Bienvenue à la 28e séance du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes. Je vais commencer par quelques rappels.
La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride. Les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes. Sachez que la webdiffusion montrera toujours la personne qui parle et non l'ensemble du Comité. Les saisies d'écran ne sont pas permises et, bien sûr, il faut suivre les lignes directrices du Bureau de la régie interne en matière de santé.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 30 mai 2022, le Comité reprend son étude sur l'insécurité alimentaire mondiale, dossier que nous étudions depuis juin, mais nous l'abordons maintenant suivant une perspective nationale.
Je souhaite la bienvenue aux témoins de ce premier groupe, tandis que trois autres de trouvent dans la salle.
Je vois la main levée de M. Perron, et je veux lui dire qu'il y a eu des vérifications de son à l'avance pour les services d'interprétation. Le test n'a pas fonctionné pour M. Lemaire, mais tous les autres témoins ont réussi. M. Lemaire a dû se déplacer sur place à la dernière minute et il a oublié son casque d'écoute de la Chambre des communes. Il fait partie du deuxième groupe. Si les services d'interprétation ne sont pas satisfaisants dans ces conditions et que ses écouteurs-boutons ne fonctionnent pas, il ne pourra malheureusement pas participer. Tous les autres ont été acceptés.
Je vais commencer par le premier groupe de témoins.
À l'écran, nous avons M. Evan Fraser, directeur du Arrell Food Institute de l'Université de Guelph, qui se joint donc à nous par vidéoconférence.
De Cereals Canada, nous accueillons Mark Walker, vice-président, Marchés et commerce. M. Walker se joint à nous aujourd'hui en personne à Ottawa. Je suis heureux de vous voir, monsieur Walker.
Nous accueillons également M. Steve Webb, directeur général du Global Institute for Food Security. Il comparaît par vidéoconférence depuis Saskatoon. Monsieur Webb, c'est un plaisir de vous voir. J'ai eu l'occasion de me joindre à vous en avril, à Saskatoon, et j'apprécie grandement votre travail.
Nous allons vous accorder cinq minutes pour les déclarations préliminaires et comme nous avons peu de temps aujourd'hui en raison des votes, nous allons procéder le plus rapidement possible.
Je vais commencer par M. Evan Fraser.
Vous avez cinq minutes, monsieur.
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Merci de cette belle occasion.
Dans mes brefs commentaires, je me propose d'aborder quatre points à prendre en considération si nous voulons que le Canada se dote de technologies agroalimentaires de pointe qui lui permettront d'accroître ses exportations — question à laquelle on m'a demandé de réfléchir — tout en étant comme un chef de file mondial dans ce que nous appelons la « révolution de l'agriculture numérique », qui est une façon de s'attaquer aux changements climatiques. Nous cherchons des solutions gagnantes sur tous les plans.
La première est évidente: nous devons investir davantage dans nos infrastructures. Nul n'ignore que, de nos jours, les Prairies sont dans une situation quasiment unique à l'échelle planétaire pour ce qui est de leur capacité à produire des céréales et des oléagineux, ainsi que de protéines d'origine végétale ou animale. Ces productions sont expédiées de l'autre côté des Rocheuses par un très petit nombre de lignes de chemin de fer et, tous les deux ou trois ans, le service est perturbé.
Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai participé à une table ronde en compagnie du vice-président des opérations du port de Vancouver qui a parlé de la propagation des goulots d'étranglement, même à l'heure actuelle. La fragilité de notre système commercial empêche le Canada d'être le grenier du monde comme il le souhaite, et nous devons mettre davantage l'accent sur notre infrastructure de transport.
Le deuxième point consiste à créer des incitatifs financiers visant à récompenser les agriculteurs qui adoptent des pratiques de gestion destinées à atténuer les émissions de gaz à effet de serre et qui écoulent ensuite leurs produits sur les marchés mondiaux sous le label d'agriculture durable. En adoptant ce que certains d'entre nous appellent l'agriculture régénératrice, c'est‑à‑dire en encourageant les agriculteurs à utiliser des rotations de cultures plus complexes permettant de limiter les rejets de gaz à effet de serre et en utilisant des tracteurs intelligents qui épandent les engrais de façon très efficace, l'agriculture peut devenir une source de solution climatique plutôt qu'une source d'émissions de gaz à effet de serre. Cela nous permettra de bâtir une marque mondiale synonyme de durabilité qui sera un avantage commercial dans un monde de plus en plus préoccupé par le climat.
Sans trop en dire, le 25 octobre, mon institut, l'Arrell Food Institute, de concert avec le bureau du PDG de la Banque Royale et le Boston Consulting Group, publiera le premier opuscule d'une série de rapports traitant de cette question. La conclusion de ce travail est que nous avons besoin d'un mécanisme fédéral de tarification du carbone prenant en compte l'agriculture afin d'inviter les agriculteurs à faire ce qu'il faut et de nous doter d'une base sur laquelle bâtir une image de marque commerciale durable.
Troisièmement, pour produire des aliments, nous devons former les bonnes personnes, ce qui nous oblige à régler le problème de la pénurie de main-d'œuvre. Autrement dit, nous devons investir dans des programmes de formation et donner une nouvelle image de l'agriculture, afin de faire abandonner l'idée fausse et populaire selon laquelle l'agriculture est synonyme de chapeaux de paille et de granges rouges pour faire comprendre que le futur agriculteur est à même de porter une blouse de laboratoire et de conduire un tracteur. L'agriculture fait partie de l'économie de l'innovation, et nous devons investir dans notre programme de formation. Si le Canada veut accroître ses exportations à long terme, nous avons besoin d'une main-d'œuvre qui maîtrise la technologie et qui soit est prête à contribuer à l'innovation.
Quatrièmement, et dernièrement, nous devons investir dans les outils de ce que certains d'entre nous appellent la « révolution de l'agriculture numérique ». Les mêmes outils qui nous ont donné le téléphone intelligent et transformé la médecine se retrouvent aujourd'hui dans les étables et les installations de transformation des aliments, à l'instar de l'agriculture en milieu contrôlé, de l'agriculture verticale et des robots de récolte et de traite. Cette technologie nous permet d'accroître la production tout en réduisant les intrants, de disposer d'installations de traitement plus efficaces et d'emballages intelligents. Ce n'est que la partie émergée de l'iceberg des possibilités que la technologie représente pour nous.
Je pense que le Canada doit être à la tête de cette vague d'innovation. Pour ce faire, nous devrions créer des centres d'innovation en technologie agricole, accorder à certaines régions un statut fiscal et d'immigration préférentiel, accorder des autorisations d'aménagement du territoire et des tarifs concurrentiels pour les services publics, cela pour faire germer une Silicon Valley canadienne dans le domaine alimentaire.
Il se fait déjà beaucoup de bonnes choses dans le monde et dans notre pays. Je songe, par exemple, au partenariat public-privé géré par la Fondation de la famille Weston dont l'objet est de favoriser une réflexion novatrice sur ces technologies dans notre pays.
Je conclurai en rappelant mes quatre points: l'amélioration de notre infrastructure de transport; la création de marchés du carbone et d'une marque mondiale sur le thème du développement durable; la formation de la prochaine génération qui maîtrisera la dimension technologique de cette révolution de l'agriculture numérique, et la création de zones d'innovation en technologie agricole.
Ces quatre stratégies nous permettraient d'accroître les exportations à long terme et de donner vie à la vision que le Conseil consultatif sur la croissance économique, soit le rapport Barton, nous a donnée en 2016. Selon cette vision, le Canada devrait être le fournisseur mondial fiable d'aliments salubres et durables au XXIe siècle.
Sur ce, je vous remercie et je vous invite à me poser vos questions, ou à disposer de moi comme vous l'entendrez, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président et distingués membres du Comité. Je vous remercie de m'accueillir ici aujourd'hui.
Je m'appelle Mark Walker, et je suis vice-président, Marchés et commerce à Cereals Canada.
Cereals Canada est une association industrielle nationale de promotion du blé, du blé dur, de l'orge et de l'avoine au Canada. Nos membres représentent une chaîne de valeur complète allant des agriculteurs aux centres de développement des cultures en passant par les manutentionnaires et les exportateurs de grains.
Nos membres s'intéressent principalement aux avantages découlant d'une croissance axée sur les exportations et facilitée par l'accès à divers marchés mondiaux. Les céréales canadiennes sont des produits alimentaires de base exportés aux quatre coins du monde. Au cours des cinq dernières années, les exportations canadiennes de blé ont été écoulées dans plus de 80 pays. Au cours d'une année moyenne, les agriculteurs canadiens plantent 35 millions d'acres de céréales, ce qui se traduit par 27 millions de tonnes d'exportations et des recettes d'exportation de plus de 9 milliards de dollars.
Depuis des générations, les agriculteurs canadiens cultivent des produits qui nourrissent la planète. La demande alimentaire a progressé tandis que la population mondiale augmentait. Les producteurs de céréales du Canada ont relevé ce défi en adoptant des pratiques novatrices tout en augmentant la capacité de notre pays de produire pour nous-mêmes et pour l'exportation. L'amélioration des variétés de semences a permis d'accroître le rendement dans l'ensemble de notre industrie, et les nouvelles technologies de production des cultures ont permis aux producteurs de cultiver leurs cultures plus efficacement tout en réduisant leur empreinte écologique.
Dans les années 1980, les rendements de blé s'élevaient en moyenne à 27 boisseaux à l'acre sur 27 millions d'acres ensemencés. Tandis que la superficie ensemencée en blé a chuté à 15 millions d'acres, nos rendements ont augmenté pour atteindre plus de 50 boisseaux à l'acre. La précision et le succès des exploitations agricoles d'aujourd'hui sont le résultat de décennies de réglementation habilitante, d'investissements dans la recherche et d'une volonté d'innover. Le rôle du gouvernement dans ces progrès est à la fois remarquable et grandement apprécié.
Notre industrie s'efforce de gérer des saisons de croissance de plus en plus caractérisées par l'alternance de périodes de sécheresse et d'humidité excessive, ainsi que par un climat instable, tout en cherchant à assurer une production uniforme pour l'exportation, et il convient de souligner le rôle continu que le gouvernement doit jouer dans ce domaine.
Nous croyons que le succès des exportations commence chez nous, par une production alimentaire canadienne durable. Les agriculteurs doivent pouvoir compter sur des règlements fondés sur la science qui soutiennent la productivité, la fiabilité et la qualité des exportations canadiennes. Un environnement commercial facilitant la production et l'exportation de produits agricoles canadiens est essentiel pour renforcer la contribution du Canada à la sécurité alimentaire mondiale dans les prochaines années.
Hors de nos frontières, l'industrie et le gouvernement peuvent également collaborer à des initiatives de développement des marchés et d'accès aux marchés afin de cultiver des possibilités de croissance et de diversification dans plus de 80 marchés clients de céréales canadiennes.
Cereals Canada abrite une équipe d'experts spécialisés dans le maintien des marchés, le développement des marchés, l'accès aux marchés et la politique commerciale. Notre équipe d'experts représente sans relâche l'industrie céréalière canadienne partout dans le monde auprès de nos clients internationaux et d'autres gouvernements nationaux afin de veiller à ce que les céréales canadiennes aboutissent sur les marchés mondiaux de la façon la plus efficace possible. Quand des obstacles surgissent, nous nous montrons proactifs dans la recherche de solutions.
Le programme Agri-marketing d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, dont nous bénéficions depuis plus d'une décennie, joue un rôle clé dans ce travail. Tandis que nous diversifions nos marchés internationaux pour le blé, l'orge et l'avoine, nous continuerons de nous tourner vers ce programme extrêmement important pour tirer parti de nos réussites et faire progresser la sécurité alimentaire dans le monde.
Outre notre équipe des marchés et du commerce, l'équipe d'experts techniques de Cereals Canada travaille avec des clients internationaux pour veiller à ce que ceux‑ci tirent le meilleur parti possible des céréales canadiennes. Un peu partout dans le monde, le blé canadien contribue à améliorer la production de ce type de céréale. Le fait de mélanger le blé canadien avec des substituts de moindre qualité et à faible teneur en protéines améliore la fonction et l'utilisation lors de la fabrication de produits alimentaires pour les clients. Dans un contexte caractérisé par la hausse du coût des aliments et la perturbation des approvisionnements, nos experts travaillent avec des clients internationaux sur la façon d'utiliser le blé canadien à sa valeur maximale.
Grâce à notre équipement et à notre expertise, nos équipes travaillent accompagnent les clients pour les aider à simplifier leurs processus de production. Par exemple, grâce à notre compréhension des besoins de divers clients, notre usine pilote au centre-ville de Winnipeg a aidé à réduire le nombre de cycles de mouture nécessaires pour produire la farine servant de base aux produits finaux de nos clients, ce qui a permis d'économiser des ressources et d'accroître l'abordabilité.
Plus tôt ce mois‑ci, les membres de la même équipe ont donné un atelier à l'African Milling School, au Kenya, pour aider à former des minotiers de partout en Afrique sur les pratiques exemplaires d'utilisation du blé canadien. La semaine dernière, nous avons accueilli un groupe de meuniers de blé dur d'Afrique du Nord pour discuter de la récolte de cette année afin de définir les attentes en matière de qualité pour leurs usines. Il y a plusieurs années, nous avons entrepris un important exercice de transfert de connaissances et avons ainsi contribué à ouvrir au Maroc une installation technique axée sur la production de blé dur, le procédé de mouture et le couscous.
De plus en plus, à la faveur des conversations que nous avons avec des clients du monde entier, nous constatons leurs préoccupations au sujet du resserrement des approvisionnements de blé et du rôle que notre organisation peut jouer pour relever ces défis. Au bout du compte, un environnement commercial plus solide, soutenu par des politiques nationales habilitantes, améliorera les contributions à la sécurité alimentaire mondiale tout en ouvrant de plus grandes possibilités de diversification pour le développement de l'économie canadienne.
Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Merci et bonjour, monsieur le président. Merci de m'avoir invité à comparaître.
Le Global Institute for Food Security est un partenariat entre le gouvernement, l'industrie et le milieu universitaire.
Je vais entamer mon témoignage par une affirmation d'une importance cruciale: l'insécurité alimentaire mondiale, c'est l'insécurité mondiale tout court.
Norman Borlaug a dit qu'on ne peut pas construire un monde pacifique avec des ventres creux et la misère humaine. Monsieur le président, cette déclaration n'a jamais été plus saisissante que maintenant.
La population mondiale croît rapidement. Nous avons un défi à relever: nourrir un monde en croissance avec des ressources limitées en terres, en eau et en nutriments, sans oublier les aléas de la nature ni les difficultés qui sont entièrement de notre fait, comme l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Tout cela menace la résilience du système alimentaire mondial et notre capacité à nourrir le monde durablement.
Ces problèmes ont néanmoins une solution. Le Canada fait partie d'une poignée de pays producteurs nets d'aliments, et sa production est durable sur les plans économique, environnemental et social. Nous avons la nourriture, le carburant et les engrais dont le monde a besoin, et notre secteur agricole et alimentaire est prêt à nourrir un monde en croissance. Toutefois, pour réussir, nous devons appuyer l'industrie par des politiques adaptées qui nous permettent de tirer parti des possibilités qui s'offrent à nous.
Les deux témoins précédents ont parlé du rapport Barton et décrit l'occasion qui se présente à nous. Le rapport est juste. Je voudrais donc recommander quatre politiques nationales possibles qui permettraient d'améliorer les exportations du Canada.
La première concerne l'innovation. Nous ne pouvons pas continuer à relever les défis d'aujourd'hui et de demain avec les outils et les technologies d'hier. Nous avons besoin d'innovation pour avoir le plus grand impact positif possible grâce à nos secteurs de l'agriculture et de l'alimentation. Malheureusement, l'apport du Canada en matière d'innovation ne produit pas le rendement sur les investissements que nous devrions pouvoir attendre.
Le plus récent rapport du Conference Board du Canada classe notre pays au huitième rang pour les investissements, mais au 23e pour les résultats obtenus. Nous devons remédier à cette situation en élaborant une stratégie nationale d'innovation cohérente et intégrée. L'innovation est un sport d'équipe, et nous ne pouvons plus nous concentrer sur la refonte d'une partie du système sans tenir compte de tous les secteurs concernés.
La prochaine politique que je préconise consiste à faire des investissements majeurs dans l'infrastructure. Nous ne pouvons pas recommander une politique visant à améliorer les exportations canadiennes sans tenir compte de l'infrastructure nécessaire, comme la connectivité sans fil en milieu rural, les ports et les réseaux ferroviaires. Les investissements dans les infrastructures permettront au Canada de demeurer concurrentiel et de regagner sa réputation de fournisseur fiable. Le Canada doit assumer tout cela.
La troisième recommandation concerne la modernisation de la réglementation par la création d'un cadre de réglementation transparent, prévisible, fondé sur la science, interactif et habilitant. Nos secteurs agricole et alimentaire souffrent de la complexité de la réglementation et des goulots d'étranglement qui limitent l'accès des producteurs et des consommateurs aux dernières innovations éprouvées. Un cadre de réglementation hautement fonctionnel constitue un avantage concurrentiel pour le Canada. Il renforce la confiance, tant au Canada qu'à l'étranger. Nous savons que c'est possible, mais il est inutile d'attendre une situation de crise pour aller de l'avant. Jetons dès maintenant les bases de la modernisation de notre régime de réglementation afin d'adopter une approche fondée sur la science qui appuie l'innovation.
La dernière recommandation que je soulignerai concerne la durabilité. Le Canada est l'un des producteurs alimentaires les plus durables au monde. Nous devons être fiers des progrès réalisés et du chemin parcouru.
À propos des changements dans les pratiques agronomiques, M. Fraser a parlé de l'agriculture régénératrice et notamment de la culture sans labour. L'épandage d'engrais à taux variable dans l'Ouest du Canada, et en particulier en Saskatchewan, a permis de faire augmenter de 22 % la superficie des terres utilisées pour la production annuelle, avec l'élimination de la jachère d'été. Fait remarquable, pour une même intensité de production, les agriculteurs de l'Ouest canadien ont, en 30 ans, réduit leur utilisation d'engrais azotés de 28 % par boisseau et par acre .
Lorsque nous envisageons des changements de politique, comme dans les discussions récentes sur la réduction des émissions provenant des engrais et, par extension, de l'utilisation des engrais, nous devons tenir compte des conséquences imprévues de ces politiques. À défaut de le faire, nous donnerons un portrait inexact de la durabilité de l'agriculture canadienne, ce qui suscitera la méfiance de la population à l'égard de notre système agricole résilient et durable. Cela nuira aux exportations. Il faut montrer la voie à cet égard. Le Canada ne devrait pas être à l'arrière-garde.
Dernier point que je soumettrai au Comité: nous devons réunir toutes les parties autour de la table pour relever ces défis. Le modèle de partenariat entre l'industrie, le gouvernement et le milieu universitaire du GIFS regroupe ce qu'il y a de mieux chez les trois intervenants pour faire progresser l'innovation. Nous devons tirer parti de la sagesse de toutes les parties prenantes.
En guise de conclusion, je tiens à vous remercier, monsieur le président, ainsi que les membres du Comité, de m'avoir invité et de m'avoir donné l'occasion de vous livrer mes réflexions. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci.
Le président: Trois sur trois. Bravo aux témoins pour le respect des limites de temps.
Chers collègues, comme les votes nous ont retardés, nous avons environ 45 minutes par groupe. Voici comment je vais procéder: chaque parti aura droit à un premier tour de six minutes, puis nous accorderons deux minutes et demie aux libéraux et aux conservateurs au deuxième tour.
Monsieur Barlow, pour les conservateurs, à vous l'honneur.
M. John Barlow (Foothills, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci aux témoins. Merci à eux de leur patience. Pour la tenue des votes, nous revenons à la normale, ce qui, hélas, retarde parfois les travaux des comités.
Ma première question s'adresse à M. Webb. Merci de ce que vous avez dit de la nécessité de fonder sur la science la prise de décisions et le régime de réglementation. À votre avis, la politique de réduction des émissions provenant des engrais serait-elle une décision ou une politique fondée sur des données scientifiques solides? Sinon, pourquoi?
M. Steven Webb: Je dirais que l'intention de la politique est bonne, dans le contexte de la réduction des émissions. Toutefois, l'approche ne tient compte que des normes d'émissions.
Nous devons adopter une approche holistique axée sur l'intensité de la production pour nous assurer un cadre stratégique qui donne des résultats économiques, environnementaux et sociaux propices à la durabilité. Les résultats que j'ai évoqués — l'augmentation de 22 % de la superficie cultivée et la réduction de 28 % de l'utilisation d'azote par boisseau et par acre — sont des données qui peuvent éclairer la politique pour garantir au Canada l'environnement le plus concurrentiel sur le marché mondial.
M. John Barlow: À ce sujet, je vous suis reconnaissant d'avoir dit que les producteurs ont déjà réduit l'utilisation d'engrais de 28 % dans de nombreuses régions du Canada.
Vous avez parlé du discours qu'on tient sur la question. Si la réduction des émissions est effectivement notre objectif, ce qui est très louable, n'aurait‑il pas été plus avantageux dans le discours, en tout cas pour nos producteurs, d'inviter les autres pays qui ont besoin de réduire leurs émissions à s'inspirer de ce qui se fait au Canada? « Nous sommes la norme par excellence. Comme nous avons déjà réduit la quantité d'engrais, intéressez-vous aux innovations et à la technologie du Canada et tirez des leçons de ses pratiques. » L'application de notre norme n'aurait-elle pas été un moyen plus efficace de réduire les émissions dans d'autres pays?
M. Steven Webb: C'est l'occasion pour le Canada de montrer la voie, de proposer ces innovations et d'en faire profiter les autres.
Tous les témoins qui comparaissent aujourd'hui devant le Comité adhèrent à l'Indice national de rendement agroalimentaire. Il s'agit d'une coalition qui regroupe plus d'une centaine organisations, dont des ministères fédéraux et provinciaux, des acteurs de l'industrie, petits et grands, et tous les groupes de producteurs. Evan Fraser et moi y représentons le secteur des organismes sans but lucratif. C'est une solution canadienne très intéressante. Elle permet de comparer les possibilités économiques, environnementales, sociales et d'intégrité alimentaire de façon à les mettre en valeur, et le Canada peut ainsi être un chef de file.
Nous ne devrions pas être à la remorque des autres, ni avoir honte de l'impact que l'innovation a eu sur l'agriculture.
La première fois que je suis venu dans l'Ouest du Canada, j'avais 14 ans. Près de la moitié des terres que j'ai vues alors étaient en jachère d'été. Ce n'est plus le cas, Dieu merci.
M. John Barlow: Merci, monsieur Webb.
Je m'adresserai maintenant à M. Walker.
Vous avez parlé de transport. Huit conventions collectives avec les chemins de fer arrivent à expiration le 31 décembre. D'après tout ce que j'ai entendu dire, nos rendements pourraient être d'environ 50 % supérieurs à ceux de l'année dernière, qui a été difficile.
Quelle incidence la capacité ferroviaire a‑t‑elle eue sur notre capacité d'atteindre certains de nos objectifs en matière de débouchés commerciaux et de transport des marchandises? L'industrie songe‑t‑elle ce qui pourrait se passer plus tard cette année?
M. Mark Walker: Merci de votre question.
Au sujet des récoltes et des rendements, vous avez vu juste. En fin de compte, les exportateurs canadiens ont besoin d'une infrastructure commerciale capable d'absorber la demande croissante d'exportations. Cette année, la récolte de céréales sera de 56 % supérieure à celle de l'an dernier. La semaine dernière, 80 % de la récolte était faite à l'échelle du Canada. Dans cette optique, notre secteur de l'exportation a certainement hâte de travailler avec les chemins de fer pour s'assurer que le grain canadien est acheminé vers le marché dans les meilleurs délais et de façon efficace.
M. John Barlow: Y a‑t‑il des mesures précises que l'industrie a envisagées en ce qui concerne le service ferroviaire? Y a‑t‑il une politique fédérale que nous pouvons appliquer non seulement pour assurer la sécurité alimentaire chez nous, mais aussi pour répondre à la demande mondiale?
M. Mark Walker: Je suis un expert des marchés et du commerce. Je travaille un peu à la politique des transports, mais Cereal Canada est membre de la coalition Canada's Ready. Nous avons une page d'accueil, canadasready.ca, qui décrit ce que nous demandons au gouvernement, ainsi qu'aux compagnies de chemin de fer, à l'égard de cette récolte importante. Je vais fournir cette information au Comité pour qu'il puisse en tenir compte dans son étude.
M. John Barlow: J'ai le temps de poser une dernière question brève. Elle s'adresse également à M. Webb.
Vous avez parlé d'infrastructure, de ports et de chemins de fer. Y a‑t‑il quelque chose de précis à dire au sujet du transport ferroviaire, puisque ces conventions collectives arrivent à expiration le 31 décembre? Qu'aimeriez-vous voir dans une politique fédérale pour assurer la continuité du transport ferroviaire?
M. Steve Webb: La seule menace de grève crée de l'incertitude dans la chaîne d'approvisionnement. Tout ce qui peut atténuer les interruptions de travail serait avantageux pour tous les intervenants du système.
Le président: Merci, messieurs Webb et Barlow.
Nous allons passer à M. Drouin pour six minutes.
M. Francis Drouin (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Très bien. Merci beaucoup aux témoins d'être là.
J'ai une brève question à poser sur les transports. M. Walker pourrait peut-être répondre. Je voudrais aussi connaître l'opinion de M. Fraser, puisqu'il a parlé de l'importance du transport.
Récemment, j'ai appris qu'un écart de quatre heures par rapport à l'heure prévue est toléré pour qu'on puisse dire qu'un train est à l'heure. Si un train arrive quatre heures après, les deux transporteurs ferroviaires du Canada disent qu'il est à l'heure. Essaie‑t‑on activement de travailler avec vos membres pour réduire cet écart afin que les trains arrivent vraiment à l'heure? Comment cela se compare‑t‑il à ce qu'on observe aux États-Unis, par exemple?
Nous savons qu'il pourrait y avoir un risque de grève aux États-Unis également. Nous entendons souvent parler du CN et du CP, mais je ne sais pas ce qui se passe aux États-Unis. Si vous avez des échanges avec des homologues américains, pouvez-vous dire quelle est la relation avec les sociétés ferroviaires?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je profite de mes six minutes pour d'abord lire publiquement un avis de motion. La greffière a une copie de cette motion dans les deux langues officielles. La motion est la suivante:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude sur l'inflation due aux profits dans le secteur de l'épicerie et la hausse du coût des produits d'épicerie alors que les grandes chaînes font des profits records; que le Comité examine les profits records des grandes chaînes d'épicerie et de leurs PDG par rapport aux salaires des employés et au coût des produits d'épicerie au Canada; que le Comité examine également la capacité des grandes chaînes d'épicerie de tirer parti de leur taille pour réduire les revenus des agriculteurs canadiens; que le Comité invite des témoins ayant des connaissances précises sur l'inflation motivée par les profits et les intervenants concernés de l'industrie, y compris les PDG des épiceries, les économistes, les syndicats et les agriculteurs ou les organisations représentatives; qu'au moins six réunions soient prévues pour entendre les témoins; que le Comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre et que, conformément à l'article 109 du Règlement, le Comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale au rapport.
Il s'agit simplement d'un avis de motion que tous mes collègues pourront étudier au cours des prochains jours.
Monsieur le président, je vais poursuivre en posant mes questions. Je me joins à mes collègues pour remercier les témoins d'avoir accepté de comparaître et de nous aider à réaliser cette étude.
Monsieur Fraser, je vais m'adresser d'abord à vous et à l'Arrell Food Institute. Je me souviens de la visite du Comité à l'Université de Guelph, en 2018. Nous avons été vraiment impressionnés par le travail extraordinaire que votre université entreprend.
Je suis heureux que vous ayez évoqué les changements climatiques dans votre mémoire et dans votre exposé liminaire. Oxfam est l'un des témoins que nous avons entendus plus tôt dans le cadre de cette étude. Ses représentants, dans leur exposé sur la question, ont dit qu'au cours des 20 dernières années, les demandes d'aide financière humanitaire liées aux rigueurs de la météo ont augmenté de 819 %. Il y a actuellement une énorme crise dans la corne de l'Afrique. Le chef du Programme alimentaire mondial a parlé aux informations d'aujourd'hui de la crise qui sévit là‑bas. Les pays de la région sont aux prises avec de graves sécheresses qui ont nui à la capacité des agriculteurs de produire des aliments pour la population locale.
Puis, bien sûr, la région a été frappée par la guerre en Ukraine, car l'Ukraine, qui est pour elle un grenier, a vu ses exportations de céréales interrompues, essentiellement, pendant un certain nombre de mois, et nous sommes encore en train de rattraper l'arriéré dans les exportations. De plus, les changements climatiques ont une incidence sur les capacités de nos agriculteurs. Ma province, la Colombie-Britannique, a été coupée du reste du Canada en novembre dernier, et nous savons que les agriculteurs des Prairies ont connu des sécheresses extrêmes et de graves inondations, ce qui a nui à notre capacité de produire à notre plein potentiel.
En même temps que notre pays essaie d'augmenter sa production, nous luttons aussi contre cette action d'arrière-garde qui nie les effets des changements climatiques sur notre production. Nous savons que les pays du monde entier sont aux prises avec les mêmes problèmes, mais ils n'ont pas la résilience, le savoir-faire technologique, ni les ressources financières dont dispose notre gouvernement.
Avez-vous des réflexions à nous livrer sur la façon dont l'expertise et le savoir-faire canadiens peuvent servir dans des pays comme ceux de l'Afrique pour aider à renforcer la résilience locale? Lorsqu'on leur coupe l'herbe sous le pied, par exemple lorsqu'un pays comme l'Ukraine voit soudainement ses exportations réduites, que pouvons-nous faire pour renforcer la résilience et comment le Canada peut‑il intervenir pour combler le vide? Si vous aviez des réflexions à ce sujet à nous communiquer au cours des prochaines minutes, nous vous en serions reconnaissants.
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Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous suis reconnaissant de me donner l'occasion aujourd'hui de me joindre à vous et aux autres témoins. Comme il a été mentionné, je m'appelle Chris Davison et je suis vice-président des relations avec les intervenants et l'industrie au Conseil canadien du canola.
Le Conseil englobe tous les maillons de la chaîne de valeur du canola. Nos membres comprennent des producteurs de canola, des entreprises en sciences de la vie, des manutentionnaires de grains, des exportateurs, des transformateurs et d'autres intervenants de l'industrie. Notre objectif commun est d'assurer la croissance et le succès continus de l'industrie, et ce, en répondant à la demande mondiale de canola et de produits à base de canola, y compris les aliments, les aliments pour animaux et le carburant.
Le succès du canola rejaillit sur le Canada. Notre industrie représente près de 30 milliards de dollars d'activité économique par année. Elle est à l'origine de quelque 207 000 emplois et de 12 milliards de dollars en salaires, ainsi que de la plus grande part des recettes monétaires agricoles au pays. Notre plan stratégique repose sur trois piliers clés: un approvisionnement durable et fiable, une valeur différenciée et un commerce stable et ouvert.
Dans le cadre de mon témoignage devant vous aujourd'hui, on m'a demandé de concentrer mes observations sur les recommandations au chapitre de la politique intérieure susceptibles d'améliorer les exportations canadiennes sur la scène mondiale. En tant que représentant d'une industrie qui exporte 90 % de ce qu'elle produit sous forme de graines, d'huile et de tourteau de canola, je ne peux que me réjouir de cela. Pour faire suite à la demande qui m'a été faite, je vais regrouper mes observations dans trois domaines d'intérêt, soit l'accès aux marchés et le commerce, les initiatives de réglementation et l'innovation.
Toutefois, avant de passer à cela, je tiens à souligner les problèmes très réels d'insécurité alimentaire auxquels nous sommes confrontés. Il est certain que la guerre en Ukraine et d'autres événements et développements récents ont fait ressortir cela; cependant, l'insécurité alimentaire n'est pas un phénomène épisodique. Elle peut être plus aiguë ou exacerbée à différents moments, mais elle est de nature systémique et, comme nous le savons, elle comporte des dimensions nationales et internationales. Le Canada en général, et notre industrie en particulier, a la chance de pouvoir aider à régler certains problèmes d'insécurité alimentaire. Il est bien établi que le Canada produit plus que ce dont il a besoin à des fins domestiques et, comme je l'ai déjà mentionné, le canola ne fait pas exception.
Cela dit, nous avons des défis à relever. Le plus important, et celui qui a le plus de répercussions directes sur notre capacité de contribuer à l'atténuation de l'insécurité alimentaire, est celui de la demande. Les signaux à ce chapitre laissent entrevoir de façon générale une croissance importante de la demande dans un avenir prévisible, stimulée par les défis de la production mondiale, les événements géopolitiques et l'intérêt pour les huiles végétales saines, entre autres. Ces signaux en ce qui a trait à la demande ont à leur tour servi de catalyseur pour le développement d'une capacité de transformation accrue au Canada, comme en témoignent les récentes annonces d'investissements et d'activités totalisant près de 2 milliards de dollars.
Par conséquent, il s'agit d'une période stimulante et dynamique pour notre industrie, mais pour réaliser ce potentiel de croissance et jouer un rôle permanent et sans doute accru dans la lutte contre l'insécurité alimentaire, il faut tout d'abord répondre à la demande. L'accès aux marchés et le commerce, les initiatives actuelles au chapitre de la réglementation, ainsi que l'innovation, ont tous un rôle essentiel à jouer à cet égard.
Pour ce qui est de l'accès aux marchés et du commerce, ce n'est un secret pour personne que l'ouverture des frontières et des marchés est la meilleure façon d'aider à assurer l'abondance en ce qui a trait à la nourriture et qu'elle joue un rôle essentiel dans la stabilité des prix. L'accès aux marchés et le commerce face à la guerre en Ukraine ainsi que d'autres facteurs, notamment le protectionnisme post-COVID, l'intensification de la concurrence et les répercussions des changements climatiques, pour n'en nommer que quelques-uns, sont critiques. Par conséquent, à l'intérieur du secteur agroalimentaire canadien en général, l'industrie du canola appuie les efforts visant à ouvrir de nouveaux marchés, à encourager et à démontrer le leadership canadien dans les forums internationaux en ce qui concerne les règles commerciales, ainsi qu'à renforcer la capacité de défense des intérêts et la collaboration entre le gouvernement et l'industrie.
Pour ce qui est des initiatives actuelles en matière de réglementation, qui sont nombreuses, je dirais simplement que nous devons redoubler d'efforts pour ce qui est de notre engagement à élaborer et à mettre en œuvre des règlements fondés sur des données scientifiques et des données probantes, qui permettent le développement et la commercialisation des outils nécessaires pour accroître la production, ainsi que l'accès à ceux‑ci, afin de pouvoir répondre à la demande. Nous devons le faire pour assurer plus de transparence, améliorer notre compétitivité, attirer des investissements supplémentaires et, en dernier ressort, conserver des outils et en mettre de nouveaux entre les mains des producteurs de canola qui évoluent dans un contexte de production de plus en plus difficile.
En ce qui concerne l'innovation, il est bien connu qu'elle a fait en sorte que le canola est devenu l'un des oléagineux les plus importants au monde et la culture la plus précieuse du Canada, et nous sommes prêts à faire encore plus, non seulement pour ce qui est des avantages nationaux, économiques ou environnementaux, mais aussi en ce qui concerne notre capacité à contribuer à la lutte contre l'insécurité alimentaire.
Le printemps dernier, nous avons publié une nouvelle stratégie d'innovation pour le canola. Elle présente une vision des priorités à court terme pour soutenir la croissance et le développement continus de notre industrie, y compris le respect des exigences en matière de demande mentionnées précédemment. La stratégie comprend quatre piliers: le rendement, la précision, la protection et le produit. Si elle est mise en œuvre avec succès sur le plan de la collaboration, des efforts, du financement et de la réglementation, elle appuiera la prochaine phase de croissance de l'industrie canadienne du canola, en améliorant le rendement, en augmentant la précision, en protégeant la culture et les marchés, et en mettant l'accent sur les avantages du canola en tant que culture oléagineuse.
Cela permettra non seulement de stimuler l'activité économique, mais aussi d'améliorer notre capacité de relever les défis liés à l'insécurité alimentaire mondiale, en raison des gains de productivité qui seront générés. Nous partagerons avec plaisir une copie de la stratégie d'innovation avec les membres du Comité, si cela vous intéresse.
En conclusion, le monde veut plus de canola canadien et en a besoin. Nous devons travailler en partenariat si nous voulons réussir à en fournir, en tenant compte des défis liés à l'insécurité alimentaire et d'autres objectifs communs. Nous devons aussi reconnaître que notre capacité de le faire dépend en grande partie de notre compétitivité sur les marchés mondiaux. Lorsque nous prenons des décisions de politique intérieure, nous devons le faire de manière à ne pas ajouter des coûts qui rendent nos produits moins concurrentiels.
Je vous remercie de votre temps aujourd'hui. J'ai hâte de discuter avec vous.
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Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je m'adresse à vous au nom de la Fédération canadienne de l'agriculture, qui représente environ 190 000 familles d'agriculteurs d'un bout à l'autre du Canada. Je vous remercie de me donner l'occasion d'aborder la question de l'insécurité alimentaire mondiale.
Plus tôt cette semaine, j'ai assisté à une présentation de David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial des Nations unies. Il a souligné que le manque d'engrais et les problèmes de production dans les principales régions agricoles entraîneront une augmentation spectaculaire du nombre de personnes touchées par une insécurité alimentaire aiguë à l'échelle mondiale, ce nombre atteignant déjà 345 millions de personnes dans le monde. Le lien entre l'insécurité alimentaire et l'agitation civile ne fait qu'accentuer la gravité de cette situation, la nécessité urgente de maximiser la production alimentaire mondiale et d'améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires étant ressortie dans ses observations.
Le Canada jouit d'une richesse enviable en ressources naturelles et en producteurs agricoles très efficaces, mais il n'est pas à l'abri des défis mondiaux posés par la pandémie de COVID‑19, la guerre en Ukraine et les changements climatiques. En cette période de crises de plus en plus interreliées, la dépendance excessive à l'égard du commerce international ou de la production nationale rend les pays vulnérables aux perturbations des chaînes d'approvisionnement, ce qui peut avoir des effets dévastateurs.
Par exemple, les agriculteurs de l'Est du Canada continuent d'avoir un accès incertain aux engrais et reconnaissent que la rareté de cet intrant essentiel pourrait être une réalité pour les années à venir. Des politiques comme le tarif sur les engrais russes ne font qu'augmenter les prix des intrants essentiels, les producteurs étant déjà confrontés à des coûts d'exploitation historiquement élevés. Il subsiste un besoin pressant d'offrir un répit à l'égard de ces contraintes financières.
L'insécurité alimentaire mondiale exige une approche pangouvernementale multidimensionnelle, qui soutient des chaînes d'approvisionnement alimentaire résilientes et maximise la production alimentaire. Dans mes observations d'aujourd'hui, je vais aborder quelques aspects qui revêtent une importance cruciale à cet égard.
Premièrement, en ce qui concerne le commerce, lors du Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires de 2021, les membres de l'ONU ont convenu que l'atteinte des objectifs de développement durable dépendra de la promotion de systèmes alimentaires locaux stables, soutenus par un commerce équitable et fondé sur des règles. Aucune politique internationale ne devrait empêcher les pays d'établir leurs propres infrastructures agricoles. Le monde a besoin de solides échanges commerciaux fondés sur des règles, qui permettent des mesures stratégiques favorisant la stabilité de l'approvisionnement, comme des filets de sécurité, une commercialisation ordonnée et la gestion de l'offre.
La réponse du Canada aux changements climatiques constitue également un exemple clair de politiques qui peuvent avoir une incidence sur notre résilience et notre capacité de produire des aliments. Les producteurs ont besoin de politiques qui encouragent des pratiques résilientes face aux changements climatiques, sans limiter la productivité. Cela nécessite une collaboration entre les agriculteurs et les gouvernements pour tirer parti de l'expertise au niveau de l'exploitation agricole. La Fédération canadienne de l'agriculture continue de demander la création d'un groupe de travail composé d'agriculteurs, de fonctionnaires et d'experts techniques, afin de trouver des incitatifs pragmatiques en matière de changements climatiques qui appuient la croissance continue de la productivité.
En ce qui concerne les infrastructures, les infrastructures physiques et naturelles sont également essentielles à notre résilience face aux changements climatiques. Il faut continuer d'investir dans le Fonds national des corridors commerciaux, afin de diversifier et de renforcer nos canaux de mise en marché. La Fédération canadienne de l'agriculture appuie également l'élaboration continue de programmes de services écosystémiques, comme le programme d'enchères inversées annoncé dans le budget de 2021 pour la conservation et la restauration des terres humides. La reconnaissance de la contribution des agriculteurs à la gestion des plaines inondables et à d'autres biens environnementaux publics est essentielle à la résilience à long terme du secteur.
Pour ce qui est des interventions en cas de catastrophe et du rétablissement, la résilience exige également une approche coordonnée des interventions en cas de catastrophe et la détermination de mesures qui pourraient atténuer et prévenir les risques futurs. La Fédération canadienne de l'agriculture continue de réclamer la collaboration pour les examens après sinistre, dans le cadre d'Agri-relance, c'est-à-dire de réunir les principaux intervenants après les interventions initiales en cas de catastrophe, afin d'évaluer et de déterminer les pratiques exemplaires et les changements nécessaires, ainsi que d'aider à concevoir des solutions standards pour des situations semblables à l'avenir.
Enfin, en ce qui concerne la main-d'œuvre et la préservation des actifs agricoles, pour maximiser la production alimentaire canadienne, il faut avoir accès à la main-d'œuvre et aux politiques qui préservent les actifs agricoles stratégiques. La Fédération canadienne de l'agriculture travaille en étroite collaboration avec le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture et Aliments et boissons Canada à l'élaboration d'un plan stratégique national sur la main-d'œuvre, dirigé par l'industrie, afin de remédier aux pénuries systématiques graves de main-d'œuvre qui limitent notre productivité. Bien que le plan soit dirigé par l'industrie, nous avons hâte de collaborer avec vous au cours des prochains mois concernant les mesures collectives nécessaires pour s'attaquer à ce problème chronique.
Nous devons également veiller à ce que la sécurité alimentaire ne soit pas sacrifiée au profit d'intérêts conflictuels. Un excellent exemple de cela est celui d'une parcelle de terre agricole appartenant à l'État à Surrey, en Colombie-Britannique, qui est mise en vente malgré le fait qu'elle abrite l'une des exploitations horticoles les plus productives et les plus résilientes aux changements climatiques qui desservent le marché de la Colombie-Britannique. Cela peut sembler secondaire face à ce problème mondial, mais la perte de ces terres porterait un coup permanent à la sécurité alimentaire dans cette région, faisant ressortir la façon dont les politiques gouvernementales peuvent, sans le savoir, aggraver les préoccupations actuelles en matière d'insécurité alimentaire.
En conclusion, l'insécurité alimentaire mondiale est complexe et a des répercussions dramatiques sur la stabilité politique et économique dans le monde. Nous nous réjouissons de l'engagement du Comité à explorer le rôle du Canada face à l'insécurité alimentaire mondiale croissante. Pour la suite de vos délibérations sur ce sujet, je vous laisserai sur ces quatre domaines clés où les politiques canadiennes peuvent avoir un impact direct et positif.
Premièrement, nous avons besoin d'une forte présence internationale, appuyant des échanges commerciaux fondés sur des règles, qui aide les pays à promouvoir la stabilité des infrastructures et de l'approvisionnement.
Deuxièmement, un groupe de travail doit être établi avec les agriculteurs, afin de veiller à ce que les politiques environnementales favorisent une résilience et une productivité accrues.
Troisièmement, il faut maintenir les examens collaboratifs d'Agri-relance pour atténuer et prévenir les risques climatiques futurs.
Enfin, il faut adopter une approche holistique en ce qui a trait à la main-d'œuvre et à la préservation des actifs productifs stratégiques au Canada.
Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Au nom de l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, qui représente plus de 840 entreprises qui cultivent, emballent, expédient et vendent des fruits et légumes frais à l'échelle nationale et mondiale et qui soutiennent environ 249 000 emplois au pays, je suis heureux d'aborder avec vous aujourd'hui l'insécurité alimentaire mondiale.
Nous reconnaissons tous que la question de l'insécurité alimentaire est complexe. L'agriculture et l'agroalimentaire jouent un rôle clé dans la recherche de solutions. La question que nous devons nous poser est la suivante: comment le secteur agroalimentaire peut‑il travailler avec de multiples administrations et ministères, tant à l'échelle nationale qu'internationale, pour veiller à ce que les populations à risque aient le logement, l'emploi, l'éducation et l'argent nécessaires pour avoir accès à la nourriture. Il y a ensuite la question de la production et de la disponibilité d'aliments sains, ainsi que la façon dont l'agriculture peut relever les défis mondiaux.
La pandémie n'est que l'un des facteurs qui influent sur l'insécurité alimentaire mondiale; à bien des égards, elle a fait ressortir un problème déjà important. Les chaînes d'approvisionnement continuent d'être sous tension. Les changements climatiques ont eu des répercussions sur nos marchés au Canada et à l'échelle mondiale. La guerre en Ukraine a ajouté une pression supplémentaire sur un système alimentaire déjà fragile. Comme nous le savons, la guerre et d'autres facteurs ont entraîné une augmentation des prix des intrants de production essentiels et des produits de base, comme le pétrole et les engrais. Cela a entraîné directement une augmentation des prix, qui a eu une influence directe sur l'insécurité alimentaire.
L'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes est d'avis que les aliments doivent être considérés comme essentiels et périssables de façon prioritaire dans toutes les politiques et tous les programmes, en tenant compte des voies rapides pour les modèles d'importation et d'exportation à l'échelle mondiale.
Selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, près des deux tiers des entreprises ont dit qu'une réduction obligatoire du recours aux engrais à base d'azote diminuerait la rentabilité de leur entreprise, et 42 % ont indiqué que cela poserait un défi, étant donné qu'ils ont déjà réduit leur utilisation d'engrais azotés.
Compte tenu des temps difficiles que traversent les agriculteurs, au lieu d'une réduction du recours aux engrais azotés, l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes propose ce que les chercheurs canadiens encouragent les agriculteurs à faire, c'est-à-dire mettre en œuvre des pratiques exemplaires pour contrôler ou réduire les émissions d'azote. Parmi ces pratiques figurent le travail de conservation du sol, les analyses annuelles du sol pour l'azote et la rotation des cultures fixatrices d'azote.
Les chiffres ne mentent pas. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, on estime qu'entre 720 et 811 millions de personnes dans le monde étaient en situation d'insécurité alimentaire en 2020. Parallèlement, au Canada, les statistiques de 2021 montrent que 15,9 % des ménages des 10 provinces ont déclaré être en situation d'insécurité alimentaire. Il s'agit d'un triste rappel, mais aussi d'une occasion pour le Canada de stimuler les changements à l'échelle nationale et d'être une force mondiale pour répondre aux besoins internationaux.
En tant que seul pays du G7 à ne pas avoir de programme national d'alimentation scolaire, nous nous rapprochons de la réalité de l'investissement dans la nutrition des enfants. L'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes est membre de la Coalition pour une saine alimentation scolaire, un organisme non partisan qui travaille à faire progresser et à appuyer un programme national d'accès à des aliments nutritifs dans les écoles, qui permettrait aux enfants canadiens de recevoir des repas nutritifs à l'école selon un modèle de partage des coûts. Ce faisant, nous nous emploierions à atteindre le deuxième objectif de développement durable des Nations unies, à savoir éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire et améliorer la nutrition.
À l'échelle nationale, je crois qu'il y a deux grands domaines d'intérêt, soit les changements à l'échelle communautaire et le soutien de l'industrie. Comment pouvons-nous mettre en place des programmes sociaux qui permettent aux Canadiens d'acheter les aliments dont ils ont besoin, ainsi que des programmes qui appuient la production agroalimentaire et l'innovation? Des exemples comme le Programme de récupération d'aliments excédentaires et le Fonds des infrastructures alimentaires locales ont eu un impact, mais le retrait de fonds de ces sources a privé de nombreuses ONG de la capacité d'être viables dans un système d'aliments périssables. En tant que bénéficiaire des fonds du Programme de récupération d'aliments excédentaires, j'ai vu de mes propres yeux le réseau invisible d'aliments, qui regroupe 61 000 organismes de bienfaisance et sans but lucratif qui appuient nos efforts pour assurer la sécurité alimentaire. Tous comptent sur un système complexe de dons, de logistique et de financement. Second Harvest a signalé qu'avec un financement de 25 millions de dollars l'an dernier, elle recevait pour plus de 84 millions de dollars de demandes de nourriture auxquelles elle essayait de répondre, ce qui démontre un besoin criant dans les collectivités partout au pays. Je tiens à féliciter Second Harvest, car 71 % des fonds ont été distribués à des réseaux communautaires de personnes noires, autochtones et de couleur.
La sécurité alimentaire est complexe et nécessite des politiques et des programmes harmonisés pour appuyer la capacité de produire des aliments, d'y avoir accès et de les payer. Le gouvernement canadien a l'occasion de renforcer notre chaîne d'approvisionnement pour répondre aux besoins alimentaires des Canadiens et du reste du monde.
Je suis très heureux d'avoir eu l'occasion de m'adresser au Comité et de répondre à vos questions.
Merci.