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Bonjour à tous. Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 32e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et de la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité reprend son étude sur la santé mentale des jeunes femmes et des filles.
La séance d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022; ce qui signifie que les membres peuvent y participer en personne, dans la salle, ou à distance à l'aide de l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres.
Veuillez attendre que je vous désigne par votre nom avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro et veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
Des services d'interprétation sont offerts. Pour ceux qui participent via Zoom, vous avez le choix, au bas de votre écran, entre « Parquet », « Anglais » ou « Français ». Pour ceux qui sont dans la salle, vous pouvez utiliser votre oreillette et sélectionner le canal de votre choix.
Je vous rappelle que toutes les remarques doivent être adressées à la présidence.
Pour les membres présents dans la salle, si vous souhaitez prendre la parole, veuillez lever la main. Pour les membres sur Zoom, veuillez utiliser la fonction « lever la main ».
Je vous rappelle que tous nos témoins sont sur Zoom aujourd'hui. Ils devraient tous apparaître sous peu.
À l'intention des témoins, si je vous interromps, je vous demanderai de conclure en 15 secondes.
J'aimerais vous mettre en garde. Comme nous le savons tous, cette étude est très difficile. Nous allons discuter d'expériences liées à la santé mentale qui pourraient provoquer des réactions chez les téléspectateurs, les membres ou le personnel ayant vécu des expériences similaires. Si vous vous sentez bouleversé ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer la greffière.
Je voudrais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins pour la séance d'aujourd'hui. Comme je l'ai dit, tous les témoins participent à distance.
Pour le premier témoignage, nous accueillons Mme April Elliott, pédiatre pour adolescents, et M. Ryan Van Lieshout, professeur agrégé de l'Université McMaster, qui témoigneront à titre personnel. Nous accueillerons ensuite Mme Alisa Simon, vice-présidente exécutive et cheffe de la jeunesse, Stratégie de cybersanté mentale de l'organisme Jeunesse, J'écoute; puis Mme Karla Andrich, thérapeuthe à la Klinic Community Health.
Vous disposerez chacun de cinq minutes pour présenter votre organisation.
Je donne la parole à Mme April Elliott pour cinq minutes.
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Bonjour, et merci de m'avoir invitée à participer aujourd'hui.
Pour ceux d'entre vous qui ne m'ont pas rencontrée, je m'appelle April Elliott. Je suis la maman dévouée de deux jeunes. Depuis 21 ans, j'exerce le métier de pédiatre pour adolescents, et j'ai fondé et dirigé le service de médecine pour adolescents de l'hôpital pour enfants de l'Alberta, à Calgary. J'ai également suivi une formation de coaching pour cadres supérieurs à l'Université de Berkeley et je travaille avec des médecins pour les aider à lutter contre leur épuisement professionnel et soutenir de manière proactive leur développement de carrière. J'aide également les parents à mieux gérer leurs interactions avec leurs enfants.
En tant que clinicienne de première ligne, j'ai constaté une augmentation spectaculaire de la morbidité et du déclin de la santé mentale chez les jeunes de 2001 à aujourd'hui. L'offre de services adaptés aux besoins des jeunes n'a pas suivi cette augmentation.
Comme nous le savons tous, le rapport statistique 2020 de l'UNICEF montre que le Canada est nettement moins bon que les autres pays riches pour ce qui est de la santé des enfants. Par rapport aux autres pays comparés, le Canada est tombé à la 30e place sur 38 pour la santé physique et à la 31e place sur 38 pour la santé mentale.
Il existe une myriade de sujets liés à la santé des jeunes. Cette brève déclaration traitera des préoccupations liées à la santé mentale des jeunes femmes et des filles, et plus particulièrement des troubles de l'alimentation, car il s'agit de mon domaine d'expertise et celui-ci a été sévèrement touché au cours des deux dernières années et demie.
En mars 2021, avec la professeure Deborah Christie, j'ai publié un article intitulé « A year supporting youth within a pandemic: A shared reflection », dans le journal Clinical Child Psychology and Psychiatry.
Nous y résumons les répercussions des mesures d'atténuation de l'épidémie, des fermetures d'écoles et des conséquences sur la santé mentale des jeunes au Royaume-Uni et au Canada. Les données ont commencé à montrer que la pandémie causait toute une série de préjudices aux enfants, notamment le fait de se sentir isolés et seuls, de souffrir de troubles du sommeil, d'anxiété et de dépression, et de réduire leur activité physique.
Les organismes de bienfaisance ont signalé une augmentation de la demande pour les séances de counseling, durant lesquels de nombreux jeunes ont expliqué à quel point ils se sentaient seuls. Les appels vers les lignes d'assistance aux enfants ont été multipliés par quatre entre 2019 et 2020. En outre, il existe un risque et un préjudice pour les personnes qui subissent des agressions émotionnelles, physiques et sexuelles au domicile.
De nombreux collègues du monde entier ont expliqué qu'ils assistaient à une « explosion » des troubles alimentaires.
À ce sujet, la prévalence de l'anorexie mentale chez les adolescentes est passée de 0,3 % à 0,7 %, et son incidence est estimée à 8 pour 100 000. Pour mettre ce chiffre en perspective, il faut le comparer à l'incidence minimale de 1,54 pour 100 000 par an pour le diabète de type 2 chez les jeunes Canadiens.
L'anorexie mentale est un trouble bio-psychosocial complexe qui interfère avec la pédiatrie et la santé mentale. Il s'agit d'une maladie qui peut être débilitante pour les patients et leurs familles. La majorité d'entre eux sont des jeunes filles et des femmes.
Les troubles de l'alimentation sont fréquents et mettent la vie en danger. L'anorexie mentale a le taux de mortalité le plus élevé de tous les troubles psychiatriques. Le taux de mortalité peut atteindre 5 à 7 %; certains rapports font état d'un taux de 18 %. Compte tenu de ces conséquences médicales et psychiatriques importantes, un individu a dix fois plus de chances de mourir des suites de l'anorexie que ses pairs en bonne santé.
À l'échelle mondiale, nous avons constaté un nombre sans précédent d'hospitalisations liées à des cas nouveaux et graves. Les patients souffrent de malnutrition sévère et de complications médicales accrues.
La pandémie de COVID-19 est un facteur précipitant communément mentionné par les patients et les familles. Comme raisons, ils évoquent les fermetures d'écoles, la suppression des activités sportives et le manque de contacts avec leurs pairs. Un programme canadien de surveillance pédiatrique récemment publié soutient ce constat.
Voici mes recommandations.
Premièrement, le traitement en milieu hospitalier est très coûteux, il est donc essentiel que les médecins de première ligne procèdent à un dépistage et à un traitement précoces. Il faut rendre obligatoire la formation à ces troubles dans les écoles de médecine.
Deuxièmement, il faut accroître les ressources afin d'orienter rapidement les patients vers des prestataires de soins de santé formés et qualifiés pour dispenser un traitement ambulatoire des troubles de l'alimentation fondé sur des données probantes.
Supposons qu'un jeune ait besoin d'être hospitalisé pour des troubles alimentaires modérés à graves. Dans ce cas, il a besoin de services spécialisés ou, s'il est dans un service généraliste, de personnel ayant reçu une formation intégrée pour appliquer ces directives. Ces services sont rares et de nombreuses villes canadiennes n'en disposent pas. Ainsi l'hôpital pour enfants de l'Alberta, qui dessert une zone de 2,5 millions de personnes, ne dispose pas de service spécialisé dans les troubles de l'alimentation pour les patients hospitalisés.
En ce qui concerne la santé mentale générale des jeunes, je recommanderais d'offrir davantage de soutien aux jeunes. Ce type de service n'a déjà été que trop sollicité. Nous devons donner la priorité aux enseignants, à la santé mentale dans les écoles et à l'augmentation des ressources. Nous devons nous concentrer sur cette génération COVID.
Il est absolument prioritaire d'assurer la parité d'estime entre la santé mentale et les soins de santé physique. Depuis trop longtemps, la santé mentale et la santé physique ont été traitées séparément. Il faut investir de manière significative pour garantir un accès rapide à des soins de santé mentale appropriés, que le jeune vive en ville ou en milieu rural.
Enfin, en plus de renforcer l'investissement dans les programmes de santé mentale pour les enfants et les jeunes, n'oublions pas que nous devons nous assurer de renforcer et défendre l'augmentation des ressources humaines et financières dans ces domaines pour les praticiens des soins de santé, qui sont également au bord d'un épuisement incommensurable.
Merci.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Bonjour. Je suis Ryan Van Lieshout, titulaire de la chaire de recherche du Canada en santé mentale périnatale et de la chaire Albert Einstein/Irving Zucker en neurosciences à I' Université McMaster.
Je suis membre de la Société royale du Canada et j'exerce en tant que psychiatre périnatal. Mes recherches sont axées sur le développement d'interventions psychothérapeutiques évolutives pour les personnes souffrant de dépression et d'anxiété périnatales, et sur l'optimisation des effets de ces interventions sur le développement cérébral de la progéniture. L'objectif principal de mon travail est de perturber la transmission intergénérationnelle de la psychopathologie des parents à leurs enfants au Canada et dans le monde.
Mon expertise clinique m'a valu d'être invité à diriger l'élaboration des lignes directrices nationales du Canada pour le traitement de la dépression périnatale, ainsi que de la trousse d'outils sur la santé mentale périnatale de Santé publique Ontario, destinée aux unités de santé publique. Tout au long de ma carrière, j'ai constaté les effets dévastateurs que les problèmes de santé mentale survenant pendant la grossesse et la période postnatale peuvent avoir sur les enfants et les familles et j'ai consacré ma carrière à la prévention de ces problèmes.
Les problèmes de santé mentale périnatale touchent jusqu'à une mère et un parent accoucheur sur cinq, taux qui est passé à un sur trois pendant la pandémie de COVID-19. Chaque cas de dépression post-partum entraîne à lui seul des coûts pouvant atteindre 125 000 $ au cours de la vie, soit 2,5 milliards de dollars pour les naissances ayant lieu au cours d'une seule année au Canada. Les enfants de mères souffrant de dépression post-partum sont jusqu'à cinq fois plus susceptibles de développer un problème de comportement cliniquement significatif, et jusqu'à quatre fois plus susceptibles de souffrir de dépression au cours de leur vie. Même si des traitements efficaces peuvent aider à la fois les mères et leurs enfants, seulement une personne enceinte et souffrant de dépression post-partum sur dix a accès à des soins éprouvés au Canada.
Il existe de nombreux obstacles pour recevoir des soins de santé mentale périnataux en temps opportun dans ce pays. En plus du manque de temps, des frais de garde d'enfants, des déplacements et du manque de fournisseurs, la plupart des personnes préfèrent la thérapie par la parole, ou la psychothérapie, aux médicaments, particulièrement pendant la grossesse et l'allaitement. Même si le Canada est un chef de file mondial dans le développement d'interventions psychothérapeutiques évolutives pour les problèmes de santé mentale périnatale, il y a encore un manque de prestataires, de normes de qualité nationales, de modèles de soins par paliers et de coordination.
Cependant, il existe de nombreuses raisons d'espérer. Les parcours de soins par paliers — qui permettent d'orienter les personnes vers le bon traitement au bon moment — sont susceptibles d'augmenter considérablement le nombre de femmes recevant un traitement efficace, tout comme la mise en œuvre d'interventions canadiennes évolutives et le partage des tâches de psychothérapie avec des professionnels de la santé non médecins, tels que des travailleurs sociaux, des psychologues, des ergothérapeutes, et des personnes qui se sont rétablies de troubles de l'anxiété ou d'une dépression post-partum — que l'on appelle souvent des pairs rétablis.
Notre groupe de recherche à lui seul a mis au point et testé plusieurs interventions efficaces et évolutives qui peuvent être dispensées par des professionnels de la santé ou des pairs rétablis, et qui peuvent servir à la fois d'étapes initiales et d'étapes ultérieures plus intensives dans des modèles de soins par paliers. Par exemple, notre atelier d'une journée basé sur la thérapie cognitivo-comportementale pour la dépression post-partum peut traiter efficacement jusqu'à 30 personnes à la fois et être dispensé en ligne ou en personne par des professionnels de la santé ou des pairs rétablis. Notre intervention plus longue de thérapie cognitivo-comportementale en groupe, d'une durée de neuf semaines, s'est également avérée efficace pour les personnes présentant des symptômes plus graves, et sa mise en œuvre a déjà été confiée avec succès à des pairs rétablis et à des infirmières de santé publique ayant une formation psychiatrique limitée, voire inexistante. Ces interventions de groupe évolutives se sont avérées efficaces en personne ou en ligne et une demi-douzaine d'unités de santé publique en Ontario, y compris celles des comtés de Niagara et de Prince Edward, sont en cours de formation pour les offrir aux mères vivant dans la communauté.
Nous avons également démontré, avec d'autres, que le traitement des mères ne profite pas seulement à celles-ci, mais aussi à toute leur famille. Jusqu'à 70 % des coûts associés aux troubles mentaux périnataux sont dus à leurs effets en aval sur la progéniture. Des recherches récentes menées par notre groupe ont montré que le traitement des mères souffrant de dépression post-partum entraîne des améliorations cliniquement significatives sur le plan des interactions entre la mère et le nourrisson, du développement cérébral et de la capacité de régulation des émotions du nourrisson, et même de la santé mentale des enfants plus âgés du foyer. Ces résultats concordent avec les recherches menées dans le monde entier, qui suggèrent que pour chaque dollar investi dans les interventions axées sur la petite enfance, la société récupère sept dollars.
Au Canada, les problèmes de santé mentale périnatale peuvent être prévenus, détectés et traités, et nous disposons déjà du savoir-faire nécessaire pour soutenir les mères et interrompre la transmission intergénérationnelle des troubles mentaux dans les familles. Le gouvernement fédéral peut apporter son aide en collaborant avec des experts pour créer des normes de qualité nationales et élaborer des parcours de soins échelonnés propres au Canada, qui pourront appuyer la formation de professionnels et de non-spécialistes pour la prestation des traitements. De tels développements permettront de transposer à plus grande échelle les découvertes faites au Canada afin d'améliorer la vie des femmes, des filles et de tous les Canadiens.
J'ai hâte de travailler avec vous pour faire du Canada le meilleur pays au monde où vivre en tant que femme ou fille.
Merci.
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Je vous remercie, madame la présidente, ainsi que les membres et le personnel du Comité permanent de la condition féminine.
Je suis ravie d'être ici aujourd'hui. Je m'appelle Alisa Simon et je travaille pour Jeunesse, J'écoute.
Depuis plus de 33 ans, Jeunesse, J'écoute est en première ligne pour écouter les jeunes d'un bout à l'autre du pays et dans toutes les provinces. Nous aidons les jeunes à partir de cinq ans environ et nous n'avons pas de limite d'âge supérieure. Les jeunes viennent aussi longtemps qu'ils le souhaitent et utilisent notre modèle de soins par paliers pour trouver le type de services et de soutien dont ils ont besoin.
Nous avons toujours été un élément essentiel de l'infrastructure et des systèmes de santé mentale pour les jeunes. Mais depuis la pandémie, ce besoin a augmenté de façon exponentielle. En fait, depuis le début de la pandémie, Jeunesse, J'écoute a soutenu les jeunes plus de 12 millions de fois, ce qui représente une augmentation significative par rapport à 2019, où nous avons soutenu les jeunes environ 1,9 million de fois.
Parmi les jeunes qui nous contactent à Jeunesse, J'écoute, 74 % s'identifient comme des femmes. Ils nous appellent au sujet de tous les problèmes que rencontrent les jeunes, qu'il s'agisse d'intimidation, de dépression, d'anxiété, de problèmes relationnels ou de suicide.
Bien que nous recevions des témoignages de jeunes filles et de femmes de toutes les tranches d'âge, 46 % de nos interlocutrices ont entre 14 et 17 ans, une période particulièrement importante dans le développement des jeunes filles. Et nous constatons que les difficultés auxquelles elles sont confrontées évoluent avec le temps, ce qui est logique pour quiconque côtoie des jeunes filles et des jeunes femmes.
Il n'est pas surprenant que les jeunes filles soient très nombreuses à nous parler d'intimidation et de difficultés relationnelles. En fait, les filles de 5 à 13 ans sont 120 % plus susceptibles de parler d'intimidation et de cyberintimidation. Cette situation est tout à fait préjudiciable au bien-être des jeunes filles. Nous savons que cela peut entraîner de l'anxiété, une mauvaise image corporelle et une baisse des résultats scolaires.
Il convient également de souligner que les jeunes filles sont plus susceptibles de nous contacter au sujet de troubles de l'alimentation et de problèmes d'image corporelle. En fait, les filles de 5 à 13 ans sont 34 % plus susceptibles de nous parler de ces problèmes.
À mesure que les filles grandissent — comme je l'ai dit —, leurs problèmes changent. Ainsi, nous constatons, par exemple, que les jeunes femmes de 18 à 24 ans sont plus susceptibles de venir nous parler d'anxiété et de stress. Il est intéressant de remarquer qu'au cours de la pandémie, les jeunes femmes de 25 ans et plus étaient 60 % plus nombreuses à parler de deuil, ce qui me semble logique compte tenu des nombreuses pertes que nous avons tous subies au cours de la pandémie.
Mais ce qui donne peut-être le plus à réfléchir, ce sont nos données sur le suicide. Au cours des cinq dernières années, nous avons constaté une augmentation significative du nombre de jeunes qui nous contactent pour parler de suicide. En fait, environ 23 % de toutes les filles et jeunes femmes qui se connectent à Jeunesse, J'écoute parlent de suicide, notamment 46 % des filles de 14 à 17 ans. Ce qui est peut-être encore plus surprenant, c'est que 21 % des filles de 5 à 13 ans parlent de suicide, ce qui, à mon avis, est assez choquant pour beaucoup de gens, car nous ne nous attendons pas à ce que les plus jeunes pensent à la question du suicide.
Sur une note plus positive, je tiens à ce que les gens sachent que nous sommes en mesure d'aider la grande majorité des jeunes qui nous contactent. Nous sommes en mesure d'établir un plan de sécurité avec eux, et seuls 2 % environ de nos communications avec des personnes parlant de suicide nécessitent un renvoi d'urgence.
Je pense aussi qu'il est vraiment important de se concentrer sur les populations en quête d'équité, comme les Autochtones, les Noirs, les nouveaux arrivants et les personnes 2SLGBTQ+. Nous savons que leur expérience au Canada et leur expérience des déterminants sociaux de la santé ne sont pas les mêmes. Et nous savons, grâce à nos données, qu'ils ont tous une chose en commun, à savoir l'isolement et le sentiment d'être déconnectés de leurs semblables.
L'isolement social peut entraîner de nombreuses conséquences négatives, et il semble particulièrement répandu chez les populations en quête d'équité. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons lancé l'année dernière notre service de soutien par les pairs, spécifiquement pour que les jeunes puissent se rapprocher les uns des autres.
Nos données démontrent également, par exemple, que le racisme et la discrimination ont des répercussions terribles sur les jeunes issus de populations en quête d'équité. Après le meurtre de George Floyd en 2020, nous avons constaté que les jeunes qui nous ont contactés pour parler de racisme étaient plus angoissés que n'importe quel autre usager de nos services, à l'exception de ceux qui redoutaient de se retrouver en danger dans leur foyer. Et ils étaient plus susceptibles que tout autre usager de parler de suicide.
Pour conclure, j'ai trois recommandations.
Nous devons nous concentrer sur les populations en quête d'équité et sur leurs besoins spécifiques.
Nous avons besoin de plus de soutien à l'école, à tout âge, non seulement pour parler de la santé mentale, mais aussi, ce qui est tout aussi important, pour parler de la nécessité de demander de l'aide, de ce que cela signifie de ne pas se sentir bien et des raisons pour lesquelles il est important de se manifester. Jeunesse, J'écoute le fait dans les écoles intermédiaires depuis de nombreuses années et vient de lancer un programme dans les écoles secondaires. L'année prochaine, l'organisme lancera un programme dans les écoles primaires.
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Je souhaite un bon après-midi aux députés et aux autres témoins.
Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole ici aujourd'hui. Je m'appelle Karla Andrich et mes pronoms sont elle/elle.
Je participe aujourd'hui à la réunion depuis le territoire visé par le Traité no 1, le territoire traditionnel des Anishinabes, des Cris, des Oji-Cris, des Dakotas et des Dénés, au cœur de la nation métisse.
Ma relation avec ces traités est que je suis descendante de colons. Mes arrière-grands-parents et mes arrière-arrière-grands-parents ont bâti leur fortune de génération en génération à partir des richesses d'un territoire non cédé. Je profite de cette richesse et j'ai la responsabilité de travailler à la justice et à la décolonisation.
Je suis thérapeute au Klinic Community Health, un centre de santé à Winnipeg, au Manitoba. Le centre existe depuis environ 50 ans. Il fait la promotion de la santé et de la qualité de vie chez les personnes de tous âges, de tous les horizons, de toutes les origines ethniques, peu importe leurs capacités, leur identité de genre ou leur situation socio-économique.
Ma présentation aujourd'hui sera fondée sur mon expérience de thérapie individuelle auprès des survivants de violence sexuelle, qui sont en majorité des femmes, des filles et des minorités de genre, et sur la reconnaissance du fait que les Autochtones et les membres de la communauté 2SLGBTQIA+ sont ciblés de façon disproportionnée par ceux qui perpétuent les méfaits de la violence fondée sur le sexe.
Je voudrais aujourd'hui porter à votre attention trois points principaux: les méfaits que perpétue la violence sexuelle systémique; la nécessité des soins tenant compte des traumatismes dans le système; la nécessité d'un financement plus important.
La violence sexuelle regroupe une multitude de microagressions quotidiennes, d'inégalités systémiques et d'actes flagrants de violence interpersonnelle, notamment des agressions sexuelles, du harcèlement sexuel, de la discrimination fondée sur le genre et de réactions négatives à l'endroit des femmes, des filles et des minorités de genre qui dénoncent leur agresseur. La violence sexuelle est également partie intégrante des méfaits du colonialisme. Les femmes, les filles et les personnes bispirituelles autochtones sont représentées de façon disproportionnée parmi les patients que nous visitons dans les hôpitaux dans le cadre de notre travail de défense des victimes.
J'ai moi-même discuté avec un grand nombre d'Autochtones au centre des sciences de la santé ici, à Winnipeg: des adultes, des matriarches, des jeunes filles de 12 ou 13 ans. Trop souvent, elles me disent que c'est simplement la réalité de leur famille, que leur mère, leurs grands-mères, leurs tantes, leurs cousines et leurs sœurs ont toutes déjà subi une forme ou une autre de violence sexuelle.
Parmi les éléments qui contribuent à cette situation, notons le manque de soins tenant compte des traumatismes dans le système de justice, dans le système de santé et dans d'autres systèmes d'aide, comme l'aide à l'emploi, dans les collèges des médecins et d'autres systèmes périphériques avec lesquels les survivants peuvent avoir à traiter. Le premier emploi de thérapeute que j'ai eu était à l'Université du Manitoba et j'ai eu le cœur brisé de voir les impacts profonds que cette violence faisait subir à mes clients.
Enfin, point crucial, l'accès à la thérapie est sous-financé. De nombreux survivants n'ont pas les moyens de payer pour des thérapies privées qui les aideraient à surmonter les expériences traumatisantes qu'ils ont vécues et ils doivent attendre des mois ou des années avant d'avoir accès aux soins de centres comme Klinic. Cela signifie des mois ou des années passés avec une qualité de vie grandement réduite, des occasions ratées, notamment des occasions d'emploi, des études inachevées, des relations brisées et des contributions à la communauté perdues.
Les mesures que je propose aujourd'hui reposent sur la nécessité de valoriser la vie, l'avenir et le bonheur des femmes, des filles et des minorités de genre de la même manière que nous valorisons ceux des hommes et des garçons. Il faut un engagement plus ferme à mettre en œuvre les 94 appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation, en particulier les appels nos 21 à 24 et l'appel no 41. Toute personne et tout organisme qui offre des soins, qui examine des plaintes ou qui est chargé de l'application de la loi ou des politiques en matière de violence sexuelle devrait être tenu de suivre une formation sur la prise en compte des traumatismes. Enfin, il faut augmenter de façon significative le financement afin que les survivants aient gratuitement accès à des thérapies, à du soutien juridique, à du soutien pour s'y retrouver dans les dédales du système et à divers services de défense de leurs droits.
Mon équipe au centre Klinic est formée de seulement deux thérapeutes à temps plein et de deux autres à temps partiel. Il y a une coordonnatrice et quelques intervenantes à temps partiel. Nous avons aussi des bénévoles, à qui nous demandons beaucoup trop, parce que les besoins sont immenses.
Essentiellement, nous avons besoin de plus d'argent. Tous les organismes qui offrent le même genre de soins que nous ont besoin de plus d'argent. Nos ressources sont utilisées au maximum et nous devons constamment chercher un équilibre entre les besoins de notre programme d'intervention, qui offre des services aux victimes immédiatement après une agression sexuelle, et ceux de notre programme de thérapie, qui offre des services de thérapie continus et fait de la sensibilisation.
Nous sommes sans arrêt forcés de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Au bout du compte, ce sont les survivants qui en souffrent. Le montant que la société est prête à investir dans une cause est l'indicateur de l'importance qu'elle accorde à cette dernière. Le Canada doit investir dans les femmes, les filles et les minorités de genre.
Au centre Klinic, nous avons été très reconnaissants des sommes investies récemment au Manitoba pour soutenir les services d'intervention. Il serait très utile que nous recevions également des fonds pour soutenir l'autre pan de notre travail de défense des victimes et de thérapie, soit le soutien continu des survivants, parce que surmonter ce genre d'expérience demande du temps, des efforts et du soutien.
Merci beaucoup de m'avoir accordé votre temps aujourd'hui.
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C'est une excellente question.
Tous les organismes du secteur de bienfaisance aiment le financement qui n'est pas réservé à des fins précises, car nous pouvons alors l'utiliser pour répondre à nos besoins les plus criants.
Pour réussir et bâtir des solutions évolutives, il faut avoir un modèle de financement qui réunit le soutien offert par le gouvernement, le soutien offert par les entreprises et les dons. Un tel modèle permet de couvrir les dépenses moins séduisantes, comme le salaire des employés et les technologies de l'information. Ces frais d'administration sont bien réels, mais la plupart des donateurs veulent que leur don serve à financer des résultats tangibles, tels que la création d'un produit, ou la prestation d'un service s'adressant directement aux jeunes.
En réalité, il faut aider les organismes de bienfaisance à s'autosuffire. Par exemple, il y a diverses sources de financement — le gouvernement, les entreprises et la philanthropie —, mais ce ne sont pas tous les organismes de bienfaisance qui sont capables d'exploiter toutes ces sources de financement. Certaines n'ont pas le personnel voulu pour recueillir des fonds auprès de toutes les sources possibles. D'autres n'ont même pas de personnel affecté à la collecte de fonds.
Par exemple, Jeunesse, J'écoute a réussi à adapter ses opérations pendant la pandémie en partie parce que nous avons modifié notre modèle de financement de manière à pouvoir accepter plus de fonds du gouvernement. Nous sommes extrêmement reconnaissants de pouvoir compter sur le partenariat du gouvernement fédéral à l'égard de tant d'initiatives. Autrement, nous n'aurions pas pu étendre nos opérations pour répondre à l'énorme croissance de la demande qu'a entraîné la pandémie de COVID‑19.
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Je vous remercie énormément de cette question.
Bien des survivantes sont éprouvées par les stigmates sociaux associés au fait d'avoir subi de la violence sexuelle. Notre programme peut offrir des services en milieu hospitalier, mais évidemment, la personne doit en faire la demande. En général, les personnes que nous voyons à l'hôpital ou qui utilisent nos lignes d'écoute téléphonique sont assez bien suivies. Il y a une légère incohérence entre ces statistiques et le profil démographique des personnes qui se prévalent régulièrement de services de counselling, ce qui, je crois, rejoint en quelque sorte ce que disait Alisa au sujet de la sensibilisation de la communauté pour que les gens sachent que ces services existent. Ainsi, s'ils en ont besoin, ils sauront qu'ils peuvent s'en prévaloir.
Cela rejoint également ce que disait M. Van Lieshout concernant les soins préventifs et l'importance de consacrer des fonds à la sensibilisation de la population, à son éducation et à l'établissement de relations avec les communautés. Il faut avoir les fonds nécessaires pour exploiter ce genre de programmes et pouvoir affecter les fonds là où ils produiront les résultats les plus importants, selon notre connaissance des besoins sur le terrain.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
Malgré les tristes expériences qu'ils ont vécues, ils nous proposent des solutions. Je les remercie énormément de leur contribution à l'étude du Comité permanent de la condition féminine. Nous sommes heureux qu'ils aient pris le temps d'y participer. C'est très précieux.
Je l'ai dit au début de la semaine et je le répète, parce qu'il s'agit, à mon avis, d'une semaine importante: la campagne de sensibilisation aux maladies mentales du Réseau avant de craquer a lieu en ce moment, dans le cadre de la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales. Cette année, le thème est le suivant: « Derrière chaque visage, une histoire... Devant chaque personne, une solution! ». Il faut avancer de façon constructive.
Cette année, en réponse à la pandémie qui a touché toute la population, la campagne a visé les proches de tous âges qui accompagnent une personne ayant un problème de santé mentale, en leur démontrant qu'il est possible de préserver son équilibre tout en faisant partie de la solution. C'est important, c'est crucial.
Je ne sais pas à qui poser ma première question, car je crois que tous les témoins pourraient y répondre. Je vais m'adresser à Mme Simon, la représentante de Jeunesse, J'écoute.
Madame Simon, Jeunesse, J'écoute est une ressource de première ligne pour les gens qui souffrent de problèmes de santé mentale. Sur votre site Internet, on retrouve plusieurs données intéressantes.
Comme vous l'avez mentionné dans votre présentation, on observe une hausse marquée de l'utilisation de vos services depuis le début de la pandémie.
Pouvez-vous nous parler plus en détail de cette hausse? Quels changements de comportement avez-vous remarqués pour ce qui est des femmes et des jeunes filles qui ont fait appel à Jeunesse, J'écoute au cours des deux ou des trois dernières années?
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Effectivement, nous avons observé une importante augmentation du nombre de jeunes qui font appel à nous et un changement au niveau du mode de communication qu'ils utilisent pour se prévaloir de nos services. Nous recevons toujours un volume d'appels très élevé, mais nous sommes le seul service d'aide par texto ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept au Canada, alors nous répondons toujours à un volume très élevé de textos provenant de jeunes.
Comme c'était le cas avant la pandémie, nos périodes de pointe correspondent aux périodes où tout est fermé. Ainsi, nous sommes très occupés la nuit, car beaucoup de jeunes communiquent avec nous la nuit. Souvent, ils sont aux prises avec de graves problèmes, comme des idées suicidaires. Imaginez une jeune fille qui n'arrive pas à dormir alors que toute sa famille dort; c'est dans un moment comme celui-là qu'elle prend l'appareil à sa disposition et communique avec nous.
Certes, au début de la pandémie, nous avons observé une hausse importante du nombre de jeunes qui communiquaient avec nous à propos de mauvais traitements ou de négligence. Encore là, tout était fermé. Les établissements qui signalent le plus souvent les cas de mauvais traitement ou de négligence, comme les écoles, ne pouvaient pas le faire, alors les jeunes communiquaient directement avec Jeunesse, J'écoute.
Au cours de la pandémie, les problèmes liés à l'image corporelle — qui d'ailleurs ont été mentionnés plus tôt — et les troubles de l'alimentation étaient beaucoup plus répandus, tout comme l'isolement et l'anxiété. De plus en plus de jeunes nous disaient avoir du mal à composer avec le fait que tout était annulé: leur remise de diplôme, leurs activités sportives et toutes ces choses qu'ils avaient l'habitude de faire ou qu'ils avaient hâte de faire.
Même si la pandémie se poursuit et que les choses reviennent plus ou moins à la normale — la plupart des jeunes sont physiquement de retour sur les bancs d'école — nous constatons toujours un niveau d'anxiété élevé chez les jeunes, puisqu'ils tentent de s'adapter à la nouvelle réalité. Faut-il porter le masque à l'école? Est-ce acceptable de fréquenter de nouveau ses amis? Dans quelles circonstances faut-il rester chez soi?
Comme beaucoup d'entre nous, les jeunes se fraient un chemin dans cette nouvelle réalité. Les choses ne plus comme elles étaient. C'est une nouvelle normalité, et nous ne l'avons pas encore entièrement définie. Si même nous, les adultes, éprouvons de l'anxiété par rapport à cela, il est évident que les filles et les jeunes femmes dans nos vies en éprouvent également.
Nous continuons d'observer une nouvelle normalité pour ce qui est du volume de demandes, mais pour ce qui est des problèmes signalés, nous constatons quelques nouveautés, notamment, comme je l'ai dit, les occasions ratées en raison des activités annulées et l'anxiété. Cela dit, bien des difficultés sont les mêmes que ce que nous observions avant la pandémie, notamment les idées suicidaires, la dépression, l'anxiété et les problèmes relationnels.
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Oui. Environ 5 % des filles de 5 à 16 ans qui communiquent avec nous le font précisément parce qu'elles subissent de la violence sexuelle. Comme il vient d'être dit, il est important d'éduquer la population, en particulier les jeunes filles, pour qu'elles puissent reconnaître que ce qu'elles ont subi constitue de la violence sexuelle, que c'était mal. Dans le contexte des médias sociaux dont nous venons de discuter, où les jeunes femmes sont inondées d'images, il leur est très difficile de comprendre où commencent et où se terminent la violence et la sexualisation des filles.
Il faut envisager d'investir dans le retrait des images sexuelles de filles en ligne. Des pays, notamment en Europe, le font déjà. Nous devons donner aux filles et aux jeunes femmes victimes d'exploitation sexuelle en ligne un moyen de mettre fin à cette exploitation. Il faut éduquer les filles pour qu'elles comprennent quelles sont leurs limites, qu'elles ont le droit de dire non, que demander de l'aide est essentiel, qu'elles ne doivent pas garder cela secret, mais plutôt en parler à quelqu'un. Nous savons que le fait d'en parler à un adulte de confiance, qu'il s'agisse de Jeunesse, J'écoute, d'un parent ou du parent d'un ami, va aider cette jeune personne.
Il faut parler de l'importance de demander de l'aide et prendre les mesures législatives voulues pour que les filles puissent faire face adéquatement à cette menace. Qu'il s'agisse de retirer une image publiée, de révoquer un permis ou d'intenter des poursuites judiciaires, nous devons veiller à ce que les lois soutiennent les filles qui sont victimes de violence sexuelle.
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Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins.
Pour commencer, je dois vous dire que je suis la mère de deux adolescentes. Ce sujet me touche donc de près. Les adolescentes sont dépassées. Les parents sont dépassés. Certains enseignants sont dépassés. Il y a beaucoup de gens qui se trouvent dans une situation difficile en ce moment.
L'expérience que je vis en élevant des adolescentes en 2022 est tout à fait différente de celle que mes parents ont vécue en m'élevant dans les années 1980 et 1990. Les médias sociaux n'existaient pas. Les gens ne parlaient pas des maladies mentales. La COVID n'existait pas. Les troubles de l'alimentation n'étaient pas en vogue. L'intimidation a toujours existé, mais elle a été portée à un tout autre niveau. C'est hors de contrôle. Dans certains cas, les adolescents contribuent même maintenant aux finances de leurs familles, car le coût de tout est exorbitant. La pression exercée est extrêmement réelle. C'est presque comme si c'était la tempête parfaite.
Ma première question s'adresse à la Dre Elliott.
J'aimerais me plonger dans les dommages punitifs que subissent les jeunes filles et les jeunes en général à cause de la pandémie de COVID. Ils ne peuvent pas participer à des cérémonies de remise de diplômes. Ils ne peuvent pas faire de sport. Ils parlent d'isolement.
Où pensez-vous que nous pouvons trouver une responsabilité supplémentaire ? Que pouvons-nous faire différemment? En cas d'une autre pandémie, que peut faire le gouvernement différemment la prochaine fois?
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Merci beaucoup de votre question.
Je dois prendre une respiration, car j'ai beaucoup d'opinions professionnelles et personnelles à ce sujet.
Les enfants étaient les moins susceptibles à être gravement touchés par la maladie, mais ce sont eux qui ont le plus souffert. En février 2021, nous avons écrit une lettre fondée sur des données probantes pour dire que les enfants devraient recommencer à faire du sport, qu'ils pouvaient le faire en toute sécurité et que nous étions très en faveur de leur retour à l'école et de la reprise de leurs activités sportives. Pourtant, j'ai vu que les enfants avaient des options limitées dans de nombreuses provinces.
Cela ne doit plus jamais se reproduire. Comme les parents et les jeunes nous le diront et les données probantes nous le montrent, nous savons maintenant que ces restrictions et ces mesures d'atténuation étaient liées à l'isolement, au manque de contrôle et à l'incapacité d'atteindre les étapes clés du développement. Cela dit, je dirais que cela ne peut plus jamais se produire de cette manière.
Nous ne pouvons pas défaire ce qui a été fait, mais j'espère que nous nous appuierons sur les témoignages des familles et des jeunes et sur les données probantes pour ne plus jamais avoir à subir de tels confinements à l'avenir.
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C'est incroyable. Merci, madame la présidente. C'est mon jour de chance.
Je remercie tous les témoins non seulement de leur excellent travail, qui est si important, mais aussi de leur volonté de partager leur temps et leur expertise avec nous aujourd'hui.
J'ajouterai que je suis également mère de trois adolescentes. Par conséquent, je vis et respire beaucoup de ces difficultés.
Je fais écho à l'un de mes collègues qui vient de parler des répercussions difficiles de la COVID sur les parents et les enfants, surtout les jeunes filles. Les décisions provinciales concernant la fermeture des écoles sont des décisions difficiles que nous avons tous vécues. L'un des témoins a parlé de la génération COVID, ce qui est une expression que je n'avais jamais entendue auparavant. C'est tellement juste.
Ma première question s'adresse au Dr Van Lieshout.
Vous aviez quelques recommandations, dont l'une portait sur les systèmes de soins par paliers propres au Canada. Je vous serai reconnaissante de nous expliquer à quoi cela devrait ressembler selon vous.
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Les systèmes de soins par paliers sont les systèmes par lesquels nous délivrons et contrôlons les traitements psychiatriques afin que les traitements les plus efficaces et les moins gourmands en ressources soient appliqués au bon moment.
Au Canada, nous disposons d'une force remarquable en matière de recherche, de leadership et de travail clinique dans le domaine de la santé mentale périnatale. Nous ne sommes pas nombreux, mais ceux d'entre nous qui sont ici... Mes collègues sont géniaux, je suis juste acceptable.
Lorsque nous parlons d'un modèle de soins par paliers, je pense que nous devrions commencer par établir des normes de qualité pour l'information sur la santé avant la grossesse et la prévention, ainsi que sur le dépistage, l'évaluation, l'admission et le traitement. Tout cela serait évidemment axé sur des mesures.
Il y a beaucoup de mesures formidables dans le domaine de la santé mentale périnatale, y compris l'Échelle de dépression postnatale d'Édimbourg. Nous parlerions d'essayer d'identifier les gens qui ont besoin de traitements et ensuite de déterminer les traitements de faible intensité qui pourraient être utilisés par la plupart d'entre eux.
Il existe un modèle au sein du Programme de psychothérapie structurée de l'Ontario qui pourrait être utilisé, selon lequel les cours et les psychothérapies autodirigées... basées sur la thérapie cognitivo-comportementale seraient généralement une intervention de faible intensité. Nous surveillerions les réponses à ces interventions et déterminerions si les gens ont besoin de plus, s'ils ont mal réagi au traitement, si le traitement n'était pas bon pour eux ou s'ils ne l'ont pas accepté. Nous pourrions ensuite passer à des traitements d'intensité plus élevée, comme des psychothérapies individuelles ou de groupe fondées sur des données probantes, des thérapies cognitivo-comportementales, des psychothérapies interpersonnelles et j'en passe. Puis, nous passerions aux médicaments et ainsi de suite.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vous remercie tous d'être là cet après-midi. Ces échanges que nous avons ensemble sont très instructifs.
Je commencerai par vous, monsieur Van Lieshout.
Vous avez dit qu'il fallait travailler à faire du Canada le meilleur pays au monde pour nos femmes et nos filles. Je pense que tout le monde partage votre souhait.
Vous avez laissé entendre que ce bien-être commençait bien avant le berceau.
Je suis préoccupée par ce qui frappe les femmes, c'est-à-dire le post-partum. Quels sont les effets négatifs qui peuvent toucher les nouveau-nés alors que leur maman souffre de dépression à la suite de l'accouchement? Qu'avez-vous observé?
Combien de temps cela dure-t-il chez un enfant? Quels effets observez-vous?
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Merci, madame la présidente.
[Français]
Je remercie grandement tous les témoins de leur présence.
Mes questions portent sur les normes nationales. Évidemment, nous savons tous que la santé est une compétence provinciale, mais je veux dire clairement que le fédéral a aussi un rôle à jouer. On doit trouver une façon de travailler avec les provinces et de parvenir à des ententes bilatérales, qui font présentement l'objet de négociations. Ces ententes représentent un financement de 4,5 millions de dollars sur cinq ans.
Nous avons entendu parler du Royal Ottawa Health Care Group, il y a quelques semaines. Vous y avez un peu fait référence aujourd'hui, à savoir que le système a des lacunes et qu'il est très difficile pour les parents et les individus de naviguer dans le système.
Je veux essayer d'enrichir ma compréhension de certains aspects, notamment lorsqu'on parle des services d'expansion communautaire, de santé mentale, de dépendances, de jeunes de 10 à 25 ans et d'interventions précoces. Je ne pose pas nécessairement ma question aux quatre témoins.
Monsieur Van Lieshout, vous avez aussi mentionné le manque de coordination au sein des différents organismes. Par exemple, j'étais à Sudbury avec la pour participer à une table ronde. Les groupes qui y participaient ont mentionné, avec exagération, qu'il y avait environ 6 000 organisations et très peu de coordination.
[Traduction]
Je commencerai par vous, Dr Ryan Van Lieshout, puis je passerai à vous, Dre Elliott.
Que pouvez-vous dire au Comité au sujet des pratiques exemplaires et des données probantes qui pourraient permettre de conclure les ententes bilatérales afin que le gouvernement fédéral puisse verser l'argent aux provinces? Vous pourriez peut-être prendre une minute chacun pour répondre à la question.
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Merci beaucoup de cette question.
Il faut se pencher sur les endroits où les soins sont le plus chers, c'est-à-dire les hôpitaux.
Je pense qu'il faut commencer par collaborer avec les membres du milieu communautaire à l'établissement de lignes directrices qui tiennent compte du travail exceptionnel qu'ils accomplissent, rediriger les soins hors des hôpitaux et faire équipe avec les organismes communautaires, notamment pour des lits communautaires ou encore des lits destinés aux jeunes qui, même s'ils encore ont besoin de soins de niveau élevé, ne requièrent pas une prise en charge en milieu clinique.
Pour ce faire, il faut une norme nationale. Ainsi, on évitera que chaque programme dans chaque province mette au point ses propres normes, ce qui s'avère coûteux. Pour moi, c'est essentiel.
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J'ajoute rapidement deux points.
Tout d'abord, même si les soins de santé physique et mentale relèvent des provinces, le gouvernement fédéral a un rôle essentiel à jouer afin de corriger les inégalités géographiques et d'éliminer les dépenses en double.
Je ne suis pas convaincue qu'énormément plus de financement soit nécessaire. Il faut mieux financer les soins de santé mentale, cibler davantage la santé mentale, c'est vrai, mais il faut également faire en sorte d'affecter les budgets là où, preuves à l'appui, c'est efficace et de réorienter les gens de façon à privilégier les services qui répondent à leurs besoins tout en étant potentiellement moins coûteux.
Il faut employer les fonds — et on en revient au modèle de soins par paliers qu'a évoqué M. Van Lieshout — là où il semblera logique à l'utilisateur final de le faire. Souvent, il peut s'agir d'un service offert à moindre coût, à un palier inférieur du modèle de soins par paliers.
Pour y arriver, il faut adopter une perspective nationale, sans quoi on se retrouvera avec toutes sortes de programmes provinciaux et territoriaux différents qui coûteront tous de l'argent, qui feront double emploi et qui ne mettront pas nécessairement à profit les ressources ou les données qui existent déjà.
Entre autres, il faudrait peut-être que le gouvernement fédéral recommande la mise en place de programmes en milieu scolaire. Il y en a des exemples au Royaume‑Uni: la ligne d'aide Childline se trouve dans absolument toutes les salles de classe au pays.
Actuellement, pour qu'un programme comme celui de Jeunesse, J'écoute ou d'un autre organisme soit offert dans les écoles, il faut procéder province par province et territoire par territoire, ou collaborer avec leur ministère de l'Éducation respectif.
Il serait beaucoup plus simple qu'une recommandation du gouvernement fédéral préconise, par exemple, de mettre chaque jeune en relation avec Jeunesse, J'écoute à trois reprises durant ses études ou encore de le sensibiliser aux moyens d'obtenir de l'aide, à la stigmatisation et à la santé mentale. Une telle recommandation ferait pas mal de chemin au sein des ministères de l'Éducation en vue d'implanter ce genre de choses dans les écoles.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Ma question s'adressera à M. Van Lieshout.
Contrairement à mes collègues, je ne me sens pas exactement comme Superwoman en ce moment. J'essaie plutôt de concilier le travail et le fait d'être la mère d'une petite fille de huit mois. Comme je l'ai déjà mentionné, j'en suis à me demander si je réussis à bien faire mon travail de maman et de députée. Je comprends donc l'influence énorme de la santé mentale sur les jeunes mères.
J'aimerais revenir au fait qu'on s'entend tous pour dire qu'on doit investir davantage en santé mentale. Quelqu'un a dit qu'on n'avait peut-être pas besoin de sommes astronomiques, mais qu'il fallait quand même investir. Vous l'avez dit plus tôt, tout comme des organismes communautaires l'ont fait au cours d'une réunion précédente. Ces derniers font un travail de première ligne exceptionnel auprès des gens qui souffrent de problèmes de santé mentale. Ils ont besoin d'aide et de ressources, parce que les demandes et les besoins explosent. L'une des façons d'aider ces organismes est évidemment de reconnaître qu'ils ont besoin de plus de moyens financiers pour réussir à embaucher plus de personnel et à offrir davantage d'heures de service.
Monsieur Van Lieshout, en quoi est-il important de reconnaître que c'est au moyen de transferts en santé qu'on investit en santé et qu'on s'occupe d'injecter plus d'argent dans le système au niveau fédéral pour qu'il y ait plus de budgets dans nos ministères? Comment cela peut-il aider les organismes sur le terrain à répondre aux demandes grandissantes?
[Traduction]
Félicitations pour la naissance de votre fille de huit mois. Vous semblez porter avec brio le double chapeau de maman et de députée, mais bon, je vais arrêter de vous lancer des fleurs.
Beaucoup de personnes remarquables accomplissent un travail remarquable dans tous les secteurs, aussi bien au municipal qu'au provincial ou au fédéral. Santé publique Ontario mise beaucoup sur la santé mentale périnatale dans les organismes communautaires, les hôpitaux et ainsi de suite. Si le gouvernement fédéral définissait des normes de qualité, il devrait entre autres couvrir le besoin de soins fondés sur des éléments mesurables. Mme Simon en a parlé.
En effet, il importe de collaborer et de se coordonner, mais il faut aussi mesurer ce qui se fait et évaluer si c'est efficace. Pour déterminer comment affecter les budgets et tout cela, on pourrait faire appel aux organismes qui sont en mesure de contribuer à maximiser les résultats.
Dans le modèle de soins par paliers, la notion de mesure étaie, bien sûr, les normes de qualité. Il existe dans le milieu des soins de santé mentale périnatals des échelles rudimentaires qui peuvent servir à définir des points de référence, des normes et ainsi de suite.
J'espère avoir répondu à votre question.
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Je pense que l'urgence d'investir rapidement est là. Pour cela, j'entends bien ce que vous dites, soit d'éviter le dédoublement et d'éviter le temps qui est perdu à s'attacher à ces ententes.
En ce moment, c'est clair que les provinces et le Québec demandent unanimement un transfert en santé jusqu'à 35 %, notamment parce qu'ils sont conscients que sur leur territoire il y a des projets qui ne peuvent pas voir le jour par manque de moyens financiers. Donc, il faudra aussi trouver une façon d'accélérer ces transferts.
Maintenant, j'aimerais passer à vous madame Elliott. Vous êtes pédiatre. Vous travaillez avec les adolescents. Pour avoir des adolescents dans mon entourage, je sais qu'ils sont très anxieux au sujet de l'environnement, on parle d'écoanxiété. Jusqu'à maintenant, nous avons peu abordé ce thème dans cette étude. J'aimerais connaître les répercussions que cela peut avoir sur les adolescentes avec qui vous travaillez.
Le gouvernement doit absolument se préoccuper des questions environnementales. Cela pourrait, entre autres, soulager ces jeunes et répondre à leurs préoccupations.
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Je tiens à revenir à quelque chose dont quelques personnes ont parlé: il faut ramener les soins dans les familles, dans les écoles et dans les collectivités.
Il y a quelque chose qui m'apparaît très curieux: après deux ans et demi de très forte hausse des problèmes de santé mentale — nous en avons tous parlé —, pourquoi des conseillers et des psychologues en milieu scolaire ont-ils été soit licenciés, soit jugés superflus? J'ai eu écho de plusieurs exemples juste à Calgary. Or, ces personnes doivent compter parmi les ressources accessibles dans les écoles.
Je pense aussi qu'il faut ramener les services. J'adore les services prénatals ou pour la petite enfance où on apprend aux parents à contrôler leurs propres émotions. On a beau avoir le QI le plus élevé, si on n'a pas appris à contrôler ses émotions, lorsqu'une avalanche déferle, on risque de commencer à faire des choses qu'on ne ferait pas normalement. Selon moi, il faut offrir de la formation dans divers milieux — la collectivité, les lieux de culte, les écoles — pour aider les parents à apprendre des techniques comme la pleine conscience et la gestion des émotions, ce qui leur serait utile sur bien des plans au moment d'aider un adolescent. Quand on se trouve dans un milieu qui est perturbé, c'est impossible de ne pas l'être soi-même.
Pour aider un jeune, mon approche consiste souvent à me concerter avec ses parents et à les encadrer afin qu'ils se sentent mieux, dans un premier temps, pour ensuite gérer les crises.
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Je vis à environ 2 000 mètres de la réserve des Six Nations à Caledonia, en Ontario, alors nous avons eu la chance de tisser des liens avec la maison des naissances des Six Nations et un groupe de sages-femmes autochtones de la région afin de comprendre les difficultés propres aux Autochtones dans notre coin de pays.
De plus, j'effectue du travail clinique auprès de membres des Premières Nations d'Ohsweken, des Six Nations, de Rama, près d'Orillia, et ainsi de suite, et j'ai eu l'honneur de collaborer avec eux. Leurs histoires sont choquantes. Comme vous l'avez souligné, beaucoup de choses se transmettent d'une génération à l'autre. C'est très choquant.
Pendant la pandémie de COVID‑19, nous avons mené une étude en collaboration avec les sages-femmes des Six Nations. Nous avons relevé un certain nombre des problèmes dont d'autres témoins ici présents ont parlé, comme l'accès inadéquat aux soins de santé. Cependant, nous avons aussi constaté la force et la résilience remarquables des personnes en cause. Ce sont bien sûr des qualités qui leur sont propres, mais elles se manifestent aussi parce qu'elles ont cette maison des naissances exceptionnelle.
Il faut des aides axées sur les membres des Premières Nations, des pairs qui se sont rétablis... Nous devons collaborer avec eux — pas de santé pour nous sans nous — afin de comprendre les difficultés particulières qu'ils rencontrent et de mettre au point des stratégies particulières, adaptées, pour répondre à ces besoins, qu'ils soient associés aux traumatismes intergénérationnels, à l'approvisionnement sûr en eau potable, à la sécurité alimentaire ou à d'autres choses de ce style.
C'est ce que nous faisons. Nous tentons de contribuer à la formation des sages-femmes. Je ferai de la formation avec elles prochainement. Nous espérons que ce partenariat se poursuivra afin que nous puissions mieux comprendre. J'ai la chance d'avoir d'excellentes enseignantes.
J'espère avoir répondu à la question.
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Je vous remercie sincèrement de nous avoir fait part de votre expérience. Nous sommes tous d'accord pour dire que vous effectuez un travail très important, un travail qui, je l'espère, inspirera d'autres centres qui fournissent des services aux communautés autochtones des quatre coins du pays, en collaboration avec elles.
Passons à un autre sujet. Il vous inspirera peut-être des réflexions, madame Simon.
Il est beaucoup plus question de l'anxiété extrême que les changements climatiques causent aux jeunes et qui va en s'aggravant. Nous constatons déjà les conséquences des changements climatiques autour de nous. Personnellement, je représente des localités qui, au cours des dernières années, ont été évacuées à court ou à long terme en raison de feux de forêt historiques. On sait que la situation exacerbe d'autant plus les problèmes de santé mentale.
Je me demande ce que vous disent les jeunes, dans le cadre de votre travail pour Jeunesse, J'écoute, en ce qui a trait à ce que l'on appelle l'écoanxiété, l'anxiété associée aux changements climatiques.
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C'est une question extrêmement pertinente.
C'est curieux. Actuellement, les jeunes n'emploient pas les mots écoanxiété ou anxiété associée aux changements climatiques. Bien sûr, lorsque surviennent des catastrophes liées au climat, qu'il s'agisse de feux de forêt ou d'inondations, les appels sont plus nombreux depuis les régions touchées. Au fur et à mesure que de telles catastrophes continueront à survenir, les jeunes continueront à communiquer avec nous à ce sujet.
Jeunesse, J'écoute a notamment pour rôle d'aider les jeunes à apprendre à mettre des mots sur ce qu'ils ressentent, à réfléchir à ce que cela signifie et à se demander ce qu'ils peuvent faire. Notre travail, c'est souvent de les aider à déterminer ce qu'ils peuvent contrôler et quel est leur rôle. Lorsqu'il est question des changements climatiques, les jeunes doivent savoir qu'ils ont voix au chapitre et qu'ils peuvent s'exprimer. Cependant, à Jeunesse, J'écoute, nous n'avons pas encore commencé à les aider à s'exprimer, que ce soit en écrivant des lettres ou en discutant des répercussions des changements climatiques.
Je veux par ailleurs faire un lien entre cette réalité et ce dont nous avons parlé il y a un instant, à propos des Autochtones. De toute évidence, à Jeunesse, J'écoute, nous travaillons beaucoup auprès des jeunes membres des Premières Nations, métis et inuits, en adoptant une approche axée sur les différences. Nous constatons qu'ils sont très inquiets par rapport au climat, par rapport à ce qui se passe dans leur communauté et sur la planète où nous vivons.
Parce que nous sommes en mesure d'avoir des discussions... L'an dernier, nous avons réalisé un projet pilote — qui se poursuit — afin de former des bénévoles autochtones pour notre ligne texto C'est un service offert bénévolement. Son objectif, c'est de mettre les jeunes qui nous envoient un message texte, qu'ils soient Métis, Inuits ou membres des Premières Nations, en contact avec des bénévoles de la même origine, ce qui leur permet de discuter des changements climatiques ou de tout autre sujet qui les préoccupe avec quelqu'un qui comprend concrètement leur contexte culturel. Les résultats sont tout à fait extraordinaires.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je remercie également tous les témoins d'avoir répondu à d'excellentes questions sur le fonctionnement du financement bilatéral et l'intégration de la santé mentale dans les soins de santé. À vrai dire, je pense que nous avons fait des progrès considérables à ce chapitre. Les gens demandent maintenant de l'aide. Cependant, quand ils le font, il n'y a rien pour les aider. Sur le plan de l'équité en santé, il y a un énorme fossé qui persiste.
Dre Elliott, je suis probablement votre plus grande admiratrice. J'ai beaucoup de plaisir à vous voir témoigner, et beaucoup de ce que vous avez à dire me plaît. Vous avez mentionné un sujet qui m'intéresse particulièrement et que j'ai très à cœur: le volet sensibilisation de l'autoréglementation, c'est-à-dire fournir aux enfants les outils nécessaires. Après tout, les pots sont déjà cassés. Les réseaux sociaux sont là pour de bon. Nous ne ferons pas demi-tour; nous ne reviendrons pas en arrière. C'est notre réalité. Il nous revient maintenant de fournir aux enfants les bons outils pour gérer leurs émotions et de leur inculquer le vocabulaire nécessaire pour le faire sans pour autant leur donner à tort l'impression — cela arrive aussi — qu'ils ont quelque chose qu'ils n'ont pas. Eux aussi sont affectés par le syndrome de l'imposteur, et c'est dangereux.
Selon vous, lorsqu'il est question d'investir, quel devrait être le rendement de cet investissement? Je mentionne un médecin que j'adore, le Dr Stuart Shanker — j'ignore si vous connaissez ses travaux, Dre Elliott —, puisqu'il est question d'autoréglementation et du fait d'apprendre aux enfants et au personnel enseignant à reconnaître ce qui est à l'origine de leur comportement.
Pourquoi voit-on de telles choses, Dre Elliott, et pourquoi les voit-on maintenant?
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Je suis vraiment ravie que vous soyez au courant de l'autorégulation et de ces questions.
J'ai récemment offert un programme intitulé « Reset to Reconnect », auquel ont participé six familles avec des garçons adolescents. Le programme comporte une sorte d'enseignement initial, puis une mise en application des apprentissages par les garçons, qui signalent différentes choses à leur famille et élaborent eux-mêmes un plan pour la famille. Après le programme, les garçons ont indiqué qu'ils dormaient mieux, qu'ils géraient mieux leurs émotions et que les liens avec leurs familles s'étaient enrichis. Le temps que leur enlevaient les médias sociaux et les écrans pouvait être consacré à d'autres activités.
En outre, nous constatons une hausse des troubles à symptomatologie somatique, où un événement psychologique sous-jacent se manifeste par des symptômes physiques. Nous avons observé dans les médias sociaux un phénomène appelé les tics Tik Tok, c'est-à-dire des symptômes physiques chez des jeunes qui regardent beaucoup de vidéos sur Tik Tok.
Pour revenir à votre question, si nous pouvions éduquer les parents sur l'autorégulation et enseigner aux jeunes comment se comporter dans un milieu où il faut se réguler, que ce soit l'école, un lieu de culte ou ailleurs, tout le monde aurait le même langage et la même capacité à prendre une pause avant de réagir. Dans bien des situations, les choses sont compréhensibles, ou « figureoutable », si on est capable d'autorégulation.
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« Figureoutable »: je connais bien cette expression de Marie Forleo. C'est une bonne expression.
Je crois que nous sommes vraiment sur la même longueur d'onde. Au cours de la présente ronde, nous n'avons pas réellement abordé l'incapacité des parents à se réguler, laquelle est transmise à l'enfant. Des parents ont recours à des mécanismes d'adaptation inadéquats, comme le fait de regarder leurs écrans, de se déconnecter et de faire défiler les pages. Je pense qu'il faut donner un nom à ce phénomène, car, selon moi, il est comparable à l'alcoolisme ou à une autre forme de dépendance, où l'on se déconnecte pour ne pas avoir à faire face au stress de la vie.
Nous sommes en pleine crise de l'abordabilité. Il y a des ménages où les parents n'ont pas les moyens de nourrir leur famille même si les deux travaillent, et qui, à un moment donné — il y a des parents qui m'écrivent. Ils gagnent plus de 100 000 $. C'est beaucoup d'argent. Maintenant, ils ne peuvent pas se le permettre parce que le coût de l'épicerie et du logement a explosé.
Voici ma question, Dre Elliott. Existe-t-il des données — car c'est ce qui détermine le financement, au bout du compte — sur les investissements à faire pour donner aux parents les outils dont ils ont besoin pour se réguler également.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être présents aujourd'hui, de répondre à nos nombreuses questions et de nous transmettre tant d'excellentes informations.
Voici ma première question. Nous avons entendu au cours de nombreuses réunions, y compris celle d'aujourd'hui, qu'il manque de soutien et qu'il n'y a tout simplement pas assez d'aide pour répondre aux besoins, qu'il s'agisse de thérapeutes formés ou de véritables psychologues. Il n'y en a pas assez. Même s'il y en avait suffisamment, leurs services sont inabordables pour de nombreux Canadiens.
Selon vous, que peut faire le gouvernement — et plus particulièrement le gouvernement fédéral — pour rendre les soins de santé mentale plus accessibles aux Canadiens partout au pays? Je parle plus particulièrement des coûts, mais aussi de la nécessité de recruter davantage de personnes dans ce domaine et de faire en sorte qu'à l'avenir, nous soyons mieux préparés à faire face à ce type de crise.
J'invite n'importe qui d'entre vous à répondre.
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Selon moi, on a constaté, en particulier au cours de la pandémie de COVID, que, partout dans le monde, les gens se tournent vers la technologie et les services numériques de santé mentale pour régler leurs problèmes. Lorsque nous pensons à ce modèle de soins par paliers, les services de santé numériques sont formidables pour un grand nombre de problèmes moins aigus, pour le counseling en une seule séance et d'autres choses du genre.
Je trouve préoccupante l'affluence de compagnies privées dans ce marché, non seulement au Canada, mais encore plus à l'étranger. Elles arrivent sur le marché et offrent des services numériques qui ne sont pas très efficaces ou fondés sur les données probantes.
Il y a la question des coûts, de sorte que l'on crée un deuxième niveau de services que les gens peuvent choisir de payer. Lorsqu'il est question de choses comme la navigation en ligne, cela devient incroyablement difficile. Si on tape « santé mentale » dans Apple Store ou Google Store, on voit des centaines d'applications, et il n'y a pas que des applications, il y a aussi d'autres types de services numériques.
J'estime que nous avons besoin de normes en matière de soutiens numériques. Nous devons exiger que les compagnies offrant des services numériques au Canada soient en mesure de démontrer l'efficacité des produits qu'ils offrent aux Canadiens et les évaluations dont ces produits ont fait l'objet.
Ma première question s'adresse à Dre Elliott.
Vous avez mentionné que vous travaillez en Alberta. J'ai vraiment apprécié les idées que vous avez partagées au sujet de votre travail sur les troubles alimentaires et les troubles de l'anxiété auprès des filles et des jeunes femmes.
Pour revenir à des questions que j'ai soulevées au cours des travaux du comité, pouvez-vous donner un aperçu des défis à relever, notamment en ce qui concerne les troubles de l'anxiété, mais aussi les troubles de l'alimentation, dans le contexte des communautés autochtones?
De nombreuses communautés autochtones sont aux prises avec une forte insécurité alimentaire. Le coût d'une alimentation saine et équilibrée y est démesuré par rapport au reste du pays. Évidemment, les ressources sont encore plus rares lorsqu'il s'agit de soutien en matière de santé mentale.
Je me demande quels enseignements vous tirez de votre travail avec les jeunes, les filles et les femmes autochtones. Avez-vous des recommandations concrètes à formuler au comité?
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Comme je l'ai mentionné, nous entendons des jeunes âgés de 5 à 13 ans qui pensent ou parlent de suicide. Je le répète, ce qui est important selon moi, c'est que lorsqu'un jeune nous tend la main, nous avons une occasion formidable de l'aider - le fait qu'il soit prêt à en parler.
C'est effrayant pour nous qui sommes adultes, et il est choquant d'entendre des jeunes filles parler de suicide. En tant que mère d'une jeune fille, je le ressens. Je veux aussi insister pour dire que le fait qu'elles parlent de suicide est bien, car cela nous donne l'occasion de leur parler d'espoir, de résilience, de force intérieure, de présence dans leur propre vie et des outils d'adaptation dont elles disposent. Donc oui, les jeunes nous parlent de suicide.
Votre autre question concernait les femmes âgées de 25 ans et plus. Il est certain que nous entendons ces jeunes femmes parler d'anxiété, de dépression, de problèmes relationnels et de tous ces éléments. Chez Jeunesse, J'écoute, nous ne posons pas de diagnostic. Nous avons effectué des évaluations où nous avons demandé aux jeunes de répondre à un questionnaire appelé Achenbach afin de déterminer s'ils ont des problèmes pouvant être diagnostiqués. Il est certain que nous rencontrons un grand nombre de jeunes qui nous consultent et qui ont des problèmes pouvant être diagnostiqués, mais nous nous occupons davantage de ce que ressentent les jeunes à ce moment-là. Les sentiments que les femmes de 25 ans et plus nous rapportent sont des niveaux élevés d'anxiété, beaucoup de dépression et le sentiment d'avoir perdu le contrôle de leur vie.
Comme je l'ai dit, ce que nous avons remarqué, en particulier pour ces jeunes adultes d'un âge plus avancé, c'est qu'ils soulèvent des difficultés liées au deuil et à la perte. À cause de la pandémie, il y a des étudiants de niveau postsecondaire qui n'ont pas pu aller faire leurs études. Il y a des gens qui n'ont pas pu voir leur famille et qui se sentent isolés. Cela se poursuit dans notre nouvelle réalité.
Je dirais que les jeunes abordent tous les problèmes, et ce, à tout âge, mais ce sont là quelques-unes des différences que nous constatons à mesure que les jeunes vieillissent.