LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le vendredi 17 février 2023
[Enregistrement électronique]
[Français]
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la cinquante-et-unième réunion du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes. Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 30 mai 2022, le Comité reprend l'examen du projet de loi C‑13, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles, édictant la Loi sur l'usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale et apportant des modifications connexes à d'autres lois.
Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les tests de connexion requis ont été effectués avant la réunion. À ce sujet, il y a eu des problèmes. C'est pour cela que nous ouvrons la séance un peu en retard. Je signale aussi aux membres du Comité qui veulent participer à distance que s'ils n'ont pas le casque réglementaire, je ne leur donnerai pas la parole.
Aujourd'hui, nous reprenons l'étude article par article du projet de loi C‑13.
Je souhaite la bienvenue aux fonctionnaires qui sont parmi nous, en appui au Comité pour répondre à des questions techniques.
Nous recevons Mme Julie Boyer, M. Marcel Fallu et Mme Chantal Terrien, du ministère du Patrimoine canadien.
Nous recevons aussi M. Alain Desruisseaux, du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.
Nous accueillons également M. Warren J. Newman, du ministère de la Justice.
Enfin, nous recevons M. Carsten Quell, du Secrétariat du Conseil du Trésor.
Une fois de plus, je vous remercie de vous joindre à nous pour nous donner vos judicieux conseils de temps à autre.
Nous reprenons donc l'étude article par article là où nous étions rendus lorsque nous avons ajourné la séance mardi, c'est-à-dire à l'article 21. Nous en sommes à l'amendement CPC‑21.
Monsieur Godin, vous avez la parole.
Je vous remercie, monsieur le président.
Il y a des amendements qui sont plus provocants que d'autres, mais je ne pense pas que l'amendement CPC‑21 va obliger les libéraux à se chicaner entre eux.
Pour faciliter la compréhension de tous, je vais bien préciser l'amendement que je propose, comme vous nous avez demandé de le faire la dernière fois.
Monsieur Godin, juste avant que vous le proposiez, je veux souligner que s'il est adopté, les amendements BQ‑24, BQ‑25 et BQ‑27 ne pourront pas être proposés du fait d'un conflit de ligne.
Vous pouvez poursuivre.
L'amendement CPC‑21 propose que le projet de loi C‑13, à l'article 21, soit modifié, au point a), par substitution, à la ligne 3, page 11, de ce qui suit:
41 (1) Le gouvernement fédéral est tenu de favoriser et de protéger
Au point b), nous proposons qu'il soit modifié par substitution, à la ligne 5, page 11, de ce qui suit:
phones du Canada et d'appuyer leur développement,
Au point c), nous proposons qu'il soit modifié par substitution à la ligne 8, page 11, de ce qui suit:
canadienne, ainsi que de promouvoir la pleine reconnais-
Au point d), nous proposons qu'il soit modifié par substitution, à la ligne 14, page 11, de ce qui suit:
glais, est tenu de protéger et de promouvoir le français.
Je veux juste ajouter, monsieur le président, que cet amendement ne fait que corriger des libellés dans le texte du projet de loi pour faciliter la compréhension. Ce n'est, selon moi, que de la syntaxe.
Comme nous l'avons vu, cela ferait tomber plusieurs amendements du Bloc québécois. C'est pourquoi j'aimerais proposer un sous-amendement. Nous l'avons fait parvenir à Mme la greffière.
C'est parfait.
Nous allons suspendre la séance pour quelques minutes afin que tout le monde prenne connaissance du sous-amendement de M. Beaulieu.
Est-ce que tout le monde a pu prendre connaissance du sous-amendement de M. Beaulieu concernant l'amendement CPC‑21?
Monsieur Beaulieu, vous avez la parole.
En gros, ce qui est important, et cela a déjà été mentionné dans le Livre blanc, c'est qu'il y ait une intention de protéger le français également au Québec.
Au paragraphe 41(1) proposé, juste après « Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada », nous proposons d'ajouter « ainsi que les francophones du Québec ».
Ensuite, un peu plus loin, à la ligne 8, page 11, après « ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne », nous proposons d'ajouter « en tenant compte que le français est la langue officielle et commune du Québec ».
Ce sont ces deux ajouts que nous proposons.
J'aimerais poser une question aux témoins pour bien clarifier un point au sujet de la définition de « minorités anglophones » qui est utilisée. Si j'ai bien compris, c'est en fonction de l'indicateur de la première langue officielle parlée.
Pouvez-vous juste nous confirmer de quelle façon vous définissez « minorités anglophones »?
D'accord.
Ce n'est pas dans la Loi. Toutefois, dans les documents de Patrimoine canadien, on utilise notamment le critère de la première langue officielle parlée.
N'est-ce pas?
Il n'y a pas de définition dans la Loi, mais, effectivement, il y a plusieurs définitions. Du point de vue statistique, la première langue officielle parlée fait partie de l'une des définitions.
D'accord.
Selon Statistique Canada, le critère de la première langue officielle parlée inclut 33 % des immigrants au Québec, soit le tiers des immigrants. Cela veut dire qu'en utilisant cette définition, on va à l'encontre de la possibilité d'assurer l'avenir du français. En effet, il faut atteindre 90 % de transferts linguistiques vers le français pour maintenir le poids démographique des francophones.
Merci.
Merci, monsieur Beaulieu.
Y a-t-il des questions sur le sous-amendement de M. Beaulieu, qui porte sur l'amendement CPC‑21?
Monsieur Godin, vous avez la parole.
Je voudrais m'adresser aux fonctionnaires. Je vais m'adresser à M. Fallu, parce que c'est lui qui a rédigé le texte de loi, selon mes informations.
J'aimerais parler de l'esprit qui sous-tend la description de la minorité. Mme Terrien a répondu à la question tout à l'heure, mais ce n'est pas clair, et il semble y avoir plusieurs définitions.
Pouvez-vous nous aider à comprendre?
Puisque la définition de « minorité » n'est pas dans la Loi, quelle définition utilisez-vous le plus souvent ou laquelle utilisez-vous dans la réalité lorsque vous travaillez avec ces données?
Comme le disait ma collègue, il n'y a pas de définition formelle dans la Loi. Sur le plan administratif, différentes définitions sont utilisées. Dans le préambule de la Loi sur les langues officielles actuelle, dans la version non encore modifiée par les articles adoptés jusqu'à présent, on mentionne qu'il y a des minorités francophones et anglophones, qui font partie de deux grandes collectivités linguistiques au Canada, soit la minorité francophone et la minorité anglophone.
Il est sous-entendu que la minorité anglophone se trouve au Québec et que la minorité francophone se trouve à l'extérieur du Québec. Ce n'est pas écrit en toutes lettres dans la Loi, mais c'est un peu la façon dont on en parle.
Comme législateur, je voudrais bien comprendre la définition.
Je comprends votre explication, mais je trouve qu'elle est élastique. Quand une expression n'est pas bien définie, cela laisse place à l'interprétation. Il y a donc des zones grises.
Pouvez-vous confirmer ou infirmer ce que j'affirme?
Lorsque les notions de minorité anglophone, de minorité francophone et de collectivité ont été utilisées dans la Loi sur les langues officielles de 1988, que vous êtes en train de modifier, on s'est basé notamment sur l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. En effet, au paragraphe 23.(3) de la Charte, il est question de « la minorité francophone ou anglophone d'une province ».
Évidemment, cela peut varier, parce que, parfois, en ce qui a trait aux services, on vise un bassin de gens qui ne sont pas à proprement parler des ayants droit en vertu de l'article 23, mais la notion de minorité francophone ou anglophone dans une province est bien comprise. On n'a pas besoin de définir davantage ces notions, qui sont ancrées dans notre réalité quotidienne au Canada.
Monsieur Newman, comme vous travaillez au ministère de la Justice, pour vous, la définition est très claire et elle ne laisse pas place à l'interprétation.
Toutefois, ce que les représentants de Patrimoine canadien disent est sensiblement différent de ce que vous dites, mais, selon ce que je comprends, vous avez deux visions différentes.
Pour vous, c'est clair, c'est défini, et cela ne laisse pas place à l'interprétation.
C'est bien cela?
Je ne dirais pas qu'il y a deux visions différentes. Je dirais plutôt que, lorsqu'on a utilisé ces termes dans la Loi de 1988, on l'a fait sciemment, en gardant à l'esprit que la Charte canadienne des droits et libertés parlait déjà des minorités francophone et anglophone d'une province.
Oui, on utilise plusieurs indicateurs. À l'alinéa 23.(1)a), il est question de la langue maternelle. Cela n'est pas en vigueur au Québec, comme on le sait. Or, cela touche les droits qui découlent de l'article 23, les droits à l'instruction dans la langue de la minorité.
On a utilisé la notion de minorité francophone ou anglophone pour ajouter quelque chose qui n'était pas dans la Loi sur les langues officielles de 1969, soit la première Loi sur les langues officielles. On ne parlait que du français et de l'anglais, mais pas des minorités.
Dans ce cas-ci, c'est pour tenir compte du principe de protection des minorités que les rédacteurs législatifs se sont servis de cette terminologie.
Je ne suis pas contre le sous-amendement de mon collègue, mais je le trouve répétitif, parce que cela apparaît ailleurs dans la Loi.
Par solidarité, puisque je suis un Québécois et que je veux défendre la langue française au Québec et partout au Canada, je vais appuyer votre sous-amendement, monsieur Beaulieu.
Y a-t-il d'autres commentaires au sujet du sous-amendement proposé par M. Beaulieu concernant l'amendement CPC‑21?
Comme il n'y en a pas, nous mettons aux voix le sous-amendement.
(Le sous-amendement est rejeté par 6 voix contre 5.)
Nous revenons à l'amendement principal, soit l'amendement CPC‑21.
Y a-t-il d'autres commentaires au sujet de l'amendement?
Comme il n'y en a pas, nous mettons aux voix l'amendement CPC‑21.
(L'amendement est rejeté par 6 voix contre 5.)
Nous ne présenterons pas non plus les amendements BQ‑25 et BQ‑26, parce que nous voulons accélérer les choses.
Je répète pour les gens qui nous écoutent.
Les amendements BQ‑24, BQ‑25 et BQ‑26 ne sont pas présentés.
Cela nous amène à l'amendement CPC‑22, proposé par M. Godin. C'est à la page 67 de la liasse d'amendements.
Monsieur Godin, vous avez la parole.
Permettez-moi, monsieur le président, de terminer la mise à jour de ma liasse de documents.
L'amendement CPC‑22 est, encore une fois, de nature grammaticale, et il vise à renforcer l'article (2) proposé. En fait, pour respecter vos instructions, monsieur le président, je vais l'énoncer clairement.
Je propose que le projet de loi C‑13, à l'article 21, soit modifié par substitution, à la ligne 11, page 11, de ce qui suit:
(2) Le gouvernement fédéral, reconnaissant et prenant en compte que le fran-
Ce qui est ajouté vise simplement à donner plus de mordant à l'article, et pas des dents de lait comme je l'ai déjà dit par le passé. Nous voulons que le texte soit efficace. Nous voulons ajouter tout simplement « et prenant en compte ».
C'est temporaire, des dents de lait.
Merci, monsieur le président.
Nous avions compris la métaphore.
Y a-t-il d'autres commentaires au sujet de l'amendement CPC‑22.
Comme il n'y en a pas, nous mettons aux voix l'amendement CPC‑22.
(L'amendement est adopté par 11 voix contre 0.)
Cela nous amène à l'amendement BQ‑27, proposé par M. Beaulieu.
Monsieur Beaulieu, vous avez la parole.
Les amendements BQ‑27, BQ‑28 et BQ‑29 de notre liasse ne sont pas présentés.
Cela nous amène à l'amendement NDP‑5, proposé par Mme Ashton. C'est à la page 72.
Madame Asthon, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Nous proposons que le projet de loi C‑13, à l'article 21, soit modifié par substitution, à la ligne 17, page 11, de ce qui suit:
phones de faire des apprentissages de qualité, en contexte formel, non formel ou informel, dans leur
D'entrée de jeu, j'aimerais prendre le temps de remercier le Réseau pour le développement de l'alphabétisme et des compétences, ou RESDAC, et sa présidente, Mona Audet, pour son témoignage devant le Comité.
Le RESDAC a montré clairement qu'il est important pour nous de reconnaître le continuum en éducation, de la petite enfance au secondaire, et de reconnaître que l'offre de cette éducation en français est essentielle dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Au-delà de l'enseignement formel, nous devons faire de la place à la formation continue et à l'alphabétisation. Nous devons faire de la place à l'éducation qui, parfois, ne mène pas à l'obtention d'un diplôme ou d'une certification, mais qui est pourtant essentielle à notre tissu social.
Alors que nous nous apprêtons à enchâsser un programme d'immigration francophone robuste dans la Loi, je crois que nous devons nous assurer que le fédéral appuie les programmes, cours et organismes qui souhaitent favoriser les échanges culturels entre ceux et celles que nous accueillerons et ceux et celles qui sont déjà ici.
Même aujourd'hui, on fait face à des défis de taille. Plus de la moitié de la population francophone éprouve des difficultés à communiquer et à comprendre ce qu'elle lit. Elle souffre d'insécurité linguistique. Or, une personne qui a de la difficulté à s'exprimer dans sa langue aura d'énormes difficultés à participer au rayonnement de sa communauté et pourrait passer graduellement au nombre des personnes assimilées. À ce constat, j'ajoute le contexte postpandémique, la pénurie de main-d'œuvre, la menace de récession et l'impact de la technologie.
Les francophones en situation minoritaire doivent aussi avoir les compétences adaptées à leur situation pour faire face à cette nouvelle dynamique postpandémique. L'amendement proposé à l'article 21 est donc très pertinent, puisque l'ajout des termes « formel, non formel ou informel » permettrait d'avoir une approche beaucoup plus holistique en matière d'apprentissage. Cela contribuerait à un nouveau paradigme, à une nouvelle façon de mieux collaborer entre les institutions d'éducation formelle et les acteurs de la formation non formelle et informelle.
Encore une fois, je veux remercier de leur travail acharné Mme Audet du RESDAC et tous ceux qui travaillent dans le domaine de l'éducation informelle qui nous ont envoyé ce message clair, c'est-à-dire que c'est la voie à suivre.
Monsieur le président, je suis tout à fait d'accord avec Mme Ashton et j'appuie cet amendement du NPD.
Le Comité a entendu les belles et bonnes représentations du RESDAC. Je pense que nous nous devons d'intégrer cet élément dans la Loi pour renforcer cet aspect dans les années futures.
Je suis moi aussi en faveur de l'amendement dans la mesure où cela peut servir aussi aux francophones du Québec. Il y a aussi des analphabètes au Québec.
Est-ce que je peux supposer que cela va s'appliquer?
Je vais demander aux fonctionnaires si, selon eux, cela va aussi s'appliquer aux francophones du Québec.
L'engagement actuel ne dit pas cela.
Cela dit, il y a d'autres éléments dans la partie VII de la Loi telle qu'amendée par le projet de loi C‑13, et même dans sa version actuelle, qui pourraient éventuellement permettre cela. La décision se prendrait au niveau des programmes.
Comme personne d'autre ne souhaite intervenir, nous allons mettre aux voix l'amendement NDP‑5.
(L'amendement est adopté par 11 voix contre 0.)
Nous passons à l'amendement CPC‑24, à la page 73 de la liasse d'amendements.
Vous avez la parole, monsieur Godin.
Merci, monsieur le président.
Cet amendement a l'air banal, mais il est majeur. Ici, au Comité permanent des langues officielles, en 2019 ou en 2020, si je ne me trompe pas, nous avons eu une bataille avec le ministre de l'Industrie de l'époque, M. Bains, et le statisticien en chef du Canada. Tous les membres, y compris les libéraux — il y a des gens qui ne sont pas ici ce matin pour représenter le parti au pouvoir, malheureusement —, avaient déchiré leur chemise et s'étaient unis pour faire inclure le dénombrement des ayants droit dans le questionnaire long et le questionnaire court du recensement.
Si on veut améliorer la Loi sur les langues officielles, cet amendement est d'une importance majeure puisqu'il vise à dresser le portrait réel des minorités pour leur permettre d'obtenir les services adéquats. L'adopter témoignerait du sérieux du gouvernement dans cette démarche.
Lorsqu'on pense à la modernisation de la Loi sur les langues officielles, il faut savoir que celle-ci a été rédigée en 1969, puis modifiée dans les années 1980. On veut avancer, et j'espère qu'on ne reculera pas en nous suggérant un mot comme « estimation ». Il faut être sérieux dans notre démarche. C'est au nom de toutes les minorités que nous devons aujourd'hui traiter cet amendement avec une attention particulière. Sinon, nous perdons notre temps. Malheureusement, mes émotions ressortent. J'espère qu'elles transparaissent dans ma voix.
Dans le projet de loi, il est écrit que le gouvernement fédéral « s'engage à contribuer périodiquement à l'estimation du nombre d'enfants » d'ayants droit. C'est encore une échappatoire pour ne pas répondre véritablement aux besoins des minorités sur le terrain. Il faut donc réfléchir sérieusement avant de voter contre cet amendement. Cela relève d'une logique des plus évidentes, et il faut travailler dans ce sens. Je tends la main à tous les membres de ce comité ayant le droit de vote pour que nous ne reculions pas, que nous avancions, que nous regardions en avant et que nous atteignions vraiment l'objectif que nous nous sommes donné.
Moi, j'ai trois objectifs: freiner le déclin du français, protéger les deux langues officielles et les promouvoir. Toutefois, il faut avoir des données précises pour travailler, et non des estimations. Cela va démontrer à quel point nous sommes sérieux dans notre démarche.
Merci, monsieur le président.
Je remercie M. Godin d'avoir proposé cet amendement. Évidemment, nous sommes tous d'accord. Je ne veux pas éterniser le débat, mais nous voulons continuer le travail qui a été fait en 2021. Il ne fait aucun doute que nous voulons faire cela.
Je voudrais juste proposer un sous-amendement, qui a déjà été envoyé à tout le monde par courriel. Nous allons maintenant le faire circuler parmi les membres du Comité.
Je propose que l'amendement, proposant la modification de l'article 21 du projet de loi C‑13 par substitution aux lignes 20 et 21 de la page 11, soit modifié par:
a) la substitution après les mots « gouvernement fédéral » du texte suivant « estime périodiquement à l'aide des outils nécessaires, le nombre d'enfants dont les » afin que le texte se lise:
« (4) Le gouvernement fédéral estime périodiquement à l'aide des outils nécessaires, le nombre d'enfants dont les ».
Cet amendement vise à ce que nous continuions le travail qui a été fait en 2021. Tous les membres du Comité ont travaillé très fort dans le passé pour exiger le dénombrement des ayants droit.
Nous pouvons prendre une pause si nécessaire. Sinon, s'il y a des questions, nous pouvons poursuivre.
J'ai une question pour les experts en lien avec le sous-amendement de M. Serré.
D'abord, je tiens à dire que, de notre côté, nous sommes d'accord pour que les questions à ce sujet qui sont destinées à tous les foyers canadiens soient claires. On ne peut pas sous-estimer l'importance du formulaire court et il faut s'assurer qu'il fait partie du travail très important que représente le recensement. Je crois par ailleurs qu'il y a une volonté unanime sur cette question.
Le libellé du sous-amendement proposé permettrait-il d'obtenir des réponses claires sur le nombre d'enfants d'ayants droit? Nous assurons-nous ainsi que Statistique Canada posera ces questions à l'ensemble de la population canadienne?
Je vous remercie de votre question.
À la lecture du sous-amendement proposé, on comprend que le gouvernement va participer, à l'aide des outils nécessaires, à l'estimation du nombre d'ayants droit. La raison pour laquelle on utilise le mot « estimer », c'est que le recensement peut permettre de se rapprocher de la perfection, mais il ne représente qu'un moment dans le temps. Nous utilisons donc le verbe « estimer », parce qu'il est possible de confirmer le nombre exact d'enfants à l'aide des listes fournies par les commissions scolaires, par exemple.
La réponse à votre question, madame Ashton, est donc oui.
Merci, monsieur le président.
Madame Boyer, quand le sous-amendement précise « à l'aide des outils nécessaires », comprenez-vous la même chose que moi, à savoir qu'il peut y avoir d'autres outils que le recensement?
Le recensement serait l'outil principal sur lequel le gouvernement fédéral se baserait pour estimer le nombre d'ayants droit, mais d'autres outils détenus par les provinces sont nécessaires pour calculer ce nombre avec plus de précision.
J'ai notamment utilisé l'exemple des listes fournies par les commissions scolaires, qui permettraient de vraiment confirmer le nombre d'enfants. Dans le cas où un recensement aurait eu lieu deux ans auparavant, par exemple, d'autres enfants pourraient s'être ajoutés depuis. Ces listes permettraient donc d'obtenir une confirmation du nombre d'enfants.
Ce que vous venez de me nommer, ce ne sont pas des outils, selon moi. Ce sont des données recueillies par les provinces, dans ce cas-ci, par des commissions scolaires. Ce ne sont pas des outils comme tels, mais des données.
Je veux juste m'assurer qu'il y aura certaines précisions dans la Loi concernant les outils nécessaires. Vous comprenez le but visé par le sous-amendement proposé par M. Serré, n'est-ce pas?
À part les recensements, qui ont lieu tous les quatre ans maintenant, au Canada, quels sont les outils dont le gouvernement fédéral dispose pour pouvoir dénombrer les enfants au Canada?
Les autres outils relèveraient des compétences provinciales et territoriales dans le domaine de l'éducation.
Merci, monsieur le président.
Madame Boyer, c'est exactement d'outils relevant des compétences provinciales que vous parlez. L'amendement va-t-il obliger les commissions scolaires à les fournir?
En effet, si les commissions scolaires disent qu'elles ne fourniront pas les données, le gouvernement fédéral ne pourra pas les obtenir puisque les commissions sont de compétence provinciale. Même en tant que député, il faut parfois demander la permission pour aller parler aux élèves d'une commission scolaire. Lorsqu'on est ami avec le directeur, ça va bien, mais, dans le cas contraire, on reste dehors.
Imaginez alors demander des listes d'élèves à la commission scolaire! Je l'ai déjà fait parce que je voulais envoyer une lettre de félicitations à l'occasion d'une remise de diplômes. Certaines commissions scolaires ont accepté de m'en fournir, mais d'autres ont refusé, car cette décision reste à leur discrétion.
Comment allez-vous faire pour estimer le nombre d'enfants francophones ou anglophones dans une province si vous avez le même problème que nous vivons présentement? Le projet de loi C‑13 n'oblige aucunement les commissions scolaires à fournir des listes. L'estimation obtenue pourrait donc être inexacte.
Merci beaucoup de votre question.
Quand le gouvernement s'engage à quelque chose, il doit être en mesure de respecter cet engagement. Le projet de loi dit que le gouvernement du Canada s'engage à faire une estimation périodiquement, mais il faut les outils nécessaires.
Vous avez demandé si on pouvait exiger des commissions scolaires qu'elles fournissent ces données. La réponse est non, parce que les commissions scolaires relèvent de la compétence provinciale et territoriale. Le fédéral ne peut donc pas s'ingérer dans ce champ de compétence et obliger des commissions scolaires régies par la province à fournir des documents, quels qu'ils soient.
Je suis certain que votre réponse est juste.
Par conséquent, ces listes ne pourraient pas être considérées comme un outil valable, parce que la probabilité qu'elles soient mises à notre disposition est pratiquement nulle.
Il faut se rappeler que la Loi sur la statistique établit le mandat de Statistique Canada et confie de vastes pouvoirs au statisticien en chef pour qu'il puisse obtenir des données d'autres entités. Outre la tenue du recensement, Statistique Canada mène aussi des enquêtes post-censitaires.
Merci, monsieur le président.
Le sous-amendement me pose un peu de difficulté, parce qu'on y parle d'estimations périodiques, alors que l'amendement précise que « le gouvernement fédéral s'engage à faire dénombrer périodiquement les enfants […] ». Pour sa part, Mme Boyer vient de dire le gouvernement fédéral s'engage à faire une estimation.
Pour moi, il y a une très grande différence. Ce qui est important pour moi, c'est que quelqu'un s'engage à faire le dénombrement périodiquement. Il faudrait être capable d'appeler un chat un chat.
J'ai quelques questions.
En principe, le formulaire court du recensement, qui inclut toute la question des ayants droit, est envoyé à la population tous les cinq ans, n'est-ce pas?
La secrétaire parlementaire du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté est à mes côtés et me confirme que, pour la première fois en 20 ans, le gouvernement du Canada a atteint ses objectifs en matière d'immigration francophone hors Québec, qui est de 4,4 %.
Le gouvernement pourrait continuer à atteindre cet objectif pendant 50 ans. Cela voudrait dire qu'on sous-estimerait le nombre de francophones dans nos communautés hors Québec si on se fiait seulement à un seul outil, le recensement, qui est tenu tous les cinq ans. Cela voudrait donc dire qu'il y aurait moins de services pour les francophones partout au Canada, ou moins de services pour la population anglophone au Québec.
Or, il existe d'autres outils, comme les listes d'attente des commissions scolaires, qui permettent de savoir combien d'élèves veulent s'inscrire à une école. Cela pourrait être un autre outil pour déterminer la demande dans les écoles francophones ou dans les écoles anglophones au Québec. C'est de cela que nous parlons en ce moment. Cependant, il faut bien comprendre que le gouvernement fédéral ne peut pas forcer les provinces à cet égard.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais poursuivre dans la même veine que M. Drouin.
Je comprends les interventions, mais je veux essayer d'apporter des précisions concernant le commentaire de M. Gourde. J'ai été conseiller scolaire pendant six ans. Tous les conseils scolaires francophones ont avantage à fournir ces données et veulent le faire. Cela n'a rien à voir avec le gouvernement fédéral.
On parle de l'engagement du fédéral et du fait qu'il n'a pas de pouvoir sur les provinces, et je comprends que certains partis veulent mélanger ces notions à cause des champs de compétence provinciale. Cependant, madame Boyer, si on laisse la compétence provinciale de côté, est-ce que les conseils scolaires francophones ont avantage à envoyer les données de façon régulière au gouvernement fédéral?
Je pense que le sous-amendement reflète cela et je pense que nous disons la même chose, mais j'aimerais simplement obtenir cette clarification.
Je vous remercie de la question.
C'est pour cela, en effet, que l'amendement propose d'ajouter une référence à d'autres outils nécessaires, qui pourraient contribuer à une estimation plus juste du nombre d'ayants droit, par exemple, entre les périodes de recensement.
Mesdames Terrien et Boyer, je vais vous poser la question autrement.
Vous comprenez le but de mes collègues MM. Serré et Godin. Nous tentons de créer une loi idéale ou parfaite, de l'améliorer au maximum.
Le sous-amendement et l'amendement que le Comité étudie actuellement pourraient-ils être formulés autrement ou mieux, pour en arriver à un projet de loi C‑13 encore meilleur?
Merci de la question.
D'abord, j'aimerais dire que je ne peux me prononcer, car je n'ai pas d'opinion sur votre propos ou votre question.
Cela dit, comme Mme Boyer et mes collègues l'ont mentionné, il faut se rappeler que nous parlons ici d'un engagement. Les ayants droit dont il est question se situent dans le domaine de l'éducation, un domaine de compétence provinciale et territoriale.
Bien que le fédéral détienne effectivement certains outils, comme le recensement et d'autres qui ont été mentionnés, il ne contrôle pas tous les paramètres, étant donné que l'éducation relève de la compétence des provinces.
Puisqu'il est ici question d'un engagement, j'aimerais aussi rappeler que l'article 4 du projet de loi C‑13, que le Comité a déjà adopté, oblige justement le ministre du Patrimoine canadien à mettre en œuvre cet engagement.
Pour que tout le monde comprenne, parlez-vous de l'article 4 à la page 11 du projet de loi C‑13?
L'obligation du gouvernement fédéral est indiquée dans ce qui serait le nouvel article 2.3 de la Loi.
Madame Terrien, pourriez-vous répéter le lien que vous faites entre le sous-amendement de M. Serré et l'article auquel vous nous renvoyez, à la page 4 du projet de loi C‑13?
Le lien que je fais entre les deux est le suivant: le sous-amendement et l'amendement dont nous parlons visent un des engagements indiqués à la partie VII de la Loi sur les langues officielles, qui permettent au gouvernement d'agir, en effet, mais toujours en collaboration avec les provinces et territoires.
Dans ce cas-ci, je vous renvoie au nouvel article 2.3 que l'article 4 du projet de loi C‑13 ajouterait à la Loi sur les langues officielles pour obliger le ministre du Patrimoine canadien à établir un processus pour que le gouvernement fédéral mette en œuvre l'engagement énoncé au nouveau paragraphe 41(4) de la Loi proposé par le projet de loi. Ce dernier paragraphe, visé par l'amendement que nous étudions présentement, se trouverait dans la partie VII de la Loi.
Monsieur le président, je suis estomaqué de voir qu'on essaie de nous convaincre que le mot « estimation » est plus fort que le mot « dénombrement ».
Aux fins de discussion, je vais lire les deux définitions. Selon Google, le mot « estimation » signifie l'action d'estimer, de déterminer la valeur ou le prix qu'on attribue à une chose. Quant au mot « dénombrement », c'est l'action de compter, de dresser un inventaire, d'effectuer un recensement, comme dans l'exemple du dénombrement des fortunes dans un pays. Au Canada, à ce chapitre, ça ne va pas bien, parce que le gouvernement a occasionné d'importants déficits, mais c'est une autre histoire.
Personnellement, j'ai de la misère à comprendre que les fonctionnaires essaient de nous convaincre que les commissions scolaires peuvent nous envoyer des listes, qu'elles ont avantage à nous les envoyer, que nous pouvons nous fier à elles et que nous allons baser notre façon de faire sur les avantages des commissions scolaires. C'est ce que j'ai entendu tout à l'heure de la part de mon collègue M. Serré. Or, à mon avis, ce qui est important dans une loi fédérale, c'est d'avoir les outils nécessaires pour être le moins dépendant possible.
Madame Boyer, vous avez dit tout à l'heure que le statisticien en chef avait beaucoup de pouvoirs. S'il n'était pas obligé de solliciter des données d'ailleurs et qu'il pouvait effectuer lui-même ce dénombrement de façon régulière, ce serait un outil.
Cependant, dans la Loi, on ne dit pas que ce n'est que le recensement. On dit que le gouvernement fédéral a l'obligation de « dénombrer ». Je sais que les ministères ont la compétence pour le faire. Vous trouverez les outils nécessaires au dénombrement. Par conséquent, arrêtez d'essayer de nous faire avaler l'idée que le mot « estimation » est plus fort que « dénombrement »: selon moi, et en tout respect de la fonction publique, c'est illogique.
Cette semaine, je me suis entretenu avec des représentants de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones, qui m'ont rappelé l'importance du dénombrement. On parle ici de listes et des avantages que les commissions scolaires auraient à les communiquer. Or, même ces dernières disent que ce n'est pas assez et que cela doit être enchâssé dans la Loi. De plus, c'est aussi une demande de la Fédération des communautés francophones et acadienne.
Je ne comprends donc pas pourquoi le Parti libéral présente un sous-amendement visant affaiblir la Loi et à mal servir les minorités de partout au Canada. Est-ce que cela démontre la zizanie qui existe au sein de ce parti, comme on a pu le voir dans l'actualité au cours des derniers jours et des dernières semaines?
Ce matin, le député de Sackville—Preston—Chezzetcook...
J'ai beaucoup de respect pour mon honorable collègue, mais nous débattons présentement des amendements. S'il veut faire des commentaires au sujet de notre parti, je l'invite à s'y joindre. Ses commentaires n'ont aucun lien avec les amendements.
Vous avez raison, monsieur Drouin.
Monsieur Godin, je vous demande de vous en tenir au sous-amendement.
Monsieur le président, je prends note du commentaire de mon collègue, pour qui j'ai beaucoup de respect. Nous nous entendons beaucoup mieux sur les questions de politique internationale que sur celles de politique nationale, mais c'est une autre histoire. Ce que je soulève fait partie du débat, cependant, puisque cela montre que notre parti s'interroge sur les intentions de ce gouvernement.
Je veux dire une chose pour renforcer mon argument sur le dénombrement. Entre 1982 et 2001, le recensement a grandement sous-estimé le nombre d'enfants admissibles aux écoles de langue française hors Québec et n'a dénombré aucun enfant admissible aux écoles de langue anglaise au Québec. Il faut se souvenir que les recensements durant cette période ne recueillaient qu'une partie des données et qu'on ne faisait que des estimations, en extrapolant sur la base de chiffres.
Je vais donner un autre fait. Statistique Canada a ajouté des questions lors du Recensement de 2021 afin de dénombrer — et non estimer — les enfants admissibles à l'instruction en langue officielle minoritaire dans 100 % de la population.
Pourquoi cette objection, cette résistance à une proposition visant à nous donner les outils pour bien servir les minorités dans leur milieu? Je ne la comprends pas. C'est un outil, et nous voulons améliorer les outils: comment être contre ce principe? Le sous-amendement de mon collègue affaiblit mon amendement et affaiblirait la Loi.
Encore une fois, je tends la main à mes collègues et leur demande de réfléchir avant d'accepter ce sous-amendement. Nous devons laisser mon amendement intact afin que nous puissions, une fois la sanction royale accordée, commencer à dénombrer les enfants des ayants droit de façon plus précise. Cela restera encore dans le domaine de la statistique, monsieur le président, mais ce sera plus précis qu'une simple estimation, comme les chiffres nous l'ont démontré dans le passé.
Nous ne pouvons pas fonder notre démarche sur l'intention d'une commission scolaire, d'un service scolaire ou d'une municipalité de nous fournir une liste. Nous n'avons pas de contrôle sur de telles sources de données. Servons-nous des outils que nous avons à notre disposition. Je suis convaincu que, si cela ne suffit pas, les fonctionnaires fédéraux seront capables de trouver des outils pour bien dénombrer les ayants droit.
Je pense que le recensement est la clé. Cependant, je ne parle pas de recensement dans mon amendement. Je parle d'outils qui nous permettent de dresser un portrait le plus juste possible. Ces gens méritent notre attention et les aides financières.
Nous n'avons pas parlé des répercussions, mais il y en a. S'il y a moins de monde, il y a moins d'argent. S'il y a moins d'argent, il y a moins de services. S'il y a moins de services, il y a moins de formation. S'il y a moins de formation, le déclin du français continue, partout au Canada. Il est donc important que nous réfléchissions avant de voter sur ce sous-amendement.
Comme je le disais tout à l'heure, un collègue avec qui j'ai le privilège de travailler sur d'autres dossiers n'est pas ici, ce matin. Il est toujours présent le vendredi matin, sauf que, ce matin, il n'est pas ici. Je ne comprends pas pourquoi, mais...
Non, monsieur le président. Ce gars s'est battu avec vous et moi au Comité permanent des langues officielles, alors il est très pertinent que je mentionne que le député de Sackville—Preston—Chezzetcook est absent. Je ne l'appellerai pas par son nom.
Merci, monsieur le président.
Je vais revenir sur la question des coûts, que mon collègue M. Godin a soulevée. Si le gouvernement s'engage à utiliser tous les outils possibles pour obtenir l'information nécessaire pour donner les services, cela a un coût. Même si une estimation était faite par Statistique Canada en se basant sur l'information fournie par les provinces, sans aucune garantie qu'elles voudront la donner, il serait trop tard. Les commissions scolaires communiqueraient ces données trop tard et Statistique Canada publierait ses statistiques trop tard. Il serait trop tard pour offrir les services nécessaires en français dans les écoles francophones des provinces anglophones et les services en anglais dans les communautés anglophones au Québec.
S'il y a une volonté politique d'utiliser tous les outils nécessaires, il faudra dénombrer les enfants pratiquement à leur naissance, parce que les budgets prennent du temps à préparer. À la vitesse où vont les choses ici, les enfants de 0 à 5 ans ont le temps de se rendre jusqu'à l'université avant que les services de prématernelle soient donnés. C'est cela, la réalité. Il ne faut se fier à aucun outil provincial. On a tout ce qu'il faut, au fédéral.
Si on est capable d'envoyer un chèque à toutes les familles qui ont un enfant de 1 mois, on devrait être capable de savoir si les parents ont l'intention de l'envoyer à une école francophone ou anglophone. On ne toucherait à aucune compétence provinciale. C'est peut-être cela, l'outil qu'il nous faut. Cela nous donnerait un chiffre pour faire des prévisions. En se basant sur le nombre de naissances en 2024, par exemple, on aurait une idée du nombre d'enfants qui auraient besoin de services scolaires en français en 2029. On le saurait au moins cinq ans à l'avance.
Par contre, si on se contente d'outils et d'estimations, ces enfants seront rendus à l'université avant qu'on sache s'ils auraient préféré aller à l'école en anglais ou en français, ou s'ils n'ont même pas pu faire ce choix, parce que les écoles francophones dans les autres provinces étaient pleines, ce qui est déjà le cas.
Alors, on ne peut pas faire d'estimations, parce qu'il y a des coûts derrière cela. Si le gouvernement s'engage à utiliser tous les outils, il s'engage à trouver le bon nombre. S'il y a suffisamment de volonté, il est certain qu'on est capable de le faire. Cependant, si on veut faire du surplace, laissons les choses floues, et elles resteront floues pendant 50 ans encore.
Je reconnais que de grandes préoccupations ont été soulevées aujourd'hui quant à l'avenir des communautés francophones au pays. Reconnaissant que ces informations sont essentielles, je veux savoir si la question sur les enfants d'ayants droit va demeurer dans le formulaire court du recensement.
Merci, monsieur le président.
C'est probablement une question qu'il faudrait poser à Statistique Canada.
Cela dit, il semble y avoir une confusion quant aux termes utilisés dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles. J'aimerais donc clarifier la distinction entre les termes « engagement » et « obligation », si vous le permettez.
Dans le projet de loi, le libellé proposé visant la partie VII de la Loi sur les langues officielles commence par une série d'engagements. Ces derniers touchent quatre domaines: protection et promotion du français; apprentissage dans la langue de la minorité; article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés; épanouissement des minorités et promotion du français et de l'anglais. On indique ici l'intention du fédéral de s'y engager, mais il n'a pas tous les leviers nécessaires, puisque plusieurs de ces domaines relèvent des compétences provinciales et territoriales.
Tout de suite après, le libellé proposé dans le projet de loi énonce des obligations. Dans ce cas, le gouvernement fédéral a entièrement le contrôle des leviers et peut obliger la mise en œuvre de mesures positives.
L'amendement de M. Godin propose de transformer un engagement, dans une sphère où le fédéral ne contrôle pas tous les leviers, en obligation.
Il y aurait ici une obligation pour le fédéral de procéder à un dénombrement. Je reviendrai tout de suite après sur la différence entre un dénombrement et une estimation. Quoi qu'il en soit, pour répondre à ce qui constituerait maintenant une obligation, il faudrait se doter des outils nécessaires. Sinon, on ne serait pas en mesure de répondre à cette obligation. Pour que le fédéral y parvienne correctement, il lui faudrait d'autres outils qui relèvent des compétences des provinces et des territoires.
Le sous-amendement vise à corriger le fait que le fédéral ne dispose pas de tous les leviers nécessaires. Selon le libellé proposé par le sous-amendement, le fédéral procéderait périodiquement à une estimation à l'aide des outils nécessaires.
Il y a donc une différence entre une obligation et un engagement. Quand on ne dispose pas de tous les leviers nécessaires, on parle d'un engagement. Si on veut transformer l'engagement en obligation, il faut reconnaître qu'il manque certains outils pour répondre à cette obligation, et il faut les nommer. C'est ce que vise le sous-amendement.
Je vais maintenant expliquer la différence entre un dénombrement et une estimation.
Si on parle d'une estimation, alors il est question du recensement, qui a lieu tous les cinq ans. Il s'agit d'une estimation parce que, comme je l'ai expliqué, le nombre va continuer d'augmenter en 2023, puis encore en 2024, et ainsi de suite jusqu'au prochain recensement. Il s'agit d'une estimation, parce que les chiffres ne sont pas figés dans le temps et peuvent augmenter.
Madame Boyer, en ce qui concerne le recensement, permettez-moi d'ajouter une précision pour les gens qui sont ici.
Il y a le formulaire long et le formulaire court. Le formulaire court, ce n'est pas une estimation. S'il y a un recensement à l'aide du formulaire court, il ne s'agit plus d'une estimation.
Ce n'est pas sur une base annuelle.
Bref, dénombrer veut dire compter. Si on veut vraiment compter les ayants droit, il faut pouvoir utiliser d'autres outils qui relèvent des provinces et des territoires.
En fin de compte, il s'agit d'un choix terminologie entre le verbe « dénombrer » et le verbe « estimer ». S'il s'agit de faire une estimation, alors le fédéral à lui seul peut le faire. C'est un portrait instantané. Si on choisit le terme « dénombrer », alors il faut vraiment passer par les provinces pour confirmer les chiffres exacts de manière ponctuelle, car ce sont elles qui ont accès aux listes des conseils scolaires, par exemple.
Merci, monsieur le président.
Madame Boyer, j’ai de la misère à saisir votre commentaire.
Vous dites que l'amendement que nous avons proposé entraîne une obligation. Dans le texte actuel du projet de loi, il est bel et bien écrit « s'engage à ». L'amendement que j'ai présenté reprend le même terme. Elle est déjà là, l'obligation. Ce n'est pas mon amendement qui crée une obligation.
Ce que je dis, c'est qu'au lieu d'une estimation, il faut procéder à un dénombrement. Il ne faudrait pas me prêter une intention que je n'ai pas. Je pense qu'il est important d'apporter une précision à ce qui a été dit par ma collègue la fonctionnaire de Patrimoine canadien. Au moyen de mon amendement, je ne crée pas une obligation supplémentaire. Je ne fais que déterminer une méthode, tout simplement. Cette méthode, c'est le dénombrement, qui est plus fort que l'estimation, à mon avis.
À ce sujet, j'aimerais lire un extrait d'un rapport du Comité permanent des langues officielles, alors présidé par l'honorable Denis Paradis, portant sur le dénombrement des ayants droit. D'ailleurs, mon collègue M. Généreux a signé ce rapport. Selon ce qui a été dit précédemment, cela voudrait probablement dire que nous, dans notre rôle de législateur, avons commis des erreurs et fait de mauvais libellés. Je vais lire l'extrait en question, puis je vais demander à Mme Boyer de nous donner l'interprétation qu'elle en fait:
En dépit de cela, les témoins sont catégoriques: le questionnaire abrégé du recensement de la population canadienne — qui est remis à 100 % de la population — est la seule option envisageable pour dénombrer adéquatement les ayants droit.
Monsieur le président, cela revient à votre commentaire de tout à l'heure à propos du formulaire court et du formulaire long. C'est donc l'ensemble de la population qui est dénombrée.
Madame Boyer et chers membres du Comité, ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est écrit dans un rapport que les députés ont rédigé à l'époque, qui a été validé par les analystes et les greffiers et qui se trouve dans le livre d'histoire du Canada.
Je pense que c'est important de rectifier les faits, et c'est ce que je viens de faire. J'aurais bien d'autres choses à dire, mais je ne veux pas faire d'obstruction systématique.
Monsieur le président, nous avons adopté un rapport à ce comité pour donner une orientation. Vous vous rappellerez que tout le Comité s'est battu pour que la question du dénombrement se retrouve dans le recensement.
Comme mon collègue vient de le dire, nous n'imposons pas une obligation supplémentaire. C'est juste une question de terminologie, parce que l'importance des mots est essentielle. Si mes collègues m'écoutaient, ils comprendraient ce que je veux dire. Je suis totalement d'accord avec M. Godin: nous ne pouvons pas nous permettre de diluer cela.
En fait, les outils nécessaires existent. La réalité est que, si nous n'imposons pas dans la Loi sur les langues officielles l'obligation de dénombrer les ayants droit et que nous continuons à nous fier à des estimations, ce sont toutes les communautés de langue officielle en situation minoritaire qui en subiront les conséquences. Il faut que nous soyons conséquents par rapport à ce qui s'est fait par le passé. Historiquement, nous avons une occasion à saisir, car elle ne se représentera pas avant 5, 10, 15 ou 20 ans. Il s'agit de vraiment mettre les bons mots à la bonne place.
Mon collègue M. Lehoux l'a dit tantôt, il faut appeler un chat un chat. Ce qu'il faut que nous fassions, c'est dénombrer les ayants droit, et non simplement en estimer le nombre. Il y a une différence fondamentale entre ces deux mots et il faut que mes collègues en saisissent l'importance. Nous ne pouvons pas diluer cela. Tous ensemble, au Comité, nous nous sommes assurés qu'il allait y avoir un dénombrement dans le recensement. Soit dit en passant, 100 % de la population doit remplir le formulaire court du recensement.
À ce sujet, je suis d'accord avec mon collègue M. Godin. Il faut absolument que tout le monde réfléchisse comme il faut avant de voter là-dessus.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le sous-amendement de M. Serré?
Puisqu'il n'y en a pas, nous allons procéder au vote.
(Le sous-amendement est adopté par 6 voix contre 5.)
Nous revenons donc à l'amendement CPC‑24 tel qu'il a été modifié.
Avant de procéder au vote, y a-t-il d'autres interventions?
Monsieur Godin, vous avez la parole.
Monsieur le président, j'aimerais que la séance soit suspendue un instant, car j'aurais besoin de consulter la greffière.
Nous reprenons la séance.
Nous discutons maintenant de l'amendement CPC‑24 tel qu'il a été modifié.
S'il n'y a pas d'autres interventions, nous allons passer au vote.
Je cède donc la parole à la greffière.
C'est à vous que je voudrais parler, monsieur le président, et c'est votre réponse à vous que je voudrais entendre.
Je sais que la greffière est intervenue pour commencer le vote sur l'amendement CPC‑24. Cependant, je voudrais que vous demandiez s'il y a consentement unanime pour que je retire mon amendement.
Le vote a déjà commencé.
La seule façon de procéder, monsieur Godin, est d'obtenir le consentement unanime. Dès qu'il y a consentement unanime, le Comité peut tout faire.
Y a-t-il consentement unanime du Comité pour que l'amendement CPC‑24 soit retiré?
Nous avions déjà commencé le vote sur l'amendement CPC‑24, mais, afin d'éviter toute confusion, nous allons le reprendre du début.
(L'amendement modifié est adopté par 6 voix contre 5. [Voir le Procès-verbal])
Les amendements BQ‑30 et BQ‑31, qui se trouvent respectivement aux pages 75 et 76 de notre liasse d'amendements, ne seront donc pas présentés.
Nous passons maintenant à l'amendement CPC‑26.
Avant de donner la parole à M. Godin, je tiens à préciser que, si l'amendement CPC‑26 est adopté, les amendements LIB‑14, LIB‑15 et NDP‑6 ne pourront pas être proposés, puisqu'ils visent les mêmes lignes du projet de loi.
Monsieur Godin, je vous cède la parole.
Merci, monsieur le président.
C'est un autre amendement qui, selon moi, est très important. Après avoir entendu de nombreux témoins, dont des représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, je pense que l'utilisation du mot « les » au lieu du mot « des » change tout. C'est seulement une lettre qui change dans le mot, mais le mot « des » est plus évasif que le mot « les ».
Je vais lire l'amendement et, par la suite, je présenterai mes arguments pour essayer de convaincre mes collègues de l'adopter.
L'amendement CPC‑26 propose que le projet de loi C‑13, à l’article 21, soit modifié par substitution, aux lignes 29 et 30 de la page 11, de ce qui suit:
que soient prises les mesures positives nécessaires pour mettre en œuvre les engagements énon-
Autrement dit, outre le changement que je viens d'expliquer, l'amendement vise, après les mots « mesures positives », à remplacer « qu’elles estiment indiquées » par « nécessaires ».
Je vais récapituler.
Un jugement a été rendu en mai 2018, après que la Fédération des francophones de la Colombie‑Britannique, la FFCB, a été obligée de se battre en cour pour que des services soient offerts en français ou pour que les investissements retournent dans la communauté francophone. Il était question, entre autres, des centres d'emploi. Je pense que tout le monde connaît le procès et son dénouement. C'est exactement en s'appuyant sur la distinction entre les mots « les » et « des » que le juge a donné gain de cause à la FFCB, si je me souviens bien. C'était une cause opposant la FFCB et Emploi et Développement social Canada.
Par la suite, il y a eu le projet de loi C‑32, dans lequel on a bien fait les choses.
On a ensuite fait appel du jugement de la Cour fédérale. Vous comprendrez que c'est assez particulier que le fédéral poursuive une organisation qui défend les minorités.
Dans le projet de loi C‑13, on indique « que soient prises les mesures positives qu'elles estiment indiquées », en parlant des institutions fédérales. J'ai des indications selon lesquelles on voudrait remplacer le mot « les » par « des », mais on verra ce qui se passera plus tard au Comité. Il est important de laisser le mot « les » et de retirer « qu'elles estiment indiquées », en vue notamment de procéder au dénombrement des ayants droit, plutôt que d'en faire une estimation. C'est là tout le débat que nous venons d'avoir en comité.
Si nous adoptons l'amendement CPC‑26, cela aura pour effet de renforcer le projet de loi. Je pense que l'objectif de tous les membres ici est de bien servir les deux langues officielles. Si jamais, dans un avenir rapproché, on fait une intervention pour remplacer le mot « les » par le mot « des », cela aura pour effet de nous faire reculer encore plus loin que le projet de loi C‑32.
L'amendement CPC‑26 est primordial pour respecter le sens de nos travaux, pour respecter la FFCB et pour respecter la FCFA, qui regroupe près de 200 organismes représentant des minorités francophones à l'extérieur du Québec. Cet amendement est primordial, bien qu'il semble banal tant il est court. Il vise à faire deux choses: laisser le mot « les », au lieu d'utiliser un autre mot comme « des », et retirer les mots « qu'elles estiment indiquées ».
J'ai déjà présenté mes arguments, tout comme l'ont fait mes collègues, sur le fait d'éliminer l'idée d'estimation.
Je vais m'arrêter là, monsieur le président. Je pense qu'il est bien important que nous adoptions cet amendement.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier mon collègue d'avoir proposé son amendement.
Je ne pense pas que l'amendement ait pour effet de remplacer le mot « des » par le mot « les », étant donné que c'est déjà inclus dans le projet de loi. Par contre, il apporte une modification en y ajoutant le mot « nécessaires ». À ce sujet, j'aimerais poser une question aux fonctionnaires qui sont parmi nous.
La dernière fois, vous avez parlé de l'effet qu'aurait l'inclusion du mot « nécessaires », de sorte qu'on mentionne « les mesures positives nécessaires ». Je veux être clair: on ne dit pas « des mesures positives nécessaires », mais bien « les mesures positives ». C'est déjà dans le projet de loi. L'amendement a pour effet d'ajouter le mot « nécessaires ».
À votre avis, quel effet aurait l'ajout du mot « nécessaires »?
Merci beaucoup de la question.
L'amendement vise le début du libellé proposé dans le projet de loi correspondant aux obligations qui seraient prévues à la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Il y a effectivement une obligation. Les mots « les mesures positives » restent tels quels. Le texte proposé dans le projet de loi C‑13 reflète la jurisprudence, et c'est repris dans l'amendement. Par contre, ce qui est nouveau, c'est le mot « nécessaires ». Il faut se demander ici qui décide quelles mesures sont nécessaires. Est-ce le ministère qui doit déterminer ou juger si une mesure positive en particulier est nécessaire? Est-ce que ce sont plutôt les intervenants qui déterminent et font la preuve que la mesure positive en question est nécessaire?
Ici, le mot « nécessaires » pourrait avoir un effet limitatif sur les mesures qui seraient prises. Il y a en effet un jugement à poser pour déterminer si une mesure est nécessaire. Est-elle nécessaire pour les intervenants ou nécessaire pour le ministère? Le ministère pourrait juger qu'elle n'est pas nécessaire. Les intervenants devraient alors démontrer pourquoi elle l'est. Cela pourrait donc avoir un effet limitatif qui n'était pas prévu.
La formulation qu'on retrouve dans le projet de loi C‑13, à savoir « qu’elles estiment indiquées », donne au ministère le choix de les imposer. Le fardeau de la preuve ne s'applique donc pas, dans ce cas.
M. Fallu pourrait sans doute vous donner plus de détails à ce sujet.
L'obligation de prendre des mesures positives a été introduite dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles en 2005, par l'entremise du projet de loi S‑3.
Je ne répéterai pas tout ce que les intervenants ont fait valoir devant votre comité, mais disons qu'au fil des ans, un certain nombre de critiques ont été formulées quant à la mise en œuvre. La jurisprudence a aussi évolué. La dernière décision rendue dans ce dossier est le jugement de la Cour d'appel fédérale dans la cause opposant la FFCB et EDSC.
La formulation « les mesures qu'elles estiment indiquées » qu'on retrouve dans le projet de loi C‑13 et la formulation actuelle employée au paragraphe 41(2) de la Loi s'équivalent, même si les mots sont légèrement différents. Essentiellement, il s'agit quand même d'une obligation contraignante pour les institutions fédérales.
Comme Mme Boyer l'a mentionné, l'ajout du mot « nécessaires » pourrait introduire un genre de filtre. Ce n'est probablement pas ce qui était envisagé, mais nous pensons que cette formulation pourrait créer un genre de plafond ou une obligation de démontrer pourquoi une mesure est nécessaire. En revanche, la formulation qu'on retrouve dans la Loi actuelle et celle qu'on retrouve dans le projet de loi C‑13 donnent aux institutions fédérales la latitude nécessaire pour décider des meilleurs moyens.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme Boyer.
Vous avez dit que le libellé proposé dans l'amendement CPC‑26 laissait aux organismes la possibilité de juger si une mesure était nécessaire. Expliquez-moi quelle est la différence entre les formulations. Dans le projet de loi, lorsqu'on dit que les institutions fédérales doivent « veiller à ce que soient prises les mesures positives qu’elles estiment indiquées », c'est une question d'interprétation. Les organismes vont quand même faire valoir leurs arguments auprès des fonctionnaires. La formulation « les mesures positives nécessaires » implique la même chose de la part des fonctionnaires. Ce sont quand même eux qui vont décider si, oui ou non, une mesure est nécessaire. Que ce soit « les mesures positives qu’elles estiment indiquées » ou « les mesures positives nécessaires », dans les deux cas, c'est une question d'interprétation. Il n'y a pas de résistance ou d'éléments qui vont obstruer le travail des fonctionnaires.
Pouvez-vous m'expliquer en quoi le mot « nécessaires » est plus contraignant que les mots « qu'elles estiment indiquées »? Pour ma part, je ne comprends pas votre raisonnement.
Je demanderais à M. Newman, du ministère de la Justice, d'expliquer plus clairement la distinction entre les deux termes.
Merci.
Il y a une marge d'appréciation lorsqu'on met en œuvre des mesures positives. L'expression « qu'elles estiment indiquées » accorde un certain pouvoir discrétionnaire aux institutions fédérales, qui sont tout de même les maîtres d'œuvre de la conception et de la prestation de leurs propres programmes et services. Cette expression leur donne une certaine marge de manœuvre dans la mise en œuvre de cet engagement et de ces obligations.
Cela dit, le projet de loi C‑13 énonce une série de mesures positives et des balises qui ajoutent davantage à cet égard. Ces balises aident beaucoup et elles vont dans le sens du jugement de la Cour d'appel fédérale qui a été mentionné: il faut notamment que les mesures soient concrètes et soient prises avec l'intention d'avoir un effet favorable, tout en respectant les nécessités de protection et de promotion. Je n'ai pas besoin de lire toutes ces dispositions, mais c'est quand même considérable.
Lorsqu'on regarde l'évolution de la partie VII depuis 1988, le gouvernement fédéral est allé bien au-delà de l'engagement initial, qui était un engagement solennel, mais qui n'avait pas pour but de créer des obligations. Maintenant, les obligations sont en place et il faut aussi qu'elles se concrétisent. Cela dit, il faut quand même laisser un certain pouvoir discrétionnaire ou une marge de manœuvre aux institutions fédérales pour mettre en œuvre ces mesures de la manière « qu'elles estiment indiquées ». C'est le vocable que nous préférons utiliser.
En fait, monsieur Newman, vous venez de terminer votre intervention en disant que vous préférez utiliser l'expression « qu'elles estiment indiquées ». Je comprends que c'est une préférence, mais vous ne m'avez pas convaincu que la notion de « mesures positives nécessaires » sera contraignante dans son application dans le quotidien des fonctionnaires.
Le mot « nécessaires » impose une norme élevée. Il soulève aussi un certain débat sur ce qui est nécessaire et ce qui ne l'est pas. Par contre, le mot « indiquées » laisse aux institutions une marge de manoeuvre, une marge discrétionnaire pour qu'elles mettent en œuvre l'engagement en respectant son esprit, sans nécessairement les contraindre au point où elles doivent justifier la nécessité de chaque mesure.
Monsieur Newman, votre réponse s'applique-t-elle si la formulation retenue mentionne le verbe « estiment »?
Non.
Vous me dites que le mot « nécessaires » est contraignant, qu'il entraîne des obligations, qu'il est sujet à interprétation et qu'il est discrétionnaire. Comment définit-on le mot « nécessaires »? Ce qui est nécessaire pour moi ne l'est peut-être pas nécessairement pour vous et vice-versa. Or, c'est la même chose pour le verbe « estiment ». Quand j'estime, je le fais d'une façon et vous le faites d'une autre. C'est donc discrétionnaire aussi.
De ces deux mots, comment pouvons-nous dire que l'un est plus fort que l'autre?
J'imagine que vous proposez le mot « nécessaires » parce que vous le jugez plus contraignant que l'expression « qu'elles estiment indiquées ».
Pour nous, la nécessité est un critère qui va entraîner des débats quand il s'agira de déterminer si le seuil de nécessité est atteint ou pas. Il faut aussi laisser à ces institutions un certain pouvoir discrétionnaire. Le libellé actuel reflète ce désir de maintenir une marge de manoeuvre, une certaine souplesse dans la mise en oeuvre de ces obligations. Nous présumons que les institutions agiront de bonne foi, conformément à la partie VII de la Loi et aux nouvelles dispositions.
En fait, vous avez raison, dans le sens où le mot « nécessaires » est, selon nous, plus contraignant, tout en n'imposant pas de limites et en laissant quand même libre cours à l'interprétation.
Notre but est de renforcer la démarche pour que les institutions fédérales soient encore plus sensibles aux mesures positives. Qu'il s'agisse de mesures indiquées ou de mesures nécessaires, c'est la même chose, mais le terme « nécessaires » est un peu plus fort.
Nous tentons d'apporter une nuance sémantique.
Merci, monsieur Godin.
Comme il n'y a pas d'autres interventions à ce sujet, nous allons mettre aux voix l'amendement CPC‑26.
(L'amendement est rejeté par 6 voix contre 5.)
Cela nous amène à l'amendement LIB‑14.
Je tiens à porter à l'attention du Comité que, si l'amendement LIB‑14 est adopté, l'amendement LIB‑15, à la page 79 de la liasse d'amendements, ne pourra pas être proposé, car il est identique. De plus, si l'amendement LIB‑14 est adopté, l'amendement NDP‑6, à la page 80 de la liasse d'amendements, ne pourra pas être proposé non plus, cette fois en raison d'un conflit de lignes.
Monsieur Drouin, je vous cède la parole.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais suivre vos conseils et tout simplement lire l'amendement LIB‑14 intégralement. Ce dernier propose que le projet de loi C‑13, à l'article 21, soit modifié par substitution, aux lignes 29 à 31, à la page 11, de ce qui suit:
que les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) soient mis en œuvre par la prise de mesures positives.
Je vais demander aux fonctionnaires, qui ont passé beaucoup de temps avec nous durant les dernières réunions, de commenter cet amendement par rapport au texte initial du projet de loi.
Merci, monsieur le président.
Le libellé actuel du projet de loi demande aux ministères de veiller à ce que les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (4) de l'article 41 de la Loi, tel que modifié par le projet de loi C‑13, soient mis en œuvre par la prise de mesures positives.
Cet amendement formulerait la première obligation mentionnée à la partie VII de la Loi de façon plus directe. Tout en conservant l'idée qu'il s'agit de plusieurs mesures positives et non d'une seule, l'amendement supprimerait la discrétion accordée par le libellé actuel du projet de loi, dont nous venons de parler en étudiant l'amendement CPC‑26. L'amendement enlèverait ainsi à un ministère la possibilité de juger qu'une mesure n'est pas indiquée ou importante.
En enlevant la possibilité d'un tel jugement de valeur, l'amendement obligerait les ministères à mettre en place des mesures positives pour répondre aux engagements mentionnés aux paragraphes (1) à (4) de l'article 41 de la Loi, tel que modifié par le projet de loi.
Monsieur le président, ce que j'avais prédit est arrivé.
L'amendement LIB‑14 propose « que les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) soient mis en œuvre par la prise de mesures positives », au lieu de parler « des mesures positives ».
Selon moi, une référence à toutes les mesures positives démontrerait une plus grande obligation de résultat. Selon ma compréhension, l'expression « de mesures positives » laisserait entendre que certaines mesures peuvent être prises, mais pas toutes. La nuance est donc bien importante ici.
Nous discutons d'une lettre. C'est donc assez précis, mais, tant qu'à faire notre travail, faisons-le bien. Je ne suis pas à l'aise avec la formulation « de mesures ». On devrait utiliser la formulation « des mesures », afin d'inclure toutes les mesures que les fonctionnaires ont définies. Présentement, il n'y a pas d'engagement à ce que toutes les mesures qui ont été définies soient mises en place, certaines pouvant être laissées au bon vouloir de fonctionnaires ou de politiciens qui pourraient décider que même s'il y a dix mesures, ils n'en appliqueront que trois et rangeront les sept autres dans le tiroir.
J'aimerais entendre ce que Mme Boyer et M. Newman ont à dire à ce sujet.
Je remercie le député de sa question.
À mon avis, cela reflète la jurisprudence actuelle, parce que le libellé proposé dans l'amendement LIB‑14 parle « de mesures positives » au pluriel. L'obligation de la prise « de mesures positives » implique donc que « des » mesures positives seront prises.
Je vais maintenant me tourner vers mon collègue du ministère de la Justice afin qu'il confirme que cela reflète bien la jurisprudence la plus récente.
C'est aussi la façon dont je comprends les choses. Comme je l'ai dit tout à l'heure, l'idée est d'adopter une série de dispositions qui vont dans le même sens que le jugement de la Cour d'appel fédérale dont il a été fait mention. Évidemment, cette dernière devait composer avec le texte tel qu'il était rédigé.
Le présent amendement propose de supprimer l'élément « qu'elles estiment indiquées » pour tout simplement mettre l'accent sur le fait que les institutions vont prendre les mesures. On peut donc conclure qu'il s'agirait des mesures nécessaires, ce qui va dans le même sens que « les mesures positives qu'elles estiment indiquées », si on veut.
Comme Mme Boyer l'expliquait, je pense que le libellé proposé va englober la gamme des mesures pertinentes, sans pour autant contraindre les institutions à un point tel qu’elles perdraient toute souplesse dans la mise en œuvre de cet engagement et de ces obligations.
En fait, monsieur le président, le libellé du nouveau paragraphe 41(5) de la Loi sur les langues officielles que propose l'article 21 du projet de loi C‑13, rédigé par le gouvernement, demande « que soient prises les mesures positives qu'elles estiment indiquées pour mettre en œuvre les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) ». Nous ne reviendrons pas sur le débat entourant l'expression « qu'elles estiment indiquées ».
Or, ce même gouvernement propose maintenant un amendement qui viendrait selon moi amoindrir ou ramollir le projet de loi C‑13 en suggérant « la prise de mesures positives ». On élimine le mot « les » de la ligne 29 du projet de loi pour y inscrire le mot « de », qui a la même signification que « des ».
Je reviens à mon exemple de tout à l'heure. En supposant l'existence de dix mesures positives, l'amendement LIB‑14 permettrait de n'en appliquer qu'une seule, ou trois, quatre, cinq, ou encore les dix. On ne le sait pas. Or, le libellé actuel du projet de loi à l'étude obligerait les institutions fédérales à appliquer les dix mesures. Pourquoi diminuer et amoindrir ce projet de loi?
Nous pouvons demander à Mme Boyer ou à M. Newman de répondre. Si quelqu'un d'autre veut répondre, cette personne est la bienvenue. Les mesures positives ne touchent pas M. Quell, je crois.
À mon avis, ce n'est pas un amoindrissement de l'engagement. Il est évident qu'il s'agit d'une obligation pour le gouvernement fédéral. Cela semble être une façon plus directe de dire qu'il doit prendre des mesures positives, et ce, au pluriel.
Effectivement, le nombre exact de mesures positives à prendre n'est pas prescrit. C'est à la Couronne de décider de l'investissement et du niveau d'ambition et c'est au gouvernement de décider du budget. Cela dit, le libellé précise l'obligation de prendre des mesures positives afin de mettre en œuvre ces engagements.
La phrase du nouveau paragraphe 21(5) de la Loi proposé par l'article 21 du projet de loi C‑13 ne se termine pas après « mesures positives », puisqu'il n'y a pas de point. Selon le libellé actuel, il est prévu « que soient prises les mesures positives qu'elles estiment indiquées pour mettre en œuvre les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) ». Il s'agit donc des mesures indiquées, opportunes.
Pour sa part, la version anglaise est très forte.
[Traduction]
Every federal institution has the duty to ensure that positive measures are taken for the implementation of the commitments
Il me semble que ce libellé est même plus fort que si l'on disait « les mesures positives qu'elles estiment indiquées sont prises... ».
On pourrait aussi dire « les mesures positives nécessaires pour mettre en œuvre les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) sont prises ».
[Français]
Pour moi, c'est un libellé assez fort.
Monsieur Godin, avant que vous posiez une autre question, je veux vous informer que, pour toutes sortes de raisons, nous devons terminer à 10 h 45 précises. Je vous laisse continuer, mais, à 10 h 45, nous allons devoir lever la séance, même si nous n'avons pas fini la discussion sur l'amendement LIB‑14.
Vous avez la parole.
Madame Boyer, vous avez dit tout à l'heure que vous aviez l'obligation de faire la liste des mesures qui entraînent des dépenses. L'amendement vous oblige-t-il à divulguer la liste de toutes les mesures pour que nous, législateurs, décidions?
Je pense que Mme Boyer a répondu un peu aux inquiétudes de M. Godin. L'amendement n'amoindrit pas le projet de loi quant aux mesures positives.
Madame Boyer, pouvez-vous nous donner un exemple de règlement, dans la partie VII, pour démontrer que cela n'amoindrit pas le projet de loi?
Merci.
Monsieur Serré, vous parlez de règlements. La partie VII prévoit effectivement un pouvoir réglementaire depuis que la Loi a été renforcée en 2005. Toutefois, à ce jour, il n'a pas été exercé. Il n'y a donc aucun règlement en place actuellement, mais le pouvoir réglementaire demeure. Il est déplacé au nouveau paragraphe 41(11) de la Loi proposé par le projet de loi C‑13, mais c'est essentiellement le même pouvoir réglementaire que celui qu'on trouve dans la version actuelle de la Loi. Le but d'un règlement d'application de la partie VII serait de baliser la manière dont les obligations doivent être remplies.
Par ailleurs, je vous ferai remarquer que les nouveaux paragraphes 41(6) à 41(10) de la Loi proposés par le projet de loi C‑13 clarifient les démarches que doivent prendre les institutions fédérales en matière de mesures positives, pour répondre à d'éventuels problèmes de mise en œuvre. Tout cela peut également être davantage précisé par voie réglementaire, ainsi que par des instruments de politique du Conseil du Trésor. Ces instruments sont une nouveauté apportée par le projet de loi C‑13, car la version actuelle de la Loi ne prévoit pas cette possibilité à la partie VII.
Il y a donc des façons d'être encore plus précis pour donner des lignes directrices aux institutions fédérales. Toutefois, même si j'aimerais bien que ce soit nous, les fonctionnaires, qui votions les budgets, ce n'est pas le cas.
Je pense que nous avons été très raisonnables. Nous voulons que le débat avance le plus rapidement possible et que nous ayons le temps de faire le tour des amendements. Jusqu'à maintenant, nous avons étudié 20 articles sur 71, et nous avons débattu et voté 44 amendements. Nous sommes rendus à la page 78 des 229 de la liasse d'amendements.
Outre l'application de la loi 101 aux entreprises de compétence fédérale au Québec, l'article 54 du projet de loi C‑13 est important pour les francophones hors Québec.
Je pense donc qu'il est très important de terminer le débat et de procéder le plus rapidement possible.
Effectivement.
Merci de votre intervention, monsieur Beaulieu, mais il faut vraiment nous concentrer sur l'amendement LIB‑14.
Monsieur Godin, vous avez la parole.
J'en ferai la lecture, mais on n'aura pas le temps d'en débattre, puisque je comprends qu'on ne pourra pas prolonger la réunion.
Je propose donc que l'amendement soit modifié, par substitution, aux mots « les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) soient mis en oeuvre par la prise de mesures positives. » de ce qui suit:
soient prises les mesures positives pour mettre en œuvre les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3).
Je ne l'ai pas devant moi, mais, si j'ai bien compris, la modification proposée s'insérerait après les mots « les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3) ».
En fait, c'est à la ligne 29 de la page 11 du projet de loi. Les lignes 29, 30 et 31 seraient remplacées par les mots « que soient prises les mesures positives pour mettre en œuvre les engagements énoncés aux paragraphes (1) à (3). »
Je l'ai peut-être mal libellé, mais vous savez que nous sommes pressés.
Monsieur Godin, je comprends l'idée de votre sous-amendement, mais, en matière de procédure, un sous-amendement qui élimine toute la substance de l'amendement est irrecevable.
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