:
Je déclare la séance ouverte.
[Traduction]
Bienvenue à la 5e séance du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.
[Français]
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 25 novembre 2021.
Les membres du Comité seront présents en personne ou par l'application Zoom. Les délibérations seront publiées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.
[Traduction]
En raison de la pandémie qui sévit actuellement, et conformément aux recommandations des autorités sanitaires et de la directive émise par le Bureau de régie interne le vendredi 28 janvier pour assurer la santé et la sécurité, tous ceux et celles qui assistent à la séance en personne doivent maintenir une distance de deux mètres et porter un masque non médical lors de leurs déplacements dans la pièce. Il est fortement recommandé d'en porter un en tout temps, y compris en position assise, et de maintenir une hygiène adéquate des mains en utilisant le désinfectant prévu à cet effet dans la pièce.
[Français]
En tant que président, j'appliquerai ces mesures pendant toute la durée de la réunion, et je remercie d'avance les membres du Comité de leur coopération.
Pour ceux qui participent virtuellement, je voudrais énoncer quelques règles à suivre.
Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont disponibles pour cette réunion. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français.
Si l'interprétation est perdue, veuillez m'en informer immédiatement, et nous verrons à ce qu'elle soit correctement rétablie avant de reprendre les travaux.
Pour les députés participant en personne, procédez comme vous le feriez habituellement lorsque l'ensemble du Comité se réunit en personne dans une salle de réunion.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous reconnaisse par votre nom.
Si vous participez par vidéoconférence, veuillez appuyer sur l'icône du microphone pour activer le son de votre micro. Pour ceux qui sont dans la salle, votre micro sera contrôlé, comme d'habitude, par l'agent chargé des procédures et de la vérification.
Nous vous rappelons que tous les commentaires des membres du Comité doivent être adressés par l'intermédiaire de la présidence. Lorsque vous parlez, veuillez le faire lentement, comme je le fais souvent, et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être mis en sourdine.
En ce qui concerne la liste des intervenants, la greffière du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir un ordre de parole consolidé pour tous les députés, qu'ils participent virtuellement ou en personne.
[Traduction]
Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en aviser. Sachez que nous pourrions devoir suspendre la séance pendant quelques minutes, étant donné que nous devons nous assurer que tous les membres peuvent y participer pleinement.
[Français]
Conformément à l'article 108(3)f) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 31 janvier 2022, le Comité tient une séance d'information sur les enjeux urgents liés à l'application de la Loi sur les langues officielles au Canada.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins.
Aujourd'hui, nous recevons par vidéoconférence des représentants du Commissariat aux langues officielles. Premièrement, nous recevons M. Théberge, commissaire aux langues officielles. Je vous souhaite de nouveau la bienvenue à notre comité, monsieur Théberge.
Nous recevons également Mme Isabelle Gervais, commissaire adjointe de la Direction générale de l'assurance de la conformité, M. Pierre Leduc, commissaire adjoint de la Direction générale des politiques et des communications, M. Éric Trépanier, commissaire adjoint de la Direction générale de la gestion intégrée, ainsi que Me Pascale Giguère, avocate générale de la Direction générale des affaires juridiques.
Je vous souhaite à tous la bienvenue.
Je vous invite maintenant à faire, comme vous le savez, parce que vous êtes des habitués, une allocution d'ouverture de cinq minutes au maximum. Ensuite, nous passerons aux questions provenant de nos collègues qui sont dans la salle ou qui participent virtuellement.
Monsieur Théberge, vous avez la parole pour cinq minutes.
Monsieur le président, honorables membres du comité, bonjour.
Bien que la rencontre d'aujourd'hui se déroule sur une plateforme virtuelle, je tiens à souligner que je m'adresse à vous depuis le territoire visé par le Traité no 1, soit le territoire traditionnel des peuples anishinabe, cri, oji-cri, dakota et déné, ainsi que la patrie de la Nation métisse.
Je suis ici aujourd'hui pour vous parler des enjeux urgents qui touchent la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles.
J'aimerais souligner la présence de Mme Isabelle Gervais, de M. Pierre Leduc et de M. Éric Trépanier, commissaires adjoints au Commissariat aux langues officielles, ainsi que de Mme Pascale Giguère, avocate générale du Commissariat.
Nous vivons sans contredit une époque mouvementée sur le plan linguistique. L'attention sans précédent générée par les langues officielles au pays dans la dernière année démontre clairement l'importance que la population canadienne accorde aux langues officielles et à la dualité linguistique.
Plusieurs événements ont contribué à faire de la question linguistique un enjeu de premier plan au Canada en 2021, soit l'immigration francophone, l'éducation dans la langue de la minorité, la réforme des langues officielles au gouvernement fédéral, les réformes linguistiques dans plusieurs provinces ainsi que les nombreux manquements à la Loi sur les langues officielles.
[Traduction]
Le non-respect par les institutions fédérales de leurs obligations en matière de langues officielles demeure un problème important et récurrent pour lequel nous devons trouver des solutions. Les nombreuses plaintes que je reçois année après année en sont d'ailleurs la preuve, et la tendance à la hausse se confirme. Nous avons encore reçu bien au‑delà de 1 000 plaintes en 2020‑2021, et le nombre de plaintes reçues pour l'année en cours dépasse déjà les 5 500, ce qui représente environ cinq fois plus de plaintes que ce nous recevons habituellement au cours d'une année.
Au cours des derniers mois, nous avons reçu un nombre record de plaintes liées au discours unilingue du PDG d'Air Canada, Michael Rousseau, et un grand nombre de plaintes liées à l'annonce de la nomination de Mary Simon à titre de gouverneure générale du Canada.
Par l'entremise de notre mécanisme de plaintes, la population canadienne, et plus particulièrement la population francophone, s'est exprimée. Elle a envoyé un message clair au gouvernement: nous devons en faire plus pour que nos deux langues officielles soient respectées.
Je crois que cela en dit long sur ce que ressent la population canadienne à l'heure actuelle par rapport à ses droits linguistiques, et son message doit être entendu: elle en a assez. Elle exige que ses droits linguistiques soient respectés, et elle s'attend à ce que ses dirigeants, plus particulièrement ceux des institutions assujetties à la Loi sur les langues officielles, maîtrisent le français et l'anglais.
[Français]
Je le répète depuis longtemps: malgré des centaines d'enquêtes, de recommandations et d'autres rapports spéciaux visant à régler les problèmes en matière de langues officielles et malgré tous les efforts fournis pour tenter de faire respecter la Loi, les droits linguistiques de la population continuent d'être bafoués.
Force est d'admettre que la Loi sur les langues officielles ne me permet pas, dans sa forme actuelle, de pleinement remplir mon mandat quant à la protection des droits linguistiques.
Comme le plus grand pouvoir dont je dispose actuellement est celui de formuler des recommandations, il me faut sans contredit de nouveaux outils de conformité, comme les ententes exécutoires et les sanctions administratives pécuniaires.
[Traduction]
Ces mécanismes sont essentiels pour amener les institutions fédérales qui sont assujetties à la loi à mieux se conformer à celle‑ci, et par le fait même, à mieux protéger les droits linguistiques de la population canadienne. J'espère que ces mécanismes feront partie des mesures qui seront proposées dans le nouveau projet de loi, que nous attendons tous avec impatience. Les mesures présentées par le gouvernement dans sa réforme des langues officielles sont prometteuses et semblent proposer des solutions concrètes à plusieurs des problèmes qui figurent dans la version actuelle de la Loi. J'espère donc retrouver dans le nouveau projet de loi la même volonté de protéger réellement les droits linguistiques de la population canadienne. Je serai d'ailleurs heureux de vous faire part de mon point de vue sur cet éventuel projet de loi lorsque le temps sera venu.
Je vous remercie de votre attention.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions dans la langue officielle de votre choix.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais saluer le commissaire aux langues officielles et tous les membres de son équipe, soit Mme Gervais, M. Leduc, M. Trépanier et Mme Giguère.
Ma question s'adresse à M. Théberge.
Monsieur Théberge, en écoutant votre présentation, j'ai eu le sentiment que, au Canada, la volonté ne se traduisait pas par des moyens mis à la disposition du commissaire pour protéger notre pays bilingue et en faire la promotion.
Pourriez-vous me dire comment vous vous sentez, en tant que commissaire, lorsque vous êtes inondé de plaintes? On parle ici de réactions exprimées par des Canadiens.
Comment vous sentez-vous par rapport au mandat qui vous a été confié et qui consiste à protéger les deux langues officielles?
:
Je vous remercie beaucoup de la question.
Le mandat de protéger les droits linguistiques des Canadiens et des Canadiennes est très vaste. Après un certain nombre d'années, je constate que, en dépit des 60 000 plaintes que nous avons reçues et des innombrables recommandations que nous avons faites, la situation ne semble pas s'améliorer. Il faut réaliser que nous n'avons peut-être pas les outils nécessaires pour faire le travail, que ce soit en matière de conformité à la Loi ou de promotion des langues officielles.
Dans le cadre de cette réflexion sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles, il est important de se pencher sur les outils dont dispose le commissaire. Il faut le faire non seulement en fonction du mandat du commissaire, mais aussi en fonction de sa capacité à assurer à tous les Canadiens et à toutes les Canadiennes la possibilité de parler la langue officielle de leur choix chaque jour.
Je crois que cette réflexion est entamée, mais il est important de la poursuivre. Si nous ne changeons pas nos comportements et nos façons de faire, nous devrons toujours faire face au même comportement de la part des institutions fédérales. Selon moi, ces 60 000 plaintes démontrent que les moyens mis à notre disposition jusqu'à maintenant ne suffisent pas à la tâche.
:
Je vous remercie, monsieur le commissaire.
Je pense que nous faisons le même constat.
Vous avez dit que la réflexion se poursuivait et que serait bientôt déposée la version modernisée de la Loi sur les langues officielles en réponse au projet de loi . Ce projet de loi a été déposé à la fin de la dernière législature, avant que le ne déclenche des élections. Il nous faut donc recommencer tout le processus, suivant un échéancier de 100 jours.
Vous venez de parler de l'un des problèmes majeurs qui se posent, soit le fait que vous n'avez pas nécessairement les outils nécessaires pour faire votre travail.
Êtes-vous de ceux qui veulent aller vite ou de ceux qui veulent prendre leur temps pour créer un outil durable qui protégera adéquatement le français? Soyons bien honnêtes, l'objectif n'est pas de protéger l'anglais. Cela fait bien sûr partie de l'objectif, mais c'est le français qui est menacé.
Selon vous, devons-nous procéder à la modernisation de la Loi sur les langues officielles de façon accélérée, ou, au contraire, devrions-nous prendre le temps nécessaire pour aboutir à une loi qui accordera des outils au commissaire, lesquels lui permettront d'atteindre des résultats concrets en matière de protection de la langue française?
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le commissaire, de comparaître devant notre comité. Je n'ai pas encore eu la chance de vous rencontrer officiellement, dans le cadre de mon travail au sein de ce comité, mais j'ai la chance de représenter une grande communauté franco-ontarienne, chez moi, laquelle constitue 60 % de la population de la province. Tous les cinq ans, le recensement nous montre que nous perdons des plumes.
J'ai lu votre déclaration du 28 janvier 2022 concernant la décision de la Cour d'appel fédérale. Je pense que mon collègue M. Godin y a fait allusion.
Quelle est votre réaction et que recommandez-vous?
Vous avez parlé un peu du projet de loi , mais j'aimerais avoir vos commentaires sur la façon dont nous pouvons protéger le français dans le cadre de cette étude.
Quels sont les éléments que nous pouvons renforcer dans ce projet de loi en ce qui a trait aux fonctions du commissaire?
:
Premièrement, on doit se pencher sur les parties de la Loi qui, à mon avis, traitent de l'aspect que vous soulevez. La partie VII de la Loi porte sur l'obligation des institutions fédérales de tenir compte des besoins des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Dans sa décision, la Cour d'appel fédérale a reconnu cette obligation. Elle a aussi reconnu qu'il faut s'assurer que les programmes et les politiques mis en place appuient le développement de ces communautés et, surtout, ne lui nuisent pas. De plus, le gouvernement doit prendre des mesures proactives et positives pour assurer le développement et l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Pour ce qui est des éléments qui touchent particulièrement le français, viser l'égalité réelle veut dire que l'on n'applique pas la Loi de la même façon partout au Canada. Dans certaines régions, il y a des situations où les communautés sont très fragiles, par exemple, dans l'Ouest. Ces communautés sont très petites, comme dans ma province, le Manitoba. Si l'on veut atteindre l'égalité réelle, il est important, au moment d'appliquer la Loi, d'avoir une approche différenciée. La Cour suprême a très bien défini ce que l'on entend par égalité réelle, qui est l'objectif.
Pour ce qui est de la conformité à la Loi, le projet de loi , prévoit déjà le pouvoir de conclure des ententes exécutoires avec les institutions fédérales, la possibilité de formuler des ordonnances et la mise en place de différentes méthodes de résolution de conflit, par exemple, qui ne sont pas à notre disposition actuellement. On pourrait ajouter des sanctions administratives pécuniaires. Ce serait une boîte à outils beaucoup mieux garnie, qui permettrait d'utiliser différents mécanismes de règlement selon la situation. Actuellement, le commissaire peut transmettre des recommandations, et cela fait plusieurs années que nous le faisons.
Par ailleurs, lorsqu'il s'agit des façons dont nous pouvons mieux protéger le français, il faut aussi parler des façons de le faire au sein de l'appareil fédéral. Pour ce qui est de la langue de travail, il est extrêmement important de réaliser que, dans le contexte du milieu de travail, il y a une langue qui domine, et c'est l'anglais. Il faut donc s'assurer que les conditions nécessaires sont en place afin que les fonctionnaires fédéraux puissent utiliser soit le français langue maternelle, soit le français langue seconde.
À l'heure actuelle, les structures en place font en sorte de favoriser largement une langue par rapport à l'autre. On parle très peu de cela dans le cadre des travaux portant sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles. On parle un peu d'assurer une meilleure formation linguistique. C'est un premier pas, mais il faut absolument que, dans la partie V de la Loi, qui touche la langue de travail, on s'assure que les fonctionnaires ont réellement les outils nécessaires pour utiliser leur langue maternelle ou leur langue seconde. Cela veut dire qu'il faut toucher aux structures en place qui, à mon avis, font en sorte que le français devient très souvent secondaire au sein de l'appareil fédéral. Cela dure depuis un bon nombre d'années.
:
Je vous remercie, monsieur Drouin.
Monsieur Théberge, c'est toujours un plaisir de vous revoir. Je vous suis reconnaissant du travail que vous avez accompli dans le dossier de la Cour d'appel fédérale, qui a renversé la partie du jugement de première instance rendu par le juge Gascon ayant trait à la partie VII de la Loi.
Quand je lis les analyses figurant dans les décisions des deux cours, soit la Cour d'appel et la Cour d'appel fédérale, il est très clair qu'il faut se doter de clauses linguistiques robustes. Je le répète: elles doivent être très robustes. Il faut également qu'elles s'appliquent à toutes les ententes, sinon il faudra chaque fois aller devant un tribunal pour soulever les points cruciaux dans le cas de chacune des ententes, un peu comme nous l'avons fait dans les écoles.
Selon vous, quelles mesures devrions-nous prendre dans le cadre de la modernisation de la Loi sur les langues officielles, en particulier pour ce qui touche les parties IV et VII de la Loi, par suite de ces deux décisions?
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie le commissaire aux langues officielles de sa présentation.
Monsieur Théberge, nous avons récemment reçu à notre comité un spécialiste en droits linguistiques, M. Guillaume Rousseau, qui vient de publier un ouvrage assez exhaustif dans lequel il aborde les modes d'aménagement linguistique dans le monde. Selon lui, à peu près tous les spécialistes s'entendent pour dire que les modes d'aménagement linguistique fondés sur le principe de territorialité peuvent être efficaces pour protéger les langues minoritaires et les langues vulnérables, mais que les modes d'aménagement basés sur le principe de personnalité, comme la Loi sur les langues officielles, sont inefficaces pour protéger les langues en situation minoritaire.
La Loi sur les langues officielles est entrée en vigueur il y a 52 ans. Après toutes ces années, on ne peut pas s'empêcher de constater que c'est effectivement le cas. Le taux d'assimilation des francophones hors Québec augmente constamment. Même au Québec, on constate un déclin du français.
J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
Devrions-nous aussi modifier les principes sous-jacents à la Loi sur les langues officielles?
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En ce qui a trait au concept d'aménagement linguistique, il faut savoir qu'il y a énormément de facteurs qui contribuent à la mise en œuvre d'une politique. L'approche fondée sur le principe de territorialité est reconnue, mais cela ne donne pas toujours les résultats voulus.
Cela étant dit, il y a aussi d'autres approches dont nous pourrions tenir compte. Vous avez mentionné que la Loi est entrée en vigueur il y a déjà 52 ans. Si je pense aux communautés à l'extérieur du Québec, sans la Loi telle qu'elle existe, qui reconnaît les communautés en situation minoritaire, je crois que nous aurions aujourd'hui une discussion tout à fait différente. Nous nous poserions certainement la question de savoir où sont les communautés francophones en milieu minoritaire.
Je pense que le modèle d'aménagement linguistique que nous choisissons renferme aussi les valeurs auxquelles nous tenons en tant que Canadiens et Canadiennes. Nous pouvons certainement améliorer notre approche et y apporter des correctifs pour assurer la mise en œuvre de normes et nous assurer de l'essor de la langue en situation minoritaire, qui, dans le contexte canadien, est le français. Nous pourrions certainement trouver d'autres experts qui disent qu'il y a d'autres approches dont nous pourrions tenir compte.
Par ailleurs, il y a aussi un autre principe de la Loi sur les langues officielles selon lequel les anglophones du Québec doivent être traités sur le même pied d'égalité que les francophones. Lors de l'entrée en vigueur de la Loi, la population anglophone bénéficiait des services dans leur langue au sein des institutions, des réseaux de la santé et des réseaux scolaires, et ainsi de suite. Ces institutions étaient surfinancées, parce que, les anglophones, c'étaient des conquérants suivant l'histoire du pays. On a traité les communautés anglophones sur le même pied d'égalité que les communautés francophones et acadienne, qui ont été assujetties à des lois ethnocidaires qui interdisaient l'enseignement du français. Ce n'est pas du tout la même situation qu'aujourd'hui.
Ce contexte dans lequel la Loi sur les langues officielles continuait de renforcer constamment l'anglais au Québec et le surfinancement des institutions anglophones n'a-t-il pas contribué au déclin du français au Québec?
:
Premièrement, comme vous l'avez mentionné, on est censé atteindre la cible de 4,4 % d'ici 2023, mais évidemment, on n'y arrivera pas. Ainsi, ce sont plus de 75 000 immigrants d'expression française que nous aurions pu accueillir au Canada, à l'extérieur du Québec, mais qui ne viendront pas. Les répercussions démographiques se feront sentir pendant une génération, sinon davantage.
Le gouvernement doit se doter réellement d'une politique en matière d'immigration francophone hors Québec. Je dirais même que, dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles, on devrait inclure une obligation spécifique visant Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, afin de fixer une cible beaucoup plus ambitieuse si on veut maintenir l'équilibre entre les deux communautés. Cet équilibre se perd chaque année, ce qui se répercute sur la qualité des services, sur l'éducation, etc.
Je pense donc qu'on devrait intégrer à la partie VII des obligations spécifiques pour la création d'un programme d'immigration francophone en milieu minoritaire. C'est peut-être l'une des seules façons qui nous permettra d'assurer une reddition de comptes.
:
Oui, monsieur le président. Je vais prendre la balle au bond. Il y a une belle amitié au sein du groupe, mais je tiens à conserver mon temps de parole.
Monsieur le commissaire, vous avez dit, cette semaine, que le gouvernement fédéral avait conclu des ententes avec toutes les provinces, à l'exception de l'Ontario, mais qu'on ne retrouvait pas dans ces ententes fédérales-provinciales-territoriales un nombre proportionnel de places en garderie pour les communautés francophones en milieu minoritaire.
Depuis plusieurs mois, je dis que l'on se doit de donner accès à des places à nos enfants de langue française.
En avez-vous parlé à la ministre? Si oui, prévoit-elle inclure cela dans son projet de loi sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles?
C'est assez décevant d'entendre cela.
La semaine dernière, le ministre de l'Immigration a fait une conférence de presse entièrement en anglais.
La question de l'immigration francophone ne semble pas être une priorité du gouvernement, pas plus que le fait de vous rencontrer ou de prendre des mesures immédiates.
J'aimerais poser une brève question à propos des cibles.
On n'a pas donné suite aux recommandations visant à rehausser les cibles à 7 %.
Quelle est votre position quant au rehaussement de ces cibles?
:
Le nombre de plaintes dépend des citoyens et des citoyennes. Nous ne savons pas nécessairement pourquoi on a observé une diminution cette année-là. Les plaintes viennent souvent par vagues et sont influencées par ce qui se passe dans le milieu, dans l'environnement.
Cette année, par exemple, nous avons déjà reçu plus de 5 500 plaintes, ce qui correspond à cinq fois la norme. Si on regarde l'évolution sur une période de 10 ans, on constate que la moyenne était auparavant de 500 plaintes par année, alors qu'elle se situe maintenant autour de 1 000 plaintes par année. On observe donc que le nombre de plaintes a doublé.
Cette année, le nombre de plaintes est exceptionnel, mais cela démontre que les Canadiens et les Canadiennes réagissent à certains événements. Ils réagissent de façon viscérale lorsqu'ils sentent que leurs droits linguistiques ont été violés. Certaines situations font que nous recevons parfois plus de plaintes, et parfois moins. Je n'ai pas d'explication particulière pour la diminution des plaintes en 2018. Cela dit, je peux vous dire que, cette année, il y a eu un rattrapage.
:
Nous nous occupons uniquement des organisations, et plus précisément des institutions fédérales.
Comme je l'ai dit à plusieurs reprises au cours de notre comparution d'aujourd'hui, pour le moment, je peux faire des recommandations, ce que je fais. Je fais des recommandations, et je peux produire des rapports. Je peux aussi mener des études spéciales. Cependant, au bout du compte, si une institution fédérale ne met pas en œuvre une recommandation, elle ne subit aucune réelle conséquence.
Comme je l'ai mentionné précédemment, un nombre important de recommandations sont mises en œuvre par les institutions fédérales. Le problème, c'est que très souvent, cela ne change cependant pas le comportement de cette institution, car nous recevons le même type de plaintes d'un autre endroit, qu'il s'agisse de plaintes concernant la langue de travail ou de plaintes concernant des relations avec le public.
De plus, pour reprendre une analogie liée aux affaires, il est important de garder à l'esprit que le modèle d'affaires du gouvernement a beaucoup changé depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les langues officielles.
Par exemple, avant 1992, Transports Canada optait...
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie le commissaire Théberge et toute son équipe.
Je tiens d'abord à souligner, comme l'a fait mon collègue M. Gourde, la grande efficacité de votre équipe. J'ai été nommé secrétaire parlementaire le vendredi 3 décembre et, le 16 décembre, j'avais déjà reçu votre lettre de félicitations et votre demande de rencontre. Cela a été fait en 9 jours ouvrables. Encore une fois, j'offre mes félicitations à votre équipe pour sa grande efficacité.
Ensuite, je voulais vous dire que le a très à cœur la question de l'immigration francophone. Il comparaîtra d'ailleurs devant le Comité permanent des langues officielles.
Voilà les deux éléments que je tenais à souligner.
Monsieur Théberge, quelle évaluation faites-vous des mesures qui ont été mises en œuvre jusqu'à maintenant dans le cadre du plan d'action pour les langues officielles de 2018‑2023?
Quelles sont vos attentes quant au renouvellement de cette initiative?
:
Je vais me dépêcher à poser mes questions.
[Traduction]
Je vous remercie, monsieur le commissaire, de votre présence parmi nous aujourd'hui.
Je vais aller droit au but et vous poser la question concernant la surveillance de la mise en œuvre des recommandations. Je suis consciente que vous voulez que cette nouvelle loi ait un peu plus de mordant, ce qui est une considération sérieuse.
Vous avez mentionné précédemment que des répercussions pécuniaires pourraient être imposées par défaut. Parfois, lorsque nous traitons avec des entreprises, une amende n'est pas exactement le meilleur moyen de les inciter à faire quelque chose ou à ne pas faire quelque chose, n'est‑ce pas?
Est‑ce la seule mesure incitative pécuniaire ou punitive que vous recherchez, ou y a‑t‑il d'autres options que nous pourrions examiner?
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Théberge, je veux revenir sur ma question de tout à l'heure. J'ai procédé rapidement; comme vous le savez, en comité, on manque de temps.
Alors, je reviens sur votre déclaration. Le gouvernement fédéral a conclu des ententes avec toutes les provinces, à l'exception de l'Ontario. Par contre, selon vous, ces ententes fédérales-provinciales-territoriales ne prévoient pas un nombre proportionnel de places en garderie pour les communautés francophones en milieu minoritaire.
Vous avez mentionné, tout à l'heure, que vous aviez rencontré la . Avez-vous discuté avec elle de cette situation?
:
Monsieur le commissaire, excusez-moi de vous interrompre, mais mon temps de parole est très court. Vous avez répondu à ma question: vous avez rencontré la , mais, selon votre mémoire, vous n'avez pas abordé cette situation.
Je veux vous rappeler, monsieur le commissaire, que vous avez dit à ma collègue Mme Kayabaga que la prochaine Loi sur les langues officielles devait répondre aux besoins non seulement d'aujourd'hui, mais surtout de demain. Je veux donc vous faire un rappel chronologique.
En juin 2021, le projet de loi a été déposé. Il y a eu dissolution du Parlement en juillet. En août et en septembre, nous étions en campagne électorale. En octobre, il y a eu la formation du Cabinet, qui a décidé de se donner 100 jours pour déposer une nouvelle version du projet de loi. On s'entend qu'il y a eu la période des Fêtes. Nous sommes maintenant en février 2022.
Je vous ai demandé, tout à l'heure, si nous devions rapidement adopter ce nouveau projet de loi. Vous venez d'affirmer que, lorsque vous avez rencontré la , vous n'aviez pas fait le constat concernant les ententes sur les garderies. Vous m'avez répondu, tout à l'heure, que nous devions adopter le projet de loi rapidement.
Pourriez-vous me donner votre définition du mot « rapidement »?
:
Elles traitent essentiellement de la question de recevoir des services dans la langue de son choix. La plupart du temps, cette langue est le français.
Nous avons reçu un certain nombre de plaintes relatives à la langue de travail, mais la grande majorité des plaintes concernait le fait de ne pas avoir reçu des services dans la langue de son choix auprès d'institutions fédérales.
Il y a un ensemble d'institutions qui, faute d'un meilleur terme, se rendent coupables de ces comportements, et cela n'a pas beaucoup changé avec le temps. Par exemple, cette année, nous avons reçu un nombre important de plaintes du Québec, mais aussi des quatre coins du pays, concernant le discours unilingue du PDG d'Air Canada.
Il s'agit souvent de communications dans la langue de son choix.
:
Absolument. Nous allons tenir compte des commentaires. Le commissaire peut envoyer ses recommandations à la greffière.
Avant que nous poursuivions les travaux du Comité, je veux simplement indiquer aux membres que la motion de notre collègue Joël Godin proposait de rencontrer le commissaire et son équipe pendant deux heures. Si nous souhaitons que la réunion se poursuive après 17 h 30, cela prend un consentement unanime.
Je vais vous faire une suggestion en tant que président, et vous me direz ce que vous voulez. Lors du prochain tour, je couperai de moitié le temps de parole des députés. Au lieu d'accorder deux tours de questions de cinq minutes aux conservateurs et aux libéraux, je ne leur donnerais qu'une ronde de questions de cinq minutes et j'accorderais aux néodémocrates et aux bloquistes une seule ronde de questions d'une minute quinze secondes. Ainsi, tous les députés disposeraient de la moitié de leur temps de parole habituel. Pour ce faire, nous aurions besoin de 15 minutes supplémentaires. Voilà ce que je vous suggère.
Un tour complet nécessiterait au moins 25 minutes. Je vous offre donc deux options: soit on coupe de moitié le temps de parole de tous les députés, soit on fait un tour complet de questions. Cela dit, le consentement unanime est nécessaire si nous voulons que la rencontre se poursuive après 17 h 30. Mme la greffière m'informe que les techniciens, les interprètes et tous les autres membres du personnel sont prêts à rester plus longtemps.
Monsieur Godin, comme il s'agit de votre motion, je vous donne l'occasion de nous dire ce que vous en pensez.
:
Nous n'avons pas encore discuté de la question de la gouvernance des langues officielles au sein du gouvernement. Dans le projet de loi qui est proposé, la gouvernance est une responsabilité que se partagent toujours le Conseil du Trésor et le ministère du Patrimoine canadien.
Il est extrêmement important que toute agence centrale soit en mesure d'assurer la coordination et la gouvernance des langues officielles au sein de l'appareil fédéral, mais aussi qu'elle fasse connaître aux autres ministères leurs obligations et s'assure qu'elles les respectent.
Actuellement, la gouvernance est partagée entre deux ministères. D'une part, le ministère du Patrimoine canadien, que nous appelons le ministère responsable, veille à faire appliquer certains éléments de la partie VII de la loi, et, d'autre part, le Conseil du Trésor s'occupe d'autres aspects. À mon avis, il est important que la gouvernance soit plus centralisée au sein de l'appareil fédéral. Cela serait très utile pour élaborer des directives, des politiques et ainsi de suite.
Nous n'avons pas discuté de gouvernance aujourd'hui, mais, si vous en parlez aux intervenants, vous allez constater que cette question revient souvent. La question des dispositions linguistiques est souvent avancée également, non seulement par nous, mais par plusieurs autres intervenants. Bien sûr, la question des mécanismes de conformité, liés aux pouvoirs du commissaire, revient aussi souvent, tout comme la question de l'immigration.
Si nous voulons atteindre l'égalité réelle, il est important aussi de nous donner les moyens de l'atteindre. Ceux-ci se retrouvent, par exemple, dans la partie VII de la Loi. Nous avons beaucoup parlé de la partie VII; elle est cruciale au développement de nos communautés. C'est avec plaisir que je vous ferai parvenir les informations à ce sujet.
Selon moi, la Loi sur les langues officielles comporte deux volets importants. Le premier, ce sont les services offerts par l'appareil fédéral qui communique avec les Canadiens et les Canadiennes. Ce volet est abordé dans les parties IV et V. L'autre volet, celui abordé dans la partie VII, vise les communautés.
Si nous voulons maintenir le concept de la dualité linguistique au Canada, il faut nous assurer que nos communautés de langue officielle en situation minoritaire sont robustes et solides. Si nous voulons réellement mettre en œuvre le bilinguisme institutionnel, la population canadienne doit être en mesure de recevoir les services et les communications dans la langue officielle de son choix en temps normal, mais surtout en situation d'urgence.
Il est donc important de revoir la Loi. Je reviens à ce que j'ai dit plus tôt, il faut s'assurer que la Loi répond aux besoins des Canadiens et des Canadiennes, aujourd'hui et dans l'avenir, mais aussi qu'elle est technologiquement neutre, c'est-à-dire que la technologie ne devient pas une excuse pour ne pas respecter la Loi sur les langues officielles.
Je vais m'arrêter ici.
:
D'abord, en ce qui concerne le jugement de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire
Fédération des francophones de la Colombie-Britannique c. Canada (Emploi et Développement social), il est important de rappeler que nous recevions des plaintes depuis 2018 en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles et qu'elles étaient recevables. Cela veut dire qu'il était clair que certaines institutions fédérales avaient enfreint la Loi sur les langues officielles. Toutefois, étant donné les principes de l'État de droit, en raison du jugement Gascon, les plaintes étaient inévitablement non fondées, parce que c'était une interprétation très générale de la loi vis-à-vis des institutions fédérales. Maintenant, on peut enquêter à fond sur ces plaintes relatives à la partie VII.
Pour ce qui est de la COVID‑19, dès le début, il y a eu des difficultés sur le plan des communications. Nous avons dû intervenir dès le mois de mars et au début d'avril auprès de certaines institutions fédérales pour nous assurer que leurs communications étaient dans les deux langues officielles. Nous avons reçu des plaintes concernant Santé Canada, lorsqu'il a permis l'étiquetage unilingue de produits sanitaires. Certaines communications ont été faites avec certaines applications comme celle de Switch Health, par exemple, et ne se faisaient pas dans les deux langues officielles.
La pandémie a révélé des failles qui existaient au sein de l'appareil fédéral pour ce qui est de la communication dans les deux langues officielles. La capacité n'était pas là. On ne veut pas revivre de pandémie, mais je pense qu'on devrait tirer des leçons de cette pandémie en vue des prochaines situations d'urgence, qui seront certainement nombreuses. Il faut s'y préparer aujourd'hui, et non après l'événement.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le commissaire, j'aimerais revenir sur la question de l'apprentissage du français langue seconde, qui continue d'être un grand défi. J'ai déjà souligné que, dans mon cas personnel, j'ai dû attendre plus d'un an pour inscrire mes jumeaux de 4 ans à une garderie francophone et que celle-ci manque de personnel, notamment en raison de la COVID‑19. Malgré leurs grands efforts, y compris des efforts visant à faire subventionner des candidats par IRCC, ils n'ont pas réussi à embaucher le personnel nécessaire pour pourvoir les postes.
Ce n'est pas une question de places disponibles. Nous avons une belle garderie, ici. C'est une question de pénurie de personnel. Malgré les campagnes de recrutement, partout au Canada, les responsables ne réussissent pas à trouver du monde et ils n'ont pas reçu d'aide pour faire subventionner des candidats par l'intermédiaire d'IRCC.
Le manque de personnel se fait sentir non seulement dans les garderies et les écoles francophones du Québec, mais aussi dans les écoles d'immersion française. Pourriez-vous nous parler du manque d'appui non seulement en matière de fonds, mais aussi en matière de personnel lié à l'immigration?
De quelle façon le manque d'appui affecte-t-il l'apprentissage de la langue? De quoi nous privons-nous en ne transmettant pas à une génération le bilinguisme, l'appui de la francophonie et l'apprentissage du français dans un pays comme le Canada?
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Merci, monsieur le commissaire.
Merci, madame Ashton.
Monsieur le commissaire, je vous remercie et vous félicite de votre belle présentation. Je sais que, pour l'accomplissement de vos tâches, vous êtes bien entouré et appuyé par votre personnel, notamment par Me Giguère, Mme Gervais, M. Trépanier et M. Leduc. Si, en raison du temps imparti et des interruptions que j'ai causées — et dont je m'excuse —, vous croyez ne pas avoir réussi à formuler en entier les réponses aux questions qu'on vous a posées, n'hésitez pas à acheminer tout complément à la greffière.
Je vous remercie tous, ainsi que l'ensemble de l'équipe, les analystes, la greffière, les techniciens et les interprètes.
Ai-je le consentement unanime pour clore cette séance?
[Traduction]
Madame Gladu?
Je pense qu'elle répondrait par l'affirmative. Par conséquent...