:
C'est parfait. Je vous en remercie.
Comme vous pouvez le constater, la ministre Anand est parmi nous. Nous lui souhaitons la bienvenue à sa première et sans doute pas la dernière séance avec le Comité.
J'espère que nous saurons entretenir une relation constructive et vous questionner de façon utile dans l'exercice de vos responsabilités très importantes.
Avant de vous demander de nous présenter votre exposé, je souligne que nous nous réunissons en format hybride, en raison de la pandémie qui perdure. Le Bureau de régie interne a adopté des règles limitant les dimensions de la salle et le nombre de personnes qui peuvent s'y trouver. Il y a des consignes sur la distanciation physique, et nous devons porter le masque en tout temps.
Sur ce, je demanderai à la ministre de nous présenter sa déclaration préliminaire. Il y aura ensuite une période de questions.
Je vous souhaite la bienvenue, madame la ministre…
:
Monsieur le président, honorables membres du Comité permanent de la défense nationale, je vous remercie de m'avoir invitée à venir témoigner aujourd'hui.
Les périodes d'incertitude favorisent souvent les plus grands changements. Je suis honorée qu'on m'ait confié ce rôle à un moment charnière de l'histoire de notre institution. Aujourd'hui, je vous donnerai donc un aperçu de nos principales priorités, telles qu'elles sont décrites dans ma lettre de mandat, ainsi que des efforts déployés par notre organisation pour nous mettre sur la voie du succès.
D'abord et avant tout, notre succès au pays et à l'étranger dépend de l'engagement et de la résilience de nos forces armées, qui doivent être en mesure de soutenir nos opérations régulières et d'intervenir en temps de crise.
[Français]
Les deux dernières années en ont démontré l'importance, alors que notre personnel continue de faire un travail incroyable dans le contexte d'une pandémie mondiale.
[Traduction]
L'année dernière, le général Eyre, chef d'état-major de la Défense, a annoncé la mise en œuvre d'un programme important de reconstitution à l'échelle de nos forces. Un des éléments clés de cette reconstitution est d'assurer que l'équipe de défense offre un milieu de travail où tout le monde se sent en sécurité, respecté et protégé.
[Français]
Cet objectif est une priorité absolue pour moi et pour l'ensemble des dirigeants de la Défense nationale. Il est véritablement déchirant de savoir que nos membres ont été blessés dans l'exercice de leurs fonctions. Nos membres, ainsi que l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes, méritent de travailler dans un environnement où règnent la dignité et le respect.
La création du groupe Chef — Conduite professionnelle et culture l'année dernière vient soutenir ces efforts.
[Traduction]
La CCPC dirige les réformes de changement de conduite et de culture si nécessaires à l'échelle de notre organisation. Son travail est parallèle et complémentaire à l'examen indépendant des politiques et de la culture de l'équipe de la Défense qui est mené par madame Arbour. Nous avons hâte de recevoir son rapport final plus tard cette année et de mettre en œuvre ses recommandations.
Il ne fait aucun doute que nous sommes actuellement confrontés à des défis importants — à des menaces tant nationales que mondiales. Cependant, l'institution chargée de défendre notre pays contre ces menaces est aussi confrontée à un défi fondamental. Depuis trop longtemps, beaucoup trop de membres de l'équipe de la Défense ont été victimes de harcèlement sexuel, d'agression sexuelle ou de discrimination fondée sur le sexe, le genre, l'identité de genre et l'orientation sexuelle. Je l'affirme encore une fois: les choses peuvent changer, elles doivent changer, et elles vont changer.
Je vous parlerai maintenant des missions internationales.
[Français]
Dans l'environnement opérationnel très complexe d'aujourd'hui, les compétences et le dévouement de notre personnel sont plus importants que jamais. Beaucoup de nos alliés et partenaires internationaux sont confrontés à des menaces très réelles d'acteurs étatiques qui cherchent à miner l'ordre international fondé sur des règles.
[Traduction]
Nous sommes tous préoccupés par les défis que la présence militaire accrue de la Russie à la frontière de l'Ukraine et dans les environs pose pour la sécurité et la souveraineté de l'Ukraine. Pendant mon récent voyage dans ce pays, j'ai vu les effets de cette menace sur nos amis ukrainiens.
Notre soutien demeure inébranlable. Depuis 2015, nous avons formé environ 33 000 membres des Forces de sécurité de l'Ukraine dans le cadre de l'opération Unifier. Nous venons de prolonger et d'élargir la portée de cette mission pour trois ans.
[Français]
Je suis heureuse d'avoir pu rencontrer le ministre de la Défense de l'Ukraine, Oleksii Reznikov. Nous allons travailler en étroite collaboration pour déterminer d'autres domaines dans lesquels le Canada peut offrir du soutien. Notre travail en Ukraine démontre que le Canada est toujours prêt à aider en temps de crise.
[Traduction]
Par toutes nos missions dans le monde, nous réaffirmons notre engagement envers la paix et la stabilité dans une période d'incertitude.
Parlons maintenant de nos missions au pays.
[Français]
Chez nous, au Canada, nous faisons également face à une demande d'aide militaire sans précédent. Dès le début de la pandémie, nos forces armées ont donné un coup de main aux communautés durement touchées et ont appuyé les efforts de vaccination à l'échelle du pays. Des milliers de membres de la Force régulière, de réservistes et de Rangers canadiens ont été mobilisés.
[Traduction]
Parallèlement à cela, nous avons été appelés à déployer du personnel en réponse à des catastrophes liées au climat, dont l'ampleur et la gravité ont augmenté au cours de la dernière décennie.
En outre, le Canada, ainsi que l'Amérique du Nord, est de plus en plus vulnérable à des menaces externes qui ne connaissent pas de frontières. Dans le contexte de l'évolution technologique rapide ainsi que de l'adoption largement accrue de technologies numériques au Canada et de la dépendance à l'égard de celles‑ci, l'expertise du gouvernement en matière de cybersécurité est essentielle.
[Français]
Le Centre de la sécurité des télécommunications a une réputation bien établie sur le plan de la défense du Canada. De concert avec nos forces armées, le CST joue un rôle essentiel dans le renforcement de nos défenses ici au pays.
[Traduction]
De plus, nous collaborons avec les États-Unis pour rehausser nos défenses continentales. Cela comprend de travailler ensemble pour moderniser le NORAD. Dans le cadre de ces efforts, nous améliorons la façon dont nous assurons la surveillance et la défense de la région de l'Arctique, ainsi que la manière dont nous y menons des opérations. D'ailleurs, la semaine dernière seulement, nous avons annoncé l'attribution d'un nouveau contrat de sept ans à Nasittuq, une société détenue majoritairement par des Inuits, visant l'entretien des 50 sites radar du Système d'alerte du Nord, au moment où nous explorons des options en vue de moderniser la surveillance dans l'Arctique.
Notre force de combat doit être prête à répondre en tout temps à des menaces très diverses, qui viennent de toutes les directions, en étroite collaboration avec nos plus proches alliés. Cela signifie d'avoir le bon nombre de personnes dans nos rangs. Il faut s'assurer que ces personnes soient incluses, respectées et mobilisées. Et cela signifie de leur donner le bon équipement et la bonne formation pour faire face à ces menaces.
Pour conclure, monsieur le président, nos forces sont à la croisée des chemins. Nous faisons face à une importante demande de soutien, tant au Canada qu'à travers le monde. Et nous faisons face à des menaces qui évoluent rapidement, des menaces qui risquent de dépasser notre capacité à nous défendre contre elles. Nos solutions doivent être axées sur les personnes.
[Français]
Nous avons besoin des bonnes personnes ayant la bonne formation et le bon équipement. Nous devons créer une culture qui favorise la santé et le bien-être de ces personnes qui exercent les fonctions cruciales que nous leur confions.
[Traduction]
Il y a beaucoup à faire, mais je suis convaincue qu'en travaillant ensemble, nous allons réaliser cette vision.
Merci. Meegwetch.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, madame la ministre. C'est fantastique de vous voir parmi nous.
Je n'ai pas besoin de vous dire, à vous qui venez de la Nouvelle-Écosse comme moi, que la BFC Shearwater se trouve dans ma circonscription de Dartmouth-Cole Harbour et que la BFC de Halifax se trouve juste de l'autre côté du port. Il y a beaucoup de membres des FAC et d'employés du MDN chez nous. De part et d'autre du port de Halifax, on est en train de construire des navires modernes pour la Marine royale canadienne. Je n'ai pas besoin de vous dire que la population de la Nouvelle-Écosse tire une grande fierté de ces incroyables chantiers navals.
Les investissements réalisés dans le cadre de la politique de défense du Canada, « Protection, Sécurité, Engagement », sont bien tangibles. Ils sont facilement perceptibles dans la circonscription de Dartmouth-Cole Harbour comme dans la circonscription de Halifax. Ils comptent énormément pour notre communauté. Je me réjouis à l'idée de travailler avec vous pour continuer à faire avancer nos projets, à nous améliorer et à faire ces investissements très importants dans la défense.
J'étais heureux de constater dans votre lettre de mandat un engagement à étendre l'Opération Reassurance en Europe de l'Est. Le NCSM Montréal, comme vous le savez, a récemment été déployé depuis Halifax pour participer à cette importante mission de l'OTAN. C'était également très bien de vous voir annoncer récemment l'élargissement de l'Opération Unifier.
Madame la ministre, j'aimerais vous parler de nos engagements envers l'OTAN, surtout dans le contexte du conflit entre la Russie et l'Ukraine. Vous en avez parlé un peu dans votre déclaration préliminaire. Les membres de l'OTAN, dont le Canada fait partie, augmentent-ils leur coopération pour protéger la stabilité de la région? Comment le Canada se démarque‑t‑il pour fournir un soutien accru à l'Ukraine en tant que membre de l'OTAN et ami très important de l'Ukraine?
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Avant de répondre à la question elle-même, permettez-moi de vous dire qu'en tant que fille de la Nouvelle-Écosse, je suis bien d'accord pour dire que nous pouvons tous être très fiers du travail réalisé en Nouvelle-Écosse, de même qu'au Québec, en Colombie-Britannique et ailleurs dans le monde pour concrétiser notre stratégie nationale de construction navale. Non seulement ce travail est‑il important pour garantir que la marine dispose de l'équipement dont elle a besoin pour servir les Canadiens, mais il crée des emplois de qualité et des retombées économiques dans les collectivités de tout le pays.
En ce qui concerne nos engagements envers l'OTAN, je peux dire sans équivoque que nous avons approfondi et que nous continuerons d'approfondir la coopération avec nos amis, nos alliés et nos partenaires pour assurer la stabilité dans la région. Le renforcement récent très inquiétant des forces russes à la frontière ukrainienne confirme l'importance des activités du Canada dans la région.
Nous avons prolongé et élargi l'Opération Unifier. Nous avons engagé 340 millions de dollars sur trois ans pour pouvoir continuer de former des soldats ukrainiens. Nous avons offert 120 millions de dollars en prêts et 50 millions de dollars en aide humanitaire. Ces mesures témoignent de notre engagement, non seulement envers l'Ukraine, mais envers la démocratie, la paix, la stabilité et la sécurité dans le monde occidental. C'est pourquoi nous avons approuvé des mesures supplémentaires pour continuer à protéger la souveraineté ukrainienne.
Vous avez mentionné l'alliance élargie de l'OTAN. Je tiens à réitérer notre engagement à l'égard de l'Opération Reassurance également, dans la région du flanc est de l'OTAN. Le Canada dirige en Lettonie un groupe tactique multinational d'intervention rapide composé d'environ 1 500 soldats représentant 10 pays alliés. Les soldats canadiens travaillent aux côtés de soldats de 10 de nos alliés de l'OTAN. L'Opération Reassurance est le plus grand engagement militaire du Canada, elle comprend le déploiement d'éléments terre, air et mer. Comme vous l'avez mentionné, nous avons également fourni deux frégates, de classe Halifax, qui ont pris la mer le 19 janvier pour aller rejoindre un groupe de la Force navale permanente de l'OTAN en eaux européennes. En outre, six CF‑18 Hornet sont déployés périodiquement à l'appui des activités renforcées de police aérienne de l'OTAN en Roumanie, le prochain déploiement étant prévu pour l'automne 2022.
Mon chef d'état-major de la Défense, Wayne Eyre, est avec moi. Il pourra ajouter tout ce qu'il voudra, si le député qui a posé la question le permet dès maintenant.
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C'est une question géniale, car ce que ma lettre de mandat me demande de faire, c'est de veiller à la diversité et à l'ouverture à toutes les personnes au sein des Forces armées canadiennes. Je pense que nos efforts de recrutement et de maintien de l'effectif doivent garantir que nous gardons la diversité et l'inclusion en tête de nos préoccupations à tout moment.
Chaque année, au sein de la Force régulière, nous avons besoin d'environ 7 000 membres pour atteindre l'objectif de disponibilité opérationnelle des Forces armées canadiennes. À cette fin, nous axons nos activités d'engagement dans tout le Canada sur la hausse de l'enrôlement des femmes en accordant la priorité aux candidates des collèges militaires et au mentorat des cadets, et en améliorant les congés pour soins et pour obligations familiales des femmes.
Quels seront les effets de ces efforts? Ils vont, espérons‑le, attirer un groupe plus diversifié de candidats dans les Forces armées canadiennes, de sorte que nous aurons de plus en plus de femmes et de personnes d'origines diverses qui graviront les échelons afin d'être qualifiées pour occuper des postes de direction au sein des Forces armées canadiennes.
C'est une de mes priorités. Chaque fois que je parle avec le chef d'état-major de la défense, Wayne Eyre, je mentionne ce point en raison de son importance, non seulement pour les Forces armées canadiennes, mais aussi pour la population canadienne dans son ensemble. Nos forces devraient refléter la diversité que nous voyons dans la population canadienne en général.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Oui, je vais partager mon temps avec M. Doherty.
Général Eyre, bienvenue. Je vous salue de Medicine Hat. Je sais que vous avez passé du temps ici.
J'ai deux questions pour vous, général.
Récemment, un membre des forces armées à la retraite m'a envoyé un courriel dans lequel il indiquait que lui et 300 autres membres de l'équipage avaient été déployés et qu'ils n'avaient pas reçu leur rémunération à risque au moment du déploiement à cause d'un retard dans les formalités administratives. À leur retour, on leur a dit que leur rémunération rétroactive était bloquée comme d'autres redressements de salaire et qu'il faudrait de 3 à 10 ans avant que la situation soit résolue.
Cette personne est déjà partie. Beaucoup vont partir, sans aucun doute en partie à cause de ces problèmes.
Qui va vérifier que tout le monde est payé correctement dans cette débâcle? Tout ce que je veux savoir, général, c'est si vous allez vous engager à résoudre les problèmes de rémunération à risque et d'arriérés de salaire dans les six prochains mois.
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Je suis conscient du peu de temps dont nous disposons. Je vais essayer d'être concis.
Je suis très préoccupé par ce qu'implique l'environnement de sécurité futur, car le Canada n'est plus aussi sûr qu'il l'a déjà été ou qu'il a déjà cru l'être. Je crois que les Forces armées canadiennes seront de plus en plus appelées à faire face aux menaces à la sécurité dans le monde et à protéger le Canada et les Canadiens ici au pays.
Quel est le plan à cet égard? Au cours de la pandémie, notre effectif a fondu. Notre état de préparation a reculé. L'été dernier, j'ai publié un plan de reconstitution des Forces armées canadiennes. Ce plan est axé sur la reconstitution de nos forces, mais pas de la même manière. Il vise à cibler les menaces auxquelles nous serons confrontés à l'avenir.
La première de trois priorités est la population. En tête de liste, nous devons changer les éléments néfastes d'exclusion de notre culture, nous attaquer à certains des véritables défis de notre société à l'heure actuelle — le coût du logement et le coût de la vie, qui comptent parmi les principaux facteurs d'insatisfaction que je constate lorsque je voyage dans le pays —, rebâtir nos forces et rétablir notre effectif.
En deuxième lieu, il y a les opérations — être prêts à répondre à la foule de points chauds que nous voyons dans le monde, aux demandes constantes d'intervention des Forces armées canadiennes.
La troisième priorité, enfin, est la modernisation. Nous ne pouvons pas détourner les yeux de l'avenir. Nous ne pouvons pas hypothéquer l'avenir pour payer le présent. Nous devons continuer de réaliser les projets qui relèvent de notre politique de défense et rester concentrés sur la défense continentale et sur ce que nous devons faire, en examinant la structure de nos forces et en changeant peut-être une partie de la structure qui est en place depuis 70 ans, depuis l'ère industrielle, et en la préparant mieux à l'ère de l'information.
Ce que cela signifie, cependant, c'est que nous devons également mettre en place les concepts. Vous avez parlé du cyberespace. C'est l'un des nouveaux domaines qui m'inquiète beaucoup. L'espace en est un autre. Nous devons mieux intégrer ces domaines — terre, air, mer, cyber, espace, information — pour avoir vraiment une approche globale, une approche intégrée, lorsque nous abordons les défis de l'avenir, car c'est exactement ce que font nos adversaires.
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Général Eyre et monsieur le sous-ministre, je vous remercie d'être ici d'aujourd'hui. Je tiens également à remercier les autres témoins.
J'aimerais d'abord préciser qu'il y a de nombreuses années, j'ai été réserviste dans les forces armées pendant environ cinq ans. Je vous suis reconnaissant d'être ici aujourd'hui.
J'aimerais poser une question quelque peu personnelle, car il s'agit de quelque chose que j'ai observé lorsque j'étais en uniforme. Cela concerne la formation à la sensibilité, ainsi que la diversité et l'inclusion. Cela concerne aussi des choses que j'ai déjà vues — pas personnellement, mais de façon générale.
Nous savons que l'inconduite sexuelle, le harcèlement et la discrimination ont fait l'objet de nombreuses discussions au sein des forces armées. La ministre a récemment déclaré que les choses peuvent changer, qu'elles doivent changer et qu'elles vont changer. J'aimerais donc vous demander à tous les deux, du point de vue du ministère et des forces armées, que font les forces armées pour faire respecter ce principe?
Général Eyre, pourriez-vous formuler quelques commentaires à cet égard, s'il vous plaît?
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Je pourrais parler d'une longue liste d'initiatives et d'activités que nous avons lancées. Il n'existe pas de solution miracle pour effectuer un changement de culture. Il faut mettre en œuvre un certain nombre d'initiatives de haut en bas et de bas en haut.
Je dirais qu'à la base, nous devons nous attaquer aux éléments de notre culture qui favorisent l'exclusion. Traditionnellement, nous étions un groupe homogène. Nous avons été recrutés dans un groupe homogène, mais le Canada est en train de changer et si nous souhaitons que nos forces armées demeurent pertinentes à l'avenir, elles doivent être en mesure d'attirer et de retenir des talents de tous les segments de la société canadienne.
Si l'efficacité opérationnelle dépend de la cohésion, la cohésion dépend du travail d'équipe. La façon dont nous constituons nos équipes doit changer. En effet, nous devons adopter une approche beaucoup plus inclusive en matière de leadership. Ce que je veux dire par là, c'est que nous ne pouvons pas utiliser une approche à l'emporte-pièce pour constituer des équipes. Les dirigeants, à tous les échelons, doivent comprendre les antécédents, les forces, les faiblesses et les besoins en matière de perfectionnement uniques de chaque membre, afin de les réunir en équipes qui fonctionnent. Chaque membre d'une équipe doit savoir qu'il se trouve dans une organisation où il a sa place, afin qu'il se sente suffisamment en sécurité sur le plan psychologique pour contribuer, communiquer ses idées et signaler les situations qui lui semblent inappropriées.
Nous avons commencé à opérationnaliser cette démarche. En effet, l'automne dernier, nous avons formulé une directive sur l'inclusion. Cette directive explique comment les principes d'inclusion seront mis en œuvre et évalués en aval de la chaîne. Nous modifions également notre formation en leadership à tous les échelons pour mettre davantage l'accent sur le volet humain, l'intelligence émotionnelle, la dynamique du pouvoir et l'inclusion.
Nous sommes sur le point de publier un éthos militaire révisé intitulé Servir avec honneur. Auparavant, nous mettions l'accent sur la compétence, qui reste très importante, mais maintenant, le caractère l'est encore plus. Le caractère doit venir en premier, et la compétence peut suivre par la suite. L'inclusion fait partie des nouvelles valeurs militaires que nous introduisons, car elle est très importante pour assurer notre efficacité opérationnelle à l'avenir, mais aussi parce que c'est la voie à suivre.
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Je vous remercie de votre question.
C'est également l'une de nos préoccupations. C'est l'une des raisons pour lesquelles, il y a plusieurs années, nous avons créé le Groupe de transition des Forces armées canadiennes, afin d'aider nos militaires à réintégrer la société canadienne lors de leur retour à la vie civile. Une partie de ce processus de transition consiste à travailler en étroite collaboration avec Anciens Combattants Canada pour veiller à ce que les renseignements médicaux pertinents soient transférés. Nous avons réalisé d'énormes progrès à cet égard au cours des dernières années. En fait, j'en parlais justement avec le sous-ministre des Anciens Combattants il y a deux semaines.
En ce qui concerne la proposition visant à utiliser le personnel des services de santé des Forces armées canadiennes pour continuer à traiter les anciens combattants, j'aimerais beaucoup la mettre en œuvre, mais il y a un problème de capacité à cet égard. En effet, à l'heure actuelle, le facteur limitatif d'un grand nombre de nos activités est tout simplement le manque de ressources médicales. Il s'agit donc, en ce moment, d'une question de ressources, ainsi que d'une question de champ d'application. La Loi canadienne sur la santé stipule clairement que les membres de la Force régulière profiteront d'une protection médicale au sein des services de santé des Forces armées canadiennes. Nous n'avons pas de politique pour couvrir cela non plus.
J'aimerais demander au sous-ministre s'il a d'autres renseignements à ce sujet.
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Je vous remercie, monsieur le président. Je vous remercie, madame Mathyssen, de votre question.
J'aimerais commencer par reconnaître et accepter sans réserve la préoccupation qui sous-tend la question et la proposition dans le projet de loi. C'est une préoccupation valable que nous devons prendre au sérieux.
Je pense qu'il est important, pour donner effet à notre intention de traiter cette question, d'atteindre un juste équilibre entre la réponse à cette préoccupation et l'assurance qu'une importante préoccupation disciplinaire continue d'être traitée, c'est‑à‑dire que la disposition vise une importante préoccupation opérationnelle et disciplinaire. Nous devons donc nous assurer que nous pouvons compter sur les membres des forces armées pour être prêts à servir lorsqu'ils sont appelés à le faire.
C'est une question d'équilibre. Cette disposition a été utilisée des centaines de fois pendant la Deuxième Guerre mondiale et elle a été utilisée à quelques reprises dans l'ère plus moderne. Nos alliés, tous ceux dont le système juridique est issu de la tradition anglo-saxonne, ont conservé cette disposition dans leur code de discipline militaire ou l'équivalent.
En ce qui concerne les mesures qui peuvent être prises à l'avenir, la proposition présentée au juge Fish était d'ajouter une note pour préciser l'intention du législateur, c'est‑à‑dire pour préciser l'intention du Parlement, à savoir qu'il ne s'agit pas d'une disposition qui vise les personnes qui, en raison d'une maladie mentale ou d'un trouble mental, tentent de se faire du mal. Nous pensons qu'il s'agit d'une façon appropriée d'établir un équilibre entre les préoccupations que vous soulevez, les préoccupations qui sont soulevées dans le projet de loi et les préoccupations opérationnelles.
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Je vous remercie beaucoup de cette question. C'est un problème très présent dans notre esprit. Le mandat du Centre de la sécurité des télécommunications concerne avant tout le cyberespace. Que nous y recueillions des renseignements étrangers ou contribuions à protéger les systèmes au titre de notre mandat de cybersécurité, c'est notre raison d'être. Cet élément de la lettre de mandat de la ministre est donc très important à nos yeux.
Comme vous l'avez souligné, les méthodes sont de plus en plus nombreuses, variées et raffinées. Nous devons examiner attentivement ce que le Canada devra faire pour contrer ces menaces. Nous avons décidé qu'une approche faisant intervenir l'ensemble de la société serait plus appropriée ici. Dans une telle approche, le gouvernement joue un rôle précis, agissant notamment à titre de chef de file.
Par exemple, quand il faut défendre les systèmes du gouvernement, nous avons amalgamé l'expertise en cybersécurité de l'échelon fédéral avec celle du Centre de la sécurité des télécommunications dans le cybercentre, fournissant des renseignements sur les cybermenaces dans le cadre de notre mandat en matière de renseignement étranger. En outre, une nouvelle loi nous autorise à mener des cyberopérations à l'étranger pour contribuer à atténuer certaines menaces avant qu'elles ne se matérialisent au Canada.
Le Centre de la sécurité des télécommunications ne fait pas cavalier seul. C'est tout un sport d'équipe à l'échelon fédéral. Nous nous efforçons de faire profiter à la population d'une partie de notre avantage concurrentiel dans le cadre de nos mandats fédéraux. Nous effectuons plus d'évaluations de la menace publique qui s'appuient réellement sur les informations que nous recueillons grâce à notre mandat en matière de renseignement. Nous fournissons publiquement des conseils, de l'orientation et des indicateurs techniques, mais nous passons également par des voies sécurisées et spéciales pour joindre les propriétaires et les défenseurs d'infrastructures essentielles pour qu'ils aient l'information dont ils ont besoin.
Nous fournissons des outils que nous mettons au point dans le cadre de notre mandat, les rendant publics pour que les Canadiens et d'autres personnes puissent les utiliser. Nous communiquons aussi des renseignements sur les menaces à d'autres organisations, comme l'Autorité canadienne pour les enregistrements Internet, qui tient le registre canadien des noms de domaine. Cela lui permet de relayer ces renseigments aux Canadiens au moyen d'applications qu'elle conçoit, comme le Bouclier canadien. Nous éliminons également des domaines frauduleux appartenant prétendument du gouvernement du Canada. Au cours des deux dernières années, nous avons mis hors service environ 10 000 sites semblables en collaboration avec des partenaires de l'industrie.
Je vous rappellerai que la lettre de mandat de la ministre demande que nous veillions à ce que le Centre de la sécurité des télécommunications soit en mesure de continuer de diriger la réaction du Canada aux cyberisques en perpétuelle évolution. Ces risques sont sans contredit dynamiques et évolutifs à l'heure actuelle. Nous continuerons de collaborer avec les secteurs des infrastructures essentielles et les diverses autorités, comme les provinces, les territoires et les municipalités, afin d'examiner nos renseignements avec elles. Nous travaillerons avec la ministre et son équipe pour appliquer la lettre de mandat et examiner les ressources du Centre de la sécurité des télécommunications.
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Merci, monsieur le président.
Avant de poser ma question, je veux remercier encore une fois les témoins de s'être rendus disponibles.
Je vais poser une seule question, qui comportera deux volets. Je vous invite à prendre tout le temps que vous aurez à votre disposition pour y répondre.
On a souvent entendu dire que les mutations étaient un frein au recrutement et à la rétention des employés.
J'aimerais savoir, d'une part, quelles mesures sont prises pour diminuer le nombre de mutations considérées non nécessaires et, d'autre part, ce qui est fait pour mieux accompagner les familles plus adéquatement lorsque ces mutations sont nécessaires. C'est souvent pour les familles que cette situation est la plus difficile.
Pourriez-vous me répondre en deux temps, s'il vous plaît?
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Elle devra l'ajouter autrement.
Puisque le temps de Mme Gallant est écoulé, je vais poser les questions pendant les cinq dernières minutes.
Mme Gallant a posé une question légitime, mais je veux demander... Ce comité effectue une analyse des menaces. C'est un point de référence. Nous commençons à nous pencher là‑dessus. À l'heure actuelle, il est clair comme de l'eau de roche que le risque de menace est élevé. Vous connaissez les menaces mieux que nous.
Les menaces sont littéralement omniprésentes dans le monde entier, et les principaux acteurs sont la Russie et la Chine. Je considère la Chine comme étant une menace existentielle à ce pays. Je ne considère pas la Russie comme étant une menace existentielle au même titre. L'armée se concentre probablement beaucoup plus — peut-être pas beaucoup plus, mais elle se concentre certainement — sur la menace russe, qui se fait sentir dans l'Arctique. Si vous regardez une carte de l'Arctique, vous pouvez voir la militarisation de l'Arctique de façon marquée du point de vue des Russes.
Mme Mathyssen est revenue sur un point à propos de l'état de préparation de l'équipement, et je pense que les chiffres se situaient entre 55 et 60 % pour l'aérospatiale. J'ai oublié quels étaient les chiffres pour l'équipement terrestre et maritime, mais ils étaient inférieurs aux normes auxquelles on peut raisonnablement s'attendre. Qu'il s'agisse de normes ambitieuses ou non, les chiffres sont certainement bien inférieurs à ce que n'importe lequel d'entre nous aimerait voir.
Vous êtes aux prises avec une menace croissante et une capacité de réagir à la menace qui est en baisse. Je suis certain que cela vous empêche de dormir parfois la nuit. J'aimerais savoir comment vous comptez amener rapidement l'armée, dans tous ses aspects, à prendre les devants de la menace sans cesse croissante que nous observons à ce comité.
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Oui, vous avez posé une question qui me tient éveillé la nuit, car ces menaces sont réelles et notre capacité d'y répondre est mise au défi en raison des problèmes liés à notre état de préparation, au niveau de l'équipement et des chiffres. La reconstitution des Forces armées canadiennes dont j'ai parlé plus tôt sera fondamentale pour atteindre les niveaux de préparation à l'avenir: reconstituer notre effectif avec les groupes professionnels appropriés et la culture appropriée, mettre l'accent sur les opérations et les concepts opérationnels qui doivent être mis en place et travailler avec les alliés.
L'une des choses que je n'ai pas mentionnées auparavant concernant la reconstitution est le rétablissement de nos relations avec nos alliés. Je crois fermement que l'un de nos avantages concurrentiels est que nous faisons partie d'un système constitué d'alliés et de partenaires aux vues similaires avec qui nous pouvons travailler.
Enfin, il y a le volet de la modernisation: continuer d'investir pour embaucher le personnel approprié dans le cadre de nos projets de modernisation, acheter l'équipement nécessaire, veiller à ce que nous puissions procéder à cet approvisionnement et avoir la structure de forces appropriée. À mesure que nous sommes confrontés à des menaces croissantes à notre continent, le groupe chargé de la modernisation de la défense continentale — le NORAD — sera absolument essentiel également. Nous devrons avoir l'infrastructure que nous pourrons exploiter dans le Grand Nord pour pouvoir déployer des capacités là‑bas.
Vous avez tout à fait raison à propos de ce que la Russie a fait. Les Russes ont occupé de nombreuses bases de la guerre froide antérieurement fermées, en ont ouvert d'autres et ont mis en place ce qu'on appelle un IAZ, une stratégie d'interdiction d'accès et de zone, ce qui leur donne essentiellement un contrôle ferme sur leur partie de l'océan Arctique. C'est très semblable à ce que la Chine a fait dans la mer de Chine du Sud.
Nous devons examiner la situation, et nous sommes en train d'élaborer les concepts pour établir comment nous pouvons améliorer nos opérations et mieux déployer nos forces aux extrémités de notre pays. C'est une approche à facettes multiples, et c'est une longue réponse à une question très complexe.
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Merci, monsieur le président.
Je soulignerais que le CST et les FAC ont un partenariat de longue date de près de huit décennies de collaboration.
Les autorités en cybernétique des FAC ont été énoncées dans la politique « Protection, sécurité, engagement », et les pouvoirs du CST sont énoncés dans la Loi sur le CST. Nous avons un mandat national clair pour protéger les systèmes et les renseignements les plus importants du Canada et mener des cyberopérations également, dans le respect de certains paramètres. Nous avons également un nouveau pouvoir pour aider les FAC en offrant du soutien technique et opérationnel.
Nous travaillons depuis quelques années avec les équipes du général Eyre pour veiller à ce que nous puissions mettre sur pied les processus, les équipes et les capacités qui tiennent compte de nos pouvoirs lorsqu'ils se réunissent et s'assurent que la gouvernance est en place. Ces travaux sont bien amorcés.
Reste‑t‑il du travail à faire? Oui, mais je pense que c'est un cas de réussite pour l'instant. Nous croyons que les autorités combinées nous donneront les capacités voulues pour naviguer dans le spectre le plus complet possible des cyberopérations.
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Merci, madame Bruce, de cette réponse.
Au nom du Comité, je veux remercier Mme Bruce, le général Eyre, le colonel Holman et M. Matthew des deux heures qu'ils nous ont consacrées. Nous avons eu un bon échange, parfois en peu acrimonieux, mais c'était tout de même un bon échange.
Nous avons hâte à vos prochaines comparutions devant le Comité à l'avenir. Si vous souhaitez vous adresser au Comité sur un dossier pour lequel il ne vous a pas convoqués, n'hésitez pas à communiquer avec le greffier ou moi.
Sur ce, nous allons mettre fin à la réunion.
Nous avons hâte de nous réunir à nouveau le 14 février. Pour l'instant, chers collègues, la présence de M. Rasiulis, de M. Colby et de Christian Leuprecht est confirmée, et on attend la confirmation d'un ou deux autres témoins. Le 16, nous recevrons M. Kolga, M. Fadden, M. Hampson et M. Paul Taillon. Ces témoins comparaîtront aux deux prochaines réunions sur l'analyse des menaces.
Sur ce, la séance est levée.