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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 117 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 24 mai 2024

[Enregistrement électronique]

(1210)

[Traduction]

     La séance est ouverte.
     Bienvenue à la 117e réunion du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes.
     Avant de commencer, j'invite tous les députés et les autres participants en présentiel à consulter les cartes posées sur la table qui vous fourniront des instructions pour éviter les incidents acoustiques.
     Veuillez prendre note des mesures préventives suivantes destinées à protéger la santé et la sécurité de tous les participants, notamment des interprètes. Veuillez utiliser uniquement les oreillettes noires approuvées. On ne peut plus utiliser les oreillettes grises. Gardez votre oreillette à l'écart de tous les micros en tout temps, et, quand vous ne l'utilisez pas, veuillez la placer face vers le bas sur l'autocollant placé sur la table à cette fin. Merci de votre collaboration.
     Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les participants à distance ont effectué les tests de connexion nécessaires avant la réunion. Il se trouve qu'un lien n'a pas été jugé satisfaisant pour permettre la participation d'une personne à la réunion, de sorte que notre groupe de témoins est plus restreint que celui qui figure dans l'avis de motion. Jessica Diniz, de la FRDJ, ne pourra pas participer. J'ai décidé de l'ajouter à l'un des prochains groupes de témoins d'aujourd'hui, à condition que nous puissions trouver la technologie qui lui permettra de participer pleinement.
     Conformément à l'ordre de renvoi adopté par la Chambre des communes le 22 mai 2024, le Comité entreprend son étude du projet de loi C‑64, Loi concernant l'assurance médicaments.
     Comme l'indique la note de service envoyée il y a quelques jours, je rappelle aux membres que les amendements au projet de loi C‑64 doivent être soumis à la greffière du Comité au plus tard à 16 heures aujourd'hui. Il est important que les députés prennent note que, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 22 mai 2024, l'échéance de 16 heures pour présenter des amendements est ferme. Autrement dit, les amendements soumis à la greffière après l'échéance et les amendements proposés au cours de l'étude article par article du projet de loi ne seront pas examinés par le Comité.
    Sans plus tarder, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins et les remercier de leur patience pendant que nous tentions de régler nos difficultés techniques.
     Nous accueillons aujourd'hui Angelique Berg, présidente et cheffe de la direction de l'Association canadienne de la gestion de l'approvisionnement pharmaceutique, qui comparaît par vidéoconférence. Nous accueillons également Linda Silas, présidente de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers. Et nous avons également en ligne Durhane Wong-Rieger, présidente et directrice générale de la Canadian Organization for Rare Disorders.
    Bienvenue à tous ceux et celles qui se sont joints à nous pour nous aider à analyser le projet de loi C‑64. Nous allons commencer par les exposés préliminaires dans l'ordre indiqué sur l'avis de convocation. La parole revient donc à la représentante de l'Association canadienne de la gestion de l'approvisionnement pharmaceutique.
     Madame Berg, bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
     Merci, monsieur le président et merci aux membres du Comité. Je vous remercie de l'attention que vous me porterez aujourd'hui.
    Je m'appelle Angelique Berg. Je suis présidente et cheffe de la direction de l'Association canadienne de gestion de l'approvisionnement pharmaceutique.
    L'ACGAP est l'association commerciale nationale des grossistes qui acheminent plus de 90 % des médicaments consommés par notre pays. Avec leurs partenaires commerciaux, les distributeurs forment une chaîne d'approvisionnement efficace, précise et sûre qui garantit l'accès physique aux médicaments. Nous appuyons donc naturellement l'objectif du projet de loi C‑64. Nous sommes en faveur à la fois de l'abordabilité et de l'accès, de façon équilibrée et sans que l'un se fasse au détriment de l'autre ou vice-versa.
    Nous tenons à faire savoir que nous sommes conscients des énormes difficultés auxquelles font face le gouvernement et les citoyens, c'est‑à‑dire le ralentissement de la croissance économique, le fardeau de la réglementation, les lacunes du système de soins de santé et la proportion croissante des personnes de plus de 65 ans dans la population. Je les énumère pour vous convaincre que nous sommes effectivement conscients du contexte général et que nous sommes à vos côtés pour trouver des solutions là où nous pouvons faire notre part.
    Pour comprendre ce que nous avons à dire au sujet du projet de loi C‑64, je vais vous donner quelques renseignements de base sur la chaîne d'approvisionnement, car les gens pensent rarement à la façon dont les médicaments leur parviennent, du moment qu'ils leur parviennent.
    La chaîne d'approvisionnement commence par les fabricants, qui vendent aux distributeurs, lesquels vendent ensuite aux pharmacies et aux hôpitaux. Les achats vont dans l'autre sens: les pharmacies achètent aux distributeurs, lesquels achètent aux fabricants. Pour compléter cette chaîne, il y a les fournisseurs de services que sont, par exemple, les entreprises de logistique et les entreprises de transport. La majorité des intervenants de la chaîne d'approvisionnement pharmaceutique du Canada sont membres de l'ACGAP.
    Les distributeurs optimisent l'acheminement des commandes et livraisons de 15 000 UGS de produits entre des centaines de fabricants et plus de 12 000 points de distribution sur plus de 9 millions de kilomètres carrés, et c'est ce qui permet au pays d'économiser plus d'un milliard de dollars par an. Leur stock de sécurité constitue également un tampon à court terme contre les pénuries de médicaments. Le secteur compte plus de 30 centres de distribution, qui se conforment tous à au moins trois lois principales, à un maximum de sept licences différentes de Santé Canada, et à une technologie de pointe permettant de répondre à toutes ces exigences. Le secteur compte environ 20 000 employés — des spécialistes de la rotation des stocks et de la manutention sécuritaire et complexe de tous les médicaments — qui sont l'épine dorsale de notre chaîne d'approvisionnement pharmaceutique.
    Notre marché est difficile. C'est un marché contrôlé où le financement est limité, mais où les coûts de fonctionnement et de réglementation ne le sont pas. La distribution est en grande partie financée en fonction des prix des médicaments inscrits: plus le prix est bas, moins il y a de fonds pour fournir des médicaments aux Canadiens.
    Depuis 5 à 10 ans, les coûts ont augmenté au moins 2,5 fois plus vite que les volumes en raison des forces du marché et de la réglementation croissante. L'écart est estimé à plus de 100 millions de dollars par an, et les distributeurs l'ont absorbé jusqu'à maintenant en éliminant les dépenses pour rester opérationnels, avec un impact minimal sur les Canadiens.
    À supposer qu'il vise à faire baisser les prix des médicaments, nous estimons que le projet de loi C‑64 risque d'éroder l'accès physique et d'exacerber les pénuries. Parce qu'ils sont très efficaces, les distributeurs n'auront guère le choix que de réduire les services si le financement est réduit. Ils pourraient, par exemple, cesser de transporter des produits non rentables, c'est‑à‑dire ceux qui coûtent le moins cher, ou réduire le stock de sécurité, éliminant de ce fait la protection contre les pénuries, ou encore réduire la fréquence des livraisons dans les régions où les coûts sont élevés ou les éliminer complètement.
    Les membres de l'ACGAP s'inquiètent à juste titre de certaines dispositions du projet de loi C‑64 et plus généralement de la réduction des prix des médicaments et, notamment, de l'établissement d'une liste nationale restrictive, dont ont parlé les témoins d'hier soir, ainsi que des achats en vrac. Les données probantes indiquent que ce genre de politique limite le nombre de fournisseurs. Quand le gouvernement attribue un contrat à un seul fabricant, cette entreprise devient en fait un monopole, de sorte que les concurrents sont peu incités à rester sur le marché. La concentration du pouvoir augmente le risque d'approvisionnement limité, d'où notre inquiétude.
    Nous recommandons d'aborder ce changement de politique avec prudence, d'éviter d'alourdir le fardeau réglementaire et de prendre le temps de consulter tous les intervenants de la chaîne d'approvisionnement pour comprendre les conséquences imprévues éventuelles et permettre d'atteindre les objectifs du projet de loi C‑64.
    Nous n'avons pas toutes les réponses — nous aimerions bien —, mais nous sommes tout à fait disposés à collaborer avec le gouvernement pour les trouver et garantir à tous les Canadiens un accès physique sûr et rapide aux médicaments, qui est notre raison d'être.
    Je vous remercie au nom du conseil d'administration de l'ACGAP. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1215)
     Merci, madame Berg.
    Nous entendrons maintenant Linda Silas, de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers.
    Madame Silas, bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
    Je m'appelle Linda Silas. Je suis présidente de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers. Comme infirmière, je n'ai pas besoin, comme Mme Berg, d'expliquer ce que nous faisons. La FCSII est la plus importante organisation de soins infirmiers au Canada. Nous représentons plus de 250 000 infirmières et infirmiers et étudiants en soins infirmiers syndiqués travaillant dans tous les domaines, dont les soins à domicile, les soins de longue durée, les soins communautaires et les soins aigus.
    C'est un grand honneur pour moi de prendre enfin la parole devant vous aujourd'hui au sujet d'un projet de loi considéré comme une priorité majeure pour les infirmières et infirmiers depuis de nombreuses années. C'est un pas vers un régime universel d'assurance-médicaments. Notre fédération a commandé de nombreuses études et de nombreux sondages au fil des ans pour faire valoir les mérites énormes d'un régime d'assurance-médicaments public à payeur unique au pays. Vous entendrez plus tard aujourd'hui M. Marc-André Gagnon, qui est l'auteur de l'un de nos premiers rapports.
    Les infirmières et infirmiers ont de nombreuses raisons d'appuyer un régime d'assurance-médicaments public à payeur unique, dont les résultats positifs pour la santé de nos patients, l'accès équitable qu'il offrirait à tout le monde au Canada, et la capacité que cela libérerait dans notre système de soins de santé grâce à l'évitement d'hospitalisations et des coûts liés à la non-observance des médicaments d'ordonnance.
    Le dernier point est le point crucial dont je veux parler aujourd'hui: la crise des ressources humaines en santé. Chaque trimestre, nous constatons que le nombre de postes vacants en soins infirmiers atteint des sommets records partout au pays. Malheureusement, les infirmières et infirmiers travaillent toujours dans un système paralysant. Nous voyons des patients qui n'ont pas accès à leurs médicaments. Ils devraient être chez eux, mais ils doivent rester dans des salles d'attente et dans des lits d'hôpital simplement pour prendre leurs médicaments.
    Mesdames et messieurs les députés, vous avez le pouvoir de changer cela aujourd'hui. Nous sommes ravis de voir que le projet de loi C‑64 va dans le sens que les infirmières et infirmiers du Canada préconisent depuis longtemps. Il est fidèle aux recommandations de toutes les grandes études et commissions gouvernementales sur la question, notamment à celle du Conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments en 2019.
    L'accès universel aux contraceptifs et aux médicaments et fournitures pour diabétiques grâce à un système public à payeur unique constitue une amélioration considérable de notre système de santé public universel. Il marque une étape fondamentale vers un programme national d'assurance-médicaments vraiment complet et universel. C'est tous les jours que les infirmières et infirmiers voient de leurs propres yeux les conséquences de ne pas offrir une couverture équitable pour les contraceptifs et les médicaments contre le diabète à nos patients, depuis les grossesses non désirées jusqu'au manque d'accès aux médicaments et aux fournitures pour diabétiques. Ces gens finissent par atterrir dans nos hôpitaux. Il y a parmi eux des enfants et des travailleurs. Les patients divisent leurs pilules ou s'en passent pour acheter de la nourriture. Cela doit cesser.
    Les infirmières et infirmiers du Canada exercent des pressions sur des parlementaires comme vous depuis plus de 30 ans pour que l'on adopte un régime national universel d'assurance-médicaments. Et, oui, il faut que ce soit public et à payeur unique, parce que c'est, selon les données probantes, le meilleur moyen de dépenser de façon responsable les deniers publics. C'est ce que les Canadiens attendent de nous: que les services de santé ne s'arrêtent pas à la visite chez le médecin ou chez l'infirmière praticienne.
    Malheureusement, beaucoup de gens sont en faveur du statu quo. Ils disent que les Canadiens sont suffisamment protégés par le système hétéroclite en vigueur et qu'il suffirait de combler les lacunes.
    Les infirmières et infirmiers sont heureux de fournir leurs excellents soins dans ce pays. Et nous estimons que la meilleure façon de le faire est d'adopter une approche publique universelle à l'égard des médicaments d'ordonnance. Nous vous invitons à tenir compte des données probantes des 20 à 30 dernières années, à adopter ce projet de loi et à poursuivre la mise en œuvre d'un régime d'assurance-médicaments complet, universel, national et public à payeur unique.
    Je me joins fièrement à vous tous qui voterez en faveur du projet de loi C‑64.
    Merci.
(1220)

[Français]

     Merci, madame Silas.

[Traduction]

     C'est au tour de la représentante de la Canadian Organization for Rare Disorders. Mme Durhane Wong-Rieger se joint à nous par vidéoconférence.
    Bienvenue au Comité, madame Wong-Rieger. Vous avez la parole.
     Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité de la santé.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je m'appelle Durhane Wong-Rieger et je suis présidente et directrice générale de la Canadian Organization for Rare Disorders. Je suis ici pour discuter du projet de loi C‑64, notamment de ses répercussions sur la communauté des personnes atteintes de maladies rares au Canada.
    J'aimerais tout d'abord présenter quelques faits qui brossent un tableau sombre de la situation des Canadiens atteints de maladies rares. Vous savez peut-être que les maladies rares touchent plus de trois millions de Canadiens, dont la majorité sont des enfants. Bien que la plupart de ces maladies touchent les enfants, nous savons également qu'il y a un nombre important de maladies rares qui commencent à se manifester à l'âge adulte.
    Parmi les 7 000 maladies rares connues, seulement 5 % ont une pharmacothérapie efficace. Malheureusement, un patient sur trois atteint d'une maladie rare au Canada n'a pas accès aux traitements dont il a besoin. En fait, seulement 60 % des traitements qui existent sont offerts au Canada, et la plupart sont approuvés jusqu'à six ans plus tard qu'aux États-Unis ou en Europe.
    Même après l'approbation des traitements au Canada, de nombreux patients continuent de faire face à d'énormes obstacles et retards dans l'accès à de nouveaux traitements, à cause des défis liés à l'évaluation et au financement des médicaments utilisés. Lorsque des thérapies efficaces sont disponibles, il peut souvent être très difficile pour les patients d'y avoir accès. Comme vous le savez peut-être, cela varie d'une province à l'autre. En raison de ces défis, de nombreux patients connaissent un déclin de leur fonctionnalité qui aurait pu être évité, et ils peuvent décéder de façon prématurée.
    Dans le but de relever ces défis, le 22 mars 2023, le gouvernement fédéral a annoncé des mesures à l'appui de la toute première Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares, y compris un investissement de 1,4 milliard de dollars pour les provinces et les territoires, afin d'améliorer l'accès aux médicaments contre les maladies rares et leur abordabilité. Cet argent avait déjà été promis il y a une demi-décennie dans le cadre du budget de 2019.
    Cependant, plus d'un an s'est écoulé depuis l'annonce du financement, et pas un cent n'a été dépensé pour aider à financer les médicaments contre les maladies rares. Bien que la Canadian Organization for Rare Disorders appuie les efforts visant à améliorer l'accès aux médicaments pour tous les Canadiens qui en ont besoin, nous sommes également préoccupés par le fait que le gouvernement fédéral ait pris un autre engagement important de financer un régime national d'assurance-médicaments, alors qu'il n'a même pas rempli sa promesse de financer des traitements pour les maladies rares — une promesse qui, comme nous l'avons dit, a été faite il y a plus de cinq ans.
     Par exemple, aux termes de l'article 5 du projet de loi C‑64 à l'étude d'aujourd'hui, le gouvernement s'engage à maintenir le financement à long terme des produits pharmaceutiques, en commençant par ceux pour les maladies rares. Nous devons dire qu'il est déraisonnable et contraire à l'éthique, et certainement très difficile pour les patients, qu'un régime conçu pour transformer et sauver des vies soit adopté sans être mis en œuvre par la suite.
    De plus, étant donné que les progrès promis dans le dossier des maladies rares ne se sont pas concrétisés, qu'est‑ce que cela signifie en ce qui concerne les chances de succès de ces dispositions législatives sur l'assurance-médicaments? Nous devons voir des actions concrètes au chapitre de la priorité accordée aux maladies rares, conformément à la promesse qui a été faite. En ce qui concerne l'amélioration de l'accès aux médicaments et leur abordabilité, la CORD croit fermement que les maladies rares représentent le domaine où les besoins non comblés sont les plus nombreux au Canada.
    Le gouvernement fédéral devrait d'abord mettre en œuvre le financement promis pour le traitement des maladies rares, avant de lancer un autre important régime d'assurance-médicaments.
    Cependant, en ce qui concerne le projet de loi proprement dit, la CORD a formulé un certain nombre de commentaires. Les catégories prédéterminées, les listes de médicaments et l'approche à payeur unique proposée sont toutes des options visant à limiter les risques, qui pourraient ramener le niveau de couverture de chacun au plus bas dénominateur commun, ce qui pose un problème.
    De plus, le projet de loi C‑64 prévoit des délais précis pour les éléments clés qu'il comprend, alors que la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares ne comporte pas de plan de mise en œuvre détaillé ni de calendrier. Cette stratégie doit également s'accompagner d'échéanciers clairs, de jalons publics au chapitre de la reddition de comptes, ainsi que de possibilités de participation des patients et des cliniciens. Toutefois, cela ne fait pas partie du déploiement actuel.
    Enfin, la formation de comités d'experts, comme le prévoit le projet de loi C‑64, doit être assortie d'un véritable rôle consultatif. L'expérience de la CORD avec l'actuel groupe consultatif sur la mise en œuvre de la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares a fait ressortir des problèmes importants en matière de transparence, de communication et de reddition de comptes. La mise en œuvre efficace d'un régime national d'assurance-médicaments exige que ces comités fournissent une contribution significative, plutôt que de s'en tenir à remplir de simples formalités.
(1225)
     J'aimerais terminer en soulignant que le Canada a l'occasion de devenir un chef de file en ce qui concerne l'accès à des thérapies de pointe qui ont une incidence importante sur la vie des patients. Nous devons viser haut et veiller à ce que notre régime national d'assurance-médicaments et la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares produisent les meilleurs résultats possible, tant pour les patients atteints de maladies rares que pour les autres.
    Merci beaucoup de votre attention. Je suis prête à répondre à vos questions.
     Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par M. Ellis, du Parti conservateur, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous d'être ici aujourd'hui. Malheureusement, ce projet de loi est adopté à la hâte, sans consultation adéquate, mais c'est une tout autre histoire.
    Madame Wong-Rieger, puis‑je commencer par vous, s'il vous plaît? J'ai essayé de faire valoir un point hier et, malheureusement, lorsque le ministre et deux fonctionnaires ont comparu, ils n'ont pas pu répondre aux questions concernant le processus d'approbation des médicaments. Vous avez beaucoup parlé — pas beaucoup, mais pas mal — du processus d'approbation et du temps que cela prend au Canada.
    Pourriez-vous expliquer aux membres du Comité, au bénéfice de tous les Canadiens, de quelle façon nous accusons du retard quant aux délais d'approbation des médicaments au Canada?
    Certainement. Tout d'abord, je dirais que, comme le processus d'approbation est très compliqué, de nombreuses entreprises ne veulent tout simplement pas venir au Canada. Les délais sont trop longs. En toute franchise, cela signifie que, même lorsque des médicaments entrent au pays, cela arrive souvent des mois, voire des années, après leur adoption dans les autres pays de l'OCDE. C'est donc un premier élément.
    Nous avons de toute évidence un processus qui comporte plusieurs étapes. Il y a Santé Canada, qui assure le processus de réglementation et qui, je dois le dire, a beaucoup contribué à raccourcir les délais. Puis, il y a le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, qui fournit des directives sur le coût ou le prix maximal des médicaments. Il y a ensuite les groupes d'évaluation des technologies de la santé. À l'heure actuelle, au Canada, il y a les organismes chargés des médicaments, comme l'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé, ou ACMTS, et l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux qui, encore une fois, ajoutent des mois et parfois plus que cela au processus. Un grand défi se pose lorsque, dans le cas des régimes publics d'assurance-médicaments, les médicaments passent par l'agence pancanadienne des médicaments, après recommandation par les groupes d'évaluation des technologies de la santé. À cette étape, le processus peut prendre des mois et parfois des années.
    Nous avons des médicaments qui attendent là de nombreuses années avant de faire l'objet de négociations. Les prix sont négociés là. Il n'y a pas d'échéancier. Il n'y a pas de transparence. Personne n'a un mot à dire dans le processus, alors ils peuvent rester là longtemps. Ensuite, même si leur prix est négocié, toutes les provinces n'ont pas à les inclure dans leurs listes, même si elles se sont engagées à le faire. Encore une fois, le problème actuel, c'est qu'il arrive que ces médicaments ne soient même pas inscrits dans le régime public d'assurance-médicaments. Dans certains cas, ils ne sont jamais inclus dans les régimes publics d'assurance-médicaments. Il n'y a aucun moyen de les y faire inscrire.
    C'est le défi auquel nous faisons face, et nous pouvons dire que pour les patients, bien sûr, c'est un problème terrible, surtout pour ceux qui attendent des thérapies permettant de leur sauver la vie. Dans le cas des maladies rares, il n'existe souvent pas de thérapie alternative. Comme je l'ai dit, cela dissuade aussi les entreprises de faire entrer les médicaments au Canada, et nous devons souvent les supplier qu'elles le fassent parce qu'elles savent que le processus est long et très compliqué.
(1230)
     Merci beaucoup, madame Wong-Rieger. Je pense donc qu'il est tout à fait juste de dire qu'il ne semble pas y avoir de surveillance de ce processus. Lorsque nous regardons certaines des statistiques de 2012 à 2021, il ressort clairement que parmi les 460 médicaments lancés au cours de cette période, seulement 44 % l'ont été au Canada. Bien sûr, comme vous l'avez souligné, cela peut certainement avoir une incidence grave sur les personnes atteintes de maladies rares. Je vous remercie de vos efforts.
    Vous avez parlé un peu des annonces que le gouvernement a faites au sujet des maladies rares, ainsi que de son incapacité à livrer la marchandise. Craignez-vous qu'il s'agisse encore d'une autre opération de relations publiques et que rien ne se fasse?
    J'espère que non. Je crois qu'il y avait un sincère désir de comprendre les besoins des Canadiens atteints de maladies rares. On nous a assuré que l'argent avait été prévu dans le budget. Cependant, nous sommes extrêmement préoccupés par le fait qu'il ne soit pas distribué. Encore une fois, comme je l'ai dit, nous avons constaté que la majeure partie de cet argent, soit 1,4 milliard du 1,5 milliard de dollars, doit être affectée dans le cadre d'accords bilatéraux.
    C'est ce qui est dit au sujet de l'assurance-médicaments. Ce que nous savons, c'est que, bien que plus d'un an se soit écoulé, aucun accord n'a été mis en place. Nous ne savons même pas s'il y a eu des discussions à ce sujet. Je ne sais pas s'il s'agit simplement d'une question de bureaucratie, de lourdeur du processus ou de difficulté à obtenir l'accord des provinces. Cependant, ce n'est pas ainsi que les choses doivent se passer. Nous espérons que ce ne sera pas une opération de relations publiques. Nous souhaitons que cela ne devienne pas une promesse creuse. C'est pourquoi lorsque j'ai dit que nous étions préoccupés par la mise en place d'un régime d'assurance-médicaments, c'est parce que, premièrement, nous nous demandons si cela retardera la mise en œuvre de la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares et, deuxièmement, si cela va entraîner les mêmes problèmes que ceux qu'a connus cette stratégie.
     Merci beaucoup, madame Wong-Rieger. Vos propos sont très éclairants pour les Canadiens.
     Madame Berg, si vous me le permettez, je vais m'adresser à vous. Je pense qu'il nous reste un peu moins d'une minute.
    Vous avez parlé des chaînes d'approvisionnement au Canada. D'après la liste des médicaments que nous avons vus, il semble que dans le cas de certains médicaments — prenons simplement la metformine, qui est incroyablement répandue —, il pourrait n'y avoir qu'un seul fournisseur.
    Pouvez-vous nous dire en quoi cela pourrait être un problème pour les Canadiens en ce qui a trait aux pénuries de médicaments?
     Comme je l'ai mentionné, lorsqu'un gouvernement accorde un contrat à un seul fournisseur, les autres n'ont aucun intérêt à rester sur le marché. Je ne peux pas parler précisément de la metformine, mais il y a d'autres exemples.
     Lorsqu'une entreprise obtient, disons, 70 ou 80 % du marché, il est impossible pour les autres concurrents de faire de l'argent. Ils vont probablement stocker les produits, et cela pourrait mal tourner. Des produits viendront à expiration et ils perdront de l'argent ainsi. Ce sont des entreprises. Elles doivent faire leurs frais. À l'échelle mondiale — et bon nombre de nos fabricants de produits pharmaceutiques sont des acteurs mondiaux —, on décidera de ne pas vendre un produit ou un autre au Canada parce que cela n'est tout simplement pas rentable. C'est aussi simple que cela. C'est une question d'argent et d'économie.
     Merci beaucoup.
    Merci, madame Berg.
    Merci, monsieur Ellis.
    Monsieur Hanley, vous avez six minutes. Je vous en prie.
     Merci beaucoup.
    Je remercie tous les témoins de comparaître aujourd'hui.
     Je voulais tout d'abord souligner que dans votre témoignage, madame Wong-Rieger, vous avez donné... Je pense que l'un des aspects qu'il convient de souligner, c'est l'importance de ce programme. Il s'agit de la toute première Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares. Je sais que les Canadiens, en particulier les Canadiens que vous représentez, étaient très heureux de voir cela.
    À mon avis, il s'agit d'un complément à l'assurance-médicaments. Il faut un certain temps pour mettre cela en œuvre. Nous avons tous hâte.
     Je vais commencer par Mme Silas.
     Madame Silas, vous et moi avons eu de nombreuses discussions au cours des dernières années au sujet de l'assurance-médicaments. En passant, merci pour les chaussettes, sur lesquelles on peut lire « complet », « accessible », « universel », « transférable » et « public ». Je comprends que...
    Quelle est la longueur de ces chaussettes?
    Elles doivent être déballées. Cela fait longtemps qu'elles attendent, probablement en entreposage.
     Pouvez-vous me parler un peu de cela?
(1235)
     Nous nous souvenons tous du rapport de 2019 d'Eric Hoskins. Le Dr Hoskins et moi-même étions en train de planifier la célébration de l'assurance-médicaments lorsque la COVID‑19 a frappé.
     Je me joins à vous pour féliciter Mme Wong-Rieger. J'ai participé à de nombreux panels avec elle. Lorsque j'ai lu le mémoire sur le projet de loi C‑64, j'ai été également enthousiaste de voir les médicaments pour le traitement des maladies rares y figurer, parce qu'il y a 20 ans, il n'en était pas question.
    Je crois que les règles et les obstacles bureaucratiques ne devraient pas nous empêcher de faire ce qu'il faut. La santé et la vie des Canadiens seront améliorées grâce à ce projet de loi. C'est une porte ouverte, et nous devons agir.
     Merci.
    Je me demande si vous pouvez nous donner votre point de vue à ce sujet. Vous avez parcouru le pays pour en parler. Vous avez eu des entretiens avec des infirmières de première ligne partout au pays.
    Que pensez-vous de la crainte que cela ait des répercussions négatives sur les assureurs privés et sur les régimes pour les employés, comme celui dont nous bénéficions en tant que députés? Vous pourriez peut-être nous dire ce que vous en pensez et ce que vous avez appris d'autres pays sur l'effet de l'assurance-médicaments sur les assurances privées.
     Environ 90 % des infirmières sont syndiquées, alors elles n'ont pas d'inquiétude pour elles-mêmes. Elles s'inquiètent pour leurs patients, et c'est pourquoi elles nous ont donné le mandat de travailler à un régime national d'assurance-médicaments.
    En tant que négociatrice syndicale, je me souviens de l'époque où nous avions dû supplier une compagnie d'assurance de mettre en place un programme pour l'abandon du tabac, alors que cela dépassait les moyens du régime, à cause du nombre de fumeurs. Nous représentons un effectif constitué à 92 % de femmes. Nous ne pouvions pas inclure les contraceptifs, mais nous avons gagné cette bataille.
     J'ai une très petite équipe ici à Ottawa, mais de ce fait même, notre régime est très restrictif. Il y a tellement de règles et de restrictions que je suis contente que personne ne soit vraiment malade, parce que ces personnes ne seraient pas couvertes adéquatement. C'est à ce genre d'obstacles auxquels nous faisons face avec les assurances.
     Cependant, en tant que négociatrice, je sais aussi que nous serons à des tables et que nous demanderons... Par exemple, je m'attendrais à ce que l'assurance-médicaments fournisse quatre pilules par jour, mais une compagnie d'assurance fournira une pilule par jour, la plus chère. Lorsque nous en parlons à nos membres, elles le comprennent. Leur engagement est envers les enfants qui ne peuvent pas avoir d'inhalateur et qui sont asthmatiques, ou envers les enfants et les parents qui ne peuvent pas se permettre les meilleurs programmes de soins pour les diabétiques. C'est ce qu'elles attendent de nous tous.
     Merci. Nous savons que le coût de la mise en œuvre d'un régime d'assurance-médicaments suscite des préoccupations. Ce sera un investissement. Cela coûtera de l'argent. Nous savons que les rapports comme le rapport Hoskins contiennent des analyses qui montrent que, dans l'ensemble, cela représentera une économie de coûts pour notre système de santé.
    Pouvez-vous nous parler des coûts et des avantages financiers d'un régime d'assurance-médicaments comme celui que nous sommes en train de mettre en place?
    Je pense que vous aurez d'excellents experts qui viendront vous parler de l'aspect monétaire plus tard. À notre avis, l'argent est déjà dépensé, et il l'est par des Canadiens qui n'en ont pas les moyens. Le choix qui s'offre à ces personnes, c'est de payer pour leurs médicaments ou de payer pour de la nourriture. Une famille sur cinq n'a pas les moyens de payer ses médicaments.
    Les sommes dont parlait le Dr Hoskins il y a six ans déjà étaient différentes. Nous devons appuyer le directeur parlementaire du budget pour qu'un régime universel soit envisagé, et non pas un ensemble de mesures disparates, et que la bonne formule soit trouvée. En tant que contribuable, je sais que l'argent est déjà dépensé, mais il n'est tout simplement pas dépensé au bon endroit.
    Toutes les données des économistes avec lesquels nous avons travaillé au cours des 30 dernières années nous indiquent que la meilleure façon de faire, comme c'est le cas pour notre système de soins de santé, c'est d'avoir un régime public qui fournit des données probantes sur les meilleurs médicaments à prescrire. Cela vous concerne probablement davantage vous, docteur Hanley, parce que vous êtes médecin, mais lorsque j'ai rencontré le ministre hier, je lui ai dit que ce n'était pas vraiment son rôle de décider ce qui figure sur le formulaire et quel médicament prescrire pour le diabète, et qu'un groupe d'experts devrait s'en occuper. C'est ce que nous préconisons.
(1240)
    Merci, madame Silas et monsieur Hanley.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
     Je salue les témoins qui sont ici pendant la première heure de la réunion.
    Mme Silas, je vous souhaite la bienvenue au Comité et je vous félicite pour vos plus de 20 ans d'engagement auprès de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers. Vous êtes une fière diplômée de l'Université de Moncton. Les gens de Moncton sont des gens que nous apprécions, mais je dois avouer que j'apprécie également l'Université de Moncton, qui représente fièrement les Acadiens et les Acadiennes.
    Comme vous le savez, le Québec a son propre régime d'assurance médicaments. Nous reconnaissons qu'il n'est pas parfait, mais il a été mis sur pied il y a 30 ans.
    Selon vous, que pourrait faire le gouvernement fédéral de plus que le gouvernement du Québec, que ce dernier ne peut pas faire actuellement, ou que pourrait-il mieux faire?
    Je vous remercie de votre question, monsieur Blanchette‑Joncas.
    Le programme du Québec est reconnu partout au monde, mais c'est aussi un de ceux qui coûtent le plus cher à l'État.
    Les syndicats du Québec et les coalitions de la santé demandent au gouvernement fédéral de s'impliquer davantage.
    En fait, toute entente au fédéral va prévoir une reconnaissance du Québec. Je ne m'en inquiète pas. Ce qui m'inquiète et ce qui inquiète les infirmières, les infirmiers et les professionnels de la santé de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, par exemple, ce sont ceux et celles qui passent entre les mailles du filet, ceux et celles qui ne sont pas représentés par un programme offert par leur employeur et ceux et celles qui ne sont pas représentés par un programme offert par la province. Or ce programme-ci devrait couvrir tout le monde.
     J'aimerais revenir au coût des médicaments.
     Vous avez mentionné qu'il s'agissait d'un des programmes les plus coûteux. Comme vous le savez, l'Alliance pharmaceutique pancanadienne essaie d'acheter en gros, pour essayer de réduire la facture.
    Cependant, j'essaie de faire le lien avec les transferts en santé. D'ailleurs, je sais que la Fédération, notamment, est en faveur de ces transferts.
    Selon l'entente initiale entre le fédéral et les provinces et le Québec, le fédéral devait payer 50 % de la facture des frais de santé, des soins de santé et des services sociaux. Ce pourcentage est passé à 22 % après plusieurs années. On a été réaliste et raisonnable et on l'a ensuite fixé à 35 %. Pour le Québec, cela représentait 6 milliards de dollars. Or le Québec a seulement reçu 900 millions de dollars.
    Si on est censé recevoir 6 milliards de dollars, mais qu'on en reçoit seulement 900 millions, il est possible qu'on ait moins d'argent à investir pour moderniser ou améliorer le programme d'assurance médicaments. Qu'en pensez-vous, madame Silas?
    Nous sommes sur la même longueur d'onde, monsieur Blanchette‑Joncas.
     Je ne comprends pas les problèmes bureaucratiques qui existent entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Il est insensé que l'argent qui a été promis pour les maladies rares — 1,4 milliard de dollars a été promis il y a un an — n'ait pas encore été dépensé. D'ailleurs, Mme Wong‑Rieger vient d'en parler. Il en est de même pour le transfert fédéral négocié l'année passée. Cela n'a aucun sens que les provinces et les territoires n'aient pas reçu ces sommes. Il s'agit d'un problème sur lequel le ministre de la Santé doit se pencher.
     D'accord.
    Madame Silas, j'aimerais vous faire part d'un fait vécu, qui est documenté.
    Le gouvernement fédéral a réduit ses transferts en santé. S'il met en place un régime d'assurance médicaments et décide finalement de retirer ses investissements, quel effet cela pourrait-il avoir, selon vous?
    Présentement, les provinces jonglent avec des systèmes de soins de santé. Elles doivent prendre des décisions et réduire les services. Comme vous le constatez dans le système actuellement, on assiste à la privatisation accélérée de certains services, notamment ceux des infirmières. Je sais que c'est une grande préoccupation pour vous et je peux vous dire que c'en est une pour moi aussi.
    Si on a une bonne idée, comment faut-il s'y prendre pour s'assurer de la concrétiser de la façon la plus efficace possible et que la solution choisie soit pérenne?
    C'est une question très difficile. En 2019, le gouvernement fédéral s'est engagé à mettre sur pied un régime national d’assurance médicaments, qui prévoirait une liste de médicaments essentiels.
    Nous avons ensuite vécu la pandémie. Toutefois, la négociation menée par le NPD et les libéraux a permis de faire preuve d'une grande prudence à l'égard des deux classes de médicaments et de garantir que nous avançons dans la bonne direction.
    Ils n'ont pas pu dire alors que nous allions adopter toutes les recommandations du rapport Hoskins, mais une garantie pourra être donnée à des milliers de Canadiens quant à deux classes de médicaments. Quand nous pourrons tester le régime et confirmer qu'il fonctionne bien, nous y adhérerons. Pour ma part, je suis très confiante.
(1245)
    C'est excellent. D'accord.
    Madame Silas, des témoins nous ont fait part hier de leur inquiétude quant à la perte possible de certains médicaments. Le régime du Québec prévoit une liste d'environ 8 000 médicaments. Encore là, ce n'est pas parfait. On pourrait améliorer les choses sur plusieurs plans.
    On nous dit cependant que le régime national d'assurance médicaments pourrait réduire le nombre des médicaments acceptés dans sa liste, tels que l'Ozempic, un médicament tout de même très connu. Actuellement, il n'est même pas prévu que ce médicament figure dans la liste.
    J'aimerais entendre vos commentaires sur cette question. Comment fait-on pour s'assurer de ne pas perdre des médicaments considérés comme des incontournables?
    Je tire mon chapeau au Québec et à la Colombie‑Britannique, car les listes de 8 000 médicaments comptent parmi les plus longues listes qui existent au Canada.
    Comme je l'ai dit à M. Hanley dans l'un de mes témoignages, ce n'est pas aux politiciens de décider des médicaments qui vont figurer sur la liste. Ce n'est pas non plus une campagne publicitaire qui en sera responsable. Honnêtement, je crois que regarder ce qui sera sur la liste ne revient même pas aux médecins, mais aux comités d'experts.
    Merci, madame Silas.

[Traduction]

     Nous allons maintenant passer à M. Julian pour six minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Madame Silas, il ne fait aucun doute que les infirmières du Canada sont les porte-étendard de la Loi concernant l'assurance médicaments. Vous vous souviendrez qu'il y a trois ans et trois mois, nous avons travaillé ensemble sur la Loi concernant l'assurance médicaments. C'est un projet de loi que j'ai parrainé au nom du NPD.
    Les infirmières du Canada ont fait un travail extraordinaire. Quelque 120 000 Canadiens ont écrit aux députés libéraux et conservateurs pour leur dire d'adopter ce projet de loi. Nous avons tous été profondément déçus, tout comme la plupart des Canadiens qui étaient favorables à l'assurance-médicaments, que le projet de loi soit tombé à l'eau et que les députés libéraux et conservateurs aient voté contre.
    Maintenant, trois ans et trois mois plus tard, vous témoignez au sujet de la Loi concernant l'assurance médicaments, ce qui est extraordinaire. Vous avez envoyé un message à tous les parlementaires. Vous leur avez essentiellement dit ce qui suit:
L'adoption de ce projet de loi aidera les patients atteints de diabète et les femmes qui font face à un choix impossible entre acheter de la nourriture et faire remplir leurs ordonnances. Ce n'est pas seulement une question de santé; c'est une question de justice, d'équité et d'accès. Investir dans l'assurance-médicaments sauvera des vies, réduira les coûts globaux des soins de santé et permettra aux Canadiens de mener une vie plus saine et plus productive.
Vous devez...
    Le message suivant s'adressant à tous les parlementaires:
... agir rapidement et de façon résolue. Votre travail consiste à protéger et à aider à bâtir un système de santé public qui fonctionne pour tout le monde. Les infirmières d'un bout à l'autre du pays font leur part, alors mettons de côté la partisanerie et faisons du régime d'assurance-médicaments une réalité.
    C'est un message extrêmement important que vous envoyez à tous les parlementaires et aux membres de ce comité.
    J'aimerais que vous nous disiez ce que les infirmières du Canada ont constaté en première ligne en ce qui concerne l'absence d'une assurance-médicaments, le manque de médicaments disponibles et les gens qui ont de la difficulté à payer leurs médicaments. Quelles sont certaines des histoires et des choses que les infirmières du Canada ont vues dans le système actuel et que les lobbyistes considèrent comme acceptables, mais que les Canadiens veulent voir changer fondamentalement?
     Aujourd'hui, ce dont on entend parler aux nouvelles, ce sont les longs délais d'attente dans les salles d'urgence, les longues attentes pour les chirurgies et, bien sûr, la pénurie d'infirmières et d'autres professionnels de la santé.
    La réalité est simple. La réalité, c'est que les familles qui n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments restent à l'hôpital plus longtemps. Les médecins et les infirmières, qui ont à cœur la santé des patients, garderont ces derniers à l'hôpital plus longtemps, afin qu'ils puissent recevoir un traitement complet. C'est à ce niveau que les infirmières sont frustrées. Nous avons des patients dans les couloirs parce qu'ils n'ont pas d'autre choix.
    Nous devons faire mieux. Nous sommes le seul pays à avoir un système public... Je peux vous garantir que je me porterai à la défense de notre système public sur n'importe quelle tribune, même s'il est difficile de le faire en raison des dommages qu'a causés la pandémie, mais nous devons donner ce levier supplémentaire à nos médecins et à nos infirmières praticiennes.
    À l'heure actuelle, ils ont un dilemme. S'ils n'ont pas d'échantillons à donner aux familles qui n'ont pas de régime d'assurance, les patients n'ont d'autre choix que d'aller à l'urgence pour se faire soigner. Ce n'est pas juste.
     Quel effet cela a‑t‑il sur le plan des coûts pour notre système de soins de santé que des gens soient gardés dans des lits de soins actifs, parce que les infirmières comprennent que s'ils quittent l'hôpital, ils ne pourront pas payer leurs médicaments?
    Ce sont les coûts des journées d'hospitalisation, mais pire encore, ce sont les coûts humains.
    Rendez-vous dans n'importe quel hôpital aujourd'hui. Les soins infirmiers prodigués dans les couloirs font peur. Je compatis avec ces familles, et surtout avec nos aînés, pour ce qu'ils vivent dans les couloirs. Il y a un effet d'entraînement. Ces personnes sont dans les couloirs parce que des lits sont occupés par des personnes qui ne peuvent pas payer leurs médicaments ou qui n'ont pas respecté leur ordonnance.
    Les médecins de famille, les spécialistes et les infirmières praticiennes savent ce qu'ils font. Lorsqu'un médicament ou une série de médicaments sont prescrits, nous devrions avoir un système qui continue de protéger les patients et leur donne accès à leurs médicaments.
(1250)
    Lorsque les gens n'ont pas la capacité de payer leurs médicaments — je sais que vous et les infirmières du Canada avez fait un travail remarquable à ce sujet —, qu'est-ce que cela signifie sur le plan du coût en vies humaines?
    Les Canadiens meurent-ils parce qu'ils n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments? Qu'est-ce que cela signifie en termes de chiffres?
    Est‑ce qu'il y a des Canadiens qui perdent la vie à cause de l'absence d'un régime universel d'assurance-médicaments au Canada?
     Monsieur Julian, vous touchez vraiment une corde sensible chez moi comme infirmière.
     Il y a quelques années, nous avons produit un rapport sur le nombre de patients qui meurent. En se limitant à seulement deux catégories, le diabète et les maladies cardiaques, on constate que des milliers de personnes meurent chaque année à cause du manque de médicaments.
    Je n'ai même pas compris que Statistique Canada recueillait des données sur les patients qui n'avaient pas accès à des médicaments d'ordonnance et sur les répercussions à long terme et la mortalité. Il s'agit d'un cas extrême. Ce dont nous parlons aujourd'hui, c'est de leur donner la chance, avec ces deux types de médicaments, d'avoir une vie saine, d'avoir plus de contrôle et de ne pas devoir se rendre à l'hôpital ou à l'urgence pour obtenir leurs médicaments d'ordonnance.
     Madame Silas, vous souvenez-vous du nombre par année?
     Je ne m'en souviens pas. J'ai consulté mes notes. Nous ne les avons pas parce que ce rapport remonte probablement à 2013. Je vais les fournir au Comité.
     Ce serait très utile. Des gens meurent parce qu'ils ne sont pas en mesure de payer leurs médicaments. C'est extraordinaire que nous permettions cela dans un pays comme le Canada.
    Lorsque des lobbyistes d'entreprise viennent dire au Comité que la situation est très bien comme elle est, êtes-vous d'accord avec cette affirmation — que tout va bien actuellement —, alors que des gens meurent?
    Après ce rapport, la Fondation des maladies du cœur et de l'AVC du Canada s'est associée à nous pour faire pression en faveur d'un régime national d'assurance-médicaments, reconnaissant que les maladies du cœur sont importantes et que c'est la même chose pour le diabète.
    Il est difficile de comprendre... Comme je l'ai dit dans ma déclaration, nous croyons en un régime national d'assurance-médicaments parce que nous croyons aux soins que nous offrons à nos patients et que nous voulons faire le meilleur travail possible dans ce domaine...
     Merci.
    Il y en a d'autres qui ont des motivations différentes.
     Merci.
    Nous passons maintenant à M. Kitchen, pour cinq minutes. Je vous en prie.
     Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être ici. Nous vous en sommes très reconnaissants, surtout compte tenu du court préavis qui nous oblige à terminer cela très rapidement.
    Je pense que la plupart des Canadiens qui suivent ce dossier s'attendent à ce que nous discutions du projet de loi. Ils veulent que nous soyons ici pour examiner le projet de loi, nous asseoir autour de la table et proposer des changements qui, selon nous, doivent être apportés pour améliorer encore davantage ce projet de loi, ce qui représente un défi pour l'avenir. Ils supposent que les éléments pertinents seront adoptés. Ce qui est malheureux, c'est qu'ils ne le seront probablement pas. C'est malheureux, parce que les Canadiens qui nous regardent et qui entendent ce qui se passe s'attendent à ce que ce projet de loi soit amélioré. Il est terrifiant de penser que cette coalition qui essaie de forcer l'adoption de ce projet de loi a des visées contraires.
    Un certain nombre de personnes ont soulevé une question que j'aimerais aborder pour commencer. Bon nombre d'entre vous, en particulier Mme Berg et Mme Wong-Rieger, ont mentionné la question des comités et des experts et la façon dont nous abordons la question. Le projet de loi ne fait pas du tout mention de la taille de ce comité d'experts, de sa composition et des compétences de ses membres — seront-ils de chaque province, ou seront-ils choisis par le ministre et par le ministre seulement? — sans parler du coût, etc.
    La première question que j'aimerais vous poser, madame Berg, est la suivante: lorsque nous examinons la situation du point de vue pharmaceutique, hier soir, certains de nos témoins de ce secteur ont soulevé la question de la présence d'un pharmacien parmi ces experts. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
(1255)
     Certainement. Je pense que l'Association des pharmaciens du Canada a très bien fait de demander hier qu'un pharmacien fasse partie de ce comité d'experts, et nous sommes tout à fait d'accord avec cela. Les membres de l'Association canadienne de la gestion de l'approvisionnement pharmaceutique distribuent des médicaments aux patients, mais ils fournissent aussi à nos professionnels les outils du métier. Leur rôle est extrêmement important, et ils devraient siéger à ce comité d'experts.
    Nous aimerions faire partie de ce comité d'experts. Nous sommes très préoccupés par les conséquences indésirables sur la chaîne d'approvisionnement qui fournit des médicaments aux Canadiens. Nous aimerions travailler avec le gouvernement et nous assurer que vous disposiez de l'information nécessaire pour veiller à ce qu'il y ait suffisamment d'argent pour appuyer cela.
    Nous sommes au bord du précipice, et les coûts ont tellement augmenté que la seule façon de réduire les prix est de réduire les services. Cela va faire mal, et personne ne souhaite cela. Nous aimerions vraiment faire partie de ce comité également.
    Merci, madame Berg.
    Madame Wong-Rieger, vous avez également mentionné cet aspect du rôle consultatif. J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce rôle.
    Comme je l'ai dit, nous avons actuellement un groupe consultatif sur la mise en œuvre de la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares. J'ai également fait partie d'autres groupes consultatifs du gouvernement. Le problème, à mon avis, c'est que dans bien des cas, nous ne conseillons pas vraiment. Des décisions sont déjà prises. Les décisions sont souvent prises à huis clos. Nous supplions le gouvernement de nous dire ce qui se passe en ce qui concerne ces accords bilatéraux. Quelles sont les discussions en cours? Quels sont les médicaments envisagés? Pouvons-nous nous prononcer sur la nature de ces médicaments? On ne nous donne pas l'occasion de le faire.
    Si de tels comités existent, je pense que le défi est qu'ils doivent être transparents. Il doit y avoir reddition de comptes. Nous avons demandé d'avoir la possibilité d'informer le public des progrès et des plans, mais, encore une fois, on ne nous a pas donné cette possibilité. Je pense qu'une partie du défi réside dans les détails et les garanties.
    L'autre chose que j'aimerais dire, c'est que, comme nous l'avons déjà entendu, il faut beaucoup de temps pour intégrer les médicaments dans les régimes publics d'assurance-médicaments. Je ne dis pas que les choses peuvent être améliorées ou non grâce au régime public d'assurance-médicaments, mais nous savons que si un médicament est approuvé, un médicament contre les maladies rares, les personnes qui ont une assurance privée aujourd'hui l'obtiendront presque toujours très rapidement. J'ai passé deux ou trois ans avec des patients qui participaient à un régime public et qui se demandaient quand ils obtiendraient leur médicament, qui n'était jamais disponible. Même si cela est soumis à ce qu'on appelle des comités d'experts, il n'y a pas de transparence et il n'est pas possible d'avoir les bonnes personnes pour prendre ces décisions.
     Merci, madame Wong-Rieger.
     Merci, madame Wong-Rieger.
    Merci, monsieur Kitchen.
    La parole est maintenant à M. Powlowski, pour cinq minutes. Je vous en prie.
    Nous avons entendu l'Association canadienne de la gestion de l'approvisionnement pharmaceutique et la Canadian Organization for Rares Disorders. Je pense qu'elles ont toutes les deux fait une mise en garde au sujet de la possibilité que le projet de loi C‑64 constitue une menace pour l'accès aux médicaments pour les maladies rares. Cela ne me surprend pas trop de la part de Mme Berg, mais un peu de la part de Mme Wong-Rieger.
    Ce projet de loi ne prévoit certainement pas un système à payeur unique. Nous ne savons pas encore à quoi ressemblerait un régime national d'assurance-médicaments. Il pourrait toutefois s'agir d'un système à payeur unique.
    J'aurais cru que Mme Wong-Rieger, surtout, aurait pensé qu'un système à payeur unique aurait des avantages. J'aurais pensé que ce serait plus efficace. Il y a certainement des économies à faire. Un système unique permet certainement des économies d'échelle. À l'heure actuelle, nous avons tous ces fournisseurs différents. Chacun a sa propre direction, une partie de l'argent allant à chacun de ces gestionnaires et PDG. Dans un régime d'assurance-médicaments d'employeur, c'est de l'argent qui irait probablement à l'employé, plutôt que de contribuer aux profits de la compagnie qui fournit les régimes.
    Avec un grand régime administré par le gouvernement, on obtiendrait des économies d'échelle. Il n'y aurait pas d'argent qui servirait à alimenter les profits, et il n'y aurait pas ces nombreuses bureaucraties qui s'occupent de ces différents régimes. Il y aurait des économies. De plus, en achetant 10 millions de comprimés à la fois, il est possible d'obtenir un meilleur prix d'un fabricant qu'en en achetant 100 000. S'il y avait plus d'argent au Canada pour payer les médicaments de tout le monde, ne serions-nous pas en mesure de payer des médicaments pour les maladies rares, qui coûtent souvent cher?
    De plus, madame Berg, vous avez parlé de pénuries. N'aurions-nous pas l'argent nécessaire pour constituer une réserve d'urgence de médicaments, afin d'éviter ces pénuries?
    Je vais commencer par vous, madame Wong-Rieger. Je vous en prie.
(1300)
    Merci beaucoup.
    J'adore votre approche idéale. C'est absolument ce que nous aimerions voir — la capacité de faire approuver ces médicaments en temps opportun, de les rendre accessibles à tout le monde en même temps et, certainement, comme vous le dites, de fournir un accès équitable d'une province à l'autre.
    Ce que nous savons — c'est là que les détails entrent en ligne de compte —, c'est qu'avec la façon dont le régime public fonctionne maintenant, les choses stagnent. Elles croulent sous les nombreuses étapes bureaucratiques. Très franchement, nous savons que les régimes d'assurance-médicaments eux-mêmes n'allouent pas suffisamment d'argent. Dans de nombreux pays — permettez-moi de sortir des États-Unis —, on a l'impression que les meilleurs médicaments sont un investissement. J'ai entendu ce que Mme Silas a dit. Le problème, c'est que, si vous n'offrez pas aux gens la thérapie optimale ou si vous ne vous assurez pas qu'ils reçoivent le médicament qui va les garder en vie ou hors de l'hôpital, si vous fournissez à tout le monde la même thérapie, ce qui arrive parfois, et que vous n'investissez pas dans les meilleures thérapies, les choses ne fonctionneront pas.
    C'est ce qui nous préoccupe. Dans bien des cas, on ramène tout au plus petit dénominateur commun.
    Vous craignez que dans les régimes gouvernementaux, quels qu'ils soient, on n'offre que des médicaments de base. Vous croyez que si un médicament un peu meilleur que le médicament de base ou une variante était nécessaire, il ne pourrait pas être inclus dans le régime public. Ce ne serait pas nécessairement le cas, cependant.
    Est‑ce cela qui vous préoccupe?
    C'est le cas actuellement, et c'est là le problème. Les régimes publics rechignent à fournir certains médicaments. Ils ont imposé des restrictions très sévères en matière d'accès, et c'est là le problème. Regardez les recommandations qui sont formulées. Le prix recommandé qu'ils seraient prêts à payer est très bas. Cela équivaut à demander à une entreprise d'accepter une réduction de 90 % du prix qu'elle propose. Les entreprises ne feront pas cela. Dans bien des cas, elles ne viendront même pas au Canada.
    Je ne dis pas que cela ne peut pas se faire. Je dis simplement que, lorsque vous avez un régime global et qu'il est dit: « Très bien, nous allons négocier, mais nous nous attendons à ce que vous nous accordiez une réduction de 90 % »... Si vous lisez les recommandations qui sont présentées et que vous voyez ce qui se passe à l'Alliance pharmaceutique pancanadienne, c'est exactement ce que vous constaterez.
     En réalité, c'est cela le problème. Dans un monde idéal, j'adorerais votre plan.
    Puis‑je suggérer, alors, que vos objectifs n'ont pas tant à voir avec le fournisseur public, mais plutôt avec le fait que les fournisseurs sont limités dans leur volonté de sortir des sentiers battus et veulent s'en tenir à une formule? Dans ce cas, vous n'avez peut-être pas de problème avec les régimes publics en tant que tels, mais plutôt seulement avec la façon dont ils sont administrés.
     Veuillez répondre brièvement, je vous en prie.
    En tant que patiente, je me soucie peu de qui paie. Nous devons nous assurer que les médicaments sont payés et abordables pour les patients, très franchement. Oui, nous sommes tout à fait d'accord avec l'idée d'offrir un prix unique, mais il faut le faire de façon réaliste.
     Le problème que nous avons, c'est que, si nous mettons en œuvre les régimes publics actuels, et si nous en faisons un régime unique, cela signifiera que les gens devront attendre entre deux et six ans pour avoir accès aux meilleurs médicaments.
    Merci, madame Wong-Rieger.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je poursuis en posant mes questions à Mme Silas.
    Madame Silas, je suis tout à fait d'accord sur les propos que vous avez mentionnés un peu plus tôt, à savoir que ce n'est pas aux politiciens de décider quelle sera la liste de médicaments qui sera offerte dans le cadre du régime d'assurance médicaments. Je le répète: environ 8 000 médicaments sont couverts par le régime, dans la liste de médicaments actuelle, au Québec.
    Cependant, je me demande qui va décider de cette liste. Est-ce l'Agence des médicaments du Canada? Est-ce l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, ou INESSS, qui gère déjà une liste de 8 000 médicaments? Quelles seraient les meilleures personnes possible pour faire ce travail? S'agirait-il d'une personne ayant 30 ans d'expérience en matière d'assurance médicaments ou d'une autre personne qui connaît le domaine et qui pourrait, je ne sais pas de quelle façon, améliorer de façon complémentaire la liste de médicaments actuelle du Québec?
(1305)
     Je pense que vous répondez à votre propre question.
    Comme l'a dit le député Robert Kitchen, dans le libellé du projet de loi, il est écrit que c'est vraiment au ministre fédéral de mener des consultations avec les provinces, les territoires et les experts pour déterminer ce qui sera sur la liste.
    Bien entendu, il faut travailler avec le Québec et ses experts, mais aussi regarder ce qui se passe au-delà de nos frontières. Le Canada est un petit pays qui compte une population de 38 millions à 39 millions d'habitants. Des experts de partout au monde sont bien plus avancés que le Canada. Certains pays ont un régime public d'assurance médicaments et des listes de médicaments essentiels qui fonctionnent très bien.
    Merci beaucoup, madame Silas.
     Nous sommes déjà rendus à 40 millions d'habitants. C'est la plus grande croissance démographique.
    Ils doivent tous être des Néo-Brunswickois.
    Il faudrait vérifier la croissance démographique au Nouveau‑Brunswick. Cependant, je peux vous confirmer que le Canada a la croissance démographique la plus importante de tous les pays du monde.
    En vous posant mes questions, je cherchais plutôt à savoir ce que le gouvernement fédéral et l'Agence des médicaments du Canada pourraient faire de plus que ce que fait actuellement l'INESSS, soit l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux.
     Cela va au-delà de mon expertise. Toutefois, quand j'écoute les commentaires de Mme Wong‑Rieger, avec qui j'ai témoigné plusieurs fois, je constate qu'il y a un problème de bureaucratie dans la façon d'approuver et de distribuer les médicaments. Cela représente un grand problème, et on doit l'étudier. Je ne pense pas que cela va changer le projet de loi à l'étude ici, au Comité, mais il est certain que le gouvernement doit se pencher sur ce problème de bureaucratie.
    Merci, monsieur Blanchette‑Joncas.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de Mme Zarrillo, pour deux minutes et demie.
     Bienvenue au Comité. Vous avez la parole. Je vous en prie.
    Merci beaucoup. Je suis heureuse d'être ici.
     Mes questions s'adressent à Mme Silas. Je suis contente de vous voir aujourd'hui.
     Je veux parler de deux choses. La première est l'équité entre les sexes, que vous avez abordée plus tôt, et l'autre est la pauvreté. En tant que porte-parole en matière d'inclusion des personnes handicapées, je sais que la Prestation canadienne pour les personnes handicapées ne suffira pas à combler l'écart pour aider les gens à atteindre ne serait-ce que le seuil de la pauvreté.
     Premièrement, j'aimerais comprendre, d'après votre expérience et celle de vos membres, comment la pauvreté influe sur la santé et comment ce projet de loi sur l'assurance-médicaments pourrait contribuer à atténuer certains des résultats liés à la pauvreté.
     Deuxièmement, pourriez-vous donner suite au thème de l'égalité des sexes que vous avez abordé? Par exemple, comment l'accès aux contraceptifs gratuit va‑t‑il favoriser l'égalité dans notre société?
    La pauvreté s'accompagne d'une longue liste de problèmes à régler, et je ne pense pas que quiconque propose une seule solution. Ce projet de loi n'est pas une solution pour éliminer la pauvreté, mais une solution pour donner un accès égal aux médicaments d'ordonnance nécessaires, que vous ayez un revenu élevé ou faible ou que vous viviez dans la pauvreté ou non. C'est là que les infirmières interviennent. L'obtention de vos médicaments d'ordonnance ne devrait pas dépendre de votre niveau de revenu ou du fait que vous êtes assuré. C'est le cas depuis que nous appuyons un régime national d'assurance-médicaments.
     En ce qui concerne le sexe, du côté de nos infirmières praticiennes et de nos infirmières autorisées régulières, tout le mouvement de la contraception évolue au jour le jour. Les choses ont changé depuis que j'étais dans la mi‑vingtaine, alors que la contraception se limitait à une pilule. Aujourd'hui, le concept s'inscrit dans un domaine de la santé élargi dont les femmes de tous âges profitent. C'est une façon d'aider plus de 50 % de la population, et il est important d'aller de l'avant avec le projet de loi pour pouvoir le faire.
    Je répète que c'est une pièce du casse-tête pour favoriser l'égalité entre les sexes, et c'est une pièce du casse-tête pour améliorer la situation au chapitre de la pauvreté.
     Merci, madame Silas.
    La parole est maintenant à M. Ellis, pour cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai trouvé intéressant que notre collègue du NPD, M. Julian, ait fait des commentaires désobligeants au sujet des lobbyistes qui étaient ici hier. Madame Silas, vous êtes aussi une lobbyiste enregistrée, n'est-ce pas?
     Fièrement. Voulez-vous une paire de chaussettes?
    Des voix: Oh, oh!
    Non, mais merci. Je crains que cela puisse constituer un conflit d'intérêts que des lobbyistes fassent des cadeaux aux parlementaires...
(1310)
    Elles valent moins de 50 $. Il n'y a pas de problème.
    ... peut-être pour gagner des votes, mais c'est une tout autre histoire.
    Madame Silas, vous avez parlé de la présence de patients dans les couloirs des établissements de soins de santé. Vous semblez confondre cela avec le fait que les patients n'ont pas de médicaments, ce qui pourrait être l'un des problèmes, mais ne s'agit‑il pas davantage du fait que près de 10 millions de Canadiens n'ont pas accès à des soins primaires?
    Oui, et c'est semblable à la question de la pauvreté. L'accès aux soins de santé concerne les soins de santé primaires et l'accès aux médicaments, aux soins actifs et aux soins de longue durée — et j'allais oublier, je suis désolée, aux soins en santé mentale. Si nous ne sommes pas en mesure de combler tous ces silos — à l'heure actuelle, le travail se fait en silos —, notre société ne sera pas aussi en santé qu'elle devrait l'être, alors la disponibilité des médicaments d'ordonnance...
    Merci beaucoup.
    Vous savez, c'est intéressant. Au cours de ma carrière de médecin de famille, j'ai connu beaucoup d'infirmières. Elles sont très heureuses d'avoir leur régime privé d'assurance-médicaments, qui couvre beaucoup de choses. Les difficultés de leur emploi les obligent malheureusement à recourir à la physiothérapie et, souvent, à des chiropraticiens et à des professionnels en santé mentale. Que dites-vous aux infirmières qui craignent de perdre leur régime?
    Vous laissez entendre que cela ne se produira jamais. D'autres témoins nous ont dit: « Oui, il est très probable que cela se produise avec un régime national universel à payeur unique. » Si cela se produit, qu'avez-vous à dire aux infirmières qui perdront leur régime et qui n'auront accès qu'à quelques pilules contraceptives, mais pas à la physiothérapie, à la chiropratique, aux bas de compression, ni aux soins en santé mentale? Qu'avez-vous à dire à vos infirmières à ce sujet?
    Tout d'abord, ce projet de loi ne traite pas des physiothérapeutes ou des bas de contention. Il porte sur deux catégories de médicaments d'ordonnance. Il aura pour effet d'assurer l'équité dans tout le pays. Pour nos infirmières, je n'ai jamais eu le mandat d'examiner leurs propres régimes. C'est à la table de négociation dans chaque province et territoire, et elles font un excellent travail, sans jamais songer à elles-mêmes, mais aux patients dont elles s'occupent. Elles s'inquiètent du patient qui passe entre les mailles du filet au Québec, comme je le disais à M. Blanchette-Joncas, ou du patient qui n'a aucune assurance.
    Madame Silas, je vais vous interrompre parce que là n'était pas ma question. Ma question était la suivante: si cela se concrétise et que les infirmières perdent leur régime... Je sais que vous soutenez que cela n'arrivera jamais. D'autres témoins nous ont dit que c'était une possibilité bien réelle, compte tenu des causes déjà portées devant les tribunaux, etc. Qu'avez-vous à dire à vos infirmières alors que nous savons, comme l'a mentionné notre collègue du Bloc, que les régimes publics couvrent beaucoup moins de médicaments et, comme vous l'avez mentionné, peut-être pas de physiothérapie, de chiropractie et d'autres choses importantes pour les infirmières?
    Qu'avez-vous à dire à vos infirmières si elles perdent leur couverture?
     Je négocierai un meilleur régime pour elles.
    Madame Silas, ce n'est absolument pas vrai, car elles n'auront accès qu'à un seul régime. Ce n'est pas quelque chose que je trouve drôle parce que je connais beaucoup d'infirmières. Vous les représentez. Que leur direz-vous lorsqu'elles n'auront pas le choix? Comment allez-vous négocier un autre choix alors qu'il n'y a pas de choix au départ?
    Madame Ellis, j'ai 20 ans de mandat — à l'échelle nationale — pour négocier un régime national d'assurance-médicaments avec des infirmières de tous les secteurs du pays, et elles ne s'inquiètent pas de ne pas avoir de régime. Elles en auront toujours un. Certains sont plus généreux. En Alberta, le régime est très généreux, sur tous les plans, comparativement à ma propre province, le Nouveau-Brunswick, mais il est négocié au niveau provincial et continuera d'être négocié au niveau provincial et territorial. Nous cherchons à réduire certains des coûts de ces régimes afin de les améliorer — par exemple, en offrant peut-être de meilleurs services de santé mentale, de la physiothérapie et des bas de contention.
     Je ne partage pas votre optimisme, mais je vous remercie beaucoup de votre opinion.
     Merci, monsieur Ellis.
    La parole est maintenant à M. Jowhari, pour cinq minutes.
    Je vais poursuivre sur ce sujet avec Mme Silas.
    Ai‑je raison de croire qu'à la suite de l'introduction préliminaire de ces deux types de produits — les produits pour le diabète et les contraceptifs —, il y aura plus de place dans les programmes et les prestations d'assurance plus généraux, ce qui peut aider à élargir la portée d'autres services comme vous le disiez? Vous ai-je bien compris? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
(1315)
     Ce serait le meilleur scénario, mais en 2024, jusqu'à ce que la loi soit promulguée et que l'on ait une certaine expérience avec le régime, ce seront les comités dans les provinces et les divers secteurs qui décideront des réinvestissements à faire en fonction de l'incidence sur nos programmes de santé financés par les employeurs... Je parle du secteur public et des soins de santé, mais ce sera la même chose dans une entreprise automobile quelque part en Ontario. On négociera l'excédent lorsqu'il se produira.
    Quand vous dites que cela aura un impact en 2024, pouvez-vous préciser lequel?
    Honnêtement, je ne peux pas l'expliquer avec des chiffres précis. Ce que je peux expliquer... Disons que les médicaments pour diabétiques représentent 10 % des coûts des soins de santé, et qu'ils sont répartis un peu partout. Ces 10 % seront réinvestis dans autre chose, parce que ce sera couvert par la province et par le régime du gouvernement fédéral. C'est le meilleur exemple.
    M. Majid Jowhari: D'accord.
    Mme Linda Silas: Tant que nous n'aurons pas l'expérience, personne ne pourra vous donner un chiffre exact, à moins qu'il s'agisse d'un économiste qui viendrait témoigner.
    Je crois savoir que vous êtes aussi infirmière praticienne. Selon votre expérience, ou selon l'expérience des infirmières que vous représentez, combien de fois est‑il arrivé dans un hôpital, dans une salle d'urgence, qu'un Canadien se présente avec des symptômes liés au diabète et que, à cause d'un manque d'accès ou à cause du rationnement, il se retrouve à l'urgence? Combien coûte la visite d'urgence?
    Je n'ai pas exercé depuis plus de 25 ans, alors je ne suis vraiment pas la personne à qui poser la question. Je suis une infirmière autorisée et non une infirmière praticienne. Au fil des ans, nous avons fait venir des infirmières — et des médecins sont également venus — pour parler aux parlementaires du manque d'accès aux médicaments.
     La plupart du temps, nous laissons aux économistes le soin d'expliquer les coûts. Ce que nous disons, c'est qu'il y a un impact humain si les gens doivent aller voir un médecin ou une infirmière praticienne et quémander un échantillon de médicament ou pour la maladie rare dont parlait Mme Wong-Rieger... Nous ne devrions pas nous retrouver à devoir implorer des soins au Canada; l'accès à ce que le médecin ou l'infirmière praticienne prescrit devrait être inclus.
     D'accord. Merci.
    Je vais m'adresser à Mme Berg.
     Madame Berg, vous avez parlé de la chaîne d'approvisionnement, de la distribution et de l'impact potentiel de ce projet de loi, en particulier du pouvoir d'achat, et du fait que les distributeurs stockent moins d'existences ou éliminent des produits de leurs offres, et aussi du fait que d'autres fabricants, qui réussissent tout aussi bien comme soumissionnaires, vont complètement arrêter la fabrication ou la distribution au Canada. Y a‑t‑il du vrai dans cela?
     Dans quelle mesure est-il réaliste qu'une société pharmaceutique mondiale affirme qu'elle ne va plus fabriquer de pénicilline ni le vendre directement au gouvernement? Il ne me reste qu'environ 10 secondes, mais pouvez-vous répondre rapidement?
     Très volontiers.
     Ce n'est pas qu'ils vont arrêter la fabrication; ils vont arrêter de l'envoyer au Canada. C'est arrivé. Mme Wong-Rieger en a également parlé.
     Nous entendons ce genre d'affirmation sceptique selon laquelle les médicaments seront toujours distribués partout, tout comme l'épicerie. Or, contrairement à l'épicerie, les prix des médicaments sont contrôlés. Ils ne sont pas incontrôlés. La marge de bénéfice est faible, tout comme le volume. Ce ne sont pas des produits en masse qu'on peut embarquer sur n'importe quel vieux camion. Leur manutention est extrêmement complexe. C'est très réglementé et nécessite un transport spécialisé dans des véhicules à température contrôlée. Les médicaments ne sont pas faciles à entreposer et leur transport est coûteux. Quand on pense qu'il suffit de les embarquer avec le papier hygiénique, il n'en est rien. Cela ne peut pas arriver. Nous avons toutes sortes de règlements à ce sujet pour empêcher que cela se produise et pour maintenir l'intégrité du produit et la sécurité des patients.
     Cela arrivera, mais ce ne sera pas du jour au lendemain. Nous verrons la situation s'éroder et l'accès se détériorer petit à petit.
(1320)
    Merci.
     Nous passons maintenant à M. Kitchen.
    Allez-y, s'il vous plaît, pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Merci encore à tous. Il a été intéressant d'entendre certaines des réponses que nous avons reçues.
     Madame Silas, je me demande si vous avez bien compris la question de mon collègue.
     Vous savez, ma femme a été infirmière pendant 40 ans. Elle a fait sa première année comme infirmière en soins intensifs néonatals à l'hôpital universitaire d'Edmonton. Elle est ensuite allée à l'Hôpital pour enfants malades SickKids de Toronto et a été infirmière aux soins intensifs, puis à l'Hôpital universitaire Royal de Saskatoon. Elle est ensuite allée travailler à Crosby, au Dakota du Nord, avant son retour à l'Hôpital St. Joseph d'Estevan, où nous vivons actuellement. Elle s'est essentiellement spécialisée dans les soins intensifs de longue durée.
    Dans ses conversations dont j'ai été témoin, elle a été la meilleure défenseure des droits des patients au monde. Je la placerais au‑dessus de quiconque en ce qui concerne cet aspect et la façon dont elle se soucie de ses patients. Certaines des choses que vous avez dites aujourd'hui me choquent, parce qu'elle n'a jamais parlé de la sorte. Je trouve intéressant que ce soit la façon dont le syndicat voit les infirmières par opposition à la façon dont les infirmières voient les choses sur le terrain.
     Vous avez toutefois mentionné un détail que j'ai trouvé très important, à savoir que ce n'est pas aux politiciens d'établir ces régimes d'assurance-médicaments. Je suis d'accord avec vous là‑dessus. Ce n'est pas aux politiciens qu'il appartient de prendre ces décisions; c'est aux experts de le faire. Lorsque le gouvernement présente un régime sans avoir consulté des experts... En l'occurrence, nous parlons du diabète, et il s'agirait de savoir s'il s'est même donné la peine d'en discuter avec l'association du diabète.
     Lorsque nous comparons ce que l'association du diabète a mis en place et ce régime public au programme des services de santé non assurés, ou SSNA, et à ses normes cliniques, nous voyons des aspects totalement différents. Le régime public a beaucoup moins de fonds que les régimes privés. Je suis certain que vous savez très bien comment l'Ontario a élaboré le régime d'assurance-santé Plus. Lorsqu'il a été mis en œuvre pour les personnes de moins de 25 ans — et je ne viens pas de l'Ontario, mais de la Saskatchewan —, ce régime a beaucoup aidé les jeunes Canadiens à obtenir leurs médicaments, car ils n'y avaient pas accès auparavant. Voilà ce que fait ce projet de loi.
    Il s'agit d'instituer un régime public. Comme mon collègue l'a indiqué, de nombreux autres intervenants nous ont dit hier que les régimes privés seraient réduits. On ne peut pas négocier ce qui n'est pas négociable. C'est dans ce projet de loi.
    De quoi avons-nous besoin pour modifier le projet de loi pour vous permettre de négocier vos étapes au fur à mesure que vous avancez?
     Monsieur Kitchen, oui, n'importe quel projet de loi est améliorable, mais il faut bien commencer quelque part. C'est un début fondé sur 30 ans de données probantes.
    Je félicite votre épouse pour son rôle, et je suis sûre qu'elle défend les intérêts des patients. Je suis probablement la meilleure défenseure des infirmières au pays. J'ai été élue 11 fois pour faire cela au cours des 22 dernières années.
     Je m'excuse de vous interrompre. Ma question est la suivante: que pouvons-nous faire? C'est pour cela que nous sommes ici — pour élaborer des régimes susceptibles d'améliorer la situation. C'est le rôle du Comité ici présent. Comment pouvons-nous améliorer cela? Que pouvons-nous faire aujourd'hui pour apporter ces améliorations et proposer des mesures?
    Vous n'offrez aucune mesure qui améliorerait cette partie. Vous dites que cela vous convient. Cependant, ce que je vous dis, c'est que ce qui est soi-disant « acceptable » met la vie des gens en danger. Pour aider les 10 % de Canadiens qui n'ont pas de régime, qu'il s'agisse d'un bon programme ou non, il faut fournir le financement nécessaire. Le régime ne va pas les aider, car il ne fournira que des médicaments de base dans le domaine du diabète, pas plus qu'il n'aidera ceux qui ont une assurance, parce qu'on va leur enlever cela.
    Selon vous, que pouvons-nous faire pour changer la donne?
(1325)
    Madame Silas, le temps de M. Kitchen est écoulé, mais prenez 20 secondes pour répondre de votre mieux.
    Honnêtement, cessez de retarder l'accès des Canadiens aux médicaments. Le projet de loi ouvre la porte à l'égalité dans notre système de santé. Je l'appuie et je travaillerai à l'améliorer dans les années à venir.
     Merci, madame Silas.
    La dernière personne à poser des questions à ce groupe de témoins est M. Naqvi, qui dispose de cinq minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je vais commencer par rappeler aux membres du Comité que j'ai eu le grand honneur de servir au niveau provincial en Ontario pendant 11 ans. J'ai fait partie du gouvernement qui a mis en place l'Assurance-santé Plus, et j'ai participé activement à la création et à l'élaboration de ce programme.
     En marge de ce que vous dirait le gouvernement, et donc simplement du point de vue d'un député provincial qui a parlé à d'innombrables électeurs de sa circonscription, je peux vous dire que les jeunes et leurs parents ont pu bénéficier de l'Assurance-santé Plus en ayant tout à coup accès à des médicaments qui leur ont sauvé la vie sans qu'ils n'aient eu à débourser un sou et en présentant tout simplement leur carte de l'Assurance-santé de l'Ontario. Cela a radicalement changé le genre de soutien offert aux gens qui en ont besoin, surtout pour les jeunes. Tous ceux qui sont parents dans cette salle ou qui nous écoutent savent qu'il n'y a rien de plus primordial pour un parent que de veiller au bien-être de ses enfants.
     Avec tout le respect que je dois à M. Kitchen, je peux vous dire à quel point la mesure a comporté des bienfaits pour de nombreux électeurs de ma circonscription que j'ai rencontrés au fil de mon expérience personnelle comme député provincial à l'époque, en Ontario, et vous parler des souffrances que beaucoup ont dû endurer une fois que le gouvernement de Doug Ford a éliminé ce choix.
     Je vais m'adresser à Mme Silas. Je suis heureux de vous revoir. Merci de votre travail acharné et de votre plaidoyer.
    Le mot « choix » revient souvent ici, et on dit que, d'une façon ou d'une autre, ce projet de loi va miner le choix et l'éliminer. Pour moi, c'est tout le contraire. À mon avis, il crée plus de choix, plus d'options pour les gens qui n'ont pas d'assurance-médicaments, qui ne sont pas assurés ou qui sont sous-assurés.
    Compte tenu de tout le travail et de toute la recherche que votre organisation a effectués, pouvez-vous nous dire ce que vous pensez du choix et de ce que fait ce projet de loi pour les choix qui s'offrent aux Canadiens pour avoir accès à des médicaments qui sauvent des vies? Vous pourriez commencer par le diabète et les contraceptifs.
    Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec vous au sujet de l'Assurance-santé Plus. Nous nous sommes tous réjouis de son introduction. Le seul ennui, c'est que nous espérions que le gouvernement fédéral s'en occuperait, tout comme il l'a fait pour le régime de soins dentaires.
    Lorsque vous utilisez le mot « choix », je le vois comme un terrain de jeu égal pour les médicaments essentiels qui sont prescrits partout au pays. Il n'y a normalement que ceux qui ont les moyens d'en avoir plus qui ont des choix. Cependant, les règles du jeu équitables pour les diabétiques de tout le pays, pour les femmes de tout le pays, les placeront sur un pied d'égalité avec tous les autres. Tout le monde aura ainsi le choix d'opter pour des soins complémentaires.
    Merci. Vous avez examiné ce projet de loi de près et en détail. Avez-vous trouvé quelque part dans ce projet de loi une mention quelconque de l'assurance privée ou de son éventuelle disparition, ou encore du fait que les gens n'auront pas la possibilité d'avoir accès à leur assurance privée ou de compter dessus?
(1330)
     Non. Prenons les principes de l'article 4. Il y est question de travailler avec les peuples autochtones, les provinces, les territoires et les intervenants sur le mode de financement. Comme nous l'avons mentionné plus tôt, il est aussi question de « maladies rares », et ensuite des traitements du diabète et des contraceptifs.
     Il importe d'insister sur la simplicité de ce projet de loi. Les experts pourront mieux travailler avec.
     Nulle part dans ce projet de loi on ne parle de retirer des médicaments ou de réduire les médicaments couverts par l'assurance privée.
     Non. Il n'y a pas un seul syndicat au pays qui accepterait d'éliminer les programmes privés qui existent partout.
     Puis‑je poser les mêmes questions à Mme Berg et à Mme Wong-Rieger au sujet de l'assurance privée?
    Dans votre analyse du projet de loi, avez-vous relevé une allusion quelconque au manque de disponibilité de l'assurance privée pour ceux qui veulent y avoir accès?
     Nous allons commencer par Mme Berg.
     Merci.
     En fait, nous ne sommes pas au courant des régimes privés et publics existants. C'est une relation d'entreprise à entreprise tout au long de la chaîne d'approvisionnement.
     Je cède la parole à Mme Wong-Rieger. Je sais qu'elle a fait des tonnes de travail à ce sujet.
     Excellent.
     Merci.
    Merci beaucoup.
    Notre préoccupation à nous c'est de veiller à ce que... Comme vous le savez, il y a des médicaments essentiels, mais dans bien des cas, il existe des médicaments beaucoup plus personnalisés et d'un tout autre niveau, qui sont spécifiquement conçus pour les gens qui en ont besoin.
    Par conséquent, je suis tout à fait d'accord avec Mme Silas. Si on a besoin d'un médicament essentiel, d'un médicament de base, comme vous dites, ce serait disponible avec l'Assurance-santé Plus. Très franchement, nous aimerions que le projet de loi fasse en sorte que tout un chacun obtienne les médicaments dont il a besoin et que personne ne soit réduit à devoir consommer un médicament d'usage répandu quand ce qu'il lui faut en réalité est beaucoup plus spécialisé.
     Aujourd'hui, nous avons une assurance privée et publique pour les médicaments contre les maladies rares. Ce qui est triste, c'est que les patients nous disent invariablement que la première question qu'on leur posera sera de savoir s'ils ont une assurance privée. S'ils n'en ont pas, ils ne se verront même pas prescrire les médicaments qui conviennent parce qu'ils ne seront pas couverts par le régime public.
    S'il y a un régime qui offre, comme vous le dites, le meilleur choix pour chaque patient afin qu'il puisse obtenir ce qui est absolument optimal pour lui... Dans bien des cas, les gens se retrouvent à l'hôpital parce qu'ils n'ont pas le bon médicament.
    Oui, nous aimerions avoir un régime qui permettrait à tout le monde d'obtenir ce dont il a besoin, quel que soit le cas.
     Merci, madame Wong-Rieger.
    Merci à tous nos témoins d'être ici aujourd'hui. Nous vous sommes très reconnaissants de votre témoignage et de la façon professionnelle dont vous l'avez présenté.
    Chers collègues, nous allons suspendre la séance jusqu'à 13 h 45. Nous vous prions d'être de retour à 13 h 45, car nous allons entendre cinq témoins dans le prochain groupe.
    Merci encore à vous tous de votre participation.
     La séance est suspendue.
(1330)

(1345)
     Nous reprenons nos travaux.
     J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins d'aujourd'hui. Nous avons quelques témoins qui participent à distance, alors je vais simplement informer le Comité que, conformément à notre motion de régie interne, tous les participants à distance ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
    Pour nos participants à distance, vous verrez au bas de votre écran que vous avez le choix entre l'anglais et le français. C'est pour pouvoir accéder à l'interprétation simultanée, si vous en avez besoin.
    Je vous présente les témoins que nous accueillons aujourd'hui. Jessica Diniz, présidente et cheffe de la direction de FRDJ Canada.
    Madame Diniz, je vous remercie de votre patience pendant que nous réglions les questions techniques. Nous allons commencer par vous.

[Français]

     De l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires, nous recevons le président, M. Benoit Morin, et Geneviève Pelletier, directrice principale des Services pharmaceutiques et affaires externes.

[Traduction]

    Nous accueillerons ensuite Bill VanGorder, dirigeant principal des politiques, de l'Association canadienne des individus retraités, qui comparaît par vidéoconférence. Puis ce sera au tour de Glenn Thibeault, directeur exécutif, Affaires gouvernementales, défense des intérêts et politiques, de Diabète Canada.
    Bienvenue de nouveau, monsieur Thibeault. Je suis heureux de vous revoir.
     Nous accueillons également Russell Williams, vice-président principal, Mission, de Diabète Canada également. Nous aurons aussi Carolyne Eagan, représentante principale de la Coalition pour des soins de santé intelligents.
    Nous allons commencer par les déclarations préliminaires dans l'ordre indiqué sur l'avis de convocation. Ce sera donc au tour de FRDJ Canada en premier.
     Madame Diniz, bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je suis honorée d'être ici.
    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je m'appelle Jessica Diniz et je suis présidente et cheffe de direction de FRDJ Canada.
    FRDJ est le plus important organisme de bienfaisance au monde qui se concentre sur l'accélération de la recherche visant à guérir, à prévenir et à traiter le diabète de type 1 et ses complications, et qui aide à améliorer la vie quotidienne des personnes qui en sont atteintes. Nous défendons également les intérêts des 300 000 Canadiens qui vivent avec le diabète de type 1 et nous défendons leurs points de vue sur des questions cruciales comme le régime national d'assurance-médicaments.
    FRDJ appuie l'objectif de rendre l'accès aux médicaments et aux appareils pour le traitement et la gestion du diabète de type 1 équitable et abordable pour tous les Canadiens. Le choix du patient doit être une priorité.
    Le diabète de type 1 est une maladie auto-immune permanente dans laquelle le système immunitaire d'une personne détruit les cellules productrices d'insuline dans le pancréas, les rendant dépendantes des injections quotidiennes d'insuline pour survivre. Je tiens à souligner que ces patients ont besoin d'insuline pour rester en vie. Je veux simplement m'assurer que c'est très clair.
    La gestion du diabète représente un fardeau financier important pour les Canadiens touchés par la maladie, et de nombreux traitements et appareils demeurent hors de portée pour certains. Nous remercions le gouvernement d'avoir mis l'accent sur le diabète et le coût élevé de la gestion de la maladie grâce à la couverture offerte par le projet de loi C‑64.
    Bien que nous soyons d'accord avec l'intention du projet de loi C‑64 d'offrir un accès complet et sans obstacle aux traitements et aux appareils pour les personnes vivant avec le diabète, nous aimerions formuler quelques recommandations pour veiller à ce que le projet de loi réponde aux besoins de tous les Canadiens qui vivent avec le diabète de type 1.
    Premièrement, un régime national d'assurance-médicaments ne devrait empêcher personne d'utiliser la couverture d'assurance privée et publique existante pour accéder à l'insuline, qu'elle figure ou non sur la liste nationale de médicaments. Le projet de loi C‑64 devrait inclure une disposition qui énonce clairement ce principe.
     Deuxièmement, à la suite de consultations avec les fournisseurs de soins de santé et les personnes atteintes de diabète de type 1, nous aimerions que la liste des insulines figurant sur la liste des médicaments soit élargie pour inclure des insulines plus avancées qui aident à mieux traiter la maladie. C'est une liste très limitée, y compris les insulines qui sont rarement utilisées et prescrites. Il est important que les médecins aient des options thérapeutiques pour faire face à tout l'éventail des réactions et de la tolérance de chaque patient à un médicament donné, et que les patients puissent y avoir accès, car une insuline peut bien fonctionner pour une personne et pas pour une autre. Je pense que c'est un point très important. En élargissant le choix des médicaments, vous augmentez le nombre d'options de traitement disponibles pour aider à éliminer les effets secondaires, à réduire les complications et à améliorer les résultats pour la santé.
    Nous aimerions également soulever deux points concernant la mise en œuvre de ce programme. Premièrement, il faut modifier la couverture d'assurance. Le projet de loi crée aussi le risque que l'existence d'une liste de médicaments nationale incite les assureurs privés à ne pas couvrir les insulines de marque parce que certains des équivalents génériques seraient maintenant disponibles par l'entremise du programme national d'assurance-médicaments. Si cela se produit, la conséquence pourrait être la substitution automatique d'une autre insuline, ce qui peut avoir une incidence sur les résultats pour la santé.
    Deuxièmement, il y a la mobilisation et la consultation des intervenants. Cela sera essentiel pour assurer la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments qui répond le mieux aux besoins des Canadiens atteints de diabète de type 1.
    FRDJ appuie les mesures législatives qui améliorent l'accès aux médicaments et aux appareils pour les Canadiens atteints de diabète de type 1. Nous demandons au gouvernement de clarifier ce projet de loi afin qu'il respecte ses objectifs en matière d'équité et d'accès abordable aux médicaments et aux appareils, et de tenir compte des commentaires de divers groupes d'intervenants qui doivent avoir leur mot à dire sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments.
    Il est essentiel de bien mettre en œuvre ce projet de loi afin qu'il tienne sa promesse, non seulement pour les personnes atteintes de diabète de type 1, mais aussi pour tous les Canadiens qui bénéficieront de ce programme à l'avenir.
    Merci beaucoup.
(1350)
    Merci, madame Diniz.

[Français]

     J'invite maintenant M. Benoit Morin, de l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires, à prendre la parole.
    Chers parlementaires, je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant vous à titre de président de l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires.
    Je suis accompagné de Geneviève Pelletier, directrice des affaires pharmaceutiques.
     Je représente les 2 050 pharmaciens propriétaires des quelque 1900 pharmacies communautaires réparties sur le territoire québécois, peu importe la chaîne ou la bannière.
    Le Québec possède une particularité importante: il faut être pharmacien pour être propriétaire d'une pharmacie, ce qui fait que l'indépendance professionnelle et la déontologie ont préséance sur les décisions d'affaires et que le bien-être des patients est au cœur des priorités des propriétaires. Au Québec, nous avons un réseau de pharmacies unique.
     D'entrée de jeu, je souhaite souligner que notre association appuie la volonté du gouvernement du Canada d'améliorer l'accessibilité et le caractère abordable des médicaments sur ordonnance pour les Canadiens. Nous voulons toutefois faire valoir que le système en place au Québec permet déjà d'atteindre les objectifs du ministre de la Santé.
    Les pharmacies communautaires au Québec se distinguent par leur accessibilité et leur offre de soins de première ligne. Les équipes en pharmacie offrent une multitude de services qui vont bien au-delà de la distribution et de la surveillance des médicaments. Le bon déploiement de cette offre de services est intimement lié à la santé financière des pharmacies et donc à son financement.
    Or nous sommes grandement préoccupés par le projet de loi C‑64 dans sa forme actuelle. Un régime national à payeur unique au Québec mettrait en péril le modèle de pharmacie, au détriment des patients.
    Actuellement, le financement des pharmacies québécoises repose principalement sur les honoraires professionnels liés à la distribution des médicaments et à leur surveillance. La variation de ces honoraires peut influencer la capacité des pharmacies à fournir des services aux patients. Le système mixte public-privé permet aux pharmacies d'offrir leurs services de manière prévisible et stable pour le gestionnaire du régime, soit la Régie de l'assurance maladie du Québec.
    Selon le principe proposé du payeur public unique, les honoraires des pharmaciens pour l'exécution et le renouvellement des ordonnances pour le diabète et des ordonnances d'anovulants seraient un montant unique négocié pour les médicaments couverts. Dans ce scénario, l'impact sur les pharmaciens propriétaires québécois serait important, car ces médicaments sont couramment utilisés par des patients couverts par la composante privée du régime général d'assurance médicaments. Il s'agissait de près de 7 millions d'actes en 2023.
    C'est précisément la flexibilité du modèle mixte public-privé actuel qui permet aux pharmacies québécoises de se développer, d'être présentes dans toutes les régions et d'offrir une multitude de services aux patients. La mixité du système permet aux pharmaciens propriétaires de s'adapter aux besoins particuliers de leur clientèle locale et de réagir efficacement à la compétitivité du marché. Sans cette souplesse, la santé financière du réseau des pharmacies serait mise à mal, et les répercussions seraient encore plus importantes en région éloignée. Il est donc essentiel de maintenir ce système mixte, qui assure la pérennité et l'efficacité de notre réseau.
    La santé financière des pharmacies est non seulement garante de l'accessibilité aux médicaments, mais également du rôle clinique des pharmaciens en première ligne de soins et de la prise en charge des maladies chroniques.
    Au cours des douze derniers mois seulement, plus de 7 millions d'activités cliniques en soutien à la première ligne de soins ont été réalisées dans les pharmacies du Québec. Fragiliser cette première ligne de soins, essentielle au système de santé, laisserait encore plus de patients démunis.
    Je tiens ici à rappeler que le modèle québécois répond aux objectifs établis par le régime national proposé, en favorisant l'accessibilité, l'abordabilité ainsi que l'utilisation optimale des produits pharmaceutiques et en prévoyant une couverture universelle pour tous ses résidants.
    Dans certaines situations, notamment pour les personnes à faible revenu assurées par la Régie de l'assurance maladie du Québec, la contribution de l'assuré est réduite à zéro dans le système actuel.
    Ainsi, le régime mixte du Québec permet non seulement l’atteinte des objectifs du projet de loi, mais il bonifie également le régime public en place.
     En conclusion, un régime national à payeur unique au Québec serait contre-productif et aurait un effet contraire à l'objectif d'améliorer l'accessibilité aux médicaments. De plus, il fragiliserait le modèle de pharmacie communautaire du Québec, un réseau bien ancré dans les communautés et envié par les autres provinces canadiennes.
(1355)
    Merci, monsieur Morin.

[Traduction]

     Nous passons maintenant au représentant de l'Association canadienne des individus retraités, M. VanGorder, qui est en ligne.
    Bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
     Je remercie le Comité de m'avoir invité à comparaître au nom de l'Association canadienne des individus retraités et de ses 225 000 membres rémunérés de partout au pays.
     Nous remercions le gouvernement de collaborer avec les provinces et les territoires pour signer l'entente qui offrirait ce qu'on appelle une couverture universelle au premier dollar à payeur unique. Nous sommes heureux que ce financement versé aux provinces et aux territoires réduise le coût des médicaments contre le diabète et de divers autres médicaments.
    Le fait qu'il s'agisse d'un régime d'assurance-médicaments à payeur unique nous préoccupe, cependant. En effet, cette approche risque d'évincer les payeurs privés qui couvrent actuellement la majorité des Canadiens, soit un aîné sur trois. Notre association estime que cela ne favoriserait pas les Canadiens âgés pour un certain nombre de raisons.
    Tout d'abord, ce système à payeur public unique rendrait plus difficile l'accès à un grand nombre de nouveaux traitements plus efficaces. Les régimes publics d'assurance-médicaments mettent du temps à accepter de couvrir les nouveaux médicaments, et leur offre est beaucoup plus limitée que celle des régimes privés. La liste des médicaments contre le diabète que le gouvernement fédéral prévoit couvrir en est un bon exemple. Elle est très limitée et ne comprend pas les traitements les plus récents que suivent les personnes âgées atteintes du diabète.
    Deuxièmement, en englobant tous les Canadiens dans un régime public, on risque de causer de graves perturbations. Il y a quelques années, après avoir transféré tous ses jeunes de moins de 25 ans à l'Asssurance-santé Plus, l'Ontario s'est heurté à des difficultés. Pendant la transition, de nombreux enfants ont perdu la couverture des médicaments que leurs régimes privés leur fournissaient. Une réforme du régime actuel d'assurance-médicaments pourrait causer des difficultés semblables. Cela risque d'entraîner des conséquences dévastatrices pour de nombreux aînés canadiens qui dépendent de leurs médicaments et qui ne peuvent pas se permettre de cesser temporairement de les prendre.
    Troisièmement, la plupart des Canadiens bénéficient déjà de la couverture de régimes privés pour le diabète et pour des médicaments contraceptifs. En investissant 1,5 milliard de dollars sur cinq ans pour offrir une couverture à ces Canadiens, le gouvernement gaspillerait les fonds publics. Ces fonds fédéraux pourraient être utilisés à meilleur escient, notamment pour aborder les difficultés que cause le système actuel. On pourrait par exemple réduire les dépenses personnelles élevées que causent les programmes publics en ne couvrant pas certains médicaments. Ces dépenses sont souvent énormes, surtout pour les aînés qui, pour la plupart, dépendent d'un revenu fixe.
    L'Association canadienne des individus retraités mène régulièrement des sondages auprès de ses membres. Les répondants suggèrent que l'on établisse une juste combinaison de programmes publics et privés pour créer une couverture universelle. Cette couverture devrait être axée sur les personnes qui en ont le plus besoin, comme celles qui n'ont pas d'assurance, celles qui sont sous-assurées et celles qui ont de la peine à joindre les deux bouts. Ce modèle a déjà été mis en œuvre avec succès dans le cadre de l'entente de contribution du gouvernement fédéral avec l'Île‑du‑Prince-Édouard. La province a fourni le financement nécessaire pour augmenter le nombre de médicaments qu'elle couvre et pour réduire les coûts directs qu'assument les résidents de l'île. Cette approche, qui s'appuie sur des programmes d'assurance-médicaments existants, sera probablement plus facile et plus rapide à mettre en œuvre qu'une réforme en profondeur du système actuel.
    Les aînés du Canada désirent que le gouvernement produise rapidement des résultats qui améliorent considérablement leur accès aux médicaments. Ils pourront ainsi mieux gérer leur état de santé et jouir d'une plus longue vie de meilleure qualité.
    Je vous remercie de m'avoir offert cette occasion de vous parler.
(1400)
     Merci beaucoup, monsieur VanGorder.
    Nous passons maintenant la parole aux représentants de Diabète Canada. Nous entendrons M. Glenn Thibeault, directeur exécutif, et M. Russell Williams, vice-président principal, Mission. Je ne sais pas comment vous comptez partager votre temps. Comme vous êtes parlementaires, vous connaissez la procédure.
    Monsieur Williams, vous avez la parole.
     Merci beaucoup, monsieur le président et membres du Comité.
    Diabète Canada demande depuis longtemps aux ordres fédéral, provincial et territorial d'améliorer l'accès aux médicaments, aux appareils et aux services de plus de quatre millions de Canadiens atteints du diabète. Notre organisme a pour objectif d'améliorer la qualité de vie des personnes qui vivent avec le diabète.
    Nous sommes heureux que le gouvernement inclue les médicaments et les appareils pour le diabète dans la portée initiale de son régime d'assurance-médicaments. En fait, nous considérons cela comme une nouvelle étape de l'élaboration du Cadre sur le diabète au Canada qui a été déposé l'an dernier.
    Merci, monsieur Sidhu, d'avoir dirigé cette initiative.
    Cependant, pour les personnes qui n'ont pas d'assurance ou qui sont sous-assurées, il est urgent que ce régime entre en vigueur. Avec de vastes consultations et une mise en œuvre prudente, il leur éliminera de nombreux obstacles. Nos trois principales recommandations consistent à offrir une couverture complète et un choix aux patients, à continuer d'améliorer les soins et à mettre en place un système de consultation solide.
    Nous reconnaissons que la couverture dont jouissent certaines personnes qui vivent avec le diabète présente de graves lacunes. À notre avis, la couverture publique devrait viser à combler ces lacunes. En premier lieu, nous pensons que le gouvernement devrait se concentrer sur les personnes non assurées et sous-assurées. Toutefois, son approche de gestion du diabète devra également être exhaustive et conforme aux lignes directrices de pratique clinique de Diabète Canada. Élaborées par des experts du Canada, ces lignes directrices éclairent les décisions que les médecins prennent en soignant leurs patients.
    Malheureusement, la liste de médicaments qui accompagne le projet de loi du gouvernement n'est pas conforme aux lignes directrices de pratique clinique et au programme des Services de santé non assurés pour les Premières Nations et les Inuits. Sa portée est limitée. Elle exclut plusieurs traitements efficaces plus récents et comprend d'anciens traitements désuets.
    Nous avons produit un document comparant la liste de médicaments des lignes directrices de pratique clinique à celle du programme des Services de santé non assurés pour les Premières Nations et les Inuits. Ce document démontre qu'au Canada, pour de nombreux diabétiques non assurés ou sous-assurés, la plupart des médicaments que l'on prescrit couramment ne seraient pas couverts par le régime proposé. C'est pourquoi il est si important de combler cette lacune en axant ce régime sur les personnes non assurées et sous-assurées.
    Nous avons rencontré le ministre hier, et il nous a confirmé que cette liste s'allongera et couvrira beaucoup plus de médicaments.
    N'oublions pas la réalité humaine de cette initiative. Je sais que vous la ressentez tous. Nous visons ici des Canadiens extrêmement vulnérables.
    Notre ligne sans frais, qui est ouverte à tous les Canadiens, reçoit régulièrement des appels de personnes âgées qui sont obligées de rationner leurs médicaments ou de s'en passer. Nous recevons des appels de gens qui ne prennent pas la bonne dose de leurs médicaments parce qu'ils ne peuvent pas se les payer. Depuis quelque temps, des gens nous appellent pour nous demander s'ils risquent de perdre leur assurance privée pendant la transition vers le régime public.
    Hier, le ministre nous a également assurés que les gens ne seraient pas retirés de leur assurance privée. Nous nous posions justement ces questions, qui sont fondamentales.
    Nous recommandons aussi au gouvernement d'adopter notre principe d'amélioration et d'accès continus.
    Nos lignes directrices de pratique clinique et les nouvelles données indiquent que les services, les soins et les produits s'améliorent continuellement. Un régime d'assurance-médicaments devra intégrer les nouvelles techniques et les nouveaux produits plus efficaces dès qu'ils seront disponibles. Pour assurer une couverture universelle, le système devrait en fait adopter diverses approches créatives, dont l'assurance privée. Les provinces et les territoires ont établi des processus différents pour maintenir leurs listes de médicaments. Le programme d'assurance-médicaments devrait faire de même.
    Nous avons entendu dire que le modèle hybride du Québec est intéressant et qu'il serait bon de s'en inspirer.
(1405)

[Français]

     C'est un régime universel, mais il est mixte, à la fois public et privé.

[Traduction]

    Il sera crucial de veiller à ce que les gens ne perdent pas l'accès aux médicaments que leurs régimes privés couvrent déjà, même s'ils ne figurent pas à la liste de médicaments. Malheureusement, ces problèmes sont déjà survenus. Par conséquent, nous demandons l'inclusion de l'expression « ne pas nuire » dans la loi afin de protéger l'accès actuel aux médicaments et de veiller à ce que les personnes atteintes du diabète reçoivent les traitements les plus récents.
    Compte tenu de ces recommandations, le projet de loi C‑64 devrait subir un processus d'évaluation et d'analyse pratique afin d'établir le système le plus efficace possible. Il ne suffira pas de débattre intellectuellement des notions fondamentales. Il faudra effectuer une analyse pratique de l'efficacité de ce système afin d'améliorer l'accès aux médicaments pour les diabétiques.
     Nous désirons que les prochaines étapes de ce projet de loi incluent un processus de consultation plus rigoureux et plus transparent. Il faudra consulter des gens, des patients, des personnes qui ont une expérience vécue, des fournisseurs de soins de santé, des gestionnaires de régimes d'assurance-médicaments, des chercheurs ainsi que des responsables des provinces, des territoires et des communautés autochtones.
    Nous encourageons les parlementaires à veiller à ce que ce nouveau régime national d'assurance-médicaments améliore vraiment l'accès aux médicaments et à ce que personne ne soit laissé pour compte.
    Nous vous remercions de nous avoir invités à présenter nos opinions et nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci, monsieur Williams.
    Enfin, nous avons la Smart Health Benefits Coalition, représentée par Mme Carolyne Eagan.
     Bienvenue au Comité, madame Eagan. Vous avez la parole.
(1410)
     Je remercie le Comité de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui.
    Notre coalition défend ardemment des solutions judicieuses et novatrices qui apporteront sans tarder des changements positifs pour les Canadiens. Les conseillers de nos sept organismes membres aident sur les lieux plus de 65 000 entreprises et 4 800 syndicats qui élaborent des régimes d'assurance-médicaments pour leurs employés. Ces milliers de conseillers appuient, partout au Canada, de solides régimes d'avantages sociaux pour 10 millions de Canadiens et pour leurs familles.
    Je vais donc vous présenter rapidement notre point de vue sur l'assurance-médicaments.
    Nous trouvons nous aussi qu'il est inacceptable que les Canadiens vivent avec peu ou pas de couverture des médicaments essentiels. Ils sont coincés entre les régimes publics et ceux de leurs milieux de travail. Même si 97 % d'entre eux ont un type d'assurance-médicaments, près d'un Canadien sur cinq affirme encore avoir de la difficulté à payer ses médicaments. Nous avons là un problème d'abordabilité et d'accès qui nécessite des solutions bien pensées.
    Le Canada devra collaborer avec les provinces pour relever ces défis de façon rapide, efficace et rentable en concentrant les nouvelles ressources publiques nettes. Il faudra axer la stratégie sur la correction des lacunes et sur une approche progressive de l'abordabilité.
    À notre avis, un régime universel d'assurance-médicaments ciblé et à payeurs multiples serait moins coûteux et offrirait un accès plus rapide aux médicaments. De plus, il perturberait moins les plans de traitement des Canadiens.
    Par conséquent, nous vous prions de tenir compte de quelques considérations essentielles.
    Un modèle de couverture universelle à payeur unique et au premier dollar obligera les contribuables à assumer la totalité du coût des médicaments et des frais. À l'heure actuelle, les régimes financés par les employeurs versent plus de 20 milliards de dollars pour rembourser les coûts de médicaments. Ils fournissent efficacement chaque année aux familles canadiennes les médicaments qui leur sont prescrits dans le cadre de notre système de soins de santé complet. Comme les Canadiens font déjà face à de grandes difficultés, il serait coûteux et inutile de dépenser ces précieux nouveaux fonds de soins de santé alors que les médicaments sont déjà couverts par les régimes offerts en milieu de travail.
    Qu'ils soient assurés ou non, les Canadiens souffrent surtout des pressions financières dues à des traitements pour le cancer, la maladie de Crohn, la fibrose kystique et de nombreuses autres maladies chroniques que l'on traite avec des médicaments novateurs extrêmement efficaces. Les pressions financières que causent ces coûts sont dévastatrices. Il serait crucial de les traiter en priorité en élaborant ce régime d'assurance-médicaments.
    En entendant récemment le gouvernement affirmer que les Canadiens pourront choisir entre le nouveau régime public et celui que leur offre leur employeur, nous nous sommes inquiétés. Comme bien d'autres intervenants, nous voudrions vraiment savoir en quoi consiste une couverture universelle à payeur unique au premier dollar. C'est important. Du point de vue de notre industrie, ce terme signifie que si, conformément à la Loi canadienne sur la santé, le système public paie les médicaments qui figurent sur une certaine liste, les régimes offerts par les employeurs ne pourront plus rembourser ces médicaments. Cela bouleversera les estimations du directeur parlementaire du budget, qui comptait sur la couverture continue des employeurs pour générer des économies annuelles de 4 milliards de dollars.
    Si le gouvernement a réellement l'intention de permettre aux Canadiens de choisir leur régime d'assurance, alors à notre avis, il devrait l'inscrire clairement dans ce projet de loi afin que personne ne le mécomprenne.
    Nous vous proposons donc quelques solutions judicieuses.
    Utilisons les nouveaux fonds nets des contribuables de manière à offrir une couverture et un allégement des coûts à ceux qui en ont vraiment besoin. Exigeons une liste de médicaments minimale commune pour tous les régimes d'assurance-médicaments offerts par les provinces et par les employeurs afin d'assurer une couverture de base et de la prévisibilité. Collaborons avec les provinces pour créer un système national coordonné couvrant les maladies rares et les médicaments très coûteux. Révisons la Loi canadienne sur la santé. Collaborons avec les provinces pour couvrir certaines thérapies courantes administrées hors de l'hôpital, comme certains traitements contre le cancer.
    Voici maintenant ce que nous proposons pour renforcer le projet de loi et le Cadre sur le diabète au Canada.
    Premièrement, il faut veiller à ce que la couverture soit offerte aux Canadiens de toutes les provinces. Sans perturber les objectifs fondamentaux du projet de loi, nous proposons un amendement qui permettrait au ministre de la Santé d'entamer des négociations secondaires avec les provinces qui rejetteront officiellement le régime d'assurance-médicaments à payeur unique. Cela permettrait au gouvernement fédéral de conclure une entente avec des provinces qui offrent des traitements universels gratuits sans toutefois leur imposer le modèle à payeur unique et au premier dollar.
    Deuxièmement, il faut examiner les possibilités de réduire les prix.
    Troisièmement, il faut présenter aux Canadiens les résultats d'une analyse coûts-avantages avant de prendre d'autres mesures. Nous proposons un amendement qui exigerait que l'on prépare et que l'on divulgue la comptabilité publique et l'analyse coûts-avantages avant d'entamer l'élaboration d'un système élargi à payeur unique. Les Canadiens ont le droit de connaître les faits et les coûts avant que les gouvernements ne prennent des mesures qui pourraient avoir une incidence irrévocable sur leur capacité d'accéder à la vaste gamme de médicaments actuellement fournis par les régimes offerts en milieu de travail ou sur leur capacité de les acheter.
    En conclusion, je tiens à remercier le Comité de m'avoir offert cette occasion de comparaître. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions des membres du Comité.
(1415)
     Merci, madame Eagan.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par les conservateurs.
    Nous cédons la parole à M. Ellis, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous d'être venus pour discuter de cet enjeu important.
    Madame Eagan, je vais d'abord m'adresser à vous.
     Nous allons consacrer 15 heures au débat sur ce projet de loi. Je suis heureux d'y participer avec mes collègues, mais je trouve que ce n'est pas assez. Ce projet de loi sur l'accès au financement des médicaments pourrait avoir des répercussions sur l'avenir de tous les Canadiens. Je trouve donc que cette période est bien trop courte pour débattre de la mise en œuvre d'un tel projet.
    Que pensez-vous de cela? Avez-vous des observations à nous présenter sur les consultations que vous avez tenues sur ce projet de loi?
     Je vous remercie pour cette question.
    Je dirais que c'est du temps bien investi. Nous examinons le risque énorme que présentent les décisions que nous prendrons sur les soins de santé et sur l'assurance-médicaments. Elles auront une incidence sur la vie et sur la productivité de notre main-d'œuvre, de nos aînés et des personnes qui ne reçoivent pas les services dont elles ont besoin. Il est important de bien faire les choses.
    Cela dit, c'est la raison pour laquelle la Smart Health Benefits Coalition envoie des conseillers dans les bureaux, dans les ateliers d'usinage, dans les milieux syndicaux et dans tous les départements des entreprises du Canada pour les aider à concevoir leurs régimes d'avantages sociaux. Chaque jour, nous constatons ce qui entrave les Canadiens et ce qui leur réussit quand ils naviguent entre les systèmes publics et ceux qui leur sont offerts en milieu de travail.
    Nous avons d'excellentes suggestions que nous serions très heureux d'expliquer afin de bien orienter cette initiative. Nous savons tous où nous voulons en venir, mais la façon d'y arriver est tellement importante. Il est crucial que nous communiquions avec clarté sur ces enjeux.
     Merci beaucoup, madame Eagan.
    Par votre entremise, monsieur le président, je vais m'adresser à Mme Eagan. Croyez-vous que certaines personnes craignent de perdre leur couverture privée si ce système national universel à payeur unique devait voir le jour?
     Oui, tout à fait. Nous en avons vu des exemples récemment dans le cadre du régime national de soins dentaires. Ce régime a permis d'offrir d'excellents traitements à des gens qui n'avaient pas d'assurance. Cependant, des milliers de nos conseillers ont reçu des milliers d'appels téléphoniques les obligeant à expliquer aux gens qu'ils ne devraient pas annuler leur régime actuel pour adhérer au régime gratuit sans savoir ce qui figure sur la liste de médicaments et à qui elle est destinée.
     Ma propre mère, qui fêtera ses 80 ans cette année, a reçu cette lettre. Elle était très confuse. Elle pensait qu'elle devait annuler son régime, parce que le régime national couvrirait gratuitement tout ce dont elle a besoin. Heureusement, je travaille dans ce domaine, alors j'ai pu lui expliquer ce qu'il en est vraiment.
    C'est un risque. Les employeurs et les Canadiens courent un grand risque. Ils risquent de perdre l'accès à une liste de médicaments plus longue alors que leur plan de traitement maintient la stabilité de leur état de santé... La perte de l'accès à cette liste met tout en péril. Ce régime met en péril la viabilité et la santé des Canadiens, des familles, de la main-d'œuvre et de la productivité.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Morin, je vous remercie beaucoup de votre témoignage.
    Craint-on que des pharmacies rurales ferment leurs portes, au Québec?
     Oui, il y a une préoccupation. Lorsqu'un régime universel a été mis en place en Nouvelle‑Zélande, on a vu fermer environ 371 pharmacies.
    Effectivement, au Québec, s'il n'y a pas de régime mixte, on craint que cela touche les pharmacies assez durement pour les empêcher d'être rentables, ce qui entraînera des fermetures et les contraindra à s'installer dans les grands centres plutôt que dans les zones rurales.
     Merci beaucoup.
comme ma question comporte des termes techniques, je vais la poser en anglais. Je m'en excuse.

[Traduction]

     Ma question porte sur l'élargissement du champ de pratique des pharmaciens. De toute évidence, comme vous l'avez mentionné dans votre déclaration préliminaire, cette mesure est malheureusement devenue un élément extrêmement important de la prestation des soins primaires au Canada puisque — et je n'exagère pas — notre système de soins de santé est sur le point de s'effondrer.
    Nous constatons que ce projet de loi ne prévoit pas de financement pour l'élargissement du champ de pratique des pharmaciens. Pourriez-vous peut-être, au nom de vos membres, expliquer aux Canadiens à quel point cette mesure est importante pour la prestation des soins au Canada?
(1420)

[Français]

    Je vous remercie de votre question.
    Le Québec a adopté différentes lois qui ont élargi le champ d'exercice des pharmaciens, au moins à deux reprises. Au cours de la dernière année, plus de 7 millions d'actes cliniques ont été réalisés dans les pharmacies, dont la vaccination et la prise en charge de maladies chroniques. Les pharmaciens ont beaucoup d'autonomie et peuvent prescrire beaucoup de médicaments pour des problèmes mineurs courants, comme l'infection urinaire chez la femme, par exemple. Nous espérons qu'on élargira encore davantage notre champ d'exercice pour que nous puissions en faire plus.
    Cependant, ces activités ont besoin d'être financées. Actuellement, elles le sont par les honoraires liés à la distribution des médicaments. C'est ce qui permet aux pharmacies communautaires d'être pertinentes et d'avoir une aire disponible pour réaliser ces activités cliniques. Pour nous, il est essentiel de préserver la santé financière des pharmacies pour qu'elles puissent continuer de jouer ce rôle.
    Je vous dirai que, depuis quelques années, il faut en faire de plus en plus avec de moins en moins de moyens. Les besoins sont grandissants et la main-d'œuvre est rare. Il est donc important que cette stabilité demeure, afin que les pharmacies puissent continuer de jouer leur rôle et répondre aux attentes des patients du Québec.
    Je vous remercie tous les deux.

[Traduction]

    Madame Sidhu, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de s'être joints à nous. Je tiens vraiment à remercier tous ceux qui travaillent sur le terrain, en particulier les gens de Diabète Canada et de la fondation FRDJ. Cependant, ma première question s'adresse à M. Williams.
    Monsieur Williams, comme nous avons travaillé ensemble pendant de nombreuses années, surtout pour le Cadre sur le diabète au Canada, je vous remercie du travail que vous accomplissez sur le terrain pour les gens qui vivent avec le diabète, surtout à Brampton. Je tenais à souligner cela. Vous envoyez toutefois aussi des représentants de Diabète Canada pour éduquer les gens, et je vous en remercie de tout cœur.
    Ma première question porte sur la mise en œuvre du Cadre sur le diabète au Canada. Nous savons que la couverture des médicaments et des instruments que les diabétiques utilisent est considérée comme étant essentielle dans ce cadre. Pouvez-vous faire brièvement le point sur la mise en œuvre du Cadre? De plus, que recommanderiez-vous au Comité sur la meilleure façon d'utiliser le fonds d'accès aux appareils pour diabétiques pour aider les patients atteints du diabète?
    Merci beaucoup pour cette question.
    Ce cadre a en fait amélioré l'accès aux médicaments et aux instruments, qui est l'un de ses six principaux piliers. Partout au pays, les provinces effectuent à leur rythme la mise en œuvre du Cadre. Je n'ai pas le temps aujourd'hui d'entrer dans les détails, mais je pourrais certainement les envoyer plus tard au Comité. Les organismes de santé provinciaux participent activement à la mise en œuvre des six piliers du Cadre. Je considère donc que cela fait partie de la prochaine étape.
    Quant à la façon de procéder, il reste encore beaucoup de questions à régler, et je crois que vous avez mentionné l'éducation. Beaucoup de gens dans ce pays ne savent pas comment fonctionne le système de soins de santé ou comment les produits pharmaceutiques sont livrés. À mon avis, il faudrait vraiment préciser ces choses. Je suggère aussi fortement que pendant la prochaine phase de l'examen de ce projet de loi, nous discutions de ce cadre que nous élaborons. Nous devrions aussi parler de façon concrète avec les provinces du fonctionnement de l'assurance-médicaments dans ce contexte.
     Toutefois, comme le ministre nous l'a dit hier, ce projet de loi n'aura aucune incidence sur l'accès à l'assurance privée, et les personnes atteintes de diabète conserveront leur accès à la gamme complète des médicaments fournis par les régimes d'assurance auxquels ils adhèrent. Ce régime s'ajoutera aux régimes en vigueur et n'en retirera rien. Que pensez-vous de ce que nous a dit le ministre?
    En écoutant le ministre dire ces choses, nous nous sommes sentis rassurés. En effet, nous avions entendu plusieurs des interprétations de ce projet de loi, que l'on nous a rappelées aujourd'hui, d'ailleurs. Cela suscite beaucoup d'inquiétude — de l'enthousiasme dans certains domaines et des préoccupations dans d'autres. Il est donc important que le ministre s'explique clairement. Nous avons également parlé du fait que la liste que le gouvernement a déposée n'est pas exhaustive et ne reflète pas les lignes directrices de pratique clinique que Diabète Canada a établies avec des experts. Toutefois, le ministre nous a assuré qu'il s'agit d'une liste minimale et qu'on va l'allonger. Nous avons fourni aux membres du Comité un document comparant les guides de pratique clinique et la liste du projet de loi C‑64 avec la liste des Services de santé non assurés pour les Premières Nations et les Inuits que le gouvernement a dressée.
    Les soins et la gestion du diabète ne sont pas universels, en fin de compte. Tout dépend des patients, comme vous le savez. Nous devons veiller à ce que le régime n'ait pas seulement l'apparence de fournir un certain niveau de couverture, mais qu'il couvre efficacement les personnes qui vivent avec le diabète.
(1425)
     Merci.
     Il est important d'éduquer, reconnaissons-le, mais il est également important de reconnaître que certaines provinces excellent à la mise en œuvre du Cadre sur le diabète au Canada. Certaines d'entre elles, comme le Québec — dont vous avez déjà parlé dans votre témoignage —, ont un bon modèle hybride d'assurance-médicaments.
    Parlons du coût humain que supporteront les patients. Il est évident qu'ils veulent un régime qui fonctionne pour eux. Toutefois, la réunion nous a fait comprendre que nous devrons collaborer avec les patients pendant la mise en œuvre. Selon vous, comment le gouvernement du Canada devrait-il aborder le volet de sensibilisation en renseignant les patients atteints du diabète sur la mise en œuvre du programme d'assurance-médicaments?
     Cette collaboration sera fondamentale. Il faut que les patients participent pleinement aux discussions. Cela ne s'est pas beaucoup produit jusqu'à maintenant. Ce débat est tronqué, et mon âme d'ancien politicien déteste les débats tronqués. Cependant, c'est la décision qui a été prise.
     Nous devons renseigner la collectivité de façon concrète. Nous devons parler aux patients, et je dirais même que nous devrions lancer un vaste programme d'éducation. Nous devrions lancer une pleine mobilisation, et Diabète Canada serait heureux d'apporter sa collaboration. Cependant — et c'est encore l'ancien politicien qui vous parle —, nous devrions aussi indiquer aux provinces que nous avons décidé d'agir ainsi, car nous tenons à régler ce problème pour les Canadiens vulnérables, et leur demander quelle solution chacune d'elles y appliquerait.
     J'ai mentionné la solution du Québec, la province d'où je viens, mais nous collaborons avec toutes les provinces. C'est pourquoi j'ai dit dans ma déclaration préliminaire que nous devrions miser sur la créativité et la diversité des systèmes de soins de santé des provinces et des territoires.
     Ma prochaine question s'adresse à la fondation FRDJ.
     Madame Diniz, il n'y a pas si longtemps, nous avons participé à la troisième édition annuelle de la Journée mondiale du diabète tenue à Brampton, où un Canadien sur cinq est atteint du diabète. C'est un plaisir de vous revoir, même par téléconférence.
    Voici ma question. L'investissement dans la recherche aide les entreprises novatrices à fournir de nouvelles solutions et de nouveaux appareils, comme des pompes, des glucomètres continus et d'autres appareils. Le fonds d'accès aux appareils pour diabétiques ouvre l'accès aux plus récentes technologies pour les patients qui ont le diabète. Comment devrions-nous utiliser ce fonds pour servir les Canadiens le mieux possible?
    Tout d'abord, je suis très heureuse de vous revoir et je vous remercie...
     Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Je suis désolée. Tout d'abord, je vous remercie pour cette question.
     Je suis d'accord avec vous au sujet de ce fonds pour les instruments spéciaux. Il est crucial de bien l'utiliser. L'accès à des glucomètres continus est vital pour les personnes atteintes du diabète. Il améliore leurs résultats de santé et réduit le nombre de complications. Les coûts du système de santé diminueront à long terme si nous pouvons offrir aux Canadiens un meilleur accès aux glucomètres continus.
    Par conséquent, nous proposons de discuter ouvertement avec le cabinet du ministre et avec les provinces pour voir comment ouvrir l'accès à ces glucomètres à un plus grand nombre de Canadiens. C'est essentiel, et à long terme, nous obtiendrons de meilleurs résultats en matière de santé.
     Merci.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je salue les témoins et les remercie de leur présence.
     Ma première question s'adresse à M. Morin, de l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires.
    Monsieur Morin, comme vous êtes aux premières loges, vous comprenez nécessairement l'observation faite sur les coûts de certains médicaments. Je me demande, comme plusieurs, si les gens qui bénéficient actuellement d'un régime d'assurance médicaments vont pouvoir continuer à y recourir. Hier, le ministre semblait dire que oui. Selon un témoin crédible, soit M. Stephen Frank, président et chef de la direction de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, il y a des ambiguïtés et le projet de loi n'offre pas nécessairement de confirmation à cet égard. De plus, dans votre mémoire, vous soulignez que, si le régime était imposé au Québec, la viabilité des régimes d'assurance privés s'en trouverait fortement menacée.
    J'aimerais que vous m'en disiez un peu plus à ce sujet.
(1430)
    Je vous remercie de votre question, monsieur Blanchette‑Joncas.
     Évidemment, il s'agit d'un non-sens de penser que les régimes d'assurance privés pourraient agir comme assureurs complémentaires, au-delà du régime public. La viabilité n'est pas là. Je ne suis pas un spécialiste de l'assurance, mais, d'après ce qui se fait au Québec, cela ne fonctionnerait pas. Ce sont des régimes complets qui fonctionnent avec une assurance médicaments complète, la plupart du temps. Cela donne aussi aux PME un accès à des régimes d'assurance privés, à un régime collectif. Ces PME ne sont pas obligées de souscrire à ces régimes; elles pourraient ne pas y souscrire et se tourner vers l'assurance publique. Toutefois, pour des raisons de démarchage ou des raisons qui leur sont propres, elles optent pour un régime collectif. Je pense qu'il s'agit d'une bonne chose; c'est une belle offre à faire à leurs employés. Je pense que cela doit continuer de cette façon.
    De plus, ces régimes offrent souvent une plus grande couverture que le régime public. Au Québec, le régime public a déjà une large couverture. En effet, si on compare la liste du Québec à celle qui est proposée dans le régime national pour ce qui est du diabète, on constate aussi une grande différence dans l'accessibilité aux molécules.
     Merci.
    De façon réaliste, si on perdait les régimes privés, et même si on les gardait, selon vous, serait-il financièrement réaliste que le gouvernement fonctionne sans aucune franchise et qu'il conserve le même éventail de médicaments?
     Je ne pense pas que ce soit réaliste.
    Pourquoi? J'aimerais vous entendre à cet égard.
    C'est à cause de l'augmentation du coût des médicaments. Il va y avoir des choix à faire. Si la couverture est complète, si elle est assumée à 100 % par le régime public, il y aura des choix difficiles à faire, compte tenu de la technologie, qui avance rapidement.
    Les nouveaux médicaments sont extrêmement coûteux. Il est possible de traiter des maladies rares, mais aussi des maladies chroniques, avec des médicaments biologiques, par exemple, qui font des miracles, mais qui sont extrêmement coûteux. Envisager une universalité totale du régime est problématique, selon moi.
    Merci, monsieur Morin.
    Je reviens à ce que vous avez mentionné dans votre allocution. Je suis bien placé pour parler de l'importance d'avoir accès à une pharmacie dans une communauté rurale, je représente fièrement 39 municipalités de la région du Bas‑Saint‑Laurent. Je peux vous dire que, quand on n'a pas d'hôpital à proximité, avoir une pharmacie est primordial.
    Vous avez mentionné que le programme actuel du gouvernement fédéral met en péril le modèle de pharmacie, voire des pharmacies communautaires. Vous avez donné l'exemple de la Nouvelle‑Zélande, où 371 pharmacies ont été fermées. Je m'inquiète beaucoup à la suite de vos propos. C'est un non-sens pour moi. On parle de services de proximité, du bien-être individuel, du maintien des gens dans leur communauté, surtout avec le vieillissement de la population comme on le connaît chez nous, la deuxième parmi les régions les plus vieillissantes de tout le Québec.
    Que doit-on faire pour éviter ces fermetures, qui seraient très problématiques?
    Premièrement, il ne faut pas mettre une pression indue sur des acteurs clés, des acteurs de première ligne comme les pharmacies communautaires. L'exemple du Bas‑Saint‑Laurent est très éloquent. On a eu le projet pilote du Guichet d'accès à la première ligne pour les patients orphelins, qui n'ont pas de médecin de famille et qui ont eu accès aux services d'un pharmacien dans les pharmacies où on les a dirigés, quand c'était possible.
    C'est un excellent exemple où un pharmacien a la capacité d'offrir ces services, bien que les activités cliniques qui y sont liées ne sont pas rémunérées à la hauteur des besoins. Il est capable de le faire, parce qu'il est en santé financière, mais mettre à mal cette santé-là reviendrait à remettre en question le réseau, le nombre de pharmacies et la présence des pharmacies dans ces régions.
    Je vous remercie de votre réponse, monsieur Morin.
    La Liste des médicaments de la Régie de l'assurance maladie du Québec couvre environ 8 000 médicaments. Ce n'est pas parfait, mais je pense qu'on se débrouille quand même bien. C'est beaucoup de médicaments. Croyez-vous qu'il y a des risques de perdre certaines couvertures avec ce nouveau régime fédéral d'assurance médicaments?
     Si on compare la liste du Québec à celle qui est proposée, bien qu'elle ne soit pas définitive, on constate une perte de plusieurs millions d'ordonnances pour le diabète. Un important pourcentage de patients devraient changer de médicament, ce qui est un non-sens. Ce n'est pas possible. Bien honnêtement, on gère des ruptures de stock quotidiennement, en pharmacie communautaire. Ajouter à ça un changement draconien de couverture pourrait être catastrophique pour la santé des Canadiens et des Québécois. Il faudrait vraiment s'assurer que cette liste couvre minimalement la liste du Québec, bien que le Québec soit généreux.
    En matière de diabète, une vaste couverture est nécessaire pour des raisons que mes confrères et consoeurs ont évoquées pour l'apport individuel de chaque médicament dans le traitement de cette maladie. Cette accessibilité, cette grande gamme de médicaments couverts, est essentielle pour maintenir la santé des Canadiens.
(1435)
    Merci, monsieur Morin.

[Traduction]

     La parole est maintenant à M. Julian, pour six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence.
    Vos propos sont intéressants. Vous êtes en train de nous fournir de bonnes informations.
    J'aimerais me tourner vers vous, monsieur Morin et madame Pelletier.
    Les pharmaciens jouent assurément un rôle important pour l'avenir de l'assurance médicaments.
    Hier, un vaste regroupement de près de 2 millions de Québécois et de Québécoises, dont les membres de la Centrale des syndicats démocratiques, ou CSD, de la Confédération des syndicats nationaux, ou CSN, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, ou FTQ, de l'Union des consommateurs, de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec et de beaucoup d'autres organisations ont dit ceci à propos de la situation actuelle au Québec:
[...] le régime d'assurance médicaments québécois actuel est loin d'avoir garanti à toutes et à tous un accès raisonnable et équitable aux médicaments [...] « Les divers frais exigés lorsqu'on se procure des médicaments sont en réalité des tickets modérateurs qui ont un effet dissuasif: des gens sautent des doses ou se privent de médicaments parce qu'ils n'ont pas les moyens de se les procurer » [...] La hausse des coûts des médicaments met par ailleurs une pression accrue sur les régimes privés, menant des milieux de travail à abandonner leurs assurances et ainsi perdre l'ensemble de leur couverture. [...]
    Ces groupes demandent justement aux parlementaires d'adopter le projet de loi C‑64.
    Vous avez évidemment soulevé la question de la liste de médicaments qui seront couverts. Cet aspect sera négocié avec le gouvernement du Québec. D'autres pays ont la chance d'avoir une assurance médicaments universelle et publique, sans qu'il y ait de fermetures de pharmacies.
    Selon vous, est-il important de s'assurer que tout le monde a accès aux médicaments qui les gardent en vie ou en santé, tout en faisant attention à la négociation du remboursement et à la manière dont les pharmaciens seront touchés par ce régime public et universel?
    Est-ce le message que vous voulez transmettre aujourd'hui?
    Je vous remercie de votre question, monsieur Julian.
    Je pense qu'il faut assurer la couverture de tous avant de penser aux pharmaciens. À mon avis, c'est la première étape.
    Au Québec, une mesure fait en sorte que personne ne paie plus de 996 $ par année de frais de franchise ou de coassurance, et ce, peu importe que la couverture soit publique ou privée. C'est ce qu'on appelle « le plafond ».
    Pour les gens à faible revenu, le plafond est à zéro. Ils n'ont donc rien à payer. Ceux qui ont des revenus ont un plafond maximal de 996 $ annuellement. Le régime public a un plafond mensuel, et les régimes privés ont un plafond annuel. Je pense qu'il serait avantageux de répartir cela sur 12 mois, parce qu'un seul montant de 1 000 $ pourrait être trop élevé pour certains. Il pourrait remettre en question la décision de prendre ses médicaments. Toutefois, un montant de 100 $ par mois ou de 90 $ par mois pourrait être une possibilité.
    Selon moi, la solution n'est pas nécessairement de rendre les médicaments gratuits pour tout le monde. Il s'agit plutôt d'éduquer la population gagnant un certain revenu, c'est-à-dire les gens qui ont la capacité de payer leurs médicaments. Il faut leur dire que les médicaments sont essentiels et prioritaires, qu'ils doivent y accorder l'importance qu'ils méritent et qu'ils ne doivent pas choisir d'autres produits au détriment des traitements. Par contre, les gens n'ayant pas la capacité de les payer qui sont inscrits au régime public, doivent avoir une couverture complète; il ne doit y avoir aucun obstacle à la prise de leurs médicaments.
    On s'entend sur le fait que le statu quo n'est pas acceptable.
    Je vous remercie de votre réponse.

[Traduction]

     Je vais maintenant m'adresser à Mme Diniz.
    Hier, nous avons entendu un témoignage très convaincant de M. Mike Bleskie, un jeune qui vit avec le diabète de type 1. Il a parlé de ce qui se passerait s'il perdait des contrats. Il a dit qu'il aurait recours à sa marge de crédit pour continuer à payer les médicaments qui le maintiennent en santé et même en vie. Je lui ai demandé ce qui se passerait si les contrats ne rentraient pas et s'il ne pouvait pas accéder à sa marge de crédit. Sa réponse était très émouvante. Il nous a dit que dans un délai de 24 heures, il se retrouverait à l'hôpital. En l'espace de quelques jours, il pourrait subir une amputation, ou pire encore.
    J'aimerais que vous nous disiez ce qui se passe à l'heure actuelle quand les gens n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments. Quelles sont les répercussions du diabète? S'ils n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments, que leur arrive-t-il?
(1440)
     Tout d'abord, merci beaucoup d'avoir posé cette question et d'avoir attiré l'attention sur ce problème.
     Je suis tout à fait d'accord, il est essentiel que les patients aient accès aux médicaments et aux appareils dont ils ont besoin.
    Pour le diabète de type 1, c'est une question de vie ou de mort. Les patients n'ont pas le choix. Considérez l'insuline comme l'air que nous respirons. Ils ont besoin d'insuline pour rester en vie. Pour répondre à votre question sur ce qui arrive aux gens qui n'ont plus les moyens de payer leurs médicaments, ils les rationnent. Ils n'en prennent pas assez. Cela entraîne des problèmes de santé plus graves et plus de complications, et à la longue, cela coûte plus cher à notre système de santé.
    Il est important de penser aux jeunes qui entrent sur le marché du travail et qui ne sont plus couverts par le régime de leurs parents. Ils choisissent leur profession en fonction des programmes de prestations qui sont offerts et qui couvrent leurs médicaments.
    Il est essentiel que les Canadiens qui vivent avec le diabète de type 1 aient accès à des médicaments pour contrôler leur diabète, car à long terme, cela prévient de nombreuses complications.
     Monsieur Thibeault, j'aimerais vous poser la même question. Quelles sont les répercussions lorsque les gens n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments?
     Je vous remercie de la question. C'est très semblable à ce dont parlent nos collègues de la FRDJ. Une personne atteinte de diabète de type 2 aura aussi de graves complications si elle n'a pas accès aux médicaments dont elle a besoin.
    Je vis aussi avec le diabète de type 2. J'ai reçu mon diagnostic en 2016, lorsque j'étais sur la scène politique. L'apprentissage par lequel vous devez passer pour savoir quels types de médicaments... J'ai essayé trois ou quatre types différents de metformine avant de trouver le bon. C'est pourquoi nous avons parlé de choix et de la nécessité d'offrir ce choix à tous ceux qui sont atteints de diabète de type 1 ou de type 2. Il est important de veiller à ce que nous puissions éviter toutes les complications qui peuvent survenir.
    Je sais, monsieur Julian, que vous avez parlé d'Amber dans votre circonscription, qui dépense 1 000 $ par mois.
     Merci, monsieur Thibeault.
     Le temps est‑il écoulé?
     Oui, en effet.
    Nous pourrons en parler la prochaine fois.
    Nous passons maintenant à M. Kitchen, pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être venus si rapidement et avec un préavis aussi court. Je tiens à dire à tous ceux d'entre vous qui nous ont fourni des mémoires, et j'ai trouvé très utile de les avoir à l'avance. J'aimerais beaucoup les passer en revue avec chacun d'entre vous. Je vous en remercie.
     J'essaie de poser des questions le plus rapidement possible.
    Monsieur Williams, vous nous avez dit avoir rencontré le ministre hier. Le gouvernement s'est‑il adressé à vous à quelque moment que ce soit avant d'établir ce régime, ou avez-vous eu simplement l'occasion de parler au ministre hier?
     Je vous remercie de la question. Nous discutons régulièrement avec les gouvernements, surtout au sujet de la mise en oeuvre du cadre. Nous n'avons pas parlé plus tôt des détails de ce projet de loi.
    Merci.
    De nombreux groupes nous ont fait part, hier en particulier, de leur inquiétude quant au fait que personne n'en discute. Cela va des ministères provinciaux de la Santé jusqu'aux particuliers, qu'il s'agisse du diabète, etc., et des experts dans e domaine, alors je comprends vos commentaires.
    Vous avez notamment parlé de vos conversations avec le ministre. Il était ici hier, et il a dit en substance: « Faites-moi confiance; tout ira bien. » Apparemment, d'après ce que vous dites, c'est ce qu'il vous a dit: « Faites-moi confiance; tout ira bien. »
    Cependant, c'est ce même gouvernement qui a déclaré que la taxe sur le carbone ne dépasserait jamais 50 $, ce sur quoi il a fait campagne lors des élections de 2019, et maintenant, elle grimpera jusqu'à 170 $.
    Dans quelle mesure croyez-vous que ce soit fiable? Ne serait‑il pas préférable d'inclure dans le projet de loi une disposition qui protégerait contre cela?
    L'une des choses dont nous avons parlé hier, et que nous avons fournies à tous les membres, c'est une comparaison entre la liste fournie par le gouvernement et nos lignes directrices de pratique clinique, pour dire qu'il y a du travail à faire à ce sujet. Nous avons également fourni toutes les listes en vigueur dans chaque province.
    J'aimerais avoir toutes les réponses, et nous travaillons sur ce dossier depuis un certain temps, mais je préfère essayer de faire avancer cette proposition pour les personnes les plus vulnérables le plus rapidement possible.
    L'une des choses que nous devons faire ici, c'est obtenir des réponses à ces questions, c'est certain. Cette loi comporte d'autres étapes. Il y aura des négociations avec les provinces. Devrions-nous aller de l'avant avec cette mesure? Elle ne me satisfait pas entièrement. Cependant, d'un autre côté, vaut‑t‑il la peine, pour les gens que nous voulons servir, d'essayer d'aller de l'avant en s'assurant qu'il y a suffisamment de freins et de contrepoids? Je comprends votre question. Nous leur posons ces questions et nous transmettons toutes les réponses que nous obtenons.
(1445)
     Je vous remercie de ce commentaire. Vous avez mentionné les personnes non assurées et les personnes sous-assurées, et ce sont différents aspects du problème. Je vous remercie de votre document, car je l'ai sous la main..
     C'est intéressant. Je suis un diabétique de type 2 et, monsieur Thibeault, je suis passé, moi aussi, par de nombreux tâtonnements, de même que ma femme, en ce qui concerne les types de metformine disponibles. J'ai aimé les commentaires que vous avez faits ici, lorsque vous avez énuméré les différences et indiqué qu'en ce qui concerne les SSNA, ce régime est essentiellement meilleur que celui que propose le gouvernement. Nous avons également obtenu cette information des Premières Nations hier, qui nous ont dit que la solution est là. Essentiellement, les lignes directrices cliniques sont là, et elles sont également jugées très satisfaisantes.
    Je vois, par exemple, qu'au Québec, les médicaments sont, soit à prescription restreinte — autrement dit, il faut une autorisation pour les obtenir —, soit ils sont inscrits dans la liste, et ce sont les plus courants dans toutes les provinces. En Saskatchewan... Je prends le Jardiance et il est mentionné qu'il est à prescription restreinte, et c'est vrai. J'ai besoin de l'autorisation de mon médecin pour obtenir ce type de médicament.
    Ce sont là d'énormes défis, et là où nous n'avons même pas de médecins disponibles pour faire ce travail... Le problème, c'est que le régime qui est proposé est essentiellement un régime de base, mais rien n'indique qu'il pourrait changer. Rien n'indique — et c'est ce que nous avons entendu de différentes personnes — qu'à mesure que les médicaments s'amélioreront, la liste sera modifiée.
    Ne pensez-vous pas que c'est une modification qui pourrait être proposée et que nous devrions inclure dans le projet de loi pour nous assurer que ce principe sera respecté?
    C'est pourquoi nous avons inclus dans notre deuxième recommandation le principe de l'amélioration continue des soins. Nos guides de pratique clinique changent de temps à autre, à mesure que nous obtenons de nouvelles données probantes, et nous devons veiller à ce que, à mesure que de nouveaux médicaments apparaissent, nous ayons un système permettant de les inclure. Le système ne devrait pas se limiter aux médicaments plus anciens, et il devrait avoir cette capacité.
    Nous recommandons que ce principe soit intégré et, encore une fois, nous l'avons dit lors des discussions que nous avons eues hier. Nous comprenons que c'est possible et, au bout du compte, cela dépendra des discussions. J'espère que toutes les provinces adhéreront également à ce principe et que nous bâtirons un système plus solide, qui ne se limitera pas à la liste de base qui a été déposée auprès du gouvernement et dont le ministre, encore une fois, a dit qu'elle allait s'allonger. Nous aimerions voir dans quelle mesure elle va s'allonger lors des discussions avec les experts, et encore une fois, j'aimerais vraiment que nous passions au niveau suivant afin que nous puissions avoir des discussions avec les fournisseurs de soins de santé pour comprendre certaines de ces questions.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Williams.
    La parole est maintenant à M. Powlowski, pour cinq minutes.
     Le projet de loi C‑64, exception faite des médicaments contre le diabète et de la contraception, ne crée pas un système à payeur unique. Nous ne savons pas à quoi ressemblera le régime national d'assurance-médicaments pour le moment. Ce ne sera pas nécessairement un système à payeur unique.
    Cependant, madame Eagan, en réponse à l'idée d'un régime à payeur unique, vous avez dit que c'était du gaspillage parce que tous les Canadiens auraient à le payer avec des impôts — ce qui est vrai —, mais qu'à l'heure actuelle, beaucoup de Canadiens l'obtiennent en tant que prestation de leur employeur.
    Ce n'est pas gratuit. Cela fait partie de votre salaire. Vous recevez un certain montant d'argent, mais vous recevez aussi des prestations. C'est une dépense pour l'employeur, et si l'employeur n'avait pas à l'assumer, on peut supposer que vous obtiendriez un salaire plus élevé. Si le gouvernement peut avoir un régime qui coûte moins cher à exploiter — on peut penser que s'il s'agit d'un régime géré, sans but lucratif, par le gouvernement, ce dernier pourrait, grâce aux économies d'échelle, l'offrir à moindre coût que les employeurs — ce serait un avantage net pour les Canadiens.
    Ne serait‑ce pas le cas?
    Ce que j'aimerais souligner ici, c'est qu'aujourd'hui, cela coûte 15 milliards de dollars. À quel point ce chiffre pourrait‑il être inférieur? C'est ce que paient les régimes des employeurs.
    Deuxièmement, je dirais que quatre Canadiens sur cinq profitent de ce système sans incident ni contestation.
    Nous sommes d'accord. Obtenons cette assurance. Ne prenons pas l'argent là où cela fonctionne bien. Laissons cela en place et allouons ces dollars, ces dollars supplémentaires, à ceux qui ne sont pas couverts ou qui ont de la difficulté à payer, que ce soit les 20 % d'une quote-part de 100 $ ou les 20 % d'une quote-part de 10 000 $. Des gens ont des difficultés à payer dans les deux cas. Pour les quatre personnes sur cinq pour lesquelles cela fonctionne, laissons ces régimes en place, laissons en place ce qui fonctionne et allouons cet argent.
(1450)
     Même si vous pouvez obtenir des prestations en tant qu'employé, avec les régimes privés, l'assureur profite d'une certaine partie de l'argent. Au lieu de grossir les bénéfices de l'assureur, cet argent pourrait peut-être servir à offrir un meilleur régime d'assurance-médicaments à tous les Canadiens, s'il est plus efficace d'avoir un système gouvernemental.
    N'est‑ce pas le cas?
    Je peux vous dire, pour avoir travaillé dans ce secteur pendant 28 ans et avoir fait l'analyse des renouvellements ligne par ligne, que la marge bénéficiaire est étonnamment inférieure à ce que vous pensez. C'est beaucoup moins.
    La marge bénéficiaire sur...?
    Je parle des marges bénéficiaires pour l'administration d'un programme de prestations. Cet argent à lui seul ne serait même pas une goutte d'eau dans l'océan pour ce que nous devons accomplir en tant que pays. Pour y arriver, nous devons travailler ensemble dans un système à payeurs multiples.
    Si vous me permettez un bref exemple, disons qu'il y a un patient A qui a une dépense de 100 $ et qui n'est pas couvert. Donnons-lui ces 100 $. Le patient B est couvert à 80 % par son employeur. Le régime de l'employeur paie 80 $ et le patient, 20 $. Maintenant, ce patient éprouve des difficultés financières. Essayons de trouver un moyen de lui donner ces 20 $. Dans le troisième exemple, si vous me permettez, le régime couvre 80 %. L'employeur paie 80 $, le patient, 20 $. Pour quatre personnes sur cinq, cela fonctionne très bien. Pourquoi perturber cela?
    Dans le dernier et quatrième scénario, deux conjoints sont couverts à 80 % et coordonnent leurs prestations. Ils n'ont rien à débourser. Cela fonctionne très bien.
    Dans le premier scénario, avec un payeur unique, le gouvernement paie 400 $. Dans le deuxième scénario, c'est 140 $.
    Puis‑je vous interrompre, s'il vous plaît?
    J'aimerais poser une question parce qu'à peu près tout le monde a dit qu'un défaut des systèmes à payeur unique — et je ne suis pas d'accord — est que ces systèmes sont tous en quelque sorte limités dans ce qu'ils fournissent. Et si vous voulez un nouveau médicament? Et si vous voulez un produit de marque? Ce n'est pas permis dans ce genre de système à payeur unique, mais ce pourrait être possible. Rien ne s'y oppose.
    Rien n'empêche un employeur, s'il y a un système à payeur unique, d'offrir des avantages supplémentaires — une sorte de régime complémentaire. Tout comme maintenant, si nous allons à l'hôpital, grâce à notre assurance de Canada-Vie, nous pouvons obtenir une chambre simple ou une chambre avec une autre personne, ou quelque chose d'autre. C'est une prestation que vous obtenez de Canada-Vie et que vous n'obtiendriez pas autrement. C'est ce qui est offert.
    Un employeur ne pourrait‑il pas offrir un régime qui assurerait ce genre de couverture complémentaire, de sorte qu'il y aurait toujours ce choix si les gens le voulaient? Plusieurs personnes ont dit que c'était le problème du système à payeur unique.
    La difficulté...
    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
     La difficulté réside dans la confusion. Regardez les soins dentaires. Combien de personnes pensent que la couverture est la même? Elles vont annuler leur assurance, puis elles se retrouveront sans rien.
    De cette façon, le fait de transférer entièrement ce coût au système public serait très risqué. Nous avons une liste plus longue de médicaments couverts qui évolue plus rapidement avec le régime de l'employeur que nous devons protéger et garder en place. Nous avons besoin de ce système pour aider les gens qui n'ont pas les moyens de payer à la fois les médicaments de base et ces coûts élevés.
    Continuons d'innover au Canada avec les thérapies contre le cancer et d'autres maladies qui coûtent cher aux patients, qui ont de la difficulté à payer ne serait‑ce qu'une quote-part de 10 % sur des dizaines de milliers de dollars.
    Merci.
     Merci.

[Français]

     Je cède la parole à M. Blanchette‑Joncas pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
     Je m'adresse toujours à M. Morin.
    Monsieur Morin, selon les dires de certains de mes collègues parlementaires, le statu quo serait une catastrophe au Québec, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
     Ne serait-il pas préférable d'avoir un droit de retrait avec une pleine compensation et de pouvoir, comme on le fait depuis maintenant 30 ans, bonifier notre propre régime public d'assurance médicaments?
    Absolument. C'est la proposition de l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires, l'AQPP.
    J'ai mentionné tantôt que, selon moi, le système n'est pas parfait. Il s'agit d'un système mixte; parfois, si on est assuré au privé, on doit débourser rapidement le plafond de 1 000 $. Il faudrait une protection contre cela.
    Il faudrait peut-être adopter d'autres mesures plus simples. On a mentionné la difficulté d'accès aux médicaments d'exception, par exemple, où c'est laborieux parce qu'on n'a pas accès aux médecins. C'est parfois le parcours du combattant pour un patient. Il faudrait décloisonner les professions pour que d'autres professionnels puissent donner accès à ces produits. C'est en voie de se faire au Québec, selon les rumeurs.
     En outre, au Québec, il existe l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, l'INESSS, qui, scientifiquement, prend des décisions sur l'inclusion ou non de produits à la liste. Comme pharmacien et comme scientifique, j'appuie ces décisions dans 99,9 % des cas, parce qu'elles sont basées, non pas sur le sentiment d'être privé d'un produit ou de ne pas avoir accès à ceci ou à cela, mais plutôt sur un sentiment d'efficacité, d'efficience et de pertinence.
    On sait que l'industrie pharmaceutique fait des miracles, mais est-il toujours nécessaire de couvrir la trentième molécule, qui coûte plus cher? La réponse est non.
    L'INESSS fait ces analyses, et je crois que cela contribue à la qualité du régime québécois.
(1455)
     Monsieur Morin, selon une étude menée par l'Association des pharmaciens du Canada, 94 % des Canadiens sont d'accord sur le fait que les gouvernements doivent élargir et financer les soins axés sur la collectivité, comme les services de santé dans les pharmacies.
    Normalement, le gouvernement fédéral devait payer 50 % des coûts de soins de santé par l'entremise des transferts, notamment au Québec, mais il en paie 22 % actuellement. Est-ce vraiment ce qui permet d'améliorer les services de soins de santé dans les pharmacies et les soins de santé axés sur la collectivité?
    Dans la proposition, on ne parle pas des services cliniques en pharmacie, on parle seulement de distribution. Or les patients diabétiques et les jeunes femmes qui utilisent des procédés anticonceptionnels, comme la pilule du lendemain, ont d'autres besoins que le simple médicament.
    Ces activités doivent être adéquatement financées, afin que la consommation de ces médicaments soit adéquate et rationnelle.
     Merci, monsieur Morin.
    Monsieur Julian, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

     Je reviens à vous, monsieur Thibeault. Vous venez de parler d'Amber, qui est une jeune femme atteinte de diabète de type 1, et je veux que vous continuiez à informer le Comité de sa situation.
    Par votre entremise, monsieur le président, je vous remercie, monsieur Julian, de me permettre de continuer, parce qu'en ce qui concerne l'histoire d'Amber dont vous avez parlé, nous pourrions aller dans toutes les circonscriptions du pays et, malheureusement, nous aurions une histoire semblable.
    Mon collègue, M. Williams, a parlé des appels que nous recevons sur notre ligne 1-800. Tout comme Mme Eagan, nous recevons des appels de personnes qui ne sont pas couvertes, comme Amber, et qui dépensent, dans son cas, comme vous l'avez dit, 1 000 $ par mois simplement pour obtenir les soins dont elle a besoin, c'est-à-dire pour des appareils et des médicaments. Il y a aussi des personnes atteintes du diabète de type 1 ou de type 2 et qui ont une assurance privée. Disons qu'elle les couvre à 80 %. Cependant, ces personnes ont du mal à assumer les 20 % à la fin du mois, alors elles se rationnent, comme mon collègue, M. Williams, l'a également souligné dans sa déclaration préliminaire.
    C'est pourquoi nous continuons de parler de nos trois recommandations, parce que ce sont les points clés qui, selon nous... Le débat sur ce qui est universel, le premier dollar, le payeur unique — comme l'a dit M. Powlowski — n'a pas encore été défini. Nous parlons sans cesse des personnes sous-assurées et non assurées. Nous avons ici l'occasion — « nous » étant nous tous autour de cette table, les organisations de la lutte contre le diabète, de la contraception — de faire en sorte de combler ces lacunes, et si ce n'est pas le bon terme, essayons de trouver le bon terme pour veiller à ce que le choix et la possibilité de continuer d'aller de l'avant soient toujours là pendant que nous essayons de voir comment nous pouvons faire fonctionner cela dans le cadre des négociations avec les provinces.
    Nous parlons de cette consultation exhaustive et robuste que nous aimerions voir avec des personnes ayant une expérience vécue, comme moi, comme M. Kitchen et tous les autres au pays. Examinons la question dans son ensemble. Dans le projet de loi, il est question de l'article 4 et de la façon dont la Loi canadienne sur la santé peut être intégrée, et certaines de nos interprétations juridiques précisent qu'il faut veiller à ce que le choix soit complet et, bien sûr, à ce que l'on appelle « la non-malfaisance ». Nous devons veiller à ce que les personnes qui bénéficient d'une couverture complète continuent de l'obtenir, mais n'oublions pas Amber ou toute autre personne à qui nous pourrions parler, dans n'importe laquelle des circonscriptions du pays, et qui a besoin de ce soutien.
(1500)
     Merci, monsieur Thibeault.
    Merci, monsieur Julian.
    Nous passons maintenant à Mme Roberts, pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
     J'ai deux questions pour M. VanGorder et j'aimerais avoir des réponses. De nombreux aînés de ma collectivité sont préoccupés par le régime d'assurance-médicaments, et je vais vous expliquer pourquoi. Ils sont très déçus du régime de soins dentaires, et ils ne font pas confiance au gouvernement actuel pour ce qui est d'offrir un régime. Ils estiment qu'il les a laissés tomber sur tous les plans.
    En Ontario, les personnes âgées paient des frais fixes et reçoivent leurs médicaments pour le reste de l'année. Donc, une fois par année, elles paient des frais fixes et elles reçoivent leurs médicaments. Quelles seront les répercussions de ce plan sur les provinces et les territoires?
     Je vous remercie de la question.
    Par votre entremise, monsieur le président, c'est un point essentiel, parce que les aînés ne savent pas ce qu'il en est. Ils sont troublés. Ceux qui nous regardent aujourd'hui — et je sais qu'ils sont nombreux — vont se demander, s'il y a tant de questions au sujet de la couverture pour les diabétiques, qu'est‑ce que cela signifiera pour le reste d'entre nous? Qu'est-ce que cela signifiera pour ceux d'entre nous qui souffrent de troubles cardiaques et autres, et pour les gens qui ont besoin d'être couverts?
    Ils sont troublés, inquiets et craintifs. Ce n'est pas une simple supposition de ma part. Nos membres nous écrivent toutes les semaines, sinon tous les jours, pour nous faire part de leurs préoccupations. Pourquoi cela va‑t‑il si vite? Pourquoi ne savons-nous pas ce qui sera couvert?
    L'autre jour, une femme m'a téléphoné pour me dire que son mari avait pris sa retraite l'automne dernier et qu'il était décédé. Elle avait toujours son assurance-médicaments, mais elle n'avait pas les moyens de la payer et on lui a dit qu'elle ne pouvait pas la résilier et s'inscrire au nouveau programme.
    Que cela change ou non à l'avenir, c'est le genre de choses qui inquiètent les aînés. Lorsqu'ils entendent une discussion comme celle d'aujourd'hui, que ce soit en Ontario, en Nouvelle-Écosse, où je suis, ou en Colombie-Britannique, ils s'inquiètent de ce qu'ils considèrent comme un cadre incomplet.
     Merci.
    Vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire l'Assurance-santé Plus de l'Ontario, et le fait qu'elle n'a pas servi les jeunes. Nous savons ce qui s'est passé en 2018 — les libéraux provinciaux ont été éliminés.
     Qu'entendiez-vous par là?
    Je voulais dire qu'il y a eu de la confusion dans sa mise en oeuvre. Lorsqu'elle est entrée en vigueur, de nombreuses personnes sont tombées entre les mailles du filet. Finalement, il semble que la plupart d'entre elles ont été repêchées; cependant, certaines personnes n'ont pas pu obtenir leurs médicaments à partir de la mise en place du programme, jusqu'à ce qu'elles aient terminé la paperasse nécessaire pour les obtenir.
    Si les personnes âgées et les Canadiens âgés doivent cesser de prendre leurs médicaments pendant un mois ou deux, cela va créer de très graves problèmes. Nous ne pouvons pas laisser cela se produire avec ce programme.
    Je suppose que ce que nous devrions faire, c'est confier de nouveau les patients aux fournisseurs de soins plutôt qu'au gouvernement. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
     Je suis tout à fait d'accord. Ce que nous avons maintenant — un de mes collègues l'a souligné — c'est une sorte de courtepointe aux pièces mal cousues. C'est un ensemble disparate comportant des lacunes, qui couvre tout le monde.
    Ce qui est proposé maintenant ressemble davantage à un sac de toile de jute. C'est le plus petit dénominateur commun avec des trous. Nous avons besoin d'une courtepointe tricotée serré. C'est ce que les aînés recherchent et veulent avoir. Quant à savoir si l'avenir nous permettra de voir les choses s'améliorer et changer, ils se demandent maintenant pourquoi nous précipitons l'adoption de ce projet de loi sans aucune consultation — avec notre groupe et très peu d'autres.
     Merci.
    J'ai une question pour Carolyne, si je peux vous appeler ainsi. Vous nous avez expliqué le programme. Vous avez dit que les compagnies d'assurance ne font pas des profits énormes.
    Pouvez-vous me dire la différence entre ce que le gouvernement offre dans le cadre du régime d'assurance-médicaments et ce qu'il élimine pour les régimes actuels?
(1505)
    En ce qui concerne la liste de médicaments — je pense que c'est ce dont vous parlez —, elle serait beaucoup moins longue. Nous en avons beaucoup parlé aujourd'hui.
    Dans l'ensemble, province par province et régime d'employeur par régime d'employeur, il y a une différence de 40 à 50 % dans la liste des médicaments couverts. C'est la principale différence — il y a une meilleure liste ou une plus longue liste de médicaments. Si nous dépensons l'argent avec des solutions intelligentes, nous pouvons offrir la bonne couverture aux gens pour un plus grand nombre de problèmes de santé ou une liste plus longue pour les maladies dont nous parlons aujourd'hui.
    J'aimerais également ajouter qu'avec nos conseillers sur le terrain — les milliers que j'ai mentionnés qui, dans tout le pays, s'occupent des 65 000 régimes d'employeurs —, nous voyons, province par province, la façon dont ces régimes sont constitués actuellement. Nous voyons ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et quels sont les irritants. Ces régimes couvrent non seulement les médicaments, mais aussi les soins dentaires et de la vue, l'invalidité, les soins paramédicaux, la santé mentale et le bien-être.
    C'est une couverture complète que quatre Canadiens sur cinq jugent satisfaisante et efficace. Prêtons attention à la personne sur cinq qui a des problèmes d'abordabilité et d'accès.
    Merci, madame Eagan.
    Merci, madame Roberts.
    C'est maintenant au tour de M. Hanley, pour cinq minutes.
     Merci beaucoup pour les témoignages de tout le monde et pour l'éventail d'expertise et d'opinions éclairées que nous avons aujourd'hui. C'est vraiment une bonne chose.
    J'ai peut-être entendu des commentaires désobligeants au sujet du programme dentaire. Je tiens à souligner, à ce sujet, que 100 000 Canadiens ont été servis jusqu'à maintenant par le Régime dentaire canadien, dont beaucoup pour la première fois. Je vois là un modèle de réussite, de réussite précoce, et d'excellent programme. Je pense qu'il y a des choses que nous pouvons imiter avec le projet de loi C‑64.
    Monsieur VanGorder, j'aimerais revenir à vous. Merci d'être venu. Je dois dire que le contexte que vous avez brossé a retenu toute mon attention. Vous avez écrit un article de fond sur l'assurance-médicaments et vous avez parlé de la collaboration fructueuse entre le gouvernement fédéral et l'Île‑du‑Prince-Édouard en 2021. J'aimerais que vous nous disiez brièvement en quoi cette collaboration fédérale-provinciale a été fructueuse.
    Nous pensons que l'entente entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial de l'Île‑du‑Prince-Édouard est un modèle que de nombreuses autres provinces pourraient reproduire, en prenant l'argent disponible, en examinant exactement où sont les lacunes et les besoins de couverture. Ensuite, il faudrait affecter l'argent à ces secteurs au lieu d'essayer de le répartir sur l'ensemble du problème. C'est une façon particulièrement ciblée et efficace d'utiliser l'argent. Nous pensons que ce sera très efficace à long terme, surtout pour les aînés de cette province.
    Merci.
    Madame Eagan, j'ai été intrigué par ce que vous avez dit dans votre déclaration préliminaire au sujet de la mise à jour de la Loi canadienne sur la santé. Vous avez ensuite parlé de l'importance, par exemple, de la couverture des traitements ambulatoires contre le cancer. Nous connaissons l'ampleur de ce problème. Avez-vous fait une analyse de ce qu'il faudrait faire pour mettre la loi à jour? Pouvez-vous me préciser davantage comment vous envisagez cela?
    Je sais que cela dépasse la portée du projet de loi C‑64, mais je suis intrigué.
     Je serais certainement d'accord pour réécrire la Loi canadienne sur la santé, mais ce serait toute une tâche.
    Ce que je peux vous dire, c'est que ce que nous voyons...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
     Tout à l'heure, lorsque ma collègue faisait ses remarques et qu'elle a émis un commentaire au sujet de l'Ontario et de ce qui s'est passé, un député d'en face, M. Naqvi, a essentiellement traité ma collègue de « stupide ». Je demande que ce soit supprimé du compte rendu et qu'il présente des excuses.
     Monsieur Naqvi, voulez-vous répondre?
     Monsieur le président, je n'emploierais jamais ce mot à propos d'un député de la Chambre ou de toute personne. Je n'ai jamais dit cela à propos de la députée. Si elle estime que c'est le cas, je m'en excuse. Ce n'était pas mon intention.
(1510)
     Merci.
    Veuillez continuer, madame Eagan.
     Je pense que c'est un élément important qu'il faut examiner.
     Un bref exemple — encore une fois, un exemple concret —, c'est que nous avons eu récemment un patient qui était à l'hôpital pour une chimiothérapie. On lui a prescrit une pilule. Son ordonnance est sortie de l'hôpital pour être remplie et elle est revenue à l'hôpital pour être administrée. Qu'avons-nous maintenant? Nous avons une facture mensuelle de 10 000 $ qui, selon la Loi canadienne sur la santé, a été prescrite. L'hôpital est allé remplir l'ordonnance à l'extérieur, et vous avez maintenant le système public et le système de l'employeur qui ne savent plus qui a la responsabilité de payer.
     En fin de compte, une thérapie comme celle-ci, qui coûte cher, permet à cette personne de quitter l'hôpital et d'être productive au travail et en bonne santé à long terme. Le pipeline de médicaments qui arrivent et qui sont disponibles au Canada... Nous voulons nous assurer de pouvoir travailler ensemble à l'élaboration d'une stratégie nationale rentable pour les maladies à coût élevé et les maladies rares.
    Je vous remercie de la question.
     Merci.
     Je suppose qu'il me reste du temps après ce rappel au Règlement.
     Il vous reste 40 secondes.
    Je vais passer rapidement à vous, monsieur Williams.
    Vous avez des antécédents très intéressants en raison de votre expérience à Innovation Canada, à Recherche Canada et de votre carrière politique.
     Je n'ai pas le temps de passer en revue le préambule, mais dans ce projet de loi, on parle d'appuyer la modernisation du système de santé avec des données sur les médicaments et d'améliorer la coordination. Nous parlons de la stratégie nationale pour les maladies rares.
     Est-il possible d'améliorer la collaboration et l'innovation dans le contexte du projet de loi C‑64? Croyez-vous qu'il y a là un potentiel?
    C'est essentiel. Nous devons trouver la marge de manœuvre nécessaire pour continuer à encourager l'innovation, la recherche et le développement. Tout en essayant de répondre aux besoins des personnes non assurées ou sous-assurées, nous devrons veiller à concevoir de nouveaux traitements et de nouvelles technologies qui amélioreront les soins. L'un des défis qui nous attend se situe au niveau de l'équilibre à atteindre.
    En fait, nous aimerions pouvoir aider les gens à obtenir des réponses à vos questions afin de comprendre comment nous allons procéder, et je vous encourage à le faire.
     Merci, monsieur Williams.
    Nous avons presque atteint l'heure, mais pas tout à fait. Nous allons abréger les deux dernières séries de questions, puis nous remercierons et libérerons les témoins. Les deux prochains tours dureront trois minutes.
    C'est au tour de M. Ellis. Allez‑y, monsieur.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Je voulais vous poser une question, monsieur Morin, avant que nous ne terminions. Êtes-vous toujours pharmacien praticien?
     Oui, je suis encore en pratique. J'étais au travail hier. Je suis propriétaire d'une pharmacie à Montréal.
     Merci beaucoup.
    Vous savez ce que disent les patients? Le problème du coût des ordonnances s'est-il aggravé au cours des dernières années, au point que les gens n'ont plus les moyens de payer leurs médicaments?
    Je pratique depuis 30 ans.
    Je vais passer au français. Ce sera plus facile pour moi.

[Français]

     Je crois que non.
    Au départ, le régime public d'assurance médicaments du Québec était gratuit. Par la suite, on a introduit la franchise et la coassurance, mais, en effet, cela a représenté un défi à un certain moment.
    Je vois souvent, dans ma pratique, des difficultés sociales. Je constate que certaines personnes ne s'inscrivent pas au régime parce qu'elles n'en ont pas la capacité. Les gens ont besoin d'aide pour naviguer dans le système. Il y a beaucoup plus de besoins sociaux que de problèmes financiers.
    Je crois qu'il faut des solutions innovantes pour aider les gens en difficulté. Il en existe, et, à mon avis, cela passe par les services sociaux.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Je comprends cela.
    Monsieur Williams, vous avez parlé d'une rencontre avec le ministre. Il est intéressant que ces listes existent. Avez-vous eu une conversation avec le ministre? Il semble qu'elles n'aient rien à voir avec la réalité, alors pourquoi le gouvernement les a‑t‑il créées? En avez-vous parlé dans votre conversation?
    Nous avons plutôt choisi d'offrir ce que nous pensions être une bonne liste, et c'est pourquoi le document que vous avez tous en ce qui concerne la comparaison de nos lignes directrices de pratique clinique et du Programme des services de santé non assurés, les SSNA…
(1515)
    Je vous interromps. Il ne me reste que quelques secondes.
    Avez-vous parlé de la liste ou non?
    Oui. Donc…
     Mais vous n'avez pas demandé pourquoi ils ont créé cette liste si elle n'a aucun lien avec la réalité.
     Nous avons dit qu'elle n'était pas adéquate par rapport à nos lignes directrices de pratique clinique.
    C'est très bien. Merci.
    Madame Eagan, pendant les quelques secondes qu'il nous reste, revenons sur les régimes publics, les régimes privés et autres, dont il a été beaucoup question. Vous avez une expérience incroyable en la matière.
    Êtes-vous au courant d'un régime public qui soit meilleur qu'un régime privé et, si oui, lequel?
    Voulez-vous dire au Canada?
    Oui.
    Je n'ai pas entendu parler d'un meilleur régime, et je m'en remettrais à des recherches plus approfondies, mais à ma connaissance, il n'y en a pas. En ce qui concerne les listes de médicaments et les délais d'accès, je n'ai jamais entendu parler d'un meilleur fonds public.
    Merci, madame Eagan.
    Merci, monsieur Ellis.
    La dernière série de questions sera posée à Mme Sidhu, pendant trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à la Fondation de la recherche sur le diabète juvénile, la FRDJ.
    Hier, la Fondation des maladies du cœur et de l'AVC nous a dit que plus de 600 personnes au Canada meurent chaque année d'une cardiopathie ischémique parce qu'elles n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments. Nous avons aussi entendu le témoignage d'un patient atteint de diabète de type 1, M. Bleskie, qui a déclaré que l'insuline n'est pas un luxe, mais une nécessité. Nous avons également appris qu'il en coûte 1 600 dollars par an et par patient, ce qui signifie que ce projet de loi permet de réaliser des économies considérables.
    Madame Diniz, grâce à notre travail sur le cadre, nous savons à quel point le projet de loi dont nous sommes saisis est important pour tous les patients et leurs familles.
    Que vous disent les jeunes patients atteints de diabète de type 1 et leurs parents? Quelles sont leurs attentes à l'égard du Comité en ce qui concerne le projet de loi C-64? Pouvez-vous nous l'expliquer?
     Merci beaucoup de cette question.
    Je conviens que la gestion du diabète est très coûteuse. Je pense qu'il arrive que la couverture d'assurance coûte plus cher. Ce projet de loi aidera considérablement les personnes non assurées et les personnes sous-assurées.
     Comme je l'ai évoqué, l'insuline est nécessaire pour rester en vie. Ce n'est pas un luxe. Ce n'est pas un bonus. C'est une nécessité. J'encourage le Comité à s'assurer que nous nous concentrons d'abord sur les premiers principes, à savoir fournir un meilleur accès aux médicaments et aux dispositifs nécessaires, et à examiner ensuite le mécanisme de mise en œuvre. C'est ainsi que nous voyons les choses. Quel est notre premier principe? Il s'agit d'offrir un meilleur accès aux Canadiens.
    Pour ce qui est de votre question sur ce que les gens recherchent, la réponse est: un meilleur accès, plus d'abordabilité et plus d'équité. La province dans laquelle vous vivez et l'âge que vous avez ne devraient pas avoir d'importance. Tous les Canadiens atteints de diabète devraient avoir accès aux médicaments dont ils ont besoin.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Thibeault.
    Nous savons que l'éducation et la sensibilisation… Vous savez à quel point l'éducation est importante, surtout quand on a un diabète de type 2… Vous et moi en avons parlé à Brampton, et Diabète Canada participe à la campagne de sensibilisation.
    Qu'est‑ce que vous envisagez du côté des appareils pour diabétiques et de la campagne de sensibilisation, quand nous la mettrons en place? Qu'en pensez-vous?
     Je vous remercie de la question.
    J'ai la chance de porter un glucomètre continu, et je peux dire qu'il a complètement changé la façon dont je peux gérer mon diabète. Il me permet de rester dans le vert; je ne suis pas le seul et les autres comprennent de quoi je parle.
    Par conséquent, s'assurer que nous pouvons avoir accès aux appareils — je sais que nous parlerons du fonds pour les appareils à un autre moment — change absolument la donne pour les personnes vivant avec un diabète de type 1 ou de type 2. Quand nous aurons l'occasion de parler du fonds pour les dispositifs dans le cadre d'une discussion plus approfondie — pour l'instant, il est question de l'assurance-médicaments —, je pense que tout le monde en profitera.
     Grâce aux actions de sensibilisation que nous avons menées l'année dernière à Diabète Canada, des provinces et des territoires disposent désormais d'une forme ou d'une autre de couverture pour les glucomètres continus ou les pompes à insuline. C'est une excellente chose, mais il reste des lacunes à combler. Il sera essentiel de disposer d'un fonds pour les dispositifs, puis d'apporter la composante éducative nécessaire pour enseigner aux gens et s'assurer qu'ils comprennent comment ils peuvent gérer leur situation.
    Nous allons continuer à plaider et à faire notre travail au sein de Diabète Canada pour parler de l'importance des dispositifs, de l'éducation et des médicaments aux niveaux provincial et territorial.
     Nous travaillons également avec l'Association nationale autochtone du diabète, qui était présente hier pour parler du volet autochtone. Nous travaillons beaucoup avec la FRDJ. Nous avons rencontré le ministre en équipe hier pour parler de certaines des précisions que nous attendons en matière de choix, et nous en sommes reconnaissants.
    À ce titre, nous continuerons d'être une voix forte pour les personnes qui vivent avec le diabète dans ce pays.
(1520)
     Merci, monsieur Thibeault, et merci à tous nos témoins.
     Il est difficile d'avoir assez de temps avec un groupe de témoins aussi gros et diversifié. Madame Diniz, nous vous sommes très reconnaissants d'être restée avec nous pendant que nous réglions les problèmes technologiques. Nous sommes reconnaissants de votre participation et de celle de tout le monde.
     Nous allons maintenant suspendre la séance jusqu'à 15 h 30 pour permettre aux témoins de quitter la salle et aux prochains de prendre place.
    Merci encore, et bonne fin de semaine à tous.
     La séance est suspendue jusqu'à 15 h 30.
(1520)

(1530)
    Nous reprenons la séance. Bienvenue à notre dernier groupe de témoins.
    Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les participants à distance ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
    Nous accueillons, à titre personnel, M. Marc-André Gagnon, professeur agrégé à l'École d'administration et de politique publique de l'Université Carleton, et M. Steven Morgan, professeur à l'Université de la Colombie-Britannique, qui témoignera par vidéoconférence. Au nom d'Action Canada pour la santé et les droits sexuels, nous accueillons la Dre Wendy Norman, titulaire de la chaire de planification familiale et de recherche de l'Agence de la santé publique du Canada. John Adams est le président du conseil d'administration de la Coalition pour de meilleurs médicaments.
    Nous allons vous inviter à faire des déclarations liminaires de cinq minutes.
    Avant de procéder, je rappelle à ceux qui souhaitent présenter des amendements au projet de loi C‑64, qu'il ne reste que 25 minutes pour le faire, selon ce qui a été indiqué au début de la réunion.
    Nous allons maintenant entendre les déclarations liminaires dans l'ordre indiqué sur l'avis de convocation. Nous allons donc commencer par M. Gagnon, qui aura cinq minutes.
    Bienvenue au Comité, monsieur Gagnon. Vous avez la parole.
(1535)

[Français]

    Je m'appelle Marc‑André Gagnon. Je suis professeur de politique publique à l'Université Carleton. Je travaille aux questions de politiques pharmaceutiques depuis 20 ans. J'ai écrit plus de 150 articles, chapitres ou rapports techniques sur les questions de politique pharmaceutique. Je n'ai aucun conflit d'intérêts commerciaux.
    Je suis toujours estomaqué par l'à-plat-ventrisme de nos gouvernements devant le pouvoir des compagnies pharmaceutiques et des lobbys commerciaux au détriment de la population canadienne.
    Les données probantes sont claires: un régime public universel d'assurance médicaments, comme le recommande le Rapport final du Conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments, soit le rapport Hoskins, permettrait non seulement d'offrir un meilleur accès aux médicaments pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes, mais aussi de réduire les coûts d'environ 20 %.
     Pourtant, on continue d'hésiter et on a seulement annoncé une couverture pour les contraceptifs et les médicaments contre le diabète, tout en cherchant à maintenir l'actuel système hybride public-privé, qui, à l'échelle mondiale, est devenu un modèle d'inefficacité et de gaspillage.
    Le problème tient au fait que la couverture des médicaments au Canada est un système morcelé, disparate. C'est un système inéquitable, inefficace, sans cohérence ou objectif d'ensemble. Certains croient qu'on peut résoudre le problème en y ajoutant de nouveaux morceaux, mais le problème de fond est que ce système est morcelé.
    Rappelons que le Canada est le seul pays ayant un régime d'assurance maladie public universel qui n'inclut pas les médicaments prescrits, comme si ces derniers n'étaient pas un service de santé essentiel. Parmi les pays où le coût des médicaments par habitant est le plus élevé, le Canada se situe au troisième rang mondial, après les États‑Unis et l'Allemagne. Le Canada reste parmi les pays où le pourcentage de gens qui ne peuvent accéder aux médicaments dont ils ont besoin pour des raisons financières est le plus élevé. Plus de 10 % des Canadiens ne font pas exécuter leurs ordonnances pour des raisons financières.
    J'ai entendu beaucoup de gens, aujourd'hui, qui ont des conflits d'intérêts évidents, et qui proposent plutôt de mettre en place un système de régime privé obligatoire, comme au Québec. En passant, le Québec est le seul endroit au Canada où le coût des médicaments par habitant dépasse celui de l'Allemagne. Ainsi, en suivant l'exemple québécois, le Canada pourrait devenir le deuxième pays au monde où ce coût serait le plus élevé, après les États‑Unis. On voudrait donc un système à la québécoise, ainsi qu'une couverture pour les médicaments onéreux afin que les fonds publics prennent en charge les patients dont le traitement est le plus coûteux, et qui constituent un mauvais risque, pour ainsi dire.
     Un système à la québécoise augmenterait les dépenses en médicaments de 5 milliards de dollars par année et réduirait très peu les barrières financières pour accéder aux médicaments dont la population a besoin. On mettrait en place une assurance privée obligatoire incapable de prendre en charge les véritables risques, les gens qui coûteraient plus cher, dont on se déchargerait dans le régime public pour les médicaments onéreux.
    Bref, on voudrait nous faire payer plus cher pour créer un système inefficace en rendant les régimes privés obligatoires, en minant notre capacité à négocier de plus bas prix, tout en réclamant aux fonds publics de payer pour couvrir les risques des régimes privés. On veut un régime d'assurance privée obligatoire qui n'assure pas les risques. C'est assez fascinant. C'est ce qu'on demande. C'est ce que j'ai entendu.
    Il y a un obstacle important à la mise en place d'un régime public universel comme le recommandé le rapport Hoskins, et c'est que trop de parties prenantes, incluant des gouvernements provinciaux et territoriaux, profitent du système actuel de prix opaques avec des rabais confidentiels. Les régimes publics des provinces ne savent pas contenir les coûts, elles ne font que les déplacer ailleurs dans un système morcelé.
    Prenons l'exemple du Repatha, un médicament visant à réduire le cholestérol. Le prix officiel est de 6 000 $ par année. Le rabais confidentiel est estimé à 90 %. Le prix réel du médicament est donc de 600 $ par année, et la différence est une ristourne qui revient au payeur. Au Québec, un assuré du régime public doit payer une franchise de 23 $ par mois et sa part de la coassurance de 33 %. Pour acheter le Repatha, il devra finalement payer 1 200 $ par année de sa poche pour obtenir un médicament qui ne coûte que 600 $ par année. De plus, afin d'être assuré d'avoir ce type de couverture, il faut payer une prime de 731 $ par année. Ce n'est pas de l'assurance, c'est de l'arnaque, dans une certaine mesure.
    De leur côté, les régimes privés, comme des innocents, devront payer le même médicament non pas au prix négocié par le gouvernement de 600 $ par année, mais bien au plein prix de 6 000 $ par année, sans obtenir de rabais confidentiels.
(1540)
     Le système actuel est devenu un système opaque d'arnaque institutionnalisée, ce qui est inacceptable. Trop d'acteurs s'en mettent plein les poches et ont tout intérêt à éviter qu'on élimine le gaspillage.
    Il nous faut un régime public universel efficace, afin de contenir les coûts pour la population canadienne; il ne s'agit pas seulement de pelleter les coûts ailleurs dans le système, soit sur les épaules des malades ainsi que des travailleurs et travailleuses. Il nous faut un régime public universel doté des capacités institutionnelles nécessaires pour nous assurer d'en avoir pour notre argent, pour promouvoir de bonnes habitudes d'ordonnances basées sur les données probantes, et non sur les arguments des campagnes de marketing des firmes. Il nous faut un régime de couverture rationnel, comme le propose le rapport Hoskins. Je précise que le gouvernement Trudeau s'était engagé à suivre les recommandations de ce rapport.
    Je suis maintenant prêt à répondre aux questions des membres du Comité.
    Merci, monsieur Gagnon.

[Traduction]

     C'est maintenant au tour de M. Morgan, qui est en ligne.
    Bienvenue au Comité, docteur Morgan. Vous avez la parole.
    Je suis économiste et professeur de politique de soins de santé, et j'étudie les systèmes d'assurance-médicaments depuis 30 ans. J'ai publié plus de 150 documents de recherche évalués par des pairs sur des sujets connexes et je fais partie du groupe consultatif technique de l'Organisation mondiale de la santé sur les politiques de tarification des médicaments. Je n'ai aucun lien financier ni intérêts commerciaux dans ce secteur ni avec des professionnels de la santé, des syndicats ou d'autres groupes qui s'intéressent aussi activement à ce dossier.
    Je suis ici simplement parce que je souhaite aider le Canada à se doter de la capacité institutionnelle nécessaire pour fournir un accès équitable et efficace aux médicaments essentiels dans un secteur très complexe auquel participent certains des intérêts corporatifs les plus puissants du monde, et qui implique des défis très sérieux et véritablement mondiaux en ce qui concerne le caractère raisonnable et la transparence des prix.
    Je voudrais commencer par dire que nous n'avons pas besoin d'une autre étude sur la question de savoir si ou comment le Canada devrait mettre en place un programme national d'assurance-médicaments. Ces questions ont fait l'objet de quatre enquêtes distinctes depuis le milieu des années 1990. Toutes ces enquêtes ont recommandé que des médicaments sur ordonnance soigneusement sélectionnés et médicalement nécessaires soient couverts par le système universel d'assurance maladie à payeur unique du Canada.
    La dernière de ces études, le rapport de juin 2019 du Conseil consultatif sur la mise en œuvre d'un régime national d'assurance-médicaments, a été réalisée par un conseil d'experts de tout le pays présidé par l'ancien ministre de la Santé de l'Ontario, le Dr Eric Hoskins.
    Le conseil Hoskins, comme on l'appelle, a consulté les provinces et les territoires. Il a consulté les Premières Nations. Il a consulté des patients, des professionnels de la santé et d'autres intervenants du secteur. Il a consulté les Canadiens d'un océan à l'autre. Il a conclu en présentant un plan détaillé et réalisable pour la mise en œuvre d'un régime public universel d'assurance-médicaments à payeur unique qui permettrait aux Canadiens d'économiser des milliards de dollars tout en améliorant l'accès aux médicaments d'un océan à l'autre et en réduisant les pressions sur notre système de soins de santé.
    Les fondements du projet de loi C‑64 sont étayés par des discussions et des analyses approfondies. Je pense que le projet de loi C‑64 peut, si le gouvernement le souhaite réellement, nous faire progresser vers le régime d'assurance-médicaments équitable et efficace qui a été recommandé à maintes reprises par les commissions.
    Toutefois, dans sa forme actuelle, le projet de loi C‑64 ne permet pas d'atteindre cet objectif. En effet, il ne précise pas clairement le type de régime d'assurance-médicaments que le projet de loi mettrait en place. Cette ambiguïté dans le projet de loi C‑64 a permis au directeur parlementaire du budget de conclure que le régime qui serait créé serait un régime d'assurance-médicaments permettant de combler les lacunes et s'articulant autour d'une mosaïque de milliers de régimes d'assurance-médicaments privés et publics. En effet, même le ministre de la Santé a déclaré hier qu'il créerait un tel programme avec les pouvoirs que lui conférerait le projet de loi C‑64.
    Ce serait désastreux pour le Canada parce que cette mosaïque de régimes d'assurance-médicaments se trouve à injecter inutilement et de façon coûteuse des inefficacités dans le système. Ces régimes imposent un lourd fardeau financier inéquitable aux ménages et aux employeurs, ils diminuent le pouvoir d'achat d'un pays sur le marché mondial des produits pharmaceutiques et ils isolent la gestion des médicaments d'autres éléments clés du système de santé.
    Il serait particulièrement problématique que des assureurs à but lucratif jouent un rôle fondamental dans un régime national d'assurance-médicaments. Seuls les États-Unis l'autorisent. Cette situation est problématique parce que les assureurs peuvent en fait tirer profit de prix plus élevés des médicaments en augmentant les frais administratifs facturés aux promoteurs des régimes. Ils peuvent également tirer profit de rabais secrets négociés avec les fabricants de médicaments et les pharmacies.
    Si la première étape d'un régime national d'assurance-médicaments est autorisée à prendre la forme d'un programme de comblement des lacunes impliquant un mélange d'assureurs privés, publics, à but lucratif et non lucratif, les étapes suivantes de ce régime national d'assurance-médicaments seront presque certainement enfermées dans ce modèle également.
    Si, contrairement aux recommandations de son propre conseil consultatif sur le sujet, le gouvernement souhaite mettre en œuvre un régime complémentaire, il peut ne pas toucher au projet de loi C‑64 qui présente ce qu'il faut pour parvenir à ce résultat. Le cas échéant, le NPD devra conclure que son entente de soutien et de confiance a été rompue.
    Si, en revanche, le gouvernement souhaite effectivement mettre en œuvre les recommandations de son conseil consultatif sur ce sujet, il doit alors amender le projet de loi C‑64 afin d'établir des normes claires pour un programme national qui prouvera que les Canadiens sont, en fait, plus forts ensemble. C'est ce que les Canadiens méritent, mais tel qu'il est actuellement rédigé, ce n'est pas ce que le projet de loi C‑64 apportera.
    Merci.
(1545)
     Merci, monsieur Morgan.
    Nous entendrons maintenant la Dre Wendy Norman, d'Action Canada pour la santé et les droits sexuels.
     Docteure Norman, bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président et distingués membres du Comité. Je vous remercie de me donner aujourd'hui l'occasion de commenter votre étude du projet de loi C‑64.
     Je suis médecin de famille et professeure à l'Université de la Colombie-Britannique. Au cours des dix dernières années, j'ai eu l'honneur de travailler à l'Agence de la santé publique du Canada en qualité de titulaire de la chaire de recherche du Canada sur la planification familiale. Je suis coprésidente du comité d'experts de Statistique Canada sur la santé sexuelle et reproductive. Ces dernières années, j'ai travaillé en collaboration de concert avec Santé Canada pour faire progresser plusieurs programmes associés aux thèmes de la santé sexuelle et reproductive, et je collabore depuis longtemps avec Action Canada pour la santé et les droits sexuels.
    Il y a deux thèmes que j'espère éclairer de mes connaissances et de mon expérience. Le premier est l'accès universel à la contraception gratuite qui, en permettant la prévention des grossesses non désirées, aura des répercussions immédiates, permanentes et intergénérationnelles sur les personnes, les familles et la société dans son ensemble, améliorant la santé et l'équité en santé partout au Canada.
    Le second s'appuie sur la modélisation canadienne et sur certains exemples tirés de pratiques à l'étranger, qui tendent à démontrer la nécessité d'une couverture universelle, complète, à payeur unique et à partir du premier dollar en matière de contraception, pour répondre aux besoins des personnes à risque de grossesse involontaire. Au Canada, 40 % des grossesses ne sont pas désirées, et contrairement à ce que l'on pourrait croire, la plupart des grossesses non désirées entraînent des naissances non planifiées. L'effet dévastateur d'une grossesse non désirée et la gestion de tout ce qui en découle peuvent entraîner des conséquences permanentes et intergénérationnelles, non seulement pour la femme enceinte et son partenaire, mais également pour les enfants issus d'une telle grossesse, pour les autres enfants et les autres membres de la famille déjà dans la maison.
    Les méthodes contraceptives les plus complètes et les plus efficaces affichent le coût initial le plus élevé. Les contraceptifs les moins coûteux sont associés aux taux les plus élevés de grossesses non désirées. Les méthodes de contraception à action prolongée, comme les implants et les dispositifs intra-utérins, qui constituent les méthodes les plus efficaces, peuvent avoir un coût initial de plus de 400 $. Pour maintes personnes, les besoins de contraception rongent directement les sommes nécessaires au loyer ou à l'achat de nourriture. Pourtant, vu leur efficacité supérieure en fait de prévention des grossesses non désirées, ces mêmes méthodes dites « plus chères » représentent, pour le gouvernement, le coût global le plus faible.
    Des modes de contraception plus efficaces permettent aux familles d'offrir un meilleur démarrage dans la vie à des enfants dont la venue est planifiée et adéquatement étalée dans le temps. Ils aident en outre les membres de la famille à réaliser des études supérieures, à augmenter leurs chances de succès, à participer activement à l'économie et à la vie de leur collectivité. En revanche, les personnes qui n'ont pas les moyens de gérer leur propre fécondité sont aux prises avec des résultats scolaires inférieurs, un revenu de ménage inférieur et une exposition plus élevée à la violence aux mains d'un partenaire intime. Leurs enfants, à leur tour, présentent un indice moins élevé de sécurité alimentaire, vivent plus souvent dans des logements inadéquats et sont moins nombreux à obtenir un diplôme d'études secondaires.
     Dans le cadre d'une étude financée par les Instituts de recherche en santé du Canada et menée par l'Université de la Colombie-Britannique entre 2015 et 2019, le gouvernement de la Colombie-Britannique, Action Canada et un grand nombre de nos collaborateurs ont modélisé la rentabilité de l'assurance pour les médicaments d'ordonnance en Colombie-Britannique. Ils ont constaté que, parmi les personnes ayant vécu une grossesse non désirée et ayant cherché à se faire avorter, quelque 30 % environ avaient accès à une forme quelconque de subvention pour la contraception et que le coût de la contraception était le facteur le plus étroitement corrélé aux grossesses non désirées subséquentes.
    Pendant plus de deux ans, en collaboration avec le gouvernement de la Colombie-Britannique, nous avons conçu différents scénarios de couverture à la pièce des contraceptifs et nous les avons comparés à une couverture globale dans le cadre d'une modélisation. Nous avons examiné toutes sortes de modèles pour combler des lacunes précises. Dans tous les cas, dès que nous nous éloignions d'un système universel, complet et à payeur unique, les taux de grossesses non désirées augmentaient, de même que les coûts globaux pour le système de santé.
     C'est le modèle de couverture universelle qui permet au gouvernement de la Colombie-Britannique de réduire le plus efficacement les grossesses non désirées, tout en réduisant les frais globaux de plus de cinq dollars par résident de la province assumés par le système de santé annuellement.
    Des données probantes provenant des systèmes de santé du monde entier indiquent qu'une assurance-médicaments universelle, plutôt qu'une assurance partielle comblant l'écart avec les polices privées, est nécessaire pour promouvoir l'équité en santé. Une analyse effectuée à la suite de l'adoption de l'Affordable Care Act aux États-Unis a permis de constater une économie de plus de sept dollars pour chaque dollar investi dans la contraception et le counseling sur la contraception. Pareillement, l'agence Public Health England a constaté qu'elle économisait neuf livres pour chaque livre dépensée en contraception dans un régime universel d'assurance-médicaments.
(1550)
     Il est important de souligner que la prescription de contraceptifs est stigmatisée, et c'est particulièrement vrai pour les populations en mal d'équité et pour celles qui, dans notre société, sont le plus confrontées à des obstacles de nature intersectionnelle. Notre étude a révélé que les personnes en âge de procréer, et en particulier les femmes à l'âge où leur taux de fécondité est le plus élevé, sont les moins susceptibles d'avoir un emploi stable à temps plein donnant accès à une assurance-médicaments.
     Après analyse, il ressort qu'avant l'entrée en vigueur de la nouvelle politique de la Colombie-Britannique en matière de contraception gratuite, 40 % des personnes qui se procuraient des contraceptifs devaient les payer entièrement de leur poche, et que 20 % d'entre elles bénéficiaient d'une couverture privée avec coassurance. On ne parle même pas ici de toutes les personnes qui n'avaient pas accès à la contraception en raison de son coût. Après l'entrée en vigueur de la nouvelle politique en Colombie-Britannique, ces coûts directs ont diminué à moins de 10 % pour les personnes achetant des produits de contraception.
    Nous savons que parmi ces…
    Docteure Norman, je dois vous demander de conclure. Vous aurez amplement le temps d'entrer dans les détails pendant la période des questions.
    Merci.
    Merci.
     Donc, j'ajouterai simplement que les adolescentes et les personnes dont l'assurance est détenue par un parent ou un partenaire coercitif se trouvent dans une situation particulièrement difficile et sont beaucoup moins susceptibles d'avoir accès à une assurance en cas de besoin.
    Peu d'investissements en santé ont le potentiel d'offrir autant d'économies au niveau du système qu'une amélioration de l'égalité et de l'équité en matière de santé pour les enfants et les familles. Le projet de loi C‑64 permettrait d'améliorer la santé de nombreuses personnes dans le Canada entier.
    Excusez-moi, monsieur le président, d'avoir dépassé le temps alloué.
     Merci, docteure Norman.
    Nous entendrons maintenant M. John Adams, de la Best Medicines Coalition.
    Bienvenue, monsieur Adams. Je sais que vous avez déjà comparu devant nous et que vous connaissez la procédure. Vous avez la parole.
     Monsieur le président, distingués membres du Comité de la santé, je vous remercie de m'avoir invité à témoigner dans le cadre de ces audiences historiques sur l'assurance-médicaments pour les Canadiens.
    La Best Medicines Coalition représente 30 organisations de patients, qu'il s'agisse de la maladie de Parkinson à l'arthrite, en passant par l'hémophilie, la cécité, le cancer et d'autres maladies complexes et rares. Ensemble, nous représentons les intérêts de millions de patients et de leurs soignants.
    Je suis heureux d'avoir le soutien moral de JK Harris du Réseau canadien du cancer du sein, l'une de nos organisations membres, présente ici aujourd'hui. Merci beaucoup pour votre présence, JK.
    Les objectifs de la BMC sont simples.
    Le premier consiste à régler le problème de la loterie du code postal en veillant à ce que tous les patients aient accès aux médicaments dont ils ont besoin et à ce qu'ils participent de façon significative tant à l'élaboration des politiques d'assurance-médicaments qu'à leur contrôle ultérieur.
     Chez BMC, nous reconnaissons que le Canada est le seul pays développé à avoir un régime universel d'assurance-maladie qui n'inclut pas une assurance universelle pour les médicaments d'ordonnance utilisés hors du contexte hospitalier. Cet écart se traduit par des disparités au sein des provinces, des territoires et des administrations autochtones et entre eux, car chacun des programmes offre des niveaux variables d'assurance-médicaments. C'est ce que nous appelons la loterie du code postal.
     Par conséquent, un Canadien sur dix ne prend pas les médicaments qui lui sont prescrits en raison de l'importance des sommes à débourser. Cela met en évidence des iniquités importantes quant à l'accès à des médicaments nécessaires. Jusqu'à 7,5 millions de citoyens, soit un Canadien sur cinq, n'ont aucune assurance-médicaments, ne disposent pas d'une assurance suffisante pour couvrir leurs besoins en médicaments ou ne s'y inscrivent pas lorsqu'ils y sont admissibles.
    Le coût et la couverture d'assurance ne sont pas les seuls problèmes.
    La mauvaise nouvelle pour tous ceux qui œuvrent dans la tour d'ivoire d'Ottawa, c'est que 64 % des Canadiens estiment que le gouvernement fédéral manque de transparence relativement à ses politiques de soins de santé. Ce manque de transparence mine la confiance du public et nuit à la mise en œuvre efficace et à l'adoption d'initiatives en matière de santé.
    Puis, il y a les données. La production inconstante de rapports et le manque de transparence quant aux données sur la santé entravent la mesure du rendement et des résultats, réduisent la possibilité de cerner les lacunes en matière de données et de services, en plus d'empêcher le système de santé d'intégrer la voix des patients.
     Au sein des gouvernements et des organisations financées par les gouvernements, la voix des patients est également mal représentée en ce qui a trait à l'élaboration et à la mise en œuvre de la politique sur les médicaments. Il en résulte un système de soins de santé moins sensible aux besoins des patients. Cela peut compromettre la qualité des soins et entraîner un décalage entre les attentes des patients et les soins fournis.
     La complexité actuelle du parcours des patients cause beaucoup de stress et d'anxiété aux patients et à leurs soignants, ce qui peut exacerber les problèmes de santé et entraîner une dégradation de l'état général. Trente pour cent des Canadiens ont du mal à se retrouver dans le système de soins de santé actuel, ce qui entraîne des retards importants dans l'obtention des soins médicaux qui leur sont nécessaires. Les changements apportés à l'assurance-médicaments ne doivent pas créer de nouveaux obstacles à l'innovation destinée à combler les besoins non satisfaits des patients.
     Les patients méritent mieux qu'une consultation accélérée et écourtée sur un élargissement aussi fondamental de leur filet de sécurité sociale. Les patients doivent être intégrés aux programmes et à leur structure, et pas seulement faire l'objet de consultations occasionnelles. Par exemple, les patients — j'ai bien utilisé le pluriel — doivent être représentés au conseil d'administration de l'Agence canadienne des médicaments.
    Nous avons proposé huit amendements favorables au projet de loi. Mon temps est écoulé, alors si quelqu'un pouvait nous faire une courtoisie, nous serions ravis que ces huit motions soient présentées. Elles figurent dans notre mémoire.
    J'aimerais souligner deux points clés pour l'intérêt des patients.
    Premièrement, la création d'un poste d'administrateur en chef des services aux patients à Santé Canada. Deuxièmement, la création d'un poste d'ombudsman des patients, relevant directement du Parlement. Seuls les députés et les sénateurs ont le pouvoir de créer ce poste d'ombudsman.
    L'administrateur en chef des services aux patients de Santé Canada travaillerait au sein de l'organisation. Il mettrait à contribution son expérience vécue et son poste doit lui conférer le pouvoir de s'assurer que l'expérience et les connaissances du patient soient reconnues et utilisées pour améliorer l'état des patients. Cette personne doit en outre être appuyée par un comité consultatif où est représentée une diversité de patients, ce que le projet de loi n'envisage pas encore.
    L'ombudsman des patients serait extérieur à l'organisation et relèverait du Parlement de façon indépendante. En plus de signaler tout manquement à la loi et aux règlements, cet ombudsman évaluerait les préoccupations exprimées par les patients en matière d'accès aux médicaments et recommanderait des changements.
(1555)
     Ces modifications au projet de loi C‑64 permettraient la transparence et la reddition de comptes et les renforceraient. Il ne suffit pas qu'un gouvernement dise qu'il souhaite l'accès universel aux médicaments. Le projet de loi C‑64 doit préciser le rôle des patients dans l'amélioration de l'accès équitable aux médicaments.
    Je répondrai avec plaisir à vos questions sur les huit modifications que nous proposons pour mieux aider les patients.
    La Coalition pour de meilleurs médicaments demande au Parlement de faire de son mieux pour les patients canadiens. Au nom de tous les patients, rien ne doit se faire pour nous sans nous.
    Merci.
    Merci, monsieur Adams.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par M. Ellis, pour six minutes.
(1600)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous d'être ici.
    C'est avec un intérêt certain que nous poursuivrons cette série de questions.
    Je ne veux pas lancer de querelle entre M. Gagnon et M. Morgan, parce que d'après vos biographies vous êtes tous deux « le grand expert » des régimes d'assurance-médicaments au Canada. C'est une bonne chose que vous ne soyez pas tous les deux dans la salle. Ce serait sûrement intéressant.
    Cela dit, je vais commencer par vous, monsieur Morgan.
    Vous avez rédigé 150 articles sur l'assurance-médicaments et sur la façon de la mettre en œuvre. J'aimerais savoir combien de temps vous avez passé à consulter le gouvernement au sujet du projet de loi C‑64.
    Je n'ai pas directement participé à l'élaboration de ce projet de loi.
    J'ai travaillé avec le gouvernement et j'ai conseillé différents fonctionnaires pendant de nombreuses années, mais je n'ai pas participé à la rédaction du projet de loi C‑64.
    Merci.
    Par votre entremise, monsieur le président, je m'adresse à M. Gagnon. Avez-vous participé à la rédaction du projet de loi C‑64?
    Absolument pas.
     Voilà deux experts canadiens qui n'ont contribué à ce projet de loi d'aucune manière. Cela me fait peur.
    Cela dit, monsieur Gagnon, vous avez parlé du système universel de soins de santé et d'un régime universel d'assurance-médicaments. J'ai longtemps été médecin de famille. La présidente de l'Association médicale canadienne d'il y a quelques années, la Dre Katharine Smart, a déclaré que le système de soins de santé universel était au bord de l'effondrement. Il est clair que nous avons un système qui, pour toutes sortes de raisons, ne fonctionne pas. Il ne se porte pas bien, et il n'est pas bien géré.
    Pourquoi voudrions-nous instaurer un régime universel d'assurance-médicaments? Nous logeons tous à la même enseigne. Peu importe qu'il s'agisse d'un gouvernement conservateur ou d'un gouvernement libéral. Pourquoi devrions-nous faire confiance au gouvernement fédéral pour créer un autre système qui, à mon avis, ne fera probablement que décevoir les Canadiens?
    Quand il est question de mettre en œuvre un régime universel d'assurance-médicaments, il n'est pas nécessaire que ce soit le gouvernement fédéral qui le fasse. Cela peut se faire au niveau provincial ou par l'entremise d'organismes particuliers qui sont mis en place à cette fin en fonction de différents systèmes d'assurance sociale. Un organisme indépendant peut aussi s'en occuper.
    Notre système fragmenté ne permet pas d'atteindre des objectifs communs et entraîne un gaspillage énorme. À l'heure actuelle, il existe 100 régimes publics d'assurance-médicaments différents et plus de 100 000 régimes privés d'assurance-médicaments qui vont dans tous les sens. Par conséquent, nous avons un système qui, si on veut s'y retrouver et jouer le jeu, ouvre la porte à tous les abus, et nous le constatons souvent.
    Pour ce qui est de faire le ménage, un système public universel à payeur unique demeure la meilleure solution. Tous les autres intervenants peuvent ajouter une couverture supplémentaire par la suite. La question n'est pas de savoir s'il s'agit de provinces ou de payeurs privés; nous avons besoin d'une base solide qui fonctionne bien. Elle doit être efficace, rationnelle et efficiente tout en promouvant une meilleure utilisation des médicaments.
    Si nous avons ces éléments de base, alors nous pouvons voir en ce qui concerne... En français, on parle de finition. Nous voyons essentiellement ce qui se cumule, et nous pouvons construire différentes choses. Cependant, nous avons besoin d'une base solide, et elle n'existe pas pour l'instant. Par exemple, nous ne sommes pas préparés à l'arrivée sur le marché de tous ces nouveaux médicaments très coûteux. Nous ne sommes pas prêts à faire face aux conséquences. Les Canadiens ne sont pas prêts, parce que nous n'avons pas ces fondations à l'heure actuelle.
     Merci beaucoup.
    Monsieur Morgan, je vais m'adresser à vous. L'autre chose, c'est que nous avons souvent entendu au cours des derniers jours des témoignages concernant le temps qu'il faut à un médicament pour être inscrit sur les formulaires au nom des Canadiens, souvent des milliers de jours. Nous avons Santé Canada, le CEPMB, l'ACM, l'ACMTS et l'APP, etc. Il me semble qu'il aurait été judicieux d'ajouter une certaine surveillance de ces organismes dans le projet de loi C‑64, et en particulier de la nouvelle ACM.
    Pensez-vous que ce serait utile, ou avez-vous d'autres idées sur la nécessité de mettre les médicaments sur le marché au nom des Canadiens?
(1605)
    J'ai quelques points à soulever. Je suis heureux que vous ayez évoqué la question des délais d'approbation des médicaments et des décisions en matière de couverture. Certaines des preuves qui ont été citées dans les témoignages au cours de ces audiences proviennent de rapports qui déclenchent le chronomètre, pour ainsi dire, quand un médicament est approuvé dans n'importe quel pays à l'échelle internationale. Il ne tient pas compte du fait que les fabricants eux-mêmes choisissent de retarder l'introduction de médicaments sur certains marchés à des fins stratégiques. Par ailleurs, ils font souvent l'essai de médicaments sur des marchés comme les États-Unis, l'Allemagne ou le Japon, puis décident s'il y a lieu de les introduire sur d'autres marchés. Près de la moitié de tous les médicaments testés de cette façon ne se rendent pas sur d'autres marchés. Il est important de le savoir.
    En ce qui concerne les retards dans les approbations, je pense qu'il faut s'assurer que Santé Canada dispose du personnel et des ressources nécessaires pour respecter les délais. On s'inquiète aussi du fait que notre système fragmenté, avec l'ACMTS et l'APP et le processus décisionnel provincial qui en découle, entraîne de longs retards dans la prise de décisions sur la couverture. En fait, c'est un de ces processus où « non » signifie « non » quant aux recommandations des organismes consultatifs, mais où « oui » signifie « peut-être », parce que les provinces ne sont pas tenues de compléter l'équation de la couverture.
     Un programme vraiment national, géré par un organisme comme l'Agence canadienne des médicaments ou quelque chose du genre, qui disposerait du budget nécessaire et aurait pour tâche de veiller à ce que l'accès se fasse en temps opportun, éliminerait ce genre de retards. Il devrait être raisonnablement indépendant, mais il devrait être responsable du rendement.
    Merci, monsieur Morgan.
    C'est maintenant au tour de M. Naqvi, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais commencer par poser mes questions à M. Morgan et à M. Gagnon.
    Vous êtes tous les deux des experts en matière d'assurance-médicaments. Vous avez étudié la question. Pouvez-vous nous parler des répercussions de l'absence d'un régime d'assurance-médicaments sur la santé générale d'une population? Nous pouvons parler du Canada. Quelles sont les répercussions? Je suppose qu'elles sont négatives. Si c'est le cas, comment cela se manifeste‑t‑il?
    Monsieur Gagnon, nous pourrions peut-être commencer par vous.
     C'est une excellente question. Essentiellement, le manque d'accès est un problème très important, et les travailleurs à faible revenu sont habituellement les plus touchés. Pour les communautés racisées, en particulier, d'après les sondages qui ont été faits sur les obstacles à l'accès et les questions de race, c'était un gros problème.
     Ce que le directeur parlementaire du budget, le DPB, n'a pas inclus dans tous ses calculs, c'est l'argent que nous économiserions dans les hôpitaux, dans les salles d'urgence, si les gens pouvaient avoir un accès approprié aux médicaments dont ils ont besoin.
     N'oublions pas que le rapport du DPB a révélé que nous économiserions plus de 2 milliards de dollars par an, tout en augmentant de 13,5 % le nombre d'ordonnances. Il s'agit de 13,5 % des gens qui ont besoin d'une ordonnance à l'heure actuelle et qui ne l'obtiennent pas. Ils se retrouvent dans les salles d'urgence et les hôpitaux... Et quand ils s'y rendent, il ne s'agit plus du même budget. C'est l'hôpital qui paie leurs médicaments. Cette situation est courante, et c'est quelque chose de très important quand nous établissons le budget, les coûts et tout le reste.
    Il y a d'autres enjeux que je trouve très importants. Pour ce qui est de la sécurité sociale, si je suis au Québec, je recevrai environ 15 000 $ par année. Si j'essaie de travailler, disons, 15 heures par semaine, parce que c'est tout ce que je peux faire, j'ai accès à mes médicaments sans payer de primes. Il n'y a rien à payer. Tout est gratuit tant que je bénéficie de l'aide sociale. Cependant, dès que je veux m'en sortir, je dois payer d'énormes primes au Québec. Je dois payer toutes mes primes même si je ne travaille qu'à temps partiel. Si je ne travaille que 15 heures par semaine, je me retrouve avec peut-être 20 000 $ en revenus, mais peut-être 2 000 $ par année en primes pour mes médicaments d'ordonnance.
     Quant à la création du cercle vicieux de la pauvreté, Sheikh Munir a rencontré des gens et rédigé un rapport sur la réforme de l'aide sociale en Ontario. C'était l'un des principaux obstacles, l'un des principaux facteurs contribuant au cercle vicieux de la pauvreté. En fait, les gens finissent par essayer de rester dans des programmes où ils peuvent avoir accès à leurs médicaments, parce que s'ils changent de statut, ils risquent de perdre cet accès, ce qui a une incidence sur leur santé — en matière de morbidité et de mortalité.
    J'ai peut-être une dernière chose à dire sur le diabète. Il y a 10 ans, une étude a montré que si, en Ontario seulement, nous avions une couverture universelle, à payeur unique dès le premier dollar pour les personnes atteintes de diabète, cela permettrait de sauver 700 vies par an. C'est incroyable. Nous ne faisons rien à ce sujet, parce qu'il ne s'agit pas de deux avions qui s'écrasent dans la rue où tout le monde meurt. On se contente de dire: « Eh bien, ce sont des statistiques qui se trouvent quelque part. Il s'agit de 700 personnes, et elles étaient malades de toute façon. Ce n'est pas important. » Mais, c'est terriblement important.
    Oui, ce sont là certains des problèmes.
(1610)
    Merci, et j'apprécie votre passion.
    Monsieur Morgan, avez-vous quelque chose à ajouter à ce qu'a dit M. Gagnon?
     Non, si ce n'est pour dire que cette question a fait l'objet d'études approfondies et que les arguments économiques en faveur d'un accès universel aux médicaments d'ordonnance sont sans équivoque. C'est bon pour la santé du pays. C'est bon pour le système de santé.
     J'aimerais maintenant m'adresser à la Dre Norman. Merci d'être ici et de nous avoir fait part du point de vue d'Action Canada.
    Sur le même thème des économies dans le système de soins de santé, pouvez-vous nous parler des répercussions que pourrait avoir l'accès universel aux contraceptifs, envisagé dans le projet de loi C‑64?
     Absolument.
    À titre de médecin de famille qui a travaillé dans le domaine de la planification familiale pendant la majeure partie de ma vie professionnelle, je reçois régulièrement des personnes pour des grossesses non désirées récurrentes. Elles ne veulent pas être enceintes, elles n'ont pas voulu l'être et elles n'ont pas la possibilité de gérer leur vie de façon à poursuivre leurs études, à sortir d'une relation toxique ou à suivre une formation professionnelle pour accéder à une profession qu'elles souhaitent. Elles sont encore une fois aux prises avec une grossesse non désirée que certaines décideront d'interrompre. Cependant, la plupart d'entre elles finiront par devoir s'occuper d'autres enfants et auront des services de garde d'enfants et d'autres mesures à la maison, ce qui leur prendra le temps qu'elles auraient pu utiliser pour s'occuper des enfants qu'elles ont déjà et d'elles-mêmes.
    Sur la question des économies, nous pouvons démontrer — et les systèmes du monde entier l'ont fait — que la contraception universelle à payeur unique, dès le premier dollar, permet d'améliorer la santé et de réduire les coûts liés aux soins de grossesse.
     Je pense qu'il faut également tenir compte des coûts pour la prochaine génération et du fait que celle‑ci sera moins performante tout au long de sa vie parce que ses parents n'auront pas eu accès à la contraception universelle, de sorte que le problème devient intergénérationnel....
    Merci, docteure Norman.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
     Je salue les témoins de ce troisième groupe qui sont des nôtres.
     Ma première question s'adresse à M. Adams, de la Coalition pour de meilleurs médicaments.
    Monsieur Adams, à la recommandation 6 de votre mémoire, que j'ai ici en main, vous dites que le ministre de la Santé est tenu d'établir une voie d'accès exceptionnelle pour les patients, afin qu'ils puissent se faire prescrire dans certaines conditions un médicament ou un traitement ne figurant pas sur la liste.
    Comme vous le savez, le régime du Québec permet notamment aux patients ayant besoin de médicaments qui constituent un traitement de dernier recours de se faire rembourser les frais de ces médicaments d'exception.
    Dans le régime qui est proposé, il n'y a aucune garantie à l'égard de tels médicaments.
    Quelles seraient vos recommandations si nous trouvions un écho à cette préoccupation?
     Excusez-moi, mais je vais vous répondre en anglais.

[Traduction]

    Nous avons beaucoup entendu parler du Québec aujourd'hui. Je vous remercie beaucoup de la question parce qu'elle met en lumière un aspect distinct du Québec que le reste du Canada devrait imiter.
    L'autre chose dont nous avons beaucoup entendu parler, c'est que les patients ne réagissent pas tous de la même façon à un même médicament. Nous avons besoin d'une certaine variété et d'un certain choix. Le Québec dispose d'un mécanisme qui permet à un médecin de présenter une demande à un comité d'examen scientifique véritablement indépendant de la bureaucratie de la santé pour un médicament dont il sait que le patient a besoin, qu'il ait été approuvé ou non par Santé Canada et qu'il soit financé ou non par le système existant.
     Je viens du milieu des maladies rares. La PCU, la phénylcétonurie, n'est pas mortelle; elle ne menace que le cerveau. J'ai un fils qui en est atteint et qui a répondu au premier médicament de façon efficace et complète. Tous les patients atteints de la PCU qui ont eu accès à ce premier médicament ont été approuvés par le biais du programme unique de patients d'exception du Québec. Il y aura toujours des cas particuliers.
    Ce qu'il nous faut, c'est une médecine de précision, une molécule qui fonctionne pour chaque personne en fonction de sa génétique et de sa biochimie. Nous ne sommes pas tous pareils. Il n'y a pas de solution unique. Le régime national d'assurance-médicaments serait grandement amélioré, sur le plan conceptuel, par l'existence de cette soupape de sécurité pour les patients exceptionnels. Le Québec possède des décennies d'expérience pratique dont nous pouvons tous tirer de précieuses leçons.
(1615)

[Français]

     Merci, monsieur Adams.
    Je suis heureux que vous reconnaissiez cette distinction, qui va au-delà du programme d'assurance médicaments, comme vous le savez. Nous pourrions certainement faire une autre étude sur ce sujet seulement, mais je ne suis pas certain que ce serait au Comité permanent de la santé. Bref, nous aurons cette discussion ultérieurement.
    Monsieur Adams, dans votre mémoire, vous mentionnez qu'aucun patient au Canada ne doit perdre sa couverture actuelle pour les médicaments fournie par une assurance maladie privée en raison des réformes ou des programmes liés au projet de loi C‑64, et que les changements apportés ne doivent pas laisser les patients dans une situation plus difficile qu'avant la mise en œuvre des réformes.
    Pouvez-vous nous expliquer vos craintes?

[Traduction]

     Nous entendons beaucoup de préoccupations et de critiques au sujet du modèle que propose le projet de loi C‑64, et j'ai entendu d'autres critiques de la part de mes collègues aujourd'hui. Nous entendons des messages contradictoires sur la question de savoir si l'idée proposée est bonne ou non.
    À titre de parent de deux fils et de deux filles, je me préoccupe de la reproduction et de la santé sexuelles dans leur ensemble. De plus, ayant été prédiabétique et ne l'étant plus, je me préoccupe des médicaments contre le diabète. Le médicament qui m'a fait passer du statut de prédiabétique à celui de non-diabétique ne figure pas sur la liste proposée par le ministre de la Santé à l'heure actuelle. Ce sont des exemples précis. Il y a beaucoup d'incertitude.
     De plus, les initiatives antérieures des gouvernements aux niveaux fédéral, provincial, territorial et autochtone ont eu des conséquences imprévues ou non désirées. Il convient donc de se hâter lentement. Je pense que le projet de loi est un bon point de départ, mais il pourrait être amélioré à plusieurs égards.

[Français]

    Monsieur Adams, toujours dans votre mémoire, vous mentionnez une chose très importante:
Tous les gouvernements — fédéral, provinciaux, territoriaux et autochtones — doivent travailler ensemble et consulter les parties prenantes, dont les patients et les organisations qui les représentent. L’accent doit être mis sur la mise en place d’une infrastructure efficace et simplifiée visant à améliorer les soins aux patients en garantissant l’équité à un niveau élevé, avec une gamme complète de médicaments accessibles à tous en fonction des besoins médicaux et fournis en temps utile.
    Je suis entièrement d'accord avec vous quand vous dites que tout le monde doit obtenir les meilleurs soins. Dans cette optique, ne pensez-vous pas que le gouvernement fédéral devrait augmenter les transferts en santé pour permettre au Québec et aux provinces d'améliorer leur système de santé et, par le fait même, les soins donnés aux patients?
(1620)

[Traduction]

     Veuillez répondre brièvement, si vous le pouvez, monsieur Adams.
     Je suis assez vieux pour me souvenir de l'époque où l'on a fait accepter par les Canadiens, les provinces et les territoires le concept général du partage égal des coûts du régime d'assurance-maladie. Nous devrions nous pencher là‑dessus.
    Merci, monsieur.
     Madame Zarrillo, vous avez six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
     J'aimerais obtenir des précisions de votre part avant de poser mes questions. Vous avez mentionné que le temps pour apporter des amendements était dépassé depuis un certain temps. Donc, est‑ce que tout ce qui sera présenté aujourd'hui ne pourra pas éclairer un amendement. Est‑ce exact?
     C'est exact.
    D'accord.
    Je tiens à dire à quel point ce groupe de témoins a été extraordinaire et instructif. Comme nous ne pouvons pas avoir d'influence technique sur le projet de loi à ce moment-ci, j'ai quelques questions au sujet de l'équité et de la justice. Je veux me concentrer sur l'égalité entre les sexes, parce que je pense que s'il y avait eu plus de femmes au sein du gouvernement fédéral, nous serions certainement beaucoup plus avancés en ce qui concerne les contraceptifs.
    Docteure Norman, j'aimerais vous poser une question précise sur l'obtention de résultats. Nous savons que la Colombie-Britannique, comme vous l'avez mentionné, offre maintenant des contraceptifs gratuits. Pourriez-vous nous faire part de certains des arguments ou des facteurs qui ont amené le gouvernement de la Colombie-Britannique à mettre en œuvre la distribution de contraceptifs gratuits? De toute évidence, c'est quelque chose que moi-même et de nombreuses personnes d'un bout à l'autre du pays aimerions voir.
    Merci beaucoup, madame Zarrillo, de votre question.
     Nous avons reçu un financement des IRSC pour mener une étude dans le cadre de laquelle le ministère de la Santé de la Colombie-Britannique a été l'un des partenaires dans l'établissement de la principale question de recherche et la façon d'analyser les résultats afin d'être en mesure de déterminer l'incidence d'un système de subventions des contraceptifs sur la santé et l'équité en Colombie-Britannique.
    Premièrement, notre étude a entrepris une enquête sur la santé sexuelle et génésique à la grandeur de la province. En 2021, le gouvernement actuel a été en mesure d'utiliser la base que nous avons établie pour cette enquête sur la santé sexuelle et génésique afin de mettre en œuvre une enquête sur la santé sexuelle et génésique à l'échelle du Canada, que nous lancerons plus tard cette année, sous la direction de Statistique Canada.
    Je pense que c'est essentiel pour aller de l'avant, alors que nous mettons en œuvre la précontraception par l'entremise du projet de loi, dans l'espoir de pouvoir mesurer l'impact. C'est parce que c'est ce que la Colombie-Britannique utilisait pour mesurer les besoins, et c'est ainsi que nous avons déterminé où il y avait des iniquités et comment ces iniquités pouvaient être corrigées par la contraception universelle.
    Entreprendre des enquêtes auprès des gens et être en mesure d'examiner les systèmes de santé et les données administratives sur la santé par rapport aux données de l'enquête... La nouvelle enquête de Statistique Canada sera également couplée à un numéro de santé personnel et à des données administratives sur la santé, de sorte que nous obtiendrons des données précises et désagrégées sur l'équité relativement aux lacunes pour les gens en ce qui concerne leur santé sexuelle et génésique.
    La base de référence en 2024, bien sûr, sera avant tout impact du projet de loi, mais je pense qu'il sera très important, à l'avenir, que le gouvernement continue d'avoir, comme l'une des enquêtes de base de Statistique Canada, une enquête sur la santé sexuelle et génésique qui nous permet de ventiler et de comprendre ces obstacles à l'équité partout au Canada.
     Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question comme vous le souhaitiez.
     Oui, et cela a suscité une autre question.
    Vous travaillez dans le domaine de la santé génésique depuis très longtemps, alors je suis sûre que vous avez une idée de la façon dont ces enquêtes vont être menées. Cependant, ma question porte sur les facteurs qui, selon vous, contribuent à la différence dans la couverture d'assurance-médicaments décrite pour la population en général et pour les femmes exposées au risque d'une grossesse non désirée. Je suis certaine que vous allez obtenir de l'information sur les groupes désagrégés qui ont des grossesses non désirées.
    Oui, tout à fait.
    Comme d'autres témoins vous l'ont dit aujourd'hui, j'entends des experts de l'industrie de l'assurance dire que 97 % des gens ont une certaine forme de protection. Eh bien, ce n'est certainement pas le cas en santé sexuelle et génésique. Lorsque nos études ont porté sur les grossesses non désirées, nous avons constaté que jusqu'à 70 % d'entre elles n'avaient aucune protection.
     Lorsque nous avons pu examiner l'ensemble des ordonnances obtenues en Colombie-Britannique par l'entremise des pharmacies, dans le cas des gens qui ont déjà eu accès à un contraceptif et qui l'ont acheté, 40 % avaient payé de leur poche sans aucune assurance, et une autre tranche de 20 % devait payer une quote-part. Cette quote-part et le fait de ne pas avoir d'assurance pour ces 60 % de personnes qui ont accès à la contraception ne nous éclairent même pas sur le vaste éventail de personnes qui n'ont pas pu avoir accès du tout à la contraception à cause de cette iniquité au chapitre des coûts.
    Les gens qui ont besoin de contraception ont tendance à être en âge de procréer. La fourchette d'âge où la fécondité est la plus élevée chez les femmes et les personnes de tout sexe qui sont aptes à la grossesse affiche l'un des taux les plus faibles d'emplois permanents à temps plein offrant une protection. Il y a une économie à la demande. Les gens sont encore à l'école.
     La protection dont bénéficient les gens dans le secteur où la fécondité est la plus élevée — là où ils pourraient l'avoir — passe souvent par le titulaire principal du régime, de qui relève cette personne. La nécessité de divulguer l'utilisation de la contraception est un obstacle pour les personnes qui ont des relations coercitives ou pour les adolescents et adolescentes qui relèvent du régime des parents...
(1625)
    Je vais vous interrompre parce que je veux que vous poursuiviez un peu sur cet aspect.
    Je suis une femme. Comme beaucoup de gens, à l'âge de 16 ans, vous avez des conversations sur les contraceptifs et le besoin de contraceptifs. J'ai pris note de vos commentaires au sujet des parents ou des partenaires coercitifs. Vous pourriez peut-être nous parler du risque que cela représente pour les adolescentes et les très jeunes filles.
     Oui. Comme beaucoup d'entre vous le savent, les taux de fécondité les plus élevés se situent à l'époque la plus proche de l'adolescence et diminuent après la fin de la vingtaine. Dans cette tranche d'âge, les gens vivent souvent encore à la maison, ou s'ils sont loin de chez eux, ils sont souvent dans une relation, parfois avec un partenaire qui contrôle leur accès aux contraceptifs ou aux fonds.
    Ces personnes font face à de nombreux obstacles qui se recoupent pour atteindre leur propre égalité entre les sexes. Elles doivent choisir entre acheter un contraceptif ou payer leurs frais de scolarité, leur loyer ou leur nourriture. Il est clair que les trois autres aspects sont leur première priorité pour qu'elles puissent continuer dans leur vie, et elles n'auront pas recours à la contraception ou à une méthode beaucoup moins coûteuse qui présente des taux de grossesse élevés, puis auront une grossesse non désirée qui pourrait mettre fin à leurs études et les empêcher d'entrer sur le marché du travail.
    Merci, docteure Norman.
    Monsieur Kitchen, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à tous d'être ici. Nous vous en sommes extrêmement reconnaissants, étant donné qu'il est tard et que nous sommes vendredi. Nos fenêtres sont fermées, alors je n'ai aucune idée de la température à l'extérieur, mais je vous remercie tous d'être ici en ce moment avec vos exposés et vos observations.
    Comme vous le savez tous, à la fin, nous examinons le projet de loi. Pour moi et pour vous, je crois qu'il s'agit de faire ce que nous pouvons pour améliorer le projet de loi. Quelles mesures et suggestions pouvez-vous nous proposer pour que nous puissions présenter des amendements, au besoin, à ce texte législatif? C'est un énorme défi parce que, comme nous l'avons entendu, ces amendements doivent être présentés au plus tard à 16 heures aujourd'hui, alors on se demande s'ils seront présentés et s'ils seront même adoptés ou non. Le temps nous le dira.
    Je pense qu'on fait allusion, sans plus que cela, au fait que les soins de santé relèvent des provinces. Un certain nombre d'entre vous ont mentionné que c'est une question qui relève des provinces, ce qui revient à la question de la capacité des provinces de faire ce qu'elles doivent faire.
     Monsieur Gagnon, vous avez fait des commentaires sur les mesures qui pourraient être prises, et vous avez indiqué ou suggéré, du moins c'est ce que je crois vous avoir entendu dire, que cela pourrait être fait au niveau provincial.
    Êtes-vous en train de dire que le gouvernement fédéral devrait légiférer pour dire à toutes les provinces qu'elles devraient mettre en place un régime universel de soins de santé?
(1630)
    Bien entendu, le fait d'avoir une certaine aide du gouvernement fédéral pour mettre cela en œuvre faciliterait beaucoup les choses, je crois, pour les provinces.
    Vous dites que la santé est de compétence provinciale. Je ne veux pas entrer dans les détails juridiques, mais constitutionnellement, les établissements de soins de santé sont de compétence provinciale. En ce qui concerne les médicaments sur ordonnance, c'est plus compliqué, parce que cela ne relève pas des établissements de soins de santé. C'est une chose.
    En ce qui concerne l'approbation des médicaments, c'est le droit pénal qui déterminer quelle substance est illégale ou légale, et si elle est légale, il y a des façons d'y avoir accès dans les pharmacies et tout le reste. C'est essentiellement pour cette raison que Santé Canada approuve les médicaments. En même temps, en ce qui a trait au prix de ces médicaments, cela relève de la Loi sur les brevets, qui est aussi de compétence fédérale.
    Qu'on le veuille ou non, en ce qui concerne les médicaments sur ordonnance, le gouvernement fédéral, essentiellement, est déjà bien engagé dans ce domaine. Cela ne veut pas dire que les provinces ne devraient rien avoir à dire à ce sujet. Je suis fier d'être Québécois. Lorsque nous avons mis en place notre régime d'assurance-médicaments en 1997, à l'époque, il était perçu comme un premier pas vers un régime universel d'assurance-médicaments, mais lorsque nous avons mis en place un système hybride, nous avons en quelque sorte enfermé tous ces intérêts commerciaux, qui peuvent essentiellement abuser du système de différentes façons. Ce n'est pas normal qu'au Québec, nous soyons au deuxième rang sur la planète pour ce qui est du coût par habitant le plus élevé des médicaments d'ordonnance. Rien n'est fait à cet égard. Au lieu de limiter les coûts, nous les transférons ailleurs dans le système.
     Je comprends. Je m'excuse de devoir intervenir. C'est parce que j'ai si peu de temps.
    Je comprends ce que vous dites, mais en fin de compte, ce sont les provinces qui doivent décider ce qui — comme le Québec l'a fait et comme toutes les autres provinces devraient le faire — est le mieux pour elles.
    Monsieur Adams, je vous remercie de votre exposé et des huit recommandations que vous avez formulées. Je pense qu'elles présentent de bons points, en fin de compte, quand nous examinons le projet de loi et les amendements qui nous sont présentés concernant ce petit texte. Ce qui fait peur, c'est de savoir si cela va prendre de l'ampleur avec le temps. D'une certaine façon, l'une de vos recommandations porte sur ce dont il est question au sujet de la liste nationale de médicaments, quand nous parlons de l'Agence canadienne des médicaments.
     Je vais vous lire une de vos recommandations. Vous dites que l'Agence canadienne des médicaments doit être créée par voie législative plutôt que sous la direction du ministre de la Santé, sous réserve de la surveillance du Parlement, de la Loi sur l'accès à l'information, de l'examen du vérificateur général et des interventions d'un ombudsman des patients.
    Ce sont des recommandations qui suggèrent à bien des égards, en particulier pour cette agence... mais nous avons aussi vu cela dans la loi, où nous parlons de créer un comité, mais nous n'avons aucune idée de qui seront les personnes dans ces rôles. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Veuillez répondre brièvement, monsieur Adams.
     Merci.
    Je ne sais pas s'il y a moyen, sur le plan de la procédure, d'obtenir une prolongation jusqu'à 17 heures concernant ces lignes directrices relatives aux amendements. Je lance cela à tout hasard.
    Le projet de loi confère au ministre de nouveaux pouvoirs importants. On pourrait l'améliorer en instaurant diverses formes de transparence et de reddition de comptes, comme je l'ai dit. Ce sont là quelques éléments.
    Avec tout le respect que je vous dois, je pense qu'il s'en remet trop à la boîte noire qu'on appelle l'Agence canadienne des médicaments et qu'il ne prévoit pas de mécanismes de transparence ou de reddition de comptes sur ce qui pourrait devenir un rôle très important dans la réforme du système. C'est ce que je fais valoir.
    Vous êtes des députés. Ne vous éloignez pas de la reddition de comptes et de la transparence. Intégrez-les dans le projet de loi par voie d'amendement.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Madame Sidhu, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence. Je vous remercie de vos amendements et de vos mémoires. Merci de votre travail.
    Ma question s'adresse à Dre Norman. C'est surtout une question pour vous.
    Tout d'abord, êtes-vous en mesure de parler du programme de la Colombie-Britannique? C'est un programme qui connaît du succès. Avez-vous des données dont vous pouvez nous faire part? Je sais que c'est un programme qui connaît du succès. Pouvez-vous communiquer les données?
(1635)
     Merci, madame Sidhu, de cette excellente question. Je suis très fière du travail que nous avons accompli avec le gouvernement de la Colombie-Britannique au cours des 10 dernières années pour bâtir ce programme. Je travaille au sein du ministère en vertu d'une entente de non-divulgation pour aider le ministère à évaluer la mise en œuvre du programme. J'ai également accès à des recherches indépendantes que nous menons à l'Université de la Colombie-Britannique sur les données administratives sur la santé. Je peux vous faire part de choses que nous avons découvertes par nous-mêmes, mais pas des choses merveilleuses et étonnantes que nous constatons au sein du gouvernement dans notre propre évaluation.
    Ce que nous pouvons constater grâce à l'accès aux données administratives sur la santé que nous avons par l'entremise de l'université, c'est qu'il y a des milliers de personnes qui demandent ces nouveaux contraceptifs et les contraceptifs les plus efficaces depuis que la politique a été mise en place il y a environ un an en Colombie-Britannique. Il y en a des milliers tous les mois. En fait, nous avons eu un tel engouement, une telle demande soutenue pour ces méthodes contraceptives les plus efficaces, qui étaient auparavant hors de la portée des gens dans leur économie personnelle et familiale, que les médias de la Colombie-Britannique ont fait état des listes d'attente dans le système de santé et des facteurs de service qui sont maintenant pris en compte pour répondre à ce besoin non comblé. Quand vous constatez que même les médias remarquent qu'il y avait un tel degré de besoins non comblés dans la province que le très grand nombre de personnes qui veulent avoir accès aux dispositifs intra-utérins et aux implants contraceptifs...
    Ce dispositif de la taille d'une allumette que les gens peuvent mettre dans leur bras présente un taux de grossesse plus faible que la stérilisation tubaire, et il peut être retiré n'importe quand. Il a une durée de vie pouvant aller jusqu'à trois ans. Les gens se dépêchent pour obtenir ces méthodes plus efficaces que ce que nous avions auparavant. Chaque année, les taux de grossesse dans le cas des pilules anticonceptionnelles peuvent être près de 100 fois plus élevés chez les femmes.
    Oui, la Colombie-Britannique est une histoire à succès. Nous sommes très enthousiastes à l'égard des chiffres que nous obtenons des données exhaustives au sein du gouvernement et même des données disponibles dans les médias et de celles qui sont accessibles au public que nous pouvons obtenir par l'entremise de l'Université de la Colombie-Britannique. C'est un franc succès. C'est une façon pour les gens de répondre à leurs besoins de pouvoir rester à l'école, de contribuer à la population active et de réaliser leurs propres rêves quant à savoir quand avoir des enfants et à quelle fréquence.
    Docteure Norman, quelle recommandation pouvez-vous faire au Comité concernant le volet éducation pendant la mise en œuvre du programme? Comment pouvons-nous collaborer avec les provinces, les territoires et les groupes autochtones pour rejoindre les jeunes femmes et les filles, leurs familles et éventuellement les écoles afin de les sensibiliser au programme? Vous avez parlé de la stigmatisation liée à la contraception. Hier, nous avons entendu parler de la grossesse chez les adolescentes.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?
    Merci. C'est une excellente question. C'est une pièce du casse-tête à laquelle nous devons tous porter attention.
    Je reviens sur la nécessité d'instituer une enquête nationale exhaustive sur la santé sexuelle à l'échelle du Canada qui serait administrée de façon itérative et régulière afin que nous puissions désagréger les données et comprendre où nous pouvons mettre en place des programmes d'éducation et de sensibilisation en matière de santé afin de rejoindre les groupes qui, malheureusement, ne sont pas en mesure de comprendre les informations, les méthodes et les services dont ils ont besoin pour atteindre leurs propres objectifs en matière de santé génésique.
    Pour être en mesure de régler un problème, nous devons d'abord le comprendre. Pour le comprendre, nous devons le mesurer. Je pense que les résultats de l'enquête de référence sur la santé sexuelle qui seront publiés cette année fourniront beaucoup de données au gouvernement sur ce que nous pourrions faire, mais cette enquête ne nous aidera pas à comprendre comment ce projet de loi et les éventuelles mesures que le gouvernement prendra dans le cadre de son travail extraordinaire de promotion de la santé sexuelle et génésique par l'entremise de Santé Canada... Ces répercussions doivent être mesurées au fur et à mesure que nous progressons.
(1640)
    Je vous remercie.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Je vais poursuivre mes questions à M. Adams.
    Monsieur Adams, plus tôt, aujourd'hui, un groupe de témoins nous a mentionné qu'il était important de s'assurer que le comité d'experts qui sera formé ne sera pas un groupe pour la forme, c'est-à-dire sans véritable responsabilité et rôle consultatif. Ces témoins ont demandé que les groupes consultatifs du régime d'assurance médicaments et de la mise en œuvre de la stratégie nationale reçoivent les informations nécessaires pour fournir de véritables conseils plutôt que de servir de caisse de résonance ou d'approbation tacite de décisions prises à huis clos. Êtes-vous d'accord là-dessus? Qu'avez-vous à nous dire à cet égard?

[Traduction]

    Nous avons récemment tiré de nombreuses leçons de la pandémie.
    Certains d'entre nous ont pris le temps d'observer les processus consultatifs en place chez nos voisins du Sud. J'ai pu suivre sur Zoom les réunions des comités consultatifs des CDC, les centres de contrôle des maladies, et de la FDA, que ce soit sur les vaccins, les produits thérapeutiques ou d'autres sujets. J'ai pu lire les documents d'information et j'ai ainsi pu forger ma propre opinion éclairée. Ont-ils bien compris ou non?
    Quand ces processus consultatifs ont lieu dans une boîte noire où nous ne pouvons rien y voir... Je me réjouis de l'occasion que nous avons ici. Nous sommes en public. Les gens peuvent faire leurs propres évaluations et voir si j'ai compris ou pas. Je peux moi-même voir si vous avez bien compris ou pas. C'est un processus ouvert et transparent et nous pouvons rendre des comptes.
    Une trop grande partie du processus aux niveaux fédéral, provincial et territorial se déroule derrière des portes closes, dans des boîtes noires. J'exhorte le Comité à proposer des amendements qui permettront d'ouvrir des portes, d'ouvrir des fenêtres et laisser entrer la lumière.

[Français]

     Il vous reste 28 secondes.
    Monsieur Adams, quelle mesure incontournable ajouteriez-vous pour qu'on s'assure de bien faire les choses?

[Traduction]

    Nous proposons des mesures précises dans notre mémoire.
     Vous devez faire votre possible pour veiller à ce que les règles en matière de liberté d'accès à l'information s'appliquent au nouveau modèle que le projet de loi propose pour l'assurance-médicaments. Assurez-vous qu'un mécanisme de reddition de comptes est en place afin que la vérificatrice générale du Canada puisse faire des vérifications sur l'optimisation des ressources.
    Il faudrait créer une nouvelle fonction d'ombudsman auquel pourraient s'adresser les personnes qui pensent ne pas avoir été traitées de façon juste et raisonnable, sans avoir à passer par les tribunaux. Ce serait une fonction d'examen et de surveillance. Ces fonctionnaires et le ministre de la Santé devraient être tenus de présenter des rapports périodiques au Parlement sur les mesures, les progrès, les problèmes et les solutions de rechange.
    Je vous remercie, monsieur Adams.
    Madame Zarrillo, vous avez deux minutes et demie. Allez-y.
    Merci.
    J'ai juste une question à poser à M. Morgan, à M. Gagnon et à M. Adams. Vous n'avez que 30 secondes chacun pour y répondre. Vous avez tous les trois dit quelque chose qui m'intéresse, en dehors du projet de loi.
    Monsieur Gagnon, vous avez parlé d'une arnaque institutionnalisée. Que pouvons-nous faire pour corriger cela, en dehors de ce projet de loi?
    Monsieur Adams, vous avez parlé de « loterie du code postal ». Comment pouvons-nous régler ce problème?
    Monsieur Morgan, vous avez parlé d'équité et d'efficacité.
    Je vais commencer par vous, monsieur Gagnon.
    Le Trintellix, un antidépresseur ISRS, est un bon exemple d'arnaque. Quand il est arrivé sur le marché, il a été évalué par l'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé. Il n'existait aucune preuve clinique que ce nouveau médicament apportait quelque chose de plus que les médicaments déjà sur le marché. L'Agence a recommandé de ne pas payer un cent de plus pour ce médicament que le prix du médicament le moins cher de la même catégorie. Le Trintellix a quand même été lancé sur le marché à un prix dix fois plus élevé que celui des autres médicaments de la même catégorie.
    Dans un rapport annuel de la compagnie Lundbeck que j'ai lu, j'ai appris que le Trintellix — malgré l'absence de preuve démontrant que ce médicament présente un avantage par rapport à d'autres médicaments — a réussi à accaparer 24 % du marché canadien des antidépresseurs.
    L'arnaque, c'est d'avoir un système qui rend possible le succès commercial d'un médicament qui n'apporte rien de nouveau. En gros, le message que nous envoyons décourage l'innovation. Nous disons: « Cessez d'innover ». Nous avons un système lamentable qui est prêt à accepter n'importe quoi à n'importe quel prix. Cette arnaque institutionnelle nous empêche d'en avoir pour notre argent.
(1645)
    Merci.
    Monsieur Adams, allez‑y. Ce sera ensuite à vous, monsieur Morgan.
     Pour ce qui est de la « loterie du code postal », je dois rendre à César ce qui est à César. L'expression n'est pas de mon cru, je l'ai empruntée à l'ancien ministre fédéral de la Santé, M. Duclos qui l'a utilisée en mars 2023 quand il a annoncé la mise en oeuvre du programme sur les médicaments pour les maladies rares. C'est une expression que le ministre a improvisée, elle n'était pas dans son texte.
    Cette expression saisit l'essence de certaines des iniquités dans les listes de médicaments qui sont couverts ou pas, en fonction des provinces et territoires.
    Je pense qu'il est essentiel que le gouvernement et le Parlement du Canada contribuent financièrement pour faire en sorte que l'accès aux médicaments ne soit pas réservé seulement au plus petit dénominateur commun, mais bien au plus grand dénominateur commun, à tous les patients, quels que soient leur lieu de résidence au Canada ou leur code postal.
    Merci.
    Monsieur Morgan, j'espère que vous aurez suffisamment de temps pour répondre.
    Non, mais si vous pouvez être très bref, nous vous laisserons répondre.
    Vous devez renforcer la capacité nationale d'acquérir, dans le cadre de contrats fermes avec des fabricants, des médicaments dont l'innocuité, l'efficacité et la valeur ont été démontrées. En gros, nous devons mettre en oeuvre les recommandations du Conseil consultatif Hoskins.
    Merci beaucoup, monsieur Morgan.
    C'est maintenant au tour de Mme Roberts qui dispose de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais demander aux témoins de répondre par oui ou par non, en commençant par M. Gagnon.
    À votre avis, les médecins de famille sont-ils essentiels?
    Sont-ils essentiels?
    Sont-ils importants pour la société?
    Oui.
    Docteure Norman, que répondez-vous?
    En tant que médecin de famille, je dois déclarer mon conflit d'intérêts, mais ma réponse est un oui retentissant.
    D'accord.
    Monsieur Adams, quelle est votre réponse?
    Oui, et merci pour la promotion.
    Et vous, monsieur Morgan?
    Oui, avec d'autres prestataires de soins primaires.
    Je vais vous expliquer pourquoi je vous pose cette question. En Ontario, la province d'où je viens, il nous manque 2 500 médecins. Plus de deux millions d'Ontariens n'ont pas de médecin et ce nombre atteindra 4,4 millions en 2026. En Ontario seulement, 1,7 million de personnes ont un médecin de famille qui a plus de 65 ans. Au Canada, six millions de Canadiens n'ont pas de médecin de famille.
    Je pose la question parce qu'un couple de Colombie-Britannique, Jane et Steve Williams, est sur la liste d'attente d'un médecin de famille depuis trois ans. Steve a récemment subi une chirurgie d'urgence et il n'a pas de médecin de famille à qui s'adresser pour avoir un suivi.
    Nous parlons ici d'un régime d'assurance-médicaments et de soins à prodiguer à nos patients. Que doit faire une personne pour obtenir des soins médicaux et se procurer les médicaments d'ordonnance dont elle a besoin?
    Je vais revenir à vous, monsieur Morgan, parce que je veux être certaine de bien comprendre. Vous avez dit tout à l'heure que c'est un système disparate, et je suis d'accord avec vous. Je pense que ce système a été mal conçu.
    Si je vous ai bien compris, docteure Norman, vous avez dit que vous faisiez partie du groupe d'experts. Est‑ce exact? Avez-vous participé à l'enquête sur l'assurance-médicaments avec le gouvernement?
    Je suis M. Gagnon. Dre Norman est...
    Je suis désolée.
    Non, je ne faisais pas partie du groupe d'experts.
    Et vous, docteure Norman?
    Si je faisais partie du groupe d'experts...?
    Faisiez-vous partie du groupe d'experts qui a collaboré à l'élaboration du régime d'assurance-médicaments?
    J'ai collaboré avec le gouvernement de la Colombie-Britannique pour fournir des données à l'appui du programme de contraception. À la demande...
    Avez-vous collaboré au programme fédéral?
    ... du ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, j'ai pu fournir de l'information au ministre de la Santé fédéral et à d'autres ministères fédéraux.
    Très bien.
    J'ai fourni des données probantes. Je n'ai pas collaboré au processus interne d'élaboration du projet de loi.
    D'accord. Nous avons ici des experts qui ont été écartés du processus. Je ne comprends pas très bien.
    Monsieur Morgan, dans ce système disparate dont vous avez parlé tout à l'heure, comment ce régime d'assurance-médicaments profitera-t-il aux Canadiens?
(1650)
    Si nous adoptons un système véritablement national, universel et à payeur unique, les Canadiens auront un meilleur accès aux médicaments d'un océan à l'autre. Nous pourrons recourir aux marchés publics nationaux pour obtenir de meilleurs prix pour les médicaments. Nous pourrons utiliser ces mêmes marchés publics pour être certains que les fabricants garantiront l'approvisionnement en médicaments au moment où les Canadiens en ont besoin et dès que nous verrons que les pénuries se généralisent à l'échelle internationale.
    Il est vrai que si le gouvernement fédéral finançait les premières étapes des traitements contraceptifs ou contre le diabète et utilisait son pouvoir d'achat à l'échelle nationale pour obtenir le prix moyen appliqué dans les pays de comparaison, ce régime pourrait en fait coûter plus cher que le coût estimé par le directeur parlementaire du budget, mais il permettrait aux provinces et aux territoires de faire des économies de l'ordre de 1,3 milliard de dollars par année...
    D'accord. Je...
    ... et au secteur privé de faire des économies de l'ordre de 1,7 milliard de dollars et au pays de faire des économies nettes de 700 millions de dollars.
    Je suis désolée de vous interrompre, mais mon temps est limité.
    Ce qui me préoccupe, c'est que le projet de loi C‑64, dans sa forme actuelle, ne fournit pas de renseignements suffisamment détaillés pour que nous soyons certains que ce régime sera profitable aux Canadiens. Sauf erreur de ma part, c'est ce que j'ai retenu de votre allocution.
    Ce régime offrira une nouvelle couverture, mais il coûtera beaucoup plus cher qu'il ne le devrait et il continuera d'imposer un fardeau financier inéquitable aux ménages et aux employeurs.
    Êtes-vous d'accord pour dire que les personnes qui ont un régime privé de soins de santé s'en tirent mieux que celles qui seraient couvertes par le régime que le gouvernement offre actuellement?
     Non, elles ne s'en tirent pas mieux. Il n'y a aucun changement. C'est ce que le ministre a dit hier dans son témoignage. En vertu de ce nouveau régime, elles auront la même protection qu'avec leur régime d'assurance privé.
    Ce que nous voulons, c'est que les médicaments couverts par ces régimes privés puissent être achetés, partout au pays, dans le cadre d'un régime public. Cela permettrait d'alléger le fardeau financier de ces ménages et de ces employeurs.
    Ce n'est pas ce qui se passe en ce moment.
    Non, ce n'est pas ce que ce projet de loi permettra de faire.
    C'est exact.
    Merci, monsieur Morgan.
    Merci à vous également, madame Roberts.
    Monsieur Jowhari, vous allez clore ce dernier tour de questions de notre examen du projet de loi C‑64. Vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie également aux témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Nous sommes vendredi et l'après-midi est déjà bien avancé. Je sais qu'il est plus de 16 heures et que la plupart des amendements ont probablement déjà été rédigés et débattus, mais je tiens à rappeler que lundi prochain, nous ferons un examen article par article du projet de loi. Après, il sera renvoyé à la Chambre où nous aurons l'occasion d'en débattre et il sera ensuite envoyé au Sénat. Nous aurons donc plusieurs occasions de revenir sur les dispositions que nous pourrions renforcer.
    Je vais poser la plupart de mes questions à M. Morgan. J'ai remarqué que vous avez attendu patiemment votre tour et que vous auriez voulu intervenir à plusieurs reprises. Comme vous n'avez pas eu l'occasion de le faire, je vais vous consacrer mes cinq minutes.
    Vous avez été eu des commentaires très élogieux à l'égard du rapport Hoskins. Vous avez aussi dit si certains éléments étaient pris en compte dans le projet de loi  C‑64, celui‑ci constituerait un bon point de départ pour l'instauration d'un régime d'assurance-médicaments.
    Supposons que je prends la parole la semaine prochaine à la Chambre, à l'étape de la troisième lecture, pour discuter de ces points en m'appuyant sur le rapport Hoskins. Si je dis: « Voici le projet de loi C‑64 tel que présenté, voici les recommandations du rapport Hoskins et voici les trois points sur lesquels nous devons nous concentrer pour renforcer ce projet de loi ». Que devraient être ces trois points?
    Vous avez amplement le temps de répondre avant que le président vous interrompe.
    Oui, je serai bref.
    Il suffirait probablement d'apporter des amendements mineurs aux articles 4 et 6 du projet de loi C‑64 pour vous assurer que, même si ce ne sont que de petits pas, le projet pilote de mise en oeuvre des recommandations du rapport Hoskins reflétera vraiment ce que recommande le rapport Hoskins, si vous y apportez ces quelques amendements clés.
     Par exemple, l'article 4 du projet de loi C‑64 se lit ainsi: « Le ministre prend en compte les principes ci‑après ». Je pense que les membres conservateurs du Comité ont fait remarquer que ce libellé est inhabituel. On devrait plutôt lire: « Le ministre applique les principes ci‑après ».
    À l'alinéa 4d) du projet de loi, on peut lire: « offrir la couverture universelle des produits pharmaceutiques à l'échelle du Canada ». Le rapport Hoskins dit pourtant très clairement qu'il doit s'agir d'un régime universel, à payeur unique au premier dollar et public. Il y aurait lieu d'améliorer et de préciser ce libellé.
     Comme il en a été question hier ici, ce projet de loi doit définir ce qu'on entend par « payeur unique », « premier dollar » et « régime public ». Ces notions sont clairement définies dans la Loi canadienne sur la santé, qui serait la loi analogue au projet de loi C‑64 quant aux principes que toutes les provinces et tous les territoires devraient respecter pour la prestation de ces services. Il y a quelques changements à faire ici.
    De même, l'article 6 concernant le type de couverture doit énoncer clairement de quoi il s'agit. Comme l'ont recommandé le Conseil consultatif Hoskins et de nombreuses autres commissions, le régime doit être universel, à payeur unique au premier dollar et public. Le mot « public » doit être ajouté.
(1655)
    Merci.
     J'aimerais avoir votre avis sur un autre sujet. Concernant le diabète et les différents types de médicaments contre le diabète, par exemple, le ministre a dit que cela relevait de notre compétence. Nous allons négocier avec les provinces, les territoires, les groupes autochtones et d'autres instances. Nous allons examiner leurs besoins, puis nous élargirons la portée de la couverture.
    Qu'en pensez-vous?
    Si je devais concevoir un régime comme celui‑ci, je commencerais par dresser la liste des médicaments les plus essentiels qui devraient être fournis, en m'appuyant sur des données probantes.
    Vous avez entendu des témoins dire que certains de ces médicaments essentiels, notamment les GLP‑1, comme l'Ozempic, ne font pas partie du panier actuellement proposé. Je pense donc que vous pourriez réfléchir attentivement à ce qui devrait être inclus.
    Je tiens à préciser clairement que si vous faites cela dans le cadre d'un régime vraiment universel, à payeur unique, et que vous achetez des médicaments pour 40 millions de Canadiens, vous disposerez d'un tel pouvoir d'achat que vous pourriez inclure un panier complet de traitements contraceptifs et contre le diabète et économiser ainsi beaucoup d'argent. Cela peut se faire de façon très judicieuse; vous devez aussi vous appuyer sur des données probantes et prévoir un budget suffisant pour répondre aux besoins des Canadiens.
    Je vous remercie, monsieur Jowhari.
    Merci également à tous nos témoins. Vos témoignages ont été fascinants et, grâce à vous, nos auditions se terminent vraiment bien.
    Nous arrivons à la fin du délai que nous a fixé la Chambre. Avant de lever la séance, en plus de remercier les témoins, je tiens à souligner le soutien indéfectible que nous avons reçu des greffiers, des analystes, des techniciens, des informaticiens et des interprètes tout au long de nos délibérations. Au nom du Comité, je leur exprime ma gratitude.
    Plaît‑il au Comité de lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    Le président: La séance est levée.
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