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Merci, monsieur le président et chers collègues. J'ai été invité pour parler de l'information inexacte qui a été publiée dans le
Globe and Mail. Je peux comprendre que les membres du Comité aient des questions à poser. Je tiens à mettre les choses au clair.
Je voudrais d'abord prendre une minute pour dire à quel point je suis fier du travail accompli par les Forces armées canadiennes et la fonction publique, ainsi que de leur professionnalisme et de leur courage lors de l'évacuation de l'Afghanistan. Je tiens également à dire que je suis fier d'être sikh, mais que lorsque je me regarde dans le miroir, je suis aussi un fier Canadien; c'est exactement ce que je vois. J'espère que mes états de service militaire et public montrent clairement que ma loyauté va au Canada et à mes concitoyens canadiens.
En juin dernier, alors que j'arrivais à la Chambre, le Globe and Mail m'a posé une question très précise: « En août 2021, alors que Kaboul tombait aux mains des talibans, pourquoi avez-vous demandé aux Forces spéciales canadiennes d'aller tenter de sauver quelque 200 sikhs autour d'un temple? » Le fait est que je n'ai pas ordonné aux Forces d'opérations spéciales canadiennes d'organiser une mission de sauvetage dans un gurdwara à Kaboul ni ailleurs à Kaboul.
Les Forces armées canadiennes n'ont pas reçu l'ordre d'accorder la priorité à l'évacuation des sikhs afghans par rapport aux Canadiens, aux interprètes ou à d'autres personnes qui ont aidé le Canada. Comme vous le savez, les décisions tactiques sont laissées à la chaîne de commandement sur le terrain. Par ailleurs, les sikhs et les hindous afghans étaient pris en compte dans la politique du Canada visant à protéger les communautés vulnérables. Cette politique incluait les femmes parlementaires, les militants, les journalistes, les membres de la communauté LGBTQIA+ et les minorités religieuses persécutées.
Vous vous souviendrez qu'à partir du printemps 2018, il y a eu une augmentation de la violence ciblée contre les minorités religieuses en Afghanistan. Ces événements troublants ont incité les députés et la société civile à demander un programme spécial pour aider les minorités religieuses persécutées, et les sikhs et les hindous en particulier. Vingt-cinq députés canadiens ont signé une lettre adressée au ministre de l'Immigration de l'époque, demandant la mise en place d'un programme spécial pour les réfugiés sikhs et hindous afghans, afin qu'ils puissent être accueillis en toute sécurité au Canada. Cette lettre a été signée par des membres du Parti conservateur du Canada, du Nouveau Parti démocratique du Canada et du Parti vert du Canada. La lettre faisait référence — et je vais résumer un peu — au meurtre de 25 sikhs, dont un enfant de 4 ans, lors d'une attaque terroriste contre un gurdwara de Kaboul, à l'assassinat de 19 dirigeants de la communauté sikhe afghane, et à l'enlèvement d'une jeune fille de 13 ans dont le père avait été assassiné par des terroristes.
J'aimerais également citer un extrait de cette lettre. Elle dit: « À la lumière de la menace immédiate à laquelle font face ces communautés, nous vous demandons instamment de créer » — les auteurs s'adressent au ministre de l'Immigration de l'époque — « un programme spécial pour les réfugiés sikhs et hindous afghans [...] afin qu'ils puissent être amenés en sécurité au Canada. »
Je peux vous assurer, monsieur le président, que le gouvernement était déjà à l'œuvre. Nous avons annoncé des mesures spéciales en matière d'immigration afin d'offrir une voie d'accès à la citoyenneté aux Afghans menacés en raison de leur association avec le Canada. Nous avons déployé des troupes en Afghanistan, puis commencé l'évacuation de Kaboul. Par la suite, nous avons intensifié nos efforts pour faire venir au Canada des membres de communautés vulnérables dans le cadre d'une évacuation humanitaire. Il s'agissait notamment de femmes dirigeantes, de défenseurs des droits de la personne, de journalistes, de membres de la communauté LGBTQIA+ et de minorités religieuses persécutées, dont des sikhs et des hindous.
Cette politique gouvernementale a fait l'objet de discussions au cours des mois qui ont précédé la chute de Kaboul. Elle a été largement soutenue et elle incluait les sikhs et les hindous. L'une des organisations de Canadiens qui travaillaient en partenariat avec notre gouvernement était la fondation Manmeet Singh Bhullar. Cette ONG canadienne a été créée en l'honneur de Manmeet Singh Bhullar, ancien député provincial et ministre du gouvernement conservateur de l'Alberta, qui a été tragiquement tué par un camion sur une autoroute alors qu'il aidait un automobiliste en détresse. En 2020, la fondation est devenue un partenaire officiel de notre gouvernement.
La fondation s'est employée à repérer les sikhs et les hindous vulnérables en Afghanistan afin de communiquer leurs noms à IRCC pour faciliter leur immigration au Canada. Toutefois, lorsque la situation en Afghanistan s'est aggravée, les responsables d'IRCC et de l'ONG se sont plutôt efforcés de faciliter l'évacuation de Kaboul de ces minorités persécutées.
Vers la fin du mois d'août, l'ONG m'a contacté au sujet d'un groupe de plus de 200 sikhs et hindous afghans dont l'évacuation vers le Canada avait été approuvée par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Ce groupe avait du mal à entrer en contact avec les soldats et les fonctionnaires canadiens sur le terrain à Kaboul. L'ONG m'a fourni des informations sur la localisation et la situation du groupe. Lorsque j'ai reçu ces informations de l'ONG, je les ai transmises à la chaîne de commandement. J'avais la responsabilité de le faire.
Les représentants du gouvernement et de l'armée sur place ont pris contact avec le groupe, qui se trouvait déjà aux abords de l'aéroport, ce qu'il est important de noter. Le groupe a reçu l'ordre de se rendre à un endroit précis près de l'aéroport pour rejoindre les soldats canadiens. Malheureusement, cette rencontre n'a jamais eu lieu.
Pour conclure, je tiens à souligner que je n'ai pas ordonné une mission de sauvetage. J'ai transmis des informations d'une ONG canadienne partenaire concernant un groupe de personnes vulnérables dont l'évacuation humanitaire vers le Canada avait été autorisée. J'ai suivi et exécuté la politique du gouvernement.
Pour mémoire, je voudrais soumettre au Comité, à titre de preuve, ma déclaration initiale au Globe, la lettre des députés de l'opposition et le communiqué de presse publié lorsque nous avons élargi le programme de réinstallation pour permettre à un plus grand nombre d'Afghans de venir se réfugier chez nous. J'ai ces documents en main.
Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur le ministre.
Je crois que deux des trois éléments sont unilingues, de sorte que nous ne pouvons pas les distribuer aux membres. Une fois qu'ils auront été traduits, nous pourrons les distribuer.
Sur ce, nous passons à un tour de table. Chacun disposera de six minutes.
M. Bezan, vous avez la parole pour six minutes.
M. James Bezan (Selkirk—Interlake—Eastman, PCC): Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous souhaite à nouveau la bienvenue au Comité.
Monsieur le ministre, à quelle date exactement a eu lieu l'opération des Forces armées canadiennes visant à escorter les Afghans jusqu'à l'aéroport de Kaboul?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
De quelles dates parlez-vous?
M. James Bezan:
Les dates précises de l'opération, lorsque tout était en train de s'écrouler.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Sur l'évacuation proprement dite, lorsqu'on a fait appel aux Forces armées canadiennes... Nous avons reçu une demande d'assistance de la part d'Affaires mondiales le 27 juillet. Le 30 juillet, nous avons reçu l'autorisation de nous déployer en Afghanistan.
M. James Bezan:
Quel a été le dernier jour des opérations en Afghanistan?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Parlez-vous du dernier jour des opérations d'évacuation ou du dernier jour des opérations?
M. James Bezan:
Je parle de l'évacuation.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
C'était le 27 août.
M. James Bezan:
D'accord.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Je dirais que les derniers membres des Forces armées canadiennes sont partis à ce moment-là. Je ne me souviens pas de la date exacte du départ du dernier vol, mais le 27 était la date officielle.
M. James Bezan:
D'accord.
On vous a cité... Dans l'article du Globe, vous avez parlé du fait que vous avez « donné des directives aux Forces armées canadiennes par l'intermédiaire de la chaîne de commandement appropriée ». Vous l'avez répété dans votre témoignage aujourd'hui.
À qui dans les Forces armées canadiennes avez-vous donné des ordres?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Parlez-vous de l'article du Globe ou de ma déclaration?
M. James Bezan:
Je parle de votre déclaration.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Vous parlez de ma déclaration d'aujourd'hui.
M. James Bezan: Oui.
L’hon. Harjit S. Sajjan: Selon la chaîne de commandement, c'est le chef d'état-major de la défense.
M. James Bezan:
Vous adressez-vous uniquement au chef d'état-major de la défense ou parlez-vous également à d'autres personnes?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Non, lorsqu'il s'agit de... Comme vous le savez, le chef d'état-major de la défense est la personne à qui le ministre de la Défense s'adresse, mais il y a toujours des collaborateurs qui sont là.
M. James Bezan:
D'accord. Était ce la toute première personne à qui vous avez parlé dans les Forces armées canadiennes?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Pour être honnête, il y a des gens dans la salle. Quand il s'agit des renseignements, cela se passe dans un grand groupe, comme vous le savez. En tant qu'ancien secrétaire parlementaire, vous savez combien de personnes sont présentes.
M. James Bezan:
Avez-vous informé le Cabinet du premier ministre avant de donner cette instruction aux Forces armées canadiennes?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Non. Je travaillais directement avec les responsables de l'évacuation à ce moment là.
M. James Bezan: D'accord.
Considérez-vous qu'il y a une différence entre donner une directive ministérielle et donner un ordre?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Où voulez-vous en venir?
M. James Bezan: D'accord.
Pensez-vous que les Forces armées canadiennes ont compris ce que vous avez dit comme un ordre que vous leur adressiez ou simplement comme un avis que vous exprimiez?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Premièrement, c'est...
M. James Bezan:
Je parle de vos conversations avec la chaîne de commandement.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Parlons de ce que vous voulez dire quand vous parlez de directives et d'ordres; de quoi...?
M. James Bezan:
L'ordre d'évacuer des Canadiens, des Afghans et d'autres groupes minoritaires en Afghanistan.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Si vous parlez de l'évacuation générale, oui, c'est la directive qui a été donnée.
M. James Bezan:
D'accord, et cela aurait été interprété comme un ordre du ministre de la Défense nationale.
L’hon. Harjit S. Sajjan:
Du... Oui, cette directive donne évidemment l'autorisation aux Forces armées canadiennes de faire leur travail.
M. James Bezan: D'accord.
Votre ancien chef de cabinet, George Young, a-t-il participé à ces réunions et contribué à faire en sorte que la directive soit appliquée?
L’hon. Harjit S. Sajjan:
J'avais mon personnel. Oui, mon chef de cabinet était toujours là pour faire son travail. Oui.
M. James Bezan:
George Young aurait-il été votre chef de cabinet à cette époque?
L’hon. Harjit S. Sajjan: Oui.