Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bonjour à tous et bienvenue à la 101e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes. La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément au Règlement. Certains membres y assistent en personne alors que d'autres y participent à distance au moyen de l'application Zoom.
Aujourd'hui, nous accueillons des témoins en ligne et dans la salle. Pour les témoins en ligne, je vous rappellerai de lever la main. Veillez à sélectionner les paramètres d'interprétation de votre choix. Par ailleurs, si vous ne parlez pas, veuillez mettre votre micro en sourdine. Pour les personnes dans la salle, veillez à faire un choix entre les options français, anglais et parquet. Une dernière chose: veuillez éviter d'approcher l'oreillette du microphone. Je vous rappelle également que toutes les questions doivent être adressées à la présidence.
Nous tiendrons une liste d'intervenants s'il y a des questions, et nous nous en occuperons.
Revenons à nos travaux.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 27 novembre 2023, le Comité reprend son étude sur la mise en œuvre d'une alerte robe rouge.
Aujourd'hui, nous accueillons deux témoins en personne et une autre en ligne. Nous accueillons Hilda Anderson‑Pyrz, présidente du National Family and Survivors Circle, et Keely.
Bonjour, madame la présidente. Je m'appelle Keely Ten Fingers et je suis technicienne au National Family and Survivors Circle Incorporated. Je suis ici pour assister Mme Anderson‑Pyrz.
Madame la présidente, quand vous dites « Giganawenimaanaanig », imaginez que vous descendez en canot la rivière Rouge, où je me trouve aujourd'hui. Les eaux ne sont pas encore libres de glace, mais elles le seront bientôt.
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui au comité permanent au sujet de l'alerte robe rouge.
La sécurité, la protection et le bien-être des femmes, des filles et des membres de nos familles de diverses identités de genre autochtones sont essentiels pour un pays meilleur. Le rapport final de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, intitulé « Réclamer notre pouvoir et notre place », a fait un constat central de génocide et contenait 231 appels à la justice qui entraîneraient un changement transformateur pour les femmes, les filles et les membres de nos familles de diverses identités de genre autochtones.
Il est essentiel que l'alerte robe rouge, quel que soit le nom que l'on choisit de lui donner, soit mise en œuvre immédiatement. Avec bon nombre de mes collègues ici présentes, j’ai tenu des consultations au cours de l’hiver pour entendre des représentants communautaires dans le cadre de l'approche fondée sur les distinctions, des organismes politiques et des organismes communautaires au sujet des implications d'un système d’alerte, de la forme qu'il prendrait et de la façon dont il devrait ou pourrait être mis en œuvre.
Une chose est claire: un système d'alerte doit être élaboré et dirigé conjointement par des membres des familles autochtones. Au‑delà d'une alerte, il faut offrir du soutien à la communauté et aux familles des personnes disparues. Pour les personnes qui rechercheront réellement les personnes disparues, les personnes qui aideront les familles pendant le processus et les personnes qui aideront les personnes qui auront été retrouvées, il faut un soutien complet. Chacune de ces fonctions nécessite également une formation pour que les communautés et les familles aient la capacité de se soutenir mutuellement.
Le système d’alerte, lors de sa mise en œuvre, devrait tenir compte des disparités régionales et avoir très clairement une approche accessible, qui tienne compte des technologies, de la langue et de la communauté.
Les Autochtones qui vivent en milieu urbain ont été en grande partie ignorés, effacés ou abaissés, et ils ont été réduits au silence dans le cadre de l’approche actuelle fondée sur les distinctions. Il faut respecter l'inclusion complète de la population autochtone en milieu urbain.
À Giganawenimaanaanig, nous travaillons sur un projet de données, que nous appelons une carte de récits. Il montre clairement que bon nombre des personnes disparues ou assassinées sur notre territoire viennent de communautés, mais ont déménagé en milieu urbain pour des raisons médicales, pour faire des études ou pour échapper à la pauvreté et à la violence. Bon nombre de ces membres de nos familles sont devenus vulnérables et ont été pris pour cible par des auteurs de violences. Je pourrais relater de nombreuses anecdotes qui témoignent de la violence systémique qui subsiste, mais le temps manque pour cela.
Il faut tenir compte du fait que bon nombre des membres de nos familles sont en réalité des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays au sens de la convention des Nations unies de 1951 relative au statut des réfugiés. En fait, nous devons fournir un soutien dans le respect des droits de la personne des membres de nos familles et dans le respect des conventions internationales.
Je veux simplement ajouter que, comme sa caméra était éteinte, je n'ai pas eu l'occasion de présenter Charlene Lavallee, qui est la présidente de l'Association of Métis, Non and Status Indians Saskatchewan.
Madame Lavallee, je reviendrai à vous dans cinq minutes. Merci beaucoup de vous être jointe à nous.
Je vais maintenant céder la parole à Mme Anderson‑Pyrz, pour cinq minutes.
Bonjour, monsieur et mesdames les membres du Comité permanent de la condition féminine.
Je m'appelle Hilda Anderson‑Pyrz et je suis la présidente du National Family and Survivors Circle, un organisme sans but lucratif constitué en avril 2023, dirigé par des femmes et des personnes de diverses identités de genre autochtones qui appartiennent aux familles de femmes, de filles et de personnes bispirituelles et de diverses identités de genre autochtones disparues ou assassinées, ainsi que par des survivants d'actes de violence à motivation sexiste ou raciale.
Je reconnais respectueusement que notre réunion d'aujourd'hui se tient sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Aujourd'hui, je suis solidaire des familles des femmes, des filles et des personnes 2LGBTQI+ autochtones disparues ou assassinées, des survivants et des personnes bispirituelles et de diverses identités de genre dont la résilience et le travail de défense des droits ont été essentiels pour promouvoir l'initiative de l'alerte robe rouge. Je remercie le gouvernement fédéral et la députée Leah Gazan pour leurs efforts en vue de l'établissement et de la mise en œuvre prochaine de l'alerte robe rouge. L'alerte est le fruit de décennies d'action engagée en faveur d'une mesure et d'un changement transformateurs.
L'alerte robe rouge est un outil essentiel pour la protection des femmes, des filles et des personnes bispirituelles et de diverses identités de genre autochtones, et elle représente un progrès considérable dans notre réaction à la crise. Nos communautés font face à des disparitions quotidiennes de femmes, de filles et de personnes 2LGBTQQIA+ autochtones. C'est le résultat non d'un choix, mais d'un mépris sociétal de la vie des Autochtones qui fait de nous la cible d'actes de violence.
On ne saurait trop insister sur l'urgence de ces situations. Quand une femme, une fille ou une personne de diverses identités de genre autochtone est portée disparue, il est essentiel de prendre des mesures immédiates en mobilisant les informations, les ressources et les efforts de collaboration pour qu'elle soit retrouvée saine et sauve.
L’élaboration et la mise en œuvre de l’alerte robe rouge devraient être dirigées par des femmes et des personnes de diverses identités de genre autochtones ainsi que par des représentants des organismes autochtones de première ligne. Pour intervenir efficacement, il faut écouter les personnes directement touchées, surtout dans les régions éloignées comme le Nunavut, où la connectivité limitée entraîne des difficultés supplémentaires. L'implication de ces communautés est essentielle pour recueillir des perspectives et guider nos interventions.
L'alerte robe rouge, accompagnée de services de soutien complets, vise à prévenir ces disparitions et à y réagir. Ces services doivent être ancrés dans des modalités autochtones de connaissance, d'existence et d'action, et ils doivent être indépendants de toute influence politique. Il est essentiel qu'ils respectent les droits fondamentaux de la personne des femmes, des filles et des personnes bispirituelles et de diverses identités de genre autochtones pour que nous puissions vivre dans la dignité et la sécurité.
Je demande à tous les ordres de gouvernement d'appuyer l'alerte robe rouge et les services qui y sont associés, et je souligne la nécessité de prendre des mesures rapides et opérantes, ainsi que d'investir dans un système d'alerte réservé à la communauté autochtone.
En conclusion, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous. La mise en œuvre de l'alerte robe rouge est essentielle, non seulement à titre de mesure stratégique, mais aussi à titre d'engagement à résoudre la crise nationale des femmes, des filles et des personnes 2LGBTQQIA+ autochtones disparues ou assassinées sans obstruction politique. Les gestes que nous accomplissons maintenant peuvent ouvrir la possibilité d'un avenir assuré, plus sûr et plus digne pour les femmes, les filles et les personnes bispirituelles et de diverses identités de genre autochtones.
Bonjour. Je m'appelle Charlene Lavallee. Je suis la présidente de l'Association of Métis, Non and Status Indians Saskatchewan.
Nous avons des chartes communautaires dans toute la province, à plusieurs endroits dans le Nord-Ouest de la Saskatchewan, qui est une région très éloignée, et dans le Nord-Est de la Saskatchewan, qui est une région encore plus éloignée. Puis, en ce qui concerne les centres urbains, nous sommes présents dans tous les centres urbains de la Saskatchewan.
La Saskatchewan comprend les territoires visés par les traités 8, 10, 6, 7, 4, 2 et 5. La Saskatchewan est également la patrie des Métis.
L'Association of Métis, Non and Status Indians Saskatchewan n'est pas un des groupes inclus dans l'approche fondée sur les distinctions. Notre organisme relève du Congrès des peuples autochtones. Nous participons à la table ronde nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées depuis 2016. Jusqu'en février de cette année, nous y participions. Ensuite, il y a eu une réunion en février à laquelle nous n'avons pas été invités personnellement.
En ce qui concerne l'alerte robe rouge, j'aimerais remercier la députée Leah Gazan d'avoir pris cette initiative. J'ai écouté la communication mardi. Elle portait davantage sur les processus d'un système d'alerte, et il était vraiment intéressant d'entendre à quelle vitesse l'alerte pourrait être intégrée et mise en place.
L'un des principaux revers essuyés pour les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées a été le projet de loi C‑18. Dans nos communautés, beaucoup de gens s'informent sur les réseaux sociaux. Comme les actualités ne sont plus autorisées sur les réseaux sociaux, il y a un grand vide quand il s'agit de transmettre des informations concernant des personnes récemment portées disparues.
Il y a deux ou trois choses que j'aimerais aborder. La direction par les Autochtones et l'inclusion de tous les Autochtones du Canada sont des nécessités concernant cette alerte robe rouge et tout ce qui se rapporte aux femmes et aux filles autochtones disparues ou assassinées. La politique actuelle fondée sur les distinctions pour répertorier les organismes est inconstitutionnelle. La Constitution du Canada mentionne, à l'article 35, les Premières Nations, les Inuits et les Métis. L'arrêt Daniels a également inclus les Autochtones non inscrits dans l'article 35. L'article 35 ne mentionne pas l'Assemblée des Premières Nations, l'Inuit Tapiriit Kanatami et le Ralliement national des Métis.
Actuellement, l'approche fondée sur les distinctions est l'approche qu'utilise le gouvernement. Elle exclut tous les Autochtones non inscrits, et elle me prive de ma liberté de choix, liberté que je suis censée avoir au titre de la Charte des droits et de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Le gouvernement choisit de ne travailler qu'avec certains groupes. Encore une fois, les Autochtones, principalement les femmes, sont exclus de processus qui pourraient leur sauver la vie.
Tous les aspects des appels à la justice de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées doivent être inclusifs à l'égard de tous les groupes autochtones. Ils ne doivent pas être politiques, et les processus doivent être rationalisés à l'échelle nationale par les organismes autochtones.
(1545)
Les services de police n'ont pas toujours servi les intérêts des Autochtones vulnérables, pas plus que les organismes gouvernementaux, par exemple ceux des travailleurs sociaux. En tenant compte de tous ces facteurs, nous avons toujours dit que les services de police ont largement contribué au problème. Je pense que ces choses doivent être entendues.
Je remercie toutes les témoins d'être présentes. Il s'agit assurément d'une étude importante qui a également des répercussions dans ma circonscription, Peterborough—Kawartha, et dans tout le pays.
J'aimerais vous entendre toutes. Le but de cette étude est de déterminer comment mettre cela en oeuvre au mieux, avec un maximum d'efficacité. Nous avons reçu ici cette semaine une témoin prodigieuse, une vraie championne. Elle travaille en Nouvelle-Écosse.
Oui, c'est Mme Jesty. Elle était extraordinaire. Elle a soulevé d'excellents points.
Nous entendons la même chose de la part de nombreux témoins: « direction par les Autochtones » et « pour les Autochtones, par les Autochtones », ce qui, à mon avis, est essentiel. Mme Jesty n'était pas favorable à l'idée d'une initiative gérée par le gouvernement.
Je vais m'adresser d'abord à Mme Anderson‑Pyrz, si vous me le permettez, puis je demanderai aux autres témoins de répondre également.
Comment voyez-vous cela? Imaginez-vous une alerte indépendante de l'endroit où l'on se trouve? De nombreuses femmes et filles autochtones vivent hors réserve et dans les centres urbains. Comment voyez-vous le déploiement et la mise en œuvre? S'agit‑il d'un programme national?
Tout d'abord, je tiens à souligner qu'il s'agit d'une crise nationale, je vois donc un programme déployé à l'échelle nationale, pour qu'il bénéficie d'un soutien total. Tout le monde devrait y participer et l'élaborer collectivement.
L'un des plus grands défis que nous constatons en travaillant sur la question des femmes et des filles autochtones disparues ou assassinées concerne le problème des frontières et des compétences, qui fait souvent obstacle aux interventions. Je pense donc que la portée doit être nationale et qu'il faut une initiative nationale. Il faut également des ressources équitables pour que la mise en œuvre soit couronnée de succès et pour que, où que l'on habite, quelle que soit la communauté, on puisse avoir accès au système.
Avant que les autres témoins ne répondent, à ce propos, Mme Jesty a dit qu'elle était du genre à faire ce qu'il fallait. Elle a parlé de la bureaucratie. Parfois, on a d'excellentes idées, mais rien ne se passe parce qu'une fois que tout le monde s'est assis autour de la table et a dit qu'elles étaient excellentes, tout le monde s'en va et les idées ne débouchent sur rien faute de leader. Comment éviter l'inertie bureaucratique dans un projet comme celui‑là?
Je serais heureuse d'entendre les autres témoins si elles veulent intervenir. C'est le plus grand obstacle à mes yeux dans beaucoup de projets de ce genre, parce que personne ne s'opposerait, à mon avis, à la mise en place de cette alerte pour sauver des vies.
Je pense qu'en définitive, il doit y avoir un mécanisme de reddition de comptes pour garantir qu'une mesure transformatrice sera prise et un engagement à veiller à ce que l'alerte robe rouge soit mise en œuvre. Au bout du compte, l'inaction entraîne la poursuite des disparitions et des meurtres de femmes, de filles et de personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones.
Je crois vraiment que, d'un point de vue éthique, nous devons voir l'urgence d'agir et de prendre des engagements, car nos vies en dépendent.
Je pense que c'est très urgent. Les appels à la justice sont terminés. Il serait intéressant de savoir combien de femmes de plus ont disparu ou ont été assassinées depuis l'achèvement du plan d'action. C'est un phénomène quotidien, et, pour les familles qui ont perdu de leurs membres, il est trop tard.
C'est très important, et je conviens du fait qu'il faut que ce soit au niveau national, avec des entités provinciales qui travaillent ensemble, plutôt que tout le monde travaille en vase clos. Ainsi, les renseignements seront échangés entre toutes les administrations.
Madame DeLaronde, ma question, qui porte sur les détails pratiques, est en réalité la suivante: comment donner au programme une envergure nationale tout en préservant l'autonomie et en évitant les interférences du gouvernement?
Je pense que le gouvernement a sa place dans tout ceci. Nous savons que, traditionnellement, et même à l'époque contemporaine, les choses ne bougent à l'échelle locale que quand les femmes autochtones, sans soutien, impulsent et entretiennent le changement dans nos communautés.
Nous nous occupons seules de ces questions depuis au moins 50 ans, et nous avons maintenant besoin du gouvernement, de l'administration, pour appuyer ce changement, parce que nous ne pouvons pas le faire seules, de toute évidence. Les règles, les politiques et les lois ne changent pas et le nombre de personnes disparues ou assassinées continue d'augmenter: nous ne sommes pas en mesure de le faire seules. Nous avons besoin du soutien des gouvernements et des administrations pour investir dans le changement et dans la sécurité.
Nous pouvons mettre en place l'alerte maintenant — et nous devons la mettre en place maintenant —, parce que des femmes disparaissent. Pour beaucoup de gens, l'été est une période de repos et de répit, mais ceux d'entre nous qui sont sur le terrain savent que le nombre de membres de nos familles qui disparaissent ou qui sont assassinés augmente avec la température.
Nous pouvons le faire. Les gens qui veulent discuter davantage peuvent discuter davantage et régler les détails ou les querelles de compétences qui les préoccupent, mais nous devons le faire maintenant.
Je tiens d'abord à remercier tous nos témoins de leurs excellents témoignages et de leur présence pour répondre à des questions sur cette étude très importante présentée par Leah Gazan, qui milite activement pour la mise en œuvre de cette mesure, qui en parle très souvent et qui veille à ce que nous en discutions ici.
Ma première question s'adresse à Mme Lavallee, parce que vous avez été la dernière à témoigner et que cette question‑ci est prioritaire à mes yeux.
Vous avez mentionné que les services de police font partie du problème, que les forces de l'ordre ne prennent pas toujours le parti des femmes autochtones vulnérables, et je suis d'accord, bien sûr. Je me demande quels changements, selon vous, peuvent être apportés pour améliorer la situation et la collaboration avec les policiers afin de les amener à fournir leur aide relativement à l'alerte robe rouge.
Eh bien, enfin, nos services de police sont déjà surchargés de travail. Souvent, lorsqu'il s'agit d'une personne disparue, l'affaire nécessite beaucoup plus de temps, d'efforts et de traitement du signalement que la police ne peut y consacrer.
Le processus pourrait toujours commencer par une organisation externe à la police. Il pourrait commencer par un organisme qui recueille les renseignements et qui travaille avec la famille, puis l'organisme aviserait la police, dont l'intervention partirait de là.
Ce n'est pas une infraction criminelle. À ce moment‑là, il ne s'agit pas d'une affaire criminelle, alors il n'est pas nécessaire que la police intervienne dès le départ. Nous nous rappelons tous qu'il y a deux ans, lors d'une vérification de l'état de santé d'une personne, une jeune femme autochtone a été tuée. Parfois, ce sont des choses simples comme celle‑là. Nous avons des préjugés en ce qui concerne le maintien de l'ordre et les agents de police, et, parfois, toute la situation est désamorcée grâce au fait qu'une personne de sa propre communauté les surveille plutôt qu'un agent de police.
Vous avez dit qu'il est nécessaire et essentiel que nous mettions cette mesure en œuvre le plus rapidement possible. D'autres témoins étaient plus favorables à ce que la mise en œuvre soit menée par des organisations, et je pense que vous en avez parlé également.
Bien entendu, les gouvernements fédéral et provinciaux devraient aussi contribuer au financement et jouer un rôle. Je me demande quel rôle, selon vous, les provinces et les territoires devraient jouer, par rapport à celui que le gouvernement fédéral devrait jouer.
Je pense que l'une des choses sur lesquelles j'insiste vraiment dans le cadre de ce travail, c'est le fait qu'il importe peu que nous soyons le gouvernement fédéral ou un gouvernement provincial ou territorial, car tout le monde a la responsabilité de jouer un rôle dans la sécurité des femmes, des filles et des personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones parce qu'un grand nombre de personnes qui résident dans notre province ou territoire disparaissent à un rythme alarmant.
Selon moi, il est vraiment essentiel que tout le monde adopte une approche collective et collaborative dans la mise en œuvre de l'alerte robe rouge pour qu'elle donne les résultats escomptés. Comme je l'ai déjà mentionné, les limites des compétences ont souvent nui à la sécurité de femmes, de filles ou de personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones. Je pense que c'est une participation égale de la part de tous les gouvernements.
Madame DeLaronde, vous avez parlé de l'importance de mettre en œuvre le système d'alerte. Je me demande si vous pourriez nous parler un peu de ce que nous pouvons faire pour nous assurer qu'il est sécuritaire et qu'il mérite la confiance des partenaires autochtones.
Actuellement, dans les provinces, le système d'alerte est généralement géré par les services de gestion des urgences. C'est la police qui décide si les alertes sont diffusées ou non.
Je pense que la participation de membres de la famille ou de représentants de la collectivité est essentielle, lorsque l'on prend ces décisions, pour assurer la confiance. Ensuite, s'il est déterminé qu'une alerte ne sera pas diffusée, une mesure devrait être en place afin qu'il soit possible de vérifier, de concert avec la collectivité, si c'était la bonne mesure à prendre.
Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
Je sens notre devoir de mémoire envers les femmes et les filles qui sont disparues, qui ont été assassinées. Nous devons faire ce travail avec rigueur, sérieusement, pour honorer leur mémoire, pour qu'elles ne soient pas décédées en vain. C'est le souhait que j'ai en entendant les témoins, aujourd'hui.
Je vais m'adresser d'abord à vous, madame Anderson‑Pyrz.
Dans votre discours d'ouverture, vous avez parlé de la nécessité de mobiliser les ressources. On le sait, une alerte robe rouge ne se fera pas toute seule. Il faut évidemment la mettre en place. Comment voyez-vous l'aspect des ressources? Quelles ressources devrait-on mobiliser pour s'assurer que l'alerte robe rouge sera vraiment efficace?
Parmi les ressources essentielles dont nous avons besoin, il y a l'infrastructure. C'est pour s'assurer que tout le monde aura accès à ce système d'alerte robe rouge, surtout lorsqu'il s'agit de personnes qui vivent dans des régions éloignées et isolées.
De plus, il doit y avoir des mesures de soutien globales pour aider les personnes vulnérables qui ont disparu, ainsi qu'un engagement durable à long terme afin d'affecter suffisamment de ressources au système d'alerte robe rouge et de le maintenir. Il ne peut pas s'agir d'un événement ponctuel qui se produit pendant un an et qui ne se poursuit pas. Nous devons nous assurer qu'il existera pendant de nombreuses années et pour de nombreuses générations, parce que nos vies comptent.
Merci beaucoup. Je vous poserai d'autres questions plus tard.
Je vais poser une question qui s'inscrit dans la continuité de la question que je viens de poser.
Madame DeLaronde, dans votre discours d'ouverture, vous avez parlé de l'importance de soutenir les familles, d'avoir quelque chose d'intégré. Vous allez donc dans le même sens que ce qu'on vient de dire.
Comment voyez-vous cette intégration, ce soutien aux familles? Je pose cette question parce qu'on se rend compte que l'alerte robe rouge n'est pas un coup de baguette magique et que cela prendra aussi tout un continuum de services en amont et en aval, de la prévention jusqu'aux services offerts par la suite.
Pouvez-vous nous éclairer, nous donner des pistes pour que nous puissions faire quelque chose? On parle de l'alerte robe rouge dans cette étude, mais je pense qu'il faudra que nos recommandations dépassent la simple application de l'alerte et que nous pensions aussi à un continuum de services.
Oui, absolument, le travail doit aller au‑delà de ce bruit irritant que nous recevons par téléphone. Une fois l'alerte déclenchée, il doit y avoir des gens sur le terrain pour aider les familles à retrouver leurs proches. Qu'il s'agisse du modèle des Rangers dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon ou de celui des pompiers volontaires dans les provinces, nous pouvons faire appel à des gens qui ont de l'expérience et qui se dévouent au bien-être de la société afin qu'ils appuient cette initiative.
En outre, les familles ont besoin de soutien en matière de bien-être lorsqu'une personne est portée disparue. Ce qui est critique, c'est que nous constatons que celles qui ont disparu et qui sont retournées dans leur famille sont traumatisées. Il faut les aider à retrouver leur confiance et leur sentiment de bien-être lorsqu'elles retournent dans leur famille. Il ne s'agit pas seulement d'émettre une alerte dans le système. Il est important de fournir toute la gamme des services.
Je crois que c'est très sage et que nous devrons en tenir compte lorsque nous étudierons le rapport.
Madame Lavallee, dans votre discours d'ouverture, vous avez parlé de l'inclusion de tous les groupes, mais aussi de l'importance qu'elle ne devienne pas politique.
D'ailleurs, vous aussi, madame Anderson-Pyrz, avez mentionné cette question.
Madame Lavallee, qu'est-ce qui vous porte à croire, à cette étape-ci, que cette question risque de devenir politique?
Elle est déjà devenue politique. Comme je l'ai dit, le Congrès des peuples autochtones participe à la table ronde des FFADA depuis 2016. En février, on a tenu pour la première fois… en personne au sujet de l'achèvement depuis la fin des appels à la justice. Notre organisation n'a pas été invitée à y assister personnellement. Nous leur avons demandé si nous pouvions y assister en personne, mais ils ne nous ont pas invités et n'ont pas changé d'avis…
Je tiens tout d'abord à remercier le Comité, qui a accordé la priorité au fait de ramener chez eux nos femmes, nos filles et les membres de notre parenté ayant diverses identités de genre. Je tiens à vous remercier tous de toujours faire de la place pour cette discussion.
Je remercie également les femmes qui se joignent à nous dans la salle. Ce sont de véritables championnes qui sont littéralement sur la ligne de front jour et nuit et qui travaillent sur cette question, pas seulement de manière théorique, mais aussi directement auprès familles chaque jour. Je tiens à vous remercier tous de vos efforts.
Ma première question s'adresse à Mme Anderson-Pyrz.
Vous avez mentionné le Nunavut. Je sais que, dans le cadre des consultations, il y a eu des problèmes technologiques. Pourquoi pensez-vous qu'il est important de mobiliser les intervenants directement au Nunavut? Quelles en sont les raisons?
Je pense qu'il est essentiel de les mobiliser en raison de leur éloignement, de leur isolement et de leurs problèmes de connectivité. Nous devons nous assurer que tous les Autochtones disposent des services et des infrastructures nécessaires pour répondre à leurs besoins sociaux et économiques. Nous devons veiller à ce que tous les gouvernements respectent les droits sociaux et économiques des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones, en mettant l'accent sur l'appel à la justice 4.1.
De plus, leurs expériences peuvent nous renseigner afin que nous puissions nous assurer que celles‑ci et les types de services et d'interventions dont ils ont besoin sont inclus. Nous observons souvent un manque de ressources, de soutien et de mobilisation. Un grand nombre des gens qui sont pris en compte dans le coût de la mobilisation sont des parents qui vivent dans des régions éloignées du Nord. Le coût ne devrait pas être un facteur. Ces gens devraient avoir une participation équitable à tous les types d'initiatives qui auront une incidence sur leur vie.
Je sais que Mmes Anderson-Pyrz et Lavallee ont parlé d'ingérence politique. Je me demande si vous êtes d'accord avec elles. Si vous l'êtes, à quoi cette ingérence ressemble‑t‑elle? Comment peut‑on faire les choses sans qu'il y ait d'ingérence politique? Qu'est‑ce que l'ingérence politique?
Répondez rapidement, en 20 secondes. Je plaisante.
Je pense que oui, il y a de l'ingérence politique. Il y a une volonté d'apaiser des individus ou des organisations.
Je tiens à préciser que ce sont des organisations politiques représentatives. Il ne s'agit pas de gouvernements, quel que soit le terme employé. Nous sommes nombreux, sur le terrain et sur la ligne de front, à n'être pas moins engagés à assurer le changement au sein de nos collectivités et responsables de le faire.
Selon moi, il faut accorder plus de poids aux personnes qui font le travail sur le terrain. Nous l'avons constaté lors des consultations. Les participants qui avaient des réponses claires et distinctes étaient ceux qui faisaient le travail sur le terrain.
Je comprends que les gens veulent plus de temps pour parler et se mobiliser. Il est certainement possible de le faire en même temps que le processus de mise en œuvre. Nous savons que, lorsque nous parlons et que nous trouvons des façons d'aller de l'avant, nous pouvons mieux faire les choses ensemble, mais nous ne pouvons pas attendre parce que nous avons attendu trop longtemps.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Lavallee. Elle fait simplement fond là‑dessus.
Nous avons entendu dire que bon nombre de ces batailles ont été menées par des femmes de nos communautés qui sont aux premières lignes de ce dossier… souvent sans rémunération. Pourquoi est‑il essentiel de faire entendre la voix des femmes, des personnes ayant diverses identités de genre et des familles touchées par ce génocide?
Pourquoi est‑il essentiel de mettre les femmes, les personnes ayant diverses identités de genre et les familles touchées au centre des décisions et des discussions sur l'alerte robe rouge, en dehors des organisations politiques?
Je pense que c'est parce que nous sommes nombreuses à être des mères. Nous sommes les tantes et les grands-mères. Nous sommes le centre de nos familles.
Selon moi, lorsqu'il s'agit des aspects émotionnels associés à la disparition d'une personne, ce sont habituellement les femmes qui font le travail sur le terrain.
Il ne me reste que 12 secondes, alors je tiens à remercier encore une fois le Comité. Ce projet me tient tellement à cœur.
Je remercie également les témoins que je tiens en très haute estime. Je suis très heureuse d'avoir d'autres femmes autochtones fortes avec moi aujourd'hui. C'est un vrai plaisir.
Merci à vous toutes, braves dames. Je sais à quel point cette étude est importante. Je remercie Mme Gazan de l'avoir présentée.
Je vais vous faire part de quelque chose. Je peux comprendre cette cause d'une certaine manière parce que j'ai fait partie du système des familles d'accueil. J'ai vu beaucoup de choses dont je préférerais ne pas parler.
J'ai lu récemment le livre intitulé Si je disparais. Il a été écrit par Brianna Jonnie, qui était à l'époque, en 2016, une jeune femme de 14 ans. Elle a écrit une lettre au service de police de Winnipeg pour l'implorer de faire mieux lorsqu'il enquête sur des cas de disparition d'Autochtones.
Je ne vais pas lire tout le livre, mais il contient une citation qui m'a vraiment touché en raison de ce que j'ai vécu dans le passé. Deux ans plus tard, alors qu'elle était plus âgée, Brianna a interrogé le premier ministre Justin Trudeau lors d'une assemblée publique à l'Université de Winnipeg au sujet de l'enquête sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Elle lui a demandé: « Lorsque tant de gens ne feront plus confiance au processus, comment ferez-vous pour déterminer — par une mesure quantifiable — si l'enquête sur les femmes et les filles autochtones assassinées et disparues est une réussite? »
Nous sommes en 2024, alors, si je fais le calcul, je crois que c'est environ huit ans. Comme je viens du secteur privé, j'en ai assez que les choses traînent toujours en longueur. Je voudrais entendre vos commentaires à ce sujet, madame Anderson-Pyrz, parce que c'est important. Qu'en dites-vous?
Je vois cette situation du point de vue d'une femme autochtone. Souvent, on a l'impression que l'on n'accorde aucune valeur à nos vies et que nous n'avons pas d'importance. Ainsi, on envoie le message à la société qu'il n'y a pas de mal à nous tuer, à nous enlever et à nous exploiter lorsque les gouvernements ne prennent pas les mesures de transformation nécessaires là où elles ont une incidence sur le terrain.
Je veux me sentir en sécurité en tant que femme autochtone dans ce pays et que mes petites-filles et les générations à venir sachent que nos vies ont de la valeur. Si nous disparaissons, je veux m'assurer que les gens nous regarderont et prendront des mesures transformatrices, que nous serons localisés de façon sécuritaire et, surtout, que nous ne continuerons pas de disparaître à un rythme alarmant. Je veux avoir l'assurance que nos vies comptent, que l'on considère que nous avons de la valeur, que nous bénéficions de l'équité et de l'égalité au pays et que nos droits sont respectés.
Je tiens à vous dire que, si quelqu'un n'a pas lu ce livre, il est excellent. Je pleurais en le lisant; je ne vous mentirai pas. Je pleure presque en en parlant.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Lavallee.
Vous avez dit que, lorsqu'on retrouve des victimes, elles sont traumatisées. Y a‑t‑il des sanctions pour les auteurs et, dans l'affirmative, quelles sont-elles? Que pouvons-nous apprendre dans le but de mettre fin à ce type de victimisation?
Il y a eu des sanctions, mais si on revient à des cas antérieurs, je dirais qu'elles n'étaient pas significatives du tout. En fait, on a dit que nos vies valaient moins parce que les sanctions imposées sont…
Chaque cas est différent. Cependant, il faudrait certainement que ce soit plus que 18 mois ou deux ans pour avoir frappé une personne derrière la tête avec une barre d'attelage de remorque et changé sa vie.
La raison pour laquelle je dis cela, c'est que j'ai rencontré récemment une enfant de neuf ans qui a vécu ce traumatisme. C'est un événement marquant. C'est tellement difficile à surmonter. En outre, lorsque les victimes savent que les agresseurs sont de nouveau en liberté, cela les traumatise de nouveau.
Si nous voulons faire quelque chose pour éviter ces traumatismes, nous devons faire en sorte que la peine soit proportionnelle au crime, parce que les victimes méritent de se promener dans la rue sans crainte. Êtes-vous d'accord?
Je suis tout à fait d'accord, mais j'irais même plus loin en disant que la santé mentale est en crise en Saskatchewan et partout au Canada. Il y a des gens qui souffrent en raison des mêmes expériences actuellement, et, en Saskatchewan, il faut attendre deux ans pour consulter un psychiatre.
Je tiens à remercier tous nos témoins, non seulement de leur présence aujourd'hui, mais aussi de tout le travail qu'elles font.
Ma première question, comme certains d'entre vous l'ont mentionné, concerne le Nord, le Nunavut et les problèmes et défis liés à l'accès aux systèmes de communication. D'autres ont parlé de l'aspect autochtone urbain et de défis entièrement différents.
Comment pouvons-nous créer un système unique pour l'ensemble du pays, alors que les défis et les besoins sont incroyablement différents d'une région à une autre du pays?
Si vous me le permettez, je vais commencer par Mme Anderson-Pyrz.
Lorsque nous nous penchons sur la question, nous examinons la nécessité de fournir un financement pour des ressources adéquates, afin que chaque région puisse mettre au point les outils et l'infrastructure dont elle a besoin pour participer et avoir accès à ces systèmes. Surtout dans le Nord, nous savons qu'il y a des inégalités au chapitre de l'accès à tout type de service ou de soutien. Il y a beaucoup de travail à faire à cet égard.
Nous constatons également que les femmes, les filles et les personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones quittent des régions éloignées et isolées pour accéder à l'éducation, à la santé ou à un nouveau mode de vie. Nous devons voir ce phénomène comme un modèle circulaire et construire une infrastructure qui donnera à tout le monde l'impression d'en faire partie et que le système est accessible.
Si vous me le permettez, je vais poursuivre avant de passer aux autres.
Lorsque vous parlez de cette infrastructure, vous pourriez peut-être fournir des précisions. Qu'est‑ce que cela signifie exactement du point de vue du personnel, du financement et de la façon dont elle fonctionnerait?
Nous devons déterminer quelles infrastructures sont nécessaires.
Je ne suis aucunement technicienne, mais il y a l'aspect technique de disposer des outils et de la technologie nécessaires pour participer à cette alerte robe rouge. Il y a aussi les mesures de soutien et les ressources nécessaires pour assurer le bien-être mental et émotionnel des personnes qui ont été touchées par la violence et qui ont disparu.
Nous devons également examiner la question sous l'angle de la prévention. Nous devons veiller à ce que des mesures de soutien et des ressources soient en place pour empêcher les femmes, les filles et les personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones de disparaître.
Madame DeLaronde, vous avez mentionné l'aspect autochtone urbain. Je me demande si vous pourriez nous en dire un peu plus sur les divers défis, les diverses structures et les divers besoins qui pourraient exister pour les Autochtones vivant en milieu urbain.
Ce matin, je me suis levée et je me suis dit: « Hum, je me demande ce que ce serait de se lever et de ne pas avoir à s'inquiéter de la possibilité qu'un de nos proches ait disparu ou été assassiné? » C'est la réalité des mères et des grands-mères autochtones du pays. Personne d'autre n'a à vivre cette inquiétude.
Winnipeg est connue comme étant l'épicentre. Si je pouvais me lever le matin et savoir que c'est un pays et une ville sûrs pour ma fille et ma petite-fille, je serais la femme la plus heureuse qui soit. Nous savons qu'il y a des disparités entre les organisations politiques représentatives, que le financement est limité et que les personnes qui font le travail sur le terrain sont les membres des familles et les survivants, alors ils ont besoin de ressources adéquates.
Nous devons aussi les aider à surmonter leur traumatisme. Nous pouvons rester immobiles à la Chambre, mais cela ne sert en rien l'individu ou la collectivité. Lorsqu'une personne est assassinée dans notre collectivité, l'agresseur ne lui demande pas si elle est membre des Premières Nations, métisse ou inuite. Il sait seulement qu'il s'agit d'une femme autochtone vulnérable à qui il enlève la vie.
Je pense que nous devons prendre cette réalité en considération, comprendre que l'environnement urbain est différent, tenir compte des collectivités qui font déjà le travail et les aider à offrir un meilleur soutien et une meilleure accessibilité à nos familles.
J'ajouterais simplement qu'il y a de la place pour une approche fondée sur les distinctions dans le domaine de la prévention.
Je tiens à vous remercier, parce qu'il est facile d'oublier à quel point la situation est réelle — le deuil et le traumatisme que vous vivez tous — lorsque nous mettons en place un système. Je vous remercie de nous l'avoir rappelé.
Je remercie encore une fois les témoins d'être parmi nous aujourd'hui. Leurs témoignages sont extrêmement instructifs.
Madame DeLaronde, je vais revenir à votre mot d'ouverture. Vous avez parlé de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés des Nations unies et de conventions internationales. J'aimerais que vous nous en parliez davantage. On sait en effet que la façon dont le Canada essaie de faire une réconciliation et d'établir une relation de nation à nation entache le Canada sur la scène internationale.
J'aimerais donc que vous nous en disiez davantage sur les raisons pour lesquelles le respect de la Convention relative au statut des réfugiés des Nations unies et cette alerte robe rouge sont importants dans le contexte des conventions internationales.
Avez-vous entendu parler d'expériences semblables qui ont cours dans d'autres pays et qui pourraient nous être utiles?
Ce que je sais, c'est qu'il y a dans l'hémisphère sud un mouvement qui se tourne vers le Canada. Toutefois, à d'autres égards, ces pays ont plus d'avance que le Canada pour ce qui est d'offrir une protection fondée sur les droits aux femmes et aux filles autochtones.
Je ne pense pas que nous ayons entrepris au pays un processus d'inclusion qui reconnaisse les femmes autochtones comme des titulaires de droits. Cette reconnaissance a été confirmée dans le rapport final de l'enquête nationale, et nous devons continuer de l'appuyer. À quoi ressemblent ces droits pour les femmes autochtones et leur famille? Ce n'est certainement pas ce qui est présenté, car il n'y a pas eu de possibilité de discuter avec nous parce que nos voix ont été réduites au silence.
Il est vraiment important que l'on crée des occasions d'entendre le point de vue des femmes, des filles et des membres de la parenté ayant diverses identités de genre autochtones au sein du mouvement de la robe rouge, mais surtout dans notre façon de vivre dans la société civile.
L'une des choses que nous avons souvent oubliées ou égarées, c'est le fait que, en conséquence des politiques génocidaires du gouvernement, les femmes autochtones sont déplacées; elles sont des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays au sens de la Convention des Nations unies sur les réfugiés. À quoi cette situation ressemble‑t‑elle? Comment pouvons-nous régler ce problème à long terme?
Je voulais simplement souligner rapidement que, quand on regarde la situation, il s'agit en réalité de justice et de sécurité humaine. Nous devons vraiment mettre l'accent sur les principes de changement découlant de l'enquête nationale lorsque nous envisageons de nous concentrer sur l'égalité réelle et les droits de la personne et des Autochtones. Il faut que ce soit une approche de décolonisation. Les services globaux doivent être axés sur les forces et ancrés dans nos façons d'être, de savoir et de faire autochtones. Ils doivent être holistiques, ce qui nous aidera à nous renforcer en tant que femmes, filles et personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones, grâce à des facteurs de protection qui nous permettront de vivre nos vies dans la dignité et la sécurité.
De plus, les services globaux respectent également nos droits autochtones et nos droits de la personne parce qu'en tant que femmes, filles et personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones, à notre naissance, nous jouissons d'un ensemble de droits, mais, dès lors, comme nous sommes des femmes autochtones, nos droits ne sont pas respectés. C'est vraiment essentiel, surtout lorsque nous examinons l'appel à la justice 3.4, qui demande à tous les gouvernements de veiller à ce que les collectivités autochtones reçoivent immédiatement les ressources nécessaires, y compris le financement et le soutien destinés à l'établissement de services globaux durables, permanents, sans obstacles, préventifs, accessibles et holistiques.
De surcroît, je voulais rapidement souligner l'appel à la justice 3.1. Il demande à tous les gouvernements de veiller à ce que les droits à la santé et au bien-être des peuples autochtones soient reconnus et protégés de façon équitable.
Nous tenons également compte de l'importance de créer des moyens d'assurer la sécurité humaine. Si nous faisons cela, nous nous concentrerons vraiment sur ce à quoi ressembleront les mesures de soutien globales de notre point de vue et sur le fait de nous assurer que nous nous voyons dans ces mesures, que nous nous sentons connectés, que nous avons l'impression d'être à notre place et que ces mesures de soutiens répondent à nos besoins d'un point de vue culturel. Souvent, les mesures de soutien et les services qui sont offerts ne répondent pas à nos besoins, et, souvent, ils sont profondément ancrés dans le racisme systémique et structurel. Lorsque nous sommes vulnérables, nous recherchons la sécurité, mais nous continuons à subir de la violence en raison du racisme systémique et structurel.
J'aimerais commencer par remercier Mmes Anderson‑Pyrz et Ten Fingers, ainsi que Mmes DeLaronde et Lavallee en ligne. Merci beaucoup du témoignage que vous avez livré d'aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissantes.
Nous allons suspendre la séance pour permettre aux autres témoins de s'installer, puis nous allons commencer immédiatement. Merci aux dames, et nous reviendrons dans un instant.
Nous reprenons nos travaux, et je voudrais souhaiter la bienvenue à tout le monde. Si chaque personne pouvait prendre place, ce serait merveilleux.
Je ferai simplement un rappel aux dames qui font partie du groupe d'aujourd'hui au sujet des écouteurs. Lorsque vous ne parlez pas, assurez-vous de fermer votre microphone. Ce serait très utile. Merci beaucoup.
En outre, je suis certaine que vous savez au sujet de l'interprétation, mais ce que nous allons faire, c'est que j'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à deux témoins pour ce prochain groupe. Avant de commencer, je vais donner un avis, car tout le monde sait que nous tenons des votes aujourd'hui. La sonnerie retentira à 17 h 15. Nous tiendrons un vote à ce moment‑là, mais je crois que nous irons tous voter à 17 h 25, et je demanderai le consentement unanime à ce moment‑là.
Nous n'avons que deux témoins pour l'instant et, même si nous commençons en retard, tout finira par s'arranger.
Pour commencer, je voudrais souhaiter la bienvenue au Native Council of Prince Edward Island et à Lisa Cooper, qui en est la présidente et cheffe. Nous accueillons également Jessica Savoy, représentante nationale de la jeunesse du Congrès des peuples autochtones.
Je vais céder la parole à Lisa Cooper pour cinq minutes de témoignage.
Lorsque vous me verrez lever le bras, veuillez conclure votre déclaration.
Je veux reconnaître le territoire où je me trouve. Je viens de l'Île-du-Prince-Édouard, la patrie ancestrale de mes ancêtres, les Micmacs.
Bonjour, mesdames les membres du Comité permanent de la condition féminine. Je m'appelle Lisa Cooper, et je suis présidente et cheffe du Native Council of Prince Edward Island.
Mon organisation existe depuis 1975 et défend les droits des peuples autochtones hors réserve depuis près de 50 ans.
Tout récemment, il y a eu le cas d'une femme autochtone de l'Île-du-Prince-Édouard portée disparue et assassinée. Summer Kneebone a été portée disparue le 7 août 2023. Mon organisation s'est immédiatement mobilisée autour de la famille, et nous avons passé le mois suivant à travailler en étroite collaboration avec la police municipale, la GRC et des bénévoles pour trouver les restes de cette femme, qui ont été découverts le 15 septembre.
Dans ce cas‑là, mon organisation a rencontré de nombreux problèmes dans le cadre de ses efforts de recherche. La police municipale et les agents de la GRC ne savaient pas ce que signifiait l'acronyme FFADA. Ils n'ont pas communiqué entre eux pour coordonner les efforts de recherche de nos bénévoles, et l'Île-du-Prince-Édouard n'avait pas encore mis en œuvre de loi sur les personnes disparues qui autorisait la police ou la GRC à demander l'accès aux dossiers des médias sociaux de Mme Kneebone. Comme l'Île-du-Prince-Édouard est la plus petite province du Canada, les cas de FFADA ne sont pas aussi fréquents chez nous, mais les situations ont des répercussions incalculables sur les petites collectivités.
Mon organisation travaille en étroite collaboration avec son organisation sœur, le New Brunswick Aboriginal Peoples Council, pour appuyer son projet « Looking Out For Each Other », ce qui signifie en français « veiller les uns sur les autres ». Ce projet est une collaboration entre les provinces maritimes visant à signaler les cas de disparition d'Autochtones et à coordonner les efforts de recherche. Dans le cadre de ce projet, nous avons constaté qu'il arrive souvent qu'un Autochtone soit porté disparu dans une province des Maritimes et qu'on le retrouve dans une autre province. Ce projet a démontré, à petite échelle, le succès qui peut se produire lorsque les efforts de recherche sont coordonnés entre les provinces, les organisations et les services de police. L'alerte robe rouge qui est proposée par le gouvernement sera un prolongement naturel du travail qui se fait déjà dans les provinces maritimes et sera très bien accueillie par nos collectivités.
De 2017 à 2019, j'ai représenté le Congrès des peuples autochtones à la table du groupe de travail sur les FFADA, et j'ai contribué au plan d'action national sur les FFADA de 2021. Au cours des années qui ont suivi la publication de ce plan d'action, je n'ai pas vu beaucoup d'engagement de la part du gouvernement fédéral à l'égard des FFADA et des personnes bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queer, intersexuelles et asexuelles plus — ou 2ELGBTQIA+ — dans les communautés hors réserve.
Le plan national sur les FFADA fournissait une définition inclusive des mesures de soutien fondées sur les distinctions qui comprennent la représentation hors réserve, en milieu urbain et des personnes bispirituelles. Plus de 80 % des Autochtones du Canada vivent hors réserve, mais leurs voix sont souvent réduites au silence dans le cadre des consultations. Alors que nous poursuivons l'élaboration de l'alerte robe rouge, je demande au gouvernement fédéral d'adopter l'approche inclusive à l'égard des FFADA promise dans le plan d'action national et de veiller à ce que les voix des peuples autochtones hors réserve, représentées par le Congrès des peuples autochtones, soient entendues dans le cadre de cette élaboration.
Je vous remercie de votre temps, honorables députées. Wela'lin.
Bonsoir, mesdames les membres du Comité permanent de la condition féminine.
Je vous remercie infiniment de me donner l'occasion de témoigner sur cette question importante.
Je m'appelle Jessica Savoy. Je suis une fière Nisga'a qui est née et a grandi dans le magnifique territoire non cédé des Salish de la Côte de l'endroit que nous connaissons maintenant sous le nom de Vancouver. Je vous appelle depuis le territoire non cédé des Salish de la Côte.
J'aimerais dire brièvement que je suis vice-présidente du Northwest Indigenous Council et représentante nationale de la jeunesse au Congrès des peuples autochtones, ou CPA.
Je suis heureuse d'être avec vous pour défendre les intérêts de ma communauté, ainsi que ceux du Conseil national des jeunes du CPA, afin d'améliorer la vie de tous les peuples autochtones du Canada et de contribuer à cette amélioration.
Je tiens également à dire que, pendant la majeure partie de ma vie, j'ai travaillé avec des collectivités pour mettre en œuvre des politiques, pour m'engager à l'égard d'enjeux importants qui les touchent et pour travailler auprès de jeunes Autochtones et non Autochtones dans les quartiers de la ville de Vancouver, mais aussi partout au pays grâce à mon rôle de représentante du Congrès des peuples autochtones. J'ai travaillé avec des organismes sans but lucratif locaux et des administrations municipales à divers titres.
Je voudrais vous communiquer mon expérience et mon point de vue sur l'alerte robe rouge, ainsi que des réflexions de quelques jeunes du CPA sur sa mise en œuvre.
Nous savons qu'en mai 2023, la Chambre des communes a appuyé une motion qui considérait la crise des femmes, des filles et des personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones disparues et assassinées comme une urgence nationale et demandait le financement d'un système d'alerte pour informer le public lorsqu'un Autochtone est porté disparu.
En décembre, par l'entremise du groupe de travail sur les FFADA, le CPA a participé aux consultations sur l'alerte robe rouge avec la famille et le cercle des survivants. Ils ont choisi de faire appel au CPA et à d'autres organismes parce que le gouvernement fédéral ne mobilisait pas suffisamment de groupes. Il reste beaucoup de travail à faire, et celui‑ci exige les points de vue et les idées de tous les partenaires autochtones.
L'alerte robe rouge figurait également à l'ordre du jour de la réunion autochtone-fédérale-provinciale-territoriale tenue en février. Encore une fois, nous n'avons pas été pleinement inclus dans cette conversation. Je tiens toutefois à souligner que j'ai été invitée à la toute dernière minute à témoigner dans cette salle, à la réunion AFPT. Nous n'avons pas été pleinement inclus dans cette conversation, mais j'ai été témoin de certaines parties de cette mobilisation.
Compte tenu des antécédents de colonialisme et d'abus, du racisme anti-autochtone souvent signalé dans la prestation des services de police, de l'assassinat d'Autochtones par des agents de police pendant des vérifications de l'état de santé mentale et du fait que les forces de l'ordre rejettent les cas signalés de femmes, de filles et de personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones disparues et assassinées, l'établissement d'une alerte robe rouge sera difficile. Nous le savons. Les gouvernements ont la responsabilité de s'attaquer à ces problèmes, surtout dans les régions urbaines où le maintien de l'ordre est assuré par des services de police traditionnels.
L'appel à la justice 5.8 demande à tous les gouvernements « d'adopter des mesures législatives relatives aux personnes disparues ». Une recherche nationale préliminaire sur ces mesures législatives au Canada a fait ressortir d'énormes lacunes. Un grand nombre de provinces et de territoires n'ont pas adopté de loi sur les personnes disparues qui vise les FFADA, et le pays n'est actuellement pas doté de normes nationales pour enquêter sur les cas de femmes, de filles et de personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones disparues et assassinées. Si ces mesures ne sont pas en vigueur avant la mise en œuvre d'un système d'alerte robe rouge, le processus ne permettra pas de s'attaquer au racisme systémique et d'établir un lien de confiance.
Les organisations provinciales et territoriales du CPA ont déjà commencé ce travail. J'aimerais vous donner un exemple du Nouveau-Brunswick. Dans cette province, on a mis sur pied, en collaboration avec les bons intervenants, une ligne d'assistance nationale pour offrir du soutien aux familles autochtones lorsque des êtres chers disparaissent. Notre organisation affiliée, le New Brunswick Aboriginal Peoples Council, en partenariat avec la Gignoo Transition House, a créé la ligne 1-833-MMI-FIND, qui est destinée à aider les familles ayant besoin d'être orientées. Il s'agit d'une ligne d'assistance accessible 24 heures sur 24 qui offre du soutien. Elle fournit aux familles des renseignements et un service d'aiguillage pour qu'elles puissent s'y retrouver dans les divers systèmes lorsqu'un être cher est porté disparu.
Je veux vous dire que la ligne de soutien 1-833-MMI-FIND est un bon exemple de ce qui peut être accompli lorsque les communautés autochtones dirigent le travail. Un engagement équitable et respectueux est essentiel à la réussite de tout programme ou de toute politique que le gouvernement élabore, et l'élaboration conjointe est cruciale.
(1645)
Je vais m'en tenir à cela, mais j'aimerais ajouter que le modèle actuel, avec l'approche fondée sur les distinctions, ne fonctionne pas nécessairement, parce que les Autochtones hors réserve sont souvent exclus des processus de consultation.
Bonjour, mesdames. Je vous remercie d'être parmi nous cet après-midi.
Évidemment, il s'agit d'une étude extrêmement importante qui, je pense, pourrait aussi être très porteuse pour les femmes et les filles autochtones qui font face à des difficultés.
Nous cherchons à voir comment nous pourrions faire atterrir, de façon pertinente et efficiente, un système qu'on appelle « alerte robe rouge » pour qu'il n'y ait plus jamais de filles ou de femmes autochtones qui tombent dans des mains malveillantes, notamment, ou qui se retrouvent dans des situations impossibles et qui en perdent la vie.
Madame Cooper, comment voyez-vous ce système? Voyez-vous ce système sur une base nationale? Selon vous, qui devrait participer à cette organisation ou qui devrait y être engagé?
On a senti et on sent encore qu'on veut avoir les forces policières comme partenaires, mais on ne veut pas nécessairement les avoir comme gestionnaires de cette organisation. Je pense qu'il n'y a pas grand monde autour de la table qui s'interroge sur la pertinence de ce système. Je pense qu'on s'interroge sur la façon de l'organiser.
Quelles sont vos réflexions là-dessus? Comment pouvons-nous mettre sur pied ce système d'un point de vue pratico-pratique? Qui pourrait s'en occuper? Quel en serait le coût? Qui va le financer? Est-ce que ce système serait offert à la grandeur du pays? Qu'est-ce qu'on fait des endroits où il n'y a pas de réception cellulaire, par exemple, et ainsi de suite.
Je pense qu'il existe des modèles qui peuvent être utilisés. Si on regarde l'alerte Amber qui est utilisée pour les enfants disparus... Je pense qu'il existe des modèles. L'alerte Amber est pancanadienne. Je suis absolument convaincue qu'il est possible de créer un modèle de ce genre.
L'Île-du-Prince-Édouard est petite. Il n'y a pas souvent de meurtres et de disparitions ici, parce que les gens vont au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse. Ils se retrouvent dans les grandes villes et à Toronto. Je pense qu'il faut absolument qu'il y ait une alerte à l'échelle du Canada et qu'il existe des modèles qui peuvent être utilisés, comme l'alerte Amber, pour quelque chose de semblable à cette fin.
Le projet « Looking Out For Each Other », que nous avons mené en partenariat avec le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, repose sur une approche à trois provinces. Il y a ce numéro 1‑800 qu'on peut composer pour obtenir de l'aide dans trois provinces. Nous travaillons en étroite collaboration pour diffuser de l'information.
Rapide et grossière.
Des voix: Ha, ha!
Mme Lisa Cooper: Je suis désolée. J'ai dit que c'était une réponse rapide et grossière, parce que je sais qu'elle va m'interrompre. Elle a dit que ce serait un tour très rapide, alors j'essaie simplement de vous donner un exemple qui pourrait être utilisé.
Je vais arrêter la minuterie. Je regarde Mme Vien.
C'est seulement quelque chose comme ce que… je dirais que c'est simplement drôle et loufoque, madame Vien. C'est tout. C'est difficile à traduire de l'anglais.
Tout va bien. Je vais remettre la minuterie en marche, et nous pourrons reprendre.
Madame Cooper, j'étais très affairée à prendre des notes de ce que vous étiez en train de nous dire. Vous disiez qu'il faudrait suivre l'exemple de l'alerte Amber, n'est-ce pas?
Je n'ai pas compris pourquoi l'intervention de Mme Cooper a été arrêtée. Mme Cooper peut donc continuer son intervention, n'est-ce pas?
Madame Cooper, en matière de financement, d'une part, et de la participation de la police, d'autre part, vous avez dit qu'il y avait eu des problèmes d'interprétation et de communication avec la Gendarmerie royale du Canada et la police locale, que cela n'a pas été évident et qu'il y avait peut-être une méconnaissance de la culture autochtone.
Au-delà de cela, en matière de gestion de ce nouveau programme, les femmes nous disaient que ce système devait être géré par des communautés autochtones, et idéalement par des femmes. Partagez-vous ce point de vue?
Je pense qu'il est essentiel qu'il soit géré par les communautés. Il faut qu'il le soit par des Autochtones. Comme je l'ai mentionné dans mon discours, les policiers et les agents de la GRC ne savaient pas vraiment ce que « FFADA » signifiait, alors on a dû leur donner de nombreuses séances de formation sur les compétences interculturelles. Il s'agit de rallier la communauté. Nous avons réussi à le faire grâce aux médias sociaux, alors je pense qu'ils sont très efficaces en matière de sensibilisation. Plus de 200 personnes se sont présentées pour la recherche.
Je pense qu'il faut beaucoup de soutien formatif à cet égard. Toutefois, lorsque l'on se penche sur la question de savoir qui assumera la direction, à mon avis, il faut que le système soit géré par des Autochtones.
Madame Cooper, les communautés autochtones devraient-elles aussi choisir les critères servant à déterminer le moment où on décide de déclencher une alerte?
Absolument. Je ne peux pas parler au nom de tous. Notre communauté est très unie. Beaucoup de nos femmes sont à risque d'itinérance. Elles souffrent de problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Il s'est écoulé près de 10 jours avant que la famille ne remarque que leur enfant ne répondait pas. C'est ce qui nous a incités à lancer la recherche et à établir des liens avec la famille.
Depuis, nous avons mis en place un plan d'action pour rester en contact avec notre population vulnérable en ce qui a trait à l'itinérance, à la santé mentale, à la toxicomanie, à la pauvreté et aux personnes qui font partie du système d'aide à l'enfance. Il y a tellement d'éléments qui les mettent en danger, alors nous faisons beaucoup de choses maintenant avec la communauté. Comment veillons-nous les uns sur les autres et comment nous assurons-nous de faire des vérifications régulières auprès des populations les plus vulnérables?
J'étais prête, mais je crois que ma collègue Mme Vien a lu dans mes pensées, car je voulais parler de la même chose.
[Traduction]
Je pense que toutes les membres du Comité sont en faveur d'une alerte robe rouge. Ce n'est même pas une question. Nous sommes toutes en faveur d'un programme dirigé par des Autochtones et adapté à la culture. En réalité, ce que nous essayons de déterminer dans le cadre de cette étude, c'est à quoi ce système ressemblera et quelle est la meilleure prochaine étape pour l'aborder.
Comme l'a mentionné ma collègue Michelle Ferreri, plus tôt cette semaine, une témoin extraordinaire a mis sur pied son propre système d'alerte robe rouge dans sa collectivité, en Nouvelle-Écosse. Je ne me souviens pas du nom qu'elle lui a donné… c'était autre chose. Je crois qu'elle a réussi à amener 4 000 personnes à s'inscrire pour recevoir ces alertes. Elle gère tout cela elle-même, mais c'est très efficace parce que les gens qui reçoivent les alertes se sont tous inscrits. Ils sont tous engagés. Ils diffusent ces alertes sur leurs pages de médias sociaux, et ces publications ont une très grande portée. Cette femme a remporté un succès extraordinaire en aidant à trouver et à sauver des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQIA autochtones. Je pense que le taux de réussite était de 96 %.
Lisa Cooper, vous pourriez peut-être nous parler de ce modèle et nous dire s'il fonctionnerait à l'échelle du pays. L'autre modèle que nous avons est l'alerte Amber, par exemple. Il s'agit d'une plateforme nationale, mais elle est mise en œuvre et gérée par les provinces et les territoires, qui décident des paramètres quant au moment où l'alerte est déclenchée.
Peut-être pourriez-vous nous parler de ces différents modèles et nous dire comment, selon vous, l'alerte robe rouge fonctionnerait le mieux.
Nous n'avons pas vraiment créé de modèle avec notre plan d'action. C'était plus ou moins une leçon tirée de l'affaire Summer Kneebone.
Au cours de nos recherches, nous avons eu la chance de disposer de bénévoles qui étaient des alliés non autochtones et des membres de la collectivité d'où elle venait. Nous avons eu la chance de joindre un professeur du Nouveau-Brunswick ou de la Nouvelle-Écosse qui donnait un cours de droit, et il a fait participer ses étudiants en ligne. Pendant que nous menions la recherche, ses étudiants étaient en ligne, et ils ont pu suivre un véhicule semblable à celui de Mme Kneebone. Grâce à l'utilisation des médias sociaux et aux personnes qui se sont connectées par les médias sociaux dans la classe de ce professeur, nous avons pu retrouver ce véhicule. Il a été vendu tout récemment. Ce n'était pas le véhicule qu'on croyait.
Selon moi, c'est exactement à cela que ces gens pensent, c'est‑à‑dire qu'il ne faut pas dépendre que des communautés autochtones, qu'il faut aussi compter sur les Canadiens en général. Lorsqu'il y a un appel et un processus ou une plateforme commune de médias sociaux que l'on peut utiliser, vous seriez surpris de voir le nombre de personnes qui y accèdent, surtout la jeune génération, parce qu'elle est beaucoup plus intelligente que moi sur le plan technologique. Je n'utilise pas très souvent les médias sociaux. Le nombre de personnes que nous avions s'approchait des 400 ou 500 si on tenait compte des médias sociaux.
L'alerte Amber est un exemple que j'utilise, mais je pense que celle en question doit être gérée par des Autochtones, et je pense qu'elle doit l'être non seulement par des Autochtones, mais aussi par des non-Autochtones, parce que ce sont des alliés. Ils peuvent diffuser de l'information et partager les ressources dont ils disposent. C'est comme si on vous donnait 500 paires d'yeux. On peut presque retrouver quelqu'un avec 500 paires d'yeux, alors ils visent vraiment dans le mille. Je ne veux pas donner d'exemples parce que je pourrais les confondre. Ces gens ont tout à fait raison, et les médias sociaux sont la solution. Si vous utilisez une alerte Amber, il doit y avoir des liens entre les intervenants. Nous devons être en mesure d'établir des liens avec d'autres organisations de partout.
Il y a ici une personne de Terre-Neuve, une personne autochtone à risque. J'en connais une de l'Ontario. Dans le cas de Chantel Moore, elle ne venait pas du Nouveau-Brunswick, mais elle a été assassinée par un agent de police lors d'une vérification de l'état de santé. Je pense qu'il y a tant de répercussions partout au Canada que l'endroit d'où on vient n'a pas d'importance.
Vous soulevez un bon point. Souvent, lorsque des Autochtones sont enlevés, ils ne sont pas gardés au même endroit. Ils sont déplacés. Ils sont transférés dans une autre province ou une autre région du pays, alors il est logique que ce soit de portée nationale.
Concernant l'idée de l'alerte robe rouge de Jennifer Jesty en Nouvelle-Écosse, les gens s'y inscrivent. Voyez-vous cette alerte comme quelque chose que tout le monde reçoit sur son téléphone cellulaire ou quelque chose à quoi les gens s'inscrivent pour recevoir les alertes? Elle a amené beaucoup d'alliés non autochtones à inscrire, mais ce sont des gens qui ont dit: « Oui, je veux savoir, et je veux fournir mon aide quand quelqu'un disparaît. » Je pense que c'est une grande différence avec le système d'alerte Amber que nous avons actuellement. Seriez-vous en faveur d'un tel système?
L'autre chose au sujet du fait d'amener les gens à s'inscrire, c'est que, si les gens n'ont pas de téléphone cellulaire, on obtient leur ligne terrestre. On peut joindre les gens dans les régions éloignées d'autres façons, pas seulement en essayant d'envoyer des messages à des téléphones cellulaires. Vous pourriez peut-être y réfléchir.
À l'Île-du-Prince-Édouard, il n'y a pas beaucoup de traite de personnes à des fins sexuelles. Il y a plus des gens qui couchent chez des amis ou des connaissances et qui profitent de femmes sans abri. Cependant, la traite de personnes à des fins sexuelles existe, et les auteurs déplacent rapidement les victimes d'une province à une autre, alors je pense que, si on mettait en place un tel système...
Regardez le mouvement Idle No More et la rapidité avec laquelle il a commencé avec des jeunes, puis s'est étendu à tout le Canada, le mouvement dans son ensemble. Regardez combien de personnes y participent, et elles en parlent encore. Si on regarde Black Lives Matter, de nos jours, les plateformes de médias sociaux sont la bonne façon de faire si on tente de diffuser de l'information. Je ne pense pas qu'il serait difficile de mettre sur pied quelque chose qui permettrait aux gens de participer aux discussions et de faire une vérification rapide. Il y a peut-être quelqu'un qui est porté disparu à l'Île-du-Prince-Édouard. N'importe qui pourrait vouloir publier la photo de cette personne ou diffuser cette information.
Je pense qu'il faut aussi beaucoup de consultations et de discussions à ce sujet, parce qu'il y a des lois sur la protection de la vie privée auxquelles il faut faire attention, et qu'il faut éviter de porter atteinte à la vie privée d'une personne qui ne veut pas être retrouvée.
Je vais prendre mon temps, parce que je tiens à remercier les témoins, Mmes Jessica Savoy et Lisa Cooper, qui sont très intéressantes.
Je suis un peu choquée chaque fois que je prends la parole à propos de ce dossier. Je n'en reviens pas que nous en soyons à parler d'une alerte robe rouge en 2024. Je ne peux pas croire qu'autant de femmes et de filles autochtones sont victimes d'autant de violence. Cela me choque, mais je vais me ressaisir.
Je vais maintenant vous poser des questions, madame Savoy et madame Cooper. Je vous invite à répondre toutes les deux à la première. Pour que ce soit simple, disons que Mme Cooper pourra répondre la première.
J'aime bien me servir d'initiatives prises à l'étranger dans beaucoup de dossiers. Nous pouvons en tirer des leçons et cela peut nous servir pour faire nos rapports, ici, en comité.
Certains États américains ont déjà mis en place ce système d'alerte pour les femmes et les filles autochtones disparues, dont la Californie, le Colorado et l'État de Washington, et il y a différents critères pour le déclenchement d'une alerte. Par exemple, il y a le nombre de jours s'étant écoulés depuis la disparition d'une personne et la conviction que cette personne est en danger. Ma collègue Mme Vien a évoqué la question des critères, mais j'aimerais que vous reveniez là-dessus.
Avez-vous regardé comment les critères ont été établis ailleurs dans le monde? J'ai parlé des États‑Unis, mais, si vous connaissez des initiatives intéressantes d'autres pays, sentez-vous à l'aise d'en parler.
Il faudrait que je fasse des recherches à ce sujet.
En ce qui me concerne, à l'Île-du-Prince-Édouard — je ne peux parler que de mon expérience —, lorsqu'il y a une personne disparue, on lance une alerte. Nous la recevons tous sur nos téléphones et une alarme retentit. Le message dit qu'un jeune a disparu et nous demande de bien vouloir communiquer avec... Il n'est pas nécessaire que ce soit une personne assassinée. Il pourrait s'agir d'une personne portée disparue ou d'une personne d'intérêt. C'est un signal d'alarme que nous recevons sur nos téléphones.
Nous allons voir, et le message dit qu'on recherche telle personne et que nous pouvons aviser... Parfois, il peut s'agir d'une fugueuse dont on dit plus tard qu'elle a été retrouvée.
Lorsqu'on envisage quelque chose comme une alerte Amber ou une alerte robe rouge, le concept peut être le même, surtout lorsqu'il s'agit des personnes les plus vulnérables qui sont sans abri et qui vivent dans la rue ou qui sont logées temporairement chez des amis ou des connaissances. Ce sont les plus vulnérables. Si elles ne communiquent pas régulièrement avec leur famille... Il a fallu 10 jours avant que cette alerte ne soit déclenchée.
Nous sommes maintenant prêts à déclencher toute alerte ou tout autre signal d'alarme dans notre collectivité. En ce qui concerne les femmes autochtones qui sont sans abri et avec qui nous travaillons dans le village de tentes, si nous ne les voyons pas le lendemain ou deux ou trois jours plus tard — nous avons des équipes mobiles —, nous sonnons l'alerte au sein de notre organisation. Ensuite, nous commençons à travailler avec la police pour lancer cette alerte au niveau supérieur, c'est‑à‑dire la transmettre à l'échelle de la province.
Encore une fois, l'idée de parler aux organisations qui font le travail de première ligne est réaliste. Il n'y a pas de manque de respect. Il y a le modèle théorique. Je ne vous lirai pas le rapport sur les FFADA — j'ai passé trois ans à le rédiger — et les plans d'action sur les FFADA. Les modèles théoriques ne fonctionnent tout simplement pas dans la plupart des endroits. Chaque communauté doit élaborer un modèle qui fonctionne pour elle.
Quelle est l'incidence sur la collectivité? Quelle est la participation de la collectivité? Jusqu'où s'étend la portée de la collectivité?
À l'Île‑du‑Prince-Édouard, nous avons trois zones — les comtés de Prince, de Kings et de Queens —, alors nous pouvons atteindre toute l'île. Mon modèle est adapté à l'Île-du-Prince-Édouard, mais je pense que chaque communauté autochtone doit intégrer son propre modèle dans ce système. Selon moi, nous ne pouvons pas en faire une chose avec des cases à cocher. C'est essentiellement tiré de la communauté.
Je vous remercie de votre question. Je sais qu'une autre question a été posée, et j'aimerais ajouter à ce qui a déjà été dit.
Toutefois, en ce qui concerne les critères ou d'autres mesures de soutien qui pourraient être élargies, je veux simplement donner un exemple de ce qui a été fait pour s'attaquer au problème des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées en Colombie-Britannique. Dans le cadre de son engagement envers la vérité et la réconciliation, Rogers Communications a installé trois tours le long de la route 16.
On appelle cette route la « route des larmes » en raison du nombre élevé de femmes et de filles autochtones qui y sont portées disparues. Je veux seulement souligner cette initiative.
Par ailleurs, en ce qui concerne les autres mesures de soutien qui pourraient être élargies, il y a eu une conversation ou une question sur la façon de joindre les collectivités qui n'ont peut-être pas accès à des téléphones cellulaires ou à ce type de technologie. J'ai l'impression que nous devons vraiment examiner l'intersectionnalité des oppressions qui se chevauchent et qui ont une incidence sur nos communautés et, surtout, sur les femmes et les filles autochtones.
Je pense qu'il y a beaucoup de mesures de soutien qui peuvent être élargies, et ce dont nous avons vraiment besoin, ce sont des capacités humaines, technologiques et financières au sein de nos collectivités afin de régler les problèmes.
Ce sont les communautés non inscrites et hors réserve qui souffrent le plus de ces politiques coloniales. Je crois que, pour assurer le maintien de la sécurité de nos communautés, il faut que l'on prenne davantage de mesures à l'égard de l'avancement économique, social, culturel et politique au sein de celles‑ci afin de lutter contre la violence continue à laquelle sont exposées les femmes, les filles et les personnes bispirituelles et ayant diverses identités de genre autochtones.
Je remercie infiniment les témoins. Je suis très heureuse de vous accueillir.
Je voudrais poursuivre un peu dans la même veine.
Je sais, madame Cooper, que vous avez parlé des alertes, et l'une des questions portait sur la possibilité de s'y inscrire. Je sais qu'au cours des consultations, l'une des préoccupations soulevées concernait le fait que la violence faite aux femmes et aux filles autochtones est tellement normalisée. Nous savons que, dans les appels à la justice 9.1 à 9.11, en ce qui concerne les services de police dans la société, on craint qu'en rendant l'adhésion facultative, les gens choisissent de ne pas s'inscrire à grande échelle.
Que pensez-vous de cette analyse?
J'ai une deuxième question très brève à vous poser, parce que j'aimerais m'assurer d'avoir le temps d'entendre Mme Savoy également. Il semble que votre organisation soit gérée par les communautés. Je suppose qu'elle l'est aussi par des femmes. Pourquoi est‑ce important?
Je pense que les gens doivent avoir le choix. On ne peut pas forcer qui que ce soit à s'inscrire. On peut faire plein de choses afin d'expliquer pourquoi il est important de s'inscrire, on peut faire plein de promotion et de campagnes afin d'expliquer pourquoi il est important de s'inscrire, mais au bout du compte, on ne peut pas forcer les gens à le faire. C'est vraiment à eux de décider.
Pour ce qui est de la deuxième question, nous avons un certain nombre de programmes. J'ai plus de 60 employés et 30 programmes. Nous nous occupons donc non seulement des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées, mais aussi des hommes et des garçons autochtones disparus et assassinés. Nous utilisons le modèle Marcher dans ses mocassins du CPA pour travailler auprès des hommes, car si nous voulons assurer la sécurité de nos femmes, nous devons également veiller à ce que les hommes offrent du soutien aux femmes et aux groupes de femmes et défendent leurs droits. Nous voulons montrer à nos hommes comment être des hommes sains. Une grande partie de cela a été perdue à cause du colonialisme, car le rôle de pourvoyeur de nourriture de la famille et celui de femme chaleureuse et protectrice ont été changés par les pensionnats et la rafle des années 1960.
Nous envisageons maintenant de redéfinir le rôle de l'homme dans la famille, alors je pense qu'ils vont bien ensemble.
Notre programme pour les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées comporte un comité composé exclusivement de filles. Si nous tenons une séance, nous réunissons des FFADA avec des hommes et des garçons autochtones disparus et assassinés. Nous les regroupons à des fins de soutien. Notre plan d'action est élaboré directement par la communauté elle-même, de sorte qu'il s'adresse à notre communauté et apporte une contribution.
Le cas de Summer Kneebone nous a permis de comprendre ce qu'il fallait faire. Nous sommes encore aux prises avec cela, même si cela remonte à 2023, car le recours aux tribunaux exige encore du temps. Les familles veulent des réponses maintenant. Elles veulent comprendre maintenant, et elles sont en colère.
Madame Savoy, votre voix est très critique. De toute évidence, vous êtes une chef de file dans ce domaine, mais vous présentez aussi le point de vue des jeunes. Vous avez beaucoup parlé de violence systémique, surtout en ce qui a trait aux services de police. J'aimerais que vous nous en disiez davantage à ce sujet.
À quoi ressemblerait cette surveillance à l'avenir, compte tenu du système actuel et des rapports existants? Quelle est la solution?
En ce qui concerne les rapports entre les forces policières, le système de justice et les peuples autochtones… Bien souvent, dans diverses administrations, nous constatons que le budget des différents services de police augmente. Selon moi, ce qui est vraiment nécessaire, c'est d'offrir des services intégrés à nos familles. Nous devons être en mesure de combler les lacunes sociales et économiques liées à la lutte contre la violence continue faite aux femmes, aux filles et aux personnes bispirituelles autochtones.
À Winnipeg, ma ville d'origine, six décès impliquant la police sont survenus au cours des trois derniers mois. La santé mentale a joué un rôle dans quelques-uns de ces décès.
En ce qui concerne la prévention, car nous parlons bien sûr de l'alerte robe rouge… Nous ne voulons jamais devoir en diffuser une, car les gens devraient être en sécurité. À votre avis, s'il y avait davantage de services de soutien en santé mentale et davantage de lieux sûrs où les gens peuvent se rendre, est‑ce que cela contribuerait à atténuer certains des facteurs de vulnérabilité actuels?
La culture et l'accès à la culture sont des mesures préventives. Il faut plus de mesures préventives que de mesures réactives. Il est certain que nous avons besoin de plus de services de santé mentale.
Selon moi, c'est du berceau au tombeau. Nous avons besoin de ces services intégrés pour nos familles, du moment de la conception jusqu'à, espérons‑le, un dénouement heureux ou quoi que ce soit d'autre.
Oui, nous avons besoin de services intégrés pour nos familles — la situation est tellement désastreuse — avant une quelconque alerte robe rouge.
Je remercie les deux témoins. C'est de l'information très importante pour nous.
J'aimerais poser une question à Mme Savoy. Je m'intéresse au projet « Looking Out for Each Other ». C'est un projet extraordinaire qui mobilise la collectivité.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de la collaboration plus étroite entre la police autochtone et la GRC. Si je pose cette question, c'est que le comité de la condition féminine a fait une tournée l'an dernier, et l'une des choses que j'ai apprises — et que j'ignorais auparavant —, c'est que des enfants ou des femmes sont enlevés et transportés d'un bout à l'autre du pays avant qu'on s'en rende compte.
Pensez-vous qu'une collaboration aiderait à prévenir certaines de ces situations, madame Savoy?
Je pense avoir déjà mentionné que nos communautés se heurtent à des formes d'oppression intersectionnelles qui se chevauchent. Je crois qu'il faut un partenariat entre tous les secteurs — qu'il s'agisse de la justice, des soins de santé ou de la protection de l'enfance — et les peuples autochtones. Il doit être dirigé par les Autochtones, mais, bien sûr, étant donné que le gouvernement fédéral a une responsabilité fiduciaire à l'égard des Indiens inscrits, des Indiens non inscrits, des Métis et des Inuits, ce soutien sous-jacent doit exister.
Sans aucun doute, les différents secteurs, qu'il s'agisse de la justice ou d'autres, doivent travailler en collaboration avec les communautés autochtones.
Comment éduquer nos jeunes pour qu'ils soient au courant de ces situations? Comment éduquer les hommes pour qu'ils comprennent qu'ils doivent être plus respectueux envers les femmes? À vos yeux, quelles sont les lacunes à cet égard?
Quand je pense aux jeunes, je pense au système de protection de l'enfance. Il existe un lien entre les FFADA et le système de protection de l'enfance du Canada. De plus, comment nous y prendre pour autonomiser les jeunes? Il s'agit de prendre davantage de mesures préventives dans nos communautés. J'ai déjà mentionné qu'il doit y avoir plus de services de soutien dans nos communautés. Nous avons besoin de ressources humaines, technologiques et financières pour bien diriger et bien protéger nos communautés.
Pour répondre à votre question, il faut davantage de services adaptés à la culture et d'initiatives d'autonomisation des jeunes au sein des communautés afin d'habiliter nos enfants, nos jeunes et nos familles, et aussi nos hommes, de manière à ce que tous les hommes de l'ensemble de notre communauté et de notre société puissent mieux lutter contre la crise des disparitions et des assassinats de femmes, de filles, de personnes bispirituelles et de personnes de diverses identités de genre autochtones.
J'ai lu un livre intitulé Si je disparais — je ne sais pas si vous l'avez lu — de Brianna Jonnie. Elle ne se retient pas. Elle avait 14 ans lorsqu'elle l'a écrit. Elle admet que son père était toxicomane et agresseur. C'est la grande volonté de sa mère, qui a participé à son éducation pour qu'elle puisse faire… De toute évidence, elle a fait des choses incroyables.
J'ai toujours l'impression que, en tant que mères, peu importe que nous ayons des fils ou des filles — j'ai un fils et une fille —, nous avons la responsabilité d'être respectueuses pour que les femmes ne soient pas victimisées de nouveau par des hommes…
Je remercie tous les témoins de leurs témoignages éclairants et précieux.
Madame Gazan, je vous remercie de défendre cette cause.
Ma première question est la suivante. Nous savons que de nombreuses langues autochtones sont parlées au Canada. Un membre du dernier groupe de témoins de mardi, Mme Jesty, nous a expliqué que son modèle est unique en son genre puisqu'il permet aux chefs des Premières Nations de diffuser des alertes en utilisant leurs propres mots et leur propre langue, ce qui rend l'alerte plus accessible.
Pourriez-vous nous parler de l'importance de s'assurer que ces alertes sont accessibles dans les langues autochtones?
Madame Cooper, vous pouvez répondre à cette question.
Après cela, madame la présidente, ce sera le tour de M. Serré.
C'est assurément une bonne chose d'avoir sa propre langue autochtone. Malheureusement, je ne parle pas le micmac. Ma mère a perdu sa langue en tant que survivante des pensionnats, alors je n'ai pas eu la chance de l'apprendre. Si l'alerte était faite en micmac, je ne le saurais pas.
Beaucoup de gens vivant en milieu urbain ont perdu leur langue. Il y a beaucoup de communautés urbaines où plusieurs langues sont parlées. Je suis sur le territoire micmac, ma terre ancestrale. Ma mère est née et a grandi ici, tout comme moi, mais nous sommes aussi des citadins et nous offrons des services à des Cris, des Ojibwés, des Tlingits, des Algonquins, des Mohawks… Je pense que c'est formidable qu'une communauté autochtone habitant une réserve ait pu conserver ses langues, mais dans les centres urbains, il y a souvent plusieurs langues et plusieurs nations.
Je ne sais pas si ce serait une façon très efficace de procéder. Je ne dis pas que c'est impossible. S'il s'agit d'Inuits et que c'est diffusé à l'échelle nationale en langue inuite, puis en anglais et en français, ou quelque chose du genre… Cependant, je ne sais pas si je serais favorable à une diffusion en micmac, une langue que je n'ai malheureusement jamais pu parler et que ma mère a perdue à cause du pensionnat. Je pense que cela serait inadéquat à certains endroits.
Il y a des communautés inuites où la langue est couramment parlée, et j'adore cela. S'il s'agit de ces communautés, absolument. Cependant, si vous considérez les cas de disparition et d'assassinat partout au Canada, en combien de langues êtes-vous prêt à diffuser cela? Voilà ma question.
Évidemment, il s'agit d'une crise, d'une tragédie. C'est une vraie honte.
Je tiens à remercier Mme Gazan d'avoir suggéré cette étude au Comité. Selon moi, nous devrions tenir deux ou trois autres réunions, car nous avons besoin de plus de temps pour entendre les témoins. Lors de la précédente réunion, nous avons entendu parler des cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences. Selon moi, le Comité devrait inviter le représentant fédéral de cet organisme, ainsi que le président qui représente les 10 provinces et les trois territoires.
Plus tôt, Mme Cooper a parlé des modèles du système d'alerte. Le Québec, par exemple, a insisté pour avoir l'alerte SILVER, notamment pour retrouver les personnes atteintes de démence.
Pourquoi le fédéral ou une province ne pourraient-ils pas ajouter l'alerte robe rouge à son système national? Je ne comprends pas pourquoi cela n'a pas encore été fait.
[Traduction]
Madame Savoy, que diriez-vous à ce moment‑ci au Comité des cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences à l'échelle nationale? Pourquoi n'ont-ils pas inclus les femmes autochtones assassinées, qui ne font pas partie du système d'alerte? Pourquoi cela ne s'est‑il pas produit?
Je déteste faire cela, mais nous devons vous interrompre parce que nous avons très peu de temps. Si vous avez une réponse à cette question, nous vous serions très reconnaissants de nous la faire parvenir par écrit.
Je vais céder la parole à Andréanne Larouche pour deux minutes.
Encore une fois, je remercie Mmes Jessica Savoy et Lisa Cooper.
J'aimerais revenir à un aspect dont il a été question lors de la dernière réunion du Comité.
Mesdames, vous avez toutes deux abordé l'importance des réseaux sociaux pour réussir à aller chercher les gens dans le cas de disparition. Les réseaux sociaux, l'alerte robe rouge et les moyens traditionnels permettent de contacter des gens qu'on ne pourrait pas joindre par la technologie. Je pense par exemple à des initiatives comme celle que nous avons découverte l'an dernier quand nous nous sommes promenés dans les aéroports, durant la tournée du Comité permanent de la condition féminine concernant l'étude sur la traite des personnes. Je parle de la campagne de sensibilisation « Pas dans ma ville », menée dans les aéroports: des affiches de personnes et de femmes disparues sont affichées dans les aéroports.
Comment peut-on combiner les approches? Quelle est l'importance de combiner cela aux affiches traditionnelles, pour réussir à sauver le plus de personnes possible?
Je pense que nous pouvons étendre cela aux aéroports. Nous pourrions étendre cela aux arrêts d'autobus. J'ai vu de telles affiches dans des toilettes. Vous fermez la porte et il y a une photo. Je pense qu'il y a énormément de possibilités.
À certains endroits, grâce à la technologie — vous allez devoir m'excuser parce que je ne suis pas technophile —, on pourrait diffuser des vidéos sur un écran dans les aéroports, diffuser des photos pendant que les gens attendent de monter à bord d'un avion ou bien d'un autobus à un arrêt. Il y a maintenant tellement de possibilités de recourir au multimédia pour aider avec la grande quantité… Si on diffuse cela maintenant à l'échelle du Canada, de combien de femmes autochtones portées disparues ou assassinées par jour parle‑t‑on?
Je vais m'arrêter ici au cas où Mme Savoy voudrait parler de cela.
Je veux revenir à l'appel à la justice 2.4, où il est demandé « à tous les gouvernements d'offrir les ressources nécessaires et les fonds permanents requis » pour la préservation et la revitalisation des cultures et des langues autochtones. Comme vous le savez, nous avons perdu tant de choses à cause du colonialisme et des pensionnats.
Je m'en tiendrai à cela et à cet appel à la justice.
Vous avez parlé du système de protection de l'enfance. Il a été qualifié de pipeline pour les femmes et les filles autochtones assassinées ou disparues. Nous savons que beaucoup de personnes prises en charge par le système de protection de l'enfance n'entretiennent aucun lien de nature communautaire ou familiale, et qu'elles sont souvent assassinées ou portées disparues.
Compte tenu de cela, en quoi une alerte urbaine serait-elle différente d'une alerte rurale?
Je pense que nous pourrions nous servir de ce qui a déjà été fait relativement à l'alerte Amber. Je sais que Mme Cooper a dit quelque chose à propos du fait de demander aux gens s'ils sont intéressés à recevoir des alertes de ce genre, mais je pense qu'il est important de souligner que 80 % des Autochtones vivent hors réserve au pays. Bien souvent, les enfants qui ont été enlevés à leur famille se trouvent hors réserve. Il faut absolument qu'il y ait une mise en œuvre et des initiatives pour véritablement établir un lien entre les FFADA et le système de protection de l'enfance du Canada.
Je vais m'arrêter ici. Madame Cooper, je ne sais pas s'il reste du temps.
J'ajouterais rapidement que le gouvernement fédéral devrait songer à s'assurer qu'il y a de l'eau potable. Il n'a pas fait un très bon travail à ce chapitre. Il devrait veiller à ce qu'il y ait Internet partout, y compris dans les régions rurales, parce que c'est là que les gens sont à risque. Même s'il s'agit d'une sorte d'accès commuté, c'est au moins un début. Il faut que ce soit un investissement fédéral.