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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 145 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 25 février 2019

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Je déclare ouverte la 145e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
    Nous revenons à notre grande étude sur les enjeux et possibilités liés à la migration pour le Canada au 21e siècle.
    Cette semaine, nous avons trois séances pour régler les demandes du Comité à la suite du résumé des témoignages que les analystes ont préparé à notre intention. Vous aviez demandé davantage de renseignements sur l'Amérique latine, la demande de main-d'oeuvre liée aux nouveaux arrivants au Canada ainsi que des statistiques sur le travail de DSC, Développement social Canada, et les travailleurs étrangers temporaires.
    Cette semaine, les séances d'aujourd'hui, de mercredi et de jeudi porteront sur ces sujets en plus de répondre aux besoins des diverses motions adoptées en ce qui concerne le nombre de séances requises.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Oui.
    C'est à propos du sujet que vous venez d'aborder. Je me souviens vaguement d'un vote selon lequel nous aurions trois séances supplémentaires. Ce dont je ne me souviens pas, outre votre déclaration, c'est qu'il y aurait trois séances cette semaine. Je sais avec certitude qu'il n'y a jamais eu de vote prévoyant une séance jeudi. C'était une déclaration de votre part sans consultation du Comité.
    Je ne suis pas disponible jeudi. C'est un très mauvais moment pour moi. Si je l'avais su il y a un certain temps, j'aurais pu prendre des dispositions, mais c'est très inopportun. Monsieur le président, je suggérerais, parce que vous n'avez pas consulté le Comité au sujet de cette séance particulière jeudi, que vous choisissiez une autre date, avec l'approbation du Comité.
    Comme le président précédent le sait, le Comité se réunit sur convocation de la présidence. Cela fait partie du Règlement. J'ai rencontré les analystes et la greffière afin de trouver le moyen d'accomplir tout ce que vous aviez demandé et de leur donner également le temps de préparer un rapport.
    En négociant avec le personnel du Comité, j'ai donc décidé de convoquer cette séance. Je regrette les difficultés que cela cause aux membres. Vous pouvez toutefois consulter d'autres députés. Vous avez certainement le droit de siéger au Comité ou de ne pas assister aux réunions, mais comme l'indique très clairement le Règlement, comme toujours, les séances se tiennent sur convocation de la présidence.
    Je comprends que les séances se tiennent sur convocation de la présidence, mais normalement, par courtoisie, le président consulte le Comité, en particulier lorsqu'il s'agit d'une séance spéciale. Je comprends que, pour que ce sujet soit traité correctement, nous avions convenu de trois séances. Je dis simplement que je ne sais pas si d'autres membres sont du même avis, mais nous n'avons pas été prévenus de votre annonce que ce serait jeudi prochain. Cela rend les choses très difficiles, certainement pour moi.
    Toutefois, monsieur le président, j'ai eu mon mot à dire et je déplore le fait que vous mainteniez cette séance jeudi.
    Merci.
    Je rappellerai simplement aux membres qu'ils peuvent consulter les délibérations de la séance de la semaine dernière. J'ai dit au Comité la semaine dernière que nous nous réunirions jeudi après-midi. Je ne vous ai pas donné beaucoup de préavis, mais ce n'était pas juste aujourd'hui; c'était en fait à la dernière séance que nous avons tenue.
    Monsieur le président, vous ne nous avez pas donné de préavis et n'avez pas abordé ce point. Toutefois, si vous êtes résolu à tenir cette séance, vous avez absolument raison de dire que le président peut convoquer une réunion. Je pense simplement que, par courtoisie à l'égard du Comité, si vous essayez de nouer de bonnes relations avec tous les membres du Comité, vous consultez le Comité avant de commencer à organiser ces séances supplémentaires.
    Merci.
    Monsieur Maguire.
    Je suis du même avis que M. Tilson. Je peux probablement être ici. J'ai déjà changé certains plans. J'étais un peu étonné de constater que nous allions participer à trois séances en une semaine; c'était la seule chose. Je savais que nous devions en tenir trois: nous avions accepté de le faire. Je vous en remercie donc, monsieur le président. Je prévoyais ne pas être ici afin d'assister à un autre événement.
    Je me demande simplement si, à l'avenir, nous pourrions être consultés à propos de la date des séances. Je sais que vous avez le droit d'aller de l'avant et de les convoquer, en votre qualité de président, mais j'ai dû apporter des changements assez importants à mon agenda, entre autres, pour en tenir compte.
    Je sais que nous n'aurons pas de séance dans les deux semaines qui suivront, je crois. Est-ce exact?
(1535)
    Nous ne nous réunirons pas avant deux semaines. Nous revenons pour une semaine, puis nous sommes absents pendant une autre semaine.
    Vous vous souviendrez également que, lors de la dernière séance, vous avez demandé une autre séance avec les fonctionnaires concernant le Budget supplémentaire des dépenses (B).
    Monsieur le président, j'allais simplement ajouter cela.
    J'essaie de planifier toutes vos demandes et de gérer également un calendrier de la Chambre très bancal cette année. Ce n'est pas sans regret que j'essaie de planifier ces séances, car j'aimerais aussi être chez moi plus tôt jeudi, mais c'est le mieux que nous pouvons faire.
    Eh bien, cela aurait été formidable si j'avais pu être chez moi, mais je n'allais pas y être de toute façon.
    Je vous connais et je n'avais rien à voir avec ce calendrier « bancal », comme vous le dites. Je sais que nous n'avons que cette semaine et que nous serons ensuite absents pendant une autre semaine. Cela nous mènera très rapidement en avril. Je comprends le dilemme, mais je tiens simplement à le préciser aux fins du compte rendu.
    Je vous remercie.
    Y a-t-il autre chose à ajouter?

[Français]

    Nous allons poursuivre avec M. Beuze.
    Tout d'abord, nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation à comparaître aujourd'hui.

[Traduction]

    La parole est à vous pour 10 minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs. Je suis très heureux d'être de retour devant le Comité, qui est un allié important pour le HCR, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, l'agence des Nations unies responsable des réfugiés.
    De même, je suis particulièrement heureux que le Comité ait décidé de faire la lumière sur la situation en Amérique latine, car c'est habituellement l'une des situations, en ce qui concerne les réfugiés, le déplacement forcé des gens et la migration, dont les médias, le public et, parfois, certains de vos homologues parlementaires à l'étranger ne font pas assez de cas.
    J'aborderai trois situations différentes cet après-midi afin de présenter le sujet.
    La première a trait au Nord de l'Amérique centrale. Cela concerne les personnes qui quittent et fuient le Salvador, le Guatemala et le Honduras. J'y étais il y a un an, et pour quelqu'un comme moi, qui a passé la majeure partie de sa carrière sur le terrain dans des pays déchirés par la guerre au Moyen-Orient et en Afrique, je me suis rendu compte que le niveau et le type de violence sont très similaires à ce que vous verriez dans un conflit.
    Cette violence est infligée par des gangs criminels, le crime organisé, qui contrôlent, dans les faits, une partie du territoire ou des territoires dans ces trois pays, où la présence des forces de l'ordre et des autorités judiciaires est impossible, et où la présence de services publics, comme la santé ou l'éducation, est extrêmement limitée pour une certaine proportion de la population.
    Au moment où l'on se parle, nous croyons que, d'ici la fin de 2019, il y aura plus de 300 000 demandeurs d'asile et réfugiés des 3 pays de la sous-région, auxquels s'ajouteront 60 000 personnes qui seront renvoyées de force, principalement en provenance du Mexique et des États-Unis, qui pourraient avoir des soucis en matière de protection à leur retour dans l'un de ces 3 pays, et plus de 3 000 personnes déplacées à l'interne dans ces 3 pays. C'est une crise assez importante pour le HCR et ses partenaires.
    D'après l'enquête que nous avons réalisée auprès des personnes en mouvement qui, pour leur sécurité, tentent de se déplacer vers le Mexique ou les États-Unis, 71 % ont déclaré être directement visées par la violence de ces gangs criminels, en particulier les femmes, les enfants, les jeunes filles. J'ai interviewé des jeunes filles qui, à l'âge de 17 ans, avaient plusieurs fois été violées par les gangs, des jeunes hommes qui étaient enrôlés de force dans ces gangs criminels, mais également des membres de la communauté LGBTQ et, en particulier, des femmes transgenres, qui risquent particulièrement d'être prises pour cibles.
    À cela s'ajoutent des défenseurs des droits de la personne, des avocats, des dirigeants autochtones et un certain nombre d'enfants non accompagnés qui rejoignent ces caravanes, qui ont fait la une il y a quelques mois à leur arrivée au Mexique.
    Les habitants de ces trois pays se rendent dans plusieurs pays, notamment le Belize, le Costa Rica, le Guatemala et le Panama, mais arrivent principalement au Mexique. Comme nous le savons tous, ils leur est difficile de traverser aux États-Unis pour y demander l'asile.
    Quoi qu'il en soit, nous pensons qu'au Mexique nous avons de bonnes possibilités de stabiliser ces populations, à condition que le système d'asile mexicain puisse leur accorder le statut de réfugié, que nous puissions leur offrir l'accès à des moyens de subsistance leur permettant de se procurer les produits de base et à l'éducation et que nous soutenions les collectivités hôtes, en particulier les collectivités mexicaines pauvres qui les accueillent. Au Mexique, nous avons la COMAR, la Commission mexicaine d'aide aux réfugiés, qui fait le même travail que la CISR au Canada.
    Le Canada peut jouer un rôle actif, notamment dans la réinstallation des membres les plus vulnérables de la collectivité. Encore une fois, je parle des femmes qui sont exposées à un risque. Je parle des survivants de violence sexuelle et de la violence fondée sur le sexe. Je parle de la communauté LGBTQ, en mettant l'accent sur les femmes transgenres.
    Nous disposons de mécanismes pour identifier les personnes les plus exposées à un risque dans les trois pays que sont le Salvador, le Guatemala et le Honduras, afin d'éviter qu'elles ne soient persécutées ou exposées au risque d'être exploitées par des trafiquants, notamment à des fins sexuelles, pour les extraire de leur pays et les réinstaller dans un pays tiers. Les États-Unis ont fourni plus de 800 places à ces personnes l'année dernière.
(1540)
    En deuxième lieu, permettez-moi de parler brièvement du Nicaragua. Vous connaissez bien la situation. Depuis avril 2018, des violences politiques ont lieu au Nicaragua, en raison de la réforme de la sécurité sociale, de la hausse des impôts et de la réduction d'avantages. Il importe de souligner que 32 000 Nicaraguayens sont déjà partis au Costa Rica pour demander l'asile et que les autorités costariciennes estiment qu'entre 250 000 et 1 million de Nicaraguayens se trouvaient déjà au Costa Rica avant l'événement d'avril; ces personnes sont donc ce que nous appelons des réfugiés sur place, car elles ne peuvent potentiellement pas rentrer maintenant au Nicaragua. Cela exerce des pressions sur le système d'asile du Costa Rica, mais également sur les services et les moyens de subsistance pour ces Nicaraguayens.
    Le troisième et dernier point est le Venezuela, qui attire l'attention des médias depuis les deux ou trois derniers mois. Voici quelques chiffres pour expliquer la situation actuelle. On dénombre plus de 3,4 millions de Vénézuéliens hors de leur pays, en tant que réfugiés et migrants. Il convient de souligner un autre point important: depuis 2015, 2,5 millions de personnes ont quitté le pays. La plupart des Vénézuéliens à l'extérieur de leur pays sont partis après 2015. Nous prévoyons qu'à ce rythme, 5,3 millions de Vénézuéliens se trouveront à l'extérieur de leur pays d'ici la fin de 2019, dont 3,6 millions dans la sous-région. Nous parlons ici de la Colombie, du Pérou, de l'Équateur et du Brésil, dans cet ordre, quant au nombre de personnes.
    En particulier, nous avons vu 5 000 personnes quitter le Venezuela chaque jour. Le nombre de personnes qui ont quitté le pays n'a pas augmenté ces derniers jours ni ces dernières semaines, mais vous savez qu'il y a eu un renforcement de la militarisation et des forces de police déployées à la frontière, et le HCR rappelle aux autorités des deux côtés de la frontière que les gens devraient avoir le droit de quitter leur pays s'ils fuient pour sauver leur vie et veulent demander l'asile.
    Nous avons mené des enquêtes, en particulier en Colombie, en Équateur et au Pérou, sur les raisons pour lesquelles les gens quittent le Venezuela. Vous connaissez bien la situation. C'est une combinaison de facteurs économiques, mais aussi de violence. Soixante-sept pour cent d'entre eux ont signalé un incident lié à la protection. Ainsi, les deux tiers des personnes que nous avons interviewées devaient certainement être considérées comme des réfugiés et non pas comme des migrants, car elles fuyaient une situation de persécution ou de violation des droits de la personne. Seulement la moitié d'entre elles ont déclaré un incident aux autorités, affirmant qu'elles craignaient des représailles ou une absence d'action de la part des autorités si elles se plaignaient de ces incidents liés à la protection.
    Permettez-moi d'attirer rapidement l'attention sur quelques profils des personnes que nous voyons arriver en Colombie, au Pérou et en Équateur, plus particulièrement. Dix pour cent ont des besoins médicaux. Ici, en particulier, nous avons des mères qui allaitent ou des femmes enceintes qui n'ont pas accès aux services au Venezuela. Seize pour cent des personnes qui arrivent dans ces pays sont des personnes âgées qui ont du mal à survivre et à avoir accès aux médicaments, notamment. Sept pour cent sont des enfants ayant des besoins médicaux. Deux pour cent sont des personnes handicapées. Trois pour cent sont des enfants non accompagnés ou séparés, des enfants qui arrivent seuls sans tuteur légal ou sans leurs parents.
    Avec les Nations unies, nous essayons de renforcer notre intervention au Venezuela en matière de nutrition, de santé et de protection. Le HCR est présent depuis longtemps au Venezuela, car il se préoccupe du cas de plus de 850 000 personnes là-bas, surtout des réfugiés et des demandeurs d'asile colombiens. Un certain nombre de ces Colombiens ont été forcés de rentrer en Colombie, parfois même contre leur gré, pour être réinstallés dans leur propre pays.
    Malheureusement, en ce moment même, le financement demandé par les Nations unies, y compris les ONG, accuse un déficit de financement de 55 %.
(1545)
    Je m'arrête ici. Je suis ouvert aux questions, remarques ou suggestions du Comité.
    Vous êtes exactement à 10 minutes et zéro seconde. Je vous remercie.
    Nous commençons par M. Whalen, pour sept minutes.
    Je suis désolé, monsieur le président. Je ne pense pas pouvoir promettre ce degré de précision.
    Faites de votre mieux.
    Merci encore d'être venu, monsieur Beuze. Il est toujours très utile d'obtenir des données factuelles.
    Quand nous parlons de l'ampleur du problème existant pour les personnes déplacées en Amérique centrale et dans le Nord de l'Amérique du Sud, il me semble que le problème au Venezuela est en réalité beaucoup plus important que dans les autres pays.
    Pouvez-vous nous dire si vous avez suffisamment de fonds pour résoudre l'un des problèmes qui se posent dans la région, sans parler de ce que vous exposez — un problème au Venezuela qui passera de 3,4 millions de personnes actuellement à 5,4 millions à la fin de l'année —, et ce que signifie l'ampleur de ce changement?
    Merci beaucoup de cette question importante.
    La question du financement est toujours critique. Lors de l'étude générale, j'ai eu l'occasion d'informer le Comité que nous recevions toujours des fonds généreux du Moyen-Orient et, dans une moindre mesure, de l'Afrique subsaharienne. Juste pour vous donner quelques chiffres, nous avons commencé l'année au Mexique avec 2 % du financement dont nous avons besoin pour intervenir en particulier auprès des personnes qui font partie de la caravane ou celles qui viennent seules. Deux pour cent des fonds ont été mis à notre disposition pour commencer l'année.
    Si vous regardez la situation du déplacement interne dans les trois pays, le Salvador, le Guatemala et le Honduras, où il est important de s'attaquer aux causes profondes et de permettre aux personnes qui sont renvoyées de force de s'installer, nous disposons d'un financement extrêmement limité — je n'ai pas le montant, mais les fonds sont très limités — pour offrir des moyens de subsistance, permettre aux enfants d'aller à l'école ou fournir des soins médicaux et psychologiques aux victimes de violence sexuelle et fondée sur le sexe.
    En termes relatifs, le Venezuela a attiré un financement assez important. L'essentiel, c'est de ne pas oublier les 3,4 millions de personnes vivant à l'extérieur du Venezuela. Cela concerne non pas seulement le HCR, mais également tous les partenaires. L'attention, en particulier des médias et de certains milieux politiques, a été largement concentrée sur le Venezuela, mais nous avons 3,4 millions de Vénézuéliens à l'extérieur, et il devient difficile pour les pays de la région, qui sont tous des pays à revenu faible et intermédiaire, de fournir tous les services. Cela a créé des tensions avec les collectivités hôtes. Nous avons vu des agressions xénophobes, en particulier en Équateur.
    Le HCR, bien sûr, est surtout destiné à aider les personnes déplacées dans un pays tiers ou le pays dans lequel elles sont arrivées. Une organisation financée par la communauté internationale pourrait-elle jouer un rôle pour ce qui est d'accueillir des personnes qui reviennent dans leur pays d'origine? Le HCR a-t-il un rôle à jouer au Venezuela, à la fois en aidant les réfugiés ou demandeurs d'asile colombiens, mais également en aidant les Vénézuéliens rapatriés et qui sont renvoyés?
    Notre optique est très axée sur les réfugiés, comme l'indique le nom de notre institution, mais notre mandat ne s'arrête pas lorsque les réfugiés rentrent dans leur pays. Nous nous occupons également de la réinsertion lorsqu'ils sont de retour chez eux, surtout s'il s'agit d'un rapatriement volontaire, c'est-à-dire lorsque les personnes ont pu choisir leur retour librement et en connaissance de cause, sans y avoir été contraintes. Nous avons aussi ce mandat.
    Nous avons également le mandat relatif aux personnes déplacées à l'intérieur du pays. Nous nous occupons de certaines personnes déplacées au Venezuela qui vont marcher vers la frontière dans l'intention, peut-être, de la traverser, ou qui se trouvent dans les trois pays du Triangle du Nord de l'Amérique centrale. Nous avons le mandat de nous occuper d'elles du point de vue de la protection des droits de la personne et du logement.
    D'autres organismes des Nations unies — l'UNICEF pour l'éducation, le PAM, le Programme alimentaire mondial, pour la nourriture — s'occupent des personnes déplacées à l'intérieur, mais cette initiative est coordonnée entre les organismes des Nations unies.
    Notre mandat ne se limite donc pas aux réfugiés. Il inclut les rapatriés, les personnes qui sont en voie d'être rapatriées, mais également celles déplacées à l'interne.
(1550)
    La hausse dont vous avez parlé, qui est attendue cette année et qui passera de 3,4 millions à 5,4 millions de personnes, est considérable: cela représente 6 % de la population du Venezuela. Je me demande quels autres appuis seront requis le long de la frontière, là où les Vénézuéliens partiront pour le Chili, le Pérou ou le Brésil. Par ailleurs, s'ils ferment maintenant la frontière à l'aide alimentaire, le HCR est-il réellement en mesure de faire face à la situation sur le terrain?
    Votre question comporte deux volets dont l'un concerne ce que nous pouvons faire au Venezuela. Essentiellement, le secrétaire général des Nations unies a proposé d'aider le gouvernement du Venezuela à fournir de l'aide. Vous savez que, au cours de la fin de semaine, le gouvernement du Venezuela a fermé toutes les frontières, y compris la frontière maritime et les zones aériennes spéciales, mais les Nations unies sont prêtes à aider les autorités à acheminer de l'aide humanitaire dans le pays.
    Maintenant, en ce qui concerne les besoins des pays d'accueil de réfugiés, il s'agira d'une augmentation considérable du nombre de personnes, ce qui pèsera lourdement sur les ressources de ces pays. Vous avez peut-être constaté qu'au cours des trois derniers jours, la frontière entre la Colombie et l'Équateur a été fermée, limitant les mouvements de population. Nous savons que ce que les Vénézuéliens ont fait jusqu'à présent, c'est réellement un mouvement allant du Venezuela vers la Colombie — il y en a encore un million en Colombie — puis qui descend jusqu'au Pérou.
    Si vous regardez la carte, le Pérou est plutôt au sud comparé au Venezuela. En fermant la frontière entre l'Équateur et la Colombie, vous limitez la capacité des personnes de trouver la sécurité, mais également de trouver des moyens de subsistance, l'accès aux soins de santé, l'accès à l'éducation pour leurs enfants, etc.
    Je crois comprendre que cela était justifié par la montée des attitudes xénophobes des collectivités hôtes en Équateur, qui se disputaient les mêmes ressources que les Vénézuéliens nouvellement arrivés.
    Sans soutien, nous verrons de plus en plus de frontières fermer.
    Il vous reste une demi-minute, mais je vais vous interrompre et arrêter le chronomètre pendant une seconde.
    Le HCR a fourni une trousse avec une carte et ces statistiques. Nous devons la faire traduire. Vous obtiendrez également un élément visuel à ce sujet; nous ne l'avons pas encore fait traduire.
    Je suis désolé, continuez.
    Très rapidement, vous parlez de violence sexuelle, mais vous n'avez rien dit à propos de la traite de personnes. Existe-t-il des éléments de preuve selon lesquels cela fait également partie du problème en Amérique latine et en Amérique du Sud?
    Merci beaucoup de me le rappeler. J'aurais dû le mentionner.
    Très rapidement.
    En effet, plusieurs réseaux de trafiquants exercent leurs activités dans les pays du Triangle du Nord de l'Amérique centrale, en particulier vers le Mexique et au Mexique.
    Merci.
    Madame Rempel.
    Brièvement au sujet du Venezuela, nous pensons que le régime de Maduro, comme on l'a dit, bloque l'aide, ce qui aggrave encore la situation. On a laissé entendre que, si une motion était déposée aux Nations unies visant à retirer leur accréditation aux diplomates de Maduro dans le monde entier, cela permettrait peut-être à des organisations comme le FMI, le Fonds monétaire international, d'empêcher le régime de Maduro de continuer à puiser dans les réserves d'or limitées du Venezuela.
    Le Canada a-t-il tenté de faire pression en faveur d'une telle action aux Nations unies?
    Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question, car nous traitons de l'aspect humanitaire de la crise.
    D'accord. Merci.
     Monsieur le président, je vais proposer la motion suivante:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité mène une étude sur la réunification des familles de réfugiés yézidis; que cette étude examine l'arriéré du parrainage des réfugiés yézidis; que cette étude envisage d'élargir la définition des membres de la famille pour les yézidis compte tenu des graves traumatismes qu'ils ont vécus aux mains de Daech; que cette étude examine la Disposition sur le délai prescrit d'un an; que des responsables ministériels comparaissent à au moins une rencontre; que le ministre de l'Immigration soit invité à comparaître; que le Comité présente ses conclusions à la Chambre; que cette étude ait lieu avant le 1er mai 2019 et; que conformément à l'article 109 du Règlement, le gouvernement présente une réponse exhaustive.
(1555)
    Nous pouvons recevoir un avis de motion pour cela.
    ... et nous en avons reçu un.
    Ah oui?
    Oui.
    D'accord. Merci.
    Merci.
    Monsieur le président, j'aimerais prendre un moment pour expliquer pourquoi je crois qu'il nous incombe d'entreprendre cette étude à ce stade-ci.
    Tout d'abord, de nombreux rapports dans les médias sont parus cette semaine au sujet de la communauté yézidie, car Daech est en train d'être éradiqué de certains de ses bastions en Syrie. Plus tôt cette semaine, par exemple, dans une des histoires, on a déclaré que 11 enfants yézidis avaient été rescapés dans un des bastions et avaient été amenés à la frontière irakienne.
     En fait, ce matin, j'ai eu l'occasion de rencontrer Mme Nafiya Naso, la responsable de la Canadian Yazidi Association. Dans une conférence de presse, elle a affirmé que certains de ces enfants récemment rescapés avaient des membres de leur famille qui avaient été amenés ici, au Canada.
    J'aimerais présenter un bref historique, pour mes collègues du Comité et pour vous, monsieur le président, qui n'avez peut-être pas été ici tout au long de la présente législature, de l'initiative et des raisons pour lesquelles il est important d'entreprendre cette étude aujourd'hui.
    D'abord, pour vous donner un historique annoté de cet enjeu particulier, durant la campagne de 2015, on a mis en lumière une vérification qui avait été effectuée sur l'ordre de l'ancien ministre de l'Immigration, Chris Alexander, afin d'examiner la liste des gens envoyés vers le Canada en tant que réfugiés parrainés par le gouvernement par les Nations unies. Selon ma compréhension, la vérification servait à voir si les minorités persécutées figuraient sur cette liste.
    Pendant la campagne, la vérification a suscité une vive controverse, au point où nous avons découvert un extrait où l'on demandait de but en blanc à l'actuel premier ministre: « Si vous formez le gouvernement, accorderiez-vous la priorité aux minorités ethniques ou religieuses persécutées ou leur autoriseriez-vous l'accès au pays? » Sa réponse a été: « Non, c'est dégoûtant. »
    Par la suite, il est devenu très clair que les membres de la communauté yézidie ne s'étaient pas vu accorder la priorité par les Nations unies ni par le Canada dans le cadre de l'initiative concernant les réfugiés syriens ou irakiens que le gouvernement a mise en place à la fin 2015 et au début 2016.
    Ensuite, l'opposition a présenté deux motions à la Chambre des communes — la première a été rejetée — pour déclarer un génocide contre le peuple yézidi. Puis, on a déployé de nombreux efforts politiques et exercé des pressions sur le gouvernement, une fois de plus, pour qu'il déclare un génocide et pour faire en sorte que les membres de la communauté yézidie se voient accorder la priorité pour venir au pays.
    Ensuite, de nombreuses questions ont été posées à la Chambre des communes, parce qu'il a fallu au gouvernement une assez longue période pour respecter son engagement en vertu de cette motion. Après, bien sûr, d'autres études du Comité se sont penchées sur la réinstallation de la communauté yézidie, étant donné sa situation exceptionnelle au Canada, en ce sens qu'il n'y avait pas de grande communauté de la diaspora au pays. Nombre de personnes qui étaient amenées ici avaient évidemment subi des traumatismes graves. Il n'y avait pas d'interprètes disponibles, comme ce que nous avons connu ici, au Comité. Monsieur le président, vous vous en souviendrez également.
    Une des principales recommandations issues de cette étude particulière consistait à accélérer la réunification des membres de la famille survivants de cette communauté, car... J'ai rencontré des gens de cette communauté. J'ai rencontré une femme à Winnipeg, qui avait été victime d'enlèvement. Elle a dit qu'elle voulait retourner là-bas, parce qu'elle pourrait, à tout le moins, être auprès de sa famille. Le gouvernement lui avait dit que la famille serait réunie, mais bien sûr, le ministre n'avait pas donné suite à cela.
     Par la suite, comme le gouvernement n'est pas allé de l'avant avec ces recommandations, j'ai demandé l'adoption de ce rapport à la Chambre des communes, ce qui a forcé la mise aux voix de cette question à la Chambre. Après ce vote, le gouvernement n'a toujours pas agi sur cette question.
     Pour mes collègues, j'aimerais juste décrire la situation actuelle, car j'ai reçu des courriels et des appels de dizaines de membres de la communauté, qui se trouvent en ce moment même au Canada et se sont fait dire par le gouvernement que, même dans les situations où leur cas répond aux critères du délai prescrit de un an et qu'ils disposent de fonds amassés grâce au programme de parrainage privé des réfugiés... le ministre dit actuellement à ces familles qu'il faudra attendre 24 mois de plus pour que leur demande soit traitée. J'ai obtenu la réaction suivante: « Comment quelqu'un qui franchit la frontière dans le Nord de l'État de New York depuis les États-Unis obtient-il un délai de traitement le jour même, mais » — insérez ici le nom d'un parent — « qui vient de fuir Daech se fait dire qu'il faudra attendre plus de deux ans? »
(1600)
    Pour être claire, la situation dans le Nord de l'Irak, pendant que les bastions de Daech sont en train d'être retirés en Syrie, n'est pas plus sécuritaire pour les yézidis qu'elle l'était il y a un an ou deux. Bon nombre des camps en Irak même sont dans une situation désastreuse. La communauté elle-même fait face à des persécutions au sein de ces camps et à l'étranger. Elle ne peut pas rentrer chez elle, car les maisons ont été rasées par Daech. Il y a des fosses communes dans ses anciennes maisons. Il demeure un grand degré de menace pour cette communauté, et bien franchement, de traumatismes également.
    Nous voilà dans une situation qui, je le répète, a été abordée d'innombrables fois au Comité. La communauté elle-même demeure en grande partie déplacée à l'intérieur de l'Irak. Certaines personnes ont été sauvées — des enfants qui avaient été enlevés par Daech, des femmes qui avaient été enlevées par Daech à des fins d'esclavage sexuel —, mais elles n'ont pas de membres de leur famille pour s'occuper d'elles ni ne sont en sécurité dans le camp.
    Outre cette question particulière, je crois que le Canada et de nombreuses collectivités doivent dialoguer au sujet de ce qui constitue un réfugié, car nous voyons maintenant des situations où le gouvernement ici, au Canada, consacre un nombre démesuré de ressources à des gens qui sont aux États-Unis et dit aux survivants du génocide qu'il faudra attendre de nombreuses années avant de venir.
    J'aimerais faire remarquer une autre chose. Le délai prescrit de un an, ou le programme permettant aux réfugiés d'être réunis avec leur famille, définit la famille ainsi: les époux et les enfants de moins de 19 ans. Il y a une certaine disposition pour les petits-enfants, mais c'est très limité.
    Voici la chose intéressante. Je ne suis pas certaine si mes collègues le savent, mais en vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs avec les États-Unis, si quelqu'un entre illégalement au Canada aujourd'hui depuis le Nord de l'État de York et demande l'asile, des exceptions à l'Entente sur les tiers pays sûrs s'appliquent à tout membre de la famille de cette personne qui se trouve aux États-Unis.
    Une situation potentielle de migration en chaîne ou de traitement en chaîne des demandes d'asile pourrait se produire au Canada. Essentiellement, si vous ou moi franchissions illégalement la frontière depuis les États-Unis et demandions l'asile, le lendemain, votre famille pourrait se rendre à un point d'entrée légal et demander l'asile en vertu d'une exception prévue à l'Entente sur les tiers pays sûrs.
    Pour revenir à la définition de la famille dans le cadre du délai prescrit de un an, ce sont les époux et les enfants de moins de 19 ans; mais vous êtes un membre de la famille et que vous réclamez une exception pour venir demander l'asile au Canada, voici la définition de la famille en vertu de l'exemption prévue dans l'ETPS: l'époux ou l'épouse, le tuteur légal, les enfants, le père ou la mère, le frère ou la soeur, le grand-père ou la grand-mère, le petit-enfant, l'oncle ou la tante, le neveu ou la nièce, le conjoint de fait ou le partenaire de même sexe.
    Nous avons une situation où un survivant d'un génocide qui se trouve au Canada se fait dire par notre gouvernement que le membre de sa famille n'est pas admissible à venir au Canada, mais quelqu'un qui a un statut légal aux États-Unis dans le Nord de l'État de New York peut franchir illégalement la frontière, puis faire venir le lendemain les membres de sa famille sous prétexte d'une définition de la famille beaucoup plus élargie.
    Je dirais que cela semble légèrement ridicule. Cela semble... Je ne sais pas. Je dirais que cela ressemble à une abrogation ou à une mauvaise compréhension totale des priorités. Je sais que mes collègues ici n'ont pas l'impression que nous devrions nécessairement accorder la priorité aux survivants du génocide dès le départ, mais j'ai l'impression que quelque chose cloche.
    Des membres de la communauté ont écrit à mon bureau après avoir diligemment écrit au ministre, après nous avoir vus voter sur ce rapport à la Chambre des communes, après être revenus sans cesse à Ottawa, et ils sont très frustrés de voir la façon dont le gouvernement a choisi d'accorder la priorité dans cette situation.
(1605)
    Dans le but de valider pourquoi cette étude devrait se faire en ce moment et faire fond sur le débat concernant la motion d'adoption que nous avons eu à la Chambre des communes, je vais vous lire certaines de lettres que j'ai reçues à mon bureau. Elles proviennent de yézidis qui ont survécu à Daech et qui sont maintenant au Canada. Il s'agit de certains des cas où le ministre de l'Immigration a choisi d'accorder la priorité peut-être pas de la bonne façon, et c'est pourquoi, je crois, nous avons besoin de cette étude.
    Le premier groupe de gens vient de Calgary, puis il y en a d'autres de Winnipeg. Deux grandes catégories de gens en font partie. Dans le premier groupe, ce sont des gens qui ont amassé des fonds de parrainage dans un groupe de cinq, que ce soit par l'intermédiaire du projet Ezra, du travail là-bas... les fonds sont là, ainsi que leur demande. Ils respectent les critères du délai prescrit de un an, et le ministre leur dit qu'ils peuvent rester dans leur camp de réfugiés pendant trois ou quatre ans, pendant que nous accordons la priorité à des gens qui viennent ici depuis le Nord de l'État de New York.
    Il y a ce groupe de gens, puis il y a un grand groupe de personnes qui, pour quelque raison que ce soit, se font dire que leur famille n'est pas admissible à venir au Canada, peut-être parce qu'elles ne l'ont pas inscrite sur leur demande de délai prescrit de un an, ou parce que la définition de famille pour les victimes du génocide n'est pas la même que pour une personne provenant du Nord de l'État de New York.
    Je vais commencer par la dernière série de cas, parce que je veux vous montrer ce qui se passe dans une situation de génocide si vous êtes rassemblés, emmenés et jetés en esclavage sexuel, et séparés de votre famille. Lorsque vous remplissez une demande pour venir au Canada, vous pourriez ne pas savoir si votre famille est toujours en vie. Ce que nous avons vu à de nombreuses occasions, ce sont des gens qui ont présumé que leur famille était morte; puis, par une sorte de miracle, on a découvert qu'elle était vivante, mais nous avons des bureaucrates à IRCC qui leur dit que leur famille n'est pas admissible, même si elle s'inscrit dans la définition existante.
    Je ne vais pas lire de noms, par mesure de sécurité, mais je serai heureuse de les fournir de façon confidentielle au président, si cela l'intéresse, pour qu'il puisse vérifier qu'il s'agit en fait de lettres réelles, ce que je peux lui assurer qu'elles sont. Ce sont des lettres envoyées à moi et au ministre de l'Immigration.
    La première va comme suit: « Je vous écris pour vous demander votre aide afin de nous réunir, ma famille et moi. Je suis venue au Canada en 2019 dans le cadre du programme sur les victimes de Daech, et ma famille a subi des horreurs innommables aux mains de Daech. Je suis arrivée à Calgary avec seulement quatre de mes sept enfants. Les trois autres enfants et mon époux demeurent aux mains de Daech. Avant son arrivée, je vivais dans un village avec mon époux et nos sept enfants. Nous n'étions pas une famille riche, mais nous étions heureux, car nous vivions tous ensemble. Quand Daech est arrivé, ma famille a été capturée. Nous avons été transférés à Tal Afar, où nous avons été séparés. Mon époux a été enlevé, mais il nous a ensuite été retourné, car il avait convaincu nos ravisseurs de Daech que nous étions musulmans. Après un mois à Tal Afar, nous avons été transférés vers Mossoul. Puis, nous avons de nouveau été transférés vers un village situé près de Tal Afar. Nous nous déplacions constamment dans le pays, dans le but de nous cacher des fréquentes attaques à la bombe. »
    Elle poursuit: « Un jour, Daech a décidé d'enlever les hommes et les garçons afin de pouvoir les utiliser comme soldats et ouvriers, et ils ont pris ma fille de 11 ans, deux de mes fils et mon époux. Ma fille de 11 ans a été forcée de se marier avec un homme musulman, et deux de mes fils et mon époux ont été enlevés afin de travailler comme soldats et ouvriers pour Daech. J'ignore ce qui leur est arrivé, et je suis hantée à la pensée qu'ils souffrent. Lorsque mon époux, ma fille et deux de mes fils ont été enlevés, mes quatre enfants restants et moi avons été placés dans une prison souterraine, où nous avons été agressés. Après trois mois, nous avons été transférés vers une autre prison. Un jour, on a appelé nos noms, et nous avons été escortés jusqu'à un autobus, où on nous a donné notre liberté à la suite d'un échange de prisonniers. Après notre libération de Daech, le Canada nous a approchés et nous a offert de nous réinstaller dans ce pays. Au départ, j'étais très réticente à partir, parce que mon époux et mes trois enfants demeuraient en captivité, et je voulais être là pour eux s'ils étaient libérés. Cependant, comme mère seule avec quatre enfants, je n'arrivais pas à subvenir aux besoins de ma famille en Irak, car, en tant que femme, je n'avais pas de possibilités d'emploi. Par conséquent, j'ai choisi d'accepter la réinstallation au Canada, car je devais donner un avenir à mes enfants. C'est pour leur bien que je suis déménagée avec eux à Calgary, au Canada. »
(1610)
    Elle poursuit: « Je vis maintenant en sécurité au Canada et je suis reconnaissante de l'être. Toutefois, je continue d'être rongée d'inquiétude au sujet des membres de ma famille, qui demeurent en captivité. Je me demande constamment où ils sont, ce qu'ils font et s'ils souffrent ou non. Je n'ai aucune idée s'ils sont morts ou vivants. Je me sens coupable d'être si loin de mes enfants qui demeurent aux mains de Daech. Je me demande ce qu'ils vont faire s'ils sont libérés et que je ne suis pas là pour les réconforter. Mon corps est au Canada, mais mon esprit se trouve en Irak. Ces inquiétudes m'empêchent de dormir et d'apprendre l'anglais. J'éprouve des difficultés au Canada, où il n'est pas facile d'être une mère seule avec quatre enfants tout en tentant de s'adapter à une nouvelle culture, à un nouvel environnement et à une nouvelle langue. J'ai besoin de l'aide de ma famille. J'aimerais que le gouvernement me réunisse avec mes parents qui demeurent en vie, c'est-à-dire ma soeur et mon oncle. Ma soeur s'appelle — et elle met leur nom ici — et elle a cinq enfants. »
    Elle indique l'endroit où ils se trouvent et dans quel camp. Elle donne les noms de son oncle, de son épouse et de leurs enfants. Elle dit: « Veuillez les faire venir au Canada afin de les garder en sécurité et de m'aider moi et mes enfants à nous réinstaller au Canada. Je vous prie de m'aider à me réunir avec ma famille restante qui a survécu, pour que nous puissions nous entraider, guérir de nos traumatismes et viser un avenir productif au Canada. »
    La prochaine lettre provient aussi de...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président; d'abord, j'aimerais juste suspendre les travaux quelques secondes pour que nous puissions savoir comment répondre.
    Non, je ne cède pas la parole.
    M. Nick Whalen: Je reconnais que c'est à la députée de poursuivre, mais...
    L'hon. Michelle Rempel: Vous ne pouvez pas présenter une motion pour suspendre les travaux en invoquant le Règlement, monsieur le président.
    En fait, il n'a pas déposé de motion. Il a demandé la suspension des travaux, ce qui est recevable.
    Non, ce ne l'est pas.
    Le président: Puis-je m'entretenir à ce sujet?
    L'hon. Michelle Rempel: Non. Vous ne pouvez pas déposer de motion en invoquant le Règlement, monsieur le président, ni ne pouvez suspendre les travaux arbitrairement pendant que j'ai la parole.
    En fait, je crois que je peux le faire.
    Faites preuve d'autorité.
    Je viens de consulter la greffière, et ce n'est pas une motion. C'est une demande. Je vais la retenir un instant, et cela me donne l'occasion de m'expliquer aux témoins.
    Je sais que M. Beuze a été ici assez souvent pour savoir que cela arrive, et que, durant la période de sept minutes d'un député, celui-ci peut prendre le temps de déposer une motion qui a fait l'objet d'un avis conforme. Il s'agit d'une motion qui a été présentée au Comité le 11 février, et nous avons donc reçu le préavis requis.
    Tant et aussi longtemps que le député n'est pas redondant et qu'il parle de la motion, il a la parole aussi longtemps qu'il le souhaite. J'aimerais souligner, pour les membres du Comité, que nous avons d'autres témoins qui sont venus parler des millions de personnes qui ont été déplacées et qui sont en danger en Amérique latine, en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Malheureusement, l'une de ces personnes devra partir à 17 h 30 pile et elle pourrait ou non avoir l'occasion de s'exprimer au sujet des enjeux importants qui figurent à notre ordre du jour aujourd'hui.
    Cela dit, je vais retenir la demande de suspension des travaux jusqu'à ce que Mme Rempel termine, puis nous aurons le temps de les suspendre.
    Madame Rempel.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poursuivre, mais j'aimerais dire que je crois que vous avez laissé sous-entendre dans votre commentaire que ce n'est pas important, et je dirais exactement le contraire.
    Aux témoins qui sont dans la salle... parfois, vous devez vous battre contre le gouvernement pour le faire agir, et c'est ce que je suis en train de faire pour un groupe de survivants du génocide qui n'ont pas vu le présent gouvernement agir.
    Le prochain cas, et c'est pourquoi je crois que ce...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Nous avons un rappel au Règlement.
    Juste aux fins du compte rendu, la députée a mentionné que le présent gouvernement n'a pas agi, et je ferais valoir le contraire. Je crois que le génocide...
    Ce n'est pas un rappel au Règlement, monsieur le président. C'est un débat. Il ne devrait pas être autorisé à radoter de la sorte.
    J'aimerais dire que...
    C'est un débat, monsieur le président.
    J'aimerais dire que, en 2014...
    L'hon. Michelle Rempel: J'invoque le Règlement, ce...
    M. Marwan Tabbara: Je vais retirer le...
    Je reconnais qu'il s'agit d'une question de débat. Le député l'a définie ainsi, et le Comité peut entendre ce qu'il dit, mais nous reviendrons à ce point plus tard. Merci.
(1615)
    Merci.
    La lettre suivante dit ceci: « Je vous demande votre aide pour être réunie avec ma famille, afin que je puisse me réinstaller avec succès au Canada. Je suis arrivé au Canada en décembre 2017 avec mon épouse et nos deux filles. Avant Daech, j'étais étudiant, et ce, jusqu'en 2010. J'ai dû abandonner mes études, car il m'a fallu travailler comme homme de ménage pendant quatre ans pour subvenir aux besoins de ma famille. Quand Daech est arrivé, j'étais à la maison. Habituellement, quand je travaille, je me trouve dans une ville différente, loin de chez moi. Dès que nous avons constaté ce que le groupe allait nous faire, nous avons fui vers les montagnes. Nous y sommes restés pendant sept jours. Un de mes frères est resté derrière pour aider notre voisine qui allait accoucher. Mon frère a fini par arriver dans les montagnes en sécurité avec notre voisine. Nous avons quitté les montagnes, marchant pendant environ quatre heures jusqu'à la frontière syrienne. À notre arrivée à la frontière, nous avons été accueillis par des combattants du PKK, qui nous ont fourni des véhicules. Nous avons réussi à nous rendre jusqu'à une ville où nous avons vécu dans une école pendant environ trois mois. Après, nous avons été transférés vers un autre camp et y sommes restés jusqu'à notre départ pour le Canada. J'ai toujours des membres de ma famille dans ce camp. Même si j'étais dans un camp, je travaillais avec certaines ONG. Voici la liste des membres de la famille qui ont survécu et l'endroit où ils se trouvent. »
    Puis, il énumère sa mère, son frère, sa belle-soeur, son frère. Encore une fois, des gens qui seraient admissibles en vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs ne le sont pas dans ce cas-ci.
    Il poursuit: « La séparation des membres de notre famille — et l'on voit ici de nombreux noms — m'a touché de toutes les façons que vous pouvez imaginer. Nous ne pouvons cesser de penser à eux. Leurs conditions de vie ne sont pas bonnes. Ce n'est pas sécuritaire pour eux là-bas. C'est difficile de se concentrer à l'école, parce que nous nous inquiétons au sujet de notre famille. Je demanderais au gouvernement canadien d'aider à faire venir ma famille au Canada. La santé de ma mère n'est pas bonne, et les conditions de vie non plus. Mon frère a récemment eu un accident et il est maintenant handicapé. Ils ont besoin de notre aide. »
    Encore une fois, cette lettre provient de Calgary: « Je vous écris pour vous demander votre aide afin de me réunir avec ma fiancée » — il donne le nom — « qui vit actuellement à Zakho, dans un immeuble abandonné. Je suis très inquiet à son sujet. Sa santé mentale souffre parce qu'elle a survécu à l'emprisonnement aux mains de Daech. Depuis qu'elle s'est enfuie de ses ravisseurs, elle vit dans des conditions très difficiles. Elle demeure dans un immeuble abandonné avec sept autres personnes. Elle craint constamment pour sa sécurité. Elle n'a pas ressources et vit pauvrement. Nous nous sommes fiancés il y a plusieurs mois et avons besoin d'être réunis afin de commencer notre vie ensemble. Nous aimerions fonder une famille. Notre séparation est difficile. Il est difficile pour moi de me réinstaller, et je suis inquiet par rapport à sa sécurité en Irak. Durant mon entrevue, avant de venir au Canada, j'ai parlé d'elle aux représentants. Nous aimerions qu'elle vienne me rejoindre au Canada pour que nous puissions commencer notre vie ensemble et fonder notre propre famille. Veuillez m'aider à nous réunir, elle et moi. »
    Comme vous le savez, monsieur le président, et comme vous pouvez l'imaginer, je reçois toutes ces lettres, et c'est pourquoi j'estime qu'il s'agit d'une justification importante pour la motion.
    La prochaine lettre dit ceci: « Je vous écris pour vous demander votre aide afin de me réunir avec ma famille. Je suis venue au Canada dans le cadre du programme des victimes de Daech en décembre 2017, après avoir été détenue en captivité par Daech pendant neuf mois, où j'ai été agressée, violée et torturée. Avant que Daech arrive à Sinjar, je vivais avec ma mère, mon père, quatre frères et leur famille, dans un village appelé Tal Banat, où nous travaillions dans l'agriculture et la construction. Un jour, Daech est venu à notre village, et nous avons été forcés de fuir vers Sinjar, où nous avons été encerclés par des membres de Daech. Dans une attaque à la bombe perpétrée par Daech, ma soeur et ma belle-mère ont été tuées. Daech a fini par envahir Sinjar et nous a confrontés, nous donnant un ultimatum: nous convertir à l'islam ou nous faire tuer. Pour sauver nos vies, nous nous sommes convertis à l'islam. »
    La lettre se poursuit: « Nos vies ont peut-être été épargnées, mais nos tourments commençaient à peine. Nous avons été détenus en otage et nous pouvions sentir la chair en décomposition des fosses communes et voir les cadavres pourrir dans les rues. Plus tard, les filles et les femmes non mariées ont été vendues à des hommes musulmans. J'ai fini par être transportée vers une base de l'armée à Mossoul, où mes ravisseurs de Daech ont essayé de me marier à des hommes musulmans. Toutefois, j'ai un handicap et je dois me promener en fauteuil roulant, donc on n'a pas réussi à me marier. J'ai été détenue dans une prison aux conditions déplorables, où je ne pouvais pas prendre de bain et n'avais jamais assez à manger. J'ai ensuite été transférée vers une autre prison, et de nouveau transférée » — je ne mentionne pas le lieu — « où j'ai été mise en vente. Une organisation a payé pour ma libération et celle de ma mère, puis, quelques jours plus tard, on nous a rendu notre liberté. Après notre libération, ma mère et moi nous sommes rendues jusqu'à Zakho où nous avons vécu dans un camp. Dans ce camp, nos conditions de vie étaient difficiles. Il faisait très chaud, il n'y avait pas assez à manger et il n'y avait aucun service. J'ai fini par être choisie pour la réinstallation au Canada dans le cadre du programme des victimes de Daech. Je suis venue avec ma soeur et ses deux enfants. Malheureusement, ma mère n'a pas été choisie en vue de la réinstallation, et j'ai dû la laisser derrière moi. Elle demeure en Irak avec mon père, mes frères et mes soeurs. Mes frères sont toujours dans ce camp, dans l'attente de parents qui restent aux mains de Daech. Mes soeurs vivent aussi dans ces camps. Elles souffrent et aimeraient me rejoindre au Canada. »
(1620)
    Il poursuit: « Je vous écris pour vous demander de faire venir au Canada les membres de ma famille suivants », et il les énumère: ses filles, ses soeurs et ses parents. « Ils vivent dans des conditions très difficiles dans ces camps; ils vivent dans des tentes, dans des conditions dangereuses. De fait, il y a souvent des incendies; la tente de ma soeur a été incendiée, et son beau-père a péri dans l'incendie. Ils n'ont pas suffisamment de nourriture ou d'argent les soins de santé sont inadéquats, et ils continuent d'être exposés à de graves risques de persécution. Je m'inquiète pour les membres de ma famille. Je pense toujours à eux. Comme mon esprit est toujours au Kurdistan, je n'arrive pas à me concentrer à l'école. Par conséquent, j'ai de la difficulté à apprendre l'anglais. Comme je sais à quoi ressemble la vie dans ce camp, je comprends la souffrance des membres de ma famille qui demeurent là-bas. En plus, je suis handicapé et je me déplace en fauteuil roulant. Je suis incapable de quitter la maison sans avoir de l'aide; c'est pourquoi j'ai besoin que ma famille vienne me rejoindre au Canada pour qu'elle puisse m'aider à me réinstaller avec succès ici. J'ai présenté une demande au titre du regroupement familial, mais elle a été refusée. Je souhaite désespérément avoir ma famille à mes côtés et je crains de ne pas pouvoir être en paix tant que les membres de ma famille ne seront pas ici. Je vous prie de m'aider à faire venir les membres de ma famille afin qu'ils puissent être en sécurité et que nous puissions nous bâtir un avenir ensemble au Canada. »
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui pour demander au gouvernement canadien d'aider les yézidis et de m'aider à retrouver ma famille. Je suis arrivé au Canada en août 2017. Je suis venu avec ma soeur, mon épouse et mes deux enfants. En 2014, Daech est venu dans notre village et a retenu prisonniers les membres de ma famille pendant huit jours. Nous avons réussi à nous échapper, et nous avons fui vers les monts Sinjar, puis vers le Kurdistan, dans le Nord de l'Irak. Je mène une bonne vie ici au Canada, mais je suis toujours en train de penser à ma famille et à notre peuple là-bas. J'espère que le gouvernement peut m'aider à retrouver les membres de ma famille. Ma soeur vit au Kurdistan avec son époux et ses deux enfants. Ma mère a dit que la vie au camp était très médiocre. Ils sont menacés de persécution, et le gouvernement là-bas n'est pas en mesure de donner de l'argent pour acheter de la nourriture. Chaque fois que je parle à ma soeur, elle pleure et me supplie de la faire venir au Canada. Je tiens à elle et je suis attristé en pensant à elle. Je remercie le gouvernement canadien de nous avoir fait venir ici. J'espère qu'il pourra aider les yézidis qui vivent toujours dans des camps, particulièrement les membres de notre famille. Les conditions de vie dans les camps sont très mauvaises. Il n'y a pas de médicaments, pas de nourriture et pas d'eau. Ce n'est pas sécuritaire pour les yézidis de vivre dans les camps. Un grand nombre de femmes et d'enfants sont toujours prisonniers de Daech, et nous avons besoin d'aide pour les retrouver. »
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui pour vous demander de l'aide pour retrouver ma famille. Ma belle-soeur, ses enfants et moi-même sommes arrivés au Canada en décembre 2017. Le 3 août 2014, des membres de Daech sont venus dans mon village et nous ont forcés à nous convertir à l'islam, puis nous ont menacés de tous nous tuer. J'ai passé neuf jours au village. Le dixième jour, alors que les membres de Daech prenaient le repas, j'ai fui avec mon père, mon frère et d'autres personnes. Nous avons marché vers les montagnes, car nous devions quitter cet endroit qui n'était pas sécuritaire. Nous nous sommes rendus jusqu'au Kurdistan. Plus de 1 500 familles ont vécu dans une école au Kurdistan pendant environ trois mois. Mon père, deux de mes frères, un neveu et moi-même nous sommes ensuite installés dans un autre camp. Un de mes frères est toujours prisonnier de Daech, et nous ne savons pas où il se trouve à l'heure actuelle. Daech a relâché ma mère et ma soeur, qui est handicapée, en 2015 et en 2016 respectivement. Ma soeur vit maintenant au Canada. J'espère que le gouvernement pourra m'aider à faire venir mon cousin ici. Il vit dans un camp avec son épouse et ses deux enfants depuis 2014. Il a perdu ses deux parents alors qu'ils tentaient de s'enfuir vers les montagnes. Quand j'ai parlé à mon cousin, il disait vivre dans de mauvaises conditions au camp. Il a terminé ses études universitaires, mais il n'est pas en mesure de fréquenter l'école ni de travailler pendant qu'il vit au camp. En outre, il n'y a pas de nourriture, d'eau ni de médicaments au camp. Le gouvernement nous a fait venir ici, mais nous n'arrivons tout de même pas à nous sentir en sécurité. Nous avons aussi très peur que Daech tue les membres de notre famille à la maison. Aidez-moi à faire venir ma famille au Canada. »
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui parce que je souffre constamment de la séparation d'avec les membres de ma famille qui sont prisonniers de Daech. Je suis arrivée au Canada en septembre 2017 dans le cadre du programme. En Irak, j'ai été capturée par Daech le 3 août 2014 et j'ai été retenue prisonnière pendant deux ans et demi. On m'a amenée à différents endroits et vendue six fois sur le marché de l'esclavage sexuel. Je prenais des médicaments pour mes problèmes de santé mentale. Depuis que je suis arrivée seule en septembre 2017, je ne me sens pas bien parce que je suis séparée des membres de ma famille et je me sens seule. Je vis actuellement avec une famille de cinq personnes, parce que je suis arrivée seule. Je consulte un thérapeute à qui je parle de mes problèmes de santé mentale. Depuis que je suis arrivée au Canada, on m'a dit que mes douleurs abdominales étaient dues au fait que je prenais trop de médicaments. J'ai cessé de les prendre parce que je me sens fatiguée et somnolente. Après une séance, j'ai de gros maux de tête. »
(1625)
    La lettre se poursuit: « Aidez-moi à faire venir les membres de ma famille pour qu'ils m'aident à réussir à me réinstaller au Canada. J'aimerais demander au gouvernement canadien de m'aider à faire venir les membres de ma famille. Ma soeur a été relâchée par Daech le 4 avril 2018, et elle vit actuellement dans un camp en Irak. J'aimerais aussi pouvoir faire venir ma mère, qui a été libérée par Daech en 2016 et qui vit également dans un camp. Ma mère et ma soeur souffrent toutes les deux de problèmes de santé mentale. Mon frère vit également dans un camp en Irak. Mon autre frère est toujours prisonnier de Daech, et nous ne savons pas où il se trouve à l'heure actuelle. Il s'est fiancé à une femme environ un mois avant d'être capturé par Daech. Lui vit dans un camp en Irak tandis qu'elle l'attend. Elle a mis sa vie en suspens, car elle attend mon frère et ne veut pas épouser quelqu'un d'autre. Mon frère aîné vit seul en Allemagne, et j'aimerais qu'il vienne au Canada avec le reste de ma famille. Je suis reconnaissante envers le gouvernement de m'avoir aidée à venir ici. Toutefois, je souffre de problèmes de santé mentale et je vis avec une autre famille simplement pour ne pas me retrouver seule. Comme ma famille n'est pas avec moi, je n'arrive pas à me concentrer sur mes études ni sur ma vie ici. Je ne dors pas bien et je n'arrive pas à manger. Je m'inquiète toujours pour les membres de ma famille là-bas, car ils ne sont pas en sécurité. Je vous mentirais si je vous disais que je vais bien. Oui, je suis ici et je suis en sécurité, mais je ne peux pas vivre de manière autonome, car j'ai peur que quelqu'un me fasse subir le même sort que j'ai subi aux mains de Daech. Je remercie chaque pays qui accueille les yézidis, mais à cause de Daech, notre famille est séparée, et j'aimerais que nous soyons tous réunis. Je vous prie de m'aider à faire venir ma famille pour qu'elle soit en sécurité au Canada. »
    Voici une autre lettre: « Je vous écris pour vous demander de m'aider à retrouver ma famille. Je suis venue au Canada dans le cadre du programme en décembre 2017 après avoir vécu dans un camp de réfugiés pendant un an et demi. Je suis venue au Canada avec mon fils et ma fille. Ma famille, composée de mes cinq filles, de mes trois fils et de mon époux, a été détruite par Daech. Mon époux et ma fille ont été tués par Daech. Deux de mes filles sont Allemagne. Mes deux autres fils et ma chère fille vivent dans des conditions précaires dans un camp au Kurdistan. Ma fille vit également dans un camp depuis qu'elle a été relâchée par Daech après trois années de captivité, durant lesquelles elle a été maltraitée et torturée. Elle souffre de problèmes de santé mentale en raison de la torture qu'elle a subie. En fait, elle a tenté de se suicider il y a quelques mois en sautant de l'étage supérieur d'un bâtiment et s'est fait de multiples fractures. Pour rétablir sa santé mentale, elle a besoin du soutien de sa mère et de sa soeur qui vivent actuellement à Calgary. Comme elle n'a pas accès à des soins de santé adéquats, elle souffre constamment à cause de ses fractures. Elle n'a pas assez d'argent pour acheter ce dont elle a besoin. Elle dépend des aumônes de la communauté internationale pour se nourrir. Elle n'a aucun avenir au Kurdistan. Je vous écris pour vous supplier de faire venir ma fille au Canada. J'aimerais aussi que mes fils survivants me rejoignent au Canada. Mes fils sont... Il va épouser... ils ont un fils. J'aimerais que les membres de ma famille soient réunis au Canada afin qu'ils soient en sécurité et qu'ils aient un avenir. Je suis aussi très inquiète au sujet de ma nièce qui est sourde et muette et qui vit seule dans un camp. Tous les membres de sa famille ont été tués par Daech; elle est seule et vulnérable au camp. En raison de son état de santé, elle risque d'être victime de violence et de criminalité. Je me fais vraiment du souci pour elle, et j'aimerais qu'elle puisse me rejoindre au Canada afin qu'elle soit en sécurité et qu'elle puisse connaître un avenir paisible. Je m'inquiète sans cesse pour mes enfants et ma nièce. Je n'ai jamais l'esprit tranquille. J'ai de la difficulté à me concentrer parce que je m'inquiète pour les membres de ma famille. Je ne serai pas en paix tant que mes enfants ne seront pas en sécurité. Je vous prie de m'aider à retrouver mes enfants afin qu'ils soient en sécurité et qu'ils puissent se bâtir un avenir au Canada. »
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui parce que j'aimerais que le gouvernement canadien aide les yézidis et m'aide à faire venir ma famille au Canada. En août 2014, Daech nous a faits prisonniers mon cousin, mes deux filles et moi-même, et nous a amenés en Syrie, où nous sommes restés pendant quatre mois. Mes deux filles et moi-même avons pu échapper à Daech, et mon frère m'a aidée à retrouver mon époux en Irak. Je suis arrivée au Canada en septembre 2017 avec d'autres réfugiés yézidis. Je suis venue avec mon époux et mes quatre enfants. Depuis que je suis au Canada, je me sens en sécurité avec les membres de ma famille, mais je m'inquiète constamment pour ceux qui sont restés là-bas, car il n'y a pas de nourriture ni d'eau. J'aimerais demander au gouvernement canadien de faire venir les membres de ma famille en toute sécurité. Ma mère est décédée il y a longtemps, quand j'étais enfant. Mon frère vit dans une tente dans les monts Sinjar depuis qu'il a échappé à Daech en 2014. Il vit actuellement avec son épouse et sa fille. Mon père vit aussi dans les monts Sinjar avec son épouse, dans une autre tente. »
(1630)
    La lettre se poursuit: « J'aimerais aussi demander au gouvernement de faire venir ma soeur qui vit dans un camp en Irak. Daech a tué son époux, donc elle doit élever seule ses cinq enfants, et elle dépend de la générosité des autres pour obtenir de la nourriture pour sa famille. Mon autre soeur vit dans un camp de réfugiés en Irak. Je ne connais pas le nom du camp, et je n'ai pas eu de contact avec elle depuis près de deux ans. Je ne suis pas en mesure de me réinstaller avec succès au Canada, car je suis séparée de ma famille. J'étais toujours avec mon frère et ma soeur, et nous étions tous heureux ensemble. Je remercie le gouvernement de ce qu'il a fait pour moi et ma famille et j'espère qu'il peut continuer d'aider les autres yézidis, car ils ont besoin de beaucoup d'aide. J'ai été témoin de nombreuses horreurs depuis le décès de ma mère, et j'espère que le gouvernement peut m'aider faire venir ma famille ici. »
    Une autre...
    Je vais vous interrompre un instant.
    Il est 16 h 30, et la députée parle depuis 37 minutes. Nous arrivons à la fin de la première heure de notre réunion.
    À ce point-ci, monsieur Beuze, je vais reconnaître que votre temps est maintenant écoulé.
    Nous avons un deuxième groupe de témoins. Je suis tout à fait disposé à poursuivre la réunion après 17 h 30, si Mme Rempel veut continuer. Nous pourrions donner la parole aux témoins qui se sont déplacés pour être avec nous aujourd'hui.
    Si vous préférez continuer, vous avez aussi le droit.
    Merci. Je vais continuer.
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui pour aider »...
    Pour les gens qui sont ici, je dirais que c'est un enjeu au sujet duquel nous devons nous battre jusqu'au bout avec le gouvernement.
    Je remercie le représentant des Nations unies d'être ici aujourd'hui. Je sais que les Nations unies, particulièrement en ce qui concerne le volet de réinstallation des réfugiés, subissent une pression incroyable. Selon leurs propres dires, 65 millions de personnes sont en déplacement dans le monde à l'heure actuelle.
    Toutefois, nous devons tenir une conversation très difficile en tant que communauté mondiale. Ce n'est pas un sujet agréable. Ce n'est pas un sujet attrayant sur le plan politique, et ce n'est pas une conversation qui va entraîner immédiatement une séance de photos dans un aéroport. Il s'agit de déterminer qui sont les personnes les plus vulnérables au monde.
    Il n'est pas agréable d'en parler, mais il est certain que ce que j'essaie de dire aujourd'hui, et j'essaie aussi de convaincre mes collègues, c'est que nous devons réaliser une étude sur la question. Des gens ont survécu à un génocide ou à de l'esclavage sexuel, et on leur a dit qu'ils ne sont pas admissibles à venir au Canada en tant que réfugiés, contrairement à une personne qui s'est rendue dans le Nord de l'État de New York.
    Je vais donc lire une autre...
    Avant que vous alliez plus loin, par courtoisie pour les témoins, pourriez-vous nous donner une idée du temps dont vous aurez besoin afin que je puisse leur dire s'ils doivent partir?
    Je suis prêt à convoquer des séances supplémentaires cette semaine. Je tiens à faire savoir aux membres du Comité que nous pourrions avoir de très longues réunions cette semaine.
    J'aimerais simplement que vous nous disiez si nous devons libérer ou non les témoins qui ont été invités à venir aujourd'hui à votre demande.
    Eh bien, nous avons — je ne sais pas — plusieurs centaines...
    Nous ne les avons pas, vous, oui.
    Combien y en a-t-il?
    Il y a plusieurs centaines de cas comme celui-ci, j'en aurai donc probablement pour le reste de la réunion, mais nous verrons. Je vais poursuivre.
    Une autre...
    Eh bien, je vais dire aux témoins que nous n'entendrons pas un deuxième groupe aujourd'hui pour discuter de la question de la migration venant du Venezuela, de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud.
    Toutefois, je vais suspendre la séance un instant, car il est aussi important que les membres du Comité prennent une petite pause comme nous le faisons normalement après une heure.
    Je vais suspendre la séance pour quelques minutes afin que nous puissions prendre la pause nécessaire, histoire de répondre à nos besoins biologiques. Nous reprendrons sous peu.
(1630)

(1640)
    Nous reprenons la séance.
    Tout d'abord, je vais demander votre consentement unanime pour recevoir les témoignages écrits qui ont été préparés par quelques-uns des témoins qui devaient comparaître durant la deuxième heure. Ai-je le consentement unanime pour que les mémoires écrits soient utilisés dans notre rapport?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Merci.
    [Voir l'annexe — Mémoire de Rachel Kiddell-Monroe]
    [Voir l'annexe — Mémoire de Rodrigo Dominguez Villegas]
    Le président: Madame Rempel.
    Merci.
    Monsieur le président, j'aimerais également souligner la présence dans la salle aujourd'hui de membres de la communauté yézidie, particulièrement celle de la Canadian Yazidi Association. J'aimerais les remercier du travail qu'ils font pour porter ce problème à l'attention des Canadiens.
    Je tiens à préciser également que ce sont des lettres qui ont été écrites à l'intention de députés, mais aussi, je le crois, du ministre de l'Immigration dans certains cas. D'après les commentaires que j'entends, on ne répond pas souvent à ces lettres, et c'est pourquoi je pense qu'il est important de donner une voix à ces gens pour appuyer la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui.
    La prochaine va comme suit: « Je vous écris aujourd'hui pour vous demander votre aide afin de réunir les membres de ma famille qui sont toujours en Irak. Je crois sincèrement que je ne réussirai à me réinstaller avec succès au Canada et à devenir un membre actif de ma collectivité que si je retrouve de nouveau les membres de ma famille. Même avec toute l'aide que je reçois actuellement à Calgary, je crois que je n'arriverai jamais à me sentir à l'aise au Canada tant et aussi longtemps que les membres de ma famille ne seront pas en sécurité ici avec moi. Ma soeur, deux de mes frères et moi-même sommes arrivés à Calgary en mars 2018. Avant que Daech commence à s'en prendre à mon peuple, je vivais avec ma famille dans le village de Kocho, près de Sinjar. Je travaillais à la maison et je prenais soin des membres de ma famille. Le jour où Daech a attaqué notre village, j'étais à Erbil pour un rendez-vous chez le médecin. Après avoir entendu les nouvelles, j'ai fui en traversant la région de Duhok. Toutefois, mes parents et mes frères et soeurs étaient à Kocho lorsque Daech a attaqué. »
    La lettre continue: « Après de nombreux mois de captivité, ma soeur et mes deux frères qui sont venus avec moi au Canada ont réussi à échapper à Daech et à me rejoindre au camp Ronga » — toutes mes excuses si je prononce mal certains noms —, « mais les membres de Daech avaient déjà assassiné mes parents. Mon autre soeur a aussi été faite prisonnière par les membres de Daech, et nous ne savons toujours pas où elle se trouve. Nous avons payé 20 000 $ à un passeur pour qu'il libère mes frères capturés par Daech. Ma soeur, qui est avec moi au Canada, a été libérée par les troupes irakiennes plus tard, lorsqu'elles ont atteint Mossoul. Elle nous a ensuite rejoints au camp. Après cela, ma soeur, mes deux frères et moi-même sommes restés au camp jusqu'à ce que nous venions au Canada. Voici une liste de tous les membres de ma famille toujours vivants ainsi que l'endroit où ils se trouvent. » La personne énumère une soeur, un frère, une belle-soeur, une tante et deux cousins. « Le fait de ne pas être avec les membres de ma famille me touche grandement. Je pense à eux tous les jours. Cela m'empêche au bout du compte de me concentrer sur ma nouvelle vie au Canada et d'envisager l'avenir sous un jour meilleur. Les membres de ma famille vivent dans de terribles conditions en ce moment, et ils ne sont tout simplement pas en sécurité là-bas. Ils n'ont pas accès à de l'eau potable, à de l'électricité ni à des soins de santé. Cette inquiétude constante a une incidence considérable négative sur ma santé mentale. De plus, ma soeur et l'un de mes frères ont de graves problèmes de santé mentale en raison de leur séparation d'avec le reste des membres de notre famille. Comme ma soeur et mes frères au Canada sont plus jeunes que moi, je dois prendre soin d'eux, ce qui est très éprouvant pour moi. Si ma soeur et mon frère qui sont plus âgés pouvaient venir au Canada, cela m'aiderait grandement à prendre soin de ma famille. Nous avons déjà formé une communauté à Calgary; cela faciliterait considérablement l'intégration du reste de ma famille. J'espère que le gouvernement canadien sera sensible à ma situation et qu'il fera venir les membres de ma famille au Canada. Ma famille et moi avons réellement besoin de votre aide. »
    Une autre dit ce qui suit: « Je sollicite votre aide pour retrouver les membres de ma famille... »
(1645)
    Oui, monsieur Sarai.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Comme le député d'en face l'a mentionné, je pense qu'il y a certains membres des familles ici. Je veux simplement rappeler que, lorsque trois ou quatre députés conservateurs sont allés en Irak en 2014 et se sont rendus dans un camp de réfugiés yézidis...
    Monsieur le président, c'est une question de débat.
    ... où un génocide était en train de se produire, ils n'ont pas recommandé la prise de mesures.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement, monsieur le président.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
     [Inaudible] est venu, et après cela, lorsque nous avons présenté une motion [Inaudible] 14 millions de dollars pour des services de santé supplémentaires, et on voulait...
    On ne peut pas le laisser divaguer ainsi.
    L'hon. Michelle Rempel: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    M. David Tilson: Il gaspille le temps du Comité, monsieur le président.
    Je veux simplement voir s'il s'agit d'un rappel au Règlement ou d'une question de débat.
    L'hon. Michelle Rempel: Cela ressemble à une question de débat, monsieur le président.
    Je crois que tout le monde devrait savoir...
    M. David Tilson: Il s'agit certainement d'une question de débat.
    L'hon. Michelle Rempel: J'invoque le Règlement.
    M. Randeep Sarai: ... que l'opposition adore tenir ces propos uniquement lorsque...
    Je pense que vous êtes passé à une question de débat. Merci.
    Poursuivez.
    Merci.
    Je sais que mes collègues d'en face ont parfois de la difficulté à justifier le fait qu'ils ont voté contre une motion pour déclarer que ces crimes constituent un génocide, puisqu'ils ont pris part à une séance du Comité, où ils... L'un de leurs collègues a rédigé un article dans le Toronto Star disant qu'il pourrait être difficile d'assurer la réunification ou la réinstallation des yézidis au Canada, car ils ont un système de castes dans leur religion.
    Puis, leur premier ministre , lors d'une campagne en 2015, a dit, dans une vidéo que nous avons trouvée pour mon plus grand bonheur, qu'il serait dégoûtant de réinstaller des minorités ethniques et religieuses, puis n'en a réinstallé aucune au titre de l'initiative concernant les réfugiés syriens. C'est non pas notre voix qui compte, mais uniquement celle des gens qui ont survécu à ces crimes et qui n'obtiennent pas l'aide du gouvernement, ce qui est important selon moi pour la motion à l'étude.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Oui.
    En ce qui concerne les mesures prises par le gouvernement, nous avons fait venir...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    ... plus de 1 400 réfugiés yézidis...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    ... alors que l'opposition a fait venir en tout trois yézidis...
    Monsieur le président, [Inaudible] possibilité...
    ... et nous avons également investi 14 millions de dollars dans les services de soins de santé, que le gouvernement précédent avait réduits.
    Je pense que cela tient du débat également.
    Monsieur Tilson, je vous demande à vous aussi de parler quand viendra votre tour. Merci.
    Voici une autre lettre: « J'écris pour vous demander de l'aide. J'aimerais que ma famille puisse être réinstallée au Canada afin que nous soyons réunis. Je suis arrivée au Canada en décembre 2018 avec ma famille et cinq enfants. Avant de venir au Canada, ma vie était un enfer. Avant l'arrivée de Daech, nous étions heureux. Nous élevions du bétail. Nous n'étions pas très riches, mais nous étions heureux car nous étions ensemble. Quand Daech est arrivé, notre village a été cerné par ses militants pendant sept jours. Nous n'avions rien à manger. On nous a dit que les femmes allaient devenir des esclaves, et que les hommes allaient être forcés de se joindre à Daech. Après sept jours, nous avons décidé de nous échapper, de nuit, et nous avons réussi à atteindre un autre village. Notre père se trouvait ailleurs, et il nous a conseillé par téléphone de ne pas parler de notre évasion. Il a dit qu'il allait tenter de s'échapper lui aussi pour nous rejoindre. C'est la dernière fois que nous nous sommes parlés. Le village où il se trouvait a été complètement détruit. »
    La lettre se poursuit: « Nous avons marché toute la nuit jusqu'à un sanctuaire en montagne. À ce moment-là, j'étais enceinte de mon cinquième enfant. Nous n'avons pas pu rester, car on nous a avertis que Daech s'en prenait aux sanctuaires religieux. Nous avons poursuivi notre route jusqu'à l'autre côté de la montagne. Le lendemain, nous avons trouvé un transport qui nous a emmenés vers la sécurité. Nous avons dû vivre — une famille de 18 personnes — dans une seule pièce dans un immeuble appartenant à mon beau-frère. Ma belle-soeur a été capturée, et elle a été libérée deux ans plus tard, pour la somme de 15 000 $. Elle a pu demander que ma famille la rejoigne au Canada à cause de l'enlèvement dont elle avait été victime. Seize autres membres de ma famille sont présumés morts: des grand-mères, des tantes, des frères, des cousins et des cousines, des nièces et des neveux. De ma famille, il ne reste que ma soeur, mon beau-frère, trois enfants, et sa soeur, son beau-frère et d'eux autres enfants. »
    Ce n'est pas fini: « Ma famille a été déchirée. Il ne me reste plus que deux soeurs. La vie dans les camps est difficile. Ce n'est pas un endroit sécuritaire pour personne. Je suis dévorée d'inquiétude. Je suis incapable d'apprendre quoi que ce soit à l'école. Dès que je quitte la salle de classe, je ne peux m'empêcher de penser à ma famille là-bas. Nous sommes en sécurité, ici au Canada, mais le reste de ma famille est toujours là-bas. Nous sommes dispersés. Je demande au gouvernement canadien de faire en sorte que nous puissions être à nouveau ensemble, afin que nous ayons un avenir au Canada. Je demande au gouvernement canadien d'arracher mon peuple aux griffes de Daech. »
    Une autre...
    Excusez-moi, monsieur le président. J'invoque le Règlement.
    Oui, monsieur Whalen?
    J'ai laissé Mme Rempel terminer de lire ses lettres, parce que je crois qu'elles doivent être lues en entier et sans interruption. Cependant, comme elle l'a elle-même dit avant sa dernière lettre, son but en lisant ces lettres était de donner une voix à ceux et celles qui lui ont écrit. Néanmoins, le temps qui lui est accordé présentement doit servir à sa motion. Je crois qu'elle est allée au-delà de ce qui lui avait été permis pendant son temps de parole. Dans les faits, elle ne veut pas présenter sa motion; elle veut seulement lire ses lettres, même si elle aura d'autres occasions de le faire.
(1650)
    Monsieur le président...
    Un instant, je veux consulter la greffière.
    Puis-je réagir? J'ai un argument que vous devriez prendre en considération.
    Si je lis ces lettres, c'est parce qu'elles mettent en lumière la nécessité de cette étude. Le Comité a réalisé une foule d'études, et j'ai même donné mon aval à un rapport dont les recommandations étaient quasi unanimes, et pourtant, le gouvernement n'a pas réagi à la recommandation clé du rapport sur les services de réinstallation pour les Yézidis.
    C'est pour cela que ma motion est si importante. Chacune de ces lettres justifie notre étude. Je veux que ce soit clair pour mes collègues. Je veux présenter un argument solide et convaincant sur la nécessité et l'urgence de cette étude.
    Monsieur le président, s'il vous plaît, j'aimerais que mes collègues évitent d'insinuer que ces lettres sont sans importance pour la motion à l'étude. Vous dites qu'elles ne sont pas importantes, que la voix de ces personnes...
    Je soulève la question de privilège.
    Puis-je terminer ce que j'ai à dire, monsieur?
    Je crois que M. Whalen a soulevé la question de privilège.
    Mme Rempel a complètement déformé mes propos. Je disais qu'elle avait elle-même reconnu, dans ses propres mots, la raison pour laquelle elle lisait ces lettres, aux fins du compte rendu. Je n'ai rien dit à propos des motifs de mon côté. C'était ses paroles, pas les miennes.
    Je comprends.
    J'ai utilisé l'expression « insinuer », monsieur le président, les mots exacts que j'ai...
    Le verbe « insinuer » a une forte connotation. C'est la deuxième fois que vous l'utilisez aujourd'hui.
    C'est que c'est une question importante, monsieur le président.
    Je vous prierais de terminer votre argument. Ensuite, je vais décider si je suis d'accord ou non avec M. Whalen.
    Encore une fois, monsieur le président, chacune de ces lettres est une preuve — une preuve concrète — de l'énorme importance de cette étude. Chaque lettre est unique et différente des autres; il n'y a pas de répétition, et on ne peut pas remettre en question leur pertinence, contrairement à ce que je crois que mon collègue essayait de faire. Toutes ces lettres présentent des arguments uniques qui éclairent la motion à l'étude.
    Merci.
    Si mon rappel au Règlement est réfuté... Je ne remets pas en question la pertinence des lettres. Mme la députée a elle-même admis qu'elle ne les lisait pas aux fins de la motion. Elle peut préciser sa pensée si elle le veut, mais sans reprendre mes propos.
    J'ai compris ce que vous avez dit, et je comprends que Mme Rempel ait interprété vos propos différemment de moi. Nous allons prendre une courte pause, le temps que je discute de la situation avec la greffière.
    La séance est suspendue.
    Reprenons.
    Madame Rempel, vous pouvez poursuivre.
    Merci.
    Cette lettre dit: « Je demande votre aide afin de pouvoir être réuni avec ma famille et être réinstallée au Canada. Je suis arrivée au Canada en août 2017 avec ma famille et mes cinq enfants dans le cadre de l'initiative. Avant l'arrivée de Daech, la vie était belle. Mon époux et mon beau-frère travaillaient ensemble dans le secteur de la construction. Nous avons été capturés par Daech à Sinjar. Pour Daech, notre vie n'avait aucune valeur. Nous étions mal traités. Nous avons été emmenés à Baaj où les hommes ont été séparés des femmes et des enfants. Les femmes et les enfants ont été placés dans une école, tandis que les hommes ont été placés dans une aire clôturée plusieurs heures plus tard. Les membres de Daech ont amené ailleurs toutes les filles non mariées ainsi que les femmes mariées qui leur plaisaient. Ils ont dit aux autres femmes qu'elles seraient assassinées si elles ne se convertissaient pas à l'Islam; mais même celles qui se convertissaient à l'Islam allaient être tués si les membres de Daech décidaienDaecht de ne pas leur faire confiance. »
    La lettre se poursuit: « On nous a transportés à un autre endroit pour quelques jours, puis nous sommes à nouveau restés dans des écoles sans eau ni nourriture. Ils ont pris tout ce que nous avions, nos bijoux, nos téléphones et notre argent. Les hommes ont été laissés à Baaj. On nous a ensuite emmenés à une prison dans une autre ville où on nous a fouillés à nouveau, et encore une fois, les membres de Daech ont choisi les femmes qu'ils voulaient garder avec eux. Certaines filles n'étaient pas âgées de plus de 7 ans. C'est à ce moment qu'on m'a séparé de mes deux fils aînés. Je suis restée avec mes deux fils les plus jeunes. Mon fils aîné était resté avec mon époux dans l'aire clôturée. Tous les garçons qui avaient du poil sous les bras étaient considérés comme des hommes et ont été tués. La prison a été bombardée, et Daech nous a évacués vers la ville où nous étions avant. Mon époux a réussi à trouver un téléphone pour appeler son frère, et ce dernier est intervenu auprès de Daech en notre nom. Certains membres étaient d'anciens voisins, et quelqu'un a commencé à nous aider. »
    Je continue: « Nous avons réussi à retrouver mon époux avant qu'on nous emmène à Kojo, où on nous a enseignés l'Islam et les prières. Les femmes et les enfants étaient sous la surveillance constante de Daech. Une personne de notre groupe s'est échappée, et Daech a ensuite menacé de tous nous tuer. Un membre de Daech nous a aidés à retrouver nos deux fils aînés, mais nous avons à nouveau été tous séparés après que l'un des chefs de Daech a été tué. J'ai entendu des coups de feu. Ensuite, les membres de Daech ont commencé à prendre toutes les femmes qu'ils voulaient. Les autres femmes et les enfants étaient gardés dans une grange, puis on nous a amenés à Mossoul où ils avaient l'intention de nous tuer. Ils ont aligné mon époux, mon fils et d'autres membres de ma famille et leur ont dit de réciter une prière islamique pendant qu'ils se préparaient à les fusiller. Heureusement, au dernier moment, quelqu'un a reçu un coup de téléphone, et les membres de Daech ont rapidement quitté les lieux. Nous avons finalement réussi à nous échapper, parce que mon époux travaillait dans les champs à prendre soin des animaux de Daech, et qu'il avait pu observer le terrain pour trouver des chemins par où il serait possible de fuir. Voici les membres de ma famille qui ont survécu ainsi que l'endroit où ils se trouvent... » L'auteur de la lettre mentionne un fils, une belle-fille, une soeur, un beau-frère, six neveux et nièces, une belle-mère, un beau-frère et une belle-soeur.
    Ce n'est pas terminé: « Nous étions très proches de ma soeur et de son époux. Ma soeur est comme une mère pour moi. Je veux qu'elle soit à mes côtés. Son absence m'est très douloureuse. Je veux demander à la communauté internationale, et pas seulement au Canada, de mener enquête sur les fôsses communes et d'aider notre peuple. Nous avons besoin d'aide pour reconstituer nos familles. Je vous écrit pour obtenir l'aide dont j'ai besoin pour retrouver ma famille. Je vous écris pour vous demander d'être réunie avec mes parents, qui s'appellent... » — l'auteur donne leurs noms — « mes quatre frères qui s'appellent... » — l'auteur donne leurs noms — « et ma soeur. Ils vivent présentement dans un camp et », l'auteur donne l'emplacement du camp.
    La lettre se poursuit: « Je voudrais aussi être réunie avec ma soeur aînée qui vit dans un camp avec son époux et la famille de ce dernier. Je suis arrivée au Canada en janvier 2018. En 2014, notre famille a échappé à Daech en se réfugiant dans les monts Sinjar. Ma famille a ensuite fui Daech en se rendant au Kurdistan. Malheureusement, mon frère a été capturé par Daech, et il est toujours leur prisonnier aujourd'hui. J'ai été séparée de ma famille quand mon époux et moi avons été réinstallés au Canada. Nous prenions soin de ma jeune belle-soeur, que Daech avait libéré après l'avoir été torturée pendant des années. Depuis que nous sommes au Canada, c'est nous qui souffrons sans notre famille. Cela nous brise le coeur de ne pas voir notre famille. Nous sommes très inquiets pour eux, car nous savons qu'ils ne sont pas en sécurité; dans les camps, qu'ils n'ont pas d'argent, de nourriture, de médicaments ni d'abri adéquat. Ma mère a de nombreux problèmes médicaux, des problèmes de santé mentale et du diabète, entre autres. Mon père a perdu un oeil, fait de l'hypertension et a des problèmes cardiaques. Mon père est atteint d'asthme, et les traitements sont impossibles à cause de toute la poussière dans le camp. Ils ne peuvent pas se payer de soins médicaux ou de médicaments, et leur état de santé se détériore. Nous nous inquiétons énormément de leur santé. Nous sommes aussi très inquiets pour eux, parce qu'ils ne sont toujours pas en sécurité et qu'ils sont constamment exposés à des risques de violence et de persécution. »
(1655)
La lettre se poursuit: « Je suis tout le temps inquiète pour ma famille. J'ai de la difficulté à me concentrer à l'école et à apprendre l'anglais parce que je suis tout le temps inquiète. Leur vie dans le camp est difficile, et je m'inquiète pour leur bien-être et leur sécurité. S'il vous plaît, aidez-moi à être réunie avec ma famille afin que nous puissions nous soutenir les uns les autres, guérir de nos traumatismes et bâtir un avenir productif au Canada. »
    Voici une autre lettre: « Nous vous écrivons aujourd'hui parce que nous espérons que le gouvernement canadien pourra nous aider à être réunis avec nos familles et à réussir notre réinstallation au Canada. Nous sommes arrivés ici le 28 décembre 2017 avec notre fils unique. Le 3 août, Daech a envahi notre village, et nous avons essayé de nous échapper. » Cette lettre a été écrite par deux personnes, un homme et une femme. Voici ce que dit la femme: « Le 4 août, Daech m'a emmenée à d'autres endroits. J'ai vécu en Syrie pendant deux ans et demi. L'homme qui m'a achetée a brisé les deux jambes de mon fils, et il m'a violée et battue. En Syrie, cet homme m'a vendue à un autre homme qui me battait souvent. Je souffre aujourd'hui de douleurs au dos à cause de ses mauvais traitements. En Syrie, j'ai réussi à m'échapper et à me réfugier à Pakeke avec mon fils. Nous y sommes restés une semaine. Ensuite, ma famille m'a emmenée au Kurdistan, et j'ai vécu au camp pendant près d'un an. J'espère que le gouvernement canadien pourra m'aider à être réunie avec ma famille. Ma tante vit avec son époux et ses six enfants dans un camp. Mon cousin vit également avec son épouse dans le même camp. Mon oncle vit avec son épouse et leurs cinq enfants dans ce camp également. Quand je parle avec des membres de ma famille, ils me disent que la vie est difficile dans le camp. Ils ne sont pas en sécurité, et ils n'ont pas accès à de la nourriture, à de l'eau ou à des médicaments. Depuis que je suis arrivée au Canada, je ne cesse de penser à ma famille là-bas. Ils ont énormément besoin d'aide. J'ai l'impression que mon cerveau est en panne, ici. J'ai de la difficulté à me concentrer. En plus, je suis enceinte de cinq mois et je vis énormément de stress. »
    Voici ce que dit l'homme: « En 2014, j'ai appris que mon épouse et mon fils avaient été enlevés par Daech. J'ai essayé de me rendre à Sinjar, mais c'était dangereux. Je suis resté à Erbil où j'ai travaillé dans un hôpital. J'ai continué d'y travailler, même quand mon épouse et mon fils ont été libérés de Daech. J'espère pouvoir être réuni avec ma famille. Ma soeur est toujours prisonnière de Daech. Elle a été obligée d'épouser l'un de ses membres. Elle a eu deux enfants avec lui, et maintenant, il est parti avec ses enfants. Elle ne sait pas où ils sont. Elle a été libérée en septembre 2017 et a depuis fui vers Pakeke. Elle vit à présent dans un camp au Kurdistan et a des problèmes de santé mentale. Je me fais énormément de souci pour ma soeur. Quand je lui parle, elle me dit qu'elle a seulement envie de se suicider. Mon oncle vit avec son épouse et ses deux enfants dans ce camp. Mon cousin y vit aussi avec son épouse et ses deux enfants. Mon autre cousin s'y trouve aussi, avec son épouse et son enfant. J'ai un autre cousin dans le même camp qui a une épouse et trois enfants. Ma tante y vit avec ses trois enfants adultes. J'ai aussi un oncle qui vit dans ce camp avec son épouse. La tante de ma mère y vit seule. J'ai un autre oncle qui vit avec son épouse et ses quatre enfants à Erbil depuis 2014. J'espère que le gouvernement canadien pourra m'aider à faire venir ma famille ici, parce que personne n'est en sécurité, là d'où nous venons. J'ai de la difficulté à me concentrer sur ma nouvelle vie ici au Canada sans le soutien et la présence de nos familles. »
    En voici une autre: « J'écris pour vous demander de l'aide pour être réunie avec ma famille. Je suis venue au Canada dans le cadre du programme en décembre 2017, après avoir vécu dans un camp de réfugiés pendant un an et demi. Je suis arrivée au Canada avec ma mère et mon frère. Ma famille — cinq soeurs, trois frères et mes parents — a été détruite par Daech. Ma mère et mes deux frères ont échappé à Daech, mais le reste de ma famille a été capturé. Une de mes soeurs a refusé de se convertir à l'Islam, et Daech l'a brûlée vivante. Un de mes frères a réussi à s'échapper après avoir été captif. Mon père est présumé mort, assassiné par Daech. Mes deux autres soeurs ont fini par échapper à Daech après un certain temps, et sont réinstallées en Allemagne. Enfin, mon autre soeur a fui Daech en 2018 et vit maintenant dans une situation très précaire dans un camp au Kurdistan. Ma soeur vit présentement dans le camp de Zakho. Elle a été libérée par Daech après trois ans de captivité, durant lesquels elle a été agressée et torturée. À cause des tortures qu'elle a subies, elle a maintenant des problèmes de santé mentale. Après quelques mois, elle a même tenté de se suicider en sautant du haut d'un immeuble. Elle a survécu, mais a subi de nombreuses fractures. Elle n'a pas accès à des services de santé adéquats et, pour retrouver sa bonne santé mentale, elle aurait besoin du soutien que ma mère et moi pouvons lui offrir, ma mère vit à Calgary. Ma soeur éprouve des douleurs constantes en raison de ses fractures, et elle n'a pas assez d'argent pour acheter ce dont elle a besoin. »
(1700)
    La lettre se poursuit: « Elle subvient à ses besoins grâce aux bons alimentaires de la communauté internationale. Elle n'a aucun avenir au Kurdistan. Je vous écris pour vous implorer de faire venir ma soeur au Canada. J'aimerais aussi que mes frères qui sont encore en vie viennent au Canada. Voici leurs [noms...]. Ils ont des épouses et un fils. J'aimerais aussi que ma famille puisse être réunie au Canada afin qu'elle soit en sécurité et puisse se bâtir un avenir. Je m'inquiète également beaucoup de ma cousine qui est sourde-muette et qui vit seule dans le camp. Toute sa famille a été tuée par Daech et elle se retrouve seule et vulnérable. À cause de son problème médical, elle est vulnérable à la violence et aux actes criminels. Je m'inquiète énormément pour elle, et j'aimerais qu'elle puisse aussi venir au Canada pour être en sécurité et avoir la possibilité de se bâtir un avenir tranquille. Je ne cesse de m'inquiéter de ce qui va arriver à ma famille. Les médecins me disent que mon estomac, mon manque d'appétit et ma perte de poids sont liés à mon inquiétude pour le bien-être des miens. Je pense tout le temps à eux, et mes pensées et mes inquiétudes m'empêchent de dormir. Je me sens tout le temps coupable, parce que je suis en sécurité ici au Canada pendant qu'ils souffrent. Même quand je vais à l'école, je ne peux rien apprendre, parce que je m'inquiète tout le temps du sort de ma famille. »
    Voici une autre lettre: « Je vous écris aujourd'hui afin de demander au gouvernement canadien de nous venir en aide, pas seulement à ma famille, mais à toutes les familles yézidies. Les conditions de vie dans les camps ne sont pas sécuritaires; des tentes sont incendiées. Il n'y a ni eau ni nourriture. Je suis arrivée au Canada en décembre 2017 avec mon époux, nos quatre enfants et ma belle-soeur. Le 3 août 2014, Daech est arrivé dans notre village et nous a menacés de tous nous tuer si nous avions un drapeau blanc. C'était faux. Les membres de Daech ont fait feu sur nous, ont tué les hommes et ont capturé les femmes et les enfants. Nous avons fui vers les montagnes et y sommes restés pendant sept jours, sans rien à manger, puis nous nous sommes réfugiés au Kurdistan. Nous avons vécu dans un camp pendant quatre ans avant de venir au Canada en 2017. J'espère que le gouvernement canadien pourra m'aider à être réunie avec ma famille. Ma soeur vit avec son époux et ses sept enfants dans ce camp, ils y sont depuis 2014. »
    La lettre se poursuit: « L'époux de ma soeur est tombé d'une voiture en marche pendant qu'il fuyait Daech. Depuis, il souffre de graves douleurs au dos et ne peut pas se tenir droit debout. Il a de la difficulté à marcher, surtout l'hiver. Quand je parle avec ma soeur, elle me dit qu'il n'y a pas d'eau ni de nourriture dans le camp. Mon autre soeur vit avec son époux et leurs quatre enfants, et elle est enceinte de deux mois de son cinquième enfant. Ma soeur a tenté de fuir Daech, et on lui a tiré dans le ventre. Elle a dû subir sept opérations chirurgicales depuis. Ils vivent dans un camp au Kurdistan. Mon frère vit dans un camp avec nos parents. Même si nous sommes en sécurité ici, nous pensons constamment aux membres de notre famille qui sont encore dans notre pays d'origine. Notre famille ne cesse d'entendre des histoires sur le retour de Daech. Nous allons à l'école tous les jours. Nous essayons d'apprendre l'anglais et, une fois de retour à la maison, nous entendons des histoires sur les personnes qui continuent de souffrir, alors nous oublions tout ce que nous avons appris. Les yézidis sont un peuple très pauvre. Il n'y a pas d'école, pas de travail et rien à manger pour les yézidis. Notre peuple a peur de vivre au Pakistan parce que Daech y est encore actif. J'espère que le gouvernement canadien pourra nous aider à faire venir plus de yézidis au Canada. »
    Une autre encore: « Je vous écris pour vous demander de l'aide pour être réunie avec ma famille. Je suis arrivée à Calgary en 2017. Je suis venue au Canada après avoir été maintenue en captivité et torturée par Daech [pendant] deux ans et demi. Même si je suis en sécurité au Canada, je suis incapable de réussir ma réinstallation parce que je pense constamment aux miens qui sont encore en danger en Irak et que je m'inquiète pour eux. Mon corps se trouve ici au Canada, mais mon coeur et mon esprit sont restés avec ma famille en Irak. Mes parents, mes soeurs et mes frères... »
(1705)
    Je dois vous interrompre un instant.
    Vous êtes la vice-présidente, mais vous êtes occupée présentement, et la seconde vice-présidente n'est pas parmi nous. Je vais donc demander à Salma d'occuper le fauteuil, le temps que je prenne une pause.
    La lettre se poursuit: « Mes parents, mes soeurs et mes frères vivent dans des conditions très difficiles. Ils ne sont pas bien logés et n'ont pas accès à de la nourriture, à de l'eau ou à de l'électricité, à Dohuk, en Irak. Ils n'ont pas d'argent et vivent dans des conditions de pauvreté extrême. En plus, ils sont constamment exposés à un risque de violence ou de persécution par Daech. Mon époux, ma soeur et mon beau-frère sont portés disparus, et je crains le pire. Au total, 16 membres de la famille de mon époux sont aussi portés disparus. J'ai peur pour les membres de ma famille qui manquent toujours ainsi que pour ceux qui sont toujours en danger à Dohuk. Cela occupe chacune de mes pensées. Je ne peux ni manger ni dormir à cause de mes inquiétudes. Je ne peux pas me concentrer à l'école. J'ai de la difficulté à apprendre l'anglais. J'ai tellement de difficulté à réfléchir et à me concentrer que je songe à abandonner l'école, même si je sais que j'aurai de la difficulté à m'intégrer dans la société canadienne si je n'apprends pas l'anglais. La seule façon dont je pourrais retrouver la paix, c'est d'être réunie avec ma famille. Je demande respectueusement au gouvernement d'aider ma famille, qui se trouve à Dohuk, en Irak, à venir au Canada, où elle sera en sécurité. » L'auteure mentionne son père, sa mère, ses frères et soeurs et la soeur de son époux. « J'implore également le gouvernement d'en faire plus pour trouver les membres de la communauté yézidie qui sont disparus en Irak. S'il vous plaît, aidez-moi à être réunie avec ma famille. Sans ma famille, je ne réussirai jamais ma réinstallation au Canada. »
    Une autre lettre: « Si je vous écris aujourd'hui, c'est pour demander au gouvernement canadien d'aider à faire venir ma famille ici. Mon frère et moi sommes seuls au Canada. Le 3 août 2014, j'ai été capturée par Daech, et le lendemain, j'ai été violée par un homme qui m'a emmenée avec lui à Tal Afar. J'ai dû vivre avec lui pendant 16 mois. Je devais le suivre partout où il allait, même quand il combattait. Il me battait beaucoup. Dès que je faisais quelque chose qu'il n'aimait pas, il me battait et me violait. En 2016, je suis parvenue à m'échapper. J'ai fui Tal Afar et me suis rendue dans les monts Sinjar, et plus tard au Kurdistan. Je suis arrivée au Canada le 21 décembre 2017 avec mon frère. Les membres de ma famille ont également été capturés par Daech, mais ils ont réussi à fuir avant moi, en 2015. Ils vivent dans un camp au Kurdistan. Mon frère, ma soeur, ma mère, mon autre frère et mon père vivent tous dans des conditions de vie médiocres, dans un camp. Ma soeur vit dans un autre camp avec son époux et ses trois enfants. Quand Daech est arrivé dans notre village, mon cousin a essayé de s'échapper en voiture, mais il a malheureusement eu un accident. Il s'est blessé à la jambe et, maintenant, il a de la difficulté à étendre sa jambe et à marcher. Mon cousin vit dans le même camp, à Sulaimaniya, avec son épouse et ses quatre enfants. »
    Je continue: « Depuis mon arrivée au Canada, je vais voir un psychiatre. Je suis constamment inquiète pour ma famille, et cela me donne des maux de tête terribles. J'ai de la difficulté à dormir, et lorsque j'arrive à trouver le sommeil, je me réveille après une heure. Parfois, je n'arrive plus à respirer. J'ai l'impression que l'air ne veut plus sortir de mes poumons. Mon frère vit la même chose. Lui aussi s'inquiète beaucoup du sort de notre famille. Je suis reconnaissante de ce que le gouvernement canadien a fait pour nous aider, et j'espère qu'il fera venir notre famille ici afin que nous puissions commencer à rebâtir nos vies en sécurité. »
    Une autre: « J'écris aujourd'hui pour vous demander votre aide afin d'être réunie avec les membres de ma famille qui se trouvent toujours en Irak. Je crois sincèrement que la seule façon pour moi de réussir ma réinstallation au Canada et de devenir un membre productif de la société est d'être réunie avec ma famille à nouveau. Malgré toute l'aide que je reçois présentement à Calgary, je doute être jamais à l'aise au Canada tant que ma famille n'est pas en sécurité ici avec moi. »
    La lettre se poursuit: « Le 3 août 2014, Daech est arrivé à Sinjar, en Irak. Nous avons tenté de fuir, mais les membres de Daech nous ont capturés. Ensuite, j'ai été séparée de mon époux. J'ai aussi été séparée de mes deux fils quand nous étions à Tal Afar, en Irak. Je suis restée à Tal Afar pendant cinq mois et j'y ai retrouvé mon époux. Mais alors, Daech a rassemblé tous les hommes dans une "mosquée", et je ne l'ai plus revu depuis. Mon plus jeune fils a été capable de fuir. J'avais un autre fils plus âgé. Il avait 12 ans la dernière fois que je l'ai vu. Mon plus jeune fils m'a dit qu'il avait été tué par Daech. Mes deux plus jeunes enfants et moi avons été vendus à un homme du Maroc que j'ai été forcé d'épouser. Il a été tué à la guerre, et j'ai à nouveau été vendue et forcée d'épouser un autre homme. Pendant deux semaines, j'ai essayé de trouver de l'information à propos de mon fils, et j'ai appris où il se trouvait grâce à des réseaux. Je l'ai pris avec moi et j'ai réussi à le cacher dans un transport en route vers la Turquie. En chemin, j'ai rencontré des combattants anti-Daech, et ils nous ont aidés, mes enfants et moi, à retourner en Irak. J'ai réussi à retrouver ma soeur, et je suis restée avec elle pendant quatre mois. Ensuite, avec l'aide de l'ONU, je suis venue au Canada avec mes enfants. »
(1710)
    Je continue: « Voici une liste des membres de ma famille que je souhaite désespérément retrouver... » Elle mentionne sa soeur, sa fille toujours prisonnière, son époux disparu, son frère qui vit avec son épouse et ses trois enfants dans un camp, le frère de son époux qui vit dans un autre camp, son oncle dans un camp et sa nièce. « Être séparée de ma famille me trouble énormément. Je pense à eux tous les jours. Le sort de ma fille et de mon époux me terrifie. Je m'inquiète tellement pour eux que j'ai de la difficulté à dormir. Je n'ai pas l'impression de pouvoir fonctionner correctement ici, et je ne peux pas faire d'effort en vue de ma réinstallation. Ce que j'ai vécu m'affecte encore beaucoup mentalement. J'ai tout le temps peur. Je suis constamment terrifiée à l'idée que mes enfants pourraient m'être enlevés. Il me faudra du temps pour guérir et je ne pourrai jamais guérir correctement si les autres membres de ma famille ne sont pas en sécurité avec moi ici. »
    Je poursuis: « Il n'y a personne ici pour me soutenir, et je dois élever seule trois enfants, après tout ce que j'ai vécu. Si les miens étaient ici avec moi, je sais que je pourrais trouver un peu de paix, et ils pourraient nous soutenir, mes enfants et moi. J'ai été blessée entre autres par l'explosion d'une bombe, et j'ai maintenant de la difficulté à marcher. Beaucoup de membres de ma famille que j'ai mentionnés vivent dans des conditions difficiles. Ils n'ont pas de logement adéquat et ne sont pas en sécurité. Je suis très reconnaissante de ce que le gouvernement canadien a fait pour m'aider à venir ici avec mes trois enfants, mais, avec respect, j'implore à nouveau votre aide pour que le reste de ma famille puisse venir ici également. Ma famille n'est pas en sécurité où elle est présentement. J'espère que le gouvernement du Canada répondra à ma demande. »
    En voici une autre: « Nous vous écrivons aujourd'hui parce que nous avons besoin de l'aide du gouvernement pour faire venir notre famille au Canada. Mon époux, ma soeur et moi sommes arrivés au Canada avec trois enfants le 21 décembre 2017. Le 3 août 2014, Daech est arrivé dans notre village et nous a forcés à nous convertir à l'Islam. Ils ont donné aux villageois du temps pour réfléchir à leur conversion. Nous sommes restés dans le village pendant neuf jours, encerclés par Daech. Une nuit, pendant que certains membres de Daech étaient partis se battre, ma famille et moi nous sommes échappés. Nous avons marché pendant deux jours pour atteindre les montagnes, puis avons continué jusqu'au Kurdistan. Ma soeur est restée avec Daech et a été leur captive pendant près d'un an. »
    Encore une fois, cette lettre a deux auteurs. Voici ce que dit la femme: « C'est très important pour nous que notre famille soit ici. Là-bas, dans les camps, il n'y a pas ni eau, ni nourriture, ni argent. Ma soeur vit dans un camp. Sa tente a été incendiée et sa famille et elle — son époux et sa fille — doivent vivre avec mes parents. Mon père et ma mère vivent aussi dans ce camp depuis 2015. Quand je parle avec les membres de ma famille, ils disent qu'ils ne se sentent pas en sécurité. Ils disent qu'ils n'ont pas de nourriture ni d'eau. Les conditions de vie se détériorent de jour en jour. Mes grands-parents vivent dans les monts Sinjar, et ont tous deux des incapacités physiques. Ils vivent avec mon oncle, mais eux non plus n'ont pas d'eau ni de nourriture. Mon autre soeur vit dans un camp depuis 2014, avec son époux et sa fille. Je crois que Dieu a sauvé ma soeur; quand des membres de Daech ont essayé de la fusiller, ils ont seulement atteint un drap près d'elle. »
    Voici ce que l'homme écrit: « Mon père et ma mère vivent dans un camp avec mes trois soeurs et mes trois frères. Ils vivent là dans des conditions de vie médiocres depuis 2014. Depuis que nous sommes arrivés au Canada, nous nous sentons en sécurité, mais nous ne sommes pas heureux parce que notre famille n'est pas avec nous. Nous avons de la difficulté à nous concentrer, et nous ne pouvons pas être heureux pendant que les membres de notre famille sont encore là-bas. Nous nous inquiétons toujours pour eux. Nous sommes reconnaissants de l'aide que le gouvernement nous a offert pour que nous puissions venir ici en sécurité, mais personne ne sait ce que c'est d'être là-bas. Quand nous parlons avec les membres de notre famille, ils nous disent combien la vie est difficile. Nous avons dit à notre famille que nous allions écrire des lettres au gouvernement du Canada, et ils ont sauté de joie. »
    Voici une autre lettre: « Je suis arrivée au Canada il y a sept mois avec mes cinq enfants. En 2014, mon époux, mes enfants et moi-même avons été capturés par Daech. J'ai été séparée de mon époux et de mon fils, et mes filles et moi-même avons été prisonnières de Daech pendant plus de deux ans. Je n'ai plus revu mon époux ni mon fils, je ne sais pas ce qui leur est arrivé ni où ils se trouvent présentement. Je demande l'aide du gouvernement canadien pour être réunie avec ma famille afin que je puisse réussir ma réinstallation au Canada. Toute ma famille vit dans un camp en Irak. Mes trois soeurs... » — elle donne leurs noms, puis poursuit — « mes trois frères et ma mère. Les miens vivent dans ce camp depuis qu'ils ont fui Daech en 2014. Je continue à leur parler, et ils me disent qu'il n'y a pas d'eau ni de nourriture dans les camps. Ils n'ont pas d'argent. Mon frère a été mordu par un serpent il y a un mois, et il a perdu un orteil. Il perd toujours beaucoup de sang et souffre atrocement. »
(1715)
    La lettre se poursuit comme suit: « Ma mère est malade depuis les quatre derniers mois. Elle souffre d'hypertension artérielle, de diabète et de douleur à la jambe. Je vous prie de m'aider à faire venir ma mère ici. Je suis en sécurité ici au Canada, mais ma santé mentale n'est pas bonne, car je suis séparée de ma famille. Jour et nuit, je m'occupe de mes enfants, parce que j'ai toujours peur de ce que Daech nous a fait pendant que nous étions en captivité. Mes enfants souffrent eux aussi de problèmes de santé mentale. L'un de mes enfants a de la difficulté à entendre, et un autre de mes enfants est handicapé. J'ai besoin que quelqu'un m'aide avec mes enfants. Je suis seule ici — je n'ai pas de frères, de soeurs ou d'époux. Je dois amener mes enfants à leurs rendez-vous médicaux par moi-même. S'il vous plaît, aidez-moi à réunir ma famille. »
    Voici une autre lettre: « Je vous écris pour vous demander de m'aider à être réuni avec ma famille. Je suis arrivée au Canada en décembre 2017, après que ma famille et moi-même ayons vécu d'inscriptibles horreurs aux mains de Daech. Le 3 août 2014, ce groupe terroriste est arrivé dans mon village, où je vivais avec mon époux et mes cinq enfants. Nous avons été tenus en captivité dans notre village pendant plusieurs jours avant que les hommes ne soient amenés afin d'être exécutés. Mon époux a été atteint de trois balles et laissé pour mort, mais il a survécu et a réussi à s'enfuir. Les femmes et les enfants ont été enlevés et la plupart ont été vendus comme esclaves sexuels, y compris ma fille de 15 ans, ma fille de 11 ans et ma fille de 1 an. On a amené mon fils aîné pour le former afin qu'il soit kamikaze, alors qu'on a amené mon fils le plus jeune pour lui apprendre le Coran. Après avoir été vendue à un homme musulman et avoir fait semblant d'être une musulmane fidèle, j'ai gagné la confiance de mon ravisseur et il a fait ramener mes fils auprès de moi. Éventuellement, mes enfants et moi-même nous sommes échappés vers un camp après que ma famille a payé une rançon. »
    La lettre se poursuit: « Daech a détruit ma famille élargie. La plupart des hommes de ma famille ont été tués par Daech, y compris mon père et trois de mes frères. La famille de mon époux a également été décimée. La plupart des membres de sa famille sont toujours portés disparus ou présumés morts. Ma mère est portée disparue; elle est peut-être tenue en captivité par Daech ou a peut-être déjà été assassinée. Mon époux, mes enfants et moi-même sommes en sécurité au Canada et avons la possibilité d'y bâtir un avenir. Je souhaite que le gouvernement canadien offre la même possibilité pour les membres de ma famille qui sont toujours en vie, notamment mes tantes et leur famille. J'ai quatre tantes qui vivent dans différents camps en Irak et que j'aimerais faire venir au Canada pour qu'elles y soient en sécurité. Mes tantes et leur famille sont... » Il y a énormément de détails ici, et la lettre se poursuit: « Mes tantes et leur famille sont la seule famille qu'il me reste en ce monde. Je m'inquiète pour elles, car leurs besoins essentiels, tels que l'accès à l'eau potable, à de la nourriture ou à un logement convenable, ne sont pas comblés. Je me fais sans relâche du souci pour ma famille. En raison de cela, je suis incapable de me concentrer et d'apprendre à l'école. Je crains que le fait d'être séparée de ma famille m'empêche réussir à me réinstaller au Canada. Je vous prie de m'aider à réunir notre famille afin que nous puissions nous appuyer les uns les autres, surmonter de notre traumatisme et travailler à un avenir productif au Canada. »
    La prochaine lettre va comme suit: « Je vous écris pour vous demander votre aide afin que ma famille et moi puissions être réunis. Je vous écris pour obtenir la réunification de mes six frères » — les noms sont énumérés — « de ma soeur et de ma mère. Ils vivent tous dans... » On mentionne les tentes, les noms et le fait qu'ils vivent dans un camp en particulier. La lettre continue: « J'ai pu arriver au Canada en janvier 2018. En 2014, notre famille a échappé à Daech en courant chercher refuge dans les monts Sinjar. Ma famille a ensuite fui Daech en se rendant au Kurdistan, où nous avons été séparés parce que je prenais soin de ma soeur qui avait échappé à Daech. On nous a offert de nous réinstaller au Canada afin que ma soeur puisse être en sécurité. Depuis notre arrivée au Canada, nous souffrons de ne pas être avec notre famille. Nos coeurs sont lourds, et notre famille nous manque. Nous nous inquiétons beaucoup pour les membres de notre famille, puisqu'ils ne sont pas en sécurité au camp, et qu'ils n'ont ni argent, ni nourriture, ni médicaments, ni logement. Je vous prie de m'aider à réunir notre famille afin que nous puissions nous soutenir les uns les autres et travailler ensemble à bâtir un avenir productif au Canada. »
    Une autre lettre dit: « Je vous demande de m'aider à retrouver les membres de ma famille afin que je puisse me réinstaller de façon adéquate. »
    Je vais juste m'arrêter pour un moment, parce que j'entends le président chuchoter qu'il y a une phrase identique... Bon nombre de ces réfugiés ont été soutenus par les services d'immigration et de réinstallation au Canada, qui plaident en leur nom pour leur réunification. Bien sûr qu'ils vont obtenir de l'aide pour rédiger les lettres. Cela n'a pas été fait à ma demande. Ce sont des lettres qui m'ont été remises par les organismes offrant des services de réinstallation.
(1720)
    Je parlais de la redondance, parce que j'ai entendu certaines de ces phrases de 10 à 15 fois. Je vous suis depuis le début. J'ai entendu exactement les mêmes phrases, mot pour mot, cela soulève donc quelques questions au chapitre de la redondance.
    Je suis très impressionné par la qualité de l'anglais. Elle s'est grandement améliorée depuis que nous avons eu... Nous avons rencontré à plusieurs reprises des membres de la communauté yézidie, qui éprouvaient des difficultés à s'exprimer en anglais, donc leur anglais s'est énormément amélioré, mais je suis préoccupé par le nombre de fois où j'entends exactement les mêmes mots comme « être réuni avec ma famille » et « vie productive au Canada ». Je voulais simplement vous mentionner que, si j'entends ces phrases de façon continue... Je serai heureux de recevoir toutes ces lettres également, comme vous me l'avez offert. Je voulais simplement vous avertir que, s'il y a des redondances, je ne pense pas que le Comité l'apprécie.
    Monsieur Maguire.
    J'ai écouté la lecture de ces lettres avec attention, et je suis certain qu'il y en a bien plus. Je veux les entendre.
    J'aimerais préciser à ce sujet, monsieur le président, que par rapport à ce qui a été dit, je ne sais pas trop comment il pourrait ne pas y avoir de redondance dans des lettres comme celles-ci, si tel est le cas. Ce sont des événements vraiment tragiques que ces gens ont vécus.
    Nous avons entendu des témoins s'exprimer par rapport à ces problèmes, mais de l'entendre de la part d'autant de personnes illustre bien l'objectif de la motion dont nous parlons aujourd'hui.
(1725)
    Je crois que vous alimentez le débat, je vais donc vous arrêter ici.
    Je pense que vous avez déjà débattu sur ce point.
    D'accord. Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, s'il est sous-entendu ici de quelque façon que ce soit que ces histoires ne sont pas fondées, on me rappelle que beaucoup de ces histoires ont été recueillies grâce aux services de traduction et à l'aide fournis par la Calgary Catholic Immigration Society. J'aimerais prendre le temps, pour le compte rendu, de présenter mes remerciements les plus sincères à cet organisme pour le travail qu'il a accompli afin d'aider les membres de la communauté yézidie à se réinstaller.
    Pour répondre à votre point, monsieur le président, voilà l'élément clé de leur réinstallation. Pouvez-vous imaginer devoir passer par le processus administratif d'IRCC en tant que personne qui est déjà passée par là...? Je tiens à remercier la Calgary Catholic Immigration Society pour le travail qu'elle a accompli pour que ces histoires soient présentées aux députés. Encore une fois, vous avez montré que cette étude est nécessaire.
    Je pense qu'aucune de ces histoires n'est redondante. J'estime qu'elles démontrent la nécessité que l'on mène cette étude. Je suis très reconnaissante d'avoir la possibilité de le prouver en partageant leurs expériences quant à l'échec de la réunification de leurs familles.
    D'autre part, quelques-unes de ces histoires sont similaires parce qu'elles proviennent de membres d'une même famille, mais ils ont tous le droit de se faire entendre.
    Donc une autre...
    Est-ce que M. Tilson a une question de débat ou un rappel au Règlement?
    Monsieur, il s'agit d'une réponse à votre commentaire portant sur le fait qu'il peut y avoir de la redondance à l'avenir.
    J'aimerais émettre un commentaire à ce sujet, si possible.
    Oui, et cela me donne l'occasion de clarifier les choses. Je n'ai pas dit que ces histoires étaient redondantes, c'est le fait de souligner le même point encore et toujours dans un débat qui l'est.
    Les histoires qu'on nous a lues étaient toutes différentes. Les incidents sont tous différents. Ce qui peut être redondant, et je ne trouve pas que ça l'est, c'est qu'ils demandent tous de l'aide. Ils demandent tous une situation dans laquelle les femmes, en particulier, qui se retrouvent seules au pays avec des enfants et sans...
    Merci. Je pense que c'est matière à débat également.
    Mais je réponds.
    Voilà la redondance. Ils demandent notre aide. Je pense qu'ils demandent tous la même chose. Voilà tout l'intérêt de ces lettres.
    Elles ne racontent pas toutes les mêmes histoires. J'estime qu'il est important que nous entendions les différentes histoires, parce qu'elles proviennent toutes de différents points de vue. Ce n'est pas redondant.
    Je pense que vous débattez à ce sujet.
    Madame Rempel, vous pouvez poursuivre.
    Merci.
    De temps à autre, lorsque nous présentons des motions ici, monsieur le président, mes collègues de l'opposition demandent essentiellement en quoi cela est plus important que ce que nous étudions actuellement, puisque nous avons tous ces autres points qui sont si importants. Le volume d'histoires et de cas qui sont présentés aujourd'hui, laissera, je l'espère, un impact reflétant l'importance de ce sujet.
    Je vais poursuivre avec une autre lettre. Les auteurs demandent de l'aide pour être réunis avec leur famille au Canada. La lettre va comme suit: « Avant d'arriver au Canada, nous étions une famille heureuse. J'étudiais, mais nous n'étions pas riches. Nous étions heureux. Après l'arrivée de Daech, toutes les femmes ont été forcées de se marier et réduites à l'esclavage sexuel. Daech a commencé à assassiner les garçons plus âgés et les hommes. Mon père a dit à ma mère, à mes soeurs et à moi-même de nous échapper. Nous nous sommes échappées avec l'aide de gens de notre village qui possédaient des voitures. Mon père et mes deux frères sont restés derrière. Nous sommes restées dans les montagnes pendant sept jours. Nous n'avions pas de nourriture, et il y avait seulement de l'eau sale, dans laquelle baignaient des carcasses d'animaux morts. Nous avons quitté les montagnes après sept jours, et marché dans le désert syrien afin d'atteindre la frontière syrienne. Nous avons fini par monter à bord d'un véhicule et être amenées à un camp près de la frontière. Après un jour, il nous a été possible d'entrer au Kurdistan, puisque nous avions été en mesure de louer un véhicule et d'acheter notre passage à la frontière. On nous a donné de la nourriture et des vêtements, et nous sommes allées au camp Khanke, où nous sommes restées de deux à trois mois. »
    La lettre continue: « Nous sommes par la suite allées dans une autre maison à moitié détruite — sans fenêtres ni portes — et avons éventuellement dû aller dans un camp différent lorsque le propriétaire de la maison nous a chassées. Nous y sommes restées pendant deux ans. L'épouse de mon cousin a été capturée, puis rachetée pour 52 500 $US. Elle nous a choisies, ma mère, mes soeurs et moi, pour venir au Canada afin de la réconforter. Les membres suivants de ma famille sont toujours en vie, et ils se trouvent » — il y a ici l'énumération d'une soeur, d'un beau-frère, de trois enfants, d'un beau-frère, de deux enfants et d'un fiancé. « Avant Daech, nous étions une famille complète et très heureuse. Après Daech, nous avons été dispersés. Nous n'avons plus le réconfort de notre famille. Nous pensons tout le temps aux membres de notre famille qui sont toujours en vie. Les conditions de vie dans le camp ne sont pas bonnes. Les gens doivent faire la file à 3 heures du matin pour avoir de l'eau. Il y a peu de nourriture, et quand il y en a, elle n'est pas bonne. Ce n'est pas très sûr. Il y a beaucoup de fils électriques dénudés, et il y a souvent des incendies. Je souhaite que le gouvernement canadien nous aide à réunir notre famille. »
    Cette lettre n'était pas... de façon légitime... Je ne sais pas comment elle s'est retrouvée ici — celle que je viens tout juste de mettre de côté, puisque nous n'avons pas d'images aujourd'hui.
    Je vais vous en lire une qui l'est. Il s'agit d'une autre demande pour la réunification d'une famille: « Je suis arrivé à Calgary dans le cadre du programme des victimes de Daech en 2017. Je suis arrivé au Canada avec mon frère, après avoir été détenu en captivité dans une prison et torturé par Daech pendant neuf mois. J'ai rejoint ma soeur et sa famille, qui se sont réinstallés à Calgary cinq mois avant mon arrivée. Bon nombre des membres de ma famille sont portés disparus — mes parents, quatre soeurs et quatre frères. Ma plus jeune soeur, qui avait 10 ans, a réussi à échapper à Daech après avoir été torturée pendant deux ans, mais a été tuée par une bombe le jour de sa fuite. J'ai le coeur brisé pour elle, ma famille et la communauté yézidie. Mon beau-frère a 10 membres de sa famille qui sont portés disparus également. L'un de mes frères, qui s'appelle » — je ne lirai pas le nom — « vit dans un camp en Irak dans des conditions déplorables. Bon nombre des membres de la famille de mon beau-frère vivent dans le camp de Mamrashan. Parmi les membres de la famille de mon beau-frère qui y sont, il y a sa mère ainsi que mes frères et soeurs » — tous les noms sont énumérés. « Ils ne sont pas en sécurité et vivent dans des conditions difficiles. Je m'inquiète constamment pour eux. Mon inquiétude constante me rend très mal à l'aise. Je suis incapable de faire quoi que ce soit dans ma nouvelle vie au Canada en raison de mon inquiétude constante et de mon stress. »
    La lettre continue: « Je demande au gouvernement de m’aider à faire venir ma famille au Canada pour qu’elle soit en lieu sûr et en sécurité et qu’elle ait l’espoir d'un meilleur avenir. J’implore également le gouvernement de faire tout en son possible pour retrouver les membres de ma famille qui sont toujours portés disparus, qui soit sont décédés en captivité aux mains de Daech, soit subissent des horreurs indescriptibles. De plus, j’aimerais implorer le gouvernement canadien de défendre, sur la scène internationale, la justice pour notre communauté. J’aimerais voir les responsables de ce génocide être tenus responsables de leurs crimes. S’il vous plaît, aidez-moi à être réuni avec ma famille qui vit en Irak et aidez-moi à retrouver les membres de ma famille qui sont portés disparus. Je suis incapable de trouver la paix sans connaître le sort des membres de ma famille. J’aimerais que le gouvernement du Canada travaille avec la communauté internationale afin que l'on vienne en aide à ceux qui sont portés disparus. J'aimerais que le gouvernement du Canada aide à réunir toutes les familles dont les membres sont toujours en vie. J'ai le coeur brisé et il le sera tant et aussi longtemps que je ne serai pas réuni avec ma famille. »
(1730)
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui afin de vous demander votre aide pour réunir les membres de ma famille qui sont toujours en Irak. Je crois sincèrement que la seule façon pour moi de m'établir de façon adéquate au Canada et de devenir un membre actif au sein de ma collectivité est de voir ma famille réunie à nouveau. Malgré toute l'aide que je reçois actuellement à Calgary, je ne serai jamais à l'aise au Canada tant et aussi longtemps que ma famille ne se trouve pas en sécurité ici avec moi. Je suis arrivée à Calgary en janvier 2017 avec mon époux et mon fils. Avant que Daech ne se mette à attaquer mon peuple, nous vivions dans un village qui s'appelle Wardiya, en Irak. Je travaillais à la maison, prenant soin de ma famille. Lorsque Daech a attaqué pendant la nuit, nous sommes restés cachés dans notre village pendant huit jours avant de réussir à nous échapper. Nous avons fui dans les montagnes et y sommes restés pendant quelques semaines. Nous avons alors marché jusqu'à la frontière syrienne, où nous avons demeuré dans des maisons partiellement détruites avant de nous rendre dans un autre camp. Nous sommes restés dans ce camp jusqu'à notre arrivée au Canada. Quelques-uns de mes frères et soeurs ont été capturés par Daech et je ne sais pas où ils se trouvent. Les autres membres de ma famille qui sont toujours en vie attendent dans des camps dans de terribles conditions . »
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    J'ai d'autres engagements à 17 h 30. Je pense que je ne suis pas le seul.
    La réunion va se poursuivre selon la volonté du Comité. Je ne suis pas certain d'avoir le droit de présenter une motion d'ajournement, puisque nous avons une motion à l'étude. J'aurais donc besoin d'un consentement unanime pour mettre fin à la séance. C'est ce que je pensais.
(1735)
    Pouvons-nous présenter une motion d'ajournement?
    Nous n'avons pas...
    Je suis sur la liste, n'est-ce pas?
    Vous êtes sur la liste, effectivement.
    Ai-je le consentement unanime pour lever la séance?
    En voici une autre: « Je vous écris aujourd'hui afin de vous demander votre aide pour réunir les membres de ma famille qui sont toujours en Irak. »
    Monsieur le président, à des fins de clarté, vous ne pouvez pas présenter une motion en invoquant le Règlement, il n'était donc pas approprié que vous mettiez la question aux voix.
    Si j'avais obtenu le consentement unanime, j'aurais pu le faire, c'est pourquoi j'ai posé la question. Je n'ai pas accepté de motion.
    Juste pour être très clair, chaque fois qu'un membre met en doute ma connaissance des règles, je dois prendre un peu de temps pour expliquer les règles, car je les connais très bien.
    J'ai le droit de donner la parole à un député qui invoque le Règlement, et ce rappel au Règlement peut en fait concerner le temps et établir que notre réunion a été convoquée de 15 h 30 à 17 h 30, et il est opportun pour un député de se demander si nous levons la séance ou non, puisque nous le faisons normalement sans motion. Nous levons la séance grâce à un consentement unanime implicite, étant donné qu'il s'agit de l'ordre du jour qui avait été établi. Il est donc tout à fait approprié que j'aie pris le temps d'écouter quelqu'un soulever cette question. La prochaine étape était et sera toujours de m'assurer d'avoir le consentement unanime pour poursuivre. Il est donc inapproprié qu'un député laisse entendre que c'est inapproprié.
    Je pourrais poursuivre là-dessus pendant un certain temps en tant que président, puisque j'ai le droit de clarifier les règles. Je pourrais même lire les règles en long et en large si un député m'en faisait la demande.
    Un député: Quarante minutes.
    Le président: Je pourrais les lire pendant 40 minutes.
    Je souhaiterais les entendre.
    Je dis simplement que je pourrais le faire.
    J'aimerais les entendre.
    Je vous remercie d'avoir exprimé votre opinion. Vous n'avez pas la parole.
    Nous allons maintenant poursuivre avec Mme Rempel.
    Merci.
    La lettre dit: « Je vous écris aujourd'hui pour vous demander votre aide afin de réunir certains membres de ma famille qui sont encore en Irak. Même avec toute l'aide que je reçois actuellement à Calgary, je ne crois pas que je serai en mesure de me sentir à l'aise au Canada tant que ma famille ne sera pas ici avec moi en sécurité. Je suis arrivée à Calgary en janvier 2017 avec mon époux et mon fils. Avant que Daech commence à attaquer mon peuple, nous vivions en Irak dans un village appelé Wardiya. Je travaillais à la maison et je m'occupais de ma famille lorsque Daech nous a attaqués un soir. Après huit jours cachés dans notre village, nous avons réussi à nous échapper. Nous sommes restés dans les montagnes pendant quelques semaines. Nous nous sommes ensuite rendus à pied jusqu'à la frontière syrienne, où nous avons vécu dans des maisons incomplètes. Nous sommes restés dans ce camp jusqu'à ce que nous venions au Canada. Certains de mes frères et soeurs ont été capturés, et je ne sais pas où ils se trouvent. Les autres membres de ma famille qui sont encore en vie attendent dans les camps dans des conditions déplorables. » Elle énumère les autres membres de la famille, y compris un fils, un beau-frère, une soeur, un frère, un beau-frère et une belle-soeur.
    La lettre se poursuit ainsi: « Le fait d'être séparée de ma famille me bouleverse beaucoup. Je pense à elle tous les jours. Au bout du compte, cela m'empêche de me concentrer sur ma nouvelle vie au Canada et d'envisager l'avenir sous un jour meilleur. Les membres de ma famille vivent dans des conditions déplorables à l'heure actuelle, et ils ne sont tout simplement pas en sécurité là-bas. Cette inquiétude constante a eu d'importantes répercussions sur ma santé mentale et j'ai de la difficulté à fonctionner. Ma soeur et mon fils en Irak souffrent de graves symptômes de TSPT, et la situation dans les camps ne fait qu'empirer leur état. Mon beau-frère souffre également de troubles cardiaques et ne peut pas recevoir de traitement convenable dans les camps. Nous avons déjà formé une communauté ici à Calgary et nous y faciliterions l'intégration du reste de ma famille. J'espère que le gouvernement canadien compatira à ma situation et m'aidera à faire venir ma famille au Canada. Ma famille et moi avons vraiment besoin de votre aide. »
    Il s'agit d'une autre lettre, pour être claire: « Je suis arrivée au Canada le 19 septembre 2017 avec mes trois enfants. Le 3 août 2014, Daech a capturé les gens de mon village et séparé les hommes des femmes et des enfants. Depuis ce jour, je ne sais pas ce qui est arrivé à mon époux. Mes trois enfants et moi-même sommes restés à Tall Afar pendant 20 jours. Ensuite, Daech m'a vendue ainsi que mes enfants pour le commerce sexuel, et nous avons vécu en Syrie pendant trois ans. Nous avons été vendus 16 fois et avons vécu dans divers endroits avec des hommes différents. Mes enfants et moi-même avons échappé à l'homme qui nous avait achetés. » Elle énumère ensuite tous les endroits où elle a été achetée et vendue.
    La lettre se poursuit ainsi: « Nous avons atteint Peshmerga et ensuite le Kurdistan. Nous avons vécu dans un camp à partir d'octobre 2016 jusqu'à notre venue au Canada. Nos conditions de vie dans le camp étaient médiocres parce qu'il n'y avait aucune nourriture et aucun argent, et mes parents n'étaient pas avec moi. À ce jour, je ne sais pas ce qui est arrivé à mon père et à mes frères. Je sais que Daech les a capturés, mais je ne sais pas s'ils sont encore en vie. Ma mère a été libérée par Daech après avoir été en captivité pendant un an et demi et elle vit maintenant dans le camp du Kurdistan. Elle vit avec ma soeur. Le mari de cette dernière lui a enlevé son seul enfant. Mon oncle vit dans un camp avec son épouse, sa fille et un fils, qui est marié et a trois enfants; l'autre belle-fille de mon oncle a perdu son mari lorsqu'il a été tué par Daech. Elle a survécu avec ses deux filles. L'oncle de mon mari vit avec son épouse et leurs quatre enfants dans un camp. Depuis mon arrivée au Canada, je suis bouleversée et je pense toujours à ma famille. Dès que je quitte l'école, j'oublie tout ce que j'ai appris. J'espère que le gouvernement canadien peut nous aider à faire venir notre famille ici. »
    Voici une autre demande: « Je suis venue au Canada en novembre 2017 après que ma famille et moi-même avons été forcées de fuir nos domiciles lorsque Daech a envahi notre village. Je suis arrivée à Calgary avec mon époux et nos quatre enfants ainsi que ma soeur et ses cinq enfants, dont deux éprouvent des problèmes importants de développement. Avant Daech, je vivais dans un village en Irak avec ma famille élargie. Nous cultivions la terre et nous menions une vie heureuse. Après l'arrivée de Daech, nous avons fui dans les montagnes. Malheureusement, ma soeur, son époux et leurs enfants ont été capturés par Daech. Nous avons fini par aller au Kurdistan, puis jusqu'en Turquie en quête de sécurité. Nous avons vécu en Turquie pendant quatre mois et nous sommes ensuite retournés au Kurdistan; nous avons vécu à divers endroits avant de nous établir à Sheikhan, où nous avons vécu dans un immeuble abandonné. Nous sommes ensuite allés dans un village appelé »... je vais taire le nom de certains villages à des fins de confidentialité.
(1740)
    La lettre se poursuit ainsi: « Ma soeur a fini par être libérée et a pu venir au Canada à titre de personne qui m'accompagne aux fins de réinstallation. Ma soeur et moi-même sommes en sécurité au Canada, mais notre famille continue de souffrir en Irak. La situation là-bas n'est pas sécuritaire pour les membres de ma famille. Ils continuent de courir le risque d'être persécutés et de subir de la violence. Je m'inquiète pour eux tout le temps. Mes inquiétudes constantes font en sorte que j'ai beaucoup de difficultés à apprendre. J'ai du mal à me rappeler ce que le professeur me dit et j'ai de la difficulté à apprendre l'anglais. En outre, ma soeur et moi-même avons besoin du soutien de notre famille afin d'élever nos neuf enfants, dont deux éprouvent des problèmes de santé complexes. Mes deux nièces, qui sont ici avec moi au Canada, ont des problèmes de développement importants et qui nécessitent de l'attention et des soins, y compris des visites fréquentes à l'Alberta Children's Hospital. Nous rencontrons des difficultés avec la garde d'enfants et avons du mal à gérer l'horaire chargé que supposent neuf enfants. Ma soeur et moi-même bénéficierions de la présence de nos parents et de nos frères et soeurs ici avec nous. La famille avec qui je dois être réunie... » et il y a une longue liste de membres de la famille, de soeurs, de frères...
    Plus loin: « Je vis maintenant en sécurité au Canada et je suis reconnaissante d'être en sécurité. Toutefois, je continue d'être rongée par l'inquiétude parce que ma famille se trouve encore en Irak. Cette inquiétude m'empêche de dormir et d'apprendre l'anglais. J'éprouve des difficultés au Canada, car il est difficile de s'occuper d'une grande famille tout en essayant de s'adapter à une nouvelle culture et à un nouvel environnement et d'apprendre une nouvelle langue. J'ai besoin de l'aide de ma famille. Je vous prie de m'aider à réunir les autres membres de ma famille afin que nous puissions nous appuyer les uns les autres et nous remettre de nos traumatismes. »
    Voici une autre lettre: « Je vous écris pour vous demander de l'aide pour me réunir avec mes parents et mes frères et soeurs qui sont encore en danger dans... » le nom du camp au Kurdistan est inscrit. La lettre se poursuit ainsi: « Je suis venu au Canada l'an passé dans le cadre du programme. Je suis reconnaissant d'être en sécurité au Canada, mais je m'inquiète constamment pour ma famille qui continue d'être en danger au Kurdistan. Mes parents et mes frères et soeurs demeurent en danger au Kurdistan, puisqu'il y a encore des membres de Daech qui y ciblent les yézidis. Mon père est... » Il nomme son père, sa mère et ses frères et soeurs et poursuit ainsi: « Je m'inquiète pour les membres de ma famille parce qu'ils continuent de risquer d'être persécutés et qu'ils ne sont pas en mesure d'accéder à des soins médicaux adéquats pour mon père, qui a fait un AVC, et à la suite duquel il est resté avec une main faible; ma mère souffre de diabète et de polyarthrite rhumatoïde, et mon frère âgé de 11 ans est atteint de paralysie cérébrale. Tous les membres de ma famille éprouvent des souffrances psychologiques en raison de ce qu'ils ont vécu avec Daech. Mes frères et soeurs, qui sont d'âge scolaire, n'ont pas les moyens de fréquenter l'école. De plus, mon frère âgé de 11 ans qui est atteint de paralysie cérébrale n'a accès à aucun service pour l'aider à mener une vie épanouie. Je m'inquiète beaucoup pour eux, et mes inquiétudes constantes m'empêchent de fonctionner. Comme je suis très loin de ma famille, je me sens impuissant et incapable de l'aider. Je me sens coupable d'être aussi loin d'elle et de ne pas être en mesure de l'aider. »
    Il poursuit ainsi: « J'aimerais qu'ils viennent me rejoindre au Canada afin que je puisse les aider et qu'ils soient en sécurité, aillent à l'école et reçoivent des traitements médicaux. Le fait d'être séparé de ma famille me cause de la détresse psychologique, et je crois que, tant que je serai séparé de ma famille, je ne serai pas en mesure de surmonter mes traumatismes psychologiques causés par Daech. Je vous prie de m'aider à me réunir avec ma famille. J'aimerais également vous demander d'aider les filles célibataires qui ont été violées et torturées par Daech pendant nombre d'années et qui vivent seules dans les camps en Irak. Ces filles n'ont aucun avenir en Irak et méritent de vivre en paix et en sécurité au Canada. S'il vous plaît, faites-les venir au Canada afin que la communauté yézidie réinstallée au Canada puisse les appuyer. »
    Une autre lettre indique ceci: « Je vous écris aujourd'hui pour vous demander de l'aide pour me réunir avec ma famille. Je suis arrivée au Canada en décembre 2017 avec mes quatre enfants et mon beau-frère. En août 2014, Daech est venu dans mon village et a emmené trois de mes enfants à différents endroits. Le dernier, c'était la Syrie. Mon seul fils s'est enfui avec son oncle. Je ne sais pas ce qui est arrivé à mon époux. J'ai vécu à Raqqua, en Syrie, avec mes trois enfants pendant trois ans. J'ai fui avec mes amis et mes enfants à Pakeke et ensuite au Kurdistan. Nous sommes arrivés au Kurdistan en mars 2016 et nous y avons vécu dans un camp, où les conditions de vie étaient très mauvaises. J'espère que le gouvernement canadien peut m'aider à faire venir ma famille ici. Mon père » — elle nomme son père — « et ma mère vivent ensemble dans un camp au Kurdistan. Mes deux soeurs et mon plus jeune frère vivent avec mes parents dans ce camp, ainsi que mon frère aîné, avec son épouse et leurs six enfants, ma soeur, avec son mari et leurs six enfants et mon autre soeur, avec son époux et leurs trois enfants. »
(1745)
    La lettre se poursuit ainsi: « Une autre de mes soeurs vit avec son mari dans ce camp, ainsi que ma soeur aînée avec son mari et mon autre soeur, avec son mari et une fille. Lorsque je parle aux membres de ma famille, ils me disent qu'il n'y a ni nourriture ni eau et qu'il fait extrêmement chaud. Une tente brûle chaque jour. Je ne me sens pas à l'aise ici. Nous avons beaucoup souffert aux mains de Daech. Mon époux n'est pas avec moi à l'heure actuelle. Je ne vais pas bien mentalement et je ne peux pas me concentrer sur ma vie ici parce que je m'inquiète constamment pour ma famille dans mon pays d'origine. Lorsque j'y étais et que j'ai été rencontrée en entrevue, on m'a dit que, si je déménageais au Canada, on ferait venir ma famille ici. J'ai besoin d'aide parce que je dois aller à l'école le soir et, lorsque je reviens à la maison, je suis seule pour élever mes quatre enfants. D'autres pays qui accueillent des yézidis font également venir les membres de leur famille afin qu'ils soient réunis. Nous espérons que le gouvernement canadien peut nous aider à faire venir nos familles ici. »
    Voici une autre lettre: « Je vous écris pour vous demander de m'aider à me réunir avec mon fiancé, qui vit dans [... tente dans le... camp]. Je fais partie des réfugiés yézidis qui ont été amenés au Canada dans le cadre du programme en 2017. On m'a dit que mon fiancé pourrait venir me rejoindre au Canada après que je me serais réinstallée à Calgary, mais cela fait presque un an, et je n'ai pas été réunie avec lui. Dans ma culture, une fois qu'une femme est fiancée, elle ne peut plus faire marche arrière, car c'est comme si elle était mariée. La seule raison pour laquelle nous ne sommes pas mariés, c'est que le responsable de l'immigration m'a dit que je ne serais pas en mesure de me réinstaller au Canada si je me mariais. En fait, le responsable m'a dit qu'aucun membre de ma famille ne pourrait venir au Canada si je me mariais. Il m'a dit que je pourrais faire venir mon fiancé au Canada plus tard, après avoir obtenu le droit d'établissement. Je faisais face à une situation impossible: soit j'épousais mon fiancé, mais je continuais de subir de la violence en Irak, soit je reportais le mariage et venais au Canada pour être en sécurité en espérant pouvoir y faire venir mon fiancé plus tard. »
    La lettre se poursuit ainsi: « J’ai choisi de venir au Canada, mais, depuis mon arrivée, on me dit qu’il m’est impossible d’être réunie avec mon fiancé, puisque je n'ai pas de certificat de mariage officiel. Je m’inquiète terriblement pour lui parce qu’il n’est pas en sécurité à titre de membre d’une minorité ethnique persécutée depuis très longtemps en Irak. Comme vous le savez, les yézidis sont encore kidnappés et tués en Irak. Mon inquiétude pour lui et sa sécurité a un effet débilitant. Je ne me sens pas bien sur le plan psychologique parce que je suis séparée de lui et que je m’inquiète pour lui. Je suis incapable de me concentrer à l’école, et, par conséquent, j’ai de la difficulté à apprendre l’anglais, ce qui nuit à ma capacité de m’intégrer à la collectivité. Aidez-moi à me réunir avec mon fiancé. Je ne serai pas en mesure de réussir à me réinstaller au Canada sans lui. »
    Voici une autre demande: « Je vous écris aujourd'hui pour vous demander de m'aider à réunir les membres de ma famille qui sont encore en Irak. Je crois sincèrement que la seule façon pour moi de réussir à me réinstaller au Canada et de devenir un membre actif dans ma collectivité, c'est de réunir ma famille de nouveau. Même avec toute l'aide que je reçois, je ne crois pas que je serai en mesure de me sentir à l'aise au Canada tant que ma famille ne sera pas en sécurité. Je suis arrivée à Calgary en décembre 2017 avec mon époux et six de mes enfants. Avant que Daech commence à attaquer mon peuple, nous vivions à Tal Banat près de Sinjar. Je travaillais à la maison et je m'occupais de mes enfants. Nous avons été à Tal Banat jusqu'au jour où Daech a attaqué mon peuple. Mon époux et moi-même avons fui dans les montagnes à 2 heures du matin et nous avons fini par réussir à atteindre la ville de Duhok. Nous nous sommes ensuite rendus dans des villages voisins pour nous cacher avec des parents. Enfin, nous sommes allés au camp de Mamrashan, où nous sommes restés jusqu'à notre venue au Canada. Un de mes fils a réussi à s'échapper et à se rendre en Allemagne, mais les autres membres de ma famille ont été séparés de nous au début, et ils sont demeurés coincés dans les montagnes pendant plusieurs semaines. Ceux qui sont encore en vie, qui sont énumérés plus bas, vivent maintenant dans divers camps partout au Kurdistan. Voici tous les membres de ma famille qui sont encore vivants ainsi que l'endroit où ils se trouvent [...] » Les soeurs, les mères et les frères sont énumérés.
    La lettre se poursuit ainsi: « Le fait d’être séparée de ma famille m’a beaucoup perturbée. Je pense à elle tous les jours. Au bout du compte, cela m’empêche de me concentrer sur ma nouvelle vie au Canada et d’envisager l’avenir sous un meilleur jour. Les membres de ma famille vivent dans des conditions de vie effroyables en ce moment et ils ne sont tout simplement pas en sécurité là-bas. Cette inquiétude constante a une incidence directe sur moi. Mes enfants souffrent de problèmes de santé mentale parce qu’ils sont séparés de leur famille. La plupart de mes frères et soeurs en Irak souffrent de TSPT, et la situation dans le camp ne fait qu’empirer leur état de santé mentale. Nous avons formé une communauté ici à Calgary, ce qui faciliterait grandement l’intégration des autres membres de ma famille. J’espère que le gouvernement canadien compatira avec ma situation et fera venir ma famille au Canada. »
(1750)
    J'en ai une autre: « Je suis venu au Canada en décembre 2017 après que ma famille et moi-même avons vécu des horreurs indicibles. Je suis arrivé à Calgary seulement avec mon frère, son épouse et leurs quatre enfants. Avant les attaques de Daech, je vivais avec mes parents, mes frères et soeurs et la famille de mes frères et soeurs à Tel Azer, où nous faisions de l'agriculture et travaillions dans la construction. Après l'arrivée de Daech, notre famille a été capturée. Les hommes ont été enlevés et les femmes vendues comme esclaves sexuelles. J'ai été capturé et tenu captif pendant deux ans et demi. J'ai enfin été libéré après que ma famille a payé une rançon pour obtenir ma liberté. Lorsque Daech m'a libéré, on m'a amené dans un camp où des représentants canadiens se sont adressés à moi et m'ont offert de me réinstaller au Canada. Je ne pouvais emmener avec moi qu'un seul membre de ma famille à des fins de soutien. Cela a été une décision très difficile pour moi, mais j'ai choisi mon frère. On m'a dit que je serais peut-être en mesure de parrainer les autres membres de ma famille après mon arrivée au Canada, mais j'ai depuis appris que ce sera impossible pour moi de le faire. J'ai été atterré d'apprendre que je ne reverrai peut-être jamais ma famille. À l'heure actuelle, Daech garde en captivité plusieurs membres de ma famille: ma mère, mon frère cadet, ma soeur et ses trois enfants ainsi que ma belle-soeur et ses trois enfants. Je ne sais pas du tout s'ils sont encore en vie. Heureusement, j'ai des parents qui ont survécu et qui vivent dans divers camps au Kurdistan. Les membres de ma famille qui ont survécu sont les suivants [...] » Les membres de la famille sont énumérés avec le camp où ils se trouvent.
    La lettre se poursuit ainsi: « Les conditions de vie des membres de ma famille qui vivent dans les camps sont très difficiles. Même s'ils ont échappé à l'emprisonnement de Daech, ils continuent à se sentir menacés et à croire que leur sécurité est en péril. Comme ils font toujours partie d'une minorité dans une région majoritairement musulmane, ils vivent dans la peur constante d'être attaqués de nouveau. En outre, ils vivent dans des tentes très chaudes qui n'offrent pas de protection adéquate. Il fait très chaud, et ils n'ont pas assez d'eau. De plus, ils me disent que l'eau a un goût très amer. Ils ne peuvent se procurer de l'eau que tous les trois jours et parfois ils en manquent. En outre, il leur arrive souvent de manquer de nourriture. En raison de leurs souffrances, je souffre moi aussi. Mon frère et moi-même sommes en sécurité au Canada; toutefois, même si je suis en sécurité, je n'ai pas l'esprit en paix parce que ma famille souffre. J'ai des difficultés d'apprentissage, et cela fait en sorte que j'ai du mal à apprendre l'anglais. Aidez-moi à me réunir avec les autres membres de ma famille afin que nous puissions nous appuyer les uns les autres et nous remettre de nos traumatismes. »
    J'ai une autre lettre: « Je vous écris aujourd'hui pour vous demander de m'aider à réunir les membres de ma famille qui sont encore en Irak. Je crois sincèrement que la seule façon pour moi de réussir à m'installer ici et de devenir un membre actif, c'est de réunir ma famille de nouveau. Malgré toute l'aide que je reçois, je ne crois pas que je serai en mesure de me sentir à l'aise ici parce que ma famille n'est pas en sécurité. Je suis arrivée à Calgary en mars 2018 avec ma soeur et deux de ses frères. Avant que Daech commence à attaquer mon peuple, je vivais avec ma famille dans la ville de Kocho, près de Sinjar. Je travaillais à la maison et m'occupais de ma famille. Le jour où Daech a attaqué notre ville, j'étais à Erbil pour un rendez-vous chez le médecin et, après avoir entendu les nouvelles, j'ai fui dans la région de Dohuk. Toutefois, mes parents et mes frères et soeurs étaient à Kocho lors de l'attaque de Daech. Après de nombreux mois d'activité, mes trois frères et soeurs qui sont venus avec moi au Canada ont réussi à échapper à Daech et sont venus me rejoindre dans le camp de Rwanga, mais Daech avait déjà assassiné mes parents. Mon autre soeur a également été capturée par Daech, et je ne sais pas où elle se trouve. Nous avons dû payer 20 000 $ à un passeur afin pour qu'il aille libérer mes frères capturés par Daech. Ma soeur qui est ici avec moi au Canada a été libérée par les troupes irakiennes un mois plus tard, lorsqu'elles ont repris Mossoul. Elle nous a ensuite rejoints au camp. Par la suite, je suis restée avec mes frères et soeurs dans le camp jusqu'à ma venue au Canada. Voici une liste des membres de ma famille qui sont encore en vie ainsi que l'endroit où ils se trouvent. »
    La lettre se poursuit ainsi: « Je pense tous les jours aux membres de ma famille. Cela m'empêche, au bout du compte, de me concentrer sur ma nouvelle vie et de tourner la page. Les membres de ma famille vivent dans des conditions effroyables et ils ne sont tout simplement pas en sécurité là-bas. Ils n'ont pas accès à de l'eau potable, à de l'électricité ou à des soins de santé. Également, ma soeur et un de ses frères éprouvent de graves problèmes de santé mentale en raison de leur séparation du reste des membres de notre famille. Comme je suis l'aînée au Canada, je dois m'occuper de mes frères et soeurs plus jeunes, ce qui est extrêmement difficile pour moi. Le fait de faire venir au Canada mes frères et soeurs plus âgés, énumérés plus bas, m'aiderait grandement à prendre soin de ma famille. Nous avons formé une communauté ici à Calgary. J'espère que le gouvernement canadien compatira avec ma situation et m'aidera à faire venir ma famille au Canada. Nous avons besoin de votre aide. »
(1755)
    J'ai une autre lettre: « J'écris cette lettre aujourd'hui pour demander au gouvernement canadien d'aider les yézidis et de m'aider à me réunir avec ma famille. Je suis arrivée au Canada en août 2017 avec mon époux, deux enfants et une belle-soeur. En 2014, Daech est venu dans notre village et a capturé ma famille, qu'il a gardée captive pendant huit jours. Nous avons été en mesure de nous échapper et de fuir dans les monts Sinjar, pour ensuite atteindre le Kurdistan, qui se trouve au nord de l'Irak. Mes conditions de vie ici au Canada sont bonnes, mais je pense toujours à ma famille et à notre peuple dans mon pays d'origine. J'espère que le gouvernement canadien peut m'aider à me réunir avec ma famille. Ma famille vit dans... » Elle indique le camp au Kurdistan. « Ma mère, ma soeur et mes frères... » Elle indique leurs noms. « Je suis en mesure de communiquer avec les membres de ma famille dans le camp où ils vivent, et ils me disent que les conditions de vie sont très mauvaises. Il n'y a ni médicament, ni nourriture, ni eau. Depuis mon arrivée au Canada en août 2017, ma vie avec mon époux et mes enfants se déroule bien, mais je pense toujours à ma famille dans mon pays d'origine. Ma mère souffre d'hypertension et de diabète et elle n'a pas d'argent pour consulter un médecin. Je suis reconnaissante de l'aide du gouvernement canadien et j'espère qu'il peut faire venir ma famille ici. »
    Voici une autre lettre: « Je suis arrivée au Canada en novembre 2017 avec mon frère, ma belle-soeur, mon neveu et une soeur, dans le cadre du programme. Le 3 août 2014, Daech a capturé ma famille. Il a séparé mon époux et mes enfants. Il a envoyé mes enfants et moi en Syrie. Je n'ai pas eu de nouvelles de mon époux depuis que Daech l'a enlevé ce jour-là. Daech m'a tenue captive pendant un an et demi. Je me suis échappée et me suis rendue à Pakeke et ensuite dans un petit village au Kurdistan. À cet endroit-là, je vivais avec mes parents. Daech tient encore captif mon fils de 15 ans. Si j'ai des nouvelles de lui, s'il est libéré, j'espère qu'il pourra venir ici au Canada. Mon autre fils et ma fille ont été libérés par Daech et ils sont arrivés au Canada il y a environ un mois et demi. Je ne sais pas ce qui est arrivé à mon beau-frère et à sa famille. Je ne sais pas non plus ce qui est arrivé à mon oncle et à sa famille. »
    La lettre se poursuit ainsi: « Depuis mon arrivée au Canada, j’ai de la difficulté à me concentrer parce que je pense toujours à mon fils, à mon époux et à mes parents dans mon pays d’origine. Chaque fois que je pense que Daech a capturé ma famille là-bas, je n'arrive pas à bien dormir. J’espère que le gouvernement canadien pourra m’aider à faire venir ma famille ici. Mon père et ma mère vivent encore au Kurdistan avec mon frère. Celui-ci a quatre enfants avec son épouse. La vie est difficile pour ma famille, non pas seulement pour ma famille, mais pour tous les yézidis. Il n’y a ni eau ni nourriture. J’espère que le gouvernement canadien pourra aider le peuple yézidi, particulièrement les gens qui vivent dans des camps et les membres de notre famille qui sont encore tenus captifs par Daech. Ce groupe terroriste lave le cerveau de nos enfants. Je suis reconnaissante du fait que le gouvernement canadien m’a aidée à faire venir mes enfants ici. J’espère également avoir le reste de ma famille au Canada. »
    Voici une autre demande: « Voici mon histoire. Le 3 août 2014, Daech est venu dans mon village, à Sinjar. Après son arrivée, j’ai fui dans les montagnes et j'y suis restée pendant trois mois. À ce moment-là, j’ai réussi à me rendre au Kurdistan. Je suis restée pendant deux mois dans un camp de réfugiés appelé Khanke, que j’ai ensuite quitté pour aller vivre dans un immeuble inachevé. Je ne me sentais pas en sécurité dans le camp ni où que ce soit en Irak. Je ne pouvais pas travailler ou aller à l’école. Je suis venue au Canada avec ma belle-soeur, qui est seule ici avec ses enfants. Voici une liste des membres de ma famille avec qui je veux désespérément être réunie…» Elle mentionne sa soeur, tenue captive par Daech pendant deux ans et demi, et sa fille âgée de 6 ans. Sa soeur a pu s’échapper et vit dans les montagnes avec son époux et ses quatre enfants. Elle communique parfois avec eux. Elle énumère d’autres personnes.
    La lettre se poursuit ainsi: «Le fait d'être séparée de ma famille me bouleverse grandement, et je pense à elle tous les jours. Ma soeur et sa famille » — c'est la personne qui a échappé à l'emprise de Daech — « vivent dans des conditions de vie effroyables à l'heure actuelle. Elles n'ont pas de nourriture et ne peuvent pas trouver d'emploi. Elles souffrent là-bas, et je m'inquiète tout le temps de leur sécurité et de leur bien-être. Les enfants ne peuvent pas aller à l'école. Ma soeur a de graves problèmes de santé mentale et n'est pas capable de fonctionner. Elle vit constamment dans la peur, a des crises de panique et a besoin de beaucoup d'aide. Je sens que je ne peux pas bien me réinstaller au Canada sans avoir ma famille ici. Nous devons nous aider les uns les autres afin de pouvoir tourner la page sur cette expérience effroyable que nous avons tous vécue. Je ne fais que penser à mes soeurs. Je ne peux pas me concentrer sur mes travaux scolaires ici. Il m'est difficile de me concentrer sur quoi que ce soit d'autre que ma famille. Je m'inquiète quotidiennement de sa sécurité. Cela nuit à ma capacité d'aller de l'avant. Je sais que le fait d'avoir les membres de ma famille ici améliorerait ma vie parce que je saurais qu'ils sont en sécurité. Je veux également être avec mon fiancé, car nous espérons entamer une vie commune. Nous devons être ensemble. Je pense à la vie que nous pourrions avoir maintenant en Irak si Daech n'avait pas détruit nos vies. Je suis très reconnaissante que le gouvernement canadien m'ait aidée à venir ici, mais je demande avec respect qu'il continue de m'aider en faisant aussi venir ma famille ici, car elle n'est pas en sécurité où elle se trouve. Nous devons fonder une nouvelle communauté au Canada afin que nous puissions nous concentrer sur l'avenir, aller à l'école et nous bâtir une vie ici. J'espère que le gouvernement du Canada fera venir ma famille au pays et aidera les yézidis. Je souhaite que le gouvernement du Canada réponde à ma demande. Ma famille a besoin de votre aide. »
(1800)
    Voici une autre lettre: « Je suis arrivée au Canada en décembre 2017 avec mon époux et mes quatre enfants. En août 2014, trois de mes enfants et moi-même avons été capturés par Daech, et nous avons été tenus captifs pendant huit mois et demi. Mon époux et deux autres de nos enfants ont réussi à fuir dans les montagnes et ont vécu au Kurdistan durant environ huit ou neuf mois. Après huit mois, mes enfants et moi-même avons pu échapper à Daech; nous avons fui jusqu'au Kurdistan également et retrouvé mon époux et les autres enfants. Depuis mon arrivée au Canada en décembre 2017, je suis en sécurité, mais je pense toujours à mon fils qui est resté dans mon pays d'origine. Mon fils, Jamal, est âgé de 27 ans et vit dans une tente » — je tairai l'endroit à des fins de confidentialité — « avec son épouse et son fils âgé de huit mois. Il n'est pas en mesure d'occuper un emploi régulier en raison de douleurs dorsales, et je m'inquiète pour lui. Il travaille dans la construction de temps à autre pour gagner de l'argent parce que son épouse s'occupe de leur bébé. »
    La lettre se poursuit ainsi: « Ma soeur vit dans une tente dans les monts Sinjar avec son époux et quatre enfants. Ils éprouvent des difficultés, n'ont ni nourriture ni eau et dépendent de l'aide des voisins. Mon frère vit dans une tente dans la région de Sinjar avec son épouse et ses six enfants. Lorsqu'il fuyait Daech, mon frère a fait une chute et s'est fracturé des os dans la poitrine. En raison de cette blessure, il a de la difficulté à respirer et souffre beaucoup. Mon autre soeur vit également dans les montagnes avec son époux et ses huit enfants. Mon autre frère vit lui aussi dans les monts Sinjar avec son épouse, ses sept enfants et notre mère. J'ai seulement communiqué une fois avec lui depuis mon arrivée au Canada et je sais que sa vie est difficile. Mon autre frère vit également dans les monts Sinjar avec son épouse et ses quatre enfants, et ils ont dit qu'ils aimeraient venir au Canada. Ma soeur vit dans les monts Sinjar avec son époux. Mon frère vit aussi dans les monts Sinjar. Je ne vais pas bien mentalement, car j'ai une douleur au bras, et mes enfants doivent m'aider à m'occuper de la maison. La douleur que j'ai au bras m'a été infligée par Daech, qui m'a torturée et battue. J'ai de la difficulté à dormir parce que je m'inquiète de ma famille et que j'ai mal au bras et à l'épaule. Je me soucie beaucoup de ma famille en Irak, particulièrement des enfants — mes neveux et nièces. Je suis ici en sécurité avec mes quatre enfants, mais je me préoccupe beaucoup de mon autre fils et je veux qu'il soit ici avec moi. Mon autre fils est seul. Je demande au gouvernement canadien de m'aider à amener ma famille en sécurité ici au Canada. »
    Voici une autre lettre: « Je vous demande votre aide pour réunir ma famille. Je suis arrivé au Canada en juin 2017 avec mon épouse et mes deux enfants. Avant Daech, j'étais agriculteur. Nous étions une famille heureuse. Nous vivions normalement et nous pouvions subvenir aux besoins de notre famille. Tous les membres de notre famille étaient ensemble. Après Daech, nombre de personnes ont fui dans les montagnes en emportant ce qu'ils pouvaient à la dernière minute. Nous avons échappé de justesse à la mort. Nous avons tout perdu ce que nous avions accumulé pendant toute notre vie. Nous avons été chanceux de nous en sortir vivants. Nous avons passé trois jours en montagne. Nous avons réussi à rejoindre la frontière syrienne grâce à un corridor ouvert. Nous avons dû marcher pendant quatre ou cinq heures et, à la frontière, on nous a fait monter dans des autobus et on nous a amenés vers un camp en Syrie. On nous a ensuite amenés au Kurdistan. Nous sommes allés dans un village chrétien. J'y avais travaillé auparavant et je connaissais certaines personnes qui pouvaient nous héberger. Nous avons vécu là pendant trois ans. Nous dépendions de l'aide internationale au cours de cette période. À l'occasion, nous étions en mesure de trouver du travail. Ma belle-soeur est sortie clandestinement et a été l'une des personnes avec qui la Calgary Catholic Immigration Society a communiqué. Ma belle-soeur a été choisie pour venir au Canada et elle a demandé que sa soeur la rejoigne, et c'est ainsi que nous sommes venus au Canada. Voici les membres de la famille qui ont survécu ainsi que l'endroit où ils se trouvent [...] » Elle énumère son père et sa mère, cinq frères et soeurs ainsi que des oncles et tantes.
    La lettre se poursuit ainsi: « Nous pensons toujours à notre famille qui est encore là-bas. Nous avons vécu avec nos parents pendant plus de 20 ans et, soudainement, nous ne les voyons plus. J'ai donné naissance à un enfant au Canada, et mes parents ne l'ont pas encore rencontré. Nous aimerions beaucoup que le gouvernement canadien fasse venir les membres de notre famille au Canada. Nous pensons toujours à eux. Il y a toujours un danger que la même chose arrive aux yézidis encore une fois en Irak. »
    Voici une autre lettre: « Le 3 août 2014, Daech a capturé les gens de mon village; le groupe a encerclé notre village et nous a forcés à nous convertir à l'islam en nous menaçant de nous tuer. Nous sommes restés dans le village pendant cinq jours, et, une nuit, nous avons fui dans les montagnes. Nous avons marché durant quatre jours et sommes restés dans les montagnes pendant quatre jours. Après, nous sommes allés au Kurdistan et avons vécu dans un camp jusqu'à notre venue au Canada. Les conditions de vie dans le camp étaient mauvaises. Il n'y avait ni eau, ni nourriture, ni médicaments. Nous espérons que le gouvernement canadien pourra nous aider à nous réunir avec nos familles. »
(1805)
    Encore une fois, deux personnes ont rédigé la lettre. La première dit: « Mon frère s'est enfui de l'Irak avec sa famille, et ils vivent dans un refuge en Grèce. Il y vit avec son épouse et ses trois enfants. Mon frère est coincé en Grèce, et j'aimerais beaucoup que le gouvernement puisse le faire venir ici. Le gouvernement grec dit à mon frère qu'ils ne peuvent pas rester en Grèce et doivent retourner en Irak. En Grèce, les yézidis sont tués dans le camp de réfugiés. » L'autre personne dit: « Notre soeur vit avec trois enfants dans le camp depuis 2014. Notre autre soeur y vit avec son époux et un enfant. Notre autre soeur est seule dans le camp avec ses sept enfants. Elle est veuve parce que Daech a tué son époux, alors elle doit s'occuper seule de ses sept enfants. Notre neveu vit également dans le camp. Depuis notre arrivée au Canada, nous nous efforçons de mener une bonne vie ici, mais c'est difficile parce que nous pensons toujours à notre famille dans notre pays d'origine, particulièrement à notre frère en Grèce. Nous espérons que le gouvernement canadien peut nous aider à faire venir au Canada notre frère en Grèce et notre soeur en Irak. Nous savons qu'ils ne vivent pas dans des conditions sécuritaires. Nous sommes reconnaissants de tout ce qui a été fait pour les yézidis. Pendant toute leur vie, les yézidis ont vécu ensemble, et nous vivons maintenant tous séparés. »
    Voici une autre lettre: « Nous sommes arrivés au Canada en 2017. En 2014, j'ai été capturée par Daech, tenue captive pendant environ neuf mois et amenée à Tal Afar et à Mossoul. J'ai réussi à échapper à Daech et j'ai fui Mossoul pour me rendre au Kurdistan. » Encore une fois, deux personnes ont rédigé la lettre. « J'ai fui le village jusque dans les monts Sinjar, et une autre personne du village est allée dans les monts Sinjar et ensuite jusqu'au Kurdistan. Nous sommes reconnaissantes que le gouvernement canadien nous a amenées ici, mais nous espérons faire venir notre famille au Canada. C'est difficile parce que notre famille n'est pas ici. Nous n'allons pas bien mentalement. » La première femme dit ce qui suit: « J'ai de la difficulté à dormir et j'ai peur de sortir parce que je vois des gens qui ressemblent à des membres de Daech. J'ai aussi du mal à dormir parce que je m'inquiète du fait que ma famille n'est pas en sécurité. J'espère que le gouvernement canadien peut m'aider à me réunir avec ma famille. Mon père et ma mère vivent actuellement dans un camp au Kurdistan depuis 2014. Lorsque je leur parle, ils me disent qu'il est dangereux de vivre là. Mon père s'est fait amputer une jambe, et ma mère a subi une fracture au pied il y a environ six mois et ne peut pas marcher parce qu'elle n'a pas les moyens de se faire soigner. Mes soeurs vivent également dans ce camp dans les mêmes mauvaises conditions de vie, tout comme mon frère avec son épouse et ses trois enfants et mes deux soeurs avec leur époux et leurs quatre enfants. » L'autre personne affirme ce qui suit: « Mon frère a été capturé par Daech et a réussi à s'échapper après deux mois. Il vit maintenant dans le camp avec son épouse et son fils âgé de trois mois. Mes deux oncles vivent dans ce camp depuis quatre ans. » Il s'agit d'un camp différent. « Certains membres de ma famille sont encore captifs de Daech. Mon père et ma soeur ont perdu contact avec eux depuis quatre ans. Nous ne serons jamais à l'aise ici au Canada parce que nous nous inquiétons toujours de notre famille dans notre pays d'origine. Nous espérons que notre famille là-bas puisse venir ici. Nous voulons nous concentrer sur notre vie ici au Canada. »
    Voici une autre lettre: « Je suis arrivée au Canada en mars 2018 avec mon frère et ma soeur dans le cadre du programme. J'ai été capturée en août 2014 par Daech et conduite en Syrie le 5 août. J'ai été tenue captive pendant un an. Mes ravisseurs m'ont battue et violée. Je me suis échappée, j'ai fui Daech et je me suis rendue chez une famille syrienne qui a aidé mon cousin et moi-même pendant 28 jours. Après cela, nous sommes allés en Turquie pour rejoindre le reste de la famille. Mon frère est encore captif de Daech et vit en Syrie. J'espère que, s'il est un jour libéré ou s'il échappe à Daech, il pourra venir au Canada. J'espère que le gouvernement canadien pourra m'aider à faire venir au Canada ma tante, qui vit dans un camp au Kurdistan. Elle y vit avec son époux et ses six enfants. Je lui ai parlé aujourd'hui, elle m'a dit que la vie dans le camp est difficile. Il n'y a ni nourriture ni eau. Ma vie ici au Canada est bonne et sécuritaire, mais je pense beaucoup à ma famille dans mon pays d'origine. J'ai le moral bas, mais j'essaie d'être forte. Je fais de mon mieux à l'école. Même si je ne peux apprendre que deux mots par jour à l'école, ce sera déjà cela. Je fais des cauchemars chaque nuit et je n'arrive pas à cesser de penser à ce qui m'est arrivé et à ce qui arrive encore à ma famille. J'espère que le gouvernement canadien m'entendra. Je veux aider les gens de mon peuple qui vivent dans les camps parce que ce n'est pas une bonne vie et j'espère que ma tante pourra venir ici. Les yézidis ici à Calgary sont comme ma famille, mais j'ai besoin de ma tante avec moi au pays. J'aimerais également dire au gouvernement canadien que beaucoup de femmes et leurs enfants sont encore prisonniers de Daech, et ils ont besoin de notre aide. »
(1810)
    Une autre lettre indique ce qui suit: « Voici mon histoire. Le 3 août 2014, Daech nous a capturés, mon époux et moi. J'étais enceinte à ce moment-là, et nous avions également une fille avec nous. On nous a conduits à Tal Afar. À cet endroit, on m'a séparée de mon époux et on l'on battu devant moi. Je ne l'ai pas revu depuis. On nous a conduites, ma fille et moi, en Syrie, et j'ai accouché d'une petite fille pendant que j'étais tenue captive par Daech en Syrie. J'ai vu beaucoup d'horreurs là-bas: des filles enlevées et des garçons forcés à combattre pour Daech. On nous a battues maintes fois, mes filles et moi. On a essayé de me forcer à me convertir à l'islam. On m'a dit que mon nom était kurde et on l'a changé. J'allais être vendue, avec mes filles, mais ma famille m'a trouvée en ligne et a payé pour qu'on nous libère. On a envoyé ma fille aînée devant nous, et j'ai marché pendant quatre heures avec ma fille la plus jeune jusqu'à ce que nous trouvions des peshmergas de l'Irak. J'ai été en mesure de trouver mes parents et j'ai vécu avec eux pendant un an et demi, après quoi on m'a fait venir au Canada. Voici une liste des membres de ma famille avec qui je veux désespérément être réunie. » Elle énumère ses soeurs.
    La lettre continue ainsi: « Ils mènent une vie très difficile dans un logement de fortune temporaire, sans toit convenable; ils manquent souvent de nourriture et leurs enfants craignent sans cesse pour leur sécurité. Je m'inquiète beaucoup du sort de ma famille. Le fait d'être séparée de ma famille me bouleverse beaucoup, et je pense à elle tous les jours. Je suis terrifiée lorsque je pense à sa sécurité. Je pleure tous les jours en pensant à mon époux sans savoir ce qu'il lui est arrivé, mais je sais qu'il est peut-être mort. Mes filles me posent des questions sur leur père et veulent savoir quand elles le verront. Tout ce que je veux, c'est que mes soeurs soient ici avec moi afin de m'aider à aller de l'avant au Canada. Je crois que ma vie serait meilleure si elles étaient ici. Autrement, je suis seule avec mes enfants et mon beau-frère. Mes parents sont âgés et ne peuvent pas venir ici. Je suis très reconnaissante envers le gouvernement canadien de l'aide qu'il nous offre, à moi et à mes trois enfants, mais je demande avec respect qu'il continue de m'aider à faire également venir au Canada ma famille, qui n'est pas en sécurité où elle est. J'aimerais recevoir cette aide du gouvernement parce que mon état de santé mentale ici n'est pas très bon. Je ne peux pas me concentrer et je ne suis pas en mesure de bien m'installer ici en vivant comme ça. J'espère que le gouvernement du Canada répondra à ma demande. Ma famille a besoin de votre aide. »
    Voilà une pile de lettres provenant d'une ville dans ce pays, et nous avons tenu cette discussion à maintes reprises. Nous avons étudié tous les facteurs que nous devions prendre en considération en tant que Parlement et en tant que gouvernement pour aider à réinstaller les victimes de génocide. La principale recommandation à cet égard, c'était d'accélérer le processus de réunification des survivants de génocide avec les membres de leur famille, et, même après l'adoption du rapport à la Chambre des communes, le gouvernement reste toujours immobile.
    J'ai des piles de lettres. C'est seulement celles de Calgary. Il y a Winnipeg, London et Toronto. J'ai des piles d'exemples où on dit aux gens que, même dans les limites restreintes qui existent actuellement pour le délai prescrit d'un an, leurs demandes ne seront pas traitées avant au moins deux ans.
    Je demande humblement au Comité d'examiner l'étude afin que nous puissions nous assurer que ces gens soient en mesure de se réinstaller au Canada et que nous établissions nos priorités en conséquence pour ce qui est de déterminer qui vient au Canada par l'intermédiaire de notre système d'immigration humanitaire.
    Merci.
(1815)
    Le prochain est M. Maguire.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai écouté attentivement la lecture de ces lettres, je ne sais pas combien il y en avait... des dizaines au moins, si ce n'est pas une centaine. J'ai examiné l'étude qu'on nous demande de réaliser et la motion qui a été présentée aujourd'hui. L'étude porterait entièrement sur la réunification des familles de réfugiés, monsieur le président, et je crois...
    Nous entendons la sonnerie d'appel au vote. J'ai besoin d'un consentement unanime pour poursuivre la séance. Ai-je le consentement unanime du Comité?
    Des députés: Non.
    Le président: Voulez-vous que je lève la séance?
    Vous n'avez pas besoin de nous le demander parce que vous n'avez pas le consentement unanime du Comité pour poursuivre la séance.
    Voulez-vous que je suspende la séance?
    La séance est suspendue.
    (La séance est levée. [Voir le Procès-verbal])
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