Bienvenue à la 31e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité reprend son étude sur la santé mentale des jeunes femmes et des filles.
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les députés participent en personne dans la salle et à distance à l'aide de l'application Zoom.
J'aimerais formuler quelques commentaires à l'intention des témoins et des députés.
Veuillez attendre que je vous reconnaisse par votre nom avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer et veuillez le mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas. En ce qui concerne le service d'interprétation, les participants sur Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Les participants qui sont dans la salle ont le choix entre le français, l'anglais ou le parquet dans leur écouteur.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Les députés qui sont dans la salle doivent lever la main lorsqu'ils souhaitent prendre la parole. Les participants sur Zoom doivent utiliser la fonction « Lever la main ». La greffière et moi-même gérerons l'ordre des interventions du mieux que nous pourrons, et nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
Bien entendu, il s'agit d'une étude très difficile et nous accueillons des témoins extraordinaires. Je tiens donc à vous rappeler que c'est un sujet difficile et que nous discuterons d'expériences liées à la santé mentale. Cela pourrait faire surgir des émotions difficiles chez des téléspectateurs, des membres du Comité ou des membres du personnel qui ont vécu des expériences similaires. Si vous êtes bouleversés ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer la greffière ou communiquez avec moi par l'entremise du Comité si vous le souhaitez.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. C'est merveilleux d'accueillir un groupe aussi extraordinaire ici aujourd'hui.
À l'écran, nous avons Carol Todd, fondatrice de l'Amanda Todd Legacy Society et la mère d'Amanda Todd.
À titre personnel, nous accueillons Mme Charmaine C. Williams, professeure et doyenne par intérim, Faculté de travail social Factor-Inwentash à l'Université de Toronto.
En personne, nous accueillons M. Emmanuel Akindele, cofondateur et directeur général de Blue Guardian.
Toujours en personne, nous accueillons Mme Timilehin Olagunju et Mme Tapo Chimbganda, fondatrice et directrice générale de Future Femme Noire.
Nous accueillons également Mme Sydney Levasseur-Puhach, coprésidente du conseil d'administration de Ka Ni Kanichihk inc.
Par vidéoconférence, nous accueillons Lydya Assayag, directrice du Réseau québécois d'action pour la santé des femmes.
Nous vous remercions beaucoup d'être ici aujourd'hui.
Chaque groupe aura cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire. Lorsque vous me verrez commencer à agiter les doigts — pour ceux d'entre vous qui sont à l'écran, vous verrez ces mains ici, en haut — veuillez amorcer votre conclusion si vous le pouvez, car vous aurez ensuite de 15 à 20 secondes pour conclure votre déclaration.
Je vais maintenant céder la parole à Carol Todd, fondatrice de l'Amanda Todd Legacy Society et mère d'Amanda Todd.
Vous avez cinq minutes pour une déclaration préliminaire.
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Chers membres du Comité permanent, je vous remercie de l'invitation à comparaître devant votre comité pour vous faire part de mes réflexions sur les problèmes de santé mentale qu'éprouvent les jeunes femmes et les filles, en portant une attention particulière aux préjudices en ligne et aux répercussions considérables qu'ils peuvent avoir sur l'estime de soi de cette population.
Je m'appelle Carol Todd. Je suis fondatrice de l'Amanda Todd Legacy Society. Je suis également éducatrice en Colombie-Britannique, mais je suis plus connue comme la mère d'Amanda Todd.
Amanda a été victime de comportements négatifs en ligne dirigés contre elle, ce qui a affecté sa santé mentale et son bien-être en général. Son histoire s'est imposée dans le monde entier dans le cadre de la lutte contre la cyberintimidation, l'extorsion sexuelle et l'exploitation en ligne.
Au cours des 30 dernières années, le milieu de la technologie n'a cessé d'évoluer à la vitesse de l'éclair. Au début, on utilisait surtout la technologie pour communiquer par courrier électronique. Les appareils technologiques et l'Internet ont donné naissance à un vaste éventail de comportements en ligne. Bien entendu, il y a de bons côtés, mais il y a aussi un côté plus sombre, où nous entendons et voyons des choses qui affectent la façon dont nous nous sentons envers nous-mêmes et envers les autres. Au XXIe siècle, l'Internet nous a permis de diffuser des récits, des images, des vidéos et bien d'autres choses encore, d'une manière souvent peu glorieuse et ciblée. Ma fille a été victime de ce soulèvement technologique.
Amanda est née le 27 novembre 1996. Elle n'avait que 15 ans lorsqu'elle s'est suicidée, le 10 octobre 2012. Dans une semaine, cela fera 10 ans qu'elle est décédée. En tant que mère, j'aurai toujours le chagrin d'avoir perdu ma fille dans ce monde où les préjudices et les mauvais comportements en ligne pourraient être évités.
Amanda a été victime de comportements cyberviolents de la part de ses pairs, d'humiliation en ligne, de victimisation et de cyberintimidation. Amanda a été victime du « syndrome du monde parfait » sur Internet. Elle a été exploitée en ligne par un prédateur international qui a été extradé au Canada et condamné par la Cour suprême de la Colombie-Britannique le 6 août 2022 pour harcèlement criminel, cyberprédation, extorsion et deux chefs d'accusation de pornographie juvénile. La peine de ce prédateur, M. Aydin Coban, doit être prononcée dans la semaine du 11 octobre 2022, soit le lendemain du 10e anniversaire de la mort d'Amanda.
La vie d'Amanda, de 12 à 15 ans, a été marquée par la cyberintimidation, l'exploitation en ligne, maintenant connue sous le nom d'extorsion sexuelle, et la maladie mentale. Les jeunes ont l'impression que leur vie dépend du monde technologique d'aujourd'hui. Tout comme l'oxygène, ils ne croient pas pouvoir exister sans ce monde.
Quand Amanda était une jeune adolescente, nous ne connaissions pas aussi bien qu'aujourd'hui ce qui peut exister sur Internet. Amanda et ses amis ont fini par communiquer des renseignements personnels à des inconnus et ils ont ainsi appris de première main le côté obscur d'Internet, qui est le terrain de jeu des prédateurs où des inconnus peuvent s'attaquer aux enfants dans les salons de clavardage et les sites de médias sociaux. Lorsqu'elle s'est retrouvée dans cette situation, Amanda a été bouleversée et s'est sentie mal à l'aise, ce qui a suscité la peur en elle et dans notre famille. Ses camarades se sont moqués d'elle et l'ont ridiculisée en personne et en ligne, au point que Amanda avait peur de quitter la maison. Elle s'est donc tournée vers Internet pour trouver du réconfort, où elle a plutôt été victime d'autres préjudices.
Lorsque Amanda n'était plus en ligne, des propos injurieux à son égard continuaient à circuler dans les médias sociaux. Comme on ne savait pas ce qui était dit et qui le disait, il était impossible de fournir le soutien nécessaire pour aider à faire face à ces situations. Il s'agissait également de jeunes que Amanda avait, à un certain moment, considérés comme étant des amis. Mon enfant, autrefois énergique et aventureuse, a commencé à s'isoler de plus en plus; elle se sentait triste et seule, et elle me disait qu'elle ne savait plus à qui faire confiance.
Dans le monde aujourd'hui, les jeunes filles et les femmes — ainsi que les garçons et les hommes — font face à des circonstances bien différentes d'il y a 30 ans lorsqu'il s'agit des comportements sexualisés et de l'accès facile aux renseignements personnels et intimes sur Internet. Ce partage excessif a créé le type de situations dont nous discutons aujourd'hui. Nous avons pris conscience que ce qui est arrivé à Amanda peut arriver à n'importe qui.
Comme l'a dit Amanda dans ses propres mots, « tout le monde a une histoire ». Lorsque ces histoires sortent au grand jour et qu'elles appartiennent à votre enfant, vos proches et vos petits-enfants, cela signifie parfois davantage. Personne n'est à l'abri de devenir une statistique.
En terminant, je tiens à vous remercier du temps et des efforts que vous avez consacrés à la création d'un espace pour aborder les préjudices auxquels les jeunes femmes et les filles font face au cours de leur vie. Au nom de nombreux Canadiens qui se soucient de notre pays, nous félicitons et remercions le gouvernement canadien d'avoir placé le bien-être émotionnel des jeunes filles et des femmes au premier plan des discussions. Nous espérons qu'un plus grand nombre de ressources et de stratégies pourront être mises en œuvre pour résoudre les situations auxquelles nous faisons face.
Les communautés du monde entier doivent continuer à travailler ensemble pour soutenir le travail qui est fait pour promouvoir et accroître la sensibilisation et l'éducation sur le bien-être mental et la sécurité en ligne.
Je suis reconnaissante de pouvoir utiliser ma voix pour raconter l'histoire d'Amanda et cette expérience de vie, afin de contribuer à tout changement qui pourrait être apporté. Tant de personnes restent silencieuses, soit par crainte, soit parce qu'elles ne peuvent plus parler pour être entendues. C'est par mon entremise et l'héritage que Amanda a laissé derrière elle que nous pouvons continuer à faire entendre ces voix silencieuses.
Nous devons travailler ensemble pour créer un espace plus sûr dans lequel les Canadiens pourront vivre.
Je vous remercie de m'avoir accordé du temps et de m'avoir écoutée.
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Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant votre comité.
Je vous parle aujourd'hui à titre de travailleuse sociale dans le système de soins de santé mentale et à titre de chercheuse en santé mentale, et je mettrai l'accent sur les questions qui touchent les femmes de couleur et les communautés LGBT+.
Je suis sûre que d'autres témoins parleront en détail des écarts en matière de santé entre les hommes et les femmes. J'ajouterai que, lorsque nous étudions ces écarts en matière de santé, nous devons également tenir compte des écarts plus extrêmes que vivent les personnes qui n'appartiennent à aucune de ces catégories. En effet, les personnes transgenres et les personnes de diverses identités de genre font face à de graves disparités en matière de santé mentale et à des obstacles importants lorsqu'il s'agit d'avoir accès à des soins efficaces en matière de santé mentale. Les questions qui les touchent sont souvent omises ou marginalisées dans les travaux qui se concentrent sur les femmes et les filles ou sur les personnes s'identifiant au spectre LGBT.
La question de savoir qui est omis, marginalisé ou réduit au silence lorsque le système tente de répondre aux besoins des populations est essentielle dans le cadre de la discussion d'aujourd'hui. Les stratégies de promotion de la santé mentale et de prévention des maladies mentales qui s'adressent aux jeunes femmes et aux filles à titre de groupe homogène ne permettent pas de comprendre et d'aborder les disparités en matière de santé. Même s'il est utile de tenter d'aborder les préoccupations communes, cela a inévitablement pour effet d'atténuer ou d'effacer des différences importantes qui ont des répercussions sur la santé mentale et sur le bien-être de ces personnes.
Le Canada a été l'un des premiers à comprendre que les déterminants sociaux représentent des facteurs essentiels lorsqu'il s'agit de la santé des populations. Nous savons que les femmes et les filles sont défavorisées ou plus précisément démunies dans des catégories comme le revenu, l'emploi, l'éducation et l'accès aux services de soins de santé. Cependant, nous savons également que les femmes noires, les femmes autochtones et les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres sont encore plus défavorisées et démunies. Par conséquent, il est essentiel d'agir sur les déterminants sociaux, mais il faut le faire de manière équitable.
Les stratégies que le gouvernement met en œuvre pour améliorer la santé mentale des femmes et des filles doivent comprendre des stratégies qui visent directement à réduire les écarts et les risques pour la santé auxquels sont exposées les femmes et les filles noires, les femmes et les filles autochtones, les femmes et les filles lesbiennes et bisexuelles, et les jeunes de diverses identités de genre. En outre, il est essentiel d'améliorer l'accès à des soins de santé opportuns, efficaces, axés sur les femmes et adaptés à la culture, afin de traiter efficacement les femmes et les filles qui appartiennent aux communautés de personnes autochtones, noires et de couleur et de les aider à se rétablir d'une maladie mentale.
De plus, ces stratégies doivent mettre l'accent sur le fait que les disparités en matière de santé auxquelles ces groupes font face sont liées à l'exposition au sexisme, à l'homophobie, à la transphobie et au racisme interpersonnels et institutionnels — des expositions qui sont souvent renforcées par des identités croisées qui exposent les gens à leurs effets combinés. Mes propres recherches ont démontré que les femmes et les personnes transgenres qui font également partie d'une minorité raciale, qui sont lesbiennes ou bisexuelles ou qui ont un faible revenu courent un risque accru de souffrir de dépression ou d'avoir des besoins non satisfaits en matière de soins de santé mentale. L'exposition à la discrimination est l'un des principaux facteurs qui les condamnent à ces mauvais résultats.
J'ai également observé, dans le cadre de plusieurs études, que l'exposition à la violence est un facteur déterminant de la santé mentale des femmes. Les femmes et les filles noires, autochtones ou LGBT+, ou qui ont une combinaison de ces identités, font état d'une exposition à la violence tout au long de leur vie, qui commence avec des traumatismes physiques, raciaux et sexuels durant l'enfance et se poursuit à l'âge adulte dans des conditions de logement, de travail et de migration dangereuses et dans des relations auxquelles elles ne peuvent échapper en toute sécurité.
Toutes les femmes et les filles sont exposées à des risques pour leur santé mentale dans des conditions sociales et institutionnelles qui ne les protègent pas de la violence. Nous qualifions certaines de ces femmes de personnes « à risque », mais nous devrions plutôt qualifier leur environnement de risqué et de non sécuritaire. Une stratégie globale visant à promouvoir la santé mentale et la sécurité des jeunes femmes et des filles nécessite une collaboration multisectorielle. C'est particulièrement nécessaire pour aborder des enjeux dans les communautés de personnes autochtones, noires et de couleur et dans les communautés de personnes LGBT+.
Je terminerai en soulignant l'importance d'élaborer des initiatives en collaboration avec des organismes communautaires de femmes, de personnes noires, d'Autochtones et de personnes LGBT+, afin de tirer parti de leur connaissance approfondie des questions pertinentes et de leurs liens avec les communautés, ce qui permettra de mettre au point des interventions plus efficaces.
Je formule cette recommandation avec deux mises en garde.
Premièrement, si l'on veut s'assurer que nos efforts au nom des femmes et des filles autochtones, noires et de couleur sont culturellement acceptables, il faut reconnaître que les femmes et les filles sont des filles, des mères, des sœurs, des tantes et des membres de la communauté dont les liens avec les autres font partie intégrante de leur santé mentale et de leur bien-être. Les stratégies qui les excluent de ces relations, qui représentent aussi des liens avec des soutiens sociaux et culturels favorisant la guérison et la santé, ne seront ni acceptables ni efficaces.
Ensuite, nous devrions savoir que, souvent, les organismes communautaires en quête de subventions mettent en œuvre des programmes innovants, mais que le financement temporaire limite les progrès et empêche la transition des programmes-pilotes vers des soins équitables et accessibles de santé mentale. La voie à suivre pour une santé mentale féminine plus durable consiste en des investissements soutenus, fondés sur l'existence d'organismes communautaires constituant les éléments durables de nos stratégies et réseaux de soins de santé mentale.
Je remercie le Comité de l'occasion de lui faire connaître mes idées et de lui proposer des stratégies.
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Merci, madame la présidente.
Je me nomme Emmanuel Akindele, le fondateur et président-directeur général de Blue Guardian, un système d'alerte rapide pour la santé mentale qui emploie l'intelligence artificielle pour déceler les problèmes de santé mentale chez les jeunes et mettre en rapport les familles avec d'importantes ressources pour y remédier.
Mon parcours avec Blue Guardian remonte à mes études secondaires, quand ont commencé mes problèmes de santé mentale, plus particulièrement l'anxiété. Je les ai étouffés en moi, sans demander d'aide. Malheureusement, je n'étais pas le seul à le faire. Je fais partie de la première génération à grandir au milieu d'un Internet omniprésent, qui amplifiait le ressenti des problèmes que mes compagnes et compagnons d'études éprouvaient, comme la dépression, une perception négative de son image corporelle, l'automutilation et, finalement, le suicide.
J'avais abandonné mes études, tout en étant conscient que ce n'était pas normal et qu'il fallait agir pour que la génération qui suivait soit mieux lotie. Après la recherche de solutions, j'ai fondé Blue Guardian, un logiciel de santé mentale fondée sur l'intelligence artificielle pour déceler les problèmes qu'éprouvent les jeunes. Il travaille un peu comme un outil d'autocorrection, mais dirigé vers la santé mentale.
Ensemble, un parent et un enfant téléchargent le logiciel sur le téléphone de l'enfant. Le texte que l'enfant saisit parvient à un modèle d'intelligence artificielle qui, plutôt que de déceler les fautes de grammaire, est à l'affût d'indices concernant la santé mentale. Aucune donnée textuelle n'est conservée, ce qui assure la protection complète des renseignements personnels de l'enfant. Notre mission est de collaborer avec les écoles de partout au Canada pour déceler les problèmes de santé mentale et mettre en rapport les familles avec des ressources pour y remédier.
C'est avec beaucoup d'optimisme que j'entrevois l'étude de la crise de santé mentale chez les jeunes, particulièrement les jeunes filles, par votre comité. Voilà pourquoi je suis persuadé que, grâce à la conviction de chacun de ses membres, nous approcherons de nos buts communs. Notre engagement est d'accroître l'accessibilité des ressources pour la santé mentale des jeunes, sans égard à leurs caractéristiques socio-économiques. Nous sommes déterminés à vaincre le problème de la maladie mentale et à promouvoir une culture qui permet aux jeunes de se dire qu'il est normal de ne pas se sentir bien, qu'il est normal de chercher de l'aide.
Heureux de venir discuter d'un sujet si important, je vous remercie de votre invitation à venir témoigner de mon parcours.
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Merci. Merci de votre invitation.
Chez les jeunes Canadiens, le taux de diversité est passé de 13 %, en 1996, à 27 %, en 2016, le nombre de jeunes filles noires de 15 à 19 ans ayant atteint 49 476. Les statistiques ne mettent pas en évidence les difficultés uniques en leur genre qu'éprouve cette population, mais il est légitime de prévoir qu'une tranche disproportionnée éprouvera des problèmes socio-économiques et des problèmes de santé, particulièrement à cause de la COVID‑19. Parmi les jeunes noirs immigrants et réfugiés, les filles et les jeunes femmes éprouvent plus de problèmes de santé que les garçons et les jeunes hommes. D'après les statistiques nationales, la population féminine de 12 à 19 ans est davantage frappée par la dépression et l'anxiété que la population masculine correspondante: 12 % contre 5 %.
Les stratégies de Future Femme Noire promeuvent le mieux-être en privilégiant les facteurs de protection tout en réduisant les facteurs de risque. Elles s'en prennent aux effets précis de la pandémie, particulièrement la menace de maladies mentales à long terme consécutives au traumatisme de la COVID. Notre clientèle est attirée par nos programmes et notre aide rapides, efficaces, sûrs et sensibles aux besoins.
Nous voyons bien la nécessité d'une démarche féministe. La santé mentale et le mieux-être des filles et des femmes noires sont disproportionnément menacés, du fait d'obstacles préexistants et d'inégalités systémiques révélées ou exacerbées par la pandémie. Nos thérapeutes ont déterminé que ces inégalités découlent souvent de diverses formes de discrimination et de marginalisation. Notre organisme soumet la conception et l'évaluation de notre programme au prisme des discriminations croisées. Nous considérons les diverses facettes de l'identité de cette population — par exemple, les normes, valeurs et attentes sociales genrées; la situation d'immigrantes et d'étrangères; la pauvreté, qui, malheureusement, colle beaucoup plus longtemps aux femmes noires qu'à ceux ou celles à qui on peut les comparer.
Sur le plan démographique, notre clientèle est moins susceptible de pouvoir s'offrir des soins de santé mentale. Quand ces femmes sont hospitalisées, souvent les fournisseurs de soins ne les croient pas, ne les prennent pas au sérieux, parfois même les punissent pour ne pas s'être pliées à leurs attentes stéréotypées, à la faveur du racisme anti‑Noir qui existe dans le réseau général de santé. Un point de vue axé sur les discriminations croisées met en relief l'importance d'examiner ces formes de discrimination en même temps qu'on en reconnaît les effets cumulatifs sur les individus. Voilà comment nous savons que pour beaucoup de ces personnes, aucun lieu sûr ne leur permet de rassembler leurs pensées, encore moins de les communiquer.
Il faut également une démarche fondée sur les valeurs culturelles de cette clientèle et sensible à ses besoins. Notre clientèle nous a confié que l'insensibilité des thérapeutes non noirs, la méfiance culturelle et des opinions susceptibles d'être négatives ont gâché son expérience des soins thérapeutiques. Selon un sondage récent de la Black Health Alliance, 35,4 % des Noirs canadiens ont révélé avoir éprouvé une forte détresse psychologique pendant la pandémie et, pourtant, 34,2 % n'ont jamais cherché à bénéficier de services de santé. En 2018, 60 % des Noirs canadiens étaient plus que disposés à utiliser ses services de santé mentale si le thérapeute était noir.
La sensibilité aux besoins culturels consiste, pour le fournisseur de soins de santé mentale, à pouvoir reconnaître et comprendre le rôle de la culture, tant chez le client et le clinicien et à adapter le traitement aux besoins du client, compte tenu de son cadre culturel. Voilà pourquoi il importe, pour les filles et les femmes noires, d'accéder à des services de santé mentale fondés sur les mêmes valeurs culturelles.
Il faut une sensibilisation plus grande. Nous enfonçons ce clou, mais on ne peut pas imputer l'insensibilité à ceux qui ne savent pas; c'est le résultat d'un système qui applique à la santé mentale une recette identique pour tous. Les stratégies pour la santé mentale doivent tenir compte de la diversité de nos collectivités et se diversifier pour devenir avantageuses et pour, effectivement, sensibiliser davantage. Des investissements dans une conception transculturelle de la promotion de la santé mentale contribueront à vaincre l'opprobre de la maladie mentale.
Notre organisme combat cet opprobre en offrant des services fournis par des femmes noires qui peuvent instinctivement nouer un rapport avec la cliente. Faute d'inclusion, on perpétue l'opprobre. L'opprobre est maintenu par un système de santé qui ne défraie pas les clients de la psychothérapie. Au Canada, la santé mentale est devenue un luxe qui, en fin de compte, coûte davantage que ce que nous pouvons nous permettre en souffrances humaines.
Merci.
Je me nomme Sidney Levasseur-Puhach. Je représente Ka Ni Kanichihk.
Je suis très reconnaissante de votre invitation à venir témoigner de l'action de notre organisation et à présenter certaines recommandations destinées au gouvernement.
Je me présente. Je suis une Anishinabée de la nation de Sandy Bay, ici, sur le territoire visé par le traité n° 1. Je pratique également la danse du soleil. Je viens de terminer ma deuxième année dans le pavillon. Je suis coprésidente du conseil d'administration de Ka Ni Kanichihk. Je prépare également ma maîtrise de psychologie clinique à l'Université du Manitoba. Je me consacre entièrement et sans relâche à la santé mentale, un domaine qui me passionne.
Un mot sur l'organisation. Ka Ni Kanichihk est un organisme sans but lucratif, dirigé par des Autochtones, qui offre des programmes et des services culturellement adaptés aux femmes, aux jeunes et aux familles autochtones de notre communauté. Nos services se focalisent sur la formation et l'emploi, le lien avec la culture et le cérémonial, la santé et la guérison.
Voyons rapidement de quoi il s'agit. Quelques‑uns de nos programmes se focalisent vraiment sur la restauration du mieux-être dans notre communauté. Nous avons notre programme d'assistance psychosociale de Medicine Bear. Nous travaillons avec des familles de femmes autochtones disparues et assassinées. Nous fournissons des services d'Aînés et des séances de thérapie ainsi qu'un lien cérémonial.
Notre programme de médecine du cœur est conçu pour les survivantes de la violence sexuelle et en milieu familial. Elles reçoivent également des services des Aînés, une assistance psychosociale et elles bénéficient d'un lien cérémonial.
La maison de Velma est un lieu sûr, ouvert en permanence au femmes du centre-ville en quête de répit, dans les situations de violence en milieu familial, et d'une occasion pour sortir des rues de Winnipeg.
Nous avons également le programme de santé sexuelle Mino Pimatisiwin. Nous offrons un service de dépistage des infections transmissibles sexuellement et par le sang ainsi que d'autres services concernant la santé sexuelle, sachant que les femmes autochtones sont davantage en sécurité et plus à l'aise quand elles sont traitées par d'autres femmes autochtones de la communauté. Les services de santé n'ont pas souvent répondu convenablement aux besoins de notre communauté.
Nous avons aussi le club Papillon, un programme destiné aux jeunes autochtones et aux jeunes bispirituelles, qui ont l'occasion de s'investir cérémoniellement. Cela privilégie vraiment la prévention. Nous aimons prendre contact tôt avec les jeunes pour atténuer le risque d'expériences négatives, très nombreuses dans les rues de la ville.
Comme je l'ai dit, nous faisons de la prévention et de l'intervention. Tout ce que nous faisons... D'après nous, la santé mentale est en relation avec chaque partie de nous-mêmes. Pour comprendre la santé mentale, nous devons également comprendre la santé physique et la santé spirituelle ainsi que la sécurité physique. Une condition importante en est que notre milieu doit directement répondre à nos besoins pour que nous soyons bien de quelque façon que ce soit. C'est rarement possible actuellement. Pour parvenir au mieux-être, nous avons besoin d'un accès convenable aux ressources et aux mesures d'assistance sociale.
Un autre élément essentiel est notre besoin de prendre en charge notre propre mieux-être de peuple autochtone. Les femmes autochtones savent qu'il faut mener une bonne vie. En ce qui concerne l'autodétermination, c'est un élément constitutif tellement indispensable d'une belle vie. Beaucoup de problèmes se sont manifestés de façon systémique, faute, pour nous, de maîtriser notre propre mieux-être et nos propres vies.
En fin de compte, ce n'est pas nous, les Autochtones, les femmes autochtones, qui sommes brisés, mais le système. Nous affrontons un problème de système inéquitable qui exige un financement convenable et durable de programmes dirigés par des Autochtones. Nous avons seulement besoin, en réalité, d'un appui pour exécuter ce qu'il faut pour nos communautés, nos programmes, l'accès aux communautés éloignées, recevoir les services nécessaires pour avancer et, collectivement, nous comporter en nations qui se sont prises en charge.
Je vous remercie de votre temps. J'ai hâte de répondre à vos questions.
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Je vous remercie de cette invitation.
Le Réseau québécois d'action pour la santé des femmes existe depuis plus de 30 ans. Notre réseau compte une centaine de membres partout sur le territoire. Ce dont je vous ferai part aujourd'hui est basé à la fois sur la réalité du terrain et sur des recherches indépendantes que nous menons sur la santé des femmes.
Je reprends à notre compte le propos de tous les témoins avant nous en matière d'intersectionnalité, de femmes marginalisées et de besoins, évidemment. Je vais vous parler surtout de la réalité du Québec et je vais insister sur ce que vous pouvez faire en ce qui a trait aux femmes.
Avant de commencer, j'aimerais établir quelques principes de base qui sous-tendent nos interventions. Le premier est que...
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Vous m'en voyez désolée.
J'allais dire que l'une des conditions préalables de notre prestation de services ou de notre étude de la santé des femmes, c'est la reconnaissance d'un substrat social à la santé.
[Français]
En santé, il y a vraiment un rapport social. Par exemple, on sait qu'il peut y avoir une différence de 11 ans entre l'espérance de vie des gens d'un quartier riche de Montréal et celle des gens d'un quartier pauvre de cette même ville. Indépendamment des différences individuelles, si on veut un effet sur la santé, il faut vraiment intervenir dans les déterminants sociaux.
Le deuxième élément que nous voulons mentionner avant d'aller plus avant, c'est que la santé mentale est indissociable de la santé physique ou de la santé spirituelle. C'est vraiment un tout. Je vous mets au défi de me donner un exemple d'une santé physique qui n'a pas un effet mental ou spirituel, ou vice-versa. Les recherches en neurologie des 40 dernières années et celles en physique quantique le prouvent amplement. Si vous voulez avoir un effet sur la santé mentale, il faut aussi intervenir dans des choses qui ont des répercussions physiques ou spirituelles.
Je vais parler surtout de détresse et d'anxiété ainsi que de leurs conséquences sur la santé des femmes.
Comme vous le savez, les deux déterminants majeurs pour la santé des femmes sont la violence et l'insécurité économique. Vous connaissez les statistiques aussi bien que moi, et nous sommes au courant des travaux du Comité sur la violence, alors je ne vous parlerai pas en détail de ce point. Je dirai néanmoins qu'il est impossible de travailler sur la santé mentale sans s'attaquer de front à ces deux modèles.
Au Québec, le système de santé et de services sociaux est malheureusement en déconfiture. Il est gangrené depuis plus de 40 ans et il est réduit à une peau de chagrin, ce qui fait que l'accès à des services est extrêmement difficile. Il y a des listes d'attente de plusieurs années pour des soins en santé mentale. Il y a des cas dramatiques comme celui d'Amélie Champagne, une jeune fille qui s'est suicidée récemment malgré de nombreux appels à l'aide et plusieurs tentatives, à cause du manque de services. Les cas se comptent par centaines. Comme vous le savez, la pandémie a exacerbé les inégalités sociales en santé entre les hommes et les femmes.
Dépendance à l'alcool et aux médicaments, malbouffe, toxicomanie, cyberviolence, difficulté de conciliation travail-famille, écoanxiété, sentiment que son avenir est bouché: voilà malheureusement le lot quotidien de nombreuses jeunes filles et jeunes femmes, sans compter, par-dessus le marché, qu'elles sont parfois marginalisées.
Nous voulons aussi insister sur un facteur physique qui semble très éloigné de la santé mentale, mais qui a un effet énorme sur celle-ci: il s'agit des perturbateurs endocriniens, qui sont des substances chimiques imitant l'action des œstrogènes et des hormones. Ces perturbateurs ont énormément de conséquences pour la santé des jeunes filles et des femmes, qu'il s'agisse de la puberté, de la fertilité, des cancers ovariens ou des étapes de la ménopause. Enfin, je pourrais vous en parler pendant des heures.
Il y a actuellement, à l'étape de la première lecture, un projet de loi visant à apporter à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement des modifications qui devraient être en vigueur depuis 50 ans. Nous vous demandons de vous assurer que cette loi comportera une analyse différenciée selon les sexes, puisque les effets de l'environnement sont terribles pour les femmes. Les perturbateurs endocriniens ont un effet direct sur leur santé mentale.
Pour ce qui est de nos recommandations, nous vous demandons d'agir sur trois plans.
Premièrement, il faut agir dans le domaine de la prévention. Autrement dit, il faut éliminer le plus possible la violence à la source. Cela, vous en êtes très conscients. Vous devez vraiment vous assurer que plus personne, au Canada et au Québec, ne vit de l'insécurité. Je pense notamment au logement, ou encore à une flexibilité pour le revenu minimum garanti. Je pense également à la réglementation des télécommunications, dans le cas de la cyberviolence. Il faut aussi offrir des programmes dans les écoles pour essayer de déceler le plus tôt possible ces divers problèmes et briser l'isolement des femmes.
Le deuxième axe d'intervention...
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Merci, madame la présidente. Je remercie tous les témoins, qui ont trouvé le temps de se libérer en ce lundi.
Il serait négligent de ma part de ne pas reconnaître, au début de cette étude, que nous sommes dans la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales. Les maladies mentales continuent de se répandre à une vitesse exponentielle, en n'épargnant personne, peu importe, semble‑t‑il, ses antécédents socio-économiques.
Madame Todd, commençons par vous, si vous permettez. Je tiens à vous remercier, visiblement de mère à mère. Je ne peux imaginer ce que vous avez vécu ni la force qu'il vous a fallu pour transformer en un effort de sensibilisation ce qui était arrivé à votre fille Amanda.
Voyons concrètement, si c'est possible, ce que le gouvernement fédéral doit désormais faire pour que ça ne se reproduise plus. Vous avez beaucoup parlé de peur. Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer que M. Akindele, de Blue Guardian, attend peut-être de nous livrer une réponse, plus tard, grâce à une technologie qui, peut-être, aurait aidé votre Amanda.
D'abord, d'après vous, qu'a‑t‑il manqué sur le plan éducatif, qui aurait pu vous aider, en votre qualité de parent, à reconnaître que les choses prenaient une tournure sombre et dangereuse?
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Je vous remercie pour votre question.
Il y a 12 ans, en 2009, lorsque la victimisation en ligne d'Amanda a commencé, nous n'étions pas très au courant de ce qui se passait dans Internet en tant que parents, éducateurs ou forces de l'ordre. Nous en avons appris beaucoup au cours des 12 dernières années. C'est sans doute en raison de ce qui est arrivé à Amanda, de son décès qui a été hautement médiatisé et de la vidéo qu'elle a publiée dans YouTube que nous continuons d'apprendre et de poser des questions. Ce sont ces questions qui mèneront à des résultats.
Ce n'est pas la première fois que je comparais devant un comité permanent. J'ai déjà comparu au sujet du projet de loi , qui portait sur la cyberintimidation et visait à protéger davantage les Canadiens en ligne. J'ai aussi témoigné à propos de la violence fondée sur le sexe, de la cyberviolence et, maintenant, je comparais au sujet de la santé mentale. Je vais me concentrer davantage sur les abus commis en ligne qui touchent les jeunes.
Je sais que votre étude porte sur les jeunes femmes et les filles, mais le problème touche l'ensemble des Canadiens. Malheureusement, des filles, des femmes, des jeunes hommes et des garçons sont victimes d'exploitation, causant des suicides partout au pays et ailleurs dans le monde. En tant qu'éducatrice, mon rôle au sein de mon district scolaire est de coordonner des séances de sensibilisation sur la sécurité en ligne destinées aux enseignants, aux étudiants et aux parents de ma collectivité. Je pense que nous devons envisager des mesures de prévention, afin de prévenir des traumatismes psychiques qui peuvent se produire à cause de comportements abusifs en ligne. Comme pour bien d'autres choses, nos enfants ne font que rouler les yeux. Par conséquent, nous devons continuer de parler aux étudiants et aux enfants. Nous devons veiller à mieux informer les adultes afin qu'ils soient davantage conscients de la cyberviolence et de la victimisation en ligne, de ce qui se passe dans Internet et de ce que voient nos enfants.
Nous devons également nous assurer de bien éduquer nos forces de l'ordre. Je suis d'avis qu'au début, de 2009 à 2011… J'ai assisté au procès pour Amanda, qui a duré neuf semaines, et j'étais déterminée, car je suis sa mère, à écouter ce que le jury entendait. L'une des lacunes que j'ai constatées concerne les mesures que les forces de l'ordre pourraient prendre pour s'assurer qu'un crime est pris au sérieux, à savoir veiller à ce qu'une enquête soit menée, que la victime ne soit pas blâmée, qu'on ne fasse pas sentir à ma fille qu'elle était responsable et qu'on ne fasse pas sentir à ses parents que c'était de leur faute. L'éducation et la formation destinées aux services de police et à la GRC contribuent grandement à faire en sorte que ces entités gèrent mieux les signalements et s'occupent mieux des dossiers.
Des fonds publics doivent également être accordés dans l'ensemble du pays, de sorte que les districts scolaires et les provinces n'aient pas à se débrouiller seuls. Si un programme d'éducation était mis à la disposition des enseignants — car ces personnes passent six heures par jour avec nos enfants pendant 285 jours d'école —, ils pourraient éduquer nos enfants afin qu'ils comprennent bien et qu'ils soient en mesure de déceler les situations problématiques et d'évaluer ce qu'ils voient. Nous devons également éduquer les professeurs afin qu'ils soient à l'aise de parler du sujet dans leur classe. J'ai connu de nombreux enseignants…
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Merci, madame la présidente.
Je veux remercier grandement tous les témoins de leur présence aujourd'hui et du travail engagé qu'ils font dans les communautés pour tous les Canadiens, mais surtout pour les jeunes femmes et les femmes marginalisées. Comme ils l'ont mentionné, c'est tellement important.
Madame Todd, j'ai déjà eu l'occasion, à deux reprises, de vous voir témoigner ici. J'ai moi-même trois filles, et je tiens à vous remercier du courage dont vous avez fait preuve au cours des 10 ou 12 dernières années. Je vous remercie beaucoup d'apporter des solutions également.
J'avais des questions semblables à celles de ma collègue, et vous avez déjà répondu à plusieurs d'entre elles. Cela dit, je veux remercier votre organisme, l'Amanda Todd Legacy Society, du travail qu'il fait en matière de sensibilisation et de lutte contre l'exploitation.
Ma question va s'adresser à Mme Williams et à Mme Chimbganda.
Des ententes bilatérales se négocient présentement entre le fédéral et les provinces. En 2017, une entente de 5 milliards de dollars sur 10 ans a été conclue, et 600 millions de dollars sont fournis présentement. Cependant, nous avons entendu dire clairement que, par le passé, certains besoins très particuliers n'ont pas été comblés dans une vision d'avenir.
[Traduction]
Ma question concerne les recommandations que vous feriez au Comité sur la négociation d'ententes bilatérales avec les provinces. En ce qui concerne les soins virtuels et les troubles de l'alimentation, d'autres témoins nous ont parlé des pénuries dans les domaines de la psychiatrie et des soins de première ligne. J'aimerais savoir ce que vous recommandez pour faire en sorte que nous ayons en place des pratiques optimales lorsque vient le temps de négocier avec les provinces pour passer à la prochaine étape dans la prestation des services.
Madame Williams, vous pouvez peut-être répondre en premier.
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Je vous remercie pour votre question.
Premièrement, comme je l'ai mentionné durant mon exposé, nous voulons profiter de ce qui existe au sein des communautés, c'est donc dire que nous devons nous concentrer sur les services locaux. Il faut trouver des moyens de financer les personnes dans les diverses collectivités qui connaissent le mieux les problèmes et qui ont la capacité d'intervenir.
J'insiste sur le fait qu'il est très important de financer les organismes communautaires existants, car ils jouissent d'une crédibilité au sein de la communauté et ils font souvent preuve d'innovation. Nous avons entendu parler aujourd'hui, notamment, d'interventions novatrices attribuables à une personne au sein de la communauté, une personne ayant une expérience vécue. Je pense que de nombreux organismes communautaires ont comblé le vide qui existe en raison d'un manque de soins de santé mentale accessibles et de services de promotion de la santé mentale. Nous voulons qu'on investisse dans ces organismes communautaires afin d'obtenir les meilleurs résultats possible.
Je vais céder la parole à l'autre témoin.
Je conviens avec Mme Williams, car je présume qu'on nous considère comme un organisme communautaire, qu'il est très difficile d'obtenir du financement. Il est souvent nécessaire, par exemple, d'avoir le statut d'organisme de bienfaisance pour avoir accès à des fonds, mais il faut parfois du temps pour obtenir ce statut.
Cela fait longtemps que je travaille dans le domaine des soins communautaires de santé mentale, et je sais que les personnes marginalisées et racisées doivent être dans un état de crise avancé pour voir un psychiatre. Habituellement, ces personnes cherchent à obtenir de l'information dans leur voisinage, dans leur collectivité. Elles cherchent à obtenir un soutien moins stigmatisant. Lorsqu'elles finissent par voir un psychiatre, leur situation dure déjà depuis beaucoup trop longtemps. Investir dans des organismes et des services de soutien communautaires contribuera à atténuer un certain nombre de crises.
Il est vrai qu'il y a une pénurie de psychiatres, alors il est bien d'accroître le financement en psychiatrie, mais la plupart des psychiatres ne peuvent pas passer plus de 15 minutes avec un patient. En tant que thérapeute, mes patients me disent souvent « On a discuté avec moi pendant quelques minutes, puis on m'a prescrit tout de suite des médicaments, mais je ne veux pas prendre de médicaments. » Il y a un écart entre ce qui est financé et la façon dont les gens reçoivent les services.
En outre, de nombreuses personnes ne comprennent pas la différence entre un psychiatre, un psychothérapeute et un médecin. Le système en soi sème la confusion. Les gens ne savent pas que pour voir un psychiatre, ils ont besoin d'une ordonnance, ce qui signifie qu'ils doivent d'abord voir leur médecin de famille. Bien des gens n'ont pas de médecin de famille en ce moment, et il est difficile d'en obtenir un.
Il y a donc de nombreuses embûches au sein du système lui-même.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être présents. Leurs témoignages nous donnent des frissons et nous rappellent l'importance de travailler sur ce dossier.
Madame Todd, je suis une nouvelle maman depuis presque huit mois. Or, je ne peux même plus m'imaginer la vie sans ma fille. Je vous offre donc mes plus sincères condoléances.
Par ailleurs, nous sommes au début de la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales. C'est une semaine qui nous amène à réfléchir à ce que cela apporte et crée autour de nous, de même qu'à l'importance de déstigmatiser tout cela et d'en parler davantage. Les témoins ont abordé cette question.
Dans ce comité, nous sommes aussi axés sur les solutions. Je vais poser ma première question à Mme Assayag.
Ce matin, à la radio, j'ai trouvé intéressant d'entendre qu'on ne peut pas s'employer à offrir plus de services en santé mentale si l'on ne parle pas de financement. Vous l'avez d'ailleurs précisé. J'ai également entendu dire qu'il y avait des projets au Québec, mais qu'ils étaient en attente en raison d'un manque de financement. Dans des pays qui fonctionnent selon des modèles différents, notamment en Australie, il est prouvé que, plus on investit dans la prévention ou dans le traitement des maladies mentales, plus on réussit à diminuer le nombre de personnes qui en souffrent. C'est mathématique.
Or, comment pouvons-nous parler de tout cela sans rappeler que la santé mentale demeure une compétence provinciale, en l'occurrence du Québec? Comme je l'ai dit, le Québec a des projets, mais ils sont en attente en raison d'un manque de financement. Voilà qui démontre l'importance d'investir dans notre système de santé. Qui plus est, comme vous l'avez dit, la pandémie a exacerbé les problèmes. Il faudrait donc investir davantage dans ce domaine. Toute la question des transferts en santé est cruciale.
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Je vous remercie de la question.
En effet, une de nos recommandations est de doubler les transferts en santé. Toutefois, il ne s'agit pas seulement d'argent; il faut aussi repenser le système de santé.
Dans son état actuel, le système de santé québécois est uniquement curatif. Moins de 2 % du budget de la santé, qui est pourtant conséquent, sont consacrés à la prévention, ce qui est complètement anormal. Il faudrait faire comme la Commission européenne, dont 34 % du budget en santé va à la prévention.
En somme, il faut changer de paradigme. Il ne s'agit pas seulement d'une question d'argent, mais aussi de fonctionnement. Il ne faut pas attendre la crise. Pour cela, il faut travailler dans les écoles, comme le disait Mme Todd. Il faut travailler aussi dans le milieu, parce que, souvent, les gens souffrant de problèmes de santé mentale sont isolés. Les personnes dans leur entourage peuvent également offrir une aide.
Je reprends aussi la recommandation des réseaux communautaires. Notre réseau regroupe une centaine de réseaux communautaires, et nous constatons au quotidien toute la débrouillardise et toute l'innovation déployées pour recevoir des gens désespérés, pour qui ces réseaux constituent le dernier recours. Malheureusement, ces réseaux sont sous-financés et trop peu nombreux. Il existe aussi tout un réseau de ressources communautaires alternatives en santé mentale, qui peuvent agir comme tampon avant qu'une crise survienne.
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Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais d'abord offrir mes condoléances à Carol Todd. Je vous remercie beaucoup pour le courage dont vous faites preuve en racontant l'histoire de votre fille. C'est très touchant, et c'est un beau cadeau que vous faites à tous, car cela nous permet d'en apprendre davantage afin que d'autres jeunes ne vivent pas la même expérience douloureuse et que d'autres parents ne vivent pas le même traumatisme.
Ma première question s'adresse à Mme Levasseur-Puhach.
Tout le monde sait, je crois, que je suis une fervente défenseure du refuge Velma's House dans Winnipeg-Centre. Durant votre exposé, vous avez souligné l'importance pour les femmes et les filles autochtones ainsi que pour les personnes de diverses identités de genre de prendre leurs soins en main. L'une des raisons pour lesquelles je suis une ardente défenseure de Velma's House, c'est qu'il s'agit d'un refuge sécuritaire à cadre peu restrictif. Nous savons, par exemple, qu'il y a un lien direct entre la toxicomanie et les problèmes de santé mentale.
Pouvez-vous nous parler de l'importance d'offrir des soins dans un cadre peu restrictif, particulièrement aux jeunes, dans les communautés, 24 heures par jour, sept jours sur sept, et nous dire pourquoi il s'agit d'une mesure qui sauve des vies?
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Je vous remercie beaucoup.
Ma question s'adresse aux représentantes de Future Femme Noire.
Vous avez expliqué durant votre exposé qu'il est très difficile pour les femmes et les filles noires d'avoir accès à des services de soutien en santé mentale. Vous avez notamment parlé du racisme systémique dans le système de santé. Vous avez souligné l'importance de la représentation, afin que ces personnes soient représentées dans les lieux de soins, et de l'importance de la culture.
Vous avez également parlé du racisme, et je sais qu'au Manitoba, particulièrement en ce qui concerne les Autochtones, nous avons été confrontés à d'importants problèmes de racisme au sein du système de santé, qui ont parfois entraîné des décès. Des personnes sont littéralement mortes dans des salles d'attente, alors qu'elles essayaient d'obtenir des soins. On minimise ces problèmes.
Pourriez-vous nous en dire davantage sur les mesures à prendre, selon vous, pour améliorer l'accès et mettre fin à la violence, au racisme systémique et à la stigmatisation dans les lieux où des services sont offerts aux personnes noires et autochtones?
Premièrement… Il faut d'abord entraîner le modèle. Il faut faire appel à des ingénieurs. Nous avons aussi recours à des jeunes pour l'annotation des données, c'est‑à‑dire des phrases comme, par exemple, « Je passe une mauvaise journée. » Les jeunes peuvent procéder à l'annotation des données, et des psychologues peuvent également examiner l'ensemble des données.
En ce qui a trait au stockage des données, lorsqu'on entraîne le modèle d'intelligence artificielle très efficacement afin qu'il décèle des indices liés à la santé mentale — un ton neutre, triste ou joyeux — il n'est pas nécessaire de stocker les données. C'est comme un correcteur automatique ou un logiciel de correction du type Grammarly. Ces programmes ne stockent pas tous vos courriels, tous vos messages. Essentiellement, le modèle effectue un filtrage pour obtenir un résultat. De notre côté, nous obtenons un résultat…
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie chacun et chacune d'entre vous d'être parmi nous aujourd'hui.
Comme je le disais à mon amoureux il y a 15 jours, il faut vraiment être solide pour écouter les nouvelles par les temps qui courent. En effet, elles peuvent être assez décourageantes. On entend parler d'histoires d'horreur. Vous avez mentionné un peu plus tôt aujourd'hui l'histoire horrible de Mme Champagne, qui s'est enlevé la vie en se lançant du 16e étage parce qu'elle n'arrivait pas à obtenir les services dont elle avait besoin, notamment des services psychiatriques. Il y a aussi tous ces féminicides, entre autres au Québec, dont on entend parler, sans compter les nouvelles qui nous proviennent de l'étranger. Enfin, il faut vraiment avoir le cœur bien accroché. Cela peut venir nous ébranler dans notre quotidien.
Madame Todd, je vous remercie de votre témoignage. Plusieurs d'entre nous ont des enfants. Nous sommes donc très touchés par ce que vous nous avez dit aujourd'hui.
Comme l'a dit Mme Larouche, nous sommes à la recherche de solutions, ici, aujourd'hui. Nous tentons vraiment de dégager des pistes de solution afin d'aider de plus en plus les gens qui vivent avec des problèmes de santé mentale.
Par ailleurs, il est encourageant de voir, dans le monde du sport et de la culture, par exemple, des gens parler ouvertement et publiquement de leur anxiété et des problèmes qu'ils vivent, en nommant bien les choses. Je considère qu'il y a quand même des choses assez positives qui se passent actuellement.
Monsieur Akindele, je vais vous donner l'occasion de nous donner quelques explications. J'aimerais savoir comment, dans le cas de la fille de Mme Todd, un service comme celui que vous offrez aurait pu prévenir une telle situation.
Je dois préciser ici que plusieurs d'entre nous ne suivent pas assidument les développements de la technologie, qui évolue de façon fulgurante. Je ne sais pas si c'est votre cas, mais, pour ma part, j'ai de la difficulté à suivre le rythme. Expliquez-nous comment votre logiciel aurait pu aider Mme Todd dans une situation comme celle-là, qui est absolument épouvantable.
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C'est une grande question, que l'on se pose depuis longtemps.
Je dois aussi dire que le 10 octobre est la Journée mondiale de la santé mentale, et c'est le jour où Amanda s'est enlevé la vie, sans en être consciente. La sensibilisation est donc très importante.
Les stratégies et conseils... À mon avis, c'est une question de prévention, car lorsqu'on parle des préjudices et des abus en ligne, on parle de déclencheurs qui mènent à la détresse psychologique. Certains cas de détresse psychologique peuvent évidemment être physiologiques, alors que d'autres peuvent survenir à cause d'un traumatisme, d'un stress post-traumatique, d'une victimisation. Sans l'aide nécessaire, cette détresse ne disparaît pas. Elle continue malheureusement de croître jusqu'à l'éclatement. Nous ne voulons pas en arriver là.
Des mesures préventives, des ressources pour la sensibilisation, un financement pour offrir des soins de santé adéquats... Nous parlons de psychiatres, de psychologues, d'intervenants. Personne, enfant ou adulte, devrait avoir à... Si la personne se tourne vers un fournisseur de soins de santé financé par la province — à titre d'exemple, en Colombie-Britannique, nous avons des équipes de santé mentale qui travaillent avec les jeunes de 24 ans et moins —, elle ne devrait pas se retrouver sur une liste d'attente pendant six mois. Lorsque l'attente est de six mois à un an, la prochaine étape est alors le privé.
Ce que je n'aime pas des psychiatres, c'est qu'ils veulent donner des médicaments, et ce n'est pas toujours nécessaire. Il existe d'autres moyens d'offrir aux jeunes un soutien — une aide spirituelle, des soins physiques. On s'adresse ensuite à un intervenant ou à un psychologue, et il faut évidemment de l'argent. Même si les parents ont les meilleurs avantages sociaux au monde, les soins continus ne sont pas couverts. C'est d'ailleurs ce que m'ont dit de nombreux parents qui ont communiqué avec moi. Je suis déterminée à appuyer ces efforts grâce à l'Amanda Todd Legacy Society. C'est ainsi qu'on améliore les choses.
Le financement est très important. Les provinces doivent ajouter les psychothérapeutes, les psychologues et les intervenants à leurs régimes d'assurance-maladie pour que les gens puissent les consulter.
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Merci de poser la question.
Je suis reconnaissante d'avoir l'occasion de dire... Je pense que la technologie de Blue Guardian est très intéressante. C'est essentiellement un système d'alerte, ce que nous n'avions pas, et une fenêtre sur l'expérience des jeunes que nous n'avions pas avant, et il serait très intéressant de l'avoir, mais nous avons encore besoin de parents, d'enseignants et d'autres membres de la communauté qui sont prêts à intervenir. C'est en partie une question de sensibilisation du public, de connaissances en santé mentale et de promotion adaptée aux collectivités, et il faut aussi que cela s'accompagne de services accessibles et acceptables pour ces différents groupes.
Je pense que le gouvernement fédéral peut innover comme les gouvernements provinciaux ne peuvent pas le faire, ou n'ont pas pu le faire, car je crois que sa réflexion peut avoir lieu à l'extérieur des vases clos actuels des services communautaires, des services à la famille et des services de santé afin de créer quelque chose de différent. Je pense que cela pourrait être intéressant. Nous pourrions réfléchir à cela en regardant ce que nous offrons actuellement aux gens: que mettons-nous à la disposition des camarades de ces jeunes femmes et de ces filles? Que mettons-nous à la disposition des membres de la famille et d'adultes de confiance dans l'entourage de ces femmes et de ces filles? Quels sont les services offerts?
Certaines personnes ont parlé des psychiatres et des limites des outils qu'ils utilisent. Nous devons réfléchir plus longuement au type de fournisseurs de services que nous avons dans le système. Je reviens à ce que j'ai dit: il ne suffit pas de financer un projet ici et là, car il faut aussi penser à un système de santé qui comprend des guérisseurs, des psychothérapeutes et d'autres types de praticiens qui pourraient vraiment aider à promouvoir la santé mentale.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vais continuer de m'entretenir avec vous, madame Assayag.
Comme Mme Vien l'a évoqué, nous avons vu récemment au Québec des cas comme celui d'Amélie Champagne. Tout comme ma collègue, j'offre mes condoléances aux proches d'Amélie Champagne. Vous avez également mentionné ce cas, madame Assayag. Évidemment, son histoire a ranimé le débat sur les soins de santé mentale.
Cependant, comme Mme Vien l'a dit, nous sommes bien contents de voir des personnalités publiques parler davantage de leurs problèmes de santé mentale, comme Carey Price, Simone Biles, Naomi Osaka et Geneviève Jeanson, qui est sortie de l'ombre récemment. Nous voyons également des personnalités publiques parler des répercussions du fait d'être le proche aidant de quelqu'un souffrant de problèmes de santé mentale.
Sur votre site Web, il est question du travail invisible, qui comprend justement la question des proches aidants. Il est écrit que les femmes assument encore au moins les deux tiers des tâches domestiques et qu'elles prennent en charge les soins des enfants deux fois plus que leur conjoint. J'ajouterais à cela que le rôle de proche aidant revient beaucoup aux femmes.
Pouvez-vous nous proposer une piste de solution pour mieux reconnaître ce travail invisible? Par exemple, pourrait-on mettre en place une journée de reconnaissance ou d'autres mesures semblables?
Ces gens offrent de l'aide directe à leurs proches et, souvent, ils souffrent eux-mêmes beaucoup de cette charge mentale.
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Je vous remercie de la question.
En effet, le rôle de proche aidante est central dans la vie des femmes. En tant que mères, naturellement, nous prenons soin de nos enfants, mais cette tendance à prendre soin des gens qui en ont besoin est généralisée. Des études montrent que des personnes proches aidantes décèdent avant la personne qu'elles aident, tellement elles s'usent au travail. C'est pour vous dire tout ce que cela peut générer.
Malheureusement, le système de santé ne considère pas que la personne proche aidante fait partie du plan d'intervention ou du dossier. Plusieurs suggèrent que, lorsqu'une personne est prise en charge, la personne qui est sa proche aidante soit aussi prise en charge.
Une autre suggestion populaire est de reconnaître officiellement ce travail dans la loi. Au Québec, il y a une loi sur les personnes proches aidantes, mais elle n'a pas encore été appliquée dans le système.
De plus, il est important d'offrir des services de répit. Souvent, ce n'est pas une question financière, même si cela a des conséquences financières; c'est que ces gens n'ont pas de répit. Ils sont présents 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et ils s'usent, comme n'importe quel autre être humain. Comme ils le font souvent par amour, ils ne réalisent pas les répercussions sur eux. Il faut vraiment des services de répit pour les personnes proches aidantes, ainsi qu'une analyse différenciée selon les sexes.
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Merci, madame la présidente.
Merci, monsieur Akindele. Il y a beaucoup de monde dans la pièce, et ce qui sera le plus difficile pour vous, ce sera probablement de trouver comment expliquer cette technologie, ce qui est paradoxal, à un groupe démographique, surtout des parents, au moment où ils évoluent dans ce système.
C'est la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales, et j'ai déjà téléchargé votre application pendant la réunion. Dans votre application, sous Blue Guardian, il est écrit qu'on s'attend à ce que les problèmes de santé mentale non traités soient la principale cause de mortalité et de morbidité à l'échelle mondiale d'ici 2030. Je suis entièrement d'accord, en tant que mère, et je crois que nous ne faisons que commencer à voir les répercussions de la pandémie. Je pense que nous les verrons pendant de nombreuses années.
Vous avez dit que les parents doivent être proactifs plutôt que réactifs. La première chose que je demanderais, et je pense qu'on a abordé la question, c'est si vous avez des données sur l'efficacité de l'application.
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Nous n'en sommes encore qu'aux premières étapes, et l'échantillonnage est encore trop petit pour que j'aie quelque chose à vous présenter. Ce que j'ai surtout, c'est le témoignage de parents qui ont pu s'en servir.
J'aimerais vous raconter une histoire en particulier. Je me suis promené dans mon quartier pendant la Journée mondiale de la santé mentale, et je me suis adressé au père d'une fille de 17 ans, qui avait déjà des troubles de santé mentale diagnostiqués, et il était donc dans une position qui... Il se demandait comment il pouvait laisser sa fille aller à l'université en étant conscient de ses nombreuses difficultés. Il se sentait désemparé. Je lui ai présenté une solution et une idée.
Nous n'en sommes encore qu'aux premières étapes. Nous sommes loin de ce que l'application peut faire, pour ce qui est des observations relatives aux émotions, mais il a dit qu'elle lui a permis de réduire grandement son niveau de stress, car, idéalement, si elle quitte son foyer, mais qu'il peut encore surveiller son état et discuter si quelque chose ne va pas, c'est beaucoup moins stressant pour lui.
Dans le domaine de la santé mentale — et pour revenir à ce que Mme Todd a dit sur la prévention —, je pense que votre application, Blue Guardian, peut être un élément essentiel au chapitre de la prévention, car lorsque nous avons un langage et que nous pouvons cerner un sentiment ou une émotion, nous pouvons ensuite passer à l'autre étape. La moitié du problème, c'est que les parents ne parlent pas la même langue que les enfants, ce qui est un obstacle majeur. Ils ne peuvent donc pas communiquer.
L'autre aspect important serait la résilience et la détermination. Ce sont les éléments clés que nous devons enseigner à nos enfants. Compte tenu des médias sociaux, ces problèmes ne vont jamais disparaître. Comment alors pouvons-nous inculquer la résilience et la détermination? Il serait formidable qu'un autre niveau de Blue Guardian enseigne ces choses: c'est comme cela que tu te sens, alors comment pouvons-nous maintenant inculquer la résilience et la détermination, et comment pouvons-nous gérer ces sentiments?
Lorsque nous parlons de ce que Mme Todd a dit, de la prévention, il faut aussi parler des premiers soins en santé mentale. Je pense que ce devrait être un élément clé dans tout cela.
Une partie de la résistance pourrait provenir de personnes qui ne pensent pas que nous pouvons nous fier à des applications pour recueillir des données, et Mme Gazan a d'ailleurs abordé la question. L'application lit-elle les expressions faciales? Nous savons que c'est un des meilleurs moyens d'évaluer une réponse émotionnelle, la joie, la tristesse et ainsi de suite.
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Tout à fait, c'était moi. J'en assume la responsabilité.
Je tiens à souligner que le gouvernement a essayé de régler une grande partie de ces problèmes. Il a des appels de financement, des appels de propositions, et des organismes communautaires s'en servent pour créer des programmes. Ils passent parfois d'une possibilité de financement à une autre. Dans mes discussions avec les organismes communautaires, nous parlons sans aucun doute, entre autres choses, des organisations noires, des organisations autochtones et des organisations qui se consacrent aux gens de couleur dans ce domaine. Elles enchaînent les projets et les propositions pendant que le système est mis sur pied ailleurs.
Comment pouvons-nous offrir ces solutions novatrices, ces interventions qui fonctionnent dans les communautés, et en faire un élément permanent de notre système de soins de santé mentale? Je me demande s'il faut redistribuer les ressources, supprimer le financement à certains endroits pour plutôt financer ce qui aide vraiment les communautés que nous essayons d'aider, et penser dans une optique d'équité. Il faut tendre la main aux communautés qui en ont le plus besoin. Nous devons penser différemment à nos ressources. Faut‑il redistribuer des ressources de santé publique, puisqu'il y a un problème de santé dans la population et un problème de promotion de la santé? C'est ce que j'avais à dire. Je pense qu'il y a actuellement beaucoup d'innovation et de travail fascinant au sein des organisations communautaires.
Nous pourrions également réfléchir à des changements durables dans le système de soins de santé mentale en créant un effectif qui peut offrir ces services au sein des communautés. Je suppose qu'il faudrait pour cela des bourses afin que les gens acquièrent les compétences nécessaires, mais aussi une reconnaissance d'autres types de prestation de soins qui se rapportent à la santé mentale des jeunes femmes et des filles.
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Merci beaucoup pour la question.
Moi qui suis une immigrante d'origine nigériane, je trouve très important que la santé mentale des immigrants devienne une priorité, car les immigrants vivent de nombreuses épreuves, liées tant au processus d'immigration qu'aux traumatismes subis dans le pays d'origine. D'après moi, ce dossier mérite de l'attention.
Un autre dossier qui mérite de l'attention... Il a été question de la barrière linguistique entre les parents et leurs enfants. À mon avis, les parents devraient commencer à apprendre à... Dès la première fois que leur enfant leur parle de ses difficultés, ils devraient l'écouter très sérieusement. Selon moi, il faudrait leur apprendre que si leur enfant leur dit quelque chose, c'est parce que c'est la vérité. Il y a une raison pour laquelle leur enfant s'adresse à eux; ils doivent l'écouter avec attention. Il en va de même pour les enseignants et pour tout membre de la communauté. Si je m'adresse à toi, s'il te plaît, prends ce que je te dis au sérieux.
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Certainement. Nous soutenons le plus de gens possible. Nos services sont ouverts à toutes et à tous, non seulement à la population de Winnipeg, mais aussi aux résidants des réserves du Manitoba qui viennent en ville.
La protection de la jeunesse est un de nos secteurs prioritaires. Nous cherchons particulièrement à protéger les jeunes Autochtones vulnérables contre les dangers comme ceux posés par les prédateurs, les gangs et l'exploitation sexuelle. Nous essayons de les accueillir à bras ouverts dès leur première visite, qu'ils soient en ville pour poursuivre leurs études ou pour participer à un autre programme. Nous tâchons aussi de faire en sorte qu'ils aient un lieu sûr où vivre, où apprendre et où se bâtir un réseau de soins et de sécurité. C'est capital. Voilà pour nos activités de prévention.
En ce qui concerne l'intervention, nous essayons de nous adapter aux besoins de la communauté, que ce soit en créant un lieu sûr pour les femmes, en affrontant la crise des meurtres de femmes autochtones à Winnipeg et en soutenant les familles touchées, ou encore en venant en aide aux femmes victimes de violence sexuelle ou familiale. De plus, nous fournissons un espace de cérémonie en milieu urbain aux Autochtones, un endroit où nous pouvons nous rassembler pour entreprendre un processus de guérison traditionnel et collectif, et...
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Merci, madame la présidente.
Madame Assayag, pour compléter ce que nous disions au sujet des proches aidants, je tiens à souligner le travail d'un homme de ma circonscription, Jean‑Philippe Dion, qui est porte-parole de l'organisme Avant de craquer. Il a beaucoup parlé de ce qu'il a fait en tant que proche aidant auprès de sa mère, qui avait des problèmes de santé mentale. Je le salue.
Vous avez également ouvert la voie quant à la question de la reconnaissance du travail invisible, alors j'aimerais revenir sur cela. Je tiens à rappeler qu'en 2010, une de mes prédécesseurs au Bloc québécois, Nicole Demers, a déposé une motion visant la création de la Journée du travail invisible, pendant laquelle on pourrait réfléchir à tout cela. Malheureusement, ce dossier n'a pas avancé depuis 2010. J'espère que les élus entameront un jour une réflexion sur l'importance de mieux reconnaître ceux et celles qui font du travail invisible.
J'aimerais aussi entendre vos commentaires sur l'ACS+, c'est-à-dire l'analyse comparative entre les sexes plus, qui ne se fait pas partout ni de manière suffisante. Cela devrait se faire davantage à Ottawa. J'aimerais que vous nous disiez quelle importance cela pourrait avoir sur la question de la santé mentale. Vous avez abordé cette question, mais, si vous voulez ajouter quelques mots sur l'importance de l'ACS+, je vous invite à le faire.
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Je vous remercie de la question.
En effet, l'ACS+ est d'une importance capitale, parce que c'est la lunette qui nous permet de voir les effets que les programmes ont sur les hommes, les femmes, les jeunes, les personnes plus âgées, les personnes racisées, etc. Sans cette lunette, on a l'impression que ce sont des groupes homogènes. On est de bonne foi et on met des programmes en place en pensant que cela aidera tout le monde, mais ce n'est pas le cas. Cela ne peut que perpétuer des exclusions. Je pense que les autres témoins l'ont bien mentionné. L'ACS+ est donc un outil essentiel, parmi d'autres, qui nous permet de voir les inégalités et d'éviter de les perpétuer.
Quant au travail invisible des femmes, c'est une longue bataille, malheureusement. La société ne s'est pas adaptée. On a permis aux femmes d'étudier et d'aller sur le marché du travail, mais on ne s'est pas adapté à leur réalité. La réalité des femmes, c'est que nous portons beaucoup plus de chapeaux que les hommes, en général. Bien qu'il y ait aussi des hommes qui soient proches aidants, c'est un rôle majoritairement féminin. Les femmes portent le chapeau de cuisinière, d'éducatrice, de mère, de fille, de soignante, etc. À un moment donné, il y en a trop. Certaines d'entre elles se tournent donc vers des stratégies d'adaptation, comme la consommation d'alcool, de drogue ou de médicaments. Parfois, cela peut aller jusqu'au pire: le suicide. On considère comme naturels tous les chapeaux portés par les femmes, mais ils ne le sont pas tant que cela. En réalité, c'est une division sociale des choses. Tant qu'on ne rendra pas visibles tous ces chapeaux, on ne réalisera pas le poids que ces jeunes femmes ont sur les épaules.
Il y a aussi toute la pression relative à l'image corporelle et à l'hypersexualisation, entre autres. On ne le voit pas, mais les jeunes femmes et les jeunes filles subissent énormément de pression et souffrent beaucoup. Tant qu'on n'aura pas d'analyse différenciée selon les sexes, on ne le verra pas. On a besoin de cette lunette.
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Vous avez entièrement raison. Je vous remercie beaucoup de ces interventions. D'ailleurs, vous avez bien nommé la chose: il est question de proches aidants. C'est effectivement le terme qu'il convient maintenant d'utiliser, au lieu d'« aidants naturels », parce que, non, ce n'est pas naturel d'être aidant. Il faut le rappeler.
Je félicite aussi l'AFEAS, c'est-à-dire l'Association féministe d'éducation et d'action sociale, qui a repris le combat pour la reconnaissance du travail invisible. Cet organisme milite beaucoup à ce sujet.
Je vous remercie beaucoup de votre témoignage d'aujourd'hui, madame Assayag. J'aurai peut-être l'occasion de revenir à vous lors du prochain tour, mais j'aimerais terminer celui-ci en m'adressant à Mme Todd.
Madame Todd, vous avez parlé de la cyberintimidation, un autre combat qui me tient beaucoup à cœur. Vous avez souligné l'importance de présenter un projet de loi à ce sujet, parce que la haine en ligne a des répercussions sur la santé mentale des jeunes filles. Comme vous l'avez expliqué, les réseaux sociaux ont exacerbé ces problèmes.
Que représente un tel projet de loi pour vous?
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Je suis très heureuse que vous ayez abordé ce sujet parce que j'y pensais justement.
En 2014‑2015, les conservateurs ont déposé le projet de loi . Vous pouvez le trouver sur le Web. L'objectif était de protéger la population canadienne en ligne. Selon ses promoteurs, il s'agissait d'un projet de loi sur la cyberintimidation, mais quant à moi, c'était un projet de loi sur la victimisation en ligne parce qu'il concernait la publication d'images sexuelles sans le consentement de la personne. La pornographie juvénile ne fait plus partie de l'équation parce que l'image peut être celle d'une personne d'âge adulte. C'est dans le Code criminel. L'infraction est passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans. Le projet de loi a été adopté il y a plus de cinq ans, en 2015, et d'après moi, il doit être réexaminé. C'est sur ma liste de sujets à aborder auprès de mon député.
Je suis d'avis qu'un projet de loi sur la cyberintimidation doit contenir une définition précise de la cyberintimidation ainsi que de la victimisation en ligne. La publication d'images intimes est une forme d'exploitation, tandis que la cyberintimidation se rapporte à des propos haineux, ce qui correspond à du harcèlement.
Peut-être devons-nous réfléchir au harcèlement criminel, car beaucoup de personnes qui disent être victimes de cyberintimidation subissent du harcèlement, et le harcèlement est une infraction criminelle. Toutefois, pour que la police enquête, le harcèlement doit être accompagné d'une menace de mort. La cyberintimidation doit faire l'objet d'un examen sérieux, elle doit être bien définie et elle doit devenir plus facilement punissable.
Nous devons faire quelque chose. Le gouvernement doit se pencher sur la question.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Williams.
Je suis très heureuse que vous ayez souligné que ce ne sont pas les individus qui sont à risque, mais que ce sont les systèmes qui risquent de ne pas répondre aux besoins des individus. Je disais la même chose durant mon cours. Cessons de parler des jeunes à risque; parlons plutôt des systèmes à risque de ne pas subvenir aux besoins des jeunes. Quand les systèmes ne répondent pas adéquatement aux besoins, on rejette la responsabilité sur les individus. Je suis ravie que vous ayez fait cette observation.
Vous avez parlé des problèmes relatifs aux soins de santé mentale causés par l'approche homogène souvent adoptée dans ce secteur. Nous savons que ce n'est pas vrai que tout le monde est pareil; les expériences vécues par les membres des communautés autochtones, noires et de couleur sont particulièrement distinctes.
La crise des meurtres de femmes et de filles autochtones a été mentionnée aujourd'hui. À titre d'exemple, à Winnipeg — ma ville d'origine —, la simple action de marcher dans les rues a une incidence sur notre santé mentale. Nous ne nous sentons jamais en sécurité parce que nous avons une cible sur notre dos. Ces sujets sont rarement abordés dans les discussions sur la santé mentale et la création de services de soutien en santé mentale adéquats.
Nous savons que les personnes non racisées ou les personnes 2SLGBTQIA+ vivent des expériences différentes. Pouvez-vous nous en dire plus sur les services de soutien particuliers — vous avez parlé de l'importance de la culture et de la pertinence sociale — ou les modèles de soins de santé mentale particuliers qui tiennent mieux compte des facteurs identitaires intersectionnels que le système de soins de santé mentale actuel?
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Certainement. Merci pour la question.
Il y a deux éléments. D'abord, il faut se demander à qui les personnes ayant des problèmes de santé émotionnelle ou de santé mentale demandent de l'aide, et si les soins sont adaptés aux besoins de groupes particuliers. Je pense que j'ai dit, à la fin de ma déclaration préliminaire, qu'il fallait des espaces pour les femmes et les filles. Cependant, il faut aussi des espaces pour les personnes noires, autochtones et de couleur afin qu'une femme noire puisse avoir confiance que les gens à qui elle demande de l'aide comprennent les difficultés éprouvées par les femmes et les filles noires, et qu'elle rencontrera des praticiens qui représentent cette population ou qui en ont une connaissance approfondie.
L'autre élément, c'est la promotion de la santé. Comme vous venez de le dire, certains groupes vivent un stress et un traumatisme collectifs; le monde n'est pas un endroit sûr pour certains groupes de femmes et de filles. Nous devons tenir compte de ce stress et de ce traumatisme collectifs dans nos réflexions sur la promotion de la santé, ainsi que du stress et des traumatismes cumulatifs. Les recherches montrent que les femmes de couleur, les femmes de minorités sexuelles et les femmes de minorités de genre subissent de la violence et des traumatismes pendant toute leur vie. Un des problèmes de notre système, c'est qu'il n'est pas prêt à venir en aide à ces personnes quand elles-mêmes sont prêtes à demander de l'aide et à affronter leurs traumatismes.
Nous savons que les pratiques exemplaires pour soigner les traumatismes comprennent, entre autres, du soutien régulier, du soutien communautaire et l'entretien de rapports. Notre système n'est pas fait de cette façon; il est fondé sur une approche universelle, et franchement, je crois que cette approche ne répond plus aux besoins de quiconque. Elle ne répond certainement pas aux besoins des personnes noires, autochtones et de couleur, ni à ceux des femmes et des filles.
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Merci beaucoup pour votre réponse.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Olagunju.
Vous avez parlé de votre expérience. Au Manitoba, 70 % des réfugiés s'installent à Winnipeg-Centre, ma circonscription. L'une des causes que je défends, ce sont les programmes pour les jeunes, et ce, pour plusieurs raisons. Entre autres, un nombre important de jeunes qui viennent vivre dans ma collectivité sont régulièrement victimes d'islamophobie. L'islamophobie est à la hausse et elle a une incidence sur la population. Dans ma circonscription, l'absence de programmes de soutien pour les jeunes se solde par une augmentation du nombre de jeunes qui deviennent membres de gangs.
M. Martin Brokenleg a créé un modèle qu'il appelle le cercle du courage. Selon lui, les jeunes ont besoin d'un sentiment de maîtrise, de générosité, d'indépendance et d'appartenance; autrement, ils trouvent d'autres façons de combler ces besoins.
Pourquoi les services de soutien facilement accessibles sont-ils absolument essentiels, surtout pour les jeunes nouvellement arrivés provenant d'horizons divers, dont certains ont subi des traumatismes importants ou ont quitté des situations de guerre. Pourquoi ces services sont-ils essentiels?
Fait intéressant: j'ai déjà habité à Winnipeg, comme réfugiée. C'était extrêmement difficile parce que la mentalité qui y règne, c'est que les réfugiés ne sont pas des personnes. J'étais très isolée.
Pour répondre à votre question, je trouve très important que les jeunes aient accès à du soutien pour éviter qu'ils se tournent vers des activités malsaines. Les réfugiés, les immigrants et les Autochtones doivent avoir un endroit où aller pour trouver quelqu'un à qui parler afin d'éviter de se retrouver dans de telles situations. Quand nous n'avons personne à qui parler de nos traumatismes et de nos problèmes, ils se mettent à nous ronger. La seule façon de nous en libérer, c'est soit en nous isolant, soit en devenant membres de gangs pour nous sentir en sécurité.
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Madame la présidente, puisqu'il me serait difficile de poser mes questions en deux minutes, je vais changer mon approche.
Tout à l'heure, je vous disais que nous étions ici pour trouver des pistes de solution. Certains d'entre vous ont avancé des idées. Si je prenais mes deux minutes pour vous poser des questions, ce serait frustrant, parce que je ne pourrais m'adresser qu'à une seule personne et nous ne pourrions pas entendre l'éventail de vos propositions. Ce que je vous invite à faire, c'est réfléchir, au sein de chacune de vos organisations, aux bons coups réalisés et aux pratiques exemplaires acquises dans vos organisations ou dont vous êtes témoins. Mme Williams en a d'ailleurs parlé. Notre comité serait heureux d'accueillir cette information. Cela pourrait très certainement nous aider dans la réflexion que nous avons à faire sur l'important dossier de la santé mentale des femmes et des filles. Je pense que ce serait très utile.
Je termine en vous remerciant infiniment de vos témoignages. J'ai beaucoup appris et je vous en suis très reconnaissante.
Encore une fois, je souhaite que la paix d'esprit s'installe et qu'on soit plus attentif aux problèmes de santé mentale que plusieurs personnes vivent malheureusement aujourd'hui.
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Deux minutes... C'est impossible, mais je vous remercie, madame la présidente.
Tout d'abord, merci à tous les témoins qui se sont joints à nous aujourd'hui. Vos observations et vos suggestions sont excellentes et nous seront très utiles.
Madame Chimbganda, je suis ravie de vous revoir. J'aimerais approfondir quelques-uns de vos commentaires. Le premier concerne la complexité du système. Le deuxième, c'est qu'à l'heure actuelle, le régime canadien n'assume pas les frais de psychothérapie et de counseling. Le troisième, c'est que l'approche universelle de la santé mentale ne fonctionne pas et qu'elle doit être remplacée par une approche interculturelle.
Je vous invite à nous en dire plus sur l'un ou l'autre de ces sujets durant la minute qu'il nous reste.
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Future Femme Noire travaille, entre autres, sur une campagne nationale pour la santé mentale des filles noires. Nous allons réaliser un sondage à l'échelle nationale parce qu'il n'existe pas de données sur la santé mentale des filles noires. Nous ne pouvons que faire des conjectures à partir d'autres sources de données. Nous travaillons là‑dessus et nous cherchons du financement pour promouvoir spécifiquement la santé mentale des femmes et des filles noires.
Prenez l'exemple du syndrome prémenstruel. Les filles et les femmes noires sont plus susceptibles de recevoir un diagnostic de syndrome des ovaires polykystiques; par conséquent, elles sont plus à risque d'avoir des menstruations difficiles et de souffrir du syndrome prémenstruel. Cette réalité n'est jamais abordée. Elle fait l'objet de préjugés et même de blagues. Tout le monde fait des blagues à ce sujet — « Oh, elle va avoir ses règles » —; pourtant, pour ce groupe, cela représente un problème de santé mentale important.
Voilà le genre d'approches qu'il nous faut. Nous devons comprendre les problèmes de santé mentale particuliers qui touchent différents groupes, ainsi que les causes de ces problèmes, y compris les causes liées à la santé physique. Normalement, c'est votre médecin qui diagnostiquerait le syndrome des ovaires polykystiques, et non votre psychiatre.
Je tiens à remercier l'ensemble des témoins. Nous avons eu une excellente discussion et nous avons reçu beaucoup d'information.
Pour les personnes qui faisaient partie du dernier tour de questions, je suis vraiment désolée de vous avoir enlevé du temps. Je trouve très difficile de... Je suis désolée, mais jamais je n'interromprai Mme Todd. Elle a trop à offrir. Je pense que c'est cela. J'espère que tout le monde reconnaît que je fais preuve de souplesse parce que nous recevons des témoins extraordinaires. Je vous prie de m'excuser.
Nous nous réunirons à nouveau jeudi, à 15 h 30.
Je rappelle à tous les témoins que si vous avez d'autres renseignements ou des mémoires à nous présenter, vous pouvez les envoyer à notre greffière. La date limite est le 31 octobre.
Merci beaucoup.
La séance est levée.