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Je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue à la 23e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
Je vais commencer par faire quelques rappels.
La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité.
Bien sûr, les captures d'écran ou la prise de photos de votre écran ne sont pas autorisées.
[Traduction]
Chers collègues, n'oubliez pas de respecter les protocoles sanitaires en vigueur dans la salle.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 30 mai 2022, le Comité poursuit son étude sur l'insécurité alimentaire mondiale.
Chers collègues, je tiens à souligner que nous avons eu une très bonne première réunion sur ce sujet. Les renseignements que nous avons reçus ont été très utiles et vous avez posé de bonnes questions. Je pense que les renseignements que nous avons reçus étaient très crédibles. Nous avons entendu d'excellents témoins.
Ce ne sera pas différent aujourd'hui. En effet, pour la première heure, je suis très heureux de vous annoncer que nous accueillons Mykola Solskyi, le ministre de la Politique agraire et de l'Alimentation de l'Ukraine.
Monsieur le ministre, je sais qu'en ce moment même, si je consulte ma montre, il est peut-être 23 h 30 en Ukraine, et je vous remercie donc de comparaître devant le Comité à cette heure‑ci. Nous vous remercions d'être ici, car votre témoignage est important. Nous sommes à vos côtés. Nous avons entendu l'une de vos collègues parlementaires, Yulia Klymenko, députée du Parlement ukrainien, et nous avons hâte d'entendre votre témoignage. Nous savons que c'est une période difficile.
Vous avez jusqu'à cinq minutes pour faire une déclaration. Je vous accorderai un peu plus de temps au besoin. Nous voulons entendre une déclaration préliminaire de votre part. Nous donnerons ensuite la parole à nos députés, qui ont très hâte de discuter avec vous et de vous poser des questions.
Nous vous remercions encore une fois et nous vous souhaitons la bienvenue.
La dernière chose que je tiens à mentionner, c'est que nous avons la très grande chance, comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises, d'accueillir 41 stagiaires ukrainiens sur la Colline dans le cadre du Programme parlementaire Canada-Ukraine. Plusieurs d'entre eux sont dans la salle aujourd'hui. Leur aide nous a été précieuse pour établir la communication avec vous et votre gouvernement.
Je vous remercie beaucoup.
Monsieur le ministre, vous avez la parole.
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Duzhe djakuyu za zaproshennia.
Chers distingués parlementaires, c'est aujourd'hui le 106e jour que l'Ukraine résiste héroïquement aux attaques russes.
Pendant ces jours, la guerre qui sévit dans notre pays a déjà fait des milliers de victimes civiles et a éprouvé des millions de personnes avec la destruction d'infrastructures civiles et d'autres infrastructures essentielles, y compris des terres agricoles.
Tout d'abord, je voudrais vous remercier, vous et votre pays, du soutien que vous avez apporté à mon pays pendant cette période difficile et traumatisante. Sans votre aide politique, humanitaire, militaire et financière, il nous serait extrêmement difficile de combattre les forces écrasantes de l'ennemi. Je vous remercie de vos sincères paroles de soutien et de solidarité. Avec l'esprit indomptable du peuple ukrainien et le courage des forces armées de l'Ukraine, votre soutien permettra à l'Ukraine de défendre avec succès son indépendance, sa souveraineté et son intégrité territoriale.
La guerre a interrompu les exportations de l'Ukraine. En raison du blocus des ports maritimes ukrainiens, plus de 20 millions de tonnes de céréales ne sont pas sur le marché mondial. Le blocus des ports a considérablement réduit nos possibilités d'exportation. En mars, nous avons exporté 200 000 tonnes. En avril, nous avons exporté 1 million de tonnes. En mai, nous avons exporté 1,7 million de tonnes. En comparaison, avant le début de la guerre, les exportations de produits agricoles atteignaient de 5 à 6 millions de tonnes par mois. Dans la situation actuelle, nous pourrions exporter au maximum deux tonnes par mois.
Dans un mois, les récoltes commenceront dans les pays européens et, à notre avis, le port roumain de Constanta fera principalement affaire avec des entreprises européennes, et sa capacité sera chargée de leurs exportations. Cela compliquera encore davantage l'exportation des produits ukrainiens.
Le blocus des exportations ukrainiennes a déjà entraîné une hausse record des prix sur le marché mondial et provoquera certainement une crise alimentaire mondiale. Je tiens à souligner que si les prix des aliments augmentent à l'échelle mondiale, c'est uniquement en raison de l'attaque insensée de la Fédération de Russie contre l'Ukraine, et cela n'a rien à voir avec les sanctions sur les engrais, notamment la potasse. Il s'agit d'une manipulation de la part de la Fédération de Russie et de la République du Bélarus, et rien de plus.
Un autre problème se profile à l'horizon, c'est‑à‑dire celui de l'entreposage des céréales en Ukraine. En effet, en date du 24 février, la capacité totale d'entreposage était de 75 millions de tonnes de céréales. Actuellement, à cause des destructions et de l'occupation temporaire, notre capacité d'entreposage n'est que de 60 millions de tonnes. Compte tenu du faible taux d'exportation actuel, de la récolte de l'année dernière et de nos prévisions pour les récoltes à venir, le manque de capacité d'entreposage atteindra de 10 à 15 millions de tonnes d'ici octobre. C'est la raison pour laquelle nous avons un besoin urgent de mettre en place une solution d'entreposage temporaire des céréales.
Le moyen le plus efficace de résoudre le problème des exportations est de vaincre l'armée russe sur les territoires ukrainiens. Nous demandons donc une aide continue pour l'armée ukrainienne et un approvisionnement en armes nécessaires à la protection de nos territoires. Nous comprenons qu'on ne peut pas mettre fin à la guerre à court terme, et nous prévoyons donc de remédier aux lacunes en matière d'entreposage avec des installations d'entreposage temporaires, des constructions modulaires et des sacs en plastique. Il est évident que la pénurie d'espace d'entreposage est assez importante, et nous serions donc très reconnaissants au gouvernement du Canada d'envisager la possibilité de nous fournir un tel entreposage temporaire, du moins en partie. Cela contribuerait grandement à préserver les récoltes et à approvisionner les marchés mondiaux.
Enfin, je tiens à insister sur le fait que la seule solution pour que les produits ukrainiens puissent être exportés à nouveau et pour éviter d'aggraver la crise alimentaire mondiale est de vaincre l'armée russe sur le territoire ukrainien et de débloquer complètement les ports ukrainiens et de rétablir la navigation habituelle. Quant aux autres mesures temporaires comme les couloirs humanitaires, vous savez qu'elles posent problème, car en raison de la guerre, les coûts liés à l'expédition, au fret et à l'assurance seront trop élevés tant que la situation demeurera aussi dangereuse.
Seule la fin de la guerre peut garantir un moment de sécurité dans la mer Noire. Par conséquent, je vous demande instamment de ne pas mettre fin aux livraisons d'armes à l'Ukraine et même de les augmenter.
Ne levez pas les sanctions existantes. Imposez de nouvelles sanctions à la Russie, au Bélarus et à tous ceux qui les soutiennent. Continuez à soutenir l'Ukraine et sa position sur la scène internationale.
Je vous remercie beaucoup de votre attention.
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Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Permettez-moi de vous féliciter, monsieur le ministre, de votre maîtrise de votre langue seconde. Je sais que ce n'est pas toujours facile, surtout devant un comité parlementaire.
Nous avons la chance, chers collègues, d'avoir l'interprétation en ukrainien. J'aimerais encore une fois remercier notre greffière d'avoir rendu cela possible. L'interprétation se trouve sur le canal auxiliaire. Le ministre pourra donc entendre, en ukrainien, les questions des députés qui seront posées en anglais ou en français. Bien entendu, il y aura un peu de retard lorsque les interprètes reprendront la traduction en ukrainien. Attendez-vous donc à quelques délais.
Monsieur le ministre, assurez-vous que vous êtes sur le canal de l'interprétation en ukrainien.
Nous entendrons d'abord les conservateurs pour la première série de questions.
Monsieur Barlow, vous avez la parole. Vous avez six minutes.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je pense que je parle au nom de tous les membres du Comité lorsque j'affirme que c'est un honneur incroyable, monsieur le ministre, que vous preniez le temps d'être avec nous, compte tenu des circonstances extrêmement stressantes de la guerre à laquelle vous devez faire face. Je pense qu'il est extrêmement important que le Canada soit aux côtés de l'Ukraine, certainement pour la plupart d'entre nous qui représentons l'Ouest canadien.
En effet, notre industrie agricole a littéralement été construite sur le dos des immigrants ukrainiens qui sont venus ici il y a plus de 100 ans et qui ont préparé la terre et bâti notre industrie agricole. Je vous remercie. Nous pensons certainement à vous.
Je vais maintenant vous poser quelques questions.
Nous avons beaucoup parlé d'équipement militaire et de la façon dont nous pouvons vous aider à cet égard. Je ne m'attends certainement pas à ce que nous cessions de le faire. Nous savons à quel point il est important de fournir à l'Ukraine les ressources nécessaires pour l'aider sur le plan militaire.
Vous avez parlé d'entreposage. Y a‑t‑il certaines choses que nous pouvons faire au Canada pour aider votre secteur agricole, par exemple en ce qui concerne les semences, l'équipement agricole, les machines ou le carburant? À quoi ressemblerait une installation d'entreposage temporaire? Je sais que vos installations d'entreposage sont très différentes des nôtres. En effet, nous entreposons beaucoup sur les exploitations agricoles, alors que vous fonctionnez plutôt avec des centres d'entreposage.
Y a‑t‑il des mesures que nous pouvons prendre ou des choses que nous pouvons faire pour vous aider à cet égard?
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Le témoin s’exprime en ukrainien, et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Je vous remercie.
En effet, en Ukraine, nous utilisons des installations permanentes d'entreposage des céréales. Toutefois, depuis un certain temps, les agriculteurs ukrainiens utilisent des installations d'entreposage temporaires, surtout en période de récolte à haut rendement. Ils utilisent donc des sacs en plastique. Nous utilisons également des techniques d'entreposage temporaires similaires à celles utilisées au Canada. Il s'agit de structures rondes temporaires sur lesquelles, sous un film, les céréales sont apposées et des machines spéciales les chargent au sommet de ces structures.
Une autre chose qui serait très importante pour l'Ukraine… Nous avons un grand nombre de personnes déplacées, car plusieurs millions de personnes ont quitté les régions déchirées par la guerre. Nous avons besoin d'emplois pour ces personnes, notamment dans le secteur agricole. Nous pensons notamment à la cueillette des baies et des fruits et aux petits vergers d'une superficie maximale de 25 hectares ou de 60 à 70 acres.
Nous avons approché le gouvernement canadien pour lui demander de l'aide avec des plants d'arbres. Nous avons également eu des réunions avec la et nous lui avons mentionné cela.
Nos exportations passent par le chemin de fer et les routes vers la Hongrie, la Slovaquie, la Pologne et la Roumanie. Nous avons besoin de laboratoires vétérinaires et phytosanitaires supplémentaires pour accélérer l'exportation. C'est le genre d'aide dont nous aurions également besoin.
Je vous remercie.
Vous venez de mentionner les chemins de fer et les autoroutes. J'ai cru comprendre — et j'aimerais que vous me donniez des précisions à ce sujet, monsieur le ministre — que le réseau ferroviaire, et dans de nombreux cas les réseaux ferroviaires de l'ère soviétique, ne sont pas compatibles avec les réseaux ferroviaires de certains des pays avoisinants, comme la Pologne et la Roumanie, ce qui pose un réel problème pour votre chaîne d'approvisionnement, surtout avec le blocus d'Odessa.
Certaines mesures peuvent-elles être prises pour tenter de résoudre ce problème? S'agit‑il simplement d'amener les wagons jusqu'à la frontière et de charger ensuite les produits, les céréales ou l'orge dans différents wagons pour poursuivre le transport? Est‑ce que cela décrit bien la situation actuelle?
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Le témoin s’exprime en ukrainien, et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Oui, vous avez tout à fait raison. Nous avons un certain type de wagons, et la distance entre les rails est différente dans notre pays de ce qu'elle est chez nos voisins européens, et lorsque nous arrivons à une frontière, nous avons deux options. La première option consiste à charger la cargaison dans des wagons européens. La deuxième option, c'est qu'il existe dans certains pays, par exemple la Roumanie, une procédure spéciale par laquelle on pose sur les cargaisons ukrainiennes des roues qui fonctionnent sur le réseau ferroviaire roumain.
Bien entendu, cela complique la logistique et le processus de transport des marchandises.
Nous n'étions pas prêts pour les événements qui se déroulent actuellement et qui entraînent des retards importants aux frontières. Le processus prend quelques jours. En même temps, nous constatons que l'Union européenne ne dispose pas d'un nombre suffisant de conteneurs de marchandises, car elle n'était pas non plus préparée à cette guerre et à ses conséquences. Les entreprises européennes ne sont pas non plus prêtes à construire rapidement le nombre nécessaire de wagons de marchandises, car les années précédentes, elles n'en avaient pas autant et elles nous disent que si, dans quelques mois, dans six mois ou dans un an, les ports de la mer Noire rouvrent enfin, elles se retrouveront avec de nombreux wagons de marchandises qu'elles ne pourront pas utiliser et remplir.
Cela crée une situation dans laquelle le nombre de wagons pour le transport des marchandises en Europe n'augmente pas assez rapidement pour que nous puissions les utiliser pour transporter nos céréales.
Nous pouvions autrefois charger un navire Panamax de 70 000 tonnes en une journée, c'est‑à‑dire en 24 heures, mais il faut désormais beaucoup plus de temps pour utiliser le chemin de fer.
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[
Le témoin s’exprime en ukrainien, et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Oui, c'est une conséquence directe. C'est surtout parce que la Russie occupe l'Est et le Sud de l'Ukraine, où se trouvent plusieurs de nos installations d'entreposage.
La deuxième raison, c'est que les silos ukrainiens n'étaient pas utilisés de façon prolongée, c'est‑à‑dire que les céréales n'y étaient pas entreposées pendant une longue période. En effet, elles y étaient entreposées pendant une courte période, puis elles étaient ensuite acheminées vers les ports.
Maintenant, nous exportons trois fois moins de céréales que d'habitude, et c'est la raison pour laquelle nos installations d'entreposage sont pleines. Il n'y a aucun roulement. Nous prévoyons qu'à l'automne, nous aurons beaucoup de maïs et nous nous demandons si nos ports seront toujours bloqués à ce moment‑là ou s'ils seront partiellement ouverts, mais il y aura moins de navires qu'avant, pour plusieurs raisons.
Il faudra peut-être entreposer de 10 à 15 millions de tonnes de produits récoltés pour pouvoir les exporter plus tard. Et cela en tenant compte du fait que nous avons déjà diminué nos prévisions en matière de production végétale en raison de la guerre.
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[
Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Nous pouvons seulement exprimer ce que nous savons maintenant, aujourd'hui. L'avenir est trop incertain, impossible de le prévoir ou de prévoir le nombre de nouveaux pilonnages, de nouveaux missiles lancés ou les prochaines extractions. Aujourd'hui, les infrastructures agricoles ne sont pas lourdement endommagées. Un seul grand port a été gravement paralysé, mais pas détruit.
Actuellement, 10 %, peut-être, de nos installations portuaires auront besoin de réparations. Des silos élévateurs ont été partiellement détruits, mais ils ne constituent qu'un petit pourcentage de l'ensemble.
Des ponts, également, ont été détruits, des routes sont endommagées. Mais si la guerre devait prendre fin demain, nous rénoverions et remettrions en état nos infrastructures assez rapidement.
Nous ignorons quand la guerre se terminera. Depuis deux mois, les pilonnages ont augmenté. L'ennemi cible de plus en plus d'infrastructures agricoles et de ports, ce qui est nouveau.
Nous croyons que les Russes accordent maintenant plus d'attention aux infrastructures agricoles, conformément aussi avec leur rhétorique internationale, quand nous soulevons la question de la sécurité alimentaire mondiale.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre Solskyi, je vais commencer en vous disant que nous sommes de tout cœur avec vous. Nous vous remercions beaucoup de prendre le temps de nous parler. Je vous assure qu'ici, il n'y a aucune partisanerie quand il est question de l'Ukraine et que nous allons tout faire pour vous aider.
Lors de la dernière séance, nous avons beaucoup parlé avec Mme Klymenko de l'urgence de débloquer les ports, entre autres le port d'Odessa, et de créer une espèce de corridor sécuritaire. Je sais qu'il y a eu des négociations et des demandes déraisonnables de la part des Russes.
Pouvez-vous faire le point sur la situation? Y a-t-il des discussions? Peut-on y arriver? Y a-t-il aussi des discussions avec l'OTAN à ce sujet?
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Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Des négociations auxquelles participe la Turquie ont lieu entre les Nations unies et la Russie. Il y est question d'ouvrir des ports ukrainiens et de lever le blocus. Nous avons axé nos propositions d'après notre point de vue sur l'évolution de la situation. Nous espérons connaître, la semaine prochaine, certaines réactions sur la suite immédiate des choses ou les prochaines rencontres, mais on ne peut pas aller plus vite que la musique, et personne ne sait quand ça aboutira.
Les actions des Russes diffèrent de leurs paroles. Des ministres russes ont bien déclaré qu'ils ne s'opposaient pas à l'exportation du grain ukrainien et qu'ils ne l'empêcheraient pas, mais, dans le même temps, les ports ukrainiens d'où sont exportés les produits agricoles essuient des attaques de missiles tout comme les ponts par où circulent les produits agricoles, qui sont également pilonnés. Les produits agricoles constituent 90 % des chargements. Les Russes le savent et, pourtant, ils les attaquent à l'aide de missiles et par des pilonnages.
Il faut se le rappeler quand les Russes déclarent qu'ils n'empêcheront pas les exportations agricoles ukrainiennes ni le départ des cargos d'Ukraine. Ce n'est que des paroles en l'air. Tant que les navires russes ne s'éloigneront pas des ports ukrainiens, les transporteurs internationaux n'y enverront pas de navires en raison des frais d'assurance entraînés par les circonstances différentes. La situation est très difficile.
Avant la guerre, le trafic portuaire ukrainien sortant était de 200 navires. Actuellement il est peut-être réduit à 10 ou 15 navires par mois, ce qui est anémique. Cette activité symbolique ne mettra pas fin aux pénuries alimentaires du monde et elle ne résoudra pas les problèmes d'exportation de l'Ukraine.
Les actions des Russes contredisent et décrédibilisent leurs bruyantes protestations auxquelles les organisations commerciales mondiales et les gouvernements ne se fieront pas beaucoup. Seules compteront leurs actions sur le terrain.
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[
Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
L'année dernière, la récolte totale, en Ukraine, a atteint 115 millions de tonnes. Cette année, si la météo est favorable, en plus de la guerre, elle devrait être de 60 millions de tonnes. Il faudra en exporter environ 35, au moins. Même si la récolte diminue, les tonnages exportés restent très élevés.
Quant aux engrais, certaines exploitations agricoles en avaient en stock. La guerre a commencé le 24 février, immédiatement avant le début des semailles en Ukraine. Les stocks de nitrates et d'autres engrais ont été employés. Il est difficile de prévoir ce qui arrivera l'année prochaine. Le prix des engrais est très élevé, mais nous croyons que l'Ukraine pourra se fournir auprès d'autres marchés, par l'entremise de l'Europe occidentale.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre, tout comme mes collègues ici présents, je vous remercie de nous accorder de votre temps et, avec eux, je vous prie de croire en notre solidarité avec vous, votre peuple et votre pays.
Ce matin, j'ai eu la chance de parler à l'Organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation, la FAO, auprès de qui je me suis informé de ce qui arrivait au territoire ukrainien occupé par la Russie. Il paraîtrait que les Russes ont détourné à leur propre profit du grain ukrainien.
Que peuvent faire des pays comme le Canada et le reste de la communauté internationale pour surveiller de près ce grain volé et obliger la Russie à rendre des comptes sur lui, mais également tous les pays qui pourraient sciemment en acheter? Que savez-vous à ce sujet?
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Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Merci. Il s'agit de blé. Dans ces régions, nous en avons de grands entrepôts. Nous constatons que les Russes en ont déjà expédié 500 000 à 600 000 tonnes à l'étranger, à partir du port ukrainien de Sébastopol. Tous les bateaux chargés de ce grain qui en partent transportent du blé ukrainien, le seul qu'on y trouve. Il est difficile à vendre. Nous sommes intervenus et avons pu détourner ces bateaux de leur destination initiale, l'Égypte.
Ils ont changé de route et se sont dirigés vers la Syrie où nous n'avons pas d'alliés. Ils y sont arrivés. Dernièrement, nous avons observé que ce grain retournait en Russie. Là‑bas, on le mélange à du grain russe et on prétend qu'il est russe, qu'il a été récolté en Russie. Aucune interdiction n'a été décrétée pour l'exportation de grain russe. Soyons réalistes, ce serait difficile dans cette situation, vu les prix et les besoins en Afrique du Nord et en Asie. Nous essayons de suivre la piste de ce grain volé, mais, dans chaque cas, il faut une enquête distincte. On ne peut jamais être tout à fait sûr qu'il soit entièrement russe ou un mélange avec du grain ukrainien. Les documents ont été falsifiés.
Nous avons recueilli des preuves et entamé des pourparlers avec les ministres de l'agriculture des pays du G7. Nous leur avons parlé il y a quatre semaines, à Stuttgart. Nous réclamerons des sanctions contre les propriétaires de navires contre qui nous aurons des preuves et contre les acheteurs qui revendent ensuite ce grain, pour décourager ceux qui seraient tentés de les imiter et pour compliquer la tâche à la Russie.
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[
Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Ils sont visiblement dans une situation très difficile. Dans ces territoires occupés, ils font face à d'importants problèmes.
Les forces d'occupation leur imposent les lois russes et d'enregistrer leur entreprise comme entreprise russe sous peine de confiscation de leur grain. La Russie confisquera leur entreprise si elle constate qu'ils ne suivent pas la loi. Dans les régions occupées de Kherson et de Zaporijjia, ils ne se plient pas aux exigences russes et essaient de survivre. Ils passent plus de temps dans les champs. Ils se cachent des Russes. Ils font partir les membres de leur famille. Ils se cachent des forces d'occupation et se dérobent à toute communication avec elle.
Les forces d'occupation, malgré leur cruauté absolue, essaient de dorer leur image pour calmer la population locale, l'amener à inscrire les entreprises comme russes, puis montrer, à la télévision, que la paix est totalement revenue et que les agriculteurs sont heureux. Mais nous voyons que ça ne marche pas. Même la télévision russe ne convainc pas son public.
Jour après jour les agriculteurs trouvent de nouveaux prétextes pour s'enfuir ou éviter les forces d'occupation.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le ministre, d'être avec nous cet après-midi. Comme mes confrères l'ont dit, nous sommes de tout cœur avec vous.
On sait que, parmi les denrées entreposées, le blé est la matière la plus importante, et sa durée de conservation est limitée. Si vous ne réussissez pas à construire les entrepôts de stockage temporaire, que va-t-il arriver? Il y a quand même une durée de conservation maximale pour le blé.
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[
Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Parfois, la situation devient critique. Si nous conservons ce grain même dans des entrepôts temporaires, il faut comprendre que, selon le type de grain, nous n'en avons que pour un an, deux au maximum. Nous espérons employer ce temps à améliorer le travail dans les ports et à obtenir un meilleur service de transport vers l'Europe. Il nous faudra plusieurs mois à cette fin.
Si nous manquons d'entrepôts, ce sera évidemment un problème, notamment pour le maïs, qu'on peut conserver longtemps, mais nous pouvons encore éprouver un problème l'année prochaine si nous ne parvenons pas à préserver la récolte de cette année. Une grande partie sera laissée à pourrir dans les champs.
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Le témoin s'exprime en ukrainien, et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Il y a un mois, nous avons rappelé à un porte-parole de la FAO que la question du blé ukrainien recouvrait trois récoltes en même temps, parce que, d'abord, nous sommes dans l'impossibilité d'exporter la récolte de l'année dernière. Et d'un.
Nous ignorons comment nous ferons la récolte cette année et comment nous l'exporterons. De plus, la moitié du blé d'hiver se trouve en territoires occupés. Et de deux.
La troisième, qui survient en août, correspond aux semailles du blé d'hiver pour l'année suivante. Voici ce que nous voyons. Les agriculteurs devront diminuer leur quantité ensemencée de blé d'hiver ou ils sèmeront plus de colza, qui trouve plus de débouchés. Cette culture donne moins de tonnes à l'hectare, et le produit est plus facile à transporter.
Il ne serait pas étonnant que, si la situation ne s'améliore pas dans les ports, le blé, dans les pays arabes, atteigne 600 ou 700 $ la tonne, ce qui est susceptible de causer de gros problèmes. C'est très cher pour le blé. Ces pays n'ont pas de budget pour le blé. L'Égypte et d'autres pays ne s'en font pas encore pour la guerre. Ils espèrent que, dans deux ou trois mois, la situation changera. Peut-être qu'un accord sera conclu et que ces pays pourront vivre sur les stocks actuels, mais, malheureusement, ça n'arrivera pas. Leurs espoirs, je le crains bien, seront anéantis.
En juillet et en août, l'émotion, dans les pays arabes, asiatiques et africains, atteindra son comble, parce que l'offre de grain, de blé, sera très faible, et le ministère de l'agriculture des États-Unis devra corriger la situation.
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Le témoin s'exprime en ukrainien et l'interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Merci.
Ma réponse vous semblera peut-être vague, mais la solution la plus efficace pour régler la situation du secteur agricole ukrainien, c'est de mettre fin à cette guerre. Nous voyons bien que la Russie ne veut pas le faire, et nous sommes obligés de combattre pour la terminer et nous sommes prêts à le faire.
Pour que les agriculteurs ukrainiens poursuivent leur travail afin que les navires entrent dans les ports et pour stabiliser le prix des denrées, nous avons besoin de stabilité et de certitude face à l'avenir, ce qui est impossible sans la paix.
Voilà pourquoi je ne vous parle pas de tracteurs. J'en appelle à votre bonne volonté pour faire tout votre possible pour contribuer à mettre fin à cette guerre.
Notre agriculture a bien sûr besoin d'entrepôts, un besoin que nous savons critique et qui le restera. Nous savons que le Canada est l'un des chefs de file du secteur agricole et des techniques agricoles. En fait, une partie de l'agriculture ukrainienne ressemble beaucoup au secteur agricole des États-Unis et du Canada, par ce qu'elle cultive, par la similitude de la taille des exploitations et des technologies utilisées. Les agriculteurs ukrainiens ont appris à employer ces technologies.
Les entrepôts sont indispensables, d'autant plus que nous ne pouvons plus exporter le grain. Après les armes, ce serait la chose la plus importante.
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[
Le témoin s’exprime en ukrainien et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Oui, bien sûr.
Le secteur agricole ukrainien compte très peu de travailleurs, si l'on considère le nombre de travailleurs agricoles par rapport à la superficie des terres agricoles. Il n'y a pas assez de personnes qui travaillent dans l'agriculture, principalement parce que les producteurs cultivent du maïs, du colza pour l'huile et du tournesol.
Après la dissolution de l'ancienne Union soviétique, on a opté pour les produits les plus faciles à cultiver, de sorte que certains domaines de l'agriculture sont actuellement sous-développés. Je crois que nous pourrions nous concentrer là‑dessus et ainsi employer beaucoup plus de gens. L'agriculture s'est développée, mais le rythme est très lent. Nous aimerions donc qu'elle s'intensifie, car je pense que beaucoup de gens voudraient travailler dans ce domaine. Il y a beaucoup de terres agricoles pour ce type de production agricole, et c'est l'un des moyens les plus rapides et les moins coûteux de créer de nouveaux emplois en comparaison avec d'autres types de production agricole.
Bien sûr, nous avons aussi besoin de nouvelles technologies agricoles. Le Canada est un chef de file dans certains domaines, par exemple en ce qui concerne les vergers, leur culture et leur expansion. Nous possédons des terres agricoles semblables à celles du Canada et nous pourrions donc, nous l'espérons, profiter de votre expérience. En fait, nous achetons déjà du matériel de réception des grains auprès du Canada. Nous pensons donc transmettre au gouvernement canadien nos idées et nos propositions quant au type d'aide que le Canada pourrait nous apporter pour que nous puissions employer plus de gens dans le secteur agricole en Ukraine.
Nous espérons ainsi réduire le nombre de personnes qui quittent l'Ukraine pour l'étranger.
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[
Le témoin s’exprime en ukrainien et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Si vous parlez de l'accès aux aliments de base, tout va bien. Ils ont suffisamment de céréales en réserve depuis la récolte de l'année dernière, quand le territoire nous appartenait encore et n'était pas occupé.
L'ensemencement a été fait l'année dernière, donc ils pourront faire la récolte cette année. Ils ont également suffisamment de fournitures de base. Évidemment, les Russes vont aussi essayer de faire du commerce et des échanges, parce qu'ils sont les occupants et qu'ils vont essayer de s'attirer les faveurs de la population locale. C'est évident.
C'est difficile pour eux, car ils espéraient être bien accueillis par les populations locales, mais la réalité à laquelle ils font face est que tout le monde s'oppose vivement à l'occupation. Nous savons que la situation sera difficile, mais nous ne nous attendons pas à ce que les gens souffrent de la faim ou de la famine. Nous ne prévoyons rien de tout cela.
Certains fruits et légumes feront défaut, mais la situation ne sera pas critique si nous parlons d'une période limitée.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, très rapidement, nous savons que l'Ukraine est un grenier à blé pour la région et pour de nombreux pays d'Afrique et d'Asie. Vous avez dit que les gens auront bientôt des émotions fortes à cause des prix des denrées alimentaires et de l'absence de produits provenant d'Ukraine.
Avez-vous une idée des dommages causés à la réputation de la Russie dans cette région? Depuis des décennies, la Russie essaie d'établir des relations avec bon nombre de ces pays. Est‑ce que ces pays comprennent maintenant le tort que la Russie cause à leur stabilité et à leur sécurité futures, d'autant plus qu'ils font face à une hausse des prix des aliments et à des pénuries?
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Le témoin s’exprime en ukrainien et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Je peux seulement vous donner mon opinion. Il est évident que, maintenant, chaque pays, chaque personne dans le monde, même si elle vit très loin de notre région, paie pour cette guerre, car les aliments sont plus chers. Je pense que, depuis peu, les pays africains et tous les pays des autres régions du monde commencent à comprendre. Même en Égypte, leur tourisme, qui est historiquement... Ils ont toujours eu des relations plutôt prudentes avec la Russie à cause des incidences sur le tourisme, mais même cela ne les empêchera pas de voir qu'ils paient maintenant un prix trop élevé pour ne pas dénoncer la guerre.
Ce que nous observons depuis quelques semaines, c'est que la Russie commence aussi à comprendre cela. C'est pourquoi un dirigeant de l'Union africaine s'est récemment rendu en Russie pour y tenir des négociations. Poutine a déclaré que la Russie ne s'opposait pas aux exportations de céréales de l'Ukraine et qu'elle n'entravait rien.
Je pense qu'il prépare le terrain pour de futures déclarations dans lesquelles il dira qu'il n'est pas responsable de la crise, mais que ce sont les Ukrainiens et leurs partenaires occidentaux qui ne sont pas capables d'organiser les exportations ou qui ne veulent pas organiser les exportations de céréales. Je pense que c'est ce que les Russes préparent. Ils sont en train de jeter les bases de futures accusations contre l'Ukraine. Officiellement, il a déclaré que la Russie n'empêchait pas les exportations: « S'il vous plaît, allez‑y, exportez. » Mais comment voulez-vous exporter si des sous-marins et des navires de guerre vous en empêchent, ou s'il y a des combats tous les jours?
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Merci, monsieur le ministre, de vous joindre à nous en ces temps difficiles.
J'ai déjà dit à ce groupe que la situation me touche personnellement, car mes quatre grands-parents sont nés dans le sud de l'Ukraine. Le Canada et l'Ukraine sont des greniers à blé, mais j'ai visité trois fois les régions du sud de l'Ukraine, notamment Zaporijjya, Kherson et Melitopol, où se trouvent mes racines. On y cultive des légumes et des fruits, et vous en avez parlé. Pouvez-vous nous parler des conséquences de la crise sur la production de légumes pour votre propre population, pour l'Ukraine? Je sais qu'une partie de la production a été exportée et transformée. Je connais la société Chumak pour son ketchup.
Pouvez-vous nous en dire plus sur la situation relative aux fruits et légumes?
:
[
Le témoin s’exprime en ukrainien et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Oui. Je vois en effet que vous connaissez cette région particulière de l'Ukraine, et oui, la production agricole y est très répandue. Cette région est maintenant occupée, et à cause de cela, nous constatons un manque de légumes et de fruits hâtifs. Pour la saison en cours et la prochaine, les agriculteurs de cette région d'Ukraine ne veulent pas cultiver de fruits et de légumes, car cela nécessite des investissements plus importants que pour le soja ou le maïs. Par conséquent, je pense qu'ils ne vont pas se concentrer sur les fruits et légumes.
Deuxièmement, ces régions ont besoin d'irrigation, d'arrosage, et elles disposent de canaux spéciaux qui amènent aux champs l'eau du fleuve Dniepr. D'après ce que nous comprenons, les Russes utilisent comme ligne ou structure de défense une partie de ces canaux, de ces voies d'eau. C'est donc très difficile et, bien sûr, cela entrave le travail agricole. Il y a l'occupation, le manque d'eau et la guerre, constante.
:
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur le ministre Solskyi. Je vous suis reconnaissant du temps que vous nous consacrez et de votre dévouement.
Nous avons évoqué ici et ailleurs les effets dévastateurs de la guerre sur tout le monde, y compris sur les agriculteurs. Nous avons entendu dire que les agriculteurs manquent de diesel. Certains ont peur de labourer leurs champs, qui pourraient être minés. Ceux qui ne combattent pas au front vivent leurs propres difficultés à la ferme.
Pour résumer certaines des choses que nous avons entendues, il y a le manque de fournitures, le prix des fournitures existantes, le manque de main-d'œuvre, la diminution du cheptel et des champs cultivés, ainsi que les problèmes de capacité d'entreposage. Le directeur général adjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture nous a dit qu'en Ukraine, les petits agriculteurs produisent une quantité impressionnante de nourriture. Ce sont les petits producteurs de votre pays.
Ici, au Canada, nous représentons les agriculteurs de nos circonscriptions. Nous discutons avec vous, qui représentez les agriculteurs de toute l'Ukraine. J'ai donc pensé qu'il serait approprié de terminer en vous demandant de brosser un tableau pour nous tous. Expliquez-nous les défis que doit relever le petit exploitant agricole typique de l'Ukraine et sa détermination à continuer de nourrir les Ukrainiens et, en fait, de nourrir le monde malgré ces défis.
Autrement dit, je veux vous donner l'occasion de nous faire part de la fierté que vous inspirent les agriculteurs ukrainiens.
Je vous remercie.
:
[
Le témoin s’exprime en ukrainien et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
En effet, nous sommes très fiers de nos agriculteurs ukrainiens. Ils n'ont pas abandonné. Ils travaillent dur tous les jours. Soixante-quinze pour cent des terres ont été labourées et sont cultivées. Nous voyons qu'ils travaillent parfois à quelques centaines de mètres seulement des zones bombardées.
Les petites exploitations font moins de 100 hectares. Selon les normes européennes, ce sont de grandes exploitations, mais selon les normes ukrainiennes, ce sont de petites exploitations.
Nous avons reçu une promesse d'aide de la part de l'Union européenne. Il y aura une indemnisation par hectare, car nos agriculteurs travaillent dans des conditions plus difficiles que d'autres. Ils ont moins accès aux prêts des banques, entre autres. Ces agriculteurs recevront une aide en août et septembre de la part de l'Union européenne.
:
Merci beaucoup, monsieur Louis.
Merci, monsieur le ministre.
C'est tout pour notre première discussion.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire du fond du cœur une chose que vous avez déjà entendue, en mon nom, et au nom de tous mes collègues, qu'ils soient présents ou non, et c'est que nous sommes à vos côtés. Merci beaucoup d'avoir pris le temps de vous joindre à nous pour apporter ce témoignage important. Nous nous engageons envers vous à formuler, dans le sillage de notre étude, des recommandations à l'intention de notre gouvernement sur la meilleure façon d'aider l'Ukraine.
Vous avez dit dans votre témoignage que vous allez effectivement travailler avec notre honorable ministre, . Nous serons ravis de lui apporter notre soutien, ainsi qu'au gouvernement, afin de trouver la meilleure façon de vous aider, vous et votre peuple. Comme vous l'avez mentionné, nous sommes très fiers de vos héroïques et courageux agriculteurs.
Nous allons nous arrêter là. Passez une excellente soirée. Merci infiniment.
[Applaudissements]
:
Chers collègues, merci beaucoup. Comme je l'ai dit, nous reprenons très rapidement.
Pour notre deuxième heure, nous accueillons, du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, Peter MacDougall, sous-ministre adjoint, Enjeux mondiaux et développement.
Bienvenue, monsieur MacDougall. Merci d'être parmi nous. Nous nous excusons sincèrement pour le retard. C'est parfois la nature de la procédure à la Chambre des communes, mais nous vous remercions d'avoir accepté de rester.
Nous accueillons également Tara Denham, directrice générale de l'Équipe d'action stratégique pour l'Ukraine.
Vous avez un maximum de cinq minutes pour votre déclaration liminaire, puis nous passerons aux questions.
Bien sûr, nous venons tout juste d'entendre le ministre Solskyi, qui nous a livré un témoignage percutant. Nous savons que vous allez suivre de près toute cette question. Je vous laisse présenter votre déclaration liminaire, puis nous passerons aux questions.
Monsieur MacDougall, c'est à vous.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Votre étude sur l'insécurité alimentaire mondiale tombe à un moment opportun, car le monde est vraiment plongé dans une grave crise alimentaire.
Après des décennies de déclin constant, la tendance concernant le problème de la faim dans le monde s'est inversée depuis 2015, principalement en raison des changements climatiques, des conflits, de la pandémie de la COVID‑19 et des ralentissements économiques.
En 2020, avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie, l'insécurité alimentaire avait déjà atteint des niveaux records. On estime que 800 millions de personnes ont faim. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a énormément aggravé la situation et s'avère être le plus grand choc pour le système alimentaire mondial depuis la crise alimentaire de 2008‑2009. Selon la Banque mondiale, 40 millions de personnes supplémentaires dans le monde risquent de souffrir de la faim en raison de cette invasion.
Le ministre ukrainien a mentionné l'importance des engrais, qui constituent également une question cruciale. Les exportations de la Russie comptent pour 14 % des exportations mondiales d'engrais, et 25 pays sont fortement dépendants des engrais provenant de la Russie et du Bélarus. Cette situation, combinée à la hausse du prix des carburants, a entraîné une inflation considérable du prix des engrais. Entre avril 2020 et mars 2022, les prix des engrais à l'échelle mondiale ont augmenté de 220 %, ce qui représente leur plus forte augmentation sur deux ans depuis 2008.
Selon un avertissement de la Banque africaine de développement, la production alimentaire du continent pourrait baisser de 20 %, parce que les agriculteurs africains doivent payer 300 % plus cher les engrais qu'ils importent.
[Traduction]
Ensemble, la Russie et l'Ukraine sont responsables d'environ 15 % des exportations mondiales de céréales. Des pays sont confrontés à un risque immédiat en raison des perturbations qui ont suivi l'invasion, et un bon nombre d'entre eux se trouvent déjà dans une situation critique, entre autres le Yémen, la Mauritanie et Madagascar.
Cependant, outre la perturbation des approvisionnements, l'invasion russe de l'Ukraine a des répercussions majeures sur le prix des aliments. L'inflation des prix des aliments est désormais la principale préoccupation, car ces prix ont atteint des sommets historiques et dépassent les prix de toutes les crises alimentaires antérieures remontant aux années 1970. En mars, les prix des aliments dans le monde ont atteint un sommet jamais égalé. Ils étaient 30 % plus élevés qu'en janvier et plus de 60 % plus élevés qu'avant le début de la pandémie.
La Banque mondiale estime que pour chaque point de pourcentage d'augmentation des prix des denrées alimentaires, il s'ajoute 10 millions de personnes en situation d'extrême pauvreté dans le monde. L'insécurité alimentaire et la malnutrition atteignent des niveaux intenables dans des régions et des pays tels que le Sahel, le Yémen, le Soudan et Haïti.
La hausse des prix des aliments pourrait également déclencher une nouvelle vague d'instabilité politique. La ministre a souligné que les récents troubles et manifestations au Sri Lanka, au Pakistan, en Tunisie, au Soudan, en Irak et au Pérou sont liés en partie à l'aggravation de la crise alimentaire.
La Russie porte une responsabilité particulière dans la crise mondiale de la sécurité alimentaire. Elle s'est attaquée à l'un des greniers du monde et elle anéantit la capacité de l'Ukraine de fournir au monde des produits agricoles essentiels tels que le blé, l'huile de tournesol, les graines de tournesol et l'orge. Avant la guerre, l'Ukraine exportait 95 % de ses céréales en les acheminant par la mer Noire. La Russie bloque les ports ukrainiens et empêche ainsi l'exportation de céréales et d'autres marchandises, en plus de bombarder les lignes ferroviaires utilisées pour atteindre les ports de remplacement en Roumanie et ailleurs.
La Russie restreint aussi l'accès à ses propres produits agricoles et engrais. L'invasion russe a mis en évidence la nécessité de veiller à ce que le Canada et les autres donateurs ne se contentent pas de fournir une aide humanitaire à court terme pour répondre à cette crise. Nous devons également intensifier nos efforts pour rendre les systèmes alimentaires plus résilients face aux changements climatiques, aux conflits et autres bouleversements.
En 2021, le soutien du Canada à l'agriculture et aux systèmes alimentaires durables a atteint son plus haut niveau en plusieurs décennies. Cette augmentation est attribuable à des investissements à grande échelle dans l'agriculture et les systèmes alimentaires par l'intermédiaire de notre programme de financement de la lutte contre les changements climatiques, en collaboration avec des organisations telles que l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO, et le Fonds international de développement agricole, ou FIDA.
La crise actuelle place la sécurité alimentaire au premier plan des discussions internationales. Nous nous concertons au sein du G7 et d'autres forums multilatéraux pour assurer une réponse cohérente et coordonnée avec d'autres partenaires.
Je vous remercie, monsieur le président.
:
Merci beaucoup, monsieur MacDougall.
Je n'ai pas d'autres intervenants.
Madame Denham, je pense que vous êtes ici pour répondre aux questions. Je vous remercie. Je vous vois hocher la tête.
Je vais donc passer directement aux questions.
Nous allons commencer par le Parti conservateur.
Monsieur Falk, c'est à vous. Vous disposez de six minutes.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les fonctionnaires de bien vouloir prolonger leur journée pour nous et de nous fournir ce témoignage utile.
Au début de la semaine, une députée ukrainienne, Yulia Klymenko, nous a dit croire qu'il existe un plan qui vise à créer cette pénurie alimentaire et cette crise, provoquant ainsi une migration massive des pays d'Afrique du Nord, des pays asiatiques et des pays arabes vers la zone européenne, le but étant de déstabiliser politiquement cette zone en submergeant son système social. Vous semblez laisser entendre que vous adhérez peut-être à cette idée, monsieur MacDougall. Est‑ce exact?
:
Permettez-moi de répondre à cette question sous deux ou trois angles différents.
Tout d'abord, en ce qui concerne notre réponse à l'échelle internationale, nous avons versé plus de 500 millions de dollars en aide humanitaire, dont la grande majorité en aide alimentaire à divers pays, dont plusieurs que vous avez mentionnés. Nous avons également investi plusieurs centaines de millions de dollars — et d'autres investissements sont prévus plus tard dans l'année — dans des systèmes alimentaires partout dans le monde. En Ukraine, plus précisément, nous avons, depuis le début du conflit, fourni 245 millions de dollars pour l'intervention humanitaire en Ukraine. La grande majorité de ces fonds ont été versés à l'Ukraine. Près de 100 millions de dollars sont destinés à de l'aide alimentaire et financière directe. D'autres montants serviront à soutenir les réfugiés ukrainiens dans les pays voisins.
Madame Denham, vous souhaitez peut-être ajouter quelque chose.
:
Certainement. Si vous me le permettez, je vais ajouter quelques éléments à la réponse de M. MacDougall.
Nous avons un programme d'aide bilatérale au développement avec l'Ukraine depuis longtemps, et nous avons donc déjà des liens et des fonds pour les organisations locales.
L'une des premières mesures que nous avons prises a été de rendre ce programme le plus souple possible afin que toutes les organisations qui travaillent en Ukraine puissent adapter et modifier leurs activités de projet, être flexibles et répondre aux besoins.
En ce qui concerne certaines des activités concrètes qui ont eu lieu — j'en ai parlé rapidement dans ma réponse précédente —, six coopératives laitières reçoivent actuellement du soutien. Il s'agit d'aider à fournir le fourrage et à collecter et à traiter le lait. C'est financé par le Canada. Nous avons également soutenu la distribution de semences de pommes de terre à plus de 2 600 agriculteurs de l'Ouest de l'Ukraine, afin de les aider à semer et à accéder à de plus petites parcelles de terre. Nous soutenons également une coopérative de transformation laitière. C'est une autre coopérative qui est financée considérablement par le Canada.
:
Je vous remercie, monsieur Falk. Votre intervention a duré exactement six minutes.
Je vous remercie, madame Denham.
Je voudrais aussi souhaiter la bienvenue à Mme Lianne Rood, qui remplace M. Barlow.
Nous sommes heureux que vous soyez de retour au sein du Comité. Vous en avez fait partie au cours de la 43e législature; l'agriculture ne vous est donc pas inconnue. Bienvenue.
Nous accordons la parole à M. Turnbull pour six minutes.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie nos témoins d'aujourd'hui. Quelle excellente réunion.
Je veux commencer par une question.
Je sais, monsieur MacDougall, que vous avez commencé votre allocution d'ouverture en dressant une liste de pays touchés. Ce matin, nous avons eu l'occasion d'entendre Beth Bechdol, directrice générale de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, ou FAO, qui a fourni des renseignements sur les zones où l'insécurité alimentaire est la plus criante.
Je me demande si vous pourriez nous informer sur les pays où l'approvisionnement en aliments est le plus touché par la guerre illégale que la Russie mène en Ukraine.
:
C'est une excellente question.
Voici comment nous fournissons de l'aide humanitaire. Nous commençons l'année avec un certain montant d'argent, qui s'élève à un peu plus de 600 millions de dollars. Nous en affectons une bonne partie au début de l'année. Quand de nouvelles crises ou de nouveaux besoins émergent, nous pouvons recourir à un certain nombre de mécanismes pour augmenter le financement.
J'ignore si nous réagirions directement à l'inflation ou répondrions directement à un appel parce que les besoins ont augmenté. Comme nous l'avons fait dans le cas de l'Ukraine, au fur et à mesure que de nouveaux appels sont lancés, nous augmentons les sommes disponibles.
:
Je faisais référence à ce que vous avez dit, je pense, sur le fait que pour chaque point de pourcentage d'augmentation du prix des aliments, environ 10 millions de personnes se retrouvent en situation d'insécurité alimentaire. Il me semble donc que le Canada pourrait moduler son aide en fonction de l'inflation des prix des aliments dans le monde. Ce serait une manière intéressante de procéder.
Je vous remercie de cette réponse.
Monsieur, il me reste une minute? D'accord.
À quoi d'autres Affaires mondiales travaille‑t‑il afin d'aider le peuple ukrainien? Je vous ai interrogés sur les effets de l'insécurité alimentaire causée par la guerre dans le monde. Nous comprenons également que des personnes en Ukraine souffrent d'insécurité alimentaire. Je pense que la FAO a indiqué ce matin que l'Ukraine fait maintenant partie des pays les plus touchés par l'insécurité alimentaire sur sa carte des zones à risque.
Que pouvons-nous faire de plus, selon vous? Je sais que vous avez déjà énuméré ce que nous avons fait, mais que comptons-nous faire de plus?
:
Je vous le dirai volontiers.
Je dirais que compte tenu des sommes que nous avons fournies à l'Ukraine, nous sommes un des principaux donateurs au chapitre de l'aide humanitaire. Comme je l'ai indiqué, nous continuons de fournir près de 10 millions de dollars en aide alimentaire directe et 140 millions de dollars de plus pour soutenir d'autres composantes de l'intervention humanitaire.
Les fonds que le Canada et d'autres pays fournissent ne combleront jamais les besoins, et c'est autant le cas en Ukraine que dans n'importe quelle autre crise qui sévit dans le monde. L'Ukraine est le pays qui a reçu le plus de financement au chapitre de l'aide humanitaire après l'appel des Nations unies, et le Canada joue un rôle de premier plan à cet égard. À mesure que les Nations unies lancent de nouveaux appels, nous évaluerons très soigneusement la situation et proposerons une intervention au gouvernement.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être avec nous ce soir, malgré la prolongation de la réunion.
J'aborderai d'abord ce que le ministre a soulevé tantôt, à savoir l'importance du corridor sécuritaire pour permettre l'exportation des grains ukrainiens. Je pense que cela doit être le centre de notre intérêt, à tout le moins à court terme, pour essayer de débloquer la situation.
Avez-vous de l'information sur l'état de la situation? Que peut faire le Canada pour aider au déblocage ou à la création de ce corridor? A-t-on un contrôle sur les négociations, ou doit-on simplement attendre que cela débloque?
:
Monsieur le président, je remercie le député de sa question.
[Traduction]
J'expliquerai les deux manières dont nous pouvons faire passer le grain ukrainien.
Tout d'abord, comme le ministre l'a indiqué, il faudrait conclure une sorte d'entente pour rétablir l'accès à la mer Noire. À cet égard, les Nations unies dirigent un processus pour tenter de négocier une entente entre la Russie et l'Ukraine.
L'autre solution, mise en œuvre principalement par l'Union européenne, consisterait à transporter le grain par voie ferroviaire ou par la route jusqu'aux ports de la mer Baltique, c'est‑à‑dire en Pologne et en Roumanie. Comme le ministre l'a souligné, cette solution est sous-optimale, car on ne pourra jamais transporter ainsi les volumes que l'on envoie par la mer Noire. C'est réellement l'Union européenne qui est responsable de cette initiative, établissant un mécanisme de jumelage qui permettra aux entreprises canadiennes de participer au processus.
Pour ce qui est de dire comment le Canada peut intervenir directement, nous avons reçu des demandes du gouvernement de l'Ukraine — le ministre en a mentionné quelques-unes aujourd'hui — afin de régler les problèmes d'exportation. L'Ukraine nous a demandé de l'aide pour ajouter des entrepôts à grains supplémentaires et fournir de l'équipement de laboratoire pour l'aider à établir des laboratoires dans les territoires reconquis, ce qui contribuera à faire sortir des exportations de l'Ukraine.
Nous collaborons très étroitement avec nos collègues d'Agriculture Canada pour examiner les détails de ces demandes et travaillons avec d'autres pays pour éviter les doublons ou les chevauchements. Nous continuons de travailler en ce sens et espérons en arriver à une résolution très bientôt.
:
Je commencerai à répondre, et peut-être que Mme Denham interviendra également.
[Français]
Je vous remercie de cette question.
[Traduction]
Le ministre a fort bien exposé la situation, expliquant que le temps compte et que si l'Ukraine ne dispose pas d'entrepôts supplémentaires au plus tard en septembre ou en octobre, les grains risquent de pourrir.
Je sais que de nombreux pays membres du G7 cherchent également à accroître le soutien et à fournir des espaces d'entreposage, et plusieurs partenaires souhaitent intervenir. La FAO, dont il a été question plus tôt aujourd'hui, pourrait apporter de l'aide à cet égard.
Je demanderai à Mme Denham si elle a quelque chose à ajouter.
:
J'ai une dernière question à vous poser.
On a évoqué le fait que la pénurie mondiale de grains ferait partie de la stratégie russe pour appliquer de la pression à moyen et à long terme, faire des gains et obtenir des concessions territoriales importantes. Que savez-vous de cela?
Quelle information avons-nous, ici, au sujet du phénomène des grains volés qui a été évoqué plus tôt? Les Russes tentent de créer un commerce parallèle de ces grains, directement ou en le mélangeant avec du grain russe.
A-t-on des données là-dessus? Pourra-t-on punir ultérieurement les gens qui auront profité de ce commerce? Est-il réaliste de penser que des pays africains dans le besoin refuseraient d'acheter ces grains? C'est une question très complexe.
:
Je vous remercie de cette question.
Dans le premier cas, étant donné que les Russes bloquent les ports ukrainiens et imposent des restrictions sur leurs propres produits agricoles, je pense qu'il est juste de dire qu'ils essaient d'utiliser les aliments comme armes de guerre. En ce qui concerne les grains volés, nous avons probablement vu les mêmes preuves que vous montrant, comme le ministre l'a indiqué, que ces grains ont été volés et auraient refait surface en Syrie et dans d'autres pays.
Selon le pays qui reçoit les grains — et la Syrie pourrait être un bon exemple —, le Canada ou même d'autres pays auraient bien peu d'influence sur la volonté d'accepter les grains volés.
Vous avez souligné un point très important: le fait que la Russie utilise les grains pour diviser. L'exemple donné par le ministre de la visite du président du Sénégal en Russie montre que de nombreux pays africains sont vulnérables.
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Monsieur MacDougall, nous avons entendu non seulement Mme Klymenko, la députée, mais aussi le ministre de l'Agriculture nous dire que l'Ukraine a avant tout besoin d'armes de guerre pour mettre fin au conflit. Par la suite, c'est d'entrepôts à grains dont elle a immédiatement besoin, car ses installations sont pleines.
Je ne peux qu'imaginer les défis logistiques. D'une part, nous devons tenter de faciliter l'exportation des grains de l'Ukraine, et de l'autre, nous essayons de trouver des moyens de lui faire parvenir l'équipement militaire dont elle a tant besoin, ainsi que du matériel agricole important.
Comment le Canada compose‑t‑il avec ce qui doit être, j'imagine, un cauchemar logistique?
:
Je vous remercie pour la question.
Je peux commencer, si vous le voulez bien, monsieur MacDougall.
Comme je l'ai déjà dit, nous examinons différents moyens de répondre à la demande de l'Ukraine. Ces moyens comprennent l'offre de matériel de laboratoire et d'entrepôts à grains, et ils s'ajoutent aux autres mesures que nous prenons pour soutenir les agriculteurs de la région. La FAO compte parmi les organisations avec lesquelles nous travaillons très étroitement, et nous voulons continuer à collaborer avec elle exactement pour les raisons que vous venez de donner: elle sait comment travailler dans la région, elle connaît les exigences et elle comprend les critères de laboratoire. C'est un des groupes avec lesquels nous continuerons de travailler.
:
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'avoir prolongé leur journée pour se joindre à nous.
J'ai manqué la séance d'information de la FAO ce matin parce que j'étais à Winnipeg hier soir pour célébrer la retraite de M. Jim Cornelius, qui a travaillé pendant 24 ans à la Banque canadienne de grains. Je peux maintenant dire que je me suis trouvé des deux côtés du partenariat entre le gouvernement du Canada et la Banque canadienne de grains. Je connais bien ce partenariat de financement, qui remonte à 1983, ainsi que la relation entre le gouvernement et la Banque canadienne de grains et d'autres organismes.
Pouvez-vous contextualiser certains chiffres? Il a été mentionné plus tôt que le Canada est le troisième contributeur en importance de la Convention relative à l'assistance alimentaire internationale, derrière les États-Unis et l'Union européenne. Vous avez parlé d'un financement de base de 100 millions de dollars, si j'ai bien compris, et vous avez dit que 140 millions de dollars avaient été versés à l'Ukraine, sur un total de 600 millions de dollars. Ou alors, est‑ce que les 600 millions de dollars sont les fonds de base destinés à l'aide humanitaire, et les autres montants s'y ajoutent?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui pour nous parler de ce dossier important. Étant née en Afrique, je tiens à vous remercier pour tout le travail que vous faites afin de venir en aide aux gens de mon continent d'origine, ainsi qu'à la population de l'Ukraine.
Ma question s'adresse à M. MacDougall. Le ministre ukrainien nous a dit aujourd'hui que les agriculteurs faisaient face à plusieurs défis. Entre autres, ils sont obligés de se plier aux lois russes et de s'inscrire à titre d'entreprises russes. Quelles mesures, le cas échéant, sont-elles prises pour s'attaquer à ces défis?
:
De nombreux pays ont redoublé d'efforts. J'ai déjà décrit la réponse du Canada. Pour leur part, les États-Unis ont augmenté considérablement leurs investissements: ils se sont engagés à verser 11 milliards de dollars sur 5 ans pour soutenir le réseau alimentaire, la sécurité alimentaire et la nutrition partout dans le monde. De son côté, le Royaume-Uni a fait de nouveaux investissements de 10 millions de dollars, et les Pays-Bas et l'Italie aussi.
En plus d'avoir affecté près de 1 million d'euros à l'approvisionnement local en produits alimentaires, l'Allemagne, qui organise le Sommet du G7, a mobilisé les intervenants en vue de créer une alliance mondiale pour la sécurité alimentaire, à laquelle participent nos ministres.
Quant à la France, elle pilote une mission pour la résilience du secteur agricole, qui a pour but d'assurer la cohérence et la coordination des politiques, ainsi que de coordonner les investissements dans le soutien alimentaire.
En outre, il y a toute la gamme d'acteurs de l'ONU, y compris le Programme alimentaire mondial et la FAO, dont on a déjà parlé, ainsi que le Fonds international de développement agricole et nombre d'autres institutions de l'ONU, en plus du système d'institutions financières internationales.
Comme vous le savez, en plus de fournir activement du soutien supplémentaire à l'Ukraine, le Canada a investi dans la Banque mondiale et dans des banques de développement régionales. Ces banques, en particulier la Banque africaine de développement, ont redoublé d'efforts pour répondre à la crise alimentaire: elles ont accordé des prêts et des subventions à des pays se trouvant dans des situations critiques.
:
Merci, monsieur le président.
Nous parlons beaucoup de l'insécurité alimentaire mondiale. Bien sûr, la situation en Ukraine est très préoccupante, mais la crise alimentaire qui s'annonce au mois d'août est aussi extrêmement préoccupante. Cela m'inquiète beaucoup.
Avons-nous une prise de position, une stratégie ou un plan d'action multilatéral à cet égard pour combler les besoins en matière alimentaire ou pour venir en aide aux pays africains qui pourraient vivre une famine?
Pouvez-vous nous parler de cet aspect, s'il vous plaît?
:
Je vous remercie pour la question.
Je dirais qu'il y a déjà une crise alimentaire et qu'elle pourrait s'amplifier avec le temps, surtout s'il n'y a pas de changement par rapport non seulement aux exportations ukrainiennes, mais aussi aux exportations russes, qui sont restreintes.
Quelle est la stratégie du Canada et, je crois, de nombre d'autres donateurs? La stratégie est toujours de fournir du soutien et de faire des investissements pour répondre aux besoins humanitaires. Le Canada continuera à prendre de telles mesures.
Je m'attends à ce qu'à l'occasion du Sommet du G7, les pays annoncent de nouveaux engagements et de nouveaux investissements pour répondre à la fois à la situation en Ukraine et à la crise mondiale de la sécurité alimentaire en découlant. Je pense qu'il y aura de nouveaux investissements. De plus, la communauté internationale, pilotée par l'ONU, mobilise les pays et les institutions financières internationales en vue de dresser un plan d'action commun. D'après moi, dans quelques semaines, le G7 prendra des mesures concrètes à cet égard.
:
Merci, monsieur MacDougall.
Merci, monsieur Perron.
M. MacGregor a cédé ses deux minutes et demie. Étant votre président, je n'ai pas eu l'occasion de poser quelques questions, alors si vous me permettez de prendre deux ou trois minutes, je le ferai.
Merci, monsieur MacDougall et madame Denham.
La ministre et Mme Klymenko nous ont parlé du ciblage explicite de la station de recherche sur la sélection des végétaux à Kharkiv. Des représentants de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO, nous ont dit ce matin que des travaux sont en cours pour tenter de sauver, je dirais, ces 160 000 variétés différentes et types de sélection végétale.
Je ne peux que supposer qu'il est extrêmement important de reconstituer ce stock. Nous savons à quel point la recherche a été importante au Canada pour mettre au point des variétés résistantes aux intempéries et même du canola et différentes variétés de ce genre. Êtes-vous au courant de cela et y a‑t‑il quelque chose que le Canada puisse faire pour participer à la reconstitution de ce système? Est‑ce une situation dont AMC est au courant et qu'il examine?
J'ai deux autres questions rapides.
Monsieur MacDougall, vous avez mentionné de nombreuses initiatives différentes qui sont actuellement menées par les partenaires du G7 dans d'autres pays du monde. Qui aide à coordonner ces initiatives en ce qui concerne la sécurité alimentaire mondiale? Je sais que la FAO dispose d'une certaine capacité de réunir des personnes, mais y a‑t‑il un envoyé spécial?
Y a‑t‑il quelqu'un qui essaie de regrouper toutes les différentes initiatives pour aider à les coordonner et à les rationaliser? S'il n'y a personne, est‑ce que le Canada, avec sa vaste expertise dans le domaine de l'agriculture, pourrait désigner une personne qui agirait à titre d'envoyé spécial pour aider à coordonner les multiples efforts qui sont déployés?
:
Merci de ces remarques.
Je dirais qu'il y a un certain nombre de mécanismes et d'outils qui permettent aux pays de se réunir pour discuter de la question. L'un d'entre eux est un héritage de la crise de 2008‑2009, qui a été lancé par le G20, appelé le Programme mondial pour l'agriculture et la sécurité alimentaire, ou GAFSP, qui est un mécanisme d'assistance mondiale. Ce mécanisme est actif.
Les Américains, le secrétaire d'État Blinken, et les pays convoqués... et la ministre Joly ont participé à l'ONU il y a quelques semaines. Les Nations Unies jouent un rôle de coordination. Un certain nombre de pays ont désigné des envoyés spéciaux.
Je dirais que la coordination globale est encore émergente, mais le G7 joue actuellement un rôle essentiel pour rassembler les donateurs — les pays du G7 et d'autres.
Comme vous pouvez l'imaginer, c'est une négociation très délicate à laquelle les Nations Unies, les Turcs et, à un moment donné, la Russie et l'Ukraine devront se livrer, si ce n'est déjà fait. Nous suivons la situation de très près, principalement par l'entremise d'un groupe de travail du G7 dont je fais partie, mais notre ambassadeur en Ukraine suivra également la situation de très près, tout comme l'ambassadeur Rae. En fait, nous avons eu des discussions à ce sujet lorsque la ministre Joly était à New York il y a quelques semaines.
C'est la négociation qui offre vraiment les plus grandes promesses pour ce qui est des volumes, mais c'est la plus difficile sur le plan politique. Il existe également des risques de sécurité très évidents.
:
Chers collègues, merci beaucoup de m'avoir permis de poser quelques questions.
Monsieur MacDougall et madame Denham, merci de votre participation. Nous avons un peu dépassé le temps, mais vos témoignages ont été très utiles dans le cadre des travaux que nous menons.
Et merci car le travail que vous faites est extrêmement important. Il se rattache à tout ce dont nous avons discuté au cours des deux dernières heures.
Sur ce, chers collègues, nous laisserons à tous l'occasion de profiter de leur soirée.
Nous vous reverrons lundi.