Passer au contenu

NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 070 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 26 septembre 2023

[Enregistrement électronique]

(1620)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Je constate que nous avons le quorum. Je m'excuse auprès de nos témoins, mais les événements d'aujourd'hui étaient extraordinaires.
    J'ai besoin de vos lumières. Nous n'avons la salle que jusqu'à 18 heures, ce qui nous donnerait une heure et 40 minutes. Voulez-vous que je répartisse le temps également entre le premier et le deuxième groupe de témoins? Une heure et 40 minutes, cela donne 50 minutes chacun.
    Nous allons nous lancer pour 50 minutes, après quoi nous changerons rapidement de groupe de témoins.
    Nous allons consacrer 50 minutes au témoignage de M. Fadden...
    De plus, nous devrions nous en tenir à cinq minutes pour toutes les questions.
    Nous pouvons effectivement en soustraire une minute.
    Nous avons un témoin pour la première heure et trois pour la deuxième.
    Oui, je sais, mais le temps, c'est le temps.
    Commençons par 50 minutes. Je vais retrancher une minute à la première série de questions.
    Allez‑y, monsieur Cumming.
    Il y a une autre option, étant donné qu'il y a quelques autres témoins présents dans la salle. Pourquoi ne pas faire témoigner tous les témoins en même temps et avoir une heure complète?
    L'un de nos témoins n'est pas en ligne.
    Je peux voir s'il est prêt.
    Mesdames et messieurs, nous improvisons. Voulez-vous que nous siégions jusqu'à 18 heures avec les quatre témoins?
    Oui.
    Nous devons donc faire des tests.
    Pouvons-nous commencer par entendre le témoin déjà présent et...
    Il est préférable de faire d'abord les tests, n'est‑ce pas?
    Oui.
    Allons‑y, alors. Faisons 50 et 50, parce que cela prendra trop de temps s'ils ne sont pas en ligne. Sont-ils en ligne?
    Oui, ils sont en ligne.
    D'accord, alors faites‑les, rapidement.
    Pouvez-vous suspendre la séance?
    La séance est suspendue.
(1620)

(1625)
    La séance reprend. Nous entendrons tout un groupe de Richard.
    Je vais d'abord donner la parole à M. Fadden pour sa déclaration de cinq minutes, puis je la donnerai à chacun des autres témoins à tour de rôle, en terminant par M. Jaramillo.
    Sur ce, monsieur Fadden, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Au nom des Richard de ce monde, je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de parler d'un dossier auquel je travaille depuis de nombreuses années, mais qui, je dois l'admettre, n'a jamais connu beaucoup de succès. Dans une certaine mesure, notre incapacité d'apporter des améliorations à l'approvisionnement en matière de défense m'a amené à réfléchir à ces défis. J'ai quelques idées d'améliorations limitées à l'esprit, et ce sont les réflexions que j'espère vous transmettre aujourd'hui. J'espère qu'elles seront utiles.
    Avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à faire deux grandes observations générales. Premièrement, j'ai travaillé sous le règne de gouvernements conservateurs et libéraux, et je suis convaincu que mes propos s'appliquent aux deux périodes. Deuxièmement, il n'y a pas de solution miracle à ce problème aux multiples facettes. Au fil des ans, j'ai pu étudier l'expérience de nos alliés en matière d'approvisionnement de la défense et en discuter, et partout, il y a des niveaux de complexité qui présentent des similarités avec les nôtres.
    Je crois qu'il y a trois groupes principalement responsables de l'approvisionnement en matière de défense: les politiciens, les fonctionnaires et l'industrie de la défense. Je vais me concentrer sur les deux premiers, un à la fois.
    Les politiciens, à juste titre, se fixent un certain nombre d'objectifs pangouvernementaux à atteindre. Chaque objectif à lui seul peut être tout à fait approprié et raisonnable, cependant, c'est quand ces objectifs entrent en conflit les uns avec les autres qu'il y a problème. Dans le domaine de l'approvisionnement de la défense, les acquisitions militaires peuvent entrer en conflit avec divers autres objectifs, y compris les objectifs industriels, de développement régional et d'innovation. Ces objectifs sont ensuite bureaucratisés par la fonction publique, ce qui ajoute une complexité considérable pour toutes les parties concernées, y compris le secteur privé. Au fil du temps, tout cela contribue à une culture qui, en soi, devient très problématique. J'en dirai plus à ce sujet dans un instant.
    Je ne dis pas qu'il ne faut pas tenir compte de ces objectifs dans le contexte de l'approvisionnement en matière de défense. Il faudrait plutôt que les incidences de chacun soient détaillées et rendues publiques afin qu'on puisse porter un jugement sur le juste équilibre à trouver entre les différents objectifs. De plus, dans certaines circonstances, pas systématiquement, mais pas rarement non plus, la fonction publique devrait être en mesure de recommander que l'atteinte de certains objectifs précis soit suspendue, et le gouvernement devrait l'accepter. Il devrait ainsi pouvoir suspendre certains objectifs pour favoriser des acquisitions urgentes en matière de défense, sous réserve d'approbation du Parlement et de l'appui des médias, qui constituent peut-être un autre domaine où un changement de culture serait nécessaire.
    En ce qui concerne la fonction publique, la crainte de la réaction des ministres, de la Chambre et des médias pousse les fonctionnaires à suivre les règles à la lettre et à être très réfractaires aux risques. Je dirais que c'est devenu la culture dominante parmi les fonctionnaires ayant quelque rôle à jouer dans l'approvisionnement en matière de défense. La façon dont la Loi fédérale sur la responsabilité s'applique n'aide pas non plus.
    Je ne préconise pas des mesures irresponsables, mais plutôt l'acceptation d'une certaine part de risque et de la possibilité de faire une erreur pour favoriser des acquisitions plus efficaces. Concrètement, cela pourrait signifier un environnement dans lequel il est possible de demander des exceptions aux règles en faveur d'arrangements spéciaux, sans que cela ne nuise à la carrière. En voici un exemple simple: la fonction publique est devenue extrêmement réticente à prendre des mesures qui prêtent le flanc à des litiges, même si l'histoire montre que le gouvernement obtient gain de cause dans la plupart de ses litiges. Il y a une résistance réelle, et on ne fait que paralyser les choses par crainte de poursuites.
    Il y a un autre problème qui touche à la fois les ministres et les fonctionnaires, c'est le principe selon lequel les règles régissant l'approvisionnement en matière de défense s'appliquent en tout temps, peu importe la taille ou la complexité des acquisitions. Je sais que je généralise ici, mais je crois que cette approche devrait être développée davantage. Par exemple, on pourrait élargir les pouvoirs de délégation et assouplir les règles lorsque les acquisitions arrivent et qu'elles ne sont pas particulièrement complexes ou qu'elles ne nécessitent pas d'énormes investissements.
    Il y a ensuite tout le débat sur l'organisation et le mandat appropriés des ministères et des organismes qui participent à l'approvisionnement en matière de défense. Quand on regarde nos alliés, il est clair qu'il n'y a pas de modèle parfait. Quel que soit le modèle choisi, il me semble qu'il doit tenir compte du contexte politique, juridique et culturel. À mon avis, il serait très problématique de changer notre appareil actuel, qui fait intervenir un très grand nombre de ministères et d'organismes, sans régler les divers problèmes et défis qui entourent l'approvisionnement en matière de défense.
    Pour conclure, dans la mesure où les points que j'ai soulevés sont jugés pertinents, je dirais qu'ils doivent être pris ensemble si l'on veut véritablement améliorer l'approvisionnement en matière de défense. Comme ces questions touchent plusieurs ministères, ainsi que l'appareil juridique et réglementaire au complet, on ne peut réussir dans cette entreprise que si ces réformes ont l'aval du premier ministre. Un ministre, un ministère ne pourra pas à lui seul apporter de changements en profondeur ici. Il faut que ce soit un exercice pangouvernemental. Enfin, les questions culturelles peuvent être aussi importantes que les questions de fond.
(1630)
    Monsieur Foster, vous avez cinq minutes.
    Mesdames et messieurs, je travaille dans l'industrie depuis sept ans. Même si je crois fermement à la concurrence, je suis également très favorable à l'obtention du bon équipement pour nos Forces armées canadiennes en tenant compte du calendrier de livraison, de la période d'exécution, de la capacité liée à l'interopérabilité, des coûts et, bien sûr, de la pérennité et de la souveraineté. Nous ne sommes pas différents du gouvernement à cet égard. Le succès de notre entreprise dépend beaucoup des mêmes résultats escomptés.
    Le PDG de notre entreprise déteste les programmes « rouges » probablement encore plus que le gouvernement. Le Canada a l'un des processus d'approvisionnement les plus complexes, qui coûte cher en temps et en argent. La situation géopolitique exigera un approvisionnement plus rapide et plus efficace pour que les Forces armées canadiennes demeurent pertinentes sur le plan opérationnel.
    Face à une pénurie de personnel, les forces armées devraient travailler en plus étroite collaboration avec l'industrie et modifier certains des concepts par défaut dans le cadre des processus d'approvisionnement et de soutien en service.
    Nos recommandations sont les suivantes.
    Éviter les programmes de développement à prix fixe des entreprises à risque élevé. De par leur nature même, les programmes de développement feront face à des inconnues en ce qui concerne le coût total requis pour développer une capacité. Il y a beaucoup de programmes américains de développement qui nécessitent des années d'élaboration et qui engendrent des coûts importants. Des applications techniques exceptionnelles payées par l'équipementier d'un client de lancement ne sont pas toujours bon marché et ne sont pas toujours de bon augure pour l'échéancier, le coût ou le risque. Le Canada doit mieux comprendre le niveau de risque associé aux programmes de développement auxquels il participe et planifier en conséquence, tant sur le plan des coûts que du calendrier.
    Les programmes devraient faire l'objet d'un appel d'offres lorsque c'est nécessaire, et non pas pour le plaisir de favoriser la concurrence. La concurrence est saine et devrait aller de soi lorsque deux produits ou capacités constituent des offres comparables. S'il n'y a qu'un seul produit ou une seule capacité qui répond aux exigences des FAC et que le Canada n'est pas prêt à financer adéquatement un programme de développement associé à une autre offre en vue de créer de la concurrence, alors il ne devrait pas y avoir d'appel d'offres. De même, les véritables exigences du Canada ne devraient pas être édulcorées pour forcer la tenue d'un appel d'offres. Au bout du compte, cela mine la capacité des FAC. Ces principes devraient s'appliquer à la fois à l'acquisition de produits et au soutien en service.
    En ce qui a trait aux solutions éprouvées qui sont disponibles sur le marché, le client de lancement a investi dans la solution aux fins de sa mise au point, et, dans bien des cas, la solution a fait l'objet d'un appel d'offres. Le Canada devrait tirer avantage de ces solutions pour éviter des retards et des coûts.
    Les industries canadiennes devraient être encore plus intégrées que jamais dans la chaîne d'approvisionnement nord-américaine dirigée par les États-Unis. Par exemple, le projet de radar transhorizon devrait être une solution américaine et canadienne pour le NORAD créée par une industrie transfrontalière et intégrée. Les États-Unis élaborent des programmes en spirale pour investir dans la mise au point de capacités futures dans les domaines des logiciels radio, de l'équipement de vision nocturne et des systèmes de commandement et de contrôle. Un exemple est le projet Convergence, qui est axé sur les logiciels, le commandement et le contrôle. Le Canada devrait délibérément établir des partenariats, investir dans ces concepts et mieux intégrer notre chaîne d'approvisionnement dans la solution élaborée. Le Canada devrait inciter les entreprises à investir au pays afin qu'elles puissent mieux s'intégrer à la chaîne d'approvisionnement.
    Les investissements en recherche et développement au Canada devraient être plus ciblés et à plus long terme et ils devraient soutenir les capacités qui ont les meilleures chances de réussir dans un marché mondial concurrentiel.
    Le succès en matière d'exportation des caméras de la série MX de WESCAM a commencé il y a plus de 50 ans grâce à la recherche et au développement menés par le gouvernement et l'industrie. Un engagement à plus long terme au sein de l'industrie et du gouvernement est nécessaire pour que le Canada demeure concurrentiel.
    Le Canada contribue relativement peu à la mise au point d'équipement militaire. Le fait de collaborer avec l'industrie pour cerner les domaines dans lesquels le Canada est vraiment concurrentiel et d'investir de façon appropriée permettrait à notre pays de mieux se positionner sur le marché mondial.
    Le Canada devrait mieux développer et soutenir ses capacités de soutien en service au pays, y compris le soutien technique, pour assurer la disponibilité opérationnelle. Au fil des ans, pour des raisons politiques et opérationnelles, des centres d'excellence du soutien en service ont été créés au Canada. Cet investissement passé devrait continuer à être mis à profit. Le Canada devrait envisager des investissements à plus long terme pour maintenir ses centres d'excellence afin d'assurer sa souveraineté opérationnelle et d'accroître ses capacités en matière de génie. Relancer des appels d'offres pour ces capacités par défaut plutôt que par nécessité coûte cher. Cela perturbe et dégrade le soutien à la disponibilité opérationnelle pendant plusieurs années durant ce processus.
    Les Forces armées canadiennes ont un problème de capacité du personnel auquel elles n'ont pas de solution à court terme. Par conséquent, le Canada devrait intégrer davantage les services de soutien de l'industrie dans ses plans de disponibilité opérationnelle afin de s'assurer qu'il peut respecter ses obligations en matière de défense au pays et à l'étranger.
    En conclusion, veiller à ce que les forces armées du Canada demeurent pertinentes sur le plan opérationnel impliquera une perturbation de nos processus d'approvisionnement actuels et de nos façons de penser. L'industrie est prête à donner un coup de main.
(1635)
    Merci.
    Merci, monsieur Foster.
    Allez‑y, monsieur Shimooka. Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie de me permettre de m'adresser au Comité aujourd'hui.
    Je vais concentrer mes remarques sur l'approvisionnement en matière de défense dans le passé, le présent et l'avenir.
    En rétrospective, l'une des périodes les plus difficiles de l'histoire récente des Forces armées canadiennes a été la fin des années 1970 et le début des années 1980. Les gouvernements qui se sont succédé ont réduit le budget militaire, diminué les effectifs et réorienté les forces, tout en retardant la modernisation. En 1980, les Forces canadiennes ont été confrontées à l'obsolescence face aux avancées importantes des forces armées du Pacte de Varsovie.
    Même si la diminution des effectifs a réduit les forces permanentes de l'armée, celle‑ci a conservé un système administratif compétent doté d'une mémoire institutionnelle suffisante pour exécuter les nouveaux programmes. En 1990, l'armée avait remplacé plusieurs de ses capacités clés par les CP‑140, les CF‑18 et les Leopard 1, alors que d'autres, comme les frégates de la classe Halifax et le Système d'alerte du Nord, étaient sur le point d'être déployées.
    À première vue, la situation actuelle du Canada ressemble à celle des années 1980 et pourrait même sembler être sur la même trajectoire si la politique « Protection, Sécurité, Engagement » de 2017 avait été mise en œuvre comme prévu. Malheureusement, la réalité est bien pire aujourd'hui qu'elle ne l'était à l'époque.
    Bon nombre des systèmes que nous avons acquis dans les années 1980 ont largement dépassé leur date de péremption et il n'est pas prévu de les remplacer avant une décennie ou plus en raison de l'échec de l'exécution des programmes. Bien que les dépenses en matière de défense aient augmenté au cours des huit dernières années, une grande partie a été consacrée aux comptes opérationnels en raison d'engagements internationaux croissants. Cela a masqué l'état de plus en plus délabré du capital de base de l'armée.
    Autrement dit, notre système d'approvisionnement est fondamentalement défaillant. Les livraisons de capacités majeures peuvent maintenant se compter en décennies, alors que les années devraient être la norme. Le système d'aéronef télépiloté, qui fournira un véhicule aérien sans pilote de moyenne altitude, est sur le point d'entrer dans sa 17e année d'existence sans avoir offert de plateforme. À titre de comparaison, bon nombre de nos alliés, comme le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France, ont mis en service des systèmes équivalents en moins de quatre ans.
    Ces échecs se sont produits à un moment inopportun, car l'environnement de sécurité international s'est détérioré rapidement à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine et des efforts déstabilisateurs de la Chine dans l'Indo-Pacifique. Nos alliés ont augmenté leurs dépenses et lancé une vaste modernisation de leurs forces, tandis que les efforts du Canada semblent être au point mort en comparaison.
    Bref, le système d'acquisition s'éloigne fondamentalement de l'objectif de livrer des biens de défense essentiels à nos soldats. Au cours des quatre dernières décennies, il est devenu progressivement plus lent et moins en mesure de répondre à nos besoins en matière de défense nationale, et ce, pour plusieurs raisons.
    La première a été la hausse des objectifs non liés à la défense dans le cadre de l'approvisionnement, notamment pour offrir des avantages économiques et sociaux à la société canadienne grâce à certains achats. Deuxièmement, un certain nombre de lacunes perçues, comme l'annulation initiale de l'achat des F‑35 en 2012, ont donné lieu à des réformes inconsidérées. Elles ont ajouté des étapes inutiles, diluant la responsabilité individuelle et augmentant les coûts et les retards dans les programmes.
    Même si notre situation actuelle est sous-optimale, la véritable source de préoccupation ce sont les Forces armées canadiennes de l'avenir qui, en réalité, existent déjà. Compte tenu de l'évolution rapide et fondamentale de nos sociétés en raison de la confluence des nouvelles technologies, la guerre est en train de subir un changement semblable. Ce que j'ai décrit plus tôt, c'est une approche du XXe siècle en matière de guerre et d'approvisionnement. Le Canada doit entrer dans le XXIe siècle.
    Une considération fondamentale est la stratégie relative à la dominance de l'information. Aux États-Unis, elle existe dans le cadre du commandement et contrôle tous les domaines interarmées, le C2TDI. Cette doctrine vise à agréger et à intégrer l'information de tous les capteurs disponibles, à l'analyser et à la diffuser à toutes les unités qui peuvent agir. Les principaux alliés du Canada, dont l'Australie, l'Allemagne et le Royaume-Uni, mettent en œuvre des approches semblables, qui ont eu un impact considérable sur les structures et doctrines de leurs forces au sein de tous les services. Précisément, la connectivité et l'intégration d'une plateforme aux réseaux et aux systèmes de commandement et de contrôle existants sont souvent aussi importantes que ses attributs physiques.
    Le Canada ne s'est pas adapté à cette nouvelle réalité. Bien que dans la politique « Protection, Sécurité, Engagement », on reconnaît l'utilité du renseignement, de la surveillance et de la reconnaissance interarmées sur le champ de bataille, les Forces armées canadiennes ont pris beaucoup de retard par rapport à leurs alliés dans ce domaine. Par exemple, en ce qui concerne le système d'aéronef télépiloté, l'approvisionnement a été largement axé sur les capacités physiques, mais on a accordé une attention minimale à la manière dont la plateforme fonctionnerait dans un environnement réseauté plus vaste. C'est comme si on achetait un téléphone intelligent haut de gamme et qu'on ne s'en servait que pour faire des appels téléphoniques.
(1640)
    À bien des égards, lorsqu'il sera effectué, ce virage sera déterminant pour le ministère et le gouvernement. Il aura des répercussions profondes à grande échelle qui toucheront non seulement les opérations militaires, mais aussi nos méthodes d'approvisionnement pour les systèmes. Dans le cas de certains systèmes, comme le logiciel sur les capacités navales, notre façon de l'employer aura une incidence directe sur son utilité militaire. Il faut des méthodes d'approvisionnement souples et novatrices pour fournir rapidement des capacités à nos soldats afin de contrer les nouvelles menaces.
    Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé aujourd'hui. J'ai hâte d'entendre vos questions et vos commentaires.
    Je vous remercie.
    Notre dernier témoin est M. Jaramillo. Vous avez cinq minutes, je vous prie.
    Bonjour, monsieur le président. Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser au Comité. Je témoigne au nom de Project Ploughshares, une organisation canadienne qui se consacre aux questions du contrôle des armements, du désarmement, de la politique étrangère canadienne et de la sécurité internationale depuis près de cinq décennies.
    Même si Project Ploughshares ne s'attarde pas aux détails des processus d'approvisionnement, j'aimerais attirer votre attention sur plusieurs volets prépondérants qui méritent d'être pris en considération lorsqu'il est question de l'impact des processus d'approvisionnement sur l'avenir des Forces armées canadiennes.
    Avant tout, je tiens à préciser que rien dans mes propos ne remet en question le besoin indéniable de préparer efficacement les Forces armées canadiennes. Nos militaires ont principalement pour rôle de protéger les Canadiens et de contribuer à l'atteinte d'objectifs constructifs et rigoureux en matière de politique étrangère qui assurent la sécurité collective. Project Ploughshares appuie pleinement cette mission.
    Examinons certains facteurs déterminants qui ont une incidence directe ou indirecte sur les discussions et les décisions en matière d'approvisionnement.
    Le premier est l'évolution constante du contexte de sécurité et le besoin d'avoir une orientation stratégique claire et pertinente. Le monde est en constante transformation. Les technologies émergentes, les défis environnementaux et les menaces en constante évolution sont en train de refaçonner le concept même de la sécurité. Dans nos discussions sur les processus d'approvisionnement au chapitre de la défense, il est impératif d'établir sans tarder une orientation stratégique claire afin de déterminer les prochaines priorités des Forces armées canadiennes. Même si la politique de défense du Canada a été publiée il y a six ans déjà, soit en 2017, dans le document Protection, Sécurité, Engagement, l'évolution rapide de l'environnement de sécurité nécessite une adaptation continuelle.
    Nos forces armées doivent être conscientes que leur rôle évolue pour répondre aux nouveaux enjeux, puis ajuster leurs décisions d'approvisionnement en conséquence. Sans une vision claire du rôle des Forces armées canadiennes dans la réponse aux défis d'aujourd'hui et de demain, les processus d'approvisionnement risquent d'être davantage motivés par le lobbying de l'industrie que par les besoins réels des militaires, ce qui entraînera des coûts supérieurs, mais aussi des solutions moins efficaces.
    Le deuxième volet se rapporte à l'augmentation des dépenses militaires et aux répercussions à l'échelle mondiale. La trajectoire d'augmentation des dépenses militaires et la croissance rapide et soutenue de l'industrie de l'armement posent des défis complexes. Même si les dépenses dans la sécurité sont essentielles, une croissance rapide des dépenses d'approvisionnement militaire pourrait, par inadvertance, créer une industrie militaire plus vaste, ce qui peut avoir une énorme influence sur des décisions déterminantes en matière de politique étrangère et d'approvisionnement au Canada. Nous devons donc examiner d'un œil critique les répercussions de cette tendance, pour assurer non seulement la sécurité nationale, mais aussi la stabilité mondiale. Une flambée des dépenses militaires, tant au pays qu'à l'étranger, peut contribuer à une course mondiale aux armements, à une hausse des tensions, et possiblement à un risque accru de conflit.
    Troisièmement, des idées fausses circulent au sujet des objectifs de l'OTAN en matière de dépenses militaires fondées sur le PIB. Allons au‑delà des décisions d'approvisionnement précises, sans nier la nécessité de corriger les lacunes structurelles des processus d'approvisionnement. Il faut souligner que les perceptions selon lesquelles le Canada ne dépenserait pas suffisamment en défense sont trompeuses et méritent un examen plus approfondi. En effet, elles reposent souvent sur la mesure arbitraire des dépenses militaires en tant que pourcentage du PIB. Cela vaut pour les dépenses de défense du Canada prises isolément et comparativement à celles de ses alliés de l'OTAN.
    Même avant le conflit en Ukraine, les dépenses de défense du Canada s'élevaient à plus de 26 milliards de dollars américains en 2021, ce qui en fait le sixième contributeur en importance parmi les membres de l'OTAN. Autrement dit, le Canada faisait partie des 20 % des pays de l'OTAN qui consacrent le plus d'argent au domaine militaire. À l'échelle mondiale, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, le Canada s'est classé au 14e rang mondial au chapitre des dépenses militaires l'an dernier, de sorte qu'il fait assurément partie de la tranche supérieure de 10 % à ce chapitre.
    En quatrième lieu, il faut maintenir un équilibre entre une industrie de la défense saine et des exportations d'armes responsables. Même s'il faut absolument préserver la fiabilité de l'industrie, le Canada doit faire preuve de prudence s'il dépend d'exportations douteuses d'armes pour arriver à cet objectif, que ce soit en raison d'une stratégie, d'un règlement sur le contrôle des exportations mal appliqué, d'une inertie ou d'une combinaison de ces facteurs. Notre volonté à favoriser un commerce responsable des armes et des contrôles à l'exportation efficaces doit demeurer inébranlable. Il est impératif de trouver un équilibre entre le soutien des industries nationales et le respect des obligations juridiques et éthiques. Nous devons veiller à ce que nos exportations ne contribuent pas par inadvertance à l'instabilité mondiale ou aux violations des droits de la personne.
    Le cinquième et dernier point consiste à établir des balises normatives à l'égard des nouvelles technologies. À une époque où les progrès technologiques sont rapides, y compris les innovations ayant des usages militaires, le Canada doit fixer en amont des balises normatives pour prévenir d'éventuelles violations des droits de la personne et des utilisations abusives. L’innovation technologique sera un élément de plus en plus crucial de l’approvisionnement des Forces armées canadiennes. Il est toutefois tout aussi important d'établir un cadre réglementaire qui respecte les droits des Canadiens, les normes internationales et la reddition de comptes.
(1645)
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci, monsieur Jaramillo.
    Nous allons procéder à une série de questions de cinq minutes, et non de six. Monsieur Bezan, vous avez donc cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous nos témoins.
    Je vais d'abord m'adresser à M. Fadden. Vous avez un point de vue unique puisque vous avez été sous-ministre et conseiller à la sécurité nationale du premier ministre.
    Compte tenu de la menace actuelle et des difficultés d'approvisionnement que nous rencontrons, que devons-nous faire pour contrer la menace et obtenir l'équipement dont nous avons besoin aujourd'hui et demain?
    Je pense que vous avez mis le doigt sur un problème de taille. L'acquisition d'équipement de défense ne va pas augmenter considérablement tant que la population canadienne, et vous tous au Parlement, n'admettra pas que l'environnement international transformé réintroduit de graves menaces que nous n'avions pas dans le passé. Nous pouvons parler d'approvisionnement en matière de défense jusqu'à en perdre la voix. Or, si le pays ne reconnaît pas qu'il doit faire quelque chose en général au sujet de sa politique étrangère et de défense pour contrer la menace grandissante, je doute que nous puissions vraiment réformer ce processus.
    Nous constatons que nous devons acheter beaucoup d'équipement assez vite si nous regardons ce qui se passe actuellement avec la guerre en Ukraine, l'invasion russe, les jeux géopolitiques déstabilisants auxquels se livre la République populaire de Chine dans la mer de Chine méridionale, le détroit de Taïwan, la mer du Japon et notre Arctique.
    Proposez-vous que nous modifiions ou suspendions les règles actuelles du Conseil du Trésor prévues à la Loi fédérale sur la responsabilité et au programme des retombées industrielles et technologiques, comme vous l'avez dit? Ces mécanismes devraient-ils être laissés de côté pour que nous puissions faire des achats de matériel plus vite?
    Je doute qu'elles doivent être écartées dans tous les cas, mais il me semble que les militaires devraient pouvoir conseiller le gouvernement sur ces acquisitions désormais essentielles, après quoi le gouvernement pourrait déroger aux règles d'approvisionnement. Il devrait pouvoir accélérer le processus au besoin. J'imagine que vous ne feriez jamais au‑delà de 20 ou 25 % des acquisitions dans ces circonstances particulières.
    Pour l'instant, je pense à une seule situation où il y a eu une dérogation semblable au cours des 20 dernières années, et c'était une réussite.
    En ce qui concerne les projets informatiques en général, la technologie évolue si vite que lorsque nous finissons par accorder un contrat à quelqu'un, la technologie a habituellement complètement changé. Nous devrions donc suspendre certaines règles particulièrement dans les domaines technologiques.
(1650)
    Vous avez parlé de volonté et de contrôle politiques. Il faut éliminer cette aversion au risque qui est courante au sein de la fonction publique, et mettre en place un comité spécial du Cabinet et un secrétariat spécial au sein du Bureau du Conseil privé pour montrer aux ministères à quel point l'approvisionnement est important. Est‑ce un modèle convenable?
    Nous n'aurions pas à changer tous les ministères en mettant sur pied des organismes spéciaux ou quoi que ce soit d'autre.
    Je pense que votre suggestion serait utile, mais il faudrait surtout un changement de culture. La culture entourant l'approvisionnement en matière de défense est tellement ancrée dans la fonction publique — et, si je peux me permettre, dans le gouvernement aussi — que je doute qu'un changement dans l'appareil gouvernemental comme le comité spécial que vous proposez aille très loin. C'est pourquoi je dis ceci: pour que le Parlement décide de traiter sérieusement l'approvisionnement de défense, il doit être convaincu que l'environnement international l'exige.
    Pour dire les choses sans détour, j'ai côtoyé des politiciens pendant toute ma carrière, et l'approvisionnement en matière de défense ne suscite pas beaucoup de votes. Les gens doivent être convaincus qu'il y a une menace pour agir.
    Lorsqu'il y a de véritables urgences, notre pays réagit de façon spectaculaire. Je songe aux attentats du 11 septembre et à ce que nous avons fait en Afghanistan. Pour ce qui est des activités courantes de l'approvisionnement en matière de défense... À mon avis, nous ne sommes pas convaincus collectivement d'avoir un vrai problème.
    Monsieur Shimooka, vous avez parlé des objectifs d'approvisionnement non liés à la défense. Laissez-vous entendre que nous devrions nous approvisionner auprès d'entreprises commerciales pour contourner le problème, et le faire autant que possible?
    Comment pouvons-nous même être certains que nous avons une industrie nationale de défense? En temps de guerre, elle devra se mobiliser et construire des choses pour notre armée, car nous nous retrouverons autrement au bas de la liste d'autres pays, qui vont d'abord s'occuper eux-mêmes.
    Tous les programmes pour lesquels les achats ont atteint un certain seuil ont certainement un élément de proposition de valeur relative aux retombées industrielles et technologiques et nécessitent une compensation de 100 %. De toute façon, c'est ce qui se produira pour chacun de ces programmes.
    Je pense que nous devons très bien comprendre ce qui est nécessaire pour l'avenir des opérations de guerre, que ce soit dans l'Indo-Pacifique ou en Europe, et avoir une idée de nos capacités. Certains segments de la base industrielle canadienne ont ce niveau de capacité technologique et la capacité industrielle nécessaire pour offrir un soutien, et nous devrions vraiment compter là‑dessus, tout en examinant d'autres options lorsque nous ne pouvons pas acheter au pays.
    Merci, monsieur Bezan.
    Nous allons passer à M. Collins pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à nos invités.
    Monsieur Fadden, j'ai été choqué de lire vos commentaires dans votre texte de 2022. Vous y avez parlé de l'approvisionnement et de l'abandon ou de la suspension des règles. Je suis représentant élu depuis maintenant près de 30 ans, et si je devais retourner dans ma communauté et parler de renoncer aux règles d'approvisionnement...
    Vous avez utilisé le mot « médias » dans votre déclaration liminaire. Je ne peux pas m'imaginer ce que les médias en pensent. Je comprends à l'échelle nationale pourquoi il faut que cela se fasse ici et je pense qu'il faudrait le faire, mais comment pouvons-nous gérer la question culturelle, c'est‑à‑dire la soif de transparence de la population par rapport aux achats gouvernementaux? Vous pouvez imaginer, puisque vous avez travaillé ici longtemps, ce que l'opposition pourrait faire si on s'amuse à suspendre les règles, pour ainsi dire.
    Comment pouvons-nous nous occuper de la population et, par extension, des médias lorsque ce n'est pas la norme pour tous les ordres de gouvernement au Canada?
    C'est une question légitime.
    Les termes sembleront contradictoires, mais je pense qu'il faut commencer par élaborer un ensemble de règles qui établissent les règles pour la suspension des règles. Lorsqu'une acquisition en matière de défense est essentielle au pays et à la sécurité nationale au point de permettre au gouvernement de dire, des deux côtés, que nous allons suspendre les règles, il faut être totalement transparent. Je pense qu'il faut faire preuve de la plus grande transparence.
    Ce serait utile si tous les partis à la Chambre pouvaient parvenir à un accord de principe là‑dessus. Dans la mesure où la Chambre s'entend sur le principe, les médias vont finir par lui emboîter le pas.
    Soyons clairs, je ne propose pas la suspension de toutes les règles, tout le temps...
    Vous indiqueriez clairement que ce doit être limité.
    ... mais je pense qu'il faut être transparent par rapport à la nécessité de ce genre de suspension face à certaines conditions internationales qui ont lieu ou lorsqu'une situation spéciale se produit au Canada. Vous êtes mieux placé que moi pour en juger, mais je pense que si on indique clairement que nous envoyons nos soldats, nos marins et nos aviateurs se battre ou à proximité d'un combat sans l'équipement adéquat, la plupart des Canadiens s'entendraient pour dire que c'est inacceptable. Je peux vous donner des exemples de cas où nous l'avons fait si j'y pense.
    Si vous donnez ce genre d'explication, vous pouvez ensuite suspendre les règles, pas toutes, mais certaines, et seulement dans ces circonstances.
    Je suis désolé pour la longue réponse.
(1655)
    Non, c'était une excellente réponse. J'étais impatient de l'entendre.
    Dans le même texte, vous avez parlé de la microgestion, de l'aversion au risque dans la bureaucratie, et je pense que c'est courant dans tous les ordres de gouvernement. Vous avez dit qu'il ne faut pas avoir peur de peut-être commettre une erreur dans certains de ces dossiers très délicats. Il y a toutefois des avantages à cela. Le temps en est un.
    Pouvez-vous parler du niveau de risque que la bureaucratie devrait prendre lorsqu'elle s'occupe de dossiers très coûteux et de dossiers très médiatisés?
    C'est une autre excellente question.
    Je tiens à préciser que je ne propose pas de prendre à la légère une dépense de 1 milliard de dollars, mais je pense que je faisais allusion à l'application stricte de chaque mini-règle dans bien des cas et à la crainte que la plus petite erreur soit reprise par l'opposition ou par les médias et que les gens ne soient pas soutenus par leurs supérieurs dans la fonction publique. Je n'accuse pas exclusivement les politiciens. Je parle de leurs supérieurs dans la fonction publique. D'une certaine façon, je pense que c'est encore une question de culture. Je ne pense pas que nous devons modifier la loi.
    Comme je l'ai mentionné dans mes observations, pour que tout cela se fasse de manière efficace, il nous faut un premier ministre intéressé qui dit qu'il faut que cela se fasse. Je n'ai jamais été et je ne serai jamais premier ministre, mais je ne peux pas penser à un grand nombre de sujets qui pourraient intéresser plus un premier ministre. Cependant, d'une certaine façon, si nous apportons tous ces changements culturels ou de fond, nous avons besoin d'une approche pangouvernementale, en commençant à son échelon auprès des ministres et des hauts fonctionnaires.
    Surtout, comme je l'ai dit dans mes observations, il faut accepter qu'il arrive à l'occasion que la crainte d'un litige paralyse les gens. Malgré le fait que la Couronne gagne habituellement les affaires entendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur et la Cour fédérale, les gens figent tout simplement. Lorsque nous perdons une affaire, cela ne devrait pas être perçu comme un frein à l'avancement professionnel ou comme la fin du monde comme nous le connaissons, mais à l'heure actuelle, c'est presque perçu de cette façon.
    J'en conviens.
    Vous avez environ 15 secondes.
    Je vais les garder pour le prochain tour.
    D'accord. Je vais les ajouter au reste.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Fadden.
    Selon une des critiques que j'ai entendues à propos de l'approvisionnement, beaucoup de militaires qui sont affectés au système d'approvisionnement, alors qu'il y a une pénurie de militaires. On m'a signalé qu'une des solutions possibles pour contrer cela serait de recourir davantage à l'industrie pour faire fonctionner le système d'approvisionnement.
    Par exemple, on a donné un contrat à long terme pour l'habillement des militaires à une entreprise de chez moi, Logistik Unicorp. Celle-ci est responsable de trouver les fournisseurs, entre autres.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette possibilité. Croyez-vous que cela pourrait avoir un effet sur l'aversion pour le risque, étant donné que la responsabilité serait déplacée vers le secteur privé et ne se trouverait plus du côté des fonctionnaires?
     Je pense que vous avez bien raison lorsque vous dites que trop de militaires s'occupent d'approvisionnement.
    Je vois deux solutions possibles.
    La première serait d'augmenter le nombre de civils qui travaillent à ce dossier. La deuxième serait de repousser les achats vers le secteur privé, comme vous le dites.
    Cela pourrait fonctionner jusqu'à un certain point, mais au-delà duquel on ne pourrait pas aller à cause du risque...
    Le secteur privé cherche à faire des sous; c'est vraiment son principal objectif. Il faudrait quand même avoir une possibilité d'intervention; il devrait y avoir la possibilité de faire a posteriori une revue assez détaillée des achats. Je pense que, dans certains secteurs et dans le cas de certaines acquisitions, cela vaudrait la peine de le faire.
    Cela dit, chaque fois qu'il y a des compressions au ministère de la Défense nationale, on les applique toujours au secteur qui s'occupe de l'approvisionnement.
    Il n'y a pas suffisamment de personnes qui travaillent à ce dossier, ce qui cause beaucoup de retard.
    Merci beaucoup.
    Ma deuxième question s'adresse plutôt à M. Foster, mais, si une autre personne veut y répondre, qu'elle n'hésite pas à sauter dans la mêlée.
    Vous avez parlé de recherche-développement. De ce que je comprends, on laisse souvent ce secteur à l'industrie, qui l'utilise par l'entremise des retombées industrielles et technologiques comme effet multiplicateur.
    Je me demande donc si le Canada ne perd pas un peu le contrôle, en un sens, sur les secteurs dans lesquels il voudrait développer la recherche-développement, en ne décidant pas lui-même des secteurs sur lesquels il veut miser. Je pense à l'Institut quantique de l'Université de Sherbrooke.
    On pourrait être davantage à l'avant-garde et utiliser ces dépenses dans le calcul de nos 2 % à l'OTAN.
    N'a-t-on pas un peu sous-traité la recherche-développement par l'entremise des retombées industrielles et technologiques?
(1700)
    Si j'ai bien compris votre question, je dirais que la recherche-développement...
    Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plait?
    Avec plaisir.
    Le gouvernement devrait-il investir lui-même davantage dans la recherche-développement plutôt que de le sous-traiter à l'industrie, d'une certaine façon? En effet, l'industrie utilise les retombées industrielles et technologiques comme facteur multiplicateur. De plus, l'industrie prend des décisions en fonction de ses besoins plutôt que de faire de la recherche-développement en fonction des besoins des militaires.
    Ce n'est pas nécessairement le cas. Je pense que l'industrie et le gouvernement doivent davantage travailler ensemble. À l'heure actuelle, le gouvernement investit dans la recherche-développement dans plusieurs domaines qui ne sont pas nécessairement avantageux pour l'industrie. Je pense qu'elle perd un peu d'argent parce que d'autres pays font exactement la même recherche et sont plus avancés que le Canada.
    Je pense qu'il serait préférable de travailler ensemble pour trouver le meilleur endroit où investir pour que le Canada soit plus compétitif sur le marché international. Ainsi, au lieu de dépenser de l'argent dans plusieurs domaines de recherche, on se concentrerait sur quelques-uns, probablement une dizaine. Il y aurait donc plus d'argent si l'industrie et le gouvernement travaillaient conjointement.
    Cela ferait-il de nous un partenaire plus efficace sur le plan international? Cela permettrait peut-être également d'investir davantage et de se rapprocher de notre engagement de 2 % envers l'OTAN.
    Oui, c'est possible.
    Merci, madame Normandin.

[Traduction]

    Madame Mathyssen, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Jaramillo, votre organisation, Project Ploughshares, a présenté un nouveau cadre pour le développement de la sécurité du Canada et les cinq « D » de l'enveloppe consacrée à la sécurité, c'est‑à‑dire le développement, la démocratie, le désarmement, la diplomatie et la défense.
    Pouvez-vous parler au Comité de ce concept et de la façon dont le Canada pourrait tirer parti de cette perspective et dépenser cet argent?
    Absolument. Je vous remercie de cette question.
    Je vais d'abord vous parler de la défense, qui est l'un des piliers de cet ensemble que nous appelons les cinq « D ». Ploughshares ne remet pas en question — et ce n'est pas mon intention ici — la notion essentielle selon laquelle la défense est et peut être un élément très important du rôle que joue le Canada dans le monde et que nous avons besoin d'un niveau de préparation adéquat et fiable pour les Forces armées canadiennes.
    Cependant, nous pensons qu'il y a un problème lorsqu'on a tendance, au Canada et à l'échelle mondiale, à accorder une trop grande priorité à la défense, surtout au détriment des autres piliers qui sont la diplomatie, le développement, le désarmement et la démocratie.
    Par conséquent, ce que nous aimerions, et ce qui, selon nous, servirait les intérêts du Canada à l'étranger et dans la communauté internationale, serait une approche plus équilibrée à l'égard de ces piliers. Nous aimerions qu'il y ait plus d'investissements, et je parle d'investissements plus délibérés, dans la diplomatie, l'édification de la démocratie, les projets de développement et le désarmement. Historiquement, nous avons observé que plus nous avons investi dans ces autres piliers, plus le besoin de compter uniquement ou principalement sur la défense a diminué.
    Il est important d'apporter des nuances. Nous ne sommes pas en train de dire que la défense n'est pas importante. Nous sommes toutefois d'avis que le Canada doit établir un équilibre entre la défense et les autres outils à sa disposition dans l'élaboration de sa politique étrangère.
    Il s'agit ensuite de trouver cet équilibre et d'être beaucoup plus proactif, et je suis tout à fait d'accord avec cela.
    J'ai souvent l'impression que notre stratégie d'approvisionnement en matière de défense ne tient pas compte des droits de la personne. Il y a eu des perturbations majeures dans notre chaîne d'approvisionnement en matière de défense en raison de la fabrication de matériel de défense qui entrait en conflit avec les droits de la personne et en raison des crises qui existent au chapitre des droits de la personne.
    Vous avez récemment écrit un article dans le Globe and Mail au sujet des obligations du Canada en vertu du Traité sur le commerce des armes, plus précisément en ce qui concerne la Turquie, qui transférait certaines exportations canadiennes à des utilisateurs non autorisés. Pouvez-vous nous parler de ces obligations et sanctions issues de traités et des changements réglementaires qui doivent être apportés pour veiller à ce que les exportations canadiennes en matière de défense soient protégées?
(1705)
    Bien sûr. Je vous remercie encore une fois de cette question pertinente.
    Tout d'abord, j'aimerais dire qu'il ne s'agit pas seulement du Traité sur le commerce des armes. Vous avez tout à fait raison de dire que le Canada est signataire du Traité international sur le commerce des armes, et cela s'accompagne d'obligations juridiques. Cependant, il existe aussi des contrôles d'exportation nationaux que le Canada doit respecter lorsqu'il prend des décisions en matière d'exportation.
    À l'heure actuelle, il est clair que la majorité des exportations d'armes canadiennes sont destinées à des régimes autoritaires et à des utilisateurs louches. C'est vrai aujourd'hui, c'était vrai l'année dernière, c'était vrai l'année d'avant et l'année avant cela. Plus de la moitié des exportations d'armes canadiennes sont destinées à des entités louches et ont été utilisées à mauvais escient. Elles sont acheminées à des entités aux pratiques douteuses comme l'Arabie saoudite. Elles sont utilisées à mauvais escient, comme par la Turquie. Le Canada a autorisé l'exportation de la technologie de ciblage par drone produite par L3Harris WESCAM, malgré le fait que la Turquie l'a utilisée à mauvais escient en Irak et en Syrie et l'a envoyée en Libye et, malgré un embargo sur les armes imposé par l'ONU, l'a détournée vers le Haut-Karabakh et vers son allié l'Azerbaïdjan, qui a été accusé d'avoir commis des abus durant le conflit qui touche la région du Haut-Karabakh.
    Encore une fois, c'est une question de nuance. Il est tout à fait nécessaire de maintenir une base industrielle saine et fiable ici au Canada, mais le fait que l'autorisation des exportations d'armes à des destinataires louches soit nécessaire pour la maintenir devrait vraiment être une source de préoccupation et de réflexion.
    Plus tôt, nous parlions de la possibilité de modifier certaines règles et de les rendre plus contraignantes, ou de les définir différemment. Nous avons souvent entendu parler de la suspension de l'application des règles pour le bien public. Pouvez-vous formuler des commentaires à ce sujet, à savoir qu'elle est l'incidence de ces changements sur les droits de la personne?
    Absolument...
    Excusez-moi. Nous allons devoir laisser tomber la question de Mme Mathyssen pour l'instant. Je suis très strict avec les cinq minutes qui sont allouées aux députés. J'aimerais que nous puissions avoir deux autres séries de questions de cinq minutes. Mme Mathyssen pourra revenir à sa question pendant un autre tour.
    Merci.
    Sur ce, madame Gallant, vous avez cinq minutes.
    Monsieur Fadden, en plus de suspendre l'application de certaines règles, quelles mesures le gouvernement doit‑il prendre pour dissocier l'approvisionnement en matière de défense du développement régional et industriel et du développement en innovation?
    J'aimerais bien avoir une réponse à cette question. Cependant, je pense qu'il faut commencer en acceptant le fait que, dans certains cas, l'acquisition de matériel de défense est plus importante que le développement économique régional. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de dissocier l'approvisionnement de ces activités dans chaque cas, mais nous n'avançons jamais ces arguments.
    J'ai siégé dans ce que j'appelle le poulailler sous deux ou trois gouvernements et j'ai écouté les ministres parler de cette question. Il n'y a pas de critères. Certains appuieront le développement régional et industriel alors que d'autres appuieront les acquisitions. Il n'y a pas de critères. Il n'y a pas de règles qu'ils pourraient appliquer.
    Je pense qu'il faudrait d'abord élaborer des critères qui permettraient de ne pas tenir compte des questions liées au développement régional. Les critères seraient énoncés publiquement et débattus publiquement, peut-être par ce comité. Procéder à huis clos n'est pas la bonne démarche.
    Quelles politiques doivent être mises en place pour surmonter l'extrême aversion au risque des ministres et des fonctionnaires en matière d'approvisionnement de la défense? Quelles mesures devons-nous prendre pour provoquer ce changement de culture dont vous avez parlé?
    Le changement de culture, comme vous le savez, est l'une des choses les plus difficiles à réaliser. À mon avis, il faudrait d'abord déclarer à l'échelle du gouvernement que nous nous attendons à ce que les fonctionnaires tiennent compte de l'efficacité et des approches fondées sur les règles. Il nous faudrait trouver quelques cas précis de personnes qui ont commis une erreur et qui n'ont pas été réprimandées.
    Il s'agit surtout de changer les comportements en peu de temps, mais je ne pense pas que ces changements vont s'opérer rapidement. Aujourd'hui, on ne peut pas sauter sur chaque petit problème qui survient dans le domaine de l'approvisionnement en défense comme si le gouvernement méritait d'être défait. Mais c'est ce qui se passe. Je ne m'adresse pas à vous parce que vous faites partie de l'opposition aujourd'hui. Je dirais la même chose si les députés de ce côté‑ci de la salle étaient dans l'opposition. Je comprends qu'il y a des partis d'opposition. Les partis de l'opposition sont censés s'opposer. Mais d'une façon ou d'une autre, nous devons trouver un moyen de relever le seuil de désapprobation lorsque quelque chose tourne mal. Je pense que les gens devraient être en mesure de justifier leurs gestes lorsqu'ils prennent des risques ou qu'ils enfreignent une règle. Il est parfois possible de le faire de manière très efficace.
    Lorsque je travaillais au ministère de la Défense, je disais à mes collègues que si on leur demandait de faire quelque chose qui leur semblait absurde, ils devaient demander qu'on leur accorde une exemption. Si je ne pouvais pas la leur donner, j'allais en faire la demande au ministre. Dans bien des cas, ce n'est pas très grave, et on ne viole pas les droits de la personne, pour revenir au point que vous avez soulevé. Nous ne parlons que d'une règle que quelqu'un a adoptée il y a 15 ans et que nous n'avons jamais changée. Comme dans la plupart des secteurs du gouvernement, des règles sont établies, puis on y ajoute des éléments au fil des décennies. Un simple examen systématique des règles ne serait peut-être pas une mauvaise chose, car le Conseil du Trésor, les services publics, le Bureau du Conseil privé et ISDE ajoutent tous des règles à l'approvisionnement en matière de défense. Ils n'en retirent pas beaucoup, mais ils ont tendance à en ajouter au fil des ans.
(1710)
    Selon vous, quels sont les changements les plus importants en matière de menaces à la sécurité du Canada qui indiquent que les dépenses de défense devraient être plus prioritaires?
    Je pense à la montée en puissance de la Chine et à sa politique étrangère et de défense beaucoup plus agressive, à l'avènement de cyberattaques importantes contre le Canada et tous nos alliés occidentaux, et aux actions de la Russie en Ukraine. Beaucoup se demandent si nous devrions soutenir l'Ukraine, mais il y a bien d'autres pays.
    Selon moi, les menaces principales sont les suivantes: la Chine, la Russie, la hausse des activités cybernétiques, la désagrégation en général, et le leadership affaibli des États-Unis, qui nous a unis après la guerre froide.
    Quels critères devrait‑on utiliser pour déterminer quels projets d'approvisionnement devraient être exemptés des règles qui les gouvernent, partiellement ou entièrement?
    Je crois que nous aurions tout d'abord besoin de la garantie du chef d'état-major de la défense que tout ce qui est nécessaire l'est maintenant dans un délai précis. Nous avons besoin qu'il nous explique clairement pourquoi une chose ne peut pas être faite avec les règles existantes. Pourquoi une règle a‑t‑elle été suspendue? À quel effet? Nous avons besoin de savoir clairement comment ce type de décision va accélérer les choses.
    Je crois que la situation dépend de facteurs propres à chaque cas la plupart du temps, mais que nous avons tout d'abord besoin d'une déclaration claire et sans ambiguïté du chef d'état-major. Il doit nous expliquer ce qui doit être acquis maintenant, peu importe l'enjeu.
    Merci.
    Ce n'est probablement pas une bonne journée pour parler d'erreurs.

[Français]

     Madame Lambropoulos, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par vous, monsieur Fadden.
    Vous avez parlé de l'importance de prioriser la livraison d'équipement par rapport aux autres objectifs. En tant que députée canadienne, je veux également m'assurer que les Forces armées canadiennes sont prêtes et capables d'atteindre leurs objectifs et de s'acquitter de leur mission le plus efficacement possible. Plusieurs des entreprises de l'industrie dont nous discutons aujourd'hui se trouvent dans ma circonscription, dont L3. Je comprends donc qu'il est important de les aider à être à tout le moins compétitives sur le marché mondial. Il est important de les aider à atteindre le même niveau que leurs compétiteurs, sinon à les dépasser.
    Comment le gouvernement peut‑il déterminer s'il est plus avantageux de rechercher des retombées industrielles que de prioriser l'obtention du bon équipement en temps voulu?
    Là encore, je ne crois pas qu'il soit possible d'établir des règles qui s'appliqueraient à toute circonstance. Le ministère de la Défense doit faire preuve d'efficacité dans sa planification. C'est essentiel. Bien souvent, on peut prédire ce genre de choses. Si on peut prédire les choses, on peut faire face aux surprises.
    Il faudrait tenir compte des surprises dans les critères. Quelque chose pourrait se produire à l'échelle cybernétique. La Russie pourrait devenir plus active dans l'Arctique. Peu importe la surprise, je parle d'un événement qui prendrait vraiment l'armée et le gouvernement par surprise. Cela devrait faire partie des critères.
    De plus, j'estime que nous ne devrions jamais envoyer nos soldats dans une guerre ou dans une zone de guerre sans préparation ou équipement. Je ne sais pas à quel point c'est vrai, mais on a entendu l'exemple de la Lettonie, où nos soldats auraient été envoyés sans casques appropriés. Je ne me l'explique pas. On ne peut pas... On ne devrait pas envoyer des soldats dans des zones de guerre sans équipement de protection individuelle. Voilà un exemple. Il est donc également question de cas où une situation pose un risque immédiat pour les soldats.
    C'est logique.
    Vous avez également parlé du fait que les politiciens se fixent certains objectifs qui couvrent nombre de catégories différentes et qui, bien sûr, sont parfois contradictoires. Est‑il possible d'œuvrer sur les deux fronts en même temps?
    Comment pouvons-nous soutenir l'industrie à long terme, même si nous atteignons immédiatement nos objectifs en cas de surprise ou d'urgence?
(1715)
    J'ai essayé de dire dans mes remarques liminaires que je trouvais les objectifs raisonnables. Je pars donc de ce principe.
    Il n'y a rien de mal avec le développement régional. Nous devrions développer les régions lorsque l'occasion se présente. Cela dit, j'estime que le gouvernement du Canada — le ministère de la Défense, en particulier — n'est pas très doué pour établir des priorités. On tente d'en faire un peu partout, et on en paie parfois le prix.
    La priorité serait de tenir une discussion ouverte sur ces enjeux, ce qui ne se fait pas en ce moment. On décide simplement de procéder avec les règles en vigueur, puis beaucoup de gens se fâchent. Le gouvernement, lui, se sent alors obligé de se défendre et rien ne change.
    Le Canada dispose d'un système d'imputabilité ministérielle. Je ne propose donc pas que l'on autorise le chef d'état-major de la défense à faire ce qu'il veut de son côté. Je suis certain que ces cas peuvent être défendus publiquement d'une façon ou d'une autre, que ce soit par le biais d'un sous-comité du Cabinet ou d'un sous-comité de la Chambre, par exemple. Dans la plupart des cas, je crois vraiment que la situation varie en fonction de l'acquisition individuelle.
    Pensez-vous que le Canada pourrait en faire plus pour mobiliser l'industrie et veiller à ce qu'elle fasse partie de la solution à long terme, par exemple en organisant des réunions régulières avec le ministère de la Défense — les deux parties se rencontreraient — afin de renforcer les capacités?
    Oui, absolument. Certains le font déjà, mais je crois qu'on devrait de plus en plus se départir des documents d'exigences de 1 500 pages envoyés aux entreprises. On devrait plutôt leur envoyer un document de 100 pages sur l'exigence de résultats et se concentrer sur des acquisitions axées sur les résultats. C'est ce que font nombre de nos alliés. Cela dit, le gouvernement du Canada est toujours d'avis qu'il faut énoncer chaque exigence détaillée à laquelle l'entreprise doit répondre. Je pense que si l'on donne plus de flexibilité aux entreprises tout en leur indiquant clairement ce que l'on veut en fin de compte, on les incite à trouver des gains d'efficacité et des économies tout en obtenant le produit final.
    De plus, j'estime qu'on bénéficierait d'un dialogue plus ouvert entre la fonction publique — en particulier — et le secteur privé. Les deux ou trois derniers gouvernements ont quelque peu découragé la chose. C'est un peu risqué pour un fonctionnaire d'aller dîner avec un représentant d'entreprise. C'est comme si on avait l'impression qu'une simple tasse de café pouvait convaincre un fonctionnaire de changer l'octroi d'un contrat de plusieurs millions dollars.
    Je rigole, mais il y a une certaine vérité dans ce que je dis. Il serait utile d'avoir un meilleur dialogue entre les parties. Il faudrait qu'elles se parlent nettement plus. Cela dit, ce dialogue ne devrait pas déterminer le résultat. Les décisions reviennent au gouvernement. Par contre, on fait parfois appel à l'industrie trop tardivement, et on se rend compte qu'elle ne peut pas livrer ce qu'on demande, ce qui cause toutes sortes de retards.
    Vous avez tout à fait raison. Il nous faudrait nettement plus de dialogue.
    Merci, madame Lambropoulos.

[Français]

     Monsieur Thériault, soyez le bienvenu au Comité.
    Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Deux minutes et demie... D'accord. Je vais essayer de poser une brève question.
    Monsieur Fadden, vous avez parlé plus tôt d'une gouvernance qui devrait être davantage centralisée. Vous avez parlé d'un manque d'efficacité sur le plan décisionnel, parce que trop de ministères étaient impliqués.
    Pourquoi préconisez-vous la formation d'un nouveau ministère plutôt que d'un nouvel organisme? Quels seraient les avantages?
    C'est une question sur laquelle les gens sont divisés depuis une vingtaine d'années. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de changer le nombre de ministères. Ce qui est vraiment important, c'est d'établir à l'avance l'essence de chaque ministère. Il nous faudrait un ministère central. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il y avait le ministère de la Production de la défense qui centralisait tout ce qui touchait l'acquisition militaire.
    Aujourd'hui, les mêmes priorités existeraient. Il y aurait les priorités régionales, l'innovation, la technologie. Elles seraient simplement concentrées dans un ministère. Les mêmes pressions, les mêmes conflits existeraient.
    À mon avis, il n'existe pas de solution idéale. Plusieurs de nos alliés ont créé une agence, plutôt qu'un ministère. Parfois, c'est plus efficace, et, parfois, ce ne l'est pas. L'avantage d'une agence, c'est que c'est un peu plus éloigné de l'interférence ou de l'ingérence ministérielle. Parfois, mais pas toujours, il est utile que les ministres ne s'ingèrent pas dans les détails.
    On peut donc créer une agence plutôt qu'un ministère. C'est une façon de procéder.
(1720)
    Croyez-vous que cette centralisation rendrait plus efficace la reddition de compte?
    J'ai de la difficulté à répondre à votre question, parce qu'il se pourrait qu'elle soit plus efficace. Cela dit, le ministre qui s'occupe de l'approvisionnement de la défense est très expérimenté, tous ses collègues vont tenter de le convaincre de ce qui se passe ou non.
    De plus, au Canada, beaucoup de choses se décident lors des réunions du Cabinet. Alors, même si un ministre avait un pouvoir très centralisé, il serait difficile de le séparer du pouvoir des comités du Cabinet.
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    Vous disposez de deux minutes et demie, madame Mathyssen.
    Merci.
    Monsieur Jaramillo, vous avez offert un point de vue différent sur l'objectif de dépense de 2 % de l'OTAN. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet et nous expliquer comment cet objectif est calculé selon vous ou pourquoi vous l'avez remis en question ainsi?
    Absolument, et merci beaucoup de cette question pertinente.
    Je crois que tous les membres du Comité savent que l'OTAN insiste pour que les dépenses militaires représentent 2 % — ou plus de 2 % — du PIB. Je pense qu'il existe plusieurs fausses idées dans ce débat.
    Tout d'abord, et c'est le cas notamment dans mes conversations avec mes collègues et avec des Canadiens ordinaires, il y a cette idée que le Canada est en quelque sorte à la traîne et qu'il rattrape son retard, ou que l'OTAN comble en quelque sorte l'écart au chapitre de ses dépenses militaires. Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, à l'échelle mondiale, le Canada fait partie de la tranche supérieure de 10 %. Au sein de l'OTAN, le Canada se classe au sixième rang parmi plus de 30 pays qui dépensent dans le domaine militaire. La fausse idée selon laquelle nous rattrapons notre retard doit vraiment être contrebalancée par une certaine perspective des chiffres réels.
    La mesure elle-même, c'est‑à‑dire ce pourcentage du PIB, est une mesure économique qui ne nous dit absolument rien sur le niveau ou la perception des menaces. C'est une mesure arbitraire qui fait augmenter les dépenses en matière de défense, alors qu'il s'agit déjà d'une alliance hautement militarisée.
    Cela ne précise pas vraiment ce que le Canada pourrait maximiser ou optimiser ou... Je sais que certains pays tiennent compte, dans ce calcul, des sommes consacrées aux anciens combattants ou à la garde côtière, alors que nous voyons les choses différemment. Est‑ce exact?
    En effet, et je pense que le Canada pourrait jouer un rôle très constructif en élargissant la définition de ce qu'on entend par sécurité et de ce qui compte pour atteindre les objectifs fixés.
    La notion traditionnelle de sécurité — une notion qui est étroite — nécessitera, par définition, au cours des prochains mois, des prochaines années et des prochaines décennies, la prise en compte de l'intersection entre la dégradation de l'environnement et la sécurité. Le Canada peut jouer un rôle dans l'élaboration d'une définition plus large, plus précise et plus moderne de ce qui constitue la sécurité et de ce qu'est un état de préparation efficace.
    Merci, madame Mathyssen.
    Madame Kramp-Neuman, vous avez cinq minutes.
    Ma première question s'adresse au général Foster.
    Dans votre témoignage, vous avez mentionné la « pénurie de personnel » qui existe dans les Forces armées canadiennes. Je crois que vous pouvez certainement nous présenter un point de vue unique, grâce à votre expérience militaire et à votre travail actuel dans l'industrie. J'ai une question à deux volets.
    Comment pouvons-nous combler le déficit de 16 000 effectifs? Où se trouve le juste milieu ou, comme l'a dit M. Fadden, la « solution miracle », afin que nous puissions nous acquitter de notre obligation fiduciaire de respecter l'argent des contribuables et d'obtenir l'équipement dont nos forces armées ont besoin dans le monde dangereux où nous vivons?
    Je vous remercie.
    D'après mon expérience, même dans le cadre de mon travail auprès de L3Harris, je sais que nous avons déployé le CC‑150 Polaris au Koweït, et cette capacité a été appuyée par des civils en Irak pendant quatre ans. Durant mes déploiements à bord de chasseurs un peu partout dans le monde, je n'ai jamais vu un conflit où nous ne pouvions pas recourir à des techniciens sur le terrain pour soutenir ces capacités, comme à Aviano, au Koweït ou ailleurs.
    À mon avis, l'industrie a un rôle à jouer pour participer davantage aux capacités de soutien en service afin d'aider à combler le déficit. En collaboration avec l'Association des industries aérospatiales du Canada, dont je préside le conseil d'administration, nous examinons la formation de techniciens d'entretien d'aéronefs, formation dirigée par l'industrie, et je pense que certaines de ces possibilités pourraient être mises à contribution dans l'armée canadienne.
(1725)
    Deuxièmement, monsieur Shimooka, les retombées industrielles et technologiques ajoutent-elles des coûts à l'approvisionnement, ou est‑ce qu'elles ralentissent le processus et le rendent plus coûteux?
    C'est les deux.
    Comparativement à tous nos alliés, le programme des retombées industrielles et technologiques est un peu anachronique. Aucun de nos alliés n'a maintenu une telle exigence de compensation de 100 %, en partie parce qu'ils ont constaté, surtout dans le cas de l'Australie et de plusieurs alliés européens, que cela ralentit l'exécution des programmes et entraîne des coûts supplémentaires.
    Il est impossible de demander à un fabricant étranger de réinvestir la totalité des coûts dans un pays et d'aller ensuite chercher un remboursement auprès de ses actionnaires, ou de quiconque relève de son obligation fiduciaire, en disant: « Nous allons simplement redonner cet argent. » Il y aura une augmentation des coûts, qui seront refilés au pays. C'est le cas de tous les principaux programmes canadiens qui comportent ce genre d'exigence. Cela se répercutera donc sur nos coûts, ainsi que sur les délais.
    Croyez-vous que les retombées industrielles et technologiques profitent aux entreprises canadiennes?
    Je pense que cela dépend du cas et du programme dont il est question. On peut certainement faire valoir qu'il y a un coût de renonciation lorsqu'on examine ces programmes. Si nous investissions le même montant d'argent, c'est‑à‑dire les coûts supplémentaires que nous consacrons à un programme, et si nous investissions cet argent différemment dans la société canadienne, obtiendrions-nous un meilleur résultat industriel et économique que si nous nous en remettions au système de propositions de valeur dans le cadre du programme des retombées industrielles et technologiques?
    À l'heure actuelle, je dirais que les données réelles à ce sujet sont incomplètes, mais, chose certaine, le rapport du directeur parlementaire du budget, publié l'an dernier, a mis en évidence ce type d'investissements et la répartition des fonds. Je pense que certains signes semblaient indiquer qu'une telle mesure n'est peut-être pas aussi efficace que les gens le croient ou le prétendent.
    Je vous remercie.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Fadden.
    Dans votre témoignage, vous avez mentionné quelques points qui ont retenu mon attention.
    En ce qui concerne les menaces graves, nous devons nous assurer que le pays reconnaît la menace qui nous guette, mais la crainte de poursuites judiciaires conduit souvent à des impasses. Si nous pouvons apprendre de nos alliés, y a‑t‑il des modèles internationaux qui permettent d'accélérer l'approvisionnement ou peut-être de suspendre l'application des règles d'approvisionnement dont nous avons parlé? Par exemple, les Britanniques ou les Américains disposent-ils d'un plan?
    Selon moi, il est probablement juste de dire, comme mon collègue l'a souligné dans ses observations, que nous avons, de loin, l'ensemble de règles le plus complexe parmi nos alliés. La plupart de nos alliés agissent plus rapidement que nous. À mon avis, nos alliés européens sont enclins à accélérer la cadence parce que la menace est beaucoup plus immédiate. Nous sommes pas mal isolés en Amérique du Nord, et je ne pense pas que nous ressentons cette pression.
    Je suppose que les États-Unis se trouvent dans une catégorie à part. Leur complexe militaro-industriel est énorme. Si vous parlez à des amiraux et à des généraux, ils vous en feront un compte rendu affligeant, un peu comme ce que je viens de vous décrire, mais ils y consacrent tellement d'argent que cela semble porter ses fruits, même s'ils commencent à éprouver des problèmes.
    Comme j'ai essayé de le dire, je pense qu'aucun pays n'a trouvé le moyen idéal de régler cette question parce qu'il existe des objectifs contradictoires, aussi légitimes soient-ils.
    Je vous remercie.
    Merci, madame Kramp-Neuman.
    La parole est à M. Fillmore pour les cinq dernières minutes de ce tour.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je remercie infiniment les membres de notre groupe de témoins de leur présence.
    J'aimerais poser des questions à M. Foster et à M. Fadden.
    Si vous le permettez, je commencerai par vous, général Foster. Aujourd'hui, nous avons parlé du fait que le monde se trouve actuellement dans un contexte de sécurité ou de menace qui change sans arrêt. La technologie évolue rapidement. Nous l'avons vu avec l'invasion russe de l'Ukraine et la dépendance de l'Ukraine à l'égard des technologies de pointe qui l'ont aidée à tenir bon. Par ailleurs, M. Fadden nous a dit que l'acquisition de technologies de pointe doit être très souple, parce que ces technologies sont en constante évolution.
    J'aimerais savoir comment vous percevez les effets de cette évolution rapide du contexte sur nos processus d'acquisition. Qu'est‑ce que cela signifie pour nos processus habituels d'acquisition de matériel de défense?
    Je peux vous donner un exemple. Les radios tactiques que nous exportons en Ukraine sont meilleures que celles que l'armée canadienne utilise actuellement dans ses véhicules. En fait, je pense que, du point de vue de la capacité opérationnelle, cela aurait tendance à mettre nos soldats canadiens en danger. Je ne peux pas en parler de façon explicite, mais c'est ce que je comprends.
    Je pense que l'institution s'accroche à des programmes qui prennent beaucoup de temps à aboutir et que cela entraîne une dégradation de notre capacité. Les programmes ont cinq ans de retard sur ce qu'ils étaient censés être. Or, l'institution ne change pas pour autant ce paradigme ou ne trouve pas de solutions plus rapides pour obtenir l'équipement de pointe dont les forces armées ont réellement besoin.
    J'espère avoir répondu à votre question.
(1730)
    Je vous remercie.
    Cela nous amène à la question suivante: selon vous, quels changements faudrait‑il apporter à nos processus d'acquisition pour tenir compte de la transformation rapide de ces réalités?
    Je pense qu'ils doivent s'asseoir avec l'industrie afin d'établir ce dont ils ont réellement besoin pour agir adéquatement sur un théâtre d'opérations et pour trouver des solutions disponibles dans le commerce. Beaucoup d'autres pays ont déjà résolu ce problème. Le Royaume-Uni, par exemple, s'est empressé d'acquérir certaines de ces radios tactiques. Je pense qu'il serait utile de s'aligner sur les pays occidentaux pour assurer l'interopérabilité, tout comme il serait utile d'abandonner les anciens systèmes, de prendre ce risque et de dire qu'il est temps d'abandonner les vieilles façons de faire. Il est temps d'adopter rapidement quelque chose de nouveau.
    En ce qui concerne les équipements de communication, les logiciels changent probablement tous les deux à quatre ans. Il est important de travailler avec l'industrie pour se tenir au courant et comprendre à quel point ce service et ces changements de logiciels vont se produire rapidement. Nos méthodes d'approvisionnement traditionnelles fondées sur des cycles de cinq à dix ans ne vont tout simplement pas tenir la route.
    Il semble que le conseil soit de ne pas réinventer la roue. Les technologies existantes présentent déjà l'avantage de l'interopérabilité, etc. C'est un bon conseil.
    Comment un pays comme le Canada peut‑il trouver cet équilibre entre les solutions conçues et fabriquées au Canada et les solutions souvent commerciales en provenance de l'étranger?
    J'aimerais aborder un peu la question des retombées industrielles et technologiques, parce que j'y suis constamment confronté. Le problème des marchés publics est la prévisibilité et la portée. Si je dis à mon grand patron qu'il faut investir tant de millions de dollars au pays pour commencer à développer des chaînes de montage d'équipements de vision nocturne ou de radios, il va me demander: « Quel programme suis‑je en train de soutenir? Quand cela va‑t‑il se produire? Quelle sera l'ampleur de ce programme? » Si je lui réponds que je ne sais pas, il me dira: « Si vous ne le savez pas, je ne peux pas investir. »
    Le programme des retombées industrielles et technologiques est conçu pour imposer une obligation à une entreprise qui a remporté un programme, plutôt que d'inciter une entreprise comme la mienne à amorcer la construction de chaînes de montage pour des lunettes de vision nocturne. Nous sommes dorénavant en concurrence avec tous les autres pays — l'Australie, le Royaume-Uni, Singapour, la Corée du Sud —, et ces pays veulent que nous mettions en place cette même capacité d'assemblage pour le contenu local dans leurs pays. Le Canada devrait prendre de l'avance et inciter les grandes entreprises comme la mienne à investir au Canada en amont d'un programme, plutôt qu'après coup.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Fillmore.
    Chers collègues, je tiens à vous remercier de votre coopération et de votre discipline. Il nous reste assez de temps pour une série de questions de 25 minutes. Donc, si nous maintenons notre coopération et notre discipline, nous devrions y arriver.
    Monsieur Kelly, vous avez cinq minutes.
    Général Foster, dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que le Canada ne devrait pas abaisser les critères afin de créer une concurrence là où il n'y en aurait pas. Est‑ce que c'est ce qui se passe actuellement?
    Je pense que c'est le cas, oui.
    Pouvez-vous nous donner des exemples que nous pourrions citer dans notre rapport?
    Si un autre témoin a un exemple à donner, ce serait bien aussi.
    Je vous écoute.
    Il y a le Projet de capacité des futurs chasseurs. Il était clair dès le départ, en 2010, que ce projet n'aurait pas dû faire l'objet d'un contrat du ministère de la Défense et, à l'époque, de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Avec l'arrivée d'un nouveau gouvernement, il y a évidemment eu des problèmes de nature politique, mais le même résultat s'est produit, et on a assisté à une sorte de « repondération » visant à faire mousser la concurrence. Si vous regardez chacun de nos alliés, si vous regardez la Finlande et tous les autres pays qui ont acheté le F‑35, il ne fait aucun doute qu'il s'agissait d'une occurrence unique.
    Cela nous ramène à ce que M. Fadden a dit au sujet de la politique et de l'opposition, et de la façon dont ces enjeux sont pris en compte lors des élections. Il y a des décennies d'exemples qui vont dans ce sens. J'étais dans mes premières années d'activisme politique lorsqu'un gouvernement s'est opposé à un contrat d'achat d'hélicoptères. Les Canadiens se sont habitués à cela au fil des décennies.
    Pour revenir sur une chose que vous avez dite, y a‑t‑il maintenant possiblement plus de risques à ces tergiversations qui durent des années, parfois des décennies, en ce qui a trait à l'acquisition d'équipement? Y a‑t‑il encore plus de risques « politiques » ou de risques d'embarras que si l'on se contente de faire quelque chose — quitte à commettre une erreur, peut-être, et à encaisser un coup sur le plan politique?
(1735)
    J'allais répondre aussi, mais je vous laisse commencer.
    Allez‑y, l'un ou l'autre.
    Dans ma déclaration liminaire, j'ai dit qu'il fallait éviter les programmes de développement. Souvent, ils lancent la compétition en présentant un programme qui est davantage axé sur le développement que, peut-être, un autre programme, sans comprendre quels sont les risques et les coûts que cela implique. Ils finissent par choisir un programme qui nécessite plus de développement après coup et qui ne donne pas les résultats escomptés. On peut penser à de nombreux programmes de ce type. Le PHM, le Projet des hélicoptères maritimes, était manifestement un programme de développement financé par un contrat à prix fixe. Avec le recul, on s'aperçoit que, dès le départ, c'était une porte ouverte à toutes sortes de problèmes.
    D'accord.
    Monsieur Shimooka, dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que de nombreux systèmes des années 1980 qui sont encore utilisés sont en train de rouiller. Pouvez-vous nommer certains d'entre eux? Pouvez-vous nous dire quels sont les systèmes qui sont en place depuis des décennies et qui ont besoin d'être remplacés de toute urgence?
    Certainement. Je pense toujours aux CF‑18. Ces avions sont...
    D'accord, nous en avons parlé.
    Oui, absolument. Il y a les CF‑18. Il y a le CP‑140. Vous pouvez penser à nos frégates. On rapporte maintenant que l'une d'entre elles est hors d'usage. C'est un problème généralisé. Nos systèmes sont fondamentalement...
    Donc, ce sont ceux qui coûtent cher.
    Oui, tout à fait, mais c'est aussi le cas aux niveaux inférieurs, par exemple pour les radios, les camions, tout. C'est le cas dans l'ensemble des Forces.
    D'accord.
    Dans vos observations, vous avez également parlé du projet des véhicules aériens sans pilote, qui a été lancé il y a 17 ans. Pourriez-vous nous dire pourquoi ce projet particulier pose problème? Pourriez-vous décrire ce que...?
    Les besoins ont assurément changé. Cette évolution a en fait commencé à l'aube de la guerre en Afghanistan. Il y avait alors un besoin. Il y a ensuite eu une demande opérationnelle urgente, et nous avons donc fait venir deux systèmes temporaires en vue de leur utilisation sur place. Depuis lors, il existe des divergences quant à l'utilisation que nous voulons faire du projet. Il existe de multiples facteurs.
    D'une certaine manière, il s'agit d'une bonne étude de cas pour illustrer les problèmes liés aux retards dans l'approvisionnement en matière de défense. On constate que les besoins évoluent différemment et que les intérêts divergent en ce qui concerne les dépenses et l'usage que l'on veut faire du programme. Il s'agit en fait, d'une certaine manière, d'un microcosme dans lequel un grand nombre de ces questions sont réunies dans un seul et même programme.
    Merci, monsieur Kelly.
    Monsieur Fisher, vous avez cinq minutes. Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous quatre, messieurs, d'être présents aujourd'hui.
    En plus d'être membre du comité de la défense nationale, je siège à l'Assemblée parlementaire de l'OTAN.
    Je voudrais d'abord m'adresser au major‑général Foster.
    Merci beaucoup, major‑général, pour les 35 années que vous avez passées au service de notre pays.
    Je m'intéresse aux processus d'approvisionnement. Je crois que c'est vous, monsieur Foster, qui avez dit que le système d'approvisionnement du Canada était très complexe. Nous le savons bien puisque nous l'avons entendu sous plusieurs gouvernements depuis plusieurs décennies.
    J'aimerais savoir ce que certains de nos alliés de l'OTAN, plus particulièrement, font bien, ce que nous faisons bien et à la manière dont nous pouvons cerner les résultats les plus faciles à atteindre pour améliorer ou simplifier nos processus — je sais que certains points ont été évoqués aujourd'hui — tout en sachant que tout n'est peut-être pas comparable. Je sais que le Canada est beaucoup plus réticent à prendre des risques en matière de litiges. Certains pays, certains pays alliés, considèrent que le règlement des litiges fait partie du prix à payer pour faire des affaires, et ils l'ajoutent donc au prix. J'aimerais savoir si vous pensez que nous pourrions tirer des leçons de certains de nos alliés de l'OTAN.
    Je me souviens également, monsieur Fadden, que vous avez dit que, pour certains pays, certains de nos alliés de l'OTAN, la menace est plus imminente ou plus immédiate, de sorte qu'ils devront, vraisemblablement, intervenir un peu plus rapidement que nous.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez, monsieur Foster.
    J'estime que nous devons davantage aligner nos solutions sur celles de nos alliés. Je me tournerais en premier lieu vers les États-Unis, et je m'intéresserais à leurs programmes de développement. Ils ont commencé à mettre en place des processus très itératifs pour ce qui est de la capacité de communication radio et de développement de logiciels. Je pense qu'ils accepteraient volontiers de travailler en partenariat avec le Canada à la mise en œuvre de ces programmes. Nous pourrions ainsi investir dans nos propres entreprises et permettre à nos petites et moyennes entreprises d'y participer. Nous pourrions mener des activités de recherche et de développement collectives qui seraient mises à profit dans le cadre de ces exercices collectifs visant à développer une capacité.
    Je pense que nous devrions également apprendre à acheter plus souvent des capacités qui ont déjà été déployées par nos alliés.
(1740)
    C'est intéressant, parce que nous avons déjà entendu des questions sur l'utilisation de solutions disponibles sur le marché, et je pense que c'est un sujet intéressant.
    Monsieur Foster et monsieur Fadden, avez-vous des exemples de ce que nous avons fait de bien ces dernières décennies, sous différents gouvernements de différentes tendances politiques. Qu'avons-nous fait de bien et pourquoi, peut-être, n'avons-nous pas tiré les leçons qui s'imposaient?
    Je vais commencer par M. Foster.
    J'ai souvent entendu l'exemple du programme des frégates de classe Halifax. Il s'agit probablement du programme le mieux développé et le mieux géré, et ce parce que l'industrie et le gouvernement ont participé à l'ensemble du processus.
    Je pense que l'on craint trop souvent de mobiliser l'industrie et de travailler avec elle. Si vous réunissez suffisamment de chefs de l'industrie afin de tenir une discussion transparente avant un appel d'offres, vous pouvez cerner une grande partie des exigences qui peuvent réellement être atteintes. Vous pouvez établir quelles sont les meilleures capacités.
    À l'heure actuelle, nous avons tendance à délimiter les choses dès le départ, puis nous lançons des demandes d'information en disant: « Pouvez-vous répondre à cette question? Je ne sais même pas ce que je cherche. Pouvez-vous m'aider? » Au lieu d'avoir une conversation transparente pour comprendre dès le départ ce qui est possible, quelles sont les meilleures solutions, et de les soumettre à un appel d'offres auquel participeront les parties pertinentes.
    Avant de passer à M. Fadden, si le programme des frégates de classe Halifax a été un tel succès, pourquoi cette crainte existerait-elle? Qu'il s'agisse des bureaucrates ou des gouvernements au pouvoir, pourquoi y aurait‑il une crainte si nous jugeons qu'il s'agit d'une réussite?
    Monsieur Fadden, vous voudrez peut-être répondre à cette question, mais j'aimerais partager un peu le temps qui m'est imparti.
    Vous n'avez pas de temps à partager.
    Pouvons-nous les laisser répondre très brièvement?
    Très brièvement.
    Je pense que le problème du programme des frégates de classe Halifax n'était pas son achat initial — bien qu'il ait pris un certain temps —, mais ses réaménagements en milieu de vie et son remplacement.
    Vous vouliez deux exemples de projets qui ont bien fonctionné. Le premier est le C‑17, le transport aérien stratégique. Il n'y avait pas beaucoup de solutions de rechange. Nous l'avons acquis par le biais de ventes de matériel militaire à l'étranger. Nous avons fait un chèque aux États-Unis et ils nous ont livré cet avion.
    L'autre exemple est peut-être un peu plus controversé, mais le gouvernement de M. Harper a dérogé à toutes les règles pour faire construire le navire de ravitaillement Asterix. Il a été livré dans les délais et le budget n'a pas été dépassé, et il s'agit selon moi d'un exemple de cas dans lequel les règles ont été suspendues de manière appropriée parce que l'armée était convaincue que nous avions besoin d'un navire de ravitaillement à ce moment‑là, et pas plus tard.
    Merci, monsieur Fisher.
    Quelle surprise, un gars de Halifax pense qu'un programme de Halifax est un excellent programme.
    Ils ont été construits en même temps.
    Nous avons deux personnes qui pensent qu'ils sont géniaux.

[Français]

     Monsieur Thériault, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais m'adresser à M. Shimooka qui, à ce que je vois, est un spécialiste des questions aériennes et de l'approvisionnement.
    Quand j'ai entendu parler pour la première fois du F‑35, j'étais encore plus jeune qu'aujourd'hui. C'était en 1997, sous le gouvernement Chrétien. Aujourd'hui, on parle de livrer le F‑35 en 2026.
    Une première question simple et rapide se pose: les infrastructures existeront-elles et seront-elles adaptées?
    Par ailleurs, serons-nous bien à la fine pointe de la technologie? Pourquoi, par exemple, ne pas avoir envisagé des drones? Je m'inquiète un peu de la vie utile d'un appareil et de ce qu'on donne à nos gens pour qu'ils puissent faire leur travail.
(1745)

[Traduction]

    Je ne suis pas tout à fait sûr de ce qu'il en est de l'infrastructure. Je sais que le gouvernement a présenté plusieurs programmes pour développer l'infrastructure de Bagotville et de Cold Lake.
     Je pense que le plus gros problème pour passer au F‑35 concerne le personnel. Comme nous pouvons le constater, l'ARC, l'Aviation royale canadienne, est bien en deçà du grade établi qui est requis pour ses pilotes et ses préposés à l'entretien. Sa capacité d'effectuer la transition vers une flotte de chasseurs... Nous pourrions recevoir le premier appareil en 2026, mais la question est de savoir quand nous aurons notre flotte complète et quand elle sera pleinement opérationnelle. Je crois que les dates étaient supposées être 2031‑2032, mais la réalité est que c'est probablement beaucoup plus tard que cela, parce que l'armée de l'air ne peut pas combler les postes de pilote et entretenir les appareils.
     En ce qui concerne vos questions sur les drones, je voudrais souligner qu'à mon avis, nous sommes certainement... Les opérations dans le Nord présentent des défis technologiques. Quand on regarde l'évolution de la guerre aérienne, l'humain est encore nécessaire. Il faut toujours que quelqu'un soit là pour fournir le dernier point de contact afin de faire fonctionner les chasseurs. Les drones n'ont pas atteint le stade où ils peuvent opérer avec la même efficacité; nous aurons donc besoin d'un chasseur avec pilote.
    Quand on regarde certains des développements à venir, on voit aussi des avions qui sont... Il s'agit d'une formation homme-machine, où les drones seront contrôlés par un chasseur piloté par un seul homme, comme le F‑35 ou un avion de la prochaine génération.

[Français]

    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    Nous passons à Mme Mathyssen.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Jaramillo, on voit des campagnes pour appeler les gouvernements et les Nations unies à proposer des limitations préventives à l'utilisation des technologies émergentes dans le domaine de la défense. Pourriez-vous nous parler de l'importance de ces réglementations proactives lorsqu'il s'agit de technologies émergentes et de la manière dont elles peuvent faire partie intégrante de notre stratégie d'approvisionnement?
    Bien sûr, et je vous remercie de cette question pertinente.
     Il existe un consensus croissant sur les technologies émergentes qui peuvent être intégrées dans les armées. Cela pose essentiellement toutes sortes de questions liées aux implications éthiques et juridiques et à l'aspect encore inexploré d'un régime normatif. La communauté internationale accorde une certaine attention à cette question, au fait qu'il s'agit vraiment d'un aspect inexploré. De nombreuses questions se posent quant à l'utilisation et à la conformité de l'emploi des technologies militaires émergentes avec les principes fondamentaux, par exemple, du droit international humanitaire, comme la distinction, la précaution, la proportionnalité, etc.
    Le Canada a participé à des réunions à Genève sur la CCAC, la Convention sur certaines armes classiques, et des discussions ont eu lieu au niveau national. Cependant, nous pensons que le rythme et la rapidité de ces développements sont tels que le Canada doit vraiment, de manière plus proactive et plus affirmée, élaborer un régime réglementaire et entamer la conversation en vue d'un régime normatif et réglementaire, parce que ces risques sont réels. Ils pourraient toucher non seulement les adversaires potentiels, mais aussi les citoyens canadiens, et il s'agit vraiment d'être à l'avant-garde, car ces technologies seront intégrées dans les forces armées.
     Nous ne pouvons pas fonctionner dans un vide normatif. Il est impératif que le Canada contribue, tant au niveau national qu'international, à l'élaboration d'un tel régime normatif.
    Il vous reste 30 secondes.
    Rapidement donc, faisons-nous bien les choses en incluant aussi dans la stratégie d'approvisionnement des questions comme les changements climatiques?
     La question est de savoir à quelle orientation politique répond cette stratégie d'approvisionnement. Comme je l'ai dit, la stratégie « Protection, Sécurité, Engagement » date déjà de 2017. Six ans, c'est beaucoup quand on pense à l'évolution du paysage et de l'environnement de la sécurité. Toutes ces conversations, même au sujet des F‑35, des nouvelles capacités ou de la construction navale — tout cela —, doivent nous amener à nous poser la question suivante: quel est le rôle prévu pour les Forces armées canadiennes?
     Dans ce contexte, par exemple, les comparaisons avec les États-Unis, le Royaume-Uni ou d'autres alliés peuvent ou non être vraiment pertinentes, parce que pour le Canada, la souveraineté dans l'Arctique, la protection des citoyens canadiens et, par exemple, le maintien de la paix sont des priorités historiques qui peuvent ne pas être en harmonie avec celles de nos alliés. On leur demande de...
    Nous allons devoir nous arrêter ici. Je vous remercie.
    Monsieur Bezan, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux contester un peu ce qu'a dit M. Fadden. Il a dit que l'opposition politique a créé des problèmes dans le passé. En ce qui nous concerne, je peux dire qu'au cours des huit dernières années, l'opposition n'a critiqué qu'un seul marché public. Il s'agit de l'achat des F‑18 d'occasion à l'Australie. Le gaspillage d'argent et le fait que nous n'ayons pas les pilotes pour les piloter étaient les principales raisons de le faire, mais pour le reste, nous sommes restés discrets, et je peux dire que j'ai été critiqué pour ne pas avoir fait assez de partisanerie en essayant de faire avancer certains achats.
     Cela étant dit, je regarde le général Foster, ainsi que vous, monsieur Fadden et monsieur Shimooka. Vous avez tous écrit à ce sujet par le passé. Des gens du ministère sont venus ici la semaine dernière pour parler de l'approvisionnement et ont, en fait, critiqué l'industrie parce qu'elle n'avance pas assez vite — elle ne veut pas construire de matériel si personne ne l'achète —, ou qu'elle n'a pas le matériel dont le monde a besoin, comme les munitions de 155 millimètres que nous pourrions fabriquer dès maintenant au nord de Montréal... Nous avons d'autres installations qui fabriquent des produits dont le monde a besoin en ce moment, y compris le Canada.
     Le ministère de la Défense prend souvent beaucoup de temps pour définir les achats, puis change les règles du jeu et continue à les reporter à plus tard, comme nous l'avons vu pour les navires de combat de surface — un bon exemple —, ce qui ajoute du temps d'attente et des retards. Nous n'avons toujours pas de plan final pour commencer à couper l'acier aux usines d'Irving. Comment pouvons-nous régler le problème?
     Général Foster, vous avez parlé d'une meilleure coopération entre l'industrie et les Forces armées canadiennes, mais c'est aussi au sein du ministère qu'il faut veiller à ce que les choses se fassent plus rapidement. Est‑ce la faute de l'industrie? Est‑ce la faute du ministère? Est‑ce que les généraux et les amiraux ne font pas les choses correctement ou ont une liste de souhaits trop longue qui pourrait rendre les choses impossibles?
(1750)
     Je voudrais juste aborder un point dont nous avons parlé, le F‑35. Il change la donne pour ce qui est de la sécurité. C'est un catalyseur pour le C4ISR, l'interopérabilité et le JADC2. Je pense que c'est le bon moment pour l'industrie et le gouvernement de s'asseoir et d'élaborer soigneusement ce projet. Il a fallu six ans aux Australiens pour mettre en place l'infrastructure et les conditions de sécurité nécessaires pour accueillir le premier F‑35. Nous avons discuté avec l'entreprise BAE.
    En ce qui concerne la transition au F‑18, l'industrie peut contribuer à la transition au F‑35 et au F‑18. Nous pouvons leur fournir des pilotes pour faciliter la transition, et nous pouvons, en fait, améliorer l'entretien. Il s'agit de déterminer ce qui est nécessaire et de prendre la décision de s'y atteler, plutôt que de s'en tenir au traditionnel « il faut passer par un processus concurrentiel pour que ce soit juste et transparent ». C'est une question de souveraineté nationale. Je pense que c'est souvent là où on trébuche, et c'est ce qui nous empêche d'avancer dans le présent cas.
     En ce qui concerne l'ajout d'exigences, vous avez mentionné les navires de combat de surface canadiens, un projet en cours depuis plusieurs années. Je ne pense pas que l'on ne puisse jamais mettre fin à la confusion ou aux problèmes qui surgissent au sujet des exigences, mais je pense qu'il y a eu une rupture entre les exigences initiales et la compréhension de ce qu'était la proposition.
    Je vous remercie.
    Monsieur Shimooka, ou monsieur Fadden...?
    Je reconnais votre point de vue au sujet des critiques, mais j'espère que vous reconnaîtrez le mien, à savoir que les critiques, qu'il y en ait ou non, sont ancrées dans la culture. Les gens craignent simplement le changement, mais je comprends votre point de vue.
    Lorsque je travaillais dans le secteur de la défense, le nombre d'ordres de modification dans tous les domaines me rendait fou. Je m'en veux, et j'en veux à mes collègues civils, de ne pas avoir contesté davantage ces ordres auprès des généraux et des amiraux. Ils veulent toujours une solution en or à leurs problèmes parce qu'elle protégera des vies, mais je crois que même au sein de l'armée, il y a une sorte d'entente entre les hommes et les femmes selon laquelle, vous savez, si la force aérienne veut telle ou telle chose, l'armée ne va pas critiquer cette demande. Il est très difficile d'obtenir un examen efficace à mesure que l'on monte dans la hiérarchie. L'une des rares choses qui a survécu à mon passage au ministère est un comité qui est maintenant présidé, ou qui était présidé, par l'amiral Murray, et qui est censé examiner ce genre de choses avant qu'elles ne quittent le ministère.
    Je pense qu'il s'agit en grande partie d'un désir de faire le bien, mais selon moi, il y a honnêtement un manque d'autodiscipline tant du côté du ministère que du côté de l'armée.
    Je vous remercie, monsieur Bezan.
    Veuillez prendre la parole, madame Lambropoulos.
(1755)
    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec M. Collins.
    Monsieur Foster, j'aimerais vous poser deux ou trois questions.
    Vous avez mentionné qu'il est préférable d'investir dans des domaines qui sont déjà très développés, plutôt que d'essayer de créer une concurrence là où elle n'existe pas encore dans ces industries. J'aimerais que vous me disiez quelles sont les industries canadiennes qui excellent dans ce domaine et quels sont les secteurs où notre capacité est plus limitée que celle de nos partenaires et alliés.
    Peut-être pourriez-vous ensuite répondre à la question que j'ai posée à M. Fadden. Quelles mesures le Canada peut‑il prendre pour établir un meilleur équilibre entre la nécessité d'assurer un approvisionnement efficace et l'objectif d'accroître réellement la capacité nationale?
    Répondre à toutes ces questions pourrait exiger beaucoup de temps.
    Dès le départ, le Canada a investi dans la recherche et le développement de WESCAM, et il a investi dans notre division de Dorval, qui appartenait à CAE à l'époque, afin de permettre l'élaboration du système intégré de gestion des plateformes. Ces deux systèmes sont reconnus dans le monde entier comme des capacités de premier plan. C'est cette coopération avec l'industrie en matière de recherche et de développement, plutôt que la logique d'investissement liée aux RIT — ou retombées industrielles et technologiques — ou à la proposition de valeur, qui est à l'origine de ces capacités. Si vous examinez la société CAE, vous constaterez qu'elle est de calibre mondial dans le domaine de la formation. Nous devrions continuer à développer ce type de capacités. Il y a aussi d'autres industries — Bluedrop Training, par exemple — qui excellent dans ce domaine. De plus, nous avons d'excellentes capacités en matière de cybertechnologie.
    J'ai parlé au président du CNRC. Si nous pouvions collectivement amener l'industrie à examiner les différents secteurs et à déterminer les domaines dans lesquels le Canada est vraiment le plus grand expert en matière de capacités, puis investir vraiment dans leurs capacités, nous pourrions être compétitifs à l'avenir.
    Monsieur Fadden, le directeur parlementaire du budget a comparu devant notre comité et a parlé du nombre de mains qui se trouvent sur le volant lorsqu'un projet franchit les étapes du processus d'approvisionnement. Il a insisté sur la nécessité d'avoir un seul point de contact pour des raisons d'efficacité et de responsabilisation. Compte tenu du fait que vous étiez au cœur de bon nombre de ces grands projets à mesure qu'ils avançaient dans le système, que pensez-vous de cette idée?
    D'un point de vue théorique, je pense qu'il a raison, mais d'un point de vue pratique, tant qu'il y aura un éventail d'objectifs politiques internes et externes au ministère, il sera très difficile d'avoir un seul point de mire. Si vous voulez que quelqu'un au sein des Forces armées canadiennes soit responsable d'une acquisition particulière, c'est très bien, mais il ou elle ne peut pas être responsable des composantes régionales, des composantes technologiques ou des composantes d'innovation.
    Je pense qu'il est souhaitable d'améliorer notre façon de faire les choses et que nous devons le faire, mais je ne crois pas que le fait de dire tout à coup qu'une personne sera responsable de tout dans l'environnement politique restreint actuel — et je ne veux pas dire un environnement « partisan », mais simplement un environnement « politique » — va fonctionner.
    Chers collègues, vous avez été tellement coopératifs et disciplinés qu'il nous reste en fait deux minutes.
    Je voudrais revenir sur l'observation que le général Foster a formulée au sujet de la collaboration avec les États-Unis et nos collègues américains. J'aimerais savoir dans quelle mesure vous êtes préoccupé par le statut national du Canada, qui est traité comme un fournisseur national aux fins de la fourniture d'équipements militaires. Pensez-vous que nous courons un risque à cet égard?
    Je pense que les États-Unis ont une meilleure capacité. Il est reconnu, si c'est ce à quoi vous voulez en venir, que notre propre industrie nationale fournit ce type de capacité. Je crois qu'il faut trouver un équilibre. Si le Canada...
    Non, ce à quoi je veux en venir, c'est à la façon dont nous sommes traités en tant qu'entité étrangère par l'industrie de la défense américaine, et en particulier par le gouvernement des États-Unis. Pensez-vous qu'il y ait un risque que nous perdions ce statut, dont nous jouissons depuis 1954, je crois, qui nous permet d'être traités comme un fournisseur national?
    Non, je ne crois pas que ce soit un risque, mais je pense que nous avons une bonne occasion de travailler avec les États-Unis et d'accroître nos propres capacités commerciales nationales en étant un meilleur fournisseur au sein de cette chaîne de valeur. Il s'agit d'une discussion de gouvernement à gouvernement qui se déroulerait comme suit: « Nous allons dépenser telle ou telle somme pour nous procurer un radar transhorizon, et nous voulons harmoniser notre achat avec la solution que vous choisissez, mais compte tenu de cette grande solution que les entreprises américaines vont apporter, nous voulons que vous investissiez dans la chaîne d'approvisionnement canadienne. »
(1800)
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je voudrais simplement faire savoir à tout le monde que c'est aujourd'hui la Journée de la Force aérienne sur la Colline du Parlement, et que nous devons tous nous réunir dans la salle 228 de l'édifice de la Bravoure.
    Je ne sais pas si c'est un rappel au Règlement, mais c'est certainement une annonce.
    Je tiens à remercier chacun d'entre vous pour sa coopération. Nous naviguons dans des eaux étranges en ce moment. Chers collègues, restez à l'écoute pour savoir si la réunion de jeudi aura lieu. Nous espérons qu'elle aura lieu.
    Cela dit, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU