SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 16 octobre 2018
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bienvenue à tous à notre deuxième journée de témoignages sur la situation des Ouïghours en Chine.
[Français]
Nous recevons Mme Evelyn Puxler, directrice de la Direction de la Chine élargie, politique et coordination du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.
[Traduction]
Je me demande si nous pourrions avoir cinq minutes à huis clos à la fin de la séance pour discuter d’une question concernant les témoins.
D’accord. Nous allons siéger pendant 50 minutes, jusqu'à 13 h 55 et nous poursuivrons à huis clos pendant quelques minutes.
Je vous invite, madame Puxley, à faire votre déclaration préliminaire.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci aux membres du Comité. Nous sommes très heureux de l'invitation à comparaître devant vous. J’ai quelques remarques préliminaires à faire, après quoi je répondrai à vos questions. Si je n’ai pas dans l'immédiat les éléments de réponse voulus, je vous communiquerai les renseignements demandés par la suite.
Je tiens à souligner d’entrée de jeu que la relation entre le Canada et la Chine est une priorité pour le gouvernement du Canada. C’est une relation à multiples facettes. La défense des droits de la personne et des normes internationales à cet égard est au coeur de cette relation. Nous continuons de chercher à établir avec la Chine une relation globale fondée sur la confiance et l’avantage mutuel, dans laquelle les intérêts communs et les préoccupations respectives peuvent être pris en compte.
Dans le cadre de cette relation, comme je l’ai mentionné, le Canada s’est engagé à avoir des échanges constructifs avec la Chine en matière de droits de la personne. Il s’agit d’un élément fondamental de notre engagement bilatéral. Cela dit, je pense qu’il est juste de préciser que nous sommes profondément troublés par des rapports dignes de foi concernant la détention arbitraire massive et prolongée, sans aucune forme de procès, d'Ouïghours et d’autres personnes musulmanes dans la Région autonome ouïgour du Xinjiang. Nous croyons comprendre que, pendant leur détention, les Ouïghours et d’autres musulmans subiraient une éducation patriotique et seraient victimes de mauvais traitements. II semblerait qu’en agissant ainsi, les autorités chinoises cherchent à miner les traditions culturelles, linguistiques et ethno-religieuses des Ouïghours et d’autres musulmans, et je cite ici des rapports de l’ONU, « sous prétexte de lutter contre l’extrémisme et le terrorisme ». De tels actes sont contraires à la constitution de la Chine et à ses engagements internationaux en matière de droits de la personne. Ils vont également à l’encontre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations unies, adoptée par consensus à l’Assemblée générale des Nations unies en 2006.
L’accès au Xinjiang est difficile, en raison des mesures de sécurité et du contrôle qui y est exercé sur la libre circulation des personnes, en particulier du personnel diplomatique. Cela dit, l’ambassade du Canada en Chine suit de près l’évolution au Xinjiang et la situation des Ouïghours ailleurs en Chine. Dans un instant, je vous ferai part de certaines des informations les plus récentes disponibles sur ces questions. Je tiens à souligner que ce que les diplomates canadiens ont constaté au Xinjiang corrobore ces rapports externes et indépendants.
En août, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale a publié ses observations concernant la Chine et sonné l’alarme au sujet de la situation au Xinjiang, ce qui a contribué à la diffusion de plus d’information. Je pense qu'il est utile de préciser qu’une grande partie de l’information que nous avons reçue n’a été recueillie qu’au cours des six ou sept derniers mois. Le rapport du Comité des Nations unies a certainement été important à cet égard.
Le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale a déploré le manque de données officielles sur le nombre de personnes en détention prolongée au Xinjiang ou forcées de passer des périodes variables dans des « camps de rééducation politique », et je cite encore une fois le Comité des Nations unies, « même pour des expressions non menaçantes de la culture ethno-religieuse musulmane comme des salutations quotidiennes ». Le Comité a noté que les estimations du nombre de personnes détenues vont de quelques dizaines de milliers à plus d’un million de personnes, mais comme je l’ai dit, l’incertitude entourant ces estimations reflète le fait qu’il n’y a pas vraiment de données précises sur les personnes détenues ou emprisonnées.
Nous croyons comprendre que la Chine a construit et continue de construire des centres pour recevoir les nombreux détenus au Xinjiang et que les activités de surveillance se sont intensifiées dans la région. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations unies a noté que des informations faisaient état d’une surveillance de masse ciblant de façon disproportionnée les Ouïghours, comme des vérifications policières fréquentes et l’examen des téléphones mobiles aux points de contrôle de la police. D’autres rapports ont été reçus à propos de la collecte de nombreuses données biométriques imposée à de grands groupes de la population au Xinjiang, y compris par le prélèvement d’échantillons d’ADN et la lecture de l’iris.
Le Comité des Nations unies a été informé que tous les résidents du Xinjiang sont tenus de remettre leurs documents de voyage à la police et de demander une autorisation pour pouvoir quitter le pays, autorisation qu’ils peuvent attendre pendant des années. Nous croyons comprendre que cette restriction touche tout particulièrement les personnes qui souhaitent voyager pour des motifs religieux, notamment pour faire le hadj.
Les autorités chinoises n’ont pas fourni de données officielles sur les détentions. Pour cette raison, le Comité des Nations unies leur a demandé de lui fournir de l’information sur les détenus, par exemple, les motifs de leur détention, le nombre de personnes détenues contre leur gré au cours des cinq dernières années et les mesures prises pour garantir que les familles sont avisées sans délai de la détention d’un de leurs proches.
Le Comité des Nations unies fait mention aussi d'informations selon lesquelles de nombreux Ouïghours ayant quitté la Chine y seraient renvoyés contre leur gré et des craintes au sujet de leur sécurité depuis leur retour en Chine. Nous signalons que les gouvernements de l’Allemagne et de la Suède ont récemment interrompu la déportation des Ouïghours au Xinjiang, en Chine, pour ces motifs.
J’aimerais aussi parler de la déclaration d’ouverture faite au Conseil des droits de l’homme à Genève le mois dernier. La nouvelle Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, ancienne présidente du Chili, a indiqué que les conclusions du Comité corroboraient d’autres rapports que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme avait reçus. À la lumière de ces rapports, il a été demandé que le gouvernement chinois autorise l’accès du Haut-Commissariat à toutes les régions du pays.
De plus, en septembre, Human Rights Watch a publié un rapport exhaustif fondé sur des entrevues menées auprès de 58 anciens résidents du Xinjiang. Certaines personnes ont dit qu’au moins la moitié des membres de leur famille immédiate se trouvaient dans des camps de rééducation politique, en détention préventive ou en prison. Selon Human Rights Watch, des décès sont rapportés dans les camps, ce qui laisse craindre des violences physiques et psychologiques, ainsi que du stress causé par les conditions de vie difficiles, le surpeuplement et la nature même de la détention indéfinie, autrement dit, sans durée fixe.
Il nous a été donné de comprendre que des soins médicaux de base sont disponibles, mais Human Rights Watch a aussi entendu dire que des personnes âgées ou atteintes de maladies graves demeurent détenues, de même que des adolescents, des femmes enceintes et allaitantes et des personnes handicapées.
D’anciens détenus ont fait état de tentatives de suicide et de châtiments sévères en cas de désobéissance dans ces établissements.
Nous savons que l’endoctrinement politique et la rééducation ne sont pas des phénomènes nouveaux en Chine. Les bouddhistes tibétains, les musulmans ouïghours, les chrétiens et les adeptes du Falun Gong ont été visés dans le passé. Il importe de souligner que ce sont les informations sur la situation au Xinjiang, sur son ampleur et les intentions apparentes des autorités chinoises qui préoccupent la communauté internationale. Nous sommes conscients que la situation semble s’être détériorée ces dernières années. Nous avons entendu parler de proches de citoyens canadiens ayant la nationalité chinoise qui ont disparu ou qui sont en détention et ne peuvent plus être joints et dont les documents de voyage ont été saisis par les autorités chinoises.
C’est à la lumière de cette situation que, plus tôt cet été, en juillet, nous avons mis à jour l’avis aux voyageurs en partance pour la Chine. Il est maintenant indiqué que les autorités chinoises détiennent de plus en plus de membres de minorités ethniques dans la région, sans application d’une procédure régulière. L’arrestation de proches de citoyens canadiens ayant la nationalité chinoise est aussi mentionnée. Certains de nos partenaires qui partagent nos vues ont aussi mis à jour récemment leur avis aux voyageurs dans le même sens.
Le Xinjiang est de plus en plus difficile d’accès pour les étrangers. Nous savons qu'il y a très peu d’étrangers qui y vivent encore aujourd’hui et que leur nombre diminue rapidement.
En ce qui concerne les mesures prises par le Canada jusqu’à maintenant, nous avons soulevé la situation au Xinjiang directement auprès des autorités chinoises à de nombreuses reprises et à divers échelons. Tout récemment, en septembre, le sous-ministre des Affaires étrangères, Ian Shugart, en a discuté avec son homologue chinois, le vice-ministre des Affaires étrangères Zheng Zeguang à l'occasion de consultations bilatérales annuelles régulières avec le sous-ministre du ministère des Affaires étrangères.
La ministre Freeland, comme vous l’avez peut-être vu dans la presse, a par la suite parlé du Xinjiang avec son homologue, le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, au cours d'une réunion bilatérale en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, à New York en septembre. Précédemment, à l’ONU et dans des tribunes multilatérales au Conseil des droits de l’homme en mars 2018, nous avons exprimé nos préoccupations concernant le traitement des Ouïghours et des Tibétains, en faisant une déclaration au point 4. Nous avons exhorté les autorités chinoises à libérer immédiatement toutes les personnes détenues pour avoir exercé leurs droits humains, y compris leur droit à la liberté de religion, de croyance et d’expression, et à protéger les défenseurs des droits linguistiques et culturels.
Toujours en juillet, dans le cadre d’une réunion ministérielle sur la liberté de religion organisée par le département d’État américain à Washington, le Canada a signé une déclaration visant la Chine dans laquelle il exprimait ses préoccupations au sujet de la situation au Xinjiang. Cette déclaration traitait de manière approfondie de la situation au Xinjiang.
Nous avons également fait part de nos préoccupations au Conseil des droits de l’homme en septembre dernier. Nous continuerons de demander à la Chine de respecter ses obligations internationales en matière de droits de la personne. La prochaine occasion sera l’examen périodique universel de la Chine, le 6 novembre à Genève.
Merci beaucoup de me donner l’occasion de témoigner.
Merci beaucoup.
Vous avez terminé juste à temps.
Nous allons commencer la ronde de questions de sept minutes avec M. Sweet.
Merci beaucoup.
Merci, madame Puxley, de votre témoignage. J’espère que vous n’attendez pas beaucoup du Conseil des droits de l’homme. Si vous suivez mon compte Twitter, vous saurez que je viens de publier de l’information sur les personnages figurant à son générique, et je ne pense pas qu’il y en ait beaucoup qui respectent les droits de la personne, du moins pas au sens où nous les entendons.
Le 2 octobre dernier, l’Union européenne a voté une résolution très ferme concernant la situation des Ouïghours et des Kazakhs en Chine. Vous avez fait allusion — et la résolution les mentionnent expressément — aux mesures prises par l’Allemagne et la Suède ayant pour effet de suspendre tout rapatriement d’Ouïghours, de Kazakhs ou de musulmans turcs en Chine. Quelle est la position du Canada à cet égard?
Comme je l’ai mentionné, nous savons que certains pays aux vues similaires aux nôtres — l’Allemagne et la Suède — ont pris cette mesure, temporaire dans certains cas. Nous sommes en contact très étroit avec les autorités canadiennes responsables de ces questions, soit Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et l’ASFC, qui est chargée des déportations. Notre engagement consiste essentiellement à nous assurer que soient portés à leur connaissance les renseignements crédibles les plus récents dont nous disposons, tant de sources canadiennes que d’autres sources indépendantes.
Je pense que notre positionnement actuel à cet égard est une question qu'il vaut probablement mieux laisser à IRCC et à l’ASFC, mais c’est certainement une question qui nous préoccupe beaucoup. Comme je l’ai dit plus tôt, l’un des défis auxquels nous sommes confrontés, c’est qu’une grande partie de l’information ne nous est parvenue que récemment. Le troisième rapport a été publié en août et a soulevé suffisamment de préoccupations pour nous amener à porter la question devant le Conseil des droits de l’homme en avril, et à la reprendre dans la déclaration de Washington en juillet. Mais il a été extrêmement difficile d’obtenir des preuves, plutôt que des rumeurs et des ouï-dire. Il va sans dire que nous voulons conseiller nos ministres et le gouvernement du Canada en nous fondant sur les meilleurs renseignements disponibles.
Oui, les déportations des Ouïghours au Canada vers la Chine, que ce soit au Xinjiang ou ailleurs, sont certainement une question à laquelle nous accordons une très grande importance, en consultation avec les ministères et organismes concernés.
J’espère que nous ferons bientôt, à l'exemple de l’Allemagne et de la Suède, une déclaration ferme et que nous affirmerons clairement ce que nous n’avons pas l’intention de faire.
Bien entendu, la République populaire de Chine est passée maître dans l’art de supprimer toute capacité de recueillir des preuves. Vous avez parlé de la difficulté d’accès. C’est une tendance constante dans la République populaire de Chine, que ce soit pour le Tibet ou le Falun Gong ou, comme vous l’avez mentionné, les chrétiens et, maintenant, les Ouïghours. Je suis préoccupé par la détention arbitraire, mais je le suis encore plus par les rapports très clairs concernant le prélèvement d’organes. Cela s’est produit dans le cas du Falun Gong, et on nous apprend que c’est maintenant au tour des Ouïghours. J’ai reçu récemment des renseignements selon lesquels, à l’aéroport de Kashgar, il y a une voie spéciale pour les arrivants destinés à subir des prélèvements d’organes. Je me demande si vous êtes au courant de cela et quelles mesures vous avez prises à cet égard pour informer les autorités chinoises.
Je ne suis pas au courant, et je vous prie de nous communiquer cette information.
Nous savons que le prélèvement d’organes soulève partout de très vives préoccupations, notamment au Canada. Il me semble que l’information dont nous disposons laisse voir qu’il y en a moins qu'auparavant, mais que cette pratique se poursuit. Nous allons certainement nous pencher sur cette question.
Je vous remercie d’avoir porté cette question à notre attention.
J’espère que le ministère suit de très près nos témoignages, parce que nous avons déjà entendu un témoin, et je pense que vous en entendrez beaucoup d'autres à ce sujet. Je vous dirais que le marché des organes prélevés en République populaire de Chine ne s’est pas contracté, mais qu'il a pris de l'expansion. Je rappelle le témoignage que nous avons entendu de deux éminents Canadiens, David Kilgour et David Matas, qui ne cessent de suivre de près la situation. C’est certainement le cas pour le Falun Gong. Je pense qu’il en ira de même pour les Ouïghours.
Je vais céder la dernière partie de mon temps de parole à mon collègue David Anderson.
Nous pourrons peut-être y revenir.
Je veux simplement vous demander quelle est la position du Canada devant la tournure prise ces derniers jours, à savoir que le gouvernement régional, officiellement bien qu'illégalement, a pour l'essentiel légalisé les camps de rééducation qui sont en place. Est-ce que cela change le point de vue du gouvernement sur ces camps? Qu’est-ce que le gouvernement canadien va faire face à cette situation?
J’ai d’autres questions, mais je vous laisse répondre tout de suite à celle que je viens de poser. Les camps ont été légalisés. En quoi cela influe-t-il sur l’approche du gouvernement canadien à leur égard?
Il y a des préoccupations au sujet de la diversité des camps. Certains sont utilisés pour la rééducation, d’autres pour la formation professionnelle et d’autres, plus clairement, pour la détention. Certains ont été décrits comme des camps servant essentiellement à couper les gens de leur religion et de ce qu’on appelle l’extrémisme violent. Par conséquent, nous devons faire très attention aux types de camps dont nous parlons.
Si vous me permettez de le mentionner, ils englobent la plupart de ce que vous venez de dire. L’article 33 est libellé comme suit:
les établissements tels que les centres de formation professionnelle devraient offrir des formations sur la langue nationale commune, les lois et règlements, et les compétences professionnelles, et mettre en oeuvre une éducation idéologique anti-extrémiste et une correction psychologique et comportementale afin de promouvoir la transformation de la pensée des apprenants et de les aider à réintégrer la société et la famille.
Cela me semble être une liste assez exhaustive des efforts visant essentiellement à détruire la culture et les croyances religieuses des gens.
Malheureusement, nous allons devoir nous arrêter ici. Il y aura un autre tour, alors vous pourrez revenir sur ce sujet.
Avant de passer à la prochaine question, je tiens à souligner que beaucoup d’entre nous traînent des souvenirs du programme Women in House de l’Université de Toronto. Elles sont assises à l’arrière. Je les salue et je leur souhaite à tous la bienvenue au Parlement.
Merci d’être ici.
Nous passons maintenant à M. Tabbara, pour sept minutes.
Merci, madame la présidente. Merci aussi à notre témoin de s'être déplacée aujourd'hui.
J’aimerais parler un peu du système judiciaire en Chine et de son efficacité. Selon l’article 123 de la partie 7 de la constitution, « les tribunaux du peuple (...) sont les organes judiciaires de l’État ».
En général, dans les États occidentaux, nous avons un système de freins et de contrepoids, comme aux États-Unis et ici au Canada, où les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire sont distincts. Ce système fait en sorte qu'aucun de ces pouvoirs gouvernementaux ne peut prendre le pas sur les autres.
Selon vos connaissances, diriez-vous que ces tribunaux du peuple ne protègent pas les groupes minoritaires aussi efficacement que ceux que nous avons ici, en Occident?
Je pourrais peut-être répondre en disant que l’une de nos préoccupations, c’est que les détentions massives dont nous sommes au courant jusqu’à présent, à l’exception de cette récente modification de la loi, n’ont pas été le résultat d’une application régulière de la loi. Par conséquent, la primauté du droit n’entre pas vraiment en ligne de compte. Nous examinons de très près les changements apportés récemment à la loi qui s'appliqueraient à certains camps, mais pas à d’autres.
Pour ce qui est du système judiciaire en Chine, c’est un domaine où le Canada et la Chine ont une longue tradition de coopération et d’échanges. Les Chinois comprennent mieux notre système et nous cherchons à mieux comprendre le leur. Il est toutefois juste de dire que le processus judiciaire chinois est très différent, comme vous l’avez souligné, de celui du Canada, particulièrement en ce qui concerne l’indépendance de la magistrature et du jeu des freins et contrepoids.
Cela varie selon qu’il s’agit de la protection des droits de la personne ou de litiges commerciaux. Cependant, c’est une question pour laquelle, franchement, je serais heureuse de vous donner plus d’information sur notre évaluation de ce système judiciaire qui est effectivement très différent du nôtre, mais dans lequel il y a eu une évolution récente tendant à l'institution de tribunaux que nous, au Canada, ne verrions pas comme des instances susceptibles de juger en toute indépendance les affaires dont elles sont saisies.
Comme je l’ai dit, cela concerne strictement des aspects particuliers de la loi. Quant aux droits de la personne, l’essentiel de mon intervention d’aujourd’hui et de mon témoignage, c’est que nous sommes très préoccupés par le fait que rien de ce qui est survenu récemment au Xinjiang relativement aux détentions massives n’est le résultat d’un processus judiciaire. Il y a eu des détentions sans audience ni possibilité d’appel, sans aucune forme de comparution devant un tribunal chinois.
Y a-t-il d’autres États clés de la région qui se sont dits préoccupés par le traitement réservé aux Ouïghours, notamment la Turquie et différents autres États de la région?
C’est une excellente question.
Dans ma déclaration, j’ai dit que le Canada travaillait avec des pays qui ont des vues similaires et avec d’autres partenaires qui s’inquiètent de la situation au Xinjiang. Nous avons tendu la main à des pays comme la Turquie et d’autres qui sont membres de l’Organisation de la coopération islamique puisque le groupe religieux ethnique qui semble avoir été le plus ciblé en Chine est en majorité de confession musulmane.
Oui, nous cherchons à engager des partenaires non traditionnels pour faire valoir leurs préoccupations. Vous avez peut-être remarqué que récemment la Malaisie — qui avait refoulé auparavant des Ouïghours qui cherchaient à obtenir le statut de réfugié à l’extérieur de la Chine — a refusé de les renvoyer. Je pense que la position de la Turquie a évolué. La Turquie acceptait autrefois de nombreux Ouïghours qui avaient demandé le statut de réfugié, particulièrement en Asie du Sud-Est. Je pense qu’il y a des preuves que leur point de vue dans ce dossier a changé; certains sont peut-être plus disposés à renvoyer les Ouïghours. Pour ce qui est des déclarations publiques, je pense qu’il est également juste de dire qu’il n’y a pas eu beaucoup de manifestations d’inquiétude jusqu’à maintenant, mis à part nos partenaires traditionnels qui ont des vues similaires, comme l’Union européenne, dont l'un de vos collègues a parlé tout à l’heure, les États-Unis et certains pays d’Europe.
Les Ouïghours sont-ils les seuls à être envoyés dans les centres de rééducation ou est-ce qu’il s’agit de toute une série de groupes minoritaires?
D’après ce que nous avons compris, il s’agit principalement d’Ouïghours, même si, selon des informations récentes, une partie de la minorité hui, qui est également une minorité islamique en Chine, a également été assujettie à certaines de ces mesures. Nous cherchons à le confirmer. Ce n’est qu’une rumeur pour l’instant.
Merci, madame la présidente.
J’aimerais revenir sur quelques points qui ont déjà été soulevés en ce qui concerne ce que nous avons appris récemment sur la situation dans les camps, notamment le prélèvement d’organes, et notre coopération de longue date avec la Chine. Que pouvons-nous faire? Quels sont les moyens les plus efficaces de recueillir des preuves?
Je pense qu’il y a diverses mesures que nous pouvons prendre et diverses avenues que nous pouvons explorer, comme évidemment, travailler avec des partenaires aux vues similaires. Pour ce qui est de la collecte de preuves, même si notre ambassadeur n’a pas encore pu se rendre au Xinjiang, il est certain que des membres de l’ambassade à Pékin ont pu se rendre sur place, même si leurs visites sont très restreintes tant en raison des mesures de sécurité qu’en raison des préoccupations des habitants du Xinjiang qui craignent que s’ils parlent à des diplomates étrangers, ils en subiront les conséquences.
Je pense que vous aurez constaté que mes remarques préliminaires faisaient largement référence aux rapports des comités de l’ONU et des autorités de l’ONU. C’est parce qu’ils sont vraiment une source crédible d’information qui rassemble des renseignements provenant de toutes sortes de sources, y compris des renseignements confidentiels qui leur sont transmis, et dont ils doivent protéger la confidentialité.
Nous examinons toutes les possibilités pour recueillir des renseignements. Évidemment, le plus important est d’obtenir des données des autorités chinoises. Une des choses qui nous ont inquiétés, c’est que, jusqu’à tout récemment, elles ne parlaient pas des camps, que ce soit de rééducation ou d'autre nature. Cela semble avoir changé au cours des dernières semaines. Je pense qu’il serait très utile que le gouvernement et le Canada ainsi que les autorités des Nations unies et celles qui partagent les mêmes idées aient des données sur le nombre de personnes qui ont été envoyées dans des camps de détention, ou des camps de rééducation, peu importe comment vous voulez les appeler. Les chiffres varient vraiment — comme je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire — de milliers à un million. En fait, nous avons entendu qu’il y en avait beaucoup plus d’un million.
Il est très difficile d’obtenir des données et c’est évidemment une grande préoccupation pour nous. Nous ne voulons pas faire des allégations qui ne peuvent être fondées. Il serait très utile que les Chinois soient un peu plus transparents sur ce qui se passe au Xinjiang. Cela nous aiderait tous et nous aiderait à travailler avec la Chine pour essayer de régler ce qui, du point de vue du gouvernement canadien, est actuellement une situation très grave où les normes internationales en matière de droits de la personne sont violées.
Y a-t-il des partenaires potentiels avec lesquels nous pourrions travailler, peut-être avec d’autres pays qui sont plus susceptibles d’obtenir ces données? Nous faisons des affaires et avons des liens avec la Chine. Il y a sûrement d’autres entités avec lesquelles nous pourrions travailler.
Y voyez-vous des possibilités et, dans l’affirmative, que pouvez-vous nous dire pour que nous puissions formuler des recommandations appropriées?
Eh bien, certains des renseignements que nous avons proviennent de Canadiens qui sont récemment allés en Chine, notamment des gens qui font des affaires là-bas.
Le problème, comme je l’ai mentionné, au Xinjiang, c’est que très peu d’étrangers se trouvent encore au Xinjiang. En fait, je pense que nous voudrons continuer à travailler avec les organes de l’ONU surtout pour essayer d’amener certains représentants spéciaux de l’ONU au Xinjiang pour voir la situation sur le terrain. Nous continuons de travailler avec des partenaires aux vues similaires et d’autres non traditionnels pour recueillir de l’information.
Comme je l’ai mentionné, nous aurons en novembre l’examen périodique universel de la Chine à Genève. Ce sera pour nous l’occasion non seulement de soulever cette question, mais ce sera aussi l'occasion pour la Chine d’y répondre. Nous nous attendons à ce que d’autres pays soulèvent les mêmes préoccupations que nous.
Je pense qu’il est également juste de dire, comme vous avez pu le constater dans ma déclaration préliminaire, que nous nous fions dans une certaine mesure aux rapports d’organismes non gouvernementaux crédibles comme Amnistie Internationale et Human Rights Watch. Ce ne sont que deux exemples qui me viennent à l’esprit.
Oui, nous cherchons de l’information auprès d’un certain nombre de sources, mais, bien sûr, la Chine est l’État responsable et devrait — comme nous l’avons demandé — être plus transparente au sujet de ce qui s’y passe.
Savez-vous si des Ouïghours ont été ou sont dans une situation où ils pourraient être renvoyés en Chine?
Du Canada; ou êtes-vous au courant d’une situation ailleurs dans le monde, disons, dans ce dossier en général, étant donné qu’il est très récent, comme vous l’avez souligné? Vous n’êtes peut-être pas au courant d’une situation précise, mais si c’est le cas, que savez-vous?
Comme je crois l’avoir mentionné en réponse à l'un de vos collègues, nous travaillons en étroite collaboration avec IRCC et l’ASFC pour nous assurer qu’ils sont au courant de l’évolution récente de la situation en Chine.
En ce qui concerne les autres pays, il y a eu un certain nombre de cas de « refoulements » qui ont été très médiatisés dans des pays où les Ouïghours demandaient le statut de réfugié, par exemple, la Thaïlande, la Malaisie et la Turquie. Cette situation a perduré de 2015 à 2016 environ. Les différents gouvernements ont pris différentes mesures. La Thaïlande a notamment renvoyé un assez gros groupe de personnes en Chine. C’est compliqué en Thaïlande, parce que la Thaïlande n’est pas signataire de la Convention sur les réfugiés.
Mais oui, un certain nombre de pays ont expulsé des Ouïghours vers la Chine, ce qui, je crois, constitue probablement un problème très grave dans la situation actuelle dans ce pays.
Le temps est écoulé. Nous allons passer au deuxième tour.
Pour commencer, nous avons M. Fragiskatos qui dispose de cinq minutes.
Merci d’être ici. Tout d’abord, je tiens à m’excuser: je n’ai pas pu assister à votre exposé. Je siégeais à un autre comité; nous examinions des projets de loi. Je suis très intéressé par votre déclaration, que j’ai lue ici, et par les observations que vous avez formulées par la suite.
Madame Puxley, vous avez parlé tout à l’heure de « crédibilité ». J’aimerais y revenir, si vous me le permettez. Il y a des revendications contradictoires.
Quelle norme appliquons-nous pour évaluer les demandes? Comment définissons-nous les revendications crédibles? Je pose la question par simple curiosité, parce que je n’ai certainement pas la réponse. C’est une chose très difficile à faire.
Je pense qu’il est difficile de répondre à cette question.
Évidemment, nous prenons très au sérieux les rapports que nous recevons des diplomates canadiens qui ont pu s’y rendre. Je pense avoir décrit les dernières informations reçues de l’ONU comme étant crédibles, compte tenu du nombre de personnes qui ont été interrogées et de la grande diversité des sources.
Je pense que nous souhaitons toujours évaluer certains des renseignements qui nous sont transmis, comme votre collègue l’a mentionné — je ne sais pas si vous étiez ici — au sujet des rapports sur les stations spéciales de prélèvement d’organes établies à Kashgar. En toute honnêteté, je n'étais pas au courant, et nous allons certainement nous pencher là-dessus.
Comme je l’ai dit, les rapports des Nations unies constituent habituellement la référence en raison de la grande diversité des sources sur lesquelles ils se fondent. Je pense qu’il est dans notre intérêt à tous de veiller à ce que les représentants de l’ONU aient accès au Xinjiang afin qu’il y ait des rapports jugés crédibles et indépendants.
Le Canada a exprimé des préoccupations ici même, lors de réunions qui étaient organisées notamment par le département d’État américain et qui portaient particulièrement sur la liberté de religion.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Nous travaillons avec, semble-t-il, les États-Unis et d’autres démocraties pour soulever cette préoccupation. Je sais que le premier ministre Trudeau a fait état de préoccupations il y a quelques semaines.
Oui.
Je pense que les États-Unis sont évidemment un partenaire clé. Je pense que les États-Unis n’ont pas un meilleur accès au Xinjiang ou à d’autres rapports indépendants que le Canada, mais ils sont de toute évidence un partenaire clé. Comme vous le savez, ils ont accordé une attention particulière aux questions de liberté de religion.
En toute honnêteté, nous collaborons avec un certain nombre de partenaires en Europe et dans la région. Nous portons cette question à l’attention de la Chine depuis quelques mois déjà, dans le but d’obtenir des renseignements de la Chine sur ce qui se passe réellement au Xinjiang. Nous le faisons en raison des informations présentées, non seulement dans la presse, mais aussi dans un rapport crédible de l’ONU, selon lesquelles il y a un grave problème de détention de masse.
Merci.
Y a-t-il des tendances claires qui se dégagent parmi les Ouïghours en ce qui concerne leurs volontés politiques? Les activistes ouïghours font-ils pression pour l’autonomie politique? Les protections culturelles moins l’autonomie politique seraient-elles acceptables? Y a-t-il un courant de pensée qui préconise l’indépendance?
Il me semble que les activistes ouïghours — je ne peux même pas utiliser le mot « mouvement » — ont des priorités quelque peu fragmentées.
Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
À ce stade-ci, je dirais que les communautés ouïghoures, comme la plupart d’entre elles, ont des opinions politiques et des appartenances religieuses diverses. Certains activistes aimeraient voir un État indépendant tandis que d’autres trouvent très difficile lorsque des éléments de leurs traditions religieuses et culturelles ne sont pas respectés.
Il y a tout un éventail d’opinions; je pense que c’est la meilleure façon de répondre à votre question. Ce n’est pas une communauté monolithique ni à l’extérieur de la Chine ni à l’intérieur du Xinjiang.
Non, certainement pas; elles ne sont jamais monolithiques. Je pense qu’il est important d’exposer ces nuances pour que nous comprenions.
Merci beaucoup.
Merci, madame la présidente.
Pour ce qui est de la réponse du gouvernement à cette question, certains des membres du Congrès chez nos voisins ont réclamé des sanctions contre les autorités chinoises compétentes.
Le gouvernement canadien a-t-il dit s’il pense que c’est une réponse appropriée?
Je pense que nous envisagerons toute une série d’options au fur et à mesure que la situation évoluera.
À ce stade-ci, je ne voudrais pas indiquer quelle option en particulier nous pourrions recommander au ministre ou au gouvernement. Certaines des mesures à notre disposition sont les mêmes que celles à la disposition des États-Unis, mais je ne voudrais pas qu’on me demande quelle mesure nous pourrions prendre en particulier — des sanctions ou toute autre mesure particulière — pour le moment.
Je pense que nous mettons beaucoup l’accent sur la collaboration multilatérale et bilatérale pour soulever ces questions et espérer que la situation changera.
Vous venez de mentionner « au fur et à mesure que la situation évoluera », mais nous avons une répression locale massive; l’établissement d’une banque de données génétiques; plus d’un million de personnes dans des camps de concentration; des informations sur le prélèvement d’organes; l’installation dans des logements privés de surveillance vidéo 24 heures par jour et la présence d’agents dans les maisons lors de festivals religieux; l’enlèvement et les demandes d’expulsion; la disparition de citoyens et les menaces proférées à leur famille; et l’imposition de restrictions complètes de voyage à toute une communauté.
Le gouvernement du Canada considère-t-il donc l’ensemble de cette situation comme une sorte d’anomalie ou y voit-il un problème systémique?
Je pense que j'ai dit dans ma déclaration préliminaire que nous étions très préoccupés par l’ampleur des détentions massives, quel qu’en soit l’objectif — la rééducation ou quoi que ce soit d’autre — au Xinjiang. Je pense que la situation au Xinjiang, par rapport à ce qui s’est passé ailleurs en Chine, y compris au Tibet en ce qui concerne le Falun Gong, etc., et les communautés chrétiennes, est très différente. Nous n’avons jamais eu d’informations crédibles faisant état de la détention d’un si grand nombre de personnes.
En fait, dans le passé, ces personnes étaient exécutées par ce même gouvernement, mais c’est un autre dossier.
Je reviens à ce que j’ai dit au sujet de la nécessité d’avoir non seulement des informations, mais aussi de s’assurer, dans la mesure du possible, que ces informations sont vérifiées et crédibles. Pour ce faire, nous comptons dans une certaine mesure sur les organismes de l’ONU.
Vous avez énuméré un grand nombre de situations, si je puis dire, monsieur. Je pense que nous sommes d’accord pour dire que, pour certaines d’entre elles, les informations sont crédibles et que, pour d’autres, elles méritent un examen plus approfondi.
Pouvez-vous me dire lesquelles méritent un examen plus approfondi? La répression locale? La banque de données génétiques? Savez-vous si elles existent?
Nous sommes bien conscients du fait que des milliers de personnes ont été détenues, que ce soit dans des camps de rééducation, ou simplement détenues ou jetées en prison...
D'accord. Donc des milliers... C’est intéressant. Nous avons des chiffres entre un million et trois millions. Vous dites des milliers.
Les informations sur le prélèvement d’organes les considérez-vous comme valides?
J’en ai parlé dans ma déclaration préliminaire. Je crois que l’information que nous avons — et je sais très bien que M. Kilgour et d’autres ont déjà travaillé là-dessus —, c’est que le prélèvement d’organes, particulièrement en ce qui concerne le Xinjiang et le Falun Gong, a diminué au cours des dernières années.
Nous sommes au courant d’activités comme celle-là, qui ont certainement des répercussions, surtout pendant le ramadan, sur la capacité des résidents et des citoyens de la Chine de pratiquer leur religion.
Je comprends que vous n’ayez pas de pouvoir dans ce domaine, mais parler de ce genre de choses comme d’une atteinte aux droits des gens diminue l’importance de ce qui se passe là-bas.
Vous avez parlé des enlèvements, des expulsions et de la disparition de citoyens, je crois; ces situations ne soulèvent aucun doute à mon avis. Elles se produisent dans une certaine mesure.
Je me demande à quel point le gouvernement chinois devra contrevenir aux normes internationales avant que ses actions n’aient une incidence sur ce que vous appelez une relation prioritaire « multidimensionnelle » « mutuellement avantageuse et fondée sur la confiance ». À quel point un pays doit-il mal agir avant que nous disions que nous ne souhaitons tout simplement plus traiter sur son marché?
Je pourrais peut-être revenir à ce que j’ai dit au début, c’est-à-dire qu’il y a eu une augmentation de l’information diffusée au cours des six à huit derniers mois sur ce qui se passe. Tous ces renseignements ne peuvent pas être vérifiés. Je cite le chiffre que vous avez cité: d’un million à trois millions de personnes ont été détenues. Comme je l’ai dit, je ne suis pas en mesure de confirmer pour l’instant les trois millions de détentions, même si les médias en ont parlé.
Pour ce qui est de la réponse du gouvernement canadien, je pense qu’il est juste de dire que nous avons soulevé cette question dans des contextes multilatéraux et bilatéraux, d’une façon qui montre clairement que nous sommes d’avis qu’il s’agit d’une situation extrêmement grave. Pour ce qui est de ce que nous ferons ensuite, lorsque nous aurons plus d’information, comme je l’ai dit, c’est quelque chose que nous... comme je l’ai dit, je ne suis pas en mesure de dire quelles mesures nous pourrions être prêts à prendre dans l’avenir.
Merci, madame la présidente.
Merci, madame Puxley, de votre témoignage et d’avoir répondu aux questions de mes collègues aujourd’hui.
En 1949, la région où se trouvent les Ouïghours au Xinjiang a été annexée pendant une très courte période de temps au Turkestan oriental. Elle est devenue un État indépendant, mais cela a été de courte durée. Est-ce que les violations des droits des minorités, ou seulement des populations ethniques dans cette région, se sont poursuivies et ont augmenté lentement depuis cette époque et depuis la réintégration avec la Chine?
Je ne parlerais pas des nombreuses décennies qui se sont écoulées depuis 1949. Je pense que je devrai vous revenir là-dessus.
De toute évidence comme je l’ai dit aujourd’hui, nous sommes préoccupés par ce qui semble être une détérioration de la situation au cours des 16 à 18 derniers mois, particulièrement au cours des derniers mois. Je pense que c’est ce sur quoi nous nous concentrons en ce moment. À dire vrai, ce n’est pas ce qui aurait pu se produire en 1949. C’est évidemment pertinent, mais notre objectif en ce moment est de régler la situation actuelle au Xinjiang que nous considérons comme extrêmement grave.
L’une des préoccupations dont nous avons entendu parler, c’est l’incapacité des gens de partager directement leur histoire ou leur témoignage. Un certain nombre de personnes ont indiqué qu’elles avaient supprimé l’application populaire WeChat en Chine afin de se protéger, parce que celle-ci est très surveillée.
Comment pouvons-nous — non seulement un pays comme le Canada, mais aussi les Nations unies et tous les organismes internationaux — contourner ce problème pour pouvoir entendre ces témoignages de première main? Comment recueillons-nous des données sur ce qui se passe actuellement?
Comme je crois l’avoir mentionné, il existe diverses sources. La première consiste à demander aux diplomates canadiens et à d’autres diplomates de se rendre dans la région et de communiquer l’information que nous y recueillons. Ensuite, il y a les gens qui ont réussi à sortir et à demander le statut de réfugié dans la région, que ce soit en Asie du Sud-Est ou en Turquie; dans certains cas, ils ont réussi à venir au Canada.
Comme je l’ai mentionné, les Nations unies ont des sources d’information provenant d’un vaste éventail de personnes, parce que les renseignements seront gardés confidentiels. Je pense que vous avez souligné une difficulté réelle, compte tenu de l’accès difficile des journalistes et des diplomates au Xinjiang. Oui, nous sommes certainement conscients du fait que certains résidents sont si préoccupés par l’ampleur de la surveillance qu’ils n’utilisent pas les applications qu’ils auraient eues sur leurs téléphones cellulaires personnels parce qu’ils craignent que cela les mette en danger, eux et leur famille.
J’ai une dernière question. Un témoin qui a assisté à une réunion précédente nous a montré une carte de l’endroit où la Chine développe l’initiative Une ceinture, une route. Il a dit que, dans beaucoup de régions où sera mise en place cette infrastructure, il y a des violations des droits de la personne et des actes de nettoyage ethnique. La région du Xinjiang est sur la trajectoire de cette infrastructure. Pensez-vous que c’est une des raisons pour lesquelles cette minorité ethnique est capturée et isolée?
Eh bien, nous avons certainement beaucoup entendu parler d’Une ceinture, une route. Je crois savoir qu’une portion au nord de ce projet passe par certaines régions du Xinjiang. Je pense que notre préoccupation n’est pas tellement liée à la région particulière où cette route nordique passerait, mais plutôt au traitement des minorités ouïghoures et des autres minorités musulmanes en Chine. Je n’établirais pas de liens précis entre nos préoccupations et le projet Une ceinture, une route. Je pense que c’est davantage un problème de non-respect des normes internationales en matière de droits de la personne.
Merci, madame la présidente.
Merci, madame Puxley.
J’aimerais vous demander très rapidement s’il y a des moyens par lesquels le Canada peut aider ou aide à protéger les droits des activistes ici au Canada qui sont harcelés par le gouvernement chinois.
Nous sommes bien entendu au courant de cas de harcèlement de Canadiens d’origine ouïghoure. Nous les encourageons à signaler ce genre de harcèlement aux autorités policières locales — qui sont également au courant de ce problème plus général — et à nous parler de ces problèmes lorsque nous les rencontrons.
Je pense qu’il est juste de dire que ce n’est pas la seule communauté au Canada qui s’inquiète à cet égard. C’est une question qui a été soulevée auprès des autorités chinoises dans le passé, et je m’attends à ce qu’elle le soit de nouveau.
Cependant, pour ceux qui se sentent ciblés de cette façon, le premier point de contact devrait évidemment être les services de police locaux.
Là encore, je pense qu’il y a des informations crédibles selon lesquelles beaucoup de gens perdent contact avec leur famille et leurs proches. Ils sont envoyés dans ces camps, qu’il s’agisse de camps d’éducation, de camps de détention, ou peu importe comment vous souhaitez les appeler.
Dans ma déclaration préliminaire, j’ai mentionné que nous savons que des Canadiens ont perdu le contact avec des membres de leur famille qui sont citoyens chinois en Chine. Je pense que c’est peut-être une préoccupation plus générale, en ce sens que le contact a aussi été perdu avec ceux qui sont retournés, par exemple, et ceux qui ont été refoulés en Thaïlande et en Turquie.
La réponse simple est oui, nous sommes au courant de ces informations. Je ne suis pas en mesure de les vérifier, mais elles sont évidemment préoccupantes.
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