en consommer. C'est plutôt difficile de s'inscrire en faux avec ce principe.
    Je pense que le problème, c'est l'intensité. Cela me rappelle beaucoup les débats sur la TVH en 1991, lorsque Michael Wilson était ministre des Finances. Je parle maintenant de la taxe sur le carbone. Pour répondre à votre question, voici la solution. Comme le témoin précédent vient de le dire, la taxe augmente si rapidement que la technologie et l'investissement n'arrivent pas à suivre le rythme.
    Je pense que ce n'est pas la taxe sur le carbone qu'il y a lieu de critiquer, mais la vitesse à laquelle elle est mise en place. Au lieu de l'augmenter à toute vapeur, en cinq ans, si je ne m'abuse, nous devrions peut‑être l'amortir sur 10 ou 12 ans. J'ai débattu avec le président de la Commission de l'écofiscalité à l'Université McGill. Cet organisme est fermement en faveur de la taxe sur le carbone aussi. Nous sommes tous deux d'accord pour dire qu'il faudra 50 ans pour décarboner les économies américaine et canadienne, non pas 5, 7, 10 ou 12 ans.
    Nous devrions peut‑être le reconnaître et allonger l'amortissement, ce qui signifierait un taux d'augmentation plus faible pour que les cultivateurs, les fermiers et les exploitants de serres puissent s'adapter progressivement, parce que la taxe n'augmenterait pas si radicalement, si rapidement.
(1250)
    Je vous remercie, monsieur Lee. Je vois que vous n'appuyez pas les amendements au projet de loi C‑234 et la diminution de la temporisation.
    Je vais changer de sujet un peu. Il y a ceux qui demandent plus de concurrence dans le secteur de l'alimentation au détail. En fait, il semblerait que le ministre de l'Innovation multiplie les appels pour y parvenir. Nous avons évoqué les profits dans le secteur du détail. On parle en moyenne de 3,7 %, mais un taux de 0 % ne réduirait le coût d'un panier d'alimentation de 25 $ qu'à 24 $. Si c'était notre objectif, je me demande comment un profit nul permettrait d'attirer plus de détaillants alimentaires étrangers ou de faire croître les petits détaillants ici, au Canada.
    Concernant le code de conduite des détaillants alimentaires, ne serait‑il pas plus sensé d'avoir une solution équitable et uniforme partout au Canada qui serait fondée sur le marché et émanerait de l'industrie? Ne pourrions‑nous pas attirer... Je vais citer l'exemple de l'Australie, qui applique un code volontaire. Ce pays a attiré un autre détaillant depuis que son code est en vigueur. Le Royaume‑Uni a aussi attiré un autre détaillant depuis l'entrée en vigueur de son code de conduite obligatoire.
    Je vais commencer par M. McCann. Pourriez‑vous parler de ces dynamiques qui entrent en jeu dans d'autres pays et de comment un code pourrait aider à faire venir plus de concurrents au Canada?
    Veuillez répondre en environ 45 secondes pour terminer, monsieur McCann.
    Je pense qu'en réalité, une chaîne d'approvisionnement qui fonctionne bien est bonne pour tous ceux qui y participent. C'est bon pour les agriculteurs, les détaillants et les consommateurs, au bout du compte.
    La question, c'est de savoir quel rôle un code peut jouer pour que tout fonctionne mieux. D'après les expériences que nous voyons partout dans le monde, l'incidence est positive. Bien des exemples du Royaume‑Uni et de l'Australie montrent une amélioration de la fluidité d'un marché plus attrayant et plus efficace pour tous les participants.
    Monsieur Janzen, veuillez répondre brièvement.
    Je suis d'accord avec ces commentaires.
    Je pense qu'à un certain moment, il faudrait imposer un calendrier fixe pour mettre un tel code en place. Je crois qu'avec un peu de volonté politique, on peut y arriver.
    Je vous remercie beaucoup. Nous devons nous arrêter ici.
    Nous passons à M. Carr pour quatre minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais commencer par parler brièvement de quelque chose que mon collègue de la Saskatchewan, M. Steinley, a dit durant son intervention.
    L'objectif de la tarification de la pollution consiste à garantir que la pollution ne soit plus gratuite. Si mes collègues de l'autre côté sont en désaccord avec cela, nous devrons en discuter. De plus, la tarification de la pollution vise à promouvoir l'innovation et à garantir qu'il y ait là un élément essentiel à la décarbonation. Cela ne se traduit pas par des coûts au détail plus élevés, comme M. Charlebois l'a dit catégoriquement il y a quelques mois avec à l'appui des données tirées des études qu'il a menées.
    Monsieur McCann, vous avez dit que la question était complexe. J'imagine que la suppression de la taxe ne serait pas une solution parfaite qui assurerait tout d'un coup une stabilisation du prix des aliments.
    Monsieur McCann, êtes‑vous d'accord avec ce que M. Charlebois a dit durant cette réunion, soit que la tarification de la pollution ne contribue pas directement au prix des aliments au détail?
    J'invoque le Règlement.
    Nous allons interrompre le chronomètre un instant, simplement pour nous assurer qu'il s'agit bien d'un rappel au Règlement.
    C'est bien un rappel au Règlement.
    M. Charlebois a dit qu'il manquait de données pour prouver que la taxe sur le carbone nuit au prix des aliments. M. Carr lui fait dire ce qu'il n'a pas dit.
    Nous allons nous assurer que tout le monde ait accès aux bleus et aux témoignages.
    J'ai arrêté le chronomètre.
    Monsieur Steinley, c'est le temps de M. Carr, et la séance tire à sa fin.
    Monsieur Carr, il vous reste environ trois minutes et demie. Vous avez la parole.
(1255)
    J'apprécie le débat, monsieur le président.
    Monsieur McCann, êtes‑vous d'accord ou croyez‑vous que la taxe sur le carbone a une incidence directe sur les prix au détail des aliments au pays?
    Encore une fois, je pense que M. Charlebois a dit que nous n'avons pas beaucoup de données.
    En réalité, les prix au détail sont influencés par divers facteurs. Les fermiers diront que les prix au détail ne reflètent pas ce qui se passe à la ferme. Je pense que bien des personnes dans la chaîne de valeur diront que les prix au détail ne reflètent pas les différentes politiques et leurs incidences le long de la chaîne.
    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur McCann.
    Certains politiciens disent que la tarification de la pollution fait augmenter le coût des aliments au Canada — c'est ce que j'entends tous les jours de la part de mes collègues d'en face à la Chambre des communes —, mais vous dites qu'il n'y a pas de données pour soutenir cet énoncé.
    Est‑ce que je vous comprends bien?
    C'est exact, oui.
    D'accord, je vous remercie.
    Vous avez dit quelque chose de très profond — et j'en suis heureux — concernant la pauvreté.
    Je viens du Manitoba, qui a la population autochtone la plus nombreuse par habitant au pays. Malheureusement, en raison de toutes sortes de traumatismes et de torts intergénérationnels commis contre les Autochtones par le gouvernement du Canada au fil des ans, le taux de pauvreté des enfants se situe à environ 20 % au Manitoba. Je souligne que c'est après huit ans de gouvernement conservateur au Manitoba. C'est 7,4 % plus élevé que la moyenne nationale.
    Un de mes collègues a récemment présenté un projet de loi pour examiner l'alimentation dans les écoles, en vue d'établir des programmes de nutrition et un cadre. Je sais que le nouveau premier ministre Kinew du Manitoba en a parlé et qu'il investit présentement des dizaines de millions de dollars pour garantir la stabilité alimentaire dans les écoles.
    Pouvez‑vous vous prononcer sur le rôle que l'industrie peut jouer pour aider à soutenir l'établissement de programmes de nutrition dans les écoles? Qu'il s'agisse de gaspillage alimentaire ou des politiques que vous avez relevées contre la pauvreté, j'aimerais connaître votre point de vue.
    Nous allons probablement manquer de temps, mais s'il en reste assez pour que M. Janzen ajoute quelque chose à ce propos, je vous en serais reconnaissant.
    Je vous remercie.
    Je pense souvent qu'on ne parle pas assez du bon travail accompli de nos jours par les acteurs de la chaîne de valeur pour réduire la pauvreté. Les entreprises comme les grands détaillants, les groupes et les associations de fermiers sont de grands donateurs et de grands contributeurs aux programmes et aux banques alimentaires.
    Il existe des mécanismes, mais je pense qu'il y aurait des possibilités intéressantes pour créer de meilleures conditions, de meilleurs crédits d'impôt ou d'autres outils qui inciteraient davantage les acteurs de la chaîne de valeur à en faire plus pour donner des aliments ou les aliments excédentaires aux groupes qui en ont le plus besoin.
    Merci.
    Monsieur Janzen, vous avez la parole.
    En Colombie-Britannique, nous avons le programme Agriculture dans la classe qui permet la coordination de la production primaire dans les classes du primaire et du premier cycle du secondaire. Nous avons aussi le programme Buy B.C. qui encourage les établissements publics, notamment les écoles, à acheter des produits locaux.
    Merci. Nous allons en rester là.
    Merci, messieurs.
    Monsieur Perron, vous disposez de deux minutes.

[Français]

    Je vais essayer d'être bref, monsieur le président.
    Monsieur Lee, tantôt, vous avez dit qu'il fallait éliminer les barrières à la concurrence ou les barrières à l'entrée. À cet égard, avez-vous une recommandation concrète à transmettre au Comité?

[Traduction]

     Oui. Mon approche est axée sur le macro, et non sur le micro, et sur ce qu'on appelle la réglementation indirecte plutôt que la réglementation directe. Il faut revenir à l'essentiel et à la terre.
     Le Bureau de la concurrence, qui a bien cerné la concentration, n'a pas pleinement reconnu avoir approuvé des acquisitions au cours des 10 à 15 dernières années. Je ne suis pas ici pour lancer des pierres au Bureau de la concurrence parce qu'il compte d'excellentes personnes, mais il devrait peut-être, par décret ou par modification de la loi, imposer une sorte de plafond théorique au ratio de concentration.
     Lorsque les ratios de concentration vont jusqu'à 70, 80 et 90 % — ce qui est le cas dans plusieurs secteurs —, il y a un manque de compétitivité, ce qui crée des problèmes. C'est une conséquence directe des taux élevés de concentration. Autrement dit, le Bureau de la concurrence approuve trop d'acquisitions.
(1300)

[Français]

    Monsieur McCann, tantôt, vous avez aussi formulé des recommandations précises. Est-ce possible de les transmettre au Comité? Autrement, il vous reste environ 20 secondes pour les expliquer plus clairement.
    Je crois qu'un groupe de travail devrait être mandaté pour effectuer trois tâches.
    La première tâche serait de produire de meilleures données et analyses. Ça permettrait de mieux comprendre, par exemple, quelle incidence la taxe sur le carbone a sur le prix des aliments. C'est une question qui reste ouverte.
    La deuxième tâche serait de déterminer ce qui engendre présentement des conséquences et quelles sont les solutions.
    La troisième tâche serait de se pencher sur les questions de l'accessibilité et de l'abordabilité et d'essayer de trouver des solutions, peut-être à l'extérieur du système alimentaire, pouvant répondre aux conséquences de la hausse du prix des aliments.

[Traduction]

    Monsieur MacGregor, vous êtes notre dernier intervenant. Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur McCann, le Comité a entrepris cette étude il y a un bon moment, et je suis très heureux d'avoir obtenu le consentement unanime de mes collègues lorsque j'ai proposé la motion d'origine à cette fin. Parmi les plus grands avantages découlant de cette étude et de l'attention accrue portée à l'inflation du prix des aliments, il y a eu les récentes modifications apportées à la Loi sur la concurrence. Le projet de loi C‑56 a obtenu l'appui unanime des députés de la Chambre des communes. Il fait maintenant partie des Lois du Canada. Il y a aussi d'autres dispositions dans le projet de loi C‑59.
    Je place tout cela dans le contexte de votre déclaration préliminaire, lorsque vous dites qu'il manque de données au Canada. Pouvez-vous nous parler davantage des pouvoirs législatifs accrus du Bureau de la concurrence et de ce qu'ils permettront de faire, surtout en ce qui a trait aux études de marché et à la possibilité d'exiger la communication de renseignements?
     De toute évidence, il permettra de combler les lacunes. Dans son rapport de l'été dernier, le Bureau de la concurrence a lui-même reconnu ses limites et n'a certainement pas répondu à toutes les questions qui se posent. Je pense que cela crée beaucoup d'incertitude quant à ce qui se passe exactement et à ce que nous comprenons vraiment. Il est également important de comprendre, surtout dans un secteur concentré comme celui de la vente au détail, qu'il peut très bien y avoir des limites à ce que le Bureau peut rendre public au bout du compte.
     C'est une petite pièce du casse-tête. Il serait intéressant de voir comment les choses se seraient passées il y a 20 ans si le Bureau de la concurrence avait eu ces pouvoirs à l'époque. Il ne les avait pas, alors nous en sommes là. Je pense qu'en fin de compte, cela a une incidence très marginale sur la question du prix des aliments.
    Merci, monsieur Mac Gregor.
    Chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier notre deuxième groupe de témoins d'avoir contribué à notre étude.
    Pour vous donner une idée de ce qui s'en vient jeudi, nous en sommes à la fin de la liste des témoins que vous aviez proposés. En fait, la greffière a eu de la difficulté parce que tous les témoins avaient été entendus, avaient refusé notre invitation ou n'étaient pas en mesure de participer à notre étude. Nous pourrons toutefois entendre les représentants du Bureau de la concurrence, qui seront présents pour la première heure de notre réunion de jeudi. Pour la deuxième heure, nous transmettrons nos instructions aux analystes afin qu'ils puissent préparer un premier rapport. Nous allons aussi examiner un rapport du Sous-comité en vue de son adoption et allons aborder tous les travaux pertinents du Comité.
    Le 13 février, nous devrions recevoir le PDG de Costco, je crois. Nous tentons de confirmer la comparution du ministre Champagne; ce n'est pas encore fait, mais nous y travaillons. Le 15 février, nous entreprendrons notre étude sur l'horticulture. La greffière y travaille.
    Nous avons parlé d'aborder le projet de loi C‑355 au cours de la première heure de notre réunion de jeudi. M. Louis aimerait avoir un peu plus de temps, mais nous allons nous assurer de l'entendre, parce que le Comité aura à étudier cette mesure législative également.
    Voilà notre horaire d'ici au congé de février. Nous nous reverrons jeudi.
    La séance est levée.
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