Bienvenue à la 43e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 31 octobre, le Comité reprend son étude sur les femmes et les filles dans le sport.
La séance d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre pris par la Chambre le 23 juin 2022. Certains membres du Comité siègent en personne, et d'autres siègent à distance à l'aide de l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité. Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous nous joignez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer. Veuillez mettre votre micro en sourdine quand vous n'avez pas la parole. Pour les services d'interprétation dans Zoom, vous pouvez sélectionner le français, l'anglais ou le parquet au bas de votre écran. Si vous vous trouvez dans la salle, utilisez l'oreillette fixée à votre microphone et sélectionnez la langue qui vous convient.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Les députés présents dans la salle peuvent demander la parole en levant la main. Ceux qui utilisent l'application Zoom pourront utiliser la fonction « Lever la main ». La greffière et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre des interventions. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension.
Conformément à notre motion de régie interne, j'avise le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
Avant de souhaiter la bienvenue à nos témoins, j'aimerais vous avertir que le sujet de notre étude est très délicat. Nous discuterons de situations mettant en cause de la violence, qui risquent d'ébranler des téléspectateurs, des membres du Comité, du personnel ou quiconque a vécu des expériences semblables. Si vous éprouvez de la détresse ou si vous avez besoin d'aide, veuillez vous adresser à la greffière.
Je tiens à informer les gens qu'il y a eu quelques changements à notre ordre du jour. Nous recevrons deux groupes de témoins aujourd'hui. Nous entendrons notre premier groupe de témoins maintenant, puis un deuxième groupe dans une heure.
Dans notre premier groupe de témoins d'aujourd'hui, nous accueillons Myriam Da Silva Rondeau et Ciara McCormack.
Nous vous donnerons une certaine marge de manœuvre. Vous aurez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire, mais je vous prierais de me regarder; lorsque je commencerai à faire des gestes, vous saurez que votre temps est presque écoulé.
Je cède maintenant la parole à Mme Da Silva Rondeau.
Madame Da Silva Rondeau, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie le Comité permanent de la condition féminine de nous faire une place aujourd’hui.
J'étais jusqu'à tout dernièrement une athlète en boxe olympique. Je suis médaillée d'argent aux Jeux panaméricains de 2019 et je suis montée six fois sur le podium aux Championnats continentaux. Je me suis maintenue parmi les 10 meilleures pendant toutes mes années au sein de l'équipe nationale et j'ai participé aux Jeux olympiques de Tokyo de 2020, repoussés à 2021, terminant 9e au classement général.
Mon arrivée dans l'équipe nationale s'est faite en 2011. Malgré un podium dès mon entrée sur la scène internationale, c'est avec cette phrase qu'on m'a accueillie: « À ton âge, on ne peut pas penser au développement; t'es déjà vieille ». En juin 2019, j'ai reçu un appel du directeur de sport de haut niveau, qui me disait que mes résultats me rendaient admissible à un brevet. Par contre, je devais quitter définitivement mon entraîneuse des 10 dernières années et mon équipe pour me réinstaller. Je devais également quitter mon emploi rapidement et donner une réponse en moins de 48 heures, sinon le brevet serait offert à quelqu'un d'autre.
J'ai donc négocié une centralisation qui débuterait à la fin de l'année scolaire, puisque je suis enseignante. Il m'a dit que je n'allais pas recevoir le plein montant du brevet en faisant cela. Je savais que ce n'était pas vrai, mais je ressentais quand même une pression, une impression d'être déjà fautive avant mon entrée. J’ai voulu rapporter cette situation, parce que ce type d'incident est très fréquent dans les fédérations sportives. Malheureusement, ma plainte n’était pas recevable et ne le sera toujours pas avec le nouveau système du Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport, le BCIS.
Dès mon arrivée au centre, on a été clair: je devais travailler avec le psychologue de l'équipe en priorité. C'était une personne en laquelle je n'avais aucune confiance, compte tenu d'expériences antérieures et de sa grande camaraderie avec le personnel administratif. Nous devions nous soumettre à des tests de personnalité chaque année. Je me suis adressée aux différentes ressources en place qui servent à protéger les athlètes, leur signifiant mon inquiétude. Ils m'ont répondu que c'était irrecevable.
Aux Championnats du monde en 2019, j’ai été témoin de la distribution de somnifères d'ordonnance aux athlètes par des membres du personnel. L'entraîneur, qui avait une relation de confiance avec toutes les athlètes, a été remplacé par le directeur de sport de haut niveau sans préavis ni explication. La massothérapeute de l'équipe devait limiter ses contacts avec nous. Au retour, c'est l'équipe entière qui s'est adressée aux ressources en place. Encore une fois, on a répondu que nos préoccupations étaient irrecevables.
L'équipe de soutien intégrée a fourni de l'accompagnement et du soutien en matière de communication et de relations interpersonnelles au personnel administratif. Autrement dit, ce n'était pas leur faute et on allait les aider au détriment des athlètes. C'est comme cela que le système fonctionne, parce que personne, pas même le BCIS, n'a l'autorité nécessaire pour imposer des sanctions ou donner des avertissements.
Quelques semaines plus tard, l'entraîneur de confiance a été renvoyé, sans explication ni préavis. Vous vous doutez de ce qui s'est passé lorsque nous nous sommes ensuite adressées aux différentes instances censées nous protéger: nos plaintes étaient irrecevables.
Quand les athlètes mentionnent qu'il n'y a pas de système pour les protéger, ce n'est pas du nombre de ressources ou de programmes dont ils parlent, car il y en a beaucoup. Ils parlent plutôt du pouvoir de tenir les gens responsables de leurs actes et d'imposer des conséquences, qui est complètement inexistant dans le système du sport au Canada.
Après deux ans à temps plein dans le processus de centralisation, l'épuisement psychologique s'est fait sentir et je n'étais plus capable de me protéger moi-même. On m'a obligée à livrer des combats dits « tests » contre une partenaire beaucoup plus lourde et plus grande que moi, et ce, à plusieurs reprises. J'ai communiqué et verbalisé mes préoccupations, mais rien n'a été fait.
J'ai souffert d'un long épisode de dissociation du mois d'avril 2021 au mois de septembre 2021. Je n'ai donc aucun souvenir de l'expérience qui est censée être la plus mémorable: ma participation aux Jeux olympiques de Tokyo. Le seul souvenir qu'il m'en reste est une vidéo mise en ligne sur les réseaux sociaux par le nouvel entraîneur à la suite de ma performance. Dans cette vidéo, après mon combat, il mentionnait que je n'avais pas été à la hauteur de leurs attentes à eux, que cela le mettait était mal à l'aise, que je n'avais pas su saisir l'occasion de récolter cette médaille qui manquait à mon pays depuis 30 ans, et que c'était extrêmement embarrassant pour lui et pour la nation.
Malgré ma plainte officielle aux différentes instances en place, l'entraîneur présent dans la vidéo est bien sûr revenu en poste immédiatement, et ce, sans même me présenter ses excuses. On m'a isolée du reste du groupe lors des entraînements. À la suite de ma dénonciation, j'ai subi du harcèlement de façon quotidienne pendant plus d'un mois de la part de l'entraîneur adjoint ainsi que de mes collègues. J'ai finalement été contrainte de quitter le processus de centralisation, de perdre mon brevet et de mettre fin à ma carrière de boxe de façon prématurée pour des raisons évidentes de santé mentale.
Dans le domaine du sport, on parle actuellement de reconstruction du système. Or, sans enquête judiciaire par une tierce partie pour tenir responsables les gens qui perpétuent les abus et la culture actuelle du sport au Canada, aucune reconstruction ne peut avoir lieu. L'ajout d'un système serait, encore une fois, une solution temporaire de réparation, comme ce fut le cas dans les dernières années.
Une commission d'enquête sur la culture toxique de l'abus partout au Canada est absolument nécessaire pour donner la possibilité de construire un système qui permettra aux Canadiens et au sport de rayonner à la hauteur de leurs capacités au moyen de résultats et de médailles. C'est ce que nous souhaitons tous.
Je remercie les membres du Comité.
Merci, madame la présidente.
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Il s'intitulait « A Horrible Canadian Soccer Story—The Story No One Wants to Listen to But Everyone Needs to Hear ». J'y racontais l'histoire d'un gigantesque camouflage qui a eu lieu dans le soccer féminin canadien — pendant plus d'une décennie — au sujet d'un délinquant sexuel qui a depuis été reconnu coupable.
En 2008, Bob Birarda était le personnage le plus influent du soccer féminin au Canada, en tant qu'entraîneur en chef des Whitecaps de Vancouver et de l'équipe nationale des moins de 20 ans du Canada. Il a également été entraîneur adjoint aux Jeux olympiques de 2008 à Pékin. Il a été congédié pour inconduite sexuelle à l'endroit de joueuses adolescentes, après que moi-même et d'autres avions signalé son comportement abusif pendant plus d'un an. Les Whitecaps et Canada Soccer ont tous deux camouflé le congédiement de Birarda en octobre 2008, le présentant publiquement comme un départ résultant d'un accord mutuel, ce qui lui a permis de continuer à entraîner des adolescentes pendant encore 11 ans.
Il a été suspendu comme entraîneur le lendemain de la publication de mon blogue, en février 2019. Mon blogue expliquait en détail comment, entre 2008 et 2019, un petit groupe de mes anciennes coéquipières et moi-même avions demandé collectivement de l'aide, à plus de 30 reprises, pour que Birarda soit congédié, sans succès. Nous nous sommes adressées à la police. Nous avons écrit une lettre au propriétaire des Whitecaps, Greg Kerfoot, et à deux de ses cadres supérieurs. Nous avons placardé le complexe de soccer où Birarda travaillait d'affiches où figurait le numéro d'une ligne d'assistance que les joueuses pouvaient appeler si un entraîneur les mettait mal à l'aise. Nous avons présenté à B.C. Soccer un rapport de police, en présence d'une victime, et nous avons raconté notre histoire et partagé des preuves avec un nombre incalculable de représentants des médias canadiens. Nous avons été manipulées et nous avons subi des préjudices à répétition, après avoir raconté notre histoire traumatisante à des gens faisant partie d'un système auquel on nous avait dit que nous pouvions faire confiance, mais qui était plutôt conçu pour nous réduire au silence.
Sur le plan personnel, au cours de cette décennie horrible, j'ai lutté contre la dépression et les idées suicidaires et j'avais l'impression d'être prise au piège. Tout me semblait lourd, sombre et difficile. Je détestais retourner dans ma ville natale, Vancouver, et j'avais de la difficulté à me retrouver dans ce que j'aimais le plus, le soccer. Comment peut‑on agir comme si de rien n'était en sachant qu'un prédateur continue d'avoir accès à des jeunes filles? Comment peut‑on se sentir mentalement bien dans un monde où des gens en position d'autorité ne font rien pour empêcher que cela se produise?
Lorsque j'ai appuyé sur le bouton « envoyer » à 8 heures, le lundi 25 février 2019, j'étais épuisée, terrifiée et seule. J'avais l'impression d'avoir été détruite par un système, dont j'ai appris depuis qu'il était conçu pour avoir raison de moi, me forçant à choisir entre ma propre sécurité en tant que dénonciatrice et celle des joueuses adolescentes que Birarda continuait d'entraîner.
Après sa publication, mon blogue est rapidement devenu viral. Peu de temps après, d'autres anciennes joueuses des Whitecaps et de l'équipe nationale des moins de 20 ans ont fait part publiquement de leurs expériences et, ce qui est le plus important, les victimes de Birarda ont fini par se manifester.
Le mois dernier, Birarda a été condamné à deux ans de prison pour des crimes sexuels commis contre quatre anciennes joueuses adolescentes sur une période de 20 ans. Sa dernière victime remontait à 2008, année où il avait été congédié à la fois par les Whitecaps et par Canada Soccer.
Compte tenu de la folie, des peines et des torts que nous avons dû endurer pour faire congédier un délinquant sexuel maintenant condamné, la question que je me pose continuellement est la suivante: combien d'autres Birarda y a‑t‑il dans ce système défaillant? Combien d'autres athlètes subissent encore des préjudices?
Pourtant, le pire tort que j'ai subi dans le système sportif canadien est survenu bien après que j'aie côtoyé Birarda. Les agressions ne se produisent pas sans facilitateurs. Permettez-moi de parler franchement de notre système défaillant, qui permet les abus et qui victimise de nouveau les athlètes qui les dénoncent.
Un rapport sur le camouflage du cas de Birarda a été commandé par Canada Soccer et publié en septembre 2022. Victor Montagliani et Peter Montopoli joueront tous deux un rôle de premier plan dans la Coupe du monde de la FIFA, financée par les contribuables, qui sera présentée au Canada en 2026, en leur qualité de vice-président de la FIFA et de chef de l'exploitation de la Coupe du monde de la FIFA de 2026 au Canada, respectivement. Tous deux ont été désignés dans ce rapport de septembre 2022 comme ayant participé directement au camouflage qui a permis à un délinquant sexuel maintenant reconnu coupable d'avoir accès à des adolescentes pendant une décennie. Des gens comme cela n'ont pas leur place dans le sport, et nous avons besoin de mécanismes pour nous en débarrasser. Quel genre de message cela envoie‑t‑il que les dirigeants d'un sport financé par les contribuables soient récompensés, après avoir camouflé des cas de violence faite à des enfants?
Sur le plan financier, une entité récente appelée Canadian Soccer Business, et les Whitecaps de Vancouver, ont chacun de leur côté tiré parti de ce qui devrait être un actif public de Canada Soccer pour leur propre avantage financier. Ces relations financières inappropriées et préjudiciables, favorisées sans surveillance et au détriment de joueurs de partout au pays, sur le terrain et à l'extérieur du terrain, se poursuivent encore aujourd'hui.
Andrea Neil, ancienne joueuse et entraîneuse de longue date au sein de l'équipe nationale féminine du Canada, a également dénoncé ces mêmes problèmes concernant Canada Soccer pendant des années et a de précieux renseignements à partager.
Il est également important de s'attaquer à toute une industrie qui a été bâtie à partir d'une conscience morale déformée, représentative de l'état actuel du sport canadien, dans lequel des groupes de loups déguisés en agneaux mentent. Il s'agit notamment d'une entreprise à but lucratif d'Ottawa, appelée ITP, et d'une autre de Toronto, appelée Sport Law. Ces deux groupes se présentent comme un lieu sûr pour les victimes canadiennes d'abus dans les sports, sans révéler qu'ils ont des relations d'affaires avec les institutions qui causent du tort à ces mêmes athlètes.
Prenons l'exemple de Sport Law. Peu après la publication de mon blogue en 2019, une femme, Dina Bell‑Laroche, s'est présentée à moi comme étant une personne passionnée par les problèmes des femmes dans le sport au Canada. Je lui ai fait confiance et j'ai partagé avec elle des détails privés de notre histoire. Elle ne m'a jamais mentionné que la compagnie dont elle était partenaire, Sport Law, avait des relations avec les organismes qui nous avaient causé des préjudices. Je me suis rendu compte de ce conflit d'intérêts des mois plus tard, lorsque son groupe a été retenu pour mener une enquête « indépendante » pour les Whitecaps de Vancouver dans notre affaire. Je mets « indépendante » entre guillemets pour souligner un autre mensonge qui a cours dans notre système actuel. Une enquête n'est pas indépendante si elle est payée par l'institution même qui a quelque chose à perdre advenant des conclusions négatives.
J'ai appris plus tard, soit en 2019, que Sport Law agissait également comme conseiller juridique de Soccer Ontario, tout en dirigeant la ligne d'aide pour les dénonciatrices de Canada Soccer. Vous m'avez bien entendue. À la suite du camouflage de l'affaire Birarda, Canada Soccer disait aux athlètes de soccer que si elles avaient été victimes d'abus, un endroit sûr où appeler était une ligne téléphonique gérée par Sport Law, un groupe qui était payé pour protéger les intérêts juridiques de la plus grande organisation sportive provinciale relevant de Canada Soccer.
Ce qui ressort clairement de mon expérience des abus dans le domaine du sport au Canada, c'est que nous avons perdu de vue ce qui est bien et ce qui est mal. Permettez-moi de dire clairement aujourd'hui à ceux qui traitent avec ITP, Sport Law et d'autres groupes qui se livrent à ce genre de comportement qu'il n'est pas acceptable de se présenter devant des athlètes vulnérables victimes d'abus comme un endroit sûr où échanger de l'information, uniquement pour en tirer parti pour leur bénéfice personnel. C'est une revictimisation épouvantable à laquelle beaucoup trop d'entre nous ont été confrontées, et ce genre de comportement contraire à l'éthique est l'une des nombreuses raisons pour lesquelles la confiance a été complètement brisée dans le système sportif canadien actuel.
Je suis ici aujourd'hui pour dire que ça suffit. Le problème, ce ne sont pas les pommes pourries parmi les entraîneurs, mais plutôt un système qui facilite les choses pour les agresseurs, nuit aux victimes et les réduit au silence, sans qu'elles aient la capacité de s'exprimer à ce sujet en toute sécurité à l'extérieur du système, et qui ne prévoit rien contre les dirigeants sportifs qui permettent les abus. Si nous voulons vraiment éradiquer les abus, nous devons commencer à traiter la crise du sport comme une crise des droits de la personne et à apporter des changements pour que la reddition de comptes, la transparence, l'intégrité et les droits fondamentaux de la personne soient au cœur de notre système.
Un changement systémique signifie qu'il faut faire la lumière sur les relations financières qui préservent le pouvoir, ainsi que découvrir et démanteler les relations et les systèmes qui protègent les institutions sportives canadiennes, au détriment de la vie des athlètes. Les groupes comme le Bureau du Commissaire à l'intégrité dans le sport ne sont pas la solution, car ils sont aux prises avec les mêmes conflits d'intérêts et les mêmes personnes dont il a été question plus tôt. Seule une vaste enquête judiciaire sur les abus dans le sport canadien jettera l'éclairage nécessaire sur les torts causés par le passé, tout en rétablissant la confiance pour un avenir meilleur.
Comme je l'ai dit dans les dernières lignes de mon blogue de 2019, paroles qui demeurent malheureusement encore vraies aujourd'hui, « compte tenu de ce que nous avons vécu, il faut aller plus loin qu'où nous en sommes aujourd'hui ».
Merci.
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Comment je vais? Je suis reconnaissante d'être ici. Le parcours a été très long, évidemment. Nous sommes là‑dedans depuis 2007, alors oui, je suis très reconnaissante.
J'ai l'impression que les gens qui peuvent faire quelque chose à ce sujet écoutent enfin. La route a été longue, sombre et difficile, et les choses doivent changer. C'est la raison pour laquelle j'ai traversé le pays en avion et je me suis placée dans une situation très vulnérable: pour que vous puissiez mettre un visage sur les préjudices. J'ai subi des préjudices. Mes amies en ont subi aussi, et ce n'est pas seulement ce que nous avons vécu en tant qu'athlètes. C'est la suite des choses — ce que nous avons dû endurer pour essayer de dénoncer un délinquant sexuel.
Je pense que c'est le message le plus important, du point de vue de la santé mentale. Avant d'écrire le blogue, jusqu'à ce que je l'écrive, j'ai traversé 10 années désastreuses. Je ne comprenais pas ce qui se passait, mais maintenant je me rends compte que c'est le traumatisme d'avoir été manipulée pendant 10 ans — après avoir signalé que des enfants étaient en danger, sans que personne n'écoute, et en croyant faire partie d'un système qui se souciait vraiment de moi, en tant que personne, et des enfants en général.
Depuis que j'ai écrit le blogue et que j'ai communiqué avec d'autres personnes comme Mme Da Silva Rondeau... Il y a le sentiment d'isolement, l'impression d'être le problème et le fauteur de troubles. Il y a la solitude. Je pense simplement que je me sens validée et entendue. Même dans cette horrible communauté, nous faisons maintenant partie d'un groupe d'athlètes qui ont vécu la même chose.
Je me sens beaucoup mieux en ce moment, malgré les apparences.
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Encore une fois, je pense que cela se résume au fait pour les athlètes de pouvoir compter sur un groupe qui défend uniquement leurs intérêts, parce que, malheureusement, les gens n'ont pas de sens moral. C'est une question d'affaires et d'argent, et s'ils peuvent exploiter l'information dont ils disposent au sujet des athlètes, ils le font pour pousser leur entreprise du côté de l'argent et du pouvoir, et il existe malheureusement des gens qui choisissent de s'engager dans ce genre de conflit d'intérêts. Encore une fois, je pense qu'il faut un groupe qui défend les intérêts des athlètes.
Je crois qu'il est également important de mentionner que, lorsque vous dénoncez une situation, vous n'avez aucun contexte ni expérience. Vous êtes prise dans un tourbillon, et les gens vous tendent la main. Si vous n'êtes pas au courant des tenants et des aboutissants, il est facile de... Si quelqu'un s'adresse à vous, vous pensez que cette personne est là pour vous aider. Vous n'êtes même pas au courant de tout ce qui protège l'institution du sport, et il est très facile de se laisser aspirer.
Encore une fois, c'est là où je pense qu'il est très important que nous ayons cet équilibre dans le système, de sorte que lorsqu'il y a dénonciation, la façon dont j'ai dénoncé... La seule raison pour laquelle j'ai réussi à passer à travers le premier mois, ne serait‑ce que mentalement, c'est que, par hasard, mon amie était amie avec Gen Simard, une dénonciatrice dans l'affaire Canada Alpin. J'ai passé du temps au téléphone avec elle pendant un mois complet. Je ne l'ai jamais rencontrée en personne, mais elle m'a appuyée.
Il faut qu'il y ait un organisme officiel qui le fasse. Je pense que s'il y a un groupe qui protège les athlètes, elles ne seront pas vulnérables aux organisations qui s'en prennent à elles en période de fragilité et qui vont utiliser leurs renseignements pour les exploiter et obtenir des contrats auprès des institutions. Malheureusement, à ce stade‑ci, il y a si peu de réglementation que cela se produit tout le temps.
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Merci, madame la présidente.
Je suis désolée de ne pas pouvoir être avec vous en personne aujourd'hui.
Je tiens d'abord à vous remercier toutes les deux de votre témoignage. Je dois reconnaître qu'il est difficile de partager ce genre d'histoires, surtout avec les expériences que vous avez vécues et du fait que vous n'avez pas été entendues ou crues. J'ai confiance en vous. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Ma question s'adresse à vous deux. J'aimerais que vous répondiez toutes les deux.
Vous et d'autres témoins qui ont comparu devant le Comité nous avez dit que le fait de dénoncer les abus dans votre sport, lorsqu'il y a des abus dans le sport, a des répercussions directes sur vous.
Madame Da Silva Rondeau, vous avez dit aujourd'hui qu'il y a beaucoup de soutien et de ressources, mais qu'il n'y a personne pour assurer une reddition de comptes. Je pense que vous avez toutes les deux donné des exemples d'organisations qui étaient censées vous aider, mais qui étaient clairement en conflit d'intérêts parce qu'elles travaillaient des deux côtés. Il est très clair pour moi que le désir de justice a eu un grand coût émotionnel pour vous, pour vos amies, pour vos coéquipières et pour votre réputation, et a souvent eu un impact sur votre carrière.
Il y a eu un article dans le Guardian au sujet de ce que vous avez dit, madame McCormack. Il s'intitule « Sexual abuse in sport: FIFA supports executives after failure to tell players about sexual abusive coach ». Vous avez dit que lorsque vous dénoncez un cas d'abus et qu'on ne vous croit pas, cela entraîne d'autres cas d'abus pour d'autres personnes, des enfants et des jeunes. Nous devons changer cela.
J'ai quelques questions, mais j'aimerais d'abord vous lire ceci:
La FIFA a soutenu les hauts dirigeants de son organisation après avoir omis de dire aux joueuses et au public la véritable raison pour laquelle Bob Birarda, un délinquant sexuel reconnu coupable et ancien entraîneur de l'équipe nationale, avait quitté Canada Soccer en 2008.
Les hauts dirigeants — Victor Montagliani, président de la Concacaf et vice-président de la FIFA, et Peter Montopoli, chef de l'exploitation pour le Canada à la Coupe du monde de 2026 — sont des cadres supérieurs de Soccer Canada qui ont joué un rôle central dans le départ de Birarda de son poste d'entraîneur de l'équipe nationale féminine de moins de 20 ans, après qu'on eut découvert qu'il avait agi de façon inappropriée avec ses propres joueuses.
Ces personnes occupent toujours des postes de haut niveau.
J'aimerais vous poser deux questions. Premièrement, comment pouvons-nous protéger les survivantes, les victimes et les témoins, même au sein de ce comité, contre d'autres abus, alors que vous dénoncez à nouveau la situation, en mettant en jeu votre sécurité, y compris votre sécurité émotionnelle? Deuxièmement, que pouvons-nous faire pour que les futures survivantes puissent dire leur vérité en toute sécurité, sans être soumises à d'autres souffrances et à d'autres victimisations?
Ces questions s'adressent à vous deux.
Merci.
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Je suis tout à fait d'accord avec Mme Da Silva. Concernant le fait que la FIFA protège encore des gens directement impliqués dans cette affaire, je pense que, sur le plan sociétal, nous devons dire que ce n'est pas acceptable et trouver un moyen de rompre ces relations. Nous estimons, quant à nous, qu'ils se sont tenu les coudes pendant 11 ans. Que nous nous adressions aux médias, aux organisations de soccer ou à qui que ce soit d'autre, tout le monde couchait avec tout le monde et protégeait tout le monde, de sorte nous n'avions nulle part où aller.
Même du côté de ce que nous pourrions faire quand des gens se manifestent, par exemple pour obtenir une thérapie... J'ai eu la chance d'avoir les ressources nécessaires pour avoir beaucoup de thérapie pendant la pandémie de COVID, et cela a complètement changé la situation pour moi, mais c'était un privilège absolu et non un droit. J'ai été complètement détruite par notre système sportif pendant 10 ans et je pense que ce genre de ressources, comme du soutien, ne serait‑ce que... C'est le genre de situation où on est tellement isolé et confronté à ces organisations massives et à ces gens et ce pouvoir, alors qu'il n'y a rien du tout en face.
Comme l'a dit Mme Da Silva, les gens ont signé des ententes de confidentialité, même ceux qui veulent dénoncer la situation à Canada Soccer, les membres du conseil d'administration, les anciens entraîneurs. Je connais très bien des gens qui veulent parler de ce qui s'est passé, mais qui sont liés par des ententes de confidentialité et qui ont peur à cause des ramifications juridiques. Il y a toutes ces choses qui... Je pense qu'il est très important de faire comprendre que tout cela n'est pas normal.
Des groupes comme la FIFA ne sont pas au‑dessus des droits fondamentaux de la personne et devraient traiter les gens correctement, et les athlètes ne devraient pas avoir à subir cela. Mon souhait le plus cher serait que les 11 années pendant lesquelles nous avons été réduites au silence donnent au Canada une voix forte et un rôle de premier plan et qu'il dise qu'il n'est pas acceptable que ces gens viennent au Canada à un événement payé avec l'argent des contribuables et qu'ils protègent des gens qui ont aidé à couvrir un prédateur sexuel. On manque complètement de soutien juridique, psychologique, etc. Il n'y a absolument aucun soutien à l'heure actuelle, et je pense qu'il faudrait au moins changer cela.
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La première chose, à mon avis, c'est l'éducation. Très souvent, dans mon parcours d'athlète, j'ai cru que c'était la conséquence de mon franc-parler; j'ai été mise sur le banc ou il m'est arrivé des choses désagréables. Il y a deux ans, j'ai appris qu'il s'agit d'une forme de violence appelée « négligence ».
C'est ma grande question: pourquoi les enfants et les parents ne sont-ils pas informés de ce à quoi ressemble la violence? On ne fera pas disparaître les prédateurs. Ils seront toujours là, mais il y a des façons d'atténuer les dommages qu'ils vont causer. D'après moi, c'est la première chose. Il faut donner aux enfants les moyens de savoir, et, ensuite, il faut un endroit sûr pour signaler les incidents.
Pendant 11 ans, j'ai littéralement décrit tous les... au point d'afficher le complexe sportif où il se trouvait. Mais il ne s'est rien passé. Il faudrait une sorte d'entité extérieure au sport, parce que la chose la plus importante à reconnaître, c'est que les institutions sont responsables des abus et qu'elles ne veulent pas donner des moyens aux victimes. C'est le problème fondamental du système.
Pour atténuer le problème, il faut une entité extérieure à la responsabilité de l'institution, une entité qui offre un soutien juridique, de la thérapie et un soutien par des pairs qui ont vécu cette situation et qui peuvent aider à franchir les étapes nécessaires. Il faut informer les victimes pour qu'elles sachent que « c'est de la violence qui vous est arrivée » et que « c'est une situation criminelle qui vous est arrivée ».
Je crois sincèrement que, s'il y avait ce genre d'équilibre dans le système, beaucoup de ces entraîneurs et prédateurs assoiffés de pouvoir ne pourraient pas faire la moitié de ce qu'ils font et que des athlètes ne subiraient pas de préjudices pendant 11 ans. Ma carrière dans le soccer à Vancouver a pris fin en 2008. Nous sommes en 2022. J'en parle encore. Cela aurait dû être réglé en 2008. Il aurait fallu une enquête. Le responsable aurait dû aller en prison, et pourtant, depuis 14 ans, beaucoup d'entre nous sont encore aux prises avec cette situation.
Je crois sincèrement que, si ce genre de choses... Il faut que ce soit extérieur au système. Il faut traiter ce problème comme une question de droits de la personne, plutôt que comme une question de sport, parce que c'est devenu très compliqué et que le mal est très profond.
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Merci, madame la présidente.
C'est un témoignage alarmant, mais nous étions au courant. Voilà le problème. Vous parlez de systèmes. Parlons des mauvais traitements infligés aux gymnastes. Les violations des droits de la personne font les manchettes depuis toujours. La FIFA... On en parle tout le temps aux nouvelles.
Nous parlons des organisations sportives, mais nous avons aussi la responsabilité, comme élus, d'adopter des lois pour protéger les gens.
J'aimerais vous lire une citation de Lianne Nicolle. C'est tiré d'un article paru dans The Guardian, en avril dernier, au sujet de l'enquête sur l'inconduite sexuelle. J'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet. Elle a dit ceci: « Les seules personnes qui, dans le système, ont du courage moral sont les athlètes. »
Il s'agit de Lianne Nicolle, ex‑membre du conseil d'administration de Canada Soccer et ex‑directrice générale de la Fondation olympique canadienne. Elle ajoute ceci: « Les répercussions doivent être plus importantes pour les personnes qui ne veulent pas avoir de courage moral. Il n'y a pas que les agresseurs (qui sont en cause). Il y a aussi ceux qui leur permettent d'agir ainsi. »
J'aimerais avoir votre avis sur ces propos.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je m'appelle François Lemay.
[Français]
Dans un premier temps, j'aimerais remercier Mme la députée Larouche de son invitation et de m'avoir convaincu de venir ici aujourd'hui.
À prendre connaissance des témoignages d'aujourd'hui, je peux vous assurer que c'est avec beaucoup d'humilité que je suis présent aujourd'hui. J'ai plus de 30 ans d'expérience en bénévolat et en administration sportive au Québec. Cependant, je n'ai pas l'expérience de Mme Lafrenière, qui est l'entraîneuse des entraîneuses au Canada. Je n'ai pas non plus dans ma carrière fait preuve du courage dont Mme McCormack et Mme Da Silva Rondeau ont fait preuve. Cela dit, c'est pour vous parler de mon expérience sur le terrain et dans le développement de jeunes athlètes que je suis devant vous aujourd'hui. J'entraîne des équipes de filles et de garçons, soit des équipes mixtes.
Au cours des derniers mois, par un concours de circonstances médiatique, je suis devenu en quelque sorte le porte-parole officieux des parents outrés par Hockey Canada. Nous avons été les premiers, à Granby, à nous exprimer contre notre fédération nationale, en refusant entre autres de payer nos cotisations. Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis, mais il y a eu peu d'avancées concrètes. Alors que nous étions peu à nous insurger contre Hockey Canada, nous avons appris avec stupéfaction que le gouvernement canadien était pour ainsi dire impuissant devant une fédération nationale: il n'avait aucun levier direct autre que l'argent et l'opinion publique.
Qui plus est, nous avons constaté l'échec de Sport Canada, dénoncé à juste titre par le juge Cromwell, à l'égard de son rôle de chien de garde édenté. Alors, je vous pose la question, chers élus: qui surveille les gardiens, surtout quand le conseil d'administration est de pacotille?
Comme parent, je m'implique 12 mois par année dans le sport de mes enfants: planification de l'horaire, camps d'entraînement, pratiques, évaluations, matchs, journées de 12 heures à des tournois, et j'en passe. Quand nous constatons avec dépit que même notre gouvernement fédéral ne peut pas intervenir directement, ni son délégué, Sport Canada, le découragement nous envahit. Nous n'avons pas le temps de nous occuper de la gouvernance de nos instances nationales, puisque nous sommes quatre à cinq fois par semaine au terrain sportif. Nous étions en droit d'avoir confiance en une institution comme Sport Canada. À la lumière de l'actualité et des témoignages récents, force est d'admettre que ce fut une erreur.
En fait, le problème concernant le sport amateur au Canada réside justement dans ce mot: « amateur ». L'essentiel du développement sportif canadien repose sur les épaules de bénévoles de bonne foi, mais aux ressources et à l'expérience limitées. Si, en Europe, il y a la structure des clubs civils, et qu'aux États‑Unis, un réseau prend forme dans les écoles secondaires, nous avons au Canada un drôle de mélange des deux modèles, où il manque fondamentalement de professionnalisation.
Organiser un tournoi, des inscriptions et, à la rigueur, un budget, des bénévoles chevronnés peuvent y parvenir. Toutefois, pour bâtir un programme sportif basé sur le développement à long terme de l'athlète, pour gérer avec équité une situation d'abus ou de harcèlement, pour instaurer une gouvernance et une transparence organisationnelle et pour développer un plan stratégique pour le sport au féminin, il faut du temps, de l'expérience et la formation nécessaire.
Ce que l'on voit dans les hautes sphères du sport a pris naissance quelque part. La culture toxique n'est pas apparue par magie; on l'a laissée grandir, par inexpérience et par manque de moyens. Même si la bonne volonté est omniprésente, le sport amateur se définit majoritairement par des cohortes de parents bénévoles qui se succèdent, ce qui laisse trop de place à l'erreur et aux abus.
Si l'on veut concrètement améliorer et aider le sport canadien et, nécessairement, aider le sport au féminin, qui a un potentiel énorme, il faut que les différents gouvernements s'engagent à soutenir les bénévoles. Il faut professionnaliser le sport amateur et financer la formation des bénévoles pour la gouvernance et le développement de leur sport. Il est anormal, par exemple, que l'équipe canadienne féminine de handball doive faire une collecte de fonds pour se qualifier pour les Jeux panaméricains. De la même façon, il est anormal que des bénévoles doivent enquêter et faire des suivis sur des entraîneurs possiblement maltraitants. On espère beaucoup de nos sportifs et on en demande beaucoup à nos bénévoles, mais on offre peu de ressources ou on s'y prend mal.
Pour y arriver, on pourrait commencer par exempter d'impôt les premiers 5 000 $ de revenu gagnés en arbitrage ou en gestion de ligue. Les gouvernements fédéral et provinciaux pourraient aussi s'entendre pour financer directement des permanences au sein des clubs sportifs amateurs. On pourrait aussi réformer Sport Canada et ses mandats.
Toutefois, au-delà de tout, il doit y avoir une cohésion dans le sport amateur. Il y a beaucoup d'acteurs autour de la table qui ont des rôles mal définis. Plus le sport amateur sera écartelé, plus la mauvaise gestion y trouvera sa place. Un leadership bancal tend à se cacher quand cela va mal, mais tout le monde est disponible pour aller chercher un trophée.
Je ne parle pas d'une solution uniforme qui s'appliquerait à tous les sports. Chaque discipline a sa réalité. À cet égard, le handball a besoin de moyens, alors que le hockey a besoin de gouvernance. Les bénévoles de partout au Canada ont besoin de votre aide concrète. Il nous faut des permanences sportives, non pas pour nous remplacer, mais pour pérenniser nos efforts et, surtout, garantir une meilleure sécurité pour nos jeunes filles et nos jeunes garçons. Le sport canadien doit se moderniser.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé.
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Merci, madame la présidente.
Je vous parle aujourd'hui depuis le territoire des Mississaugas de Credit, des Anishinabe, des Chippewas, des Haudenosaunee et des Wendat.
[Français]
Je tiens à souligner le courage des victimes et des survivants qui ont brisé le silence. Nous vous avons entendu. Je veux moi aussi honorer votre bravoure.
[Traduction]
Que ceux et celles qui continuent de tirer la sonnette d'alarme, comme nous le constatons aujourd'hui, sachent que nous sommes avec eux.
Le système a besoin d'un profond changement de culture. Et le seul moyen est de faire une enquête judiciaire nationale. C'est un enjeu d'importance nationale — et c'est le minimum. Une enquête permettra de dresser une feuille de route publique pour un changement de culture unifié. Des mécanismes semblables ont déjà été utilisés dans le monde et ont permis de changer radicalement les choses en abordant les problèmes de sécurité systémiques dans le sport. J'ai été témoin des puissants effets de la Commission Dubin en 1988, après le scandale Ben Johnson. Le legs de cette enquête est que le Canada est aujourd'hui un chef de file en matière de lutte contre le dopage.
[Français]
Le mandat de l'Association canadienne des entraîneurs est d'encadrer, conformément aux principes d'éthique, le développement des entraîneurs et des intervenants sportifs, ainsi que d'assurer la mise en œuvre et la promotion d'un programme de perfectionnement en association avec tous les paliers de gouvernement et toutes les fédérations nationales, provinciales et territoriales.
En moyenne, nous formons annuellement 50 000 entraîneurs dans le cadre du Programme national de certification des entraîneurs, du niveau communautaire jusqu'au sport de haut niveau. La sécurité et les principes d'éthique sont au cœur des formations offertes aux entraîneurs. Depuis 2006, un entraîneur doit réussir la formation Prise de décisions éthiques pour obtenir sa certification.
[Traduction]
Depuis trois ans, nous travaillons avec des chercheurs chevronnés pour élaborer une formation sur la violence dans les fréquentations chez les adolescents et la violence sexiste, la responsabilisation des témoins, la modélisation des relations saines, la création d'un environnement sportif positif et la lutte contre le racisme. Ce travail est appuyé par Sport Canada, Condition féminine Canada et l'Agence de la santé publique du Canada.
En 2019, à la demande de la ministre de l'époque, , nous avons créé un programme obligatoire de formation sur la sécurité dans le sport, qui permet d'éduquer tous les participants. Comme on l'a dit de façon si éloquente tout à l'heure, nous avons besoin de formation et d'éducation, mais ce n'est pas tout. Nous travaillons également en partenariat avec le Centre canadien de protection de l'enfance pour offrir de la formation sur la manipulation psychologique. Nous travaillons avec le Groupe Respect et avec Jeunesse, J'écoute. Nous avons lancé le mouvement Entraînement responsable, ou MER, qui comprend des stratégies de prévention fondées sur des données probantes et axées sur la « règle de deux », la formation sur l'éthique et la vérification des antécédents. Nous sélectionnons des entraîneurs pour les grands Jeux. Il existe une désignation officielle des entraîneurs, mais la profession n'est pas réglementée.
Les programmes de formation et de prévention dont j'ai parlé ne sont qu'une facette de la culture de la sécurité dans le sport. Nous ne sommes qu'une organisation. Nous devons faire plus, et d'autres doivent aussi en faire plus. C'est pourquoi une enquête judiciaire nationale est nécessaire. C'est une question complexe. Le Canada a d'excellents entraîneurs, et ceux‑ci jouent un rôle essentiel en apportant leur soutien aux athlètes et aux participants, comme nous venons de l'entendre. Ils sont parfois la seule personne de confiance dans la vie d'un jeune. Mais ce n'est pas la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui. Le déséquilibre de pouvoir dans la relation entre l'athlète et l'entraîneur est un énorme problème. Les normes professionnelles sont un énorme problème partout au pays. Le manque de ressources est un énorme problème.
Nous savons que les prédateurs utilisent surtout le rôle d'entraîneur pour arriver à leurs fins, mais il faut aussi comprendre que la maltraitance peut prendre de nombreuses formes. Il n'y a pas que le rapport entre l'entraîneur et l'athlète. Le Dr. Larry Nassar est l'un des cas les plus épouvantables de maltraitance à long terme. Le patineur John Coughlin a agressé sexuellement sa partenaire, Bridget Namiotka, qui s'est suicidée. Parker Egbert, un nageur de 19 ans atteint d'autisme et d'un handicap intellectuel, a récemment intenté une poursuite, alléguant qu'un double médaillé d'or paralympique l'avait violemment et à plusieurs reprises violé pendant les Jeux olympiques de Toronto et au centre national d'entraînement. En 2018, huit joueurs de hockey ont commis une agression, et de nouveau en 2023 au Championnat mondial junior.
Si nous ne reconnaissons pas que les agresseurs peuvent être multiples, le système ne fonctionnera pas, et nous trahirons encore nos athlètes.
[Français]
Enfin, nous respectons la compétence des provinces et des territoires. Par contre, si l'on souhaite que les mesures de sport sécuritaire soient efficaces, il faut que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux unissent leurs forces et créent un registre national de tous les prédateurs et agresseurs.
[Traduction]
Si nous n'avons pas de registre centralisé ou de registres coordonnés, les agresseurs et les prédateurs continueront de se déplacer d'un sport à l'autre, d'une province ou d'un territoire à l'autre, dans toutes sortes de rôles, prolongeant ainsi le cycle des mauvais traitements.
[Français]
En résumé, nous demandons trois choses: qu'une enquête soit menée, qu'on mise sur le sport sécuritaire pour tous et qu'il y ait un registre national ou, au minimum, de la collaboration.
Merci de votre écoute.
Il faut que l'entraîneur soit présent, parce que nous faisons tous partie d'une grande famille sportive. En théorie, il ne faudrait pas qu'il y ait une dichotomie entre l'entraîneur, qui est très souvent un parent, et les enfants.
Comme l'a mentionné plus tôt Mme Lafrenière, les entraîneurs sont formés par l'intermédiaire de cours d'éthique, notamment. J'ai moi-même suivi un tel cours, par l'intermédiaire du Programme national de certification des entraîneurs.
Par la suite, il faut savoir comment former nos organisations et faire des suivis auprès des parents. Quand il est question d'éthique et de mauvais traitements, on ne parle pas de la même façon à des enfants de 6 ans et à des adolescentes de 14 ans. Il doit y avoir une évolution dans l'enseignement offert aux jeunes et aux parents. Il doit y avoir un suivi continuel.
Le sport amateur canadien est basé sur le bénévolat. Tous les trois ou quatre ans, la composition du conseil d'administration local change complètement, ce qui entraîne une perte d'expertise. Il faut donc recommencer, mais ce n'est pas à cela que la priorité est accordée. Elle est plutôt donnée aux inscriptions, aux chandails et aux horaires, entre autres. Bref, il faut aider les bénévoles canadiens, partout sur le territoire.