:
Je vous remercie, monsieur le président, de nous donner l'occasion de comparaître devant votre comité pour discuter de cet important enjeu et faire le point sur le travail d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada pour la réinstallation des survivants de Daech au Canada.
[Français]
Je suis accompagnée aujourd'hui de Mme Corinne Prince, qui est directrice générale à la Direction générale des politiques de l’établissement et de l’intégration à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, ainsi que de M. Jean-Marc Gionet, qui est directeur principal par intérim des Opérations de réinstallation à IRCC également. M. Sean Boyd, qui est directeur exécutif des Relations avec le Moyen-Orient à Affaires mondiales Canada, ainsi que sa collègue Mme Tara Carney se sont joints à nous.
Après cette brève allocution, mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
Comme vous le savez, en octobre 2016, la Chambre des communes a adopté à l'unanimité une motion voulant que le gouvernement du Canada offre sa protection à des femmes et filles yézidies fuyant le génocide.
Puisque le Canada offre une protection en fonction de la vulnérabilité des gens, et non pas de leur religion ou origine ethnique, la réponse du gouvernement à cette motion visait tous les survivants de Daech pour qui la réinstallation serait une solution adéquate. Le gouvernement s'est engagé à réinstaller 1 200 survivants de Daech, y compris des femmes et enfants yézidis vulnérables, d'ici la fin de 2017. Nous avons également accordé la priorité à toute demande de parrainage privé de réfugiés qui sont des survivants de Daech.
Afin de respecter cet engagement, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a collaboré étroitement avec l'Agence des Nations unies pour les réfugiés, l'Organisation internationale pour les migrations, les fournisseurs de services du Programme d'aide à la réinstallation et d'autres partenaires.
Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés nous a aidés à identifier les femmes et enfants yézidis vulnérables, ainsi que d'autres survivants de Daech et les membres de leur famille, à l'extérieur comme à l'intérieur de l'Irak.
Monsieur le président, je suis heureuse d'annoncer qu'en date du 29 octobre, 807 survivants étaient déjà arrivés au Canada — 747 comme réfugiés parrainés par le gouvernement et 60 comme réfugiés parrainés par le secteur privé. De ces 807 personnes, 81 % sont des yézidis, dont 230 femmes, 178 hommes et 398 enfants. Parmi toutes les personnes reçues au Canada en date du 29 octobre, 39 % venaient d'Irak, 35 % du Liban et 26 % de la Turquie.
Nous avons établi tous les cas de réinstallation restants et mené les entrevues nécessaires. Parmi les 1 383 individus dont le dossier nous a été transmis, presque tous viennent d'Irak, et ces demandes sont en cours de traitement.
[Français]
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada demeure résolu à atteindre l'objectif qui consiste à réinstaller 1 200 survivants de Daech d'ici la fin de cette année, malgré la difficulté liée aux opérations dans la région et à leur complexité. Ces opérations peuvent comporter des risques pour le bien-être et la sécurité des réfugiés, de nos partenaires et de notre personnel.
Nous continuons de suivre l'évolution de la situation politique et de la sécurité dans la région ainsi que d'évaluer toutes les répercussions éventuelles sur nos opérations.
[Traduction]
Nous continuons également de planifier ou replanifier les vols pour les personnes dont le voyage a été annulé en septembre et octobre en raison de l'interdiction des vols internationaux en provenance de la région kurde de l'Irak. Bien que le taux de refus soient faibles, les arrivées sont parfois retardées pour des raisons médicales, logistiques ou autres.
Comme nous l'avons mentionné dès le début de cette initiative, nous ne voulons pas amener ces personnes vulnérables au Canada en grands groupes, car elles ont besoin d'appuis supplémentaires, et nous voulons nous assurer que ces appuis sont en place dans les collectivités d'accueil.
À moins qu'il y ait de nouveaux problèmes de sécurité, de sortie ou de transport qui échappent à notre volonté, nous comptons atteindre notre objectif d'accueillir ces 1 200 personnes au Canada d'ici le 31 décembre.
Outre les 1 200 réfugiés pris en charge par le gouvernement, conformément à l'engagement gouvernemental, nous facilitons le parrainage privé de personnes qui font partie de ce groupe vulnérable pour qu'un plus grand nombre de femmes et filles yézidies, ainsi que d'autres survivants de Daech, puissent entrer au Canada en tant que réfugiés parrainés par le secteur privé.
Au moment de choisir l'endroit où envoyer ces nouveaux arrivants, nous avons tenu compte de la présence d'une diaspora yézidie, de services médicaux et psychosociaux, de la disponibilité d'interprètes et d'organismes fournissant des services sociaux et ayant de l'expérience auprès de groupes semblables.
Nous avons aussi tenu compte des conseils de responsables yézidis en Irak et au Canada, qui ont insisté sur l'importance d'établir des liens avec leur communauté religieuse au Canada, pour permettre la création spontanée de réseaux communautaires entre les familles nouvellement installées.
[Français]
À ce jour, la majorité des personnes arrivées dans le cadre de cette initiative ont été reçues à Toronto, à London, à Winnipeg et à Calgary. Nous prévoyons également envoyer des individus et des familles à Lethbridge.
Évidemment, lorsque des personnes qui présentent une demande de réinstallation disent avoir des contacts dans une autre localité canadienne, nous mettons tout en oeuvre pour qu'elles puissent y aller et être près d'amis ou de membres de leur parenté qui pourront leur offrir le soutien nécessaire.
[Traduction]
Pour aider les fournisseurs de services à répondre aux besoins de cette population en matière de réinstallation et d'intégration, les agents de migration et les médecins de l'Organisation internationale pour les migrations ont cerné les besoins particuliers de chaque personne en ce qui a trait aux soins médicaux et à la réinstallation, et cette information nous a été communiquée avant l'arrivée de ces gens. Notre ministère a également élaboré et distribué un profil de la population yézidie, contenant des renseignements sur la démographie, la santé et la culture de cette population vulnérable.
Pour assurer le succès de leur réinstallation et intégration, tous les réfugiés pris en charge par le gouvernement, y compris les survivants de Daech, reçoivent des services d'établissement avant et après leur arrivée. Ainsi, l'Organisation internationale pour les migrations offre des séances d'orientation sur le Canada à tous les survivants de Daech, avant leur départ du Moyen-Orient. Cette orientation leur fournit des renseignements exacts et pertinents ainsi que des mesures de soutien afin qu'ils puissent prendre des décisions éclairées au sujet de leur nouvelle vie au Canada, avoir des attentes réalistes et commencer leur processus d'établissement.
Au Canada, les fournisseurs de services du Programme d'aide à la réinstallation, financé par IRCC, jouent un rôle important dans l'accueil des survivants de Daech et assurent leur transport vers les centres d'accueil. Le rôle de ces fournisseurs est d'offrir aux réfugiés pris en charge par le gouvernement des services après leur arrivée afin de répondre à leurs besoins essentiels immédiats.
Après leur établissement initial, les nouveaux venus reçoivent des services de soutien auprès de fournisseurs de services d'établissement financés par IRCC, notamment une formation linguistique, des services de consultation d'urgence et des services d'interprétation. Il y a aussi des services destinés aux jeunes, comme du soutien à l'établissement dans les écoles, des clubs d'aide aux devoirs et des activités artistiques et récréatives.
Ici, au Canada, ces organismes ont coordonné et partagé les leçons apprises entre eux et avec notre ministère afin de répondre aux besoins de ces nouveaux arrivants. De plus, les partenariats locaux en matière d'immigration, connus sous l'acronyme PLI et financés par IRCC, offrent un soutien aux survivants de Daech. Les PLI jouent aussi un rôle important pour ce qui est d'organiser l'aide aux réfugiés syriens dans leur processus de réinstallation et d'intégration. En rassemblant les divers intervenants, ces réseaux de partenaires oeuvrent à la coordination des services aux nouveaux arrivants au niveau local et communautaire. Il s'agit notamment d'employeurs, de commissions scolaires, de centres de santé, d'autres ordres de gouvernement, d'organismes de prestation de services, d'associations professionnelles, d'organisations confessionnelles et ethnoculturelles, ainsi que d'autres organismes du secteur des services sociaux.
[Français]
Enfin, le ministère surveille les progrès que nous accomplissons quant à la réalisation de notre engagement, à savoir la réinstallation de nouveaux arrivants au Canada.
Le ministère tient régulièrement des réunions avec les fournisseurs de services à l'échelle locale pour résoudre les problèmes, discuter des progrès vers l'atteinte de nos objectifs, des leçons tirées et de toute autre question à laquelle il faudrait prêter attention. Nous allons communiquer de nouveau avec ces organisations au cours de la semaine.
Monsieur le président, je vous ai donné un aperçu de la situation concernant nos opérations de réinstallation des survivants de Daesh. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à toutes les questions des membres du Comité et de fournir tout autre détail, au besoin.
Merci beaucoup.
Je cède maintenant la parole à mon collègue d'Affaires mondiales Canada.
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Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
On m'a demandé de faire le point sur l'engagement du Canada en Irak et de décrire la situation actuelle dans ce pays. J'espère que cette mise en contexte vous sera utile pendant vos discussions d'aujourd'hui sur le programme de réinstallation des yézidis.
[Français]
L'année dernière, mon prédécesseur vous a fourni des renseignements sur notre présence diplomatique accrue en Irak. Cette mesure a permis au Canada d'approfondir ses relations avec le gouvernement irakien et le gouvernement régional kurde. Notre personnel diplomatique communique régulièrement avec un vaste éventail d'interlocuteurs au sein du gouvernement irakien et du gouvernement régional kurde. Nous avons également des interactions régulières avec les autorités locales, notamment les gouverneurs et les maires, les Nations unies, des représentants des communautés et des organisations de la société civile.
[Traduction]
La majorité des yézidis irakiens vivent dans le nord de l'Irak, dans la province de Ninive et dans certaines parties de la région du Kurdistan. Les deux communautés les plus importantes se trouvent à Sheikhan, au nord-est de Mossoul, et à Sinjar, près de la frontière syrienne, à 80 kilomètres à l'ouest de Mossoul. Les deux villes sont situées dans la province de Ninive.
À la suite du siège de Sinjar par Daech en 2014, de nombreux yézidis ont fui leur communauté. Ils se sont retrouvés dans des camps destinés aux personnes déplacées à l'intérieur du pays, dans des communautés d'accueil en Irak, essentiellement dans les provinces de Dohuk, d'Erbil et de Sulaymaniya, ou dans d'autres pays comme la Turquie et la Grèce, où ils ont été accueillis en tant que réfugiés. Notre présence accrue à Erbil nous a permis de communiquer régulièrement avec différents représentants de la communauté yézidie et de poursuivre les discussions avec les autorités locales et les Nations unies. Le bureau de l'ambassade du Canada à Erbil a également fourni une aide aux équipes de sélection d'IRCC qui se sont rendues en Irak pour effectuer l'examen préalable des personnes ayant présenté une demande de réinstallation.
[Français]
Les Forces de sécurité irakiennes et les forces kurdes ont réalisé d'importants progrès contre Daech au cours de la dernière année, notamment en libérant Mossoul et Hawija. La situation dans l'ensemble de l'Irak demeure cependant imprévisible. La sécurité dans certaines régions du pays, y compris dans celle du Kurdistan, demeure instable.
Affaires mondiales Canada a recommandé aux Canadiens d'éviter tout voyage dans ce pays. En outre, nous surveillons la situation pour assurer la sécurité de notre personnel. Des élections parlementaires auront lieu en Irak en mai 2018, et il pourrait y avoir des tensions à l'approche de ces élections.
[Traduction]
Le 25 septembre, le gouvernement régional du Kurdistan a tenu un référendum sur l'indépendance, malgré un jugement de la Cour suprême de l'Irak déclarant le référendum inconstitutionnel. Le gouvernement irakien a répondu en déployant les Forces de sécurité irakiennes dans plusieurs territoires contestés près des frontières de la région du Kurdistan, y compris à Kirkuk, à Sinjar et dans les environs de Mossoul. Il a également annulé tous les vols internationaux à destination de la région du Kurdistan et a repris le contrôle de certains postes frontaliers qui relevaient auparavant des autorités kurdes.
Les restrictions de vols ont rendu les déplacements à l'intérieur et à l'extérieur de la région kurde encore plus difficiles pour les visiteurs internationaux, et on ne sait pas encore à quel moment ces restrictions prendront fin. Les forces de sécurité irakiennes ont pris le contrôle de ces régions sans incident majeur, même si quelques affrontements mineurs ont eu lieu, particulièrement dans les environs de Kirkuk. La composition du gouvernement du Kurdistan demeure incertaine, tout comme les prochaines étapes de la confrontation politique avec Bagdad.
Alors que le pays se dirige vers les élections nationales de 2018, les différences fondamentales concernant les droits constitutionnels et le partage de la richesse n'ont toujours pas été résolues.
En ce qui concerne la lutte contre Daech, les forces de sécurité irakiennes, avec l'aide de la Coalition mondiale contre Daech, continuent de libérer les territoires toujours occupés par Daech dans l'ouest de l'Irak. Le contrôle exercé par Daech a considérablement diminué; à l'heure actuelle, ce groupe occupe moins de 10 % du pays. Les autorités irakiennes et la communauté internationale s'efforcent dorénavant de stabiliser les zones libérées et de créer un environnement propice à la réconciliation. Ce conflit a entraîné le déplacement de millions de personnes à l'intérieur du pays, et on estime qu'environ 400 000 yézidis vivent dans des camps destinés aux personnes déplacées ou dans des communautés d'accueil. Par ailleurs, des villes et des villages entiers ont été entièrement démolis. La Coalition mondiale s'est donné pour priorité immédiate d'éliminer les munitions non explosées et les engins explosifs improvisés dans ces régions, et de rétablir, dans la mesure du possible, les services de base comme l'eau, l'électricité et l'éducation.
Le Canada appuie ces efforts, mais il faudra du temps avant que ceux-ci ne portent fruit, et de nombreux Irakiens continueront à avoir besoin d'aide humanitaire au cours des années à venir.
[Français]
L'aide humanitaire du Canada est attribuée en fonction de la vulnérabilité et des besoins. Comme les yézidis sont un groupe particulièrement vulnérable qui a été touché de manière disproportionnée par la campagne de violence de Daech, ils font partie des groupes auxquels nous offrons une aide humanitaire. Par exemple, dans les camps et les communautés d'accueil où les yézidis ont trouvé refuge, nos partenaires des Nations unies offrent des services complets aux yézidis déplacés, ce qui comprend la nourriture, l'eau, l'accès à l'éducation, les soins médicaux et les abris.
[Traduction]
En particulier, avec l'appui du Canada, le Fonds des Nations unies pour la population a établi, à l'hôpital de Dohuk, un centre pour femmes qui offre des traitements cliniques et non cliniques dans les cas les plus extrêmes de violence sexuelle et fondée sur le sexe. Entre septembre 2014 et octobre 2016, le centre a fourni une aide à 824 survivantes, parmi lesquelles des femmes et des filles yézidies victimes d'atrocités commises par Daech. Ce centre fonctionne toujours aujourd'hui.
Par ailleurs, le financement que nous avons accordé au cours des dernières années à des ONG partenaires a permis d'offrir des services de soins de santé dans les camps pour personnes déplacées et les communautés qui ont accueilli de nombreux yézidis. Grâce à des programmes pluriannuels dans le cadre de la stratégie du Canada au Moyen-Orient, nous fournissons une aide humanitaire de plus de 150 millions de dollars à l'Irak pour répondre aux besoins des plus vulnérables, y compris des yézidis.
Le conflit avec Daech a également exacerbé des divisions interconfessionnelles et créé un climat de méfiance au sein des communautés. Nombre de personnes, dont des membres de groupes minoritaires, craignent d'être victimes de discrimination ou de représailles en cas de retour à leur domicile. Le Canada contribue aux efforts de stabilisation et de réconciliation dans l'espoir de créer un environnement propice au retour en toute sécurité des personnes déplacées à l'intérieur du pays, notamment en finançant l'élimination des munitions non explosées et des engins explosifs improvisés, et en soutenant les initiatives de règlement des conflits et de réconciliation au niveau communautaire. À cette fin, le Canada appuie les campagnes anti-représailles, les groupes d'action communautaire axés sur le règlement des conflits locaux potentiels et les institutions qui se penchent sur les litiges relatifs aux terres et aux propriétés dans le nord de l'Irak. Nos efforts de stabilisation visent essentiellement à régler certains des problèmes qui ont permis à Daech de diviser les communautés dans le nord de l'Irak, notamment dans les territoires yézidis traditionnels.
Les yézidis ont subi d'horribles atrocités aux mains de Daech. La Commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies sur la République arabe syrienne a conclu que ces actes de violence constituaient un génocide et a déclaré que le génocide des yézidis se poursuivait. Des membres de la communauté yézidie nous ont dit qu'ils ne se sentaient pas en sécurité et qu'ils continuaient à craindre les cellules dormantes de Daech et les autres formes d'extrémismes religieux.
Le programme de réinstallation du Canada aide les membres les plus vulnérables de la communauté, à savoir les femmes et les enfants qui ont subi des sévices inhumains, mais le Canada aide également les yézidis et les autres minorités vulnérables qui demeurent en Irak. En offrant une aide humanitaire et en appuyant les efforts de stabilisation, nous espérons que les yézidis pourront un jour regagner leurs domiciles et continuer à pratiquer librement leur religion, conformément à leurs normes culturelles.
Merci encore de m'avoir invité à prendre la parole devant vous aujourd'hui.
:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Honorables députés, je suis très heureux de comparaître de nouveau devant votre comité pour parler de la situation des survivants de l'EIIS qui ont été relocalisés au Canada.
Tout d'abord, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés remercie le Canada de lui avoir donné la possibilité de travailler avec les autorités irakiennes et canadiennes pour relocaliser les plus vulnérables des survivants de Daech. En Irak, nous travaillons de très près avec le gouvernement central à Bagdad et avec les autorités du Kurdistan irakien, particulièrement avec trois organes gouvernementaux: le ministère de la santé publique, lequel, comme vous le savez, vient en aide aux victimes de violence sexuelle avec l'appui d'une autre agence de l'ONU; la direction de la lutte contre la violence faite aux femmes, qui copréside avec le HCR le groupe de travail sur la protection au Kurdistan; et la direction du travail et des affaires sociales, qui oeuvre surtout auprès des enfants.
Nous partagions le même objectif que le Canada et, comme on l'a dit plus tôt, que l'Allemagne, qui a également offert de relocaliser un certain nombre de réfugiés. Cet objectif commun était d'identifier les plus vulnérables des survivants de Daech, ceux qui risquaient de ne pas survivre ou qui avaient besoin de traitements qui n'étaient pas disponibles là où ils habitaient au Kurdistan. Nous avons donc collaboré avec tous les partenaires pour identifier ces survivants sans compromettre leur sécurité et leur dignité.
Un des aspects clés des programmes de relocalisation et de réinstallation est qu'il faut préserver la dignité et la liberté de choix des personnes concernées et bien les informer sur ce que la relocalisation ou la réinstallation implique. Au bout du compte, c'est aux personnes elles-mêmes qu'il revient de décider de quitter leur pays et d'être réinstallées ou relocalisées dans un pays comme le Canada.
Relocaliser des personnes qui se trouvent toujours à l'intérieur des frontières de leur propre pays ne fait pas partie de notre mandat traditionnel, mais nous l'avons fait dans certaines situations exceptionnelles lorsque nous étions dans l'impossibilité de venir en aide aux personnes touchées et de les protéger.
Nous mettons surtout l'accent sur les victimes de violence sexuelle — des femmes et des filles au premier chef, mais, comme on l'a dit plus tôt, nous devons également être conscients que des hommes et des garçons sont également victimes de violence de nature sexuelle; les personnes qui ont été détenues par Daech pendant de longues périodes et qui ont été soumises à des conversions religieuses forcées, de la torture et des mauvais traitements physiques et psychologiques, la traite des personnes ou aux travaux forcés; et les gens qui ont été séparés de leur famille.
Pour ce faire, nous nous tournons vers nos partenaires sur le terrain pour obtenir des recommandations, pas seulement les trois organes que j'ai mentionnés — le ministère de la santé publique, la direction des affaires sociales et la direction de la lutte contre la violence faite aux femmes —, mais aussi les ONG qui oeuvrent en Irak et au Canada. J'en ai personnellement rencontré plusieurs qui étaient intéressées à nous donner des listes de noms, et quatre ONG canadiennes l'ont fait. Il s'agit de la Calgary Catholic Immigration Society, du Manitoba Interfaith Immigration Council, du Canadian Lutheran World Relief et du bureau des réfugiés du diocèse de Toronto. Ensemble, ces ONG nous ont fourni 34 noms, dont 18 se trouvaient déjà dans la base de données des autorités kurdes, et donc dans la base de données du HCR. Ce sont donc 16 nouveaux noms que ces ONG nous ont fournis, et nous les avons transmis aux autorités canadiennes.
J'ouvre une petite parenthèse pour signaler que, comme vous le savez très bien, les programmes de réinstallation ou de relocalisation ne visent que les personnes les plus vulnérables, habituellement moins de 1 % du nombre total de réfugiés.
Je veux faire valoir nos inquiétudes quant au financement de l'opération en Irak. À la fin de l'année financière, c'est-à-dire à la fin décembre, nous aurons reçu moins de 20 % du financement nécessaire pour venir en aide à plus de quatre millions de personnes déplacées, dont bon nombre de victimes de Daech.
Voyez-vous, bien que nous soyons heureux d'être en mesure de relocaliser les gens les plus vulnérables, nous devons aussi pouvoir offrir aide et protection aux personnes qui se trouvent encore en Irak, notamment dans la région du Kurdistan, et cela inclut des victimes et des survivants de Daech. Le problème, c'est que c'est extrêmement compliqué d'y parvenir avec seulement 18 % de financement. La protection et l'aide à la survie que nous pouvons offrir aux personnes déplacées sont extrêmement limitées.
Je m'arrête ici. C'est avec plaisir que je répondrai aux questions des députés.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je ne suis pas un membre habituel du Comité, mais dans une autre vie, j'ai fait beaucoup de recherche sur la situation des yézidis et des Kurdes. J'ai aussi donné des cours sur ces sujets, je suis donc de près ces questions.
Je veux d'abord vous poser une question d'ordre général. Comme vous le savez, le haut-commissaire pour les réfugiés était ici hier. J'ai écouté quelques-unes des entrevues qu'il a données, où l'on a soulevé la question des demandeurs d'asile.
Dans leurs questions au haut-commissaire, les journalistes ont indiqué que la situation avec les demandeurs d'asile que le Canada a eu à gérer, surtout cet été, risquait d'avoir refroidi l'ardeur des Canadiens à accueillir des réfugiés. Le haut-commissaire prit la peine de souligner que le Canada restait un pays accueillant.
Pour le travail que vous faites, qu'il fait et que nous faisons ici aujourd'hui, il est important de remettre les chiffres en contexte. Il est vrai qu'il y a eu quelques problèmes liés à l'asile pendant l'été qui ne sont pas entièrement réglés. Cependant, l'école de politique publique de l'Université de Calgary, d'après une analyse qu'elle a effectuée en examinant les chiffres d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, a constaté ce qui suit.
En 2017, au Canada, 36 000 personnes auront demandé l'asile, un nombre, certes, assez considérable. Toutefois, en 2008, ce nombre était de 37 000. En 2000, il était de 38 000 et en 2001, de 45 000. J'aimerais donc que vous et M. Grandi sachiez que le Canada a déjà relevé ce genre de défi — affronté la tourmente, si l'on veut —et il saura de nouveau le faire.
Pour revenir aux yézidis et à ce qui se passe dans le Nord de l'Irak, nous avons entendu ce matin un témoignage indiquant que le Canada s'implique activement sur le terrain, principalement sur le plan de la justice transitionnelle, mais aussi dans d'autres méthodes de résolution de conflit.
M. Grandi a fait valoir — et vous aussi, à l'autre comité où vous avez témoigné — que la réinstallation ne représente qu'une partie infime de nos interventions visant la crise mondiale liée au déplacement. La pire depuis la Deuxième Guerre mondiale, comme vous l'avez si bien dit.
Pouvez-vous parler tout spécialement de justice transitionnelle et de son importance dans la reconstruction des sociétés? Le Canada en fait un point central de l'ensemble de ses activités. Je pense ici au nord de l'Irak, mais c'est aussi le cas ailleurs. Celle-ci est extrêmement importante pour aider à la guérison des collectivités et faire en sorte que les personnes déplacées puissent un jour y retourner.