NRGO Réunion de comité
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STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS
COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 20 novembre 1997
[Traduction]
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)): Je suis heureux d'ouvrir cette séance du 20 novembre du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales, consacrée aux changements climatiques.
La séance d'aujourd'hui sera la dernière de cette série. Nous reviendrons sur ce sujet au début de l'an prochain. Nous sommes heureux que les divers témoins entendus jusqu'à présent nous aient permis d'obtenir des informations qui seront utiles pour préparer la conférence de Kyoto.
Au nom de tous les membres du comité, je souhaite la bienvenue à Don Downing, de l'Association charbonnière canadienne, Pierre Guimond, de l'Association canadienne de l'électricité, et Kelly McCloskey, du Conseil canadien du bois. Vous pourrez nous présenter les personnes qui vous accompagnent à mesure que vous prenez la parole.
Nous avons demandé à chacune des associations de faire un bref exposé de cinq à sept minutes, afin de nous laisser beaucoup de temps pour les questions. Si vous le souhaitez, nous pourrons vous inviter à nouveau lors de la prochaine série d'audiences.
Nous allons donc commencer tout de suite avec M. Downing, de l'Association charbonnière canadienne.
M. Donald Downing (président, Association charbonnière canadienne): Merci, monsieur le président.
Le président: Merci d'être venu.
M. Donald Downing: Je suis heureux de pouvoir m'adresser à vous au nom de notre association.
Je suis accompagné de deux représentants de sociétés charbonnières du Canada, soit M. Ken Crane, de Luscar Limited, et Bernd Martens, de Manalta Coal Limited.
Je vais maintenant vous lire notre mémoire.
Au Canada, 29 mines produisent du charbon. Deux sont situées en Nouvelle-Écosse, une, au Nouveau-Brunswick, six, en Saskatchewan, douze, en Alberta et huit, en Colombie-Britannique. Leur production totale en 1996 a atteint 76 millions de tonnes, un record, et nous nous acheminons vers un autre record pour 1997.
La production actuelle et future de charbon au Canada s'appuie sur des réserves qui dépassent les 9 milliards de tonnes. Le charbon représente plus de 66 p. 100 de nos réserves de combustibles fossiles.
La plupart des mines de charbon du Canada sont d'importantes exploitations à ciel ouvert. En effet, 94 p. 100 de notre production annuelle de charbon vient de ces mines.
Les producteurs canadiens servent deux vastes secteurs de marché. Plus de 41 millions de tonnes du charbon produit en 1996 ont été consacrées à la production d'énergie au Canada. Les 35 millions de tonnes restantes ont été exportées.
L'Alberta, la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse tirent la plus grande partie de leur électricité de la combustion du charbon. Le Nouveau-Brunswick, l'Ontario et le Manitoba utilisent aussi du charbon pour produire de l'électricité. Au total, on trouve au Canada 25 centrales électriques alimentées au charbon qui produisent ensemble 19 000 mégawatts d'électricité. Ces centrales génèrent actuellement quelque 20 p. 100 de l'électricité produite au Canada.
• 1105
Les mines qui alimentent les marchés intérieurs en charbon
sont situées dans les prairies de l'Alberta et de la
Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick, et au Cap-Breton, en
Nouvelle-Écosse. En raison de facteurs géographiques, les
consommateurs du Nouveau-Brunswick, du Québec et de l'Ontario
importent une partie de leur charbon des États-Unis et de
l'Amérique du Sud. En 1996, plus de 11 millions de tonnes de
charbon importé ont été consommées par les services publics et
des usines de ces provinces.
Les exportations canadiennes de charbon ont aussi connu un record l'an dernier. En effet, 35 millions de tonnes ont été envoyées vers les marchés de l'Asie, de l'Europe, de l'Afrique, de l'Amérique du Nord et de l'Amérique du Sud. La plupart de nos exportations servent à la production sidérurgique dans des pays comme le Japon, la Corée du Sud, le Brésil et le Royaume-Uni. Le Canada vient au troisième rang mondial pour l'exportation de charbon sidérurgique de grande qualité. Au total, il a exporté l'an dernier près de 29 millions de tonnes de charbon métallurgique.
Outre le charbon à vocation sidérurgique, les producteurs canadiens ont expédié plus de 5 millions de tonnes de charbon qui ont servi à alimenter les centrales électriques du Japon, de la Corée du Sud, du Chili et de huit autres pays. Même si la Nouvelle-Écosse exporte de faibles quantités de charbon, la plus grande part des exportations provient de grandes mines fortement mécanisées, situées principalement en Alberta et en Colombie-Britannique. Deux des mines d'exportation sont situées dans le nord-est de la Colombie-Britannique, cinq, dans le centre-ouest de l'Alberta et cinq, au sud-est de la Colombie-Britannique. De plus, le charbon de l'Ouest canadien est acheminé vers l'est par rail, afin dÂêtre transbordé dans les terminaux de Thunder Bay pour les clients américains et canadiens situés sur les rives des Grands Lacs.
L'Agence internationale de l'énergie place les mines de charbon du Canada parmi les deux plus productives du monde, sur le plan du nombre de tonnes produites par quart de travail. Les gains de productivité constants sont attribuables à deux facteurs: gains d'efficience obtenus grâce à l'application de nouvelles technologies, et réinvestissement de capitaux dans de nouveaux équipements et procédés. Les investissements effectués chaque année dans les mines de charbon atteignent environ 350 millions de dollars.
L'amélioration de l'efficience et de la productivité se traduisent aussi par une réduction des émissions des procédés industriels. Depuis le début du XXe siècle, l'efficience de la combustion du charbon pour la production d'électricité a augmenté de plus de 400 p. 100. On trouve dans les centrales thermiques alimentées au charbon de Point Aconi, en Nouvelle-Écosse, de Belledune, au Nouveau-Brunswick, et de Shand, en Saskatchewan, de bons exemples des nouveaux procédés efficients. Ces installations sont à l'avant-garde de la technologie pour ce qui est de la production d'électricité dans des centrales alimentées au charbon.
L'utilisation de charbon au Canada et son exportation représentent une injection de près de 6 milliards de dollars par an dans l'économie canadienne. Plus de 73 000 hommes et femmes occupent un emploi directement ou indirectement attribuable à l'exploitation du charbon. Ces personnes vivent et travaillent dans plus de 20 collectivités rurales de tout le Canada qui dépendent de la vitalité de l'industrie du charbon.
Le Canada participe à une activité internationale visant à faire baisser partout dans le monde les émissions de gaz à effet de serre. La série de négociations actuelles prendra fin à Kyoto, au Japon, au mois de décembre.
L'industrie canadienne du charbon a d'énormes intérêts dans les résultats des négociations. En effet, des analyses économiques fiables ont fait ressortir que, dans l'ensemble, le Canada sera plus durement touché par les mesures visant la stabilisation des émissions, et que le secteur du charbon dans l'économie canadienne sera le plus durement touché.
Même si le charbon est une ressource abondante et facilement accessible au Canada et dans l'ensemble du monde, sa combustion entraîne naturellement l'émission de bioxyde de carbone, un gaz à effet de serre. C'est ce qui explique pourquoi l'utilisation à grande échelle du charbon au Canada est contraire aux objectifs mondiaux visant la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre et risque donc de compromettre l'exploitation minière du charbon devant être utilisé au pays; elle menace aussi la compétitivité du Canada sur les marchés internationaux.
Afin de recommander des mesures qui permettraient au Canada de préserver ses précieuses ressources de charbon, j'aimerais m'attacher à deux aspects des négociations. Tout d'abord, il y a l'objectif global qui découlera des pourparlers de Kyoto. Il semble que le Canada vise à stabiliser les émissions de gaz à effet de serre aux niveaux de 1990 d'ici à la fin de la prochaine décennie. Il semble probable que le Canada adoptera cette position dans les négociations internationales. Il faut donc que le Canada propose dans ce contexte un objectif qui lui permette d'acquérir la souplesse dont il a besoin à long terme pour diversifier son approvisionnement en énergie, afin que l'on puisse continuer à utiliser toutes nos ressources naturelles.
• 1110
Il est donc important pour le Canada de bien voir dans
quelle mesure tout objectif international peut s'appliquer
directement à la situation canadienne. L'existence de très vastes
réserves de charbon et d'autres combustibles fossiles très
importantes pour le Canada devrait être prise en considération
dans les négociations, et l'on devrait en tenir compte pour la
planification et la mise en oeuvre de toute mesure prise une fois
l'objectif établi.
Nous recommandons que le Canada adopte pour ces négociations une position qui lui donne la souplesse voulue à long terme afin qu'il puisse s'alimenter en énergie, et nous recommandons aussi que le Canada appuie l'établissement d'un processus qui le différencie des autres pays, compte tenu de sa situation particulière. Nous savons que les négociations porteront notamment sur la recherche d'une certaine souplesse dans les mesures à prendre.
Ensuite, le Canada devrait s'attacher à la délicate question de la participation des pays en développement à un protocole international. Un débat important et légitime s'est ouvert sur à la participation des pays en développement à tout protocole négocié à Kyoto. Cependant, du point de vue de l'industrie canadienne du charbon, l'aspect pratique de la participation concerne la concurrence internationale. Plusieurs économies de très grande taille comme l'Indonésie et la Chine sont de gros exportateurs de charbon ou sont susceptibles de le devenir, et elles enlèveront au Canada une partie de son marché s'il devait adopter des mesures qui auraient pour résultat de faire augmenter les coûts de production et de transport de son charbon d'exportation. Les nouveaux investissements miniers sont susceptibles d'être attirés par les pays qui ne sont pas soumis à un objectif au chapitre des émissions mais qui disposent de réserves de charbon exploitables.
Ironiquement, même si le Canada perdait une partie de son marché d'exportation dans ce contexte, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ne seraient pas touchées.
Nous recommandons que le Canada appuie l'inclusion de tous les pays à un éventuel protocole, selon une formule tenant compte de la situation et du développement économique de chaque pays, afin de protéger la compétitivité du Canada sur les marchés internationaux.
Cela met un terme à mon exposé.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant entendre les représentants de l'Association canadienne de l'électricité.
Monsieur Guimond.
M. Pierre Guimond (conseiller principal, Relations gouvernementales, Association canadienne de l'électricité): Merci, monsieur le président.
L'Association canadienne de l'électricité s'intéresse depuis plusieurs années à la question des changements climatiques. De fait, nous nous y intéressons depuis fort longtemps, soit depuis 1988 environ, et nous suivons attentivement l'évolution de ce dossier.
L'été dernier, nous avons adressé au gouvernement le document d'information que nous avons remis au greffier et qui vous a été distribué. Vous y trouverez la position de notre industrie sur cette question.
Je rappelle aux membres du comité que le Canada est un pays béni du point de vue de la production d'électricité puisque 60 p. 100 de ses besoins sont couverts par des centrales hydrauliques, 20 p. 100, par des centrales nucléaires, et 17 p. 100, par des centrales thermiques.
Le document d'information préparé au printemps dernier par l'ACE et communiqué au gouvernement fédéral contenait sept grandes recommandations, que vous retrouverez à la fin du document que nous vous avons remis aujourd'hui.
Pour rester bref, je dirais que, toutes choses étant égales par ailleurs, nous pourrions maintenir nos émissions de CO2 au niveau de 1990 ou à des niveaux inférieurs pendant les 30 prochaines années, à condition de remplacer notre parc industriel à la fin de sa vie économique. Vers 2030, on prévoit une augmentation des émissions, ce qui veut dire que nous devrons prendre d'autres mesures qui pourront être des mesures d'ordre économique, des décisions de mise en oeuvre conjointe et des mesures de compensation intérieures et internationales, pour faire face à ce phénomène.
Les sept recommandations que nous avons adressées au gouvernement fédéral et qui figurent à la dernière page de notre document découlent de cette conclusion.
Je m'empresse d'ajouter qu'il ne s'agissait là que d'une étude prévisionniste fondée sur certains scénarios qui nous avaient amenés à certaines conclusions. Ce sont ces conclusions que nous avons intégrées et exposées le plus exactement possible dans le document.
Je voudrais maintenant vous présenter mon collègue, Roy Staveley, vice-président des Affaires publiques et de l'environnement à l'ACE. Il va en effet vous parler d'un nouveau programme que nous allons lancer la semaine prochaine lors d'une conférence qui se tiendra ici, à Ottawa, à laquelle certains d'entre vous ont été invités, je crois. Ce nouveau programme sera destiné à gérer nos responsabilités environnementales. Je donne donc la parole à M. Staveley.
M. Roy Staveley (vice-président, Affaires publiques et environnement, Association canadienne de l'électricité): Bonjour, monsieur le président. Le programme dont je vais vous parler est ce que nous appelons un Programme d'engagement et de responsabilité en environnement. Il a été adopté collectivement par les membres de notre association, qui représente 90 p. 100 de la production et de la transmission d'électricité au Canada, soit quelque 90 000 employés directs et 30 milliards de dollars de revenus par an. C'est en fait le plus gros secteur industriel du pays.
En juin dernier, les membres de l'Association ont décidé d'aller de l'avant avec ce programme de portée nationale qui reflète leur engagement à améliorer continuellement notre rendement environnemental.
Ce programme devrait avoir des conséquences non négligeables sur les changements climatiques, notamment parce qu'il est directement axé sur des résultats. C'est un programme dont la mise en oeuvre pourra être vérifiée, qui repose sur la participation du public et qui constitue l'engagement de notre industrie envers le développement durable et la protection de l'environnement.
Il contient des dispositions très précises dont la mise en
oeuvre sera mesurée avec exactitude et opportunité. Certaines de
ces mesures concernent les émissions de CO2, NOx et SO2, en
général, et elles évolueront de manière à intégrer le mieux
possible l'évolution de toute la question des émissions
atmosphériques.
Pour replacer les choses dans leur contexte, je rappelle que
nous parlons ici d'un secteur industriel important qui prend des
engagements d'amélioration continue envers le public et envers le
gouvernement. Nous sommes prêts à rendre compte de nos résultats
à ce sujet. Nous sommes prêts à les communiquer et à en faire
rapport. Si l'on prend le seul cas du CO2, nous affirmons par le
truchement de ce programme non seulement que nous allons mesurer
avec exactitude et opportunité notre rendement en matière
d'émissions de CO2, et communiquer cette information au
gouvernement et à la population, mais aussi que nous allons
continuer d'améliorer ce rendement au cours des années.
Il s'agit là d'une décision que notre industrie a prise
volontairement et de sa propre initiative. Il s'agit aussi d'un
engagement envers le gouvernement. Lorsque nous dévoilerons ce
programme, lundi, nous le ferons en présence de trois ministres
supérieurs, de hauts fonctionnaires fédéraux, de représentants de
la population et de cadres supérieurs de notre industrie. Je
crois que c'est là une initiative très importante pour le pays et
j'ose affirmer qu'elle témoigne clairement de notre démarche
continuellement constructive à l'égard de ces questions.
Le président: Merci beaucoup. Nous sommes impatients d'en
savoir plus sur tout cela.
Nous allons conclure les déclarations liminaires avec
M. Kelly McCloskey, du Conseil canadien du bois.
M. Kelly McCloskey (président, Conseil canadien du bois):
Merci, monsieur le président. Nous vous remercions de nous avoir
invités à cette séance. Le Conseil canadien du bois est
l'association nationale qui représente l'industrie canadienne des
produits solides du bois. Nous représentons près de 95 p. 100 de
tous les produits solides du bois fabriqués au Canada. Je veux
parler ici d'entreprises de bois d'oeuvre, de contre-plaqué, de
bois traité, de bois de charpente, etc. Notre association
regroupe près de 1 200 membres.
Notre mission fondamentale est de préserver l'accès de nos
produits du bois aux marchés et c'est pourquoi mes remarques
porteront essentiellement sur les conséquences que pourraient
avoir à ce chapitre certaines des mesures proposées au sujet des
changements climatiques.
Je sais que l'Association canadienne des producteurs de
pâtes et papiers, qui est notre homologue, s'est adressée à vous
mardi. Évidemment, certains de nos membres font partie des deux
organisations et nous partageons certaines des positions qu'elle
a prises devant votre comité. La grande différence qui existe
entre nos deux organisations est que l'ACPPP regroupe une
cinquantaine de grandes entreprises, alors que nous regroupons
quant à nous celles de ces entreprises qui fabriquent aussi des
produits du bois ainsi que 1 150 membres supplémentaires qui sont
des PME.
Pendant les prochaines minutes, j'aimerais vous donner un
aperçu général de notre industrie puis formuler deux remarques.
L'aperçu général—et je suis sûr que cela ne surprendra
personne—repose sur le fait que l'industrie des produits du bois
est fortement tributaire des exportations. De fait, nous sommes
le premier pays d'exportation de produits du bois au monde. Rien
que pour le bois d'oeuvre, nous représentons plus de la moitié du
commerce international. Nous exportons 90 p. 100 de notre
production, et 85 p. 100 de nos exportations sont destinées aux
États-Unis. Je mentionne cela pour bien souligner l'importance
cruciale des exportations pour notre industrie, notamment vers
les États-Unis.
• 1120
Abordons maintenant le marché de la construction
domiciliaire, qui absorbe la majeure partie de notre production.
Des études ont montré que c'est l'une des industries les plus
sensibles sur le plan économique. De fait, on considère qu'elle
est deux fois plus sensible que l'industrie du bois dans son
ensemble, du point de vue des émissions de gaz à effet de serre.
Je veux dire par là que l'on pourrait constater une réduction de
5 p. 100 à 6 p. 100 de la construction domiciliaire en Amérique
du Nord, ce qui nous serait évidemment très préjudiciable à titre
de pays producteur. Voilà pourquoi notre industrie se trouve au
premier rang de celles qui seraient durement touchées et ce,
malgré sa faible contribution aux émissions.
Ma deuxième remarque est que l'industrie de la construction
est souvent l'une des cibles favorites des organismes de
réglementation, lorsqu'on parle d'efficience énergétique, étant
donné que celle-ci concerne le chômage, l'isolation, etc. Comme
l'une des choses qu'aiment bien faire les organismes de
réglementation est de relever les critères d'efficience
énergétique des maisons, cela a pour effet d'augmenter le coût
des maisons et de faire baisser le marché de la construction, ce
qui nuit également à notre industrie.
Comme vous le dirait l'Association canadienne des
constructeurs d'habitations, les maisons d'aujourd'hui sont de
30 p. 100 à 40 p. 100 plus efficientes que celles d'il y a 30 ou
40 ans. De ce fait, l'avantage marginal de faire cela est
pratiquement nul par rapport à ce qu'il en coûte, d'autant plus
que nous n'ajoutons qu'environ 1 p. 100 à 1,5 p. 100 de nouvelles
maisons au parc domiciliaire, chaque année. Donc, s'il y a un
problème d'efficience énergétique des maisons, ce n'est pas dans
le secteur de la construction neuve. Il s'agit plus des vieilles
maisons, et c'est tout un défi.
La deuxième remarque que je voulais faire est que
réglementer l'efficience énergétique du marché de la construction
peut avoir pour effet d'augmenter les émissions de gaz à effet de
serre, surtout à court et à moyen terme. Cela peut paraître
contradictoire mais, lorsqu'on réglemente l'efficience
énergétique, on a tendance à se concentrer exclusivement sur un
facteur, comme les pertes d'énergie, à l'exclusion de tous les
autres.
Considérons par exemple le code actuel de l'énergie appliqué
aux maisons du Canada. Lorsqu'il a été publié, on recommandait
d'utiliser de la mousse comme isolant—d'appliquer une gaine de
mousse autour du bois—parce que cela permettrait de réduire
considérablement les pertes de chaleur. Toutefois, on n'avait pas
tenu compte de l'augmentation d'énergie nécessaire pour produire
des gaines de mousse, ni des autres facteurs environnementaux qui
en découlaient.
Donc, la deuxième remarque que je tenais vraiment à faire
est qu'il est très important—et c'est peut-être là un point de
vue différent de ceux que vous avez déjà entendus—d'adopter une
approche globale lorsqu'on envisage des mesures quelconques, ou
de les envisager dans le contexte du cycle de vie, si vous
voulez, pour veiller à ce que les gains d'énergie réalisés dans
un domaine ne soient pas annulés par des pertes dans un autre.
Ce n'est qu'un acétate, qui fait partie des cinq ou six
reproduits à la fin du document. Je veux m'en servir pour vous
montrer un nouveau modèle qui a en fait été créé avec l'aide
financière du gouvernement.
Il s'agit d'un édifice qui a été construit par une coalition
des industries du bois, de l'acier et du béton, et vous pouvez y
voir toutes les incidences environnementales. On les présente
depuis l'extraction des ressources jusqu'à la fabrication des
produits, leur transport sur le marché et leur utilisation dans
la construction. Voici une mesure concernant les gaz à effet de
serre.
Vous pouvez voir que le bois a un indice d'une fois et demie
à deux fois moindre lorsqu'on arrive au produit fini sur le
marché. Si on analyse l'utilisation énergétique, la pollution de
l'eau et tous les autres critères, on constate encore une fois
que les résultats concernant le bois sont très favorables, quel
que soit le critère considéré. La principale différence est que,
plutôt que d'examiner le bois, l'acier et le béton, ce modèle
porte sur les systèmes de construction en Amérique du Nord. Du
point de vue de l'énergie et des gaz à effet de serre,
l'industrie nord-américaine de la construction est la plus
efficiente au monde. Cela est particulièrement important
lorsqu'on la compare aux industries de la construction d'Europe
ou d'autres pays qui exercent tellement de pressions pour adopter
certaines de ces mesures.
Cela met un terme à mon exposé, monsieur le président. Je
suis prêt à répondre à vos questions.
Le président: Je vous remercie de votre exposé, qui était
concis et pertinent.
Nous allons commencer la période des questions avec Darrel
Stinson.
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Merci, monsieur
le président. Je remercie les témoins de leurs informations. Je
voudrais poser quelques questions à l'Association charbonnière.
À votre connaissance, est-ce que les grands pays producteurs
de charbon—et j'ajouterais aussi les grands pays utilisateurs de
charbon—iront à Kyoto pour ratifier cet accord? Quel est le
pourcentage des émissions mondiales provenant du charbon que l'on
peut attribuer aux non-signataires? En avez-vous une idée?
M. Donald Downing: La Chine et l'Inde font partie des
principaux pays consommateurs de charbon. Le Brésil en est un
autre. De fait, le Brésil est un gros client du Canada. Ces pays
ne vont probablement pas ratifier l'accord, bien qu'ils soient
actuellement responsables d'une partie non négligeable des
émissions de gaz à effet de serre.
Pour ce qui est des pays producteurs qui sont susceptibles
de ratifier l'accord, on peut mentionner le Canada, les États-Unis, les
pays d'Europe et l'ex-Union soviétique.
M. Darrel Stinson: Si plusieurs de ces grands pays
producteurs ou consommateurs de charbon ne ratifient pas l'accord
de Kyoto, quel est l'intérêt de voir seulement des pays comme le
Canada, ou les pays développés, le ratifier?
M. Donald Downing: D'après nous, les problèmes liés à la
ratification de l'accord concernent la concurrence
internationale. Prenez le cas de la Chine, pays exportateur.
C'est un grand producteur et consommateur de charbon, et c'est
aussi un pays qui exporte quasiment autant de charbon que le
Canada. Il y a aussi l'Indonésie, et il y a la Colombie. Il est
inévitable que nos investissements dans le secteur du charbon et
le commerce international du charbon seront perturbés si certains
pays sont obligés d'agir alors que d'autres ne le sont pas.
M. Darrel Stinson: Autrement dit, on parle de pertes
d'emploi éventuelles. Vous parlez en effet de perte de marchés
d'exportation, ce qui soulève une autre question. Si nous perdons
une partie du marché d'exportation, comment allons-nous la
récupérer? Lorsque des pays font des achats à l'étranger et que
leurs fournisseurs sont obligés de réduire leurs exportations,
ils se mettent inévitablement à la recherche d'autres
fournisseurs. Une fois que ces marchés sont perdus—et nous
savons tous comment fonctionnent les marchés; pour parler
franchement, la concurrence est tout simplement sauvage—comment
peut-on espérer récupérer cette part de marché?
M. Donald Downing: Si certaines des conséquences négatives
que l'on peut envisager pour l'industrie canadienne du charbon
devaient se concrétiser, je crois que cela provoquerait
l'effondrement permanent de l'industrie. Il ne s'agirait pas là
d'un phénomène temporaire.
Si les prix de l'énergie devaient changer au Canada de façon
à modifier la consommation de combustibles fossiles, on
constaterait une hausse des frais de transport. Parmi les grands
pays importateurs, nous sommes celui qui doit transporter son
charbon sur les distances les plus longues par chemin de fer. De
fait, cela constitue l'un de nos succès les plus remarquables
puisque nous réussissons à faire concurrence aux autres pays tout
en étant obligés de transporter notre charbon sur 1 100
kilomètres, des mines jusqu'aux ports. La distance de transport
moyenne en Australie, par exemple, qui est l'un de nos principaux
concurrents, est de moins de 300 kilomètres.
La hausse de nos frais de transport pénaliserait
considérablement nos exportations et je pense que ce serait un
phénomène irréversible.
M. Darrel Stinson: Merci.
Le président: C'est tout pour maintenant?
M. Darrel Stinson: Oui.
Le président: Vous pourrez reprendre la parole au tour
suivant.
Carmen Provenzano, s'il vous plaît.
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Merci,
monsieur le président.
Je voudrais poser une question au représentant de
l'Association canadienne de l'électricité.
Il y a dans votre mémoire un graphique intéressant qui
semble montrer que les émissions de bioxyde de carbone par
l'industrie canadienne de l'électricité ont baissé en 1990 et ont
atteint leur niveau le plus bas en 1995. Mon interprétation est-elle exacte?
M. Pierre Guimond: Oui. Il y a certaines raisons pour
lesquelles on a choisi l'année 1990.
M. Carmen Provenzano: Bien. Je voulais simplement savoir si
j'interprétais correctement le graphique.
Il y a par ailleurs dans ce graphique une note disant que
«les valeurs normalisées de 1990 tiennent compte des
installations en construction et des situations anormales s'étant
produites durant cette année». Hélas, je n'ai pas trouvé
d'explication de ces situations anormales en lisant votre
mémoire. Pourriez-vous nous donner quelques précisions à ce
sujet?
M. Pierre Guimond: Certainement. Vous venez de soulever une
question très délicate et très controversée au sein de notre
industrie. Comme vous le savez, 1990 est l'année de référence qui
a été retenue dans le cadre du processus international.
Or, il se trouve que 1990 n'était pas une très bonne année
pour l'électricité. Ce ne fut pas une bonne année pour
l'hydro-électricité. Ce fut une année anormale en matière de production
d'électricité d'origine thermique. Ce fut également une année où
toute une série de centrales étaient en construction, ce qui veut
dire qu'elles n'ont pas été intégrées aux chiffres de référence.
Nous voulions que ces facteurs soient pris en considération. Il y
a eu un long débat dans l'industrie sur cette question. En fin de
compte, nous avons décidé d'établir des valeurs normalisées en
plus des valeurs réelles, de façon à ce que tout le monde puisse
accepter nos prévisions. C'est un effet d'égalisation que nous
cherchions, à partir de toute la gamme d'opinions qui étaient
exprimées dans l'industrie au sujet de 1990.
M. Carmen Provenzano: Ma deuxième question vous concernera
peut-être aussi.
Je trouve dans le mémoire de l'Association charbonnière du
Canada un graphique montrant une baisse de production totale et
de production par personne en 1990.
Ma question s'adresse donc aux deux associations. Quand elle
est venue témoigner, l'Association canadienne des automobilistes,
si je me souviens bien, a dit que 1990 était une année de
récession. Si tel est le cas, et considérant ce que vous avez dit
au sujet de la production d'électricité en 1990, ainsi que ce
graphique de l'Association charbonnière du Canada, il semble y
avoir une corrélation entre certaines choses.
Est-ce que cela vous paraît pertinent, messieurs? Devrions-nous intégrer
ce genre de facteurs aux données de 1990, de façon
à les corriger? Il me semble que votre opinion serait très
importante à ce sujet. Si 1990 était une année exceptionnelle—et
c'est ce que je crois pouvoir conclure de vos mémoires—qu'est-ce
que cela signifie dans la pratique?
M. Pierre Guimond: Je vais tenter de vous répondre. Il est
vrai que 1990 fut une année exceptionnelle. Ce fut une année de
récession. La production thermique d'électricité fut très
différente de ce qu'elle avait été en 1988, année plus typique.
En 1990, Hydro-Québec était en train de recharger ses réservoirs,
ce qui veut dire que sa production d'hydro-électricité fut assez
exceptionnelle. Cela dit, 1990 ne fut pas une année atypique
seulement pour le Canada mais pour la quasi-totalité des autres
pays aussi.
J'ai constaté que, dans le cadre des négociations
internationales avant Kyoto, les Américains envisageaient de
recommander à l'UE de choisir 1995 plutôt que 1990 comme année de
référence. Cela éliminerait la hausse exceptionnelle des
émissions qui s'est produite chez les Allemands et chez les
Anglais car, avant 1990, il y avait eu une baisse d'émissions
dans ces pays, pour des raisons qui ne sont pas vraiment reliées
au changement climatique.
En ce sens, votre question est tout à fait pertinente. C'est
l'un des outils de négociation que l'on pourrait peut-être
utiliser dans le contexte international. Cela dit, sachez bien
que cela provoquerait la fureur des Européens et qu'il n'y a pas
que des avantages à formuler une telle recommandation, mais il
n'en reste pas moins que c'est une idée qui circule dans les
milieux internationaux, comme outil de négociation.
M. Carmen Provenzano: J'aimerais savoir pourquoi vous n'en
parlez pas dans vos mémoires? Est-ce un élément mineur? Si tel
est le cas, je comprends que vous n'en parliez pas.
M. Pierre Guimond: Dans notre mémoire, nous avons tenté
d'envisager la situation d'un point de vue uniquement prospectif.
Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons eu de longues discussions
dans notre industrie au sujet des données de 1990 mais, avant que
nous puissions en parler au gouvernement fédéral pour défendre
l'argument que vous venez d'avancer, la communauté internationale
avait déjà décidé de choisir cette année-là comme année de
référence. La décision était déjà prise.
M. Carmen Provenzano: Je n'ai pas d'autres questions.
Le président: Merci, Carmen.
Je donne maintenant la parole à M. Canuel puis à Roy Cullen.
[Français]
M. René Canuel (Matapédia—Matane, BQ):
Mon commentaire et ma question
vont s'adresser au président du Conseil canadien du bois.
Tout le monde connaît l'importance de la forêt par
rapport à l'air, à l'eau, à l'érosion, etc. Vous
avez dit que vous étiez 2 030 membres associés. Moi, je
suis au Québec et je vois la Gaspésie se dépeupler de sa
forêt, et je vais vous dire honnêtement que cela m'inquiète
un peu.
D'autre part, je vois la plupart de ces essences partir
pour les États-Unis du fait de l'entente Canada—États-Unis
qui a été signée pour quelques années et que
j'applaudis. Mais si je me mets à réfléchir aux conséquences
sur l'environnement, je dois vous dire que je suis
sérieusement inquiet.
Il y a deux ans, on m'a dit que les États-Unis
voulaient protéger leurs forêts et nous demandaient notre
bois. On est allés le leur porter allégrement.
On sait aussi qu'il y a des coupes qui
sont désastreuses pour la faune.
Pourrait-on ne pas
exploiter de façon abusive nos forêts au Canada?
Je viens du Québec et je suis relativement bien
informé, d'autant plus que j'ai travaillé pendant une
vingtaine d'années en foresterie. N'y a-t-il pas,
au Québec particulièrement, un problème majeur?
M. Kelly McCloskey: Merci pour la question.
[Traduction]
Comme je travaille moi aussi dans l'industrie de la forêt,
je connais très bien les problèmes que vous évoquez. De fait,
l'industrie de la forêt—et je sais que cela figurait dans le
mémoire de l'Association canadienne des producteurs de pâtes et
papiers—a mis fortement l'accent sur toute cette question de
gestion saine de nos forêts, ce qui est directement lié au
problème des gaz à effet de serre.
Comme vous l'avez certainement entendu dire, nos forêts sont
considérées comme des puits d'assimilation du carbone. À mesure
qu'elles vieillissent, elles commencent à se décomposer et elles
deviennent une source de bioxyde de carbone. Lorsqu'elles sont
jeunes, elles sont une source d'oxygène. Au bout de cinq à sept
ans après le début des coupes, elles ne produisent plus un niveau
optimal mais un niveau équivalent à celui d'une forêt en pleine
maturité. Les forêts peuvent donc jouer un rôle très positif du
point de vue de l'environnement et de la résolution du problème
du CO2.
La manière dont tout cela doit être géré fait l'objet de
nombreux débats à l'échelle internationale. De même, dans notre
industrie, nous nous demandons constamment comment ce problème
doit être géré.
Les forêts canadiennes sont tout à fait particulières. Si on
les compare aux forêts suédoises, par exemple, on constate que
les nôtres sont beaucoup plus diversifiées. De fait, on trouve
plus de diversité dans un seul segment de n'importe laquelle de
nos provinces que dans toute la Suède. Nous avons des forêts très
anciennes. Nous avons beaucoup de forêts en pleine maturité. Nos
forêts ont tendance à être plus vieilles parce que nous avons
fait un excellent travail de la lutte contre les incendies. La
question du CO2 et des forêts est donc très complexe.
• 1140
J'ai vu des forêts dans beaucoup de pays et je peux vous
dire que les méthodes de gestion des nôtres figurent parmi les
meilleures au monde. Nous n'avons strictement rien à envier aux
autres à ce chapitre.
J'ajoute que la gestion des forêts évolue constamment. En
fait, les méthodes de gestion des forêts sont des méthodes
sociales. Les besoins de la société ont changé radicalement au
cours des années, tout comme la gestion des forêts.
Si l'on envisage cette question d'un point de vue global, et
surtout au Québec, je dois dire que nous faisons un travail
remarquable dont nous avons tout lieu d'être fiers, surtout si on
le compare aux normes internationales.
Cela dit, il y a toujours des choses à améliorer. En ce qui
concerne le CO2, c'est un problème sur lequel nous devons nous
pencher avec beaucoup d'attention. Je sais bien que l'on est
facilement porté à croire que la résolution du problème réside en
grande partie chez les pays producteurs de produits forestiers
mais je me dois de vous prévenir que les choses ne sont pas aussi
simples.
Les dernières théories en vogue aux Nations Unies sont qu'il
s'agit en fait d'un jeu à somme nulle. Si l'on considère
l'exploitation des forêts et leur reconstitution, on a un jeu à
somme nulle du point de vue des émissions de CO2, tant que l'on
applique des méthodes de gestion durables. Comme beaucoup
d'autres, nous croyons qu'une bonne gestion de nos forêts, c'est-à-dire
leur exploitation pour fabriquer des produits de bois
solides comme ceux-ci, comme ces bureaux capables de durer 300
ans ou 400 ans, constitue une partie de la solution au problème
de fixation du carbone. Nous pouvons toutefois essayer de faire
plus dans cette voie.
Il y a des terrains forestiers que l'on pourrait reboiser
mais qui sont encore vacants.
[Français]
M. René Canuel: Je suis bien d'accord, mais ma
question était la suivante: est-ce qu'on fait une
bonne exploitation de nos forêts? Je suis d'accord
avec vous quand vous dites: «si on exploite bien nos
forêts». Mais moi, je dis qu'on exploite mal nos
forêts. Je ne sais pas si votre association pourrait
contribuer, avec le gouvernement, à la recherche sur la
génétique en foresterie. En effet, on travaille depuis
20 ans sur la génétique du monde animal mais pas
beaucoup sur la génétique en foresterie où il me semble
qu'on est bien en retard.
Pour ma part, je n'ai rien contre le fait de vendre du
bois et je suis ravi si on peut en vendre pour quelques
milliards de dollars, mais il faut penser au
repeuplement de la forêt, car on va avoir un désert si
on ne replante pas. À mon avis, on ne travaille pas
assez sur la génétique, et je vous demande si vous
seriez prêts à investir dans ce domaine de recherche.
[Traduction]
M. Kelly McCloskey: L'industrie est prête à investir dans ce
domaine. Elle y investit déjà beaucoup.
Les forêts du Canada sont bien gérées. Il est illégal de ne
pas les repeupler. L'industrie investit des sommes considérables.
Je dois toutefois vous dire que, lorsqu'on parle de terres
publiques—et vous savez bien sûr qu'elles appartiennent en
grande mesure aux provinces—il est très difficile d'obtenir les
encouragements nécessaires pour effectuer les investissements à
long terme qui sont requis.
Pour ce qui est des forêts privées du Canada, gérées par les
sociétés forestières, elles font partie des forêts les mieux
gérées au monde. Il ne faut pas aller loin pour le constater. Il
suffit de faire la comparaison avec certains pays où l'on trouve
également beaucoup de forêts gérées par des entités privées.
Il y a sans doute beaucoup plus à faire encore, du point de
vue des politiques publiques, et c'est un défi que l'industrie
tente de relever. Je puis cependant vous garantir, monsieur, que
les méthodes de gestion des forêts au Canada sont les meilleures
au monde.
Le président: Monsieur Cullen, puis Dave Chatters.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci beaucoup,
monsieur le président.
Je remercie les témoins de comparaître devant le comité. Je
remercie surtout M. McCloskey, l'un de mes anciens collègues de
l'industrie forestière.
J'ai deux questions à poser, la première à l'Association
canadienne de l'électricité, et la deuxième au Conseil canadien
du bois.
Pour ce qui est de l'Association canadienne de
l'électricité, j'aimerais qu'elle nous donne des précisions sur
la cogénération. J'aimerais surtout savoir si vous y voyez une
menace concurrentielle ou une stratégie compatible.
Je songe en particulier à certains monopoles publics que
l'on envisage de briser, par exemple en Ontario. Il y a aussi une
capacité nucléaire qui est en jachère, si vous voulez, en tout
cas pour le moment.
• 1145
Monsieur McCloskey, pourriez-vous nous parler du potentiel
offert par la construction domiciliaire en bois, du point de vue
de la résolution du problème des gaz à effet de serre, non
seulement au Canada mais peut-être aussi à l'échelle
internationale? Quel rôle peut jouer notre industrie des produits
forestiers à ce chapitre?
Nous pourrions peut-être commencer avec l'Association de
l'électricité, au sujet de la cogénération.
M. Roy Staveley: Je répondrai d'abord à la première
question, sur la cogénération, et je parlerai peut-être ensuite
de la capacité nucléaire.
Pour ce qui est de la cogénération, elle fait partie des
diverses méthodes de production envisageables. Il y a des
centrales de cogénération au Canada. Je sais qu'il y a un certain
nombre de sociétés de distribution d'électricité et de
producteurs indépendants qui s'intéressent de très près à cette
option et qui l'envisagent activement. Du point de vue des
consommateurs, j'ai rencontré par exemple des producteurs d'acier
qui s'y intéressent aussi.
L'ouverture du marché va entraîner la multiplication des
systèmes de cogénération. Les systèmes de production vont se
diversifier et la cogénération sera l'une des options possibles.
Tout dépendra de sa compétitivité par rapport aux autres options,
et cette compétitivité variera selon les situations et les
régions.
La production nucléaire fait partie de la gamme d'options
disponibles, et c'en est un élément très important. Comme nous le
savons, 20 p. 100 de notre production électrique est d'origine
nucléaire, et elle occupe une place importante en Ontario. Il est
cependant impossible de dire aujourd'hui si la production
nucléaire se maintiendra à ses niveaux actuels. Tout dépendra des
décisions que prendront les sociétés et les provinces.
Les recommandations que nous formulons dans notre document
sur les changements climatiques sont directement reliées à l'une
des caractéristiques les plus importantes de l'industrie. Celle-ci change
profondément, et ce ne seront plus seulement les
provinces et les sociétés de distribution publique qui décideront
à elles seules de la construction de nouvelles centrales ou du
recours à des systèmes de remplacement. À mon avis, c'est le
marché qui sera le facteur le plus important à l'avenir. Nous
voyons déjà des sociétés d'électricité sortir de leurs marchés
régionaux et provinciaux traditionnels pour chercher de nouveaux
débouchés dans d'autres parties de l'Amérique du Nord afin
d'assurer leur viabilité.
Je pense que les modes de production vont se diversifier. On
aura de plus en plus recours à la cogénération et je soupçonne
fortement que le nucléaire sera toujours là. Pour ce qui est de
la technologie des turbines à essence, elle a déjà beaucoup
changé et elle va continuer d'évoluer en fonction des besoins du
marché, à cause de son prix et de ses autres caractéristiques. Je
crois aussi que l'hydro-électricité gardera sa place.
Les méthodes fondamentales de production d'électricité ne
vont pas changer. On entend beaucoup parler d'énergie verte mais
elle ne représente qu'une partie infime de la production totale
et elle ne sera jamais en mesure de répondre à nos besoins de
masse, qui sont énormes. Nous continuerons donc d'avoir besoin
des formes traditionnelles d'énergie, que je viens de décrire,
mais la cogénération va prendre une place non négligeable.
M. Kelly McCloskey: J'ai une remarque à faire au sujet de
cette question. Vous savez que la cogénération offre des
possibilités importantes à notre industrie. Le problème est qu'il
lui est difficile d'être compétitive dans le contexte économique
actuel. Vous savez sans doute que notre industrie estime qu'il
faut envisager cette question de manière un peu différente, étant
donné les avantages environnementaux et économiques qui
pourraient résulter de cette option si elle bénéficiait de
l'appui des pouvoirs publics, comme on a pu le constater dans
certaines régions, par exemple en Californie.
Pour ce qui est de votre question sur l'analyse du cycle de
vie, j'ai inclus un résumé de deux pages à ce sujet dans notre
mémoire. On peut en trouver des versions beaucoup plus étoffées
mais l'élément essentiel, à nos yeux, est qu'il serait erroné de
chercher une solution unique à ces problèmes, sans tenir compte
de tout le reste. Il est très facile aux bureaucrates—ceci sans
vouloir les offenser—de se concentrer sur telle ou telle
solution, sans tenir compte... et je reconnais très franchement
qu'il est très difficile de prendre toutes ces mesures en
considération en même temps.
• 1150
Ce qui nous plaît dans ce modèle, c'est qu'il intègre tous
les éléments dans un seul contexte afin de permettre aux gens de
prendre des décisions plus éclairées lorsqu'ils doivent choisir
un produit plutôt qu'un autre, ou un règlement plutôt qu'un
autre. Nous croyons que les organismes de réglementation auraient
vraiment intérêt à se pencher sur ce type de modèle et à s'en
servir pour évaluer leurs propositions, afin d'obtenir une image
beaucoup plus exacte de la réalité économique et
environnementale.
Je voudrais ajouter une autre remarque. Vous savez bien que
nous avons tous la réputation, comme d'autres secteurs
industriels, d'utiliser beaucoup d'énergie dans notre production.
Cela dit, nous fabriquons des produits que nous exportons et il
conviendrait peut-être que les pays clients en tiennent compte
lorsqu'ils font le calcul de leurs propres émissions de gaz de
serre.
Par exemple, nous exportons un système de combustion du bois
qui est largement supérieur à tous les autres, notamment
européens, du point de vue énergétique. Il est peut-être possible
de profiter du crédit et du débit gagnés par la reconnaissance du
fait que nous exportons des produits intensifs sur le point de
vue de l'énergie, mais dans un système qui est plus efficient que
les leurs du point de vue de la consommation d'énergie. Cela
devrait faire l'objet d'un débat plus poussé.
En ce qui concerne l'industrie des maisons préfabriquées,
qui est manifestement l'un de nos très gros clients, nous croyons
qu'elle offre des possibilités de croissance considérables, tout
comme toutes les autres industries des produits et systèmes de
bois.
La contrepartie est que nous utilisons plus d'énergie pour
produire ces produits de valeur ajoutée, malgré l'intensité des
pressions exercées par le public pour tirer le plus de valeur
possible de chaque arbre coupé. Donc, même s'il y a plus
d'emplois, plus d'avantages économiques et de nombreuses raisons
pour faire ces choses, elles nous posent des défis
supplémentaires lorsqu'on aborde des questions comme celles-ci.
Nous devons bien comprendre que les produits que nous fabriquons
sont des produits à très haute intensité d'énergie.
Le président: Merci. Merci, monsieur Cullen.
Dave Chatters, puis Ovid Jackson pour conclure.
M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Ma question est
relativement simple. Je voudrais demander à nos témoins s'ils
conviennent que nous faisons actuellement face à une crise
immédiate et extrême, justifiant que l'on se détourne d'un
programme volontaire pour s'orienter vers un programme de type
législatif, avec un plafond imposé. Vos organisations et vos
membres participent-ils au programme volontaire? Quels progrès
a-t-on réalisés avec ce programme?
M. Donald Downing: Je vous remercie de cette question. À
l'heure actuelle, nous ne reconnaissons pas que le risque
environnemental soit tel que le Canada devrait agir par voie
législative.
Le programme de Défi-climat offre encore bien des
possibilités. Au cours des 24 derniers mois, nous avons vu divers
secteurs de l'économie et maintes entreprises prendre
volontairement des mesures pour rehausser leur efficience, ce qui
a des effets secondaires bénéfiques du point de vue des
émissions. Nous sommes donc certainement favorables au maintien
de ces mesures volontaires. Les sociétés charbonnières vont
participer au régime volontaire et vont collaborer avec d'autres
secteurs pour élargir et approfondir la participation à Défi-climat.
M. Kelly McCloskey: L'industrie forestière a déclaré
publiquement qu'elle continue d'appuyer des mesures volontaires,
et seulement des mesures volontaires. Elle a montré qu'elle est
capable d'obtenir les réductions souhaitées. Je crois que
l'Association canadienne des producteurs de pâtes et papiers vous
l'a clairement indiqué mardi. L'industrie est extrêmement active
dans tous les processus gouvernementaux volontaires pour essayer
de continuer à enregistrer de nouveaux progrès.
Le président: Monsieur Guimond.
M. Pierre Guimond: L'Association canadienne de l'électricité
continue d'appuyer vigoureusement le programme Défi-climat,
c'est-à-dire le programme de mesures volontaires et de registre.
Nous avons d'ailleurs été l'une des premières organisations à
recommander l'instauration d'un tel programme et nous continuons
de l'appuyer.
Cela dit, votre question touche un point fondamental: le
Canada peut-il accepter un objectif de réduction absolu imposé
par la communauté internationale? Considérant tout ce que nous
avons pu lire sur cette question, aussi bien dans des études que
dans des rapports adressés à la Chambre des communes ou par le
truchement d'organismes publics et au sein de la collectivité
internationale, nous doutons très sérieusement que le Canada
puisse atteindre facilement ce genre d'objectif.
Voilà pourquoi nous recommandons un système d'objectifs
différenciés. Le Canada devrait pouvoir déterminer sa
participation individuelle à l'objectif international de
réduction des émissions de gaz à effet de serre. De cette
manière, nous pourrions tenir compte de notre propre situation
économique et de nos atouts régionaux pour tenter de résoudre le
problème. Il n'est pas nécessaire que l'on nous impose un
objectif absolu, même si nous reconnaissons que cela pourrait
être utile dans le cas d'autres économies. Nos informations nous
portent à croire que tel ne serait pas le cas pour le Canada.
Le président: Merci. Ça vous suffit, Dave?
M. David Chatters: Oui.
M. Darrel Stinson: Puis-je poser une autre brève question?
Le président: Reliée à la précédente?
M. Darrel Stinson: Reliée à toutes les autres. En 1990,
lorsque cela a été signé, le Canada avait déjà la réputation
d'être un pays très conscient de l'environnement. Comme on l'a
dit, nos méthodes de gestion forestière jouissent d'une
réputation mondiale. La même chose vaut pour les autres
industries dont nous parlons aujourd'hui.
Cela m'amène donc à me poser une question: notre technologie
était-elle déjà supérieure à celles de beaucoup d'autres pays en
1990? Cela serait-il aujourd'hui un désavantage pour nous? En
effet, il est plus facile de régler 5 p. 100 de 90 p. 100 d'un
problème que 5 p. 100 de 12 p. 100.
Le président: Peut-être pourriez-vous répondre simplement
par oui ou par non?
Des voix: Oh!
M. Donald Downing: Beaucoup de pays ont avancé cet argument.
Comme les économies industrialisées produisent des biens et des
services de manière beaucoup plus efficiente que les autres,
leurs dépenses marginales pour réduire les émissions leur
coûteront beaucoup plus cher que celles de pays dont la
production de biens et de services n'est peut-être pas aussi
efficiente. Autrement dit, nous serions pénalisés pour nos
succès.
Le président: Ovid Jackson, après quoi nous conclurons avec
une brève question de Mme Folco.
M. Ovid Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le président,
je constate que tous les témoins nous disent quasiment la même
chose. En effet, leur message fondamental est que nous devons
faire très attention à ce que nos succès ne nous désavantagent
pas, et aussi que nous devons veiller à bien comprendre toutes
les ramifications de tous les divers intrants et crédits, de
façon à ce que, lorsque nous commencerons, nous commencerons à
partir d'une base qui soit équitable pour le Canada, quelle que
soit l'année de départ.
Nonobstant le fait que nous ayons d'excellents résultats et
que nous fassions toutes ces bonnes choses, je pense que nous
devons constamment vous mettre sur la brèche. Vous avez besoin
d'un défi.
En Californie, par exemple, l'industrie de l'automobile est
obligée de concevoir de meilleurs véhicules à cause du smog
photochimique. Les véhicules sont plus efficients. Je suppose que
c'est parce qu'on les fabrique avec des matériaux plus légers,
afin de les rendre plus aérodynamiques. On utilise la méthode
stoechiométrique pour assurer une combustion complète. On utilise
la technologie et les convertisseurs catalytiques, évidemment,
qui extraient l'oxygène ou placent l'oxygène dans l'air et
contrôlent les oxydes, l'azote, les hydrocarbures, etc. On voit
cela, par exemple, dans les citernes d'essence, avec les BPC
qu'elles renferment.
Ce que je veux savoir, c'est où vous en êtes du point de vue
technologique, car tout ce que vous utilisez... si vous utilisez
l'option hydraulique, vous inondez des sites et vous tuez les
animaux et la végétation, ce qui crée des problèmes. Nous avons
récemment vu des maisons s'effondrer au Québec. Des choses
tombaient dans le ravin. Certaines de ces choses sont causées
parce que l'eau provoque de l'érosion et entraîne l'effondrement.
Il y a des coûts à cela. Dans le domaine nucléaire, il y a les
matériaux épuisés. Nous comprenons bien que c'est une bonne chose
propre mais le problème provient des déchets. Pour ce qui est du
charbon, il y a de la suie et des problèmes, mais vous avez
maintenant des épurateurs et on peut espérer que la situation
s'est améliorée.
Je voudrais savoir où vous en êtes arrivés. Croyez-vous que
nous devons continuer à nous améliorer pour faire en sorte que
notre écosystème soit le meilleur possible?
Le président: Puis-je vous demander de répondre assez
brièvement? Nous reviendrons sur ces questions au début de
l'année prochaine, notamment du point de vue des solutions
concrètes. Monsieur Staveley, pourriez-vous nous donner une brève
réponse?
M. Roy Staveley: Quelqu'un avait posé une question sur la
technologie. Je dois vous dire que l'on a fait des progrès
considérables, et j'ai parlé à ce sujet des turbines à essence
qui sont de plus en plus efficientes. On fait constamment des
efforts considérables pour améliorer l'efficience, et cela
provient en partie du marché, du fait que nous évoluons vers un
marché de plus en plus ouvert et compétitif. Améliorer
l'efficience pour devenir plus rentable débouche sur la réduction
des émissions de CO2.
Il y a aussi une autre leçon que nous avons tirée. Je ne
pense pas que nous pourrons réduire les émissions de CO2 de
manière efficiente et efficace sans coopération—c'est-à-dire
sans la coopération des provinces, de l'industrie, du
gouvernement fédéral et d'autres—et nous l'apprenons peu à peu.
L'une des raisons pour lesquelles nous avons annoncé aujourd'hui
devant votre comité le programme Défi-climat était que nous
voulions vous montrer que ce genre de programme n'était même pas
envisagé il y a cinq ans. Aujourd'hui, il l'est et l'industrie y
voit des promesses énormes, autant pour elle-même que pour
l'ensemble du pays. Voilà le genre de leçons que nous apprenons
et, si ce processus continue, j'ai la ferme conviction que nous
pourrons réduire les émissions de CO2 de manière efficiente et
rentable, ce qui sera un gain incontestable pour notre pays.
Si nous examinons la production de l'électricité dans le
cadre d'un réseau national, et non plus province par province,
nous ne pouvons manquer d'être surpris par le nombre considérable
de gains d'efficience que nous pourrions obtenir. Donc, je pense
que nous apprenons constamment beaucoup de choses grâce à cet
effort de réduction des émissions de CO2.
Le président: Les autres ont-ils quelque chose à ajouter?
M. Kelly McCloskey: Une brève remarque concernant le marché.
J'ai déjà dit que l'industrie de la construction
domiciliaire a déjà augmenté son efficience énergétique de
30 p. 100 à 40 p. 100. En fait, des études montrent que c'est
l'une des industries qui ont enregistré les gains d'efficience
les plus élevés de tout le pays et ce, sans même parler de
réglementation. Cette tendance a été totalement ou quasi
totalement provoquée par le marché, qui a exigé des maisons plus
efficientes sur le plan de l'énergie. Les gens veulent des
maisons efficientes. Il n'est pas nécessaire d'adopter des
règlements pour que ça se fasse.
Le président: Merci.
Monsieur Crane.
M. K.G. (Ken) Crane (directeur, Services environnementaux,
Luscar Ltd.): J'aimerais vous donner quelques exemples concernant
le reste de l'industrie. En fait, ils concernent mon entreprise.
Remplacer le matériel roulant par des tapis roulants pour
transporter les produits peut être une solution très efficace.
Manalta Coal l'a fait à Line Creek. Nous aussi, nous l'avons fait
de manière très simple dans l'une de nos usines de préparation.
Au lieu de transporter par camion les déchets issus de la
préparation du charbon, nous avons installé un moteur électrique
de 40 chevaux et un court tapis roulant relié à un puits épuisé.
Cela nous a permis d'économiser 390 000 litres de diesel pendant
une seule année. Voici un autre exemple: nous avons installé un
petit tapis roulant électrique pour transporter le matériel
rocheux extrait entre deux couches de charbon. Cela nous a fait
économiser 888 000 litres de carburant par an.
En ce qui concerne la réhabilitation des sites des mines de
charbon, je puis vous dire que notre entreprise a déjà planté
plus de deux millions d'arbres. Il y a de nombreuses possibilités
de fixation du carbone dans le sol et dans les plantes.
On peut parler aussi de la manière dont nous utilisons les
produits, les recyclons et les réutilisons. Autrefois, nous
achetions tout dans des fûts de 45 gallons. Aujourd'hui, nous
utilisons des monoteneurs beaucoup plus vastes. Un gros camion
arrive et on les recharge. Ils ne sont jamais vides. On les
remplit constamment. On n'a plus de déchets d'acier à éliminer.
On n'a plus de déchets ou de produits à incinérer, ce qui coûtait
cher et produisait des émissions de CO2.
Voilà donc des domaines dans lesquels les charbonnages ont
sensiblement amélioré leur efficience, et cela continue.
Le président: Ça va maintenant, monsieur Jackson? Vous venez
de soulever une question sur laquelle nous reviendrons
certainement au début de l'année prochaine.
Je vais maintenant donner la parole à Mme Folco pour une
dernière question. Ensuite, nous ferons une pause et nous
aborderons la deuxième partie de la séance.
[Français]
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.):
Ma question s'adresse au témoin représentant le
Conseil canadien du bois. Vous nous avez justement
montré la diapositive indiquant la proportion du
potentiel de pollution de l'extraction des matériaux
par rapport à la manufacture des produits dérivant de
ces matériaux. Ma question est la suivante: si vous
pouviez réduire les émissions de dioxyde de carbone par
des changements opérationnels tels que, par exemple,
des moyens de transport comme le chemin de fer
plutôt que de transporter votre matériel par des
camions, ne pourriez-vous pas obtenir
des crédits additionnels? Est-ce que vous vous êtes
penchés sur cette question?
[Traduction]
M. Kelly McCloskey: Non, nous ne l'avons pas fait. Cet
acétate—et j'en ai d'autres sur l'utilisation de l'énergie, qui
lui ressemblent beaucoup—montre la quantité totale de gaz à
effet de serre que produit l'extraction de toutes ces ressources,
leur transport vers l'usine, leur transformation en produits,
l'expédition des produits vers les marchés et la construction des
maisons. C'est donc encore une fois une étude de cycle de vie.
Si j'ai bien compris votre question, vous voulez savoir si
nous avons examiné ce genre d'information afin de déterminer si
nous pourrions conseiller le gouvernement sur la manière dont
nous pourrions obtenir le crédit de ce genre de chose. La réponse
est non, nous ne l'avons pas fait. Je dois dire que ce sont des
informations tout à fait nouvelles, qui n'ont que deux mois.
[Français]
Mme Raymonde Folco: Si je peux me permettre, je
voudrais dire qu'à l'intérieur du morceau jaune,
«manufacturing», il y a le transport des matériaux.
C'est justement sur cette donnée que vous pourriez
aller chercher des crédits additionnels si vous
repensiez votre mode de transport.
[Traduction]
M. Kelly McCloskey: La réalité est que l'industrie utilise
déjà les moyens de transport les plus efficients et les plus
économiques possible. Si les choses changent tellement que l'on
peut obtenir un crédit d'une manière ou d'une autre, cela
pourrait évidemment influer sur la décision.
[Français]
Mme Raymonde Folco: Merci.
Le président: Merci, madame Folco.
[Traduction]
Je remercie nos témoins au nom de tous les membres du
comité. Comme je l'ai dit plus tôt, nous nous réservons le droit
de vous réinviter l'an prochain, lorsque nous aborderons l'étape
suivante de ce débat.
Nous allons faire une pause d'une minute avant d'inviter
Mike Cleland, SMA, Secteur de l'énergie, RNCan, avec ses
collègues.
Le président: Nous reprenons maintenant nos travaux. Nous
allons conclure cette série d'audiences de l'automne sur les
changements climatiques.
Nous accueillons maintenant Mike Cleland, qui va nous
présenter ses collègues.
Monsieur Cleland, je vous invite à faire une déclaration
d'une dizaine de minutes, après quoi nous vous poserons des
questions. Merci d'être venu. Vous avez la parole.
M. Mike Cleland (sous-ministre adjoint, Secteur de
l'énergie, ministère des Ressources naturelles): Merci, monsieur
le président.
Je vais d'abord vous présenter mes collègues, Bill Jarvis,
directeur général de la Direction de l'efficience énergétique à
RNCan, et Frank Campbell, directeur du Centre de technologie
énergétique de CANMET, qui est l'un des laboratoires de recherche
sur l'énergie.
Je vais m'efforcer de respecter votre limite de temps car je
sais que c'est la période des questions qui est généralement la
plus productive. Nous avons apporté une série d'acétates que
j'aimerais vous présenter, si vous me le permettez monsieur le
président. J'en ai remis des exemplaires sur papier au greffier
afin que les membres du comité puissent suivre notre exposé.
L'exposé comprendra deux parties. Premièrement, un très bref
aperçu du problème fondamental de la réduction des gaz à effet de
serre. Deuxièmement, un très bref résumé des principales
stratégies et initiatives de RNCan.
Quels que soient les scénarios envisagés, on pense que les
émissions de gaz à effet de serre ne peuvent qu'augmenter si l'on
n'adopte pas de mesures supplémentaires. Cela peut paraître
évident mais c'est très important.
Une deuxième chose, qui est peut-être moins évidente, c'est
que la réduction des émissions est un défi considérable. C'est un
problème fondamental. Je ne dis pas cela—et je tiens à le
souligner—pour faire croire que c'est un problème auquel on ne
peut rien faire. Les gouvernements, provinciaux et fédéral, ont
réitéré la semaine dernière à Regina leur engagement à faire face
à ce problème et à trouver des méthodes pour réduire les
émissions. Toutefois, je ne pense pas que l'on doive s'engager
dans cette voie sans bien comprendre l'énormité du défi.
L'autre chose importante est que, quel que soit le résultat
de Kyoto—que l'on ne peut prévoir—la Convention sur le
changement climatique exigera du Canada et des autres pays qu'ils
s'engagent sur la voie du changement.
Je vous demande de m'excuser si tout cela vous semble très
familier, car je suis sûr que vous en avez déjà entendu parler.
Cet acétate—sur laquelle je ne m'étendrai pas—vous donne un
aperçu de l'origine des émissions de gaz à effet de serre au
Canada et de leur distribution par gaz. Comme je l'ai dit, nous
pourrons y revenir si vous le souhaitez.
L'acétate qui suit contient des informations que vous
connaissez peut-être moins. Elle vous donnera une idée des
principaux déterminants de la consommation énergétique. Bien sûr,
la consommation d'énergie n'est pas la seule source d'émissions
de gaz à effet de serre mais c'est de loin celle qui domine.
L'une des choses importantes à souligner ici est que nous
prévoyons une hausse soutenue de notre produit intérieur brut
entre 1995 et 2020. Dans la mesure où les émissions sont reliées
à la hausse du PIB, et sachez bien que le lien est très fort,
vous saisissez mieux le défi que nous avons à relever.
Les autres informations figurant sur cet acétate sont
également pertinentes à ce sujet. Il s'agit de l'augmentation du
nombre de véhicules que l'on prévoit jusqu'en 2020, de
l'augmentation de la population et de l'augmentation du revenu
par habitant. Lorsque le revenu des gens augmente, ils achètent
plus de biens de consommation, ils ont besoin de plus de
logements, ils achètent plus de véhicules, etc. Tous ces facteurs
contribuent à augmenter les émissions de gaz à effet de serre.
L'acétate qui suit contient des données historiques et des
prévisions pour les années 2000, 2010 et 2020 en ce qui concerne
les émissions de gaz à effet de serre au Canada. Les chiffres de
1995 sont les chiffres réels. Les autres sont des projections. On
avait prévu une légère baisse en l'an 2000 mais elle ne se
manifestera probablement pas, essentiellement à cause des récents
changements à Ontario Hydro. Quoi qu'il en soit, à partir de l'an
2000, on constate une hausse soutenue. C'est 18,6 p. 100.
Considérant la marge d'erreur de ce genre de prévisions, on peut
arrondir à 20 p. 100, puis 35 p. 100 ou plus d'ici à l'an 2000.
• 1215
Encore une fois, l'acétate qui suit fait bien ressortir
l'ampleur du défi. J'ai quelques remarques à faire. La première
concerne les chiffres, qui montent. La deuxième concerne ce que
nous croyons être l'incidence des mesures prises jusqu'à présent.
Évidemment, il s'agit là d'une prévision. Ce n'est pas définitif.
Il y a ensuite ce que nous avons appelé le défi. Vous pouvez
mesurer le défi par l'écart, mais il est peut-être préférable de
le faire par cette trajectoire. Ce dont nous parlons ici, c'est
de ramener cette trajectoire à ce niveau et, en fait, de
renverser la tendance au cours des prochaines années.
Je ne vais pas insister beaucoup sur l'acétate suivant, pour
nous faire gagner du temps; je dirai simplement que c'est une
ventilation des émissions réelles et des émissions prévues par
secteur de l'économie canadienne. Cela vous donne une idée des
secteurs où le défi est le plus gros. Je tiens cependant à
préciser que nous devrions faire des efforts dans tous les
secteurs de l'économie canadienne. Malgré l'importance des
transports dans ce contexte, il y a peut-être des mesures plus
rentables à prendre dans le secteur domiciliaire ou dans le
secteur commercial, par exemple, et il faut y réfléchir.
L'acétate suivant est une ventilation par province et par
région. La région de l'Atlantique est présentée globalement. Vous
voyez où l'on prévoit qu'il y aura une hausse importante. Pour ce
qui est de l'Ontario, considérant les événements récents chez
Ontario Hydro, la situation sera probablement un peu différente,
en tout cas en l'an 2000. Ce qui est important, c'est que l'on
s'attend à une croissance très substantielle dans toutes les
régions d'ici à l'an 2010 et pour les années suivantes, à cause
d'une multitude de facteurs—par exemple, en Colombie-Britannique,
essentiellement à cause de la croissance
démographique.
Depuis le début des années 90, et le phénomène s'est
accéléré en 1993, RNCan prend des mesures pour faire face à cette
question, du point de vue de l'efficience énergétique. C'est en
effet de loin le secteur le plus problématique. Mentionnons,
parmi ces mesures, le programme de mesures volontaires et de
registre, que beaucoup d'entre vous connaissent déjà, une
stratégie sur les énergies renouvelables, toute une série de
programmes scientifiques et technologiques appuyant les autres
volets, et un certain nombre de mesures non énergétiques.
Nous pourrons revenir sur cet acétate qui contient beaucoup
trop d'informations pour que je les donne en détail. Si vous
voulez des précisions, M. Jarvis pourra vous les donner. Je ferai
seulement quelques remarques d'ordre général. Nous avons recours
à un large éventail d'instruments pour faire face à ce problème.
On dit souvent que le seul instrument que nous utilisons est le
volontariat. Ce n'est pas vrai. Certes, c'est une composante
importante mais c'est loin d'être la seule. Par exemple, nous
utilisons aussi des incitatifs fiscaux. Nous utilisons des
mesures de réglementation, en vertu de la Loi canadienne sur
l'efficience énergétique.
Comme je l'ai dit, vous connaissez peut-être le programme
des mesures volontaires et de registre. C'est un programme mixte
qui a été mis au point il y a deux ou trois ans avec la
participation des provinces, du gouvernement fédéral et des
ministères de l'Énergie et de l'Environnement. Jusqu'à présent,
c'était RNCan qui s'en occupait mais nous sommes en train de le
transférer pour en faire un organisme à but non lucratif qui sera
financé et géré aux deux tiers par le secteur privé.
Dans le cadre de ce programme de mesures volontaires et de
registre, nous demandons aux participants de présenter une lettre
d'intention, de dresser un plan d'action et de faire rapport sur
leurs résultats—et tout cela est rendu public. Nous pensons
avoir déjà fait des progrès notables dans ce domaine, considérant
le nombre de participants inscrits et l'ampleur des mesures
envisagées. Je crois que le Canada est un cas unique du point de
vue du volontariat.
• 1220
Les sciences et technologies constituent en fait le plus
gros volet de l'appui de RNCan dans le cadre de ce programme.
Sans aller dans les détails, je mentionne que la ventilation des
dépenses est plus ou moins proportionnelle aux dépenses du
programme. Il convient de souligner notre degré de partenariat
avec le secteur privé, avec les provinces, avec d'autres
gouvernements et avec d'autres pays.
Il est clair cependant qu'il faudra accroître nos
investissements. Nous devons donc trouver le moyen d'attirer plus
d'investissements, notamment privés—et nous pouvons peut-être
mettre l'accent sur les investissements privés—pour faire face à
ce problème.
Le programme des technologies est axé sur un certain nombre
d'éléments différents: efficience énergétique dans le secteur
industriel; technologie de l'énergie dans le secteur du bâtiment,
où le Canada est un leader mondial dans un certain nombre de
créneaux; systèmes énergétiques des collectivités; technologie
des carburants de transport; et, finalement, une diversité
d'éléments concernant les énergies renouvelables.
Pour résumer, disons simplement que notre principal souci
est de collaborer avec un grand nombre de partenaires. Nous
travaillons avec les gouvernements provinciaux au moyen d'un
certain nombre d'instruments, notamment de lettres de
coopération, et nous essayons d'élaborer des mesures avec eux et
d'assurer de la coordination, par exemple dans le domaine de la
réglementation sur l'efficience énergétique. Nous oeuvrons aussi
à l'échelle internationale, par exemple avec les États-Unis pour
élaborer des normes, avec l'APEC, avec qui nous avons eu certains
succès ces derniers mois. Nous oeuvrons aussi avec l'Agence
internationale de l'énergie, où nous sommes des participants très
actifs et où nous présidons en fait le Comité sur la recherche et
la technologie de l'énergie. Nous sommes donc un acteur très
important du point de vue de la collaboration internationale dans
ce contexte.
Monsieur le président, j'ai dépassé mes dix minutes et je
vous rends tout de suite la parole.
Le président: Merci, monsieur Cleland.
Nous allons ouvrir la période des questions avec M. Stinson
et Ovid Jackson.
M. Darrel Stinson: Merci, monsieur le président.
Je vous remercie aussi de comparaître devant le comité,
monsieur Cleland.
Pourriez-vous me dire quand le ministère a reçu pour la
première fois l'instruction d'étudier toutes les interactions
possibles entre le secteur des ressources naturelles du Canada et
la hausse des émissions de bioxyde de carbone dans l'atmosphère?
En outre, quel a été le degré de participation de votre ministère
aux études et aux discussions avant, pendant et après la
conférence de Rio? Quel est le pourcentage du budget ou du
personnel de votre ministère qui est consacré à cette question,
que d'aucuns estiment être l'une des plus pressantes à l'échelle
mondiale?
M. Mike Cleland: Pour ce qui est de votre première question,
il faut remonter à 1989. Certains d'entre vous se souviennent
peut-être que c'est à la conférence de Toronto que ce problème
avait été pour la première fois porté à l'attention du public.
Vers 1989, le ministère collaborait avec les provinces pour
tenter d'évaluer la situation et, depuis lors, il a appuyé
plusieurs études. En outre, nous avons reçu des fonds dans le
cadre du Plan vert pour appuyer les programmes d'efficience et de
technologie de l'énergie et, comme je l'ai dit, plus tard dans
les années 90, en 1993 et 1994, nous avons accéléré nos
activités. Finalement, nous avons réussi à protéger ces
activités, ou la plupart d'entre elles, contre les coupures, dans
le cadre de l'examen des programmes.
Pour ce qui est de notre participation à Rio, je puis vous
dire que nous avons été très actifs à la fois pour effectuer des
analyses et pour appuyer nos collègues des Affaires étrangères et
d'Environnement Canada. De fait, nous coprésidions un comité
consultatif provincial-territorial ainsi qu'un comité consultatif
de parties prenantes.
• 1225
Pour ce qui est du Secteur de l'énergie, je dois dire que la
majeure partie de son budget, soit quelque chose comme 63 p. 100
du budget consacré aux éléments non imposés par la loi, est
consacrée à cette question. La proportion atteindra près de
70 p. 100 l'an prochain, lorsque nous accueillerons les
programmes annoncés dans le budget de 1997.
M. Darrel Stinson: Avez-vous les chiffres absolus?
M. Mike Cleland: Je peux les obtenir.
M. Darrel Stinson: Je vous en prie.
Le président: Avez-vous une autre brève question?
M. Darrel Stinson: Elle sera probablement un peu plus
compliquée que la première.
Le président: Très bien. Je reviendrai à vous plus tard.
Monsieur Jackson.
M. Ovid Jackson: Monsieur le président, le gouvernement du
Canada a investi des sommes considérables dans l'option
nucléaire. Je suppose qu'il y a toujours un moment où l'on veut
faire marche arrière mais on continue toujours à augmenter les
dépenses. Je vais vous poser une question un peu chargée—je ne
sais pas si c'est vrai ou non—et je ne sais pas si vous voudrez
y répondre. Prenons une usine existante. Chaque fois que l'on en
construit une autre, elle est plus grosse que la précédente et
elle est plus compliquée. C'est comme quand on construit une
maison. Si on construit la même maison quatre ou cinq fois, on
peut l'améliorer chaque fois. Pour ce qui est des usines, les
problèmes viennent peut-être du fait que, chaque fois que l'on en
a construit une nouvelle, on a modifié les plans.
D'après ce que j'ai entendu dire, nous allons avoir besoin
de beaucoup d'électricité et l'option nucléaire reste très bonne
du point de vue environnemental. Pourquoi devrions-nous rénover
ou construire d'autres centrales nucléaires? Pourquoi seront-elles
meilleures que celles d'aujourd'hui du point de vue de
l'environnement et de la sécurité?
M. Mike Cleland: Je dirais tout d'abord que vous devriez
peut-être poser votre première question aux gouvernements
provinciaux, étant donné que ce sont évidemment eux qui ont la
responsabilité de faire un choix entre les diverses options
disponibles. Certes, le gouvernement du Canada estime que
l'option nucléaire est viable à long terme, tout autant
qu'aujourd'hui.
Je n'ai pas de chiffres avec moi mais le volume d'émissions
de CO2 évitées grâce à nos centrales nucléaires est très élevé.
Nous pensons que les gouvernements du Canada et d'autre pays
voudront donc au minimum envisager l'option nucléaire à partir de
l'an 2010, selon les paramètres économiques qui prévaudront
alors.
Pour ce qui est de ce que nous avons fait pour rehausser la
sécurité et la fiabilité des réacteurs, je puis vous dire que
l'EACL investit une couple de centaines de millions par an dans
la R-D, dont environ la moitié provient du gouvernement fédéral.
Le reste vient de ce qu'on appelle le groupe des propriétaires de
CANDU, c'est-à-dire Ontario Hydro, Hydro-Québec et la Société
d'électricité du Nouveau-Brunswick, ainsi que des fonds propres
de l'EACL. Ces activités de recherche visent à rehausser
l'efficience des centrales nucléaires existantes et futures et à
en accroître la sécurité et la fiabilité.
Nonobstant les difficultés quÂont connues les réacteurs
CANDU, notamment en Ontario, j'estime que le CANDU a toujours un
excellent dossier du point de vue de la fiabilité et de la
sécurité, et j'ai la conviction que les activités futures de R-D
continueront de l'améliorer.
M. Ovid Jackson: Merci.
Le président: Monsieur Cullen, puis nous retournerons à
Darrel Stinson.
M. Roy Cullen: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, monsieur Cleland et vos collègues, d'être
venus devant le comité. J'ai plusieurs questions à poser
concernant respectivement les instruments économiques, les
solutions technologiques et la cogénération. Je ne pourrai peut-être pas
toutes les poser mais nous aurons peut-être un deuxième
tour.
Je voudrais d'abord revenir à votre acétate intitulé
Augmentation des émissions de 1990 à 2020, au sujet de laquelle
j'ai deux questions.
• 1230
Deuxièmement, vous avez dit au sujet du chiffre de 1995—je
crois que c'était 619—qu'il n'est plus exact. Si je me souviens
bien, vous avez dit que c'est à cause des événements récents à
Ontario Hydro. Pourriez-vous préciser?
M. Mike Cleland: Je vais répondre d'abord à la première
question. C'est le chiffre de l'an 2000 qui n'est plus exact à
cause de cela.
M. Roy Cullen: Très bien.
M. Mike Cleland: La fermeture ou la mise hors service de ces
sept réacteurs entraînera une hausse assez importante des
émissions de CO2 par Ontario Hydro en l'an 2000. Toutefois, la
société prévoit remettre ensuite ces réacteurs en production. Si
tel est le cas, le chiffre de l'an 2000 restera à peu près le
même. Voilà donc l'explication.
En ce qui concerne les mesures volontaires, et je demanderai
à M. Jarvis de compléter ma réponse, la partie importante de ce
bloc ombré du graphique, intitulé Initiatives, correspond aux
résultats attendus des mesures volontaires. Cela correspond à
notre évaluation de ce qui s'est fait l'an dernier dans le cadre
de toutes les initiatives qui ont été adoptées, et à une
évaluation détaillée des engagements pris dans le cadre des plans
d'action qui ont été déposés. Au fond, nous avons considéré que
tous ces engagements seraient respectés et nous en avons calculé
l'incidence attendue.
Bill, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. W.D. (Bill) Jarvis (directeur général, Direction de
l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles):
La plupart des engagements pris par les entreprises participant
au programme Défi-climat concernent des mesures à court terme.
Voilà pourquoi c'est entre 1995 et l'an 2000 que l'on trouve
l'incidence la plus marquée. Il s'agit par exemple de ce que
l'industrie du gaz naturel a l'intention de faire pour éliminer
les pertes de méthane des usines de traitement du gaz naturel.
C'est un problème que l'industrie maîtrise maintenant assez bien
et qu'elle peut régler assez rapidement. Comme l'a dit
M. Cleland, nous avons pris ces engagements tels qu'ils ont été
communiqués et tout permet de penser qu'ils seront respectés.
M. Roy Cullen: Il est donc probable que l'on enregistre des
résultats encore plus positifs après l'an 2000, du fait des
mesures volontaires. En effet, les plans d'action vont jusqu'en
l'an 2000, comme vous l'avez dit, et la situation est beaucoup
plus floue après. Vous n'avez pas beaucoup d'éléments pour
évaluer la contribution des mesures volontaires après l'an 2000,
n'est-ce pas?
M. Bill Jarvis: Nous prévoyons des résultats beaucoup plus
prononcés au-delà de l'an 2000, avec les programmes volontaires,
mais ils ne figurent pas dans ces prévisions. Je précise par
ailleurs qu'après l'an 2000, la majeure partie des résultats
positifs proviendra de choses telles que le remplacement des
installations existantes—c'est-à-dire de la technologie. Lorsque
les gens remplacent leur réfrigérateur, ceux qu'ils achètent sont
meilleurs. Même chose pour les maisons.
M. Roy Cullen: Pourrions-nous revenir à ce graphique et à
Ontario Hydro, jusqu'à l'an 2000? Je sais que c'est le
gouvernement provincial qui décidera de la relance de la
production nucléaire mais c'est l'idée de la cogénération qui
m'intéresse le plus.
Ces dernières années, l'industrie des ressources naturelles,
en particulier, mais cela vaut aussi pour d'autres secteurs, n'a
pas pu tirer le meilleur parti possible de la cogénération à
cause de gros problèmes de concurrence avec les États-Unis.
Ontario Hydro peut bien dire qu'elle est favorable à la
cogénération mais, en réalité, rien d'important n'a été fait au
niveau global, du fait de sa capacité excédentaire, et les choses
sont donc essentiellement restées au niveau local.
Si l'on calcule les investissements nécessaires pour
relancer la capacité de production nucléaire—mégaprojets contre
cogénération, qui est marginale—c'est un gain net pour
l'industrie, c'est un gain net pour la capacité électrique. C'est
au niveau environnemental que l'on constate des résultats. Si
l'on prend le cas de l'industrie forestière, par exemple, et je
rappelle qu'elle ne contribue pas beaucoup au problème du CO2,
quels sont les calculs, du point de vue de l'efficience
économique? Je sais que c'est une question fondamentale—la
question de l'efficience économique par rapport à la protection
de l'environnement—si l'on veut comparer la relance de la
production nucléaire à la promotion de la cogénération.
M. Mike Cleland: C'est une question à laquelle il serait
très difficile de donner une réponse complète et je demanderai à
mes collègues de donner leur avis.
La première chose à faire est d'établir les facteurs
économiques correspondant à chaque option. Il est cependant
difficile de faire le calcul économique. Évidemment, Ontario
Hydro aura une très grosse facture à payer pour remettre ces
réacteurs en production. On peut se demander si c'est la bonne
solution mais c'est en fait Ontario Hydro et les consommateurs
ontariens qui devront y répondre.
• 1235
M. Roy Cullen: Si l'on prend le problème uniquement du point
de vue de l'incidence environnementale, je suppose que la théorie
conventionnelle est que la capacité nucléaire est probablement...
Du point de vue de l'environnement, comment peut-on comparer la
cogénération et l'utilisation de la biomasse?
M. Mike Cleland: Il y a plusieurs facteurs à prendre en
considération à ce sujet. L'utilisation de la biomasse n'est pas
totalement neutre sur le plan environnemental. Elle est neutre
sur le plan des émanations de CO2, si l'on considère que celui-ci
provient de sources de bois qui sont remplacées, mais elle
produit aussi d'autres émissions dont on doit tenir compte. Il y
a sans doute aussi des effets locaux à prendre en considération,
mais ils sont généralement assez mineurs étant donné que les
installations sont relativement petites.
L'incidence environnementale immédiate du nucléaire est très
minime, si on laisse de côté son effet sur le paysage. Le gros
problème du nucléaire concerne évidemment les conséquences à très
long terme. Je ne pense pas que l'on ait beaucoup d'inquiétudes
du point de vue de la sécurité, c'est surtout la gestion des
résidus de combustion qui pose de très sérieux problèmes à long
terme, tout comme la mise hors service des réacteurs et la
gestion des déchets qui en résultent inévitablement.
Nous n'avons pas résolu ce problème. Nous avons adopté
plusieurs programmes à ce sujet, comme d'autres pays, mais cela
reste un problème très réel.
M. Roy Cullen: Merci. J'aurais peut-être une autre question
à poser au tour suivant, monsieur le président.
Le président: Darryl Stinson.
M. Darrel Stinson: Vous disiez que vous vous occupez
sérieusement de cette question depuis 1989 et que vos activités
se sont intensifiées en 1993-1994. Je trouve donc un peu étrange
que nous n'ayons pas encore établi notre position pour la
conférence de Kyoto. Qu'en pensez-vous?
M. Mike Cleland: Dans un sens, oui. En revanche, cela ne
fait que mettre en relief l'ampleur du problème. Nous nous en
occupons très sérieusement depuis 1989, à la fois en effectuant
des études et en élaborant des programmes. Nous avons mis en
oeuvre des programmes avec les ressources que nous avons pu
obtenir, et nous avons aussi fait adopter des changements de
politiques. Toutefois, le problème est tellement énorme qu'aucun
gouvernement au monde n'a encore réussi à le maîtriser, à ma
connaissance.
Pour ce qui est de ce que nous ferons après Kyoto, je puis
vous dire que des efforts ont été déployés pour élaborer un plan
adéquat. Il y a notamment eu un effort qui a commencé il y a
environ quatre ans avec les provinces et toutes les parties
prenantes pour formuler une approche. On avait dressé dans ce
contexte une longue liste de mesures possibles qui, si elles
avaient toutes été mises en oeuvre et avaient produit les
résultats anticipés, nous auraient amenés près de la
stabilisation aux niveaux de 1990 d'ici à l'an 2000 et auraient
sans doute eu ensuite d'autres effets durables.
Le fait est cependant que les divers gouvernements,
notamment provinciaux, ont conclu qu'ils n'étaient pas prêts à
mettre en oeuvre ces diverses mesures, après les avoir analysés.
On a en effet jugé que certaines seraient trop coûteuses, que
d'autres fausseraient les mécanismes économiques, et qu'un bon
nombre auraient tout simplement été inefficaces.
M. Darrel Stinson: Quelles compensations pourrons-nous
obtenir des pays qui n'acceptent pas de ratifier ce texte?
Croyez-vous que des pénalités pourraient leur être imposées?
M. Mike Cleland: Bonne question. L'une des positions
adoptées par le gouvernement canadien dans les négociations
préparatoires de Kyoto est que les pays en développement
devraient eux aussi s'engager à oeuvrer vers des engagements.
La raison en est que le mandat de Berlin ne comportait
aucune disposition appelant les pays en développement à prendre
des engagements à Kyoto. Pour notre part, nous considérons qu'il
faut que ces pays se joignent à nous pour que nous puissions nous
attaquer sérieusement au problème et obtenir l'appui du public et
des instances politiques.
Nous ne savons pas si cela se fera à Kyoto. Pour l'instant,
les discussions sont très difficiles. Aucune pénalité n'a encore
été prévue. Il appartient donc à chaque pays de décider lui-même
s'il va ratifier ou non la convention et les protocoles.
M. Darrel Stinson: N'avez-vous donc pas le sentiment que
nous prenons un engagement à l'égard d'un contrat qui reste
foncièrement inconnu?
M. Mike Cleland: Pas totalement. Nous avons une idée des
grands paramètres du contrat envisagé. Certes, nous savons que ce
ne sera pas facile et qu'il faudra que les gouvernements prennent
des mesures très concrètes pour commencer à faire baisser nos
émissions de gaz à effet de serre.
Il est clair aussi que le problème mondial ne pourra être
résolu tant que nous n'aurons pas réussi à amener les PED dans
notre camp. Vous savez certainement que plusieurs pays—notamment
la Chine et l'Inde—sont les plus grosses sources de croissance.
Ils deviendront les plus grosses sources dans très peu d'années.
Je n'ai pas de réponse satisfaisante à vous donner là-dessus. C'est une
question de diplomatie internationale. Nous ne
pouvons que poursuivre nos efforts.
M. Darrel Stinson: Peut-être pourrais-je aborder la question
d'un point de vue différent. Nous utilisons de plus en plus de
satellites, n'est-ce pas? Vous utilisez les données que vous
communiquent les satellites sur ce problème.
M. Mike Cleland: Oui.
M. Darrel Stinson: Nous savons aussi qu'il faut un certain
temps pour que le réchauffement touche les océans. C'est en tout
cas ce que portent à croire les études pertinentes.
Cela étant, et considérant les pays qui ne veulent pas
embarquer, quelles informations vous ont communiquées les
satellites sur l'incidence des mesures prises au Koweit lors du
retrait des troupes de Saddam Hussein? Je crois me souvenir que
plus de 500 puits de pétrole avaient été incendiés et qu'ils ont
brûlé pendant des mois. Quelle a été l'incidence de ce phénomène?
Est-ce la raison pour laquelle nous sommes toujours confrontés à
ce problème? Est-ce un facteur?
M. Mike Cleland: C'est certainement un facteur à prendre en
considération mais je ne saurais répondre avec précision à votre
question. Je soupçonne qu'on peut trouver la réponse. J'ai une
bonne idée des quantités qui ont probablement brûlé pendant cette
période, ce qui devrait nous permettre de mesurer les
conséquences.
En ce qui concerne le problème global des émissions
mondiales de gaz à effet de serre, j'ai l'impression que ce
phénomène a été relativement mineur.
M. Darrel Stinson: Qu'en a-t-il été pour la Première et la
Deuxième Guerres mondiales?
M. Mike Cleland: À l'époque, elles ont probablement joué un
rôle important.
Envisagez par exemple l'une des questions soulevées
récemment par les États-Unis, qui ont dit vouloir obtenir une
exemption des émissions de CO2 résultant des activités de
maintien de la paix ou d'autres activités militaires.
Il ne fait aucun doute que des opérations de cette nature
ont une importance énorme, étant donné qu'elles font brûler
beaucoup de carburant de transport. Je soupçonne donc que la
Deuxième Guerre mondiale a probablement eu un effet assez
important dans ce contexte.
M. Darrel Stinson: Je crois que nous devrions faire très
attention à ce que nous allons décider.
M. Mike Cleland: Je suis d'accord avec vous là-dessus.
M. Darrel Stinson: Je n'arrive pas à le croire.
Le président: Monsieur Cullen, puis M. Jerry Pickard.
M. Roy Cullen: J'aimerais revenir un instant sur les
instruments économiques. J'ai une question d'ordre général à vous
poser concernant le dialogue que vous avez déjà eu et que vous
aurez avec le ministère des Finances, en particulier au sujet des
incitatifs fiscaux, de l'équilibre entre le renouvelable et le
non renouvelable, et de toute la question des transports publics.
Le transport est un énorme problème que l'on va devoir résoudre.
Je me demande si l'on fait des progrès sur ce front.
• 1245
À titre de question supplémentaire, qu'adviendra-t-il des
mesures volontaires? J'ai déjà posé cette question à des témoins
qui favorisent les mesures volontaires. Considèrent-ils que les
mesures volontaires font partie d'une solution ou cela revient-il
à dire qu'une femme peut être à moitié enceinte? Les mesures
volontaires peuvent-elles être une partie de la solution, ou
s'agit-il de mesures volontaires ou d'objectifs prédéterminés?
M. Mike Cleland: Laissez-moi commencer par la première
question.
Nous avons fait certains progrès sur le plan fiscal. Quand
nous avons effectué l'étude d'égalisation du terrain de jeu, il y
a quelques années, elle a révélé que le terrain n'était pas égal
pour certains types d'investissements, notamment ceux concernant
l'énergie renouvelable, en tout cas au vu de cette analyse. De ce
fait, certains changements ont été apportés au régime fiscal pour
favoriser un peu plus l'énergie renouvelable—un petit changement
dans le bon sens.
M. Jarvis pourra vous donner des précisions mais, l'an
dernier, considérant les fonds mis de côté dans le budget de
1997, nous avons examiné plusieurs options pour établir la
meilleure méthode de prestation du programme d'incitatifs. Au
cours de cet automne, nous avons tenu des consultations publiques
sur une série d'options, afin de savoir s'il valait mieux agir
par le truchement d'incitatifs directs ou en modifiant le régime
fiscal. Ce processus arrive à sa conclusion mais je ne suis pas
encore en mesure de vous en donner les détails. Nous n'avons pas
encore divulgué le programme mais sachez que nous cherchons la
meilleure méthode.
Beaucoup de propositions ont été faites pour modifier le
régime fiscal afin d'encourager différents types
d'investissements. C'est une option mais elle n'est pas
nécessairement bien ciblée. Elle tend à produire beaucoup de
perte, mais c'est une option qu'il faut envisager dans le
contexte de toutes les autres possibilités. Nous continuons de
discuter de cette question avec le ministère des Finances.
Pour ce qui est de l'échange d'émissions, je vous dirais
très franchement que personne ne sait vraiment comment on
pourrait faire fonctionner un tel système à l'échelle
internationale. Jusqu'à présent, l'expérience acquise ne concerne
pratiquement que les États-Unis. Il s'agit d'un programme
purement américain, axé sur des problèmes très particuliers de
SO2, pour lesquels il existe un modèle très efficace. Le nombre
d'entités émettrices est relativement petit à l'intérieur d'un
seul pays, et il s'agit d'un problème pour lequel existe une
technologie de réduction valable.
Rien de cela ne vaudrait dans le cas d'un dispositif
international sur les émissions de gaz à effet de serre. Cela
soulève toutes sortes de questions quant au genre de structure
arborescente qu'il y aurait. S'agirait-il de transferts
financiers d'un pays à un autre? S'agirait-il de transferts d'une
entreprise A d'un pays X à une entreprise B d'un pays Y? Rien de
cela n'a encore été réglé. La solution consisterait probablement
à essayer d'acquérir une certaine expérience à l'échelle
nationale avant d'essayer de passer à l'échelle internationale.
Finalement, en ce qui concerne les mesures volontaires,
elles constituent dans un certain sens un pas dans la bonne voie.
En effet, elles permettent d'obtenir immédiatement des résultats
pour lesquels il faudrait sans doute attendre des années si l'on
devait se fonder uniquement, par exemple, sur un mécanisme de
réglementation. Plus important encore peut-être, elles permettent
de mobiliser les énergies et la créativité des milieux d'affaires
afin de trouver des idées et de prendre des mesures concrètes.
Vous avez précisé dans votre question que ce n'est peut-être pas
la seule solution et je partage votre avis. On ne peut pas tout
régler de cette manière et il faut aussi avoir recours à d'autres
instruments, soit des incitatifs, soit des règlements.
M. Roy Cullen: Me reste-t-il du temps?
Le président: Je vais d'abord donner la parole à M. Pickard
puis je reviendrai à vous.
M. Jerry Pickard (Kent—Essex, Lib.): Merci, monsieur
Cleland. J'ai deux questions très fondamentales à vous poser.
Je connais la position du gouvernement canadien et je
connais les autres positions dans le monde. Toutefois,
considérant les questions qui ont été posées aujourd'hui, j'ai le
sentiment que la question est de savoir si les émissions de CO2,
ou l'effet de gaz de serre, constituent ou non un problème
fondamental dans notre pays. Êtes-vous de ceux qui pensent
vraiment que c'est un problème majeur que l'on doit absolument
résoudre?
M. Mike Cleland: Je crois devoir reprendre la position
officielle du gouvernement canadien à ce sujet. Je ne suis pas
climatologue. Je connais un peu la question, j'ai lu des choses
là-dessus mais, pour être tout à fait franc avec vous, je ne suis
pas qualifié pour vous donner une réponse officielle.
Le gouvernement canadien accepte les conclusions du Comité
intergouvernemental sur les changements climatiques, et c'est à
partir de cela qu'il a décidé d'aller de l'avant.
M. Jerry Pickard: Quand j'entends parler des effets du
Koweit, de la Seconde Guerre mondiale ou d'autres événements,
j'ai le sentiment que le problème est moins urgent qu'on le dit.
Il y a peut-être d'autres facteurs qui sont à l'origine du
problème. Qu'en pensez-vous?
M. Mike Cleland: Certainement.
M. Jerry Pickard: Deuxièmement, quelles initiatives—et je
pense que nous entendons oui. La plupart des données que j'ai
vues montrent qu'il y a certaines choses qui pourraient être
faites mais qu'il y a des variables ici et là. D'après vous,
quelles mesures précises devrions-nous prendre au Canada pour
résoudre le problème des émissions à effet de serre?
M. Mike Cleland: La liste est probablement longue. Je
commencerai en disant que la chose la plus importante, à mon
avis, est de faire participer activement les provinces, les
Territoires et le public canadien, de manière plus générale, à
l'élaboration de la bonne liste, au cours de la prochaine année
environ, c'est-à-dire une liste des choses qui fonctionnent
vraiment et qui sont acceptables à la population et sur le plan
politique.
Une longue liste de possibilités a été dressée au cours des
années mais il n'est pas évident qu'elles recueilleraient l'appui
voulu. Il faut donc la revoir et il faut examiner les
possibilités.
Pour revenir au volontariat, il est parfaitement clair que
les gens peuvent faire certains progrès avec des mesures
volontaires mais qu'ils doivent toujours soumettre leurs projets
d'investissement à leurs conseils d'administration. Ils doivent
toujours surmonter d'autres obstacles et faire face à cette sorte
de choses. À l'heure actuelle, considérant le prix de l'énergie,
l'incitation à aller au-delà de l'attentisme n'est tout
simplement pas là.
À mon sens, la question fondamentale est celle-ci: que doit-on faire pour
changer cette structure incitative? Une option
pourrait être d'adopter des mesures réglementaires, en plafonnant
tout simplement les émissions de telle ou telle entreprise ou
usine.
M. Jerry Pickard: Je suppose, peut-être en m'écartant un peu
du point à partir duquel... Je comprends les conséquences des
provinces... collaborer avec le gouvernement fédéral, avec
l'industrie et avec le côté politique—je comprends ça—mais
j'examine le côté technique. Il s'agit des innovations que vous
jugez importantes, pas du point de vue de la collaboration avec
les provinces ou avec l'industrie. Quels mécanismes devrions-nous
envisager pour éliminer les émissions à effet de serre?
M. Mike Cleland: Quand vous parlez d'innovations, voulez-vous parler
d'instruments gouvernementaux, de mécanismes, par
opposition aux technologies?
M. Jerry Pickard: Je veux parler de tous les instruments
qu'il faudrait adopter en priorité.
M. Mike Cleland: Si tel est le cas, je répète qu'il faut
analyser la structure incitative présentée aux investisseurs et
aux consommateurs.
M. Jerry Pickard: Donc les structures incitatives seraient
un élément. Quels autres?
M. Mike Cleland: Ensuite, je pense que l'on peut envisager
des mécanismes réglementaires, par exemple la réglementation du
matériel. C'est là un domaine dans lequel le gouvernement fédéral
agit, et nous pouvons aller plus loin à cet égard.
M. Jerry Pickard: Recouvrement des capitaux investis et ce
type de chose?
M. Mike Cleland: Et, fondamentalement, adopter des
règlements pour éliminer du marché l'équipement le moins
efficient.
De même, on pourrait envisager la réglementation des
structures, des immeubles—bien que cela soit provincial—et on
pourrait faire une diversité de choses dans ce sens. On pourrait
envisager d'autres programmes d'information. C'est peut-être une
option assez molle mais on peut probablement faire plus pour
éduquer le consommateur. On peut aussi examiner ce que l'on fait
pour investir dans les nouvelles technologies. Le délai de
recouvrement serait plus long—peut-être 10 ou 15 ans—mais il y
aurait en même temps des possibilités économiques pour le Canada.
Le président: Ça va, monsieur Pickard? Allez-y si vous
avez...
M. Jerry Pickard: Non, je pense que la liste est très
longue. Ce qui m'intéresse, c'est de connaître les priorités. On
peut bien parler de cogénération, on peut parler de recouvrement
du capital, on peut parler de beaucoup de choses mais, à
l'échelle globale, il va falloir trouver quels sont les
changements les plus fondamentaux.
Il va falloir se concentrer sur ceux-là et dire: il faut
faire ceci, ceci, ceci et ceci. Voilà le genre de choses que
j'essayais de savoir. Je pense qu'on a beaucoup tourné autour du
pot.
Le président: Ce sera un bon sujet pour notre prochaine
ronde d'audiences, au début de l'an prochain, avec les questions
de technologie.
Monsieur Cullen, vous aviez une dernière question à poser,
après quoi nous lèverons la séance.
M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président. Je ferai
simplement une remarque d'ordre général.
Si l'on examine la liste des principaux secteurs qui
contribuent aux gaz à effet de serre au Canada, on voit que le
secteur du transport occupe une place énorme, ce qui me fait
penser qu'il doit être prioritaire.
J'aimerais parler un peu de technologie et poser une
question à ce sujet. Bien que je sois toujours très intéressé par
ce que peut faire la technologie et par la manière dont elle peut
nous aider à améliorer notre rendement environnemental, je dois
dire que les solutions axées sur la technologie me rendent
toujours un peu perplexe. J'ai vu des solutions axées sur la
technologie dans la technologie de l'information, dans la
technologie de réglementation environnementale mais, vous savez,
la meilleure technologie disponible n'est pas toujours très
justifiée du point de vue économique, du point de vue des
juridictions qui ont recommandé cette solution.
Je présume que vous jouez avec différents modèles en ce qui
concerne l'incidence de tout ce que l'on fait sur les gaz à effet
de serre. Quel genre de poids accordez-vous à la technologie
prouvée par rapport aux technologies qui seront ou ne seront
peut-être pas là à l'avenir? Que pouvez-vous dire du poids que
vous attribuez aux solutions technologiques à certains de ces
problèmes?
M. Mike Cleland: Certainement. Je peux peut-être diviser
votre question en deux parties et demander à M. Jarvis de dire où
nous en sommes du point de vue des technologies prouvées, puisque
cela concerne en réalité le volet programmatique de la boutique.
Je demanderai ensuite à Frank Campbell de dire quelques mots
sur les perspectives à plus long terme concernant la technologie.
M. Bill Jarvis: L'un des aspects tout à fait particuliers de
ce problème est qu'il touche le long terme. Si l'on se penche sur
la situation qui prévaudra en 2010, cela veut dire que les
solutions doivent dans l'ensemble déjà se trouver dans le
portefeuille technologique dÂaujourdÂhui.
Globalement, celles-ci portent essentiellement sur la
manière dont on utilise l'énergie—l'efficience énergétique—et,
dans une certaine mesure, sur la manière dont on transforme
l'énergie en électricité, la cogénération, dont on a déjà parlé,
et des choses de ce genre.
Si on essaie de voir encore plus loin, on considère que l'on
a alors épuisé toutes les possibilités d'amélioration de
l'efficience qui existent dans l'économie actuelle. On utilise
tout le potentiel offert par le portefeuille technologique
existant et on passe aux technologies que l'on pourra mettre au
point à partir de maintenant.
Pour ce qui est d'après 2000, je peux peut-être demander à
Frank de dire comment il voit la situation.
M. Frank Campbell (directeur, Centre de technologie
énergétique CANMET, ministère des Ressources naturelles): Je vais
essayer de vous répondre. Il y a les technologies prêtes à être
commercialisées que Bill vient d'évoquer. Ce sont des
technologies qui existent sur le marché, qui sont commerciales.
La difficulté est d'obtenir plus de pénétration du marché.
Par exemple, nous savons aujourd'hui comment fabriquer des
fenêtres très efficientes à un prix abordable, le problème est
d'en équiper plus de maisons. C'est en grande mesure ce que
tendent à appuyer les programmes de M. Jarvis.
Si l'on passe au moyen terme, le problème tend à être la
réduction des coûts. Nous avons des technologies, nous savons à
peu près comment faire du point de vue scientifique, mais nous ne
pouvons pas le faire de manière rentable. Les programmes que nous
avons ont donc tendance à être axés sur la réduction des coûts.
On parle ici de choses telles que des immeubles à rendement
vraiment élevé, deux fois plus efficients que ceux d'aujourd'hui
sur le plan énergétique. Le coût de l'énergie éolienne, dont nous
disposons dans des qualités très limitées, diminue.
Pour ce qui est de la micro-cogénération, on a déjà parlé de
grosses centrales de cogénération mais il y a aussi la génération
dans des très petites centrales. Nous avons étudié la possibilité
d'en installer dans des immeubles.
On peut aussi utiliser l'éthanol comme carburant de
transport issu de la biomasse, pas des processus de fermentation
conventionnels mais de processus biotechnologiques plus avancés.
Voilà donc un tout petit échantillon. Si vous voulez voir
encore plus loin dans le temps, vous parlez de choses qui n'en
sont pas encore vraiment à l'étape de démonstration... Vous
parlez des cellules énergétiques—pour lesquelles nous sommes
certainement un chef de file incontestable, grâce à Ballard—de
l'utilisation de l'hydrogène dans les véhicules et de piles à
hydrogène, de cellules photovoltaïques; ce sont des choses que
nous sommes encore loin de pouvoir utiliser couramment. On peut
aussi aller encore plus loin et parler de fusion et d'énergie
spatiale et de toutes sortes de choses qui n'apparaîtront
probablement pas avant 30, 40 ou 50 ans.
M. Roy Cullen: Merci. C'est très utile.
Pour élaborer notre position à Kyoto, a-t-on...? Je serais
nerveux si vous me disiez que l'on peut tirer une conclusion
parce que nous sommes capables d'améliorer notre rendement de
telle ou telle manière, grâce à plusieurs stratégies différentes,
et que le reste devra être accompli au moyen de ces technologies
qui seront transférées, qui deviendront plus rentables ou qui
seront effectivement mises au point. Je serais nerveux si nous
placions toute notre confiance dans... Je crois que cela viendra
et je pense que certaines des choses que l'on fait sont
magnifiques mais, pour ce qui est de nous engager à atteindre des
objectifs basés sur des «si», cela me rendrait très nerveux.
Pourriez-vous me garantir que nous allons accorder le poids qui
convient aux solutions technologiques?
M. Mike Cleland: Je ne sais pas vraiment quel est le poids
qui convient. Par exemple, si l'on examine la situation actuelle,
on constate que notre meilleure estimation des meilleures
technologies que l'on pourrait mettre en marché avec des
structures d'incitation adéquates—elles nous feraient beaucoup
avancer vers des réductions aux niveaux de 1990 d'ici à l'an
2010. Cela exigerait des efforts considérables sur le plan des
incitations mais, dans l'ensemble, les technologies sont là. À
plus longue échéance, on parle manifestement d'un avenir
incertain. On ne sait pas jusqu'où on peut aller.
En contrepartie, l'expérience acquise dans ce genre de chose
est que, pour autant que la société soit correctement mobilisée
et que l'on ait la volonté d'investir dans la R-D nécessaire, je
serais étonné que l'on ne parvienne pas à trouver de nouvelles
solutions importantes. C'est donc une question de temps et de
délai de remplacement des équipements actuels de l'économie, ce
qui est un autre facteur absolument crucial, et cela nous amène
clairement dans le siècle prochain.
M. Roy Cullen: Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen. C'étaient de
bonnes questions et d'excellentes réponses.
Au nom de tous mes collègues, je tiens à vous remercier,
messieurs, d'avoir passé l'heure avec nous. Comme pour les autres
témoins, nous nous réservons le droit de vous inviter à nouveau
au début de l'an prochain lorsque nous aborderons le palier
suivant de cette discussion, après Kyoto. Nous constatons au
moins les prémisses d'une prise de conscience du défi
considérable qui se pose pour notre pays et pour la planète.
Collègues, vous aurez lundi une ébauche de rapport sur vos
bureaux.
Merci. La séance est levée.
Ma première remarque—et cela va probablement vous
surprendre, tout comme cela nous a surpris nous-mêmes—est que,
selon certaines études consacrées aux incidences sur différentes
industries, celle des produits du bois scié serait l'une des plus
durement touchées. Cela est d'autant plus surprenant que c'est
une industrie dont la contribution aux émissions de gaz à effet
de serre est relativement mineure. Toutefois, ce phénomène
s'explique facilement. Le fait que nous soyons tellement
tributaires du marché américain a un effet multiplicateur
considérable lorsqu'on considère que les États-Unis et le Canada
seraient les deux pays qui pourraient être le plus durement
touchés sur le plan économique.
En ce qui concerne la position collective de notre
industrie, du point de vue de la gestion des forêts, je puis vous
dire que nous appuyons vigoureusement la norme établie par
l'Association canadienne de normalisation en matière de gestion
durable des forêts. C'est ce que disent la plupart des
entreprises: établir une norme internationale de gestion des
forêts afin que des questions comme celles que vous venez
d'évoquer, touchant par exemple la faune, soient traitées de
manière équitable d'un pays à l'autre.
Je me demande si M. McCloskey pourrait donner des précisions
sur cette question de cycle de vie, sur les avantages
environnementaux qu'offre la construction avec des produits du
bois. Je pense que c'est une question très importante sur
laquelle il faudrait insister à nouveau, d'autant plus que le
bois constitue une ressource renouvelable, ce qui n'est pas le
cas de l'acier ou du béton.
Le modèle que nous avons élaboré est le premier de ce genre
au monde et le gouvernement canadien en parle un peu partout dans
le monde en disant qu'il est bien plus efficace pour essayer
d'évaluer la situation globale. Certes, les gaz à effet de serre
sont un vrai problème, mais la pollution atmosphérique et la
pollution des eaux aussi, tout comme beaucoup d'autres
questions—par exemple, les déchets du bois ou n'importe quel
type de déchets.
Voici le scénario que l'on peut envisager s'il n'y a aucun
changement du point de vue des politiques publiques. Cela dit, il
importe de souligner que nous prévoyons que les politiques
publiques changeront, ce qui changera les prévisions.
La stratégie sur les énergies renouvelables est une
initiative de moindre ampleur que celle concernant l'efficience
énergétique, mais elle n'en est pas pour autant négligeable. Elle
est axée sur trois grands types d'initiatives: améliorer les
conditions d'investissement—autrement dit, égaliser le terrain
de jeu du point de vue fiscal; des initiatives technologiques,
dans le but de favoriser les technologies renouvelables; et des
initiatives de développement des marchés, notamment la nouvelle
initiative d'approvisionnement du gouvernement fédéral fondée sur
l'énergie verte.
Je n'ai pas le pourcentage des ressources totales du
ministère que nous consacrons à cette question. Je précise
d'ailleurs que je n'ai pas mentionné certaines des choses que
nous faisons dans des secteurs qui ne sont pas directement reliés
à l'énergie, par exemple au Service canadien des forêts ou dans
le Secteur des sciences de la terre. Ce sont là des activités
importantes mais qui ne sont pas énormes par rapport à leurs
budgets totaux.
Premièrement, dans le scénario où rien ne change, comment
extrapolez-vous la situation, en fonction des mesures
volontaires? Pour que les choses soient bien claires, je précise
tout de suite que les mesures volontaires ne constituent à mon
avis qu'une partie de la solution.
Je pense que l'élément important que vous avez soulevé dans
votre question concerne les structures de réglementation et le
fait de savoir dans quelle mesure le maintien des monopoles
favorise ou défavorise les autres options telles que la
cogénération. Notre sentiment, et je crois qu'il repose sur des
données très solides, est que, sur un marché de l'électricité
plus compétitif et plus ouvert, on a plus de chances de voir
apparaître ce genre d'options. Il est clair que ce sont des
options réalistes et je ne doute pas que les investisseurs soient
tentés de les réaliser.
Deuxièmement, je comprends le concept d'échange d'émissions
mais je ne vois pas comment il pourrait fonctionner dans le cadre
d'un traité global. Pensez-vous qu'on pourra négocier des
émissions au-delà des frontières, ou s'agira-t-il de transactions
d'émissions à l'intérieur d'un même pays en fonction de certains
objectifs?