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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 114 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 24 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(0820)

[Traduction]

    Bonjour, chers collègues.
    Je suis désolé du retard. Nous avons eu un problème de son avec l'une de nos témoins et nous voulions être sûrs de l'avoir résolu. Comme tout le monde est arrivé un peu en retard, tout s'est très bien passé.
    M. Stanley et moi sommes arrivés tôt.
    J'étais là. Je n'ai pas mentionné de noms, mais apparemment, nous allons citer des noms et montrer du doigt, ce que je ne ferai pas.
    Chers collègues, comme nous n'avons que deux témoins aujourd'hui, nous devrions être en mesure d'avoir trois tours de questions. Si vous êtes à court de questions, nous verrons ce qu'il y a lieu de faire à ce moment‑là.
    Au cours de la deuxième heure, nous nous pencherons sur les travaux du Comité, ce qui pourrait prendre toute l'heure ou moins que cela. Cela dépend de nous.
     Distingués collègues, je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 114e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride. Ces délibérations sont accessibles sur le site Web de la Chambre des communes.
    J'informe les témoins que la webdiffusion montre la personne qui parle et non l'ensemble du Comité. Comme d'habitude, les captures d'écran ne sont pas autorisées. Veuillez vous abstenir d'en faire.
    Chers collègues, vous connaissez toutes les règles concernant les oreillettes destinées à l'interprétation. Tenez-les loin des microphones.
    Je remercie nos témoins de leur présence. Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Nous disposons de services d'interprétation. Si nous avons un problème de son, je lèverai la main et vous demanderai de vous interrompre pendant que nous tentons de rectifier ce qui ne va pas. Maintenant que les problèmes de son que nous avions ont été résolus, j'espère que le reste de la journée se déroulera sans anicroche.
    J'aimerais vous présenter les témoins que nous accueillons aujourd'hui dans le cadre de notre étude sur l'impact des ajustements à la frontière pour le carbone et de la réciprocité des normes.
    De l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, nous avons Monika Tothova, économiste principale, Division des marchés et du commerce, Volet de travail sur le développement social et économique. De l'Université de la Saskatchewan, nous avons Angela Bedard-Haughn, doyenne et professeure, Collège d'agriculture et de bioressources.
    Vous disposez chacune de cinq minutes pour nous livrer votre déclaration liminaire. Lorsqu'il vous restera environ 30 secondes, je lèverai la main pour que vous sachiez que votre temps de parole achève. Si vous dépassez un peu le temps imparti, ne vous inquiétez pas. Nous avons beaucoup de temps à vous accorder aujourd'hui.
    Je vais demander à Mme Tothova de commencer.
    Si vous voulez bien nous faire part de votre déclaration liminaire, les cinq prochaines minutes sont à vous.
    Bonjour.
    Je vais dépasser un peu les cinq minutes, mais comme il n'y a que deux témoins, j'espère qu'on n'y verra pas d'objection.

[Français]

     Je m'appelle Monika Tothova, et je suis économiste principale à la Division des marchés et du commerce de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture, ou FAO.
    L'Organisation des Nations unies pour...

[Traduction]

    Madame Tothova, je suis désolé.
    Pourriez-vous relever la perche de votre microphone afin d'approcher ce dernier de votre bouche?
    Voilà qui est fait. Je vous remercie.
    Vous pouvez continuer.
    Est‑ce que ça va maintenant? Vous m'entendez bien?
    Oui, tout va bien. Merci.
    Allez‑y.

[Français]

     L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture est l'agence spécialisée des Nations unies qui mène les efforts mondiaux relativement à l'élimination de la faim et de la malnutrition.

[Traduction]

    Merci d'avoir invité l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, ou FAO, à se joindre à un groupe d'experts. La FAO ne prescrit pas de choix stratégiques aux pays. Elle fournit plutôt un répertoire des options stratégiques fondées sur des données probantes, et expose les compromis et les répercussions que ces différentes politiques peuvent entraîner. Venant d'une agence technique spécialisée, je concentrerai mes observations sur les effets que les ajustements à la frontière pour le carbone et la réciprocité des normes peuvent avoir sur l'alimentation et l'agriculture.
    Le changement climatique est vraiment une externalité environnementale négative de portée mondiale. Ses effets se font sentir partout sur la planète. Il a une incidence sur de nombreuses activités économiques, y compris les systèmes agroalimentaires, qui sont eux-mêmes responsables de 28 % de l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre. Les coûts potentiels des changements climatiques ne sont pas pris en compte par les marchés et les avantages liés à l'atténuation de leurs conséquences ne peuvent être divisés en fonction des frontières et revendiqués par un seul pays. Plusieurs mesures incitatives stratégiques peuvent contribuer à améliorer l'efficacité et à réduire les émissions de gaz à effet de serre par unité de production.
    Dans ma déclaration, lorsque j'évoque différents moyens d'action issus de politiques, je ne renvoie à aucun pays en particulier.
    La taxe sur le carbone et d'autres instruments de ce type, tels que les systèmes d'échange de quotas d'émission, s'attaquent directement à l'incapacité du marché à prendre en compte les coûts sociaux des changements climatiques. Toutefois, une action unilatérale visant à imposer une taxe carbone sur les importations de denrées alimentaires risque de placer le pays qui l'applique dans une situation de désavantage concurrentiel sur les marchés mondiaux. Une taxe carbone peut entraîner une « fuite » de carbone, c'est‑à‑dire le déplacement de denrées alimentaires à faible empreinte carbone produites dans le pays par des importations moins chères et à plus forte empreinte carbone en provenance de pays qui ne prennent pas de mesures similaires pour réduire les émissions. Il est donc possible que cela entraîne des pertes de revenus pour les producteurs nationaux et une augmentation des émissions à l'échelle mondiale. Ce qu'il faut retenir ici, c'est que les externalités négatives de portée mondiale telles que les changements climatiques nécessitent des solutions de portée mondiale.
    Le commerce peut étendre la portée des politiques d'atténuation du changement climatique. Le possible recours à des ajustements fiscaux aux frontières qui pourraient être basés sur l'empreinte carbone a suscité un intérêt considérable. L'ajustement de la taxe carbone signifie que le même taux appliqué à l'empreinte carbone des produits nationaux serait appliqué aux importations. Dans ce cas, les fournisseurs à faibles émissions seraient soumis à une taxe faible et pourraient concurrencer les produits nationaux, tandis que les fournisseurs à fortes émissions seraient soumis à une taxe plus élevée, ce qui les rendrait moins concurrentiels. L'application de cet ajustement fera en sorte que le commerce soit défini non seulement en fonction de l'avantage comparatif, mais aussi en tenant compte de l'efficacité relative sur le plan des émissions.
    Une difficulté technique de taille concernant la détermination et l'application de cet ajustement fiscal aux frontières est de calculer l'empreinte carbone des produits nationaux et des importations, et d'appliquer une taxe appropriée sur les produits nationaux et des ajustements fiscaux correspondants sur les importations de manière à niveler les conditions de concurrence. Lorsqu'une taxe carbone explicite est appliquée aux produits nationaux, il semble relativement simple d'appliquer un ajustement correspondant de la taxe aux frontières sur les importations, pour peu que l'empreinte carbone que ces émissions ont générée lors de la production et de la fourniture des importations puisse être chiffrée.
    Le calcul de ces ajustements fiscaux aux frontières pose des problèmes lorsque les fournisseurs d'importations internalisent les coûts liés aux émissions ou si la taxe appliquée dans le pays exportateur dépasse celle qu'applique l'importateur, scénario dans lequel un remboursement de taxe sur les importations serait effectué. Pour ce cas de figure, il serait nécessaire d'établir l'équivalent unitaire de la taxe carbone de ces mesures.
    La conception et la mise en œuvre d'une taxe carbone sur les denrées alimentaires et les produits agricoles se heurteraient à plusieurs difficultés. Il faudrait se mettre d'accord sur les mécanismes de comptabilisation du carbone et sur une empreinte carbone pour tous les produits alimentaires et agricoles produits dans le monde. Il faudrait également s'entendre sur le prix du carbone afin de pouvoir fixer la taxe et d'éviter les différends commerciaux internationaux.
    Toute approche des ajustements fiscaux aux frontières présente le double défi de déterminer l'empreinte carbone des produits nationaux et importés, tout en garantissant le respect des règles des systèmes commerciaux internationaux.
    Pour conclure, la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans l'agriculture nécessite plusieurs actions intersectorielles, y compris l'application non seulement de pratiques d'atténuation, mais aussi de pratiques d'adaptation par le truchement d'une agriculture et de politiques sensées sur le plan climatique.
    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer à ce sujet et de m'avoir accordé un peu plus de temps pour ce faire. Je serai ravie de répondre aux questions du Comité.
(0825)
    Merci beaucoup de votre analyse d'experte en la matière.
    Nous allons maintenant passer à Mme Bedard-Haughn, de l'Université de la Saskatchewan.
    Bonjour, monsieur le président, et bonjour à tous les gens assis à la table.
    Je vous parle aujourd'hui depuis le territoire visé par le Traité no 6, la patrie traditionnelle des Métis et le centre des prairies canadiennes.
    J'ai grandi dans une ferme mixte du Centre-Nord de la Saskatchewan et j'ai obtenu mes deux premiers diplômes ici, à l'Université de la Saskatchewan, avant de partir en Californie pour faire mon doctorat. Je suis retournée à l'Université de la Saskatchewan en 2006 en tant que professeure de la science des sols. Depuis 2020, je suis doyenne du College of Agriculture and Bioresources.
    La perspective d'appliquer l'ajustement carbone aux frontières dans les secteurs de l'agriculture et de l'alimentation semble relativement éloignée. Cet état de fait est, à mon sens, une bonne chose, car j'estime que nous — et, dans ce sens, j'utilise le « nous » mondial, ce qui inclut le Canada — ne sommes pas prêts à cet égard. Je crois que nous devons être très prudents puisque nous risquons en faisant cela de mettre en péril la sécurité alimentaire mondiale à un moment où les troubles politiques et le protectionnisme ajoutent de l'incertitude dans un marché mondial déjà très complexe.
    Pour faire suite au témoignage de Mme Tothova, je pense que l'une des premières choses auxquelles ce groupe doit réfléchir, c'est la raison pour laquelle les ajustements à la frontière pour le carbone sont mis de l'avant. Une grande partie de l'idée sous-jacente est d'encourager les bons comportements qui permettront de réduire davantage les émissions mondiales de gaz à effet de serre ou, au minimum, de mettre en place des mécanismes de tarification pour obliger les gros émetteurs à payer. En théorie, c'est une bonne chose, mais savons-nous en ce moment si ces leviers fonctionneront réellement alors qu'ils visent la nourriture, qu'ils ont une incidence sur un besoin humain fondamental? En bref, je dirais que ce n'est pas encore le cas.
     L'un des principaux chercheurs du département d'économie agricole et des ressources de l'Université de Saskatchewan, M. Richard Gray, est actuellement à Uppsala. Il travaille sur un modèle économique du marché mondial des légumes afin d'établir si les politiques d'ajustement carbone à la frontière sont efficaces ou inefficaces pour empêcher la hausse des prix et la déforestation à l'échelle mondiale. Ces recherches sont en cours et les résultats devraient être publiés au début de l'année prochaine, en 2025.
    Il étudie également l'effet potentiel de l'échange net intégral d'écosystèmes sur la comptabilisation du carbone, tant sur le plan national que mondial. Il s'agit d'une comptabilité qui prend en considération le carbone réellement séquestré dans certains des produits de base que nous produisons, nommément les céréales, les légumineuses et les oléagineux, et qui sont ensuite exportés et consommés ailleurs sans pour autant être concrètement incorporés.
    Je dirais qu'avant de nous engager trop loin dans la voie des ajustements à la frontière pour le carbone, nous devons nous assurer de disposer de toutes les données nécessaires que nous fournissent des experts comme M. Gray et d'autres, puisque ces experts étudient justement les effets nets qu'ont ces ajustements sur différents marchés et différents pays.
    Même si nous ne disposons pas encore des analyses socioéconomiques, il y a d'autres éléments dont nous devons tenir compte ici, chez nous, avant d'aller de l'avant avec des ajustements carbone aux frontières dans le domaine de l'agriculture et de l'alimentation.
    Comme le Comité l'a entendu précédemment de la part de M. Steve Webb et d'autres, nous disposons de données qui confirment que l'agriculture canadienne est un meneur mondial en ce qui concerne la faible intensité carbonique intervenant dans la production de cultures telles que le canola, le blé, les pois et les lentilles. C'est peut-être une raison pour laquelle nous devrions accueillir à bras ouverts la notion d'ajustement carbone aux frontières. Compte tenu des résultats relativement bons du Canada en matière de production durable, nous devrions, en théorie, être les bénéficiaires d'une telle politique.
    Si nous mettons en œuvre l'ajustement carbone aux frontières, nous devons également nous assurer que le Canada reconnaîtra d'abord la valeur de nos propres pratiques afin que les remises à l'exportation soient appropriées et que nos projets ne soient pas soumis à des objectifs d'importation injustes dans d'autres pays parce que nous n'accordons pas le crédit adéquat aux producteurs et aux systèmes. Si nous n'évaluons pas correctement nos propres pratiques en matière de développement durable, pourquoi nous attendrions-nous à ce que d'autres pays le fassent?
    Pour ce faire, pour arriver là où nous devons aller, nous devons mettre en œuvre un cadre MRV — pour mesure, rapport et vérification — approprié afin de garantir que les crédits sont accordés à ceux qui les méritent. Pendant que Mme Tothova parlait, je pensais aux innombrables différences qui peuvent exister non seulement à travers le monde — lorsque nous essayons de mettre au point une empreinte carbone pour différents produits agricoles, les écarts sont énormes —, mais aussi à l'échelle du Canada ou même à l'intérieur de chaque province. En effet, de nombreux agriculteurs accomplissent déjà un travail remarquable en matière de durabilité, alors que d'autres pourraient faire mieux.
(0830)
    Si nous adoptons l'ajustement carbone aux frontières, comment pouvons-nous tirer parti des taxes à l'importation pour récompenser les pratiques durables? Tout aussi important, comment s'assurer que les agriculteurs qui pratiquent l'agriculture durable depuis des années — les pionniers — profiteront des avantages d'une mesure comme l'ajustement carbone aux frontières, alors que nous continuerons à les encourager à se convertir aux nouvelles technologies émergentes sur lesquelles nous travaillons?
    Malheureusement, à l'heure actuelle, il est très difficile d'effectuer des mesures, des rapports et des vérifications dans le domaine de l'agriculture, de sorte qu'il est très difficile d'établir à quoi ressemblera cette empreinte en raison des grandes différences constatées au fil du temps entre les divers champs et les diverses régions. Cette variabilité est associée à tous les aspects de la mesure de l'intensité du carbone dans un système naturel.
    Cela ne signifie pas que les difficultés sont insurmontables, mais cela signifie que nous devons continuer à investir dans la recherche qui nous aidera à les surmonter, et que nous devons investir dans les cadres de gestion des données qui nous permettront d'intégrer la recherche et de créer des outils qui peuvent réduire le risque d'erreur de mesure et de vérification.
     Il a déjà été dit à ce comité que l'idéal serait une approche harmonisée avec nos principaux partenaires commerciaux mondiaux. Nous devons nous aligner le mieux possible afin de ne pas nous engager sur la voie d'un protectionnisme accru. Oui, bien sûr, nous devons être attentifs au sort que l'Union européenne, les États-Unis et l'Australie réservent à cette question, mais, parallèlement, nous devons mettre de l'ordre chez nous et clarifier la façon dont nous allons reconnaître nos différences régionales et sous-régionales en ce qui a trait aux pratiques de gestion durable.
    Je crois que nous devons nous concentrer sur quatre domaines principaux. Le premier est la recherche qui permet à nos agriculteurs et à nos producteurs de continuer à améliorer leur durabilité. Nous devons à ce chapitre mettre l'accent sur des solutions qui sont avantageuses pour tous, sans égard pour la tarification et la taxation du carbone. Il s'agit de solutions qui réduisent les coûts des intrants, augmentent les rendements et améliorent la santé des sols. Ici, dans les Prairies, c'est la raison pour laquelle nous avons assisté à l'adoption généralisée du semis direct et du travail de conservation du sol. C'est tout simplement logique du point de vue de toutes ces perspectives.
    Deuxièmement, nous devons nous concentrer sur l'élaboration d'ensembles de données de référence et de protocoles harmonisés de mesure, de préparation de rapports et de vérification qui permettent de mesurer de façon appropriée l'intensité carbonique à l'échelle régionale.
    Troisièmement, nous devons veiller à ce que les systèmes de taxation et de crédit du carbone soient fondés sur des données scientifiques et factuelles, et à ce que nous comprenions l'incidence que l'ajustement du carbone aux frontières aura sur les différents secteurs de l'agriculture et de l'alimentation. Cela inclut tout risque de barrières commerciales supplémentaires pour le Canada, attendu que nous sommes un pays dépendant des exportations et que, de ce fait, nous sommes déjà un peu à la merci du protectionnisme et des tarifs.
     Enfin, je pense qu'il est important que nous puissions utiliser nos connaissances pour montrer la voie à suivre pour l'agriculture mondiale. En position de force, avec l'appui de la science, nous pouvons montrer aux autres pays comment améliorer leurs pratiques durables. Si l'ajustement carbone aux frontières s'applique à l'agriculture et aux systèmes alimentaires, nous voudrons nous assurer d'être proactifs plutôt que réactifs.
    Je vous remercie de votre attention et je me fais une joie à l'idée de discuter de cela avec vous.
(0835)
    Merci, madame Bedard-Haughn. C'est un plaisir de vous revoir, même si ce n'est pas en personne cette fois‑ci. Je vous remercie tout de même d'être là.
    J'ai omis d'accueillir quelques remplaçants aujourd'hui.
    Nous accueillons Mme McPherson, députée du NPD. Je vous remercie infiniment de vous être jointe à nous.
     M. Epp est l'un des députés conservateurs qui se joignent à nous aujourd'hui.
    Tout comme M. Morrissey. Je vous remercie beaucoup de votre présence.
    Nous allons maintenant passer à nos séries de questions, et je vais donner la parole aux conservateurs en premier.
    Monsieur Epp, vous avez la parole pendant six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence.
    J'aimerais commencer par poser deux questions fondamentales. Dites-moi où nous en sommes sur une échelle de 0 à 10, ou de 0 à 100. Commençons par le Canada, puis passons à la situation à l'échelle internationale. Je vous demande à tous les deux de formuler des observations.
    Si l'on s'en tient à un simple accord et à la compréhension de la manière de mesurer l'empreinte carbone, je pense qu'en Ontario, nous produisons quelque 257 produits agricoles primaires différents. Parmi cet éventail de produits, où en sommes-nous en ce qui concerne la compréhension à une grande échelle de l'empreinte carbone réelle de chacun de ces produits?
    La deuxième question est la suivante: où en sommes-nous en ce qui concerne le degré d'entente à l'échelle internationale si nous mesurons les choses différemment — là encore, choisissez votre échelle, qu'elle soit de 0 à 10, de 0 à 100, ou n'importe quoi d'autre? Je pose la question tout simplement à titre de référence pour que nous puissions même commencer à réfléchir à l'établissement de systèmes commerciaux internationaux fondés sur des ajustements à la frontière pour le carbone.
    Je vais commencer par donner la parole à Mme Bedard-Haughn.
     Formidable. Je vous remercie de votre question.
    En ce qui concerne la façon de mesurer l'empreinte carbone, je pense que cette question comporte deux volets. D'une part, la question est de savoir comment nous pouvons mesurer cette empreinte, ce que nous savons faire, mais aussi comment nous pouvons la mesurer de manière rentable, ce qui est peut-être le deuxième et le plus délicat des aspects.
    En ce qui concerne la manière de la mesurer, nous sommes conscients des différents éléments qui doivent entrer dans ce calcul. En ce qui concerne l'analyse du cycle de vie complet, cela devrait en fin de compte aboutir à une évaluation complète de l'intensité carbonique d'une culture particulière. Je dirais que nous sommes plus avancés à cet égard dans le cas de certains des produits de base les plus importants et les plus dominants, et moins avancés dans le cas des produits moins répandus et plus spécialisés.
    Pour ce qui est des défis posés par cette évaluation, ils résident toutefois dans les aspects que j'ai soulevés plus tôt, à savoir la variabilité qui est inhérente à ces produits.
    Je citerai l'exemple du travail réalisé par le Global Institute for Food Security. Les résultats de ce travail ont été très bien présentés à l'échelle provinciale. Nous pourrions examiner l'intensité carbonique moyenne enregistrée dans l'ensemble de la Saskatchewan ou dans d'autres pays, en fonction d'un ensemble de pratiques typiques.
    Maintenant, cela changera‑t‑il les choses si un producteur met en œuvre ces pratiques, alors qu'un autre ne le fait pas? C'est là la question la plus délicate à envisager si nous essayons d'utiliser ce mécanisme pour encourager différentes pratiques.
(0840)
     Il faut donc tenter d'attribuer une note entre 0 et 10.
     Je vais aussi demander à Mme Tothova de formuler des observations.
    J'approuve ces observations. Nous savons en théorie ce que nous voulons inclure, la façon de procéder et ce qui doit être pris en compte. Toutefois, dans de nombreux cas, en particulier dans les petits pays, disons, il se peut que nous ne disposions pas de toutes les données nécessaires à l'établissement d'un chiffre exhaustif.
    Cependant, je dirais qu'en fait, il est bon que nous ayons cette conversation au sujet des ajustements pour le carbone, du contenu du carbone et des politiques environnementales en général. C'est l'une des étapes qui permet d'améliorer l'encadrement et la réflexion sur le sujet.
    Pour conclure, je voudrais parler des cornichons, uniquement parce que j'estime qu'ils illustrent la complexité du processus et le cauchemar administratif qui pourrait en découler.
    Je vis près des États-Unis, dans le sud-ouest de l'Ontario. Évidemment, on ne plante pas des cornichons, mais plutôt des concombres que l'on fait mariner. Cependant, l'industrie du marinage a disparu en Ontario. Par conséquent, les concombres sont cultivés et acheminés vers des gares de triage locales, après quoi ils sont calibrés, distribués dans les États de l'Ohio, du Michigan et de New York, marinés, mis en bocaux et réexpédiés au Canada dans nos marchés de vente au détail.
    Je sais également que dans l'Union européenne, il existe un commerce de cucurbitacées entre les pays d'Europe de l'Est non membres de l'Union européenne et les pays européens. Donc, certaines des mêmes dynamiques s'appliqueraient dans les deux situations.
     Comment peut‑on administrer un programme de MACF pour un commerce transfrontalier qui englobe le processus de transformation, le transport, de même que les systèmes de culture initiaux?
    Mme Bedard-Haughn peut commencer à répondre à la question. Ensuite, j'interrogerai Mme Tothova.
    C'est essentiellement ce à quoi je voulais en venir lorsque j'ai déclaré que nous n'étions pas prêts à mettre en oeuvre un tel programme. Lorsque je me suis entretenue avec M. Gray à ce sujet, avant d'apporter mon témoignage d'aujourd'hui, nous avons parlé de cette complexité et du fait que les marchés ont tellement un caractère mondial. Je pourrais vous donner exactement le même exemple en ce qui concerne les lentilles et certains des produits que la Saskatchewan exporte, pour qu'ils soient transformés à l'autre bout du monde et qu'ils nous reviennent sous la forme d'un produit à valeur ajoutée.
    Je suis tout à fait consciente de ces défis.
    Lorsque nous commencerons à mettre en place ces mécanismes, qui en couvrira les coûts? Dans l'exemple que vous avez donné, vous avez intégré ces coûts dans l'intensité carbonique du produit final. Ces concombres sont transportés depuis l'Ontario jusqu'à l'endroit où ils sont transformés, puis ils sont réexpédiés au Canada. À quel moment cet ajustement est‑il appliqué? Est‑il appliqué deux fois? À quel moment l'administration d'un tel programme devient-elle insensée du point de vue des coûts économiques qu'elle occasionne par rapport aux avantages réels qu'elle procure?
    C'est en fin de compte l'une de mes plus grandes préoccupations, si une partie de cette mesure est censée inciter...
    Je vous remercie de votre réponse. Je suis désolé, mais je tiens à accorder également un peu de temps à Mme Tothova.
    J'aime votre exemple lié aux concombres, car je sais que le Canada et les États-Unis échangent activement des cornichons. D'un point de vue conceptuel, il s'agit d'un bon exemple, qui traite des produits qui sont transformés par la suite tout au long de la chaîne de valeur, mais j'insiste sur le fait qu'il faut commencer à réfléchir à cette question en commençant par des produits de base. Si le Canada expédie des lentilles de la Saskatchewan vers un autre endroit pour qu'elles y soient transformées, que se passe‑t‑il à ce moment‑là et quelle est l'empreinte carbone de cette expédition? En fin de compte, il y a de nombreuses étapes à franchir avant que le produit atteigne un commerce de détail, et chacune d'entre elles s'accompagne d'un ensemble distinct de problèmes de transport, entre autres choses. Voilà pourquoi il serait peut-être bon de commencer à réfléchir aux images qui délimitent le processus, par exemple. Les cornichons sont donc envoyés dans l'État du Michigan, puis ils sont réexpédiés, et nous nous arrêtons là, n'est‑ce pas? Nous n'allons pas prendre en considération d'autres niveaux de distribution.
    Je précise encore une fois qu'il est bon de commencer à réfléchir à cette question, mais j'insiste pour que nous commencions par songer aux expéditions de produits de base, avant de parler de produits de consommation particuliers.
(0845)
    Je vous remercie.
    Je vous remercie du temps que vous nous avez consacré.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Murray pendant six minutes.
    Je vous remercie beaucoup de vos témoignages très intéressants. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que nous ne voulons pas que les produits à fortes émissions de carbone soient avantagés par rapport à ceux des producteurs qui ont investi dans des processus de rechange à faibles émissions de carbone.
    Le Canada ne cherche pas à procéder à des ajustements à la frontière pour le carbone, mais j'ai d'emblée deux questions à poser.
    Premièrement, quelles sont les limites de ce qui serait comptabilisé? À cet égard, je songe à la question du gaspillage alimentaire. Au Canada, environ 32 % des aliments sont perdus ou gaspillés, alors qu'ils pourraient être réacheminés pour nourrir des gens. C'est ce qui ressort d'un projet de recherche mené par Value Chain Management International et Second Harvest. Comment le gaspillage alimentaire est‑il pris en compte et comment la préparation du Canada, en cas d'ajustements à la frontière pour le carbone, peut-elle nous aider à encourager les intervenants à adopter des pratiques qui réduisent les 30 % de denrées qui sont gaspillées et qui pourraient être réacheminées pour nourrir des gens? En fait, 58 % de toute la nourriture disponible au Canada est perdue ou gaspillée. Comment notre façon d'envisager la question pourrait-elle nous permettre de réduire cette proportion?
    J'aimerais que nos deux témoins me fassent part de leurs réflexions à ce sujet, et je vous remercie de vos témoignages.
    Je pense que nous étions en train de nous dévisager pour savoir qui allait prendre la parole en premier.
    Je dirais que, là encore, il s'agit d'un domaine dans lequel nous ne sommes pas encore prêts à intervenir. Mais si nous devions réfléchir à cette question du point de vue de la meilleure façon d'appliquer ce principe — et je pense tout haut en ce moment —, je soupçonne qu'il faudrait alors établir différents niveaux en matière de risque relatif de perte ou de gaspillage que nous devrions prendre en compte. Certains produits alimentaires présentent un risque de perte ou de gaspillage beaucoup plus élevé que d'autres. Certains se conservent et se transportent plus facilement. D'autres sont beaucoup plus vulnérables au gaspillage. En général, la valeur de ces produits reflète cette vulnérabilité, mais il faudrait en tenir compte dans la mise en place de ce système.
    Cela met en évidence l'une des autres complexités propres aux systèmes alimentaires, par opposition à d'autres secteurs où des ajustements à la frontière pour le carbone sont envisagés. Vous faites valoir un excellent argument.
    Je vous remercie d'être intervenue en premier.
    J'ajouterai qu'il existe une différence entre les aliments perdus et les aliments gaspillés. Les pertes d'aliments sont attribuables aux producteurs, alors que le gaspillage d'aliments est attribuable aux consommateurs. Il faudrait organiser une audience distincte pour en discuter. Mais lorsqu'il est question de pertes et de gaspillages alimentaires, l'enjeu fait partie de ce que nous appelons la transformation des systèmes agroalimentaires, n'est‑ce pas? C'est une question importante. En réduisant la quantité de pertes et de gaspillages alimentaires, comme vous l'avez mentionné, nous améliorons la quantité d'aliments qui peuvent faire l'objet d'une transformation supplémentaire et être offerts, entre autres, aux consommateurs. Ce sont les ajustements à la frontière et les politiques qui tiennent compte des externalités, et ils interviennent aussi dans la transformation des systèmes alimentaires, mais sous un angle légèrement différent. Néanmoins, l'objectif des deux est d'améliorer le fonctionnement et l'efficacité des systèmes agroalimentaires.
    Je pense que la question suivante a été posée à tous nos témoins.
    Je vais l'encadrer de la façon suivante: quelles sont les trois principales mesures que le Canada pourrait ou devrait prendre pour être aussi prêt que possible si des ajustements à la frontière pour le carbone devaient entrer en vigueur à l'échelle internationale?
(0850)
    Je peux parler de cette question en premier.
     Comme je l'ai souligné dans mon témoignage, je pense qu'il sera essentiel de répondre à certaines de ces questions clés.
    La première façon d'y parvenir consiste à poursuivre les recherches qui nous permettent de continuer à faire progresser nos pratiques durables à tous les niveaux de la chaîne de valeur. Au cours de mon témoignage, j'ai insisté sur l'importance des pratiques destinées aux agriculteurs, mais comme cela a été souligné dans la question posée plus tôt, il faut examiner les pratiques adoptées à toutes les étapes de la chaîne de valeur. Ce sont des pratiques bénéfiques pour tous qui nous permettent d'améliorer notre durabilité, avec ou sans les ajustements à la frontière pour le carbone, afin que nous soyons en position de force.
    Deuxièmement, nous devons nous assurer que nous disposons des données dont nous avons besoin pour participer à ce programme. Nous devons connaître l'empreinte carbone dont parlait Mme Tothova, et disposer des ensembles de données nécessaires et d'un cadre de données qui nous permettent de suivre ces informations.
    Enfin, il faut comprendre les effets que ces politiques pourraient avoir sur toutes les parties de nos systèmes, afin que nous ne soyons pas pris au dépourvu lorsque nous arriverons à une autre étape de nos systèmes de production alimentaire et que nous déclarions: « Eh bien, nous n'avions pas vraiment vu cela venir, n'est‑ce pas? », que ce soit au niveau des producteurs ou au niveau des épiceries.
    Je crois que ce sont là les trois domaines que nous devons examiner attentivement avant de mettre en œuvre quoi que ce soit au Canada.
    Il vous reste environ 30 secondes, si vous le voulez bien.
    Je voudrais ajouter quelque chose à cet égard, à savoir qu'il faut s'efforcer de discuter de ces questions dans le cadre d'interactions avec des institutions mondiales. Vous ne voulez pas participer à une discussion lorsqu'un pays met en place un certain système et qu'un autre pays doit ensuite s'y adapter. Il s'agit là d'une externalité mondiale. Comme je l'ai mentionné dans mon témoignage, une externalité mondiale exige une solution mondiale.
    Nous devons discuter de méthodologies communes concernant la manière de mettre cela en place et, une fois qu'il y aura une compréhension commune, il sera plus facile de trouver des solutions qui conviendront à un plus grand nombre de personnes ou à un plus grand nombre de pays.
     Je vous remercie.
     Monsieur Perron, vous avez la parole pendant six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Personnellement, je m'intéresse beaucoup à la question de la réciprocité des normes. Un des problèmes importants que les producteurs locaux dénoncent constamment, c'est que le Canada laisse entrer au pays des produits de l'étranger. Ces pays n'ont pas les mêmes normes et utilisent des produits qui sont interdits au Canada pour des raisons phytosanitaires. De plus, ces produits sont à un coût moindre, ce qui désavantage nos producteurs locaux. Une concurrence déloyale s'est installée depuis longtemps, et il n'est pas simple d'ajuster cela.
    Madame Bedard‑Haughn, comment fait-on pour implanter cela? Selon vous, ai-je raison d'affirmer qu'il y a actuellement un problème? Comment peut-on ajuster cela sans augmenter le coût des aliments?

[Traduction]

    Si l'environnement était un peu plus international... Madame Bedard-Haughn, je vais parler en premier, si vous êtes d'accord.
    J'espère que toutes les importations qui entrent au Canada satisfont aux exigences de l’Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires. Il s'agit des normes minimales ou des paramètres qui doivent être respectés pour garantir que les importations ne sont pas dangereuses pour la santé, entre autres choses. Il existe un ensemble de normes ou de mesures sanitaires et phytosanitaires que les produits importés au Canada doivent respecter.
    Je ne suis pas sûre qu'il y ait un problème. Il est possible qu'il y ait un problème de perception de la part des agriculteurs, qui estiment que la qualité, par exemple, des normes environnementales appliquées... Les mesures sanitaires et phytosanitaires ne tiennent pas compte de l'environnement, mais il est possible que les agriculteurs aient l'impression que l'environnement dans lequel ces produits sont fabriqués intervient en fait dans les mesures sanitaires et phytosanitaires.
    Il s'agit d'une discussion sur la manière dont les produits sont fabriqués, ce qui peut avoir une incidence sur leur qualité ou non. C'est une question qui devrait être abordée au cours d'une autre audience. Il faudrait avoir une autre discussion concernant la manière dont ces normes sont réellement créées.
(0855)

[Français]

     Qu'en pensez-vous, madame Bedard‑Haughn?

[Traduction]

    Je suis du même avis en ce qui concerne la nécessité de poursuivre le dialogue pour s'assurer que ce genre de normes seront mises en œuvre. Je sais que les membres du Comité discutent depuis longtemps de cet enjeu préoccupant.
    Il est également important, dans le cadre de ces discussions, que le processus décisionnel soit fondé sur des données probantes. Quelles que soient les normes mises en œuvre, nous devons tenir compte des dernières avancées scientifiques, et nous devons établir ce genre de comparaisons.
    Je pense qu'au fur et à mesure que nous améliorons et renforçons nos capacités en matière de gestion des données agricoles numériques, nous disposerons de plus en plus d'outils, ce qui peut constituer l'un des plus importants défis dont vos producteurs vous ont sans doute parlé.

[Français]

     Merci beaucoup. Je suis désolé de vous interrompre, mais il ne me reste pas beaucoup de temps.
    Nous sommes d'accord sur l'importance des données probantes. Prenons l'exemple de la carotte, qui est très facile à comprendre. On avait modifié la recette du linuron, qui n'était pas encore homologué au Canada, mais qui l'était aux États‑Unis. Nos producteurs ne pouvaient pas s'en servir. On a donc failli se retrouver dans une situation où on aurait importé des carottes cultivées en utilisant un produit qui n'était pas homologué ici, ce qui aurait désavantagé nos producteurs. Encore l'été dernier, des carottes de Chine sont entrées massivement au Canada, alors qu'elles étaient interdites aux États‑Unis, pour protéger les terres agricoles. Il y a beaucoup d'exemples et je suis d'accord sur ce que vous dites toutes les deux. Cela prend des données probantes.
    Ensuite, il y a une sous-question liée à l'homologation. Comme le Canada est un plus petit marché que ceux de nos partenaires commerciaux, les entreprises internationales ne viennent pas investir ici, d'abord, pour faire homologuer leurs produits au Canada. Elles vont plutôt les faire homologuer en Europe ou aux États-Unis. C'est un problème pour le Canada.
     Croyez-vous qu'il est possible d'établir une collaboration internationale, sans réduire les normes de qualité, afin de partager les étapes d'homologation avec un certain nombre de partenaires?
    La question s'adresse à vous deux.

[Traduction]

    Je vous remercie pour vos questions.
    Il s'agit d'organismes de certification internationaux, n'est‑ce pas? Ce sont des organismes internationaux de normalisation. Par exemple, nous avons le Codex Alimentarius qui établit les normes pour les produits alimentaires.
    Je ne suis pas spécifiquement au courant... Je dois admettre que je ne suis pas les marchés canadiens actuels dans les moindres détails, et je ne peux donc pas me prononcer sur ce cas particulier, mais il existe des organismes internationaux de normalisation dont les recommandations nous sont utiles, et je suis certaine que le Canada y participe...

[Français]

     Merci beaucoup, madame Tothova. Je suis désolé de vous interrompre.
    Madame Bedard‑Haughn, pouvez-vous répondre en quelques secondes?

[Traduction]

    Oui, je pense que certains des problèmes dont j'entends parler aujourd'hui reflètent probablement davantage les enjeux d'évaluation des produits dès leur entrée au pays, par opposition aux ajustements à la frontière pour le carbone.
    Nous devons évaluer le cadre actuel en fonction de l'application de ce type de normes.
    Merci beaucoup, monsieur Perron.
    Nous allons maintenant céder la parole à Mme McPherson pour les six prochaines minutes, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup aux témoins pour leur témoignage d'aujourd'hui. J'ai trouvé cela très intéressant. Je dois admettre que je ne suis pas un membre régulier du Comité, et que tout cela est très nouveau pour moi, alors pardonnez-moi si mes questions pouvaient vous sembler un peu simples.
    Ma première question s'adresse à Mme Bedard-Haughn. J'ai été surprise d'entendre qu'il n'y avait pas eu suffisamment de recherches. Nous savons que le commerce et les relations commerciales sont complexes, mais vous insistez sur le fait qu'il n'y avait pas assez de recherches. Autrement dit, nous ne disposions pas de tous les renseignements nécessaires pour être en mesure de prendre des décisions éclairées.
    Pourquoi ne disposons-nous pas encore de ces données? Pourquoi cela a‑t‑il pris autant de temps? De toute évidence, la taxe sur le carbone est en place depuis longtemps. Les gouvernements fédéral et provinciaux mettent-ils à la disposition des chercheurs canadiens des ressources suffisantes pour mener à bien cette tâche?
(0900)
    C'est une excellente question et une interprétation appropriée, je pense, de mon témoignage dans ce contexte.
    Nous avons effectué de nombreux projets de recherches dans différentes régions du pays. C'est pourquoi je peux affirmer en toute connaissance de cause qu'il existe une grande variabilité à l'échelle régionale. L'une de mes préoccupations est donc la suivante: si nous commençons à évaluer un projet aux implications fédérales, comment pouvons-nous l'intégrer au reste du processus?
    Si je demande quelles sont les similitudes et les différences entre les pommes de terre produites à Lethbridge, en Alberta, et celles produites sur l'Île-du-Prince-Édouard, ou si j'examine la production agricole dans les Prairies par rapport au sud de l'Ontario, je dirais que ce sont là quelques-uns des défis que nous avons à relever.
    L'autre défi que nous devons relever pour collecter et rassembler toutes ces données est la taille même de notre pays et la capture d'une partie de cette variabilité dans l'espace et dans le temps. Le coût de l'obtention de données fiables est très élevé, car dans ce contexte... Par rapport à d'autres marchés ou industries où l'on pourrait envisager une telle chose, comme un produit ou une industrie où il y a peut-être une usine, des murs autour d'elle et, oui, beaucoup de choses qui entrent et sortent, c'est un peu plus défini. Nous avons plus de contrôle dessus.
    Il y a toutes ces autres variables climatiques qui influencent le coût du carbone d'un produit particulier au cours d'une année si l'intensité du carbone devait varier. Quelle quantité de séchage a dû être effectuée sur les grains? Quels sont les engrais nécessaires pour une année donnée? Quelles sont les autres considérations à prendre en compte?
    On voit donc que la situation est très complexe et, qu'à l'échelle nationale, il est très difficile de rassembler tous ces ensembles de données afin de les intégrer au sein d'un seul et unique cadre fédéral.
    Je suis d'accord avec vous pour dire que nous faisons face à des défis aussi complexes que coûteux.
    Je reviens d'Irlande, et je vous confirme que les relations commerciales entre le Royaume-Uni et l'Irlande sont très complexes, surtout dans un contexte post-Brexit. Ainsi, chaque pays doit faire face aux défis qui lui sont propres. La situation du Canada est complexe, en raison notamment de l'immensité du pays, et des particularités du régime fédéral.
    Existe‑t‑il des exemples où ce travail est effectué et fonctionne très bien, ou des exemples où des recherches ont été effectuées et où des leçons peuvent être tirées?
    En ce qui concerne les autres pays, et notamment les membres de l'UE, je m'en remettrai à Mme Tothova.
    Je dirais que ce serait beaucoup plus simple dans une région géographique plus petite, parce que même si vous avez la diversité complexe des marchés ou de ce qui est exporté, vous n'avez pas à ajouter la complexité géographique qui signifie que l'intensité de carbone est très différente pour le même produit dans les différentes régions d'un pays.
    Les États-Unis seraient confrontés aux mêmes problèmes que nous, de même que l'Australie, en toute probabilité. Si nous considérons l'UE dans son ensemble, la situation est différente selon chaque pays membre.
    Madame Tothova, puis‑je également vous demander votre avis?
     Oui, bien sûr.
    Pour ce qui est de l'UE, permettez-moi de commencer par dire que l'évaluation de l'intensité en carbone dans ce contexte est une mesure relativement nouvelle. Nous avons beaucoup parlé du commerce et nous disposons de nombreuses données commerciales. Essayer de détecter la teneur en carbone de produits spécifiques, en tenant compte de la manière dont ces produits ou matières premières sont produits, et des étapes à inclure, s'avère une entreprise relativement nouvelle.
    Il existe des moyens de le faire. Des méthodologies sont en cours d'élaboration. Ces méthodologies peuvent varier d'un pays à l'autre, mais des progrès ont été réalisés.
    Dans l'UE, par exemple, si vous prenez l'Irlande, les conditions y seront très différentes de celles de l'Italie. Vous produisez des produits différents. Il y a également la question de la diversification et de l'irrigation. En fait, nous devons prendre compte de multiples facteurs, mais je demeure optimiste, et je pense qu'il y a beaucoup de réflexions en cours dans ce sens.
(0905)
    Mon temps de parole doit être écoulé.
    Il vous reste quelques secondes.
    D'accord, donc je vais m'arrêter pour l'instant.
     Je vous remercie, madame McPherson.
    Nous allons maintenant revenir aux conservateurs.
    Madame Rood, à vous la parole pour les cinq prochaines minutes, je vous prie.
     Je tiens tout d'abord à remercier nos invités pour leur présence aujourd'hui.
    Je voudrais demander à Mme Bedard-Haughn comment l'introduction de ce mécanisme d'ajustements de carbone à la frontière pourrait entrer en conflit avec les efforts plus larges du Canada pour promouvoir l'innovation et la durabilité agricoles, en sapant la viabilité économique de ce secteur?
    C'est une question fantastique, et je dirais que c'est l'une des grandes préoccupations que nous avons ici au Canada. Nous avons tendance à être très innovants et à adopter relativement tôt un grand nombre de technologies qui font progresser l'agriculture, de sorte que nous craignons de développer des approches qui sont testées et validées par des preuves comme étant plus durables et moins intensives en carbone. Je fais référence à la sélection des cultures ou à d'autres types de nouveaux intrants agricoles qui, à leur tour, ne sont pas reconnus à l'échelle mondiale comme offrant les avantages qu'ils présentent.
     C'est probablement l'une de mes plus grandes préoccupations: si nous laissons cette question être abordée ailleurs, dans des domaines peut-être moins innovants, plus réticents à l'innovation, nous finirons par compromettre notre potentiel. Compte tenu des changements qui se produisent à l'échelle mondiale et des défis que nous devons relever en matière de sécurité alimentaire, je pense que nous devons utiliser tous les outils dont nous disposons.
    C'est une question importante et c'est en partie pour cela que je pense que le Canada doit jouer un rôle de leader au cours des premières discussions. Nous devons nous montrer proactifs plutôt que réactifs.
    Je vous remercie de votre attention. J'ai une question complémentaire.
    Craignez-vous un effet dissuasif sur les initiatives d'innovation et de recherche au sein du monde universitaire?
     À mon avis, les universités doivent continuer de prioriser différentes activités de recherche et d'innovation.
     Cela nous découragerait dans la mesure où cela limiterait notre boîte à outils, n'est‑ce pas? Nous espérons que cela ne se produira pas et que, si c'est le cas, nous aurons la possibilité de changer d'orientation et de travailler ailleurs, mais les universités ont tendance à suivre ces voies. C'est l'un des avantages de la recherche universitaire par rapport aux travaux menés uniquement dans un contexte industriel.
     Merci beaucoup, madame Bedard-Haughn.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole à M. Steinley.
    J'ai quelques brèves questions à poser dans le temps qui m'est imparti.
    Madame Bedard-Haughn, savez-vous combien il existe de types de sols en Saskatchewan, et a fortiori au Canada?
    Cela dépend de la définition que vous utilisez.
    En ma qualité de scientifique en science du sol, je pourrais passer des heures à examiner cette question. De façon générale, la texture du sol et la quantité de matière organique varient beaucoup, même dans le principal type de sol que nous avons. Chacun de ces éléments a une incidence sur la façon dont ces sols fonctionnent ou se comportent sur le plan de l'intensité carbonique.
    Comme vous le savez, les différents types de sols requièrent des engrais différents.
    C'est tout à fait juste.
    C'est pour cette raison qu'il est très difficile de les comparer.
    J'ai une question et une préoccupation à ce sujet. Nos producteurs au Canada et plus particulièrement dans l'Ouest du pays se demandent toujours quel genre de crédit ils recevront et comment l'on reconnaîtra leurs efforts en matière de séquestration du carbone. Tout le monde parle des émissions, mais personne ne parle de la séquestration. C'est une partie importante de cette conversation qui fait défaut, selon moi.
    Avez-vous des commentaires sur la manière dont nous pouvons reconnaître le mérite qui revient à nos producteurs? J'ai parlé à maintes reprises en comité des innovations, du semis direct, de la rotation des cultures et de toutes les excellentes méthodes que nos producteurs ont adoptées et pour lesquelles ce gouvernement ne leur accorde toujours aucun mérite.
    Je vais revenir à l'examen que le Global Institute for Food Security, ou GIFS, a effectué. Il a comparé l'intensité carbonique de la production de certaines denrées en Saskatchewan à celle que l'on observe ailleurs dans le monde, en tenant compte de la séquestration. C'est en partie ce qui lui confère un tel avantage, et il faut en tenir compte au moment d'effectuer les mesures, les rapports et les vérifications, qui sont nécessaires.
    Ensuite, lorsque nous parlons des émissions dans ce contexte, nous devons reconnaître que nos producteurs, même les pionniers, préviennent la production d'émissions supplémentaires en continuant à appliquer ces pratiques. S'ils devaient revenir à un travail du sol plus intensif, par exemple, nous nous retrouverions au même point que dans les années 1940 et 1950, où de grandes quantités d'émissions provenaient de l'agriculture, ce que nous avons réussi à éviter depuis.
(0910)
    J'ai une dernière petite observation. Nous devrions également examiner les émissions, par tonne produite. Je pense qu'il faut en parler dans le cadre de cette discussion.
    Cela se trouve aussi dans l'étude du GIFS.
    Merci, monsieur Steinley.
    Nous passons maintenant à Mme Taylor Roy pour cinq minutes.
    Je remercie Mme Bedard-Haughn et Mme Tothova de leur présence.
    Vos témoignages étaient très intéressants et pertinents. Ils soulignent qu'il est complexe de réduire les émissions de carbone et d'effectuer des mesures, en particulier dans le contexte du commerce mondial.
    Mon collègue d'en face vient de dire à quel point il était difficile de déterminer la quantité d'émissions nettes. Nous savons que les choses difficiles sont difficiles, et c'est pour cette raison que des personnes brillantes comme vous deux examinent cette question, car c'est quelque chose que nous devons faire.
    Vous avez dit que le Canada devait faire preuve de leadership dans ce dossier. Êtes-vous d'avis qu'il est important d'entreprendre une étude comme celle‑ci et d'examiner ces questions maintenant, avant même que nos partenaires commerciaux ne mettent en place des mécanismes d'ajustements à la frontière pour le carbone? Dans l'affirmative, pourquoi?
    Nous pouvons peut-être commencer par vous, madame Bedard-Haughn.
    Je sais qu'au début, j'ai dit que fort heureusement, ces mécanismes étaient encore loin d'être mis en place, mais je suis tout de même soulagée que nous ayons entamé la conversation, en raison de ce que vous venez de dire. On nous a demandé quelles étaient les trois choses auxquelles nous devions nous attaquer maintenant. Il ne s'agit pas d'entreprises que nous pourrons mener à bien d'ici la fin de l'année 2024, car elles sont énormes.
    En faisant de cette question une priorité — une priorité pour la recherche et pour le gouvernement — et en nous assurant de bien la comprendre, nous serons en bien meilleure posture pour préparer le terrain pour d'autres, si ces mécanismes finissaient par être mis en place.
    C'est très bien. Merci.
    Madame Tothova, avez-vous une observation à ce sujet?
    Oui, je suis tout à fait d'accord.
    Les mesures liées aux mécanismes d'ajustements à la frontière pour le carbone ailleurs dans le monde concernent surtout le fer, l'acier, le ciment et les engrais; des secteurs à forte intensité énergétique. On parle moins de l'agriculture. Il est quelque peu question de l'élargissement des mesures d'ajustement à la frontière pour le carbone au secteur agricole.
    Vous réfléchissez déjà à cette question, et je tiens d'ailleurs à vous féliciter d'avoir entamé cette étude.
    Merci beaucoup.
    Nous avons parlé de la complexité et du fardeau administratif entourant la mesure et la comptabilisation d'empreintes carbone précises. Nous devons veiller, lorsque nous mesurons l'empreinte nette dans l'écosystème, comme vous le disiez, à ce que nous recueillions des données non seulement sur la séquestration du carbone, mais aussi sur les émissions et sur tout changement. Il va sans dire que ces éléments seraient aussi pris en compte dans le calcul par tonne.
    Cependant, il me semble qu'il serait très compliqué de le faire ferme par ferme et produit par produit. Y a‑t‑il eu des discussions sur ce que nous pouvons faire d'autre pour encourager les agriculteurs à adopter ces pratiques et faire en sorte que le marché mondial soit favorable à ceux dont les pratiques sont plus durables, sans qu'ils aient à recueillir toutes ces données produit par produit ou ferme par ferme?
    Je vous demanderais de donner une réponse brève, si vous le pouvez, car mon temps de parole est presque écoulé. Existe‑t‑il d'autres façons de s'y prendre?
    C'est l'avantage de commencer tôt. Nous disposons d'outils. Prenez l'exemple des mesures relatives aux sols. Nous pouvons combiner des données locales et des outils d'apprentissage automatique. Il s'agit, grosso modo, de développer notre boîte à outils et notre capacité à accomplir une plus grande partie de ce travail sans devoir effectuer des mesures ferme par ferme.
    Nous devons constituer cet ensemble de données pour être en mesure d'utiliser ces autres outils à l'avenir. Cela fait partie des efforts accomplis en matière d'innovation. Certes, nous innovons en développant de nouvelles variétés et ce genre de choses, mais nous essayons aussi de trouver de nouvelles façons d'effectuer les mesures en combinant la télédétection et les technologies d'apprentissage automatique avec un plus petit nombre de données locales.
    C'est formidable.
    Madame Tothova, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je suis tout à fait d'accord avec ces énoncés.
    Me reste‑t‑il du temps, monsieur le président?
(0915)
    Vous avez 45 secondes.
    Je m'interroge aussi sur l'exemple des cornichons qu'on a soulevé. J'allais également parler des cornichons.
    Nous devons trouver des moyens d'encourager l'ensemble de la chaîne, y compris le secteur des transports, à favoriser la carboneutralité. J'espère que l'on préconisera la transformation des aliments au Canada, en raison des émissions liées au transport des marchandises. Si cela est pris en compte dans ces mesures, il y aura peut-être plus de mesures incitatives et d'investissements axés sur la transformation des aliments au Canada.
    Êtes-vous d'accord? Comment pourrions-nous y arriver, à votre avis?
    Je hoche la tête avec enthousiasme. Oui, je suis tout à fait d'accord pour dire que c'est essentiel. Il faut encourager la transformation à valeur ajoutée plus près de la source, tout en trouvant des façons de favoriser la carboneutralité dans le secteur des transports.
    Merci.
    Merci, madame Taylor Roy.
    Monsieur Perron, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Madame Tothova, dans votre présentation, vous avez dit que 25 % des émissions de gaz à effet de serre provenaient du secteur de l'agriculture et qu'il fallait réduire ces émissions. Je suis d'accord. Cependant, je pense aussi qu'il faut aussi tenir compte des effets bénéfiques de l'agriculture, comme vous en avez parlé dans vos interventions. Je parle, par exemple, du maintien d'une prairie ou du captage de carbone dans les sols quand on fait du semis direct.
    Madame Bedard‑Haughn, vous avez beaucoup parlé de l'importance de reconnaître la valeur de nos propres pratiques, de mesurer cela de façon durable et de récompenser nos pionniers. Je défends cette idée depuis très longtemps. Comment peut-on faire pour mesurer les effets positifs des pratiques agricoles et récompenser décemment les gens qui, pendant 20 ou 25 ans, ont eu de la misère et ont mangé leurs bas parce qu'ils protégeaient l'environnement? Maintenant qu'on veut que tout le monde protège l'environnement, on va récompenser celui qui a pollué l'environnement pendant 20 ans parce qu'il a changé ses pratiques, mais on ne tiendra pas compte du pionnier. Il faut trouver une meilleure façon de faire.
    J'aimerais entendre votre avis sur cette question.

[Traduction]

    Ce sujet me tient certainement à coeur, monsieur Perron. Ici, en Saskatchewan, beaucoup de gens pratiquent, par exemple, le travail de conservation du sol, et ce, depuis longtemps. Je consacre une grande partie de mon temps de recherche à essayer de quantifier efficacement les avantages qu'ils nous ont apportés jusqu'à présent. Je pense également que l'une des occasions qui s'offrent à nous aujourd'hui est d'examiner comment nous pouvons inciter ces gens à continuer à appliquer ces pratiques importantes alors qu'ils sont confrontés à d'autres difficultés.
    Ma plus grande crainte est que nous mettions en œuvre une politique ou un cadre qui découragerait ces pionniers sans le vouloir, en ne récompensant, par exemple, que ceux qui ont tardé à adopter ces pratiques. Cela reviendrait à dire aux pionniers que la seule façon d'obtenir ce crédit de carbone est d'arrêter leur travail de conservation du sol, de ne pas tenir compte de tout le carbone qu'ils ont déjà séquestré et de recommencer à zéro, en réadoptant ces pratiques. Il est important que nous réfléchissions aux possibilités de crédits pour ceux qui préviennent la production d'émissions, car nous pourrions nous retrouver dans cette situation trop facilement si nous adoptions la mauvaise politique.
    J'ajouterais, si vous me le permettez, que c'était 28 % de l'ensemble du système agroalimentaire, mais, bien sûr, nous reconnaissons que l'agriculture contribue également de façon positive à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. La question est de savoir comment les politiques agricoles de chaque pays équilibrent cette demande. Il n'y a pas de solution universelle, n'est‑ce pas? Tout dépend de la manière dont la politique agricole est mise en place dans le pays.
    Si l'on récompense les personnes qui utilisent une pratique depuis longtemps — le travail de conservation du sol, par exemple — tout en encourageant, peut-être avec un instrument politique légèrement différent, les personnes qui ne l'ont pas utilisée... et elles devraient, par ailleurs, adopter cette pratique.
    Merci beaucoup.
    Enfin, nous passons à Mme McPherson pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Encore une fois, je tiens à remercier les témoins.
    Je vais commencer par vous, madame Bedrad-Haughn. En 2021, l'Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, a recommandé d'investir dans des technologies de réduction des émissions afin d'éviter les fuites d'émissions, ce dont de nombreux témoins se sont également fait l'écho dans le cadre de cette étude. Pensez-vous qu'il s'agit d'une bonne solution de rechange aux ajustements à la frontière pour le carbone? Pensez-vous que les deux approches peuvent aller de pair? Pourraient-elles se compléter?
    J'aimerais beaucoup connaître votre avis à ce sujet.
(0920)
    Très brièvement, oui, je pense qu'il serait important de conjuguer ces deux approches si l'on finit par appliquer des ajustements à la frontière pour le carbone. Selon moi, les ajustements à la frontière pour le carbone seront mis en place plus tard, en raison des détails complexes qui y sont associés. Certaines approches de réduction des émissions que nous envisageons — et cela dépend de celle dont vous parliez — seront davantage axées sur l'innovation et seront relativement faciles à adopter à court terme.
    Il nous faut adopter les deux approches, plutôt que l'une des deux.
    Avez-vous des commentaires à ce sujet?
    Je suis tout à fait d'accord pour dire que nous devons essayer tout ce qui peut fonctionner, qu'il s'agisse de technologies pour réduire les émissions ou de différentes politiques, et qui nous permettrait d'améliorer la situation.
    Je vous remercie.
    Madame Bedard-Haughn, j'ai une dernière question à vous poser. En 2021, des consultations ont eu lieu au sujet des ajustements à la frontière pour le carbone au Canada. Est‑ce que vous ou l'Université de Saskatchewan étiez au courant de ces consultations? Y avez-vous participé?
    Étiez-vous au courant de ces consultations?
    Non. J'étais relativement nouvelle dans mes fonctions de doyenne à l'époque, il se peut donc que cela n'ait pas été porté à mon attention. Je ne peux toutefois pas dire avec certitude si l'un de mes collègues a participé ou non à ces conversations.
    Puis‑je donc conclure que, selon vous, les consultations ont été insuffisantes?
    Je ne sais pas si elles ont été insuffisantes ou non. Je peux dire que lorsque j'ai communiqué avec mes collègues en agriculture et en économie des ressources à propos de cette question, avant mon témoignage d'aujourd'hui, le seul qui m'a répondu et qui travaillait activement dans ce domaine était M. Richard Gray. Cependant, il y a eu quelques départs à la retraite au cours des deux dernières années. Il est donc possible que la mémoire institutionnelle se soit perdue.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, madame McPherson.
    Merci aux témoins.
    Je vais simplement poser une question à Mme Bedard-Haughn.
    En réponse à une question précédente, vous avez fait part de vos préoccupations relativement à la mise en œuvre d'un système qui risquerait de ne pas reconnaître les réalisations des producteurs qui travaillent le sol au minimum, qui pratiquent la rotation des cultures, l'agriculture de précision, etc. Vos collègues se sont-ils penchés sur l'élaboration d'un système que l'on pourrait privilégier pour souligner la contribution des producteurs qui séquestrent du carbone? Il pourrait s'agir d'un marché de crédits de carbone ou quelque chose de ce genre. Y a‑t‑il un consensus sur le modèle à privilégier?
    Je ne pense pas que nous soyons encore parvenus à un consensus. Je me contenterai de dire que nous nous entendons pour dire qu'il faut faire quelque chose. Nous travaillons activement sur deux ou trois possibilités différentes. Cela inclut, comme je l'ai mentionné, le fait de récompenser ceux qui évitent la production d'émissions supplémentaires à l'aide de la séquestration ou d'autres méthodes. Il s'agit là d'un élément. D'autres conversations ont eu lieu sur les moyens d'encourager ces pratiques, car elles sont bonnes pour les sols et les écosystèmes.
    Existe‑t‑il d'autres façons de récompenser ces gens en tenant compte de la réduction des risques? Les pratiques que ces gens utilisent tendent à réduire les risques agricoles, comme les risques d'érosion des sols, de perte de sol, de maladie, etc. Ainsi, y a‑t‑il des prestations en matière d'assurance-récolte, par exemple, qui pourraient être versées à ces gens, et qui vont plus loin et qui viendraient s'ajouter à tout type de marché du carbone?
    À l'heure actuelle, en ce qui concerne le marché du carbone, nous devons composer avec les exigences internationales en matière d'additionnalité. Cependant, nous devons reconnaître que chaque année où les producteurs continuent à appliquer ces pratiques, ils préviennent une énorme fuite de carbone qui, autrement, aurait lieu. De même, grâce à l'agriculture de précision, ils préviennent un grand nombre d'émissions qui, autrement, seraient produites.
    Nous travaillons donc activement sur les moyens de quantifier cela.
    Je vais donner la chance à Mme Tothova...
    Est‑ce que l'on s'est penché, à l'échelle internationale, sur l'établissement d'une norme internationale, de pratiques exemplaires? Y a‑t‑il d'autres pays qui ont mis en place un système qui semble porter ses fruits?
    Des efforts ont été accomplis, mais à ce stade, je ne suis pas sûre que je les qualifierais de réussites.
    Les méthodes et l'harmonisation des méthodes peuvent encore être améliorées, et cela revient à ce que j'ai dit au début de mon témoignage: une question d'envergure mondiale comme celle‑ci nécessite une réponse mondiale.
(0925)
    Merci beaucoup. Je vous remercie du temps que vous nous avez consacré.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Vos témoignages nous sont très utiles.
    Chers collègues, nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes pour permettre à nos témoins de retourner à leurs activités. Ensuite, nous reprendrons la séance et nous nous pencherons sur les travaux du Comité. Nous suspendons la séance pendant deux ou trois minutes.
    Des voix: Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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