FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 10 juin 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Bienvenue à la 147e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
Il s'agit d'une séance spéciale sur la question des prisonniers politiques en Russie. Nous discuterons aujourd'hui de la situation des droits de la personne en Russie à la suite de la publication du rapport de Perseus Strategies sur les prisonniers politiques du Kremlin. La question des prisonniers politiques et de la constante détérioration de la situation des droits de la personne en Russie en est une qui rassemble les membres de notre comité, tous partis confondus. Un certain nombre d'entre nous sont membres du caucus multipartite Raoul Wallenberg sur le projet international de défense des prisonniers politiques, mené par M. Cotler, qui est avec nous aujourd'hui. Le rapport d'aujourd'hui nous tient à cœur, surtout à la suite du rapport du comité et l'adoption unanime de la loi de Magnitski.
Nous accueillons aujourd'hui le président de la Boris Nemtsov Foundation for Freedom, M. Vladimir Kara-Murza; le président fondateur du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, l'honorable Irwin Cotler; l'associé directeur de Perseus Strategies, M. Jared Genser; et la présidente de la Free Russia Foundation, Mme Natalia Arno.
Bienvenue de nouveau au Comité, monsieur Kara-Murza. Si vous voulez bien faire votre déclaration préliminaire, qui sera suivie de brèves déclarations de vos collègues, les membres du Comité poseront leurs questions par la suite.
Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un honneur d'être de retour devant votre comité. Je vous remercie de me donner cette occasion et de tenir cette séance très importante aujourd'hui.
Le 10 décembre 1975, l'hôtel de ville d'Oslo a accueilli la cérémonie annuelle de remise du prix Nobel de la paix. Tout semblait en bon ordre, sauf un détail: le lauréat, Andreï Sakharov, était absent, de même que ses quatre invités d'honneur. Aucun d'entre eux n'avait été autorisé par le gouvernement soviétique à voyager.
Dans son discours de réception du prix Nobel, qui a été prononcé par sa femme, Elena Bonner, Sakharov a écrit ce qui suit: « [...] je vous demande de vous rappeler que tous les prisonniers de conscience et tous les prisonniers politiques de mon pays partagent avec moi l'honneur du prix Nobel ». Il a énuméré 126 noms. Ce n'était pas tout le monde, mais cela donnait une idée.
[Français]
Aujourd'hui, d'après Memorial, un organisme de défense des droits de la personne, la Russie compte 296 personnes emprisonnées pour leurs convictions politiques ou religieuses. Ce n'est pas tout le monde non plus, ce sont juste ceux qui répondent aux critères rigoureux établis par le Conseil de l'Europe, mais cela aussi donne une idée.
[Traduction]
Au-delà des statistiques, de vraies personnes sont détenues dans des prisons, des colonies pénitentiaires, des centres de détention ou à domicile, même s'ils n'ont commis aucun crime. Ils n'ont que franchi les limites imposées par le régime de Vladimir Poutine: Oleg Sentsov, un cinéaste de la Crimée, qui a protesté contre l'annexion; Anastasia Shevchenko, mère célibataire et militante du mouvement Open Russia, qui est la première personne à avoir été arrêtée parce qu'elle fait partie d'une organisation « indésirable »; Alexeï Pitchouguine, le dernier otage dans l'affaire Ioukos qui, après 16 ans, est le plus ancien prisonnier politique de la Russie; Oïoub Titiev, un défenseur des droits de la personne qui a fourni des preuves de violations flagrantes commises par le régime de Ramzan Kadirov, en Tchétchénie; et, Iouri Dmitriev, un dirigeant de Memorial, en Carélie, qui a découvert des fosses communes de l'époque des exécutions effectuées sous Staline.
Ce ne sont là que 5 personnes sur 296, et une autre s'est ajoutée au cours des deux derniers jours: Ivan Golounov, l'un des journalistes d'enquête les plus connus de la Russie, a été arrêté après avoir été faussement accusé de trafic de drogues.
Au cours des quatre dernières années, le nombre de prisonniers politiques en Russie a été multiplié par six. Leur incarcération viole non seulement la constitution de la Russie, mais également nos obligations internationales au titre de la Convention européenne des droits de l'homme, le document de clôture de Vienne de l'OSCE etle Pacte international relatif aux droits civils et politiques, entre autres. Des organisations internationales, dont la Cour européenne des droits de l'homme et le Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire, ont maintes fois condamné ces incarcérations, mais faire appel à la loi est une entreprise aussi futile dans la Russie de Vladimir Poutine que cela l'était dans l'Union soviétique de Leonid Brejnev.
Le seul tribunal qui compte, c'est celui de l'opinion publique mondiale. Tout comme dans les années 1970, le meilleur espoir, la meilleure défense pour les prisonniers politiques de notre pays, c'est l'attention internationale. À l'époque, cette question était de haute importance pour les premiers ministres et les présidents des pays démocratiques. Lors des rencontres au sommet avec les dirigeants de l'Union soviétique, ils commençaient souvent par mettre la liste des prisonniers politiques sur la table.
Les administrations américaines qui se sont succédé ont réussi à négocier l'échange ou la libération d'éminents prisonniers d'opinion soviétiques, dont Vladimir Dremliouga, Vladimir Boukovski, Alexandre Ginsburg et Iouri Orlov. En 1978, le premier ministre canadien, Pierre Trudeau, a remis en mains propres à Brejnev le document juridique sur l'affaire d'Anatoly Sharansky, préparé par l'homme avec qui j'ai le privilège d'être à cette table — M. Irwin Cotler. Sharansky dit que ce qui les sauvait, c'était le fait que des gens importants de l'Occident les appuyaient dans chaque discours et qu'ils connaissaient leurs noms.
Il ne se passe rien de semblable aujourd'hui.
[Français]
Peu importe de quoi les leaders occidentaux parlent avec M. Poutine, il paraît que le problème des prisonniers politiques n’est pas soulevé, comme si c'était normal qu'en 2019 un pays européen tienne des centaines de personnes en prison pour leurs convictions politiques ou religieuses. Il est temps de briser le silence.
[Traduction]
Dans l'un des documents principaux de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE, dont le Canada et la Russie sont membres à part entière, on soutient que « les questions relatives aux droits de l'homme, aux libertés fondamentales, à la démocratie et à l'État de droit [...] sont un sujet de préoccupation directe et légitime pour tous les États participants et qu'ils ne relèvent pas exclusivement des affaires intérieures de l’État en cause ». Le Canada devrait respecter cet engagement.
[Français]
Le Canada devrait donner l'exemple en soulevant le problème des prisonniers politiques, non pas d'une manière générale, mais en citant des noms et des cas précis à chaque contact avec des fonctionnaires russes, dans le cadre des sommets aux plus hauts niveaux, des rencontres ministérielles et des assemblées parlementaires.
[Traduction]
Mettre fin à la pratique honteuse de l'incarcération politique et libérer les personnes injustement détenues devraient constituer une condition préalable à tout véritable dialogue avec le Kremlin.
Les mots comptent, mais le Canada peut faire plus qu'en parler. En octobre 2017, la Chambre a adopté à l'unanimité la loi de Sergueï Magnitski, par laquelle on demande des comptes — ce qui est fort nécessaire — aux responsables de violations des droits de la personne en leur imposant un gel des avoirs et une interdiction de visa. J'espère que le Canada se servira de cette loi pour sanctionner les gens responsables de l'emprisonnement ordonné pour des motifs politiques en Russie, à commencer par le procureur général, Iouri Tchaïka.
Un peu plus d'une décennie après que ce discours a été prononcé lorsque Sakharov a reçu le prix Nobel, presque tous les prisonniers qu'il avait nommés avaient été libérés. C'était le résultat à la fois des vents de changement qui ont balayé notre pays et de la position de principe du monde démocratique. Un jour, les prisonniers politiques actuels seront, eux aussi, libres, et la Russie mettra enfin derrière elle l'héritage honteux de l'incarcération politique. D'ici là, j'espère que nos partenaires et la communauté internationale continueront à défendre la justice au nom de ceux qui en sont privés chez eux.
Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de témoigner. Je suis impatient de répondre à toutes vos questions.
Bonjour, monsieur le président, bonjour, distingués membres du Comité. Je suis ravi d'être parmi vous encore aujourd'hui.
Le mois dernier, mon cabinet d'avocats d'intérêt public a publié le rapport intitulé The Kremlin's Political Prisoners: Advancing a Political Agenda By Crushing Dissent. Il s'agit du premier rapport exhaustif sur le sujet des prisonniers politiques en Russie. Il contient quelque 280 pages et 1 700 notes en bas de page. Il a été coparrainé par le Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, la Free Russia Foundation, la Human Rights Foundation, et la Lantos Foundation for Human Rights and Justice.
J'aimerais aussi vous décrire brièvement les éléments uniques du rapport. Nous en avons des exemplaires pour tout le monde également.
Premièrement, en utilisant la liste de prisonniers de Memorial, nous avons établi huit catégories de prisonniers détenus par le Kremlin sur les ordres de Vladimir Poutine: opposants politiques, militants et citoyens ukrainiens, militants de la société civile, journalistes, minorités religieuses, minorités ethniques, prétendus espions et membres de la communauté LGBT en Tchétchénie.
Comme on vous l'a dit plus tôt, le nombre de prisonniers politiques du Kremlin a été multiplié par six au cours des quatre dernières années. Il est passé de 50 à presque 300 prisonniers.
Dans ce groupe de prisonniers, il y a mon client, Alexeï Pitchouguine, le plus ancien prisonnier politique du Kremlin, qui est incarcéré depuis plus de 16 ans pour de fausses accusations de meurtre. En fait, son arrestation était simplement une première mesure qu'a prise Vladimir Poutine contre la compagnie pétrolière Ioukos. Pitchouguine est toujours en prison parce qu'il refuse, pour des raisons de conscience, d'impliquer ses principaux actionnaires, dont Mikhaïl Khodorkovski, dans des crimes que ni lui ni eux n'ont commis.
Au cours des derniers jours, nous avons publié un avis du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, qui a conclu que la discrimination qu'exerce le gouvernement contre M. Pitchouguine en fonction de son association avec la compagnie Ioukos est la seule explication plausible de son arrestation, de sa détention et de son emprisonnement, et il a demandé sa libération immédiate.
Deuxièmement, dans notre rapport, nous avons terminé le premier examen exhaustif des lois nationales utilisées pour emprisonner des opposants politiques au régime — à la fois les lois qui sont à première vue invalides, incompatibles avec le droit international et celles utilisées comme prétexte —, de même que des dispositions administratives utilisées pour intimider ou harceler des menaces, réelles ou imaginaires, au régime de Poutine.
Troisièmement, nous avons analysé le large éventail de violations du droit international commises par le Kremlin par l'incarcération de prisonniers politiques.
Quatrièmement, nous avons examiné la réaction internationale et nationale des médias, des groupes de la société civile et des partis politiques à l'incarcération des prisonniers politiques du Kremlin et la façon dont le Kremlin réagit aux critiques.
Cinquièmement, nous avons examiné les nombreuses façons dont les prisonniers politiques ont été libérés, tant dans le passé, que ces dernières années, ce qui inclut la liberté conditionnelle, le pardon, l'échange de prisonniers, les amnisties, et les réductions de peine et les libérations pour raisons de santé, entre autres. Cela peut fournir des orientations pour voir quelles mesures pourraient être prises afin d'aider les prisonniers politiques actuels.
Sixièmement, nous avons indiqué, concernant la liste des prisonniers politiques, les noms des juges, des procureurs et des enquêteurs qui sont liés à leurs affaires. À partir de là, nous avons identifié un groupe de 16 personnes ayant une responsabilité du commandement pour l'incarcération des prisonniers politiques en Russie. Les responsables à l'échelle du système sont notamment Vladimir Poutine, Iouri Tchaïka, le procureur général, et Gennady Kornienko, directeur du Service pénitentiaire fédéral. En fait, le Canada a déjà sanctionné quatre des huit personnes qui figurent sur notre liste des responsables du commandement. Ceux que j'ai mentionnés, ainsi que huit juges, procureurs et enquêteurs qui ont joué un rôle dans le plus grand nombre d'affaires, n'ont pas encore été sanctionnés.
Enfin, dans notre rapport, nous présentons cinq recommandations à la communauté internationale. Chacune comprend des mesures plus détaillées, mais les mesures recommandées entrent dans les catégories suivantes: sanctions financières ciblées et interdictions de voyager aux auteurs des actes; mesures communes prises par des institutions multilatérales; mise en lumière du sort des prisonniers; efforts concertés de la société civile; et engagement des médias.
Il vaut la peine de parler brièvement de la partie du rapport qui porte sur les responsables. Nous plaidons en faveur de l'inscription de ce groupe de responsables sur les listes Magnitski, et c'est pourquoi notre rapport contient 1 700 notes en bas de page. Nous avons reçu des commentaires de nombreux bureaux des sanctions — y compris de ceux du Canada — qui, compte tenu de leurs ressources limitées, se fient exclusivement à des rapports crédibles de la société civile, des médias et autres sur les violations des droits de la personne commises dans un pays donné lorsqu'il y a enquête sur les cibles potentielles. En présentant un groupe de sources très organisées et méticuleusement rassemblées pour vérifier les éléments de preuve que nous avons présentés dans notre rapport, nous espérons que cela permettra aux bureaux des sanctions de disposer en un seul endroit de tous les renseignements dont ils ont besoin pour enquêter et vérifier nos affirmations.
Avec plus de 20 ans d'expérience dans la représentation de prisonniers politiques, je peux dire que la plus grande crainte de tout prisonnier politique, c'est qu'on l'oublie. Nous espérons que le Parlement du Canada exhortera le gouvernement canadien à imposer une série de sanctions contre le groupe de responsables de l'incarcération des prisonniers politiques du Kremlin. Non seulement la mise en place d'un ensemble de sanctions contre les responsables pour l'ensemble du système serait une bonne chose pour les prisonniers politiques en Russie, mais cela enverrait également un message clair à d'autres régimes autoritaires que s'ils incarcèrent des prisonniers politiques, leur régime sera le prochain à faire l'objet de sanctions.
Je sais que la libération des prisonniers politiques du Kremlin peut sembler, à ce moment-ci, une mission impossible. Il nous incombe à nous tous, qui vivons dans une société libre, de montrer les photos de ces prisonniers et de raconter leurs histoires, tout comme nous montrons les photos des responsables et demandons qu'ils soient tenus responsables. Il convient de rappeler que, comme l'a dit Nelson Mandela, cela paraît toujours impossible, jusqu'à ce que cela devienne réalité.
Je vous remercie une fois de plus de me donner l'occasion de témoigner. Je serai ravi de répondre à vos questions lorsque tous nos exposés auront été présentés.
Merci beaucoup, monsieur le président, distingués membres du Comité, de prendre le temps d'entendre nos témoignages concernant l'augmentation importante et préoccupante du nombre de prisonniers politiques détenus aujourd'hui dans la Russie de Poutine.
Nous vous remercions de nous offrir cette occasion de vous parler du rapport détaillé que nous avons produit sur une situation renversante et tragique, et nous vous savons gré d'être disposés à entendre ce que le Parlement canadien et le peuple canadien peuvent faire pour démontrer leur solidarité et contribuer à mettre un terme à ce qui est une honte nationale pour mon pays.
Sur les 296 prisonniers politiques actuels en Russie — une estimation très conservatrice, je le précise — plus de 220 personnes ont été poursuivies pour leurs croyances religieuses. Un grand nombre des prisonniers, plus de 40, sont des otages ukrainiens du Kremlin. Nous avons le cinéaste Oleg Sentsov, déchiré d'avoir vu sa terre natale, la Crimée, se faire absorber par un État-nation tout-puissant, rappelant la prise de contrôle à l'époque de l'Union soviétique. Nous avons deux groupes, dont les noms pourraient se traduire par « Nouvelle Grandeur » et « Réseau », une douzaine de jeunes personnes qui se réunissaient tout simplement pour discuter de l'actualité politique. Nous avons une mère monoparentale qui voulait simplement organiser un débat. Nous avons un professeur qui a participé à une discussion professionnelle. Son collègue est mort en prison après avoir été incarcéré pour la même accusation. Nous avons un historien qui se consacre à exposer la vérité au sujet du passé de la Russie. Il y en a beaucoup d'autres. Des gens sont en prison pour de simples tweets ou pour de simples publications sur Facebook.
Les peines d'emprisonnement apparemment aléatoires ne sont pas du tout aléatoires; c'est ce qu'il faut souligner. Si une mère, un cinéaste ou un enfant qui joue à Pokémon peuvent être emprisonnés, tous les citoyens doivent comprendre qu'une peine de prison les attend s'ils expriment une opinion contraire à la vision que le Kremlin a du monde. Est-ce qu'il y en a parmi eux qui sont coupables? Cela n'a pas vraiment d'importance. Ce qui compte, c'est la peur et la terreur. Une société atomisée où la peur règne est beaucoup plus facile à dominer. C'est ainsi que le Kremlin veut maîtriser sa population de plus de 140 millions de personnes — en prenant à partie arbitrairement quelques centaines de personnes et en semant la peur chez tous les autres.
J'ai, avec les prisonniers, des affinités qui dépassent le simple fait que j'en connais personnellement un bon nombre et que leurs histoires me vont droit au cœur. J'aurais pu moi-même finir sur cette liste de prisonniers politiques à cause de mon travail et de mes activités pour la démocratie. Je pourrais être en train de purger mes sept années de prison. Je serais un nom de plus et une histoire de plus dans ce rapport. Mon crime? J'ai travaillé pour une organisation américaine de promotion de la démocratie qui réclamait des élections libres et équitables, et l'application des mêmes règles aux candidats qui avaient des idées différentes du régime sur la façon de mieux diriger un pays. À cause de cela, j'ai dû faire le triste choix entre quitter mon pays et mon héritage, ou risquer 20 ans en prison pour trahison contre mon pays. Le choix était très facile à faire, mais cela reste la plus difficile décision de ma vie.
Cependant, les autorités russes ont fait une erreur de calcul. Je continue de livrer le combat. C'est la raison pour laquelle je suis ici à vous parler aujourd'hui. J'espère que vous n'avez pas l'impression que je suis une dangereuse criminelle qui devrait être battue et torturée dans une prison russe. C'est la même chose pour les autres qui ont été persécutés pour des raisons politiques; ce ne sont que des gens qui croient en une meilleure Russie. Notre rapport dénombre les personnes qui sont en prison aujourd'hui, mais dans chaque cas, il y a une vie humaine, une histoire humaine et une tragédie humaine. Le rapport ne nous donne pas que des catégories de prisonniers, mais il nous parle de personnes en chair et en os.
Plutôt que de parler de ce rapport aujourd'hui, il serait beaucoup plus plaisant de parler des nouveaux documentaires produits par le cinéaste Oleg Sentsov, ou des nouveaux articles rédigés par le journaliste Igor Rudnikov, ou encore des nouvelles recherches menées par le professeur, M. Bobyshev. Au lieu de cela, nous discutons de la vie des gens et de la cruauté du régime qui détruit ces vies. Dans un monde civilisé, nous ne devrions pas tolérer l'existence même de prisonniers politiques au XXIe siècle. Nous ne devrions pas tolérer que les procès équitables soient l'exception et que la torture soit courante et très répandue. Nous ne devrions pas tolérer que des gens qui veulent des élections libres et équitables soient en prison, et que ceux qui falsifient les élections n'y soient pas. Nous ne devrions pas tolérer que ceux qui se font entendre parce qu'ils veulent que la Russie soit libre et démocratique se retrouvent en prison, mais que ceux qui imposent la censure et qui diffusent de la propagande n'y soient pas. Nous ne devrions pas tolérer que les gens qui osent critiquer le régime corrompu et criminel de Poutine soient en prison, mais que les fonctionnaires corrompus s'adonnant à des activités criminelles à l'intérieur de la Russie et hors de ses frontières n'y soient pas.
Je crois que vous savez tous qu'un leader confiant comme Poutine est censé l'être ne devrait avoir aucune raison d'emprisonner ses opposants, et qu'un leader qui prétend jouir d'une grande popularité ne devrait pas ressentir le besoin de s'inquiéter d'une mère monoparentale ou de deux jeunes qui ont fait 2 affiches et 30 dépliants, et qui ont acheté un mégaphone. Un tel leader ne devrait pas s'inquiéter des tweets et des publications Facebook des gens, ou des gens qui attrapent des Pokémons et qui en parlent sur un blogue.
Ce sont les signes d'un dictateur désespéré. J'espère que vous voyez cela de la même manière.
Comme je l'ai dit, mes collègues et moi vous sommes très reconnaissants de nous écouter, et nous espérons que vous envisagerez d'imposer des sanctions à ceux qui participent directement à ces violations flagrantes des droits de la personne.
Merci.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je suis très heureux d'être ici et de participer à la cause commune qui nous rassemble: la poursuite de la justice.
[Traduction]
Je suis ravi d'être ici avec les représentants de la coalition internationale d'organisations dont le but est de libérer les prisonniers politiques du Kremlin, et je suis également ravi du lancement du tout premier rapport, d'une grande importance, sur cette question. Nous sommes au courant des agressions perpétrées par la Russie hors de ses frontières — en Ukraine, en Crimée et au Venezuela —, mais nous sommes très peu conscients de la répression exercée sur son propre territoire en ce moment même, notamment la criminalisation de libertés fondamentales comme la liberté de religion, d'expression et d'association et la liberté de participation politique; la persécution et la poursuite des dirigeants de la courageuse société civile russe, des militants politiques, des journalistes, des défenseurs des droits de la personne, des Ukrainiens, des chefs religieux, de la communauté LGBTQ et d'autres groupes; la multiplication par six du nombre de prisonniers politiques, lequel est passé de 50 à 296 au cours des quatre dernières années seulement; enfin, la culture d'impunité qui fait qu'on ne se contente pas de ne pas tenir les architectes mêmes de la répression, nommés dans le rapport, responsables de leurs crimes, mais qu'on va même jusqu'à les en récompenser dans certains cas.
Permettez-moi de terminer en faisant au Comité un certain nombre de recommandations. Je vais présenter chacune des recommandations de manière concise pour que ce soit plus rapide.
Premièrement, il faut lutter contre la culture de criminalité et d'impunité en imposant des sanctions Magnitsky contre les architectes de la répression décrite en détail et étayée dans notre rapport. Je vous rappelle que Boris Nemtsov, le courageux leader de la démocratie russe qui est venu au Canada témoigner devant ce comité et donner son appui aux sanctions Magnitsky, et qui a finalement été assassiné en Russie, a toujours parlé de la Loi Magnitsky comme étant la loi la plus pro-Russie qu'on puisse adopter, puisqu'elle l'a été au nom du peuple russe.
Deuxièmement, prenez les devants pour susciter une mobilisation multilatérale, que ce soit aux Nations unies, à l'OSCE, au G20 ou sur une autre tribune.
Troisièmement, il faut demander à la Russie de rendre des comptes pour ses violations des traités internationaux dont le Canada est un État partie avec la Russie, ce qui fait que la Russie ne respecte pas ses obligations envers nous.
Quatrièmement, appuyez les cas et les causes des prisonniers politiques du Kremlin. Je le fais depuis 40 ans, car ils m'inspirent. J'ai commencé avec la libération d'Anatoly Sharansky après un emprisonnement de huit ans et demi; j'ai continué avec Vladimir Nikitin, le militant environnemental qui a été le dernier prisonnier politique à être incarcéré avant le régime Poutine, mais qui, fait intéressant, a été emprisonné par Poutine alors qu'il était à la tête du FSB, l'ancien KGB; et enfin, en ce moment, je m'occupe d'Anastasia Shevchenko, l'une des plus récentes prisonnières politiques russes, une femme courageuse dont j'ai l'honneur d'être le conseiller juridique international.
Il ne faut surtout pas oublier que même si nous ne réussissons pas immédiatement à obtenir leur libération, ce que l'expérience a démontré, c'est que nos actions vont contribuer à améliorer leurs conditions de détention et à diminuer la torture et les mauvais traitements qui leur sont infligés.
Cinquièmement, soutenez la courageuse société civile russe. Montrez à ces gens qu'ils ne sont pas seuls.
Enfin, à l'approche du 40e anniversaire de l'Acte final d'Helsinki, dont le septième principe porte sur le droit de connaître ses droits et d'agir en conséquence, ceux qui ont entrepris de connaître leurs droits et d'agir en conséquence en Russie croupissent maintenant en prison. Le Canada étant un des principaux parrains de l'Acte final d'Helsinki, nous avons l'obligation d'exiger des dirigeants du Kremlin qu'ils rendent des comptes.
Comme Vladimir l'a dit, il est temps de briser le silence, et ce, dans la quête de la justice.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur Cotler.
Merci à vous tous des exposés éloquents que vous nous avez présentés.
Sur ce, nous allons passer directement à la première série de questions. Nous commençons par le député Genuis.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins de vos exposés. Surtout, merci de votre courage, et merci de continuer de défendre ces intérêts malgré les grandes difficultés.
Monsieur le président, avant d'amorcer mes questions, je veux aviser le Comité que j'ai l'intention, cette semaine, de proposer des motions concernant l'enquête indépendante sur les allégations de génocide contre les Tamouls au Sri Lanka à la fin de la guerre civile, et concernant l'inscription du CGRI, le Corps des gardiens de la révolution islamique, sur la liste des entités terroristes en vertu du Code criminel. Je voulais informer le Comité de cela.
Revenons aux témoignages. J'ai deux questions à poser. Je vais les poser toutes les deux, et quiconque veut y répondre pourra le faire. Nous pourrions procéder ainsi.
Ma première question s'adresse à M. Kara-Murza. Vous avez parlé de prisonniers politiques et religieux. C'est une terminologie différente de ce que nous utilisons parfois pour cette région.
Est-ce que vous pourriez en dire un peu plus au Comité concernant l'anatomie de la persécution religieuse en Russie, l'adhésion de l'Église orthodoxe et les défis auxquels les minorités religieuses font face, par exemple les musulmans, les chrétiens évangéliques et d'autres groupes, puis nous dire de quelle façon cela devrait avoir un effet sur notre réaction particulière à ces enjeux?
Deuxièmement, les sanctions Magnitsky sont manifestement un outil important pour le gouvernement, mais seulement dans la mesure où elles sont utilisées. Des observations ont été faites à propos des personnes qu'il faudrait ajouter à notre liste des sanctions.
J'aimerais savoir ce que vous pensez plus généralement du point de vue des politiques.
Qu'est-ce que nous pouvons faire, en tant que Parlement, pour garantir un usage plus fréquent de cet outil? Il y a dans le monde des personnes terribles qui commettent des violations des droits de la personne, et aucune d'entre elles n'a été ajoutée à la liste en vertu de la Loi Magnitsky. Il y a manifestement beaucoup plus de gens qui devraient y être inscrits.
Est-ce qu'un changement de mécanisme pourrait raffermir notre recours à cet outil? Est-ce qu'il y a des choses que nous pouvons faire, en tant que Parlement, pour veiller plus efficacement à ce que le ministre ou le gouvernement au pouvoir ne se retienne pas, disons, de sanctionner des personnes qui doivent l'être?
Pour ce qui est de la première question sur les prisonniers religieux, la plupart des gens — comme Natalia l'a mentionné, ce sont plus de 200 des 296 personnes — sont des prisonniers religieux plutôt que des prisonniers politiques. La grande majorité sont des adeptes d'une organisation musulmane appelée Hizb ut-Tahrir, un mouvement islamique, mais pacifique, ou, de plus en plus, des adeptes des Témoins de Jéhovah. L'un des plus récents prisonniers politiques est en fait un citoyen danois du nom de M. Christensen, un des dirigeants des Témoins de Jéhovah de la ville d'Oryol.
Vous avez raison. C'est un terme relativement nouveau pour nous, mais bien sûr, dans le cadre des engagements de l'Acte final d'Helsinki et d'autres engagements de l'OSCE, sans parler de la Convention européenne des droits de l'homme, la liberté de religion est l'une des obligations auxquelles le gouvernement russe s'est soumis, et dans le cas de ces prisonniers religieux, cette obligation n'est manifestement pas respectée.
La deuxième partie de votre question porte sur la Loi Magnitsky, et c'est très important. Je participe à ce travail depuis près de 10 ans maintenant. J'ai commencé aux États-Unis, puis j'ai poursuivi le travail au Canada, puis dans plusieurs pays de l'Union européenne. Nous nous retrouvons toujours devant le même modèle, quand il s'agit de la Loi Magnistky. Je crois qu'il est juste d'affirmer que c'est le modèle qui a été appliqué au moins partiellement ici au Canada également: vous avez le pouvoir exécutif, le gouvernement et le service diplomatique qui sont initialement très opposés à ce principe. La realpolitik n'est pas un nouveau principe, mais c'est un principe de résilience. Il existe depuis longtemps, et il n'est donc pas surprenant de constater qu'il a conservé une partie de sa vigueur. Cependant, dans chacun des six pays où une loi Magnisky a été adoptée — c'est certainement le cas au Canada —, nous avons constaté que l'appui de principe de tous les partis, au Parlement, est venu à bout de la résistance et a garanti l'adoption et la mise en application des mesures législatives. Comme vous l'avez dit avec raison quand vous avez posé votre question, ce sont deux choses différentes. Par exemple, le Royaume-Uni est un des six pays qui a une loi Magnitsky. Il l'a adoptée il y a maintenant un an, en juin 2018, et le nombre total de personnes sanctionnées en vertu de cette loi au Royaume-Uni est précisément de zéro.
L'une des choses que nous voyons de plus en plus ici, en Grande-Bretagne, c'est la pression exercée par le Parlement. Aussi, concernant ce qu'il a fallu initialement pour que le processus avance aux États-Unis, je vais vous donner un seul exemple. Le général Alexander Bastrykin, un haut responsable de l'application de la loi dans le régime de Poutine, président du comité sur les enquêtes de la Russie, est personnellement responsable de toutes les poursuites judiciaires fondées sur des motifs politiques des dernières années, par exemple l'affaire Yukos, l'affaire Bolotnaya, l'affaire Navalny et toutes les autres. De plus, il y a quelques années — et nous parlons du plus haut responsable de l'application de la loi du gouvernement de Poutine —, il a personnellement emmené un journaliste indépendant très connu de la Russie, appelé Sergueï Sokolow, de la Novaya Gazeta, dans une forêt située à proximité de Moscou. Il l'a fait sortir de la voiture et l'a emmené dans la forêt, puis lui a dit: « Si ton journal continue de publier ce qu'il publie, je vais te tuer, et je vais t'enterrer ici même, dans cette forêt. Et en passant, devine qui va mener l'enquête? Ce sera le président du comité d'enquête. » Rien de cela n'est contesté, soit dit en passant. Cela n'a pas été prétendument dit: il a admis l'avoir fait.
Il a aussi dit, la semaine suivante, qu'il était désolé. Je ne crois pas que ce soit, pour un haut responsable gouvernemental ayant menacé d'assassiner un journaliste, une façon suffisante d'assumer ses responsabilités.
Il a fallu de nombreuses années et beaucoup de pression de la part des deux grands partis politiques au Congrès américain pour finalement convaincre le gouvernement des États-Unis de sanctionner cet individu. Il a été sanctionné en 2017. Il a également été sanctionné au Canada, immédiatement, soit dit en passant. En octobre 2017, vous avez adopté la loi, et je crois que c'est en novembre que les premiers noms sont apparus sur la liste des sanctions Magnitsky. Le général Bastrykin était sur cette liste. Je me retrouve donc à avoir une rare occasion d'être devant le Parlement d'un pays que j'aimerais féliciter au lieu de le critiquer. Maintenant, chaque fois que je vais dans d'autres parlements de l'Europe de l'Ouest pour parler de la nécessité d'adopter une loi Magnitsky, je donne toujours le Canada comme exemple de pays qui a adopté la loi à l'unanimité et qui l'a mise en œuvre.
Bien entendu, on peut toujours en faire plus, et les gens dont nous parlons aujourd'hui, à commencer par le procureur général Yury Chaika, sont des omissions très évidentes et flagrantes. En fait, c'est stupéfiant, mais Chaika, qui a été soit ministre de la Justice ou procureur général pendant les 20 années de règne de Vladimir Poutine et qui a été à ce titre responsable de certains des cas extrêmes de poursuites judiciaires ayant une motivation politique, n'a toujours pas été sanctionné par aucun des six pays qui ont adopté une loi Magnitsky, y compris le Canada.
Je crois qu'il serait important que le Parlement exerce des pressions sur le gouvernement du Canada pour qu'il sanctionne les personnes responsables des poursuites judiciaires fondées sur des motifs politiques, ainsi que les personnes responsables d'assassinats fondés sur des motifs politiques.
Il y a trois semaines, le gouvernement américain a adopté une mesure très importante en sanctionnant en vertu de la loi de Magnitski un organisateur important dans l'assassinat du chef de l'opposition russe, Boris Nemtsov: un fonctionnaire du ministère de l'Intérieur russe du nom de Ruslan Geremeyev.
La Lituanie et les États-Unis sont deux pays qui ont sanctionné cet individu jusqu'à présent, et je pense qu'il serait très percutant et très important que le Canada fasse de même. Il n'y a pas de violation des droits de la personne plus flagrante que le meurtre d'une personne qui a consacré sa vie à défendre la liberté, la démocratie et la primauté du droit.
Puisque nous sommes témoins depuis plus de quatre ans maintenant d'une opération de camouflage de très haut niveau en Russie pour ce qui est de traduire en justice les organisateurs et les stratèges de l'assassinat de Boris Nemtsov, nous espérons que les pays qui ont la loi de Magnitski l'utilisent pour mettre un terme à l'impunité à l'égard de ces personnes. Après tout, c'est la raison d'être de la loi de Magnitski: mettre fin à l'impunité accordée aux personnes que l'on protège, aux coupables de violations des droits de la personne qui sont protégés par leur gouvernement.
Merci, monsieur le président.
Bienvenue, encore une fois, monsieur Kara-Murza, au Comité des affaires étrangères.
Vous avez fait allusion à M. Sakharov et aux 126 prisonniers d'opinion durant la période soviétique. Très peu de ces individus sont encore en vie; très peu d'entre eux sont encore parmi nous.
Un individu qui a passé 15 ans, entre 1966 et 1986, dans le système du goulag a comparu devant notre comité il y a trois semaines: l'iconique Mustafa Dzhemilev. Il a passé 15 ans dans le goulag pour avoir réclamé le droit des Tatars de Crimée de retourner à leur patrie ancestrale.
Dans le témoignage qu'il a fait devant le Comité il y a de cela trois semaines, qui concordait pratiquement avec le 75e anniversaire du Sürgünlik, il a demandé que le Parlement du Canada reconnaisse le génocide des Tatars de Crimée sous le régime de Staline.
Monsieur Kara-Murza, reconnaissez-vous que ce qui est arrivé aux Tatars de Crimée était un génocide?
Mustafa Dzhemilev est une personne que j'admire énormément comme l'une des légendes et des piliers du mouvement de protection des droits de la personne dans l'Union soviétique.
Soit dit en passant, Andrei Sakharov, comme vous le savez bien, participe au mouvement pour rétablir les droits des Tatars de Crimée, qui étaient le dernier groupe ethnique de l'Union soviétique, afin de restaurer officiellement leurs droits. Il a fallu jusqu'en 1989. La majorité des droits ont été rétablis dans les années cinquante, et la plupart des nations déportées, y compris celles des États baltes, ont été autorisées à retourner dans leur pays sous le régime de Khrouchtchev dans les années cinquante. Ce n'était pas le cas pour les Tatars de Crimée. Ils ont été les derniers à qui l'on a rendu justice et, maintenant, bien entendu, on leur refuse à nouveau justice.
Oui, pour répondre à votre question, je pense qu'il serait très important de reconnaître leurs droits. Je pense l'une des plus grandes erreurs que le gouvernement démocratique a commises en Russie au début des années 1990 a été de négliger ou de refuser de tenir un procès en bonne et due forme ou une commission de vérité, peu importe comme vous voulez l'appeler, pour dénoncer les crimes du régime communiste totalitaire. Je pense que nous le ferons un jour, car si on ne tourne pas complètement la page sur le passé totalitaire, il est impossible d'aller de l'avant.
Il est très important de se rappeler que le régime de Staline a été impliqué dans des crimes de masse commis à l'encontre de nombreuses nations et de nombreux groupes ethniques en Union soviétique, en commençant, bien entendu, avec les Russes. D'après les chiffres, les principales victimes du régime de Staline étaient les Russes. Je pense qu'il est important de s'en rappeler.
Bien que cette reconnaissance fasse défaut au pays, je pense qu'il est important que les nations démocratiques et les communautés internationales manifestent leur solidarité de cette façon.
Merci, monsieur Kara-Murza.
Monsieur le président, j'aimerais présenter un préavis de motion:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, et au témoignage de M. Mustafa Dzhemilev le 16 mai 2019, et de M. Vladimir Kara-Murza le 10 juin 2019, le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international fasse immédiatement rapport sur ce qui suit à la Chambre des communes:
(1) Que, afin d'appuyer la vérité historique et la demande de Mustafa Dzhemilev, la déportation des Tatars de Crimée de 1944 soit reconnue comme un génocide perpétré par le dictateur soviétique Staline, et que le 18 mai soit désigné jour du Souvenir de la déportation des Tatars de Crimée (Sürgünlik).
Je l'ai fait traduire en français également.
Merci.
Monsieur Kara-Murza, c'est peut-être une question difficile car vous avez vous-même été la cible d'une tentative d'assassinat. Dieu merci, vous avez survécu. Bon nombre d'entre nous connaissaient votre bon ami Boris Nemtsov. M. Cotler le connaissait personnellement.
Aujourd'hui, nous parlons des 296 prisonniers politiques qui sont actuellement incarcérés en Russie par le Kremlin. Combien de gens ont assassiné impunément les fils et les filles de Russes? Combien de personnes nous ont quittés? Avez-vous une liste, ou une liste a-t-elle été dressée pour imposer des sanctions en vertu de la loi de Magnitsky? Vous avez mentionné l'un des assassins impliqués dans le meurtre de Boris Nemtsov. Y a-t-il une liste des personnes qui ont participé à l'assassinat de défenseurs des droits de la personne, de journalistes et de défenseurs des droits démocratiques en Russie?
Monsieur Wrzesnewskyj, merci de soulever cette question.
Bien que le principal sujet de discussion aujourd'hui soit les prisonniers politiques, je pense qu'il ne faut pas oublier qu'il y a un prix encore plus important que l'emprisonnement à long terme que doivent payer les gens qui osent défendre la vérité et la justice en Russie et qui osent s'élever contre le régime de Poutine.
Boris Nemtsov, qui était l'un de mes amis proches et le dirigeant le plus éminent, efficace et puissant de l'opposition démocratique russe, a payé le prix ultime le soir du 27 février 2015, lorsqu'il a été abattu sur le pont situé littéralement devant le Kremlin.
Ce que nous avons constaté au cours des quatre ans et demi depuis cette terrible nuit, ce sont des opérations de camouflage de haut niveau orchestrées par le régime de Poutine pour protéger les individus qui ont organisé cet assassinat, qui est l'assassinat politique le plus notoire de l'histoire moderne de la Russie. Les auteurs de cet acte ont été arrêtés et condamnés à la prison, mais personne d'autre n'a dû rendre des comptes ou faire face à la justice.
L'homme que j'ai mentionné il y a quelques minutes, le major du ministère de l'Intérieur russe, Ruslan Geremeyev, est un collaborateur de haut niveau qui travaille pour Ramzan Kadyrov, le chef nommé par le Kremlin en Tchétchénie. À deux occasions différentes, des enquêteurs russes ont essayé de l'accuser d'avoir pris part à l'organisation de l'assassinat car les preuves étaient plus que suffisantes, et les deux fois, le général Alexander Bastrykin, que j'ai mentionné plus tôt, le chef du comité d'enquête russe, est intervenu personnellement pour empêcher les enquêteurs de porter les accusations.
L'un des faits les plus remarquables à propos de l'affaire Nemtsov, c'est que nous connaissons le nom de toutes les personnes qui ont été impliquées dans l'assassinat, dans une certaine mesure à tout le moins, mais je suis convaincu qu'il y a d'autres responsables à des échelons supérieurs. À un certain niveau très élevé, nous connaisssons ces noms, et ils ont été prononcés durant l'enquête et le procès.
Les avocats qui représentaient la famille de Nemtsov et Zhanna Nemtsova, que vous connaissez personnellement, la fille de M. Nemtsov, sont intervenus à maintes reprises pour exhorter les autorités russes à questionner ces individus. Chaque fois, leurs demandes ont été rejetées. D'importantes preuves ont été dissimulées. D'importantes personnes d'intérêt n'ont pas été questionnées.
Pour répondre directement à la question de M. Wrzesnewskyj, je pense qu'il est important de consigner au compte rendu certains de ces noms, car ils sont connus: Ramzan Kadyrov, le chef de la République tchétchène, le général Viktor Zolotov, commandant de la Garde nationale de Vladimir Poutine, Adam Delimkhanov, membre de l'État russe Douma pour une Russie unie, le parti de Vladimir Poutine et, bien entendu, le major Ruslan Geremeyev, que j'ai déjà mentionné.
En l'absence de justice et de reddition de comptes, il sera très important que ces pays qui ont la loi Magnitski, ce qui comprend le Canada, imposent des sanctions ciblées à ces individus.
[Français]
Bonjour. Merci beaucoup de ces témoignages très puissants.
Je pense que le Comité a déjà fait la preuve qu'il est très préoccupé par la situation des droits de la personne en Russie et ailleurs.
J'aimerais aborder un angle qui n'a pas encore été abordé. Je ne sais pas qui, de M. Kara-Murza ou de Mme Arno, est le mieux placé pour me répondre. C'est au sujet des droits des personnes LGBTQ.
On connaît la situation en Tchétchénie, où il y a eu, en 2017, une vague de cas de répression, d'arrestation, d'enlèvement, de meurtre et de torture. Il y a eu une nouvelle vague en 2019, qui semble avoir peu attiré l'attention malgré tout, mais qui n'en existe pas moins.
Premièrement, la Russie ferme-t-elle simplement les yeux sur ces actes, ces événements et ces tragédies en Tchétchénie, ou est-ce plutôt qu'elle n'est pas en position d'agir relativement à cela?
Ensuite, quelle est la situation des droits de la personne de la communauté LGBTQ dans le reste de la Russie? Assiste-t-on au même type de répression?
[Traduction]
C'est une question difficile.
Très souvent, le Kremlin essaie de ne pas incarcérer des gens pour avoir publié des articles politiques. Oui, il y a les soi-disant articles politiques... qui portent sur des sujets comme l'extrémisme, le terrorisme, l'espionnage et la trahison. Dans le cas des membres de la communauté LGBT, on essaie de ne pas les incarcérer en raison de leur identité. Le régime essaie de placer des drogues ou des armes, de les accuser d'avoir commis d'autres crimes ou de les contraindre à quitter le pays. C'est l'une des conséquences du régime de Poutine. Il enlève la vie à des personnes comme Boris Nemtsov, Anna Politkovskaya, Natalia Estemirova et bien d'autres. Il prive d'autres de liberté et compte au moins 296 prisonniers politiques. De nombreuses autres personnes sont privées de leur mère patrie comme moi et les membres des communautés LGBT qui ont dû fuir la Russie lorsqu'ils n'ont pas été incarcérés pour d'autres accusations inventées de toutes pièces.
[Français]
Oui. Merci beaucoup de votre question.
Comme vous le savez, il y a eu deux guerres contre la Tchétchénie dans le but officiel que celle-ci fasse partie de la Fédération de Russie. Du point de vue de la loi, actuellement, la Tchétchénie de Ramzan Kadyrov ne fait pas partie de la Fédération de Russie.
Sous le régime de Vladimir Poutine, la situation des droits de la personne en Russie est tout à fait affreuse. Il y a une censure des médias, une falsification des élections, des violations de la liberté d'assemblée, des prisonniers politiques et tout le reste. Cependant, dans le cas de la Tchétchénie et de Ramzan Kadyrov, c'est comme si on était sur une autre planète. C'est un régime médiéval qui existe là-bas. Il y a des tortures, des meurtres et des disparitions de gens presque chaque jour.
Il est important de se souvenir que des opposants à M. Kadyrov sont tués régulièrement, et pas seulement en Tchétchénie, mais aussi à Moscou, à Vienne, à Dubaï et presque partout dans le monde, parce que cet homme jouit d'une impunité complète. Comme nous l'avons déjà répété aujourd'hui, ce sont les proches de Ramzan Kadyrov qui ont organisé l'assassinat de l'opposant russe Boris Nemtsov. Il est donc très important d'agir, à l'échelle internationale, contre M. Kadyrov et ses proches.
Comme vous le savez, il fait déjà l'objet de sanctions de la part du Canada en vertu de la loi de Sergueï Magnitski. Il a déjà été sanctionné par les États-Unis et par plusieurs pays de l'Union européenne. Parfois il en rit, parce qu'il n'a pas de comptes bancaires, d'intérêts ou d'argent en Occident. Peut-être a-t-il raison. Par contre, il y a trois mois, le 12 mars de cette année, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté la résolution H. Res. 156, qui confie au gouvernement américain la tâche d'investiguer sur les avoirs de M. Kadyrov dans les pays du Proche-Orient, comme l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. M. Kadyrov a beaucoup d'avoirs dans ces pays, et il n'a pas ri quand cette résolution a été adoptée.
Il est donc très important que les pays occidentaux comme le Canada parlent des intérêts de M. Kadyrov à l'étranger, même si ce n'est pas en Occident. Il a beaucoup d'intérêts dans beaucoup de pays, et je crois qu'il faut s'attaquer à cette question.
Merci beaucoup.
Je vais maintenant poser une brève question à M. Cotler.
On connaît la situation des droits bafoués de la communauté LGBTQ. Comment qualifieriez-vous la réponse du Canada sur cette question bien précise?
En particulier, avez-vous vu du mouvement concernant l'accueil de réfugiés? J'imagine que la persécution dont ils font l'objet doit amener plusieurs membres de cette communauté à s'expatrier pour se protéger.
Cette question est très importante pour la communauté LGBTQ. Le problème, c'est que les gens qui font partie de cette communauté ne sont pas reconnus comme des prisonniers politiques. En fait, ces gens eux-mêmes ne sont pas à l'aise de demander cette reconnaissance, parce que la persécution dont ils font déjà l'objet pourrait augmenter s'ils étaient reconnus comme tels. Toutefois, nous pouvons leur accorder cette reconnaissance. Cela peut se faire au moyen de notre loi de Sergueï Magnitski, comme M. Kara-Murza l'a mentionné.
Au sujet de cette loi, j'aimerais souligner brièvement que nous avons imposé des sanctions à 140 leaders du Venezuela, y compris M. Maduro, à 17 personnes d'Arabie saoudite et à d'autres personnes du Soudan. Pour ce qui est des sanctions imposées à la Russie, les plus importantes visent le procureur général, le ministre de la Justice, le ministre de l'Intérieur, le chef des prisons et les personnes impliquées dans l'assassinat de M. Nemtsov.
[Traduction]
Bonjour à vous tous. Merci beaucoup d'être venus.
Monsieur Kara-Murza, je veux commencer avec vous. Il est arrivé quelque chose le mois passé en Europe dont bien des gens ne sont sans doute pas au courant. Si nous revenons un peu en arrière, nous savons que la Fédération de Russie a présenté une demande pour faire partie du Conseil de l'Europe en 1992. En 1996, la demande a été acceptée. Comme vous le savez également, la Cour européenne des droits de l'homme est le dernier recours pour les citoyens en Russie qui n'ont pas de recours par l'entremise de leurs propres tribunaux, surtout pour les affaires délicates sur le plan politique. Nous savons qu'en 2015, M. Poutine a ratifié une loi qui permet au gouvernement russe de faire fi des décisions rendues par la CERH. Nous savons qu'en juin 2017, le gouvernement russe a cessé de verser ses contributions au Conseil de l'Europe. C'est un montant considérable, comme vous pouvez l'imaginer — presque 7 p. 100 de son budget.
Nous savons également que le mois dernier, une réunion a eu lieu où 47 pays ont décidé de permettre à la Russie de continuer de faire partie du Conseil de l'Europe. La France et l'Allemagne étaient deux des pays derrière cette proposition. Puisque nous savons ce que la Russie a fait, n'est-ce pas un recul important pour les droits de la personne en Russie? De plus, 47 pays européens ont d'une certaine façon appuyé cette proposition.
Je vais répondre de deux façons différentes, car il y a deux versions à cette histoire. Pour ceux d'entre nous qui sont dans l'opposition démocratique russe et la société civile rurale, lorsque nous rencontrons nos amis et homologues occidentaux, nous insistons toujours sur l'importance de faire la distinction entre le régime et le peuple en Russie. Le Kremlin n'est pas synonyme de Russie; ce sont deux choses différentes. C'est dans cet esprit que je vais répondre à votre question de deux façons différentes.
Premièrement, je pense que ce serait une catastrophe si la Russie était expulsée du Conseil de l'Europe. Comme vous l'avez dit à juste titre, en tant que citoyen russe, le meilleur endroit pour demander que justice soit faite, c'est la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg. J'ai ce droit, car je suis un citoyen d'un État membre du Conseil de l'Europe.
Nous avons également les protections juridiques de la Convention européenne des droits de l'homme. Le régime de Poutine, comme je n'ai pas besoin de vous le dire, ne tient pas compte des décisions de la Cour européenne et viole également des obligations importantes prévues dans la Convention européenne, mais ce n'est pas une raison de nous priver de tous ces droits. En tant que personne qui a une cause devant la Cour européenne des droits de l'homme, je peux vous dire que c'est très important.
De nombreux détracteurs éminents du Kremlin ont gagné leur cause à la Cour européenne des droits de la personne. Citons notamment le regretté Boris Nemtsov, Aleksei Navalny, Mikhail Khodorkovsky et de nombreux autres, y compris des prisonniers politiques comme Alexey Pichugin, qui a deux affaires contre lui à la Cour européenne des droits de l'homme. C'est important, premièrement parce que rien n'est permanent, et M. Poutine et son régime ne régneront pas pour toujours. Lorsque la situation changera, ces décisions seront bien entendu mises en œuvre.
Deuxièmement, je ne peux pas vous dire à quel point il est important de savoir que la loi est de notre côté, pas parce que c'est ce que nous pensons, car c'est une décision de la plus haute instance judiciaire en Europe qui nous affirme que c'est le cas. À vrai dire, je pense qu'il n'aurait rien de pire que d'expulser la Russie du Conseil de l'Europe et de laisser 140 millions de personnes sans les protections de la Convention européenne et de la Cour européenne des droits de l'homme.
La deuxième partie de ma réponse serait que je pense que la décision de rétablir tous les droits de la soi-disant délégation parlementaire de la Russie à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe est une très mauvaise décision. Pendant de nombreuses années — bien avant la Crimée, soit dit en passant —, bon nombre d'entre nous ont réclamé la suspension des droits de vote des membres de la soi-disant délégation russe à l'Assemblée parlementaire, pas parce qu'ils représentent la Russie, mais parce qu'ils ne représentent pas la Russie.
Étonnamment, si vous lisez les rapports du Conseil de l'Europe d'il y a deux décennies, vous constaterez que chaque élection nationale en Russie depuis 2003 a été déclarée comme n'étant pas libre, équitable ou démocratique par le Conseil de l'Europe. La dernière fois que nous avons eu des élections à peu près libres et justes était en 2000, il y a près de 20 ans. D'une part, le Conseil de l'Europe a dit que les élections ne sont pas libres ou équitables. D'autre part, elle a accepté les résultats de ces fausses élections et ces représentants « élus » comme étant des représentants de bonne foi du peuple russe. Il n'y a pas de logique, à mon sens.
Sur une note plus précise, dans deux semaines, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe tiendra sa séance estivale à Strasbourg. Ce sera une séance où les membres de la délégation russe retourneront vraisemblablement et prendront place à leur siège. Ce sera également une séance où un parlementaire de la Lituanie, Emanuelis Zingeris, qui est le rapporteur spécial du Conseil de l'Europe dans l'affaire de l'assassinat de Boris Nemtsov et l'enquête, présentera un rapport sur l'affaire Nemtsov, qu'il a passé les deux dernières années à préparer.
La délégation russe a refusé toute forme de coopération dans le cadre de ce rapport. Les Russes lui ont interdit l'entrée au pays. Ils ont ignoré ses demandes, ses appels et ses messages, et lorsqu'il s'est rendu à un bureau de poste et a envoyé une lettre au Parlement russe, la lettre lui a été renvoyée avec une estampille du bureau de poste russe où l'on peut lire « adresse inconnue ». Je n'invente rien. Ce sera dans le rapport du Conseil de l'Europe.
Je pense que la condition première, avant de parler du retour de la délégation russe à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, sera la coopération totale et non équivoque dans le cadre du rapport de Zingeris sur l'affaire Boris Nemtsov. Malheureusement, cette coopération n'a pas lieu.
Je vais aller droit au but.
Il y a trois semaines, nous avons entendu parler du lent ethnocide des Tatars en Crimée occupée, mais ce que bien des gens en Occident ne comprennent pas, c'est que la Fédération de Russie a de nombreuses républiques autonomes qui comptent des peuples autochtones russes. À l'heure actuelle, bon nombre de ces gens, de ces Autochtones de la Russie, font face à des arrestations et à de longues peines d'emprisonnement. Dans certains cas, les gens sont internés dans des asiles psychiatriques. J'espérais que nous pourrions soulever la question des arrestations de ceux qui défendent les droits des peuples autochtones de la Russie.
Vous avez cité plus tôt aux fins du compte rendu le nom des personnes impliquées dans l'assassinat de Boris Nemtsov, mais M. Genser a dit très clairement qu'il n'y a rien de pire que d'être arrêté et oublié. Je trouvais qu'il était important de citer le nom de ces personnes aux fins du compte rendu. Cependant, je suis disposé à soumettre ces noms plus tard, car je constate que le président est limité dans le temps qu'il peut m'accorder.
Donc, merci, mais j'aimerais que vous décriviez la situation actuelle des peuples autochtones, notamment ceux dans les républiques du Tatarstan, de Bachkorstan, d'Ingouchie, etc.
Très rapidement, vous avez tout à fait raison. Il y a une disposition relativement nouvelle dans le code criminel russe qui pénalise officiellement les « tendances séparatistes ».
Par exemple, si l'une des régions russes décidait d'essayer de faire ce que Poutine a fait en Crimée en 2014, le soi-disant référendum, les gens qui l'organiseraient seraient tous passibles de poursuites criminelles en vertu de la loi russe actuelle. Et, oui, il y a beaucoup de personnes dans les régions, y compris de nombreux représentants de groupes ethniques autochtones de la Russie, qui font l'objet de poursuites et de persécution.
Je pense qu'il est important de dire que, à cet égard à tout le moins, le régime de Poutine est également un persécuteur qui ne cible pas un groupe particulier. Si l'on regarde la liste des prisonniers politiques en Russie, on y trouvera des représentants de nombreux groupes ethniques, de religions différentes et de différentes sphères de la société. Cependant, comme à l'époque de Staline, les Russes constituent le groupe le plus important.
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