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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 049 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 13 février 2023

[Enregistrement électronique]

(1835)

[Français]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bonjour, tout le monde.
    Bienvenue à la 49e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
    Je vais commencer par quelques rappels.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité. Bien sûr, les captures d'écran ou la prise de photos de l'écran ne sont pas autorisées.

[Traduction]

     Chers collègues, reprenons nos travaux. Il y a quelques remplacements. Bienvenue à M. Kurek, qui remplace M. Warren Steinley. Il y a également M. Iqwinder Gaheer qui remplace M. Turnbull et Mme Soraya Martinez Ferrada qui remplace Mme Taylor Roy.
    Bienvenue au comité de l'agriculture, c'est un plaisir de vous avoir parmi nous.

[Français]

    Monsieur Perron, je vous avise que tous les témoins de ce soir ont passé les tests de son. Tout devrait donc fonctionner correctement.

[Traduction]

     Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 5 octobre 2022, le Comité reprend son étude de l'inflation du prix des aliments.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins de la première heure. Ils se joignent tous à nous virtuellement. Des Canadiens pour une fiscalité équitable, nous accueillons M. D.T. Cochrane, économiste et chercheur en matière de politiques.

[Français]

    Du Conseil de la transformation alimentaire du Québec, nous accueillons Sylvie Cloutier, présidente-directrice générale, et Dimitri Fraeys, vice-président de l'innovation et des affaires économiques.

[Traduction]

    De Restaurants Canada, nous accueillons M. Olivier Bourbeau, vice-président, Fédéral et Québec.
     Je vous souhaite à tous la bienvenue. Chacun d'entre vous aura cinq minutes pour sa déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
    Je vais commencer par M. Cochrane, pour cinq minutes maximum, s'il vous plaît.
     Je vous remercie d'avoir invité les Canadiens pour une fiscalité équitable à s'exprimer sur cet enjeu important.
    L'inflation est un phénomène complexe. Malheureusement, une explication trop simpliste selon laquelle la cause de l'inflation serait trop d'argent pour trop peu de biens a conduit à une solution politique trop simpliste: des taux d'intérêt plus élevés. Cette explication porte également à blâmer le gouvernement fédéral pour l'inflation, en raison de l'argent créé pour soutenir les Canadiens pendant la pandémie. À cause de cet argent, nous dit‑on, la demande est excessive.
    Voici une question pour ceux qui répètent qu'il y aurait « trop d'argent »: qui a trop d'argent? Qui fait preuve d'une demande illégitime de nourriture et d'autres biens?
    Je pourrais vous parler longuement du problème de l'utilisation réflexe des taux d'intérêt pour gérer l'inflation, mais permettez-moi d'en venir au sujet de l'inflation du prix des aliments.
    Notre organisation attire l'attention sur le rôle du pouvoir des entreprises dans l'inflation. En avril dernier, nous avons publié un rapport intitulé The Rise of Corporate Profits in the Time of Covid, qui montre que la marge bénéficiaire des entreprises canadiennes a bondi considérablement en 2021. D'une marge moyenne avant impôt de 9 % au cours des deux décennies précédentes, elle est passée à près de 16 % en 2021. Les données préliminaires de 2022 portent à croire que les marges bénéficiaires sont restées élevées. Les entreprises ne se contentent pas de refiler leurs hausses de coûts aux consommateurs. Nombre d'entre elles profitent des turbulences de l'économie mondiale pour augmenter leurs marges bénéficiaires.
    Les grandes chaînes d'épicerie de détail comme Loblaws, Empire et Metro ont beaucoup été pointées du doigt pour expliquer l'inflation du prix des aliments. Cette attention est tout à fait méritée, car toutes trois ont vu leurs marges bénéficiaires augmenter pendant la pandémie. Cependant, cela va bien au‑delà de la vente au détail de produits alimentaires, même si le public ne le voit pas.
    Les coûts des épiceries incluent les marges bénéficiaires de leurs fournisseurs. Par conséquent, lorsque les coûts des épiceries sont plus élevés, une partie de ces coûts sert probablement à payer des marges bénéficiaires plus élevées. À pratiquement chaque étape de la chaîne d'approvisionnement alimentaire, les entreprises cherchent à réaliser le plus grand profit possible. Certaines sociétés seront en mesure de refiler leurs coûts plus élevés aux consommateurs tout en préservant leurs marges bénéficiaires, et d'autres leur imposeront des coûts plus élevés encore afin de réaliser des bénéfices encore plus importants.
    Les petites entreprises alimentaires, comme les restaurants de quartier, se trouveront contraintes d'absorber une partie de ces coûts et marges plus élevés parce qu'elles ne seront pas en mesure d'imposer des coûts plus élevés aux consommateurs. Cependant, ce seront les étudiants, les retraités, les travailleurs et leurs familles, autrement dit tous ceux qui ont besoin de manger, qui seront contraints d'absorber la plus grande partie des coûts. Bien entendu, les travailleurs souhaiteront à leur tour voir leurs salaires augmenter pour absorber cette hausse de coûts. Certains réussiront à obtenir un meilleur salaire, mais la plupart ne réussiront pas.
    C'est là que les banques centrales commencent à craindre une spirale salaires-prix. Elles ne craignent pourtant pas la spirale profits-prix, même si, d'une part, la plupart des prix auxquels nous sommes confrontés sont fixés par des sociétés à but lucratif et, d'autre part, la croissance des bénéfices des sociétés dépasse largement la croissance des salaires. En fait, les rapports de la Banque du Canada sur la politique monétaire, qui justifiaient les hausses de taux d'intérêt récentes, ne font aucunement mention des profits.
    Permettez-moi de mentionner les profits associés aux combustibles fossiles, un intrant fondamental pour tous nos aliments, à de nombreuses étapes de la production. En 2019, les 10 plus grandes sociétés pétrolières et gazières du Canada ont enregistré des bénéfices combinés avant impôt de 8,5 milliards de dollars, ce qui équivaut à une marge bénéficiaire de 8,5 %. En 2021, leur marge doublera pour atteindre 17 %, ce qui leur rapportera 23,8 milliards de dollars en tout. Oh! Et pendant qu'ils enregistraient ces bénéfices records, 7 sur 10 n'ont pas payé d'impôt sur le revenu.
     La question de savoir qui peut refiler des coûts plus élevés au suivant, qui doit absorber des coûts plus élevés et qui peut refiler des coûts plus élevés encore au suivant dépend de l'équilibre des pouvoirs et du mode de redistribution. À l'heure actuelle, certaines des plus grandes entreprises du Canada ont un grand pouvoir de fixation des prix. Il n'est pas surprenant qu'elles en profitent, au détriment des Canadiens.
    Je terminerai en recommandant deux mesures fiscales pour remédier à la situation.
    La première serait d'imposer un impôt minimum sur les bénéfices déclarés. S'il y avait un impôt minimum de 15 % sur les bénéfices que les sociétés déclarent à leurs actionnaires, les 10 plus grandes sociétés pétrolières et gazières auraient payé un total de 3,6 milliards de dollars plutôt que rien du tout.
    La deuxième serait d'imposer une taxe sur les bénéfices excédentaires, ce qui réduirait l'incitation à augmenter les marges à chaque occasion. Les recettes tirées de la taxe sur les bénéfices excédentaires pourraient être redistribuées aux Canadiens pour les aider à absorber l'augmentation du coût de la vie.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité à m'exprimer sur ce sujet important. J'ai hâte de participer à la discussion.
(1840)

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Cochrane.
    Nous passons maintenant au Conseil de la transformation alimentaire du Québec.
    Madame Cloutier ou monsieur Fraeys, vous disposez de cinq minutes.
    Membres du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, bonsoir. C'est un réel plaisir de nous adresser à vous ce soir.
    Le Conseil de la transformation alimentaire du Québec, ou CTAQ, est le principal regroupement d'entreprises dans le secteur de la transformation des aliments et des boissons au Québec. Le CTAQ est une fédération de 13 associations sectorielles comptant plus de 650 entreprises membres.
    L'industrie de la transformation des aliments et des boissons compte 75 000 emplois au Québec et 300 000 au Canada, ce qui en fait le premier employeur manufacturier. Cette industrie est composée principalement de petites et moyennes entreprises.
    L'inflation alimentaire a débuté au printemps 2021. Les prix des denrées comme le blé, le maïs, le sucre et le soya ont commencé à augmenter dès le mois d'avril 2021. Les stocks étaient en baisse et les marchés anticipaient de faibles rendements en raison de la sécheresse qui sévissait en Amérique du Nord. La production nord-américaine a été très faible en 2021. Les stocks sont demeurés au plus bas.
    Prenons l'exemple du blé. Le prix du blé a augmenté de 50 % entre avril et novembre 2021, passant de 6 $ à 9 $ le boisseau. Puis, à la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le prix du blé a connu une autre hausse de 50 % entre mars et juillet 2022, passant ainsi de 9 $ à 14 $ le boisseau. Pour l'année 2023, le prix du blé demeure élevé, c'est-à-dire autour de 8 $ le boisseau, malgré la bonne récolte de 2022.
    Au cours de l'automne 2022, le secteur de la boulangerie a vécu des pénuries de beurre, de gluten, de sucre et de farine. La rareté de certains ingrédients a poussé les prix à la hausse et maintenu une inflation alimentaire en augmentation depuis deux ans. En effet, l'Indice des prix des produits agricoles, soit l'IPPA, et l'Indice des prix des produits industriels, soit l'IPPI, sont en croissance de 20 % depuis janvier 2021, ce qui, conséquemment, a poussé l'Indice des prix à la consommation de plusieurs produits alimentaires à des seuils de 10 % et plus à la fin de l'année 2022.
    Les données de NielsenIQ sur les achats dans tous les réseaux du Québec le confirment: à la fin de l'année, on notait une hausse de 8 % de l'inflation alimentaire. Plus précisément, la hausse était de 15 % pour les produits de boulangerie ainsi que pour les aliments préparés, tandis qu'elle était de 10 % pour les produits d'épicerie.
    La hausse des prix des produits alimentaires est une préoccupation mondiale, notamment aux États‑Unis, en France et au Royaume‑Uni.
    Les causes de l'inflation sont multiples. Outre les hausses de prix des denrées et des ingrédients, les salaires, l'énergie, les coûts de transport, les emballages et les frais financiers sont tous en hausse. Bref, tout augmente.
    Le Groupe de travail national sur la chaîne d'approvisionnement l'a démontré: les chaînes d'approvisionnement sont fragiles. L'usine Canada est moins performante et moins efficiente, les coûts augmentent, les délais de livraison sont plus longs. Les confinements pendant la pandémie de la COVID‑19, les blocus ferroviaires en 2020, les grèves au Port de Montréal en 2020 et en 2021 ainsi que la fermeture du pont Ambassador en février 2022 ont complexifié la logistique et le transport, autant par bateau que par train, et ont gonflé les prix.
    Les systèmes sont tendus. Le moindre incident a de lourdes conséquences sur les prix. Prenons l'exemple de la fermeture partielle du tunnel Louis‑Hippolyte‑La Fontaine, à Montréal. Un sondage interne montre que les entreprises vont devoir changer les itinéraires et les horaires de livraison, ce qui va entraîner des surcharges en carburant et en salaires, ainsi que des frais additionnels en cas de retard de livraison.
    Pour assurer la disponibilité des produits de base et prévenir les longs délais, les entreprises sont forcées de maintenir de plus grands stocks. Les récoltes de 2022 ont été bonnes, les entrepôts sont pleins. Les entreprises vont devoir financer 11 mois de stocks alimentaires à des taux d'intérêt élevés. Les marges de crédit sont très sollicitées et nuisent aux liquidités. Après huit hausses du taux directeur de la Banque du Canada, les taux sont à un sommet de 4,5 %, une situation inédite depuis octobre 2007. Ce sont autant de frais financiers additionnels à supporter.
    La pénurie de main-d'œuvre est le plus sérieux défi de l'industrie. Près de 20 % des postes sont vacants. L'industrie des aliments et des boissons est en compétition avec d'autres secteurs manufacturiers pour attirer des travailleurs à partir d'un bassin qui se rétrécit. Ainsi, la hausse moyenne des salaires en 2022 a été de 5,8 % au Québec et de 5,1 % au Canada.
    Pour faire fonctionner leurs usines, les entreprises font venir des travailleurs étrangers temporaires. Les délais sont longs, les démarches administratives sont coûteuses et, au bout du compte, il en coûte 5 $ de plus l'heure pour embaucher un travailleur étranger temporaire plutôt qu'un Canadien. Ce sont encore des coûts qui alimentent l'inflation.
(1845)
    Pour 2023, il faudra s'attendre à d'autres hausses de prix au cours des prochaines semaines. Plusieurs grands distributeurs ont annoncé qu'ils analysaient des milliers de demandes de hausses de prix. Selon le Rapport annuel sur les prix alimentaires 2023, on prévoit une hausse de 5 % à 7 % en 2023. Les prix de l'énergie vont continuer de croître, ainsi que les salaires.
    On devra attendre les prévisions sur le niveau des récoltes et des stocks pour juger de l'évolution des prix des denrées agricoles au cours des prochains mois. On peut présumer un ralentissement de la croissance des prix.
    Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de nous exprimer devant le Comité.
    Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, madame Cloutier.
    Je cède maintenant la parole à M. Bourbeau pour cinq minutes.

[Traduction]

    Je m'appelle Olivier Bourbeau et je suis vice-président, Fédéral et Québec, de Restaurants Canada.
    Les restaurants et les nombreuses petites et moyennes entreprises qui composent le secteur canadien de la restauration sont un pilier essentiel de notre culture, de notre économie, de notre marché du travail et de nos milieux de vie locaux. Avant la pandémie, le secteur canadien des services alimentaires constituait une industrie de 95 milliards de dollars, employant directement 1,2 million de personnes et servant chaque jour 22 millions de clients à l'échelle du pays. Nous lançons des carrières, investissons dans la formation et sommes le quatrième employeur en importance au Canada.
    Bien que nous voyions les clients revenir dans nos restaurants et les ventes, retrouver lentement leurs niveaux d'avant la COVID, la rentabilité n'est tout simplement pas au rendez-vous. Peu de gens le savent, mais même avant la pandémie, les restaurants avaient des marges bénéficiaires très minces. En effet, avant la pandémie, le restaurant moyen avait une marge bénéficiaire avant impôt de seulement 4 à 5 %. Avec l'inflation galopante, elle n'est plus que de deux ou trois pour cent. De plus, en raison de la pénurie de main-d'œuvre, nous fonctionnons à 80 % de notre capacité. Faites le calcul: nos restaurants survivent de peine et de misère ou ne font souvent pas d'argent; 50 % des restaurateurs atteignent à peine le seuil de rentabilité ou sont déficitaires, comparativement à 12 % dans la même situation avant la COVID.
    L'inflation a tellement fait grimper les coûts de fonctionnement d'une entreprise qu'il est devenu difficile, voire impossible de gérer un établissement de restauration et d'être rentable. Il n'y a pas qu'une poignée d'ingrédients dont les prix ont augmenté. Tout a augmenté: la nourriture, les services publics, les commodités, l'assurance (quand nous arrivons à en obtenir), le loyer et chaque matière que nous utilisons.
    Dans notre secteur, nous ne pouvons pas simplement transférer ces hausses de coûts aux consommateurs. Nous essayons de les absorber le plus possible, parce qu'il y a une limite à ce qu'une personne est prête à payer pour un repas. Malheureusement, l'élastique est étiré au maximum.
     Voici quatre recommandations prioritaires pour notre industrie.
    Restructurer les prêts au titre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes et en prolonger le terme pour en rendre le remboursement possible. Si nous voulons que le secteur de la restauration continue de jouer son rôle de premier plan dans une reprise économique forte, étant donné que 20 % des restaurants qui n'ont pas encore remboursé leur prêt ne seront pas en mesure de le faire, en partie ou en totalité, nous demandons instamment au gouvernement de faire preuve d'une plus grande indulgence envers les bénéficiaires du CUEC en prolongeant de 36 mois la période de remboursement et en l'assortissant de conditions réduites pour la partie subvention.
    Deuxièmement, il faut freiner l'escalade de la taxe d'accise sur l'alcool, l'augmentation annuelle automatique. L'augmentation de 6,3 % de la taxe d'accise prévue pour 2023 se traduirait par une perte de 750 millions de dollars pour l'industrie de la restauration, ce qui équivaut à 36 000 $ en moyenne par restaurant — imaginez cela —, tandis que notre industrie est toujours en difficulté.
    Troisièmement, il faut réduire le taux d'imposition fédéral des petites entreprises de 9 à 8 %. À l'heure actuelle, les entreprises ont très peu de capital à réinvestir dans leurs activités. La baisse du taux d'imposition des petites entreprises leur permettrait de rembourser leurs dettes et d'investir dans leurs employés.
    Quatrièmement, le gouvernement doit travailler avec tous les acteurs pour que les exigences d'utilisation réduite du plastique soient réalisables. Le calendrier de mise en œuvre de l'interdiction des articles en plastique à usage unique doit être prolongé, et le gouvernement doit travailler en étroite collaboration avec les fournisseurs pour que des produits de remplacement soient disponibles en quantité suffisante, à temps et à prix raisonnable.
(1850)

[Français]

    J'aimerais résumer rapidement nos quatre recommandations prioritaires: nous recommandons une nouvelle prolongation du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes, mais avec un système de paliers décroissants du volet pardonnable; nous recommandons de faire marche arrière quant à l'augmentation automatique de la taxe d'accise sur l'alcool, étant donné que la hausse faramineuse de 6,3 % annoncée cette année représente des coûts énormes pour les restaurateurs; nous recommandons de réduire le taux d'imposition des petites entreprises de 9 % à 8 %; enfin, pour ce qui est des produits de plastique à usage unique, le gouvernement doit s'assurer qu'il sera en mesure de nous les fournir en quantité nécessaire et à un prix abordable.

[Traduction]

     Pour terminer, je vous rappelle que l'industrie canadienne de la restauration a perdu près de 5 000 restaurants depuis janvier 2021 et plus de 13 000 depuis l'arrivée de la COVID.
    Il y a 51 % des entreprises de services alimentaires qui fonctionnent actuellement à perte ou qui atteignent tout juste le seuil de rentabilité, comparativement à 12 % avant la COVID, et les propriétaires d'un restaurant indépendant avec service aux tables sur quatre estiment que leur entreprise ne se relèvera pas: un sur quatre.
    Parmi les emplois vacants dans le secteur privé, un sur cinq se situe dans le secteur de la restauration. Les restaurateurs fonctionnent en moyenne à 80 % de leur capacité normale en raison de la pénurie de main-d'œuvre.
    Le soutien du gouvernement est plus essentiel que jamais pour que notre industrie puisse s'en remettre de façon réaliste, continuer d'employer 1,2 million de Canadiens, maintenir 98 000 entreprises en activité et alimenter la reprise au Canada.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Bourbeau.
    Nous entamons maintenant le premier tour de questions, en commençant par le Parti conservateur.
    Monsieur Barlow, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

     Merci à nos témoins d'être ici ce soir. Je vous remercie de vos excellents témoignages. Vous nous avez présenté de bonnes informations.
    Je veux commencer par M. Bourbeau, de Restaurants Canada.
    Je suis heureux que vous souleviez la question de l'indexation de la taxe. Je suis sûr que lorsque nos collègues libéraux et le gouvernement libéral ont introduit cette taxe progressive et l'ont ajustée à l'inflation, ils s'attendaient à ce que l'inflation se maintienne autour de 1 ou 2 %. Or, nous constatons qu'elle a bondi à 6,3 %.
    Même si je pense que l'indexation de la taxe est antidémocratique, puisqu'il s'agit d'une augmentation de l'impôt sans aucune consultation publique ni vote à la Chambre des communes... Vous avez mentionné que cela représentait une augmentation de 30 000 $ pour le restaurant moyen, une augmentation qu'il devra tenter d'absorber.
    Monsieur Bourbeau, j'aimerais connaître votre vision des choses ou votre opinion.
    Vous parlez de marges bénéficiaires de 4 à 5 %, qui ont baissé à peut-être 2 % avec l'inflation. Quel genre d'incidence cette taxe de 6,3 % aura‑t‑elle sur le restaurant moyen?
    Vous avez dit qu'un restaurant indépendant sur quatre ne devrait pas se rétablir. Comment cela changera‑t‑il le 1er avril, quand cette taxe avec indexation passera à 6,3 %?
    La réponse courte, c'est que plus de restaurants vont fermer, malheureusement. C'est extrêmement difficile.
    Merci beaucoup de m'avoir écouté et d'avoir pris note de ces chiffres, parce qu'ils sont vraiment importants.
    Quand je dis qu'aujourd'hui, après la COVID, la marge bénéficiaire avant impôt se situe entre 2 % et 3 %... J'étais au téléphone aujourd'hui avec un homme qui possède plusieurs restaurants. Il m'a dit: « J'atteins mes objectifs de vente chaque année. Je fais 30 millions de dollars, mais savez-vous quoi? Au bout du compte, je gagne 1 %. » Ce n'est pas 2 %. Ce n'est pas 3 %. C'est 1 %.
    Chaque dollar compte. Chaque cenne compte. C'est sur l'alcool que nous faisons un peu plus d'argent. C'est là que nos marges sont un peu plus élevées.
    Au bout du compte, une augmentation de 6,3 % sera catastrophique, parce que ce sera la différence entre gagner quelques dollars en fin de compte, seulement pour atteindre le seuil de rentabilité, ou perdre de l'argent.
    Pour que nous comprenions bien, lorsque vous dites qu'un restaurant indépendant sur quatre ne devrait pas se rétablir... Je sais que c'est probablement difficile à dire pour vous, mais diriez-vous qu'on pourrait s'attendre à ce que ce chiffre double pour passer à deux sur quatre, peut-être, s'ils doivent payer 30 000 $ de plus en taxe?
    Je vis dans une circonscription rurale où il y a beaucoup de petits restaurants familiaux qui essaient de se rétablir depuis la COVID. L'effet économique sur nos petites communautés... La perte de ces entreprises, d'emplois et de revenus dans ces municipalités...
    Avez-vous évalué si... Est‑ce que ce ratio d'un sur quatre passerait à deux sur quatre? Le savez-vous déjà?
    Malheureusement, je n'ai pas de prévisions en ce sens.
    Au sujet des restaurants locaux, on constate aussi que les propriétaires de restaurants indépendants travaillent de plus en plus, parce que le coût de la main-d'œuvre a augmenté de 20 % à cause des pénuries de main-d'œuvre. Ils travaillaient déjà de 50 à 55 heures par semaine. Ils travaillent maintenant 70 heures par semaine.
    S'ils ferment leur restaurant, la majorité d'entre eux perdront tout, car ils louent leurs locaux. Un grand nombre de restaurateurs sont propriétaires du restaurant, mais pas de l'immeuble et du reste. Par conséquent, ils perdront tout si l'inflation et les prix continuent d'augmenter à ce rythme.
(1855)
    Merci. Je sais que c'est une question à laquelle il est difficile de répondre avec précision.
    On parle de tous ces coûts supplémentaires, évidemment des coûts de la main-d'œuvre qui ont augmenté de 20 % et de la taxe avec indexation de 6,3 %, et nous savons que la taxe sur le carbone va augmenter de nouveau le 1er avril, une autre taxe imposée aux propriétaires de petites entreprises, en particulier aux restaurateurs.
    Mes collègues prétendent que huit familles canadiennes sur dix retirent plus de la taxe sur le carbone qu'elles ne paient, mais le directeur parlementaire du budget nous assure que ce n'est pas le cas. Et même si ce l'était, ce ne le serait pas pour les propriétaires de petites entreprises. Les charges sociales ont augmenté le 1er janvier, et voilà que la taxe sur le carbone va augmenter aussi.
    Quel est l'état d'esprit de vos membres, à force d'encaisser autant de coûts supplémentaires pour les entreprises? Il doit être extrêmement difficile pour eux de s'accrocher.
    Si vous me permettez d'être extrêmement honnête, je reçois des appels...
    Je préfère que vous soyez extrêmement honnête.
    Je reçois des appels, non seulement pendant la journée mais parfois même les week-ends, de propriétaires de restaurants, indépendants pour la plupart, qui pleurent littéralement au téléphone en me disant qu'avant la COVID, ils avaient 200 000 $ en banque alors qu'ils sont maintenant endettés de 200 000 $, 300 000 $, 500 000 $. Ils ont réhypothéqué leur maison. C'est terrible, c'est extrêmement difficile.
    Certes, pendant la COVID, il y a eu un virage vers la vente à emporter et la livraison, mais cela n'a jamais remplacé le service complet et les clients que nous avions dans nos restaurants.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Bourbeau.

[Traduction]

    Merci, monsieur Bourbeau et monsieur Barlow.
    Mme Valdez est la suivante, pour un maximum de six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins qui sont parmi nous aujourd'hui.
    Par votre entremise, monsieur le président, je vais adresser mes questions à M. Cochrane. Vous avez écrit sur les lacunes du Canada en matière d'impôt des sociétés.
    Pouvez-vous nous dire comment elles contribuent à l'inflation du prix des aliments ou l'accentuent?
    Dans notre analyse de la provenance et de la destination des bénéfices des entreprises, nous nous sommes penchés à la fois sur les marges supérieures de 2021 et le montant de l'impôt payé par les entreprises, par rapport à ce que l'on s'attendrait à ce qu'elles paient, compte tenu des taux d'imposition. Nous avons constaté qu'en 2021, l'évasion fiscale totale des entreprises s'est élevée à environ 30 milliards de dollars.
    Cet argent reste entre les mains des entreprises les plus grandes, les plus puissantes et déjà les plus rentables, qui ont conjugué cette réduction de leurs taux d'imposition effectifs à des marges bénéficiaires encore plus élevées.
    Comme elles augmentent leurs marges bénéficiaires, ces profits doivent bien venir de quelque part. Ils proviennent principalement des petites entreprises, qui — comme M. Bourbeau l'a dit à propos des restaurants — ne peuvent pas transférer les coûts supérieurs auxquels elles sont confrontées à leurs clients, et ils proviennent également des poches des Canadiens.
    Ce sont vraiment les deux côtés d'une même médaille. D'une part, les marges de profit sont plus élevées. Les entreprises font ce qu'elles ont toujours fait, au fond. On ne devrait pas s'en surprendre, mais on a le droit de s'en indigner. D'autre part, elles essaient de faire baisser leurs taux d'imposition par tous les moyens possibles.
    Pouvez-vous nous dire ce que nous pouvons apprendre des autres pays du G7? Je sais que vous faites aussi pas mal de recherches à ce sujet.
    Les autres pays du G7 utilisent divers mécanismes fiscaux que nous devrions absolument examiner, mais je ne peux pas parler en connaissance de cause de la question. Je suis enchanté d'entendre que vous vous intéressez à ce que font les autres pays.
    Nous devrions certainement examiner ce qu'ils font. Nous savons que la répartition du produit social est bien plus équitable dans d'autres pays qu'au Canada. Nous nous targuons d'être un pays où les gens prennent soin les uns des autres, mais d'autres pays en font beaucoup plus, notamment en ayant un régime fiscal plus équitable qui oblige les gros joueurs à payer leur juste part.
(1900)
    Je vous remercie. J'adresserai maintenant mes prochaines questions à M. Bourbeau.
    Monsieur Bourbeau, dans ma circonscription de Mississauga—Streetsville, je suis entourée de nombreuses petites entreprises, particulièrement dans l'industrie de la restauration. J'ai parlé aux propriétaires, qui ont réellement apprécié tout le soutien que le gouvernement fédéral leur a offert, notamment les prêts accordés au titre du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes, dont vous avez parlé plus tôt.
    Convenez-vous que ces prêts ont aidé les restaurants à rester ouverts pendant la pandémie?
    Oui, ils les ont certainement aidés.
    Nous étions certainement ravis que le gouvernement fédéral soit là et soit présent. Nous voulons maintenant nous assurer que tout le monde puisse rembourser ces prêts. Nous voulons que les subventions et les prêts soient remboursés. En outre, vous avez prolongé la durée des prêts du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes, pour notre plus grand bonheur.
     Cela étant dit, nous proposons une solution gagnante pour tous permettant aux propriétaires de restaurant de rester en affaires et de ne pas déclarer faillite, et au gouvernement d'être remboursé. En outre, la prolongation de 36 mois et la solution de paliers décroissants pour la radiation partielle sont réellement des solutions intéressantes pour le gouvernement, car les propriétaires de restaurant et de petite entreprise voudront rembourser leurs prêts le plus rapidement possible, car ils... Eh bien, c'est évident: nous comprenons tous qu'ils garderont une part radiable plus importante.
     C'est une manière de les aider à survivre et à poursuivre leurs activités. De plus, le gouvernement peut ainsi s'assurer qu'un plus grand nombre d'entreprises le remboursent.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je sais que Restaurants Canada tient le RC Show en avril prochain. Sur le site Web, vous avez présenté une initiative que je trouve formidable pour les restaurants: le « Radeau de sauvetage contre l'inflation ». Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s'agit et comment ce radeau aidera les restaurants à faire face à l'inflation? Vous avez parlé précédemment de la diminution des marges. Pouvez-vous nous parler de cette initiative?
    Je n'ai pas d'information à ce sujet avec moi, malheureusement. Je m'en excuse.
    Il n'y a pas de mal. C'est surtout que je cherche à comprendre ce que les restaurateurs et l'industrie considèrent comme les causes de l'inflation du prix des aliments.
    Votre micro est en sourdine, monsieur Bourbeau.
    Bien entendu. On est en 2023 et je laisse encore mon micro en sourdine. Veuillez m'excuser.
    Nous pensions que le pire pour nous était tout ce qui touche aux aliments, mais nous avons malheureusement réalisé au cours des 12 derniers mois que le pire, ce sont les coûts de la main-d'œuvre, les commodités et les assurances, quand nous pouvons en contracter, car c'est un réel problème.
    Sur le plan de l'inflation, ce sont là nos trois pires bêtes noires.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, madame Valdez.
    Je vous remercie, monsieur Bourbeau.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence ce soir. Nous leur en sommes très reconnaissants.
    Madame Cloutier, dans votre allocution d'ouverture, vous avez brossé un bon portrait des causes de l'inflation et des problèmes vécus présentement.
    Si vous aviez une recommandation à faire au Comité sur la façon dont le gouvernement pourrait aider les entreprises de votre groupe de transformateurs, quelle serait-elle?
    Personnellement, je crois qu'on doit nous appuyer dans la mise en place d'un code de pratiques exemplaires entre les grands détaillants, les distributeurs et les fournisseurs.
    Je vais laisser mon collègue M. Fraeys vous faire part de recommandations portant précisément sur la pénurie de main-d'œuvre et les travailleurs étrangers temporaires.
    Comme on l'a mentionné tantôt, la main-d'œuvre est un problème criant. Dans notre cas, de 15 % à 20 % des postes sont vacants en raison du manque de main-d'œuvre. Nous devons donc faire venir des travailleurs étrangers temporaires pour pourvoir ces postes. Or, cela occasionne des coûts supplémentaires de 5 $ l'heure.
    Le problème, quand on fait venir des travailleurs étrangers temporaires, ce sont les délais. Il peut s'écouler de 8 à 15 mois entre le moment où on fait la demande et le moment où on reçoit le travailleur. Par conséquent, nous demandons principalement de réduire les délais à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Le délai avant d'obtenir un permis de travail peut être très long; il peut être de quatre, cinq ou six mois.
    En ce qui a trait aux études d'impact sur le marché du travail, même si Service Canada a passablement amélioré l'efficacité de son fonctionnement, il demeure que, si on pouvait créer un système d'employeurs de confiance, un peu comme le programme NEXUS à la douane, les employeurs qui font venir les mêmes travailleurs d'une année à l'autre pourraient avoir accès à une voie rapide et les délais seraient réduits.
    Le problème réside vraiment dans les délais, qui sont considérables et que nous voudrions voir réduits de moitié, si possible. On ne peut pas changer les dates de la saison des récoltes. Quand un employeur fait une demande, il s'attend à ce que les travailleurs arrivent au moment de la récolte, et non après celle-ci. C'est une situation qui est déjà arrivée.
    Par ailleurs, je pense que les taux d'intérêt posent la plus grande difficulté actuellement. Tantôt, M. Bourbeau a parlé des prêts. Dans le cas des entreprises de transformation, les stocks sont très élevés, parce que les commandes se font plus difficilement. Si les restaurateurs ou les autres clients ont de la difficulté à savoir quelle sera la demande finale, les demandes seront moins élevées. Par exemple, auparavant il y avait des contrats d'un an, mais aujourd'hui on parle de contrats d'un à trois mois. Le transformateur doit donc tenir un niveau de stocks beaucoup plus grand, pendant de plus longues périodes, alors que les taux d'intérêt sont beaucoup plus élevés.
    Nous recommandons donc de faciliter l'accès au crédit à court terme, un peu de la même façon que la Banque de développement du Canada accorde des prêts de cinq ans sans intérêt aux entreprises qui investissent en transformation numérique. Si on avait l'équivalent pour ce qui est des marges de crédit, cela aiderait énormément les entreprises à traverser les 12 à 18 prochains mois, qui seront difficiles notamment en raison de la hausse des taux d'intérêt et de l'inflation.
    Ce seraient nos principales recommandations.
(1905)
    Croyez-vous que cette mesure pourrait aider à contrôler l'inflation des prix des aliments, au bout du compte?
    À partir du moment où les frais d'intérêt sont moins élevés, cela réduit la pression. Comme je le disais tantôt, les stocks sont élevés et tous les coûts augmentent. Quand les coûts augmentent, les demandes en matière d'outils financiers sont automatiquement à la hausse.
    Ce que nous proposons aiderait les entreprises à traverser les prochains mois, qui s'annoncent un peu plus difficiles.
    Merci, c'est bien noté.
    Dans la présentation d'ouverture du Conseil de la transformation alimentaire du Québec, il a été question du rapport du Groupe de travail national sur la chaîne d'approvisionnement. Vous dites que vous auriez besoin d'une réduction des intérêts, parce que vous devez maintenir de grands niveaux de stocks, en raison des problèmes de transport.
    Pouvez-vous me parler de cet aspect? Que pourrait-on faire à cet égard?
    Effectivement, vous avez raison. Le Groupe de travail national sur la chaîne d'approvisionnement, sous l'égide de Transports Canada, a présenté son rapport au mois d'octobre, dans lequel il a fait un certain nombre de recommandations. La plus urgente, c'est d'utiliser la technologie numérique pour améliorer la logistique et le transport au Canada.
    On peut considérer le Canada comme une grande usine manufacturière. Si on améliore l'efficience, les processus et les opérations, cela coûtera moins cher et les flux seront plus rapides. Dès qu'on améliore les flux, on réduit les coûts.
    Par exemple, en février 2022, le pont Ambassador a été fermé. Je rappelle que la fermeture d'un lien essentiel comme celui-là peut créer des difficultés dans toute l'économie du Canada.
    Si l'on pouvait améliorer les flux de transport, qu'il s'agisse de transport terrestre, maritime ou ferroviaire ou encore de transbordement entre les bateaux et les trains, cela nous permettrait d'être plus efficients et donc de réduire...
    Monsieur Fraeys, je suis désolé de vous interrompre, mais mon temps de parole est presque écoulé.
    En conclusion, vous aimeriez qu'il y ait des investissements à cet égard dans le prochain budget, n'est-ce pas?
    En effet, nous aimerions voir des investissements substantiels dans le budget afin de pouvoir améliorer la logistique et le transport au Canada.
(1910)
    J'étais préoccupé de voir qu'une autre question était posée alors qu'il ne restait que 15 secondes, mais vous avez fait du bon travail pour respecter le temps, monsieur Perron et monsieur Fraeys.
    Monsieur MacGregor, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins.
    Monsieur Cochrane, je voudrais commencer par vous.
    Je félicite Canadiens pour une fiscalité équitable de son travail et je veux vous remercier de votre allocution d'ouverture, où vous avez notamment mentionné les profits de l'industrie pétrolière et gazière.
    Vous avez entendu mon collègue, M. Barlow, parler de la tarification du carbone. Les conservateurs ne ratent pas une occasion d'en parler, mais nous ne parlons pas suffisamment de la marge de profit délirante des sociétés pétrolières et gazières. M. Jim Stanford nous a remis un document qui indique que depuis 2019, le revenu net annuel de ces sociétés a augmenté de 1,011 %. Elles ont ainsi engrangé un profit net de 38 milliards de dollars.
    Bien entendu, nous savons que les combustibles fossiles sont nécessaires sur les fermes. Les agriculteurs bénéficient d'une exemption en vertu de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Les activités agricoles sont donc exemptées, mais pour les marchandises et de tout ce qu'il faut, les combustibles fossiles sont évidemment nécessaires.
    Monsieur Cochrane, pouvez-vous expliquer les répercussions que ce genre d'augmentation délirante des profits a sur l'abordabilité pour les familles canadiennes qui peinent à joindre les deux bouts actuellement?
    Notre organisation a été fondée pour lutter contre le dénigrement de l'imposition. Nous voyions l'impôt comme un mécanisme social essentiel et voulions pouvoir tenir une conversation adulte à ce sujet. Nous n'avons certainement jamais voulu parler en mal de l'impôt comme tel, mais je pense parfois que les profits des sociétés sont comme un impôt payé aux acteurs du secteur privé plutôt qu'aux institutions publiques. L'augmentation faramineuse des marges de profit des sociétés est comme une hausse d'impôt salée, sauf qu'au lieu d'être accordé aux institutions publiques qui l'utilisent pour le bien public, l'argent va dans les mains d'acteurs du secteur privé qui le distribuent ensuite entre les actionnaires, dont la très vaste majorité trônent tout en haut de la hiérarchie économique.
    L'accroissement des marges de profit pour un produit aussi essentiel que les combustibles fossiles finit par faire augmenter les coûts pour pas mal toutes les autres entreprises. Si certaines d'entre elles pourront refiler quelques coûts au suivant, d'autres pourront en refiler moins alors que d'autres encore devront tout simplement les absorber. On assiste à une redistribution difficile des coûts, les sociétés pétrolières et gazières en sortent les grands gagnants. Conséquence de ce phénomène, les trois grands acteurs du secteur — Shell, BP et un autre dont le nom m'échappe — ont essentiellement fait savoir qu'elles renieront leur promesse d'investir dans l'énergie propre pour chercher encore plus fort à exploiter les combustibles fossiles.
    Nous allons en plein dans la mauvaise direction. Les profits fabuleux que font ces sociétés nous envoient dans la mauvaise direction, et nous devons examiner des mécanismes fiscaux pour nous aider à nous remettre dans le droit chemin. Si ces acteurs n'investissent pas dans les énergies propres dont nous avons besoin, alors le gouvernement doit montrer la voie en effectuant les investissements nécessaires et en utilisant des mécanismes fiscaux pour les financer.
    Autrement dit, monsieur Cochrane, vous dites que si les parlementaires veulent sérieusement s'attaquer aux problèmes d'abordabilité auxquels les familles travaillantes du Canada sont confrontées, nous aurions une incidence bien plus considérable si nous concentrions nos efforts sur les marges de profit délirantes plutôt que sur la tarification du carbone. Est‑ce bien cela?
    Absolument. Vous devez commencer à intervenir dans la lutte de redistribution, où les gagnants ont toujours été les mêmes. La pandémie a simplement fait augmenter leurs gains. Nous assisterons à une aggravation considérable de l'inégalité après une brève amélioration, notamment parce que nous avons failli avoir quelque chose s'approchant d'un revenu annuel garanti qui bénéficiait du soutien d'une large part de la population canadienne. Maintenant, cet argent file dans les comptes de ceux qui sont déjà extrêmement riches, en partie à cause de l'augmentation démentielle des marges de profit des sociétés pour laquelle nous payons tous, au bout du compte.
(1915)
    Je vous remercie de le souligner, car les gens se taisent souvent quand vient le temps de jeter un œil critique sur la situation. Je pense qu'il faut qu'un plus grand nombre de voix comme la vôtre se joignent au débat afin d'exposer réellement ce que les familles canadiennes vivent. Où va le revenu qu'elles gagnent à la sueur de leur front? Où finit‑il par aboutir?
    Monsieur le président, par respect pour les autres membres du Comité, je veux profiter de l'occasion que m'offre ma dernière minute pour donner avis d'une motion. Je respecterai le temps des autres membres et proposerai ma motion pendant la deuxième heure.
    Je donne avis de la motion suivante: « Que le Comité étende l'étude sur l'inflation du prix des aliments en augmentant le nombre de réunions dans la motion adoptée le mercredi 5 octobre 2022 à au moins 6 réunions; que le Comité assigne à comparaître les chefs de la direction et présidents des Compagnies Loblaw limitée, [...] de Metro inc., [...] et d’Empire Company Limited, [...] devant le Comité; que le Comité invite des témoins supplémentaires à comparaître et que les partis fournissent à la greffière du Comité, au plus tard à 16 h HNE le mardi 28 février 2023, leurs listes de témoins supplémentaires, et que le président les invite d'une manière équitable pour tous les partis. »
    Monsieur le président, j'ai maintenant donné avis de ma motion. Je proposerai ma motion pendant la deuxième heure. Je voulais simplement donner à mes collègues l'occasion de l'examiner et de prendre une décision.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur MacGregor. Je sais que nos collègues réfléchiront à la question.
    Nous entamerons maintenant notre deuxième tour.
    J'accorde la parole à M. Lehoux, du Parti conservateur.

[Français]

    Monsieur Lehoux, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Deux des témoins ont parlé, dans leur présentation d'ouverture, du problème de la main-d'œuvre.
    Je vais m'adresser d'abord à Mme Cloutier, puis à M. Bourbeau par la suite.
    Vous avez mentionné des problèmes liés aux études d'impact sur le marché du travail, les fameuses EIMT. Dans un contexte où les taux de chômage sont très bas et où les entreprises s'arrachent la main-d'œuvre, seriez-vous d'accord pour recommander qu'on mette de côté les EIMT afin d'alléger le processus, premièrement?
    Par ailleurs, vous avez parlé des délais de délivrance des permis de travail, qui sont interminables. Quelle serait votre suggestion? Nous avons entendu toutes sortes de propositions, mais il me semble que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle important à cet égard, car cela a un impact direct sur le coût de nos aliments.
    Vous avez raison.
    Je vais laisser mon collègue M. Fraeys répondre à votre question.
    En ce qui concerne l'élimination des EIMT, c'est une excellente idée. Peut-être qu'elles sont justifiables dans le cas des nouveaux travailleurs, mais, comme je le disais, il y a des travailleurs étrangers qui viennent ici depuis 10 ou 15 ans. À l'époque, les EIMT avaient été mises en place pour qu'on s'assure qu'aucun travailleur canadien n'était disponible avant d'engager des travailleurs étrangers. Aujourd'hui, alors que les taux de chômage sont de 4 % ou 5 %, on sait très bien qu'il n'y a plus de travailleurs disponibles dans les régions. C'est pour cela que les entreprises sont obligées d'engager des travailleurs étrangers. L'idée d'éliminer les EIMT est donc une très belle suggestion.
    Deuxièmement, en ce qui concerne les délais à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, le problème fondamental est un manque de ressources, un peu comme c'était le cas à Service Canada, il y a un an. La seule façon d'accélérer le processus, c'est de le simplifier. Si IRCC pouvait recourir à la technologie numérique pour les demandes, cela irait beaucoup plus vite. Cela éviterait qu'un grand nombre de travailleurs doivent faire l'objet d'une étude.
    J'aimerais vous poser une question sur les travailleurs qui arrivent après des délais beaucoup trop longs.
    Durant la pandémie, on a permis aux travailleurs étrangers d'aller d'une entreprise à l'autre. Est-ce qu'une telle mesure pourrait causer un problème de disponibilité de la main-d'œuvre?
    C'est du moins ce que je constate dans ma région. Certaines entreprises de transformation ou de restauration ont fini par perdre des travailleurs étrangers qu'ils avaient fait venir. Ils se les sont fait prendre par d'autres entreprises.
    Comment voyez-vous cette situation? Est-ce un problème que vous constatez?
(1920)
    Oui, nous constatons ce problème principalement lors des renouvellements de permis. C'est l'entreprise qui fait toute la démarche, et le travailleur peut décider, une fois que son permis est renouvelé, d'aller travailler pour un autre employeur. Effectivement, cela cause un préjudice à l'entreprise qui a fait la démarche.
    Qu'en est-il de votre côté, monsieur Bourbeau?
    Je suis en faveur d'éliminer les EIMT le plus rapidement possible, s'il vous plaît. Il faut également plus de ressources à IRCC.
    Vous avez tout à fait raison de dire qu'on perd des employés lorsque ceux-ci se retrouvent avec un permis de travail ouvert. C'est notamment le cas pour les restaurants, comme vous en avez parlé. C'est très difficile.
    Par contre, ce que nous aimerions, c'est que des groupes de restaurants, par exemple des chaînes comptant 10 restaurants, aient la flexibilité de faire bouger les employés d'un restaurant à l'autre. C'est quelque chose d'important.
    Maintenant, j'aimerais aborder rapidement deux autres éléments.
    Cette année, une mesure a été mise en place pour nous permettre d'embaucher jusqu'à 30 % de travailleurs étrangers, et non plus 20 %. Cette mesure s'applique à sept secteurs, dont le nôtre, celui de la restauration. S'il vous plaît, prolongez cette mesure, car cela nous donne de l'air.
    Il y a un dernier élément que je veux souligner. Nous en avons déjà parlé et je vous en reparlerai plus tard. C'est à propos du code de la Classification nationale des professions, qui répertorie de façon très précise les postes et qui s'applique aux travailleurs étrangers qu'on fait venir ici. Il faudrait modifier cette classification et élargir les catégories de postes, pour nous donner un peu plus de flexibilité. Ainsi, après avoir fait venir ici un travailleur étranger, nous pourrions le former dans d'autres postes par la suite et le faire évoluer dans l'entreprise. Ce serait bon pour lui et cela lui ouvrirait la voie vers l'obtention de son statut de résident permanent au Canada.
    Merci beaucoup, monsieur Bourbeau. Ce sont d'excellentes suggestions.
    J'aimerais poser une dernière question sur...
    Malheureusement non, monsieur Lehoux. C'est bien essayé, mais le temps de parole est de cinq minutes.
    Je cède maintenant la parole à M. Drouin pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Bourbeau, de Restaurants Canada.
    Je veux juste m'assurer de bien comprendre vos demandes.
    Tout d'abord, étant donné que 20 % des gens que vous avez sondés ne pourront pas respecter l'échéance établie pour le remboursement du fameux prêt au titre du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes, vous demandez une prolongation.
    Ensuite, vous demandez une réduction de la taxe d'accise sur l'alcool, qui augmente naturellement avec le taux d'inflation.
    Par ailleurs, vous demandez de faire passer le taux d'imposition des PME de 9 % à 8 %.
    Je vais être honnête avec vous. Je jase avec des restaurateurs presque tous les jours et ils me parlent tous de la pénurie de main-d'œuvre. Or, ce sujet ne se retrouve pas dans vos trois priorités.
    Avez-vous parlé à vos membres? Vos demandes ne reflètent pas du tout la situation que nous vivons chez nous. Je me pose donc la question: la pénurie de main-d'œuvre est-elle ou non un problème important pour Restaurants Canada?
    La pénurie de main-d'œuvre est assurément le problème le plus important. Elle est à l'origine d'une augmentation de 20 % des frais. Comme je l'ai mentionné dans mon allocution d'ouverture, nous fonctionnons à 80 % de nos capacités. Pourquoi est-ce le cas? C'est parce qu'il nous manque des gens.
    C'est pourquoi, dans mon dernier commentaire, j'ai proposé des recommandations concernant les travailleurs étrangers et la main-d'œuvre.
    Comme le sujet de la réunion d'aujourd'hui était l'inflation, nous avons présenté quelques points qui concernaient l'inflation, les coûts, les remboursements ainsi que l'allégement fiscal pour nos membres.
    D'accord.
    Si je comprends bien, 20 % de vos membres demandent une prolongation, mais 80 % de vos membres ont réussi à respecter leurs engagements auprès du gouvernement.
    Il y a deux ou trois ans, quand la mesure a été mise en place, tant la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante que Restaurants Canada étaient d'avis que l'échéance de 2023 était raisonnable et que les gens pourraient rembourser 10 000 $ des 40 000 $ empruntés ou 20 000 $ des 60 000 $.
    Aujourd'hui, l'économie n'a peut-être pas repris comme nous l'espérions et, après avoir sondé vos membres, vous demandez une autre prolongation.
    Est-ce bien cela?
    C'est plus que cela. Le sujet qui est étudié par votre comité aujourd'hui, c'est l'inflation. Or, l'inflation enregistrée durant la dernière année a été absolument aberrante. Même l'année précédente, par exemple, les prix de tous les produits laitiers ont augmenté de 12,4 %, alors qu'avant la pandémie de la COVID‑19, c'était normalement de l'ordre de 1,2 % à 2 %. Le coût d'une pizza a augmenté de 15 % à 17 %. Ce sont des augmentations énormes.
    Nous ne sommes donc plus dans la même situation que celle où nous étions. Cela dit, nous sommes très reconnaissants des prolongations que nous avons obtenues.
    Maintenant, lorsque nos membres nous disent qu'ils ne seront pas capables de rembourser leur prêt, nous essayons de trouver une solution pour qu'ils soient en mesure de le rembourser, pour que ces gens restent en affaires, pour éviter qu'ils perdent leur entreprise ou que leurs employés perdent leur emploi, et aussi pour que le gouvernement recouvre son argent.
(1925)
    Je comprends.
    Vous me dites que le prix de la pizza ou le prix des aliments en général a augmenté, mais êtes-vous en train de dire que les restaurants n'ont pas augmenté leurs prix en conséquence?
    C'est une très bonne question.
    M. Cochrane en parlait tout à l'heure. Dans toute la chaîne d'approvisionnement alimentaire, la majorité des gens avant nous, par exemple les producteurs et les distributeurs, transfèrent l'augmentation aux suivants. Malheureusement, lorsque cela arrive à nous, nous devons en absorber un maximum, et nous tentons de le faire dans la mesure du possible, parce que nous ne pouvons pas transférer la totalité de cette augmentation aux clients.
    J'ai parlé du principe de l'élastique, une analogie que tout le monde comprend bien. Il y a un prix maximum que les consommateurs, comme vous et moi, sont prêts à payer pour une pizza ou un hamburger. À un certain moment, on ne peut pas augmenter les prix davantage.
    Nous rationalisons donc les menus, d'autant plus que nous sommes ouverts moins de jours ou de soirs et que nous avons des heures quotidiennes d'ouverture qui sont réduites. Nous essayons de maximiser tous les aliments utilisés et d'avoir le moins de pertes possible, mais il y a des limites à cela aussi.
    Nous sommes donc à la limite de notre capacité d'augmenter les prix.
    Bien sûr.
    Disons que le gouvernement décide d'apporter un changement à la taxe d'accise sur l'alcool et de la réduire en fonction d'un taux d'inflation normal, c'est-à-dire autour de 2,1 % ou 2,3 %, plutôt qu'en fonction du taux d'inflation réel. C'est effectivement une demande que j'ai entendue très haut et fort de la part de l'industrie. Pour Restaurants Canada, cela voudrait dire que les prix de l'alcool augmenteraient seulement de 2,1 % ou 2,3 % au cours des prochaines années.
    Est-ce bien cela?
    Je vous demanderais de répondre très rapidement, s'il vous plaît.
    Oui.
    Notre but est de garder les prix le plus bas possible tout en dégageant la marge minimale nécessaire pour survivre. Nous en sommes à ce point actuellement.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mes questions s'adresseront encore une fois à Mme Cloutier et à M. Fraeys, du Conseil de la transformation alimentaire du Québec.
    Parmi vos recommandations, vous demandez qu'on vous appuie dans la mise en place d'un code de pratiques exemplaires.
    Certains témoins de la semaine dernière, entre autres les gens de l'Association des producteurs maraîchers du Québec, nous ont parlé de la nécessité d'établir un tel code ainsi que du mécanisme de fixation des prix, qui est difficile. Ces gens ont mentionné deux aspects importants. Entre autres, il faudrait une espèce d'enquête du Bureau de la concurrence sur les mécanismes de fixation des prix, car ces producteurs voyaient une grande différence entre le prix qu'ils obtenaient pour un légume et son prix de vente à l'épicerie, même en solde.
    Est-ce quelque chose qui devrait être fait?
    C'est quelque chose qui pourrait être fait par le Bureau de la concurrence, mais je ne sais pas si c'est une nécessité à l'heure actuelle.
    Nous prônons plutôt de stabiliser les relations entre les fournisseurs et leurs clients, c'est-à-dire les distributeurs et les détaillants. Nous savons tous qu'un détaillant ou un distributeur alimentaire doit, lui aussi, composer avec les coûts de l'inflation. Cela se répercute sur le transport et les salaires, notamment. Évidemment, il va chercher sa marge au moyen des prix des aliments sur les tablettes.
    Nous sommes tous un peu dans la même situation actuellement. Pour tout le monde, la seule façon de compenser l'augmentation des coûts subie pendant la dernière année en raison de tous les facteurs que nous venons d'énumérer, c'est-à-dire l'inflation, le transport, l'augmentation des salaires, les bris dans la chaîne d'approvisionnement, c'est malheureusement...
    Excusez-moi de vous interrompre, madame Cloutier, mais il me reste seulement 20 secondes.
    Considérez-vous que l'État canadien devrait recueillir plus d'information concernant la fixation des prix? C'est une autre recommandation qui a été faite au Comité. C'est peut-être quelque chose à renforcer. Comparativement aux États‑Unis, il paraît que le Canada a beaucoup moins d'information permettant de savoir de quelle façon les prix sont augmentés à chacun des échelons.
    Qu'en pensez-vous?
    Évidemment, il devrait y avoir de la transparence. On devrait effectivement avoir un peu plus d'information sur l'ensemble des coûts dans la chaîne d'approvisionnement.
(1930)
    Merci beaucoup.
    Pour finir, je cède la parole à M. MacGregor pour deux minutes et demie.

[Traduction]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Cochrane, nous avons maintenant entendu un certain nombre de témoins.
    Ce n'est pas la première controverse qui secoue le secteur de l'épicerie. Nous connaissons le scandale de la fixation du prix du pain et avons entendu des allégations très sérieuses à ce sujet.
    Notre comité a entendu de nombreux producteurs et transformateurs qui ont préconisé d'instaurer un code de conduite dans le secteur de l'épicerie en raison des frais cachés et des amendes.
    À l'heure actuelle, des consommateurs et des familles travaillantes de ma circonscription et de toutes les régions du pays voient le prix des aliments — des aliments dont les gens ont besoin pour nourrir leur famille — atteindre des sommets astronomiques.
    Je veux légèrement changer de sujet.
    Pendant votre allocution d'ouverture, vous avez proposé deux solutions pour s'attaquer au pouvoir excessif des sociétés au Canada, et particulièrement aux profits, grâce à un impôt minimal sur les profits déclarés et un impôt sur les profits excessifs.
    Je veux également m'attarder à la position dominante que ces entreprises sont capables d'occuper, une position appelée oligopole dans le secteur de l'épicerie. Nous savons que ce secteur fait face à une crise de confiance.
    De nombreux témoins ont évoqué le Bureau de la concurrence et la Loi sur la concurrence.
    Monsieur Cochrane, auriez-vous des recommandations que vous voudriez que le Comité examine concernant le Bureau de la concurrence? Quelles suggestions ou recommandations pourrions-nous faire au gouvernement fédéral pour qu'il s'attaque à la position dominante que les grandes chaînes d'épiceries exploitent si adroitement pour augmenter leurs profits?
    Comme je l'ai indiqué, les fournisseurs et leurs clients se font une chaude lutte au chapitre des coûts. Il est certainement crucial de réduire le pouvoir oligopolistique dont jouissent les grandes chaînes d'épiceries. Cependant, je ne pense pas que nous devrions trop miser sur la concurrence pour y parvenir, car les épiciers doivent transiger avec des fournisseurs qui sont souvent des sociétés transnationales gigantesques.
    Nous en avons eu un exemple retentissant avec la lutte entre Frito-Lay et Loblaws. Si Loblaws a réussi à refuser l'augmentation de prix que Frito-Lay voulait lui imposer, c'est en partie parce qu'il est une grosse pointure dans l'industrie.
    Nous ne savons pas vraiment quelle sera l'issue de cette lutte. Je ne veux pas nécessairement dire que Loblaws était en quelque sorte du côté des Canadiens dans cette lutte. Cela montre toutefois qu'il faut parfois être gros pour résister aux autres gros acteurs.
    S'il faut que certaines de nos chaînes d'épiceries soient grosses pour résister aux grands fournisseurs, alors il faut les réglementer. On ne peut pas s'attendre à ce que le jeu de la concurrence accomplisse le travail que les économistes nous affirment qu'il fera.
    Je vous remercie, monsieur Cochrane. Merci, monsieur MacGregor.
    Je vous ai accordé un peu de temps supplémentaire pour pouvoir entendre cette réponse, mais ainsi faisons-nous les choses. Notre comité s'efforce de travailler en collaboration.
    Honorables collègues, c'est ici que prend fin le témoignage du premier groupe de témoins.
    Permettez-moi de remercier M. Cochrane, Mme Cloutier, M. Fraeys et M. Bourbeau de leur témoignage et du travail qu'ils accomplissent dans leurs industries respectives. Je sais que je parle au nom du Comité en affirmant que leurs témoignages nous ont été utiles.
    Nous vous remercions d'avoir pris le temps de comparaître devant nous.
    Honorables collègues, nous allons maintenant passer au deuxième groupe de témoins. Ce ne sera pas long, alors ne vous éloignez pas.
(1930)

(1935)

[Français]

    Nous reprenons la séance.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins que nous recevons pour la deuxième heure de la réunion.
    Nous accueillons à titre personnel M. James Brander, professeur à l'Université de la Colombie‑Britannique.

[Traduction]

    Nous recevons également M. Jim Stanford, économiste et directeur au Centre for Future Work.

[Français]

    Nous recevons aussi deux représentants de l'Union des producteurs agricoles: M. Martin Caron, président général, et M. David Tougas, coordonnateur de l'économie et du commerce.
(1940)

[Traduction]

    Bienvenue à tous nos témoins. Vous disposerez de cinq minutes pour faire votre allocution d'ouverture, après quoi nous commencerons à vous poser des questions.
    J'accorderai la parole en premier à M. Brander.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie de m'avoir invité à participer à la réunion d'aujourd'hui. Je crois comprendre que le Comité étudie l'inflation dans la chaîne d'approvisionnement en aliments et qu'il se préoccupe particulièrement de la possibilité que les grands détaillants en alimentation gonflent leur prix et fassent des profits excessifs.
    Je ne suis pas économiste agricole et je n'ai jamais étudié l'établissement des prix dans le secteur agroalimentaire, mais j'ai réalisé des recherches sur les prix exagérément élevés, les profits excessifs, la collusion et d'autres problèmes connexes. J'ai témoigné à titre d'expert dans ces domaines à maintes reprises et ai évalué l'ampleur du problème de prix et de profits excessifs dans de nombreux cas.
    J'ai effectué un bref examen des problèmes de prix des aliments au Canada récemment, et j'espère pouvoir contribuer de quelconque manière aux délibérations du Comité, mais je ne promets rien.
    Selon Statistique Canada, l'inflation globale, mesurée d'après l'indice des prix à la consommation, était d'environ 7 % en 2022, un sommet en 40 ans. Le prix des aliments achetés en épicerie a quant à lui augmenté de 10 % environ. L'inflation du prix des aliments a donc augmenté davantage que l'inflation des prix en général, l'écart étant d'environ trois points de pourcentage. J'appellerai ce phénomène la surinflation du prix des aliments. Je me suis posé un éventail de questions, dont je vous fournirai les réponses.
    Mais avant tout, voici quelques explications. Qu'entend‑on par prix et profits excessifs? Les gens utilisent ces termes de différentes manières, mais comme la plupart des économistes, je parle de prix excessifs quand les prix sont supérieurs à ce à quoi on s'attendrait quand la concurrence est raisonnable et normale dans l'industrie concernée. Les profits excessifs sont le résultat des prix trop élevés.
    Quelles sont les causes de la surinflation du prix des aliments? Parmi les facteurs contributifs, à quel point le gonflement du prix par les détaillants en alimentation est‑il important? Sachez que plusieurs facteurs évidents s'ajoutent aux prix excessifs, notamment la guerre en Ukraine, qui a réduit l'offre et fait augmenter les prix des céréales et d'autres produits. Il y a également les phénomènes climatiques, comme les sécheresses qui ont touché certaines régions du Canada, et les inondations et les sécheresses survenues dans le reste du monde. Votre étude ne porte pas sur les changements climatiques, mais il semble que ce n'est pas que dans le domaine scientifique que l’on considère que ces phénomènes climatiques de plus en plus graves sont dus aux changements climatiques, du moins en partie. Je voudrais également mentionner les effets prolongés que la pandémie de COVID‑19, bien que ces effets soient en train de s'atténuer, et les problèmes ponctuels, comme la grippe aviaire qui a provoqué une crise en 2002, ont sur les chaînes d'approvisionnement.
    La plupart de ces effets ne se limitent pas au Canada et devraient donc avoir des répercussions dans d'autres pays. Je me suis intéressé à d'autres pays et j'ai constaté qu'en fait, l'inflation du prix des aliments au Canada est inférieure à la moyenne des pays de l'OCDE en 2022. Fait plus important encore, la surinflation du prix des aliments au Canada était moins élevée que la moyenne des pays de l'OCDE. Si on prend en compte tous ces facteurs, il ne reste pas grand-chose à expliquer par les prix gonflés.
    Existe‑t‑il des preuves de collusion ou de toute autre forme de pratique non concurrentielle dans le secteur de l'épicerie? Pas vraiment. En 2017, il y a eu le scandale de la collusion pour fixer le prix du pain. On pouvait s'attendre à ce que les chaînes de supermarchés réagissent en prenant grand soin de ne pas s'adonner encore à la collusion, bien entendu, et je pense que c'est ce qu'elles ont fait. Je pense que le Bureau de la concurrence a maintenant l'industrie dans sa mire, mais je n'ai pas eu vent de problèmes de collusion dans les dernières années.
    Qu'en est‑il de la rentabilité? A‑t‑elle augmenté dans le secteur de l'épicerie? C'est difficile à dire avec certitude, mais il semble qu'elle ait quelque peu augmenté pendant la pandémie de COVID‑19. J'ai examiné le prix des actions, qui ont légèrement augmenté à la Bourse de Toronto; pas beaucoup, mais un peu. C'est exactement ce à quoi je me serais attendu comme conséquence de la pandémie, car cette dernière a créé des conditions favorisant les profits des épiceries, la transition de la demande des restaurants vers les épiceries, et les pénuries qui poussent les prix et les plus-values à la hausse. Il n'y a donc pas de surprise là.
    Cela signifie‑t‑il que les augmentations de prix sont « motivées par le profit »? Bien sûr qu'elles le sont. Je dirais que la plupart des changements de prix sont motivés par le profit. Les entreprises sont en activités pour faire des profits et ajustent leurs prix en conséquence. Et c'est tant mieux, car la motivation de faire des profits génère des retombées sociales et économiques plus efficacement que tout autre système. Comme Adam Smith l'a affirmé, ce n'est pas parce que le boucher, le brasseur ou le boulanger sont bienveillants que nous pouvons souper, mais parce qu'ils veillent à leur propre intérêt.
    Les augmentations de prix agissent comme un signal. Souvent, de gros profits temporaires peuvent être réalisés, mais cela incite des concurrents potentiels à entrer ou à prendre de l'expansion sur le marché, et encourage les consommateurs à moins gaspiller. Je ferais remarquer que pendant la pandémie de COVID‑19, il y avait encore beaucoup trop de gaspillage au Canada. Quoi qu'il en soit, c'est exactement la réaction qu'il faut avoir: augmenter l'offre et diminuer la demande. L'imposition de contrôles des prix ou l'augmentation de l'impôt sur les profits auraient probablement un effet totalement contraire et aggraveraient les problèmes au lieu de les atténuer, comme nous l'avons appris quand nous avons tenté d'appliquer de telles solutions.
(1945)
    Cela dit, Adam Smith nous a également mis en garde contre la collusion et les pratiques anticoncurrentielles, en rappelant que le pouvoir de marché pourrait nuire à l'intérêt public.
    Existe‑t‑il un problème structurel dans le secteur de l'épicerie à cause d'un manque de concurrence? C'est possible. Le secteur régional présente une concentration assez élevée, car trois entreprises détiennent environ 60 % du marché. Ces détaillants ont un grand pouvoir de marché comparativement aux petits fournisseurs. Il y a aussi de gros fournisseurs…
    Monsieur Brander, malheureusement, vos cinq minutes sont écoulées. Je vais vous donner quelques secondes pour conclure si vous souhaitez faire quelques derniers commentaires.
    D'accord.
    J'allais dire que je ne peux pas exclure les problèmes structurels de ce type. Toutefois, si la prime de risque-inflation a eu un effet en 2022, je suis certain qu'il a été minime. Je pense que les outils de la politique en matière de concurrence sont les outils appropriés pour traiter de tels enjeux. Je serais pour le renforcement de la politique dans certains domaines.
    Je vais m'arrêter ici, car j'en ai déjà assez dit.
    Je vous remercie beaucoup.
     Je vous remercie beaucoup.
    Nos collègues auront certainement l'occasion de vous poser des questions.
    La parole est à M. Stanford. Il a cinq minutes.
    Je remercie également les membres du Comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
    Je m'appelle Jim Standford, et je suis économiste et directeur du Centre for Future Work, un centre de réflexion sur l'économie du travail qui a des bureaux à Vancouver et en Australie.
    J'ai préparé un mémoire sur les profits et les prix dans le secteur de la vente au détail des aliments. J'espère que vous l'avez à portée de main. Permettez-moi de résumer brièvement, pendant le temps qui m'est imparti, les principales conclusions de ce mémoire.
    Dans ce mémoire, j'utilise les données de Statistique Canada pour l'ensemble de l'industrie, afin d'évaluer le rendement des entreprises dans le secteur élargi de la vente au détail des aliments. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles j'utilise la source globale de Statistique Canada plutôt que les états financiers individuels des entreprises, que vous analysez également dans vos délibérations.
    La première raison, c'est que l'enquête de Statistique Canada fournit des définitions uniformisées des notions et des mots utilisés, tandis que les rapports financiers individuels des entreprises peuvent utiliser des mots différents pour certains des rapports précis qu'ils présentent.
    La deuxième raison, c'est que la source de Statistique Canada regroupe les données sur des périodes de déclaration communes, comme des trimestres et des mois. Encore une fois, c'est différent des entreprises individuelles, qui utilisent des points de départ et d'arrivée différents pour les exercices financiers, ce qui rend les comparaisons plus difficiles.
    Enfin, les données de Statistique Canada donnent une idée très utile des tendances générales dans l'ensemble de l'industrie et au fil du temps, ce dernier point étant très important, à mon avis.
    Quant aux principales conclusions de mon examen, il ne fait aucun doute que les profits totaux ont fortement augmenté dans le secteur de la vente au détail des aliments au Canada depuis la période qui précède la pandémie. En effet, au cours des quatre derniers trimestres présentés par Statistique Canada, le revenu net était 120 % plus élevé qu'en 2019, la dernière année avant la pandémie.
    La marge de profit sur le total des ventes a aussi considérablement augmenté. La marge de revenus nets — le revenu net en tant que part du revenu total dans la vente au détail des aliments — a augmenté d'environ trois quarts au cours des quatre derniers trimestres par rapport à 2019.
    Enfin, je montre également que la quantité réelle de produits d'épicerie achetée par les Canadiens diminue. Elle a atteint un sommet pendant les périodes de confinement pour des raisons évidentes. Elle est ensuite revenue à la normale, mais elle est maintenant à la baisse. Je dirais qu'il s'agit d'un exemple de sujet d'inquiétude. C'est certainement une réponse à la hausse des prix, mais aussi un signe de stress et de faim dans les ménages canadiens, car les Canadiens achètent des quantités moins élevées de produits d'épicerie aujourd'hui qu'en 2019, même si notre population est nettement plus élevée.
    Mon analyse démontre que l'affirmation répandue selon laquelle les supermarchés ont simplement perçu une marge constante sur un secteur en croissance est manifestement fausse, et ce, pour deux raisons différentes. La première, c'est que la marge n'était pas constante, car elle a visiblement augmenté. La deuxième, c'est que non seulement le secteur n'est pas en croissance, mais il s'affaiblit. En effet, la quantité réelle de produits d'épicerie qui passe par ces magasins diminue, car les Canadiens ne peuvent pas se permettre de les acheter.
    Je pense qu'il est important de s'attarder à l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement en aliments et autres produits que nous fabriquons et achetons dans notre économie. Il est certainement vrai que le prix d'un grand nombre des intrants achetés par les supermarchés a augmenté, mais ces prix plus élevés, à leur tour, représentent également des marges de profits plus élevées dans de nombreux cas. Nous pouvons être conscients de ces profits plus élevés, non pas pour exempter les supermarchés d'une attention critique, mais pour reconnaître que le problème de la réalisation de profits excessifs pendant la pandémie — et tout le stress et toutes les difficultés qui l'ont suivie — va au‑delà des supermarchés. Par exemple, on parle beaucoup du secteur de la transformation des aliments.
    J'ai également examiné les données de Statistique Canada sur la fabrication des aliments, dont les profits nets ont aussi considérablement augmenté depuis la pandémie, pour atteindre une hausse de 47 % au cours de la même période, avant et après. Ce n'est pas aussi spectaculaire que la vente au détail d'aliments, qui a connu une augmentation de 120 %, mais c'est une hausse importante, et la transformation des aliments est un secteur plus important sur le plan macroéconomique que la vente au détail des aliments. L'impact de ces profits réalisés à l'étape de la transformation des aliments sur les prix finaux des aliments payés par les Canadiens est également important. Il en va de même pour les profits plus élevés dans le secteur de l'énergie, qui représentent une cause dominante de l'inflation au Canada.
    Nous avons mené d'autres recherches — que je cite dans mon mémoire — sur 15 secteurs stratégiques de l'économie canadienne qui, ensemble, ont enregistré une augmentation de 142 milliards de dollars de leur rentabilité annuelle au cours des quatre derniers trimestres par rapport à la période prépandémique. Par contre, l'ensemble des profits a diminué dans les 37 autres secteurs suivis par Statistique Canada.
    Ce point est important, car ce n'est pas un phénomène qui touche l'ensemble de l'économie. Ce n'est pas une chose qui peut être attribuée à une demande globale excédentaire ou à un marché du travail en ébullition, comme M. Macklem, gouverneur de la Banque du Canada, ne cesse de le répéter. Si quelqu'un abordait les consommateurs qui sortent de Loblaws après avoir payé 200 $ pour un panier d'épicerie et leur disait, par exemple, que le prix des aliments est si élevé parce qu'il y a trop de gens qui travaillent et qu'ils ont trop d'argent à dépenser, je ne pense pas que cet argument serait bien accueilli.
(1950)
    Je suggère respectueusement qu'une personne qui tiendrait ce genre de discours se ferait chasser du stationnement de Loblaws. Ce n'est visiblement pas la faute de Justin Trudeau non plus. Comme M. Brander vient de le souligner, notre inflation et notre inflation alimentaire sont toutes deux inférieures à la moyenne d'autres pays industrialisés.
    Je ne blâmerais pas non plus la cupidité en soi. La cupidité n'est pas une nouvelle chose, et elle est bien antérieure à la pandémie, mais elle a le vent dans les voiles au Canada depuis la pandémie. Les profits après impôts réalisés au Canada pendant la pandémie ou depuis la pandémie ont augmenté pour atteindre la part du PIB la plus élevée de l'histoire. Au milieu d'une urgence sociale, économique et sanitaire, les entreprises enregistrent des profits records.
    Comment dois‑je interpréter cette situation? Le problème englobe les supermarchés, mais il ne s'y limite pas. Nous avons connu des perturbations sans précédent de la chaîne d'approvisionnement pendant la pandémie, des périodes de confinement et l'effondrement des systèmes de transport internationaux. Il y a tout d'abord eu la panique chez les consommateurs, puis l'incertitude et le désespoir...
    Monsieur Stanford, je suis désolé, mais nous avons dépassé le temps imparti. Je pense que nous allons nous arrêter ici.
    Nous avons votre mémoire, et je sais que mes collègues veulent le consulter.
    M. Jim Stanford: Je vous remercie.
    Le président: Nous allons donc en rester là.

[Français]

    Nous passons maintenant à l'Union des producteurs agricoles.
    Monsieur Caron ou monsieur Tougas, vous avez la parole.
    Je suis Martin Caron, président général de l'Union des producteurs agricoles. Je suis également producteur laitier et de grandes cultures à Louiseville, en Mauricie.
    Selon plusieurs économistes, la période inflationniste que nous connaissons est unique, dans la mesure où la hausse des prix de plusieurs produits a été causée par des restrictions de l'offre, et non par une surchauffe de la demande. Rappelons que la pandémie a fait dérailler un bon nombre de chaînes d'approvisionnement, qu'elles soient locales ou mondiales, y compris la chaîne d'approvisionnement alimentaire.
    C'est dans ce contexte que les Canadiens ont pris conscience de l'importance d'avoir une production agricole locale et une capacité de transformation pour assurer la sécurité alimentaire. L'inflation a mis à mal cette chaîne d'approvisionnement alimentaire locale ou intérieure. Durant la pandémie, plusieurs usines de transformation ont dû réduire ou arrêter leur production à cause d'éclosions de COVID‑19. Plus récemment, ce sont des problèmes de disponibilité et la hausse du coût de la main-d'œuvre qui affectent les marges de profit des entreprises du secteur agricole. Celles-ci peinent à demeurer compétitives, car certains concurrents bénéficient souvent d'un accès presque illimité à une main-d'œuvre à très faible coût.
    Le secteur de la production agricole n'a pas été en reste. Les entreprises agricoles que nous représentons pour le Québec ont dû composer avec une forte hausse du prix de leurs intrants. Au Canada, les prix des intrants ont augmenté de près de 30 % entre le premier trimestre de 2020 et le troisième trimestre de 2022, selon l'Indice des prix des entrées dans l'agriculture de Statistique Canada. Trois des principaux intrants de production, soit l'alimentation des animaux, les engrais et le carburant, ont connu des croissances de prix de 56 %, de 84 % et de 82 % respectivement, ce qui est beaucoup plus élevé que l'Indice des prix à laconsommation. Pour les productions horticoles, le prix des contenants a aussi connu une hausse importante durant la même période.
    En plus de devoir composer avec une augmentation du coût de leurs intrants, les agriculteurs doivent désormais faire face à la hausse considérable et rapide de leurs emprunts. Il est important de rappeler que les producteurs agricoles ont investi massivement dans leurs entreprises au cours des dernières années, notamment pour se conformer aux normes environnementales et de bien-être animal. La dette du secteur agricole canadien a crû de plus de 30 % au cours des cinq dernières années et s’élevait à 129 milliards de dollars en 2021. À terme, nous estimons que la hausse des taux d’intérêt occasionnera une dépense supplémentaire de 5,5 milliards de dollars en intérêt.
    Dans un contexte où le revenu agricole net se situe, en moyenne, à environ 6 milliards de dollars, il est évident que cette hausse du coût des emprunts affectera grandement la rentabilité de plusieurs entreprises dans les prochains mois. En raison notamment de leur endettement plus élevé, les entreprises de la relève ou celles en démarrage seront plus particulièrement touchées par la hausse des taux d’intérêt.
    Malgré ce contexte difficile, nous estimons que le secteur agroalimentaire a réussi à limiter les dégâts, particulièrement pour les consommateurs. Bien que le prix des aliments ait évolué de manière légèrement supérieure à l’Indice des prix à la consommation, ayant augmenté de 15,9 %, par rapport à 11,9 %, depuis le début de la pandémie, cette croissance est tout de même largement inférieure à la hausse du prix des intrants agricoles au cours de la même période, qui est de 30 %.
    Cela dit, le pire est loin d’être derrière nous. Selon les prévisions économiques, les taux d’intérêt demeureront élevés pour les 24 prochains mois, ce qui maintiendra la pression sur les marges des entreprises agricoles. De plus, les problèmes de main-d’œuvre, tant à l’égard de la disponibilité que du coût, continueront à freiner la compétitivité du secteur agricole et de la transformation alimentaire.
    Pour limiter les dégâts, le gouvernement doit apporter le soutien nécessaire au secteur, notamment en offrant une aide ad hoc temporaire, comme l’ont fait les États‑Unis. Il doit aussi maintenir le montant de l’avance sans intérêt à 250 000 $ dans le cadre du Programme de paiements anticipés. Il doit également rembourser aux producteurs touchés les sommes prélevées en lien avec la surtaxe de 35 % sur les engrais russes. En outre, il faut qu'il mette en place des mesures permettant aux entreprises agricoles et de la transformation alimentaire d’avoir un coût de main-d’œuvre compétitif. Finalement, il doit prolonger l'accès au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, dont la fin est prévue en 2023.
(1955)
    Enfin, le gouvernement doit soutenir la mise en œuvre d’un code de bonne pratique avec les distributeurs afin d’assurer un partage équitable des revenus entre les différents maillons de la filière agroalimentaire. Le consommateur paiera ainsi le juste prix pour ses aliments. L’aide ponctuelle et les mesures demandées permettront d’atténuer les répercussions financières pour les entreprises agricoles, qui doivent à la fois composer avec des hausses historiques et sécuriser l’approvisionnement alimentaire de nos populations.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Caron.
    Nous allons maintenant passer à la période des questions et nous commençons par les conservateurs.
    Madame Rood, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

     Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus ce soir.
    La semaine dernière, j'ai eu l'occasion d'interroger Metro sur des allégations de pratiques commerciales déloyales, comme l'imposition de frais aux agriculteurs pour pouvoir ne serait‑ce que vendre leurs produits à un épicier, ou parce que leurs produits ont été refusés ou bien parce qu'ils ont dû attendre que l'épicier décharge les camions. Ce que j'ai entendu de la part des agriculteurs a été corroboré par la Fédération canadienne de l'agriculture. C'est aussi ce qu'ils ont entendu dire. C'est une situation qu'on ne retrouve pas dans les autres pays et, franchement, c'est embarrassant de savoir qu'elle existe au Canada.
     Ma question s'adresse à monsieur Stanford. Pouvez-vous nous expliquer comment, possiblement, avec des frais réduits et davantage de profits directement dans les poches des exploitants de fermes familiales, cela pourrait avantager la production alimentaire nationale et son prix?
    Je vous remercie.
    Je dois d'abord vous avouer que je ne suis pas un spécialiste des pratiques agricoles ni des relations d'approvisionnement avec les épiciers. J'ai lu des rapports à propos de ces frais et d'autres difficultés auxquels font face les plus petits producteurs afin de placer leurs produits sur les tablettes des grandes chaînes de supermarchés.
    En revanche, je suis aussi au courant, comme l'a fait remarquer l'un de vos précédents témoins, du fort pouvoir corporatif ou oligopolistique de nombreuses entreprises de transformation des aliments. Je ne parle pas des agriculteurs, mais plutôt des fabricants, qui pèsent de tout leur poids, si je puis dire, pour tenter d'arracher des excédents de bénéfices à ce stade.
    Lorsque les supermarchés achètent directement des petits producteurs, alors de toute évidence ces frais et autres obstacles entraveraient de façon importante leur participation au commerce de détail. Cela saperait les revenus agricoles, c'est sûr, et augmenterait probablement les prix pour le consommateur.
    L'élimination pure et simple de ces frais ne se traduirait pas automatiquement par de plus bas prix pour les consommateurs, étant donné le pouvoir manifeste sur les prix que possèdent les chaînes de supermarchés elles-mêmes. C'est là que je crois que les mesures visant la réduction des frais et des autres obstacles du côté des intrants au stade des supermarchés de la chaîne de distribution alimentaire devraient être complétées par d'autres mesures visant à garantir que ces économies soient effectivement répercutées sur les consommateurs, plutôt que de se traduire par des marges bénéficiaires encore plus considérables que celles déjà constatées pour les supermarchés.
(2000)
    Je vous remercie.
    Vous avez déjà abordé le sujet de ma prochaine question. J'ai parlé à des transformateurs. J'ai un transformateur dans ma circonscription. Je me rappelle qu'ils m'ont dit que pour les épiceries, ils doivent conditionner des produits de marques privées, qu'ils doivent vendre aux épiciers à un prix inférieur. Pourtant, dans les magasins, les prix des boîtes de conserve de marque ne sont pas si différents. On parle de quelques cents de moins pour le produit générique par rapport au produit de marque et pourtant le transformateur est obligé de le vendre au rabais à l'épicier.
    Si l'on voit les choses de l'extérieur, il semble évident que ces étiquettes privées ont effectivement pour résultat une marge de profit supérieure pour l'épicier que le produit de marque.
    Je me demandais si vous pouviez nous dire pourquoi Loblaws, par exemple, n'a choisi de geler les prix que sur leur marque maison. Si vous vous rappelez, avant Noël, ils ont gelé les prix de leur marque maison et les autres épiciers leur ont emboîté le pas.
    Est‑ce qu'ils auraient pu choisir de geler les prix sur tous les produits d'épicerie pendant un certain temps? Est‑ce que cela aurait eu des incidences sur leur bilan?
    Bien sûr, vous avez raison de dire que les chaînes de supermarchés ont la possibilité de geler les prix de tout ce qu'ils vendent. C'est manifestement de leur ressort. Dans ce cas‑ci, Loblaws a choisi de geler les prix de leur marque maison, qui, bien sûr, n'est pas fabriquée par Loblaws. Les produits sont faits par d'autres fabricants et transformateurs et, dans certains cas, par ceux‑là mêmes qui fabriquent les produits de marque.
    Ma position ne me permet pas d'avoir des informations sur les rendements qu'obtiennent ces transformateurs avec leurs produits de marque par rapport à ceux de leurs produits génériques ni sur la différence de coût de production et de qualité pour la partie générique de leurs résultats. Mais on reconnaît, me semble‑t‑il, que les produits génériques tendent à donner de meilleures marges de profit aux supermarchés que la totalité des produits en vente.
    Beaucoup de questions ont aussi été posées, à juste titre selon moi, sur l'importance et la signification de ce gel de prix des produits génériques, qui a bien sûr été effectué.
     Je vous remercie.
    Je vais poursuivre.
    Pendant la COVID, les grandes entreprises d'alimentation, on l'a vu, ont payé une prime de salaire à leurs employés, pour qu'ils puissent continuer de travailler. Puis, une fois que la COVID a été terminée, nous avons noté la décision pratiquement concomitante des trois plus importantes chaînes de magasins d'arrêter de payer cette prime. Nous avons vu le scandale sur la fixation des prix du pain et nous avons tous constaté que tous les épiciers ont gelé les prix de leurs produits maison en même temps. Chez les épiciers, nous constatons que beaucoup de choses se produisent simultanément.
    Mes collègues et moi-même, et avec ce secteur, avons demandé un code de conduite pour les épiciers. J'aimerais que vous commentiez la raison pour laquelle, selon vous, ils font tous les mêmes choses en même temps. En fin de compte, est‑ce de la collusion?
    Est‑ce que c'est à moi que vous posez la question, madame?
    Oui.
    D'accord, je vous remercie.
    Manifestement, le terme « collusion » a une définition et un contexte juridiques précis. En tant qu'économiste, je ne m'aventurerais pas à dire si cela peut ou non être classifié comme collusion à des fins juridiques. Cependant, cela représente clairement un intérêt concerté entre eux, ainsi qu'une coordination des interventions de ces entreprises.
    La question que vous souleviez à propos de l'abolition de la prime de 2 $ de l'heure pour les employés des épiceries, le retrait de ce qu'on a appelé la « rémunération des héros » pratiquement simultané dans toutes les chaînes, est la preuve évidente d'un certain type de coordination informelle, tout du moins entre les grands supermarchés. Cela montre que le pouvoir que peuvent exercer ces grandes sociétés sur les marchés va dans de nombreuses directions. Il est manifestement dirigé contre les consommateurs. Nous avons mentionné la façon dont il peut être dirigé contre certains producteurs et il peut être dirigé contre leurs propres employés, ils possèdent une forme de pouvoir monopsone.
    Nous allons nous arrêter là.
    Je vous remercie, madame Rood. Je vous ai accordé un petit peu plus de temps.
    Je vous remercie, monsieur Stanford. Je crois que nous avons les principaux éléments qui vous intéressaient.
    C'est à vous, monsieur Drouin, vous avez jusqu'à six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'apprécie beaucoup les témoins que nous avons ici ce soir.
    Ma première question s'adresse à M. Stanford.
    Vous nous avez dit que les ventes du secteur de la transformation alimentaire ont augmenté d'un pourcentage de x et que c'est pareil pour les détaillants alimentaires. Je me demandais si, dans le cadre de cette analyse, vous avez.... Nous savons que les cinq principaux détaillants alimentaires possèdent 80 % du marché. Avez-vous effectué une analyse semblable pour les transformateurs alimentaires? Est‑ce que c'est un peu plus partagé ou diversifié que pour la partie détaillants?
(2005)
    Je n'ai pas étudié ce à quoi vous faites référence, c'est‑à‑dire les ratios de concentration, en somme, ou la part du revenu total du secteur que raflent les plus grands fournisseurs du même marché. M. Brander peut avoir quelques idées là‑dessus.
    Dans le secteur de la transformation alimentaire, je crois qu'il y a plus de diversité en ce qui concerne la taille des entreprises. Certains transformateurs sont très importants, des sociétés comme Cargill ou PepsiCo. D'autres sont beaucoup plus petits. Certains sont des fabricants de produits-créneaux. Je doute que le ratio de concentration soit aussi élevé dans le secteur de la transformation que dans le secteur du détail, mais ce n'est pas une recherche que j'ai moi-même effectuée.
    Monsieur Brander, je n'aime pas l'idée de vous sacrifier, mais elle n'est pas de moi. C'est M. Stanford qu'il faut remercier pour cela.
    Avez-vous quelques observations à faire là‑dessus?
    Non, je n'ai pas étudié le secteur de la transformation alimentaire.
    La seule chose que je sais, et elle ne vous sera pas très utile, c'est que l'ampleur de la concentration varie beaucoup, selon l'aliment. Dans un secteur comme celui des boissons gazeuses, la concentration est très élevée. Dans d'autres domaines, elle est très basse. Cela varie beaucoup selon l'aliment ou le produit.
    Je ne sais pas ce qu'il en est du niveau de concentration total.
    Merci infiniment.

[Français]

    Monsieur Caron, nous sommes heureux de vous voir des nôtres ce soir et je vous en remercie.
    Vous savez sans doute que ce comité a trop souvent entendu dire que la gestion de l'offre contribue à l'augmentation des prix. Si vous avez eu l'occasion de parler avec certains de vos producteurs d'œufs au Québec ou avec des collègues d'ailleurs au Canada, ou si vous avez eu la possibilité de comparer le prix de la douzaine d'œufs au Canada par rapport à ce que paient vos amis québécois en Floride à l'heure actuelle — vous en avez peut-être qui y sont —, il serait intéressant de vous entendre à ce sujet.
    On sait qu'il y a une différence dans le prix des œufs entre les deux pays: il est moins élevé au Canada qu'aux États-Unis. Je pense donc que ça démontre que la gestion de l'offre un outil vraiment performant. Une des premières choses à faire est de s'assurer d'avoir des entreprises agricoles en milieu rural partout au Canada. Les producteurs soutiennent ce projet de société pour, entre autres, avoir un juste prix et s'assurer de répondre aux attentes des citoyens et des citoyennes.
    Je ne sais pas si vous aviez d'autres éléments à rajouter, monsieur Tougas.
    La gestion de l'offre permet aussi une stabilité des prix. En période d'inflation ou de crise sanitaire, la gestion de l'offre permet de contrôler ou de limiter la variabilité des prix des produits sous gestion de l'offre, ce qui est quand même intéressant pour les consommateurs canadiens.
    Je vais dire quelque chose de totalement non partisan: je tiens à remercier mon collègue du Bloc québécois d'avoir présenté le projet de loi C‑282. D'ailleurs, la ministre, la totalité du Cabinet, la grande majorité des membres de mon parti et moi-même l'avons appuyé.
    Comme on le sait, on s'attaque souvent au secteur laitier, qui est sous gestion de l'offre. Cependant, durant les grandes périodes d'inflation, le prix du lait est demeuré assez stable, du moins à la ferme. Je ne peux pas parler du coût de transformation ou du prix de détail, mais, à la ferme, le prix est quand même resté stable.
    Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
    Premièrement, je dois dire que nous sommes heureux de voir l'appui au projet de loi C‑282, qui porte sur la gestion de l'offre.
    Il s'agit certainement d'un élément qui nous permet d'ajuster les prix très rapidement. Ce que nous disons aujourd'hui, c'est que nous voulons avoir un prix juste. Cela permet la prévisibilité, la recherche et l'innovation et le respect des attentes de la société. On a parlé, entre autres, du bien-être animal et de l'environnement. Il faut une prévisibilité pour les entreprises agricoles. Comme on le sait, quand on investit dans le monde agricole, c'est à long terme, et le système de la gestion de l'offre permet cela. Ce ne sont pas seulement les producteurs qui en bénéficient, mais l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes. Qu'on parle des transformateurs ou des fournisseurs, l'ensemble de la chaîne en bénéficie.
(2010)
    Je vous remercie de vos commentaires, monsieur Caron.
    Merci à vous deux.
    Monsieur Perron, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres ce soir.
    Si on trouve que je suis souriant, c'est probablement parce que je trouve que M. Drouin a vraiment une belle inspiration. Il me fait économiser de mes six minutes de temps de parole et je vais donc pouvoir parler d'autre chose.
    Nous comprenons l'importance de la gestion de l'offre pour l'industrie. Nous allons inclure cela dans nos recommandations visant à nous prémunir contre l'inflation.
    Monsieur Caron, dans votre allocution, vous avez parlé de propositions précises. Vous avez, entre autres, parlé de déployer un soutien ad hoc, c'est-à-dire un soutien ponctuel d'urgence pour aider les entreprises à faire face à l'inflation, comme l'ont fait les États‑Unis.
    Pouvez-vous nous expliquer un peu cette proposition?
    Les États‑Unis ont fait cela fin août ou début septembre en injectant rapidement un milliard de dollars par l'intermédiaire de la loi américaine sur la réduction de l'inflation. Ils se sont rapidement rendu compte que les entreprises avaient besoin de liquidités. Le message que nous avons reçu de nos entreprises, après les Fêtes, c'est qu'elles avaient elles aussi besoin de liquidités.
     Le gouvernement a mis sur pied le Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes, mais la période de remboursement a été prolongée jusqu'à la fin de 2023. Nous voudrions que ce programme continue pour avoir accès à des liquidités.
    Vous avez bien compris ce qu'on disait, tantôt, au sujet des taux d'intérêt, qui ont augmenté de plus de 4 %. La dette du secteur agricole, elle, est de 129 milliards de dollars. Si on renouvelle 100 % des paiements de cette dette, cela équivaut à 5,5 milliards de dollars, tandis que le revenu net du secteur est de 6 milliards de dollars. Vous comprendrez qu'on nous enlève tout de suite notre marge de manœuvre avant même que nous ayons fait quoi que ce soit.
     D'ailleurs, on prévoit que ça va peut-être aller jusqu'à 50 %, sur le plan du remboursement ou du renouvellement des prêts. Il n'en reste pas moins que ça aura d'énormes conséquences au cours des deux prochaines années. C'est pour ça qu'il doit y avoir des liquidités.
     Nous répondons aussi aux attentes environnementales. En votre qualité de membres du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, vous entendez souvent parler des changements climatiques, des gaz à effet de serre et de divers indicateurs et objectifs. Il faut avoir des liquidités pour être mesure de soutenir le secteur de l'agriculture, sachant tout ce qu'il a investi ou emprunté durant les dernières années.
    Merci beaucoup, monsieur Caron. Vos recommandations sont claires.
    Vous avez aussi mentionné qu'il faudrait maintenir le montant de 250 000 $ du Programme de paiements anticipés. Pouvez-vous nous expliquer précisément quelle est votre demande à ce sujet?
     Il y a eu une augmentation de la limite des avances sans intérêt de 100 000 $ à 250 000 $ pour deux ans, soit pour 2022 et 2023. Notre demande est de maintenir cette limite à 250 000 $ pour une plus longue période, minimalement pour les prochaines années, pour que nous puissions traverser la crise. Sinon, on pourrait aussi tout simplement fixer dorénavant cette limite à 250 000 $, étant donné que nos entreprises sont en croissance et que ce chiffre aurait dû être actualisé dans les dernières années, de toute façon.
    Merci beaucoup.
    Vous parlez de main-d'œuvre à coût compétitif. J'imagine que vous souhaiteriez aussi qu'il y ait une plus grande flexibilité dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Pouvez-vous nous donner des détails là-dessus?
    Je sais que le gouvernement a fait des efforts, mais je pense que tout le monde au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire a vu qu'il faudrait aller un peu plus loin. Il faut savoir qu'au Canada, et même au Québec, un tiers de notre main-d'œuvre agricole vient de l'étranger. Il est donc important d'avoir des programmes flexibles et prévisibles.
     On nous demande, en tant que producteurs, d'être productifs et efficaces, et nous exigeons la même chose de nos systèmes et de nos outils, qu'ils soient l'État ou ses ministères. Nous demandons des systèmes et des outils plus efficaces, et non un plus grand fardeau administratif.
    Il faut continuer dans cette direction pour accroître la flexibilité des programmes, tout en respectant les travailleurs. Pour nous, il est très important que tous ces travailleurs fassent partie du développement de nos entreprises. Cela fait des années qu'ils y participent. Ce sont des gens extraordinaires et formidables, et il faut les accueillir comme il faut et mettre sur pied des comités de transition avec eux. Il faut que tout se fasse dans les règles, mais plus rapidement.
(2015)
    Au sujet de la surtaxe de 35 % sur les engrais russes, nous avons eu quelques discussions ici, entre collègues. Comment percevez-vous le remboursement de ces frais?
    Nous sommes d'accord pour dire qu'un remboursement est de mise. Dans l'Est du Canada, cela a eu des conséquences. Ce sont quand même des sommes importantes. On parle de frais totalisant quelques millions de dollars, alors qu'on nous demande de rester compétitifs. Ces sommes d'argent sont là, et nous demandons que ces frais nous soient remboursés. Il y a peut-être différentes façons de procéder, et nous sommes ouverts à cela, mais il faut nous rembourser cet argent. Cela va permettre aux producteurs d'atténuer l'impact de l'inflation et de demeurer compétitifs. Sans cet argent, les entreprises ne peuvent pas investir dans la recherche et l'innovation ou dans la protection de l'environnement.
    Merci.
    Les producteurs maraîchers nous ont parlé de la réciprocité des normes, la semaine dernière. Pouvez-vous nous en parler, en 20 secondes?
    C'est quelque chose que nous demandons depuis des années. Il faut que nous ayons les mêmes outils. Quand nous disons que nous voulons demeurer compétitifs, c'est la même chose. Quand on parle de la réciprocité des normes, ce n'est pas pour rien que nous demandons aussi un code de bonnes pratiques: c'est un autre outil que nous voulons valoriser.
    Merci beaucoup, messieurs Caron et Perron.

[Traduction]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de guider notre comité dans le cadre de cette étude.
    Monsieur Stanford, je voudrais commencer par vous. Vous savez sans doute, bien sûr, que des représentants de certains géants de l'alimentation ont comparu devant notre comité. Malheureusement, ils ont pensé qu'il valait mieux envoyer leurs vice-présidents plutôt que leurs DG ou PDG. J'ai trouvé qu'ils étaient sur la défensive. Ce qu'il ont dit à notre comité allait certainement dans ce sens.
    Je suis très heureux que vous comparaissiez. J'apprécie l'exposé que vous nous avez transmis. Je crois que vous proposez une autre version très importante, qui est étayée par des faits que vous avez obtenus dans des statistiques facilement accessibles, à savoir que les marges des épiciers sont montées en flèche depuis 2019 et que les profits ont doublé, ce qui bien sûr se produit simultanément avec la baisse du volume des ventes pour chacune de ces entreprises.
    Je vous cite, soit la partie où vous dites ce qui suit:
Les preuves sont claires: les détaillants alimentaires ont tiré profit de la pandémie et de ses contrecoups afin de dégager davantage de surplus de leurs employés et de leurs consommateurs. […] Leurs profits ont manifestement contribué à l'inflation et devraient être contestés: avec des impôts sur les profits excédentaires, avec des règles de concurrence plus strictes et de meilleures normes de travail.
    Toutefois, je voudrais aussi parler d'un autre secteur. Vous avez ce beau tableau à la page 5 de votre exposé, dans lequel vous étudiez les 15 secteurs où l'augmentation des profits est la plus importante. Les combustibles fossiles sont bien sûr incroyablement importants pour le secteur agricole. Les producteurs du secteur agricole primaire bénéficient d'un allègement sur les combustibles qu'ils utilisent dans leur exploitation. C'est prévu par la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Mais les combustibles sont incroyablement importants pour livrer non seulement les intrants à la ferme, mais encore les aliments produits aux supermarchés.
    Lorsque je regarde votre tableau, je peux voir les changements du revenu net pour le pétrole et le gaz. Depuis 2019, il a augmenté de 1 011 %. Vous indiquez 38 milliards de dollars. Il y a en ce moment beaucoup de bruit et de fureur au Parlement à propos de la tarification du carbone, mais c'est le gros problème dont personne n'ose parler. Je crois que nous l'ignorons à nos risques et périls.
    Je me demandais si vous pouviez remettre cela dans son contexte. Quelle est l'incidence de ce type d'augmentation de la marge de profit sur les problèmes d'abordabilité auxquels les familles canadiennes doivent faire face ces jours‑ci?
    Je vous remercie, monsieur.
    J'ai créé ce tableau parce que je crois que le débat concernant les prix et les profits de l'alimentation au détail — débat très important et je remercie le Comité d'entreprendre cette étude — peut déboucher sur une conversation plus vaste. J'ai décrit les facteurs de la vente au détail de produits alimentaires où les entreprises profitent des chaînes d'approvisionnement, de l'incertitude, du pouvoir d'achat préservé des Canadiens — je n'ai pas parlé de surchauffe de la demande, mais leur pouvoir d'achat a été préservé grâce aux mesures de soutien d'urgence prises pendant la COVID, qui ont maintenant toutes été progressivement éliminées — et de leur pouvoir sur les marchés afin d'augmenter leurs profits et atteindre la part la plus élevée jamais enregistrée du PIB canadien. Un mécanisme semblable est visible dans d'autres secteurs « stratégiques », comme je les appelle, qui ont une place dans la chaîne d'approvisionnement globale qui leur permet de facturer ce que le marché peut supporter même en période de crise sociale, environnementale et économique.
    En haut de la liste, et sans aucun doute, se trouve le secteur du pétrole et du gaz. Les profits excédentaires touchés depuis la pandémie représentent en gros un quart du volume total des profits dans les 15 secteurs sélectionnés pour mon travail. L'augmentation des prix qui correspond à ces énormes marges bénéficiaires se répercute ensuite sur le reste de la chaîne d'approvisionnement. Les transformateurs alimentaires doivent payer cela, donc leurs coûts sont théoriquement plus élevés, mais après ils ajoutent à tout cela leur propre marge bénéficiaire majorée. C'est la même chose pour le secteur des détaillants alimentaires. Au moment où le consommateur l'obtient, des profits excédentaires ont été ajoutés à plusieurs étapes de la chaîne d'approvisionnement. Cela amplifie la répercussion finale sur l'inflation des prix à la consommation.
    Je suis reconnaissant au Comité d'avoir entrepris cette étude sur l'inflation des prix de l'alimentation, mais lorsque les vice-présidents viennent vous voir et vous disent que leurs marges n'ont pas augmenté tant que ça et que leurs coûts sont à la hausse, je leur ferais remarquer, tout d'abord, que leurs marges sont plus élevées et que leurs profits sont à la hausse malgré l'augmentation des coûts. Puis, je leur ferais remarquer que leurs coûts plus élevés sont le reflet d'une prise excessive de bénéfices similaire à d'autres étapes de la chaîne d'approvisionnement. Il n'y a pas de meilleur exemple que celui de l'augmentation des profits et des prix des produits pétroliers et gaziers.
(2020)
    Quand tout est couché dans un tableau comme celui‑là, ce chiffre est tout simplement aberrant. Vous conviendrez avec moi, d'après ce que je comprends de vos commentaires, que ce type de marge de profit fait beaucoup plus de mal aux familles canadiennes qu'une tarification du carbone ne pourra jamais en faire.
    En dernier lieu, j'aimerais que vous répondiez aussi à cette question. Vous avez ces recommandations d'imposer les profits excédentaires, des règles de concurrence plus strictes et de meilleures normes de travail. Y a‑t‑il d'autres recommandations que vous aimeriez voir dans le rapport final de notre comité? Y a‑t‑il autre chose que vous voudriez souligner?
    Je vous remercie.
     Je vous remercie.
    Tout d'abord, pour la référence à la tarification du carbone, particulièrement quand les revenus du prix du carbone sont remboursés aux Canadiens, il est difficile de voir l'incidence nette que cela aura sur le pouvoir d'achat réel des Canadiens. J'ai dans l'idée qu'elle sera négligeable.
    Il est certain que la flambée des prix de l'énergie à laquelle nous avons assisté au cours de cette période a tout à voir avec la spéculation mondiale sur les marchés à terme. L'offre mondiale en pétrole n'a pas été réellement affectée par la guerre en Ukraine. L'offre mondiale en pétrole, y compris celle de la Russie, a augmenté et non baissé. Pourtant, compte tenu du fonctionnement des marchés à terme et de notre politique énergétique au Canada, la flambée des prix qui en est résultée s'est répercutée très rapidement sur les consommateurs canadiens. Et c'était tout bénéfice parce que le prix réel de la production de cette énergie au Canada, de son raffinage et de sa distribution aux consommateurs n'a pratiquement pas changé.
    Pour ce qui est des recommandations...
    Monsieur Stanford, malheureusement, il va falloir nous arrêter là.
    Je vous remercie, monsieur MacGregor.
    Chers collègues, nous n'allons pas avoir beaucoup de temps, alors je vous demanderais de vous contenter de trois ou quatre minutes. Vous n'aurez pas toutes vos cinq...
    Je suis désolé, monsieur Lehoux. Je vais dire quatre minutes et à quatre minutes je vais vous arrêter. Je suis intraitable.
    Il ne reste plus que quatre minutes et nous allons en enlever un petit peu pour le Bloc et pour le NPD.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres ce soir.
    Monsieur Caron, je reviens encore sur l'enjeu de la main-d'œuvre. Nous avons quand même fait des études, il y a quelques mois, voire plus d'un an, sur la question de réduire les formulaires et la paperasserie. Vous aviez même fait des propositions, que nous avions incluses dans notre rapport, remis à la ministre.
    Est-ce que ces recommandations du Comité ont mené à des résultats?
    Merci de la question.
    Il y a eu un certain suivi. Nous savons que le gouvernement va notamment mettre en place un modèle d'« employeur de confiance », plus flexible et vraiment moins lourd sur le plan administratif.
    Nous parlions aussi de demander des études d'impact sur le marché du travail aux trois ans, voire aux cinq ans, avec un cadre établi. Je pense qu'il reste encore des efforts à faire concernant cet élément.
     Il y a aussi tout le volet du logement et de toutes les modifications à apporter. Par conséquent, nous sommes encore en attente concernant cela et la manière dont on peut arriver à cette flexibilité.
(2025)
    Je comprends donc que vous attendez encore ces éléments.
    C'est le cas pour quelques éléments.
    Toujours sur la question de la main-d'œuvre, plusieurs agriculteurs de ma région se sont plaints ces dernières semaines et ces derniers mois du fait que des travailleurs étrangers temporaires n'étaient plus disponibles parce qu'ils s'étaient fait embaucher par des entreprises n'étant pas nécessairement dans le secteur agricole. Cela découle d'assouplissements mis en place en raison de la pandémie.
    J'imagine que les producteurs vous parlent de cet enjeu, qui est quand même très important. Y a-t-il du nouveau là-dessus?
    C'est un enjeu important, absolument.
    Les producteurs investissent des montants pour faire venir des travailleurs ici, au Canada. Malheureusement, à l'occasion, il arrive que ceux-ci, surtout de certains pays, quittent l'entreprise sans aucune raison, ce qui oblige les producteurs à recommencer à zéro. Nous nous entendons sur le fait qu'il doit y avoir un suivi sur cette question et nous en avons parlé au ministère des Affaires étrangères pour qu'il nous tienne au courant là-dessus.
     Comme je le mentionnais tantôt, on en demande beaucoup au secteur agricole. Nous apprenons à relever le défi et à être efficaces et productifs, mais nous voulons un suivi sur cette situation. Ce n'est pas juste pour notre bien, c'est aussi pour le bien de ces travailleurs, qui se retrouvent peut-être dans des endroits où ils ne sont pas bien traités.
    Merci, monsieur Caron.
    Je pense réellement que c'est un enjeu majeur et qui aurait un impact direct sur l'augmentation des prix, puisqu'il est évident que les producteurs ne peuvent pas non plus se permettre de consentir des augmentations salariales importantes en réponse à la surenchère que se font différentes industries, comme dans ma région.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste encore 45 secondes.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Caron, vous avez dit qu'on était ouvert à l'idée de rembourser la surtaxe perçue sur les engrais russes. Y a-t-il une volonté réelle de trouver une solution pour rembourser les quelque 34 millions de dollars qui ont été soutirés de la poche des agriculteurs?
    À la suite de la mise à jour économique de Mme Freeland et de l'annonce de la ministre Bibeau, on nous a mentionné que le processus pour en arriver à une entente était entamé. Reste à voir si...
    Par contre, vous n'avez pas encore vu la couleur de l'argent. Est-ce exact?
    Non, pas encore.
    Merci, monsieur Caron.
    Merci, messieurs Caron et Lehoux.
    Monsieur Louis, vous avez la parole pour environ quatre minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    La discussion d'aujourd'hui est très utile. Elle est aussi importante puisque nous avons entendu à maintes reprises que l'alimentation est un besoin essentiel et que les ménages ne peuvent pas réduire leurs dépenses en nourriture comme ils peuvent le faire pour d'autres biens et services. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour parler de la frustration que la population canadienne ressent à l'égard de la hausse du prix des aliments.
    Monsieur Stanford, vous avez dit qu'au cours de la dernière année, les prix moyens à l'épicerie ont augmenté de 11 %, ce qui équivaut approximativement au double du taux d'inflation, qui se situe à 6,3 %. Vous avez ajouté qu'alors que les prix des logements et de l'essence diminuent, l'inflation du prix des aliments demeure élevée et les profits des détaillants en alimentation ont presque doublé par rapport aux normes d'avant la pandémie.
    M. Brander et vous nous avez dit que les pénuries que nous avons connues au début de la pandémie ont permis de hausser les prix. Au plus fort de la pandémie, la demande a augmenté puisque les gens restaient chez eux. Or même si les gens achètent moins d'aliments à l'épicerie aujourd'hui, en moyenne, les supermarchés continuent à engranger des profits de plus en plus grands.
    Pouvez-vous nous expliquer en termes simples comment réfuter les arguments des grandes chaînes de supermarchés, qui prétendent que pour elles, c'est le statu quo? Pourquoi les prix grimpent-ils rapidement, mais baissent-ils si lentement?
    Je trouve très important d'envisager la question dans une longue perspective historique. Souvent, on compare les marges de profit ou les profits globaux seulement d'une année à l'autre; c'est peut-être ce qu'ont fait d'autres témoins que vous avez reçus. On peut alors déclarer que les profits de la dernière année ne sont pas beaucoup plus élevés que ceux de l'année précédente et que les marges sont presque les mêmes.
    Pourtant, l'analyse historique que j'ai réalisée à partir des données de Statistique Canada montre que, depuis les confinements, les marges de profit ont augmenté et sont demeurées élevées, et les profits globaux ont plus que doublé par rapport aux normes d'avant la pandémie. À mon avis, la perspective historique est très importante.
    À savoir ce que l'avenir nous réserve, c'est une question ouverte. Il se peut que la stabilisation des chaînes d'approvisionnement à l'échelle internationale réduise les marges de profit. Bien entendu, nul ne peut prédire quels effets auront certains facteurs mentionnés par M. Brander, dont les phénomènes climatiques, les circonstances comme la grippe aviaire, l'élargissement éventuel des hostilités en Ukraine ou la hausse possible des prix de l'énergie. L'avenir est imprévisible, mais en l'absence de chocs majeurs pareils, franchement, je m'attendrais à ce que les marges de profit des détaillants reviennent plus ou moins à la normale. C'est difficile à dire.
    Vous constaterez que durant le dernier trimestre pour lequel nous avons des données, les marges de profit sont plus modérées. Elles sont toujours loin de ce qu'elles étaient avant la pandémie, mais elles n'atteignent pas les mêmes sommets que durant les vagues d'achats faits sous l'effet de la panique, les confinements, etc.
    Il se peut qu'on assiste à une normalisation. Cela dit, je trouve important que la population canadienne comprenne que les prix qu'elle paye pour les aliments reflètent en partie l'effet cumulatif sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement des gains excessifs réalisés par les sociétés, qui ont pu fixer des prix beaucoup plus élevés qu'elles n'avaient à le faire pour couvrir leurs coûts.
(2030)
    Je vous remercie pour votre réponse.
    Je ne pense pas avoir le temps de poser une question complète en 30 secondes.
    Très bien, merci, monsieur Louis.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Caron, à la fin de votre allocution d'ouverture, vous avez parlé d'un code de bonnes pratiques.
    On a beaucoup entendu parler du mode de fixation des prix. Des maraîchers nous ont parlé des écarts épouvantables entre le montant qu'ils reçoivent pour leurs produits et le prix de vente de ces derniers à l'épicerie.
    Que pouvons-nous faire pour répartir plus équitablement les profits entre les différents maillons de la chaîne alimentaire?
    Merci de la question.
    J'ai parlé plus tôt du code de bonnes pratiques. C'est un des premiers outils qu'on peut et qu'on doit avoir. Il doit notamment être applicable et obligatoire.
    Il existe toutefois d'autres outils, que d'autres pays utilisent. C'est d'ailleurs un des éléments dont nous avons parlé au Bureau de la concurrence, dernièrement.
    La France, par exemple, a mis sur pied l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, où on s'intéresse à chacun des secteurs existants: la transformation, la distribution et la production. C'est le gouvernement qui l'a mis en place et qui le soutient. L'Observatoire recueille des données concernant les prix et en fait annuellement rapport au Parlement et à l'ensemble des délégués. Je pense que c'est un autre outil que nous pourrions avoir au Canada.
    Une collaboration se fait entre tous les secteurs. Il ne faut pas l'oublier: quand on parle de filière agricole et de filière agroalimentaire, on a besoin de tous les maillons pour réussir. Un comité consultatif est mis en place, mais un rapport est également produit, ce qui permet aux élus et au gouvernement de montrer aux citoyens de quelle façon les prix et les marges sont formés. De plus, il doit y avoir un aspect législatif à tout cela pour assurer que, s'il y a des choses à modifier concernant certaines règles, le gouvernement peut procéder à ces changements.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur MacGregor, vous avez la parole pour deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais utiliser mon temps de parole pour déposer officiellement ma motion. La greffière l'a envoyée à tout le monde par courriel. J'espère que vous avez eu le temps de la lire et d'y réfléchir. Je ne vais pas la relire à voix haute puisqu'elle a déjà été consignée au compte rendu. Je vais tout simplement la déposer et je suis prêt à en discuter.
    J'espère que mes collègues l'appuieront.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Il nous reste environ huit minutes. Nous allons lancer la discussion, et si nous n'arrivons pas... Il faudra la reporter à la prochaine réunion.
    Je vois que M. Drouin lève la main.
    Monsieur le président, je remercie mon collègue pour la motion.
    De notre côté, nous appuyons sans réserve le dépôt et l'adoption de la motion. Merci.
(2035)
    La parole est à M. Perron.

[Français]

    Monsieur le président, puisque j'ai reçu le texte en français, pour lequel je félicite mon collègue M. MacGregor, je n'ai pas d'objection.

[Traduction]

    Y a‑t‑il d'autres interventions?
    Je ne vois pas de mains levées. Il semble y avoir consensus.
    En ma qualité de président du Comité, je tiens à dire que je comprends que nous prolongions... Je ne suis pas convaincu que les chefs de la direction qui seront convoqués nous fourniront plus d'information, mais c'est une question de transparence, et le Comité a le pouvoir de les citer à comparaître.
    Faut‑il mettre la motion aux voix? Je pense qu'elle sera adoptée, mais voulez-vous procéder à un vote par appel nominal?
    Monsieur MacGregor, c'est sans doute à vous qu'il faut poser la question. Voulez-vous que nous procédions à un vote par appel nominal?
    Oui, procédons à un vote par appel nominal aux fins du compte rendu.
    Madame la greffière, je vous prie de me donner un coup de main.
    (La motion est adoptée par 11 voix contre 0.)
    Le président: La motion est adoptée à l'unanimité.
    Très bien, chers collègues, je poursuivrai le travail avec la greffière.
    Je vois la main levée de M. MacGregor, et M. Lehoux demande aussi la parole.
    Je regarde l'horloge de près, surtout pour le bien des interprètes.
    La parole est à M. MacGregor.
    Très rapidement, je tiens à remercier mes collègues pour une autre motion adoptée à l'unanimité. Je vous suis reconnaissant de votre appui.
    Nous vous écoutons, monsieur Lehoux.

[Français]

     J'aimerais poser une question rapide: a-t-on eu une réponse de la part du ministre de l’Immigration?

[Traduction]

    Je vais demander à la greffière de répondre.
    À ma connaissance, nous n'avons pas reçu de réponse. Je pense que l'invitation est toujours ouverte. Le ministre connaît notre horaire et les différents paramètres. À ce que je sache, rien n'a changé depuis notre dernière réunion, mais j'invite la greffière à répondre.

[Français]

    J'ai fait le suivi avec le bureau du ministre. On m'a informé que le Comité devrait recevoir une réponse dans le courant de la semaine. Je vais continuer d'assurer le suivi.

[Traduction]

    D'accord.
    Nous allons lever la séance.
    Merci, chers collègues.
    Merci aussi aux témoins. Excusez-nous; nous avions quelques questions de procédure à régler.
    Monsieur Caron, monsieur Tougas, monsieur Stanford, monsieur Brander, je vous remercie d'avoir pris le temps de vous joindre à nous ce soir pour participer à notre étude.
    Bonsoir, tout le monde. La séance est levée.
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