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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 121 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 21 novembre 2024

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Français]

     Je déclare maintenant la séance ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 121e réunion du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.
    Je rappelle à ceux qui sont présents ici autour de la table de lire les avis écrits sur les cartons qui sont devant nous, pour éviter les accidents sonores qui pourraient blesser nos interprètes. Prenez soin de lire le petit carton et de respecter les consignes.
    Conformément à l'alinéa 108(3)f) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 29 avril 2024, nous allons poursuivre notre étude sur le continuum d'éducation dans la langue de la minorité.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui seront avec nous pendant la première heure, ce matin. M. Yvon Laberge, président et directeur général du Collège Éducacentre sera présent en mode virtuel.
    Soyez le bienvenu, monsieur Laberge.
    Les autres témoins représentent le Conseil scolaire du Nord‑Ouest. Il faudrait que vous me disiez de quel Nord‑Ouest il s'agit, parce que, dans ma petite province du Nouveau‑Brunswick, nous avons un Conseil scolaire du Nord‑Ouest, et elle se situe dans ma circonscription, Madawaska—Restigouche.
    Je pense qu'il s'agit ici du Conseil scolaire du Nord‑Ouest de l'Ontario. Nous avons Mme Sylvianne Maisonneuve.
    On me dit que ce n'est pas le Nord‑Ouest de l'Ontario, mais plutôt celui de l'Alberta. Je vous prie de m'excuser.
    En effet, je pense même que Mme Maisonneuve a déjà témoigné ici au Comité.
    Je crois qu'il n'y a pas d'interprétation.
    Il n'y a pas d'interprétation.
    Attendez un instant, on va vérifier cela.

[Traduction]

    J'avais la traduction.
    Je suis sur le canal anglais. Je ne l'entends pas.
    Ça y est.

[Français]

    Apparemment, il n'y a pas de problème.
    Quand je parle en français, entendez-vous l'interprétation? Il semble que oui.
    Le problème est réglé.
     Du Conseil scolaire du Nord‑Ouest, nous recevons donc la présidente, Mme Sylvianne Maisonneuve, et Mme Brigitte Kropielnicki, de la direction générale.
    Je souhaite la bienvenue à tout le monde. Vous participez à la réunion en mode virtuel.
    Pour ceux qui témoignent pour la première fois, je vais expliquer notre mode de fonctionnement. Chaque organisme dispose de cinq minutes pour faire une allocution, se présenter et nous dire quelles sont ses attentes. Par la suite, il y a des tours de questions de la part des députés des formations politiques. Ce sera une interaction sous forme de questions-réponses. Je vous guiderai à ce moment-là.
    Je suis très sévère pour ce qui est du temps. C'est ma tâche. Plus on est sévère à cet égard, plus on a l'occasion de poser des questions.
    J'accorde donc cinq minutes à chaque organisme pour son allocution; nous commencerons par M. Laberge, du Collègue Éducacentre.
    Monsieur Laberge, la parole est à vous. On vous écoute.
    Honorables membres du Comité, bonjour.
    Je suis heureux de me joindre à vous aujourd'hui pour discuter des questions touchant le postsecondaire en français dans les communautés francophones en situation minoritaire. Je parlerai principalement de l'objectif du financement de sources fédérales des institutions postsecondaires fournissant des services aux communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada. Mes observations se concentreront sur le contexte des minorités francophones en Colombie‑Britannique et sur le Collège Éducacentre.
    Le Collège Éducacentre, établi depuis 1992 en Colombie‑Britannique, se distingue en tant que seul collège francophone de la province. C'est un organisme de bienveillance et sans but lucratif dont le mandat est provincial. Depuis 2015, le Collège Éducacentre est reconnu comme collège privé par le Ministry of Advanced Education and Skills Training de la Colombie‑Britannique.
     Malgré nos demandes, le gouvernement provincial a refusé de nous accorder le statut de collège public. Or le statut privé du Collège Éducacentre le prive de certaines possibilités de financement au fédéral, comme le Fonds d'investissement stratégique pour les établissements postsecondaires.
    En 2023‑2024, le Collège Éducacentre a servi près de 3 000 personnes, tous programmes et services confondus, ce qui comprend 1 018 personnes inscrites au niveau collégial. Le Collège forme la grande majorité des éducateurs et des éducatrices d'expression française de la province. En septembre 2025, le Collège prévoit d'accueillir jusqu'à 25 étudiants internationaux, qui, nous le souhaitons, choisiront de rester dans la province après leurs études.
    Le financement du Collège Éducacentre reste le point crucial à résoudre. Pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2024, 87 % des fonds du Collège provenaient du gouvernement fédéral, et le reste venait des activités génératrices de revenus. Du budget global, 21 % des fonds proviennent du programme d'appui à l'enseignement dans la langue de la minorité. De ces fonds, 52 % sont octroyés pour financer les activités de base et le reste est octroyé pour financer des projets définis. Toutefois, le financement de base accordé au Collège est resté inchangé depuis 2014. Or le fait que le financement de base soit statique alors que le coût de la vie augmente entraîne plusieurs conséquences. En effet, l'écart grandissant entre les coûts de fonctionnement et le financement de base du Collège engendre un risque considérable pour son avenir, et l'impossibilité d'offrir des augmentations salariales complique le recrutement et la rétention des employés.
    Ce résumé nous amène à deux grands constats. Le premier est le désengagement financier de la province. Le deuxième est l'absence d'un financement fédéral pérennisé pour le postsecondaire. Ces deux facteurs sont des préoccupations majeures, car ils contribuent à la stagnation du financement de base du Collège. À notre avis, c'est la responsabilité du fédéral de veiller à ce que la province respecte son engagement de payer 50 % en contrepartie du financement fédéral en appui à l'enseignement dans la langue de la minorité. Si la province ne remplit pas son obligation, il revient au fédéral de prendre des mesures pour garantir que le financement nécessaire soit accordé au Collège. Cela pourrait comprendre des discussions avec la province ou même des mesures juridiques, si nécessaire.
    Pour ces raisons, nous vous présentons trois recommandations. D'abord, nous recommandons que le gouvernement du Canada rende permanente une enveloppe budgétaire pour soutenir les établissements postsecondaires des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il s'agit d'une mesure essentielle pour garantir un soutien continu et stable à ces établissements. Ce financement permanent leur permettrait de planifier à long terme, d'améliorer les conditions de travail de leurs employés et d'offrir des programmes de qualité.
    Ensuite, nous recommandons que le gouvernement du Canada démontre de la souplesse dans l'interprétation de ses paramètres de financement pour les institutions postsecondaires privées dans des provinces où le gouvernement provincial refuse de les reconnaître comme des établissements publics.
    Enfin, nous recommandons que le gouvernement du Canada prenne des mesures concrètes pour soutenir les étudiants de niveau postsecondaire des communautés de langue officielle en situation minoritaire dans les cas où les provinces ou les territoires ne remplissent pas leurs obligations financières. Si un gouvernement provincial ou territorial refuse de contribuer équitablement au financement des établissements postsecondaires, le gouvernement fédéral devrait envisager de combler directement le manque de financement.
    En intégrant ces recommandations dans vos efforts pour résoudre le défi du financement et de la stabilité, vous pourriez contribuer à renforcer la viabilité financière du Collège Éducacentre et à garantir qu'il puisse continuer d'exercer son rôle dans l'éducation postsecondaire en français en Colombie‑Britannique.
(1110)
    Je vous remercie de votre attention.
     Merci, monsieur Laberge.
    Je cède maintenant la parole à Mme Maisonneuve, du Conseil scolaire du Nord‑Ouest, pour cinq minutes.
     Monsieur le président, chers membres du Comité, bonjour.
    Je m'appelle Sylvianne Maisonneuve et je suis présidente du Conseil scolaire du Nord‑Ouest de l'Alberta, ou CSNO.
    Je vous remercie de m'offrir cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Je vais présenter les enjeux cruciaux pour assurer la pérennité de la langue française et de la culture francophone dans le Nord-Ouest.
    Le territoire du CSNO couvre tout le Nord‑Ouest de l'Alberta, de Slave Lake à la frontière de la Colombie-Britannique et jusqu'à la frontière des Territoires du Nord‑Ouest. Nous comptons actuellement trois écoles francophones, de la maternelle à la 12e année, accueillant environ 460 élèves.
    Tout d'abord, je vais aborder la question des centres de la petite enfance, ou CPE. Les CPE sont essentiels pour aider les parents à transmettre leur langue et leur culture et pour bien préparer les enfants à leur parcours scolaire. Le CSNO reconnaît depuis longtemps l'importance d'offrir ces services au sein de ses écoles. Nous exploitons trois CPE, soit une garderie, prématernelle et service de garde avant et après l'école à Grande Prairie, une garderie/prématernelle à Peace River et une prématernelle à Falher. À la demande de parents, nous entreprenons des démarches pour ouvrir une garderie francophone dans cette école aussi.
    Les parents de nos communautés se réjouissent de l'Accord entre le Canada et l'Alberta sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants à l'échelle du Canada, à 10 $ par jour, qui a eu un effet très positif dans notre région.
     Cependant, nous faisons face à deux défis majeurs dans le domaine de la petite enfance. Il y a d'abord le manque d'éducatrices francophones certifiées en petite enfance dans le Nord‑Ouest de l'Alberta. Dans la province, la certification des éducatrices relève du ministère des Services à l'enfance. Bien que ce ministère encourage les jeunes à poursuivre une carrière auprès de la petite enfance, il se fait très peu de promotion en français pour attirer la population francophone vers cette carrière.
    Le second défi est l'ajout d'espaces pour un CPE dans les projets de nouvelles constructions d'écoles. Le délai entre l'annonce d'une nouvelle construction par la province et l'approbation des projets par le fédéral pour les fonds complémentaires en infrastructure est trop long. Il en résulte une perte de temps pour l'équipe d'architectes et un manque d'occasions. Il devrait y avoir un processus plus fluide pour assurer une meilleure collaboration entre les deux gouvernements, afin d'éviter des délais ou de courir le risque de ne pas avoir d'espaces destinés à la petite enfance dans les écoles francophones en milieu minoritaire.
    Le CSNO bénéficie du programme des langues officielles en enseignement des écoles élémentaires et secondaires dans la langue de la minorité. Les quatre conseils scolaires francophones de l'Alberta collaborent avec le ministère de l'Éducation, et le CSNO s'en réjouit grandement. Cet appui financier permet au CSNO d'offrir à ses élèves et à ses enseignants des projets valorisant la langue et la culture dans nos écoles. Cependant, nous croyons que les fonds alloués à l'Alberta sont insuffisants pour répondre à la hausse remarquable du nombre d'ayants droit dans notre province. Le programme des langues officielles en enseignement est important pour nous puisque la programmation et la rétention des élèves au secondaire dans nos écoles demeurent un défi, surtout dans la communauté de Grande Prairie, où nous devons rivaliser avec des écoles d'immersion à une seule voie et à des programmes spécialisés.
    De plus, la pénurie d'enseignants francophones dans notre région existe depuis plusieurs années, mais nous avons constaté récemment une aggravation de la situation. Des postes d'enseignants restent vacants pendant plusieurs mois, voire une année scolaire entière, ce qui empêche nos élèves d'avoir accès à une éducation francophone réellement équivalente à celle qu'offrent les écoles anglophones. Une campagne nationale pour encourager les jeunes à poursuivre des études en éducation, ainsi que des bourses d'études pour les finissants œuvrant en milieu minoritaire en région rurale, pourraient être des pistes de solution.
    Le Programme de contestation judiciaire est essentiel pour permettre aux conseils scolaires de s'assurer que la province respecte ses responsabilités en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Par contre, le financement inadéquat de ce programme ne permet pas aux conseils scolaires de revendiquer efficacement le droit à l'éducation francophone des ayants droit.
    Les dernières données obtenues par le dénombrement des ayants droit ont été cruciales pour le CSNO dans ses démarches pour la création de nouvelles écoles et la modernisation des établissements existants. Il est essentiel de maintenir cette pratique, car l'absence de données empêche les provinces de bien saisir les besoins et les enjeux. Ces données nous ont permis de démontrer que de nombreux ayants droit sur notre territoire n'avaient pas accès à l'éducation francophone. Par exemple, à Grande Prairie, l'école Nouvelle Frontière, qui accueille 180 élèves de la maternelle à la 12e année, est située dans le Sud‑Ouest de la ville. Les données du dénombrement ont révélé que près de 500 enfants de parents ayants droit vivaient dans le secteur Nord de Grande Prairie, mais que moins de 50 enfants de ce secteur fréquentent l'école Nouvelle Frontière.
    Enfin, le financement de notre seule institution postsecondaire en situation minoritaire demeure un défi majeur dans notre province. Le Campus Saint‑Jean et le Centre collégial de l'Alberta ne peuvent pas, faute de soutien financier adéquat, offrir les programmes auxquels nos élèves devraient avoir accès. En Alberta, les élèves du secondaire de deuxième cycle ont la possibilité d'obtenir des crédits à double reconnaissance, c'est-à-dire des crédits de cours collégial et secondaire.
(1115)
     Malheureusement, nos élèves intéressés par divers métiers doivent suivre ces cours en anglais, car ils ne sont pas offerts en français. Par conséquent, nos élèves qui souhaitent obtenir ces crédits ne reçoivent pas une éducation secondaire en français.
    Je vous remercie beaucoup de votre écoute. Je suis disponible pour répondre à vos questions.
     Merci beaucoup, madame Maisonneuve.
    Pour le premier tour de questions et réponses, chaque formation politique disposera de six minutes. Nous commencerons par le Parti conservateur.
    Monsieur Godin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de nous permettre de devenir meilleurs en faisant une étude qui, je l'espère, répondra à leur réalité.
    Ma première question s'adressera à M. Laberge, du Collège Éducacentre.
    Monsieur Laberge, vous avez dit avoir présentement 1018 élèves inscrits pour l'année 2023‑2024. Est-ce exact?
     Oui, il y a 1018 inscriptions...
     D'accord. Monsieur Laberge, vous comprendrez que je n'ai que six minutes de temps de parole. Je vous serais reconnaissant de me répondre de façon succincte, pour que nous puissions approfondir davantage le sujet.
    Vous avez dit que vous prévoyiez accueillir 25 immigrants en janvier 2025. Est-ce exact?
     C'est exact.
    D'accord.
     Monsieur Laberge, quel est le taux d'occupation de votre école, actuellement?
    Il est de 110 %.
    Je comprends donc qu'il y a un débordement.
    C'est exact.
     Combien d'étudiants ont manifesté le désir d'étudier chez vous et ont vu leur demande refusée?
    Au niveau collégial, il n'y a pas de liste d'attente, mais dans d'autres programmes de formation linguistique, comme les programmes LINC et CLIC, il y a de longues listes d'attente.
     D'accord. Merci, monsieur Laberge.
    Vous avez aussi indiqué que le gouvernement provincial ne vous reconnaissait pas comme collège public.
    C'est exact.
    Quel effet cela a-t-il sur votre administration?
    Comme je l'ai souligné dans ma présentation, cela nous prive d'abord de l'accès à un financement de base adéquat. Un collège de notre taille devrait avoir un budget de base frôlant les 15 millions de dollars, mais nous avons un budget de 790 000 $.
    Vous en faites donc beaucoup avec peu.
    C'est exact. Nous devons nous fier à différents programmes de financement du gouvernement fédéral pour combler le vide.
     Comment le gouvernement provincial justifie-t-il son refus de vous reconnaître comme collège public?
(1120)
     C'est une bonne question.
    Merci.
    Je n'ai pas de réponse claire, mais je pense que cela a quelque chose à voir avec la place qu'occupent les francophones sur le plan démographique par rapport aux autres groupes.
    On ne reconnaît pas vraiment l'importance du français comme langue officielle, alors il se fie à d'autres...
    D'accord.
    Je vais vous poser une dernière question, monsieur Laberge, puis je vais me tourner vers les autres témoins.
    Le gouvernement provincial respecte-t-il la règle sur les ayants droit?
     Oui, mais la règle sur les ayants droit, c'est-à-dire l'article 23 de la Charte, ne s'applique pas au niveau postsecondaire, du moins pas encore.
     J'espère que notre rapport va changer cela.
    Merci, monsieur Laberge.
    Maintenant, je vais m'adresser aux gens de l'Alberta. Mesdames Maisonneuve et Kropielnicki, vous avez soulevé un problème majeur, soit le manque d'éducateurs et d'éducatrices.
    Pouvez-vous me dire comment se fait le recrutement de gens dévoués ayant la précieuse vocation d'enseignant, chez vous?
     Nous avons un problème à deux niveaux. Nous avons mentionné les éducatrices à la petite enfance, mais il y a aussi les enseignants brevetés.
    Pour ce qui est des éducatrices à la petite enfance, nous trouvons surtout nos candidates parmi les gens qui travaillent déjà dans nos écoles. Elles sont encouragées par leur communauté et leur famille à suivre une formation pour devenir éducatrices, mais il y a des barrières, puisque le centre collégial n'offre pas cette formation à distance. Ces éducatrices reçoivent donc une formation en anglais.
    Pour ce qui est des enseignants brevetés, je vais laisser la parole à la directrice générale, Mme Kropielnicki.
     Nous affichons nos postes d'enseignants dans toutes les régions canadiennes.
    Je vous donne un exemple. Il y a peut-être 10 ans, pour chaque poste, nous recevions une panoplie de CV. L'année passée, pour l'ensemble des postes, nous en avons reçu à peine trois.
     C'est vraiment un problème, madame Kropielnicki.
     Je vous remercie beaucoup.
     Vous avez parlé des ayants droit, et je suis obligé de dire que notre comité, à l'époque, en 2019, s'est battu pour que le recensement inclue un dénombrement des ayants droit. C'est donc un peu une victoire du Comité permanent des langues officielles, tous partis confondus. Il faut le reconnaître.
    Pourriez-vous me dire quelle clientèle vous avez présentement, comparativement au nombre d'ayants droit qui devraient avoir accès à l'école francophone et qui sont refusés?
    Avez-vous cette donnée, madame Maisonneuve ou madame Kropielnicki?
    Je laisse la parole à Mme Kropielnicki.
    Si vous ne l'avez pas, vous pourriez nous faire parvenir l'information par l'entremise de la greffière du Comité.
    Si j'ai bien compris la question, les ayants droit qui présentent une demande...
    Je voulais savoir si vous pouviez me donner le nombre d'ayants droit comparativement au nombre de personnes, actuellement, qui ont accès à une école francophone dans votre secteur.
    Nous pourrons y revenir parce que, présentement, vous avez dépassé vos six minutes.
     Le prochain intervenant est de la formation libérale.
    Monsieur Iacono, vous disposez de six minutes.
     Merci, monsieur le président.
     Je remercie les témoins d'être avec nous ce matin.
     Ma première question s'adresse à Mme Maisonneuve et à M. Laberge.
    À votre avis, les récentes modifications apportées à la Loi sur les langues officielles font-elles en sorte que les fonds transférés aux provinces et aux territoires pour l'éducation dans la langue de la minorité sont dirigés vers les conseils scolaires de la minorité? Est-ce bien le cas?
    Si je comprends bien, on parle des fonds attribués en grande partie par le programme de langues officielles en éducation. Comme je l'ai mentionné dans mon allocution, l'Alberta a connu, ces dernières années, une hausse incroyable du nombre d'ayants droit dans la province. Ce nombre a augmenté, mais le montant d'argent qui est versé à la province n'a pas suivi.
    On constate que le montant alloué est insuffisant. Après l'Ontario, l'Alberta est la province où il y a le plus grand nombre d'ayants droit à la scolarisation en français hors Québec. Il s'agit donc d'un défi majeur.
(1125)
     Merci.
    Monsieur Laberge, qu'en est-il chez vous?
    De mon côté, je ne peux pas parler au nom des commissions scolaires mais, au niveau postsecondaire ou collégial, en Colombie‑Britannique, notre établissement est le seul qui soit entièrement francophone. Au niveau universitaire, c'est le Bureau des affaires francophones et francophiles, ou BAFF, de l'Université Simon Fraser qui a la meilleure structure définie francophone.
    Cela dit, d'autres grandes universités qui reçoivent énormément d'argent du programme de langues officielles en éducation, ce qui nous prive de certains montants pour soutenir notre démarche, du moins au collège. Je connais très bien le directeur général du BAFF, M. Gino LeBlanc. Or il dit la même chose, à savoir qu'il aurait besoin de plus de ressources, alors qu'elles sont octroyées à de grands établissements anglophones.
    Merci.
    Monsieur Laberge, le Comité entend souvent parler de pénurie de la main-d'œuvre en éducation, qui semble être une grande préoccupation.
    Que fait votre établissement pour contrer cette pénurie?
    Par ailleurs, offrez-vous des incitatifs pour encourager l'inscription à vos programmes?
    Nous avons deux programmes ayant directement trait à l'éducation. Le premier porte justement sur l'éducation de la petite enfance et l'autre, sur l'aide pédagogique spécialisée. La majorité de nos inscriptions au niveau collégial se situent, comme je l'ai noté, dans le programme d'éducation de la petite enfance. Notre établissement est le seul qui peut offrir cette formation en français. C'est donc nous qui offrons la formation des éducatrices et éducateurs de la petite enfance en français dans la province.
    Pourriez-vous répéter la deuxième partie de votre question?
     Offrez-vous des incitatifs?
    Oui. Nous recevons du financement du ministère du Patrimoine canadien. Nous recevons un certain nombre de bourses pour des francophones et pour des jeunes qui sortent de l'immersion. Par contre, au niveau collégial, on remarque qu'on ne reçoit vraiment pas d'étudiants qui viennent des programmes d'immersion, parce que quand ils ont fait leur douzième année en immersion, ils s'orientent généralement vers des programmes universitaires. C'est la raison pour laquelle je disais qu'un peu de souplesse dans les enveloppes de financement serait utile. Par exemple, on pourrait nous permettre d'accorder à des étudiants en français langue première certaines bourses destinées à des étudiants en immersion pour le collégial.
     Merci, monsieur Laberge.
    Madame Maisonneuve, le Comité entend souvent des témoins dire que l'éloignement de l'école pose un problème important à de nombreuses familles.
    Pourriez-vous nous parler du territoire couvert par votre conseil scolaire?
    Les écoles sont-elles éparpillées ou sont-elles à proximité des lieux de résidence des membres de la communauté?
    C'est une bonne question.
    Notre territoire est immense. Il est situé dans le Nord de l'Alberta, et il est composé principalement de régions assez rurales. Nous avons trois écoles sur ce territoire, et elles se retrouvent dans trois villages ou villes.
    Bien entendu, il y a quand même des ayants droit à l'extérieur de ces centres. Selon les données que nous avons pu analyser, certains ayants droit, très au nord de la province, n'ont pas accès à l'éducation francophone. Il y en a aussi dans l'Ouest et dans le Sud-Ouest de notre territoire, dans la région de Slave Lake. C'est une population assez importante, mais qui est éparpillée partout sur notre territoire. Nous avons reçu des demandes que nous allons analyser prochainement, mais, encore là, certaines contraintes de financement rendent difficiles nos interventions.
    Merci, madame Maisonneuve.
    Merci, monsieur Iacono. Six minutes, c'est vite terminé.
    Les prochaines questions nous viendront du Bloc québécois, donc du deuxième vice-président du Comité permanent des langues officielles.
    Monsieur Beaulieu, vous avez la parole.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités d'être là.
    Tout d'abord, pour le Conseil scolaire du Nord‑Ouest, je reprendrai la question de mon collègue: quel est le nombre d'ayants droit en comparaison avec le nombre de places dans vos écoles?
(1130)
    C'est une bonne question technique.
    Je vais céder la parole à Mme Kropielnicki.
     D'accord.
    En ce moment, le CSNO compte 480 élèves inscrits. Selon les statistiques de 2021, nous aurions un potentiel de près de 2 000 élèves.
    D'accord.
    Pour continuer dans la même veine, hier, nous avons entendu un témoin qui a constaté que, dans sa région à lui — je pense qu'il est en Ontario —, beaucoup d'écoles acceptent bien des gens qui ne sont pas des ayants droit parce qu'elles manquent d'étudiants. Ainsi, afin de conserver leur enveloppe budgétaire, ils doivent accepter des anglophones, des gens qui ne connaissent pas le français.
    Est-ce le cas dans vos écoles aussi?
     Je dirais que non. Nous avons fait certaines exceptions, mais nous avons une directive administrative quant au pourcentage de cas que nous acceptons. Ce sont vraiment des exceptions. La grande majorité de nos étudiants sont des ayants droit.
    Je vais laisser Mme Kropielnicki poursuivre.
     Parmi ces exceptions, nous retrouvons les immigrants francophones qui n'ont pas encore la citoyenneté canadienne, mais qui sont issus de pays francophones. On les considère des exceptions, dans nos écoles.
     D'accord.
    Le conseil scolaire a-t-il le droit de désigner de nouveaux ayants droit?
    Je vous pose cette question parce que, avant-hier, nous avons compris que les conseils scolaires pouvaient accepter des gens qui ne sont pas des ayants droit et qui, dès lors, vont le devenir.
     Heureusement, comme la province nous accorde la pleine gestion de cette question, en effet, nous pouvons gérer le fait que les étudiants sont acceptés ou non.
    D'accord.
    C'est un détail, mais, plus tôt, vous avez dit que vous étiez, après l'Ontario, la province où il y avait le plus d'ayants droit.
    Y a-t-il plus d'ayants droit chez vous qu'au Nouveau‑Brunswick? Ce n'est pas très important, mais cela m'a étonné.
    Selon les données que j'ai eues, la réponse serait oui, mais Mme Kropielnicki a peut-être quelque chose à ajouter là-dessus.
     Je voulais dire à l'ouest de l'Ontario. Selon les statistiques, il y aurait 68 000 ayants droit dans la province.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Monsieur Laberge, si je comprends bien, le Collège Éducacentre est le seul collège francophone en Colombie‑Britannique. Il n'y a donc aucun collège public francophone en Colombie‑Britannique.
    C'est juste.
    De plus, il n'y a aucune université par et pour les francophones en Colombie‑Britannique.
    C'est juste. Comme je le disais, ce qui s'en rapprocherait le plus est le Bureau des affaires francophones et francophiles qui est rattaché à l'Université Simon Fraser. Dans les autres universités, il y a quelques personnes dans les facultés d'éducation ou de langues romanes.
     Dans le fond, un de vos principaux problèmes, c'est que vous n'êtes pas reconnu comme un collège public. C'est donc le manque de volonté politique de la part du gouvernement de la Colombie‑Britannique qui fait que vous ne pouvez pas prendre l'ampleur que vous devriez avoir.
    C'est exact.
    Les étudiants qui étudient à votre collège viennent-ils principalement des écoles françaises de la Colombie‑Britannique? Acceptez-vous aussi beaucoup d'anglophones ou de personnes n'étant pas des ayants droit?
     Dans les programmes collégiaux, les étudiants proviennent du conseil scolaire francophone ou sont issus de l'immigration récente. Ceux qui suivent des formations à notre collège peuvent avoir étudié une année au conseil scolaire ou aucune. La majorité de nos étudiants collégiaux ont, en moyenne, entre 32 et 34 ans. C'est donc une population étudiante plus âgée.
     Ils viennent chez vous pour refaire une formation.
     Oui.
    Si je comprends bien, il n'y a pas beaucoup d'anglophones qui fréquentent votre établissement d'enseignement.
(1135)
     Il n'y en a pas beaucoup dans les programmes collégiaux, mais nous offrons un programme de français langue seconde aux immigrants. Dans cette formation, il y a un mélange d'immigrants de différents pays.
    Aussi, pour le programme d'apprentissage de l'anglais pour les immigrants, appelé LINC, nous donnons la priorité aux francophones. Toutefois, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada nous encourage à accepter des étudiants non francophones, parce qu'il y a des listes d'attente importantes dans ce programme de formation.
     Diriez-vous que…
    Il ne vous reste que cinq secondes, monsieur Beaulieu.
    D'accord.
     Répondez-vous à la demande des écoles françaises ou manque-t-il beaucoup de places pour y répondre?
    Monsieur Laberge, veuillez répondre par un oui ou par un non.
     Non. Nous ne répondons pas à la demande.
    Merci, monsieur Laberge. Nous pourrons y revenir. Veuillez me pardonner.
    Pour le prochain tour de questions, je vais donner la parole à Mme Leila Dance, du NPD.

[Traduction]

    Madame Dance, tout d'abord, félicitations pour votre victoire.
    Elle est, je dirais, la plus jeune députée à la Chambre des communes.
    Félicitations.

[Français]

    Merci.
    Elle a gagné l'élection partielle de septembre dernier. Elle est la plus jeune députée à la Chambre des communes.

[Traduction]

    Bienvenue au Comité, madame Dance.
    Vous avez la parole pour six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je vais poser mes questions en anglais.

[Traduction]

    Je ne suis pas très bonne en français, pas encore.
    Je vais commencer par Mme Maisonneuve.
    Vous avez parlé de la grave pénurie de main-d'œuvre, y compris parmi les enseignants et le personnel de soutien de manière générale. Nous avons entendu parler du manque de formations postsecondaires offertes.
    Pensez-vous que si le gouvernement fédéral investissait plus dans l'éducation postsecondaire en français, il aiderait ainsi à résoudre certains des problèmes que vous observez dans votre domaine?
    C'est une question très valable et une solution très valable.
    Comme nous l'avons mentionné dans l'exposé, l'Alberta possède un système de crédits à double reconnaissance. Il serait certainement utile d'avoir de meilleurs programmes au secondaire. Nos élèves pourraient explorer une plus grande variété de carrières dans leur langue. Nous savons tous que lorsque les gens reçoivent une formation localement ou à proximité, ils sont plus susceptibles de rester. Ce serait donc certainement utile.
    Vous avez parlé un peu des cours en ligne et des cours virtuels.
    Je vais vous demander si vous pensez que ces cours permettraient aux gens de votre collectivité de suivre une formation. Je vais ensuite passer à M. Laberge et lui demander s'il a des cours en ligne qui pourraient être offerts.
    Oui, je pense que les cours en ligne seraient un excellent ajout. Notre région est plutôt éloignée et rurale. Nous sommes à cinq heures de route au nord d'Edmonton, la ville où se trouvent nos établissements d'enseignement postsecondaire francophones. De plus, certaines personnes font des études postsecondaires plus tard, à l'âge adulte, comme nous l'avons dit au sujet de nos éducatrices. Elles travaillent à temps plein.
    Il est grandement avantageux d'avoir accès à ces cours en ligne.
    Allez‑y, monsieur Laberge.
    Oui. Tous nos programmes collégiaux sont offerts en ligne, car la population francophone en Colombie-Britannique est très dispersée dans la province. Il n'y a pas d'enclaves ou de collectivités francophones, comme nous le voyons en Saskatchewan, en Alberta et au Manitoba. La population est vraiment répartie partout. L'enseignement à distance, c'est‑à‑dire les programmes collégiaux offerts en ligne, est notre gagne-pain.
    D'accord.
    Dans ma circonscription, Elmwood—Transcona, nous avons un bon nombre d'écoles d'immersion française. J'ai obtenu le diplôme d'une de ces écoles. Je sais toutefois qu'elles débordent maintenant d'étudiants. Certains n'obtiennent pas de place et n'ont pas la chance de les fréquenter. Nous avons une seule université francophone à Winnipeg, l'Université de Saint-Boniface. Une fois de plus, c'est un autre établissement qui doit refuser des étudiants à cause de l'accès limité.
    Je me demande si nous pouvons nous servir de ces cours d'une province à l'autre, si nous pouvons prendre des cours offerts en ligne à l'Université de Saint-Boniface et les offrir dans différentes régions rurales et éloignées, comme le disait Mme Maisonneuve.
    Savez-vous si certains membres de votre personnel ou d'autres personnes obtiennent un accès de cette façon?
(1140)
    Posez-vous la question à Mme Maisonneuve ou à moi?
    Oh, je suis désolée. Elle est pour Mme Maisonneuve.
    Je suis désolée. Je n'ai pas compris la question.
    Avez-vous quelqu'un qui accède à des services en ligne par l'entremise de l'Université de Saint-Boniface, qui est à Winnipeg, ou dans d'autres provinces?
    Pas à ma connaissance...
    Je vais permettre à Mme Kropielnicki de répondre à la question.
    Je crois qu'il y a des restrictions provinciales en matière de certification.
    Allez‑y.
    Non. Toutes nos éducatrices à la petite enfance suivent les cours en ligne avec des anglophones compte tenu de la certification du stage pratique.
    D'accord.
    Pensez-vous qu'il serait avantageux de faire quelque chose pour que ce soit offert partout au Canada, d'une province à l'autre?
    Ce serait formidable.
    C'est intéressant. J'apprends sur le tas. Merci beaucoup de vos réponses.
    Je sais que nous avons également parlé un peu des places en garderie.
    Je suis très fier de ce que le NPD a fait. Ma collègue, Leah Gazan, a présenté un amendement pour que les francophones en situation majoritaire aient accès à des services de garde en français.
    Je veux savoir si c'est quelque chose qui s'est révélée utile pour offrir une partie de ces services dans certaines écoles.
    Je pense que cette mesure est extrêmement utile. Comme nous le savons, l'intervention précoce est la clé de l'apprentissage d'une langue et du renforcement de la transmission d'une culture. Cela a vraiment changé la donne, comme je l'ai décrit plus tôt. Ces services n'existaient pas avant les services de garde à 10 $ par jour. Nous avons élaboré tous ces programmes au cours des dernières années, et la participation est bonne. Ils fonctionnent à plein régime et les parents les aiment beaucoup.
    C'est parfait. Merci beaucoup à vous deux.

[Français]

     Merci, mesdames Dance et Maisonneuve.
     Pour le prochain tour de questions, chacune des deux prochaines formations politiques disposera de cinq minutes
    Nous commençons par les conservateurs.
    Monsieur Dalton, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie beaucoup les témoins d'être ici avec nous, aujourd'hui.
    Madame Maisonneuve, j'ai beaucoup de famille dans votre région, de Grande Prairie jusqu'à Falher et Slave Lake. Il y a même des Maisonneuve qui y habitent. Nous avons peut-être des liens de parenté.
    Vous représentez un conseil scolaire francophone. J'ai lu un peu sur le Conseil scolaire du Nord‑Ouest. Je crois que vous desservez des écoles catholiques, n'est-ce pas?
     Notre conseil scolaire est composé de trois écoles; l'une est catholique et les deux autres sont publiques.
    D'accord. L'école catholique est-elle située à Falher? Où sont situées les écoles?
    L'école catholique est effectivement située à Falher. Pour ce qui est des deux écoles publiques, elles sont situées à Peace River et à Grande Prairie.
    D'accord.
    J'ai beaucoup de souvenirs de la région. Mon père était militaire. Je n'ai pas vécu dans la région, mais je l'ai souvent visitée dans les années 1960 et 1970. À l'époque, les familles étaient très grandes, et le français était parlé par tout le monde. Maintenant, les familles sont beaucoup plus petites, les fermes sont beaucoup plus grandes et moins de gens parlent français.
    Le nombre d'étudiants diminue-t-il à cause de la démographie ou ce nombre reste-t-il le même?
    Depuis l'époque que vous avez mentionnée, il y a certainement eu une diminution. Dans les dernières années, je crois que la population est restée assez stable, c'est-à-dire qu'elle n'a connu ni augmentation ni diminution. Aujourd'hui, il y a certainement beaucoup moins de gens dans les régions éloignées qu'il y en avait à une certaine époque.
    Y a-t-il de plus en plus d'enfants qui viennent de familles immigrantes?
(1145)
    Ce n'est certainement pas au même niveau que dans les villes, mais il y en a de plus en plus, surtout dans les centres plus urbains, comme Grande Prairie, où la population immigrante est assez importante.
    La grande majorité de l'argent vient-elle de la province? Le montant des subventions fédérales est-il important?
    Les subventions fédérales offertes dans le cadre du programme des langues officielles en enseignement nous permettent d'offrir des programmes que nous ne pourrions pas autrement offrir à nos élèves. Par exemple, il y a de l'animation culturelle dans toutes nos écoles, ce qui est important pour la solidification et l'acquisition de l'identité. Nous offrons aussi un cours de leadership, pour lequel l'étudiant obtient des crédits. Nous finançons la moitié du programme de maternelle, puisque la province en finance seulement la moitié. Nous offrons aussi du perfectionnement professionnel. Enfin, les subventions nous permettent de faire de la promotion et du marketing. Ces subventions sont…
    Je vous remercie. Excusez-moi de vous couper la parole, mais j'aimerais poser d'autres questions.
    Avez-vous des partenariats avec les écoles secondaires qui offrent l'immersion? Ces partenariats pourraient être en lien avec d'autres cours, des programmes ou des sports, entre autres.
    Cela n'arrive pas beaucoup, mais je vais laisser Mme Kropielnicki répondre à cette question.
    Il n'y a pas d'échanges de services entre les écoles d'immersion.
    Monsieur Laberge, vous avez dit que 87 % du financement provenaient du fédéral. Les étudiants paient-ils des frais de scolarité?
    Oui.
    Quel pourcentage du coût est-ce que ça représente?
     Je ne suis pas certain de bien comprendre votre question.
    Par exemple, pour un étudiant qui fréquente l'Université Simon Fraser, les frais de scolarité représentent environ un tiers du coût total. Dans votre établissement, combien cela représente-t-il, environ?
    C'est à peu près la même chose.
    D'accord.
    La porte du gouvernement provincial est-elle toujours fermée? Il s'agit d'un établissement privé, mais vous voudriez que ce soit un établissement public. Est-ce ce que vous désirez?
    C'est notre désir, oui.
    Personnellement, je suis en poste depuis 2010, et je fais cette demande chaque fois que je rencontre le gouvernement provincial, mais on me répond toujours non.
    Merci, messieurs Laberge et Dalton.
    Nous allons maintenant passer aux libéraux.
    Monsieur Serré, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Cela va nous aider à enrichir notre étude.
    Monsieur Laberge, nous avons fait une étude un peu plus approfondie sur l'éducation postsecondaire, au mois de mai, alors nous comprenons bien les défis que vous soulevez. Même si le gouvernement fédéral a prévu une enveloppe permanente de 80 millions de dollars, on n'est pas certain que cela suffise à répondre à vos besoins, si la province est complètement absente. Il ne fait aucun doute qu'il y a de grands problèmes, à l'échelle régionale, liés à la contribution des provinces.
     Cela dit, aujourd'hui, mes questions porteront davantage sur la petite enfance. Nous savons tous combien c'est important.
    Vous offrez actuellement un programme de formation pour l'éducation à la petite enfance. Combien d'étudiants êtes-vous capables d'accueillir, présentement? J'ai cru comprendre que vous n'avez pas assez de place pour en accueillir plus. Ensuite, quelle est la demande, dans la communauté? Tous les diplômés trouvent-ils un emploi immédiatement? Finalement, combien d'argent vous faudrait-il pour construire les infrastructures nécessaires et pour former plus de personnel éducatif pour la petite enfance?
    En ce qui concerne l'éducation à la petite enfance, je réitère que tous nos programmes collégiaux sont offerts à distance. La question de l'espace n'est donc pas un problème.
    Pour ce qui est de notre capacité à accueillir davantage d'étudiants, nous pourrions facilement doubler le nombre d'inscriptions, ce qui ne serait pas de trop, parce que nous pourrions ajouter quelques éducatrices ou éducateurs pour former les étudiants.
    En ce qui concerne notre budget de fonctionnement, l'an prochain, nous pourrions facilement absorber 1 million de dollars de plus en financement de base. Cela nous permettrait de solidifier nos activités.
    Enfin, du côté de l'infrastructure, nous avons différents projets en cours, dont un programme très technique que nous voulons offrir à Victoria. Pour celui-ci, nous aurions besoin d'environ 2,5 millions de dollars.
(1150)
     Merci, monsieur Laberge.
    Madame Maisonneuve, je vous remercie du travail que vous faites dans le domaine de la petite enfance et au sein du Conseil scolaire du Nord‑Ouest. J'ai moi-même été conseiller scolaire dans le Nord de l'Ontario, alors je comprends les défis liés à la distance, à la pénurie d'enseignants et au financement basé sur le nombre d'élèves, ce qui vous pénalise.
    J'aimerais aussi entendre ce que vous avez à dire concernant la formation de personnel éducatif pour la petite enfance. Quelle est votre capacité? Quels sont vos défis? Comment le gouvernement fédéral peut-il vous aider à avoir plus d'enseignants et à avoir plus d'élèves francophones dans les centres de la petite enfance?
     Ce n'est pas directement lié à votre question, mais je vais commencer par mentionner un défi que nous avons concernant les espaces. Nous pouvons accéder à des fonds fédéraux complémentaires pour des projets d'infrastructure, ce qui est fantastique pour les nouvelles constructions. Cependant, la communication entre les deux gouvernements manque de fluidité et leurs annonces ne sont pas toujours faites en même temps. De plus, lorsqu'il s'agit de bâtiments existants, on ne peut rien modifier ou ajouter, parce que ces fonds ne sont accordés que pour de nouvelles constructions.
     En ce qui concerne la formation d'éducatrices, je vais laisser Mme Kropielnicki vous répondre.
    Notre plus grand défi, en ce qui a trait au recrutement, ce sont les frais. La plupart de nos éducatrices sont des mères qui veulent suivre la formation, mais qui n'en ont pas nécessairement les moyens. Alors, en ce moment, le conseil scolaire subventionne certaines de nos éducatrices avec les fonds du programme des langues officielles en enseignement, mais ce n'est pas suffisant.
     Merci.
    Madame Maisonneuve, pouvez-vous transmettre au Comité un peu plus de détails et des exemples illustrant les défis auxquels vous êtes confrontés? Par exemple, vous avez parlé à deux reprises du manque de fluidité dans la collaboration entre les provinces et le gouvernement fédéral en matière de financement. Nous vous serions très reconnaissants de transmettre cela par écrit au Comité.
     Merci, monsieur Serré.
    Monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Laberge, vous avez dit tantôt que vous n'arriviez pas à fournir des services, que vous n'arriviez pas à satisfaire la demande pour ce qui est des finissants des écoles secondaires en Colombie‑Britannique. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Oui.
    L'un des défis est d'attirer les jeunes vers nos établissements, parce que nous n'avons que six programmes au niveau collégial. Nous venons donc répondre à un besoin limité à cet égard. Nous aimerions avoir plus de programmes.
    J'ai mentionné tantôt un projet d'infrastructure que nous voudrions mettre en œuvre à Victoria. Il s'agirait d'offrir un programme en Technologies sonores conjointement avec le Collège d'Alma. Ce projet requiert l'aménagement d'un studio et l'acquisition d'équipement pour les étudiants, et permettrait d'attirer une nouvelle clientèle. En effet, la majorité de notre clientèle, actuellement, est féminine, mais nous voudrions attirer davantage de gars. Le conseil scolaire a exprimé le souhait de faire une demande en ce sens.
    L'autre élément, c'est que nous avons créé un partenariat avec le Conseil scolaire francophone de la Colombie‑Britannique pour offrir des crédits à double reconnaissance, comme en Alberta. Cette initiative commence à prendre forme.
    Nous avons également commencé à offrir des cours en vue de l'obtention du diplôme Cornouiller pour adultes, conjointement avec le Conseil scolaire francophone de la Colombie‑Britannique. Le diplôme Cornouiller, c'est l'équivalent d'une douzième année de scolarité pour adultes. Des étudiants seraient plus aptes à venir au collège, mais ils doivent terminer leurs études secondaires avant de pouvoir s'inscrire dans nos programmes.
(1155)
    Quand on regarde l'ensemble de la situation, le fait qu'il n'y a aucun collège public et le fait que le gouvernement provincial s'entête à vous refuser le statut de collège public, il me semble que c'est scandaleux. Ne devrait-il pas y avoir une campagne pour dénoncer ce fait?
    Nous pourrions nous occuper un peu de cela, parce que ça n'a pas de bon sens.
     En effet.
    Veuillez répondre en dix secondes, monsieur Laberge.
     Je pense que je vais reporter ces dix secondes à une prochaine intervention.
    Votre réponse pourrait être longue, n'est-ce pas? Deux minutes et demie, ça passe vite.
    Merci beaucoup, monsieur Laberge.

[Traduction]

    Madame Dance, vous avez deux minutes et demie à votre disposition.
    Merci.
    J'aimerais revenir à la pénurie de main-d'œuvre qu'on observe surtout dans le Nord de l'Alberta. Je suis certaine que c'est exactement ce qui se produit d'un bout à l'autre du pays dans de nombreuses collectivités éloignées et rurales, et je suis sûre qu'on le voit également dans certains centres urbains. Nous manque‑t‑il des enseignants à un niveau précis? Est‑ce dans les services de garde ou bien à l'âge préscolaire ou scolaire?
    De plus, avez-vous des recommandations à propos de ce que le gouvernement pourrait faire précisément pour s'attaquer au problème, que ce soit grâce à une aide pour payer les frais de scolarité, améliorer l'accès au cours et ainsi de suite?
    Je pense qu'il manque de personnel partout.
    Je vais permettre à Mme Kropielnicki de répondre à la question.
    Oui, il manque de personnel partout. Dans le passé, c'était surtout dans les écoles secondaires, mais nous voyons maintenant une pénurie jusque dans les écoles primaires. Si les enseignants recevaient une bourse pour travailler dans des régions éloignées, comme les médecins, je crois que cet incitatif les encouragerait probablement à se rendre dans le Nord.
    Je veux juste ajouter que le principal problème que nous avons maintenant, c'est qu'une grande partie de nos étudiants sont issus de l'immigration et qu'ils ne veulent pas sortir des grandes villes. Beaucoup d'enseignants ne travaillent pas dans les grandes villes, mais ils font de la suppléance, et ils refusent de se rendre dans le Nord. Ils pourraient peut-être accepter si on les encourageait avec un peu d'argent.
    C'est très intéressant. Je n'avais même pas pensé à ce genre de choses.
    Il me reste 45 secondes. Voulez-vous ajouter quelque chose que vous n'avez pas eu la chance de dire dans vos réponses à toutes les questions? Vous pouvez en parler rapidement maintenant.
    Je veux juste parler rapidement d'un autre problème que nous avons. Si nous réussissons à attirer des travailleurs dans notre région, il y a également le problème du logement. C'est devenu un peu difficile. Certains conseils scolaires dans notre région possèdent leurs propres maisons et peuvent loger leurs employés, mais nous n'avons pas les moyens d'en faire autant.
    Parfait. Merci beaucoup.

[Français]

     Merci, madame Dance.
    Comme il reste un peu moins de deux minutes avant la fin de la première heure de la réunion, je vais profiter de mon privilège de président pour poser des questions.
    Monsieur Laberge, dans votre présentation, vous avez dit qu'à votre avis, le gouvernement fédéral devrait rendre permanentes des enveloppes budgétaires pour le postsecondaire. De plus, quand les provinces ne prennent pas leur responsabilité, le gouvernement fédéral devrait agir. C'est ce que j'ai compris.
    Quand vous utilisez les termes « à notre avis », est-ce parce que vous avez reçu un avis à cet effet?
    C'est notre analyse de la situation. Un précédent a été établi avec l'Université de l'Ontario français. Dans ce cas, le gouvernement fédéral a versé 100 % du montant avec l'intention que le gouvernement provincial investira plus tard dans le cycle quinquennal. Je pense qu'il est possible de faire quelque chose comme ça.
    Il faudrait qu'il y ait une…
    Monsieur Laberge, est-il possible de transmettre cette analyse au Comité? Je pose la question parce que cela rejoint un peu les questions de tout le monde, et certainement celles posées plus tôt par M. Beaulieu.
    Cette analyse peut-elle être rendue publique? Je ne veux pas vous forcer la main, mais c'est quelque chose qui pourrait être lu par les membres du Comité et qui pourrait faire partie de notre étude.
     Il faudrait que je la rédige. J'ai des bouts par-ci, par-là. Ce sont des arguments que nous utilisons dans notre stratégie de revendication auprès du ministère du Patrimoine canadien. Nous avons lancé cette stratégie seulement cet automne.
(1200)
     D'accord. En tout cas, si vous voulez soumettre un mémoire, sentez-vous libre de le faire et de le faire parvenir à la greffière, qui le distribuera aux membres du Comité. C'est vraiment important.
    J'ai une dernière question, en 30 secondes.
    Le Comité a souvent entendu par d'autres témoins, dans d'autres études qui ont été réalisées depuis que je suis membre, le genre de position que vous avez. Cela n'encourage-t-il pas le désengagement des provinces et des territoires du boulot qu'ils doivent faire? Cela semble si facile de dire que s'ils ne le font pas, le fédéral s'en chargera. N'est-ce pas un peu le signal qui serait envoyé aux provinces et aux territoires qui ne sont pas très disciplinés à l'égard des langues officielles?
     Vous avez entièrement raison dans cette réflexion. C'est pourquoi j'ai mentionné qu'il faudrait que le gouvernement fédéral examine la possibilité d'un recours juridique. Les provinces signent des ententes avec le fédéral dans le cadre des programmes de langues officielles en éducation. Si elles ne respectent pas les ententes, une mesure juridique devrait être employée.
     C'est un très bon point. Je vous laisse là-dessus, car j'ai pris plus de temps qu'il ne fallait pour poser mes questions.
    Monsieur Laberge, mesdames Kropielnicki et Maisonneuve, je vous remercie. Si vous avez de l'information supplémentaire que vous n'avez pas eu le temps de communiquer au Comité, n'hésitez pas à l'envoyer par écrit à la greffière, qui la transmettra à tous les membres du Comité.
    Nous allons maintenant prendre une pause pour accueillir notre prochain groupe de témoins.
(1200)

(1205)
    Nous reprenons la séance.
     Conformément à l'article 108(3)f) du Règlement et à la motion adoptée par le comité le 29 avril 2024, nous poursuivons notre étude sur le continuum en éducation dans la langue de la minorité.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui seront avec nous pour cette deuxième heure. Nous recevons une habituée, Mme Stéphanie Chouinard, professeure agrégée, qui témoigne par vidéoconférence à titre personnel. Nous recevons en personne M. Bourgeois, chercheur, également ici à titre personnel.
    Monsieur Bourgeois, je pense que c'est votre première fois au Comité permanent des langues officielles. Je vous souhaite la bienvenue.
     Vous avez chacun cinq minutes pour faire votre présentation. Nous sommes très sévères sur le temps alloué, car cela permet d'avoir plus de temps pour les questions. J'ai donc la difficile tâche d'arrêter toute personne qui dépasse son temps. Nous allons commencer avec M. Bourgeois pour les cinq premières minutes.
    Allez-y, monsieur Bourgeois.
     Bonjour, je vous remercie de l'invitation.

[Traduction]

    Savons-nous vraiment si la politique sur les langues officielles fonctionne bien? Dans l'affirmative, pourquoi, et dans quelle mesure? Pouvons-nous le prouver?
    Que ferions-nous si nous pouvions prouver que la présence d'une école peut garantir pendant 80 ans la survie d'une communauté minoritaire francophone et que l'absence d'une école mènerait à la disparition dans 40 ans? Financerions-nous le développement de la petite enfance et l'employabilité différemment si nous savions que la première option serait 10 fois plus profitable que la deuxième pour assurer la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire? Si nous pouvions prouver que l'éducation est l'outil le plus important à cette fin, ne devrions-nous pas accorder un financement adéquat avant de dépenser l'argent ailleurs? Dans l'affirmative, les parlementaires accepteraient-ils de modifier le financement public en conséquence? Les gouvernements s'opposeraient-ils fermement aux groupes directement concernés?
    Je ne sais pas, mais il incombe aux parlementaires d'évaluer les résultats des politiques, des programmes et des investissements publics dans les langues officielles. C'est nécessaire pour renforcer l'efficacité et l'efficience ainsi que la responsabilité démocratique.
    Pour effectuer une telle évaluation, nous devons d'abord établir des objectifs précis à atteindre. S'agit‑il de l'égalité, de l'équivalence, de la progression et de la vitalité? On s'est servi de tous ces objectifs, et ils présentent tous des problèmes.
    Je propose plutôt la viabilité. C'est plus ambitieux et mesurable, et cela cadre mieux avec la théorie de l'être, qui reflète mieux la réalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Peu importe l'objectif retenu, nous devons cerner toutes les interventions potentielles et surtout déterminer l'importance relative de chacune d'elles. L'éducation et le développement de la petite enfance sont des secteurs qui méritent certainement un soutien public. Ils doivent donc être financés en conséquence. Ces activités de base reçoivent actuellement la majorité des fonds consacrés aux langues officielles, mais il faudrait peut-être les financer encore davantage et, au besoin, aux dépens d'autres secteurs.
    Après avoir cerner les objectifs précis et les meilleurs moyens de les atteindre, nous devons adopter un plan stratégique tripartite national cohérent pour soutenir l'éducation des minorités, c'est‑à‑dire: un plan pour faire en sorte que les commissions scolaires des minorités remplissent leur double mandat; un plan qui est stratégique, ce qui signifie que les priorités fondées sur des données probantes arrivent en premier; un plan qui est cohérent, de sorte que les investissements visent à maximiser les résultats; un plan qui intègre et synergise les mesures fédérales, provinciales, territoriales et communautaires; un plan qui encadre des mesures qui durent plus de cinq ans; et un plan qui évalue et met à jour les moyens déployés. Il existe déjà beaucoup de plans semblables, et il n'est donc pas nécessaire de partir de zéro. Il faut toutefois les revoir à la lumière des objectifs à long terme et du point de vue des minorités.
    Puisque votre mandat consiste à étudier le continuum de l'enseignement en français langue première dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire et à faire part de vos conclusions et de vos recommandations à la Chambre, j'ai essayé de me mettre à votre place. J'ai écrit mes réflexions sous forme de conclusions et de recommandations pour que vous puissiez les examiner.
    Au‑delà de l'adoption et de la mise en œuvre complète d'un plan national cohérent pour soutenir l'enseignement dans la langue de la minorité, je vous présente cinq autres recommandations. Il faut reconnaître et prioriser l'éducation comme le plus important outil public d'appui à la transmission intergénérationnelle de la langue et de la culture. Il faut appuyer les familles en situation minoritaire dans leurs efforts pour transmettre la langue et la culture à leurs enfants, notamment pendant la petite enfance et à l'âge scolaire. Il faut appuyer les centres de la petite enfance et les services de garde en milieu minoritaire à la hauteur de leur importance, de manière semblable à ce que nous faisons pour les écoles des minorités. Il faut également appuyer les conseils scolaires minoritaires dans leurs efforts servant à contribuer à la construction identitaire des élèves et à la viabilité de la communauté. Enfin, il faut accorder aux conseils scolaires la pleine gestion scolaire promise par l'article 23 et les soutenir pour que cette gestion soit effectuée à bon escient.
    Bref, si nous n'assurons pas le succès du système d'éducation et du réseau de la petite enfance dans la langue de la minorité — les activités de base —, toutes les autres mesures prises ne serviront à rien.
    Merci de votre attention. Je vais faire de mon mieux pour répondre à vos questions.
(1210)

[Français]

     Merci, monsieur Bourgeois.
    Madame Chouinard, la parole est à vous pour cinq minutes.
    Chers membres du Comité, je vous remercie de me recevoir encore une fois aujourd'hui pour parler du continuum en éducation dans la langue de la minorité.
     Mes propos d'aujourd'hui peuvent se résumer en une seule phrase: tant que le continuum en éducation ne sera pas complet et qu'un accès à une éducation de qualité égale, géré par et pour nos communautés, ne sera pas disponible, la vitalité des communautés demeurera précaire.
    Ce continuum en éducation est désormais mentionné explicitement dans la Loi sur les langues officielles, mais, avant même que cette avancée ne soit accomplie, il était déjà clair que tant que tous les morceaux du casse-tête, de la petite enfance à l'éducation postsecondaire, n'étaient pas en place, des lacunes troublantes allaient continuer de se révéler dans l'éducation primaire et secondaire, pourtant protégées par la Charte.
    Laissez-moi commencer par le commencement, soit la petite enfance.
     La première attaque directe contre la vitalité de nos communautés dans le domaine de l'éducation, c'est de constater que, pour chaque place disponible dans une garderie francophone à l'extérieur du Québec, il y a quatre autres enfants qui, eux, demeurent sans place et qui finissent vraisemblablement dans une garderie de langue anglaise. Ces quatre enfants n'arriveront pas, à moins d'efforts herculéens de la part de leurs familles — dont bon nombre sont exogames, il faut le reconnaître —, à la maternelle avec les mêmes compétences langagières et culturelles que les petits inscrits aux garderies francophones. On met donc sur les épaules de nos écoles primaires, qui ont déjà le double mandat de respecter les objectifs du curriculum provincial et d'agir comme passeurs culturels en situation minoritaire, le fardeau supplémentaire de franciser les petits francophones. C'est injustement lourd comme tâche et c'est d'autant plus difficile que nos écoles souffrent d'une pénurie profonde de personnel qualifié, ce qui m'amènera dans un moment à l'autre bout du continuum.
    Même si l'on a réussi, à l'arraché, à faire inclure dans la nouvelle Loi sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada une protection du financement dédié aux communautés de langue officielle en situation minoritaire, cela ne va pas assez loin. Des clauses linguistiques sont absolument nécessaires pour assurer que les provinces vont investir la juste part du financement provenant du fédéral au service de nos communautés. Des consultations avec les communautés doivent également faire partie des négociations de ces ententes, afin d'assurer que leurs priorités sont prises en compte. L'historique du financement des programmes de langue officielle en éducation nous démontre depuis longtemps que l'on ne peut pas faire confiance aux provinces pour dépenser l'argent qui leur est transféré là où elles le devraient et de façon à satisfaire les besoins de la communauté. Il serait naïf, pour utiliser un euphémisme, de s'attendre à ce qu'elles agissent différemment en petite enfance.
     Passons maintenant au fait que le continuum en éducation n'est pas complet dans le domaine postsecondaire. Cette situation nourrit évidemment la pénurie de personnel dans nos écoles, mettant en péril la qualité de l'éducation qui y est prodiguée. Mais il y a encore pire. Les élèves qui n'ont pas d'option pour poursuivre leur éducation en français après l'école secondaire près de chez eux — dans un rayon d'environ 80 km selon les études  — désertent les écoles françaises à partir de la septième année, et ce phénomène s'accélère jusqu'aux dernières années du secondaire au profit des écoles de la majorité. Une étude de feu le Commissariat aux services en français de l'Ontario, en date de 2016, révèle que dans certaines régions très minoritaires, comme le sud de l'Ontario, c'est près du deux tiers des élèves inscrits aux écoles de la minorité qui auront quitté le système francophone au profit des écoles anglophones avant d'avoir obtenu leur diplôme d'études secondaires.
    Pourquoi cet exode? Les élèves — et leurs parents — veulent s'assurer d'avoir un niveau d'anglais assez fort pour être en mesure de poursuivre des études collégiales ou universitaires dans cette langue. Pour le dire plus clairement, l'absence d'options d'éducation postsecondaire en français vide nos écoles secondaires. Ce phénomène est d'autant plus alarmant que l'on sait que c'est à l'âge de l'adolescence et de jeune adulte que se cristallise l'identité d'un individu. C'est donc dire que l'on perd ces jeunes au profit des écoles anglaises au moment même où tout le travail de construction identitaire effectué depuis la petite enfance commence à porter des fruits.
    Je vous ai déjà récemment parlé des défis propres aux institutions postsecondaires francophones en situation minoritaire et au domaine de la recherche, donc je ne m'attarderai pas aujourd'hui sur ce sujet, mais si vous avez des questions, évidemment, n'hésitez pas à me les poser.
    En conclusion, hors d'une complétion du continuum en éducation, il n'y aura point de salut pour les francophones en situation minoritaire. Il est plus que temps que des gestes concrets soient posés en ce sens. J'espère que mes propos ont pu aider à éclairer l'ampleur du travail à abattre.
    Je vous remercie, et au plaisir de poursuivre la discussion.
(1215)
     Merci, madame Chouinard. C'était on ne peut plus clair.
    Nous allons commencer la première ronde de questions de six minutes chacune de la part de chacune des formations politiques. On commence par les conservateurs.
    Monsieur Généreux, la parole est à vous pour six minutes.
    Je remercie les témoins d'être là. Leurs propos sont très intéressants.
    Madame Chouinard et monsieur Bourgeois, j'ai l'impression qu'au Canada, on vit un paradoxe actuellement. En effet, les écoles d'immersion sont débordées par la demande. Des parents doivent faire la file pendant 24 heures pour être capables d'inscrire leurs enfants à l'école d'immersion, particulièrement dans l'Ouest canadien. On a été témoin de cela. D'ailleurs, ma sœur a enseigné dans une école d'immersion. C'est le contraire des commissions scolaires francophones, qui manquent de financement de façon systémique, pratiquement, et ne sont pas capables de combler les besoins.
    De plus, comme vous l'avez évoqué, madame Chouinard, si on éduque des enfants en français dès la maternelle, peut-être qu'un jour, ils vont vouloir enseigner en français, et la roue va continuer de tourner. Est-ce que vous y voyez un paradoxe?
    Mon autre question, en lien avec la première, concerne le financement. Évidemment, ce n'est pas juste une question d'argent. C'est aussi une question identitaire. Toutefois, on a entendu dire à plusieurs reprises par le passé que des fonds partaient du fédéral pour aller vers les provinces dans le cadre d'ententes, mais que la reddition de comptes n'était pas au rendez-vous. Il arrive donc que les fonds envoyés par le fédéral aux provinces pour permettre le continuum en éducation ne soient pas octroyés par les provinces selon les modalités de l'entente, ou que le fédéral ne soit pas en mesure de vérifier qu'ils le sont véritablement.
    Monsieur Bourgeois, est-ce que vous considérez que la reddition de comptes est un véritable problème dans le cadre de ces ententes?
     Je ne suis pas certain d'avoir compris votre question par rapport au paradoxe entre les écoles d'immersion et les écoles francophones. Si vous la posez de nouveau, je pourrai peut-être y répondre avec plus de sagesse.
    En ce qui concerne la reddition de comptes, la Constitution dit que l'éducation relève de la compétence des provinces et des territoires. Toutefois, le fédéral intervient. Il est difficile d'imaginer le système d'éducation en français en milieu minoritaire sans contribution du fédéral. Il est sûr que les provinces résistent, parce qu'elles considèrent l'éducation comme leur domaine, à juste titre. Toutefois, comme je l'ai indiqué à la fin de mon petit document d'accompagnement de quatre pages, si on a des valeurs fondamentales, comme la protection des minorités, et si on a l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, que les provinces ont signée, il faut avoir le courage de ses convictions et investir en conséquence. Dans ma présentation orale, j'ai essayé de dire que si on n'assurait pas le succès du système d'éducation et du système de la petite enfance, tous les autres efforts ne serviraient à rien ou, à tout le moins, ne seraient pas aussi efficaces.
     Madame Chouinard, j'aimerais également connaître votre avis.
    Dans le cadre des ententes bilatérales entre le fédéral et les provinces pour l'éducation dans la langue de la minorité, que vous connaissez très bien, il y a toujours trois volets de financement. Le premier concerne ce qu'on appelle le français fondamental, du financement qui doit, selon les ententes avec les provinces, s'ajouter au financement de base que les provinces sont déjà censées octroyer pour leur curriculum. Ensuite, il y a le volet du financement pour l'immersion et, finalement, celui du financement pour les écoles de la minorité linguistique. Or, dans de nombreuses provinces, on constate sur le terrain que la proportion du financement octroyé par les provinces aux écoles de la minorité linguistique n'est même pas près d'être égale à la proportion des élèves qui se trouvent dans ces écoles. Donc, il y a un désavantage systématique pour ces élèves.
    D'ailleurs, dans ma province d'origine, à Terre‑Neuve‑et‑Labrador, il y a, si je ne m'abuse, une cause qui est en train de cheminer devant les tribunaux, parce que la Fédération des francophones de Terre‑Neuve et du Labrador s'est fâchée par rapport à cette question.
    Le reste du financement fédéral, une fois qu'il entre dans le système scolaire provincial, se perd dans la nature. On constate que ce financement finit par être utilisé comme du financement de base plutôt que comme du financement supplémentaire, alors que les provinces sont censées l'ajouter au financement qu'elles octroient déjà elles-mêmes à leur système scolaire provincial. Donc, si les provinces étaient honnêtes dans la façon dont elles utilisent le financement provenant du gouvernement fédéral, peut-être qu'on aurait un moins grand problème en ce qui concerne, par exemple, les listes d'attente dans les programmes d'immersion, que vous avez mentionnées et qui, effectivement, débordent un peu partout.
(1220)
     En fait, monsieur Bourgeois, ma question relative à l'immersion était liée au fait qu'il y a un débordement, dans la mesure où il y a une grande demande. La volonté des anglophones d'envoyer leurs enfants dans les écoles d'immersion est bel et bien présente.
    Cependant, y a-t-il un lien à faire avec le fait que, encore une fois, les sommes d'argent du fédéral dirigées vers les provinces finissent par disparaître? Quand il est question de reddition de comptes, on nous dit souvent, et ce, depuis plusieurs années, que des sommes disparaissent, littéralement, et Mme Chouinard vient d'ailleurs de le répéter.
    Dans le cadre des ententes, devrait-il avoir une obligation de rendre des comptes pour indiquer où sont versées les sommes d'argent?
    Veuillez répondre en 15 secondes.
    Je pense que la réponse est oui. Il y a un problème, un enjeu, une difficulté. La plupart des provinces ne rendent même pas compte de leurs dépenses aux conseils scolaires minoritaires, sans parler du fédéral.
    Merci, monsieur Bourgeois.
    Nous poursuivons avec le deuxième tour de questions et nous commençons par les libéraux.
    Monsieur Iacono, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres ce matin.
    Monsieur Bourgeois, la pénurie de main-d'œuvre en éducation est souvent une grande préoccupation pour notre comité. Que fait votre établissement pour contrer cette pénurie? Offrez-vous des incitatifs pour encourager l'inscription dans vos programmes?
    Je ne représente pas un établissement scolaire. Je suis un chercheur autonome.
     Excusez-moi.
    Madame Chouinard, vous êtes une ardente défenseure des communautés de langue officielle en situation minoritaire. D'ailleurs, vous avez énormément écrit sur le sujet et vous vivez ouvertement votre francophonie. Nous vous demandons souvent votre avis professionnel sur des sujets variés qui touchent la francophonie.
    Aujourd'hui, j'aimerais que vous nous parliez de votre parcours en tant que mère d'une jeune fille.
    J'ai un fils.
    D'accord. Excusez-moi.
    Vous habitez dans une ville anglophone, et votre fils atteindra bientôt l'âge préscolaire pour commencer à fréquenter les services de garde. Pourriez-vous nous parler de votre parcours pour trouver un service de garde francophone?
    D'accord. Je vais vous donner des dates pour vous situer.
    Le 24 décembre 2021, mon conjoint et moi, qui vivons à Toronto, apprenions que nous attendions un enfant. Le 26 décembre, nous avons inscrit notre futur enfant sur la liste d'attente des deux garderies francophones de notre quartier. J'aurais pu difficilement être plus rapide. Notre fils est né en septembre 2022, et je suis retournée au travail le 1er juillet 2023. Cependant, mon fils n'a obtenu une place dans une garderie francophone que le 1er juillet 2024. Il a donc été sur la liste d'attente de cette garderie pendant au-delà d'un an à partir de la fin de mon congé de maternité. Durant cette année-là, à mon grand désarroi, notre famille a donc fait partie des familles dont 4 enfants sur 5 n'avaient pas de place dans une garderie francophone. Je pensais avoir fait tout mon possible pour éviter une telle situation. J'étais extrêmement désespérée.
    Dans le cadre de votre étude, vous avez entendu un peu plus tôt de la part d'autres témoins qu'à l'Île‑du‑Prince‑Édouard, 150 enfants francophones attendent une place dans les garderies de la province. Dans notre quartier, il y en a au moins 150 qui sont dans la même situation. Je ne cherche pas à entrer en compétition, mais je veux simplement vous donner une idée de l'ampleur de la demande à laquelle on pourrait répondre s'il y avait plus de places.
(1225)
    Permettez-moi de vous poser une question avant que vous continuiez à nous raconter votre histoire.
    Vous parlez de ces 150 enfants, mais est-ce que le problème est lié à l'emplacement? Ce problème existe-t-il depuis les deux ou trois dernières années, ou est-ce un problème qui existe depuis plus de 10 ans? Pourriez-vous nous confirmer que ce problème existe depuis plus de 10 ans et qu'aucun gouvernement provincial ou fédéral n'y a jamais porté attention?
    Il est impossible que ce problème ait commencé à prendre de l'ampleur, tout d'un coup, depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux en 2015.
     En 2015, j'étais encore au doctorat et je n'étais pas tout à fait prête à avoir des enfants. Je ne peux donc pas vous répondre.
     Cependant, le problème existait, n'est-ce pas?
     Je ne sais pas quelle était l'ampleur du problème à l'époque, mais je serais prête à vous dire que cet enjeu existait effectivement à ce moment-là. Le problème s'est aggravé récemment, notamment en raison de la popularité des services de garde. Depuis les derniers mois et les quelques dernières années, le coût des places en garderie est beaucoup plus bas, en raison des investissements et des ententes conclues entre le gouvernent fédéral et les provinces. Dans certaines familles, un parent restait à la maison parce que le coût des places en garderie était trop élevé. Ce parent considère maintenant la possibilité de retourner sur le marché du travail parce que, sur le plan économique, il est sensé pour lui de le faire.
     Vous me dites qu'un élément positif apporté par notre gouvernement s'est révélé un peu négatif.
    C'est exactement ça. De toute évidence, aucun parent ne se plaint des coûts beaucoup plus abordables des services de garde aujourd'hui, mais on constate maintenant que la baisse de ces coûts a entraîné une augmentation de la demande. Je pense qu'on aurait pu prédire ce phénomène, mais il était peut-être difficile à évaluer à ce moment-là. En fait, les éducatrices nous disent que les listes d'attente ont grandement augmenté depuis la baisse du coût d'inscription.
    Lorsqu'on examine ce qu'il est possible de faire dans les garderies sur le plan financier, on remarque que les places pour poupons sont les plus difficiles à financer parce que, en fait, les garderies perdent de l'argent sur ces places. Pourtant, ces dernières servent de point de départ pour les tout-petits dans le système de la petite enfance. Le conseil d'administration de la garderie fréquentée par mon fils opine dans ce sens.
     Merci, madame Chouinard. Vous pourrez intervenir plus tard lorsque d'autres questions viendront, mais nous avons largement dépassé la période de six minutes.
    Monsieur le deuxième vice-président de ce comité, monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités d'être des nôtres.
    On a deux invités qui sont des chercheurs. M. Bourgeois a parlé de l'efficacité de la politique linguistique fédérale et de la façon de l'évaluer. Dans les faits, si on examine la Loi sur les langues officielles depuis qu'elle existe en 1969, on peut se demander si elle est un échec ou une réussite.
    Le taux d'assimilation des francophones augmente continuellement depuis 1969, et c'est très évident hors Québec. Au Québec, il y a eu des progrès malgré la Constitution qui lui a été imposée. C'est au Québec qu'on retrouve 90 % des francophones du pays. Les Québécois ne sont pas reconnus comme une minorité, même s'ils le sont au Canada.
    De plus, la Loi sur les langues officielles ne vise qu'à renforcer l'anglais au Québec. On pensait que la nouvelle mouture de la Loi apporterait peut-être un changement, mais, de toute évidence, ce n'est pas le cas. Elle ne contient aucune mesure pour le français au Québec. On constate que le gouvernement fédéral saupoudre des subventions aux francophones hors Québec pour leur système d'éducation. On a eu des témoignages concernant le système d'éducation et il y a beaucoup de cas où le financement est insuffisant pour les niveaux préscolaire et scolaire. Un témoin nous a dit tantôt qu'il n'y avait ni collège public francophone ni université par et pour les francophones en Colombie-Britannique.
    Au bout du compte, la finalité de la politique linguistique fédérale n'est-elle pas d'assimiler les francophones tranquillement, pas vite, et de les laisser s'assimiler? Au Québec, là où il aurait des chances de pérennité, on intervient pour affaiblir le français afin de renforcer l'anglais.
    J'aimerais le point de vue des deux témoins à ce sujet.
(1230)
    Plusieurs Québécois ont avancé cet argument depuis la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme dans les années 1960. À la suite de cela, on a plutôt abandonné le biculturalisme en faveur d'une politique sur le bilinguisme et sur le multiculturalisme.
    Comme chercheur, cependant, je n'ai jamais lu quelque chose qui confirmait que le fédéral visait l'assimilation, goutte par goutte, de la minorité. C'est votre opinion. Je la laisse là.
     D'accord.
    C'est une question qui a été soulevée avant l'adoption de la Loi sur les langues officielles, mais après son adoption aussi. Il y a souvent eu des critiques à cet effet.
    Madame Chouinard, qu'en pensez-vous?
    Bonjour, monsieur Beaulieu.
    L'étude d'aujourd'hui porte sur le continuum en éducation. Je pense qu'il est important de rappeler que, selon l'article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867, l'éducation est un domaine de compétence provinciale. La question constitue un nœud gordien. Nous en avons parlé au sujet de l'éducation postsecondaire, et nous en parlons encore aujourd'hui.
    Le gouvernement fédéral effectue des investissements. Est-ce trop peu? On peut certainement en discuter. Personnellement, j'aimerais bien qu'il y en ait plus, mais le nerf de la guerre est réellement de s'assurer que, lorsque ces fonds se retrouvent dans les budgets provinciaux, ils sont dépensés là où ils devraient l'être. Ça, ça peut être fait grâce à des clauses linguistiques, qui devraient être imposées aux provinces, notamment pour s'assurer aussi que le financement est investi là où c'est nécessaire pour les communautés et qu'il répond aux besoins et priorités des communautés.
    Je pense que la seule province où le financement d'une communauté linguistique en situation minoritaire est assuré est le Québec. La communauté anglophone du Québec est considérée comme minoritaire dans l'optique fédérale, et elle est certainement une minorité numérique au Québec, même si elle fait partie de la majorité anglophone canadienne. Cette communauté est bien financée, et je dirais même que son financement est supérieur à la proportion d'anglophones, que ce soit au préscolaire, au primaire ou au postsecondaire. Dans cette province, le fédéral n'intervient que pour renforcer l'anglais. Si on affaiblit les pouvoirs du Québec, si le gouvernement fédéral s'ingère davantage au Québec, on pourrait penser que ce sera encore plus préjudiciable pour l'avenir du français au Québec.
    N'y aurait-il alors pas lieu vraiment d'intervenir différemment?
    Monsieur Beaulieu, pour la première fois de l'histoire, la nouvelle Loi sur les langues officielles énonce très explicitement que la langue de la minorité au Canada est la langue française.
    Je pense que le gouvernement fédéral s'est donné un outil très clair pour s'assurer précisément que ce déséquilibre est renversé. Maintenant, c'est le moment de mettre en œuvre cette belle loi, qui date de l'année dernière.
    Merci.
    Cependant, si on regarde le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028: Protection-promotion-collaboration, rien n'a changé. Tout le financement au Québec va pour l'anglais. La nouvelle Loi dit une chose et son contraire. On y admet que les francophones, y compris ceux du Québec, font partie d'une minorité, mais on continue à parler des anglophones du Québec comme d'une minorité. Ce que l'on voit finalement, c'est que cette ambiguïté semble servir à pérenniser le même vieux système qu'avant.
    Vous avez 15 secondes, madame Chouinard.
    Monsieur Beaulieu, je pense qu'il y a un désaccord entre vous et moi sur la façon de voir les choses.
    J'espère cependant que la situation va changer, mais elle n'a pas changé encore.
     Merci beaucoup, monsieur Beaulieu.

[Traduction]

    Madame Dance, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup.
    Je suis nouvelle au Comité, et j'essaie de comprendre certaines choses. En tant que chercheurs, j'espère que vous pouvez me donner de l'information pour me permettre de mieux comprendre ce que nous examinons.
    Ce que je vois, c'est que les provinces et les territoires doivent verser une indemnité journalière pour chaque élève, n'est‑ce pas? Parlons-nous du gouvernement fédéral qui donne de l'argent aux provinces en fonction du nombre d'élèves de manière générale?
(1235)
    Cela varie d'une province à l'autre. J'ai fait de la recherche pour la Fédération nationale des conseils scolaires francophones en 2014. Certaines provinces ont beaucoup d'argent pour chaque élève. Certaines en ont beaucoup moins. Cela dépend.
    À vrai dire, la tendance, c'est que plus il y a d'élèves — au Nouveau-Brunswick et en Ontario, par exemple —, moins il y a d'argent par élève.
    Avez-vous comparé les élèves anglophones aux élèves francophones? Une fois l'argent remis aux provinces, lorsqu'on commence à le diviser, est‑il réparti à parts égales?
    Ce n'est pas réparti à parts égales. Ce que j'ai fait, c'est étudier le financement du Programme des langues officielles dans l'enseignement, le PLOE, qui sert à appuyer l'immersion en français langue seconde et l'enseignement en français langue première.
    Dans chaque province et chaque territoire, si je me souviens bien, le financement de l'enseignement du français et des langues minoritaires était plus élevé pour chaque élève, au total, que les montants consentis pour l'immersion en français langue seconde.
    D'accord, mais rien de tout cela n'a été comparé aux étudiants anglophones des classes anglophones seulement.
    Non. J'ai seulement comparé le financement du PLOE-OLEP.
    J'essaie de comprendre. Vous avez tous les deux mentionné que le gouvernement provincial ne dépense pas adéquatement et qu'il existe un écart. J'essaie de comparer les deux côtés pour voir comment augmenter cela ou veiller à ce que ce soit comparable.
    Avez-vous, l'un ou l'autre, ou les deux, des recommandations sur les façons d'accroître la reddition de comptes des provinces à cet égard?
    Je suggère d'élaborer un plan tripartite intégré dans lequel chacun connaîtrait le rôle de chacun, et tous rendraient compte de leurs dépenses et de leurs investissements. C'est probablement la meilleure solution.
    Je vais vous raconter une anecdote. À l'Île‑du‑Prince‑Édouard, le conseil scolaire a été obligé de faire une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée pour savoir comment la province utilisait son financement du PLOE. La province avait refusé la demande sous prétexte qu'elle négociait avec le gouvernement fédéral et que les négociations entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial l'empêchaient de divulguer des renseignements.
    Personnellement, je pense que la meilleure solution est d'avoir un plan auquel tous les intervenants adhèrent, où tout le monde communique des renseignements. L'idée est de savoir où l'on va. Cela revient à dire: « Vous faites cela, je fais ceci et les conseils scolaires de la minorité font cela », et tout le monde évolue dans la même direction.
    J'aime cela.
    Je vais poser les mêmes questions à notre autre témoin, Mme Chouinard.
    D'abord, bienvenue au Comité. Je suis ravie de voir un nouveau visage.
    Je suis en grande partie d'accord avec mon collègue que ce soit pour une entente tripartite ou, comme certains autres membres de la communauté l'appelleraient, une clause linguistique. Idéalement, les signataires comprendraient un représentant de la communauté provinciale, non seulement afin d'assurer la transparence quant à l'affectation des fonds, mais aussi veiller à ce qu'ils soient répartis en fonction des priorités et des besoins de la communauté. Dans toutes les provinces, personne d'autre n'est mieux placé pour dire à la province et au fédéral quelles devraient être ces priorités.
    Actuellement, aux termes des ententes bilatérales entre le gouvernement fédéral et les provinces en matière d'éducation, les provinces sont libres d'établir leurs propres priorités pour la répartition des fonds. Souvent, quand on révèle où le financement est allé — parce que ce n'est pas toujours le cas, comme M. Blaikie vient de le dire —, on se rend compte que les fonds sont allés, en vain, à des choses qui ne contribuaient aucunement à la vitalité des communautés.
    Permettez-moi d'ajouter une anecdote.
    À l'Île‑du‑Prince‑Édouard, la province utilise le PLOE pour payer 13,75 enseignants. C'est censé être une responsabilité provinciale primaire. La province ne devrait pas utiliser les fonds du PLOE pour financer les salaires de 13,75 enseignants, mais elle le fait. Le conseil scolaire francophone a dit à la province qu'elle ne pouvait pas agir ainsi. Patrimoine canadien est parfaitement au courant de la situation et ne fait rien pour la corriger.
(1240)
    Sauf si un membre de la communauté décide de poursuivre Patrimoine canadien devant les tribunaux, comme c'est actuellement le cas avec certaines provinces, notamment Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Le financement du PLOE-OLOE est censé être du financement supplémentaire au financement de la province. En ce moment, très souvent, ce n'est pas ainsi que ce financement est utilisé.
    Avez-vous fait des recherches sur les pénuries de personnel?
    Je me prépare simplement pour le prochain tour. Merci beaucoup.

[Français]

     Merci, madame Dance.
    Madame Gladu, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
     Je souhaite la bienvenue aux témoins.
    Madame Chouinard, vous avez décrit la situation actuelle et les nombreuses difficultés. Quelles mesures le gouvernement doit-il prendre, et quelles sont les priorités?
     C'est une grande question.
    Premièrement, en vertu de la nouvelle Loi sur les langues officielles, une lentille francophone devrait être appliquée aux nouvelles lois. Toutefois, il y a des exemples récents où cela n'a pas été fait sur le terrain et où on a dû se battre pour que cela se fasse. C'est ce qui est arrivé dans le cas de la Loi relative à l'apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada. Il a fallu se tourner vers le Sénat, parce qu'il n'a pas été possible d'y apporter un amendement à la Chambre des communes afin de protéger le financement explicitement destiné aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.
     La Loi sur les langues officielles devrait être en mesure, de façon horizontale, de régler de telles questions. Celles-ci doivent être prises en considération dans le processus de rédaction législative, et non lorsqu'on est en train de débattre d'un projet de loi. Ce serait déjà un bon pas en avant.
     Par ailleurs, puisqu'on parle ici du domaine de l'éducation et que le gouvernement fédéral doit toujours faire affaire avec les provinces et les territoires, il est nécessaire d'assurer une transparence et une reddition de comptes, par l'entremise de clauses linguistiques, pour qu'on puisse avoir la preuve que le financement envoyé par le fédéral aux provinces est dépensé comme il devrait l'être.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Bourgeois, ma question pour vous porte sur votre recherche et sur l'article 23 de la Charte. À cet égard, la Charte est un peu vague, car on n'y précise pas vraiment le nombre d'élèves francophones ou de la minorité linguistique requis pour avoir l'obligation de financer une école pour ces élèves, et elle ne semble pas couvrir l'éducation postsecondaire ou l'éducation de la petite enfance.
    Si des changements devaient être apportés, quels changements souhaiteriez-vous à cet égard?
    Je pense qu'en matière d'éducation, le problème général dans l'ensemble du système, c'est que les provinces ne respectent pas leurs obligations. On fait habituellement référence aux pouvoirs exclusifs des conseils scolaires de la minorité linguistique, et nous n'en sommes même pas encore là. Ce n'est même pas complet.
    Cependant, le plus important problème, c'est que les provinces ont des obligations, selon l'arrêt Mahe et d'autres éléments de jurisprudence, et elles ne font pas leur travail non plus.
    À ce jour, personne n'a poursuivi les provinces ou obligé les provinces à venir à la table en disant: « Écoutez, vous avez des obligations relativement à la promotion du système d'éducation de la communauté de langue officielle en situation minoritaire. » Sans égard au PLOE, elles ont cette responsabilité. Or, si le gouvernement fédéral veut les aider à le faire, c'est très bien. Dans le cas contraire, cette obligation demeure. Donc, c'est probablement l'un des...
    J'essaie de me souvenir de la deuxième partie de votre question.

[Français]

     Puisque vous avez étudié le droit à la gestion scolaire, il serait intéressant de vous entendre parler du lien entre l'article 23 de la Charte, sur le droit à la gestion scolaire, et les modes de financement fédéral actuels. J'aimerais aussi que vous commentiez les dispositions de reddition de comptes dans le protocole d'entente actuel.
    À mon avis, un financement complètement séparé du programme des langues officielles en enseignement devrait être versé directement du gouvernement fédéral aux commissions scolaires pour la réalisation de leur mandat culturel et communautaire. Ce sont les écoles et les conseils scolaires qui seraient responsables, mais leur mandat culturel et communautaire serait séparé de l'entente relative au programme des langues officielles en enseignement, et cela permettrait de contourner les provinces et les territoires récalcitrants.
(1245)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Si vous avez d'autres recommandations auxquelles vous aimeriez que le gouvernement fédéral donne suite, je vous invite à les transmettre à la greffière du Comité, et nous les intégrerons à notre rapport.
    Je vous remercie de vos témoignages aujourd'hui. Je vous en suis très reconnaissante.

[Français]

     Merci, madame Gladu.
     Monsieur Serré, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie beaucoup les deux chercheurs de leur témoignage, aujourd'hui. Ils ont fait des recherches en ce qui concerne la Constitution et les responsabilités des provinces.
    D'un côté, nous sommes entièrement d'accord sur le continuum en éducation, la petite enfance, les conseils scolaires et l'éducation postsecondaire. Il est clair qu'il y a des lacunes importantes à cet égard. Nous l'avons entendu clairement tout au long de notre étude, et auparavant. Je viens du Nord de l'Ontario où les défis sont énormes, évidemment. Nous vivons de la frustration.
    Madame Chouinard, il est question de certains éléments. Le gouvernement fédéral au pouvoir présentement est le gouvernement qui a probablement imposé le plus de conditions dans certaines des ententes, ce qui n'avait jamais été fait auparavant. Toutefois, ces mesures ne sont pas suffisantes.
    Vous savez que nous avons le Programme de contestation judiciaire. Le Bloc québécois et les conservateurs étaient contre ce programme, d'ailleurs. Cela a fait l'objet d'un débat au Comité permanent du patrimoine canadien quand j'y siégeais. Ce dossier est bloqué présentement à la Chambre des communes. Nous avons inséré cela dans la Loi sur les langues officielles.
    Les groupes communautaires francophones de partout au pays devraient-ils utiliser ce programme pour se défendre contre les provinces, afin de s'assurer qu'il y a des pénalités et que le financement est versé par les provinces pour ce qui est de la petite enfance, de l'éducation secondaire et postsecondaire?
    Merci de la question.
     Monsieur Serré, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais vous allez l'être.
    Je suis membre du Comité d'experts chargé des droits en matière de langues officielles au Programme de contestation judiciaire. J'ai donc une bonne idée du type de demandes qui sont déposées et du type de demandes qui sont financées. Ces questions apparaissent dans les dossiers qui sont déposés dans le cadre du Programme de contestation judiciaire. Par contre, l'un des critères importants pour que les dossiers soient financés est qu'ils doivent soulever une nouvelle question de droit.
     Depuis 1982, nous savons qu'une pléthore de causes ont été portées devant les tribunaux et se sont rendues jusqu'à la Cour suprême en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Certaines questions sont considérées comme étant déjà réglées, que ce soit réglé ou non de la façon dont les communautés le souhaiteraient. Les choix sont faits dans ce contexte.
    Pour ce qui est du financement de la petite enfance et de l'éducation postsecondaire, il y a effectivement des éléments qui restent à déterminer. Des éléments de jurisprudence sont déjà apparus dans certaines causes, notamment l'obligation d'une province d'ajouter un espace pour aménager une garderie lors de la construction d'un nouvel établissement scolaire. Cependant, la Cour suprême a refusé d'aller aussi loin.
    Il faut faire la part des choses. Au Comité d'experts chargé des droits en matière de langues officielles, notre travail est de voir si les demandes dont le Comité est saisi soulèvent de nouvelles questions de droit qui méritent d'être élucidées par les tribunaux.
     La seule façon d'accorder la priorité en matière de financement pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire serait-elle de passer par les tribunaux? Présentement, il ne semble pas y avoir de volonté politique au sein des provinces.
    Êtes-vous en mesure d'examiner cela, de défendre cela, et de faire appel à plus d'intervenants qui vont se pencher sur cette question?
    Je ne suis pas certaine de comprendre votre question.
     Les paramètres du Programme de contestation judiciaire doivent-ils être élargis pour que d'autres associations et d'autres organisations puissent amener les provinces en cour pour les obliger à remplir leurs obligations envers les communautés de langue officielle en situation minoritaire en vertu de la Constitution? C'est parce que l'éducation relève de la responsabilité des provinces.
    D'accord.
    Je marche un peu sur des œufs en tant que membre du Comité d'experts chargé des droits en matière de langues officielles.
(1250)
    Oui, c'est vrai.
    Je pourrais cependant dire une chose. L'un des problèmes auxquels font face les organismes qui voudraient pousser plus loin des questions comme celles-là devant les tribunaux est souvent le plafonnement du financement qui est offert dans le cadre du Programme de contestation judiciaire. En raison du financement qui est octroyé actuellement, souvent, nous ne pouvons pas répondre à la demande pour ce qui est des coûts liés à un litige, du début à la fin.
    Par exemple, nous avons entendu à de nombreuses reprises le Conseil scolaire francophone de la Colombie‑Britannique s'exprimer sur cette question, à savoir qu'on doit retirer du financement du budget de fonctionnement, alors que ce financement devrait aider les écoles à financer des litiges contre la province. Nous faisons face à des défis vraiment troublants. Pendant ce temps, la qualité de l'éducation ne peut pas être la même. Si les conseils scolaires sont tout le temps pris devant les tribunaux, ils doivent prendre l'argent de leurs coffres pour lutter contre la province.
     Merci, madame Chouinard et monsieur Serré. On a un peu dépassé le temps alloué.
    Monsieur Beaulieu, la parole est à vous pour deux minutes et demie.
    Tous les témoignages présentés ici le confirment, plusieurs provinces anglophones refusent de financer un continuum minimal en éducation pour la viabilité des communautés francophones et acadiennes. Même le financement fédéral semble parfois détourné. Le gouvernement fédéral ne manifeste pas non plus de volonté de demander une reddition de comptes. Par conséquent, l'assimilation se poursuit. Un moment donné, des torts irréparables seront causés aux communautés francophones et acadiennes qui auront été assimilées des suites de mesures visant l'interdiction des écoles il y a plus longtemps. S'il n'y a pas de changement majeur rapidement, on s'en ira vers toujours plus d'assimilation.
    Comment voyez-vous l'avenir? Quelles perspectives voyez-vous?
    À l'Île‑du‑Prince‑Édouard où j'ai travaillé le plus, il y a un revirement. Il y a 10 ou 15 ans, il y avait environ 850 élèves dans nos écoles francophones. Maintenant, il y en a à peu près 1 300. L'objectif est d'atteindre 1 500 élèves.
    Si tous ces élèves sont bilingues et fiers de leur construction identitaire, j'imagine que, dans 20 ou 30 ans, ce sera beaucoup mieux que ce qu'on a maintenant, quantitativement parlant.
     Est-ce que la qualité de la construction identitaire sera aussi au rendez-vous? Les fonds fédéraux pour la construction identitaire et les programmes de langues officielles en éducation, entre autres, pourraient y contribuer énormément. Ça prend une conviction des provinces, mais je vois cela d'un très bon œil.
     Si on regarde les chiffres objectivement, on ne voit pas d'amélioration jusqu'à présent.
    Les chiffres que je viens de vous présenter sont pour l'Île‑du‑Prince‑Édouard.
    Pour le nombre d'élèves, c'est le cas. D'un autre côté, il y a des écoles où une bonne proportion des élèves ne connaissent pas le français. On en a parlé tantôt, mais on va voir.
    Madame Chouinard, voulez-vous vous prononcer là-dessus?
    Pour répondre rapidement à votre question, je vous dirais que l'avenir appartient à ceux qui luttent, monsieur Beaulieu.
     Effectivement, on va continuer à lutter. On n'a pas le choix.
     Sur ces paroles sages, je pourrais ajouter que notre ami Darrell Samsondit toujours qu'il faut se lever de bonne heure et se coucher plus tard que les autres pour continuer le combat. C'est pour ça qu'il se couche plus tard.
    On passe maintenant au Nouveau Parti démocratique.
    Madame Dance, la parole est à vous pour deux minutes et demie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je vais revenir à votre exposé. Vous avez dit que le gouvernement a actuellement un plan quinquennal. Vous ne semblez pas aimer ce nombre. Selon vous, quel sera le nombre idéal?
    Cela figure dans mon document de quatre pages. Je parle de 2067, l'année du bicentenaire du Canada. Si la Finlande peut se doter d'un plan en matière d'éducation pour 22 à 23 ans, je ne vois pas pourquoi nous ne ferions pas de même.
    Nous avons un plan en matière de langues officielles pour cinq ans. Nous avons des plans en matière d'éducation pour cinq ans. Le financement du PLOE est établi sur cinq ans. Il n'y a pas un système d'éducation au monde qui fonctionne cinq ans à la fois.
    Pouvez-vous me dire, selon vous, quel est le sort des communautés francophones en situation minoritaire après la fermeture d'une école ou d'une garderie francophone? Dans l'ensemble, qu'adviendra‑t‑il de cette langue officielle du Canada si les communautés n'ont pas accès à du soutien aux communautés francophones et à l'éducation francophone?
    Nous avons des preuves anecdotiques au sujet des fermetures d'écoles, à savoir la centralisation des années 1960, dans l'ensemble du pays, qui visait à éliminer les petites écoles pour les remplacer par des écoles consolidées.
    Je vais vous raconter une anecdote. Ma femme vient de Tignish, à l'Île‑du‑Prince‑Édouard. Elle a fait sa première année d'école — sa première année — dans une école francophone. Puis, la province est intervenue; elle a regroupé les six écoles francophones de la région de Tignish dans... aucune école. Les élèves ont été obligés de fréquenter l'école anglophone. Ma femme s'est assimilée. Ses sœurs se sont assimilées. Vingt ans plus tard, tout le village, qui s'appelle Tignish Shore, était assimilé.
    Il existe d'autres exemples partout au pays. Nous avons aussi des exemples d'écoles en construction, comme à Chezzetcook, en Nouvelle-Écosse, où la communauté s'est revitalisée.
    Il y aura probablement des succès et des échecs, mais sans école et, accessoirement, sans développement de la petite enfance, la situation est vouée à l'échec.
(1255)
    Merci beaucoup.
    Je tiens à vous remercier tous les deux d'avoir partagé vos recherches et vos renseignements avec le Comité aujourd'hui.
    Merci.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Bourgeois et madame Chouinard, la qualité de vos interventions a permis de se pencher sur le nerf de la guerre. Si vous pensez qu'il y a de l'information supplémentaire que vous auriez aimé nous communiquer, je vous prie de la faire parvenir au Comité. C'est vraiment important, car le Comité ne peut écrire dans ses rapports que ce qu'il entend de la part des témoins.
    En terminant, monsieur Bourgeois, je vais recourir à mon privilège de président pour vous poser une question. En tant que chercheur, vous êtes spécialiste en droit de la gestion scolaire. Y aurait-il un argument juridique à faire, du côté fédéral, par rapport à la gestion scolaire et au fait que les conseils scolaires sont écartés des négociations des ententes bilatérales? Y aurait-il un argument à faire pour corriger l'avenir par rapport au droit?
     Certainement. Comme je l'ai dit, il faudrait un plan tripartite. Qui représentera la minorité? Ce sont les élus au suffrage universel qui siègent au conseil scolaire. Vous êtes des élus du fédéral. Il y a des élus provinciaux qui représentent la minorité, mais ils ne sont même pas à la table de négociation. Ils ne sont même pas consultés adéquatement. Il y a certaines provinces qui les consultent, mais la plupart ne le font pas. Il ne s'agit certainement pas d'une consultation efficace.
    Qui parle au nom des minorités, qui sont supposées détenir huit pouvoirs exclusifs, mais qui ne sont même pas exclusifs? Ça fait une quarantaine d'années que l'article 23 existe. Depuis 1990, en principe, on est censé avoir une pleine gestion scolaire, mais, en réalité, ce n'est pas le cas. On patauge. On sait ce que sont les huit pouvoirs, mais aucun district scolaire et aucune commission scolaire du pays n'exerce ces pouvoirs exclusifs. Sont-ils vraiment « exclusifs » s'ils sont partagés avec le gouvernement? Il me semble que, à un moment donné, il faut qu'on s'arrête et qu'on dise s'il s'agit de pouvoirs exclusifs ou non. S'il s'agit de pouvoirs exclusifs, donnons-les aux minorités, aux conseils scolaires et à leurs représentants élus.
    C'est un peu comme si on disait que si la province ne voulait pas décentraliser ses pouvoirs aux conseils scolaires, les conseils scolaires devraient assumer des pouvoirs quitte à se faire poursuivre par la province. Le problème, c'est que le financement ne suit pas. Il serait intéressant que les conseils scolaires exercent leurs huit pouvoirs exclusifs, par exemple l'établissement des programmes scolaires et la dépense des fonds publics pour la culture et l'identité. Si les moyens ne suivent pas l'obligation du cas de la sécession ou l'arrêt Beaulac, il est difficile d'exercer ces pouvoirs. Ce n'est pas grâce à des quêtes à la messe qu'on va amasser assez d'argent pour exécuter ces mandats. Les provinces devraient être sérieuses et être présentes à la table de négociation.
    Mon dernier commentaire est le suivant. Ça fait deux ans que je travaille avec la communauté acadienne et le ministère. Je ne veux pas dénigrer les provinces. Le gouvernement du Nouveau‑Brunswick est très favorable. Il est d'ailleurs en train de faire la coconstruction du système scolaire de langue française. Le ministère est divisé en deux, au Nouveau‑Brunswick; il y a un sous-ministre francophone et un sous-ministre anglophone. Le sous-ministre francophone est entièrement prêt à trouver des solutions et à établir la pleine gestion scolaire. Ça s'en vient. Ce sera probablement fait d'ici un an ou deux, selon le nouveau gouvernement. C'est de bon augure. Ce n'est pas partout; c'est au Nouveau‑Brunswick, où la situation est différente.
    La Nouvelle‑Écosse a montré l'exemple avec l'élaboration des programmes. C'est le seul territoire où le conseil scolaire élabore les programmes, ce qui est vraiment le nerf de la guerre. Qu'est-ce qu'on enseigne à ses élèves, et comment? La Nouvelle‑Écosse est en tête de file à cet égard. Le Nouveau‑Brunswick, éventuellement, sera en tête en matière de pleine gestion scolaire. Peut-être que ça fera boule de neige chez les autres conseils scolaires.
    Merci, monsieur Bourgeois.
    Madame Chouinard, avez-vous quelque chose à ajouter sur cette question?
(1300)
     Je vais renchérir sur ce que M. Bourgeois vient de dire. Je rappelle que, au tournant du siècle dernier, la Cour suprême a rendu l'arrêt Arsenault‑Cameron, qui déterminait explicitement que les conseils scolaires et les parents francophones en situation minoritaire devraient être reconnus comme les porte-paroles de la communauté dans le domaine scolaire. Il y a donc de la jurisprudence qui appuie les propos de mon collègue.
    Encore une fois, nous ne vous remercierons jamais assez, chers témoins, de vos sages conseils et de vos réponses très intéressantes.
    Nous allons terminer là-dessus.
    La séance est levée.
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