NRGO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS
COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 5 mai 1999
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)): Cette séance du mercredi 5 mai 1999 du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales est ouverte. Nous reprenons notre étude du projet de loi C-78, Loi constituant l'Office d'investissement des régimes de pensions du secteur public.
Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Steven Hindle, président, et Rudy Loiselle, conseiller en pension et avantages sociaux, et des représentants de l'Association des employé(e)s en sciences sociales, William Krause, président, Claude Danik, agent de recherche, et Walter Kelm, conseiller.
Messieurs, je vous remercie d'être venus témoigner aujourd'hui devant le comité au sujet du projet de loi C-78. Je suis sûr que le greffier vous a déjà indiqué que chacune de vos organisations aura cinq à 10 minutes pour faire un exposé liminaire, après quoi nous passerons aux questions.
Je vais vous donner la parole dans l'ordre figurant sur la liste des témoins.
Monsieur Hindle, je suppose que c'est vous qui allez parler au nom de l'Institut professionnel et je vous invite donc à commencer.
M. Steve Hindle (président, Institut professionnel de la fonction publique du Canada): Merci, monsieur le président.
L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada désire profiter de cette occasion pour faire des observations sur le projet de loi C-78. Nous avons déjà indiqué publiquement que ce texte de loi extrêmement complexe, de plus de 200 pages, mérite bien plus que quatre heures de débat.
Notre intervention portera particulièrement sur diverses modifications qui régleraient les sérieuses préoccupations que suscite ce projet de loi chez nos membres. Permettez-moi d'abord de vous rappeler que le projet de loi aura des répercussions sur les fonds de retraite de quelque 670 000 fonctionnaires fédéraux, comprenant les membres des Forces armées canadiennes et de la GRC.
L'Institut convient que certaines des modifications proposées dans le projet de loi C-78, ainsi que dans le projet de loi C-71, la Loi d'exécution du budget de 1999, peuvent avoir des répercussions positives sur les fonctionnaires et sur les retraités. Je songe en particulier à la nouvelle méthode de calcul des prestations tenant compte du salaire moyen des cinq meilleures années consécutives de service, au lieu de six; de la modification de la méthode de coordination du RPC et du RRQ en fonction du nouveau mode de calcul des prestations; de l'octroi des prestations de survivant aux partenaires de même sexe; de l'investissement sur le marché des actifs du régime; et de la mise en application d'un régime de soins dentaires pour les retraités. Toutefois, la valeur en dollars de toutes ces améliorations est bien mince par rapport à l'excédent de 30 milliards de dollars que possèdent les régimes actuels.
L'Institut est particulièrement révolté par la manière dont le gouvernement se propose d'accaparer l'excédent de 30 milliards de dollars actuellement attribuable aux régimes de pensions de la fonction publique. En outre, l'Institut est profondément inquiet de constater que l'on n'envisage pas de conseil de gestion mixte dans le nouveau régime.
• 1535
Des experts affirment que cela pourrait constituer un
dangereux précédent, risquant d'encourager les employeurs des
secteurs public et privé à exercer des pressions pour avoir eux
aussi le droit de s'emparer des excédents de leurs régimes de
pensions. En tant que députés, comment comptez-vous résister aux
pressions qu'exercera le secteur privé pour faire modifier la loi
afin d'obtenir un accès illimité aux excédents des régimes de
pensions des travailleurs?
Pour ce qui est de la consultation des employés, je passe directement à la recommandation que nous formulons à ce sujet, monsieur le président.
L'Institut invite le gouvernement à respecter sa promesse de longue date consistant à soumettre les régimes de pensions de la fonction publique à un véritable système de gestion conjointe.
L'article 90 du projet de loi C-78 dispose que:
-
Est constitué un comité, le Comité consultatif sur la pension de la
fonction publique, chargé de conseiller le ministre et de
l'assister [...]
Nous recommandons qu'il soit modifié de la manière suivante:
-
Est constitué un Conseil de gestion du régime de pensions de la
fonction publique formé de représentants des employés, de
l'employeur et des pensionnés, responsable de la conception, du
financement, de la gestion de l'excédent ou du déficit, de son
administration et d'assurer les fonds nécessaires au paiement des
prestations de retraite.
En ce qui concerne la législation canadienne, le président du Conseil du Trésor avait déclaré en 1992 que:
-
[...] le gouvernement a la ferme intention de respecter ses propres
règles et de ne pas profiter de sa position unique d'employeur ne
payant pas d'impôt et rédigeant lui-même les règles.
Depuis lors, l'honorable Marcel Massé a réitéré publiquement cette opinion à maintes reprises. Ses déclarations sont toutefois ironiques considérant que le gouvernement n'a cessé de retarder le processus destiné à assurer la conformité de la LPFP avec la Loi sur les normes de prestations de pension. Le projet de loi C-78 ne comporte aucune disposition en vue du respect de la LNPP.
La LNPP de 1985, telle que modifiée par le projet de loi S-3, s'applique actuellement à tout emploi sous réglementation fédérale, à l'exception d'un «emploi par Sa Majesté du chef du Canada».
Les employés de la fonction publique ne veulent pas être une classe privilégiée ou désavantagée de la société canadienne. Ils veulent tout simplement jouir des mêmes droits et privilèges que tous les autres citoyens canadiens.
L'Institut recommande que le gouvernement modifie la Loi sur la pension dans la fonction publique afin de bien préciser qu'elle est assujettie à la LNPP, et qu'il modifie la LPFP pour s'en assurer. Les modifications devraient s'appliquer à la LPFP actuelle et à la LPFP modifiée par le projet de loi C-78.
En outre, la Loi sur les normes de prestations de pension devrait être modifiée afin d'abroger les paragraphes 4(5) et 4(6) qui excluent l'emploi par «Sa Majesté du chef du Canada».
Passons maintenant à la Loi de l'impôt sur le revenu, notamment à la modification proposée au paragraphe 71(1) de la LPFP qui dispose que:
-
Le gouverneur en conseil peut, afin que le régime de pensions prévu
dans la présente loi soit conforme aux dispositions de l'article
147.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu et de la Partie LXXXV du
Règlement de l'impôt sur le revenu, adopter des règlements
il s'agit donc ici d'assurer la conformité des deux textes.
Comme nous l'avons déjà mentionné, les fonctionnaires fédéraux ne demandent pas de traitement de faveur. Ils veulent tout simplement être assujettis aux mêmes lois que tous les autres Canadiens.
En conséquence, nous recommandons que le paragraphe 71(1) de la LPFP soit modifié en ces termes:
-
Le gouverneur en conseil doit, afin que le régime de pensions prévu
dans la présente loi soit conforme aux dispositions de l'article
147.1 de la Loi de l'impôt sur le revenue et de la Partie LXXXV du
Règlement de l'impôt sur le revenu, adopter des règlements
Passons maintenant à une disposition fort controversée. L'article 95 du projet de loi C-78 dispose que le ministre peut retirer tout excédent du CPRFP qui dépasse 110 p. 100 du passif estimé du régime, et qu'il doit retirer l'intégralité de l'excédent en sus actuel du CRPFP. Ce retrait doit se produire sur une période ne dépassant pas 15 ans.
Les lois provinciales et fédérales actuelles sur les pensions, qui ont été confirmées par les tribunaux, ne permettent pas le retrait unilatéral de l'excédent d'un régime de pensions quel qu'il soit. Au moment de se pencher sur les restrictions imposées sur le «remboursement de l'excédent à l'employeur», il ne faut pas oublier qu'il n'y a aucun lien entre celles-ci et la source ou la cause de l'excédent.
• 1540
L'article 9.2 de la Loi sur les normes de prestations de
pension de 1985, tel que modifié par le projet de loi S-3, traite
en ces termes de la question du remboursement de l'excédent à
l'employeur:
-
(1) Le paiement à l'employeur de tout ou partie de l'excédent,
indiqué au rapport actuariel déposé en application du paragraphe
12(3), est subordonné:
-
a) à la justification par l'employeur:
-
(i) soit de son droit à tout ou partie de l'excédent au titre du
régime de pensions;
-
(ii) soit de sa réclamation, en vertu du présent article,
concernant tout ou partie de l'excédent;
-
b) à l'observation du règlement pris au titre de l'alinéa 39h.1);
-
c) au consentement du surintendant.
Droit à l'excédent
-
(2) L'employeur a une réclamation concernant tout ou partie de
l'excédent si, après avoir été informés de son intention, au moins
les deux tiers des membres de chacun des groupes suivants lui
notifient leur consentement:
-
a) les participants;
-
b) les participants anciens et les autres personnes qui entrent
dans les catégories prévues par règlement.
Il est incompréhensible que le gouvernement légifère des normes pour le remboursement de l'excédent à l'employeur afin de protéger les participants au régime, puis qu'il décide d'exempter l'employeur de telles normes minimales. Les fonctionnaires fédéraux méritent la même protection en vertu de la loi que tous les autres employés régis par le gouvernement fédéral.
L'Institut recommande que la Loi sur la pension dans la fonction publique soit assujettie à la Loi sur les normes de prestations de pension et, plus particulièrement, que l'article 44 de la LPFP soit modifié afin de tenir compte des restrictions de la LNPP sur le retrait par l'employeur de l'excédent du régime.
En conclusion, les années 90 ont été extrêmement difficiles pour les fonctionnaires. Nous avons en effet assisté à l'érosion graduelle de nos droits, les uns après les autres. Les députés ont adopté nombre de mesures législatives qui ont bafoué nos droits.
En voici quelques exemples: gel des salaires pendant près de six ans au début des année 1990; suspension de l'arbitrage exécutoire, seul mécanisme autre que la grève susceptible de régler une impasse à la table de négociation; loi de retour au travail et imposition de conventions collectives par voie législative; et maintenant, ce projet de loi C-78, qui permettra au gouvernement d'accaparer l'excédent de 30 milliards de dollars du régime de pensions, produit en grande mesure par le gel prolongé des salaires.
Le régime de pensions est un élément important de la relation employeur-employés et il forme un tout avec la rémunération touchée pour les services fournis. Pour nous tous, le fonds de pension est un principe inviolable. La pension est le résultat de nombreuses années de travail et d'engagement envers l'employeur.
Nous vous demandons de revoir ce texte de loi au nom de la justice afin que les fonctionnaires fédéraux puissent être régis par les mêmes lois et jouir de la même protection que tous les autres citoyens canadiens.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Hindle.
Je donne maintenant la parole à M. Krause.
Vous pouvez commencer.
M. William Krause (président, Association des employé(e)s en sciences sociales): Merci, monsieur St. Denis.
L'Association des employé(e)s en sciences sociales est un agent négociateur qui représente 5 900 professionnels relevant d'une juridiction fédérale. Depuis quelque temps, et encore plus depuis le dépôt du projet de loi C-78 à la Chambre des communes, les membres de l'Association expriment une profonde inquiétude au sujet des pensions du secteur public.
Normalement, j'aurais l'honneur de vous présenter un mémoire exhaustif au nom des membres de l'Association. Toutefois, le leader du gouvernement en Chambre a jugé opportun d'annoncer le 23 avril que la durée du débat serait limitée. En conséquence, nous n'avons pas eu assez de temps pour préparer un mémoire exhaustif sur la question et nous avons dû nous contenter de la lettre que nous vous avons adressée à ce sujet.
Notre première remarque est que le projet de loi C-78 est mauvais tant sur le plan du contenu que de la procédure et ce, pour quatre raisons.
Premièrement, le projet de loi C-78 avance dans la filière législative sans débat public ni discussion en comité, malgré l'ampleur et la complexité de ses dispositions. Des groupes de retraités de tout le pays, les membres des Forces armées et les fonctionnaires n'ont pas assez de temps pour étudier attentivement le projet de loi, pour identifier leurs préoccupations et pour proposer des améliorations par la voie de réunions publiques. Il s'agit clairement d'un abus de pouvoir gouvernemental et d'une violation de la tradition démocratique.
• 1545
À titre de comparaison, les récentes modifications apportées
à la Loi sur les normes de prestations de pension l'ont été dans le
cadre d'un processus législatif de plus de deux ans qui a permis à
toutes les parties prenantes d'exprimer complètement leur point de
vue par le truchement de mémoires contenant des analyses et des
recommandations étoffées. Voilà comment le gouvernement fédéral
établit les règles s'appliquant aux autres employeurs alors que,
dans le cas présent, il se fait la faveur d'éliminer un examen
législatif complet.
Deuxièmement, en ce qui concerne la teneur du projet de loi, celui-ci accordera à toutes fins pratiques au gouvernement le droit de contrôler l'excédent de 30 milliards de dollars du régime de pensions. Toutefois, comme nous parlons ici du plus gros employeur du pays mais aussi du législateur qui réglemente les autres régimes de pensions, du secteur privé, les mesures prises par le gouvernement fédéral engendrent généralement une demande correspondante de la part des autres employés canadiens, qui souhaitent bénéficier d'avantages similaires.
Autrement dit, ce projet de loi fournira inévitablement aux gouvernements provinciaux soucieux de la fiscalité la justification de se servir dans les régimes de pensions de leurs employés.
Troisièmement, le projet de loi permet au gouvernement d'inclure l'excédent du nouveau régime dans ses recettes générales. Du point de vue des responsabilités et des contrôles sur le plan fiscal, nous croyons qu'il n'est ni souhaitable ni prudent de dépenser ailleurs les sommes prélevées auprès des employés à des fins précises.
Puisque le gouvernement, par le biais des ministres du Conseil du Trésor, aura le pouvoir de déterminer les cotisations et les prestations et par le fait même de contrôler l'importance de l'excédent, la loi pourrait en effet imposer une taxe sur l'emploi aux fonctionnaires, aux agents de la GRC et aux membres des Forces armées canadiennes.
Aussi, les nouveaux pouvoirs accordés aux ministres du Conseil du Trésor remplaceraient l'examen par le Parlement. Actuellement, le Parlement doit être consulté pour toute modification aux cotisations et aux prestations. Par conséquent, avec le projet de loi C-78, le rôle du gouvernement à titre de percepteur des impôts pourrait entrer en conflit avec ses responsabilités fiduciaires à titre d'administrateur du régime de pensions.
Quatrièmement, en principe tout excédent de régime de pensions a une importance des plus significatives puisque cet excédent sert de coussin pour protéger contre le sous-financement, les corrections de trajectoire de marché, les changements imprévus de la composition démographique et les erreurs de stratégie d'investissement. La confiscation par le gouvernement de l'excédent actuel de 30 milliards de dollars, ainsi que l'autorité que lui prévoient les modalités du nouveau plan de pension pour continuer de prendre possession des excédents manquent de sagesse et risquent de causer du tort aux régimes de pensions. Ce droit d'appropriation que veut se donner le gouvernement compromet la viabilité à long terme de ces régimes en échange des objectifs fiscaux à court terme du gouvernement de l'heure.
Enfin, avec une perspective sur l'avenir il faut convenir qu'un excédent est essentiel pour l'amélioration des prestations qui protégeront de la pauvreté nos gens du troisième âge. La confiscation des excédents accroît la vulnérabilité financière de nos gens du troisième âge et impose de nouvelles pressions sur nos programmes sociaux.
Notre deuxième grande préoccupation porte sur le fait que le projet de loi C-78 se fonde sur des hypothèses trompeuses et sur des demi-vérités. Le président du Conseil du Trésor, Marcel Massé, a laissé entendre à plusieurs occasions que l'excédent des régimes de pensions appartient aux contribuables puisqu'ils auraient à combler tout déficit des régimes.
Aucune obligation du genre n'est précisée dans le régime actuel, pas plus que dans celui que propose le gouvernement. De plus, l'histoire nous révèle que cela n'a jamais été le cas.
Dans les années 50, lorsqu'il a fait face à un manque à gagner dans le régime, le gouvernement de l'époque a fait passer les cotisations de 6 p. 100 à 10 p. 100. Lorsque les taux ont baissé, on les a laissés à plus de 6,5 p. 100. Lorsque l'indexation a été intégrée au régime, les primes des employés ont été augmentées de 1 p. 100. Au cours de la période du programme de lutte contre l'inflation, le gouvernement a pris des mesures pour restreindre l'indexation des pensions.
Il est donc évident que, lorsqu'il a fait face à un manque à gagner dans ses régimes de pensions, le gouvernement a pris des mesures pour augmenter les cotisations ou réduire les prestations et qu'il n'a pas laissé les contribuables combler le manque à gagner. Toutes les améliorations ont été faites aux frais des employés, y compris l'indexation.
M. Massé a expliqué diligemment comment le gouvernement paie actuellement 70 p. 100 des cotisations versées au régime et que cette loi lui permettra d'abaisser la cotisation de l'employeur au niveau plus acceptable de 60 p. 100.
Depuis 1996, le gouvernement a cessé de créditer le régime conformément à la loi. De plus, le gouvernement a omis en 1998 de créditer le plein montant des intérêts comme le veut la loi.
L'AESS, aux côtés d'autres syndicats, d'une association de retraités des Forces armées et d'une association de la GRC, a entamé une action en justice pour que le compte du régime soit crédité correctement. Le montant en souffrance atteint aujourd'hui environ 11 milliards de dollars et il est scandaleux que le plus important amortissement de l'excédent, se chiffrant à 5,9 milliards de dollars, provienne du régime de nos membres des Forces armées canadiennes qui sont mal rémunérés.
Selon ses propres comptes publics déposés au Parlement, le gouvernement n'a pas, depuis 1996, crédité un seul sou des contribuables canadiens à un seul de ses régimes de pensions. Toutes les cotisations ont été versées par les fonctionnaires, les agents de la GRC et nos propres Forces armées.
• 1550
À l'heure actuelle, le taux de contribution est de 0 p. 100
pour l'employeur et de 100 p. 100 pour les employés. Si le projet
de loi C-78 est promulgué, nous pourrons alors nous attendre que le
gouvernement amortisse l'excédent sur quelque 12 ans et qu'il ne
verse aucune cotisation dans aucun des régimes de pensions de ses
employés.
Ce taux de participation réel contraste avec le secteur privé où les primes de pension de 50 p. 100 des employés qui font partie d'un régime parrainé par l'employeur sont versées entièrement par ce dernier. Dans le secteur privé, la cotisation des employés qui contribuent à un régime de pensions atteint rarement 25 p. 100.
Notre troisième et dernier argument est que les fonctionnaires et tous les Canadiens méritent un traitement égal.
Il semble tout à fait évident que, lorsqu'on considère sa procédure d'adoption accélérée et ses hypothèses inexactes, le projet de loi C-78 est une loi qui vise à faire main basse, rapidement et en silence, sur les 30 milliards de dollars. Il est en quelque sorte motivé par une antipathie du reste du Canada à l'endroit de ses fonctionnaires, un sentiment de discorde dont le gouvernement tire avantage.
Une loi devrait se fonder sur des principes qui rapprochent les Canadiens, où les valeurs communes, les principes et les lois communes prévoient protections et avantages égaux. Depuis plus d'une décennie, la tendance au Canada a été de passer aux employés plus de contrôle sur les régimes de pensions et leurs excédents. Et pourtant, la direction donnée au projet de loi C-78 est exactement dans le sens contraire: les cotisations des employés augmentent tandis que l'employeur s'octroie le contrôle exclusif des excédents.
Pour nos membres, il n'est pas question de demander un traitement de faveur ou un avantage indu. Nous voulons simplement que les employés du gouvernement fédéral soient traités de la même façon que les employés participant à des régimes de pension privés.
Par conséquent, le projet de loi est inacceptable. Toutefois, si le gouvernement insiste avec ce projet, nous souhaitons que le comité se penche sur la série de recommandations suivantes.
Recommandation 1: Le projet de loi C-78 doit être modifié afin qu'il soit indiqué que le consentement des employés cotisant à un régime de pensions soit une condition nécessaire pour retirer toute somme excédentaire durant la vie du régime. Dans l'éventualité qu'une telle modification du projet de loi ne soit pas effectuée, nous recommandons que le projet de loi C-78 soit modifié afin que la loi et ses règlements soient conformes à la Loi sur les normes de prestations de pension.
Recommandation 2: Le projet de loi C-78 doit être modifié afin qu'il soit indiqué que la loi et ses règlements soient conformes à la Loi sur l'impôt au sujet de l'utilisation des excédents par l'employeur.
Recommandation 3: Le projet de loi C-78 doit être modifié afin que les conseils consultatifs soient de véritables conseils de gestion qui fonctionnent pleinement à titre de gestionnaires de régime, avec une participation élargie à tous les groupes qui y ont intérêt.
Recommandation 4: Le projet de loi C-78 doit être modifié afin que la gestion des excédents actuels des régimes ainsi que les décisions se rapportant aux congés de cotisations soient la responsabilité des conseils d'administration que nous proposons.
Ces recommandations, dans leur ensemble, visent un but: assurer que les employés de la fonction publique, les membres de la GRC et des forces armées ne soient pas traités différemment de tous les autres Canadiens et Canadiennes qui contribuent à un régime de pensions. L'AESS demande l'équité et non un traitement spécial.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Krause.
Nous allons ouvrir la période des questions avec Dave Chatters.
M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être venus exprimer leurs préoccupations au sujet du projet de loi. J'ai plusieurs questions à leur poser.
Tout d'abord, vous avez soulevé une question que moi-même et plusieurs de mes collègues avons déjà soulevée: d'après vous, y a- t-il une raison quelconque pour que le projet de loi soit adopté aussi vite que le souhaite le gouvernement? Nous semblons avancer vers un vote final à la Chambre des communes à la fin du mois, ce qui me semble tout à fait précipité.
En outre, si vous aviez plus de temps, que pourriez-vous faire de mieux?
Je vais vous donner toute ma liste de questions et vous pourrez y répondre l'une après l'autre.
Je n'ai entendu aucun témoin dire qu'il serait illégal d'envisager pour n'importe quel régime de pensions du secteur privé ce que le gouvernement envisage avec ce projet de loi. Je n'ai entendu non plus aucun témoin critiquer le fait que le gouvernement envisage d'octroyer des pouvoirs aussi vastes au ministre, puisqu'il aurait la possibilité de modifier les dispositions du régime de pensions sans même la toute petite protection qu'offrirait un débat public devant ce comité et à la Chambre des communes. À l'avenir, de tels changements n'auront pas à être soumis au comité ni à la Chambre. Cela m'inquiète mais personne n'en a encore parlé.
Troisièmement, auriez-vous une objection quelconque à ce qu'on laisse les 30 milliards de dollars dans le régime, afin de prévoir un coussin pour d'éventuels déficits futurs? Les actuaires que nous avons entendus hier ont dit que ce serait une éventualité tout à fait possible à plus long terme.
• 1555
Finalement, cette question de relations conjugales me met
vraiment hors de moi. Je veux parler du fait que quelqu'un
prétendrait avoir droit à des prestations de survivant sur la base
d'une relation conjugale.
À votre avis, cela veut-il dire qu'il faudra mettre sur pied une police du sexe ou appliquer un test pour prouver que la relation reste conjugale? Cela veut-il dire que l'employé ayant droit à la pension pourra tout simplement désigner n'importe qui comme bénéficiaire survivant ou que les couples vont en fait être obligés de passer un test confirmant leur relation conjugale?
Voilà les questions que je voulais poser, monsieur le président.
M. Steve Hindle: Est-ce que le projet de loi est traité à la va-vite? Oui. C'est incontestable. Or, nous ne voyons aucune raison à cela. Il n'y a actuellement aucune crise touchant le régime de pensions.
Certes, nous aimerions que le régime de pensions de la fonction publique se rapproche plus des régimes du secteur privé, du point de vue de la gestion et des investissements, mais nous ne voyons aucune nécessité de précipiter les changements qui sont proposés.
Que pourrions-nous faire si nous avions plus de temps? Nous pourrions poursuivre les discussions qui ont été engagées l'an dernier, et qui n'étaient pas sans mérite, au sujet du conseil de gestion et de la structure du nouveau régime. Nous pourrions poursuivre le débat dans la sérénité, sans avoir la menace d'un projet de loi coupant court à toute réflexion, ce qui est le cas aujourd'hui.
Nous n'avons pas soulevé directement la question des pouvoirs futurs du ministre mais nous en traitons indirectement dans nos recommandations puisque nous souhaitons que le régime soit assujetti à la Loi sur les normes de prestations de pension et à la Loi de l'impôt sur le revenu. De ce fait, le conseil de gestion serait assujetti aux mêmes règles qui s'appliquent actuellement aux régimes de pensions du secteur privé.
L'excédent pourrait certainement être maintenu dans le régime actuel. Comme je l'ai dit plus tôt, on pourrait mener le débat à son terme afin de savoir quel serait le meilleur usage possible de cet excédent, eu égard au coussin dont les retraités pourraient avoir besoin pour que leur niveau de vie ne soit pas pénalisé par un éventuel déficit futur.
Pour ce qui est des relations conjugales, je rends hommage au gouvernement d'avoir fait ces propositions qui garantiront que les couples de même sexe jouiront du même accès aux prestations que les couples hétérosexuels.
Je comprends ce que vous dites au sujet d'une éventuelle «police du sexe» mais je ne pense vraiment pas que l'on risque d'en arriver là. Le seul problème que l'on puisse envisager serait que quelqu'un conteste la relation.
À mon avis, cette proposition est une solution politique qu'a trouvée le gouvernement pour entériner les relations de même sexe et avancer vers les mariages de même sexe. Je pense que cela constitue un équilibre satisfaisant entre le devoir juridique du gouvernement à l'égard des personnes, quelles qu'elles soient, et ses devoirs politiques qui sont de ne pas créer de vagues excessives.
M. David Chatters: Voulez-vous dire que le proposition relative à la relation conjugale signifie que les personnes concernées devront prouver qu'elles ont une relation conjugale ou une relation de même sexe, plutôt qu'une simple relation de dépendance, ou que leur affirmation à ce sujet sera acceptée d'office?
M. Steven Hindle: J'ai l'impression qu'on l'acceptera d'office, tout comme on l'accepte aujourd'hui pour les couples hétérosexuels de common law. Ces couples ne sont aucunement tenus de prouver l'existence d'une relation conjugale et je ne vois pas pourquoi les couples de même sexe seraient traités différemment. Je pense que la proposition vise directement à régler ce problème particulier de la loi actuelle.
M. David Chatters: Merci, monsieur le président.
Le président: Je donne maintenant la parole à Pierrette.
M. William Krause: Pourrais-je répondre à la question, s'il vous plaît?
Le président: Veuillez m'excuser, monsieur Krause, vous avez la parole.
M. William Krause: Merci beaucoup.
Il est clair que ce projet de loi est précipité. Comme nous le disons dans notre lettre, le gouvernement a pris deux ans lorsqu'il a adopté une législation aussi exhaustive concernant les normes de prestations de pension.
Or, le régime actuel ne connaît manifestement aucune crise. En fait, il a un excédent de 30 milliards de dollars et on est donc loin d'une crise financière. Il n'y a aucune raison d'agir dans la précipitation.
Je pense que nous sommes tous des gens raisonnablement intelligents. Nous comprenons bien pourquoi le gouvernement se précipite—il essaie de faire main basse le plus vite possible sur les 30 milliards de dollars d'excédent.
Cela serait-il illégal dans le secteur privé? Bien sûr. Voilà pourquoi notre association a intenté des poursuites judiciaires contre le gouvernement. Et je peux vous dire que nous continuerons cette procédure même si ce projet de loi est adopté. Notre poursuite porte notamment sur des questions reliées à la Charte et nos arguments sont tout à fait crédibles.
• 1600
Pour ce qui est des pouvoirs du ministre, M. Hindle a
parfaitement raison de dire que ces pouvoirs seraient circonscrits
si le régime était assujetti à la LNPP et à la Loi de l'impôt sur
le revenu mais, avec la législation actuelle, les ministres peuvent
fixer les primes ainsi que les prestations. Ils peuvent créer
artificiellement un excédent, à leur guise, et s'en emparer en
toute impunité.
Au fond, ils peuvent imposer une nouvelle taxe sur les fonctionnaires et sur les membres des Forces armées et de la GRC. Cela ne nous plaît pas beaucoup. Au fond, c'est un impôt déguisé.
Pour ce qui est de laisser l'excédent dans le régime, notre position est tout à fait raisonnable. Nous souhaitons que le régime soit à la fois sain et dynamique.
J'ai dit dans mon mémoire, et je peux le répéter maintenant avec vigueur, que l'existence d'un excédent constitue pour les personnes âgées une protection contre le danger d'appauvrissement. À l'heure actuelle, 40 000 à 50 000 veufs et veuves bénéficient de ce régime et reçoivent une prestation mensuelle moyenne de seulement 650 $.
À mon sens, une partie de l'excédent devrait leur être consacrée. Certes, ce ne sont pas mes membres mais j'aimerais qu'ils soient bien traités. Je pense que nous avons le devoir d'y veiller.
Garder l'excédent dans le régime constituerait donc une protection pour les personnes qui risqueraient de s'appauvrir au cours des années. C'est quelque chose qu'il faut envisager très sérieusement.
Pour ce qui est des relations conjugales, je pense qu'on aurait pu s'exprimer autrement. Nous appuyons l'octroi des prestations aux couples de même sexe. Je crois cependant que l'on aurait pu atteindre cet objectif en parlant d'autre chose que de «relation conjugale». En ce qui me concerne, si quelqu'un me dit qu'il a une relation conjugale avec une autre personne, je le crois sur parole.
Le gouvernement aurait donc peut-être pu éviter de parler de relation conjugale. Il aurait peut-être pu trouver une autre expression qui lui aurait permis d'accorder des prestations de la catégorie du même sexe.
Donc, oui, il aurait pu s'exprimer autrement.
M. David Chatters: L'excédent de 30 millions de dollars est évidemment très important. Il me paraît clair qu'il existe, tout au moins dans les comptes.
Cela dit, si le futur conseil de gestion des investissements est aussi efficace qu'on le prévoit, l'excédent pourrait être encore plus élevé à l'avenir. La question de savoir quoi faire de l'excédent est donc tout à fait pertinente, pas seulement pour maintenant mais aussi pour le futur, n'est-ce pas?
M. William Krause: Puis-je répondre à cette question?
Pour ce qui est des investissements, j'ai certaines inquiétudes qui découlent des récentes déclarations d'Alan Greenspan, le chef de la FED aux États-Unis. Je veux parler de déclarations qu'il a faites sur l'éventualité de placer l'argent des services sociaux sur les marchés boursiers privés.
Sa préoccupation vient évidemment du fait que ce serait le gouvernement qui désignerait les membres de ces conseils. À son avis, demander à des personnes bénéficiant de nominations politiques de prendre des décisions économiques déboucherait sur des décisions qui ne seraient pas tout à fait efficientes, ce qui produirait des taux de rendement ne correspondant pas à ceux que l'on peut normalement attendre de la bourse. Les taux de rendement seraient invariablement plus faibles, l'expérience l'a montré.
Avec le système proposé, ma préoccupation est que tous les membres du conseil seraient nommés par le gouvernement, lequel détiendrait un pouvoir exclusif et absolu sur tout. Les autres parties prenantes, comme les retraités et les syndicats, n'auraient absolument pas leur mot à dire, que ce soit au sein du conseil de gestion ou pour superviser les décisions des personnes chargées d'établir les stratégies d'investissement.
J'ai donc aussi des réserves à ce sujet, surtout si l'on considère l'ampleur des excédents envisageables. Je crois que les taux de rendement seraient inférieurs à la normale.
Le président: Merci, Dave.
Pierrette, puis Ben.
[Français]
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Bonjour, messieurs.
Tout comme vous, je déplore que nous ayons peu de temps pour étudier ce projet de loi. Vous devez d'ailleurs savoir que mardi prochain, nous passerons à l'étape du rapport en Chambre et peut-être même à la troisième lecture, ce qui fera en sorte que tout sera bâclé la semaine prochaine. Comme nous sommes conscients de la chose, nous savons que les dés sont pipés et nous discutons aujourd'hui pour que vous nous expliquiez votre point de vue, mais vous êtes également conscients que le gouvernement n'écoutera pas une minute et quart ce que vous êtes en train de nous dire puisque tout est déjà prévu et fait.
Pour ma part, je suis quand même intéressée à savoir ce que vous avez à proposer. C'est pourquoi je vais m'adresser à vous, monsieur Krause, de l'Association des employé(e)s en sciences sociales au sujet de votre recommandation numéro 3, qui parle des conseils de gestion.
• 1605
J'aimerais que vous nous
expliquiez ce que vous voulez dire par
cette recommandation, qui est quand même très
succincte, pour
que je puisse voir exactement ce à quoi vous faites
allusion quand vous parlez des conseils consultatifs et
des conseils de gestion.
[Traduction]
M. William Krause: Nous aimerions que la gestion fondamentale du régime soit assurée par le conseil de gestion. Le conseil que nous envisageons engloberait des représentants de l'employeur, des syndicats et des retraités. Toutes les parties prenantes y seraient donc représentées. Leurs responsabilités seraient de superviser la gestion du régime, de fixer les prestations et les taux de cotisation, et de gérer les ressources et les excédents.
Au fond, le conseil assumerait les pouvoirs actuels des ministres du Conseil du Trésor. J'estime que confier ces pouvoirs au gouvernement est manifestement une erreur.
Nous avons proposé que le conseil dit consultatif qui est envisagé dans le projet de loi devienne un vrai conseil de gestion auquel participeraient pleinement toutes les parties prenantes, soit les retraités, tous les syndicats, les employés et, bien sûr, l'employeur, et que ses pouvoirs soient foncièrement ceux que détiennent aujourd'hui les ministres du Conseil du Trésor dans le cadre de la loi.
Nous pensons qu'avec un tel système, avec toutes les parties prenantes et avec les autres modifications que nous avons proposées—notamment pour assurer la conformité à la fois avec la Loi de l'impôt sur le revenu et avec la Loi sur les normes de prestations de pension—le régime bénéficierait d'une structure globale parfaitement efficace et ne prêtant à aucun abus.
[Français]
M. Claude Danik (agent de recherche, Association des employé(e)s en sciences sociales): Permettez-moi d'ajouter à l'intervention de M. Krause. Le principe de base que nous voudrions faire reconnaître est que les gens qui déposent leur argent dans un fonds doivent avoir le droit de décider où l'argent ira. Les prestataires qui ont déjà déposé de l'argent dans un fonds de pension et les cotisants à un fonds de pension doivent avoir le droit d'être représentés au conseil d'administration.
Mme Pierrette Venne: Qu'est-ce que vous faites des retraités qui ont déjà cotisé et qui ne sont plus dans le système? Il y aura peut-être éventuellement une baisse des cotisations pour les travailleurs actifs, et eux réclament actuellement une compensation. Que pensez-vous de cette position des retraités?
M. Claude Danik: Vous me demandez ce que je pense de la représentation des retraités au conseil?
Mme Pierrette Venne: Oui, et également ce que vous pensez de leur position actuelle. Ils demandent une compensation. Le projet de loi sera probablement adopté tel qu'il est. De la façon dont vont les choses, il n'y aura probablement pas beaucoup d'amendements de la part du gouvernement. Donc, le gouvernement aura le droit de réduire unilatéralement les cotisations de l'employeur ou des employé. Nos retraités ont déjà réclamé une compensation, et je vous demande ce que vous en pensez.
[Traduction]
M. William Krause: Nous pensons que les retraités méritent une compensation. Ce que nous avons proposé, évidemment, serait de maintenir dans le régime un solide excédent pour permettre aux retraités d'obtenir la bonification de leurs prestations.
Ce qui nous inquiète, c'est que, normalement, les survivants, c'est-à-dire les conjoints ou conjointes des employés, ne reçoivent environ que 50 p. 100 des prestations après le décès du conjoint. De fait, c'est probablement un crime, dans une certaine mesure, étant donné que les 50 p. 100 ont été établis en 1947 et que le système n'a jamais été révisé depuis. Le problème est que nous avons aujourd'hui des veufs et des veuves qui reçoivent en moyenne 650 $ par mois, ce qui est insuffisant pour vivre décemment.
Nous croyons que les retraités devraient être directement impliqués. Voilà pourquoi nous disons dans notre quatrième recommandation que les gestionnaires du régime—c'est-à-dire, le conseil—devraient avoir la responsabilité de déterminer les excédents du nouveau régime, ainsi que les congés de cotisations. Les retraités devraient être représentés au sein de ces conseils et avoir le droit de vote.
Je pense qu'ils devraient être impliqués de cette manière. Si l'on veut que le conseil de gestion agisse avec prudence et raison, il va falloir qu'il tienne compte des personnes qui sont le plus à risque et qui sont le moins capables de subvenir à leurs propres besoins, étant donné que leurs pensions subissent une érosion continue, année après année. La situation des retraités nous semble très préoccupante.
M. Walter Kelm (conseiller, Association des employé(e)s en sciences sociales): Puis-je ajouter un mot?
• 1610
Il faudrait peut-être envisager une méthode qui est courante
dans le secteur privé, c'est-à-dire que les retraités reçoivent une
augmentation ponctuelle de leurs prestations lorsqu'il y a dans le
régime plus d'argent que nécessaire. Si l'on a assez d'argent dans
le régime pour accorder une augmentation de 3 p. 100 ou de 5 p. 100
des prestations, pourquoi ne le ferait-on pas? C'est très courant
dans le secteur privé.
[Français]
Mme Pierrette Venne: Merci.
Mon autre question s'adresse aux représentants de l'Institut professionnel de la fonction publique. Dans votre recommandation de la page 9, en français, vous dites:
-
L'Institut recommande que
la LPFP soit assujettie à la LNPP,
et plus précisément que l'article 44 de la LPFP
soit modifié
afin de tenir compte des restrictions...
Cette recommandation est tellement touffue que j'aimerais que vous me l'expliquiez davantage pour qu'on puisse bien comprendre votre suggestion.
[Traduction]
M. Steve Hindle: Comme je l'ai expliqué, la Loi sur les normes de prestations de pension fixe certains critères que l'employeur doit respecter pour pouvoir puiser dans l'excédent d'un régime de pension. À notre avis, l'un des critères les plus importants est que l'argent qui est retiré soit destiné aux cotisants actuels et aux retraités qui touchent déjà des prestations. Un autre critère est qu'il faut obtenir le consentement d'au moins les deux tiers des membres de chacune de ces catégories.
Cela garantit que l'argent qui a été mis de côté, sous forme de salaire différé des employés, avant leur retraite, à l'intention précisément des gens qui ont pris leur retraite, est suffisant pour payer les prestations, et cela garantit aussi que les parties concernées ont leur mot à dire dans la gestion des investissements. Il faut en effet qu'elles aient la conviction que le retrait d'une partie de l'excédent par l'employeur ne nuira pas à leur propre situation financière.
Voilà le sens de cet amendement proposé.
[Français]
Mme Pierrette Venne: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, Pierrette.
Benoît, s'il vous plaît.
M. Benoît Serré (Timiskaming—Cochrane, Lib.): Je serai très bref, monsieur le président, car je n'ai qu'une remarque à formuler.
Je tiens à attirer l'attention du comité et, surtout, des témoins, sur le fait que le Parti néo-démocrate, qui se dit comme le grand défenseur des syndicats et des travailleurs de ce pays, n'a pas jugé ce projet de loi assez important pour envoyer au moins un de ses membres à cette réunion.
Le président: Votre remarque figurera au procès-verbal, bien qu'elle ne le devrait pas.
David.
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Je vais commencer avec M. Krause.
Vous dites dans votre exposé:
-
Quatrièmement, en principe tout excédent du régime de pension a une
importance des plus significatives puisque cet excédent sert de
coussin pour protéger contre le sous-financement.
Vous avez parfaitement raison à cet égard.
L'argument qu'a présenté le ministre ces derniers jours est que le régime souffrait autrefois d'un énorme déficit que l'on a réussi à combler au cours des années.
Ce qu'il veut dire, si je comprends bien, c'est qu'une somme se situant entre 10 milliards et 14 milliards de dollars—ce sont les chiffres que l'on nous a donnés—a servi à compenser cette dette apparente. Nous parlerons plutôt de déficit puisque c'est ce que dit le ministre. Nous ne voulons pas parler de...
Quoi qu'il en soit, seriez-vous d'accord, si c'est vrai, pour que le gouvernement ait accès à cette somme mais à rien de plus, c'est-à-dire que le reste des 30 milliards de dollars resterait dans le régime pour servir de coussin?
M. William Krause: Tout d'abord, si le régime était autrefois déficitaire, je n'en savais rien. C'est ma première réponse. Je n'accepte pas cette affirmation.
Deuxièmement, ce déficit a peut-être été créé par le gouvernement lui-même, par sa gestion des fonds investis dans le régime. On dispose de certaines données qui portent à tirer cette conclusion. Je donnerai la parole dans un instant à Walter, qui peut préciser cette affirmation.
Troisièmement, le gouvernement a déjà prélevé 11 milliards de dollars dans le régime. Il ne veut pas le reconnaître mais il sera tôt ou tard obligé d'en convenir devant les tribunaux. C'est probablement là que nous aurons la réponse à cette question.
Je répète que, selon moi, M. Massé ne dit pas toute la vérité sur cette question et que les informations qu'il diffuse sont trompeuses. Je ne l'ai pas vu remettre 14 milliards de dollars dans le régime.
Walter souhaite intervenir.
M. David Price: Quoi qu'il en soit, ce sont les chiffres dont nous disposons. Je suis le critique du portefeuille de la défense, ce qui fait je m'intéresse à la chose militaire, et je sais...
M. David Chatters: Mais nous ne sommes pas à la Chambre des communes.
M. David Price: ...que les militaires n'ont jamais eu de déficit. On ne devrait donc aucunement toucher à la partie qui les concerne.
Je réalise toutefois qu'il s'agit là d'un fonds commun où sont aussi versées leurs cotisations.
M. William Krause: Je comprends.
M. David Price: Cela correspond aux chiffres que nous avons entendus. Toutefois, même si c'était...
[Note de la rédaction: difficultés techniques]
...voilà ce qu'on peut dire. Théoriquement, au moins dans ce cas, on pourrait accepter si cet argent supplémentaire avait vraiment été investi dans le régime. Le reste, par contre, ne devrait absolument pas être touché parce que cela en fait manifestement partie.
M. William Krause: J'ai toujours pensé que les retraités, les syndicats et les représentants du gouvernement devraient être capables de discuter rationnellement de la manière dont on pourrait répartir cette somme, pour que nous ne soyons pas obligés de nous battre devant les tribunaux à ce sujet.
L'un des problèmes vient aussi du fait que le gouvernement propose ce projet de loi complexe pour accaparer l'argent. Au lieu de cela, il aurait dû organiser dès le départ de larges consultations avec toutes les parties prenantes, de façon à nous demander notre réponse à quelques réponses très simples: Comment souhaitons-nous que ce régime soit géré pour garantir les retraites des personnes âgées? Comment souhaitons-nous résoudre les problèmes de pauvreté des retraités et des conjoints survivants?
Si l'on avait commencé par ça, on comprendrait peut-être mieux la manière dont le régime devrait être géré. Hélas, le gouvernement a préféré agir autrement en décidant tout simplement de faire main basse sur l'argent. Il n'y a malheureusement pas eu ce dialogue important au départ.
J'aimerais que Walter réponde à votre question concernant le déficit. C'est probablement le meilleur spécialiste de ce régime.
M. Walter Kelm: Je précise que j'étais autrefois directeur des pensions de retraite et des avantages sociaux au Conseil du Trésor. Autrement dit, il y a peu de temps encore, j'étais de l'autre côté de la barrière.
Tout d'abord, le montant du soi-disant déficit ne cesse de changer. Restons-en donc à ce que dit le ministre, c'est-à-dire que le gouvernement a investi au cours des années 60 ¢ chaque fois que les employés en investissaient 40. Autrement dit, 1,50 $ chaque fois que les employés mettaient 1 $. Cela comprend tout déficit... et je ne sais pas quel est le chiffre qu'ils utilisent cette semaine mais ce chiffre est inclus dans les 60/40.
Considérez donc que le gouvernement a investi au cours des années 1,50 $ chaque fois que les employés ont mis 1 $. Selon Statistique Canada, les employeurs du secteur privé mettent en moyenne—et je souligne en moyenne—3 $ pour chaque dollar des employés. Donc, même si l'on accepte la thèse du gouvernement, celui-ci n'a mis dans le compte que la moitié de la moyenne du secteur privé.
Finalement, on peut se demander pourquoi il y a eu un déficit. Eh bien, c'est parce que la loi autorise le gouvernement à fixer le taux d'intérêt appliqué à l'argent qu'il emprunte aux retraités, ce qui lui permet d'emprunter à très bas prix. Les chiffres donnés par le ministre en février montrent que c'est à cause de la manière dont le gouvernement a traité l'argent des employés que les coûts du régime ont été d'environ 15 p. 100 à 20 p. 100 supérieurs pour chaque point de pourcentage. Ce sont les fonctionnaires qui y ont perdu.
Le gouvernement a commandé dans les années 80 une étude à la firme William M. Mercer Limited, et le vérificateur général a lui aussi effectué une étude. Les conclusions ont été que si le gouvernement n'avait pas agi comme s'il était au-dessus des lois, en ce qui concerne les fonds de pension, le régime de pensions du secteur public aurait gagné entre 1 p. 100 et 2,5 p. 100 de plus que ce qu'il a gagné en réalité.
Autrement dit, les contribuables et les employés ont payé jusqu'à 50 p. 100 de plus qu'ils ne l'auraient dû au cours des trois ou quatre dernières décennies. Voilà l'explication du déficit. Le gouvernement a emprunté l'argent à vil prix. À ma connaissance, c'est le seul emprunteur du Canada qui peut fixer lui-même le taux d'intérêt de l'argent qu'il emprunte. Croyez-moi, il a fait une bonne affaire.
Il ne faut donc pas se surprendre qu'il y ait eu un déficit.
M. David Price: Vous dites dans votre première recommandation que «le projet de loi C-78 devrait être modifié afin qu'il soit indiqué que le consentement des employés...» Comment ce consentement serait-il accordé? Par un conseil?
M. William Krause: Non, il faudrait que le régime individuel...
C'est courant, je pense, en Ontario, par exemple. Pour pouvoir prendre une partie des fonds excédentaires, il faut avoir l'accord des deux tiers des cotisants actuels du régime et des deux tiers des prestataires.
• 1620
Cela constituerait la meilleure recommandation. Je pourrais
vous en proposer une autre, utilisant la Loi sur les normes de
prestations de pension, mais nous préférons une formule
garantissant l'obtention du consentement d'une majorité
substantielle de chaque catégorie.
M. David Price: Bien. Merci.
Le président: Merci, Dave.
Tony sera le suivant. Je n'ai pas d'autres noms sur ma liste pour le moment. Si vous avez d'autres questions à poser, veuillez me l'indiquer.
Tony.
M. Tony Ianno (Trinity—Spadina, Lib.): Merci beaucoup.
Pourriez-vous me dire, monsieur Hindle, si vous connaissez un régime quelconque en vertu duquel le gouvernement garantirait le déficit et partagerait l'excédent avec les employés?
M. Steve Hindle: Un régime légiféré? Cela montre la difficulté d'établir un régime par voie législative. Il n'est pas rare de trouver ce type d'arrangement dans le secteur privé. L'Institut professionnel lui-même a un régime de cette nature. Je crois que c'est aussi le cas du régime de la Commission des pensions de l'Ontario, ainsi que du fonds de fiducie du SEEFPO.
M. Tony Ianno: Y a-t-il partage des risques avec l'employeur ou seulement...
M. Steve Hindle: C'est l'employeur qui paie si le régime est déficitaire.
M. Tony Ianno: Donc, il partage l'excédent avec les employés.
M. Steve Hindle: Il n'y a aucune garantie qu'il partagera l'excédent avec les employés mais l'excédent est possible. L'employeur n'a pas le droit unilatéral de s'emparer de l'excédent. Par contre, il a l'obligation de compenser tout déficit.
M. Tony Ianno: Bien. Donc, il ne partage pas nécessairement l'excédent avec les employés.
M. Steve Hindle: Non, mais il n'a pas le droit non plus de s'en emparer unilatéralement.
M. Tony Ianno: Je vois. Connaissez-vous d'autres juridictions où existent des régimes légiférés...
M. Steve Hindle: Non.
M. Tony Ianno: Bien.
Dans un article du Ottawa Citizen du 27 février 1998, on indique que vous auriez dit être prêt à laisser le gouvernement avoir l'excédent à condition qu'il promette de compenser tout déficit éventuel.
Cette citation est-elle exacte?
M. Steve Hindle: C'est probablement exact.
M. Tony Ianno: Bien. Merci.
Monsieur Krause...
M. Steve Hindle: Vous ne voulez pas savoir si c'est encore mon avis aujourd'hui?
M. Tony Ianno: Je voulais simplement savoir si c'était une citation exacte.
M. Steve Hindle: Tout comme le débat peut évoluer au sujet de l'excédent ou du déficit, ma position aussi a pu évoluer. Même si cette citation est exacte, la situation peut avoir changé, ce dont vous conviendrez certainement, à titre de politicien.
M. Tony Ianno: Absolument. C'est pourquoi je vous ai seulement demandé si c'était une citation exacte. Je vous remercie beaucoup de votre réponse.
Monsieur Krause, avez-vous participé au processus l'an dernier, d'une manière ou d'une autre?
M. William Krause: L'AESS n'a participé à aucun processus de négociation avec le gouvernement au sujet des pensions de retraite. Certes, avec nos divers collègues et avec d'autres groupes qui nous appuient, nous sommes actifs depuis plus d'un an et demi devant la Cour fédérale, où notre argument est que le gouvernement a violé la loi actuelle en ne cotisant pas au régime depuis 1996, comme il y est tenu par la loi, et en ne créditant pas l'intérêt sur les pensions, ce qu'il a fait l'an dernier.
M. Tony Ianno: Vous êtes donc généralement assez conscient du processus global. Avez-vous envoyé des informations quelconques au gouvernement, à part dans le cadre du processus juridique, pour exprimer votre opinion?
M. William Krause: Nous avons analysé la situation et avons envoyé des informations à nos membres. Les informations que nous destinons à nos membres sont aussi communiquées aux membres du gouvernement.
M. Tony Ianno: Et vous vous occupez de cette question depuis un an et demi?
M. William Krause: Des aspects juridiques, oui, mais nous nous occupons depuis beaucoup plus longtemps de toute la question du régime de pensions.
M. Tony Ianno: Depuis combien de temps?
M. William Krause: Depuis les années 80, si je me souviens bien. Nous sommes actifs dans ce domaine depuis ce temps-là. Je sais que le gouvernement souhaitait à l'époque éliminer une garantie d'indexation. Déjà là, le gouvernement cherchait une manière de faire payer les employés. Nous avons dit non. Nous avons résisté et nous nous sommes joints à d'autres syndicats pour le faire. Nous voulions conserver la garantie d'indexation que nous avions payée.
M. Tony Ianno: Il y a donc fort longtemps que vous vous occupez de cette question.
M. William Krause: L'Association, oui. J'en suis le président depuis sept ans mais le dossier des pensions n'est pas actif depuis ce temps-là.
M. Tony Ianno: Je vois. Quand est-il redevenu actif, au cours des sept années de votre présidence?
M. William Krause: Depuis trois ou quatre ans, je crois. Nous avons écrit aux présidents successifs du Conseil du Trésor pour les interroger sur la gestion des fonds, sur les données publiées dans les Comptes publics du Canada, etc.
• 1625
Bien sûr, cela nous a permis de réaliser ce que faisait le
gouvernement et de prendre les mesures juridiques nécessaires.
M. Walter Kelm: Je voudrais ajouter un mot à ce sujet. Je conseille l'AESS depuis un certain temps et...
M. Tony Ianno: Depuis combien de temps?
M. Walter Kelm: Vingt ans.
L'une des raisons pour lesquelles nous avons intenté des poursuites est que nous n'avons jamais obtenu de réponse satisfaisante du président du Conseil du Trésor aux nombreuses lettres que nous lui avons adressées. La seule manière d'obtenir une réponse sérieuse était d'aller en cour.
M. Tony Ianno: Quand avez-vous quitté le Conseil du Trésor, monsieur?
M. Walter Kelm: J'ai pris ma retraite en 1990.
M. Tony Ianno: Donc, vous avez conseillé l'AESS dans l'intérim—pendant 11 ans si je calcule bien—alors que vous étiez encore au Conseil du Trésor?
M. Walter Kelm: Vous dites?
M. Tony Ianno: Vous avez joué le rôle de conseiller de l'AESS alors que vous étiez encore employé du Conseil du Trésor?
M. Walter Kelm: J'avais souvent l'occasion de rencontrer les représentants de l'Association de l'autre côté de la table.
M. Tony Ianno: Oh. Mais vous n'étiez pas leur conseiller?
M. Walter Kelm: Non, non.
M. Tony Ianno: Veuillez m'excuser, j'avais mal compris. J'avais compris que vous aviez été le conseiller de l'AESS pendant 20 ans, alors que vous étiez fonctionnaire jusqu'en 1990. Si l'on prend 1979 et 1990, cela fait 11 ans de différence. Il n'est donc pas exact de dire que vous avez conseillé l'AESS au moment où vous étiez encore un employé du gouvernement?
M. Walter Kelm: J'avais mal compris votre question. Je traite avec l'Association depuis 20 ans.
M. Tony Ianno: Je vois.
M. Walter Kelm: Jusqu'en 1990, nous nous sommes trouvés de chaque côté de la table de négociation puisque je représentais le Conseil du Trésor. Depuis 1990, je conseille l'Association, tout comme d'autres groupes. Je ne m'occupe pas seulement des pensions du secteur public mais aussi de questions concernant les avantages sociaux des personnes âgées, dans le cadre de l'Association canadienne des retraités.
M. Tony Ianno: Pourquoi ne leur avez-vous pas donné ce qu'ils voulaient, ou pourquoi n'avez-vous pas recommandé au gouvernement, à l'époque...
Le président: À l'ordre.
Tony, je ne pense pas que...
M. Tony Ianno: Mais c'est une information indispensable, pour la transition. En 1990, il quitte le gouvernement et il se met à conseiller l'AESS. J'aimerais savoir ce qui s'est passé depuis.
Le président: Est-ce relié au projet de loi?
M. Tony Ianno: Oui, dans la mesure où j'ai besoin de savoir combien de temps les gens ont pu consacrer à cette question afin de comprendre, lorsque nous parlons de l'historique, qu'il s'agit d'un processus continu. Je veux savoir comment ça marche.
Le président: Peut-être pourriez-vous conclure votre question?
M. Tony Ianno: Certainement.
Voudriez-vous seulement...
M. Walter Kelm: Mon rôle le plus important concerne probablement l'AESS, et aussi l'ANRF, lorsque le gouvernement avait proposé le projet de loi C-55 pour essayer d'éliminer l'indexation par voie réglementaire.
M. Tony Ianno: C'était en 1980?
M. Walter Kelm: Non, en 1992 ou 1993, je ne sais plus exactement.
M. Tony Ianno: Mais, à ce moment-là, vous n'étiez plus fonctionnaire. Vous étiez conseiller indépendant de l'Association?
M. Walter Kelm: Exactement.
M. Tony Ianno: Ce que je voudrais savoir, c'est ce qui a changé, en 1989-1990, lorsque vous étiez le conseiller des gens qui négociaient avec l'AESS.
M. Walter Kelm: À ce moment-là, je ne m'occupais pas du tout de pensions de retraite. J'étais directeur de l'élaboration des politiques au Conseil du Trésor.
M. Tony Ianno: Pas des pensions, alors?
M. Walter Kelm: Non, pas des pensions.
M. Tony Ianno: Bien.
M. Walter Kelm: C'était 10 ans avant que je m'occupe des pensions de retraite.
M. Tony Ianno: Pendant les 11 années où vous avez été de l'autre côté de la table de négociation, par rapport à l'Association, que pensiez-vous de cette question des pensions?
M. Walter Kelm: À titre de directeur de l'élaboration des politiques, j'ai eu à connaître de nombreuses questions, notamment de celle-là.
M. Tony Ianno: Vous vous êtes donc occupé de pensions dans ce contexte?
M. Walter Kelm: De temps à autre.
M. Tony Ianno: Veuillez m'excuser, monsieur le président, mais je suis curieux...
M. William Krause: Monsieur le président, je tiens à exprimer mon objection.
Le président: À l'ordre.
Tony, je ne suis pas sûr que cela concerne le projet de loi.
M. Tony Ianno: Bien. Ce sont donc les témoins qui décident... du point de vue du processus accéléré, ou... Je voudrais simplement savoir comment ça marche.
Le président: Je vous dis simplement que je ne pense pas que vos questions actuelles concernent le projet de loi.
M. Tony Ianno: Vraiment?
Le président: Tout à fait. D'accord?
M. Tony Ianno: Bien, monsieur le président. Je respecte votre décision.
Le président: Merci. Avez-vous d'autres questions à poser?
M. Tony Ianno: Non, merci.
Le président: Parfait.
Dave Price, puis Dave Chatters.
M. David Price: Monsieur Hindle et monsieur Krause, vous avez tous deux exprimé la crainte que le gouvernement n'en arrive à fixer les primes des pensions de retraite à un niveau un peu plus élevé qu'il ne le devrait, de façon à produire un excédent artificiel qu'il pourrait ensuite accaparer.
Avez-vous une idée quelconque de la manière dont nous pourrions prévenir une telle manoeuvre?
M. Steve Hindle: La solution la plus simple consisterait à créer le conseil de gestion des pensions, en lui donnant le pouvoir de superviser la gestion du régime de façon à s'assurer que les primes correspondent aux niveaux strictement nécessaires.
C'est tout à fait normal. Cela déboucherait sur des changements tout à fait normaux en ce qui concerne les primes, les cotisations et les prestations. Je pense que ce serait la meilleure protection à offrir aux personnes les plus directement concernées par la bonne marche du régime, c'est-à-dire les cotisants et les retraités. Il faut qu'ils participent à la gestion.
M. David Price: Vous n'êtes donc pas du tout satisfait du type de conseil actuellement proposé?
M. Steve Hindle: Exactement.
M. David Price: Bien. Merci.
Le président: Dave Chatters.
M. David Chatters: Pour revenir à la question de M. Ianno, je me demandais ce qui avait pu changer entre le moment où vous avez fait cette déclaration et aujourd'hui, où vous exprimez une position tout à fait contraire.
M. Steve Hindle: Ce n'est pas exactement une position tout à fait contraire. À l'époque, je pensais qu'il y avait une vraie possibilité que le gouvernement se mette à bouger. C'était une sorte de carte de négociation que j'avais posée sur la table pour voir si le gouvernement allait bouger.
Évidemment, cette citation suppose que je peux agir de manière aussi cavalière que le gouvernement semble le faire actuellement à l'égard de l'excédent et que je pensais que ce que je pouvais dire aurait vraiment une influence sur la décision relative à l'excédent.
Ayant eu la possibilité de discuter avec les gens que je représente, ainsi qu'avec les représentants d'un nombre élevé d'autres cotisants au régime, et vous pourrez parler ici de révélation, d'avoir vu la lumière ou de quoi que ce soit d'autre mais je pense qu'il est important à cette étape de reconnaître qu'il est nécessaire de poursuivre le débat sur le projet de loi et de faire en sorte qu'il y ait plus de discussions entre l'employeur et le gouvernement et les membres du régime de pensions sur ce que l'on devrait faire de l'excédent de 30 milliards de dollars.
M. David Chatters: Mais si vous ne pensiez pas vraiment à l'époque avoir de chances réelles d'influer sur la décision du gouvernement, pensez-vous en avoir plus aujourd'hui, alors que le projet de loi a été déposé?
M. Steve Hindle: Je pense que ce gouvernement fera ce qu'il veut sans consultation publique adéquate. Mais il n'empêche que je suis ici aujourd'hui. Je discute toujours avec les députés, individuellement et collectivement, pour exprimer nos réserves. J'ai toujours un faible espoir que ce que je dis finira par influer, ne serait-ce que de manière minime, sur les députés, qu'ils fassent ou non partie du Cabinet, et leur fera comprendre qu'ils avancent trop vite et qu'ils devraient engager de plus larges consultations avec la population.
M. David Chatters: Je ne saurais mieux exprimer la raison pour laquelle je suis moi aussi présent aujourd'hui.
Je suis déçu que vous n'ayez pas répondu à la question en rappelant les déclarations du premier ministre sur la TPS.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Chatters.
Lorne.
M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Veuillez excuser mon retard, monsieur le président. Je remplace Yvon Godin qui est au congrès du CTC. Je présente mes excuses aux témoins.
[Note de la rédaction: Inaudible]
M. Tony Ianno: ...
M. Lorne Nystrom: J'ai essayé de vous recommander, Tony, mais ça n'a pas marché. C'est un bonhomme de la Colombie-Britannique qui va gagner. En tout cas, ce sera demain, pas aujourd'hui.
Ma question porte sur l'excédent. Que pensez-vous de la décision du gouvernement au sujet de l'excédent, par rapport à ce qui se fait dans les régimes de pension privés? Pourriez-vous nous donner des précisions là-dessus?
Encore une fois, veuillez excuser mon retard, au cas où vous auriez déjà répondu à cette question.
M. Steve Hindle: Le gouvernement entend se donner un accès illimité non seulement à l'excédent actuel mais aussi à tout excédent futur, probablement à compter du 1er avril 2000. Aucun autre employeur ne pourrait s'emparer ainsi d'un excédent sans respecter certains critères établis dans la loi. Dans son rôle d'employeur, le gouvernement continue de se placer au-dessus des lois régissant les régimes de retraite.
M. William Krause: Je tiens aussi à souligner une remarque formulée dans la lettre que nous avons adressée au comité. Par le truchement des ministres du Conseil du Trésor, le gouvernement sera en mesure de fixer la taille de l'excédent, étant donné que c'est lui qui fixera les taux à la fois de cotisation et de prestation.
• 1635
En agissant ainsi, il aura la possibilité de créer un excédent
et de le transférer dans ses recettes générales, ce qui signifie
qu'il pourra à toutes fins pratiques lever un impôt spécial auprès
des fonctionnaires, des membres des Forces armées et des membres de
la GRC. Avec ce projet de loi, il aura la possibilité de toucher un
impôt supplémentaire pour l'intégrer à ses recettes générales.
Ce régime me paraît donc très dangereux. Non seulement le gouvernement n'agira pas comme tous les autres employeurs du pays, pour ce qui est de la gestion de l'excédent, mais il pourra en fait créer une sorte de nouvel impôt. Je crois que le gouvernement sera à l'évidence en situation de conflit d'intérêts puisqu'il sera à la fois le producteur des recettes et l'administrateur du régime.
Je songe d'ailleurs à un autre conflit d'intérêts. Quels que soient les avantages sociaux accordés aux fonctionnaires à la table de négociation, le gouvernement pourra fort bien les récupérer indirectement en augmentant les cotisations au régime de pensions et en s'emparant ensuite de l'excédent qui en résultera.
Il s'agit donc là d'une forme de comportement et d'un degré de pouvoir que personne d'autre ne possède, que ce soit dans la sphère provinciale ou dans le secteur privé, et aussi d'un phénomène de création d'un impôt déguisé.
M. Lorne Nystrom: J'allais vous demander si ce genre de chose existe ailleurs Canada ou en Europe de l'Ouest ou aux États-Unis. Savez-vous s'il y a un précédent quelconque pour ce type de mesure concernant l'excédent d'un régime de pensions? y a-t-il un autre modèle qui...
M. William Krause: Non, je pense que ce cas est tout à fait unique. Cette législation a été conçue pour faire main basse sur 30 milliards de dollars. Voilà son objectif.
Écoutez, si le gouvernement voulait vraiment rénover le régime, je pense qu'il passerait beaucoup de temps à consulter toutes les parties prenantes, c'est-à-dire les retraités et les diverses associations concernées. Nous aurions eu de longues discussions, franches et ouvertes, sur les principes fondamentaux de gestion du régime avant de passer à des recommandations et à des modifications détaillées comme celles qui nous sont soumises.
Cela dit, comme l'objectif du gouvernement n'est pas de moderniser le régime de pensions afin de mieux répondre aux besoins de ses membres mais uniquement de faire main basse sur le magot, autant le reconnaître tout de suite.
M. Steve Hindle: Je ne connais aucun précédent à ce sujet, dans aucune autre démocratie occidentale.
M. Lorne Nystrom: Je suis vraiment préoccupé par toute cette question de démocratie au Canada. Il me semble qu'avant de proposer un changement aussi important, le gouvernement aurait dû obtenir l'approbation des gens qui ont cotisé au régime pendant de nombreuses années. Il devrait y avoir non seulement des consultations mais aussi un processus pour obtenir l'accord des gens qui ont créé l'excédent. Évidemment, rien de tout cela n'a été fait.
Avez-vous demandé aux représentants du gouvernement s'ils seraient prêts à accepter un vote libre sur cette question, en guise de position de repli? Cela ne mettrait aucunement en cause la survie du gouvernement.
Évidemment, c'est le premier ministre qui décide si quelque chose met ou non en cause la survie de son gouvernement. S'il le veut, il peut décider que la couleur des cheveux du président est une question fondamentale pour la survie de son gouvernement.
Le président: Essayez d'éviter les digressions spécieuses, Lorne.
M. Lorne Nystrom: Mais cela concerne tout à fait le projet de loi.
Le président: Vous souhaitez faire un rappel au Règlement, Tony?
M. Tony Ianno: Tous les votes à la Chambre des communes sont des votes libres. Chaque député décide lui-même comment il va voter.
Le président: Je ne suis pas sûr que ce soit un rappel au Règlement.
J'aimerais que l'on ne s'écarte pas du projet de loi, Lorne, s'il vous plaît.
M. Lorne Nystrom: Mais ce que je dis concerne parfaitement le projet de loi.
Le président: J'ai déjà fait la même remarque à d'autres membres du comité. Vous avez le droit d'exprimer votre avis mais ne vous écartez pas du sujet.
M. Lorne Nystrom: La question est de savoir si ce projet de loi sera assujetti au processus réglementaire usuel ou si vous avez pensé à demander un vote libre. Il est évident que la plupart des votes qui se tiennent en Chambre ne sont pas des votes libres. Tout le monde le sait. Il arrive souvent que le premier ministre décide qu'une question sera une question de confiance.
Comme position de repli, étant donné que la mesure envisagée constitue quelque chose de tellement radical et de tellement différent—pas seulement pour le Canada mais dans le monde entier—pensez-vous qu'il pourrait y avoir un vote libre à la Chambre des communes, ce qui permettrait aux Tony Ianno de ce monde de voter selon leur conscience et selon les pressions de leur électorat? Ce serait plus intéressant que de les voir voter selon les instructions de leur whip.
Évidemment, il y a des votes libres sur les projets de loi d'initiative privée mais pourquoi ne pourrait-on pas faire la même chose avec un projet de loi comme celui-ci?
M. William Krause: Je ne pense pas que ce serait opportun. En fait, je pense que cela détournerait l'attention du fait qu'il s'agit d'un projet de loi profondément vicié.
Je crois qu'il serait préférable que le comité et, je l'espère, le Sénat se penchent sérieusement sur le texte et reprennent par exemple le thème que nous avons soulevé des personnes âgées et des veufs et veuves qui reçoivent des sommes insuffisantes au titre de ce régime, dans le but d'essayer de chercher à améliorer leur situation en proposant des amendements.
Nous préférerions qu'on propose des amendements pour améliorer le projet de loi. Si nous ne pouvons pas obtenir la refonte de la législation que nous souhaitons, nous espérons que les députés pourront proposer d'autres modifications qui permettront quand même d'améliorer quelque peu la situation. Évidemment, tout cela prend du temps et le gouvernement a clairement montré qu'il n'est pas prêt à en donner.
• 1640
À la question: «Comment vole-t-on 30 milliards de dollars?»,
la réponse est: «En vitesse et en douce.»
M. Lorne Nystrom: Il s'agit donc du vol de 30 milliards de dollars. C'est probablement le plus gros coup fourré de toute l'histoire du Canada.
Des voix: Oh!
M. Lorne Nystrom: Je me demande si Tony pourrait nous expliquer la situation.
Le président: À l'ordre.
Merci, Lorne.
M. Lorne Nystrom: Je vous en prie.
Le président: Comme il n'y a plus d'autres questions, je remercie les témoins qui sont venus répondre à nos questions sur le projet de loi C-78.
Je rappelle aux membres du comité qu'il y aura deux réunions demain, une à 8 h 30 sur les prévisions budgétaires de Ressources naturelles Canada, et l'autre à 11 heures sur l'examen article par article du projet de loi C-78.
La séance est levée.