CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 16 octobre 2018
[Énregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Bonjour et bienvenue.
Il s’agit de la 125e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude des enjeux et possibilités liés à la migration pour le Canada au XXIe siècle.
Je remarque un certain nombre de remplaçants aujourd’hui. C’est très bien. Bienvenue.
Je croyais que Bill Casey était ici, mais il est parti.
Pour mettre les remplaçants au courant de la situation, il s’agit d’une étude plus longue que celles que nous menons habituellement dans notre comité. Elle porte sur la migration au XXIe siècle. Il s’agit d’examiner les défis, les raisons pour lesquelles les gens se déplacent et leurs lieux de destination. Il s’agit à la fois de la migration forcée des réfugiés et de la migration planifiée ou volontaire des migrants économiques et de ceux qui y sont liés, comme les étudiants ou les migrants temporaires, etc.
Il s’agit d’une étude d’ensemble qui vise à déterminer quelle devrait être la réponse du Canada face à un monde qui se déplace plus que jamais dans l’histoire de l’humanité. Nous faisons cette étude. Nous avons eu plusieurs réunions.
Nous accueillons aujourd’hui Son Excellence Peteris Ustubs, représentant de l’Union européenne ici, à Ottawa; et Brice de Schietere est avec lui.
Ils ont très gracieusement accepté notre invitation à venir nous présenter une perspective européenne.
Au cours de la deuxième heure de la séance, nous ferons un suivi de certaines de ces questions lors d’une séance à huis clos. Je voulais simplement vous prévenir que les questions que nous poserons au cours de la première heure pourraient également éclairer notre discussion à huis clos.
Votre Excellence, vous avez la parole. Merci d’avoir accepté notre invitation.
Merci beaucoup de l’invitation. Merci beaucoup de me donner l’occasion de venir témoigner.
En ce qui concerne ce que je vais dire au sujet de la migration et des rapports que vous préparez, je peux vous assurer qu’il y a beaucoup de choses que l’Union européenne et l’Europe peuvent dire au sujet de l’évolution actuelle et des initiatives actuelles concernant la migration. J’espère que nos conversations d’aujourd’hui vous aideront à rédiger votre rapport en tenant compte de perspectives et de points de vue différents.
La migration n’est pas un phénomène local et ne peut pas être réduite à un défi national ou même régional. Les guerres, la violence et les persécutions ont porté les déplacements forcés à un nouveau sommet en 2017 pour la cinquième année consécutive. Par conséquent, nous parlons d'un phénomène qui devient en quelque sorte permanent.
À la fin de 2017, 68,5 millions de personnes avaient été déplacées. Parmi ce nombre, 16,2 millions de personnes ont été déplacées en 2017 seulement, ce qui indique un nombre énorme de personnes en déplacement. Si on le calcule plus précisément, c’est l’équivalent de 44 500 personnes qui sont déplacées chaque jour, soit environ une toutes les deux secondes. Ces chiffres sont éloquents. Il s’agit vraiment d’un phénomène mondial qui se poursuit, qui risque de se poursuivre dans un avenir prévisible et qui aura un impact majeur sur nos sociétés, sur nos économies et sur nos débats politiques.
L’Union européenne, en raison de sa situation géographique, de son ouverture intrinsèque, de ses interconnexions avec les routes commerciales et de voyage, et de ses frontières ouvertes, est confrontée à ce défi. L'UE est située à proximité de plusieurs zones de crise. Notre situation est différente de celle des autres pays qui ont des frontières physiques sécurisées.
Nous sommes aussi près de certains des pays où la croissance démographique est la plus forte. Pour vous donner un exemple, le Nigeria compte aujourd’hui moins de 200 millions d’habitants, et on estime qu’il en aura un milliard à la fin de ce siècle. C’est un défi énorme, mais j’ajouterais que c’est aussi une opportunité considérable.
Étant un phénomène mondial, la migration exige une attention mondiale, une volonté politique et une vision commune mondiale. À cet égard, nous sommes reconnaissants au Canada de demeurer un partenaire solide dans les tribunes internationales de l’ONU et du G7, appelant à la solidarité et à la gestion des migrations mondiales. Nous reconnaissons également la contribution du Canada à la réinstallation de 40 000 réfugiés syriens depuis 2015.
Après cette introduction brève, mais nécessaire, permettez-moi de répondre au premier point soulevé par votre honorable comité, c’est-à-dire l’état de la situation dans l’Union européenne ou dans son voisinage.
Il est juste de dire qu’une combinaison de facteurs a mené, en 2015 et 2016, à un afflux sans précédent de migrants irréguliers vers l’UE. Il est également juste de dire que l’UE n’était pas bien préparée pour un événement de cette ampleur. Je n’entrerai pas dans les détails. Il suffit de dire qu’entre 2015 et 2017, l’UE a reçu plus de 3,4 millions de demandeurs d’asile.
Pour aggraver le problème, la grande majorité de ces demandeurs sont arrivés dans un nombre très limité de pays, qui ne disposaient pas de structures suffisantes pour gérer un tel afflux. Cela dit, l’UE est aujourd’hui bien mieux préparée à faire face au phénomène migratoire et à relever le défi.
Nous avons fait d’importants progrès au cours des 18 derniers mois. Nous avons endigué la migration irrégulière. Les arrivées ont été considérablement réduites, de 97 % sur la route méditerranéenne orientale et de 80 % sur la route méditerranéenne centrale. Les chiffres sont maintenant revenus, si je puis dire, à ceux d’avant la crise.
Entretemps, nous avons sauvé plus de 690 000 vies en mer au cours des trois dernières années, 690 000, grâce aux efforts combinés de l’UE et de ses États membres. Ce progrès impressionnant a été rendu possible par une meilleure gestion de nos frontières extérieures. Comme le Canada le sait très bien, la gestion efficace des frontières extérieures est une condition préalable à toute politique de migration réussie.
Je dois également souligner que l’UE a renforcé ses frontières extérieures et ne les a pas fermées. Elle a mis en place des structures pour accélérer le traitement des demandes à la frontière et pour enregistrer et traiter les arrivées.
En outre, étant donné la situation géographique de l’Union européenne, une politique migratoire robuste ne devrait pas se limiter à une gestion efficace des frontières. Il est illusoire d’espérer endiguer la circulation des personnes en érigeant des murs ou des clôtures. D’ailleurs, il est difficile d’imaginer où un tel mur pourrait être érigé autour de l’Europe, étant donné nos interconnexions avec l’Asie et l’Afrique.
Une politique d’intégration et une politique d’immigration réussies doivent englober une dimension externe visant à s’attaquer aux causes profondes qui forcent les gens à se déplacer.
Nous avons intensifié notre coopération avec les pays d’origine et de transit pour les retours et les réadmissions. Malgré un certain succès dans la conclusion de nouveaux accords non juridiquement contraignants avec le Bangladesh, la Guinée, l’Éthiopie, la Gambie et bientôt, espérons-le, la Côte d’Ivoire, la coopération des pays tiers sur la réadmission de leurs propres ressortissants demeure un défi. Le manque de coopération de la part de certains pays d’origine ne facilite pas les choses, et c’est peut-être le principal défi à ce stade-ci.
À plus long terme, la situation ne peut s’améliorer que si l'on s’attaque aux causes profondes du phénomène, comme ce que nous avons vu en Syrie, ainsi qu'aux problèmes de bonne gouvernance en Afrique. Compte tenu des projections démographiques, les gens ne seront prêts à rester dans leur pays que s’ils ont de bonnes perspectives économiques, mais aussi la liberté et la protection de leurs droits fondamentaux. Aider les pays africains à créer de meilleures opportunités économiques, à améliorer leur gouvernance et à lutter contre la corruption et la mauvaise gestion n’est pas une dépense; c’est un investissement dans notre avenir.
L’UE est le plus proche voisin de l’Afrique, et aussi son plus grand investisseur, son principal partenaire pour le commerce et le développement et un de ses principaux fournisseurs de sécurité. J’aimerais mentionner quelques chiffres à titre de référence. L’UE fournit 31 milliards d’euros d’aide publique au développement à l’Afrique entre 2014 et 2020 afin de stimuler l’économie africaine, de donner aux jeunes du continent la chance de construire un avenir, d’assurer la sécurité alimentaire et l’accès à l’énergie, et d’ancrer la bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme. Les États membres de l’UE détenaient un stock d’investissement de 291 milliards d’euros en 2016 en Afrique, ce qui fait de l’UE le plus gros investisseur sur ce continent. L’UE offre également un accès libre à son marché par le biais d’accords de partenariat économique avec les pays d’Afrique du Nord et, pour tout sauf les systèmes d’armement, avec le reste du continent.
Permettez-moi de vous donner un aperçu des autres activités en matière de migration et de ce que nous faisons actuellement.
Tout d’abord, j’aimerais dire une chose qui saute aux yeux, à savoir que la migration est une question qui occupe une place très importante dans le programme politique de l’Union européenne. Voici trois exemples. Les ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, des 28 États membres, ont discuté de la migration le 12 octobre. Les ministres des Affaires étrangères se sont réunis hier, et les chefs d’État discuteront de la migration plus tard cette semaine lors d’une réunion les 17 et 18 octobre.
Juste pour démontrer que la migration est certainement une priorité pour les dirigeants politiques, dans le discours sur l’état de l’Union le mois dernier, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a annoncé un certain nombre de nouvelles propositions importantes qui renforceront notre travail sur la migration et l’asile. Permettez-moi d’en mentionner quelques-unes.
Les dirigeants de l’UE ont convenu de renforcer le rôle de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes avec 10 000 employés permanents dotés de leur propre équipement et outils, fournis par les agences frontalières nationales; un budget de 2,2 milliards d’euros entre 2021 et 2027 pour financer ses opérations; et un mandat fort pour lancer des opérations conjointes, non seulement avec son propre personnel au sein de l’UE, mais aussi en dehors de l’Union européenne.
Comme je l’ai dit, c’est essentiel pour gérer efficacement les frontières extérieures européennes et assurer un haut niveau de sécurité au sein de l’Union européenne, mais en même temps, l’Europe ne fermera pas ses frontières et continuera d’offrir la sécurité à ceux qui ont besoin de protection.
En plus de renforcer les frontières extérieures, nous proposons de renforcer le Bureau européen d’appui en matière d’asile. Ce bureau deviendra un outil majeur pour renforcer la solidarité européenne et accroître la préparation à la gestion des futurs défis migratoires. Afin d’aider les États membres à mieux gérer la migration, cette agence sera en mesure de fournir une assistance technique opérationnelle en temps opportun.
Bien que l’octroi de la protection aux personnes les plus vulnérables demeure une priorité, le retour des migrants qui ne sont pas admissibles en vertu de la législation internationale est tout aussi important pour le bon fonctionnement de notre système d’asile et de migration. Malgré des efforts accrus, le taux de rendement effectif dans l’ensemble de l’UE a diminué, passant de 46 % en 2016 à 37 % en 2017. Nous nous emploierons à accélérer les procédures de retour et à augmenter le taux de retour global dans le plein respect des droits fondamentaux.
La migration légale fait partie intégrante de l’approche globale de l’UE en matière de migration et va de pair avec une politique ferme de lutte contre les flux irréguliers et de renforcement de la protection des frontières, de simplification des procédures d’asile et de retour plus efficace.
Nous avons une voie légale de migration pour les travailleurs qualifiés, le système de carte bleue européenne. Nous avons adopté de nouvelles règles pour qu’il soit plus facile pour les étudiants, les chercheurs, les stagiaires et les bénévoles étrangers d’obtenir un permis pour venir dans l’UE et pour faciliter leur accès au marché du travail — par exemple, les bourses doubles et les placements pour les étudiants des pays africains.
Nous avons lancé une initiative visant à coordonner des projets pilotes avec certains pays tiers sur la migration légale afin de combler les pénuries sur les marchés du travail et d’aider les pays d’origine à renforcer leurs capacités grâce à des projets circulaires et de migration de la main-d’oeuvre.
Les initiatives de réinstallation interne de l’UE ont démontré que la migration irrégulière et dangereuse peut être remplacée par des voies légales et sûres pour les personnes ayant besoin d’une protection internationale. Nous devons utiliser pleinement les autres voies légales pour les personnes qui ont besoin de protection.
Depuis 2015, deux programmes de réinstallation internes de l’UE ont aidé plus de 38 000 des personnes les plus vulnérables à trouver un refuge dans l’UE entre les différents États membres. Afin de coordonner les efforts européens à long terme, la Commission européenne a proposé de mettre en place un cadre commun de réinstallation permanent dans le cadre du régime d'asile européen commun.
L’intégration des migrants des pays tiers sur le marché du travail est essentielle pour garantir un impact positif de la migration. Nous nous intéressons à la façon dont la politique d’immigration du Canada aborde l’admission d’immigrants ayant des compétences correspondant aux besoins économiques et facilitant l’intégration à long terme sur le marché du travail, y compris la reconnaissance des titres de compétences étrangers et les programmes de mentorat.
En conclusion, beaucoup de choses ont changé depuis 2015, mais nous avons beaucoup d'efforts à fournir pour gérer la migration de façon sécuritaire et ordonnée, en adoptant une approche globale de la migration, y compris la migration légale.
Nous avons partagé notre expérience avec nos homologues canadiens à divers niveaux et nous en avons tiré des leçons à de nombreuses occasions. Malgré les différences géographiques, nous savons que les défis auxquels nous sommes confrontés sont de plus en plus semblables. Nous sommes reconnaissants de la collaboration soutenue du Canada et nous nous réjouissons à la perspective d’autres échanges qui seront bénéfiques pour les deux parties.
Merci beaucoup.
Merci, Votre Excellence.
J’aurais aimé vous donner une heure. C’est très intéressant.
Madame Zahid, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d’être venus aujourd’hui et de nous avoir fait part des programmes que vous menez au sein de la communauté européenne.
Nous avons vu qu’en 2015, l’Europe a été confrontée à la plus importante vague d’immigration massive depuis la Deuxième Guerre mondiale, et le nombre de migrants a atteint un sommet de plus d’un million en 2015-2016.
Avez-vous des chiffres récents?
Oui. Je peux revenir à mon exposé. Je ne le relirai pas, ne vous inquiétez pas, mais je vous reviendrai et je vous dirai exactement quels sont les chiffres si on les divise entre les années.
Nous en avions 1,3 million en 2015. Le chiffre était plus ou moins le même en 2016. En 2017, il est tombé à 800 000 personnes. La tendance générale est à la baisse.
Avez-vous fait des études sur ce qui motive les personnes qui traversent la frontière? Est-ce pour des raisons économiques ou autres? Quels sont les facteurs qui entraînent une plus grande migration?
C’est une question très complexe, et je vais essayer d’être aussi concis que possible.
Je pense qu'il faut faire une distinction en fonction des différentes voies par lesquelles les migrants arrivent dans l’Union européenne, et je pense que les principales raisons pour lesquelles les gens migrent vers l’Europe sont différentes.
Tout d’abord, si nous regardons la route méditerranéenne orientale, qui est le lien entre la Turquie et la Grèce, soit la frontière terrestre ou maritime, nous constatons que le plus grand nombre de personnes vient probablement de la Syrie. C’était le cas en 2015 et en 2016. À l'heure actuelle, il y a un certain changement dans les nationalités des gens qui arrivent en Europe par cette voie, mais la principale raison était la guerre en Syrie, qui a provoqué une forte augmentation du nombre de migrants.
Si vous prenez la route méditerranéenne centrale, c'est une histoire légèrement différente, parce que les gens que vous voyez sur ces bateaux viennent du Bangladesh; on voyait des Érythréens et des Libyens et, plus récemment, un nombre croissant de Tunisiens et de nombreuses personnes d’Afrique de l’Ouest; le Nigeria domine.
La principale motivation de ces migrants est d’ordre économique. Ils essayent de rejoindre l’Europe pour en tirer des avantages économiques. Je ne minimise pas les conditions existant dans certains de ces pays pour ces personnes, mais ce n’est pas une migration causée par la guerre ou d’autres catastrophes.
Le phénomène le plus récent est la migration dans la Méditerranée occidentale qui relie le Maroc et l’Espagne. Encore une fois, les migrants que l’on voit sur ces navires viennent surtout de l’Afrique de l’Ouest. Leur origine est légèrement différente de celle des migrants de la Méditerranée centrale. Ils viennent de Côte d’Ivoire, du Sénégal et du Nigeria. Là encore, il s’agit principalement d'une migration économique.
Au cours de nos dernières réunions, nous avons entendu des témoins parler de la relation entre les voies légales et illégales de l’immigration et de la façon dont l’élimination des voies légales peut pousser les migrants à utiliser les voies illégales. Par exemple, lorsque l’Espagne a éliminé le visa de travail saisonnier pour les Africains, il y a eu une augmentation des migrants, et le nombre d’immigrants illégaux a diminué dans le cadre d’un programme de visas.
Vous avez mentionné certains programmes que vous avez mis en place, en Europe. Avez-vous constaté que l’ajout de programmes d'immigration légale a réduit le nombre d’immigrants illégaux? Quelle est la relation entre les deux?
J’aimerais mentionner ici plusieurs choses liées à notre opération Sophia en Méditerranée. Le mandat de cette opération, qui est l’opération menée par l’UE avec les États membres, a donné en 2016 la possibilité d’arrêter des passeurs et de leur enlever les moyens de migration, c’est-à-dire les navires.
Le troisième élément de cette opération consistait à accroître la capacité des gardes-côtes libyens. Pour ne donner que quelques exemples, cette opération nous a permis d'arrêter environ 200 personnes qui étaient directement impliquées dans le trafic de migrants. Deuxièmement, elle nous a permis de démanteler ou retirer environ 500 navires qui participaient à des activités de migration illégale.
Enfin et surtout, si vous prenez les événements qui se déroulent à l’extérieur de la côte libyenne, en raison de l’augmentation de la capacité des gardes-côtes libyens, essentiellement au cours des deux derniers mois, le nombre a diminué considérablement, parce que toutes les opérations ont été confinées et gérées par la Garde côtière libyenne, ce qui n’était pas le cas avant.
La réponse courte à votre question, c’est qu’il y a beaucoup d’activités illégales en cours et qu’il faut absolument être actif pour s'y attaquer. Si vous savez où régler le problème, le trafic de migrants peut diminuer.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier l’ambassadeur d’être ici aujourd’hui, ainsi que M. de Schietere.
Vous nous avez fourni beaucoup de renseignements. Vous venez de mentionner l’opération Sophia comme l’un de vos champs d'action, mais je me demande si vous pouvez me dire où en sont les autres. J’ai lu un peu au sujet de l’accord de Dublin et de la renégociation dans ce domaine. Je me demande si vous pourriez faire le point sur l’accord de Dublin concernant l’établissement des réfugiés.
L’accord de Dublin est en cours de révision. La Commission européenne a présenté ses propositions au Conseil européen. Pour le moment, c’est aux États membres de discuter et de prendre une décision finale.
Il est évident que l’entente de Dublin devrait être revue. Nous devons nous assurer que les États membres trouvent les compromis pertinents entre eux, notamment en ce qui a trait à l’endroit où le migrant est enregistré — c’est la première entrée ou non — et à la façon dont cette information est ensuite diffusée entre les États membres de l’Union européenne.
Bien sûr, il y a un autre élément que j’ai mentionné, et c’est la réinstallation interne des migrants et des réfugiés qui arrivent dans l’Union européenne. Les discussions entre les États membres se poursuivent et ne sont pas toujours faciles. Je ne veux pas prédire quand cette discussion prendra fin, mais le simple fait que les chefs d’État et de gouvernement vont discuter de nouveau de la migration, au sommet, plus tard cette semaine, montre qu’il n’appartient pas seulement aux ministres de l’Intérieur de trouver un compromis; c’est aussi au plus haut niveau des chefs d’État et de gouvernement de le faire. Il s’agit de l’une des priorités clés: mettre en place le cadre juridique et le cadre de coopération entre les États membres.
Oui, et quand on y regarde de plus près, je comprends que les immigrants ou les demandeurs d’asile qui arrivent en Europe aujourd’hui n’ont toujours pas le droit de choisir le pays ou l’État où ils veulent aller pour ce qui est de la demande d’asile. Pensez-vous que nous pouvons faire quelque chose au Canada? Le Canada devrait-il conclure des accords semblables avec des pays européens, comme certains pays européens le font actuellement, en ce qui concerne les demandes d’asile?
S.E. M. Peteris Ustubs: Ce serait certainement...
M. Larry Maguire: Avec l’objectif...
Excusez-moi. Ce serait dans le but d’empêcher de magasiner pour trouver le pays dans lequel vous voulez vivre.
L’un des facteurs qui ont joué un rôle important dans l’entente de Dublin, c’est que pour éviter que des migrants arrivent en Europe et magasinent pour un pays, il nous fallait d’abord disposer de toutes les bases de données, de toutes les empreintes digitales et de toutes les demandes. Autrement, si les empreintes digitales n’étaient pas prises, elles n'allaient pas être conservées, et le magasinage d’asile allait pouvoir commencer.
La question est maintenant réglée de façon beaucoup plus globale. Cela se fait en Grèce et en Italie pour tous ceux qui arrivent. Ensuite, ce sont les accords entre les États membres de l’Union européenne qui assurent les mouvements des migrants dans le cadre de la réinstallation interne.
En ce qui concerne l’intérêt du Canada à participer, ce serait certainement une décision souveraine du Canada. Il y a peut-être des approches différentes parce que, dans les groupes qui arrivent en Europe, on voit des gens qui viennent certainement de zones de guerre et on a besoin de les protéger pour des raisons humanitaires ou autres, mais il y a une troisième catégorie, qui est plutôt liée à la migration économique.
Le Canada aurait peut-être à définir le type de migration qui l'intéresse. Ou bien ce serait seulement le type de personnes qui viennent de pays déchirés par la guerre comme la Syrie ou ailleurs, ou bien vous seriez intéressés à recevoir plus de migrants économiques, qui pourraient venir avec des compétences et qui seraient désireux de venir ici.
Merci.
Comme le temps passe vite, y a-t-il des pays de l’Union européenne qui délivrent des permis de travail à ceux qui attendent actuellement une audience d’asile?
Nous avons plusieurs approches. L’une d'elles consiste à faciliter l’intégration de ceux qui ont des compétences sur le marché du travail. Certains États membres de l’Union européenne tiennent à ce que leur intégration se fasse rapidement. Cela consiste à faciliter, par exemple, l’ouverture des entreprises dans les différents États membres pour leur trouver un emploi parce que l’intégration économique est la façon la plus facile de régler le problème.
Cela dit, il y a un autre régime, auquel j’ai fait allusion dans mes remarques liminaires, et c’est la carte bleue européenne, qui ne s’adresse pas aux demandeurs d’asile ou aux migrants qui arrivent sur le territoire de l’Union européenne, mais à ceux qui se trouvent dans des pays tiers et qui ont des connaissances et des titres de compétence pour toutes sortes d’emplois. Ils peuvent demander la carte bleue de l’Union européenne, qui est un permis de travail. C’est un programme permanent.
À votre connaissance, y a-t-il des pays de l’Union européenne qui s’emploient à encourager le parrainage privé de réfugiés, comme des organisations privées, des groupes de cinq, des organismes sans but lucratif, des groupes religieux ou ce genre de choses?
Oui, très brièvement, nous avons eu plusieurs initiatives privées qui ont aidé à sauver des vies en mer. Cette activité a été assurée par des commanditaires privés, Médecins Sans Frontières et d’autres, qui ont affrété les navires. Une grande partie de leur financement provenait de groupes privés.
Quant au mouvement des migrants dans le cadre du régime privé, il n’est pas très souvent visible en ce moment dans l’Union européenne. Le Canada adopte certainement une approche différente à cet égard.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J’aimerais commencer par souligner que le programme Women in House, de l’Université de Toronto, est sur la Colline aujourd’hui. Je suis très heureuse d’avoir avec moi Gabrielle da Silva, qui suit une formation en droit de la personne, entre autres. C’est un jour particulièrement bien choisi pour nous observer sur la Colline.
Vous êtes un excellent président.
Pour venir à ma première question, je vais parler de ma propre expérience au Canada et dans la circonscription de Nanaimo—Ladysmith que je représente.
Les gens sur le terrain, en Colombie-Britannique, nous parlent beaucoup du manque de capacité du système d’immigration du Canada à traiter l’afflux massif de demandes. C'est particulièrement douloureux pour les familles qui demandent à parrainer un membre de leur famille ou ceux qui espèrent que leur permis d’études sera prolongé, et qui doivent attendre indéfiniment. Cela angoisse les familles. Les gens ne sont pas certains de leur statut. Ils sont séparés. Ils sont incapables de faire des plans à long terme parce qu’ils ont l’impression que leur vie est en suspens et leur avenir incertain.
L’an dernier, le Comité a recommandé que le Canada fournisse plus de renseignements aux demandeurs pour expliquer ses refus de visa. À l’heure actuelle, nous recevons une lettre vague et générique qui ne donne aucun détail sur les raisons précises du refus. Les gens ne connaissent pas les raisons, et s’ils veulent présenter une nouvelle demande, ils ne savent pas comment ils pourraient corriger la situation.
Je suis curieuse de savoir une chose. Compte tenu du volume de migrants que l’Union européenne a connu, avez-vous des programmes en place pour que les demandeurs de visa aient une idée claire de la feuille de route qui les attend, mais surtout pour expliquer le refus de leur visa afin qu’ils puissent modifier leur demande et avoir de l’aide pour naviguer dans la bureaucratie?
Il y a deux réponses à votre question.
Tout d’abord, je ne peux pas parler au nom des États membres de l’Union européenne parce que les demandes de visa et les visas — et cela s’applique à toute personne d’un pays tiers à l’extérieur de l’Union européenne qui a demandé un visa et qui voyage dans l’Union européenne — sont la prérogative des États membres individuellement.
Bien que nous ayons le système de Schengen et que, par conséquent, il soit facile de voyager entre les États membres de l’Union européenne, quand une personne décide de présenter une demande pour se rendre dans un pays particulier, c'est l’ambassade de ce pays, quel qu’il soit, qui y donne suite. Le genre de réponse que l’État membre donne lorsque le processus de demande est terminé relève toujours de la responsabilité du pays en question. Je ne peux pas vraiment vous donner une réponse précise.
En ce qui concerne les migrants de toutes sortes qui arrivent et qui sont déjà sur le territoire de l’Union européenne, nous faisons de notre mieux pour nous assurer que le traitement de leurs demandes se fait le plus rapidement possible.
Le nombre d’employés de l’Union européenne que j’ai mentionné en témoigne. L’agence européenne pour la sécurité frontalière comptera 10 000 personnes, c’est-à-dire que 10 000 personnes supplémentaires seront envoyées en renfort, au besoin, dans tout État membre de l’Union européenne qui pourrait être confronté à des situations très difficiles. Il s’agit essentiellement de la mobilisation de la capacité des gardes-frontières dans toute l’Union européenne. S’il y a une capacité de réserve dans l’un ou l’autre des pays, elle pourrait être envoyée pour aider à régler les problèmes au fur et à mesure qu’ils se présentent. Cela faciliterait l’enregistrement et le traitement.
Par conséquent, pour nous, l’élément clé est le personnel et la disponibilité du nombre de personnes qui s’attaqueraient à ces chiffres.
Excellent. Merci.
Une autre difficulté dont j'ai entendu parler, surtout par la Central Vancouver Island Multicultural Society, c’est le manque de garderies. La tendance observée à l'égard des familles de réfugiés et d’immigrants qui sont venues à Nanaimo est que ces personnes restent souvent à la maison pour s’occuper de leurs jeunes enfants si elles n’arrivent pas à trouver des services de garde abordables. Cela limite leur capacité de suivre des cours de langue et les laisse donc plus isolées et hors de la population active.
Avez-vous des exemples de programmes de l’Union européenne qui sont mis à la disposition de ces familles — des services de garde d'enfant ou autres — pour leur permettre d’avoir accès à une formation linguistique et d’obtenir le soutien dont elles ont besoin à la maison pour pouvoir partir en formation professionnelle et linguistique, afin qu’elles aient des possibilités économiques et d’intégration?
En ce qui concerne la formation linguistique, il est certain... C’est l’un des principaux problèmes pour tout migrant qui arrive sur le territoire de l’Union européenne. Encore une fois, cela dépend du pays où les migrants arrivent, s'établissent et restent.
À ma connaissance, les systèmes sociaux de chaque pays font en sorte de prioriser l'apprentissage de la langue, en essayant d’accommoder et ceux qui n’ont pas la capacité de suivre des cours de langue et de leur en donner la possibilité. Cela pourrait aussi englober des éléments de garde d’enfants, en veillant à ce que les services de garde soient liés à la formation linguistique.
Cela faciliterait le processus d’intégration.
C’est une bonne confirmation. Merci.
Une troisième question qui nous pose un problème au Canada, dans ma propre circonscription, est celle de la réunification des familles. Nous entendons beaucoup de plaintes de la part de réfugiés qui sont venus au Canada. Ils ne peuvent pas se sentir à l'aise ici en sachant que leur famille est toujours en danger. Ils ne peuvent pas s'installer complètement.
Fatima vit dans ma circonscription. Elle et ses deux filles étaient des réfugiées de l’Érythrée. Une fois qu’elles sont venues au Canada en tant que réfugiées, parrainées par l'église Neighbourhood Church, de Nanaimo, qui les a très bien soutenues, elles ont appris que le père de famille qu'elles croyaient mort pendant la guerre civile, était toujours vivant. Elles attendent depuis des années. Elles ne savent pas dans quel délai la demande du père aboutira. À ce stade-ci, ses filles commencent à dire: « Nous ne croyons même pas que notre père est encore en vie. Il ne figure nulle part. » C’est un exemple du désarroi de la communauté.
Avez-vous des exemples de programmes qui peuvent raccourcir et faciliter le processus de réunification des familles pour éviter ces séparations?
L’une de nos priorités, lorsque les migrants arrivent en Europe, est d'établir s’ils ont déjà des parents dans l’Union européenne. Ils peuvent se rendre dans l’Union européenne ou faire des voyages très dangereux de l’autre côté de la mer, essentiellement pour retrouver leur famille. Si c’est là l’élément, cela facilite le processus. S’il n’y a pas de lien avec une famille inscrite, c’est bien sûr un cas légèrement différent.
Je pense que l’élément de réunification est toujours gardé à l’esprit précisément en raison de l’aspect humanitaire, et que chaque pays décide de la demande qui a la plus haute priorité. Je ne peux pas vous donner de chiffres précis quant à la fréquence de l’utilisation de ce système, ni vous dire si le bilan est positif ou non, mais je sais pertinemment qu’on s’en sert très souvent pour accélérer le processus si c'est lié à la réunification des familles.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence. J’ai aussi deux étudiants de l’Université de Toronto, à l’arrière, qui nous observent aujourd’hui.
Je vous remercie de votre présentation, de votre discours initial. C’était excellent et très intéressant. Vous avez mentionné que l’Union européenne a reçu 3,4 millions de demandeurs d’asile. C’est la plus importante migration depuis la Deuxième Guerre mondiale.
Le Rapport sur les migrations internationales 2017 de l’ONU portait principalement sur les migrants économiques. Je vais vous montrer certains des chiffres parce que nous discutons des tendances migratoires dans le monde et de ce à quoi le Canada devra faire face à l’avenir.
En 2000, nous avions 173 millions de migrants économiques dans le monde; en 2010, nous en avions 220 millions; et en 2017, nous en avions 258 millions. Dans votre témoignage, vous avez mentionné l’Afrique et la raison pour laquelle beaucoup de ces migrants quittent leur pays, c’est qu’il n’y a pas de conditions économiques stables pour prospérer et réussir. Ce n’est pas seulement ce que nous constatons en Afrique, mais aussi à divers endroits, et les chiffres indiquent qu’il y a beaucoup de migrants qui voyagent partout.
Je voulais parler d’un pays en particulier et comprendre la portée de ces conditions dans un État de l’Union européenne. Combien de migrants ont été acceptés dans l’UE l’année dernière? Quels sont ces chiffres en Allemagne et comment se comparent-ils à ceux des autres pays de l’UE? Nous voulons une comparaison pour voir ce que l’Allemagne a fait et des exemples dont nous pouvons tirer des leçons.
Pour ce qui est du nombre de demandes d’asile et de citoyenneté pour les principaux groupes en Allemagne, l’an dernier, en 2017, il y en a eu 222 562, donc 222 000.
Vous avez dit qu’en 2015-2016, le nombre de demandeurs d’asile était à peu près le même, soit environ 1,3 million. En 2017, ce chiffre est passé à 800 000.
Le nombre de demandeurs d’asile qui vont en Allemagne est-il plus élevé que les 220 000 enregistrés les autres années?
Le nombre global de demandes a diminué, et les demandes pour l’Allemagne ont également diminué. Pour parler un peu plus de l’origine, plus précisément pour l’Allemagne, 50 000 des demandeurs venaient de Syrie seulement, environ 23 000 d’Irak et environ 18 000 d’Afghanistan. Ce sont les trois principaux pays d'où provenaient les demandeurs d'asile pour l’Allemagne.
Nous voyons davantage de demandeurs d’asile venir au Canada. L’an dernier, nous avons eu un nombre important de migrants haïtiens pendant l’été, et cette année, nous avons plus de migrants nigérians. C’est important, parce que selon ce qui se passe dans certaines régions du monde — la croissance démographique, les possibilités économiques —, un plus grand nombre de demandeurs d’asile cherchent de meilleures perspectives. Ces chiffres ont augmenté auparavant. En 2008, il y a eu une hausse de ces chiffres également, et nous avons également été confrontés à ces chiffres cet été.
Quels sont les principaux problèmes auxquels l’Union européenne est confrontée en matière de migration? Encore une fois, je m'intéresse à l'Allemagne. Comment l’Allemagne aborde-t-elle la question de la migration?
Il serait préférable que les Allemands répondent à ce que fait l’Allemagne, parce qu’il s’agit d’une activité nationale. Ce n’est pas du ressort de l’Union européenne. Chaque pays s’y attaque; c’est la responsabilité de chaque État membre. Nous ne pouvons pas dire grand-chose du point de vue de l’Union européenne.
En ce qui concerne les débats politiques internes ainsi que les activités entreprises par les ministères allemands et les services concernés, tout d’abord, ils affectent énormément de personnel pour s’assurer que le nombre de personnes chargées de traiter les demandes a augmenté considérablement au cours des dernières années. S’attaquer à ce problème particulier était le principal enjeu du système allemand.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de l’intégration rapide et des compétences des demandeurs d’asile et des immigrants, de les faire correspondre aux besoins. L’Union européenne a-t-elle un processus pour accélérer les processus de migration tout en maintenant la sécurité?
Les opportunités économiques et l’ouverture des entreprises européennes figurent en tête de l’agenda de nombreux États membres de l’Union européenne afin de garantir que les opportunités dans les secteurs et activités économiques soient ouvertes aux migrants. Le bilan de chacun des États membres de l’Union européenne sera différent. Dans certains pays — je ne les nommerai pas — cette activité a donné de très bons résultats, et les migrants ont trouvé des emplois assez facilement. À d’autres endroits, cela a pris beaucoup plus de temps, et les entreprises n’y ont pas participé activement. Je pense que la façon dont les États abordent les questions de migration en général est attribuable à leur culture antérieure qui, disons, a peut-être empêché certaines entreprises d’être actives sur ce plan-là.
Nous devons nous arrêter là. Merci. Nous avons un peu dépassé le temps alloué de l’autre côté.
Je voudrais poser une question au sujet du Venezuela.
Les migrants en provenance du Venezuela vont en grande partie dans d’autres pays d’Amérique du Sud et en Amérique centrale. On m’a dit qu’environ un demi-million de Vénézuéliens allaient en Europe. Je me demande si vous avez des renseignements à ce sujet. J’ai entendu dire que c’était surtout en Écosse, qui fait toujours partie de l’Union européenne cette semaine.
Vous êtes très pessimiste, d’une certaine façon.
Je ne sais pas où en sont les choses cette semaine. Je pense que cela pourrait encore durer en 2019. Mais c’est un autre sujet.
Oui, je sais.
En ce qui concerne le Venezuela, il y a deux choses. Je sais que M. Grandi, le haut commissaire des Nations unies à la migration, s’est rendu dans la région au début de la semaine dernière. Il a participé hier aux débats du Conseil des affaires étrangères, à Bruxelles, puisqu’il vient de la région du Venezuela, pour s’assurer que les États membres de l’Union européenne et les ministres des Affaires étrangères sont bien informés sur le problème croissant des migrations dans la région.
Vous avez posé une question au sujet de l’Union européenne, et je dirais que c’était avant la crise. En 2017, le nombre le plus élevé de Vénézuéliens se trouvait en Espagne. Cela représente environ 12 000 personnes. Cela dit, il faut aussi savoir que beaucoup de Vénézuéliens ont une double citoyenneté. Il s’agit de la citoyenneté portugaise et espagnole. Je dirais que si le Venezuela entrait dans une situation encore plus volatile, ce serait un problème important pour l’Union européenne, parce que nous devrions prendre soin des citoyens européens.
Nous avons écouté les Bulgares qui voulaient ériger un mur, bien que l’ambassadeur de Bulgarie m’ait assuré que c’était une clôture. Le Danemark avait parlé de rétablir la sécurité à la frontière, de la rétablir. J’ai parlé à des députés britanniques qui m’ont dit que ce problème de migration est l’une des nombreuses raisons du Brexit.
Dans le cas des Allemands, bien sûr, Mme Merkel a dit qu’elle accueillait toutes sortes de gens. Bien sûr, il y a des reportages dans les médias aujourd’hui selon lesquels l’un de ses partenaires de la coalition est allé trop loin à droite et a simplement dit non, qu’il ne voulait personne. Cela a eu un effet sur les élections bavaroises.
Il y a manifestement un différend à bien des égards entre les États membres. Ma question est la suivante: pour créer une politique européenne, comment l’Union européenne fait-elle face à ces différences, dont la plupart sont négatives?
Je dois dire que les débats dans l’Union européenne, imaginons les 28 États membres de l’Union européenne autour de la table, ne sont pas toujours faciles, car il y a différents acteurs et différentes voix autour de cette table.
Cela étant, je dois dire qu’en 2015 et en 2016, lorsque la crise a frappé à sa porte, j’ai été très surpris par la rapidité avec laquelle l’Union européenne a réagi et pris des décisions.
Cela dit, l’impact politique pourrait prendre un certain temps avant d’atteindre le niveau de la réalité politique. Nous le voyons probablement maintenant dans différents types d’élections, que ce soit en Suède, en Allemagne, au Danemark ou en Bulgarie.
Je suppose que les politiciens de certains États membres seront plus prudents en ce qui concerne les questions de migration. En même temps, tout le monde s'entend à dire que nous devons améliorer notre système et notre gestion, mais il ne s’agit pas de fermer les frontières.
Il peut y avoir différents types de voix et, bien sûr, différents acteurs politiques se feront entendre. Cependant, c’est davantage une question de capacité de traitement et de politiques de retour — parce que ce ne sont pas tous ceux qui arrivent dans l’Union européenne qui ont le droit d'y rester — et de s’assurer que ceux qui en ont besoin obtiennent la protection. Ce ne sont pas non plus tous ceux qui arrivent qui obtiennent les emplois. Ce genre de débat se poursuivra.
Cela deviendra plus difficile sur le plan politique dans l’Union européenne. Jusqu’à maintenant, je constate que l’Union européenne n’a pas été paralysée dans ses décisions en matière d’asile et de migration.
J’ai une autre question, monsieur le président.
Comme vous le savez probablement, au Canada, nous avons des demandeurs d’asile illégaux qui viennent des États-Unis. Le gouvernement les appelle des demandeurs d’asile irréguliers. La question qui se pose particulièrement dans les villes de Toronto et de Montréal est de savoir qui paie. La province de l’Ontario, la province de Québec, la ville de Toronto et la ville de Montréal disent: « Vous êtes à l’origine de tout cela, monsieur le premier ministre; à vous de payer. » Le gouvernement en a payé une partie, mais pas assez.
Cela me fait penser aux migrants qui traversaient la Méditerranée, en particulier vers l’Italie et la Grèce, lorsque les Italiens et les Grecs disaient: « Le coût est exorbitant pour nous comparativement à ce qu’il est en Suède ou dans d’autres pays. » Cette question a été soulevée il y a quelques années. Les États du Sud ont dit: « Vous ne partagez pas les coûts »
Pouvez-vous nous dire si cette question a été réglée? Si oui, comment a-t-elle été résolue?
L’une des réponses du côté de l’Union européenne — et je ne dis pas qu’elle est parfaite ou que c’est la plus réussie — est la réinstallation interne. Il s’agit de l’accord entre les États membres sur la proportion de migrants des pays les plus exposés, à savoir l’Italie et la Grèce, qu'ils acceptent d'accueillir.
Bien sûr, un certain nombre d’États membres ont réussi à tenir leurs promesses. Il y en a d’autres qui n’ont pas réussi. D’autres encore ont traduit les États membres en tant qu'institutions devant la Cour européenne de justice, disant que c’était illégal.
D’un côté, l’Union européenne a décidé d'agir et de procéder à la réinstallation des migrants. On s'est entendu sur des chiffres que tout le monde accepterait. En même temps, il y a eu un léger retard sur le plan de la mise en oeuvre.
Il y a quelque chose que nous pouvons continuer d’améliorer pour nous assurer que la réinstallation fonctionne vraiment. La réinstallation au sein de l’Union européenne entre États membres est en quelque sorte la réponse de la solidarité entre les membres de l’Union européenne.
Vous avez fait un excellent résumé de ce qui se passe en Europe, monsieur l’ambassadeur. Merci beaucoup.
Merci.
Nous avons commencé un peu en retard à cause du vote, mais je vous accorde deux minutes, monsieur Ayoub.
[Français]
[Traduction]
[Français]
C'est très généreux de votre part. Je vais essayer d'être bref.
Votre Excellence, je vous remercie d'être avec nous.
Votre opinion m'intéresse. D'après votre expérience à l'Union européenne, le Canada vit-il actuellement une crise de migration?
Je vous remercie de votre question.
Les crises peuvent être d'une ampleur différente. Elles peuvent aussi être évaluées différemment. Cela dépend de l'expérience et de l'arrivée de migrants dans le territoire.
[Traduction]
Si je fais la comparaison entre les États membres de l’Union européenne et le Canada, ce que l’Union européenne a vécu en 2015 et en 2016, bien sûr, ce sont des chiffres beaucoup plus élevés. De ce point de vue, je dirais que c’était une crise et que le nombre actuel de migrants irréguliers que le Canada reçoit pourrait être faible.
Cela dit, chaque cas est complètement différent. Nous ne pouvons pas faire de comparaison.
[Français]
Merci.
Vous connaissez l'Entente sur les tiers pays sûrs entre le Canada et les États-Unis. Quelle est votre opinion sur cette entente en ce qui concerne l'immigration?
[Traduction]
Je dirais que c’est de la politique interne entre les deux pays que de s’assurer du genre de définitions utilisées — par exemple, les pays sûrs et les retours sûrs. Nous avons exactement le même genre de conversations en Europe au sujet des pays tiers, et je sais à quel point ces conversations sont complexes.
Je n’ai pas de bonne réponse à donner au sujet des discussions que vous avez entre les États-Unis et le Canada.
[Français]
[Traduction]
Nous avons beaucoup de discussions sur les retours sûrs avec différents types de pays. Un exemple que j’aimerais mentionner est celui de la Turquie, parce que nous avons discuté de retours sûrs et d’accords avec la Turquie, précisément après les événements de 2016 et 2017 dans ce pays — c’est-à-dire le genre de définition que nous devrions avoir pour ce pays en particulier.
Il y a toujours un débat sur les retours sûrs. Lorsque nous discutons d’ententes de réadmission, c’est toujours la principale considération. Nous essayons de nous assurer que la définition est bien interprétée et bien appliquée en ce qui concerne les retours sûrs.
Merci beaucoup, Excellence, de votre générosité et de votre temps.
Je suppose que nous pourrions nous adresser de nouveau à vous au sujet de cette étude pour voir si vous avez d’autres renseignements que nous pourrions trouver utiles.
Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, puis nous poursuivrons à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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