Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
À titre d'information avant de donner la parole aux témoins, le ministre Blair comparaîtra devant le Comité le 20 de ce mois pour parler du budget supplémentaire des dépenses.
Monsieur le président, en ce qui concerne la comparution du ministre au sujet du budget supplémentaire des dépenses (C), ce budget sera‑t‑il réputé avoir fait l'objet d'un rapport ou arrivera‑t‑il à temps pour que nous puissions en faire rapport?
Nous ne le savons pas encore, car le processus qui détermine le moment où le budget est réputé avoir fait l'objet d'un rapport est complexe. Ce doit être au plus tard le troisième jour de séance précédant la fin de la période de subsides en cours, soit le 26 — le mardi suivant — ou trois jours avant le dernier jour désigné, mais il n'a pas encore été désigné.
Nous ne le saurons donc pas avant cette semaine‑là, malheureusement.
Nous accueillons aujourd'hui un témoin que nous connaissons bien, mais qui a l'air un peu amoché, et un témoin qui n'est pas aussi connu du Comité.
Je donnerai la parole à M. Lick et à Mme Hynes pour les cinq premières minutes, puis à M. Joshi pendant les cinq minutes suivantes. Nous passerons ensuite aux séries de questions.
Bienvenue, monsieur Lick. J'allais faire une blague sur votre nom, mais elle ne serait pas drôle et je vais donc m'abstenir.
Depuis la création de notre fonction, chaque ombudsman a demandé que son bureau soit enchâssé dans la loi. Nous avons fait parvenir au Comité des exemplaires de quatre rapports que nous avons préparés sur la question. L'enchâssement de notre bureau dans la loi et l'obligation de rendre des comptes au Parlement est à la fois un geste symbolique et utile. Mais le plus important, c'est que cela ferait passer le traitement équitable de nos électeurs avant toute considération politique.
[Français]
En juin 2022, en plein cœur de la crise des inconduites sexuelles, j'ai tenu une conférence de presse nationale pour aborder directement certaines questions. Il s'agissait d'accroître la responsabilisation, ce qui demeure un défi aujourd'hui.
Un certain nombre de crises ont miné la confiance envers le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes. De nombreux mécanismes de recours ne sont pas considérés comme étant réellement indépendants de ces institutions. J'espère que le consensus du Comité sera qu'une loi relative au Bureau de l'Ombudsman servira de pierre angulaire pour le rétablissement de la confiance envers l'institution.
[Traduction]
Sans une telle loi, notre organisme fait l’objet de surveillance et d’enquêtes par le ministère qu’il a le mandat de surveiller. Il y a visiblement conflit d'intérêts dans ce cas‑ci. Cette situation a déjà donné lieu à des enquêtes sur notre bureau qui étaient problématiques et manquaient de crédibilité. Dans l'une de ces affaires, une enquête du ministère visant mon prédécesseur et son personnel contenait tellement d’erreurs de procédure et d’injustices qu’elle a soulevé des préoccupations concernant l'utilisation abusive de la procédure. En ce qui concerne l’un des membres du personnel visés, la Cour fédérale a été catégorique en affirmant que cette personne, et je cite: « … a été privée de son droit à l’équité procédurale durant l’enquête et le processus décisionnel ». À ce jour, personne n'a été tenu responsable et rien n'empêche que cela se reproduise.
[Français]
Le ministre de la Défense nationale n'est pas tenu par la loi de donner suite aux recommandations contenues dans les rapports du Bureau de l'Ombudsman. Nos rapports, qui sont fondés sur des éléments probants, visent à éliminer les problèmes systémiques auxquels est confrontée la communauté de la Défense.
[Traduction]
En fait, les réponses que nous recevons ne contiennent aucun détail concret sur la mise en œuvre des recommandations, et mettent maintenant des mois à arriver. Nous savons que le ministère a préparé des réponses, et nous aimerions donc savoir ce qui cause ce blocage.
[Français]
Soyons clairs: en ce qui concerne les dossiers individuels, notre organisation réussit extrêmement bien à obtenir des résultats équitables pour nos commettants.
[Traduction]
C’est quand il s’agit des recommandations visant le système que le ministère et les Forces armées canadiennes n’ont pas suffisamment progressé. Les preuves de la mise en œuvre des recommandations ont toujours manqué. Par conséquent, nous assurons un suivi régulier auprès du ministère et des Forces armées canadiennes et nous émettons des fiches de rendement fondées sur nos observations. Il s'agit d'une pratique exemplaire en matière de surveillance, mais les résultats sont rarement prometteurs.
[Français]
À l'automne 2023, j'ai publié un rapport portant sur la détermination des besoins en matière de santé mentale et de soutien des réservistes qui participent aux opérations nationales. Cinq mois plus tard, je n'ai toujours pas reçu de réponse du ministre.
[Traduction]
Avant de quitter mon poste le 2 juillet prochain, je publierai un rapport qui traitera des enjeux liés aux mécanismes de traitement des plaintes des Forces armées canadiennes. Devrons-nous encore attendre des mois pour recevoir une réponse? Est‑ce ainsi que vous souhaitez que la reddition de comptes fonctionne?
(1105)
[Français]
Il y a trois semaines, devant ce comité, j'ai indiqué que les problèmes liés à la famille constituaient la principale raison pour laquelle les militaires quittent les Forces canadiennes. Logiquement, le fait de régler les problèmes relatifs aux familles aiderait à la rétention des militaires. Notre bureau signale les problèmes des familles militaires depuis plus de 10 ans.
[Traduction]
À titre de députés, vous êtes conscients des problèmes auxquels font face les militaires et leurs familles. C'est précisément la raison pour laquelle, à mon avis et à celui de mes prédécesseurs, notre bureau devrait rendre des comptes à la Chambre du peuple — à la Chambre des communes — et non à un seul de ses membres, surtout lorsque les questions en jeu dépassent le cadre du ministère de la Défense nationale et pourraient concerner la sécurité nationale.
En réponse à la plupart des rapports précédents sur la gouvernance, le ministère a affirmé que les choses allaient bien, et que si ce n'était pas le cas, nous devions communiquer avec le ministère. Cependant, comme c'est arrivé à mon prédécesseur en 2018, que se passe‑t‑il lorsque la personne au bout du fil est la source du problème ou refuse d'écouter? Si je ne parviens pas à attirer l'attention du ministre, dois‑je organiser d'autres réunions avec des membres de tous les partis? Dois‑je faire appel aux médias? Comment le Parlement peut‑il garantir la responsabilité ministérielle s'il ne dispose pas d'un organisme complètement indépendant qui lui fournit des conseils ou des recommandations?
Nous disposons d’une surveillance complète prévue dans la loi pour les détenus fédéraux — ceux qui commettent des crimes graves. Pourquoi ceux qui portent fièrement l’uniforme militaire et dont dépend notre sécurité nationale n’ont-ils pas droit aux mêmes modalités législatives?
[Français]
Cela n'a pas de sens.
[Traduction]
Le Canada est le seul membre du Groupe des cinq qui n'exerce pas une surveillance prévue par la loi à cet égard. Vous pouvez changer cette situation.
Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à cette réunion importante, aujourd'hui.
Je suis Vihar Joshi, président intérimaire du Comité externe d'examen des griefs militaires.
Par souci de concision, je vous parlerai du Comité externe d'examen des griefs militaires en utilisant son sigle, le CEEGM, tout le long de ma présentation.
Le CEEGM est une composante externe qui fait partie intégrante du système de règlement des griefs des Forces armées canadiennes. Il a été créé en juin 2000, en vertu de la Loi sur la défense nationale. Le CEEGM est un organisme quasi judiciaire indépendant, qui a un seul mandat: examiner les griefs qui lui sont renvoyés par le chef d'état-major de la défense, et remettre des conclusions et recommandations au chef d'état-major de la défense et aux militaires qui ont déposé un grief.
Le chef d'état-major de la défense n'est pas lié par les conclusions et les recommandations du CEEGM. Cependant, si les Forces armées canadiennes décident de ne pas suivre une des conclusions ou recommandations, elles doivent expliquer leurs motifs dans la décision définitive.
[Traduction]
Même si le CEEGM n'a pas de pouvoir décisionnel, son rôle est néanmoins essentiel au maintien de la transparence et de la confiance à l'égard du système des griefs des Forces armées canadiennes.
Indépendant des Forces canadiennes, le CEEGM a acquis une expertise considérable au cours des 23 dernières années et est bien placé pour entreprendre des enquêtes approfondies sur des questions relatives aux griefs et pour fournir des évaluations impartiales et indépendantes au chef d’état-major de la défense et aux plaignants sur la façon dont un grief devrait être résolu. Le CEEGM présente son rapport annuel au Parlement par l'entremise du ministre de la Défense nationale. Il publie en ligne ses rapports annuels, ses résumés de cas et ses recommandations systémiques, ce qui contribue à renforcer la transparence.
Même si la réglementation exige que seuls certains types de griefs fassent l'objet d'un examen par le CEEGM, tous les plaignants devraient pouvoir avoir accès à un examen externe indépendant avant qu'une décision définitive soit prise au sujet d'un grief. Cette notion a non seulement été soulignée par des autorités d'examens indépendants, notamment le juge Fish dans son récent troisième examen indépendant, mais jusqu'à récemment, il s'agissait également d'une pratique exemplaire des Forces armées canadiennes depuis les 13 dernières années. Pour s'assurer que tous les plaignants aient accès à un tel examen, cette pratique devrait être inscrite dans la loi.
Le juge Fish a également formulé un certain nombre d'autres recommandations visant à améliorer la transparence et l'efficacité du système des griefs des Forces armées canadiennes. Le CEEGM se réjouit de travailler avec les Forces armées canadiennes en vue d'améliorer le système de règlement des griefs pour tous les soldats, marins et aviateurs.
En ce qui concerne les demandes d'accès à l'information et les questions parlementaires, je peux confirmer qu'au cours des cinq dernières années, le CEEGM a répondu en moyenne à 116 questions parlementaires, à trois demandes officielles d'accès à l'information et à 19 demandes non officielles d'accès à l'information. Par souci d'efficacité et pour réduire le fardeau administratif imposé aux demandeurs, le CEEGM a pour pratique exemplaire de répondre rapidement sans qu'il soit nécessaire de présenter une demande officielle d'accès à l'information.
Le CEEGM joue un rôle utile et important au sein du système des griefs des Forces armées canadiennes. Essentiellement, il accroît la transparence et permet de renforcer la confiance à l'égard du système en veillant à ce que les plaignants aient accès à tous les renseignements pertinents et à ce que leurs griefs fassent l'objet d'un examen approfondi, indépendant et impartial avant que le chef d’état-major de la défense ne rende sa décision définitive. Les plaignants et le chef d’état-major de la défense nous ont répété à maintes reprises que la qualité et la rigueur de nos examens permettent d'enrichir ce processus.
(1110)
[Français]
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous adresser la parole, et je répondrai avec plaisir à vos questions.
Monsieur Joshi, dans votre rapport annuel de 2022, il y a moins de deux ans, vous dites que pour trois des cinq dernières années, « il a été difficile pour notre organisation de remplir son mandat en raison de la vacance de certains postes de membres du comité lesquels sont nommés par le gouverneur en conseil ». Combien de nominations par le gouverneur en conseil sont devenues caduques, et pour combien de temps, au cours des cinq dernières années?
Deux nominations sont devenues caduques au cours des cinq dernières années. En 2018, nous avons atteint un effectif complet. En 2022, le vice-président à temps plein a quitté le comité, et la présidente a quitté le comité à l'été 2022. Ces postes n'ont pas encore été pourvus.
Il s'agit d'une tendance troublante qui va de pair avec l'absence de nomination de juges. Le gouvernement tarde à procéder aux nominations qui permettent à ces organismes de faire leur travail. Cela vous inquiète‑t‑il?
Qu'en est‑il des réductions proposées? Le budget de la défense sera amputé d'un milliard de dollars. On a promis à notre comité que cela n'aura aucune incidence sur l'état de préparation opérationnelle ou les forces de première ligne. Craignez-vous que ce soit plutôt les mécanismes de transparence qui souffriront des réductions à venir?
Je n'ai aucune crainte ou inquiétude en ce qui concerne notre comité, car notre budget n'est pas touché à ce moment‑ci. En fait, nous avons été en mesure d'augmenter légèrement notre budget, afin d'accroître nos effectifs pour traiter le nombre plus élevé de griefs.
D'accord, mais vous n'avez pas les nominations nécessaires pour que les audiences puissent avoir lieu, et cela ralentit votre travail, comme vous l'avez dit.
Monsieur Lick, combien de temps faut‑il aux plaignants pour en arriver à demander l'aide de votre bureau? Ils doivent d'abord passer par le CEEGM. Combien de temps faut‑il, en général, avant qu'ils communiquent avec vous?
Tout d'abord, ils peuvent avoir accès à nos services à n'importe quel moment et nous veillerons à les orienter sur la bonne voie pour obtenir le mécanisme de recours approprié, le cas échéant, ou pour obtenir les renseignements nécessaires, quels qu'ils soient. Ils peuvent donc communiquer avec notre bureau à tout moment.
Des anciens combattants ont dit à mon bureau et au bureau d'autres députés qu'ils avaient présenté des demandes d'accès à des renseignements personnels dans le cadre d'affaires d'inconduite sexuelle, mais que les accusations portées contre l'auteur présumé du crime avaient été suspendues parce que les renseignements nécessaires pour déposer une plainte et monter un dossier n'avaient pas été communiqués en temps opportun.
Comment le refus de communiquer ce type de renseignements affecte‑t‑il le moral et les militaires actifs et leurs familles, car ils ne peuvent pas obtenir l'information dont ils ont besoin de la part de l'armée pour déposer une plainte?
Tout d'abord, lorsqu'il s'agit de l'application de la loi ou des procédures judiciaires de ce type, nous ne pouvons pas nous pencher sur ce domaine en particulier et nous ne pouvons aborder aucune affaire criminelle.
En ce qui concerne la question générale de l'accès à l'information pour des raisons liées à leur vie ou à leur carrière, le fait de ne pas pouvoir obtenir l'information en temps voulu est préjudiciable au moral. L'un des rôles de notre bureau est de veiller à leur fournir ces renseignements en temps voulu. Ces gens peuvent donc avoir recours à nos services s'ils éprouvent des difficultés à obtenir ces renseignements, sauf pour les affaires criminelles.
Dans certains de nos rapports précédents, nous avons souligné les problèmes que nous avons observés en ce qui concerne l'obtention de renseignements qui permettent aux militaires d'accéder à leur dossier et à d'autres choses, ou à Anciens Combattants Canada de rendre une décision au sujet de leurs prestations. La situation s'est améliorée. Les militaires peuvent avoir accès à ces services et à ces renseignements à leur libération, mais ils font encore face à de petits problèmes semblables. Par exemple, les renseignements peuvent être fournis sur des disques compacts, mais de nombreuses personnes n'ont plus de lecteur de disques compacts.
On travaille actuellement sur ce problème. Je pense que les choses s'améliorent incontestablement. Ces gens peuvent avoir accès à leurs renseignements, peu importe le type, mais peut-être pas aussi rapidement qu'on pourrait le souhaiter.
Les gens qui ont des blessures liées au service font face à des problèmes persistants, car ils doivent prouver à nouveau leurs blessures après leur libération des Forces armées canadiennes.
Oui. C'est d'ailleurs l'une des recommandations qui n'ont pas été acceptées par le ministère. Il s'agissait de faire en sorte que les Forces armées canadiennes, ou les services de santé militaires, prennent la décision sur l'attribution d'une blessure au service. Nous sommes certainement toujours de cet avis, car cela semble être la façon la plus logique et la plus efficace de procéder, mais le ministère s'est montré réticent à l'idée depuis notre précédent rapport.
À l'époque — et je demanderai peut-être à Mme Hynes de vous en dire plus à ce sujet —, les intervenants du ministère ont soulevé des questions éthiques liées au fait que le médecin traitant prendrait cette décision. Il existe toutefois des moyens de contourner ce problème. Par exemple, un groupe distinct au sein de l'organisme pourrait s'en charger, c'est‑à‑dire un groupe qui travaillerait indépendamment du médecin traitant. Néanmoins, c'est la question qu'ils ont soulevée à l'époque.
Je ne le crois pas. Je pense qu'au bout du compte, nous voulons que les militaires qui prennent leur retraite obtiennent les prestations auxquelles ils ont droit le plus rapidement possible et, en fait, qu'ils obtiennent la décision d’arbitrage avant leur libération des forces, afin qu'ils aient tous les renseignements, toutes les prestations et tous les services en place avant leur départ.
C'est exact, car nous parlons parfois de militaires libérés pour des raisons médicales qui sont incapables d'obtenir des prestations pour les blessures qui sont à l'origine de leur libération.
Ma première question s'adresse à M. Lick. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Vous avez mentionné qu'il y a cinq mois, vous avez envoyé une lettre au ministre au sujet de la santé mentale. Je sais que vous avez dit que vous n'aviez pas eu de réponse en cinq mois. J'aimerais savoir si, avant cet incident, vous aviez eu des expériences semblables ou si, au contraire, vous aviez déjà écrit et reçu des réponses en temps voulu.
Vous pourriez peut-être nous parler des autres occasions où vous avez tenté de communiquer avec le cabinet du ministre.
Je dirais que depuis mon arrivée, en 2018, nous avons connu les mêmes problèmes et les mêmes retards pour obtenir des renseignements du ministère — en l'occurrence, le ministre et le cabinet du ministre — au sujet de nos recommandations systémiques. En raison de nos discussions avec les intervenants du ministère, nous savons qu'ils ont commencé à se pencher sur ces recommandations pour déterminer si elles seront mises en œuvre ou s'ils y donneront suite. Cependant, pour une raison ou une autre, nous ne parvenons pas à obtenir une réponse du ministère, c'est‑à‑dire une réponse officielle du ministre et de son cabinet, en temps opportun. C'est ce qui a la plus grande incidence sur la transparence de l'ensemble de l'institution.
Nous avons formulé une recommandation. Le ministère a certainement le droit de ne pas l'accepter. Cela ne pose pas de problème. En même temps, notre milieu de la défense mérite une réponse — que ce soit oui ou non —, mais nous n'obtenons pas cette réponse en temps voulu. Nous ne connaissons pas les raisons de cette situation.
Vous avez également mentionné que le Canada est l'un des seuls pays où la surveillance militaire n'est pas prévue par la loi. Pourriez-vous nous expliquer un peu plus en détail en quoi cela aiderait, dans ce cas‑ci ou en général, à améliorer la transparence?
Nous pouvons fournir à ce comité un tableau pour tous les endroits dans le monde pour lesquels nous avons ces renseignements. Dans le Groupe des cinq — les communautés et les pays les plus étroitement liés avec lesquels nous travaillons —, nous sommes les seuls à ne pas avoir de mandat prescrit par la loi pour son ombudsman, son inspecteur général ou peu importe.
Ce que j'ai dit et ce que mes prédécesseurs ont dit dans de nombreux rapports, c'est que, plus que tout, c'est parfois la perception d'une ingérence ou une ingérence réelle qui est à l'origine de notre incapacité de mener à bien certaines des enquêtes que nous effectuons. Il s'agit également de pouvoir soulever des enjeux au Parlement, au‑delà du ministre ou du gouvernement en place à ce moment‑là. Je peux absolument utiliser les médias. Je peux discuter avec tous les partis politiques. Cependant, est‑ce ainsi que la responsabilité ministérielle doit fonctionner? Je ne crois pas. Je pense qu'il faudrait que je soumette ces questions au Parlement, que ce soit à un comité ou autrement. C'est cela, au final.
L'autre aspect est que la loi prévoit une protection contre le fait de contraindre un témoin à comparaître dans un cas particulier. C'est important. L'enquêteur du Service correctionnel, par exemple, bénéficie de cette protection. Je n'ai pas cette protection. Je me défendrai si on me demande de le faire. Cela devrait être prévu dans la loi afin de protéger la confidentialité des services que nous fournissons à nos électeurs.
Nous avons entendu parler du processus militaire de règlement des griefs. Nous savons que pour améliorer la culture des FAC, nous devons améliorer le processus de règlement des griefs et veiller à ce que les gens reçoivent une réponse juste et rapide.
Je me demande si vous pouvez suggérer des améliorations précises qui, d'après vous, nous aideraient en ce qui concerne l'accès à l'information.
Comme je l'ai déjà mentionné, l'une des grandes suggestions que je ferais, ce serait que tous les griefs nous soient soumis de manière discrétionnaire ou obligatoire, comme nous les appelons. Tout d'abord, l'accès à l'information permettrait à tous les plaignants d'obtenir les renseignements dont ils ont besoin pour que leurs griefs soient correctement examinés. Cela permettrait au chef d'état-major de la défense de procéder à un examen impartial et indépendant.
Bien qu'il puisse sembler que l'envoi de tous ces dossiers au comité des griefs serait plus long, au final, cela permet de gagner du temps dans le processus. Pourquoi? Les Forces armées canadiennes et le membre reçoivent en retour un dossier entièrement analysé avec tous les renseignements qu'il renferme et le déroulement logique de la façon dont nous sommes arrivés à une recommandation ou à une conclusion. Lorsque l'autorité finale reçoit le dossier, elle dispose d'un dossier complet. Elle peut l'examiner. Elle a un avis indépendant. Nous expliquons également aux plaignants pourquoi nous pensons que leur dossier devrait être réglé d'une certaine manière. Cela nous donne une certaine transparence et renforce la confiance dans le système.
Ce n'est pas notre cas. Dans la Loi sur la défense nationale, il y a une disposition qui prévoit que lorsque le chef d'état-major de la défense envoie un dossier au Comité, il doit fournir tous les renseignements pertinents. Dans la mesure où nous ne recevons pas un dossier complet ou qu'il manque des renseignements, nous avons des lignes de communication avec les Forces armées canadiennes qui nous permettent d'obtenir ces renseignements.
Bien entendu, cela prend parfois du temps, car comme nous le savons, les griefs ne sont pas forcément la priorité de l'organisation. Elle a des activités à mener. Cependant, nous avons mis en place un système pour récupérer ces renseignements.
Monsieur Joshi, je vais commencer par vous parce que je veux donner suite aux questions de Mme Lambropoulos.
Vous avez mentionné que ce n'étaient pas tous les griefs qui sont transmis au Comité externe d'examen des griefs militaires. J'aimerais savoir sur quelles bases certains le sont et d'autres ne le sont pas. Comment est-ce justifié? Avez-vous une idée des raisons pour lesquelles certains vous sont référés, et d'autres pas? Peut-il y avoir, justement, à travers même cette sélection, un manque de transparence qui cache quelque chose spécifiquement?
En ce qui concerne les renvois au Comité, il y a deux types de renvois: obligatoires et discrétionnaires.
Les catégories de dossiers qui doivent être soumises au Comité sont prescrites par le Règlement. Il s'agit de mesures administratives qui ont une incidence sur les finances, donc les confiscations ou les déductions salariales, les politiques des Forces armées canadiennes relatives aux activités politiques, au harcèlement, à la rémunération et aux indemnités et au droit aux soins médicaux et dentaires, ainsi que les décisions que le chef d'état-major de la défense a prises et qui sont des décisions personnelles.
[Français]
Ce sont des dossiers qui doivent obligatoirement nous être transmis, mais il y a en d'autres, qui sont discrétionnaires.
(1125)
[Traduction]
En ce qui concerne les carrières, par exemple, le chef doit décider s'il estime que le Comité serait utile et s'il juge que nous avons les capacités voulues. Cette décision est totalement discrétionnaire. Je ne suis pas tout à fait sûr de la manière dont le choix est fait.
[Français]
Nous recevons tous les dossiers obligatoires. Dans le cas des dossiers discrétionnaires, nous les recevions quasiment tous jusqu'à l'an passé. Toutefois, cette année, nous en recevons beaucoup moins.
Justement, au sujet des dossiers discrétionnaires qui vous sont transmis, est-ce que le fait qu'ils sont discrétionnaires peut devenir un outil politique, d'une certaine façon? Je serais curieuse d'entendre votre point de vue là-dessus.
Oui, c'est possible, dans la mesure où des gens auraient quelque chose à cacher.
[Traduction]
Je ne pense pas que ce soit vraiment le problème. C'est plutôt le flux de travail des dossiers et la question de savoir si ce sera efficace. Toutefois, comme je l'ai déjà dit, pour assurer la transparence et la confiance dans le système, il serait certainement préférable que nous obtenions tous les dossiers.
Monsieur Lick, j'aimerais poursuivre un peu sur l'application des recommandations que vous faites, pour lesquelles il n'y a pas actuellement de façon coercitive d'imposer un suivi. Sur le plan législatif, comment pourrait-on imposer ce suivi? Avez-vous des recommandations à nous faire pour les fins de notre rapport là-dessus?
Dans la loi, ce pourrait être comme c'est le cas avec le vérificateur général. Dans sa loi, les délais prescrits pour les réponses constituent un moyen de veiller à ce que les ministères répondent en temps voulu. C'est l'une des façons de faire dans la loi. Toutefois, je reviens sur l'autre partie de la question: cela ne signifie pas qu'ils doivent accepter ces recommandations particulières.
Nous sommes très bons dans le travail que nous accomplissons et dans les recommandations que nous formulons. La grande majorité d'entre elles sont acceptées. La mise en oeuvre est tout simplement beaucoup plus lente que ce que nous souhaiterions tous.
D'autre part, nous imposons la transparence à l'organisation en produisant des rapports d'étape. Chaque année, ces rapports sont mis à jour par les ministres. Nous analysons les preuves et indiquons si les recommandations qui ont été acceptées ont été entièrement mises en œuvre, partiellement mises en œuvre ou pas mises en œuvre. Tout cela est du domaine public. Il s'agit en fait d'une pratique exemplaire que j'aimerais que vous appliquiez dans le reste de la fonction publique.
Parlons maintenant des délais de réponse aux rapports que vous produisez. Vous avez spécifiquement fait référence à celui sur la santé mentale des réservistes, auquel vous n'avez toujours pas eu de réponse après cinq mois.
Serait-il envisageable que le délai de réponse soit codifié dans la loi et que, advenant que le ministre ne puisse pas répondre à l'intérieur du délai qui lui est imparti, il ait l'obligation d'expliquer pourquoi il ne répond pas?
Nous ne sommes pas naïfs. Il faut parfois plus de temps pour analyser et évaluer la recommandation, etc. C'est tout à fait vrai.
Je m'attendrais au moins à ce qu'on accuse réception du rapport. Je m'attendrais au moins, s'il y a eu un problème pour obtenir une réponse à temps, à ce que nous recevions une explication. Nous n'en avons reçu aucune.
Le Comité a reçu des tableaux comparatifs des mandats des ombudsmans du secteur public fédéral. Certains éléments des mandats des autres ombudsmans diffèrent de ceux de votre mandat et pourraient vous rendre jaloux. Pouvez-vous nous parler des éléments qui figurent dans les autres mandats que vous voudriez voir dans le vôtre?
Comme je pense l'avoir dit à plusieurs reprises, il s'agirait d'une loi et de divers éléments législatifs qui nous empêcheraient, mon personnel et moi, d'être contraints à comparaître, d'être assujettis à des échéances et d'avoir la possibilité de passer du gouvernement politique au pouvoir à l'institution nationale, le Parlement, qui représente tous les Canadiens et la communauté de la défense. Ce serait la bonne chose à faire.
Ce sont les trois éléments qui me semblent importants. On peut mettre toutes sortes de choses différentes dans la loi. Chaque ombudsman qui dispose d'une loi agit d'une manière différente, mais je pense que ce sont les trois principes que j'inclurais dans la loi.
Monsieur Lick, quand le sous-ministre, Bill Matthews, a comparu pour cette étude, il a dit qu'il avait assoupli certains des contrôles financiers liés à l'administration de votre bureau. Est‑ce le cas?
Non, et c'est ce qui est le plus problématique à notre bureau. Nous en faisons l'expérience presque tous les jours. Notre bureau est assujetti à tellement de contrôles que je dirais que ce n'est pas approprié. Ils ne sont pas illégaux, loin de là, mais ils ne sont tout simplement pas appropriés.
L'un des principes de la fonction d'ombudsman dans le monde est que nous devrions être en mesure d'embaucher les personnes que nous pensons être les mieux placées pour faire le travail. Toutefois, notre bureau est assujetti à un si grand nombre de contrôles des ressources humaines que nous ne sommes pas en mesure de faire le travail aussi bien que nous le pensons.
Mme Hynes peut vous citer un cas actuel où nous avons dû refaire un processus parce qu'une erreur avait été commise dans l'un des contrôles.
Je crois que mon prédécesseur a été confronté à des contrôles et à des problèmes différents, probablement plus graves que ceux que nous connaissons aujourd'hui, mais la situation perdure. L'un des problèmes est que cela change d'un sous-ministre à l'autre, ce qui ne devrait pas être le cas, sauf s'il s'agit d'un processus à l'échelle du gouvernement ou d'une question particulière que nous traitons incorrectement.
Nous sommes soumis aux mêmes contrôles que tous les autres fonctionnaires, mais il est inapproprié que ces contrôles nuisent à notre capacité de faire notre travail de manière indépendante.
Des compressions ont été proposées pour ce qui est des voyages et des contrats dans notre budget. Elles n'ont pas encore été mises en oeuvre car le nouvel exercice financier n'a pas encore été mis en place. Nous avons fait part de nos problèmes.
Je ne siège pas aux comités qui se penchent sur ces questions particulières, avec raison d'ailleurs, car nous sommes un bureau indépendant. Nous ne sommes pas consultés comme les autres hauts fonctionnaires du ministère le sont, et cela pose problème.
À ce stade, les réductions proposées ne devraient pas avoir d'incidence significative sur le travail, mais nous ne le savons pas toujours tant que nous n'avons pas commencé à travailler et que nous n'avons pas découvert qu'il y a des problèmes à régler. Par exemple, il se peut que nous devions nous rendre dans une base pour enquêter sur un problème particulier. Ce genre de situation se présente tout au long de l'année.
Nous ne pensons pas, à ce stade, que les réductions seront problématiques, mais en même temps, le problème est la perception d'un manque d'indépendance et une perception d'ingérence.
Je me répète un peu, mais je pense que la loi et les principes législatifs que j'ai présentés et dont je viens de parler sont une façon de procéder.
Je ne dis pas que le fait de rendre des comptes au Parlement faciliterait les choses sur le plan budgétaire, comme d'autres fonctionnaires indépendants du Parlement en font l'expérience, mais je pense que ce qui est le plus important, en raison de nos électeurs — la communauté de défense que nous représentons —, c'est l'indépendance réelle et la perception de l'indépendance. C'est absolument essentiel. C'est l'idée que le ministère n'interfère pas dans le travail que nous faisons, que ce soit par une réduction des frais de voyage ou des contrats. C'est aussi cette perception.
Cependant, l'autre aspect, dont j'ai parlé plus tôt, est l'idée de la confidentialité. Mon personnel, en particulier, et moi devons être protégés de ne pas être contraints de témoigner devant un tribunal ou une instance administrative. C'est essentiel non seulement pour l'indépendance du bureau, mais aussi pour le principe crucial de la confidentialité, afin que nos électeurs se sentent à l'aise et en confiance pour venir nous dire des choses que nous pourrons ensuite examiner.
À ce propos, en 2021, vous avez publié un exposé de position intitulé « Surveillance civile indépendante: la communauté de la défense ne mérite rien de moins ». Pouvez-vous remettre ce document au Comité aujourd'hui?
Parfait. Je crois qu'il s'agit également d'une grande partie de ce dont vous parlez aujourd'hui.
Dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé de votre retraite. Je sais que bon nombre d'entre nous sont attristés de vous voir partir. Le gouvernement a‑t‑il entamé le processus pour vous remplacer?
Je dirai d'entrée de jeu que j'ai des sentiments mitigés concernant mon départ aussi.
J'ai examiné les possibilités d'affectation — les occasions de nomination par le gouverneur en conseil — pour mon type de poste. Je n'y ai rien vu. Je suis préoccupé, en ce moment. Juillet approche à grands pas et aucun processus transparent pour choisir la meilleure personne pour représenter la communauté de la défense et faire le travail que nous faisons n'a été lancé. Je ne veux pas laisser l'organisation sans ombudsman, mais il n'y a rien pour l'avenir. Où est le processus?
Le gouvernement n'a pas affiché le poste ou fait quoi que ce soit. Quelles sont les options? Pourrait‑on simplement puiser dans une liste de candidats antérieurs? Quels sont les problèmes à cet égard?
Il n'y a pas de liste. Comme pour tout processus de sélection de la fonction publique, l'intention de créer une liste ou un bassin pour utilisation future doit être indiquée dès le début. C'était il y a cinq ans et cela n'avait pas été annoncé.
Le processus de sélection que j'ai suivi était très transparent. N'importe qui pouvait présenter sa candidature. Je pense qu'il faut un processus identique à l'avenir. Nous ne devrions pas faire un choix à partir d'une liste qui, en fait, n'a jamais été créée.
Avant de donner la parole à Mme Gallant, vous avez parlé de non-contraignabilité pour vous et votre personnel. J'ai donc demandé aux analystes ce que vous entendiez par là, et nous ne le savons pas. Pourriez-vous donner des explications à ce sujet?
Très simplement, dans le cadre de certains processus parfois menés par les Forces, par exemple une commission d'enquête, il est arrivé qu'on nous demande de fournir des renseignements sur des commettants qui ont pu faire l'objet d'une enquête ou que nous avons aidés à faire enquête. Dans le passé, nous n'avons pas fourni de tels renseignements, mais je ne suis pas légalement protégé contre l'obligation de le faire.
Comme je l'ai dit, je me battrai en cour s'il le faut, mais cela ne devrait pas être le cas. Oui, cela aurait peut-être aidé la commission d'enquête, mais le principe de confidentialité auquel nous adhérons est primordial pour offrir aux personnes qui se manifestent la certitude que je protégerai cette confidentialité à tout prix.
Non, je ne pense pas que ce soit intentionnel. Souvent, par exemple, il s'agit d'un processus à deux niveaux dans lequel il y a d'abord une décision de l'autorité de première instance. Ensuite, si le dossier est envoyé à l'autorité de dernière instance, il nous est transmis. Il arrive souvent que l'autorité de première instance ne rende pas une décision. Le cas échéant, nous ne recevons pas un dossier. Nous recevons le grief, mais peu de renseignements contextuels. Voilà un exemple de cas pour lesquels il y a un manque de renseignements.
Nous n'avons pas reçu de griefs de cette nature. Je n'ai pas vu de griefs de cette nature.
Je pourrai vous revenir là‑dessus. Nous pouvons vérifier s'il y a eu des griefs concernant des représailles à la suite de demandes d'accès à l'information. Notre système d'AIPRP est entièrement distinct.
Avez-vous connaissance de situations où des supérieurs s'en sont pris à des membres ou ont exercé des représailles à l'endroit de membres pour avoir présenté un grief?
Nous avons certainement reçu des griefs de ce genre de la part de plaignants. Ils s'estiment lésés pour avoir présenté un grief et disent faire l'objet de représailles de la part de la chaîne de commandement.
Nous voyons assurément ce type de griefs, pas fréquemment, mais cela arrive.
Il y a des règlements à cet égard dans les Ordonnances et règlements royaux. Les membres ne devraient pas craindre des représailles ou des conséquences s'ils présentent un grief. C'est un droit que leur confère la loi.
Peu de temps après mon arrivée au Parlement, M. André Marin était l'ombudsman militaire. Il était très compétent. Dans le dossier de l'exposition des soldats à divers produits chimiques, il a réussi à aller au fond des choses et à obtenir une indemnisation pour les soldats. Il semblait capable de contourner les obstacles, à l'époque.
Les lois ou les règlements ont-ils changé depuis, ce qui rend votre travail encore plus difficile pour aller au fond des choses ou obtenir les renseignements dont vous avez besoin?
Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, lorsqu'on parle d'enquêtes individuelles — lorsque les gens portent plainte, par exemple —, nous avons beaucoup de succès pour ce qui est d'obtenir un règlement pour les gens. J'ai peut-être mentionné notre taux de réussite actuel de cent pour cent pour l'obtention d'un règlement dans les cas où nous avons constaté une injustice dans un processus.
Ce qui me préoccupe le plus, c'est la capacité, dans le cadre de nos enquêtes systémiques, d'obtenir des réponses et, ce qui est peut-être plus important encore, de prendre des mesures. Cela pourrait être lié à n'importe quelle situation, à différents commettants ou à quoi que ce soit d'autre. C'est probablement ma principale préoccupation en ce moment.
Y a‑t‑il eu des cas où le MDN ou les FAC ont tenté d'entraver votre travail à titre d'ombudsman, en particulier dans le cas de plaintes de subalternes à l'égard de supérieurs du MDN ou des FAC?
À ce jour, selon mon expérience — Mme Hynes pourra peut-être compléter en parlant de son expérience antérieure —, rien ne m'indique qu'il y aurait eu des gestes inappropriés ou une ingérence quelconque dans une plainte donnée. Obtenir des renseignements prend parfois un peu de temps. Il arrive que les renseignements soient classifiés. De façon générale, nous trouvons que les FAC font preuve d'une grande collaboration lorsque nous demandons des renseignements.
J'ai l'habitude de dire que les gens tendent à se tenir droits lorsque les enquêteurs les appellent. Je dis simplement qu'ils répondent plutôt bien.
Monsieur Joshi, aujourd'hui et lors de séances précédentes, bon nombre des questions portaient sur le nombre de griefs et le processus de règlement des griefs après leur présentation par les membres des FAC. Je m'intéresse au processus de résolution des conflits que vous avez mis en place avant le dépôt d'un grief officiel par une personne et à la façon dont ce processus pourrait être utile pour réduire le nombre de griefs que nous avons.
Pourriez-vous expliquer au Comité quels sont les processus en place pour les membres qui ont des questions au sujet d'une affaire personnelle et qui envisagent de présenter un grief?
Nous prenons connaissance d'un grief seulement lorsqu'il nous est renvoyé par les Forces canadiennes, ce qui a lieu longtemps après son dépôt, soit habituellement au moins quatre à six mois après.
Nous publions les résumés de cas sur notre site Web. Lorsqu'une personne nous appelle, nous pouvons l'aiguiller vers notre site Web, où elle pourra consulter les résumés de cas pour avoir une idée des conclusions et des recommandations qui ont été formulées dans le passé. Lorsque le chef d'état-major de la Défense rend une décision, nous faisons un résumé que nous ajoutons à l'ensemble des résumés de cas. Les plaignants pourront ainsi les consulter pour voir, de façon générale, comment les Forces canadiennes ont traité ces dossiers.
Quant à une participation à la résolution de conflits dès le début du processus, cela ne fait pas partie de notre mandat.
Je sais qu'il y a, sur le plan des droits, beaucoup de similitudes avec le processus de négociation collective et les syndicats. Évidemment, notre système est géré différemment en vertu de la loi.
Au fil des ans, j'ai constaté que le traitement des plaintes des employés est souvent une question de leadership. Je pourrais, à titre d'exemple, penser à ma carrière précédente. Pour certaines personnes, peu importe où elles se retrouvaient au sein de l'organisation, on constatait une augmentation du nombre de griefs. On aurait dit que c'était une tendance qui les suivait. Je pense que c'était en bonne partie lié à leur leadership, à leurs compétences interpersonnelles et à la façon dont elles traitaient, dans de tels cas, avec les employés.
Monsieur Lick, dans quelle mesure l'explosion du nombre de griefs est-elle liée à la culture et au leadership? À l'inverse, dans quelle mesure cela découle‑t‑il du changement de culture qu'on observe dans l'organisation?
Il y a probablement une multitude de raisons pour lesquelles les gens présentent des griefs ou des plaintes, dans notre cas. Certes, une partie des plaintes sont liées au leadership et à la capacité de résoudre les conflits en milieu de travail. Les dirigeants ne sont pas nécessairement toujours en cause; cela peut aussi être un collègue. De toute évidence, la capacité de bien gérer les relations interpersonnelles est une compétence, et le manque de compétence sur ce plan se traduit par des plaintes et des griefs.
Le ministère met en place des mécanismes pour aider les gens à composer avec les conflits en milieu de travail par l'intermédiaire du groupe du SGCP. C'est une excellente initiative. En fait, les gens sont aiguillés dans un sens ou dans l'autre entre notre groupe et le leur, selon l'entité la mieux placée pour examiner une plainte donnée.
Je pense que le processus informel de résolution des conflits dont vous avez parlé est, pour le moment, un élément nouveau du processus de règlement des griefs pour les Forces armées canadiennes. Nous avons bon espoir que cela représentera une occasion supplémentaire de régler une plainte ou un conflit avant de passer au long processus de règlement des griefs. Nous sommes optimistes, et je pense que ce sera quelque chose de positif. Nous n'en voyons pas encore tous les résultats, étant donné que c'est tout nouveau.
Dans le même ordre d'idées, vous avez parlé de délais obligatoires pour le règlement des griefs et des plaintes et des avantages que cela comporte. Je sais que dans le cas d'employés syndiqués, le principal problème, c'est que plus la situation s'envenime et perdure, plus cela devient une question de moral. Cela peut aussi entraîner d'autres griefs.
Pouvez-vous parler des problèmes de moral survenus dans la foulée des enquêtes que vous avez menées par votre bureau, et de leur incidence?
Comme je l'ai dit, nous sommes très efficaces pour régler les dossiers des gens qui font appel à nous, mais outre certaines des enquêtes systémiques que nous menons, ce n'est que s'ils font appel à nous que nous pouvons véritablement les aider.
Sur le plan individuel, nous avons effectivement beaucoup de succès, mais comme je l'ai mentionné plus tôt, je crois, nous disons toujours aux gens que nous pourrions les aider plus tôt s'ils faisaient appel à nous plus tôt, soit en les renseignant ou en les aidant à régler un problème précis. Parfois, il suffit d'un simple appel à quelqu'un qui fait partie de notre excellent réseau de contacts.
Certaines personnes attendent à la dernière minute pour s'adresser à nous, ce qui n'est pas utile, en général. Nous pouvons toujours les aider, espérons‑le, mais nous disons toujours aux gens que même si nous sommes le bureau de dernier recours, nous sommes aussi le bureau de premier recours pour aider les gens à régler un problème, espérons‑le, avant qu'il ne devienne vraiment un problème.
Avant de donner la parole à Mme Normandin pour deux minutes et demie, je souligne que le bruit que l'on entend dans la salle semble venir d'un seul endroit. Je n'ai pas encore déterminé sa provenance exacte, mais j'ai ma petite idée. Je le mentionnerai peut-être la prochaine fois que le bruit atteindra un tel niveau. Un peu de respect envers les collègues, s'il vous plaît.
Madame Normandin, vous avez deux minutes et demie.
Monsieur Lick, dans les documents que vous nous avez envoyés, il y a quelque chose qui a attiré mon attention: au Royaume‑Uni, non seulement l'ombudsman peut faire des recommandations, mais celles-ci, dans certains cas, sont contraignantes. Quel genre de recommandation pourrait être contraignante? Est-ce quelque chose qui pourrait s'appliquer à votre poste?
Monsieur Joshi, je vous demanderais à vous aussi s'il serait envisageable de rendre contraignantes certaines recommandations du Comité externe d'examen des griefs militaires.
L'ombudsman des plaintes liées au service du Royaume-Uni a, essentiellement, la capacité de faire des recommandations contraignantes, dans certains cas seulement. C'est une façon de faire les choses. Je pense que nous avons prouvé, en particulier avec les Forces armées canadiennes, que nous pouvions faire les choses sans ce type de mesure contraignante. Quant à savoir si ce serait avantageux ou non, je suis neutre.
L'idée, habituellement, comme c'est le cas pour la plupart des ombudsmans dans le monde, c'est que l'ombudsman n'a pas de pouvoir contraignant. C'est lié au travail de l'ombudsman, qui est fondé sur la persuasion morale. Il s'agit de faire la bonne chose avec les éléments de preuve de l'enquête.
En général, comme je l'ai indiqué, nous constatons que cela fonctionne assez bien pour nous pour les plaintes individuelles. À mon avis, ce n'est pas une nécessité absolue. Cela pourrait être un outil utile un jour, mais dans le contexte actuel, je dirais que ce n'est pas absolument nécessaire. En même temps, cette situation pourrait changer avec un leadership différent. Donc, en ce sens, je suis neutre.
Très rapidement, est‑ce possible? Oui, c'est possible.
M. Fish a fait deux recommandations à cet égard. La première était que nos conclusions et recommandations seraient contraignantes pour les Forces canadiennes si l'autorité de dernière instance ne rendait pas une décision dans les 90 jours suivant la réception de notre appel. Quant au deuxième scénario, il a demandé qu'un groupe de travail examine la question de savoir si le pouvoir de dernière instance devrait être confié à une autre entité semblable au comité.
Je souligne que ce n'est pas aussi facile que cela peut paraître, car cela doit s'accompagner de pouvoirs. Si nous prenons des décisions qui ont des répercussions financières ou qui placent les gens dans une position donnée, il faut en avoir le pouvoir. Cependant, c'est sans doute une avenue qui pourrait être explorée. Le juge Fish a d'ailleurs formulé ces recommandations dans son troisième rapport à titre d'autorité d’examen indépendant.
Pour poursuivre dans la veine des questions de Mme Normandin, lorsque le ministre a comparu ici au Comité, je lui ai demandé directement si ces changements en matière d'indépendance, surtout ceux concernant l'ombudsman et son bureau que je demandais dans mon projet de loi C‑362, feraient partie des changements qu'il comptait apporter. Malheureusement, il a répondu que non. Donc, j'aimerais beaucoup obtenir vos commentaires à ce sujet.
Monsieur Joshi, vous avez parlé de l'importance de l'indépendance de votre comité et des changements que les juges Fish et Arbour demandaient aussi. Croyez‑vous que ces changements feront partie d'une série de modifications législatives ultérieure? Avez‑vous entendu quelque chose là‑dessus? Quelle est l'importance de ces deux types de changements pour vos deux bureaux?
Le ministre ne m'a pas consulté sur ce projet de loi, donc c'est difficile de dire exactement de quoi il en retourne, même si je pourrais en avoir une idée. En tout cas, il ne m'a pas consulté sur l'indépendance de notre bureau. C'est dommage, car il me paraîtrait approprié que je fasse une proposition, dont il pourrait évidemment disposer à sa guise.
Vous connaissez bien sûr mon opinion et celles de tous mes prédécesseurs sur le besoin de légiférer concernant mon bureau, mais au bout du compte, c'est le Parlement qui décide de le faire ou non. Cela dit, je pense tout à fait que la voie à suivre est celle de la législation.
À propos du système de griefs, nous savons que les Forces armées canadiennes sont en train d'apporter des changements internes au système. On nous a renseignés sur certains d'entre eux, mais on ne nous a pas consultés sur ces deux recommandations essentielles du juge Fish; en tout cas, et je ne sais pas si les forces les envisagent.
Je tiens à remercier les trois témoins d'être ici aujourd'hui.
Monsieur Lick, rappelez‑moi s'il vous plaît si votre prédécesseur Gary Walbourne avait proposé un projet de loi pour que le bureau de l'ombudsman soit un bureau parlementaire indépendant?
Vous voulez vous assurer que votre bureau soit vraiment indépendant.
Pour revenir au manque de leadership dont a parlé M. Collins et au traitement de ce genre de plaintes dans le passé, nous savons que des documents relatifs à la plainte d'inconduite sexuelle contre l'ancien chef d'état‑major de la Défense Jonathan Vance avaient été remis à votre prédécesseur et au ministre. Cependant, le ministre de la Défense nationale de l'époque, le ministre Sajjan, avait refusé d'agir.
Si votre bureau avait été indépendant, comment auriez‑vous géré ce dossier?
Ce serait difficile de savoir comment nous aurions réagi sans connaître tous les détails. Si l'affaire était de nature criminelle, nous nous serions assurés de rediriger la documentation à la bonne organisation, comme la police militaire ou autre.
Même si je ne connais pas tous les détails de ce cas particulier, nous pourrions évidemment prendre des mesures législatives. À qui est‑ce que je parlerais de cette affaire? Est‑ce que je m'adresserais au premier ministre ou à quelqu'un d'autre que le ministre si ce dernier n'agissait pas? Est‑ce que j'en parlerais à votre comité? Il y a diverses options selon les situations auxquelles nous serions confrontés. En gros, nous confierions le dossier à une personne qui pourrait réagir et qui serait neutre sur le plan politique.
Au moins, vous pourriez agir, et il n'y aurait pas ce camouflage que nous avons constaté sous l'ancien ministre de la Défense. Je le comprends.
Vous dites que votre budget sera réduit. Il s'agit d'une décision unilatérale du ministre de la Défense nationale, et vous n'avez même pas la possibilité de dire de quoi votre budget devrait avoir l'air ou quels sont vos besoins. Va‑t‑on simplement vous donner un budget dont vous devrez vous contenter?
Le ministère a en effet proposé des compressions à notre organisation. Dans notre planification opérationnelle, nous avons le pouvoir de dire quelle en sera l'incidence. Toutefois, la décision sur ces compressions n'est ultimement pas la mienne. Cette décision revient au ministère.
Vous avez dit que cette réduction budgétaire va nuire à votre capacité de vous déplacer d'une base à l'autre, de rencontrer des membres de la Défense nationale ou des Forces armées canadiennes et de signer des contrats. Parlez‑vous ici de contrats passés avec des inspecteurs spécialisés ou des enquêteurs?
C'est possible, oui. On parle en général d'un contrat de services professionnels. Comme nous l'avons déjà fait, il peut s'agir d'embaucher une équipe ou une organisation qui nous aideraient dans nos recherches. C'est ce que nous faisons à l'heure actuelle. Le contrat prévoit parfois simplement un soutien en TI ou toute une gamme d'autres choses; cela importe peu.
Un des problèmes que nous allons sans doute rencontrer à l'avenir concerne notre système de TI. Nous n'avons pas l'expérience nécessaire à l'interne pour nous en occuper.
Votre mandat se termine le 2 juin. Savez‑vous si quelqu'un a été nommé ou si quelqu'un fait l'objet de vérifications en vue de vous remplacer comme ombudsman?
Le Comité externe d'examen des griefs militaires connaît‑il le même problème, c'est‑à‑dire que vous n'avez pas de président ni de vice‑président permanents et que rien n'indique que quelqu'un sera nommé?
On a nommé un vice‑président la semaine dernière. Le Commissariat à l'information du Canada nous a indiqué la semaine dernière qu'il entrerait en fonction en avril. On nous dit que le processus va bon train pour le président. Nous pouvons nous attendre à une nomination imminente, mais je n'ai pas de date.
Les lenteurs dans les nominations réduisent votre capacité de faire votre travail. Qui sait ce qui arrivera au bureau de l'ombudsman si on ne prolonge pas votre contrat?
Vous avez dit que le chef d'état‑major de la défense renvoyait des cas au Comité externe d'examen des griefs militaires. Votre comité choisit‑il les cas à examiner au hasard, ou est‑ce un autre processus qui est en jeu?
Pour les griefs obligatoires, nous n'avons pas le choix. S'ils entrent dans les catégories visées, ils nous sont obligatoirement confiés. Pour les dossiers discrétionnaires, nous ne connaissons pas les critères qui sont employés. Jusqu'à tout récemment, nous recevions presque tous les dossiers discrétionnaires, mais depuis l'an dernier, le nombre de dossiers discrétionnaires que nous examinons a beaucoup baissé.
Vous avez dit qu'il vous faut 16 mois pour réaliser un examen et en faire rapport au chef d'état‑major de la défense. En vertu de la loi, les demandes d'accès à l'information doivent être traitées dans les 45 jours. Si ces demandes étaient gérées avec transparence et que le ministère de la Défense nationale et les forces armées fournissaient l'information voulue aux militaires ou à ceux qui la demandent, qu'il s'agisse de renseignements personnels ou juste d'informations supplémentaires, votre comité serait‑il aux prises avec un aussi fort arriéré dans les griefs?
Les demandes d'accès à l'information n'ont aucune incidence sur nous. Nous n'intervenons pas dans leur traitement. Néanmoins, si une limite de temps était imposée pour cela, elle aurait sans contredit une incidence sur l'aptitude à obtenir l'information voulue.
Merci aux témoins de leur travail et de leur temps aujourd'hui.
J'aimerais aborder un autre sujet. Les questions qu'étudie notre comité comportent de nombreuses facettes. Je m'intéresse aux informations et aux données, ainsi qu'à la façon de les faire circuler et d'y accéder.
Ma question s'adresse au témoin qui voudra bien en parler avec nous.
Un document de 2020 du Commissariat à l'information du Canada évoque les options qui s'offrent à nous pour établir une stratégie de déclassification des documents qui portent sur la sécurité nationale et le renseignement. Un régime de déclassification automatique serait‑il bénéfique pour votre travail lorsqu'il s'agit des dossiers de la Défense nationale et des forces armées?
Nous traitons très rarement des informations classifiées. La plupart des documents que nous examinons sont « protégés B ». Je ne pense pas que la déclassification des données à l'aide de la commissaire à l'information aurait une incidence substantielle sur nous.
Monsieur Joshi, est‑ce que l'accès à des documents classifiés ou la capacité de déclassifier des documents vous aideraient d'une quelconque façon dans votre travail au Comité externe d'examen des griefs militaires?
Tout comme pour le bureau de l'ombudsman, la déclassification aurait très peu d'incidence sur nous. En vertu de la Loi sur la défense nationale, le chef d'état‑major de la Défense a en fait l'obligation de nous fournir toutes les informations pertinentes. Bien sûr, il incombe aux plaignants de nous donner tous les renseignements nécessaires s'ils veulent que nous examinions leurs griefs en bonne et due forme.
Continuons un peu à parler des données et des informations. Durant une séance précédente de notre comité, dans le cadre de cette étude, il a été dit que nous vivions à une époque moderne. La prépondérance des données est assez importante. Dans les années 1980, pour traiter une plainte, il fallait arpenter un corridor et ouvrir des classeurs pour y trouver des documents, tandis que les recherches se font désormais en grande partie de manière électronique.
Pensez‑vous que la prépondérance des informations et des données électroniques est liée, ne serait‑ce qu'un tant soit peu, aux délais dont nous parlons maintenant pour répondre aux demandes d'accès à l'information?
Les données électroniques accélèrent plutôt notre travail. De nos jours, les recherches sont plus efficaces que par le passé, lorsqu'il fallait fouiller dans tout un tas de documents papier. Il est plus facile de classer des documents électroniques, comme il est plus facile pour le comité d'y accéder ainsi.
C'était pas mal inefficace de chercher des informations dans une multitude de boîtes de documents papier. Dans nos enquêtes, les délais viennent parfois du temps qu'il faut pour obtenir des informations du ministère. Nous devons ensuite fouiller dans les données. Il est parfois difficile aussi d'obtenir des renseignements des plaignants, parce que nous avons du mal à les joindre. Les difficultés viennent donc des deux côtés.
Je pense que l'infrastructure du gouvernement fédéral pour faire circuler l'information a quelque chose à y voir. Nous savons qu'il y a beaucoup d'information et de dossiers auxquels il faut accéder. Parfois, je me demande si on ne néglige pas un peu l'infrastructure dans laquelle on garde les données.
Voudriez‑vous nous faire part des réflexions inspirées de vos travaux sur la façon dont nous pourrions moderniser les systèmes?
Bien sûr. Comme je l'ai dit, nous devons actualiser et moderniser notre système de TI, comme tout système de TI au fil du temps. Dans notre cas, le ministère n'a aucun accès aux données emmagasinées sur nos serveurs de TI. C'est très important pour respecter le principe de confidentialité qui nous guide, mais c'est clair qu'il faut moderniser notre système de TI.
Bifurquons un peu pour un instant. C'est délicat, mais pour vous, monsieur l'ombudsman, quelle est la meilleure façon dont le processus d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels influe sur votre travail?
En ce qui concerne le processus d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels, nous respectons essentiellement la loi. Nous recevons beaucoup moins de demandes d'accès à l'information que le ministère dans son ensemble, mais nous respectons la loi. Nous sommes très bons pour rassembler l'information nécessaire pour répondre à une demande. En fait, nous nous débrouillons plutôt bien, alors cela ne nous touche pas vraiment. Cela change d'une année à l'autre, cependant, alors nous ne savons jamais combien de demandes nous pouvons recevoir d'une année à l'autre. Nous avons un contrat de services professionnels prêt en réserve, alors si nous avons besoin de ressources supplémentaires une année où il y en a beaucoup, nous n'avons qu'à l'utiliser.
Nous sommes de retour. Près de la moitié des membres du Comité sont présents. C'est très bien.
Nous entamons la deuxième heure. Nous accueillons Caroline Maynard, commissaire à l'information, et Allison Knight, directrice principale des enquêtes, des cas prioritaires, des documents historiques et du renseignement au Commissariat à l'information. Quel long titre! Nous accueillons également Harriet Solloway, commissaire à l'intégrité du secteur public, et Brian Radford, avocat général.
Bienvenue à tous.
Je vais vous demander de vous en tenir à vos cinq minutes chacun pour commencer.
Merci de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui.
Comme il s'agit de ma première allocution devant votre comité, permettez-moi de vous donner un aperçu de mon mandat en tant que commissaire à l'information du Canada. Afin de bien saisir mon mandat, il faut savoir que je suis une agente du Parlement, indépendante, et dont le rôle est défini par la Loi sur l'accès à l'information.
(1210)
[Traduction]
La Loi sur l'accès à l'information consacre le droit d'accès du public aux documents de l'administration fédérale conformément aux principes suivants: l'information gouvernementale devrait être accessible au public; les exceptions indispensables qui restreignent ce droit sont précises et limitées; les décisions relatives à la communication sont susceptibles de recours indépendants du pouvoir exécutif.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor assume la responsabilité générale d'exécuter la Loi, notamment en fournissant une orientation et des outils aux institutions fédérales.
Il est possible de faire une demande d'accès à l'information à l'égard de n'importe quel document qui relève d'une institution fédérale. Quelque 260 institutions sont assujetties à la Loi, dont le ministère de la Défense nationale.
[Français]
Ces institutions sont tenues de répondre aux demandes d'accès à l'information qu'elles reçoivent. En tant que commissaire à l'information, mon rôle est d'enquêter sur les plaintes liées à ces demandes.
Le Commissariat à l'information du Canada peut être saisi d'une plainte si la personne qui a fait une demande d'accès à l'information n'est pas satisfaite du délai de réponse de l'institution ou si elle estime ne pas avoir reçu tous les documents ou renseignements auxquels elle a droit.
[Traduction]
Depuis le début de l'exercice en cours, 103 plaintes ont été enregistrées à l'encontre du ministère de la Défense nationale, ce qui le place au sixième rang des institutions ayant reçu le plus grand nombre de plaintes jusqu'à présent.
À l'issue d'une enquête, je peux rendre une ordonnance à l'encontre de l'institution visée. Je peux, par exemple, ordonner la communication des renseignements à la personne qui en avait fait la demande. Les institutions sont légalement tenues de se conformer à mes ordonnances, à moins d'exercer un recours en révision devant la Cour fédérale.
Cette année, j'ai rendu 29 ordonnances dans le cadre d'enquêtes portant principalement sur le respect des délais de réponse aux demandes d'accès par le ministère de la Défense nationale. Plusieurs de ces enquêtes ont montré un manque de réactivité de la part de certaines unités opérationnelles. Cela nuit à la capacité du ministère à répondre aux demandes conformément aux exigences de la Loi.
[Français]
Comme je l'ai souvent souligné dans des déclarations sur l'importance de la transparence au sein du gouvernement fédéral, le leadership de la haute gestion et de la haute direction est indispensable pour influencer un changement de culture au sein d'une organisation. Ce leadership doit s'étendre aux pratiques de gestion de l'information et aux protocoles de communication interne en vue d'assurer la conformité à la Loi.
[Traduction]
D'ailleurs, j'aimerais faire le point sur des enquêtes récentes que j'ai conclues à l'encontre du ministère de la Défense nationale.
En juin dernier, j'ai ordonné à la ministre de la Défense nationale de l'époque de communiquer les politiques du ministère sur la COVID‑19 au plus tard le 30 novembre 2023. Ces politiques avaient fait l'objet d'une demande d'accès l'année précédente. Le ministère avait avisé le Commissariat qu'il donnerait suite à l'ordonnance, mais le délai de novembre n'a pas été respecté. Voilà pourquoi, en décembre dernier, j'ai présenté une demande de bref de mandamus à la Cour fédérale afin d'obliger le ministre actuel de la Défense nationale à se conformer à mon ordonnance. Cela fait maintenant deux fois que j'ai recours à ce type de demande parce qu'une institution persiste à ignorer mes ordonnances.
La semaine dernière, j'ai présenté deux nouvelles demandes afin d'obliger le ministre de la Défense nationale à se conformer à des ordonnances qui auraient dû être respectées en novembre et en décembre 2023. Comme ces affaires sont actuellement en instance devant la Cour fédérale, je ne peux pas en discuter en détail. Cependant, cette forme de recours extraordinaire pour assurer la conformité aux ordonnances rendues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information ne devrait pas être nécessaire. Ces recours minent mon autorité et, plus important encore, la crédibilité du système fédéral d'accès à l'information.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Monsieur le président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de fournir des renseignements sur le régime externe de dénonciation au sein du secteur public fédéral.
Le Commissariat à l'intégrité du secteur public du Canada a été créé en 2007 en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, dans le cadre d'une initiative du gouvernement fédéral en matière de responsabilité. Le Commissariat offre un mécanisme confidentiel qui permet aux fonctionnaires et aux membres du public de divulguer certains actes répréhensibles commis dans le secteur public fédéral. Il convient de noter que la Loi donne une définition très précise de ce qui constitue un acte répréhensible, laquelle ne comprend pas tous les actes répréhensibles au sens général du terme. La Loi prévoit également que les fonctionnaires actuels et anciens peuvent déposer des plaintes en matière de représailles qui découlent de divulgations.
À titre d'agente du Parlement, j'exerce une fonction qui garantit indépendance et neutralité.
Le Commissariat ne peut lancer une enquête sur les divulgations faites à l'encontre des Forces armées canadiennes, du Centre de la sécurité des télécommunications ou du Service canadien du renseignement de sécurité. Conformément à la Loi, ces organisations doivent maintenir leur propre régime interne de dénonciation. Le Commissariat est toutefois en mesure de lancer une enquête sur les divulgations faites à l'encontre du ministère de la Défense nationale et sur les plaintes déposées par les fonctionnaires qui travaillent ou ont déjà travaillé au sein du ministère.
La Loi prévoit également que les organisations fédérales assujetties à la Loi doivent mettre en place des processus internes, que nous appelons des régimes internes. Les organisations doivent désigner une agence supérieure chargée des divulgations et lui accorder un mandat qui reflète celui du Commissariat. Le secrétaire du Conseil du Trésor est responsable de l'administration des régimes internes. En vertu de la Loi, les fonctionnaires ont la possibilité de faire une divulgation à leur supérieur hiérarchique ou à leur agent supérieur par le biais du régime interne de chaque organisation, ou de s'adresser directement au Commissariat dans le cadre du régime externe. Le choix leur appartient.
[Traduction]
Mon bureau établit des processus normalisés pour le traitement des divulgations et des plaintes en matière de représailles, notamment des normes de service applicables aux diverses étapes du processus et des politiques claires pour appuyer la prise de décisions. Ces processus internes visent à assurer un traitement uniforme et équitable des dossiers. Ils sont continuellement réexaminés et sont modifiés périodiquement dans un souci d'efficacité.
Toute personne peut faire une divulgation confidentielle d'acte répréhensible à mon bureau au moyen d'un formulaire en ligne à soumettre par télécopieur, par la poste ou en personne. Dès réception, nous analysons les divulgations afin de déterminer si elles relèvent de ma compétence et si les allégations pourraient constituer des actes répréhensibles au sens de la loi. Les analystes peuvent alors communiquer avec le divulgateur pour obtenir de plus amples renseignements.
Quand je décide de ne pas lancer d'enquête, le divulgateur est informé par écrit des motifs de ma décision, et le dossier est clos. Je peux revenir sur ma décision après réception de renseignements supplémentaires importants.
Quand je décide d'ouvrir une enquête, je communique avec l'administrateur général de l'organisation touchée, ainsi qu'avec le divulgateur et l'auteur présumé de l'acte répréhensible, et l'enquête commence. Nous avons une norme de service pour l'achèvement des enquêtes, qui est de 12 mois. L'enquête peut comprendre des entretiens avec des témoins et l'auteur présumé d'actes répréhensibles, ainsi que la collecte et l'examen de documents ou d'autres preuves. Tout au long du processus, mon bureau respecte le droit à l'équité procédurale et à la justice naturelle pour toutes les parties concernées.
[Français]
Après enquête, je conclus si un acte répréhensible a été ou non commis en me fondant sur la prépondérance des probabilités. Dans le cas d'un acte répréhensible avéré, je dispose de 60 jours pour déposer au Parlement un rapport dans lequel je décris l'acte en question. Le rapport comprend également mes recommandations de mesures correctives et la réponse de l'administrateur général à ces recommandations.
À ce jour, mes prédécesseurs ont déposé 19 rapports de ce genre.
(1220)
Fait à noter, je suis en fonction depuis moins de 5 mois.
Je reconnais la difficulté de faire une divulgation et je prends au sérieux l'obligation de préserver la confidentialité des divulgateurs. La même obligation incombe aux fonctionnaires qui gèrent le régime interne de leur institution. Le Commissariat à l'intégrité du secteur public ne communique jamais l'identité du divulgateur. Néanmoins, cette personne peut faire l'objet de représailles si son identité est révélée par d'autres sources. Dans un tel cas, le divulgateur peut déposer une plainte auprès du Commissariat. La procédure de réception et de traitement des plaintes est similaire à celle de la divulgation, mais la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles exige que je décide…
J'ajouterai simplement que la conciliation et la médiation sont des outils importants pour optimiser les résultats pour les parties et que nous avons jusqu'à présent financé 24 conciliations réussies.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé.
Madame Maynard, je vous remercie d'avoir clarifié certaines choses dans votre déclaration préliminaire.
Il y a deux semaines, devant le Comité, le ministre Blair a dit ne pas croire que la conformité à la Loi sur l’accès à l’information et la protection des renseignements personnels et le litige en la matière émanait de son ministère, alors je vous remercie de clarifier la situation.
Pouvez-vous confirmer, aux fins du compte rendu, que le titre de l'affaire est La commissaire à l'information du Canada contre le ministre de la Défense nationale?
Il y en a trois maintenant. Merci d'avoir porté cela à notre attention.
Depuis que nous avons entendu le ministre, il y a deux semaines, vous avez essuyé deux autres refus de son ministère. Vous le poursuivez maintenant en justice pour deux autres refus.
Je comprends que vous n'êtes pas en mesure de parler de l'affaire elle-même ou de son bien-fondé, mais pouvez-vous nous donner une idée des délais dont il est question ici? Quelle communication ou quelle information avez-vous reçue concernant le refus du ministère de se conformer à vos ordonnances?
Ce n'est pas tant un refus. Je pense que c'est surtout que le ministère est incapable de respecter ces ordonnances en raison du manque de ressources et de réactivité des différentes sections de la Défense nationale qui détiennent les dossiers. Il y a là un problème.
Dans le cadre de notre enquête, nous nous sommes rendu compte que lorsque nous prenons des ordonnances, il n'arrive toujours pas à divulguer l'information. Nous devons maintenant nous adresser aux tribunaux pour nous assurer que les ordonnances soient respectées.
Je sais que les ordonnances prévoyaient la divulgation de l'information avant certaines dates en novembre et en décembre. Les ordonnances proprement dites ont dû être produites en été, puisque les parties ont habituellement 36 jours ouvrables pour se conformer à une ordonnance.
Les gens du ministère vous ont-ils dit qu'ils étaient incapables de respecter l'ordonnance que vous leur imposiez en vertu de la Loi? Vous ont-ils dit qu'ils étaient incapables de s'y conformer, ont-ils simplement laissé le temps s'écouler ou ont-ils trouvé des excuses plus fortes que leur volonté?
Lorsque nous émettons une ordonnance, nous devons envoyer un avis d'intention. Les parties ont 30 jours pour nous dire si elles vont s'y conformer ou contester notre ordonnance en justice.
Dans les trois cas, le ministère nous a dit qu'il allait se conformer aux ordonnances. Nous avons découvert grâce à l'information qui nous a été communiquée — ce sont souvent les plaignants qui communiquent avec nous — qu'il ne l'avait pas fait. La date est passée. Ainsi, nous devons nous adresser aux tribunaux pour faire respecter l'ordonnance.
Je vais vous poser la question que j'ai posée au ministre. S'agit‑il d'ouverture et de transparence à l'oeuvre, ou d'une démonstration de l'ouverture et de la transparence promise aux Canadiens par le gouvernement en 2015?
Comment cela touche‑t‑il les gens qui ont besoin d'information de la part du ministère? Nous avons entendu parler de personnes qui veulent porter plainte pour harcèlement ou inconduite sexuelle. Ils ont besoin d'avoir accès à l'information pour porter plainte, mais ils n'arrivent pas à obtenir cette information.
Qu'est‑ce que cela indique aux gens qui ont besoin d'information de la part du ministère?
Je ne peux pas parler d'accès à des renseignements personnels. Le commissaire à la protection de la vie privée serait le mieux placé pour vous parler des plaintes relatives aux demandes de renseignements personnels. Je soupçonne que son commissariat a le même problème en ce qui concerne les réponses à ces demandes.
Chose certaine, nous constatons que nos plaintes sont souvent liées aux échéances. Au moment où l'on se parle, le bilan du ministère empire. Au cours des trois dernières années, le nombre de plaintes a augmenté. C'est habituellement parce que les échéances ne sont pas respectées.
Les principales raisons évoquées, selon nos enquêtes, sont liées à ce que nous appelons le bureau de première responsabilité, où se trouvent les dossiers. Le service d'accès à l'information demande ces documents, l'information, mais ne les reçoit pas.
En ce qui concerne les recommandations formulées dans votre dernier rapport, le gouvernement affirme « prendre note » de vos recommandations. Est‑ce que cela signifie qu'il rejette vos recommandations?
C'était dans le rapport que j'ai rédigé en 2018. À l'époque, la Défense nationale avait nettement de la difficulté à traiter les demandes et à y répondre. Nous avions mené une enquête systémique. Nous avons formulé neuf recommandations. Depuis, le ministère a mis en place un plan de gestion pour y répondre.
Je dois dire que les deux premières années ont été très bonnes. Les plaintes ont diminué en 2019 et en 2020. Cependant, depuis, elles ont augmenté.
Comme je l'ai dit, je pense que la direction a un grand rôle à jouer dans l'équation. Le ministère ne répond pas à la demande.
Je faisais en fait référence à l'ensemble des recommandations formulées par le comité de l'éthique en 2023. C'est là que le ministre a dit explicitement avoir pris bonne note des recommandations, mais sans les mettre en oeuvre. Plus précisément, la recommandation n o 7 du comité de l'éthique visait à « créer un système d'accès à l'information accéléré » pour les victimes d'inconduite militaire, mais le ministère n'a pas accepté cette recommandation et ne l'a pas mise en œuvre, si je comprends bien.
Avez-vous quelque chose à ajouter au sujet de cette recommandation?
Ce rapport a été envoyé au Secrétariat du Conseil du Trésor. La présidente du Conseil du Trésor, comme vous l'avez dit, a répondu que son ministère allait se pencher sur la question. Aucune recommandation n'a été mise en oeuvre à ce jour.
Merci beaucoup à nos témoins. C'est vraiment un plaisir de vous avoir parmi nous.
Madame Maynard, ma première question concerne les données et les décisions du commissariat, publiées sur Internet. En consultant ces données, nous constatons une augmentation du nombre de décisions visant le ministère de la Défense nationale en lien avec ses retards à répondre aux demandes d'information.
Vous avez mentionné que ces retards avaient commencé en 2021. Il semble donc certain que la situation était différente au cours des années 2019 et 2020. Seriez-vous disposée à nous dire ce qui pourrait expliquer l'augmentation des retards à compter de 2021? On a connu un événement majeur en 2020, la pandémie, et tout a été fermé pendant un certain temps. Pensez-vous que ça a eu un impact sur le nombre de décisions?
La pandémie a certainement eu un impact sur toutes les institutions en ce qui concerne le respect de leurs obligations en vertu de la Loi. Par contre, pendant la pandémie, l'unité d'accès à l'information du ministère de la Défense nationale a été exemplaire, dans le sens où elle a traité énormément de cas au cours de l'année 2020. C'était intéressant.
C'est en 2021 et 2022 que nous avons reçu de plus en plus de plaintes. La pandémie a commencé à avoir un impact sur les années qui ont suivi et les retards continuent d'augmenter. À l'heure actuelle, cependant, on ne peut plus utiliser la COVID ou la pandémie comme excuse pour justifier un retard.
Comme je le disais tout à l'heure, ce qui semble être la raison principale des retards à la Défense nationale, c'est que les services qui détiennent l'information ne répondent pas dans les 30 jours, soit dans le délai demandé par l'unité d'accès à l'information.
À la dernière réunion de notre comité, un des témoins a fait valoir qu'il pourrait ne pas être réaliste de demander une réponse dans les 30 jours. Ce témoin a laissé entendre que nous devrions peut-être envisager de repousser l'échéance. Il faudrait prolonger le délai au‑delà de 30 jours.
Madame Maynard, et peut-être madame Solloway, j'aimerais vraiment entendre votre point de vue à ce sujet.
Selon les statistiques du Conseil du Trésor, 60 % des demandes respectent le délai de 30 jours, mais, généralement, un peu plus de 50 % sont en retard. Il est sûr que si on donnait un délai de 60 jours, les gens demanderaient encore du temps additionnel. Je crois qu'il faut se pencher sur tous les facteurs qui font que les délais ne sont pas respectés.
Tout à l'heure, on a parlé de la gestion de l'information. Il y a beaucoup trop d'information. Les gens ne font pas une bonne gestion de l'information. Quand on fait une demande d'accès à l'information, on ne parle plus de deux ou trois pages dans un petit fichier papier. Maintenant, les gens conservent des milliers de pages pour expliquer une décision.
[Traduction]
Il y a bel et bien un problème de gestion de l'information, ce qui entraîne des retards.
La consultation entre les ministères retarde aussi le processus. Il faut faire quelque chose et établir un échéancier pour les institutions qui reçoivent des demandes de consultations, afin d'éliminer ces retards. C'est l'une des recommandations législatives que j'ai faites au Conseil du Trésor.
Madame Solloway a raison: il n'y a pas eu de problème important dans ce domaine.
Notre commissariat est formé de 36 personnes seulement, et notre mandat est de mettre en oeuvre la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, ce qui signifie qu'il est un peu plus facile pour nous de respecter le délai de 30 jours à la suite d'une demande d'accès à l'information. Il y a bien sûr certaines exceptions relatives à la communication des renseignements.
J'avais presque terminé; j'allais seulement vous parler du processus de renvoi des cas de représailles au tribunal. Dans l'ensemble, j'avais réussi à aborder tous les sujets que je souhaitais aborder.
Madame Maynard, le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique a recommandé que le commissaire à l'information puisse imposer des amendes ou des pénalités en cas de non-respect de ses ordonnances. Vous avez eu à déposer trois requêtes de mandamus afin de faire respecter les ordonnances que vous aviez émises.
Les pénalités ne seraient-elles pas une façon de dissuader les agences de ne pas respecter les ordonnances? Cela permettrait aussi d'éviter d'en arriver au point où on doit déposer une requête de mandamus pour réussir à faire respecter ces ordonnances.
Pour ce qui est des ordonnances, j'avais recommandé lors des discussions entourant l'ancien projet de loi C‑58 la mise en place d'un processus d'homologation des ordonnances émises par le commissariat. En vertu d'un tel processus, il suffirait de faire homologuer une ordonnance du commissariat par la Cour fédérale pour qu'elle soit respectée au même titre qu'un jugement de la Cour. Un tel processus serait beaucoup plus facile qu'une requête de mandamus.
À l'époque, le gouvernement avait dit qu'on n'avait pas besoin d'un processus comme celui-là, parce qu'il allait respecter les ordonnances du commissariat, qui avaient force de loi. On a maintenant la preuve que ce n'est pas exactement le cas. Un processus d'homologation serait suffisant, selon moi, pour que les institutions ne veuillent pas être accusées d'outrage au tribunal, si je peux m'exprimer ainsi.
En ce qui concerne les pénalités, les gens nous demandent souvent qui devrait être puni quand le ministère ne répond pas ou ne respecte pas la Loi. Selon moi, il serait très difficile d'établir un processus qui sanctionnerait un fonctionnaire, un directeur ou un sous-ministre. Je pense qu'il serait plus facile d'établir au sein du ministère un processus d'évaluation de rendement relativement aux réponses aux demandes d'accès à l'information. Quand cela touche aux primes et à la paie, cela peut avoir un effet.
Comme on le dit, c'est l'argent qui mène le monde.
J'ai une question relative aux finances. Je crois comprendre que vous avez demandé environ six millions de dollars supplémentaires sur trois ans pour terminer le traitement des plaintes que vous avez reçues. Vous avez reçu le double des plaintes habituelles, mais avec le même budget. Où en est-on quant à cette demande?
C'est une demande qui a été envoyée en recourant au mécanisme actuel de demande de budget additionnel. Je n'ai pas reçu de nouvelles ni du ministre de la Justice ni du ministère des Finances. Je n'ai pas grand espoir d'avoir de l'argent additionnel. C'est malheureux parce que je suis une agente indépendante du Parlement, mais je dois me rapporter à ces ministères pour recevoir de l'argent supplémentaire afin d'accomplir mon mandat.
Heureusement, nous avons reçu moins de plaintes cette année, et nous sommes donc capables de répondre à la demande, mais mon arriéré ne diminue pas beaucoup parce que le nombre des demandes qui entrent est égal à celui des demandes traitées. Il est certain que nous devrions avoir une façon d'obtenir de l'argent quand nous en avons besoin pour répondre à la demande, ou pour remettre de l'argent s'il y a une réduction du nombre de demandes. C'est un processus qui devrait être indépendant du gouvernement, selon moi.
Merci. Je vais revenir avec d'autres questions par la suite.
Madame Solloway, en septembre dernier, nous avons reçu de l'information selon laquelle le ministère de la Défense avait enfreint la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. Je comprends que c'était votre prédécesseur, M. Friday, qui avait rendu l'information publique. Il avait qualifié ses conclusions de troublantes, puisque, durant plusieurs années, le ministère de la Défense, dans le cadre de son régime interne, n'avait même pas mis à jour son site Web pour dire qu'il y avait des enquêtes en cours, et n'avait même pas avisé les dénonciateurs du résultat ou du suivi de ces demandes.
J'aimerais entendre ce que vous pensez des rôles parallèles de votre commissariat et des régimes internes des institutions fédérales. Je comprends qu'un dénonciateur peut décider de faire appel soit au régime interne de l'institution soit à votre commissariat, ou aux deux. S'il y a une perte de confiance envers les régimes internes, quel est l'impact sur votre organisation? Au cours des dernières années, est-ce que le nombre de demandes que vous traitez à votre commissariat a augmenté comparativement aux demandes qui sont traitées par les régimes internes?
Sans me prononcer sur les raisons — parce que je n'ai pas fait une analyse complète à cet égard —, je dirais que notre commissariat a connu une augmentation constante du nombre de cas. Cela ne fait aucun doute. Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois que nous en sommes à environ 50 % de plus que l'an dernier, et je crois qu'il y avait eu une augmentation l'année précédente.
Le budget du Commissariat n'a pas augmenté depuis sa création en 2007. J'étais en poste depuis deux semaines au moment où nous avons dû présenter une demande de budget. Nous avons demandé une augmentation très modeste pour l'année budgétaire à venir, principalement parce que notre système informatique est sur le point de s'effondrer. Nous examinons maintenant où nous en sommes et ce dont nous avons besoin en vue de trouver la meilleure façon de nous structurer pour accroître notre efficacité et déterminer les ressources qui seront nécessaires en fonction de l'analyse des tendances que nous avons effectuée.
Je sais que d'autres agents du Parlement partagent notre préoccupation, mais dans notre cas, elle est assez importante. Nous sommes préoccupés par les budgets à venir.
Vous dites qu'il n'y a pas eu de mise à jour depuis 2007. C'est terrible. Vous avez dit que votre système informatique était sur le point de s'effondrer. Pouvez-vous nous en dire plus?
Jusqu'à il y a quelques mois — et M. Radford est notre mémoire institutionnelle —, nos services informatiques étaient confiés à des sous-traitants. Nous avons maintenant une capacité interne. Nous avons deux employés qui travaillent à maintenir le système pour le moment. Nous avons déjà demandé à obtenir des équipements — puisque nous avions le budget nécessaire pour le faire cette année —, alors nous nous attendons à ce que notre système soit mis à jour bientôt.
Nous devons faire ce travail à l'interne pour toutes sortes de raisons. Je n'entrerai pas dans les détails, mais ils se trouvent dans notre demande budgétaire. Je peux vous en dire plus si vous le voulez.
Dans le cadre de notre étude, nous avons beaucoup entendu parler des différences entre les agents du Parlement, et entre les commissaires et les ombudsmans. Nous venons d'entendre l'ombudsman. J'aimerais en savoir plus sur l'indépendance de ces bureaux.
Pourriez-vous nous en parler, et nous expliquer comment l'indépendance de vos rôles en tant que commissaires vous permet de faire votre travail? Pouvez-vous nous parler de l'importance d'élargir ce rôle, jusqu'à celui d'ombudsman, peut-être?
C'est intéressant, parce que je siégeais au Comité externe d'examen des griefs militaires en 2011 et les problèmes sont les mêmes. J'ai écouté Vihar Joshi, et je constate que la situation n'a pas beaucoup changé. C'est la même chose pour l'ombudsman.
La bonne nouvelle, c'est qu'en tant qu'agents du Parlement, nous relevons du Parlement. Nous sommes complètement indépendants. Ce qui nous préoccupe, c'est d'avoir suffisamment de ressources pour nous acquitter de notre mandat. À part cela, j'enquête sur le ministre de la Défense nationale , le ministre de la Justice, la ministre des Finances et la présidente du Conseil du Trésor. Nous faisons rapport au Parlement des résultats de nos enquêtes.
Si nous n'avons pas les ressources nécessaires et les mécanismes appropriés pour les obtenir, cela nuit à notre capacité d'en faire plus. Les salaires représentent environ 87 % de mon budget. Tout comme la commissaire Solloway, j'ai une très petite équipe de TI. Nous ne pouvons pas utiliser le nuage. Nous ne pouvons pas faire des choses que d'autres grands ministères peuvent faire rapidement. Je veux réaliser plus d'enquêtes. Je veux réduire les délais. Je veux être plus efficace dans le cadre du mandat qui m'a été confié. Nous devons faire des choix quant à l'affectation des fonds. C'est difficile.
Je suis certain que le travail de l'ombudsman, qui fait rapport au ministre, est différent. Lorsque des décisions sont prises par un ministère, vous en êtes responsable. Notre mandat est entièrement distinct.
J'aimerais ajouter quelque chose. Bien que je ne veuille pas parler au nom des autres, comme nos organisations sont très petites, les fonds de prévoyance représentent un défi. Ces fonds visent les augmentations marquées ou les obstacles auxquels nous devons faire face, les cas complexes qui sortent de l'ordinaire ou les cas où nous devons financer les services juridiques en vue d'un examen.
Il est difficile de prévoir ces éléments dans un budget. Nous devons garder de l'argent de côté au cas où une telle situation se produirait, ce qui nous empêche de l'utiliser au quotidien. Nous devons être prêts à toute éventualité.
Les plus grandes organisations peuvent bouger les choses plus facilement. C'est plus difficile pour nous. Autrement, je suis tout à fait d'accord avec mon collègue.
Lors d'une réunion dans le cadre de notre étude, le sous-ministre a dit que la numérisation permettrait en grande partie de régler le problème. Êtes-vous du même avis? Est‑ce qu'on procède à la numérisation de manière satisfaisante au sein des ministères?
C'est une pièce du casse-tête. Je ne dirais pas que la majorité des cas sont touchés par des problèmes de numérisation. Ce sont surtout les anciens dossiers qui sont toujours au format papier. L'armée n'utilise plus le papier aujourd'hui. La numérisation ne représente pas un obstacle au respect des délais pour les dossiers actuels.
Chers collègues, on me dit que nous devrons lever la séance à 13 h 6. Nous n'aurons pas le temps de tenir une série de questions de 25 minutes. Je vais retirer une minute à l'intervention de M. Bezan, et nous allons poursuivre.
Merci, monsieur le président. Je remercie également les deux témoins d'être avec nous.
Madame Maynard, votre témoignage d'aujourd'hui a été très convaincant. Combien d'autres ministères, à part celui de la Défense, avez-vous dû poursuivre?
Premièrement, le pouvoir de rendre des ordonnances a été créé en 2019 seulement. Il nous a ensuite fallu environ un an ou deux pour commencer à le faire. Le nombre d'ordonnances augmente: cette année, j'en ai rendu 298, je crois.
La plupart du temps, les institutions se plient à mes demandes ou bien elles les contestent devant le tribunal. La Loi le permet. J'ai dû rendre des ordonnances ou demander un mandamus pour forcer les institutions à respecter les ordonnances dans trois cas: deux contre la Défense nationale et un contre la TMC.
Vous avez aussi dit que cela minait votre autorité et compromettait la mise en œuvre de la Loi sur l'accès à l'information. Alors que le gouvernement dit qu'il veut plus de transparence, que pensez-vous de la situation? Est‑ce qu'on tente de cacher de l'information? Est‑ce gênant? Pourquoi nous retrouvons-nous dans une situation où un agent du Parlement doit forcer les ministres à comparaître devant le tribunal?
La situation a une incidence sur l'autorité en soi et sur la crédibilité de la demande d'accès, parce que les délais sont plus longs. Les ministères présentent les ordonnances devant le tribunal ou les ignorent, alors ils prennent plus de temps pour répondre aux demandes d'accès, au‑delà des 30 jours prescrits ou des délais de prolongation légaux.
Certaines demandes d'accès à l'information n'ont jamais été complétées. Nous en avons présenté une le 13 octobre 2017; elle visait uniquement l'obtention d'un document de changement de politique. Il y en a une de 2018 qui vise seulement à obtenir des renseignements sur la Stratégie nationale de construction navale, ce qui me semble être assez simple. Nous avons une demande pour l'obtention de dossier sur les frais d'accueil d'un employé, et une autre sur le rapport du vérificateur général et la correspondance connexe. J'ai six demandes qui ont été présentées entre 2017 et 2019.
Est‑ce que je devrais vous présenter ces dossiers? En tant que parlementaire, je ne sais pas si je peux vous demander d'exiger au ministère qu'il rende des comptes. Pour certaines de ces demandes, le ministère nous a répondu il y a quelques mois seulement, et nous n'avons toujours pas obtenu l'information.
Le processus existe pour cela. La Loi prévoit un certain délai, et si vous n'obtenez pas de réponse à l'intérieur de celui‑ci ou de la période de prolongation légale, alors vous avez le droit de déposer une plainte dans les 60 jours. Oui, vous avez le droit de porter plainte devant mon commissariat.
Est‑ce que c'est à cause du ministère ou du ministre? Sont-ils incapables ou incompétents? Est‑ce un manque de leadership ou un scandale politique et une manœuvre de camouflage?
De nombreux facteurs ont une incidence sur la capacité du ministère de répondre. Comme je l'ai dit plus tôt, il y a un problème de gestion de l'information, la culture du ministère, le manque de ressources, le manque d'outils... Tous ces facteurs. Le leadership a aussi un rôle à jouer à cet égard.
Je remercie les deux commissaires et leurs équipes de leur présence.
J'avais préparé une question, mais j'entends la frustration dans vos déclarations préliminaires et dans vos réponses.
Nous avons entendu parler des budgets de 2007. On a aussi évoqué l'année 2011. Madame Maynard, vous avez parlé de la gravité de la situation en 2011.
Nous savons à quel point les choses allaient mal sous le gouvernement précédent, mais ma foi, il semble que la situation ne se soit pas beaucoup améliorée. Les graphiques montrent des améliorations minimes. C'est vraiment frustrant.
C'est une chose pour nous d'être assis ici et de dire que l'opposition avait vraiment mal fait son travail il y a plusieurs années ou d'être de l'autre côté et de dire que nous sommes très mauvais. Toutefois, en tant que comité, en tant que gouvernement, en tant que ministres et en tant que ministères, nous devons faire mieux.
Pour le temps qu'il me reste, pouvez-vous toutes les deux me dire ce que nous devons faire, nonobstant la question du système informatique — et nous avons bien compris le message, merci — et celle du budget, pour corriger ce système d'accès à l'information? Je sais que je ne vous laisse pas beaucoup de temps pour me répondre. Je comprends votre frustration, et j'entends celle des députés autour de la table. Je suis moi-même frustré de la situation. Que devons-nous faire pour aller au‑delà de ce que je vois dans les graphiques comme des améliorations marginales? Nous allons prendre deux secondes pour nous féliciter de ces améliorations, puis nous reprendrons le travail. Que devons-nous faire pour améliorer la situation?
Je suis d'accord avec vous: rien n'a changé. Lorsqu'il s'agit de nos renseignements, nous voulons les protéger; lorsque ce sont les renseignements des autres, nous voulons les voir.
Si nous voulons que les choses changent, il faut changer la culture au sein du gouvernement. Les leaders doivent établir les priorités et des objectifs clairs, fournir les ressources et la formation nécessaires et favoriser l'innovation.
Il faut apporter des changements législatifs. Il faut attendre jusqu'en 2025 pour la prochaine série de changements législatifs, et ce ne sera que le début. Il faudra probablement tenir des consultations, et je ne sais même pas si j'y serai. Il faut absolument renforcer les lois. La loi actuelle a 40 ans, et n'a pas beaucoup changé.
Il faut investir de l'argent et investir dans les ressources pour répondre aux demandes d'accès. Ces demandes ne disparaîtront pas. Les gens demandent de l'information. Ils savent qu'ils ont le droit de le faire, et ils le font.
Je ne sais pas vraiment comment répondre. Pour être très transparente, je dois dire qu'à ma connaissance, mes prédécesseurs n'ont pas demandé une augmentation de budget au cours des années précédentes. Je ne peux donc pas dire que des demandes ont été refusées. Cependant, je pense que nous devons prévoir une marge de manœuvre dans notre budget pour répondre aux situations spéciales, en veillant à ne pas gaspiller d'argent, mais à avoir des fonds lorsque c'est nécessaire.
Je pense que c'est un cas particulier, mais comme je l'ai dit, je crois que cela dépendra de nous. C'est ce que nous sommes en train de faire en examinant notre organisation, et d'ici le prochain cycle budgétaire, espérons‑le, nous serons prêts à présenter une demande lucide à propos de ce qui est nécessaire.
Je remercie encore les représentants des deux organisations de leurs déclarations liminaires et de leurs commentaires.
Je pense qu'il nous incombe en tant que comité de cesser les attaques partisanes comme « ils sont pires que nous, nous sommes pires qu'eux » et de tout simplement nous mettre au travail afin d'améliorer le système pour vous.
Madame Maynard, il y a deux semaines, j'ai cité une partie de votre rapport de 2020, qui mentionne que les fonctionnaires tendent à ne pas divulguer trop d'information pour ne pas s'exposer à des sanctions, qu'ils classent parfois de façon routinière des informations comme étant confidentielles et que leur travail lié aux demandes d'accès à l'information n'est qu'une tâche parmi d'autres.
J'ai questionné un témoin à ce sujet, qui a dit qu'il n'y avait pas vraiment de problème de ce côté-là, que le travail était bien fait et que ces fonctionnaires étaient exclusivement affectés aux demandes d'accès à l'information. J'aimerais entendre votre point de vue pour que votre témoignage aussi puisse faire partie de notre rapport.
Les unités d'accès à l'information ne font pratiquement que ce travail tout le temps. Il ne fait aucun doute que ces gens travaillent fort et qu'il faut avoir la vocation pour travailler dans une unité d'accès à l'information. D'un côté, les demandeurs ne sont pas contents de ne pas avoir l'information demandée et, de l'autre, les ministères ne veulent pas la donner parce qu'ils ont d'autres choses à faire.
Les obligations prévues par la Loi font partie des responsabilités des fonctionnaires, mais je ne pense pas que ça leur a été enseigné. Il faut donc faire preuve de leadership et leur dire que ça fait partie des priorités de leur ministère et que ce n'est pas seulement une tâche secondaire qu'on peut ignorer parce que ce n'est pas important ou amusant.
Je ne veux pas vous mêler à nos désaccords, et je pense que M. Fisher a les meilleures intentions. Il a certainement raison de dire que ce ne devrait pas être partisan. Cependant, lorsque nous parlons d'un changement de culture ou que vous parlez de faire preuve de leadership et de la nécessité d'investir et d'accorder des ressources, je me demande souvent à quel point c'est délibéré, car, par exemple, un groupe a le pouvoir et l'autre a l'information, puis l'autre a le pouvoir et veut l'information.
Dans quelle mesure pouvons-nous faire quelque chose selon vous? Que pouvons-nous vraiment faire en tant que législateurs pour éliminer toute cette partisanerie de l'équation et pour mettre fin à ce manque délibéré de ressources au sein des institutions?
Comme nous l'avons dit, à l'heure actuelle, seuls deux ou trois agents du Parlement ont des mécanismes indépendants à leur disposition pour obtenir leurs propres arrangements financiers à l'extérieur du gouvernement. Malheureusement, nous faisons partie des, je crois, six entités qui ne possèdent pas de mécanisme de financement indépendant. Ce serait sans aucun doute la bonne mesure à prendre. Nous pourrions alors obtenir des ressources lorsque le nombre de demandes ou de plaintes augmente soudainement, et lorsque notre système informatique fait défaut, il ne nous serait pas nécessaire d'utiliser nos propres ressources pour régler les problèmes.
En modifiant la Loi, en la renforçant, en faisant de cette question une priorité, en rendant prioritaire la divulgation proactive et en m'accordant un pouvoir de divulgation proactive pour enquêter... En ce moment, on ne tient même pas compte de la partie 2 de la Loi. Nous ne savons même pas si les institutions respectent leurs obligations de divulgation proactive puisque ce n'est du ressort de personne, puisque personne n'est habilité à vérifier si c'est fait.
Madame Maynard, pensez-vous que ce qui se produit à la Défense nationale — trois poursuites sont intentées contre le ministre — est systémique? S'agit‑il de la nouvelle façon de faire? Va‑t‑on continuer d'essayer de vous bloquer le chemin plutôt que de se conformer à la loi?
Madame Solloway, vous avez parlé d'employés des ministères qui présentent de l'information et qui signalent des plaintes et des représailles de leurs supérieurs hiérarchiques. Au ministère de la Défense nationale, nous voulons faire en sorte que les dénonciateurs soient protégés, mais on utilise maintenant des choses comme la Loi sur la défense nationale, la Loi sur la protection de l'information et des accords de non-divulgation pour faire taire les gens.
Est‑ce que les gens hésitent à se manifester lorsqu'ils voient des actes répréhensibles au ministère de la Défense nationale et dans les Forces armées canadiennes?
Je vais demander à M. Radford de répondre à cette question. Puisque j'occupe mon poste depuis seulement quatre mois, je n'ai pas eu assez de temps pour déceler des tendances.
La crainte de représailles est sans aucun doute un problème. Comme on y a fait allusion plus tôt, il y a peut-être des répercussions sur le système de divulgation tout entier lorsque le régime interne de divulgation ne fonctionne pas très bien.
Le ministère de la Défense nationale relève de nous, mais pas les Forces armées canadiennes. Nous pouvons toutefois enquêter sur des représailles présumées de la part de membres des forces armées. À la fin du processus, les conséquences pourraient être un peu différentes pour eux puisqu'ils ne sont pas des fonctionnaires assujettis à la loi, mais cela contribue effectivement à la peur de divulguer des renseignements, tout comme la crainte que rien ne soit fait par la suite.
Ce sont des employés du ministère de la Défense nationale qui signalent des actes répréhensibles ou qui se plaignent de représailles. Parmi les gens accusés d'avoir usé de représailles, il peut toutefois y avoir des membres des forces armées.
Monsieur le président, je veux proposer une motion qui s'appuie sur les témoignages que nous avons entendus aujourd'hui. Je pense qu'elle est assez simple. Je propose:
Que le Comité prolonge l'étude sur la transparence au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes d'une réunion supplémentaire et invite le commissaire à la protection de la vie privée à comparaître.
Personne parmi nous n'a proposé l'ajout du Commissariat à la protection de la vie privée à notre liste de témoins, et je crois que c'était une erreur. La commissaire Maynard nous a dit aujourd'hui que le commissaire à la protection de la vie privée serait mieux placé pour répondre à certaines des questions.
Nous savons que les membres des Forces armées canadiennes doivent souvent présenter une demande d'accès à l'information pour obtenir leurs propres dossiers médicaux, ce qui se rapporte à la protection de la vie privée. C'est la même chose pour d'autres renseignements demandés par les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale. Je pense qu'il nous incombe de demander la comparution du commissaire.
La motion est recevable, de toute évidence. Je ne pense pas que nous aurons un débat, mais pour la gouverne du Comité, nous avons déjà invité le commissaire à la protection de la vie privée. Il faut tout simplement négocier une date de comparution. Nous lui avons envoyé une invitation.
Je dirais que nous devrions probablement adopter la motion, car même si l'invitation a été envoyée, une autre demande du Comité en ce sens serait utile.
Avec l'ajout de mon amendement, le libellé dirait:
Que le Comité prolonge l'étude sur la transparence au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes deux réunions supplémentaires et invite le commissaire à la protection de la vie privée, le chef d'état‑major de la Défense et l'ancien ombudsman de la Défense, Gary Walbourne, à comparaître.
J'aimerais comprendre. Je sais que nous faisons preuve d'une grande générosité en facilitant l'étude de cette importante motion. Nous aimerions toutefois en examiner d'autres. Nous nous sommes également entendus pour prolonger l'étude sur le logement.
Je ne mets pas en doute la grande importance de cette question, mais quelles sont les raisons invoquées par Mme Mathyssen pour inviter ces personnes? Nous parlons de deux témoins supplémentaires, c'est‑à‑dire de quatre heures de délibérations. Est‑ce que j'ai mal entendu, ou s'agit‑il plutôt de deux heures? Je veux juste comprendre, avec le recul et compte tenu de tout ce qui s'accumule sur le bureau des membres de ce merveilleux comité.
Je ne dis pas non. Je veux juste comprendre les raisons invoquées.
Quand j'ai initialement proposé cette motion, je m'attendais à ce qu'elle soit plus longue. Le Comité se souviendra qu'elle a été raccourcie. Comme nous l'avons découvert, il y a beaucoup de questions à approfondir, et je pense que les témoins qui ont comparu et donné de leur temps méritent une étude plus exhaustive, comme nous devons le faire.
J'ai aussi initialement demandé que le chef d'état-major de la défense comparaisse puisqu'il a le dernier mot. À plusieurs reprises aujourd'hui et au cours des réunions précédentes, nous avons entendu dire que son bureau et lui représentent l'autorité de dernière instance en ce qui concerne l'information et l'accès à cette information. Je pense que c'est très important. Même après avoir entendu aujourd'hui l'ombudsman, et même si son personnel et lui sont formidables, je pense qu'une grande partie du contexte historique entourant ce qui s'est produit avec l'ancien ombudsman, M. Walbourne, est important dans le cadre de cette étude.
Si nous pensons pouvoir nous en occuper en l'espace d'une réunion et demie, c'est bon. Cela dit, compte tenu de la profonde importance de ces témoins, j'estime qu'il serait approprié de leur consacrer deux réunions.
J'appuie l'amendement. Je crois que ce que nous avons entendu ce matin de la part du comité des griefs militaires, c'est qu'il reçoit des directives du chef d'état-major et renvoie des dossiers, et nous voulons donc entendre le chef d'état-major.
Compte tenu du témoignage livré par M. Lick ce matin et des commentaires qu'il a formulés sur l'indépendance du bureau, à savoir que M. Walbourne a proposé une mesure législative lorsqu'il était ombudsman, je pense que nous devrions parler à M. Walbourne de l'importance que le bureau devienne une entité parlementaire indépendante qui peut mener les enquêtes nécessaires.
C'est dans l'intérêt des personnes qui servent les Forces armées canadiennes et qui travaillent au ministère de la Défense nationale. Nous devons nous assurer de promouvoir une culture de transparence. Je pense qu'un examen approfondi dans le cadre de cette étude aiderait à envoyer un message sur le changement de culture qui s'impose pour garantir la collaboration et la coopération des responsables du ministère, y compris le ministre.
Comme toujours, j'aime comment à la dernière minute de chaque réunion du Comité, sans préavis ou renseignements... Nous n'avons rien vu par écrit. Nous avons un excellent amendement, et je pense qu'il sera intéressant de le voir par écrit. Nous pourrions donc peut-être, monsieur le président, ajourner les délibérations, ce qui nous permettrait de voir l'amendement.
Nous n'avons pas l'amendement dans les deux langues officielles. On l'a lu, mais par souci de clarté, je vais demander au greffier de le relire pour que nous sachions à quoi nous en tenir.
Nous semblons avoir largement dépassé le temps alloué de toute façon, à moins que vous ne vouliez vraiment rester pour cet exercice démocratique vraiment palpitant.
Des voix: Ha, ha!
Le président: Merci encore.
Monsieur le greffier, pour que nous sachions tous à quoi nous en tenir, allez‑y.
Je vais lire la motion en entier, la version qui tient compte des amendements proposés par Mme Mathyssen. Voici ce qu'il en est:
Que le Comité prolonge l'étude sur la transparence au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes deux réunions supplémentaires et invite le commissaire à la protection de la vie privée, le chef d'état‑major de la Défense et l'ancien ombudsman de la Défense, Gary Walbourne, à comparaître.
Mon équipe serait prête à soutenir l'amendement à une seule condition.
Si possible, Mme Mathyssen devrait écouter.
Nous sommes prêts à appuyer votre amendement à la motion à la condition que les témoins soient placés au bout de la file et qu'ils comparaissent après l'étude sur l'espace. Si cette condition est remplie, nous allons appuyer ce que vous proposez, mais nous devons entamer cette étude. Vous avez vu les reportages sur la technologie russe de destruction de satellites. Nous devons passer à l'action, et le temps qu'il reste pour les déplacements diminue.
Je suis convaincue que le Comité est suffisamment compétent pour gérer les deux études en même temps si nous le voulons. Je sais que le greffier, aussi excellent soit‑il, pourrait avoir de la difficulté à trouver le temps nécessaire pour faire venir les témoins, et je sais que nous avons une autre étude avant celle sur l'espace, mais si nous pouvons composer un peu avec les circonstances et faire comparaître les gens de manière à ne pas perdre de temps, ce serait formidable. Je suis parfaitement disposée à procéder ainsi.
Premièrement, nous appuyons la teneur de la motion.
Deuxièmement, pour donner suite aux propos de M. Fillmore, je pense qu'il revient au sous-comité ou à la présidence de gérer le calendrier du Comité du mieux possible. Je pense que nous pouvons composer avec les circonstances. Nous savons que le chef d'état-major et le commissaire à la protection de la vie privée sont tous les deux ici à Ottawa. Si nous avons besoin de trouver des témoins, il serait assez facile de les faire venir pour combler les plages horaires libres que nous pourrions avoir dans notre calendrier.
En même temps, je ne veux pas retarder l'étude sur l'espace, surtout à cause de la question des déplacements. Nous devons la commencer. Nous pouvons marcher et mâcher de la gomme en même temps.
(L'amendement est adopté. [Voir le Procès-verbal])
(La motion modifiée est adoptée.)
Le président: Merci beaucoup.
Nous avons un dernier point à régler avant de lever la séance. J'ai besoin que quelqu'un propose le budget de l'étude sur la transparence, que nous avons établi à 6 000 $ pour deux réunions. Nous allons voir si ce montant est suffisant.