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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 122 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 29 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(1550)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Chers collègues, je vois que nous avons le quorum. Nous sommes déjà un peu en retard, et je ne veux pas abuser de la bonne volonté de nos témoins.
    Avant de commencer, nous avons une petite question pratique à régler. Je vais demander à M. Bezan de déposer une motion visant l'adoption du budget de 1 000 $ pour l'étude du mémoire sur le Moyen-Orient. Les membres en ont reçu une copie le 21 octobre.
    Merci, monsieur Bezan, d'avoir déposé la motion, et merci, monsieur Collins, de l'avoir appuyée. Y a‑t‑il débat?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci beaucoup. N'est‑il pas formidable de voir la démocratie à l'œuvre?
    Je souhaite maintenant la bienvenue au Comité à M. Kevin Ford, chef de la direction chez Calian Group, ainsi qu'à M. Ewan Reid, chef des opérations chez Mission Control Space Services.
    Je suis certain que M. Bourgault, notre très estimé nouveau greffier, vous a informé des procédures. Vous disposez chacun de cinq minutes pour vous adresser au Comité.
    Je vais donner la parole à M. Ford en premier, puis à M. Reid ensuite. Nous sommes impatients d'entendre vos témoignages.

[Français]

    Mesdames et messieurs, c'est avec grand plaisir que je suis ici aujourd'hui pour présenter mes commentaires.

[Traduction]

    Merci de tenir des auditions sur ce sujet d'une grande importance. J'ai très hâte de participer aux discussions qui suivront.
(1555)
    Comme il a été mentionné, je m'appelle Kevin Ford et je suis le cef de la direction de Calian Group. Je suis également le vice-président d'Espace Canada. Calian, au cas où vous ne le sauriez pas, est une société canadienne qui conçoit, construit, met à l'essai et installe des stations terrestres; qui construit des composants sur mesure pour l'espace; qui fournit des services d'intégration de logiciels sur mesure et des services d'opérations d vol de satellites 24 heures sur 24, ept jours sur sept. Nous fournissons notamment des stations terrestres adaptées à un large éventail d'applications satellitaires pour l'observation de la Terre, les radars à synthèse d'ouverture et lescommunications par satellite, entre autres. Nous avons des installations de fabrication à Saskatoon et à Regina, en Saskatchewan, à Ottawa, en Ontario, et à Vaudreuil-Dorion, au Québec.
    Calian a livré des antennes d'écoute de l'espace lointain de 35 mètres à l'Agence spatiale européenne dans le cadre de la mission Rosetta, qui avait pour objectif d'envoyer une sonde afin qu'elle se pose sur une comète à des centaines de millions de kilomètres de la Terre. Nous avons aussi livré des antennes de 12 mètres à la NASA aux fins du programme d'interférométrie à très longue base, dont l'objectif est de déterminer la place de la Terre dans la galaxie par rapport à d'autres corps spatiaux. Nous avons également fourni à l'Agence spatiale canadienne des services d'opérations de vol de satellits qui garantissent le respect des horaires et des cibles de la mission. Enfin, nous avons livré des stations d'atterrissage à Ressources naturelles Canada.
    Dans le domaine de la cybersécurité, Calian fournit des services de sécurité des réseaux, des centres d'exploitation de réseux et d'opérations de sécurité, de même que des solutions de sécurité des émissions pour assurer la protection des installations, des réseaux et des infrastructures contre les intrusions. Nous offrons en outre des formations individuelles et collectives qui sont réalistes et immersives afin de préparer les membres des Forces armées canadiennes à relever les défis rencontrés durant les opérations.
    Le programme spatial canadien était le troisième en importance en 1962, et notre pays a été un chef de file mondial en matière de développement de technologies terretres et spatiales. Toutefois, il existe un risque réel que le Canada soit distancé par ses partenaires, ses alliés et ses adversaires dans le secteur spatial. Actuellement, son principal défi est de trouver des moyens de mieux intégrer son secteur spatial commercial à une vision nationale de ses activités spatiales. Le secteur commercial représente environ 85 % du marché spatial, et il est à l'avant-garde en matière d'innovations et de capacités. Les capacités que les gouvernements possèdent et administrent à des fins civiles et militaires sont en très grande majorité développées et fournies par des entités commerciales. Les alliés du Canada ont déjà compris l'importance de mieux intégrer leur secteur commercial à une vision nationale. Ils ont aussi pris des mesures pour que les résultats soient optimaux à la fois pour leurs indusries et pour leurs intérêts nationaux.
    L'Australie a intégré des composantes commerciales à ses stratégies civile et de défense. Le Royaume-Uni a adopté une stratégie nationale qui englobe les composantes civiles, militaires et commerciales. Les États-Unis ont adopté une approche similaire pour leur stratégie nationale. La Space Force des États-Unis a privilégié l'établissement de liens et la collaboration avec le secteur commercial, et elle a ouvert des bureaux à cette fin précise.
    Dans le budget de 2024, le Canada a annoncé la création d'un Conseil national de l'espace, dont l'objectif est de favoriser l'intégration des secteurs cvil, de la défense et commercial. C'est certainement un pas dans la bonne direction. Le Conseil national de l'espace devra emboîter le pas à nos alliés et proposer une vision ainsi que des priorités pour favoriser l'alignement du secteur commercial sur les objectifs stratégiques nationaux. Le Canada risque de prendre du retard s'il ne prend pas exemple sur les nations qui se sont dotées d'une vision nationale.
    Le processus d'approvisionnement militaire est beaucoup trop long au Canada. En fait, il n'est plus du tout adapté à la réalité du monde numérique. À cause de la lenteur du processus d'appel d'offres, il n'est pas rare que la capacité définie dans une demande de propositions ne soit pas la plus récente au moment de l'acquisition. Dans le secteur spatial, les cycles de développement sont plus rapides que le processus d'approvisionnement. S'il ne change pas en profondeur son processus d'approvisionnement militaire lié aux programmes patiaux, le Canada risque d'acquérir des capacités qui seront devenues désuètes. Un meilleur dialogue entre le secteur de la défense et le secteur commercial est nécessaire pour accélérer le processus d'approvisionnement.
    Le processus d'appel d'offres, par définition, vise un résultat. Ce résultat est d'ailleurs défini dans la demande de propositions. Or, il serait plus efficace pour le Canada de définir le problème à régler et de consulter le secteur commercial pour qu'il lui propose des solutions fondées sur les technologies existantes ou en cours de développement. Cette approche réduirait considérablement les délais ente la définition et le déploiement d'une solution. L'utilisation croissante de technologies à double usage — qui peuvent avoir des applications civiles et militaires — dans le secte spatial favorise l'émergence constante de nouvelles technologies. Pour maintenir une avance technologique sur ses adversaires, le Canada doit raccourcir les délais entre la conception et le déploiement des capacités.
    La nouvelle politique militaire intitulée « Notre Nord, fort et libre » énonce les priorités du Canada à l'égard de la modernisation du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord, ou NORAD. La relation entre le Canada et les États-Unis est très importante. Il s'agit de la plus importante relation du Canada, et elle touche à la fois la culture, l'économie et la défense nationale. Les programmes e modernisation du NORAD proposés sont tout à fait appropriés. Des éléments comme le système de commandement et de contrôle en nuaginformatique, les communications par satellite dans l'Arctique, les radars transhorizon, la surveillance depuis l'espace, de même que la cybersécurité et la sécurité quantique sont essentiels. Cependant, le déploiement est beaucoup trop lent. Certains de ces programmes ne seront pas fonctionnels avant le milieu des années 2030. C'est tout simplement trop long. Il faut accélérer la modernisation des capacités du Canada, sans quoi il ne pourra pas apporter sa juste contribution à sa relation avec les États-Unis.
    En conclusion, la base industrielle du Canada est le moteur de l'innovation dans le secteur spatial. Le gouvernement a un rôle vital dans la gestion des entreprises civiles et militaires, et il doit se doter d'une vision nationale en veillant à mieux intégrer le secteur commercial. Pour ce faire, le Canada doit avoir une idée plus claire de ce qu'il souhaite réaliser, faire en sorte que le secteur commercial fasse partie intégrante de ce processus, et favoriser explicitement ses liens avec le secteur de la défense.
    Je m'arrête ici, monsieur le président.
    Merci, monsieur Ford.
    Monsieur Reid, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci de me donner la possibilité de comparaître devant ce comité. Je m'appelle Ewan Reid. Je suis le fondateur et le chef des opérations de Mission Control, ainsi que membre du conseil d'administration d'Espace Canada.
    Mission Control est une entreprise émergente entièrement canadienne qui a été fondée il y a 10 ans et dont le siège est à Ottawa. Nous développons des technologies nnovantes pour les missions spatiales, et plus précisément des solutions d'actionnement des systèmes robotiques et de charges utiles évoluées, ainsi que des solutions d'intelligence artificielle, ou IA, dans l'espace. Au cours de la prochaine année, notre technologie va être utilisée dans le cadre de trois missions de véhicules d'exploration lunaire, par des clients de trois continents. À notre connaissance, nous sommes la seule entreprise canadienne à urnir du matériel pour des missions de véhicules d'exploration lunaire. Notre entreprise a aussi été la première dans le monde à envoyer une technologie d'IA d'apprentissage profond sur la lune.
    En plus d'être intégrée à des véhicules et à des missions d'exploration lunaire notre technologie d'IA peut être intégrée à des applications d'obsevation de la Terre et de connaissance du domaine spatial. L'an dernier, nous avons téléversé un algorithme d'IA d'apprentissage profond dans un satellite d'observation de la Terre de l'Agence spatiale européenne. Plus récemment, nous avons annoncé la prochaine avancée spectaculaire du Canada dans le domaine de l'IA dans l'espace dans le cadre de la mission Persistence. Grâce à une aide financière de l'Agence spatiale canadienne, la mission Persistence vise à faire la démonstration que le recours à une technologie d'IA robuste et résiliente pour le traitement des données en orbite va permettre de préserver la bande passante, d'accélérer la prise de décisions rapide et d'approfondir notre connaissance de la Terre. Cette avancée marque un changement radical de paradigme.
    L'IA est employée depuis des années pour le traitement de quantités colossales de données générées dans l'espace. Toutefois, le traitement sefait au sol et les exploitants dépensent des millions de dollars par année pour la transmission de toutes ces données en iaison descendante par une station terrestre et leur traitement intelligent en vue de la producion d'informations exploitables. La mission Persistence a pour objectif d'utiliser cette capacité d'une manière optimale en déployant l'IA à bord d'un engin spatial en vue de la transmission en liaison descendante des informations ploitables plutôt que des données brutes. Les exploitants vont économiser des millions de dollars par année, mais aussi un temps précieux, ce qui constitue un avantage névralgique pour les applications de défense et de sécurité. En fait, les engins spatiaux pourront être utilisés à des fins qui seraient inenvisageables sans l'IA à bord. Par exemple, elle va permettre d'utiliser es engins spatiaux à très faible distance l'un de l'autre. Beaucoup de ces usages présentent un très grand intérêt dans le domaine de la défense spatiale. Nous savons que des adversaires du Canada sont en train de développer ces capacités.
    Avant d'inaugurer l'ère de l'IA dans l'espace, nous devons faire la démonstration de son efficacité, et c'est pourquoi la mission Persistence est si importante. Cette mission de démonstration en orbite s'étendra sur un an et permettra de confirmer que l'IA peut être un outil résilient et fiable. Une fois cette démonstration faite, nous allons pouvoir faire breveter notre plateforme et obtenir notre part des milliers de milliards de dollars que cette industrie devrait générer au cours des prochaines années. Les possibilités sont énormes mais, pour exploiter ce potentiel, nous devons être en mesure de rivaliser avec des sociétés étrangères qui bénéficient d'un soutien financier substantiel, qui font des progrès rapides et, surtout, qui travaillent en étroite collaboration avec leurs gouvernements.
    Nous avons reçu du financement du gouvernement canadien pour la recherche et le développement, et nous avons également reçu l'aide d'organismes et de programmes comme le Conseil national derecherches Canada, le Programme d'aide à la recherche industrielle, Exportation et développement Canada, la Banque de développement du Canada et d'autres. Cependant, le contexte canadien est loin d'être favorable pour les entreprises qui font face à la concurrence mondiale. Les entreprises canadiennes comme la mienne ont besoin de plus qu'une aide minime et irrégulière à la recherche et au développement. Nous avons besoin de la certitude que procurent un plan à long terme du gouvernemen et un partenariat avec lui. Nous ne pouvons pas nous contenter de faire seulement de la recherche, du développement et des démonstrations de technologies et de services. Nous devons pouvoir les vendre au gouvernement.
    Dans le monde, les pays qui sont en tête de peloton dans le secteur spatial collaborent étroitement avec leurs industries nationales. Dans ces pays comme la Chine ou les États-Unis, les gouvernements sont les principaux clients de leur industrie spatiale. Ils achètent les services que les entreprises veulent leur vendre et contribuent ainsi à renforcer la compétitivité de l'industrie et à générer du capital. Dans le secteur spatial, les progrès de l'innovation, de la robotique et de l'IA sont très rapides. Le Canada et les entreprises canadiennes doivent trouver des moyens de tirer parti rapidement de l'innovation pour que l'industrie nationale puisse répondre aux besoins des Canadiens dans un monde moderne et en constant évolution, où les tensions géopolitiques et les changements climatiques s'intensifient, et où les technologies progressent rapidement, et particulièrement dans le secteur spatial.
    Les investissements privés sont beaucoup moins importants au Canada qu'aux États-Unis. Si les entreprises canadiennes peuvent être assurées de vendre plus rapidement et plus efficacement leurs produits au gouvernement, il serait plus facile pour l'industrie spatiale de générer du capital, de continuer à progresser, de faire la démonstration et la commercialisation de technologies clés, et de soutenir la concurrence internationale. Au‑delà de la compétitivité mondiale, le soutien à l'essor de la base industrielle contribue à notre souveraineté en matière de capacités spatiales. Le Canada doit être en mesure de soutenir le cycle complet des programmes spatiaux, de la conception à la construction, en passant par le lancement et l'exploitation. Autrement, les Forces armées canadiennes et les citoyens canadiens dépendront des autres pays pour les infrastrutures essentielles de communication, la souveraineté dans l'Arctique, la surveillance des feux de forêt et des pêches, et bien d'autres domaines.
    Les entreprises canadiennes ont été à l'avant-garde en matière d'IA, dans le secteur spatial et de la robotique, mais elles risquent de se faire distancer si elles ne peuvent pas vendre leurs capacités au gouvernement canaien au même rythme où elles évoluent.
    C'est ce qui conclut ma déclaration liminaire.
(1600)
    Merci, monsieur Reid.
    Monsieur Stewart, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Vous avez évoqué nos capacités de lancement. Pouvez-vous me décrire les capacités de lancement de notre pays?
    Actuellement, le Canada souverain n'a aucune capacité de lancement. Nous avons toutefois des programmes de contrôle de lacement de mission. Un projet de développement d'une capacité de lancement est en cours à Halifax, et je sais qu'il y en a un autre au pays.
    Actuellement, nous n'avons aucune capacité de lancement, mais deux projets de développement devraient être achevés à court terme.
    D'accord.
    Je suis désolé, mais je suis novice en la matière. Cette semaine, j'ai eu des discussions avec d'autres gens du secteur spatial à propos du Conseil national de l'espace et de sa composition. Ces gens ont soulevé certaines réserves eu égard à la composition du Conseil et à la façon dont il pourra faire avancer les choses.
    Pouvez-vous nous éclairer un peu sur la composition du Conseil et sa capacité d'obtenir des résultats au vu de son mandat?
    Voulez-vous commencer, et je pourrai compléter.
    L'annonce de la création du Conseil nous semble une excellente nouvelle. C'est fantastique. Du point de vue de l'industrie, il est essentiel que le gouvernement canadien adopte une approche pangouvernementale du secteur spatial. Il y a énormément d'éléments interdépendants à l'échelle du gouvernement et, s'il fonctionne adéquatement, un conseil national va garantir une utilisation optimale des ressources de l'industrie.
    À ce propos, nous pensons que ce conseil est suffisamment important pour qu'il soit présidé à l'échelon ministériel et que les réunions soient tenues sur une base semi-annuelle, sinon trimestrielle. Nous pensons aussi que les activités devraient être centralisées à un seul endroit — comme le Bureau du Conseil privé, par exemple — pour assurer une supervision du secteur spatial dans une optique pangouvernementale.
    Est‑ce qu'une analyse d'un point de vue économique sera nécessaire pour favoriser la rentabilité des entreprises privées et leur permettre de continuer d'investir?
    Avant le début de la réunion, nous avons eu une discussion sur les immenses avantages… Par exemple, l'investissement dans les ressources spatiales pourrait être une façon d'augmenter les dépenses de défense. Quand ces ressources ne sont pas utilisées explicitement à des fins militaires ou de défense, elles peuvent avoir des utilisations qui servent le bien commun de l'ensemble des Canadiens comme la surveillance des côtes, des pêches, des feux de forêt et ce genre de choses.
    Cela peut se faire par la voie de stratégies d'approvisionnement intelligentes, qui vont générer des retombées commerciales à l'industrie canadienne et favoriser l'expansion de notre base industrielle. Cela permet aussi de remplir le mandat de la Défense nationale.
    J'imagine que le double usage des ressources spatiales et des satellites est financièrement avantageux. Pour les Canadiens, cette immense puissance informatique peut servir d'autres intérêts collectifs que ceux du domaine militaire.
(1605)
    Je crois que c'est en effet un potentiel à exploiter.
    La puissance du matériel déployé de nos jours peut avoir un double usage, comme vous l'avez dit. C'est économiquement faisable du point de vue du gouvernement. Comme mon homologue l'a expliqué, les applications peuvent servir à la fois à des fins militaires et commerciales.
    Nous avons parlé brièvement de la question de l'approvisionnement.
    Est‑ce que cela aiderait à accélérer le processus? Les échéanciers des entreprises privées sont très différents de ceux des gouvernements, et elles ont d'autres exigences en matière d'efficience et d'approvisionnement. Est‑ce qu'une concordance entre leurs exigences d'efficience respectives contribuerait à accélérer le processus, ou pensez-vous que cela se ferait au détriment des capacités de défense?
    Si le gouvernement canadien présente de manière explicite ses plans à long terme, l'industrie privée peut en tenir compte dans sa propre planification. Elle peut développer les capacités et fournir les services demandés. Si elle peut ensuite les vendre au gouvernement — et en faire son principal client — et à d'autres clients, le modèle est viable. Ce serait plus efficace qu'un modèle dans lequel le gouvernement doit lancer des processus d'approvisionnement à répétition pour acheter et posséder ses propres ressources. C'est d'ailleurs ce qui explique la longueur excessive des cycles d'approvisionnement.
    Est‑ce que la lenteur de nos processus d'approvisionnement vous incite à vendre vos produits à d'autres pays, qui deviennent vos principaux clients? Dans ce cas, la propriété intellectuelle sort du Canada, de même que tous les autres effets positifs en aval.
    À mon avis, plusieurs des programmes proposés pour la modernisation du NORAD sont très pertinents. Je ne crois pas que le problème vient de la pertinence des programmes. Comme vous l'avez dit, le problème est lié au déploiement. Des entreprises investissent des millions de dollars pour lancer des satellites en orbite basse ou moyenne.
    Pour donner suite à ce que vous avez dit, pour que ce soit viable sur le plan commercial, elles doivent trouver les premiers clients principaux. Ce que l'industrie canadienne souhaite, c'est que le gouvernement canadien devienne ce premier client principal.
    Comment protégez-vous les civils canadiens? Nous avons parlé de l'utilisation de l'IA dans les satellites. Il se peut que le public soit moins à l'aise avec certaines caractéristiques d'une application militaire. Comment envisagez-vous la protection du public et le message comme quoi il n'y a rien d'inquiétant parce que le satellite est utilisé à des fins militaires? Comment peut‑on rassurer les gens et les convaincre qu'ils ne sont ni espionnés ni ciblés?
    Comment conciliez-vous les deux?
    Nous allons lancer cette mission d'IA au deuxième trimestre l'an prochain, et il faut que ce soit très clair que les applications de l'apprentissage profond sont très précises. C'est le plus important. Les usages sont très bien définis. Ce n'est pas un modèle de langage d'apprentissage aussi large que ChatGPT. C'est impossible de l'utiliser pour autre chose. Le seul usage possible sera celui qui aura été prévu au lancement. Il le fera mieux que toute autre application logicielle implantée. C'est ce que nous allons prouver lors de cette mission de démonstration.
    J'ajouterais que les balises en place au Canada assurent la protection et la sécurité du public. En revanche, le gouvernement canadien et les Canadiens n'ont aucun contrôle sur les capacités qui ne sont pas canadiennes.
    J'ai une autre question qui est liée à ce que nous venons de discuter. Si une ressource spatiale a un double usage, ne vous exposez-vous pas à certains risques? Si c'est une ressource militaire, nos adversaires ne risquent-ils pas de la voir comme une cible prioritaire?
    C'est pourquoi j'estime que le conseil de l'espace est aussi important. Le mieux est d'intégrer les exigences liées à la protection des civils et à la défense dès la conception. C'est plus difficile d'intégrer les exigences liées aux deux usages après le lancement.
    Je pense qu'il est impératif de réfléchir à tout cela maintenant, d'examiner les possibilités d'usages doubles, d'accélérer ces programmes et de prendre la responsabilité, en tant qu'industrie, d'empêcher le piratage de ces capacités satellitaires.
    Merci, monsieur Ford, et merci, monsieur Stewart.
    Madame Lapointe, vous avez la parole pour six minutes.
    Monsieur Ford, je crois savoir qu'en juillet dernier, le magazine Canadian Defence Reviewvous a décerné le prix de l'administrateur de l'année dans le domaine de la défense.
    Je vous félicite pour ce prix.
    Merci. C'est très aimable.
    Dans l'entrevue que vous avez accordée au magazine Canadian Defence Review, vous avez déclaré qu'il ne faut pas tenir la démocratie pour acquise, en soulignant qu'il faut investir dans notre cpacité de soutenir les forces d'intervention mondiales, que ce soit pour lutter contre les changements climatiques ou nous défendre contre des forces hostiles.
    Pouvez-vous nous parler davantage de ces forces d'intervention mondiales et des éventuelles répercussions de ces enjeux sur les capacités de défense spatiale?
    C'est une excellente question.
    Historiquement, quand on parlait de capacité de défense, on faisait référence aux forces maritimes, terrestres et aériennes.
    Je me suis rendu en Norvège il y a quelque temps, au Centre de guerre interarmées parce que Calian donne maintenant des formations pour le compte de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN. Je suis allé en Lettonie dernièrement. Le message très clair que nous devons tous entendre, c'est qu'il faut considérer l'espace et le cyberespace comme les nouveaux domaines… En plus des espaces aériens, terrestres et maritimes, nous devons maintenant prendre en considération l'espace et le cyberespace.
    Ce que j'ai essayé d'expliquer, c'est que le problème devient de plus en plus complexe en raison du rythme effréné de l'innovation dans tous ces domaines. Dorénavant, pour assurer une réelle capacité de guerre et de combat, il faut tenir compte de tous ces domaines. J'ai essayé de faire ressortir l'importance d'englober tous ces domaines. Nous ne pouvons pas nous limiter à un élément en particulier. Tous ces éléments doivent être pris en considération pour l'élaboration d'une politique spatiale et d'une politique de défense.
(1610)
    À quelles nouvelles menaces le Canada devrait‑il accorder la priorité dans le domaine spatial?
    Dans quelle mesure sommes-nous prêts à affronter les défis comme ceux qui sont liés aux armes antisatellites ou aux débris spatiaux, qui risquent d'avoir des incidences sur les opérations autant militaires que civiles?
    Je vais donner mon point de vue, et vous voudrez peut-être ajouter quelque chose.
    Je pense que c'est quelque chose dont nous devons discuter avec nos alliés. Comment pouvons-nous renforcer ces capacités collectivement, dans le cadre de l'OTAN ou du NORAD? Je ne crois pas que le Canada pourra faire cavalier seul. Le contexte est propice à une collaboration entre la Défense nationale et nos alliés pour planifier maintenant la prochaine génération d moyens de défense liés aux satellites et aux opérations.
    Je crois que ces discussions sont en cours mais, comme je l'ai dit, c'est le rythme auquel elles ont lieu qui m'inquiète. À mon avis, la collaboration avec nos alliés à l'intérieur d'une approche commune sera déterminante pour trouver des solutions à ces enjeux.
    La seule chose que j'ajouterais, c'est que les capacités technologiques qui sont essentielles pour déployer beaucoup de ces… Si une mission est lancée pour réparer un satellite, les technologies utilisées pourraient aussi servir à le démanteler, à modifier son orbite ou à l'endommager d'une quelconque façon.
    Ces technologies sont généralement à la fine pointe et elles sont mises au point par des entreprises en démarrage. C'est pourquoi il est important d'avoir un écosystème canadien d'entreprises en démarrage si nous voulons construire une capacité souveraine, au moins pour une partie des composants.
    Cela ne nous empêche pas de collaborer avec nos partenaires, comme l'a souligné M. Ford. Toutefois, nous devons nous assurer que les technologies de pointe ne proviennent pas seulement de la Silicon Valley et d'ailleurs ans le monde, mais du Canada également.
    Dans votre déclaration liminaire, monsieur Reid, vous avez expliqué que le secteur spatial est en plein essor et que les progrès sont exponentiels dans le domaine compétitif du développement de technologies destinées à des applications spatiales, y compris l'IA.
    La plateforme SpacefarerAI développée par votre entreprise joue un rôle de premier plan dans la mission novatrice Persistence. Vous avez dit notamment, concernant le lancement de ce projet, qu'un des objectifs est de donner la preuve que l'IA peut être fiable et pourra être utilisée pour toutes sortes d'applications à l'avenir.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, et notamment pour ce qui a trait à la sécurité nationale du Canada?
    Tout à l'heure, j'ai parlé du fait que ces algorithmes ont un usage précis et que cette technologie ne pourrait pas être modifiée pour servir à autre chose. Il n'y a pas de risques graves comme ceux dont on nous parle dans les médias, pas de possibilité que l'IA prenne le contrôle, pour ainsi dire.
    L'idée ici, c'est qu'avec l'intensification des activités dans l'espace — où les opérations sont foncièrement compliquées en raison des longs temps de latence des signaux de communication, des bandes passantes et de la capacité de traitement limitées —, plus les fonctions embarquées à bord des engins spatiaux sont intelligentes, plus les possibilités sont grandes.
    Ce dont il est question, c'est de stations spatiales commerciales qui vont prendre la relève de la Station spatiale internationale. Comment allons-nous les construire? Elles vont être construites grâce à la robotique. Est‑ce qu'elles seront automatisées? Sans doute que oui.
    Comme je l'ai dit, le potentiel est énorme pour les entreprises canadiennes, et nous devons nous assurer qu'elles restent chez nous. Il faut qu'elles tirent profit de ces possibilités en étant au Canada.
    Monsieur Ford, très rapidement, votre entreprise a maintenant des activités dans certains pays européens membres de l'OTAN, et je suppose que l'enjeu régional le plus urgent en Europe de l'Est est la guerre de la Russie contre l'Ukraine. Y a‑t‑il lieu pour nous de nous inquiéter de l'utilisation de technologies spatiales contre l'Ukraine? Est‑ce que des technologies détenues et déployées par des entités privées peuvent représenter un risque grave pour la sécurité mondiale?
    Il faut garder à l'esprit que les possibilités de double usage et la capacité spatiale commerciale peuvent être exploitées autant à des fins positives que négatives, que ce soit en Ukraine ou dans un autre contexte. Les systèmes spatiaux de surveillance jouent un rôle capital, c'est évident. Nous entendons parler de la militarisation de l'espace, et nous ne pouvons rien tenir pour acquis à ce sujet. Nous devons réfléchir à une stratégie pour faire face à cet enjeu.
    Ce que je constate quand je discute avec des gens de l'OTAN dans différents pays, c'est que tout le monde réfléchit à la prochaine génération dans le secteur spatial. Le Canada a un rôle unique à jouer dans ces discussions, c'est clair, et il a des capacités à offrir. Nos capacités de fabrication et d'ingénierie placent le Canada en très bonne posture pour jouer un rôle de premier plan dans la prise de décisions sur la prochaine génération dans le secteur spatial.
    Tout cela pour dire que c'est tout à fait pertinent. Le Canada a un rôle unique à jouer dans ce processus. Il suffit de prendre les moyens de relever ce défi.
    Merci.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Sauvé, bienvenue au Comité. Vous avez la parole pour six minutes.
(1615)
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Ford. Je vous prie de m'excuser de l'aspect un peu amateur de mes questions, puisqu'il s'agit de ma première intervention en comité parlementaire.
    Mes interventions seront à la jonction du développement économique et de la défense nationale.
    Parlez-moi d'abord de votre entreprise. J'ai cru vous entendre dire tout à l'heure que vous aviez des installations à Vaudreuil‑Dorion. Est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus sur le nombre d'employés et sur les retombées économiques de votre entreprise dans le secteur?

[Traduction]

    Si j'ai bien compris, la question porte sur nos activités au Québec, à Vaudreuil plus précisément.
    Actuellement, c'est au Québec que nous effectuons une bonne partie du travail de développement dans le domaine de l'exploration de l'espace lointain en collaboration avec la NASA. Nous y avons fabriqué des antennes. Si jamais vous allez dans ce coin, vous pourrez voir notre antenne de 12 mètres à mouvement complet sur le bord de l'autoroute.
    Il y a une quarantaine d'employés actuellement, et nos soumissions en cours dans le domaine des nouvelles capacités spatiales pourraient offrir de belles possibilités d'expansion. C'est un élément essentiel de notre chaîne d'approvisionnement dans le secteur spatial, et nous envisageons une expansion.

[Français]

    Est-ce que votre entreprise bénéficie de l'écosystème aérospatial à Montréal? On sait que Montréal est un lieu central de l'industrie aérospatiale, non seulement au Canada, mais dans le monde. Est-ce que la consolidation de cet écosystème par les politiques publiques profite à votre entreprise?

[Traduction]

    Je crois que oui. Actuellement, si on considère plus particulièrement nos activités au Québec, nous avons un établissement à Vaudreuil, mais nous avons aussi des employés à Saint-Hubert, à l'Agence spatiale canadienne. Très franchement, je ne crois pas que notre entreprise a vraiment profité de cet écosystème. Nous avons gardé une assez grande indépendance, et nous réfléchissons à ce que nous ferons à cet égard à mesure que nous prendrons de l'expansion.
    Pour le moment, nous recevons le soutien dont nous avons besoin, mais le plus important, comme M. Reid l'a dit, est d'avoir accès à une aide financière pour innover et continuer d'accroître notre présence en obtenant des mandats, idéalement du gouvernement canadien, de développement de nouvelles capacités spatiales au Québec.

[Français]

    Le 6 mai dernier, M. Greenley, de l'entreprise MDA Space, a dit au Comité que « le Canada a pris du retard du point de vue des capacités militaires spatiales et ne mobilise pas sa base industrielle de manière efficace ».
    Étant donné que, d'ici à 2040, la contribution de l'industrie spatiale à l'économie mondiale pourrait atteindre un billion de dollars, n'êtes-vous pas un peu inquiet de la situation exposée par M. Greenley? Est-ce que vous faites le même constat que lui?

[Traduction]

    Les possibilités offertes par l'espace, si j'ai bien compris votre question, sont considérables. L'économie de l'espace offre d'énormes possibilités. C'est le cas notamment des technologies à double usage du point de vue de la défense, et des entreprises comme MDA, Télésat et Calian jouent un rôle dans cette économie.
    Je crois que ce qu'a dit M. Greenley est juste par rapport à la situation à laquelle il fait référence. Pour ce qui est de Calian et de notre champ d'activités, je peux vous affirmer que les possibilités offertes dans le domaine spatial sont très enthousiasmantes. Ce qui se passe à l'échelle mondiale nous enthousiasme au plus haut point, et j'espère vraiment… C'est pour cette raison que je voulais être ici aujourd'hui. Je voulais vous faire comprendre pourquoi il est important d'accélérer le processus du gouvernement relativement à nos collaborations avec lui si nous voulons rester en tête du peloton. Autrement, nous risquons de nous retrouver à la traîne du reste du monde. Et je le répète, nous avons une chance unique de rester des chefs de file.

[Français]

    Comme moi, vous lisez les journaux et vous savez que l'économie canadienne souffre d'un problème de productivité.
    Voyez-vous votre industrie comme étant un nouveau moteur de productivité économique, une façon de générer des produits à valeur ajoutée permettant non seulement de renforcer l'économie du Canada et du Québec, notamment par notre industrie aérospatiale, mais également d'améliorer la défense du pays?
    Si oui, comment le gouvernement pourrait-il soutenir votre industrie et l'aider à prospérer? C'est vraiment cet aspect qui doit intéresser les membres du Comité, à mon avis.

[Traduction]

    Je le redis, l'économie de l'espace peut vraiment être un moteur de l'économie canadienne. Je crois qu'elle peut contribuer, comme je l'ai dit tout à l'heure, à atteindre le niveau de 2 % du produit intérieur brut pour la défense. C'est un secteur qui offre des possibilités uniques. Concernant la productivité, tous les acteurs de l'industrie cherchent actuellement des façons de l'augmenter.
    Notre concurrence est mondiale, et ce serait irresponsable de ma part de prétendre que tout est réglé. Il faut trouver des façons d'accroître notre productivité et de créer des emplois dans les domaines des sciences, des technologies, du génie et des mathématiques. Il faut faire une analyse de toutes les industries qui ont besoin de ces compétences techniques et en génie. Bref, des améliorations sont possibles, mais je crois que nous sommes déjà très forts. Je ne veux absolument pas donner l'impression que nous ne sommes pas prêts à rivaliser avec la concurrence mondiale.
    Pour revenir sur le conseil de l'espace, c'est vraiment une belle occasion de réfléchir à des moyens de mobiliser l'industrie dans tous les domaines d'activité du gouvernement pour discuter des utilisations spatiales, militaires et civiles, de même que des priorités… Nous devons nous assurer d'être prêts à relever le défi. En fait, nous sommes prêts, mais nous voulons savoir si nous sommes au même diapason que vous pour ce qui est des priorités.
    Si nous connaissons les priorités et les échéanciers, nous serons prêts. Nous pourrons collaborer avec vous dans le cadre de nouveaux programmes et en matière d'innovation, et faire tout ce qu'il faut pour y parvenir. Mais pour le moment, nous devons prendre un pas de recul pour nous assurer que nous sommes prêts à avoir cette discussion avec vous concernant ce qui nous est demandé et à quel moment. Le mandat doit être clair.
(1620)

[Français]

    Combien de temps de parole me reste-t-il?

[Traduction]

    Il vous reste 20 secondes.

[Français]

    Rapidement, monsieur Ford, pouvez-vous me dire comment votre industrie bénéficie de notre intégration dans l'espace continental, sur le plan des chaînes de valeur de la défense?

[Traduction]

    Je crois que l'intégration optimale aux chaînes de valeur dont vous avez parlé, et que la compréhension du rôle du secteur spatial dans ces chaînes de valeur… À mon avis, la plupart des Canadiens et beaucoup d'industries… Nous devons mieux expliquer le rôle du secteur spatial dans toutes les sphères d'activité, que ce soit les communications, l'exploitation de satellites ou la surveillance côtière. Le conseil de l'espace va nous permettre de prendre part à la discussion et de faire comprendre à tout le monde le rôle que joue le secteur spatial dans l'économie canadienne, mais aussi pourquoi il ne faut rien tenir pour acquis et continuer d'investir dans ce secteur, pas seulement pour aujourd'hui, mais pour demain aussi.
    Nous allons devoir en rester là.
    Madame Mathyssen, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins pour leur comparution devant le Comité.
    Je vais poursuivre dans la foulée des questions précédentes, mais j'aimerais les aborder sous un angle un peu différent. M. Stewart vous a interrogé au sujet des technologies à double usage et des enjeux de sécurité associés. Malheureusement, nous savons que la machine gouvernementale bouge beaucoup plus lentement que des domaines comme l'IA et ces technologies.
    On entend beaucoup parler du déclin de la coopération internationale dans le secteur spatial. Les Nations unies ont travaillé à des accords sur les protocoles du Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique. Il y a eu des complications. Nous avons parlé de la vitesse à laquelle évolue l'intelligence artificielle et des risques pour la sécurité.
    J'aimerais avoir votre avis sur les efforts déployés… Pensez-vous que nous faisons assez d'espace, sans vouloir faire de jeu de mots, ou que nous accordons suffisamment d'importance aux balises reconnues internationalement?
    De plus, monsieur Reid, vous avez parlé précisément des usages ou des capacités limitées de vos technologies. L'utilisation de l'IA est‑elle assujettie à une réglementation gouvernementale? Devez-vous vous conformer à un cadre réglementaire? Selon vous, devrions-nous faire mieux?
    C'est une vaste question. Elle comporte plusieurs… Je suis désolée.
    Je crois que le thème de la réglementation est important. J'imagine que c'est assez rare que des représentants d'une industrie réclament une réglementation gouvernementale, mais c'est important que l'industrie sache comment agir dans un écosystème et un secteur qui sont relativement nouveaux. Nous devons connaître nos responsabilités et beaucoup d'autres choses.
    Pour vous donner un exemple… Nous avons parlé de la guerre menée par la Russie en Ukraine. Si une technologie à double usage est utilisée là‑bas… Elle peut devenir une cible. Elle peut ne pas être utilisée… Quelles sont les répercussions sur la composante civile? Nous devons connaître les lois et les règles qui s'appliquent dans ces situations.
    Pour ce qui concerne l'IA, je maintiens que notre participation aux activités entourant l'IA dans l'espace est essentielle pour faire en sorte que les normes internationales reflètent les valeurs canadiennes, mais aussi pour assurer notre contribution au Groupe des cinq et à nos autres partenaires dans le monde. Et pour ce faire, nous devons faire des investissements et du développement.
    Ne pensez-vous pas que le gouvernement doit commencer par mettre la réglementation en place avant d'être dépassé par toutes ces technologies et de perdre le contrôle?
    Oui, dans certains cas, je crois que c'est essentiel.
    Un de vos collègues du Comité a posé une question au sujet de la capacité de lancement du Canada. Nous sommes le seul pays du Groupe des cinq à n'avoir aucune capacité de lancement nationale. Nous sommes en train de remédier à la situation, et c'est fantastique. Nous allons avoir notre propre capacité de lancement.
    Je pense qu'il faut aussi chercher les lacunes dans la réglementation applicable à l'IA et réfléchir aux mesures qu'il faut mettre en place. En revanche, il ne faut pas que ce processus nous empêche d'avancer, qu'on nous dise qu'une étude est nécessaire et qu'une décision va être prise dans cinq ans. Il faut aller aussi vite que l'innovation, comme je l'ai dit plus tôt.
    Est‑ce que, eu égard aux balises mises en place à l'échelle internationale, nous sommes clairement en retard par rapport aux autres pays? Pouvez-vous nous donner de bons exemples à suivre concernant ce qui a été fait ailleurs?
(1625)
    Je vais devoir vous revenir avec une réponse plus tard.
    C'est une excellente question. C'est toujours un défi dans le domaine de l'innovation. Pour l'instant, nous parlons d'IA, mais dans deux ans, nous allons probablement parler d'IA quantique ou de quelque chose d'autre.
    Là encore, le conseil de l'espace va nous offrir une tribune extraordinaire pour discuter avec le gouvernement d'enjeux comme celui que vous venez d'évoquer. Nous allons pouvoir discuter avec lui de la mise en place d'un cadre qui ne compromettra pas nos progrès. L'innovation est un catalyseur essentiel mais, pour répondre à votre question, il faut garder les yeux grands ouverts pour ce qui concerne les politiques.
    L'industrie, et le conseil de l'espace également… Nous sommes prêts à discuter avec le gouvernement de la manière dont il faut procéder. Le défi, comme vous l'avez dit, c'est que le monde va de l'avant, et que nous devons trouver notre rôle.
    Un des dangers de la commercialisation de l'espace, à mon avis, est lié au fait que l'humanité n'est pas suffisamment mise au premier plan. Nous avons compris les dangers que les projets lancés aux États-Unis, SpaceX, la monopolisation… Que faut‑il faire pour empêcher que la rentabilité prenne le pas sur les besoins de l'humanité dans les accords de consolidation de la paix qui devront être signés dans le contexte spatial?
    La base industrielle doit être vaste et diversifiée. C'est primordial. Si jamais une ou deux entreprises en venaient à exercer un quasi-monopole au Canada, ce serait mauvais pour l'innovation, les contribuables et notre capacité à établir des balises et une réglementation appropriées.
    Monsieur Ford, je suis un peu inquiète au sujet de Calian. Les Forces armées canadiennes viennent de conclure un contrat d'une valeur de 1 milliard de dollars environ dans le domaine des soins de santé. Aux termes de ce contrat, Calian touche 25 % pour tous les médecins et fournisseurs de soins de santé salariés. Pouvez-vous nous parler des profits réalisés par Calian au titre de ses contrats dans le secteur spatial?
    Je répondrai que, premièrement, je ne sais pas d'où viennent ces chiffres sur une part de 25 %. Si vous examinez nos résultats consolidés, ils incluent non seulement ce contrat relatif à la santé, mais tous les produits, les innovations et la technologie que nous vendons dans le monde, et pas seulement au gouvernement canadien. Je ne suis pas forcément d'accord avec ce commentaire.
    Dans le même ordre d'idées, le contrat relatif à la santé — encore une fois, j'étais à Kingston aujourd'hui même, avant de venir ici — est un élément essentiel pour aider à relever certains des défis actuels de l'armée en matière de capacités, et c'est le rôle que nous jouons, que ce soit dans les soins de santé ou la formation, principalement.
    Pourriez-vous répéter la deuxième partie de votre question, s'il vous plaît?
    Ce ne sera pas possible parce que ses six minutes sont largement dépassées.
    Nous allons passer à la deuxième série de questions. Je suis certain qu'elle reviendra vers vous quand ce sera son tour.
    Madame Gallant, vous disposez de cinq minutes.
    Dans quelle mesure nos satellites sont-ils vulnérables s'ils sont détournés ou neutralisés par nos adversaires au moyen d'une cyberattaque?
    S'ils sont détournés ou neutralisés, ils ne rempliront pas leur mission. Ce sont les services que les Canadiens et les Forces armées canadiennes attendent de ces satellites et tiennent pour acquis qui sont vulnérables.
    La géolocalisation...? Quelles sortes de services...?
    Le GPS permet d'effectuer toutes les transactions bancaires, absolument. Il ne s'agit pas de satellites canadiens. Ce sont des satellites qui ont été payés et construits par l'armée américaine qui nous fournissent gratuitement le GPS, que nous exploitons ensuite, mais tous les satellites que le Canada a construits, la mission de la Constellation RADARSAT et d'autres satellites radar, nous fournissent des données essentielles pour la surveillance de la Terre, des changements climatiques, des feux de forêt et pour toutes sortes d'applications. Sans satellites, il nous est très difficile de voir ce qui se passe.
    D'accord, c'est donc ce qui passe si nous sommes attaqués. Dans quelle mesure les satellites canadiens sont-ils vulnérables?
    Je crois que, du point de vue de la vulnérabilité, je dirai que, comme toutes les industries — en ce qui concerne les satellites, l'infrastructure de communication, l'énergie, toute infrastructure essentielle —, nous devons considérer les choses sous le même angle. Nous devons évaluer par rapport aux vulnérabilités et à la capacité d'y remédier, et voir comment nous positionner au mieux pour nous protéger contre ces vulnérabilités.
    J'estime que ce n'est pas différent de notre façon d'envisager nos réseaux 5G, nos systèmes bancaires et nos réseaux énergétiques. Je pense qu'à l'heure actuelle, le défi, évidemment, pour l'espace est qu'ils se trouvent dans l'espace, et qu'il faut donc concevoir et intégrer ces éléments à mesure que nous lançons de nouvelles capacités.
    Comment remédions-nous à ces vulnérabilités? Comment défendons-nous nos satellites contre des pays adverses dotés d'un programme spatial ou des acteurs non étatiques s'ils venaient à fomenter une cyberattaque pour nous empêcher d'utiliser notre infrastructure satellitaire?
    En travaillant avec des organisations comme la Défense nationale et le Centre canadien pour la cybersécurité pour renforcer la capacité des satellites lorsque nous les concevons.
    Comme vous le savez, le paysage cybernétique continue de se compliquer alors que nous commençons à réfléchir à l'IA et à la cybernétique, ainsi qu'à la quantique et à la cybernétique. Convenons qu'il s'agit d'un défi sur lequel nous devons travailler de façon proactive avec l'industrie, le gouvernement et la Défense nationale, ainsi qu'avec nos alliés, à vrai dire.
(1630)
    Avez-vous confiance dans l'infrastructure de cyberdéfense de nos forces armées si un État ou un acteur non étatique agressif venait à s'en prendre à nos satellites et à l'infrastructure qui les soutient?
    À vrai dire, je préférerais laisser le ministère de la Défense nationale répondre à cette question. Je pense qu'il est mieux placé parce que je ne connais pas tous les détails de ce qu'il fait aujourd'hui pour protéger ces satellites. Il est, selon moi, probablement...
    Avez-vous un avis sur cette question?
    Non, je n'en ai pas. J'ajouterai que, si M. Ford et moi-même ne sommes pas en mesure de répondre à cette question, c'est en partie parce que nous n'avons pas la cote de sécurité de niveau très secret nécessaire pour savoir quelles sont toutes les menaces, ce qui fait partie du défi en matière d'innovation, car nos entreprises pourraient sans doute proposer des solutions pour aider à atténuer ces menaces.
    Nous ne savons pas toujours quelles sont les menaces, car elles sont classifiées. Nous n'avons pas accès à ce niveau de classification avant d'avoir un contrat avec le gouvernement canadien pour fournir quelque chose, mais nous ne pouvons pas obtenir de contrat pour fournir quelque chose au gouvernement canadien avant de savoir ce que nous allons mettre au point pour contrer les menaces. C'est un peu la question de la poule et de l'oeuf.
    Je ne pense pas que nous puissions, l'un ou l'autre, répondre au sujet du niveau de menace.
    D'accord. Vous ne savez donc même pas si vous avez confiance dans notre infrastructure de défense.
    Hormis la menace de cyberattaques et d'armes antisatellites, disposent-ils de capacités qui leur permettent de nous empêcher d'utiliser nos satellites ou de perturber cette utilisation? Y a‑t‑il d'autres éléments que je n'ai pas mentionnés?
    À l'heure actuelle, ce que vous avez mentionné, tant les cyberattaques... Tout type de prise de contrôle ou de destruction d'un satellite, ce qui est aussi un problème... Nous devons reconnaître qu'il s'agit de défis et de menaces. Il sera essentiel pour contrer cette menace de rendre nos réseaux résilients, comme nous le faisons au sol et dans l'espace.
    Là encore, cela veut dire travailler avec le gouvernement, la Défense nationale et nos alliés pour le faire au mieux. Il n'y a pas de réponse facile à cette question, c'est certain, mais je suis persuadé qu'en planifiant, nous pouvons y arriver.
    Le Centre de la sécurité des télécommunications Canada, le CST, a‑t‑il jamais établi de communications régulières avec votre entreprise ou votre organisation pour vous alerter au sujet de cybermenaces ou de vulnérabilités importantes?
    Avez-vous dit le CST?
    Je ne suis pas au courant de communications directes avec le CST à ce sujet aujourd'hui.
    Oui.
    Êtes-vous régulièrement en communication avec d'autres organismes de cybersécurité au sein du gouvernement, comme le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, par exemple?
    Calian fournit des cyberservices. Par conséquent, dans ce contexte, nous avons effectivement des discussions avec le gouvernement sur la cybersécurité. Pour ce qui est des cas d'utilisation ou de tout ce que nous nous sommes engagés à faire ou qui fait l'objet d'un contrat, il y a des discussions sur les besoins cybernétiques les concernant.
    Il y a un dialogue continu, mais c'est généralement sur un sujet ou un contrat particulier que nous avons aujourd'hui.
    Je vous remercie.
    Monsieur Collins, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins.
    Monsieur Ford, je commencerai par vous. Au début de cette étude, j'ai interrogé des témoins sur la politique spatiale en ce qui concerne la relation entre certains de nos fournisseurs du secteur commercial et ceux dont nous dépendons. Vous avez souligné que nos alliés ont intégré leur secteur commercial dans leur stratégie de défense. Il me semble que vous avez tous deux évoqué toute la question de la dépendance croissante à l'égard du secteur privé. Elle présente d'énormes avantages du point de vue des économies. C'est le moteur de l'innovation. Je suis d'avis qu'il est important que nous ayons ces partenariats avec le secteur privé.
    Toutefois, si je prends le cas de M. Musk et l'aspect politique de certaines de ses positions, que ce soit au sujet de Taïwan ou de la Russie... certaines dans les médias, à des postes gouvernementaux, parfois aux États-Unis... Un administrateur de la NASA vient de demander qu'il y ait une enquête sur les allégations selon lesquelles M. Musk est en contact régulier avec M. Poutine depuis 2022. La situation est délicate. Le gouvernement dépend de plus en plus du secteur privé, et lorsque le secteur privé a des positions politiques qui ne cadrent pas avec celles du gouvernement, il y a un problème. Il y a des problèmes de sécurité.
    Pouvez-vous me dire comment les gouvernements, qu'il s'agisse de celui du Canada ou de gouvernements alliés, gèrent une dépendance croissante à l'égard du secteur privé quand celui‑ci affiche des positions différentes des nôtres, que ce soit du point de vue de la sécurité ou autrement?
    C'est une excellente question.
    D'après moi, premièrement, nous devons nous assurer que le Canada dispose d'une capacité souveraine. Deuxièmement, je pense que les paramètres de cette relation doivent être très bien documentés et compris dès le départ, afin que nous ne nous retrouvions pas dans une situation où nous parlons d'un cas d'utilisation où quelque chose s'est produit et où nous disons que nous ne comprenons pas pourquoi cela se produit. Il est essentiel que la relation avec l'industrie soit bien documentée dès le départ en ce qui concerne la manière dont nous allons travailler ensemble, pas seulement aujourd'hui, mais pendant de nombreuses années, et ce doit être clarifié dès le début de la réunion et pas 10 ans après le début de la relation.
    Cela dit, une gouvernance habituelle de la relation en ce qui concerne la façon dont les choses sont gérées est essentielle. Il faut vérifier ce qui est fait et si vous êtes en phase pour ce qui est du service que vous obtenez conformément aux instructions de l'entente sur le contrat.
(1635)
    Monsieur Reid, je vous pose la même question.
    J'ai également oublié de mentionner que l'on a reproché à M. Bezos, le week-end dernier, de ne pas avoir laissé le Washington Postsoutenir officiellement l'un ou l'autre des candidats aux élections américaines. Certains prétendent que sa décision est liée à ses activités spatiales avec Blue Origin et à l'ancien président Trump.
    Que pensez-vous de ces situations délicates par rapport à la politique spatiale?
    Je ne parlerai pas de mes affinités politiques dans cette salle.
    Je pense, comme M. Ford, qu'il est possible d'intégrer des éléments et des exigences dans un contrat sur le contrôle au sein d'une organisation. M. Musk semble garder beaucoup de contrôle sur Starlink, par exemple — il l'éteint, le rallume.
    Je pense qu'il y a des solutions pour que, si une entreprise canadienne fournit un service de communication ou un service robotique ou autre chose dans l'espace, et que le gouvernement le lui achète en tant que client, encore une fois, idéalement en tant que service, je pense qu'il y a des solutions pour que le contrat dise que nous avons la capacité de prendre ces décisions — pas en tant que dirigeant, pas en tant que conseil d'administration ou en tant que personne. Encore une fois, il y a aussi des différences entre les entreprises canadiennes cotées en bourse comme Calian et M. Ford, et SpaceX, qui est entièrement privée, dont nous ne connaissons pas les investisseurs et pour laquelle nous ne savons pas à quoi ressemble ce contrôle.
    J'abonde certainement dans le sens de M. Ford quand il dit qu'il s'agit d'un argument de plus en faveur de capacités spatiales nationales. Sinon, nous dépendons aussi de M. Musk si nous voulons lancer des satellites canadiens. C'est le cas actuellement, car il a un quasi-monopole. Par conséquent, trouvons une société de fusées canadienne qui lancera des satellites de défense canadiens depuis le sol canadien et, au moins, démarquons-nous sur cette question.
    C'est une excellente suggestion.
    Monsieur Ford, très rapidement — je pense qu'il me reste moins d'une minute —, vous avez parlé plusieurs fois d'approvisionnement, et nous venons de terminer une étude épuisante à ce sujet. Vous avez parlé de certaines choses que nos alliés font pour améliorer la situation à cet égard.
    Pouvons-nous tirer des enseignements de ce qu'ils font en ce qui concerne l'approvisionnement relatif à l'espace?
    C'est une excellente question.
    Pour moi, l'essentiel est que, si nous pouvons continuer de travailler avec le gouvernement comme client sur les besoins et sur ce qu'il essaie d'accomplir, nous puissions vous dire quelle est la meilleure façon de le faire en fonction des innovations actuelles et en pensant à l'avenir. Il me semble que vous devez avoir la possibilité de devenir client et avoir vos exigences, et ne pas sentir la pression, à vrai dire, de définir la solution. À mon avis, l'industrie est tout à fait capable de définir la solution. Ce que nous devons faire, c'est travailler avec vous sur le défi que nous essayons de relever, puis revenir vers vous avec des idées sur la façon de s'y prendre. Au fond, sans mettre la pression sur le gouvernement pour qu'il ait l'impression de devoir nous dire comment il va construire ou concevoir la maison, nous pouvons travailler avec vous une fois que vous avez un énoncé clair des besoins, pour accélérer ce processus.
    Je vous remercie.

[Français]

    Monsieur Sauvé, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, c'est fort dommage que nous n'ayons que quelques minutes pour échanger encore, car, en vous écoutant, j'ai eu beaucoup d'idées.
    Tout à l'heure, je mentionnais que la ville de Montréal était une plaque tournante de l'industrie aérospatiale. Je me suis aussi rappelé que Montréal était un carrefour de l'intelligence artificielle. Donc, j'aimerais utiliser les deux minutes qu'il nous reste ensemble pour réfléchir avec vous à voix haute, au bénéfice de la partie gouvernementale, sur l'élaboration d'une stratégie de développement de l'aérospatiale.
    Comment le gouvernement pourrait-il élaborer une stratégie industrielle qui tire profit non seulement de la présence de l'industrie aérospatiale et de l'intelligence artificielle à Montréal, mais aussi du caractère français de cette ville? En effet, cet élément pourrait nous permettre d'avoir des relations plus étroites avec nos partenaires européens et leurs entreprises.
    J'aimerais entendre votre opinion à tous les deux.

[Traduction]

    Selon moi, c'est l'occasion de le faire et c'est pourquoi je suis ravi d'être ici aujourd'hui. C'est le moment ou jamais. Le gouvernement a parlé de son engagement à l'égard de l'IA, de l'espace, du Conseil national de l'espace, de l'aérospatiale et des dépenses de défense.
    Je pense qu'il se présente actuellement une occasion unique de travailler avec l'industrie globalement afin de voir comment nous pouvons tirer le meilleur parti de ce pays extraordinaire dans lequel nous vivons et de l'ensemble des compétences qu'il a à offrir. J'ai des collaborateurs à Saskatoon, en Ontario et au Québec. Je suis prêt, en fait, à investir pour être certain qu'ils soient prêts à aller aider à relever ces défis.
    À mon sens, vous posez une bonne question, et je suis ravi d'être ici. Je pense qu'il s'offre à nous une occasion unique, parce que tout se présente à nous en même temps. Nous trouvons formidable l'idée du Conseil national de l'espace s'il peut chercher à régler cette question. Comment pouvons-nous examiner ce que vous avez mentionné, comme l'IA, l'espace et la défense, et progresser de manière concrète et globale de sorte qu'en tant qu'industrie, nous n'essayions pas de déterminer quelle est la priorité du moment?
(1640)
    Je vous remercie.
    Madame Mathyssen, vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vais reprendre là où je me suis arrêtée quand je vous ai demandé une explication et votre avis sur les pourcentages et, si vous voulez présenter ces chiffres au Comité, ce serait formidable pour ce qui est des marges bénéficiaires. Je me demande quel est le lien avec les contrats relatifs à l'espace que vous avez actuellement, et c'était ma question secondaire.
    Cependant, pour que cela puisse tenir dans les deux minutes et demie dont je dispose, nous parlions de la monopolisation de l'espace et de la distance avec ce que le gouvernement doit faire. Nous avons appris dans notre étude sur l'externalisation à ce comité que nombre de programmes ont été conçus spécifiquement par Calian pour promouvoir des programmes externalisés, et qu'il s'agissait d'une conception qui leur était propre. Par ailleurs, comment le gouvernement canadien peut‑il mieux se protéger contre la monopolisation d'une entreprise, plus précisément lorsqu'il externalise constamment vers certaines entreprises qui rédigent ensuite leurs propres contrats pour augmenter leurs propres marges bénéficiaires?
    Je répondrai que nous ne rédigeons pas nos propres contrats pour augmenter nos marges bénéficiaires. Nous gérons beaucoup de contrats, et nous le faisons dans l'esprit du contrat qui nous est confié.
    Le processus d'approvisionnement est très clair: les entreprises n'ont pas leur mot à dire sur les exigences de marchés qu'elles chercheront ensuite à obtenir, et nous avons renoncé à répondre de nombreux appels d'offres parce que l'équipe avait participé à la définition des exigences.
    De notre point de vue, le système fonctionne actuellement dans le contrat en question. Il ne permet pas la monopolisation et, dans le même ordre d'idées, il met en place certains obstacles de sorte que, si l'on travaille sur les exigences, on n'est pas autorisé à soumissionner ensuite sur l'appel d'offres correspondant. Nous n'avons pas, selon moi, eu ce problème.
    Il se peut que mes propos soient jugés contraires au Règlement. Nous verrons.
    Le gouvernement libéral a annoncé un contrat de 144 millions de dollars pour élargir les services de santé afin de répondre aux besoins des femmes et de militaires aux diverses identités de genre, puis une semaine après ce budget, votre entreprise a publié un appel à candidatures pour des gynécologues-obstétriciens dans le cadre de la nouvelle initiative en faveur des femmes. Vous avez ensuite affiché un poste dont les attributions étaient d'examiner, de mettre à jour et de réécrire le programme de santé des femmes des Forces canadiennes.
    En réponse à la question à laquelle je vous ai demandé de répondre, c'est de là que cela venait.
    Je voulais poser une autre question...
    Je vous remercie de votre question. Vos deux minutes et demie sont écoulées.
    Monsieur Bezan, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins. Je vous remercie de votre présence.
    Monsieur Ford, vous avez une perspective particulière. Voilà 14 ans que vous êtes chez Calian et vous avez passé 14 ans au ministère de la Défense nationale et du matériel. Vous parlez des appels d'offres qui deviennent trop vite obsolètes, mais de votre point de vue, comment pouvons-nous y remédier? Comment faire en sorte que le système fonctionne pour, par exemple, moderniser le NORAD et imprimer la marque canadienne dans l'espace en matière de défense nationale?
    Pour être honnête avec vous, le secteur privé rencontre quantité des mêmes problèmes. Je ne pense pas que le gouvernement doive faire quelque chose. Il y a toujours tellement à faire et les ressources comme le temps sont limitées. À mon avis, il faut d'abord arriver à un ordre de priorité logique dans ce qui est à faire.
    À l'heure actuelle, je pense que nous devons reconnaître que, compte tenu des problèmes de capacité, il y a des limites à ce que l'on peut faire en parallèle. Par conséquent, il faut se demander quelles sont les choses dont nous devons faire passer en première ligne. Il faut donc se concentrer sur ces choses, les réaliser, puis passer à la vague suivante, puis à la vague suivante.
    L'industrie est prête, selon moi, à avoir ces discussions. Nous sommes conscients que le ministère de la Défense nationale subit d'énormes pressions avec la réalité du rythme des opérations, qu'il s'agisse des changements climatiques ou de l'Ukraine. Il me semble que si nous pouvons examiner ce qui est sur la table, dresser la liste de priorités de cette première vague, obtenir des ressources suffisantes pour les réaliser, ainsi que l'approvisionnement et l'engagement de respecter un calendrier d'exécution, c'est un début. Pour l'instant, il n'y a que...
(1645)
    Si l'on prend l'exemple des unités centrales graphiques et tous les investissements qui se font, plus les différents projets et explorations qui ont lieu dans le cadre des différents contrats d'approvisionnement, la modernisation du NORAD vient, me semble‑t‑il, en tête de liste, tout comme l'installation des systèmes de radar transhorizon, sans oublier la position du radar transhorizon dans l'Extrême-Arctique.
    Vous dites que lorsque nous publions les appels d'offres, ils sont déjà obsolètes. Est‑ce que nous devons, par conséquent, utiliser l'IA pour faire des acquisitions et rédiger ces appels d'offres? Qu'est‑ce qui doit changer?
    De mon point de vue, si nous prenons les programmes de modernisation du NORAD, là encore, avec nos alliés américains en particulier, nous asseoir pour examiner les capacités initiales que nous devons mettre en place plus tôt et dans quel ordre de priorité serait un début.
    Le processus d'approvisionnement lui-même nous permet de mettre cela en place dès que possible. Je sais que ce n'est pas toujours facile, en raison des règles qui régissent la passation de marchés, mais je...
    D'un point de vue canadien sur votre industrie canadienne, je sais que vous n'entrez peut-être pas dans le système radar même qui pourrait être utilisé dans le radar transhorizon, mais qu'en est‑il des points communs? Les États-Unis vont de l'avant. Le Canada semble être à la traîne. Qu'en est‑il des solutions prêtes à l'emploi? Dans de nombreux cas, il s'agit d'un élément très important du développement, mais pourrait‑on utiliser les mêmes types de programmes et d'infrastructures que les États-Unis?
    Pour répondre à votre question, il existe des réseaux satellitaires qui sont lancés aujourd'hui et qui offrent des possibilités. Le gouvernement a investi dans Lightspeed avec Télésat. Je pense que nous pourrions examiner ces possibilités avec des choses qui sont déjà déterminées et voir comment, là encore, dans une perspective de double usage, les utiliser plutôt que de créer quelque chose de tout nouveau, et voir ce que nos alliés ont en place.
    S'il est urgent d'agir, et je pense que c'est le cas, il faut savoir ce que nous pouvons utiliser qui se trouve dans l'espace ou qui est sur le point de s'y trouver pour répondre à des besoins opérationnels urgents, puis, à plus long terme, ajouter les autres capacités pour avoir plus de capacité de lancement et d'autres nouveaux satellites qui seront nécessaires à plus long terme.
    Si nous regardons à plus long terme, en particulier du point de vue de la souveraineté dans l'Arctique et de la protection contre les dangers qui nous menacent au‑dessus de la planète, quel rôle l'industrie canadienne peut-elle jouer pour s'assurer que nous disposons des actifs et de l'infrastructure voulus dans l'espace?
    Plus de satellites en orbite basse? Plus de systèmes d'alerte dans le Nord basés au sol? Seront-ils archaïques d'ici un an ou deux, sans parler d'aujourd'hui? Qu'en est‑il du regroupement total de différentes plates-formes, qu'elles soient automatisées ou pas?
    C'est l'occasion d'agir parce que nous avons la possibilité de créer tout cela. Nous avons des entreprises comme Calian qui peuvent créer une grande partie de l'infrastructure au sol, et des entreprises comme MDA et Télésat qui peuvent construire les pièces. Il y a des entreprises comme celle de M. Reid qui peuvent apporter un élément d'IA. Voilà la possibilité. Tout cela est pertinent dans la structure de l'industrie canadienne. Il n'y a vraiment rien que nous ne puissions prendre en charge et construire avec le bon cadre et la bonne gouvernance.
    M. Reid souhaite peut-être ajouter quelque chose à propos de la capacité.
    En comprenant quels sont les besoins à long terme du gouvernement canadien et des Forces armées canadiennes et en les formulant, l'industrie peut se positionner en se présentant comme une entreprise en démarrage. Nous pouvons lever des capitaux et dire: « Nous savons que le gouvernement a besoin de ceci, nous allons donc lever des capitaux et construire cette capacité », puis idéalement trouver un moyen de la vendre au gouvernement, afin de ne pas attendre très longtemps un appel d'offres, mais de lancer une capacité et de dire qu'elle existe. Un de nos nombreux clients pourrait alors être le gouvernement canadien, qui achèterait ce service particulier.
    Dans le cas de mon entreprise, il s'agit peut-être d'une IA embarquée qui vous dit instantanément qu'il y a un navire non identifié et à quel endroit, ou qu'il y a un feu de forêt, ou quelle que soit l'application. Nous avons peut-être aussi d'autres clients, voire d'autres ministères.
    Malheureusement, nous allons devoir en rester là. Encore une fois, je suis désolé.
     Madame Lambropoulos, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Ford et monsieur Reid, de votre présence aujourd'hui.
    Je poserai deux questions, et toutes deux sont pour vous deux. Nous commencerons par M. Ford, puis nous passerons à M. Reid.
    Selon vous, que peut faire le gouvernement du Canada pour aider à promouvoir des entreprises canadiennes à l'étranger? Quelles sont, selon vous, les possibilités qui existent déjà et que nous oublions lorsqu'il s'agit de vous promouvoir à l'étranger?
    J'aimerais beaucoup que le gouvernement ait la possibilité de promouvoir l'industrie canadienne. La meilleure façon d'y parvenir est d'acheter les solutions ici, au Canada, puis d'en devenir les défenseurs et de devenir le client qui dit: « Ce ne sont pas des concepts. Voici la réalité de ce qu'ils ont fait pour le gouvernement canadien. »
     À mon avis, il s'agit d'acheter local et de voir ensuite comment vous nous aidez sur la scène mondiale en devenant la référence que tant de clients recherchent et qui dit que ce n'est pas un simple logiciel éphémère, mais bien de quelque chose d'opérationnel aujourd'hui.
(1650)
    Pour ma part, une des grandes qualités du Canada et de son gouvernement est que nous avons un système équitable, et c'est formidable. Nous appliquons parfois ce principe au‑delà du pays, lorsque nous pensons au contexte international. À mon avis, le gouvernement canadien peut choisir ses favoris en privilégiant les entreprises canadiennes par rapport aux entreprises étrangères. C'est ainsi qu'il peut soutenir l'industrie canadienne. Nous voyons cela dans d'autres pays, où un pays travaille avec son industrie nationale et participe à des réunions. Ils participent à des réunions de prospection de clientèle et s'associent à l'industrie pour l'aider à vendre à d'autres gouvernements.
     Au Canada, nous avons tendance à dire: « Ce n'est pas juste. Nous sommes en train de choisir un favori. » Le fait est que si cette entreprise canadienne est la seule à le faire, elle le vend déjà peut-être au gouvernement, comme l'a dit M. Ford. Pourquoi ne pas aller plus loin? Aller à la rencontre d'autres pays et leur dire: « Nous pouvons vous offrir cela. Vous êtes un partenaire. Vous êtes un allié. Vous avez, vous aussi, besoin de cette capacité ».
     Ce serait vraiment bien. De mon point de vue, je n'ai pas l'impression que c'est vraiment le cas.
    J'ai une question complémentaire à cette question. Est‑ce que l'un d'entre vous a été invité par l'OTAN à l'un de ses...? L'OTAN présente parfois certaines des technologies mises au point dans différents pays. Avez-vous été invités à ce genre d'événement, et quelle a été votre expérience, le cas échéant?
    Nous avons été en contact avec l'OTAN pour des programmes comme le programme Accélérateur d'innovation de défense pour l'Atlantique Nord, ou DIANA. Pour ce qui est de l'espace en particulier, il faudrait que je vérifie, mais je ne pense pas que ce soit le cas pour l'instant. Pour l'instant, ce sont plutôt certaines capacités d'intelligence artificielle qui sont recherchées pour le théâtre des opérations.
     Nous avons eu des conversations avec d'autres organisations, comme l'Agence spatiale européenne. C'est un client pour nous aujourd'hui, par exemple. Nous sommes présents dans cette région avec des entreprises satellites. De nombreuses entreprises sont établies dans cette région. Nous y sommes présents en ce qui concerne les clients, mais pour ce qui est de l'OTAN en particulier, je ne pense pas que nous ayons encore eu une conversation détaillée à ce sujet.
     Je vous remercie.
     J'ai une dernière question. Diriez-vous que le plus grand obstacle à l'obtention de contrats avec le gouvernement fédéral est le manque de communication entre l'industrie et le gouvernement, ou diriez-vous qu'il y a d'autres obstacles plus importants, et, le cas échéant, lesquels? S'ils ne sont pas plus importants, quels sont les autres obstacles que vous n'avez pas encore mentionnés et que vous souhaiteriez évoquer ici aujourd'hui?
    La propriété intellectuelle peut être un point douloureux, et cela peut se manifester de différentes manières. Il y a eu des situations dans lesquelles nous avions des contrats avec le gouvernement canadien. Il y a, en ce qui concerne la propriété intellectuelle, diverses contraintes qui nous empêchent de poursuivre la commercialisation ou même d'obtenir des investissements extérieurs. C'est un autre aspect à prendre en compte.
     Je ne crois pas que ce soit le cas actuellement. J'ai travaillé aussi dans la fonction publique. J'ai été des deux côtés de la barrière. Je sais à quel point il est difficile de rédiger des appels d'offres et de mener à bien le processus.
     Je dis, moi aussi, que le processus d'approvisionnement doit permettre la mise en oeuvre rapide de l'innovation. Nous devons tous déterminer collectivement ce que nous pouvons faire mieux et ce que l'industrie peut faire mieux dans le contexte de cet objectif. Je pense que c'est essentiel.
     Nous en avons déjà parlé. Je suis dans ce milieu depuis longtemps. Nous en parlons depuis 30 à 40 ans. Cela concerne la défense. Que faisons-nous pour nous donner un accès rapide à l'innovation? C'est un sujet dont nous devons tous continuer à parler avec le gouvernement et l'industrie — comment trouver des mécanismes pour faire exactement cela.
     Je vous remercie de votre attention.
    Merci à vous deux.
    Merci, madame Lambropoulos.
     Nous avons eu une très bonne conversation et je suis désolé de devoir y mettre fin.
    Mais avant d'arrêter, je sais que le ministère de la Défense des États-Unis prend parfois part à une entreprise simplement parce qu'il veut voir comment la technologie va se développer. Je crois comprendre que le ministère canadien de la Défense ne peut pas faire la même chose.
     Pensez-vous que c'est un problème?
    Il serait intéressant de voir le gouvernement adopter une approche plus souple et plus active en matière d'investissement dans les technologies essentielles. Nous avons bénéficié d'un financement important de recherche et développement par le truchement de contributions, mais je pense qu'il y a des moments où les choses pourraient avancer plus vite. Il serait possible de répondre aux besoins changeants des Forces canadiennes en disant à l'industrie: « Nous avons besoin de ceci, et nous en avons besoin tout de suite », et en abordant l'approvisionnement autrement que selon les méthodes traditionnelles. Ce pourrait être un investissement en actions, ou encore une autre forme d'investissement où l'argent circule et les capacités sont développées. Par la suite, la capacité est fournie au gouvernement canadien, mais sans le long processus d'approvisionnement.
(1655)
    Pour une société cotée en bourse, c'est un défi pour nous. Je crois en l'esprit de cette initiative en ce qui concerne l'investissement dans l'innovation et l'investissement dans les entreprises canadiennes qui sont ici. Ce n'est pas qu'il n'y a pas d'investissement. Il y a des investissements dans les entreprises canadiennes. Il y a différents programmes d'investissement. Il s'agit simplement de s'assurer que nous pouvons continuer à rivaliser avec d'autres nations qui continuent à investir et accélèrent leur rythme d'investissement dans des domaines tels que l'espace.
     Je tiens à répéter que nous bénéficions effectivement du soutien du gouvernement. Nous devons simplement continuer à trouver ces priorités et le rythme d'innovation pour faire en sorte que nous répondons aux besoins futurs du gouvernement.
    Je vous remercie de nouveau, tous les deux. Cette conversation a été fort intéressante.
     Sur ce, nous allons suspendre la séance, puis reprendre avec le prochain groupe le plus rapidement possible.
(1655)

(1700)
    Chers collègues, il est 17 heures. Nous reprenons nos travaux.
     Nous avons deux témoins pour notre deuxième heure. De Galaxia Mission Systems, nous accueillons M. Gharagozli, chef de la direction. De Global Spatial Technology Solutions Inc., nous accueillons M. Kolacz, qui vient de Boston. Merci à tous les deux de vous joindre à nous.
    Vous disposez chacun de cinq minutes pour une déclaration liminaire. Ensuite, chers collègues, je pense que nous devrons réduire un peu le temps consacré aux questions, car je ne pense pas que nous pourrons terminer en temps voulu.
     Peut-être, puisque M. Kolacz est le plus éloigné, nous lui donnerons la parole pour sa déclaration liminaire.
     J'essaierai de ne pas vous interrompre, mais si vous pouviez vous en tenir à cinq minutes, ce serait très bien.
     Je vous remercie de votre attention.
    Bonjour à tous. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à ce comité.
     Je m'appelle Richard Kolacz. Je suis fondateur et chef de la direction de Global Spatial Technology Solutions, une société d'intelligence artificielle maritime qui s'appuie sur des données provenant de divers actifs spatiaux pour développer des solutions qui soutiennent l'évaluation des risques et des menaces maritimes à l'échelle mondiale, ainsi que l'optimisation de la chaîne d'approvisionnement mondiale.
     Notre objectif est de devenir le NAV CANADA des océans, en assurant la sécurité maritime, la sûreté et la résilience de la chaîne d'approvisionnement pour le Canada et le monde entier, puisque 90 % du commerce mondial se fait par bateau.
     Ma principale activité dans le domaine de l'espace a été de diriger une équipe qui a mis au point le premier réseau de satellites mondial dédié à la surveillance maritime, qui a été conçu et construit au Canada en réponse à la directive présidentielle 41 sur la sécurité nationale des États-Unis. Cette directive, émise après le 11 septembre, visait la mise au point d'un système non classifié pour surveiller tous les navires du monde, en permanence, afin de détecter les risques et les menaces venant de la mer.
     Lorsque j'ai été invité à comparaître devant le Comité, la première question que je me suis posée a été: que recherche le Comité?
     Comme vous le savez, les points du mandat de l'étude sont les suivants.
     Premièrement, étudier l'état actuel des capacités et des programmes de défense canadiens. Comme j'ai quitté l'uniforme depuis un certain temps, il m'est apparu clairement que ce sont les membres des Forces canadiennes qui seraient le plus à même de fournir des détails sur ce sujet.
     Deuxièmement, étudier les accords et les partenariats internationaux liés à la défense spatiale. Encore une fois, ce sont les membres du gouvernement qui négocient ces accords qui sont les mieux placés pour gérer cet aspect.
     Troisièmement, étudier l'impact des avancées spatiales sur la souveraineté et la sécurité nationale du Canada. C'est une question à laquelle j'ai pensé pouvoir contribuer. Voici mon point de vue sur le troisième point.
     Les biens spatiaux sont indispensables à notre sécurité nationale, à notre commerce et à notre souveraineté, et notre dépendance à leur égard ne cessera de croître. Les biens spatiaux sont utilisés d'un océan à l'autre pour soutenir les communications et gérer les ressources. On utilise les satellites pour surveiller la météo et l'environnement et pour détecter les menaces. On utilise les signaux GPS pour tous les transports financiers et les services de localisation.
     Les nouveaux développements de la technologie spatiale, la réduction des coûts et l'augmentation des capacités signifient qu'il y aura beaucoup plus d'actifs commerciaux dans l'espace, offrant beaucoup plus de capacités que le Canada utilisera certainement pour des applications commerciales, civiles et de défense.
     L'espace est essentiel pour l'économie, la souveraineté et la sécurité du Canada. Mes observations porteront sur la protection de ces biens et de ceux à venir.
     Quelle forme devrait prendre cette protection?
     La défense contre les dommages physiques ou la destruction des biens spatiaux est un élément. Si un tel événement devait se produire, il est probable que la situation devienne rapidement très grave et qu'il y ait de nombreux problèmes à résoudre.
     L'autre défense à envisager est la défense contre l'interférence non physique dans les données des satellites ou le contrôle des satellites eux-mêmes — les attaques informatiques et de manipulation des données. Ces attaques se font en permanence. Nous en observons les effets dans de nombreux secteurs au Canada.
     Pour moi, ce genre d'activités, qui est continu aujourd'hui, est beaucoup plus probable que les dommages physiques intentionnels. Les dommages causés par ces événements peuvent être aussi graves que la destruction d'actifs physiques et auraient un impact considérable sur notre économie et notre souveraineté.
     J'aurais tendance à me concentrer sur des solutions de protection pour faire face à ces problèmes.
     Comment procéder?
     En améliorant les solutions de cryptage des données par satellite, comme le cryptage à clé quantique, qui est en cours de développement au Canada aujourd'hui. La protection des actifs peut également être soutenue par la surveillance des signaux et des données au moyen de l'intelligence artificielle pour déterminer si des attaques s'annoncent, indiquer qu'il faudrait utiliser des systèmes différents ou signaler que les données ont été compromises. Chez GSTS, nous procédons ainsi pour détecter les anomalies dans le modèle de vie des navires, anomalies qui indiquent un risque ou une menace.
     La défense de l'espace est une activité complexe à plusieurs niveaux. Elle doit couvrir toute une série de menaces, de la destruction physique aux tactiques beaucoup plus subtiles de désinformation et de tromperie. Aucun pays ne peut couvrir tous les aspects à lui seul.
     Le Canada obtient souvent de bons résultats en se concentrant sur une capacité précise, en développant une expertise de niche et en la proposant à ses alliés dans le cadre d'un système de défense spatiale complet et multicouche partagé par tous. L'analyse par l'intelligence artificielle des anomalies générées par les satellites est une capacité peu coûteuse et de grande valeur que le Canada pourrait offrir en tant que contribution importante à un réseau de défense spatiale collaboratif.
     Je vous remercie de votre attention.
(1705)
    Monsieur Gharagozli, vous avez la parole.
    Bonjour, monsieur le président et membres du Comité. Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer sur le sujet crucial de l'espace dans le domaine de la défense du Canada.
     Je m'appelle Arad Gharagozli et je suis le fondateur et chef de la direction de Galaxia Mission Systems, un fabricant canadien de satellites intelligents. Notre siège social se trouve dans la belle Nouvelle-Écosse. Chez Galaxia, nous construisons des plateformes avancées d'intelligence spatiale conçues pour la défense et les utilisations commerciales. Nos satellites traitent les données directement en orbite et sont combinés à l'intelligence artificielle pour fournir une vision en temps réel et une surveillance autonome de la terre. Notre approche transforme le renseignement spatial et stimule l'innovation au profit de la sécurité nationale et des infrastructures essentielles. La technologie spatiale est essentielle pour notre défense nationale. Les biens spatiaux permettent la collecte de renseignements, la communication et la navigation de précision, qui sont toutes essentielles pour la protection de la souveraineté, l'amélioration de nos capacités de combat et la sécurisation des infrastructures essentielles du Canada.
     Le déploiement des technologies spatiales est plus rapide que jamais, mais les missions spatiales traditionnelles, à cycle long, ne peuvent pas répondre aux exigences rapides des besoins de défense modernes. Pour rester compétitif, le Canada doit adopter des capacités spatiales plus agiles et plus réactives et réduire le temps qui s'écoule entre le repérage d'une lacune et le déploiement de solutions en orbite. L'essor de nouvelles entreprises spatiales est essentiel pour relever ces défis. Des entreprises plus petites et plus agiles peuvent fournir des solutions et des services novateurs plus rapidement et de manière plus rentable, ce qui permet au Canada de répondre rapidement à l'évolution des besoins en matière de défense.
     Le cadre des priorités spatiales des États-Unis souligne la nécessité de disposer de capacités spatiales résilientes et réactives, ce qui correspond au besoin croissant du Canada d'améliorer ses opérations spatiales. Le cadre souligne que, l'espace devenant un domaine contesté, il s'agit de protéger les biens spatiaux, d'encourager l'innovation et de renforcer la défense nationale au moyen d'une collaboration entre le secteur public et le secteur privé. Le Canada doit faire de même en développant des capacités de lancement indépendantes, en investissant dans de nouvelles entreprises spatiales et en assurant une intégration transparente entre le secteur privé et celui de la défense du Canada. Cela signifie qu'il faut utiliser des modes d'approvisionnement nationaux pour propulser les entreprises nationales, ce qui permettra d'accroître les capacités spatiales du Canada, de développer notre portefeuille d'experts et de créer des emplois dans le secteur spatial ici, chez nous.
     L'Agence spatiale canadienne a joué un rôle de premier plan dans ce domaine, en soutenant des solutions novatrices sur les marchés scientifiques et commerciaux de l'espace dès les premiers stades de la recherche et du développement. Bon nombre de ces applications s'étendent au marché de la défense avec de fortes capacités de double usage. Nous devons accroître notre soutien à l'Agence spatiale canadienne pour qu'elle reste compétitive et réponde aux besoins de croissance du secteur spatial national.
     Nous devons également moderniser les programmes d'approvisionnement de la défense afin d'intégrer la nouvelle économie spatiale dans sa chaîne d'approvisionnement, en particulier sous la forme d'entrepreneurs maîtres d'oeuvre. Cela signifie qu'il faut augmenter la fréquence des projets sous forme de contrats, afin de garantir l'évolution à long terme de l'industrie, la sécurité de l'emploi et la durabilité de l'innovation. La création du Conseil national de l'espace est une bonne chose, tout comme l'est la création de la 3e Division spatiale du Canada, mais il reste encore du travail à faire.
     Les processus actuels d'approvisionnement bureaucratiques et longs créent des obstacles pour les nouvelles entreprises spatiales canadiennes, limitant l'innovation et ralentissant le progrès. Des mécanismes d'approvisionnement rationalisés permettraient au secteur privé de s'engager dans des projets gouvernementaux et de créer des technologies de pointe. Un Canada indépendant sur le plan spatial et doté de solides capacités de défense est essentiel pour notre sécurité et notre croissance économique à long terme. En accueillant des entreprises spatiales nouvelles et émergentes, nous construirons un secteur spatial fort ici même au Canada, en soutenant à la fois le secteur commercial et le secteur spatial. Nous pourrions atteindre cet objectif si notre processus d'approvisionnement public était prêt à adopter les nouvelles façons d'innover que nos alliés ont déjà. L'accélération de la croissance de nos nouvelles entreprises spatiales nationales, l'adoption de politiques d'approvisionnement de défense actualisées et la rationalisation des canaux de communication permettront également un flux de renseignements afin de repérer les lacunes et de permettre au secteur privé de réagir rapidement.
     Enfin, l'espace est un domaine complexe et coûteux. Nous devons augmenter notre soutien à l'Agence spatiale canadienne afin de garantir que la recherche et le développement de capacités spatiales essentielles continuent à se développer. Le jour où nous construirons un Canada indépendant de l'espace en maximisant l'utilisation de nos talents et de compétences nationaux pour repousser les limites du possible dans l'espace, le Canada deviendra une nation prête pour l'avenir, dotée de solides capacités de défense et de commerce qui dépasseront nos frontières.
     Je vous remercie de votre attention.
(1710)
    Chers collègues, je ne pense pas que nous réussirons à faire des tours complets, alors nous allons réduire le premier tour à cinq minutes et continuer à partir de là.
     Monsieur Stewart, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie les témoins présents aujourd'hui.
     Les processus d'approvisionnement du ministère de la Défense et du gouvernement sont-ils cause de frustration?
     Ne riez pas tous en même temps.
     Des voix: Oh, oh!
    Encore une fois, je parle au nom d'une entreprise de la taille de Galaxia. Nous avons été créés il y a environ cinq ans.
     Ce n'est pas tant que c'est frustrant. C'est simplement que les méthodes d'approvisionnement sont plutôt désuètes. Il suffit de regarder les processus d'approvisionnement semblables aux États-Unis. Ils ont mis en place un processus très précis pour traiter avec les nouvelles entreprises spatiales en dehors des processus d'approvisionnement normaux.
     En ce sens, je pense que nous devons moderniser ces processus pour nous assurer que nous pouvons répondre à des projets pour lesquels il ne faut pas nécessairement deux ans pour traverser une phase de passation de marché. Par exemple, un projet d'une durée totale de trois ans, depuis l'attribution du contrat jusqu'au déploiement dans l'espace, pourrait être plus rapide.
    Pensez-vous que c'est propre aux logiciels, aux biens spatiaux ou...? Je me disais simplement que dans votre secteur, le cycle de remplacement, l'évolution des produits doit être si rapide — nous l'avons entendu plus tôt dans un autre comité — qu'au moment où vous produisez quelque chose, il peut être redondant ou devoir déjà être mis à niveau, etc.
     Est‑ce que, pour vous, en tant qu'entreprise...? Il s'agit en quelque sorte d'une perte de temps et d'énergie si les choses peuvent être accélérées d'un processus de deux ans à un an et demi, ne serait‑ce que de ce point de vue.
    Encore une fois, pour une entreprise de notre taille, le temps est un facteur essentiel. Il est très difficile pour une nouvelle société spatiale de tenir un an ou un an et demi dans une phase d'attribution de marché et de conserver ses talents et ses compétences.
    Quel genre de renseignements recueillez-vous avec votre logiciel dans les nanosatellites?
    Nous fabriquons des engins spatiaux dotés de capacités logicielles. Nos engins spatiaux sont capables d'analyser de manière autonome toute sorte d'anomalies.
     Comme je l'ai mentionné, nous avons quelques applications dans les infrastructures critiques, la surveillance des conduites de gaz et d'autres choses de ce genre. Cependant, en matière de défense, nous avons de nombreux systèmes maritimes, terrestres et aériens.
    Pouvez-vous nous donner un exemple d'application militaire en particulier?
    Par exemple, nous pouvons observer une vaste zone de terre et repérer tout type de construction sur un continent.
    Sous-traitez-vous vos services à des pays étrangers?
    Pas maintenant, pas encore.
    D'accord.
     Qu'est‑ce qu'un nanosatellite? De quelle taille de véhicule s'agit‑il?
    C'est la norme des engins spatiaux qui pèsent généralement moins de 25 kilogrammes. Ils peuvent peser de 1 kilogramme à 25 kilogrammes. C'est simplement leur taille et leur poids qui les classent dans la catégorie des nanosatellites.
    Sont-ils lancés dans le cadre de missions avec d'autres dispositifs?
    En général, oui. En raison de leur taille, ils sont généralement lancés en tant que charge utile secondaire, dans le cadre d'une mission Falcon 9, par exemple. C'est ce qu'on appelle une « mission de covoiturage », c'est‑à‑dire qu'ils sont lancés lors d'une mission de covoiturage.
    Est‑ce que tout cela part des États-Unis en ce moment?
    Il y a plusieurs véhicules qui font ce lancement. La plupart de nos lancements se font par l'intermédiaire de SpaceX.
    Nous avons parlé tout à l'heure des garde-fous pour nos applications et des applications militaires et civiles que nous contemplons pour les biens spatiaux.
     J'aimerais vous poser la question suivante. Si nos adversaires, comme la Russie et la Chine, n'ont pas de garde-fous comme nous en avons, pensez-vous qu'il soit judicieux pour nous d'imposer des restrictions à nos applications, de nous désavantager par rapport à nos adversaires?
(1715)
    C'est une question difficile.
     Nous le constatons également en ce qui concerne la capacité des véhicules de lancement, le type de carburant utilisé, le genre de méthodes et les protocoles de réorbitation qu'ils utilisent. Par exemple, pour la Chine, je dirais qu'il y a moins de surveillance sur ce plan. La mise en place de ce type de garde-fous entrave réellement les progrès. Oui, cela ralentit les progrès.
    Ont-ils dans l'espace des actifs semblables à ce que votre société produit?
    Je ne suis au courant de rien de précis.
    Votre société produit-elle quelque chose de vraiment unique?
    Non. C'est tout simplement que je ne suis pas au courant de l'existence d'un tel système.
    Bien.
     Pensez-vous que, dans l'espace, nos vaisseaux spatiaux militaires ou civils sont exposés aux plus grands risques dans les axes espace-sol, sol-espace, ou espace-espace, à l'heure actuelle?
    S'agit‑il du côté de l'offensive ou du risque passif?
    Dans l'offensive.
    Eh bien, dans l'offensive, je dirais que les risques sont probablement les plus importants dans les axes sol-espace et espace-espace.
    Merci, monsieur Stewart.
     Monsieur Powlowski, vous avez cinq minutes.
    Je suis nouveau dans ce comité, mais il me semble que lorsque nous parlons de défense, en particulier de la souveraineté dans l'Arctique, quelle que soit la façon dont on la découpe, pour protéger l'Arctique et l'immensité des régions nordiques, toute tentative de surveillance de nos frontières nécessitera une grande utilisation de satellites. Tout, de la surveillance météorologique aux communications, semble passer par les satellites.
     M. Kolacz a parlé de cybersécurité en évoquant ce qui semble être un armement antisatellite, que certains pays sont en train de mettre au point. Avez-vous réfléchi à ce que vous pouvez faire en matière de protection contre les armes antisatellites, le cas échéant? Il me semble que notre défense est étroitement liée à nos communications par satellite.
     Que pouvons-nous faire, le cas échéant, pour éviter d'être totalement tributaires des satellites et pour nous protéger contre la possibilité qu'un autre pays, en détruisant nos satellites, puisse gravement compromettre toutes nos défenses, en particulier dans le Nord?
    Voulez-vous que je commente cela?
    L'un ou l'autre peut répondre, voire les deux.
     Allez‑y, monsieur Gharagozli, si vous voulez commencer.
    Je pense que le risque d'attaque des biens spatiaux ne peut être éliminé. Une des façons d'anticiper ce risque serait d'avoir des systèmes de lancement réactifs. Ce sont des satellites qui sont prêts à être lancés et qui évoluent dans leur propre écosystème. Il ne s'agit pas seulement de l'engin spatial lui-même. Il s'agit du véhicule de lancement qui est prêt à être lancé, de l'opération de lancement et du concept d'opération, ou CONOPS. Ce sont des satellites qui peuvent rester en orbite moins d'un mois ou deux, ou moins encore. Une des façons de prendre de l'avance est de disposer de ces capacités de lancement réactif, juste au cas où quelque chose se produirait, et de disposer des mécanismes permettant de faire rentrer d'autres vaisseaux spatiaux et d'ajouter d'autres actifs. C'est une chose que j'ajouterais.
     Je passe la parole à M. Kolacz.
    Merci.
     Oui, c'est bien dit. Toutefois, quelle est la probabilité que quelqu'un s'empare physiquement d'un satellite? Elle est bien moindre que celle d'une personne qui prendrait le contrôle d'un satellite par voie électronique ou qui perturberait le flux de renseignements.
     Actuellement, nous surveillons l'Arctique toutes les minutes en examinant les images et les signaux émis par un grand nombre de satellites. La suppression de tous ces satellites commerciaux, qui fournissent aujourd'hui probablement plus de 80 % de la capacité de surveillance et de communication, représente un énorme défi. Le retrait de certains satellites qui fournissent des capacités stratégiques est une chose différente. Il s'agit en fait de déterminer la probabilité qu'un événement se produise et l'impact de cet événement.
     Encore une fois, à l'heure actuelle, ce qui se passe et que nous observons dans plusieurs pays, c'est quelqu'un qui perturbe le flux de renseignements. Sans être une fonction de guerre hostile, c'est suffisant pour perturber l'économie, et la défense économique est la défense nationale. La question est de savoir comment gérer cette capacité.
(1720)
    D'après ce que vous dites, j'en déduis que le nombre de satellites peut être important. Nous avons suffisamment de satellites là‑haut pour que l'élimination d'un ou deux satellites, ou d'une poignée, ne nous rende pas vulnérables, et il y a suffisamment d'autres solutions. Cela fait‑il partie de notre défense?
    Cela dépend de ce que font ces satellites. Certains satellites sont très spécialisés dans la détection des lancements nucléaires et l'émission des codes de lancement nucléaire — pas pour nous, mais pour nos alliés. Ces satellites sont très précis, mais si l'un d'entre eux est supprimé, nous nous trouverons dans un monde totalement différent. La perte des satellites de communication, de navigation et de surveillance qui sont là‑haut en ce moment même... leur nombre crée une capacité redondante ou une certaine capacité supplémentaire. Le fait de disposer d'une coalition, d'une vaste capacité, est un mécanisme de défense en soi, contrairement à la possession d'un seul atout.
    Est‑ce là la raison d'être des réseaux de renseignement modernes? Essaient-ils de déterminer quels satellites font quoi? S'ils veulent détruire un satellite, ils le savent. Est‑ce que c'est ce que l'espionnage et le contre-espionnage font de nos jours?
    Je ne peux pas me prononcer sur ce qu'ils font de nos jours, mais je peux dire que l'information peut provenir d'un grand nombre de sources. Certains satellites peuvent rechercher des signaux très précis, qui constituent une cible de grande valeur. C'est exact.
    Merci, monsieur Powlowski.
     Je pense que vous lisez un peu trop de romans d'espionnage.
     M. Sauvé posera ses questions en français. Avant que je lui donne la parole, pouvez-vous vous assurer que vous entendez l'interprétation?
    C'est parfait.

[Français]

    Monsieur Sauvé, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Gharagozli, je pense que je ne surprendrai personne ici en mentionnant que la question de la souveraineté m'intéresse beaucoup. Je ne parle pas de la souveraineté du Québec, mais bien de celle du Canada.
    Dans votre intervention, vous avez mentionné la nécessité pour le pays d'avoir des bases de décollage pour les systèmes satellitaires. Je laisserai à mes collègues de l'opposition officielle le soin de poser des questions relatives à la sécurité nationale, ma préoccupation étant plutôt axée sur l'économie.
    Au Québec, nous avons des régions en voie de dévitalisation qui ont besoin d'un coup de pouce pour assurer leur développement économique. Comme je ne suis pas du tout un initié, je veux savoir ceci. Construire une base de lancement de la sorte, combien cela coûte-t-il? Comment finance-t-on cela? Combien d'emplois cela crée-t-il? Finalement, quels sont les sites idéaux où l'on peut construire cela au Canada, et préférablement au Québec?

[Traduction]

    Je viens de la Nouvelle-Écosse. Maritime Launch Services est un exemple. L'entreprise s'emploie à construire ce type de capacité en Nouvelle-Écosse. En résumé, c'est très simple: nous avons la chance d'avoir trois côtes autour de notre pays. Imaginez si nous n'avions pas cette chance, si le Canada était un pays enclavé, quel fardeau financier cela représenterait pour nous à notre époque.
     Compte tenu des progrès en matière d'exploitation de l'espace, il est probable qu'un jour, les fusées pourront même transporter des marchandises, sans parler de la mise en orbite d'engins spatiaux. Il est très important que nous ayons cette capacité et que nous ne dépendions pas d'autres nations pour nous amener dans ce milieu, l'espace, une capacité qui nous fait défaut actuellement.
     Comme je l'ai dit, une grande partie de nos capacités de lancement dépendent d'autres pays qui lancent à partir des États-Unis ou d'entreprises qui lancent à partir de l'Inde ou de l'Europe, et nous devons donc ramener ces capacités chez nous. Je ne peux pas faire d'observations précises sur d'autres sites — le choix des sites de lancement n'est pas de mon ressort —, mais il est très difficile de trouver les endroits où l'on peut construire un port spatial.
     En ce qui concerne la capacité, c'est quelque chose que nous...

[Français]

    Combien d'emplois cela génère-t-il? L'exploitation de ce genre d'installation permet-elle de créer énormément d'emplois? J'imagine que ce sont des emplois à forte valeur ajoutée, pour lesquels les salaires sont au-dessus de la moyenne.

[Traduction]

    L'exploitation d'un port spatial est une tâche très complexe. Il y a des gens... depuis les pompiers et les techniciens du sous-sol jusqu'aux ingénieurs et aux équipes chargées des opérations de vol. Il s'agit, je le rappelle, d'un projet très complexe, mais, comme vous pouvez l'imaginer, j'y vois des ressemblances avec la présence d'un port naval dans votre ville ou votre province: il créera beaucoup d'emplois, quel que soit l'endroit où se trouve ce système. Si vous avez voyagé en Floride, par exemple, et que vous avez vu le port spatial, on y trouve toute une économie connexe. Cela va se produire, mais...
(1725)

[Français]

    Il y a donc une nécessité d'avoir des installations portuaires, mais pas nécessairement ferroviaires.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Je vais passer tout de suite aux autres questions.
    Monsieur Kolacz, vous avez parlé des dangers possibles liés à des installations satellitaires, par exemple des attaques contre celles-ci. Encore une fois, je ne suis pas un initié, alors j'aimerais en savoir plus. Je ne vous demande pas non plus de nous donner un mode d'emploi, bien sûr, mais j'aimerais savoir de quelle façon on s'attaque à des installations satellitaires et de quelle façon nous pouvons nous protéger contre cela.
    Nous avons tous vu des films de James Bond, comme GoldenEye. Devons-nous craindre des explosions nucléaires visant à détruire toutes les installations électromagnétiques?
    Je voudrais entendre vos commentaires là-dessus.

[Traduction]

    Encore une fois, des gens au sein de notre ministère de la Défense pourraient vous en parler. L'acte de détruire physiquement et intentionnellement un satellite constitue, je crois, un acte de guerre, de sorte que la probabilité que cet événement se produise et la manière dont il peut être réalisé sont des points assez importants. Il est possible de détruire intentionnellement un satellite, il y a des moyens de le faire. Des choses comme des impulsions électromagnétiques peuvent endommager des satellites, puis il y a les activités plus subtiles qui peuvent perturber votre satellite, où l'on tente d'altérer son rendement sans que vous vous en rendiez compte. C'est un sujet qu'il vaut mieux aborder avec des militaires, et même dans ce cas, beaucoup de ces capacités — je ne porte plus l'uniforme — ne peuvent pas être discutées sur la place publique.
    Merci, monsieur Sauvé.
     Madame Mathyssen, vous disposez de cinq minutes.
    Monsieur Gharagozli, il y avait un projet financé par l'Agence spatiale canadienne et développé par le Dalhousie Space Systems Lab. Il s'agissait d'un projet spécifique. Existe‑t‑il un moyen pour le gouvernement canadien de reproduire ce système de laboratoire? Dans quelle mesure ce projet était‑il propre à Dalhousie? Est‑ce un projet que nous pouvons financer pour lui donner une plus grande présence, pour ainsi dire, dans l'ensemble de notre système universitaire, de sorte que nous investissions dans ce volet éducatif que nous avons vu à Dalhousie?
    Il s'agissait d'un projet émanant strictement de l'Agence spatiale canadienne dont le nom à l'époque était « Initiative canadienne CubeSats ». Le projet a été incorporé depuis dans l'initiative Cubics, je crois. Il s'agit d'un projet financé par l'ASC qui s'adresse aux universités, et l'Université Dalhousie était l'une des 15 universités bénéficiaires. Chaque province a reçu un financement de cette initiative. Je ne saurais trop insister sur son importance pour générer de nombreux talents, surtout chez les étudiants en ingénierie qui ont obtenu leur diplôme dans le cadre de ce programme en travaillant sur ce type de projets et qui en sont sortis munis de très solides connaissances et ont commencé à s'intégrer dans notre espace actuel.
     Je dirais que chez Galaxia, près de 90 % de nos employés sont des diplômés qui ont participé à ce programme. Grâce à cette initiative, ils ont acquis une très solide formation dans le domaine spatial.
    On la retrouve aussi dans d'autres universités, partout au Canada.
    Oui, c'est vrai. Le Dalhousie Space Systems Lab était simplement cette organisation. En fait, je l'ai créée lorsque j'étais à Dalhousie. C'était simplement le nom de l'organisation, mais l'initiative qui a vraiment propulsé le DSS Lab était l'Initiative canadienne CubeSats, maintenant appelée Cubics.
    Cette initiative bénéficie‑t‑elle toujours d'un financement, ou...?
    Je crois qu'elle bénéficie toujours d'un financement, mais encore une fois, honnêtement, elle ne peut pas obtenir suffisamment de fonds.
    Très bien. Merci infiniment.
     Je voudrais revenir sur ce dont nous avons discuté avec un groupe précédent. Il a été question des PME au sein de l'industrie canadienne et des difficultés qu'elles rencontrent dans un dilemme de l'oeuf ou la poule: les entreprises ne savent pas ce dont le gouvernement canadien a besoin parce qu'elles n'ont pas d'habilitation de sécurité, mais elles ne peuvent pas déterminer comment elles peuvent répondre au mieux aux besoins du gouvernement canadien sans ces habilitations de sécurité.
     Pouvez-vous nous en parler du point de vue de votre entreprise? Je donnerai ensuite la parole à M. Kolacz pour qu'il réponde à la même question.
(1730)
    Oui, je dirais exactement la même chose. C'est un problème persistant, je dirais, dans toutes les entreprises. Je parle plus particulièrement de l'espace.
     Comme je l'ai dit, les nouvelles entreprises spatiales sont très douées pour inventer des choses. Nos frais généraux sont très faibles. Nous sommes très agiles. Nous pouvons construire des choses très rapidement. Cependant, si on ne connaît pas les besoins, on ne fait que courir dans le vide.
     Le deuxième problème est qu'une fois que l'on dispose de ces capacités, il vous faut vraiment des moyens faciles de les vendre au gouvernement canadien, de monter un dossier qui vous permette d'aller à l'international et d'en faire un produit d'exportation. Cela n'existe pas à l'heure actuelle. Encore une fois, les modèles existent déjà aux États-Unis pour le DOD et même pour la Space Force.
    Je vous donnerai la parole dans un instant, monsieur Kolacz, pour l'autre réponse.
     Vous avez dit que les Américains contournent le problème. Comment font-ils?
     Je ne dis pas qu'ils contournent explicitement le problème, mais ils ont mis en place des mécanismes très ciblés pour travailler directement avec les PME plutôt qu'avec, par exemple, Raytheon, Boeing et Lockheed Martin. Ils ont leur propre système, mais...
    Ils ont également des enjeux de sécurité spécifiques, peut-être même plus importants, mais ils se soucient moins de la sémantique que nous. Est‑ce que c'est...?
    Je dirais que c'est le cas. Cependant, je le répète, ils ont mis en place des mécanismes différents qui sont plus adaptés aux PME qu'aux grandes entreprises.
    Monsieur Kolacz, vous avez la parole.
    De notre point de vue... Si j'ai décidé de ne pas continuer à construire des satellites, c'est pour me concentrer sur le développement d'applications qui extraient les renseignements de ces satellites. Les programmes classifiés ne représentent qu'un faible pourcentage de l'activité spatiale globale. Le plus grand pays, les États-Unis sont très actifs dans ce domaine. Cependant, si vous venez de ce domaine, vous savez en quelque sorte ce qu'ils recherchent, outre quelque chose de très précis. Vous savez que vous cherchez à détecter les menaces; vous savez que vous cherchez des capacités de communication.
     Dans notre domaine, qui se concentre sur le développement d'applications utilisant les actifs, 80 % des capacités disponibles aujourd'hui sont offertes par des satellites commerciaux. À une époque, elles auraient été considérées comme classifiées, et notre objectif est donc un peu différent. Nous sommes en mesure de fournir et de renforcer des capacités, parce que nous savons ce qui s'en vient et ce qui est là‑haut, et nous sommes en mesure de satisfaire une grande partie de la capacité.
     J'ai lancé ces satellites parce que les États-Unis voulaient une solution non classifiée pour suivre les navires afin de pouvoir utiliser leurs fonds pour développer le système classifié. Le développement par le Canada d'un système non classifié a permis d'alléger considérablement le fardeau des ressources classifiées qui auraient...
    Nous allons devoir en rester là. Je suis sûr que M. Poilievre peut nous aider avec certaines classifications.
     Des voix: Ha, ha!
     Le président: Madame Gallant, vous avez quatre minutes.
    Cette question s'adresse à nos deux témoins.
     Votre technologie comporte-t-elle un mécanisme automatique pour signaler les anomalies, sans interruption, qui constituent des menaces pour le NORAD? Si votre technologie détecte une anomalie — une anomalie maritime, par exemple —, existe‑t‑il un mécanisme automatique pour l'envoyer directement au NORAD, de façon à ce qu'elle apparaisse sur son écran?
    D'après nos capacités actuelles, nous fournissons de l'information. Le MDN utilise notre système à l'heure actuelle. Je ne crois pas qu'il transmet l'information au NORAD. On pourrait très facilement le faire, en leur donnant un mot de passe et en se connectant au système, en détectant des menaces, non classifiées, sur la base du modèle d'analyse en direct d'un navire, par exemple, entrant dans la zone économique exclusive canadienne.
    Il faudrait que le NORAD se connecte. Il n'y a aucun moyen pour lui de ne pas avoir à surfer sur l'une de ces anomalies.
    Non. Ce système fonctionne aujourd'hui.
    En fait, lorsque la guerre avec l'Ukraine a commencé, j'ai écouté le ministre de la Défense dire qu'il aimerait savoir où se trouvent tous les navires russes et ce qu'ils font, et combien d'années il faudrait pour y parvenir. J'ai demandé à mon équipe de commencer à fournir ces renseignements immédiatement et gratuitement au gouvernement du Canada. C'est ce que nous faisons depuis trois ans, en disant: « Nous disposons de ces renseignements dès maintenant, et voici les navires et les menaces ». Cette technologie est disponible dès maintenant.
(1735)
    Est-elle capable de détecter ces navires fantômes qui transportent le pétrole russe vers des acheteurs?
    Oui.
    Dans le cas où le Canada serait engagé dans des hostilités avec un acteur étranger, comment votre produit ou service peut‑il être utile pour défendre le Canada et aider nos forces armées à mener à bien leur mission au combat, en dehors de ce que vous avez déjà mentionné?
    Il s'agit avant tout de pouvoir détecter les navires qui représentent un risque ou une menace, ou de navires qui violent un embargo. Les navires l'utilisent aujourd'hui lorsqu'ils se rendent dans une zone d'opération pour identifier un navire susceptible de faire du trafic de drogues, d'armes ou de personnes. L'analyse du mode d'activité que nous réalisons aujourd'hui avec notre système en utilisant des ressources spatiales non classifiées est opérationnelle aujourd'hui. En fait, nous avons été déployés sur des navires de guerre canadiens opérant dans le cadre de capacités opérationnelles internationales, ainsi qu'auprès d'organisations à terre.
    Avez-vous été touché par une cyberattaque?
    Je suis désolé. Avez-vous demandé si nous l'avons été?
    Oui. Avez-vous été touché par une telle attaque?
    À ce jour, non.
    Très bien.
     Ces questions s'adressent aussi également à votre entreprise.
     Avez-vous un moyen de signaler automatiquement au NORAD ou à la défense canadienne les anomalies que vous détectez?
    Notre conception de notre vaisseau spatial et tout l'environnement qui l'entoure sont en quelque sorte largement commandés par des logiciels. Cela signifie que nous pouvons prendre n'importe quel type de renseignement et le relayer dans n'importe quel logiciel C3. Il est possible d'afficher l'information dans ce logiciel ou toute autre plateforme que nos clients utilisent. C'est un système portable, c'est certain.
    S'il s'agissait d'une notification, serait‑il utile qu'elle soit automatique? Cela ne serait‑il pas utile?
    Oui, c'est automatique. Je dis simplement que la destination dépend du client, où l'information doit aller. Le système peut être configuré de manière à envoyer automatiquement un texto sur votre téléphone si vous le souhaitez.
    D'accord.
     Les organisations de défense devraient s'abonner à ce service.
     Le font-elles?
    Actuellement?
    Oui.
    Non.
    Même les organisations de défense canadiennes?
    Oui.
    Les FAC n'utilisent pas vos capacités?
    Pas en ce moment.
    Madame Lalonde, vous disposez de quatre minutes.
     Je tiens à vous remercier tous les deux d'être ici.
     Je vais essayer de résumer une chose que j'aimerais entendre de votre part, et j'espère que vous pourrez nous donner quelques lignes directrices.
     Nous avons beaucoup parlé de l'espace et de ce qui s'y trouve, de nature commerciale à 80 %, de l'aspect commercial par rapport à la composante de défense — le matériel à double usage. Je pense que mon collègue a fait référence à un organe de gouvernance international. Sommes-nous trop tard?
     Le Canada se fait le champion de nombreuses initiatives par votre intermédiaire, les industriels. Je me demande, à plus grande échelle, quel pourrait être le rôle du Canada dans le développement d'une gouvernance internationale dans le domaine spatial. S'agit‑il d'une OTAN? Quel serait, selon vous, notre rôle en tant que Canadiens?
    Je dirais que l'espace est par nature un environnement très pacifique. L'Agence spatiale canadienne fait actuellement un travail splendide à cet égard, sous la présidence de Lisa Campbell. Ce sont les conversations que l'Agence spatiale canadienne a habituellement avec ses homologues de l'Agence spatiale européenne, de la NASA et d'autres pays. Nous avons ces conversations, et encore une fois, surtout avec les pays du G7. Il est certain que nous avons ces conversations.
    Monsieur Kolacz, vous avez la parole.
    De mon point de vue, le Canada a mis en place plusieurs politiques: politiques en matière de protection de la vie privée, politiques en matière d'IA, politiques découlant de la Loi sur les systèmes de télédétection spatiale. Nous nous conformons à ces politiques ainsi qu'aux politiques européennes relatives à l'intelligence artificielle, à la diffusion de renseignements et au type de renseignements.
     Nous constatons que le Canada est actif dans ces domaines. Il fournit les garde-fous, les politiques et le cadre de protection de la vie privée pour garantir que les renseignements sont diffusés d'une manière qui s'aligne sur les objectifs canadiens.
    D'après ce que j'ai compris, il n'y a pas d'organe de gouvernance internationale plus important qui aiderait à structurer ce que nos partenaires et alliés du G7 font dans l'ensemble dans le domaine spatial.
    Encore une fois, nous nous concentrons sur le renseignement dérivé de ces actifs spatiaux, et nous constatons qu'il y a une harmonisation. Rien n'est radicalement différent. Des éléments sont légèrement différents, mais nous voyons que le Canada est harmonisé avec le reste du monde pour l'élaboration de ces politiques et réglementations.
(1740)
    Très bien, et je vais vous laisser tous les deux sur cette question. Quelles recommandations nous feriez-vous pour nous aider à formuler des recommandations à l'intention du gouvernement?
     Monsieur Kolacz, vous avez la parole.
    Encore une fois, comme nous sommes une organisation qui tire des renseignements des actifs qui sont là‑haut, j'ai constaté en travaillant avec l'Agence spatiale et le ministère de la Défense que les projets qui nous permettent de démontrer la validité de ce que nous faisons sont extrêmement utiles. Ils valent 10 fois plus que l'argent que nous recevons. Nous développons de nouvelles capacités pour gérer les navires, par exemple, pour soutenir la résilience de la chaîne d'approvisionnement et cerner les risques.
     Nous avons été financés dans le cadre de plusieurs programmes différents — Supergrappe des océans du Canada, TDDC, RDDC, IDEeS — de sorte que la capacité à valider la technologie est la même que lorsque nous travaillions avec l'Agence spatiale. Chaque fois qu'ils lançaient un satellite, il y avait de la place pour une nouvelle technologie. C'est inestimable et cela nous donne un avantage concurrentiel, en fait, par rapport à d'autres.
     Nous aimerions tous avoir plus d'argent, mais l'occasion sera de faire la démonstration du premier système mondial de contrôle du trafic aérien pour les navires utilisant la technologie satellitaire le long de la Voie maritime du Saint-Laurent, depuis les approches de l'Atlantique Nord jusqu'aux Grands Lacs. La possibilité de valider cette capacité et de la montrer au reste du monde est extrêmement importante pour nous, et nous aimerions que ces programmes se poursuivent.
    Vous disposez d'une minute et demie, monsieur Sauvé.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Kolacz, votre entreprise a des activités dans le secteur maritime. Durant cette étude, on a beaucoup parlé des technologies à double usage. Il y a un dossier qui me tient particulièrement à cœur, soit la question des pêches. Les médias ont fait grand cas de l'usage d'animaux marins à des fins d'espionnage par la Fédération de Russie.
    Pourriez-vous expliquer au Comité comment les technologies militaires qui sont développées peuvent aussi servir à d'autres fins, par exemple à la protection de la baleine noire ou d'autres mammifères marins?

[Traduction]

    Bien. Nous avons eu un projet avec l'Agence spatiale canadienne dans le cadre duquel nous avons utilisé des satellites optiques pour faire de la reconnaissance faciale sur la baleine franche de l'Atlantique Nord, une espèce protégée qui nage au large des côtes du Saint-Laurent. Pourquoi est‑ce important? Parce que lorsque vous détectez cette baleine, votre navire est censé ralentir et changer de cap. C'est comme lorsqu'il y a un orignal sur la route entre Montréal et Ottawa. Il y a l'impact sur tous les autres véhicules, ce qui signifie que vous pouvez ralentir votre navire. Vous allez économiser du carburant, mais plus important encore, vous allez réduire les émissions. L'utilisation de Google Maps pour les navires permet d'économiser jusqu'à 200 millions de tonnes d'émissions par an. C'est un exemple d'utilisation d'une image optique. Il ne s'agit pas d'une capacité militaire, mais d'une capacité à haute résolution qui peut être utilisée pour faciliter le double usage des systèmes.
     Nous n'utilisons évidemment aucun renseignement classifié, mais c'est un exemple du type de technologie qui peut être utilisé, et c'est un élément majeur.
     Je dois dire que nous venons de déménager notre siège social à Montréal. Notre équipe de développement se trouve à Halifax et nous travaillons en étroite collaboration avec le fantastique soutien du gouvernement du Québec pour renforcer notre capacité en matière d'intelligence artificielle et la déployer dans le reste du monde.
    Merci, monsieur Sauvé.
     Il vous reste une minute et demie, madame Mathyssen.
    Pour rebondir sur ce que Mme Lalonde dirait au sujet des organismes internationaux et de la compréhension de ce qu'est l'espace, il est évident que la militarisation de l'espace suscite une grande inquiétude.
     Il est certain que je suis préoccupée par la commercialisation de l'espace, donc en tant qu'universitaire, et en reliant cette recherche, pouvez-vous nous parler de ce que le gouvernement canadien doit faire par l'entremise des organismes internationaux, quels qu'ils soient, pour protéger l'idée que l'espace est pacifique, tout en laissant de la place à la recherche universitaire.
    Comme je l'ai mentionné, que nous le voulions ou non, nous aurons des capacités et des opérations de défense dans l'espace, mais la majorité des capacités sont de nature commerciale. Ce qu'on voit, c'est qu'un très petit segment de ce secteur commercial est consacré au secteur universitaire.
     Encore une fois, je reviens sur le fait que l'espace coûte cher. Si nous voulons voir de l'innovation et de la croissance au Canada, nous devons également investir dans le secteur universitaire pour nous assurer qu'il dispose d'un financement suffisant et qu'il y a suffisamment de recherche en cours pour propulser les technologies de pointe dont nous parlions en matière de communication quantique, de radar à synthèse d'ouverture et de systèmes de communication, et d'autres choses de ce genre.
(1745)
    Pensez-vous que nous trouvons un bon équilibre?
    Merci, madame Mathyssen.
     Monsieur Bezan, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à nos témoins.
     Pour en revenir aux nanosatellites, tout se miniaturise et la technologie progresse. Quelle est la durée de vie d'un nanosatellite, sachant que vous aurez une batterie plus petite et tout ce qui limitera la durée de vie?
    La plupart des nanosatellites peuvent survivre en orbite terrestre basse, qui se situe entre 500 et 600 kilomètres, pendant trois à quatre ans, mais c'est généralement moins que cela. Tout dépend si le vaisseau spatial revient sur terre pour se désorbiter. S'il reste là‑haut, il est confronté à l'environnement très hostile de l'espace, principalement aux radiations, et l'on peut donc supposer deux ou trois ans de vie.
     Cependant, en ce qui concerne l'approche que nous adoptons et que beaucoup d'autres nouvelles entreprises spatiales adoptent, la vitesse à laquelle la technologie évolue ici sur terre ne justifie pas vraiment le lancement d'un satellite qui restera là‑haut pendant 20 ans. Nous continuons à le faire, mais encore une fois, même avec votre téléphone, lorsque vous le comparez à votre téléphone d'il y a deux ans, vous pouvez voir qu'il est beaucoup plus rapide. Les caméras sont plus performantes, etc.
     C'est exactement la même chose dans l'espace. Si vous pouvez réduire le coût de votre vaisseau spatial afin de pouvoir effectuer des lancements plus fréquents et disposer de meilleures capacités plus fréquemment... Certaines entreprises ont adopté cette approche.
    [Difficultés techniques] le BlackBerry ne va plus fonctionner?
     Ils ont essayé. Cela n'a pas fonctionné.
    Est‑ce qu'ils restent là‑haut et deviennent des déchets spatiaux ou est‑ce qu'ils se consument dans l'atmosphère?
    Nous avons pour mission de les ramener, ou du moins nous avons des procédures et des protocoles en place pour nous assurer qu'ils reviendront et ne produiront pas de déchets spatiaux. De nombreux engins spatiaux en orbite basse reviennent en raison de leur relativité par rapport à la Terre. Comme ils sont plus proches, la force de gravité est plus forte sur eux, et ils reviennent avec le temps. En général, cela prend entre cinq et dix ans, mais cela pourrait être un peu plus long.
     Certains engins spatiaux sont dotés de mécanismes de désorbitation forcée qui permettent de les ramener immédiatement. Beaucoup de missions plus récentes, en particulier celles des États-Unis, du Canada et de l'Europe, ont des plans très robustes pour garantir que nous ne créons pas plus de déchets spatiaux.
    Si l'on se place du point de vue de ce que feraient nos adversaires, comment utiliseraient-ils un nanosatellite contre le Canada?
    Je dirais que la situation est très semblable. En ce qui concerne les nanosatellites, encore une fois, à mesure que la technologie évolue, nous pouvons intégrer davantage de technologies dans des facteurs de forme plus petits. Nous pouvons encore détecter un grand nombre de ces objets en orbite terrestre basse à l'aide de radars Doppler ou d'autres types de systèmes de surveillance automatique dont nous disposons ou dont nos alliés disposent.
     Encore une fois, les frontières de l'espace n'existent pas vraiment. Vous pouvez survoler n'importe quel pays. Vous pouvez pratiquement observer tout ce que vous voulez. Il nous incombe simplement de veiller à la propreté et à la sécurité de l'espace.
    Même avec un nanosatellite aussi petit qu'il soit, vous pouvez toujours mettre les optiques dont vous avez besoin pour faire de la surveillance, de la reconnaissance et de la collecte de renseignements par satellite.
    Je dirais que oui.
    Très bien.
     Êtes-vous d'accord, monsieur Kolacz?
    Il y a des limites physiques du côté de l'ouverture. C'est de la physique. La résolution optique de la résolution radar que vous pouvez obtenir diminue avec la taille de l'ouverture que vous avez, de sorte que vous ne pouvez certainement pas obtenir une résolution inférieure à un mètre ou de quelques centimètres. Il n'est pas possible de capter des signaux. Il y a une limite. Bien sûr, une solution consiste à en utiliser un grand nombre. On peut alors submerger les défenses, quels que soient les systèmes de défense, comme on le voit actuellement avec l'utilisation de drones en Ukraine et en Russie.
     Il existe une limite physique à la taille de l'ouverture que l'on peut placer sur une petite plateforme. Il y a une limite, mais vous pouvez alors utiliser ces satellites pour détecter 80 % de ce que vous voulez détecter et utiliser les satellites à très grande ouverture, plus grands, comme RADARSAT, pour détecter des dispositifs beaucoup, beaucoup plus petits.
    Avons-nous terminé?
    Oui.
     J'ai une dernière question. Comment mon navire disparaît‑il de votre système, monsieur Kolacz?
(1750)
    Eh bien, il ne disparaîtra pas. Ce que vous allez faire, tout d'abord, c'est éteindre votre transpondeur, ce qui nous signale immédiatement que vous faites quelque chose de suspect. Nous pouvons alors demander à un satellite radar, optique ou à radiofréquences non classifié de capter n'importe quelle transmission et de vous rechercher par radar — nuit ou jour, à travers les nuages — ou par voie optique.
     Vous ne disparaîtrez jamais.
     C'est dommage. C'est également intéressant.
     Et si je suis un sous-marin russe?
    Si vous allez sous l'eau, c'est une autre histoire.
    À un moment donné, vous les perdriez, mais tous les sous-marins doivent remonter à la surface à un moment ou à un autre.
    Non, les sous-marins nucléaires n'ont pas besoin de remonter à la surface, mais d'autres éléments entrent en jeu qui dépassent le cadre de cette discussion.
    Il s'agit, à certains égards, d'un système infaillible — à tout moment, n'importe quel gouvernement peut trouver n'importe quel navire, à n'importe quel endroit.
    Tout à fait.
    C'est intéressant.
     Je vous remercie.
     C'était une discussion intéressante, encore une fois, pour la deuxième heure. Je vous remercie tous les deux de nous avoir fait profiter de vos renseignements et vos connaissances.
     Chers collègues, sur ce, nous allons mettre fin à cette séance.
     Jeudi matin, notre première heure sera consacrée à cette étude. La deuxième heure est consacrée à nos amis finlandais, mais nous allons changer de salle afin d'accueillir les Finlandais ainsi que le comité des affaires étrangères qui va donner suite à nos questions. Ce n'est pas compliqué, mais je vous informe de ce changement.
    Sur ce, je vous remercie de nouveau.
     La séance est levée.
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