:
Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être ici.
Comme vous l'avez dit, je m'appelle Deryck Trehearne. Je suis le directeur général du Centre des opérations du gouvernement de Sécurité publique.
J'aimerais prendre un peu de temps ce matin pour parler de mon organisation, du processus de demande d'assistance fédérale et de notre relation très spéciale avec les Forces armées canadiennes et les forces armées en général. J'aimerais aussi vous donner une idée des leçons que nous avons apprises au cours des dernières années. Comme vous le savez, mon organisation, les Forces armées canadiennes, et tous les partenaires fédéraux ont déployé des efforts considérables dans le contexte de la COVID-19, ainsi que pour divers événements d'intérêt national très importants.
[Français]
Nous avons une relation très spéciale avec les Forces armées canadiennes et nous jouons un rôle très particulier dans les déploiements nationaux des Forces armées canadiennes pour répondre aux urgences et à tout risque par l'entremise du processus de demande d'aide fédérale.
[Traduction]
Au cours des deux dernières années et demie, comme vous le savez, le Canada a dû composer avec au moins six vagues distinctes de COVID-19. Vous vous souviendrez peut-être que nos efforts ont commencé en mars 2020 par le rapatriement de milliers de Canadiens de Wuhan et de certains navires de croisière partout dans le monde. Nous avons établi une installation de quarantaine à la base des Forces canadiennes de Trenton et, plus tard, au Centre Nav à Cornwall. Au cours de cette période, mes partenaires des FAC et moi-même avons réagi à d'importantes inondations saisonnières et à des feux de forêt en 2021 et 2022, particulièrement en Colombie-Britannique l'an dernier, y compris des événements météorologiques sans précédent comme des rivières atmosphériques en Colombie-Britannique et dans les provinces de l'Atlantique l'automne dernier, qui ont causé d'importants dommages aux infrastructures. Ces événements ont été suivis par la manifestation des camionneurs à Ottawa et, plus récemment, nous avons dû faire face aux dommages causés par l'ouragan Fiona.
Il va sans dire que cette période a été et continue d'être une période sans précédent pour mon organisation, tous les ministères fédéraux et les FAC. Tous les Canadiens, y compris tous les membres du Comité, sont certainement au courant des répercussions de certains de ces événements, y compris ceux qui touchent les circonscriptions et les régions que vous représentez.
Nous avons fait face à des demandes d'assistance fédérale dans chaque province et territoire à quelques reprises pendant la pandémie de COVID-19 et, dans le cas de certaines provinces, de nombreuses fois.
J'aimerais parler brièvement du rôle de mon organisation et du processus de demande d'assistance fédérale. De façon générale, comme vous l'avez sûrement entendu maintes et maintes fois, les situations d'urgence au Canada sont une responsabilité partagée. Cela dit, c'est le palier de gouvernement le plus apte à intervenir en cas d'urgence qui agit, à commencer par le niveau local. Les situations d'urgence au Canada sont pour une large part gérées aux niveaux local et provincial. C'est lorsque des situations d'urgence se chevauchent ou nécessitent un soutien qui dépasse la capacité d'intervention d'une province ou d'une Première Nation, ou lorsqu'il y a un événement d'intérêt national, que le gouvernement fédéral est alors appelé à intervenir, en vertu des lois pertinentes du Parlement.
Conformément à la Loi sur la gestion des urgences, le ministre de la Protection civile, le ministre Blair, est chargé d'assurer le leadership en matière de protection civile et d'intervention d'urgence au Canada. Le Plan fédéral d'intervention d'urgence, que l'on appelle aussi le PFIU, décrit en détail comment ce pouvoir est exercé. Dans le cadre de ce plan, Sécurité publique, mon organisation, est le ministère fédéral responsable de la coordination des interventions d'urgence.
Comme vous le savez sans doute, la Loi sur la défense nationale décrit les cas où les FAC peuvent être autorisées à fournir de l'assistance en cas d'urgence et à assurer le soutien du public, entre autres. Dans mon monde, les FAC sont toujours considérées comme une ressource de dernier recours au Canada, et il faut obtenir une approbation ministérielle et le soutien de notre ministre et de la ministre de la Défense nationale avant qu'une demande d'assistance puisse être autorisée.
Le Centre des opérations du gouvernement aide particulièrement le à s'acquitter d'un certain nombre de responsabilités, y compris les interventions et certains aspects de la préparation.
Comme je l'ai dit, en ce qui concerne le processus de demande d'assistance, si une province ou un territoire présente une demande officielle en ce sens, un processus bien établi est en place pour assurer la gestion, en commençant par les contacts régionaux avec les membres de l'équipe du Centre des opérations du gouvernement ou COG et la consultation interministérielle. Il s'agit souvent d'un travail en coulisses, qui a lieu avant la réception de la demande d'assistance officielle et se poursuit au fur et à mesure du déroulement d'un événement.
Avant la pandémie, juste pour vous donner une idée de la charge de travail au Canada, le COG — et, par osmose, les FAC dans de nombreux cas — recevait probablement de 5 à 10 demandes d'assistance par année. Je suis fier d'annoncer que, depuis mars 2020, nous avons franchi le seuil des 200 demandes d'assistance au Canada pour appuyer les provinces, les Premières Nations et les territoires.
Ces demandes d'assistance concernaient le soutien de la santé publique, le soutien des soins de santé, le soutien du déploiement des vaccins, l'aide aux organismes d'application de la loi, la coordination nationale et le soutien aux évacuations. De ces 200 demandes, 157 ont reçu, d'une façon ou d'une autre, le soutien des FAC ou des Rangers des FAC. Dans le cas des Premières Nations, elles ont profité d'au moins 56 déploiements de Rangers des FAC pour assurer leur soutien pendant la pandémie de COVID-19 et d'autres événements.
En plus des demandes d'assistance générales, certaines demandes concernent l'aide des FAC aux organismes d'application de la loi. Vous êtes déjà au courant de quelques-unes. Un exemple digne de mention est le soutien offert aux établissements de soins de longue durée au Québec, au printemps 2020, environ 1 300 membres des FAC ayant été présents dans 47 établissements de soins de longue durée au Québec pendant la première vague de la COVID-19. Du soutien a également été offert en Ontario.
Le Centre des opérations du gouvernement sert de guichet unique pour accéder aux mesures de soutien fédérales, comme je l'ai dit, y compris des mesures de soutien pour les soins de santé primaires, les efforts liés à la COVID-19 et les ressources humaines en santé. Les FAC font partie de l'un des nombreux ministères fédéraux, dont Santé Canada, avec l'Agence de la santé publique du Canada, qui ont créé un guichet unique pour appuyer les efforts liés à la COVID-19.
Comme je l'ai dit, les FAC sont toujours considérées comme une source de dernier recours pour les interventions d'urgence au Canada. Par conséquent, les demandes concernant les ressources des FAC doivent faire l'objet d'une évaluation rigoureuse par mon organisation lorsque les provinces et les territoires demandent de l'aide. Cette évaluation comprend, par exemple, la capacité régionale, les options commerciales et d'autres sources fédérales. Nous discutons d'un certain nombre de critères avec la province ou le territoire avant de déployer les FAC.
De plus, nous essayons de définir à l'avance les tâches que les FAC accompliront et qui sont appropriées à leur mandat et à leurs capacités, ainsi que l'aide d'urgence à durée limitée et axée sur l'intervention. Évidemment, vous savez qu'à l'heure actuelle, les FAC sont déployées dans les provinces de l'Atlantique en raison de l'ouragan Fiona. Vous pouvez voir le genre de travail qu'elles font là-bas.
De toute évidence, les FAC ont démontré leur capacité de répondre à de nombreux besoins opérationnels concurrents, mais cela a un coût, comme vous l'ont dit un certain nombre de témoins.
Je tiens à souligner que le gouvernement et Sécurité publique ont créé un programme de main-d'œuvre humanitaire. On a annoncé 100 millions de dollars au début de 2020, et des fonds se sont ajoutés depuis. Vous avez entendu Conrad Sauvé, je crois, de la Croix-Rouge. La Croix-Rouge, l'Ambulance Saint-Jean et d'autres font partie de cette main-d'œuvre humanitaire, ce qui a créé un soutien stratégique pour les renforts fédéraux, afin d'alléger le fardeau des FAC. Et cela s'est fait en pleine pandémie de COVID.
Je terminerai en disant qu'au cours des deux dernières années et demie, nous avons évidemment eu un niveau impressionnant d'intervention fédérale au Canada, en réponse à la COVID et à d'autres crises. De toute évidence, les FAC ont été au centre de tout cela. Leurs membres se sont montrés extrêmement coopératifs et d'excellents partenaires en réponse à ces événements à grande échelle. Comme vous le savez tous, notre capacité fédérale d'intervention est limitée. Les provinces ont aussi des capacités limitées et très asymétriques, dans bien des cas.
Je vais m'arrêter ici, monsieur le président. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Cela me fait plaisir de vous en parler.
Comme je l'ai dit, si des urgences surviennent et qu'elles ont des répercussions au niveau local au départ... Pensons à l'orage qui a frappé Ottawa il y a quelques mois. Dans ce cas, la province n'a pas demandé le soutien du fédéral, ni le déploiement de l'armée. Ottawa a géré cela. Les répercussions se sont principalement fait sentir sur les installations hydroélectriques et sur les infrastructures, et la situation a été gérée. De nombreux événements se produisent partout au Canada, dont vous n'êtes peut-être pas au courant. Ils ont lieu à l'échelle locale et régionale et sont gérés à ce niveau.
Si une région ou une province commence à être submergée par les événements, les équipes de gestion des urgences à l'échelle de la province et à l'échelle locale entament des discussions. Elles pourront faire appel au Centre des opérations du gouvernement. Nous avons des bureaux régionaux partout au pays. Les régions et les provinces entretiennent des relations très étroites avec les centres des opérations d'urgence de chaque province et territoire. Si une situation dégénère, comme dans le cas de la rivière atmosphérique l'automne dernier, les FAC interviennent immédiatement pour la recherche et le sauvetage, ainsi pour que l'évacuation des gens sur les autoroutes. Puis, d'autres conversations ont eu lieu avec notre équipe. Nous travaillons avec la province et son centre de gestion des urgences pour déployer les mesures d'assistance fédérale.
Bien entendu, une fois que la phase critique est terminée, il y a un certain nombre de conversations très stratégiques qui ont lieu au sujet du soutien et du financement en cas de catastrophe. Vous vous souviendrez du groupe de travail ministériel sur la Colombie-Britannique. Je suis sûr que vous avez également discuté de cela. Des conversations ont lieu, surtout si la province estime qu'une région est dépassée par les événements. Si quelque chose a une incidence importante sur la province, notre équipe sera appelée à intervenir et nous travaillerons avec les intervenants concernés pour comprendre leurs besoins.
Comme je l'ai dit, pour ce qui est des critères relatifs aux capacités requises, nous saurons si le gouvernement fédéral possède ces capacités, si les ressources provinciales et régionales ont été entièrement mises à profit, et quels sont les actifs du secteur privé et du secteur public disponibles. Tout cela peut se faire en quelques heures ou en quelques jours, avant qu'une demande officielle d'assistance fédérale soit présentée.
:
Je vous remercie. C'est une excellente question.
Au Canada, il y a une évolution de la capacité des provinces, des territoires et des municipalités à répondre aux urgences.
[Traduction]
Dans bien des cas, nous avons des provinces qui sont très bien équipées à ce chapitre. De toute évidence, le Québec a une très forte capacité de gestion des urgences, et je pense que de nombreuses municipalités ont beaucoup évolué au cours de la dernière décennie, je dirais.
Comme je l'ai mentionné, je pense qu'historiquement, en tant que Canadiens, nous avons compris que des inondations et des feux de forêt se produisent chaque année, même si nous n'avions pas vraiment connu des catastrophes de l'ampleur de celle que l'on voit en Floride, par exemple, chaque année, ou dans le golfe, mais je pense que cela change. Je pense que les gens comprennent. Nous parlons parfois de gestion des urgences, d'éducation et de sensibilisation, et je crois que de nombreuses municipalités et, en particulier, de nombreuses provinces ont fait beaucoup de progrès au cours de la dernière décennie. Je suis en poste depuis un peu plus de trois ans, et nous avons vu, même au cours des vagues successives de COVID-19, au cours des dernières années, l'engagement, la capacité et la sensibilisation de ces organisations en matière d'intervention — et cela a une incidence sur leurs demandes d'assistance fédérale. Tout cela a beaucoup évolué au cours des trois dernières années. Je pense que les gens ont vraiment pris conscience du défi et qu'ils y ont consacré des ressources adéquates.
Il y a eu des événements majeurs au cours desquels les provinces ont dit: « Non, ça va. Nous avons la situation bien en main. Nous n'avons pas besoin de votre aide », et c'est le genre de choses que nous aimons voir. Mais je vais m'arrêter ici.
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Je donne exactement la même réponse que M. Fadden. Comme je l'ai déjà dit, c'est une responsabilité partagée au Canada.
[Traduction]
C'est très typique du Canada. Nous avons 13 provinces et territoires, puis le gouvernement fédéral. Les capacités sont très asymétriques, comme vous pouvez l'imaginer. Cela dépend vraiment du type d'événement.
Il y a un aspect un peu scientifique et un autre qui relève plus de l'art, aux premières étapes d'un événement, pour comprendre quelles mesures de soutien sont nécessaires et si la province, le territoire... Nous avons vu d'importantes inondations dans les territoires cet été. Dans bien des cas, ils n'ont pas demandé d'aide au gouvernement fédéral, mais l'an dernier, ils l'ont fait. La Colombie-Britannique a connu d'importants feux de forêt cette année, mais les répercussions qu'elle a subies représentent le tiers de celles de l'an dernier, alors qu'elle a reçu un soutien fédéral important, y compris le déploiement des forces armées.
Cela dépend vraiment de la situation. Nous avons tous un rôle à jouer. Il est difficile de dire qu'un seul groupe devrait prendre toutes les décisions au Canada. Cela ne correspond tout simplement pas à notre structure constitutionnelle.
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Bien sûr. La stratégie de gestion des urgences existe. Il s'agit d'une stratégie dirigée par Sécurité publique, et elle fonctionne au niveau fédéral, provincial et territorial et avec les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux, en ce qui concerne les principes et les engagements que nous avons pris au Canada pour faire avancer la cause de la préparation et de l'intervention — et de l'atténuation, bien évidemment. Cela signifie des investissements initiaux dans des choses comme l'infrastructure, etc., comme beaucoup de gens l'ont mentionné, sans aucun doute.
Ce dont parle M. Fadden, c'est ce que nous appellerions... Cela représente une version un peu plus détaillée de la liste des capacités canadiennes de base. Une « capacité » peut aller de l'approvisionnement à la coordination, comme ce que je fais. Elle pourrait englober les FAC. Il pourrait s'agir de planification. Il y a littéralement des centaines de capacités qui peuvent être mises à contribution. De toute évidence, la lutte contre les incendies est une force au Canada. Pour tout événement donné, je pense qu'il y a différents niveaux de stratégies, si cela peut aider à clarifier les choses. Il y a un plan d'action à l'intérieur de cette stratégie de gestion des urgences au Canada, auquel les provinces se sont engagées. Je crois qu'il comporte cinq ou six priorités.
Je ne sais pas si un examen majeur de la gouvernance est prévu dans le cadre de cela. Je ne suis pas certain de quoi il retourne, mais il y a certainement, au sein du gouvernement fédéral, un programme de transformation de la gestion des urgences, que le ministre Blair appuie et dirige, de toute évidence. C'est au niveau fédéral. Cela comporte des répercussions et un engagement, évidemment, avec les provinces également, en raison des responsabilités partagées dont il continue d'être question.
Il y a un certain nombre de niveaux de stratégies et de travail à faire, je crois, dont certains sont très avancés, et d'autres en sont encore principalement à l'étape du concept. J'espère que cela vous aide.
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Avec plaisir. Je pense qu’il y a des collègues d’Environnement Canada et du Centre canadien de prévision des ouragans qui, de toute évidence, voudront peut-être faire des commentaires à ce sujet également.
Je vais prendre un peu de recul. Les ouragans sont considérés comme un risque cyclique, chaque année, au Canada. Chaque année, au Canada, les meilleurs scientifiques provinciaux et fédéraux procèdent à une évaluation des risques liés aux ouragans. Mon groupe coordonne ce travail avec eux, en fait la compilation, puis le présente et le communique aux ministres — le dans ce cas-ci — en ce qui concerne l’évaluation des risques. Cette information est également communiquée à tous les collègues provinciaux et fédéraux dans le domaine de la gestion des urgences. Il y a une évaluation annuelle des risques à laquelle participent des gens comme Environnement Canada, le Centre canadien de prévision des ouragans et les provinces. Cela se fait à l'avance et chaque année.
Le rôle de mon groupe consiste à aller rencontrer chacune des provinces qui sont à risque — surtout celles de l’Atlantique, en ce qui concerne les ouragans — pour discuter de l'évaluation des risques avec elles. Nous validons ce qu’elles croient, que ce soit vrai ou faux, et ce qu’elles préparent. En fait, mon groupe les a rencontrées individuellement bien avant l’ouragan Fiona, en juin et en juillet, lorsque les évaluations des risques ont été publiées, et nous leur avons parlé de leur état de préparation à ces risques. À l’époque, la Nouvelle-Écosse était très confiante dans sa capacité d’intervention, car elle a tendance à être l’une des provinces les plus durement touchées, évidemment, lorsque nous avons ces ouragans. La dernière grande tempête a eu lieu il y a trois ans — l’ouragan Dorian — comme vous vous en souvenez peut-être.
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C’est une bonne question.
La pandémie était très intéressante, mais, comme vous l’avez dit, c’était plutôt exceptionnel. Espérons qu’elle s’estompera. Cela a donné lieu à beaucoup de demandes d'aide pour le personnel médical, la vaccination, etc. En ce qui concerne les changements climatiques, il y a évidemment les incendies et les inondations, et les demandes portent sur les évacuations et le transport aérien. Les ressources des FAC en matière de transport aérien sont limitées. Elles le sont également davantage en raison des événements internationaux de ces dernières années.
Par exemple, nous avons aidé à évacuer une Première Nation au complet, celle de Mathias Colomb, au Manitoba, à cause d’un risque d’incendie cet été. C’était environ 2 000 personnes. Il y a eu une collaboration entre les responsables de la gestion des urgences de la Première nation, les provinces et nous-même pour réaliser cette évacuation de grande envergure. C’est le genre de choses que nous voyons.
L’an dernier, dans le nord de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, les incendies ont été nombreux. Des efforts considérables ont été déployés en Ontario pour évacuer par avion les Premières Nations des communautés isolées qui n’ont pas d'accès routier aux localités du Nord de l’Ontario ou à la région du Grand Toronto. Encore une fois, c'est une question de transport aérien, de coordination, de soutien réel et de services médicaux et sanitaires...
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C'est encore une excellente question.
Comme je l'ai dit plus tôt, cela s'est vraiment amplifié durant la COVID‑19.
[Traduction]
Dans le passé, les gens ont évolué... Les provinces sont devenues plus fortes à bien des égards et ont donc moins besoin de l’aide fédérale, mais en même temps, comme mes chiffres et mes données le montrent, nous avons reçu un nombre extrêmement élevé de demandes d’aide fédérale et de déploiements des forces armées et des Rangers.
C’est une bonne et une mauvaise chose, en ce sens que les provinces sont plus conscientes des mesures de soutien qu’elles peuvent demander et qu’elles comprennent mieux comment fonctionne le système de mesures d'urgence au Canada. Elles renforcent leurs propres capacités, mais elles savent aussi quand et comment demander de l’aide. Il est certain que la pandémie a rendu cela très clair pour les gens.
Ensuite, bien sûr, le public sait aussi que les forces armées peuvent être déployées. Au cours des vagues successives de COVID-19, les médias sociaux s’enflammaient d’appels au déploiement des forces armées, même quand ce n'était pas nécessaire d'après les faits sur le terrain ou les discussions avec la province ou le territoire. Souvent, le système exerce des pressions pour que les FAC soient déployées et que les provinces demandent de l’aide. C’est donc une dynamique intéressante.
Ce n’est pas vraiment à moi, qui suis un fonctionnaire, de juger si c’est trop ou pas assez, mais au cours des dernières années... Nous espérons tous que les choses reviendront à la normale et que nous reviendrons à 5 ou 10 demandes par année. Néanmoins, je ne sais pas si ce sera le cas, compte tenu des tendances que nous observons tous, de la capacité limitée du Canada et du fait que les gens savent comment et quand aider et comment demander de l’aide.
J’espère que cela vous aide.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos invités de s’être joints à nous.
J’aimerais revenir à une réponse que vous avez donnée à M. Fisher au sujet des capacités de transport aérien — une des choses le plus souvent demandées. Quand M. Fadden en a parlé, et évidemment quand on regarde les FAC, cela coûte très cher. Vous avez également parlé des contrats et du fait que leur passation prend parfois beaucoup de temps. Autrement dit, ce n’est pas comme si vous pouviez les conclure aussi rapidement que vous le souhaiteriez.
Serait-il possible d’avoir un protocole d’entente ou d'avoir des gens sous contrat? Je suppose que c’est l'expression utilisée pour les avocats. Vous pourriez avoir une certaine capacité, car vous parlez d'événements cycliques, qui semblent se produire sans cesse, comme les incendies de forêt, les inondations, etc. Parlez-nous en . Vous faites peut-être déjà ce genre de choses.
Toutefois, en ce qui concerne les évacuations aériennes, je pense que M. Fadden dirait que si les FAC s'en chargent, cela coûte plus cher que si l'on se tourne vers des transporteurs externes. Dites-moi ce que vous en pensez.
Encore une fois, comme les FAC sont une force de dernier recours, nous essayons de ne pas... mais dans une situation de vie ou de mort, comme j’en ai parlé, à Mathias Colomb ou ailleurs, comme à Bearskin Lake, en Ontario, les FAC vont intervenir très rapidement et elles ont des ressources pour le faire.
Pour ce qui est de la capacité de lutte contre les incendies, les provinces ont également des liens très importants et des protocoles d’entente avec diverses compagnies aériennes, je crois, pour ce qui est de la capacité commerciale, alors nous en tenons compte également. Encore une fois, cela peut être remboursé par le gouvernement fédéral.
Comme je l’ai dit, nous avons souvent travaillé avec SPAC. Nous n’avons pas d’offres à commandes, parce que cela nous ramène à la nature des urgences au Canada où ces ressources peuvent être disponibles au niveau local ou provincial. Par exemple, le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario possède un très grand nombre de ressources de ce genre, qu’il possède et exploite physiquement ou qui sont à sa disposition pendant la saison des incendies.
Le premier choix est de se tourner vers les ressources commerciales avant de faire appel aux FAC, et cela peut souvent faire partie de la dynamique dans ce domaine. Il y a pas mal de capacité commerciale au Canada. Comme je l’ai dit, en Ontario, l’an dernier, mes amis de Services aux Autochtones Canada, nous-mêmes et la province avons dépensé des millions de dollars pour faire évacuer les gens par des compagnies aériennes commerciales.
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C’est une excellente question.
Les ouragans ne sont qu’un de mes soucis. C’est certainement un sujet d'inquiétude. On avait prédit que cette année serait plus agitée que la normale, et voilà où nous en sommes. Les inondations et les incendies sont également touchés par les changements climatiques. Je pense que dans notre pays, une conversation s'impose sur notre état de préparation global et notre capacité globale à réagir à ce genre de choses. Nous avons vu, ces dernières années, des événements très exceptionnels — vraiment exceptionnels — et je pense que nous avons tous éprouvé certaines difficultés, dans chaque province et territoire.
Je crois que nous devons discuter de la capacité globale, au début et au milieu d’une intervention, et des capacités à l’échelle fédérale, provinciale et municipale au Canada. Les tendances nous le disent. Comme je l’ai souvent répété, j’estime que nous avons toujours eu de la chance. Il y a les inondations et les incendies, mais dans le cas des autres fléaux d'une ampleur inhabituelle ou des phénomènes étranges qui défient toute catégorisation, comme une rivière atmosphérique ou le Derecho qui a frappé Ottawa, si vous ne savez pas qu’ils arrivent, vous pouvez seulement réagir.
De façon générale, nous devons parler de notre état de préparation, de notre analyse et de notre capacité d’intervention en tant que pays, et aussi au niveau fédéral.
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Je m’appelle Eva Cohen. Avant mon arrivée au Canada, en 2003, j’étais bénévole au sein de l’Agence fédérale de secours technique d’Allemagne, la THW, un organisme gouvernemental composé de 98 % de citoyens bénévoles non rémunérés et qui est présent partout en Allemagne, aux niveaux local et régional.
J’ai pu constater par moi-même les nombreux avantages d’une approche communautaire de protection civile reposant sur le bénévolat des citoyens. Pendant plus de 14 ans, je me suis concentrée sur la valeur qu’une version canadienne, s'inspirant du succès de la THW, apporterait à notre société et sur la façon dont cela pourrait se faire.
Pour amorcer le processus de changement de la culture de préparation et de renforcement des capacités, j’ai fondé une entreprise sociale sans but lucratif appelée Civil Protection Youth Canada.
Il ne fait aucun doute que le gouvernement doit disposer d'une force d'appoint pour assurer une réponse adéquate aux menaces allant au-delà des urgences quotidiennes. Nous avons besoin d'une bonne connaissance de nos risques, des capacités nécessaires pour être prêts, et d'une structure pour assurer la disponibilité opérationnelle et le déploiement rapide de la capacité nécessaire.
Même si nos forces armées sont le seul outil gouvernemental que nous pouvons déployer en cas de catastrophe, ce n’est pas leur principal rôle et elles ne sont pas adéquatement formées et équipées pour toutes les tâches comportant des risques. L’utilisation d’équipement militaire sophistiqué pour l’intervention en cas de catastrophe et le rétablissement est coûteuse et n'est pas la meilleure solution. Au lieu de véhicules blindés, nous avons besoin d’excavatrices, de grues, de pompes à haute capacité et d’autres équipements — et de gens formés pour les utiliser — pour enlever les débris, fournir l’alimentation d’urgence et l’eau, et réparer les infrastructures endommagées.
Heureusement, la plupart des compétences requises existent au sein de notre population et dans le secteur privé. Ce qui manque, c’est une structure permettant au gouvernement d'intervenir rapidement, d'être présent sur le terrain et de moduler sa réponse comme l'armée, mais avec une approche de protection civile. La solution la plus facile semble souvent être celle qui s’appuie sur ce que nous avons déjà. Nous sommes devant un rare cas où la solution la plus rapide et la plus abordable est d’ajouter quelque chose d'entièrement nouveau à ce qui manque et de mettre en place une structure pour mobiliser une ressource complètement inexploitée, à savoir les citoyens canadiens bénévoles. Nous avons besoin d’une organisation qui complétera et intégrera ce que nous avons déjà, et non pas qui ferait double emploi ou nous enlèverait ce que nous avons déjà.
Même si nous avons constaté une augmentation alarmante du nombre de catastrophes au fil des ans, aucun de nos intervenants actuels dans la réponse aux catastrophe n’a pu offrir une vision à long terme solide et durable pour répondre à la nécessité d'adapter notre système à cette réalité. Et maintenant, nous n’avons plus de temps devant nous. Cependant, nous ne sommes pas les seuls dans cette situation.
Je recommande qu’au lieu de mener de longues enquêtes et études, nous unissions nos forces à celles de nos partenaires internationaux, l’Allemagne et l’Union européenne, et que nous comparions les risques et les capacités. Je demande au Comité de bien vouloir recommander au gouvernement d’utiliser l’offre à commandes de l’un de nos plus proches alliés, l’Allemagne qui, en tant que fédération comme le Canada, a compétence en matière de GU avec les États et les municipalités, possède un secteur des ONG dynamique comme le nôtre et dispose, en dernier recours, d'une armée comme outil supplémentaire sur lequel le gouvernement peut compter.
Soixante-dix ans de succès et de renforcement des capacités en matière de coopération internationale nous donnent une longueur d'avance, parce que nous devons agir maintenant. Le principe directeur veut que le gouvernement permette aux bénévoles d’être l’épine dorsale du système et de fournir une vision, une structure et un cadre à long terme pour faire en sorte que cette capacité de bénévolat locale, mais en même temps nationale, soit formée, certifiée, équipée et intégrée de façon uniforme dans le système d’intervention d’urgence.
Cela ne garantit pas seulement une coopération efficace de toutes les ressources disponibles; cela transforme notre système entièrement réactif en un système de préparation et de résilience proactif reposant sur les citoyens. Un organisme canadien de protection civile fournirait au gouvernement l’organe opérationnel qui lui manque actuellement.
Sans ajouter un niveau inutile de bureaucratie, cela garantit l’orientation, la structure et les normes nécessaires à une approche nationale qui relie la totalité des provinces, des territoires et des communautés autochtones et leur permet de fournir proactivement aux collectivités la capacité nécessaire, à l’échelle locale et régionale, pour une intervention rapide et prolongée, tout cela pour une fraction du coût de notre approche actuelle.
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Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m’avoir invité.
J’aimerais commencer mon témoignage en décrivant à quels titres je parlerai ici aujourd’hui, Ce sera, premièrement, en tant que soldat à la retraite qui a servi notre pays dans des opérations de paix, de guerre et de maintien de la paix pendant 27 ans, et deuxièmement, en tant que gestionnaire des urgences à la retraite qui a servi dans des opérations locales, municipales, provinciales, fédéral et international pendant 13 ans.
Premièrement, comme on l’a dit dans l’Antiquité, chaque pays a une armée — la sienne ou celle de quelqu’un d’autre.
Permettez-moi de commencer en tant que soldat. Le rôle des Forces armées canadiennes est, à mon avis, de protéger la souveraineté du Canada, de respecter nos engagements en matière de défense de l’Amérique du Nord, de respecter nos engagements envers l’OTAN, d’appuyer la sécurité internationale, de mener des opérations de maintien de la paix à l’appui de l’ONU, et d'exécuter d’autres tâches assignées par le gouvernement du Canada. Ces engagements signifient que nous devons avoir des forces armées conçues et formées pour combattre seules et avec nos alliés sur terre, en mer et dans les airs.
Un avantage secondaire d’une force comme celle-ci est qu’elle peut aider les autorités civiles et le pouvoir civil. Encore une fois, il s’agit d’un avantage et non d’un objectif principal ou même secondaire des forces canadiennes.
Cela dit, les soldats que j’ai commandés au cours de ma carrière étaient extrêmement fiers de servir leurs concitoyens en temps d’urgence, comme lors des inondations de la rivière Rouge, en 1997, et de la panne de courant de la tempête de verglas, en 1998.
Permettez-moi de faire valoir trois choses. Premièrement, ces interventions les éloignent de leur rôle principal. Deuxièmement, elles détournent du temps, des ressources et du financement de leur rôle principal, un rôle qui est extrêmement sous-financé depuis des décennies. Troisièmement, ces interventions pourraient normalement être bien mieux faites par d’autres organismes si des ressources étaient consacrées à la gestion des urgences — une discipline qui existe — dans notre pays.
Voici une déclaration faite par Paul Cellucci, l’ambassadeur américain au Canada après le 11 septembre 2001, lorsque je l’ai personnellement informé, en Alberta, au sujet de la protection des infrastructures essentielles. Il a dit que: « La sécurité l’emporte sur le commerce. » Si nous sommes perçus comme un parasite plutôt que comme un partenaire de nos alliés en matière de défense, il y aura des conséquences immédiates et à long terme.
Sur ce, permettez-moi de parler maintenant du point de vue d'un gestionnaire des urgences.
À l’échelle nationale, le Canada a un système de gestion des urgences. Vous n’en avez probablement pas beaucoup entendu parler, surtout en cette période de pandémie, parce qu’on l'a laissé de côté et, dans certains cas, réduit au silence.
La gestion des urgences comporte quatre fonctions: l’atténuation, la préparation, l’intervention et le rétablissement. Je pense que nous parlerons souvent de ces quatre fonctions aujourd’hui.
La gestion des urgences repose sur une approche tous risques. Il y a des dangers naturels, notamment biologiques, géologiques et météorologiques. Il y a aussi les dangers d’origine humaine, qu’ils soient intentionnels ou non. Nous devons discuter davantage de cette approche tous risques aujourd’hui, car les ressources d’un danger peuvent être utilisées pour d’autres dangers. Le processus est le même pour chacune de ces quatre fonctions.
La gestion des urgences touche tous les groupes au pays, des citoyens aux premiers intervenants, en passant par les administrations municipales, les gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral et les organismes internationaux. J’espère que nous discuterons en détail des rôles de ces organisations aujourd’hui.
Qu’en est-il du secteur privé? Au Canada, 85 % des infrastructures essentielles sont détenues, exploitées et assurées en grande partie par le secteur privé.
Il est clair que tous les ordres de gouvernement ont un rôle à jouer pour garantir le fonctionnement de nos infrastructures essentielles afin d’assurer la sécurité de nos citoyens. Le secteur privé joue un rôle essentiel dans la gestion des urgences lorsqu’il est lié de façon appropriée à la gestion des urgences. Il en va de même pour les organisations non gouvernementales comme l’Armée du Salut, la Croix-Rouge, le Mennonite Disaster Service, les clubs de radioamateurs et bien d’autres, rémunérés et bénévoles.
Permettez-moi de résumer. La gestion des urgences est négligée depuis longtemps par notre pays. En fait, en 2008, le Comité sénatorial permanent de la protection civile a rédigé un rapport cinglant et détaillé à ce sujet. En fait, le Canada a fait marche arrière. Il suffit de poser la question aux membres du CSRGU, les hauts fonctionnaires responsables de la gestion des urgences dans les 13 provinces et territoires.
À mon avis, c’est la raison pour laquelle vous vous réunissez aujourd’hui pour discuter — à tort, je crois — du recours aux Forces armées canadiennes pour la gestion des urgences. Les Forces armées canadiennes ont un rôle à jouer dans les situations d’urgence, mais comme force de dernier recours.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je suis prêt à répondre à vos questions.
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C’est une question très vaste. Chaque indicateur de rendement comporte des lacunes.
Cependant, commençons par le fait qu’il y a une relation quotidienne entre une province et le gouvernement fédéral en ce qui a trait à l’utilisation des Forces armées canadiennes. L’agent de liaison était assis juste à côté de moi dans mon centre des opérations en Alberta, et je n'appelais les Forces que lorsque j’en avais besoin, et seulement pour la raison précise pour laquelle j’en avais besoin. Dans la plupart des cas, je ne les ai jamais appelés parce que j’utilisais toujours d’abord les ressources de la province.
Il faut comprendre que, lorsque vous êtes confronté à une inondation, vous n’avez probablement pas à lutter en même temps contre un incendie de forêt. La province a des équipes de lutte contre les incendies et de nombreuses ressources. Je pourrais les utiliser pour empiler des sacs de sable et faire des digues. Je pourrais aussi avoir recours au secteur privé.
Si la mesure du succès du gouvernement fédéral pour les provinces est le nombre de membres des Forces armées sur le terrain, l’indicateur de rendement est erroné, parce que le gouvernement fédéral apporte beaucoup plus que les Forces armées du Canada. Celles-ci peuvent aider l’organisation des mesures d'urgence à accéder aux ressources des provinces voisines, si elles ne respectent pas l’entente d’aide mutuelle de la province voisine. Elles peuvent faire venir quelqu’un du Québec pour les aider.
N’oubliez pas que nous avons conclu des accords d’aide mutuelle dans de nombreux domaines. Prenons l’exemple des feux de forêt. Il y a des équipes d’intervention dans toutes les provinces du Canada. Il y a un organisme central de coordination qui déplace ces équipes de lutte contre les incendies partout au pays, sans aucune participation, jusqu’à ce qu’elles aient atteint, voire dépassé, leurs capacités maximales. L’Ontario peut envoyer ses équipes de lutte contre les incendies en Alberta, et l’Alberta peut les renvoyer en Ontario, lorsque chacune de ces provinces expérimente ce danger à un niveau différent.
Ces types de coordination existent dans les organisations cloisonnées, mais ils sont reliés entre les organisations responsables de tous les différents dangers et tous les organismes gouvernementaux.
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Merci beaucoup de cette réponse exhaustive.
Madame Cohen, je ne vous ai pas oubliée.
Je suis curieuse. Plus tôt cette semaine, ma collègue, Mme Mathyssen, a posé une question à un témoin au sujet du recours au secteur privé.
Avez-vous de l’expérience dans l’élaboration de mesures de protection pour vous assurer que le secteur privé est prêt et disponible? On peut faire de la planification et se préparer aux catastrophes naturelles, mais on ne sait pas toujours exactement par quoi elles vont se traduire ou quand elles vont commencer. Comment vous préparez-vous pour que l'on puisse s’en occuper dans un délai relativement court? Deuxièmement, comment vous assurez-vous, en temps de crise, qu'il n’y ait pas d’exploitation et qu’il y ait des mesures de protection des coûts?
Nous avons entendu beaucoup de témoignages sur les avantages du secteur privé. Cela ne me pose aucun problème. En temps de crise, on peut y recourir, mais est-ce rentable pour les contribuables et est-ce que cela permet de réaliser les objectifs? Avez-vous de l’expérience ou autre chose à répondre à cette série de questions?
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Je remercie nos deux témoins.
J'aimerais entendre ce que vous avez tous deux à dire en réponse à ma première question. Vous avez parlé tous les deux de l'importance de la préparation et de la mitigation.
Lieutenant-colonel Redman, vous avez parlé du rôle que les provinces ont à jouer et qui pourrait être soutenu par le fédéral.
De votre côté, madame Cohen, vous avez parlé de la force civile qui peut être utilisée.
Dans les cas de crise climatique qu'on voit présentement, le fédéral va financer le tout à l'instant même, soit en envoyant des fonds qui n'étaient pas nécessairement prévus ou par l'entremise des Forces armées, qui coûtent extrêmement cher.
J'aimerais cependant entendre ce que vous avez à dire sur l'importance du financement prévisible et récurrent, par exemple aux provinces ou aux OBNL.
Est-ce l'une des clés du succès, dans la préparation et la mitigation, que d'avoir un financement récurrent, prévisible et potentiellement augmenté?
Madame Cohen, vous pouvez répondre en premier.
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C'est exact. Permettez-moi d’abord de commenter le concept avancé par Mme Cohen, puisque c’en est un que je connais. Comme soldat, j’ai participé à trois missions en Allemagne pendant la guerre froide, et je comptais sur l’organisation de la défense civile allemande pour m’assurer que mes troupes puissent se rendre de leur caserne à la frontière lorsque nous étions déployés. J’ai beaucoup collaboré avec eux dans d’autres domaines également.
Parlons du véritable... Vous parlez de financement, mais je veux vous donner une idée de la structure. En Alberta, il y a d’abord les premiers intervenants. On s’attend à ce que chaque citoyen puisse prendre soin de lui-même pendant 72 heures. Les premiers intervenants viennent en aide aux citoyens directement touchés. Ensuite, l’administration municipale doit avoir un plan d’urgence municipal, qui est vérifié chaque année et qui comprend un grand nombre d’organismes bénévoles de la collectivité et des protocoles d’entente avec les collectivités limitrophes. Ensuite, il y a le gouvernement provincial, qui fait exactement la même chose et qui intègre ces organismes bénévoles, comme les opérateurs de radio amateur.
À chaque ordre de gouvernement correspond une responsabilité, et on suppose que chacun doit rendre compte de son financement. Cependant, ce que nous attendions d’un village de 100 habitants, par rapport à une ville d’un million d’habitants, était complètement différent en ce qui concerne les plans de gestion des urgences, et nous devions vérifier leurs plans en fonction de ce niveau de capacité, la province comblant les lacunes. Je m’attends à la même chose de la part du gouvernement fédéral, c’est-à-dire qu’il devrait travailler avec les 13 provinces et territoires, qu’il comprendrait leurs capacités et leurs limites, qu’il établirait des liens avec les organismes bénévoles ou avec d'autres organismes et qu’il fournirait du financement et de l’aide là où les besoins existent.
Edmonton n’avait pas besoin de financement, à la différence d'une petite ville comme Hanna. Nous devions travailler en fonction des exigences, et pour cela, il fallait connaître la compétence à chaque ordre de gouvernement.
Si vous me le permettez, j’aimerais ajouter quelque chose.
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C’est une très bonne question. Cela démontre que nous actuellement avons un gros problème pour tirer le meilleur parti possible de nos bénévoles et de nos organisations bénévoles.
L'Allemagne a mis en place un système qui permet au gouvernement fédéral de vous garantir que vous ne subirez aucun impact négatif si vous travaillez comme bénévole pour une organisation. Le gouvernement a aussi mis en place un programme de remboursement salarial. Cela veut dire que si vous occupez un emploi à temps plein et que votre expertise est requise pour une intervention dans votre région, votre employeur peut demander au gouvernement fédéral de vous trouver un remplaçant qui sera rémunéré par le gouvernement.
En réalité, cette mesure est rarement appliquée, comme vous pouvez l'imaginer, parce que les entreprises du secteur privé se font un honneur de s'acquitter de leur responsabilité sociale en autorisant leurs employés à aller prêter main-forte. Comme les catastrophes se produisent généralement à l'échelle locale, la région risque fort d'en subir les répercussions qui se feront ensuite sentir dans le secteur privé. Cela ne pose donc pas de problème.
Si vous me le permettez, j'aimerais également faire un lien avec la fonction d'atténuation, parce que nous avons tendance à cloisonner ces fonctions. Je pense que l'atténuation fait toujours partie de l'intervention et il nous sera impossible de limiter les mesures d'intervention si nous n'avons pas une capacité de protection civile en place à l'échelle locale.
Par ailleurs, je suis tout à fait d'accord pour dire que nous devons atténuer les risques le plus possible, mais tous les projets d'atténuation ne sont pas une garantie contre l'échec. Si nous construisons des barrages ou des digues, nous avons besoin d'avoir des gens capables de les entretenir, les défendre et les protéger en cas d'incident. Tout est lié, mais la disponibilité de personnel ou de bénévoles est essentielle et c'est ce qui fait défaut en ce moment.
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C'est une excellente question, parce que le bénévolat obligé n'est plus du bénévolat. Il vaut beaucoup mieux faire appel à un sens plus vaste du devoir citoyen et d'un rôle à jouer dans la société.
Si vous pensez au fait que le gouvernement n'a pas le choix et que, en tant que citoyens, nous n'avons pas non plus le choix de ce qu'il advient de l'argent des contribuables à cet égard, demander après coup des dons et faire appel à la solidarité — et il y a toujours de la place pour cela —, puis égaler les dons recueillis avec l'argent des contribuables, encore une fois, ce n'est pas la meilleure façon de procéder.
En Allemagne, vous payez environ 10 $, disons, par année. En tant que contribuable, j'ai le choix de m'associer à cette campagne et d'avoir un rôle à jouer, « protéger nos foyers et nos droits », comme je me plais à le dire. L'argent des contribuables est investi de façon proactive dans un système qui permet à tout le monde, des jeunes aux anciens combattants en passant par les personnes âgées, de faire partie de la solution au problème.
C'est un choix qui n'existe pas actuellement, alors le gouvernement doit activer le volontariat. Je ne pense pas que ce soit une question de culture. C'est que notre gouvernement n'en donne pas la possibilité. Les gens n'ont pas le loisir de se porter volontaires dans une force d'intervention qui doit être déployée promptement.