:
La séance est ouverte. Il est 8 h 45 et je vois qu'il y a quorum.
Avant de donner la parole à nos distingués invités, j'aimerais annoncer une bonne nouvelle au Comité.
Il semble que nous ayons maintenant tout ce qu'il faut pour nous déplacer. Le budget a été adopté sans amendement et, hier soir, le rapport du Comité a été déposé sans objection. Il semble donc que nous allons pouvoir nous déplacer. Cela détermine ce que nous ferons mardi. J'aimerais réserver une heure mardi pour parler d'un certain nombre de travaux du Comité. Au cours de la première heure, nous parlerons de la contrôleuse externe et, au cours de la deuxième heure, des travaux du Comité.
Gardez cela à l'esprit et si nous avons plus de réunions... N'oublions jamais que des miracles sont toujours possibles.
Sur ce, je vais demander à M. Perry et à M. Williams de faire leur déclaration préliminaire de cinq minutes, sans ordre particulier.
M. Perry est le premier sur la liste.
Monsieur Perry, président de l'Institut canadien des affaires mondiales, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Merci, monsieur le président et membres du Comité, de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
Dans ma déclaration préliminaire, j'aborderai trois points. Je ferai quelques observations au sujet de notre système d'approvisionnement, je formulerai deux suggestions de problèmes que vous voudrez peut-être étudier, puis je présenterai deux recommandations.
La première observation que j'aimerais faire est que les problèmes associés à notre système d'approvisionnement sont systémiques, persistants et remontent maintenant à une décennie et demie. La plupart des projets, soit près des deux tiers, sont retardés d'au moins un an et bon nombre d'entre eux, de beaucoup plus. Par conséquent, nous continuons de dépenser des milliards de dollars de moins que prévu année après année. J'ai vu que le directeur parlementaire du budget vous a dit récemment qu'au cours du dernier exercice, nous avons sous-utilisé d'environ 4 milliards de dollars le budget qui était prévu dans le cadre de la politique « Protection, Sécurité, Engagement ». Il est important de noter que cette sous-utilisation du budget est chronique et remonte à 2007.
Cela signifie que nous n'avons pas seulement de la difficulté à mettre en œuvre les plans d'approvisionnement de la politique « Protection, Sécurité, Engagement », ce qui se produit effectivement, mais que nous travaillons encore sur les approvisionnements de la stratégie de défense « Le Canada d'abord » de 2008 et, dans certains cas, d'avant. C'est le cas en dépit d'une série de réformes antérieures de l'approvisionnement, qui n'ont tout simplement pas été suffisantes pour suivre le rythme de l'expansion prévue de notre système d'approvisionnement et de nos approvisionnements afin de respecter la politique actuelle. Sans changements majeurs, vous devriez vous attendre à ce que la mise en œuvre de la modernisation du NORAD annoncée l'été dernier et que la mise à jour de la politique de défense, quelle qu'elle soit, soient bien en deçà des attentes, parce que cela fait plus d'une décennie que nous ne sommes pas à la hauteur des attentes en matière d'approvisionnement. D'autres améliorations graduelles de notre système d'approvisionnement ne vont probablement produire que des améliorations graduelles de la production. Si nous voulons un rendement nettement meilleur, nécessaire pour mettre en œuvre la politique de défense et répondre à l'environnement stratégique actuel, nous devons apporter des changements radicaux au système.
La deuxième observation que j'aimerais faire est qu'il n'y a aucun sentiment d'urgence détectable dans notre système d'approvisionnement, ce qui pose problème pour au moins deux raisons.
Premièrement, le contexte actuel des taux d'intérêt et d'inflation signifie que les répercussions financières des retards dans l'approvisionnement sont maintenant beaucoup plus importantes qu'elles ne l'étaient il y a seulement un an et demi. Le fait de ne pas bouger en temps opportun pour ce qui est des approvisionnements est beaucoup plus lourd de conséquences en termes de perte de pouvoir d'achat.
La deuxième raison de l'urgence est l'environnement stratégique. Ce qui ressemble en grande partie à un statu quo ne suffit tout simplement pas à équiper le Canada pour le retour de la concurrence entre grandes puissances qui se produit à l'heure actuelle. Le fait que nos troupes en Lettonie soient privées de tout, des bouchons d'oreilles à la défense aérienne, n'est tout simplement pas acceptable dans le contexte actuel.
Permettez-moi de changer de sujet et de suggérer deux aspects que le Comité devrait étudier: les contrats de service et l'infrastructure.
Les contrats de service sont d'une importance fondamentale pour le ministère et les Forces armées canadiennes, qui dépensent beaucoup plus pour ce poste budgétaire que tout autre ministère. L'annonce dans le budget de 2023 d'une réduction de 15 % des dépenses de service représentera une réduction annuelle d'environ 750 millions de dollars pour le ministère de la Défense nationale, ou MDN, si elle est entièrement mise en œuvre. D'après mon analyse, il sera très difficile d'atteindre cet objectif sans que cela ait de graves répercussions sur les Forces armées canadiennes. Environ la moitié des dépenses du MDN dans ce domaine est consacrée aux services d'ingénierie et d'architecture. Une part importante appuie la prestation directe des programmes d'immobilisations et d'infrastructure ou permet d'assurer l'entretien des aéronefs, des véhicules et des navires. Le Comité voudra peut-être chercher à mieux comprendre les répercussions de ces compressions budgétaires sur l'approvisionnement.
En ce qui concerne l'infrastructure, la majeure partie de l'argent prévu pour la modernisation du NORAD est destinée à l'amélioration de l'infrastructure. Par ailleurs, le MDN a pris des engagements ambitieux en matière de carboneutralité, et pour s'en acquitter, il faudra essentiellement procéder à une refonte des infrastructures détenues par le MDN. Cela signifie que nous prévoyons une augmentation massive des dépenses d'infrastructure, une autre forme d'approvisionnement, au cours des prochaines années. Il n'est pas clair pour moi que nous ayons beaucoup progressé pour éviter que les mêmes problèmes que ceux que nous avons connus avec l'achat de biens d'équipement — des retards et des fonds inutilisés — se produisent en ce qui concerne des dizaines de milliards de dollars en dépenses d'infrastructure.
Enfin, j'aimerais formuler deux recommandations générales.
Premièrement, il faudra beaucoup de temps pour apporter les changements radicaux nécessaires à nos systèmes d'approvisionnement. Entretemps, il serait avantageux d'établir des priorités beaucoup plus importantes pour veiller à ce que les ressources très limitées et insuffisantes dont nous disposons actuellement puissent être concentrées sur les projets les plus prioritaires.
Deuxièmement, si nous voulons assister à des changements spectaculaires et significatifs, nous avons besoin de bien meilleures données sur la défense en général, des données sur tous les types de projets pour mieux comprendre ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et où sont les pires problèmes, et chercher des exemples de pratiques exemplaires qui pourraient être reproduites et appliquées ailleurs. Si nous voulons apporter des changements efficaces, nous devons mieux comprendre le système actuel, et je ne pense pas que nous le comprenions aussi bien que nous le voudrions.
Enfin, dans le même ordre d'idées, j'aimerais faire écho aux propos de témoins précédents au sujet de la valeur d'une plus grande transparence. Beaucoup trop de discussions sur l'approvisionnement en matière de défense au Canada se déroulent dans un quasi-vide d'information, et ce travail est trop important pour être fait en silence, à huis clos.
Merci.
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Monsieur le président, membres du Comité, je suis heureux d'être ici. Je vous suis vraiment reconnaissant d'avoir pris le temps d'étudier cette question, qui me passionne depuis des décennies.
Faillite. C'est le résultat simple et irréfutable des répercussions du processus d'acquisition du Canada sur le compte des immobilisations des Forces armées canadiennes. Les coûts d'immobilisations des nouveaux chasseurs et des navires de combat canadiens, les NCC, dépasseront 100 milliards de dollars sur une période de 10 ans. À moins qu'il n'y ait une injection de nouveaux fonds, ces deux programmes à eux seuls entraîneront un manque à gagner annuel de 5 milliards de dollars en capital.
Les processus d'acquisition des F‑35 et des navires de combat canadiens ont tourné à la catastrophe.
En ce qui concerne les avions à réaction, en 2010, le gouvernement conservateur a tenté de les attribuer à un fournisseur unique sans aucune autorisation légale, et il a passé des années à induire la population canadienne en erreur quant aux raisons pour lesquelles il voulait le faire. Le gouvernement libéral, après avoir promis de ne pas acheter les F‑35, a dilué la politique des retombées industrielles et techniques pour permettre à Lockheed Martin de participer au processus, a déclaré la soumission de Boeing non conforme et, plus tôt cette année, 12 ans et demi après le début de ce programme, il a attribué le contrat à Lockheed Martin.
Les coûts sont passés d'une estimation initiale de 9 milliards de dollars pour l'acquisition et de 18 milliards de dollars pour l'entretien des avions à réaction à une prévision actuelle de 19 milliards de dollars pour l'achat des appareils et de plus de 70 milliards de dollars pour leur entretien.
En ce qui concerne les navires, après avoir violé tous les principes fondamentaux de la saine gestion des marchés publics, le gouvernement est sur le point d'acquérir 15 navires pour un coût de deux à trois fois plus élevé que leur coût réel. Les coûts d'immobilisations des NCC sont passés d'environ 26 milliards de dollars à 85 milliards de dollars, et le coût du cycle de vie est maintenant estimé à plus de 300 milliards de dollars.
Heureusement, la prescription visant à réduire considérablement les risques de débâcles futurs du processus d'approvisionnement n'a rien d'un mystère. Les trois principales lacunes du processus actuel d'acquisition de matériel de défense sont l'absence de responsabilité ministérielle, l'absence de mesures du rendement et l'absence de rapports adéquats, dont M. Perry vient de parler.
Parmi nos proches alliés, le Canada est le seul pays doté d'un système de reddition de comptes dispersé. Les rôles et les responsabilités au chapitre de l'approvisionnement en matière de défense sont partagés entre les ministres de la Défense nationale et de Services publics et Approvisionnement Canada, ou SPAC. À moins qu'un ministre ne soit chargé exclusivement de l'approvisionnement en matière de défense, celui‑ci ne sera jamais aussi efficient et efficace qu'il pourrait ou devrait l'être. Les avantages de la création d'une seule organisation d'approvisionnement vont au‑delà du renforcement de la responsabilisation.
Premièrement, le processus serait simplifié.
Deuxièmement, des économies découleront de l'élimination des frais généraux et du dédoublement des fonctions. C'est un avantage crucial à un moment où la Défense nationale souffre d'un manque de personnel aussi important.
Troisièmement, sans un ministre responsable de l'approvisionnement en matière de défense, il est difficile, voire impossible, de mettre en place des mesures de rendement à l'échelle du système. Nous avons besoin d'indicateurs qui, au minimum, permettent de mesurer les délais et les coûts. S'il y a des retards, où sont les goulots d'étranglement dans le processus? Il est impossible d'apporter des améliorations si nous ne comprenons pas clairement où se situent les problèmes.
En ce qui concerne les coûts, il faut répondre à deux questions fondamentales. La première est la suivante: quel est le coût total du cycle de vie d'un programme? La deuxième est: en avons-nous les moyens?
Aujourd'hui, les deux questions sont mal abordées. Pour mieux répondre à ces questions, un plan d'immobilisations doit être disponible et présenter le coût du cycle de vie complet de chaque projet sur une période de 30 ans, en fonction des fonds disponibles prévus d'une année à l'autre. Un tel plan aurait permis de faire la lumière sur la crise actuelle des coûts des NCC et, franchement, il aurait grandement aidé le Comité à s'acquitter de son rôle.
L'approvisionnement en matière de défense est une entreprise. Commençons par l'administrer comme tel, avec un ministre responsable des résultats, une divulgation complète des coûts du cycle de vie, des plans et des rapports appropriés qui mesurent le rendement, et une surveillance rigoureuse et opportune.
Merci.
:
Je ne veux pas dire quoi faire au gouvernement. Dans mon livre intitulé
Reinventing Canadian Defence Procurement, j'ai décrit un certain nombre de modèles, tous facilement réalisables sur le plan législatif. Vous pouvez confier cette responsabilité au ministre de la Défense nationale ou au ministre de Services publics et Approvisionnement, ou SPAC. Vous pouvez créer un troisième ministre responsable de l'approvisionnement en matière de défense. Peu m'importe. Cependant, ce qui me préoccupe, c'est que c'est le seul domaine où nous dépensons des milliards de dollars par année où le premier ministre ne peut pas nommer un ministre et lui dire qu'il fait un excellent travail ou qu'il fait un mauvais travail.
Par exemple, si vous avez un certain nombre d'enfants et que vous leur demandez de sortir les poubelles, il est probable que ce ne sera pas fait. Si vous dites à un enfant en particulier de le faire, vous avez de meilleures chances qu'il le fasse.
Ce chevauchement et ce double emploi signifient que personne n'a de comptes à rendre. Le processus devient donc beaucoup moins rigoureux. Nous ne nous concentrons pas sur les détails et nous faisons preuve de négligence. C'est pourquoi nous ne dépensons pas assez. C'est pourquoi nous ne savons pas où sont les goulots d'étranglement. C'est la raison pour laquelle les coûts augmentent énormément. C'est parce qu'on ne peut pas tenir une personne responsable en particulier.
Je pense que c'est une lacune fondamentale qui peut facilement être corrigée. Cela ne réglera pas tous les problèmes — certainement pas —, mais je peux vous dire que si nous ne le faisons pas, nous ne corrigerons pas le système. À mon avis, c'est une étape obligatoire.
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Je comprends, monsieur le président. Ayant deux enfants, je peux vous dire que même si l'on pose la question à l'un d'entre eux en particulier, cela ne se fait habituellement pas...
Des députés: Ha, ha!
M. Bryan May: ... du moins pas du premier coup.
Messieurs, tout d'abord, merci d'être ici aujourd'hui.
Lors de notre dernière réunion, les témoins ont souligné l'importance d'améliorer l'approvisionnement en matière de défense en simplifiant le processus et en réduisant les strates de politiques susceptibles d'entraver l'approvisionnement.
Je vais commencer par M. Perry.
Selon votre expérience, quelle est la leçon la plus importante que le gouvernement devrait tirer des discussions pour aider à relever les défis actuels de la simplification et de la rationalisation du processus d'approvisionnement?
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Pour continuer sur la métaphore de la responsabilité et des enfants qui sortent les poubelles, si vous ne tenez pas vos enfants responsables de quoi que ce soit, peu importe combien vous en avez, la reddition de comptes devient un problème plus général.
Dans bien des cas, dans ce système d'approvisionnement très dispersé, il est difficile de voir des preuves que les gens sont tenus responsables de leur part du travail.
À titre d'exemple, est‑ce que les différents services — l'armée, la marine et l'aviation — font avancer leurs projets en temps opportun, conformément aux calendriers militaires internes? Est‑ce que quelqu'un vérifie leur rendement et les tient responsables?
En ce qui concerne les propositions de retombées industrielles et technologiques, ou RIT, qui sont présentées pour des projets, est‑ce que les normes de prestation de services pour les mettre en oeuvre sont respectées en temps opportun ou est‑ce qu'elles retardent l'avancement des dossiers?
Je ne crois pas qu'il y ait de données qui permettent de répondre à ces questions.
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Encore une fois, je pense qu'il est vraiment important qu'une seule personne soit responsable.
Je signale qu'en 2009, l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité, ou l'AICDS, a publié un rapport contenant une recommandation en ce sens. Je vous rappelle qu'en 2019, les lettres de mandat du gouvernement libéral demandaient aux deux ministres de donner suite à cette recommandation. Cela ne s'est pas produit. Le directeur parlementaire du budget, ou DPB, Yves Giroux, a aussi dit que c'était obligatoire.
C'est obligatoire pour moi. Nous n'obtiendrons jamais aucun renseignement sans cela. Nous ne ferons jamais d'économies sans cela.
Le chevauchement et le double emploi entre ces deux ministères sont importants. Nous parlons ici de dizaines de millions de dollars et de personnes dont le travail est entravé parce que leurs tâches se chevauchent et font double emploi. Il faut mettre fin à ces chevauchements.
Je n'ai aucune idée pourquoi on ne le fait pas. Il n'y a aucune raison de ne pas le faire, sauf si cela vous indiffère. Cela ne vaut peut-être pas une tonne de votes. Peut-être que pour la plupart des Canadiens... Ce n'est pas là que vous voulez investir vos efforts. Je ne sais pas, mais pour moi, cela va de soi.
En toute franchise, j'en parle depuis 20 ans. Tous les autres pays qui ont un ministère de la Défense ont nommé un ministre responsable, qu'il s'agisse du secrétaire à la Défense des États-Unis, du secrétaire d'État à la Défense du Royaume-Uni ou du ministre de la Défense de l'Australie. Tout le monde en nomme un. Pourquoi pas? Je n'arrive pas à comprendre pourquoi cette mesure n'a pas été prise.
:
Voulez-vous que je commence?
[Français]
Je vous remercie de votre question. Je vais y répondre en anglais, ce sera plus facile pour moi.
[Traduction]
L'acquisition de matériel de défense doit découler de l'orientation stratégique du gouvernement en matière de défense. Le gouvernement doit se lever et dire haut et fort que c'est le rôle qu'il entrevoit pour le ministère de la Défense, au Canada et ailleurs dans le monde. Ensuite, il faut s'adresser aux militaires et aux civils du ministère de la Défense nationale et leur demander, compte tenu du mandat qui leur est confié, quelles sont les répercussions sur l'approvisionnement? Quels sont les biens et services qu'ils doivent acquérir et combien coûtent-ils?
Périodiquement, les militaires ont produit différents [Inaudible]. « Protection, Sécurité, Engagement » est une initiative récente, et elle se poursuit. Cependant, ce lien n'est pas établi de façon suffisamment rigoureuse pour que l'on puisse discerner l'une de l'autre. La raison pour laquelle c'est si important, c'est que si les militaires précisent le coût, le gouvernement doit alors prendre une décision. Si le coût est beaucoup plus élevé que prévu, ils doivent être prêts à modifier le rôle et le mandat des militaires ou leur dire: « Nous allons vous donner x milliards de dollars pour que vous puissiez faire ce que vous dites que vous devez faire pour vous acquitter du rôle que nous pensons que vous devriez jouer. »
Tout d'abord, nous ne faisons pas preuve de cette rigueur. Nous n'avons pas ce genre d'initiative étalée sur 30 ans. Nous fonctionnons en vase clos avec des projets qui sont approuvés et qui sont ensuite retardés, et personne ne sait exactement où nous en sommes. Je pense que c'est là que réside le gros problème.
:
Le dossier des F‑35 est maintenant réglé. Au bout du compte, nous aurons un excellent avion à réaction. Le processus dure depuis 12 ou 13 ans, ce qui est aberrant, mais il est sur le point de se conclure. J'abonderais dans le même sens — je n'ai pas de preuve évidente, mais encore une fois —, s'il n'y avait qu'un seul ministre responsable, bien informé et compréhensif, je ne pense pas que nous aurions vécu ce gâchis.
L'une des choses qui me frappent, et cela vient d'un bureaucrate, c'est que l'un des rôles clés d'un sous-ministre adjoint consiste à garder nos ministres à l'abri des ennuis. Je dirais que les ministres des deux partis avec lesquels j'ai travaillé étaient des gens merveilleux qui voulaient aider leur ministère à faire son travail.
Franchement, ce que nous voyons depuis des décennies, ce sont des acquisitions majeures où les ministres, au lieu d'être remerciés, se font blâmer pour des processus inefficaces, en vertu desquels il faut des décennies pour faire quelque chose qui devrait être fait en deux, trois ou quatre ans. Comment en sommes-nous arrivés là? Je pense que cela doit être... Il faut se demander pourquoi les ministres ont été placés en position d'échec, parce que ces processus sont incroyablement inefficaces.
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C'est le problème évident.
Il est facile pour moi d'expliquer comment y arriver. Ce n'est pas compliqué. Je l'ai expliqué. Le fait que cela n'ait pas été fait est purement politique. Habituellement, on pourrait considérer qu'un ministre gagne et qu'un autre perd. C'est pourquoi j'ai toujours dit que le meilleur moment pour le faire, c'est pendant une campagne où vous allez nommer de nouveaux ministres. À ce moment‑là, il ne s'agit pas d'enlever une responsabilité à un ministre pour la donner à quelqu'un d'autre. Je pense que c'est le meilleur moment pour le faire.
Vous avez raison, cependant. C'est un problème purement politique et, comme je l'ai dit, il n'y a aucune raison de ne pas le faire. Cela permettrait d'économiser de l'argent et de gagner du temps. Nous obtiendrions de meilleures mesures du rendement, et je compte donc sur le Comité pour défendre vigoureusement cette idée, comme l'a fait l'industrie canadienne de la défense. Le a demandé que cela se fasse, mais cela n'a pas été fait. Le directeur parlementaire du budget appuie également cette idée. Tout le monde dit que cela devrait être fait, mais cela n'a pas été fait.
Très brièvement, lorsqu'on lance un appel d'offres, toutes les conditions que quiconque doit respecter sont énoncées dans ce document. Lorsque l'on répond en tant que soumissionnaire, on reconnaît qu'on va les respecter toutes. Une fois le soumissionnaire retenu, il y a très peu de négociation à faire.
À l'inverse, si vous faites affaire avec un fournisseur unique, rien de cela n'est décidé et, en fait, l'effet de levier est détenu par le soumissionnaire. Vous avez dit que vous pensez qu'ils peuvent remplir les conditions. Vous n'avez pas lancé de concours, et vous ne pouvez pas en être certain, mais vous allez quand même leur confier le contrat. Les négociations peuvent prendre des mois, voire des années, pour finaliser un processus.
Si vous lancez un processus, ça va. Lorsque j'étais là‑bas, en fait, j'ai fait passer le délai de 16 à 9 ans, parce qu'avec le vice-chef, nous avons dit aux hommes et aux femmes du ministère... deux ans pour préparer un énoncé des besoins opérationnels, deux ans pour en faire un contrat, puis cinq ans pour l'exécution.
En fait, il est possible d'accélérer le processus en procédant intelligemment.
:
Il est difficile de désigner un projet en particulier, parce que nous ne rendons pas compte de ces données, simplement pour faire comprendre ce point, mais la majorité des projets sont en retard. Je pense que c'est assez largement réparti.
Ce qu'il faut également considérer, c'est qu'à mon avis, cette dynamique... Il ne s'agit pas seulement des crédits non dépensés. Nous parlons de la différence entre ce qui était prévu pour 2017 et le manque de progrès. Les ministères ne demandent même pas d'argent dans le budget des dépenses. Ensuite, il y a les crédits non dépensés. La différence nette entre les dépenses prévues dans le cadre de la politique « Protection, Sécurité, Engagement » et ce qui est dépensé, selon les comptes publics, c'est ce dont je crois que le directeur parlementaire du budget et moi parlions en ce qui concerne cette différence de 4 milliards de dollars.
Je m'attends à ce que la situation s'aggrave parce que, si vous consultez le profil des dépenses de la politique « Protection, Sécurité, Engagement », dont le DPB a fait rapport, vous constaterez que ce montant est censé monter en flèche au cours des prochaines années. Nous augmentons progressivement les sommes que nous dépensons, mais le montant qui devait être dépensé devait augmenter considérablement pour atteindre environ 11, 12 ou 13 milliards de dollars, alors que nous dépensons actuellement environ 6 milliards de dollars.
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Bien sûr, mais ce n'est pas aussi compliqué que cela en a l'air. Toute pièce d'équipement que vous voulez... Ce n'est pas comme s'il y en avait 10 ou 15 dans le monde. Il y a habituellement deux ou trois camions ou deux ou trois navires. Ce n'est pas qu'il y en ait beaucoup. Nous perdons beaucoup de temps à essayer de canadianiser ce que nous achetons. Nous devrions chercher uniquement des actifs hautement développés. Nous ne l'avons pas fait pour les navires. Les navires que nous achetons ne sont pas développés. Les systèmes que nous mettons en place ne sont pas développés. Toutes ces choses augmentent le risque et le coût.
Si, en fait, vous allez chercher le meilleur produit sur le marché, cela ne prend pas beaucoup de temps et d'efforts. Si nous ne dépensons pas des milliards de dollars pour essayer de les canadianiser, nous réduisons le risque d'intégration, et nous pouvons obtenir ce que nous voulons assez rapidement.
Aujourd'hui, nous achetons essentiellement des logiciels. Nous achetons des logiciels dans des cadres différents; que ce soit un navire ou un camion, peu importe. Lorsque vous achetez quelque chose aujourd'hui, vous pouvez l'acheter rapidement et efficacement et faire en sorte que le cycle de vie envisage la mise à niveau du logiciel de façon rentable. C'est ce que nous devrions faire.
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Bien sûr. À titre d'exemple, il y a de nombreux « commanditaires des capacités » différents pour les projets. Dans l'ensemble de l'armée, de la marine, de l'aviation et de l'infrastructure de la Défense nationale, nous n'examinons pas systématiquement quels projets donnent de meilleurs résultats ou de moins bons résultats.
Y en a‑t‑il qui réussissent mieux à franchir toutes les étapes? Si c'est le cas, pourquoi? Les gens qui travaillent dans cette organisation reçoivent-ils plus de formation? Ont-ils plus de personnel? C'est ce genre de choses.
Vous pourriez également examiner d'autres parties de l'organisation. Les gens de la Défense nationale laissent généralement entendre que le processus des retombées industrielles et technologiques pose des problèmes pour leur approvisionnement. Je ne sais pas si cela se fonde sur des preuves.
C'est bien beau de faire cette affirmation, mais si c'est un problème, quelle en est l'ampleur? Combien de jours sont perdus à cause de cela? Est‑ce pour tous les projets? Est‑ce seulement pour le transport aérien ou maritime?
Ce genre d'information n'est pas systématiquement recueilli. Je pourrais continuer à donner toutes sortes d'autres exemples. Il serait utile d'avoir une meilleure compréhension pour examiner les occasions de tirer des leçons de ce qui fonctionne et de corriger les lacunes constatées.
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Nous reprenons nos travaux.
Nous vous remercions de votre présence. Cela ressemble à un groupe de généraux à la retraite. Apparemment, ils sont maintenant libérés des entraves des confinements précédents et sont prêts à dire ce qu'ils pensent.
Sur ce, nous avons le lieutenant-général à la retraite Andrew Leslie, que tout le monde ici connaît. Nous accueillons le brigadier-général à la retraite Gaston Côté par vidéoconférence et le lieutenant-général à la retraite Guy Thibault, ancien vice-chef d'état-major de la Défense.
Nous n'avons pas besoin d'expliquer comment parler à un comité.
Sur ce, et sans ordre particulier, lieutenant-général Leslie, vous disposez de cinq minutes, monsieur.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à parler de l'impact des processus d'approvisionnement du Canada sur les Forces canadiennes.
En termes simples, son effet cumulatif sur la production des Forces armées canadiennes se situe entre « requiert une amélioration considérable » et « catastrophique ».
Pour les petites choses et les articles relativement simples, le processus d'approvisionnement est lent, compliqué et extrêmement bureaucratique, mais il fonctionne, s'il y a suffisamment d'argent et de personnel pour le mener à bien. Pour les capacités majeures, le cœur des forces armées en termes d'équipement, comme les navires, les avions, les chars, les armes de l'armée, le processus d'acquisition actuel est défaillant et en état de crise.
La productivité des forces armées peut être mesurée en fonction de leur degré de préparation à remplir les missions difficiles et dangereuses que nous leur confions, qu'il s'agisse de faire la guerre, de maintenir la paix, de dissuader ou d'intervenir sur le territoire national. Pour être prêtes, les forces ont besoin d'une politique gouvernementale appropriée. Elles ont besoin d'un financement adéquat. Elles ont besoin du personnel, de l'infrastructure, de l'équipement et de la formation appropriés. Tout cela s'appuie essentiellement, en l'occurrence, sur la politique « Protection, Sécurité, Engagement » de 2017 qui, soit dit en passant, se lit très bien, mais dont la quasi-totalité des nombreuses promesses et des nombreux objectifs n'ont pas été réalisés, et dont aucun de ses modèles financiers détaillés et rigoureusement élaborés ne s'est concrétisé.
Nous venons d'entendre M. Perry et M. Williams. Nous savons tous maintenant qu'il y a une différence dramatique et énorme entre ce qui a été promis et ce qui a été livré aux forces, en termes de milliards de dollars qui auraient dû être dépensés pour l'équipement et la capacité, ce qui ne l'ont pas été.
Même si le MDN obtient l'argent promis, il ne semble pas pouvoir le dépenser pour les grandes choses qui comptent vraiment. Le processus étouffe la capacité de faire avancer les choses. Soit dit en passant, les retards sont coûteux. Ils ont une incidence sur la hausse des coûts en raison de l'inflation ou de la fragilité de la chaîne d'approvisionnement. Voilà où nous en sommes: le prix du retard est le prix de l'échec. Le MDN n'arrive jamais à suivre le rythme des échecs du processus d'approvisionnement en matière de défense. Qu'est‑ce que cela signifie?
Pour ce qui est de la défense au Canada, le NORAD est essentiellement sous-financé. Diverses grandes promesses ont été faites pendant des années, mais il y a un énorme déficit auquel nous aurions dû contribuer au cours de la dernière décennie. Notre Arctique n'est pas défendu. Il n'y a dans notre Arctique aucun type d'équipement majeur permanent qui soit canadien.
Les interventions sur le territoire national en cas d'incendie et d'inondation sont de plus en plus nombreuses, mais les militaires n'ont pas l'équipement ou même les effectifs nécessaires pour intervenir adéquatement.
À l'ONU, nous avions l'habitude de déployer des milliers de soldats dans le cadre de missions de maintien de la paix, que le Canada a d'ailleurs co‑inventées. À l'heure actuelle, selon les chiffres de l'ONU, nous avons 27 militaires déployés dans des missions de l'ONU, soit la moitié d'un autobus scolaire.
Pour ce qui est de l'OTAN, nous étions censés envoyer un groupement tactique à court préavis s'il y avait lieu de le faire, ce qui est d'ailleurs le cas, — n'oublions pas ce que fait la Russie, ces atrocités en Ukraine. Il nous a fallu des mois pour envoyer quelques centaines de soldats. Nous sommes censés envoyer un groupe de brigade et le commander. Il n'est toujours pas parti.
En ce qui concerne la paix et de la sécurité internationales, il y a du bon travail à faire dans la région indo-pacifique où la Chine exerce sa puissance. Nous ne l'avons pas encore fait. Nous envoyons plus de navires, et nous en aurons donc trois temporairement dans le secteur, ce qui est une énorme réalisation, mais ces navires sont extrêmement vétustes.
Des milliards de dollars qui auraient dû être consacrés à l'infrastructure et aux installations de formation n'ont pas été dépensés. On les a laissés expirer ou disparaître.
Pour ce qui est de l'équipement, la marine n'a toujours pas signé son nouveau contrat de navire de guerre. Des décennies se sont écoulées depuis. Nos sous-marins ont été construits dans les années 1980. Nos avions de patrouille maritime sont beaucoup plus vieux que l'équipage moyen. Il manque des nouvelles armes, comme des torpilles et des missiles.
Dans l'armée, les nouveaux lance-roquettes ou lance-missiles, qui sont si bien utilisés par l'Ukraine, viennent d'autres pays pour tenter d'arrêter les Russes. Les nouveaux canons d'artillerie, les systèmes de défense aérienne à basse, moyenne et haute altitude, les véhicules de ravitaillement de l'armée de l'air, les nouveaux chasseurs... Des contrats ont été annoncés, mais je ne vois pas de chasseurs sur la piste.
Je suppose que cela revient à dire qu'une annonce ne suffit pas. Il faut que ce soit fait.
Quel est le résultat? Qu'est‑ce que cela signifie? À mon avis, notre système d'approvisionnement pour les grands projets d'investissement est un échec.
Je me ferai un plaisir de vous conseiller sur la façon de traiter de ces sujets lors de la période des questions.
Je vous remercie de votre attention.
:
Bonjour, monsieur le président et distingués membres du Comité. Au nom de la Conférence des associations de la défense, je suis très heureux de contribuer aux discussions d'aujourd'hui sur l'approvisionnement en matière de défense et sur l'état de préparation des Forces armées canadiennes. Comme le président l'a mentionné, j'ai été vice-chef d'état-major de la défense. Je me ferai un plaisir de vous parler de mon expérience sur les questions du jour pendant la période de questions.
[Français]
Votre comité étudie un sujet important, étant donné les tendances et les menaces inquiétantes que nous observons à l'échelle internationale. Nous espérons que votre travail contribuera à nourrir la réflexion du gouvernement sur l'actualisation de la politique de défense qui a été annoncée dans le budget de l'année dernière. Nous en attendons avec impatience les résultats.
[Traduction]
Compte tenu de ce qui intéresse le Comité, le premier point dont je vais traiter s'impose de lui-même. S'agissant de l'état de préparation opérationnelle des militaires, on peut parler « d'action en l'état » consistant à combattre dans l'état où l'on se trouve. On ne peut rien ajouter à ce dont on dispose. Les Forces armées canadiennes vivent aujourd'hui avec les conséquences organisationnelles et l'état de préparation hérités des politiques passées du gouvernement du Canada et des jugements, décisions et processus politiques, militaires et bureaucratiques connexes, ce qui comprend les processus d'approvisionnement à cause desquels nos forces armées sont aujourd'hui mal adaptées au monde d'aujourd'hui. Cela comprend les vulnérabilités critiques, les défauts de capacité par rapport aux menaces traditionnelles ainsi que les menaces émergentes et les niveaux de disponibilité du personnel et du matériel dans les forces armées qui sont bien en deçà de ce qui est nécessaire pour exécuter et maintenir les missions militaires et atteindre les objectifs stratégiques que les gouvernements successifs nous ont fixés dans nos politiques de défense.
La population canadienne peut être surprise de l'état de nos forces armées, mais elle ne le devrait pas. Comme les membres du comité permanent le savent peut-être, le 16 avril, soit il y a deux mois jour pour jour, notre organisation, la Conférence des associations de la défense, en collaboration avec l'Institut de la CAD, a piloté la rédaction et la publication d'une lettre ouverte signée par plus de 60 personnalités éminentes: anciens vice-premiers ministres, ministres des Affaires étrangères et ministres de la Défense — toutes allégeances politiques confondues —, conseillers en sécurité nationale et sous-ministres, anciens chefs d'état-major de la défense, diplomates et chefs d'entreprise. Dans cette lettre, les signataires ont souligné le fait qu'au Canada, les questions de sécurité nationale et de défense sont rarement traitées avec sérieux ou en tant que priorité, sauf en période de grand péril. La lettre invitait le gouvernement à agir de toute urgence, étant donné que nous sommes certainement face à un péril.
Après des années d'austérité marquées par la réduction des dépenses, des effectifs et le report d'investissements, il n'est pas étonnant que les capacités de défense du Canada se soient atrophiées. Malgré des annonces très positives au sujet de la modernisation du NORAD, du remplacement des CF‑18 et de l'ajout d'excellentes capacités à nos inventaires au cours des dernières années, en réalité bon nombre de nos systèmes militaires sont désuets et technologiquement dépassés. De plus, nos forces sont terriblement inadéquates quant à leur taille, à la modernité des équipements en service, au maintien en puissance et aux infrastructures pour protéger notre territoire et nos approches maritimes. Nous ne réussissons pas non plus à contribuer de façon notable aux efforts de défense et de sécurité collectives de nos alliés et partenaires du NORAD et de l'OTAN ni à partager leur fardeau en la matière.
Cependant, le piètre état de préparation de nos forces armées ne peut pas être entièrement attribué à l'approche du Canada en matière d'approvisionnement de défense. Compte tenu des changements rapides que nous observons dans nos sociétés, des progrès technologiques incroyables et perturbateurs, et de la montée des puissances révisionnistes autoritaires, le Canada n'est pas le seul pays à devoir adapter ses forces au monde instable, incertain et imprévisible dans lequel nous vivons. Cependant, nous semblons nous être enfoncés dans un trou beaucoup plus profond que bon nombre de nos alliés.
Le gouvernement du Canada devrait‑il traiter les problèmes de disponibilité opérationnelle comme une crise et une urgence? Est‑ce une priorité du gouvernement et une priorité personnelle pour le , la et leurs collègues du Cabinet? Reconnaît‑on que nous ne pouvons pas nous permettre de continuer comme si de rien n'était?
S'agissant des approvisionnements en matière de défense, il est malheureux que, comme d'habitude, les besoins militaires soient rarement le facteur le plus important ou le plus pertinent et ils peuvent même être une préoccupation secondaire, voire tertiaire, en regard d'autres objectifs stratégiques associés à des avantages économiques, régionaux ou sociétaux. Le maintien du statu quo revient à dire que la plupart des acquisitions, surtout les grandes capacités, seront très certainement retardées, qu'elles ne répondront plus aux exigences militaires établies à l'origine par les planificateurs militaires et qu'elles coûteront inévitablement plus cher qu'elles ne le devraient. Peu de gens diraient que nous en avons pour notre argent. Au bout du compte, quand nous dépensons plus que ce dont nous avons besoin sur le plan des capacités, cela laisse beaucoup moins d'argent pour d'autres besoins militaires importants.
On peut douter qu'un autre sujet de défense au Canada ait été examiné, étudié et débattu plus en profondeur que l'approvisionnement militaire. Malgré les engagements pris par les gouvernements au fil des ans pour rendre notre système plus efficace et efficient, il semble que, partant, on ne puisse guère espérer mieux qu'une démarche incrémentaliste.
Un changement fondamental, si c'est ce que veut le gouvernement du Canada, ne se produira probablement pas sans trois conditions.
Premièrement, il faudra avoir la volonté de réviser les politiques, les règlements et les procédures applicables pour distinguer clairement l'approvisionnement en matière de défense, l'approvisionnement militaire, y compris la capacité de personnel spécialisé, du reste de l'approvisionnement en services gouvernementaux.
Deuxièmement, il faudra recadrer le calcul du risque au vu de l'aversion des bureaucrates et des politiques à assumer les risques associés à de nombreux achats de matériel de défense. Tous les achats comportent des risques financiers et politiques liés aux processus, aux programmes et technologies, mais les achats de défense sont fondamentalement associés à des risques pour la vie, la sécurité nationale, la santé et même la réussite des missions. On ne semble pas toujours accorder à ces achats l'importance qu'ils méritent.
Enfin, comme on l'a déjà dit, l'approvisionnement est complexe à dessein et personne n'en est responsable, et il convient de régler ce problème.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Je dois dire, très brièvement, que je suis extrêmement déçu qu'on ait envisagé de rassembler ces cinq témoins dans un seul groupe pour deux heures de séance, avant de finalement les scinder en deux, ce qui nous a fait perdre six minutes pendant la transition. Nous devons faire mieux que cela, monsieur le président.
Merci beaucoup de vos témoignages jusqu'ici, messieurs.
Ma première question s'adresse au général Leslie.
L'histoire, selon vous, nous a montré que deux personnes seulement comptent vraiment: le premier ministre et le ministre des Finances. Le actuel et l'actuelle s'intéressent-ils de près à la sécurité nationale et à l'amélioration des approvisionnements?
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Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais répondre en me fondant sur ma propre expérience.
Je ne vais pas vous parler de mon expérience de major-général nouvellement promu et envoyé en Afghanistan avec environ 3 000 soldats canadiens sous ses ordres. Je vais plutôt vous parler de la façon dont le système d'approvisionnement a fonctionné sous la direction de trois premiers ministres différents. Très franchement — et je vais vous révéler la morale de l'histoire —, c'était superbe, ce qui prouve que le système peut fonctionner quand tout le monde est suffisamment intéressé et focalisé.
Pendant cette période, nous avons acheté de nouveaux canons, de nouveaux radars, de nouveaux équipements de combat nocturne, de nouveaux véhicules blindés à l'épreuve des mines, de nouveaux hélicoptères lourds, de nouveaux fusils pour tireurs d'élite, de nouveaux avions de transport gros porteurs, et j'en passe. Dans plusieurs cas, certains de ces systèmes, comme les nouveaux chars ont été achetés en un temps éclair, soit en moins de cinq ou six mois, et de nouveaux avions de transport lourd, les C‑17, l'ont été en six mois environ. Le système peut donc fonctionner.
Qu'est‑ce qui était différent alors? Je ne sais pas, je vais simplement vous dire ce que j'ai vécu et ce que d'autres ont vécu. En tant que commandant de la force opérationnelle, j'étais appelé à faire les briefings du premier ministre Chrétien qui nous a assurés, par l'entremise de la chaîne de commandement en place, que le système répondrait comme il le devrait, et les directives données au greffier ont été répercutées jusqu'aux échelons inférieurs. Bien sûr, lors de ces briefings, j'étais en compagnie du ministre de la Défense nationale.
En ma qualité de commandant de l'armée de terre à l'époque du gouvernement Martin, puis du gouvernement Harper, j'étais personnellement chargé des briefings au chef du gouvernement, en présence du chef d'état-major de la défense et du sous-ministre, ainsi que du ministre. Nous formions le groupe censé faire les points de situation.
Le système fonctionnait parce qu'on rassemblait habituellement trois à quatre personnes clés dans la salle, soit le premier ministre, le ministre des Finances, le ministre de la Défense nationale et parfois le président du Conseil du Trésor.
Le système fonctionne quand, même dans des circonstances désastreuses, on met l'accent sur les résultats réels ce qui, soit dit en passant, se fait déjà. Ce qui se passe en Ukraine revêt une importance stratégique énorme pour nous tous.
Si l'on envisage le même genre de dédoublement des efforts et la même concentration poussée, on peut affirmer qu'il est possible de résoudre ce problème. Cela ne devrait pas être si difficile, mais notez bien l'exemple que j'ai donné quant aux personnes présentes lors des réunions.
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Bon, allons‑y pour trois essais et 10 verges...
[Français]
Je suis le brigadier-général à la retraite Gaston Côté. Mon propos va peut-être différer de celui que vous avez entendu jusqu'à présent.
J'ai beaucoup d'expérience sur le plan du processus d'approvisionnement des Forces canadiennes. J'aimerais donner deux exemples à ce sujet. Je continue d'avoir beaucoup d'interactions hebdomadaires en matière d'approvisionnement, surtout avec l'industrie de défense du Canada et particulièrement avec les États‑Unis. J'ai eu la chance d'avoir une place privilégiée, comme commandant des Forces spéciales, alors que nous avions un budget. Nous avions aussi un lien direct avec l'approvisionnement, de sorte que tous nos besoins ont pu être comblés. La véritable leçon à tirer de cet exemple, c'est que si le système d'approvisionnement est à l'écoute des besoins de l'opérateur, on va avoir un succès éclatant.
D'autres choses ont été un peu moins glorieuses. Il y a plusieurs années, on m'a demandé d'examiner la possibilité de travailler pour une brigade mécanisée canadienne dans un environnement nordique. Comme vous le savez, la majorité de nos véhicules actuels sont des véhicules à roues. Il m'a fallu voir toute la science derrière la recherche en matière de défense du Canada et celle de l'industrie canadienne concernant la mobilité en milieu hivernal et dans l'Arctique. C'était intéressant de voir qu'il y avait une déconnexion assez profonde entre la science, les capacités de l'industrie canadienne, bien que toutes les industries civiles s'emploient activement à obtenir ce genre de véhicule, qui peut aller dans les milieux arctiques, et ce que nous avions sur le terrain. Si on devait déployer une brigade dans l'Arctique canadien, pour quelque raison que ce soit, on aurait des problèmes d'approvisionnement assez sérieux, puisqu'on n'a pas encore réellement la flotte de véhicules nécessaire pour opérer dans ce genre d'environnement.
Je pense qu'on a souligné les délais incroyables de certains projets en lien avec l'équipement. Présentement, ce qui me tient particulièrement à cœur, c'est la protection du Nord canadien, alors qu'on assiste à une militarisation impressionnante de tout ce secteur. De plus, le passage du Nord‑Ouest est de plus en plus fréquenté, ce qui le rend vulnérable à tous les égards, que ce soit sur le plan d'une possible pollution ou de l'utilisation illégale de cette voie maritime. Malgré cela, il faut remonter à l'annonce faite en 1988 pour voir un bateau militaire canadien qui puisse opérer dans l'Arctique. Un tel navire nous a été donné en 2022. C'est réellement une longueur atroce pour un appareil vraiment nécessaire à la protection de la souveraineté du Canada dans un milieu aussi particulier que l'Arctique canadien.
Présentement, un important changement est en train de se produire, soit le retour à la guerre conventionnelle, chose que nous avons oubliée depuis plusieurs générations, étant donné que nous étions surtout versés dans le maintien de la paix. Dernièrement, avec la situation en Afghanistan, nous sommes versés dans la contre-insurrection.
Des leçons extrêmement importantes ressortent de tout cela et de tout ce qui se passe en Ukraine. Or on ne tient pas compte de ces leçons dans certains des programmes de la politique de défense.
Je pense notamment à la capacité rapide de ciblage, qui est de plus en plus importante, à l'utilisation des drones, à tous les niveaux, et au tir de précision de longue portée. La majorité de notre artillerie est, en fait, une artillerie tractée. Présentement, les pièces d'artillerie efficaces sont des pièces d'artillerie mobiles qui peuvent tirer rapidement.
Évidemment, la défense aérienne est vraiment un problème important pour quelque opération que ce soit, dans le cadre de l'OTAN, pour les Forces armées canadiennes. En fait, il y a eu peu de développement depuis l'abandon du programme ADATS.
Enfin, je pense à des armes antichars utilisables sous toute température et en toute condition, comme le système Javelin. En tant que militaire, j'ai toujours utilisé le Carl Gustav, et ce, depuis mon entrée dans les Forces canadiennes. Ce système est toujours là, avec toutes ses qualités, mais aussi tous ses défauts.
Il est quand même important de constater qu'il y a une importante perte de capacité dans ce domaine.
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Merci, monsieur le président.
Je commencerai par remercier nos témoins d’être venus répondre à nos questions sur ce sujet très important.
D'autres témoins, aujourd’hui et précédemment, nous ont parlé de la nécessité de réduire le nombre de ministères intervenant dans les processus d’approvisionnement en matière de défense, au motif que le système gagnerait en efficacité.
Ma première question s’adresse à tous les témoins. Êtes-vous d’accord avec cette position?
Ne pensez-vous pas qu’une refonte en profondeur pourrait occasionner des revers, étant donné que nous vivons une époque où il faut agir rapidement? L’Ukraine a besoin de nous, mais notre propre... Nous devrons bientôt prendre des décisions importantes.
Selon vous, risquerions-nous un déboire conséquent? Pensez-vous possible de progresser sans en venir à confier tous les approvisionnements à un seul ministère?
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Merci de cette question, monsieur le président.
Je pense que vous faites allusion à la question d’une agence d’acquisition du matériel de défense. On en parle depuis longtemps comme étant l’une des façons possibles de régler le problème que pose la multitude des ministères actuellement chargés de l’approvisionnement dans le domaine de la défense.
Fort de mon expérience de vice-chef d'état-major, je dirais qu’au niveau des fonctionnaires, les gens travaillent fort bien pour protéger leurs intérêts en matière d’approvisionnement militaire, que l'on songe à l’industrie, au secteur de l’approvisionnement ou aux équipes en matière de défense. La machine qui permet de faire bouger les choses est très lourde, et bon nombre des acteurs sont à temps partiel. Même à la Défense nationale, le sous-ministre et le sont de gros joueurs, mais ils ont de gros portefeuilles et bien d’autres choses à faire.
Pendant la transition entre le gouvernement conservateur et le gouvernement libéral, quand j’étais vice-chef d'état-major, j’ai vu défiler quatre ministres de la Défense nationale. Il suffit d'avoir tenté d'amener un seul ministre à comprendre les enjeux de l'heure et la façon de faire avancer les choses pour avoir une idée de la complexité de la situation actuelle.
Le fait que l’approvisionnement en matière de défense ne soit pas centralisé pose problème. Comme le général Leslie l’a laissé entendre, il est bon de se focaliser sur des solutions en période de crise, mais même en l'absence de crise, le système ne fonctionne absolument pas, parce que je pense que les gens sont dispersés dans leur travail.
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Les divers gouvernements, à différents moments, subissent des pressions différentes et se concentrent sur l’éventail des activités envisageables à leurs yeux ou sur ce qu’ils peuvent faire. Combien de temps leur reste-t‑il?
Au fur et à mesure que la défense monte dans la liste des priorités, ce qui est normal dans les circonstances avec la Russie, la Chine et une foule d’autres questions dont nous devons nous occuper en termes de dissuasion ou de capacité opérationnelle... Il y a lieu que cette priorité soit beaucoup plus élevée que par le passé, non seulement pour ce gouvernement, mais pour les gouvernements futurs.
En Afghanistan, la chaîne de commandement a communiqué avec moi pour me dire que deux premiers ministres, M. Martin et M. Harper, voulaient savoir où en étaient les listes de matériel de défense et s’il pouvait aider d'une façon ou d'une autre. C'est ce genre de chose qui stimule le système en place. Les premiers ministres en question ne m'en ont pas parlé directement, et je l'ai appris par l'entremise de la chaîne de commandement opérationnelle et du ministre. Les formes ont été respectées, mais tout de même, ce fut un signal fort pour tout le monde.
Il serait fantastique de retrouver aujourd'hui ce genre d'énergie et d'enthousiasme face à la nécessité de doter nos troupes des équipements susceptibles de leur permettre de remplir leurs missions sans courir à une mort certaine. Très franchement, je dirais que c’est ce dont nous avons maintenant besoin, parce que la crise est là.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie l'ensemble des témoins de leur présence. Nous sommes heureux de les avoir parmi nous.
Je vais poser une question au lieutenant-général Thibault, mais j'invite les deux autres témoins à y répondre également.
Quand on choisit le matériel qu'on acquiert, cherche-t-on à remplir trop de critères à la fois? Par exemple, faut-il répondre aux besoins des militaires, envisager les retombées industrielles et technologiques et tenir compte de beaucoup d'autres spécifications?
Ultimement, vouloir que le matériel réponde à si grand nombre de critères peut faire en sorte qu'il ne réponde vraiment bien à aucun d'entre eux. Ce genre de situation existe-t-il présentement dans le cadre des acquisitions?
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Je vous remercie de votre question.
Je pense que c'est un très bon point, et la réponse est « oui ». J'ai souvent entendu dire que, quand il s'agit d'établir les besoins militaires, les militaires visent une capacité précise. Pour ce faire, ils orientent un peu les spécifications et les besoins opérationnels, ce sur quoi je ne suis pas d'accord. Il faut ajouter à ces besoins non seulement les autres dimensions des politiques qui exigent des investissements régionaux, mais on cherche aussi un retour de valeur. On ajoute certains aspects qui n'ont rien à voir avec les besoins militaires des Forces armées canadiennes quand elles se préparent pour des missions.
À mon avis, c'est un problème. Cela cause non seulement des retards, mais les choix qu'on fait et l'argent qu'on dépense n'apportent rien aux forces armées. Comme je l'ai dit plus tôt, la réponse est « oui ».
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Je vous remercie de votre question, madame.
[Traduction]
Je suis d'avis qu'il a fallu tellement longtemps pour améliorer le système, pour affiner les critères de choix des équipements, que nous avons pris du retard. Nous avons pris tellement de retard que nous nous retrouvons en crise. Ainsi, pour ce qui est du classement des besoins ou des critères, des décisions difficiles, des décisions fermes et impitoyables devront être prises.
Un ancien premier ministre avait suggéré de rendre publique une liste de 20 à 30 des principaux programmes, avec des dates générales. Cela ne s'est pas fait. La liste n’a pas été rendue publique, mais le premier ministre en avait une et, comme je l’ai dit, les acteurs du système ont ressenti un frisson quand il a demandé pourquoi les choses avaient été retardées.
Pour ce qui est de l'exemple précis des forces spéciales, qui sont donc spéciales par définition, par leur aptitude et leur instruction, celles‑ci sont relativement peu nombreuses, ce qui leur permet d’être beaucoup plus souples et plus rapides dans leurs interventions.
:
Merci. Je suis content que vous reveniez à la question du risque.
[Traduction]
Pour ce qui est de notre aversion au risque que l'on constate dans tout le système actuel, je dirais que nous faisons des économies de bouts de chandelle, en grande partie pour essayer de réduire les risques tout en menant les programmes à terme. Les calculs comptables sur le long terme pour essayer d'établir les coûts au dollar près, tandis que l'on parle de plusieurs centaines de millions de dollars, sont un exemple de l’aversion au risque qui a été intégrée au système.
Je dirais qu'à l'heure actuelle, le risque opérationnel doit l'emporter sur le reste des risques que nous essayons de gérer dans le cadre de ces acquisitions de défense. Comme le général Côté vient de le dire, s'agissant des risques auxquels étaient exposés les hommes et les femmes des Forces canadiennes en Afghanistan, il fallait absolument passer du transport routier au transport aérien par Chinook.
Il y a beaucoup d'autres exemples où les risques militaires opérationnels sont traités de façon secondaire par rapport aux risques liés à la gestion des programmes ou à la bureaucratie. Cela doit changer.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier nos trois témoins d'avoir servi le Canada. C'est formidable d'avoir les trois généraux devant nous et de participer à cette importante étude.
Général Thibault, vous avez parlé de la nécessité de prendre plus de risques. En ce qui concerne les processus et les procédures, le Conseil du Trésor ajoute‑t‑il un plus ou fait‑il plutôt partie des problèmes auxquels nous faisons face dans le domaine de l'approvisionnement?
Général Leslie et général Thibault, pourriez-vous nous parler de la rationalisation des processus d'approvisionnement? Celle‑ci pourrait-elle se faire par l’entremise de la Défense nationale?
Général Thibault, en tant qu'ancien vice-chef d'état-major de la Défense, vous avez eu votre mot à dire dans les projets d'acquisition. À l'heure actuelle, le plafond des dépenses fixé par le Conseil du Trésor dans le cas de la Défense nationale est d'environ 50 millions de dollars. Ne devrait‑il pas être plus élevé ou devrait‑il tout simplement relever d’un ministre qui, au sein de la Défense nationale, serait responsable des aspects financiers?
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Je peux peut-être commencer à répondre rapidement.
Pour ce qui est du risque, quand le gouvernement est arrivé aux manettes et qu'il a parlé de résultologie et de l'idée voulant que les ministres s’occupent de leurs ministères et réfléchissent un peu à la possibilité de réformer le champ des approvisionnements en matière de défense, je crois que nous nous sommes tous sentis enthousiasmés par cette perspective. En fait, en fonction du risque, c'est‑à‑dire dans le cas de programmes ne présentant pas de risque — que ce soit quant à leur complexité, à leur échéancier ou aux sommes dépensées —, il est clair que la délégation des responsabilités s'impose. Il ne serait alors pas nécessaire d'ajouter des paliers administratifs pour faire avancer ces programmes. Ce qui m'a déçu, c'est qu'il a fallu 10 ans pour commencer à donner plus de pouvoirs au ministre de la Défense nationale. Tout a commencé en 2010, quand nous avons dit que le ministre devait avoir plus de pouvoirs délégués, et il a fallu 10 ans pour que des responsabilités de base lui soient confiées dans certains cas, mais pour des programmes à faible risque.
Si nous voulons accélérer les choses, je dirais qu'il faudrait commencer par calculer les risques. Malheureusement, même quand il y a eu délégation de pouvoir, le Conseil du Trésor a encore voix au chapitre. Je pense que c'est un problème.