LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le vendredi 2 juin 2023
[Enregistrement électronique]
[Français]
Nous entamons maintenant la partie publique de la séance.
Bienvenue à la 62e réunion du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(3) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 21 avril 2023, le Comité se réunit afin de poursuivre son étude sur l'accroissement de l'immigration francophone au Canada.
J'informe le Comité que tous les députés et les témoins qui participent à distance ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
Pour garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais transmettre certaines consignes aux témoins et aux députés.
Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
En ce qui concerne l'interprétation, ceux qui participent au moyen de Zoom peuvent choisir, au bas de l'écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Ceux qui sont dans la salle peuvent utiliser les écouteurs et choisir le canal désiré.
Je vous rappelle que toutes les interventions des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins.
Tout d'abord, nous recevons Mme Anne‑Michèle Meggs, ancienne directrice de la planification et de la reddition de comptes au ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration du gouvernement du Québec. Elle comparaît à titre personnel et se joint à nous par vidéoconférence.
Nous recevons également Mme Bintou Sacko, directrice de l'Accueil francophone du Manitoba. Je lui souhaite le bonjour: je sais qu'il est tôt au Manitoba.
De la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, nous recevons en personne M. Yves‑Gérard Méhou‑Loko, vice-président, et M. Alain Dupuis, directeur général. Ce sont des habitués. Je leur souhaite de nouveau la bienvenue chez nous.
Pour terminer, nous recevons Mme Roukya Abdi Aden, gestionnaire de la concertation nationale en développement économique et employabilité pour le Réseau de développement économique et d'employabilité du Canada, soit le RDEE Canada.
Chacun des témoins disposera de cinq minutes pour faire sa présentation, avant de commencer la période des questions. J'aviserai les témoins quand il leur restera environ 30 secondes. Je serai très sévère pour le temps, car il y a beaucoup de témoins et je tiens à ce que tout le monde puisse poser des questions, qui seront certainement nombreuses. Je tiens à le préciser pour ne pas que les témoins soient froissés si je les interromps après cinq minutes.
Madame Meggs, vous êtes la première à intervenir. Vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
C'est toujours un honneur et un privilège de pouvoir témoigner devant vous.
Quelques décisions et événements importants ont eu lieu depuis notre dernière rencontre sur le même sujet, en avril 2022.
Du côté fédéral, le projet de loi C‑13, qui vise à modifier la Loi sur les langues officielles, a été adopté par la Chambre des communes. Je vous en félicite. Je sais que vous avez travaillé très fort.
Du côté du Québec, la réforme de la Charte de la langue française a été adoptée et est en train d'être mise en application. Tout dernièrement, la ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration a annoncé ses propres initiatives concernant l'immigration et la langue française.
Ce matin, je veux attirer votre attention sur un engagement particulier dans le projet de loi C‑13: celui selon lequel le gouvernement fédéral, reconnaissant et prenant en compte le fait que le français « est en situation minoritaire au Canada et en Amérique du Nord en raison de l'usage prédominant de l'anglais », s'engage « à protéger et à promouvoir le français ». Le projet de loi reconnaît même « la nécessité de protéger et promouvoir le français dans chaque province et territoire » et stipule que les institutions fédérales devraient « éviter ou, à tout le moins [...] atténuer les impacts négatifs directs que leurs décisions [...] pourraient avoir sur [ces] engagements », dans la réalisation de leur mandat.
S'il y a un domaine où la reconnaissance de l'importance de la protection du français au Québec est claire et évidente depuis plus de 50 ans, c'est celui de l'immigration.
Le préambule de l'entente Couture‑Cullen, signée en 1978 par le Canada et le Québec, reconnaissait que l'immigration « doit contribuer à l'enrichissement socioculturel du Québec compte tenu de sa spécificité française ».
L'accord du lac Meech incorporait les principes de cette entente et allait plus loin. On y trouvait l'engagement d'une entente en matière d'immigration avec le Québec en vertu de laquelle le Canada allait retirer les services fédéraux d'intégration linguistique et culturelle pour les personnes immigrantes s'établissant au Québec lorsque le Québec fournirait de tels services.
L'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains, signé en 1991 et toujours en vigueur, est la mise en application de cet engagement, malgré l'échec de l'accord du lac Meech. L’immigration étant une compétence partagée dans la Constitution, l'accord sur l'immigration énonce le rôle de chaque gouvernement en la matière. Il a aussi un statut quasi constitutionnel, dans le sens où il ne peut être modifié sans le consentement des deux gouvernements.
Nous avons donc une réforme de la Loi sur les langues officielles qui stipule que les institutions fédérales évitent les initiatives qui pourraient avoir un impact négatif sur l'engagement de protéger le français dans chaque province. Nous avons également un accord Canada-Québec sur l'immigration qui vise clairement à protéger la spécificité française de la province.
Au-delà du contexte législatif, j'ajouterai un dernier point pour compléter le portrait.
L'usage de l'anglais n'est pas seulement prédominant au Canada et en Amérique du Nord. Le nombre de personnes parlant anglais dans le monde, soit 1,3 milliard, est presque cinq fois plus grand que le nombre de personnes parlant français, qui est de 277 millions. Le bassin de recrutement des personnes à l'étranger qui parlent français est donc cinq fois plus petit. Il ne sera jamais facile d'en attirer assez pour maintenir le poids démographique des francophones, que ce soit au Québec, hors Québec ou au Canada dans son ensemble.
De plus, il sera toujours plus facile d'obtenir la résidence permanente dans une autre province que le Québec, puisque la sélection se fait par le Québec, mais l'admission se fait par le fédéral. En outre, certaines politiques et décisions administratives du gouvernement fédéral en matière d'immigration nuisent encore à l'attractivité du Québec ou ont le potentiel d'attirer des personnes immigrantes francophones à statut temporaire au Québec vers une autre province pour faire leur demande de résidence permanente. J'en ai nommé quelques exemples, la dernière fois. Je pourrai vous en fournir d'autres pendant la période d'échange, si cela vous intéresse.
Ces politiques et décisions du fédéral vont peut-être aider à atteindre les cibles d'immigration francophone hors Québec, mais de telles mesures vont à l'encontre de l'esprit et de la lettre du projet de loi C‑13, et certainement à l'encontre de l'esprit et des objectifs de l'accord Canada-Québec. L'immigration francophone est critique pour l'ensemble de la francophonie canadienne.
Merci de votre attention. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Merci, madame Meggs.
Je cède maintenant la parole pour cinq minutes à Mme Sacko, de l'Accueil francophone du Manitoba.
Merci, monsieur le président.
Chers membres du Comité permanent des langues officielles, je vous remercie grandement de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui.
Je m'appelle Bintou Sacko et je suis directrice de l'Accueil francophone du Manitoba. Ce service est une initiative de la Société de la francophonie manitobaine.
Le dossier de l'immigration francophone fait partie des grandes priorités de l'agrandissement de l'espace francophone au Manitoba. Trois grandes thématiques nous ont été présentées, et je vais vous en parler de façon très concrète et pragmatique.
Je commencerai par parler des services consulaires qui sont nécessaires à l'étranger pour soutenir les immigrants provenant de pays francophones, notamment de l'Afrique.
Depuis quelques années, certains bureaux des visas, selon le modèle qui a été conçu, qu'il s'agisse d'ambassades ou de hauts-commissariats qu'on retrouve encore au Canada, offrent des services à beaucoup de pays, notamment en Afrique subsaharienne. Par exemple, le bureau de Dakar compte 16 pays dans son bassin de service, et celui situé en France en compte 14. Il importe aussi d'examiner la provenance des étudiants internationaux et des immigrants francophones. De manière générale, 82 % des pays reçoivent les services du bureau de Dakar et 33 % des pays reçoivent ceux du bureau de Dar es‑Salaam. Les demandes en provenance de neuf pays d'Afrique connaissant un taux de rejet de 75 à 80 %. Cela joue beaucoup sur l'attractivité et le recrutement des gens qui doivent venir de ces zones.
Il est important que le gouvernement du Canada agisse de manière concrète pour améliorer l'accessibilité aux services dans les ambassades et les consulats canadiens en Afrique subsaharienne. De plus, il doit désengorger un peu les bureaux des visas en augmentant le nombre de services consulaires et la capacité de traitement des demandes dans plusieurs pays d'Afrique subsaharienne. Il doit aussi revoir les mécanismes d'affectation des agents de visas dans les pays francophones d'Afrique, afin de supprimer les barrières systémiques pour les citoyens canadiens issus de l'immigration qui ont aussi de l'expérience dans les communautés et qui comprennent très bien la stratégie de l'immigration francophone. Par ailleurs, il faut revoir les motifs de refus arbitraires pour l'obtention des visas et des permis d'études et tenter de les supprimer complètement. En effet, c'est le système qui génère cela. Finalement, il faut aligner adéquatement les pratiques d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada dans les ambassades sur les objectifs d'immigration francophone dans nos communautés francophones. Je pense que cela va aider à faire augmenter les taux d'acceptation des demandeurs francophones.
En ce qui concerne les résidents temporaires vivant au Canada, qui constituent un bassin important, je pense qu'il serait très intéressant de se pencher concrètement sur les programmes qui leur permettent d'accéder à la résidence permanente. Il faudrait supprimer certaines barrières, telles que les tests de langue, pour les diplômés universitaires canadiens et pour les personnes qui travaillent ici, en milieu francophone. On leur impose des tests de français qu'ils doivent payer; c'est une des conditions permettant d'accéder à la résidence permanente. Il faut aussi créer des programmes passerelles pour la demande de résidence permanente, peut-être à la dernière année des études universitaires ou après celles-ci, pour favoriser la rétention des étudiants.
Il faut aussi faciliter la demande d'asile pour les personnes francophones ou mettre sur pied un comité national qui travaillera avec des ordres professionnels canadiens à l'élaboration d'un plan clair pour les francophones, ou les immigrants de manière générale, qui ont des diplômes dans certains domaines précis, comme la médecine, les sciences infirmières, la comptabilité, l'ingénierie ou l'enseignement.
En ce qui concerne les ressources et les services qui doivent être mis en place pour améliorer le secteur de l'établissement francophone, le Comité consultatif national en établissement francophone travaille depuis trois ans, de concert avec un comité, sur un modèle de coordination nationale du secteur de l'immigration francophone. Il déposera très prochainement ses recommandations à IRCC quant aux solutions à apporter pour l'amélioration du secteur de l'établissement. Cela aura des répercussions sur l'intégration des immigrants à l'avenir, car le rapport tient compte du parcours renforcé des initiatives faites par et pour les francophones. Ce rapport proposera, entre autres, une coordination du secteur de l'établissement francophone et des recommandations très concrètes qui tiennent compte des groupes.
Pour améliorer le taux d'approbation, il faut mettre en place des plans quinquennaux au sujet des services consulaires, ainsi que des programmes de sensibilisation, en plus de modèles de promotion et de recrutement équitables, dans les pays de l'Afrique francophone comme ailleurs.
Je vous remercie.
Merci, madame Sacko. Vous aurez l'occasion d'en dire davantage sur le sujet lorsqu'on vous posera des questions.
Nous allons maintenant entendre M. Méhou‑Loko, de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada.
Vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, honorables membres du Comité, je vous remercie d'avoir invité la FCFA à comparaître aujourd'hui.
Je tiens tout d'abord à signifier notre profonde appréciation du travail effectué récemment par ce comité sur le projet de loi C‑13. Ce travail de tous les partis a abouti à un projet de loi considérablement enrichi.
En ce qui concerne l'immigration francophone, votre comité a posé un geste d'appui majeur à la francophonie en adoptant un amendement qui renforce l'objectif de la politique en matière d'immigration francophone promise dans le projet de loi C‑13, soit le rétablissement et l'accroissement du poids démographique de nos communautés. Vous avez également choisi 1971 comme année de référence pour le rétablissement du poids démographique de nos communautés.
Nous avons la volonté politique, nous avons le cadre législatif et nous aurons de nouveaux modèles de règlements découlant de ce cadre. La question est de savoir si c'est suffisant. La réponse est malheureusement non.
L'atteinte en 2022 de la cible de 4,4 % en matière d'immigration francophone arrive tout de même au terme de deux décennies au cours desquelles le gouvernement a peiné même à se rapprocher de cette cible. Avant 2019, les résultats ont rarement dépassé 2 %.
Il y a un peu plus d'un an, la FCFA a transmis aux membres de ce comité une étude qu'elle avait faite sur les cibles en immigration francophone. Cette étude démontre que, même si le gouvernement atteignait à nouveau 4,4 % pour 2023‑2024 et les années suivantes, le déclin du poids démographique de nos communautés se poursuivrait. Notre étude démontre également que toute cible sous la barre des 10 % se traduirait, au mieux, par un maintien du poids démographique actuel.
Si nous voulons remettre la francophonie sur le chemin de la croissance et répondre aux nouvelles obligations énoncées dans le projet de loi C‑13, il faut passer à une cible de 12 % dès 2024 et ensuite faire croître cette cible de façon progressive, jusqu'à ce qu'elle atteigne 20 % en 2036. Nous pourrions alors rétablir le poids démographique des communautés francophones et acadienne à ce qu'il était en 2001, c'est-à-dire 4,4 % de la population. Nous aurions donc, en 2036, atteint l'objectif fixé d'abord par le Plan d'action pour les langues officielles, qui vient de se terminer, et ensuite par le document de réforme des langues officielles publié par le gouvernement en 2021.
En revanche, nous ne serions même pas au pourcentage de 6,1 % de l'année de référence du projet de loi C‑13, c'est-à-dire 1971. Il est important de le savoir. En effet, une cible progressive qui passerait de 12 à 20 % peut surprendre, cela peut sembler gros, mais c'est tout simplement parce que le rattrapage à effectuer est considérable après près de 20 ans de stagnation en matière d'immigration francophone.
Il est important aussi de savoir que nous n'avons pas inventé ces chiffres. L'étude démographique réalisée pour le compte de la FCFA fait usage de données statistiques et du modèle Demosim, l'outil de projection démographique du gouvernement du Canada.
Malgré tout, plusieurs se demandent comment il serait possible d'atteindre une cible de 12 %, alors qu'au fil des ans, le gouvernement n'a pas réussi à atteindre la cible actuelle. La réponse est simple: il faut mettre en place une série de mesures précises en matière d'immigration francophone, que nous demandons depuis des années.
La bonne volonté ne manque pas à IRCC, mais il manque des outils, car ce n'est pas uniquement en apportant de petites modifications à des programmes généraux d'immigration comme Entrée express qu'on atteindra ces objectifs. On ne fait pas de l'immigration en milieu minoritaire comme on en fait en milieu majoritaire. Il faut une politique en matière d'immigration francophone qui comporte des mesures et des programmes particuliers, conçus en fonction des réalités propres aux communautés francophones et acadienne, mais qui tiennent compte aussi des bassins de population francophone dans le monde.
Voici quelques recommandations.
D'abord, il faut que le gouvernement se dote d'une politique holistique en matière d'immigration francophone, qui comprendra des leviers taillés sur mesure pour la francophonie canadienne, dont un financement bonifié, pour permettre aux communautés francophones de participer directement à sa mise en œuvre.
En deuxième lieu, il faut que le gouvernement crée un programme économique distinct pour l'immigration francophone hors Québec, taillé sur mesure pour les besoins de la main-d'œuvre des communautés francophones et acadienne, qui permettra aux communautés de participer au recrutement et à la sélection des immigrants et immigrantes d'expression française.
Mesdames et messieurs, je vous remercie. Je suis prêt à répondre à vos questions.
Merci, monsieur Méhou‑Loko.
La dernière témoin, mais non la moindre, est Mme Abdi Aden, du RDEE Canada.
Madame Abdi Aden, vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les membres du Comité permanent des langues officielles, je vous remercie énormément de me donner l'occasion de vous parler du recrutement et de l'intégration économique des immigrants d'expression française.
Depuis plus de 10 ans, les membres du RDEE Canada, de même que ceux qui composent son réseau établi dans neuf provinces et trois territoires, travaillent de près avec les employeurs canadiens, qu'ils soient francophones ou non francophones, en les sensibilisant, en les mobilisant et en les accompagnant dans le recrutement et l'intégration des talents et des compétences des immigrants francophones.
Je peux vous dire que la tâche n'est pas simple, car les entreprises avec lesquelles nous travaillons sont surtout de toutes petites ou petites entreprises. En effet, si je me fie aux statistiques recensées par Statistique Canada en 2020, presque 1,2 million des entreprises au Canada, soit 97,9 % d'entre elles, sont de petites entreprises comptant moins de 10 employés. Souvent, celles que nous rencontrons dans les provinces et les territoires comptent deux ou trois employés. La tâche n'est donc pas facile. Ces entreprises ne possèdent pas toujours les capacités et les outils nécessaires pour faire du recrutement à l'échelle locale ou internationale, sans parler des ressources qu'il faut pour intégrer ces nouveaux immigrants francophones au sein de leurs entreprises et adopter des politiques de diversité et d'inclusion.
Par ailleurs, nous sommes très heureux d'avoir atteint la cible de 4,4 % en 2022. Cependant, maintenant que le cap a été atteint après tant d'années, il faut le maintenir et le dépasser. Nous avons du retard à rattraper, surtout que le gouvernement du Canada, par l'entremise du ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, a annoncé une cible d'un demi-million de nouveaux résidents permanents à compter de 2025. C'est énorme. Ce sont beaucoup de personnes qui doivent venir au Canada.
Si nous souhaitons réussir ce projet ambitieux, notre système doit être revu afin de pouvoir mieux recruter et intégrer ces nouveaux arrivants, dont les francophones. Au RDEE Canada, nous espérons que le système modernisé qui sera proposé comprendra un processus de sélection qui mettra davantage l'accent sur les critères tels que les compétences requises sur le marché du travail que sur les critères de sélection liés uniquement aux études.
Je suis moi-même immigrante. Je suis arrivée il y a plus de 20 ans, et je suis encore sidérée d'entendre parler des mêmes défis qui existaient à l'époque, notamment la reconnaissance des acquis, la nécessité d'avoir une première expérience canadienne ou les barrières linguistiques. À cela se sont ajoutés, au cours des dernières années, des problèmes de discrimination au moment de l'embauche et d'inclusion en milieu de travail.
Les difficultés auxquelles se butent les immigrants francophones sont souvent les mêmes que celles vécues par les autres immigrants. Cependant, les services francophones d'établissement ne sont pas aussi élaborés que ceux offerts par la majorité anglophone. Pourquoi? C'est parce qu'ils sont récents et parce que le financement qu'octroie IRCC est souvent basé sur le nombre de candidats que nous servons. Si nous avons moins de candidats francophones, nous allons donc recevoir beaucoup moins de financement que les autres. Tout cela représente un défi majeur pour nous. En tant que fournisseurs de services d'intégration économique, nous constatons que nous ne pouvons pas toujours offrir la même qualité de service aux immigrants francophones, faute de moyens, comme je vous le disais.
Pour ce qui est du recrutement international, le RDEE Canada et son réseau se sont tout récemment dotés d'une stratégie, basée sur cinq axes interreliés, pour le recrutement d'une main‑d'œuvre internationale dans les bassins francophones et pour l'engagement des employeurs. Cela commence par le recensement des besoins des employeurs canadiens en matière de main‑d'œuvre. Deuxièmement, il est important de sensibiliser ces employeurs, parce que beaucoup d'entre eux sont, comme je vous le disais, de toutes petites entreprises ou de petites entreprises qui n'ont pas les moyens de recruter à l'international ou qui ont peur de le faire. La troisième étape est donc de les accompagner. Quatrièmement, il faut mettre en place un processus de recrutement continu dans les bassins francophones, en adoptant des missions ciblées, en partenariat avec les employeurs. Pour clôturer le tout, il est important de mettre en place un processus pour que les candidats sélectionnés lors de ces missions soient jumelés avec les employeurs et les offres d'emplois proposées.
Que ce soit pour le recrutement international dans les bassins francophones ou encore pour l'intégration économique une fois que les gens sont arrivés au Canada, il est important de mettre en place des programmes holistiques d'intégration qui couvrent tous les aspects du parcours de recrutement ou du parcours d'intégration économique.
Je conclus en disant que la tâche est colossale, mais que rien n'est impossible. Nous devons poursuivre le travail entamé, mais nous devons faire les choses autrement. Il est important que nous soyons stratégiques, que nous collaborions tous et que nous ne nous lancions pas dans toutes les directions.
Merci beaucoup.
Merci, madame Abdi Aden. Vous aurez l'occasion d'étoffer votre position en répondant aux questions à venir.
Je remercie tous les témoins de leurs présentations.
Je vous informe que, pour le premier tour, un représentant de chacune des formations politiques disposera de six minutes pour poser des questions.
C'est M. Marc Dalton qui aura l'honneur d'ouvrir le bal.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup à tous les témoins. Les présentations étaient intéressantes. J'éprouvais des difficultés techniques, mais je suis content d'être parmi vous virtuellement.
Ma première question s'adresse à Mme Meggs, anciennement du gouvernement du Québec.
Pour la première fois, on entend qu'on a atteint l'objectif de 4,2 % d'immigration francophone à l'extérieur du Québec. Qu'en est-il du nombre d'immigrants au Québec? Atteint-on les objectifs? S'agit-il toujours d'un problème? Y en a-t-il trop? Pouvez-vous parler un peu plus de la situation de l'immigration francophone dans votre province?
C'est une question importante.
Le recrutement n'a jamais été facile, mais il faut dire que, pour ce qui est des requérants principaux dans la catégorie des travailleurs qualifiés, le Québec a pu, grâce à sa grille de sélection, qu'il vient de mettre de côté et qui donnait des points pour le français, sélectionner une majorité de personnes qui s'exprimaient en français.
Il faut aussi faire bien attention à ce qu'on définit comme une personne francophone. En 2010, le vérificateur général du Québec a bien souligné qu'on devait assurer l'équité la plus totale possible. Il avait remarqué que, dans les entrevues qu'on faisait à ce moment-là — on en fait moins maintenant, car tout se fait en ligne —, les agents d'immigration avaient un peu trop de discrétion quant au nombre de points qu'ils donnaient pour le français. Le ministère a donc décidé de rendre les tests linguistiques obligatoires, de façon à ce que tout le monde soit évalué selon le même critère.
Dans les autres catégories, comme celles de la réunification familiale et des réfugiés, il y en a un peu moins, mais cela s'en vient. Dans la catégorie de la réunification familiale, environ 50 % des gens s'expriment en français ou déclarent pouvoir communiquer en français. Toutefois, pour ce qui est de l'immigration temporaire, qui est devenue un gros morceau de l'immigration, au Canada comme au Québec, les résultats sont moins bons. Il n'y a pas du tout d'exigences linguistiques, sauf ce que l'employeur demande ou ce que l'établissement d'enseignement exige, dans le cas d'un étudiant. Cela crée un problème, parce que les gens provenant de la catégorie de l'immigration temporaire constituent une part de plus en plus importante du bassin pour le recrutement permanent. Il y a donc du travail à faire de ce côté. Cela aura une incidence à moyen terme.
Merci beaucoup.
Ma prochaine question s'adresse à tous les témoins.
Selon les témoignages que nous avons entendus, il y a deux raisons principales pour lesquelles beaucoup d'étudiants de niveau universitaire ou collégial sont refusés. Le premier motif est le fait qu'ils n'ont pas les ressources financières nécessaires pour vivre ici pendant leurs études. Je comprends cela. Le deuxième motif est le fait qu'ils disent qu'ils n'ont pas l'intention de retourner dans leur pays après leurs études universitaires. Je trouve cela un peu bizarre. En réalité, on veut que ces étudiants poursuivent leurs études jusqu'au bout, mais, s'ils sont honnêtes quant à leurs intentions, on les rejette. C'est un peu déconcertant.
Est-ce un problème, selon vous?
J'aimerais que chaque témoin dise quelques mots à ce sujet. On peut commencer par Mme Sacko, de l'Accueil francophone du Manitoba.
Est-ce que le système fonctionne bien pour les immigrants qui viennent étudier ici, à votre avis?
Merci beaucoup de la question, monsieur Dalton.
Plus tôt, j'ai mentionné les motifs de refus arbitraires pour l'obtention de visas et de permis d'études au Canada. Je pense que votre question touche exactement les deux motifs de refus qui sont vraiment injustes.
Quand les étudiants disent vouloir rester ici, au Canada, cela s'aligne très bien sur la Stratégie en matière d'immigration francophone. En effet, les communautés en situation minoritaire travaillent fort pour que les étudiants puissent rester au Canada après leurs études. Toutefois, lorsque ceux-ci le disent avant leur arrivée au Canada, leur demande de visa est refusée.
De plus, ils doivent présenter un plan de carrière en lien avec leurs études secondaires. L'absence d'un tel plan peut aussi être une raison de refus. Lorsqu'un étudiant termine sa 12e année, on lui demande automatiquement de présenter son plan de carrière ici. C'est...
En effet. Je suis désolé, monsieur Dalton.
C'est maintenant au tour du Parti libéral.
Monsieur Drouin, vous avez la parole pour six minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins, qu'ils soient dans la salle ou à distance.
J'ai quelques questions à poser, mais je vais commencer par m'adresser aux représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, puisqu'ils sont ici en personne.
J'aimerais d'abord comprendre la situation au Canada, de façon générale.
Quels sont les besoins du Canada en matière d'immigration francophone? La FCFA s'est-elle penchée sur les différences entre les besoins de nos communautés en situation minoritaire et ceux des autres communautés? Ces différences se reflètent-elles dans notre politique d'immigration et dans les critères d'immigration? Je pense aux types d'emploi, par exemple. Si Mme Ashton était ici aujourd'hui, nous pourrions tous deux militer pour le fait d'avoir des gens qui travaillent dans le milieu de la petite enfance, par exemple.
Vos membres un peu partout au Canada vous font-ils part aussi de leurs besoins?
Je vous remercie de cette question extrêmement pertinente, monsieur Drouin.
La FCFA s'est effectivement penchée sur les besoins des communautés. Les besoins sont immenses, dans la mesure où aujourd'hui la prospérité de nos communautés est menacée par le déclin du français. Nous avons besoin de rétablir le poids démographique de nos communautés, et cela passe par une immigration francophone ciblée pour les communautés francophones hors Québec.
Il est important aussi de comprendre les cibles. Lorsqu'on fait cette analyse aujourd'hui, on se rend compte que nos cibles d'immigration sont très faibles et que nous n'avons pas réussi à les atteindre jusqu'à présent. En fait, nous avons réussi pour la première fois, l'an dernier, à dépasser très légèrement la cible de 4 %. Cependant, nous réitérons ce que nous avons déjà dit par le passé, c'est-à-dire qu'il est important aujourd'hui de rétablir le poids démographique des communautés francophones hors Québec.
À ce sujet, la FCFA a été très claire. Comme je l'ai mentionné dans mon allocution d'ouverture, nous n'avons pas inventé les cibles. Nous avons utilisé les outils à notre disposition, dont se sert aussi le gouvernement canadien, afin d'établir les cibles qui, essentiellement, permettront de rétablir le poids démographique des francophones hors Québec le plus rapidement possible et de continuer à sauvegarder nos communautés, en quelque sorte. C'est là que nous en sommes, aujourd'hui. On parle de la sauvegarde des communautés qui sont menacées en raison de leur poids démographique.
Un autre élément important est à considérer, et cela a été mentionné. Que faut-il faire? Il faut avoir le courage de prendre des mesures extrêmement ambitieuses. Nous disposons aujourd'hui d'outils, et il faut les utiliser de manière judicieuse et efficace. Par exemple, il faut mettre en place un programme d'immigration destiné exclusivement aux communautés francophones hors Québec, et non prendre des immigrants dans un bassin au même titre que l'ensemble des immigrants. Il nous faut vraiment une politique d'immigration pour la francophonie minoritaire. C'est un élément essentiel.
De plus, il sera très important que cette politique d'immigration ne cible pas seulement des immigrants qualifiés, mais qu'elle cible également des populations dont nous avons besoin. Un peu plus tôt, vous avez parlé des travailleurs en petite enfance; cela fait partie des besoins des communautés. Nous en avons besoin. Nous ne pouvons pas compter exclusivement sur Entrée express. Nous devons aller beaucoup plus loin et avoir un programme qui nous permettra d'aller chercher des travailleurs qui sont essentiels au maintien et à la sauvegarde de nos communautés.
Merci beaucoup.
Madame Sacko, j'ai bien aimé votre commentaire sur le besoin d'augmenter les services consulaires. C'est justement une question que je me pose moi-même.
Au cours des 20 dernières années, il y a une rationalisation des ambassades dans l'espace francophone africain. J'imagine que ce manque de services pour les communautés des espaces francophones d'Afrique, que vous mentionnez, correspond à ce que vous entendez de leur part.
Effectivement. Alors que certaines ambassades offrent des services à 16 pays, des consulats canadiens situés dans d'autres pays de l'Afrique francophone ne peuvent donner aucun service. Afin que leur demande puisse être traitée, les ressortissants de certains pays sont donc obligés de se déplacer ou d'envoyer leur dossier là où ces 14 ou 16 pays sont représentés.
À quoi sert d'avoir un consulat dans un pays si on ne peut en obtenir aucun service consulaire? Il est peut-être temps d'examiner la possibilité de rétablir les services consulaires dans ces pays francophones. On a souvent répété que le bassin de recrutement est beaucoup plus large en Afrique subsaharienne que dans n'importe quelle autre partie de l'Afrique. Il faudrait donner beaucoup plus de ressources aux consulats situés dans les pays africains francophones pour qu'ils puissent offrir des services consulaires ou des services liés aux visas. Ainsi, les ressortissants n'auraient pas à dépenser une fortune pour se déplacer d'un pays à l'autre juste pour aller chercher un visa ou un permis. Je cite en exemple l'ambassade du Canada au Sénégal, qui offre des services à beaucoup de pays environnants.
Au sujet des organismes sur le terrain qui vont offrir des services à des immigrants potentiels, je me demande si on comprend bien les raisons pour lesquelles, par exemple, le taux d'acceptation des demandes de permis d'études en provenance de la Tunisie est de 73 %, alors qu'il est beaucoup plus bas dans d'autres pays.
Je comprends qu'un permis d'études peut être refusé simplement parce que l'information donnée est erronée et ne permet pas de confirmer un compte de banque. En principe, c'est de la fraude. Selon moi, c'est une perte de temps pour nos agents d'immigration.
Comment fait-on pour s'assurer que les agences sur le terrain présentent des demandes réalistes, plutôt que des demandes qui ont peu de chances d'être acceptées et qui occasionnent une perte de temps pour les gens chargés de leur traitement?
C'est une excellente question, monsieur Drouin, mais votre temps de parole est écoulé. Vous pourrez y revenir plus tard.
C'est maintenant au tour du Bloc québécois. C'est M. Beaulieu, le deuxième vice-président du Comité, qui prendra la parole pour six minutes.
Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à Mme Meggs.
Vous avez dit qu'il y avait des politiques et des décisions administratives du gouvernement fédéral en matière d'immigration qui nuisaient à l'attractivité du Québec ou qui avaient le potentiel d'attirer des personnes immigrantes francophones à statut temporaire au Québec vers une autre province pour faire leur demande de résidence permanente.
Pourriez-vous nous donner des exemples des principaux facteurs qui nuisent au Québec?
J'avais justement préparé une petite liste pour vous.
En fait, on vient de parler d'un des exemples, soit le taux de refus des demandes de permis d'études ou de visa de visiteur, entre autres, en provenance de l'Afrique en général, mais particulièrement de l'Afrique francophone.
On peut penser aussi au programme ayant pour objectif de régulariser le statut des personnes à statut temporaire, annoncé en 2021 et qui devrait être mis en œuvre bientôt. Ce programme ne s'applique pas au Québec, et c'est normal, puisque le Québec fait sa propre sélection. Cependant, le fédéral prévoyait un plafond pour l'immigration en général, mais aucun plafond pour l'immigration francophone. Cela aurait pu inciter des francophones au Québec à déménager à l'extérieur du Québec pour présenter leur demande de résidence permanente.
Un peu dans le même esprit, on a créé des privilèges pour les employeurs hors Québec qui embauchent des travailleurs étrangers temporaires francophones, mais ces privilèges ne s'appliquent pas aux employeurs du Québec. Pourtant, ce ne serait sûrement pas une mauvaise idée puisque, comme je le disais, l'immigration temporaire constitue maintenant un défi dans l'optique de l'immigration permanente francophone.
De plus, les frais exigés par le gouvernement fédéral pour l'obtention de la résidence permanente ne sont nullement modulés pour les gens déjà sélectionnés par le Québec. Pourtant, dans leur cas, le fédéral a pour seul travail de vérifier le bilan de santé et le casier judiciaire. Il n'a pas à traiter ces dossiers, parce que c'est déjà fait par le Québec. Par exemple, les frais imposés par le fédéral pour une famille de quatre personnes qui demande la résidence permanente s'élèvent à 3 230 $, tandis qu'au Québec, ces frais sont de 1 418 $. Non seulement une telle famille doit entreprendre les deux processus, mais elle doit payer deux fois plus cher pour la deuxième demande qu'elle doit faire au fédéral. Je dois préciser aussi que le Québec le fait au rabais, parce que, selon son calcul, le coût de revient pour le traitement d'une demande de résidence permanente est de 1 115 $. Il n'est pas raisonnable que le fédéral impose les mêmes frais aux personnes déjà sélectionnées par le Québec qu'aux immigrants ailleurs au pays pour l'obtention de la résidence permanente.
Ce sont des exemples qui illustrent que, en plus des défis à surmonter découlant du fait que deux ordres de gouvernement s'occupent de ces demandes, certaines politiques contribuent au problème. Pourtant, selon ma compréhension du projet de loi C‑13 et certainement selon l'accord Canada-Québec sur l'immigration, cela devrait être évité, dans la mesure du possible.
Dans votre présentation, vous avez dit que l'approche fédérale pouvait aider à atteindre les cibles francophones hors Québec, mais qu'elle allait à l'encontre de l'esprit et de la lettre du projet de loi C‑13, de même que des objectifs de l'accord Canada-Québec sur l'immigration.
Vous venez de nous en toucher un mot. Pourriez-vous nous en dire davantage?
En fait, nous avons besoin d'immigrants francophones partout au Canada. C'est un peu ce que j'essaie de faire valoir. Si le nombre de francophones baisse au Québec, par ricochet, il va baisser partout au Canada. On observe déjà beaucoup de migration interprovinciale, alors ce n'est pas nécessaire d'encourager ce phénomène.
L'accord Canada-Québec sur l'immigration est un exemple où on a reconnu l'asymétrie dans le dossier linguistique, il y a 50 ans. Dans cet accord, tout comme dans les précédents, le fédéral reconnaissait clairement le besoin de protéger le français au Québec. À cela est venu s'ajouter le projet de loi C‑13, qui précise que le Canada ne devrait pas mettre en œuvre des politiques qui vont à l'encontre de l'objectif de protéger le français dans toutes les provinces, y compris au Québec.
J'ai une dernière question, qui s'adresse aux représentants de la FCFA.
Avez-vous considéré l'impact de l'assimilation, c'est-à-dire des taux de transfert linguistique vers l'anglais qui augmentent constamment?
Dans un contexte où le taux d'assimilation continue à augmenter, les efforts en immigration francophone ne sont-ils pas un coup d'épée dans l'eau?
C'est une excellente question, monsieur Beaulieu, mais vos six minutes sont écoulées.
C'est maintenant au tour de M. Boulerice, qui est heureux d'enfin venir s'asseoir au...
[Traduction]
Excusez-moi, monsieur Johns.
Vous avez l'honneur de siéger au meilleur comité sur la Colline.
Vous disposez de six minutes. Allez‑y.
C'est un grand honneur pour moi de me joindre à ce comité, surtout pour une conversation d'une aussi grande importance.
Je tiens tout d'abord à remercier les témoins pour cette conversation.
Ma première question s'adresse à M. Méhou‑Loko.
Ma province, la Colombie‑Britannique, compte actuellement la cinquième plus importante communauté francophone du pays. Nous nous battons actuellement pour la quatrième place. Pouvez-vous nous parler des mesures de soutien qui doivent être mises en œuvre pour soutenir les immigrants et des défis auxquels doit faire face la province pour préserver la communauté francophone et assurer l'immigration à l'extrême ouest du pays?
Nous savons qu'il s'agit d'un énorme défi pour la communauté francophone et la population de la Colombie‑Britannique de façon générale.
[Français]
Merci beaucoup de cette excellente question.
À la FCFA, nous suivons la question de la Colombie‑Britannique avec énormément d'attention, comme vous le savez. À ce jour, plusieurs décisions ont été prises à ce sujet.
Je vais tout de même céder la parole au directeur général de la FCFA, M. Alain Dupuis, qui vous donnera quelques éléments de réponse à ce sujet.
En Colombie‑Britannique, le défi est de sélectionner davantage de francophones dans le cadre du Programme des candidats des provinces. Il faut savoir que la majorité des immigrants sont sélectionnés par la province. Or, la très grande majorité des immigrants fédéraux choisissent encore l'Ontario et le Québec.
C'est donc une conversation qui devra avoir lieu entre les deux ordres de gouvernement. Le gouvernement fédéral doit certainement réfléchir à la façon de garantir que les immigrants qu'il fait venir au Canada iront s'installer dans l'ensemble du pays, pour ne pas que l'immigration francophone profite essentiellement à l'Ontario et au Nouveau‑Brunswick, comme c'est le cas actuellement. Il y a donc un travail et une réflexion à faire au sujet des immigrants sélectionnés par le fédéral et sur la façon de s'assurer qu'ils s'installent un peu partout au pays.
Cependant, la partie provinciale est importante. À cet égard, le fédéral ne pourrait-il pas aussi encourager les provinces à adopter un quota de francophones dans le cadre du Programme des candidats des provinces, pour s'assurer que la sélection se fait à tous les niveaux?
[Traduction]
Merci.
Madame Sacko, pouvez-vous nous parler des mesures prises par le gouvernement fédéral pour appuyer Accueil francophone du Manitoba et d'autres services d'établissement dans le cadre de leurs activités?
[Français]
Merci de la question.
Tant à l'échelle fédérale que provinciale, les gouvernements sont très impliqués dans l'établissement des immigrants qui arrivent ici. Les réfugiés aussi font partie des nouveaux arrivants. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada finance les services d'établissement des réfugiés au sens de la Convention relative au statut des réfugiés, de même qu'une part de certains programmes visant les réfugiés parrainés par le secteur privé. Les services d'établissement aident ces personnes à s'établir dans la communauté, à avoir un logement de transition et à obtenir de l'aide pour acquérir un logement permanent, par exemple. Beaucoup de services sont financés par le fédéral, comme les services d'aide à l'emploi, les services de santé, les services culturels, ou encore les services axés sur la petite enfance.
Le gouvernement du Manitoba, très impliqué dans le processus, finance des programmes d'établissement visant justement les immigrants qui viennent s'y établir, mais ce n'est pas assez. Quand on parle du programme qui s'adresse précisément aux francophones, on parle du principe des services offerts par et pour les francophones. Étant dans une province anglophone où l'on sait que l'assimilation est vraiment très forte, nous voudrions avoir aussi une certaine équité en matière de services d'établissement et de qualité des services. Nous voudrions qu'on tienne compte du principe susmentionné et que ces services soient gérés par des organisations francophones pour aider précisément les immigrants francophones. Ces derniers ont un double défi à relever dans les communautés en situation minoritaire, comme c'est le cas au Manitoba. Le défi de la langue est réel. Après leur arrivée, les immigrants sont obligés de faire une mise à niveau linguistique. Cela fait partie de leur processus d'intégration. Il faut donc financer ces cours de langue. Cela ne retarde pas forcément leur intégration, mais cela la rallonge. S'il faut prendre le temps, quand on a déjà...
[Traduction]
Je vous remercie.
Nous savons que la première langue officielle de 85 % des immigrants de l'Afrique qui se sont installés au Manitoba entre 2011 et 2021 est l'anglais, alors que seulement 8 % de ces immigrants ont déclaré le français à titre de première langue officielle.
Si le gouvernement n'investit pas davantage dans les services d'établissement, quelles seront les conséquences à long terme pour les immigrants francophones et pour la société canadienne de façon générale?
Ma question s'adresse une fois de plus à Mme Sacko.
[Français]
Si les services d'établissement ne sont pas mieux financés, cela provoque un découragement. Notre objectif est de créer un lien avec la francophonie. Il y a beaucoup d'efforts consentis à l'extérieur pour aller recruter des francophones qui pourront venir renforcer le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire. Quand ces gens arrivent et qu'ils constatent le fardeau lié à la langue, il y a un risque qu'ils s'assimilent et qu'ils s'éloignent de la communauté francophone s'ils n'ont pas aussi accès aux services...
Merci, madame Sacko. Je sais que c'est court, six minutes, mais il faut donner la chance à tout le monde de prendre la parole.
Les deux prochaines questions dureront cinq minutes.
Madame Gladu, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
Madame Abdi Aden, vous connaissez bien la situation des services aux francophones partout au Canada. Quels sont les plus grands problèmes à cet égard? Quelle est la situation?
Je vais vous répondre sous l'angle de l'intégration économique, parce que c'est mon champ d'expertise.
Les services qu'on offre sont des services de base. On aide les immigrants à rédiger un curriculum vitæ, par exemple, alors qu'ils ont besoin d'autre chose. Je vous ai parlé des différents défis qui se posent en matière d'intégration. On parle de reconnaissance des acquis et de recherche d'emploi, entre autres. On n'est pas capable d'offrir des services beaucoup plus pointus que des services de base aux immigrants francophones, parce qu'on a un financement limité.
Quand on parle d'intégration économique, il y a tout un travail à faire avec l'employeur au préalable. Quand un immigrant arrive et qu'il veut se trouver un emploi, c'est là qu'on rate une occasion, au Canada. Même si on fait venir des gens compétents, il faut que ces gens travaillent dans les domaines d'expertise pour lesquels ils ont été formés. Un jour, on a demandé à une vingtaine d'immigrants de lever la main s'ils travaillaient dans leur domaine d'expertise, et 90 % d'entre eux n'ont pas levé la main. C'est une sorte de gaspillage.
De notre côté, nous ne sommes pas financés pour travailler avec les employeurs. Il y a tout un travail préalable à faire pour accompagner les employeurs et les relier aux offres d'emploi. Ce sont des services presque gratuits. On nous dit de faire de l'intégration économique, mais cela ne se limite pas à faire des CV ou à donner aux travailleurs un peu d'information sur le marché du travail. Il s'agit de les accompagner un peu plus en profondeur, de les aider à entrer en contact avec des employeurs et de travailler avec les employeurs canadiens pour qu'ils embauchent ces immigrants francophones.
Il y a aussi le volet de l'entrepreneuriat. Il y a tout un travail à faire de ce côté-là, car nous avons un sérieux problème de reprise, au Canada. Plusieurs propriétaires d'entreprises sont sur le point de prendre leur retraite et il faut donc stabiliser le système entrepreneurial au Canada.
Merci.
[Traduction]
Ma prochaine question s'adresse à Mme Sacko.
Vous avez parlé d'accroître les services consulaires à l'étranger et vous avez dit qu'il fallait éliminer les critères arbitraires. Pouvez-vous nous dire quels sont ces critères, selon vous?
[Français]
Je pense que j'ai parlé de deux de ces critères arbitraires. Tout d'abord, si les étudiants disent qu'ils veulent rester au Canada après leurs études, l'agent leur refuse d'emblée le visa. S'ils doivent présenter un plan de carrière et que l'agent ne le trouve pas clair, il peut leur refuser le visa.
L'agent peut donc parfois rejeter une demande pour le simple motif qu'il n'est pas convaincu du dossier. Or, qu'est-ce que cela veut dire, exactement? Cela veut-il dire que la personne n'a pas suffisamment de moyens financiers? Cela veut-il dire que l'agent n'aime tout simplement pas sa photo? Cela veut-il dire que le formulaire est mal rempli?
Il y a des refus arbitraires comme cela qui ne se justifient pas et qui entraînent une sorte de rejet systématique. C'est le système qui rejette les gens, et on n'a aucune idée de la raison pour laquelle il y a ces refus arbitraires. Cela doit être beaucoup plus clair.
Si c'est le dossier qui est mal monté, il faut donner la chance à la personne de revoir son dossier ou de le mettre à jour. S'il s'agit d'un manque de moyens financiers, on doit lui laisser la chance de prouver, par exemple en s'appuyant sur d'autres comptes bancaires, qu'elle a suffisamment de moyens financiers pour que son dossier soit acceptable. Les critères actuels n'aident pas du tout le client, et son dossier est rejeté de façon arbitraire.
Merci.
Madame Meggs, vous avez parlé des initiatives qu'a prises le Québec pour augmenter l'immigration francophone. Pouvez-vous nous donner quelques exemples?
Le Québec a annoncé récemment qu'il allait rendre la connaissance du français obligatoire pour toutes les catégories de résidents permanents. Cela signifie que le nouvel arrivant devra connaître un peu le français avant d'être sélectionné par le Québec. Le niveau de connaissance du français sera vérifié par des tests linguistiques. En plus...
Merci, madame Meggs. Je sais que c'est court. Ce tour-ci était de cinq minutes. Vous pourrez y revenir plus tard en répondant à d'autres questions.
Monsieur Samson, vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins qui sont avec nous aujourd'hui pour nous aider à trouver des moyens d'augmenter l'immigration francophone au Canada.
Je vais commencer par vous, madame Abdi Aden. Par le passé, nous avons fait un peu de recrutement ensemble dans le tiers-monde pour Destination Canada.
Comme vous le savez, notre gouvernement a investi 4,1 milliards de dollars pour s'assurer que la Loi sur les langues officielles facilitera vraiment le développement sur le terrain. L'immigration est un des quatre piliers du Plan d'action pour les langues officielles 2023‑2028. De quelle façon cet investissement dans le plan d'action aidera-t-il les organismes à augmenter le nombre d'immigrants francophones et à les retenir dans les provinces autres que le Québec?
Merci, monsieur Samson. Je suis heureuse de vous reparler.
Ce nouvel investissement tombe à point nommé et nous aidera beaucoup à faire du recrutement international. Je crois qu'un fonds de 25 millions de dollars sur cinq ans sera dédié à cela.
Comme je vous le disais, nous souhaitons mettre en place une stratégie de recrutement ciblée, visant les pays où il y a des candidats qui détiennent les compétences dont le Canada a besoin, afin de répondre aux besoins en main-d'œuvre des employeurs de toutes les provinces.
J'aime bien Destination Canada et il faut garder cet organisme, mais il serait important d'explorer d'autres bassins de recrutement. Il faut apparier les besoins des employeurs et les compétences des immigrants. Il faut sélectionner les gens en fonction des possibilités d'emploi dans les différentes provinces.
Tout à l'heure, M. Dupuis parlait du nombre de candidats francophones qui s'installent dans d'autres provinces que le Québec. Soixante pour cent d'entre eux s'installent en Ontario et les 40 % restants s'installent dans les autres provinces. On se retrouve donc avec très peu d'immigrants francophones dans certaines communautés. De plus, les compétences des gens qui sont présents dans ces provinces ne correspondent pas forcément aux besoins du marché du travail ou à ce qui est exigé dans les offres d'emploi. L'organisation de missions ciblées de recrutement en partenariat avec les employeurs nous aiderait donc beaucoup à améliorer les choses.
Évidemment, il y a tout le volet de la politique d'immigration francophone qui sera déployée. On améliorera aussi les services d'établissement, puisqu'il faut aller au-delà des services de base offerts par les fournisseurs de services francophones, et offrir des services un peu plus spécialisés qui répondent aux besoins des candidats que nous recevons.
Merci beaucoup. J'ai bien hâte de voir ces améliorations prochainement. Je vous remercie de votre contribution.
Messieurs les représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, vous avez commencé votre intervention en remerciant notre comité, mais nous devons nous aussi vous remercier du travail que vous avez fait ainsi que de vos témoignages. Cela nous aide à faire des avancées sur cette question essentielle.
Cette année, on en est à 4,4 % d'immigration francophone. Comment a-t-on pu réussir à atteindre cette cible cette année? Les gouvernements des 25 dernières années, tant libéraux que conservateurs, n'ont jamais pu dépasser les 2 %. Qu'est-ce qu'on a fait différemment?
C'est une excellente question, que nous avons d'ailleurs posée au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration pour savoir si une nouvelle formule avait permis d'atteindre les objectifs.
Certes, l'objectif de 4,4 % a été atteint, mais il n'est absolument pas suffisant. Il faut faire mieux et, comme tous les intervenants jusqu'à présent l'ont dit, nous devons revoir nos bassins de recrutement. Nous devons absolument être un peu plus innovants dans les mesures qui sont prises et, surtout, fixer des cibles beaucoup plus innovantes et ambitieuses.
Merci, monsieur Samson. Votre temps de parole est écoulé. Le temps passe très vite, je le sais.
Les deux prochaines questions seront de deux minutes et demie chacune.
Monsieur Beaulieu, vous avez la parole.
Je vais laisser à mes amis de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada le temps de finir de répondre.
Je vous remercie, monsieur Beaulieu.
Nous avons certes atteint la cible de 4,4 %, mais qu'avons-nous fait de mieux? Nous avons certainement réduit les listes d'attente. Toutefois, avons-nous été innovants afin de surpasser les attentes? Vous savez, j'étais journaliste lorsque la cible de 4,2 % a été proposée, il y a très longtemps. Je suis très heureux que nous l'ayons atteinte. J'étais d'ailleurs présent le jour de l'annonce...
Sur le plan de l'intégration des transferts linguistiques des nouveaux arrivants et des francophones, prenez-vous ce facteur en considération?
Absolument. Je reviens à la question que vous nous avez posée un peu plus tôt, monsieur Beaulieu. Vous nous avez demandé si nous prenions en considération le facteur de l'assimilation. L'assimilation est certes une réalité, mais il y en a une autre. Je suis devant vous, père de deux enfants qui sont nés en Ontario, qui sont franco-ontariens et qui s'expriment en français. La réalité d'une vie en français existe donc toujours dans nos communautés. L'assimilation est certes présente, mais la vitalité des communautés existe toujours.
On peut relater beaucoup d'anecdotes, mais pour ce qui est de chiffres provenant d'études scientifiques...
D'accord, mais ce sont les chiffres qui m'intéressent.
Ce qu'on observe, c'est que plus de 99 % des transferts linguistiques des allophones ou des nouveaux arrivants se font vers l'anglais. Dans le cas des francophones, c'est plus de 40 % ou 42 %, et ce taux augmente à chaque recensement. Selon moi, il s'agit donc d'un facteur qu'il faudrait prendre en compte.
Il faut aussi tenir compte de l'endroit où vont habiter les immigrants, ce dont on ne se préoccupe pas toujours. Quand ils vont habiter dans des milieux où ils n’ont aucun service en français — et il y en a beaucoup —, on peut difficilement penser qu'ils continueront à vivre en français et à intégrer le français dans leur...
C'est un défi, mais c'est un peu le débat de l'œuf ou de la poule. Si nous n'avons pas d'immigration, la vitalité des communautés n'est pas assurée, pas plus que la relève des services en français. Pour notre part, nous y croyons et nous pensons qu'il faut effectivement inclure et envoyer les immigrants dans les communautés où il y a une vitalité.
Merci, monsieur Dupuis. C'est tout le temps que nous avons malheureusement.
[Traduction]
Monsieur Johns, vous disposez de deux minutes et demie.
[Français]
Merci.
[Traduction]
Madame Sacko, pouvez-vous nous dire quels pays subsahariens devraient avoir des services consulaires supplémentaires? Pouvez-vous aussi nous parler des défis auxquels doivent faire face les immigrants dans le cadre du processus d'immigration et nous dire si les longs temps d'attente ont une incidence sur la décision des gens d'immigrer au Canada?
[Français]
Je vous remercie de la question.
Je vais nommer quelques pays francophones de l'Afrique subsaharienne, mais il ne s'agit pas d'une liste exhaustive: la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Cameroun, la Guinée, la Mauritanie, le Niger et le Burkina Faso. Aucun de ces pays n'a de capacité en matière de services consulaires ou n'a ce qu'il faut pour servir les gens. Les habitants de ces pays sont pratiquement tous desservis par le bureau de Dakar.
Un des problèmes est l'accès aux ambassades ou aux consulats du Canada, qui est difficile pour les futurs immigrants. Il n'est pas évident d'y passer, d'y entrer ou d'y demander des services. Il faut parfois appeler à un numéro, qui n'est pas forcément accessible à tout le monde, surtout quand on parle de numéros sans frais en Afrique. Les gens ne peuvent donc pas se renseigner sur le traitement de leur dossier, qui peut être très long s'il relève d'un consulat. Ces gens n'ont pas de moyen d'entrer en contact avec le consulat pour savoir où en est leur dossier, et cela décourage certaines personnes. Cela peut être très difficile et très long.
Un autre problème est la disponibilité des services. Si on doit toujours compter sur une ambassade située dans un autre pays pour obtenir son visa, où les frais d'envoi sont très coûteux, cela devient très compliqué pour le futur immigrant. Certains d'entre eux attendent trois ou quatre ans avant d'avoir une réponse, ce qui est décourageant.
Merci, madame Sacko.
Pour les deux prochaines questions, le temps alloué sera de cinq minutes.
Monsieur Généreux, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous les témoins. Je vous remercie de votre présence.
Madame Sacko, je vais poursuivre sur ce que vous disiez. Je vais faire une brève mise en contexte. Dans les cégeps au Québec, on a de la difficulté avec l'acceptabilité et l'acceptation des étudiants africains, particulièrement. Vous avez beaucoup parlé des services consulaires qui sont offerts d'un pays à l'autre. Selon vous, comment peut-on améliorer ou étendre le service à l'intérieur des consulats ou dans certaines régions ou certains pays d'Afrique, afin que le Canada puisse mieux aider ces gens à venir chez nous?
Je vous remercie de la question.
Comme je l'ai dit dans mon allocution d'ouverture, je pense que les ambassades doivent travailler avec les communautés francophones. Il faut qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada aligne adéquatement ses pratiques sur les objectifs d'immigration francophone. Je crois que M. Alain Dupuis et la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada l'ont souvent mentionné. Comme je l'ai dit, les communautés travaillent fort pour faire la promotion et le recrutement, ainsi que pour aider les immigrants à venir s'établir au Canada.
Étendre les services consulaires aux pays où ils n'existent pas n'engage pas seulement Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. D'autres ministères sont aussi impliqués dans ce processus, et ces ministères doivent déterminer les endroits qui manquent de services.
J'ai parlé de l'ambassade du Canada en Côte d'Ivoire ou au Sénégal. N'est-il pas temps de ramener, petit à petit, les services qui ont été supprimés ou qui, dans certains cas, n'ont jamais existé, afin de permettre aux gens d'avoir accès à ces services directement dans leur pays? On pourrait aussi mettre en place une ligne téléphonique qui permettrait aux gens d'appeler pour savoir où en est rendu leur dossier. Après deux ou trois ans d'attente, certains demandeurs n'ont encore obtenu aucune réponse, et on leur dit simplement que le traitement de leur demande est en cours. Les gens ne savent pas avec qui communiquer pour obtenir de l'information. Ces services pourraient être offerts par les consulats, ce qui aiderait ou encouragerait les populations, surtout en Afrique.
Au Québec, pour ce qui est des étudiants dans les cégeps, les médias ont beaucoup parlé du fait que le système mène à de nombreux refus systématiques. Pourtant, de nombreuses demandent proviennent de l'Afrique subsaharienne francophone.
Une des raisons invoquées pour justifier le refus est le fait que ces étudiants, semble-t-il, ne sont pas en mesure de prouver qu'ils ont l'argent nécessaire pour subvenir à leurs besoins et payer leurs frais d'études pendant les trois ans de leur séjour ici. Or, des cégeps ont des documents, attestés par un notaire, qui prouvent que ces étudiants ont 100 000 $ dans leur compte de banque en Afrique. Pourtant, ces étudiants se voient refuser leur demande dans une réponse qui, j'imagine, est donnée automatiquement.
Je ne sais pas trop ce qu'il en est et il faut absolument qu'on fouille cela. Comment se fait-il qu'un étudiant, par ses parents, soit capable de prouver qu'il y a 100 000 $ dans son compte de banque, mais qu'on lui réponde qu'il ne peut pas venir au Canada parce qu'il n'est pas capable de subvenir à ses besoins? Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Cette raison n'est pas valable, cela ne se peut pas.
Il ne me reste pas beaucoup de temps. Je ne sais pas si vous voulez conclure là-dessus, madame Sacko.
Bien sûr.
Ce n'est pas une réalité, malheureusement. Il y a aussi beaucoup de preuves que des demandes ont été refusées sans que des raisons d'ordre financier aient été évoquées. Parfois, les dossiers n'ont même pas été vérifiés; toutes les preuves et tous les documents ont été fournis, mais les dossiers n'ont jamais été traités.
C'est pour cette raison qu'on propose la mise sur pied de bureaux d'ombudsman ou de bureaux de vérification. Quand un agent prend une décision, il n'y a aucune façon d’infirmer cette décision. Il n'y a aucune façon de vérifier la véracité des éléments sur lesquels l'agent s'est basé pour refuser une demande. Il n'y a pas de recours. Il est peut-être temps d'avoir des recours pour les gens dont la demande est refusée de façon arbitraire, afin qu'on puisse au moins revoir leur dossier.
Parfois, ces gens s'adressent à des députés fédéraux par l'intermédiaire de connaissances qu'ils ont au Canada ou demandent à des membres de leur famille de plaider leur cause auprès de députés fédéraux, afin qu'on puisse traiter leur dossier. C'est un processus long et pénible, qui pourrait être évité avec la création d'un mécanisme pour permettre aux gens de vérifier ce qu'il en est. Ces décisions subjectives ont un grand impact sur leur vie.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici ce matin.
Madame Abdi Aden, quelles sont les mesures que le gouvernement devrait prendre pour augmenter sa capacité d'attraction?
Le Canada attire beaucoup de gens. Il n'a pas besoin de faire de la promotion pour attirer des immigrants francophones. Il suffit d'aller en Afrique pour se rendre compte que beaucoup de gens veulent quitter leur pays pour venir au Canada.
La question est plutôt d'attirer les personnes que nous souhaitons avoir. N'oublions pas qu'à la base, le système d'immigration sert d'abord des fins économiques. Le Canada va chercher des gens surtout pour qu'ils viennent travailler ici. C'est la raison d'être de notre système d'immigration. Aujourd'hui, les besoins en main-d'œuvre sont généralisés. Il y a des secteurs qui ont plus besoin de main-d'œuvre...
Excusez-moi de vous interrompre, madame. Je comprends ce que vous dites, mais y a-t-il quelque chose qui manque dans la façon dont on fait la publicité? Le processus d'acceptation sera accéléré pour certains types de candidats et de candidates. Beaucoup de gens voudraient venir ici, mais tous ne seront pas acceptés. Sur quoi le gouvernement devrait-il se concentrer pour attirer les candidats et les candidates qui seront acceptés plus rapidement parce qu'ils possèdent les compétences que nous recherchons?
Un exemple qui vient d'être mis en place est le système axé sur les résultats. Avec ses programmes d'Entrée express, le gouvernement vient de mettre en place un système qui recrutera les gens détenant les compétences dont le Canada a besoin.
Dans les pays où le Canada fait de la promotion, iI faut aussi informer les populations de nos besoins en main-d'œuvre. De cette façon, les personnes que nous recherchons seront davantage incitées à faire une demande. Il ne suffit pas de dire qu'il fait beau au Canada et que c'est un pays bilingue. Il faut dire quels sont nos besoins en main-d'œuvre et les compétences que nous recherchons.
Il faudrait mettre en place des programmes de partenariat avec certains pays. D'autres pays, notamment l'Allemagne, ont plusieurs programmes de partenariat avec certains pays francophones pour attirer les gens qui possèdent les compétences qu'ils recherchent.
Je vous remercie.
Madame Meggs, pouvez-vous nous parler des bassins dans lesquels on va chercher le plus souvent des immigrants francophones et de ce qui est fait pour attirer ces derniers au Canada?
Il y a les pays de la Francophonie, évidemment, ainsi que les pays dont les ressortissants peuvent apprendre le français plus rapidement à leur arrivée au Canada, comme l'Espagne. Toutefois, la majorité des demandes viennent des pays d'Afrique du Nord qui sont d'anciennes colonies françaises. Ce sont les plus grands bassins d'immigration francophone. Actuellement, dans le cadre du programme québécois qui est l'équivalent d'Entrée express, 30 % des demandes viennent de trois pays d'Afrique: le Maroc, l'Algérie, et le Sénégal. Les demandes venant du Sénégal ont beaucoup augmenté dernièrement. C'est là que les gens expriment leur intérêt.
Toutefois, j'aimerais revenir un peu sur la question de l'immigration temporaire, parce que ce sont les gens de cette catégorie qui forment le bassin de recrutement pour l'immigration permanente. Or, l'immigration temporaire n'a pas les mêmes exigences sur le plan du français: l'employeur va chercher les travailleurs qu'il veut, et n'a qu'à spécifier la langue requise pour l'emploi.
Merci.
Madame Sacko, lorsque des immigrants francophones arrivent dans des communautés de langue officielle en situation minoritaire, quels sont les plus grands défis auxquels ils font face pour y vivre et participer à la société?
Si on regarde la situation actuelle dans son ensemble, les plus grandes barrières pour les gens qui arrivent dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont trait à la reconnaissance de leurs acquis. Lorsqu'on sélectionne des candidats à l'immigration, que ce soit dans le cadre des programmes des provinces ou des programmes fédéraux d'Entrée express, on recrute des candidats qui sont hautement qualifiés et qui arrivent ici avec beaucoup de compétences et des années d'expérience. Sur la foi de leur dossier, ces gens sont la crème de la crème, mais ils n'arrivent pas à travailler dans leur domaine d'expertise. La non-reconnaissance de leurs acquis pose un gros problème, parce que cela force ces gens à revoir leur objectif d'intégration et à se contenter de boulots qui ne sont pas nécessairement dans leur champ d'action pour arriver à bâtir l'expérience nécessaire, ce qui peut prendre beaucoup de temps.
J'ai aussi parlé de la langue, il n'y a pas longtemps. Les programmes de langue doivent être très bien structurés. Je pense à l'apprentissage de l'anglais, par exemple. On sait que c'est important pour les francophones dans les communautés en situation minoritaire. Or, des programmes ont été éliminés et les listes d'attente sont longues. Ces gens n'arrivent pas à avoir tout de suite accès à ces programmes pour les préparer...
Merci, madame Sacko.
Chers témoins, je vous prie de me pardonner d'avoir dû vous interrompre durant la réunion, mais nous avons quand même réussi à vous poser beaucoup de questions. Je vous invite à ne pas hésiter à nous faire parvenir par écrit toute information supplémentaire que vous estimez pertinente pour le Comité, par l'entremise de notre greffière, Mme Dallaire.
Cela étant dit, la semaine prochaine, nous entendrons d'autres témoins au sujet de l'accroissement de l'immigration francophone au Canada.
Encore une fois, merci de votre patience, chers témoins. Je remercie également les membres du Comité.
La séance est levée.
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