Passer au contenu

NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 113 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 19 septembre 2024

[Enregistrement électronique]

(0815)

[Traduction]

    Chers collègues, commençons. Il est 8 h 15. Nos trois témoins sont prêts.
    Je n'interromps personne, n'est‑ce pas?
    Non, nous sommes attentifs, monsieur le président.
    Tant mieux. Je vous en suis reconnaissant.
    Nos témoins sont prêts. Il est 8 h 15 et nous avons le quorum.
    Je considère généralement qu'il est désavantageux de comparaître virtuellement, mais si Marta Kepe est prête à commencer, je vais lui donner la parole en premier.
    Je souhaite également la bienvenue à Dominique Arel, titulaire de la chaire d'études ukrainiennes à l'Université d'Ottawa, et à Stephen Saideman, titulaire de la chaire Paterson en affaires internationales à la Norman Paterson School of International Affairs de l'Université Carleton.
    J'ai passé du bon temps hier soir avec votre collègue, Stephanie Carvin.
    Chers collègues, nous accueillons ces témoins pendant deux heures, et j'espère que nous aurons le temps de faire trois tours pour les questions. Je propose que nous fassions d'abord deux tours complets selon les règles habituelles, puis que nous donnions la parole aux autres intervenants à la deuxième heure. Ainsi, tout le monde devrait pouvoir poser toutes les questions qu'il veut à ces excellents témoins.
    Sur ce, nous accueillons Marta Kepe, analyste principale de la défense à la RAND Corporation.
    Vous avez cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup de m'avoir invitée à m'adresser au Comité au sujet de la sécurité dans la région baltique.
    L'environnement de sécurité dans la région baltique s'est dégradé depuis l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie en février 2022. Depuis, les forces militaires russes se sont concentrées sur les combats en Ukraine, ce qui a décimé ses capacités terrestres auparavant situées près des frontières avec les pays baltes.
    Cela dit, la Russie a annoncé son intention de restructurer ses districts militaires aux frontières des pays baltes et de la Finlande, des plans qui peuvent être indicateurs d'une tendance à long terme à la confrontation entre la Russie et l'Occident.
    La Russie maintient également un arsenal de défense aérienne dense et puissant et à Kaliningrad et à Saint-Pétersbourg, en plus d'avoir des missiles de défense côtière à Kaliningrad, qui pourraient constituer une menace potentielle, car ils pourraient atteindre les territoires des États baltes, de la Finlande et de la Pologne et empêcher les activités commerciales maritimes dans toute la zone maritime.
    De même, les activités hybrides de la Russie dans la région se sont intensifiées. C'est ce que le premier ministre estonien Kaja Kallas a appelé une « guerre fantôme » contre l'Occident. Cette guerre est principalement menée par des moyens non militaires comme la désinformation, les cyberattaques, les actes de sabotage, les pressions psychologiques, la migration stratégique et l'augmentation des activités de renseignement.
    Ces activités ne sont pas nécessairement nouvelles. Elles prennent toutefois de l'ampleur. Elles comprennent des cyberattaques et des campagnes de mésinformation et de désinformation. Certaines activités sont plus nouvelles — disons‑le ainsi — comme les attaques contre des infrastructures essentielles sous-marines et terrestres, qui ont révélé une très grande vulnérabilité, à savoir que les infrastructures situées sur les fonds marins sont d'une importance vitale pour les économies modernes, mais qu'elles sont également très mal surveillées et protégées.
    Nous constatons également une augmentation des activités de sabotage et de vandalisme de faible envergure dans les États baltes et ailleurs, ce que les dirigeants lituaniens ont qualifié de « terrorisme politique ». Ces actes apparemment aléatoires de vandalisme ou de sabotage visent probablement à créer un sentiment d'incertitude quant à la suite des choses et créent probablement aussi l'apparence d'une opposition croissante au soutien à l'Ukraine.
    De même, le brouillage par la Russie du système mondial de localisation ou des signaux GPS dans la région balte s'est également intensifié, perturbant la navigation aérienne et maritime et affectant de nombreux vols commerciaux. Ici, je dois admettre que certains des exemples les plus récents de brouillage des signaux GPS dans la région baltique pourraient en réalité être attribuables au fait que la Russie a simplement intensifié ses activités de défense anti-drones autour des centres névralgiques pour la population de la Russie occidentale.
    Il y a aussi les violations par la Russie de l'espace aérien de la région baltique, qui ont non seulement augmenté, mais qui se sont diversifiées depuis le 7 septembre dernier. Vous avez peut-être eu vent du fait que le 7 septembre, un drone russe Shahed est tombé dans l'Est de la Lettonie.
    À la lumière de ces événements, les pays baltes et l'OTAN ont fait beaucoup de changements. Les pays baltes membres de l'OTAN sont parmi les pays de l'OTAN qui dépensent le plus dans la défense, en proportion de leur PIB. Ils investissent également dans leurs forces armées en organisant des exercices et en donnant de la formation. L'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'OTAN a été un développement très important quant à la façon dont nous pouvons concevoir la défense et la sécurité dans la région. L'OTAN a désormais une perspective plus globale et plus conjointe de la région.
    Pour ce qui est des opérations militaires et de la préparation militaire, je tiens également à souligner que nous avons fait beaucoup pour améliorer la mobilité militaire. Tout n'est pas complètement réglé, mais c'est devenu plus facile et plus rapide. Les pays baltes renforcent leurs capacités grâce à l'acquisition d'équipement et, comme je l'ai dit, à la formation, mais aussi, dans le cas de la Lettonie, grâce à un retour à la conscription.
    Dorénavant, la présence assidue des alliés — y compris de l'armée canadienne — sera essentielle pour la défense de la région et comme mesure de dissuasion. L'OTAN et les pays baltes doivent demeurer vigilants et continuer de développer leurs capacités de défense dans la région. Avec le temps, les mesures prises par la Russie dans la région, envers les divers pays de l'OTAN, s'adapteront probablement aux nouvelles vulnérabilités. Cela signifie que le Canada, l'Alliance et les pays baltes devront surveiller de près les tentatives des Russes de transgresser les limites et d'exploiter nos vulnérabilités et nos frontières.
(0820)
    Pour aider les pays baltes à renforcer leurs capacités de défense, le soutien des alliés sera crucial à bien des égards, notamment pour la défense aérienne. Pour contrer les menaces hybrides et les menaces dans les zones grises, les pays baltes ont beaucoup de responsabilités nationales à assumer. Cependant, le soutien externe demeurera important.
    Je vais m'arrêter ici et resterai prête à répondre à vos questions.
    Merci.
    Monsieur Arel, c'est à vous.
    La dévastation croissante qui découle de la guerre en Ukraine a apporté un certain degré de clarté sur trois choses.
    Premièrement, l'Ukraine ne peut pas se défendre contre les bombes planantes sur les lignes de front ou à proximité, ni contre les missiles balistiques visant ses villes. Il lui faudrait 25 systèmes de défense aérienne de type Patriot pour cela. On lui en avait promis sept, qu'elle n'a même pas encore tous reçus jusqu'à maintenant, bien que nous ne sachions pas combien elle en a officiellement. C'est secret.
    Deuxièmement, les sanctions contre l'importation de microprocesseurs, dont dépendent les missiles et les bombes guidés, ne fonctionnent pas, en grande partie parce que la Chine refuse de les appliquer.
    Troisièmement, l'Ukraine ne peut pas gagner la guerre d'usure dans le Donbass parce que tous les membres de l'OTAN réunis ne peuvent pas égaler la production annuelle d'artillerie de la Russie et que les énormes pertes russes n'influent pas sur la stabilité du régime russe.
    Ce grave désavantage militaire a amené l'Ukraine à conclure que l'offensive est la meilleure défense. La meilleure protection contre les attaques quotidiennes est de frapper à la source. L'Ukraine utilise déjà cette tactique au moyen de drones d'attaque rapides contre des dépôts de munitions — nous en avons vu un exemple hier —, des raffineries de pétrole et des aéroports militaires sur le territoire russe.
    Cependant, elle pourrait avoir beaucoup plus d'impact si elle obtenait la permission des États-Unis d'utiliser les missiles à longue portée qu'elle possède déjà, mais qu'elle ne peut utiliser en toute légitimité que sur le territoire ukrainien reconnu. Les États-Unis refusent de lui accorder par crainte d'une escalade du conflit, nous a‑t‑on dit à maintes reprises. Cependant, il semble que cette escalade soit déjà à nos portes. La Russie a intensifié ses attaques avant même qu'une décision ne soit prise concernant l'utilisation de missiles à longue portée. On craint une escalade en raison de la menace que la Russie ait recours à l'arme nucléaire. Mais cette menace est stérile. L'Ukraine a envahi une partie de l'oblast de Koursk, et la Russie a réagi militairement par des moyens conventionnels et politiques, en prétendant que rien de grave ne s'était produit.
    Une menace plus crédible serait que la Russie mette fin au tabou de la prolifération des armes nucléaires en aidant l'Iran et la Corée du Nord. Il y a des signes inquiétants que le processus soit peut-être déjà enclenché, et j'insiste sur le mot « peut-être ».
    La deuxième menace serait que la Russie aide l'Iran à cibler les actifs américains au Moyen-Orient. L'Iran vient d'envoyer des missiles balistiques à la Russie dans le cadre d'une « escalade dramatique », pour reprendre les mots du secrétaire d'État américain, Antony Blinken. La question est de savoir ce que l'Iran obtiendra réellement en retour. Encore une fois, cette escalade semble précéder la décision américaine concernant les missiles à longue portée. La semaine dernière, Poutine a affirmé que comme les Ukrainiens ne peuvent pas utiliser ces missiles par leurs propres moyens et qu'ils doivent se fier aux données satellitaires des États-Unis, en particulier, cela ferait de l'OTAN une partie directe à la guerre. Pourtant, ces missiles frappent depuis longtemps la Crimée et les territoires environnants, que Poutine considère non seulement comme un territoire légitime, mais aussi comme un éternel territoire de la Russie. La réponse a été strictement conventionnelle.
    Un troisième élément de menace — et ma collègue Marta Kepe en a parlé en long et en large dans son exposé —, c'est la menace d'attaquer les infrastructures énergétiques et militaires et les infrastructures de communications en Occident, ainsi que la provocation par l'empiètement d'espaces aériens, comme celui de la Roumanie l'autre jour.
(0825)
    On a fait valoir que ces missiles à longue portée ne changeront pas la donne. Là n'est pas la question. Ce que ces missiles pourraient faire, c'est d'augmenter considérablement le coût militaire de l'attaque contre l'Ukraine pour la Russie. La dissuasion est en fin de compte la seule façon de fournir des garanties de sécurité à l'Ukraine.
    Merci.
    Monsieur Saideman, c'est votre tour.
    Je dois commencer par quelques mises en garde et un appel à l'humilité.
    Mes premiers travaux portaient sur les relations internationales en contexte de conflits ethniques, alors je connais un peu l'irrédentisme, qui est, en partie, à l'origine de ce que fait la Russie ces jours‑ci. Je m'intéresse maintenant davantage aux alliances et aux relations civilo-militaires. Je ne suis pas un expert de la Russie, de l'Ukraine ou des pays baltes. Je suis allé à Riga à quelques reprises au cours des dernières années. Je suis plutôt un spécialiste de la défense canadienne.
    Lorsqu'on m'a demandé, en 2022, combien de temps durerait la guerre en Ukraine, j'ai sous-estimé sa détermination, sa préparation et son leadership. J'ai aussi surestimé l'armée russe. Je dois maintenant me concentrer sur nos bons et nos mauvais coups, sur les éléments où nous sommes constants, fluides et là où c'est plus incertain.
    La plus grande incertitude à laquelle nous sommes confrontés en Ukraine, en Russie et dans les pays baltes vient vraiment de Washington, de la Pennsylvanie, du Wisconsin et d'autres endroits du genre. Les choses vont changer de façon assez remarquable selon le résultat des élections. Si Harris gagne, on peut s'attendre au statu quo, surtout si les démocrates reprennent la Chambre et conservent le Sénat. Si Trump gagne, l'avenir sera sombre partout, surtout en Ukraine, car rien ne peut remplacer le soutien des États-Unis. De même, si Trump gagne, l'OTAN cessera d'exister ou n'existera qu'officiellement. L'engagement pris en vertu de l'article 5 ne s'appliquerait plus. L'OTAN n'est pas à l'épreuve de Trump. Je pourrai en parler davantage pendant la période de questions.
    Cela crée une dynamique très importante qui, à mon avis, est sous-estimée pour juger de la sécurité dans les pays baltes et en Europe de l'Est, à savoir que la Russie, sous le règne de Poutine, s'adonne à toutes sortes de comportements agressifs, comme on l'a déjà mentionné, mais qu'il n'y a pas eu une seule attaque conventionnelle au‑delà de la limite magique et claire qui sépare l'OTAN des pays non membres de l'OTAN. Cela compte beaucoup pour Poutine. Tant que les États-Unis continueront d'être dirigés par des gens qui appuient l'alliance, la sécurité des pays baltes restera assez bonne, même si les gens de la région ne seront pas d'accord.
    Le Canada, comme la plupart des pays de l'OTAN, investit considérablement dans une perspective à long terme. On a longtemps esquivé l'idée d'une base permanente dans la région, mais on ne respecte plus la loi fondatrice OTAN-Russie, tombée en désuétude depuis longtemps. Nous n'en sommes plus à maintenir juste assez de troupes dans la région pour dissuader les Russes d'attaquer les pays baltes. La guerre en Ukraine nous a beaucoup appris sur nos limites — nous sommes loin d'avoir assez d'artillerie ou de munitions, par exemple — et sur les limites de la Russie. De plus, l'armée russe est très appauvrie, comme l'a fait remarquer la première intervenante. Nous pourrions débattre de la rapidité avec laquelle la Russie peut reconstituer son armée, mais pour l'instant, il y a beaucoup moins de chars d'assaut, d'artillerie et d'infanterie de l'autre côté de la frontière. Il est certain que la puissance aérienne et maritime russe, outre sa flotte en mer Noire, est beaucoup moins affaiblie par la guerre, par contre.
    Où se situe le Canada dans tout cela? Le Canada a énormément contribué à la formation des militaires ukrainiens avant la deuxième invasion. Les efforts déployés en Lettonie sont exceptionnels, car le Canada a eu la tâche la plus difficile parce que nous avons été les derniers à intervenir, de sorte que nous avons reçu les plus petites contributions de nombreux pays qui n'avaient pas les meilleures armées de l'alliance. Les FAC ont très bien géré la situation. L'élargissement des troupes, de groupes tactiques à des brigades a exercé encore plus de pression sur le Canada, car cela signifie un engagement beaucoup plus grand, et donc, un plus grand nombre de militaires déployés plus fréquemment en rotation en Lettonie.
    Cependant, l'adhésion de la Suède à l'OTAN signifie qu'il pourrait y avoir beaucoup plus de troupes de grande qualité en Lettonie. Le pays a promis d'y déployer des troupes. La question demeure de savoir combien de soldats le Canada peut maintenir en Lettonie. Comme je l'ai dit, j'ai visité le quartier général du groupement tactique à quelques reprises. Il est clair que les rotations fréquentes mettent nos forces à rude épreuve. Il pourrait être logique de prévoir des déploiements plus longs afin de réduire les déplacements entre les deux pays, et d'y construire de l'infrastructure pour nos militaires afin que le temps y passe plus facilement.
    On pourrait reproduire le modèle de la guerre froide, de sorte que les familles des militaires aillent vivre avec leurs proches déployés en Lettonie. Cela coûterait cher. Il faudrait des écoles, des garderies et des solutions créatives pour maintenir les conjoints au travail, mais il n'est pas évident qu'il soit viable à long terme que 1 500 soldats fassent la navette entre les deux pays tous les six mois. Le Canada et les autres démocraties devront faire preuve de plus de prudence à l'avenir quant au nombre de soldats qu'ils peuvent promettre. Notre armée n'est vraiment pas si grande.
    Parlant de limites, notre petite armée n'a tout simplement pas grand-chose à offrir à l'Ukraine. Nous pourrions nous inspirer de ce que d'autres pays ont fait, c'est‑à‑dire lui céder des pans entiers de leurs ressources militaires. Nous nous sommes demandé à maintes reprises au cours des 20 ou 30 dernières années si nous devions garder des chars d'assaut. Nous pourrions, par exemple, lui donner tous nos chars d'assaut, les fonctionnels comme les brisés, et la laisser s'en occuper, puis restructurer nos forces. À l'heure actuelle, sur le terrain, c'est essentiellement ce que j'ai observé au sein du groupement tactique que j'ai visité en 2023, en Lettonie, où l'on utilisait non pas des chars d'assaut canadiens, mais ceux de nos partenaires. Cependant, compte tenu de la crise du recrutement et du maintien en poste que nous connaissons ici, et de la lenteur de nos processus d'approvisionnement, il est peu probable que le Canada prenne cette grande décision.
    L'un des principaux changements sous-estimés dans la région, c'est que nous ne participons plus aux patrouilles aériennes rotatives. Auparavant, nous avions six groupes de six CF‑18 qui survolaient la région en alternance, à partir de la Roumanie. C'était une contribution majeure à la défense aérienne, mais nous ne le faisons plus.
(0830)
    La chose que je tiens à souligner et qui n'a pas encore été mentionnée, ce sont les relations civilo-militaires dans la région, c'est‑à‑dire que nous devons surveiller ce que Zelensky fait avec ses officiers, s'il maintient un bon contrôle civil de l'armée ou s'il y nomme des personnes avec qui il a des affinités pour obtenir des faveurs politiques. Ce n'est là qu'un des défis.
    Une autre question qui se pose est celle du moment où l'armée russe se rebellera. C'est ainsi que la participation russe à la Première Guerre mondiale a pris fin. Compte tenu de tout le sang versé jusqu'ici, la mutinerie reste une possibilité, surtout à la lumière des mauvais traitements subis par les soldats russes.
    Je vais m'arrêter là.
    Merci, monsieur Saideman.
    Nous allons passer à notre série de questions de six minutes. J'ai les noms des députées Gallant, Lapointe, Normandin et Mathyssen.
    Madame Gallant, vous avez six minutes.
    Ma première question s'adresse à Mme Kepe.
    Le ministre Blair a annoncé en février dernier un investissement de 46 millions de dollars pour l'acquisition de nouvel équipement destiné à contrer les drones de classe 1 en Lettonie. Ce nouveau système sera‑t‑il suffisant pour détecter et détruire des drones russes kamikazes Lancet?
    De mémoire, je ne peux pas vous dire précisément contre quel type de drone ce système sera efficace.
    Je tiens toutefois à dire que quand je parlais des capacités pour lesquelles les pays baltes ont vraiment besoin d'aide, je voulais dire qu'ils travaillent justement à accroître leurs capacités de lutte anti-drone. L'aide à la lutte anti-drone est très importante. Je veux dire qu'il faut pouvoir contrer toutes sortes de drones, en commençant par les très petits drones, car ils peuvent aussi être utilisés pour mener des attaques, comme nous le savons. Nous en voyons de nombreux exemples dans les deux camps, dans la guerre en Ukraine, où des drones beaucoup plus gros, beaucoup plus complexes et beaucoup plus avancés technologiquement sont utilisés aussi.
    Je dirais qu'il nous faut des capacités de lutte contre tous les types de drones.
(0835)
    De quel type était le drone qui a été récupéré en Lettonie? S'agissait‑il d'un kamikaze ou d'un drone de surveillance?
    Il s'agit du drone Shahed iranien.
    Le drone Shahed est essentiellement un système d'aéronef sans pilote de type munition rôdeuse. On l'appelle aussi drone kamikaze ou drone suicide. Il s'agit essentiellement d'une arme à vol autonome. C'est ce qui a été retrouvé en Lettonie. L'enquête est toujours en cours, alors nous n'en savons que ce qui est ressorti dans les médias...
    Merci.
    ... mais nous savons qu'on en a retrouvé un là‑bas.
    D'accord.
    Monsieur Arel, compte tenu de l'absence de capacités antiaériennes terrestres à longue portée comme des missiles Patriot ou NASAMS pour nos troupes, particulièrement pour défendre la Lettonie, qui est vulnérable aux bombardiers de haute altitude comme les Tu‑160 et les Tu‑95, aux missiles de croisière et aux missiles hypersoniques, comment pouvons-nous nous défendre contre ces menaces si notre gouvernement n'a pas de plan pour acquérir des missiles sol-air à longue portée afin de les contrer?
    La question porte‑t‑elle sur les pays baltes ou sur l'Ukraine?
    Elle est liée à la Lettonie.
    Je ne peux pas vraiment vous parler de la situation en Lettonie. Je vais laisser mes collègues répondre à cette question et à celles sur l'Ukraine.
    Très bien.
    M. Saideman pourrait‑il répondre à cette question?
    Je peux essayer.
    Je dirais que la situation en Lettonie relève d'un effort multilatéral, et que nous dépendons de l'aide de nos alliés pour la défense aérienne. Les États-Unis ont des capacités de défense aérienne dans la région. Les Britanniques et les Allemands ont certaines capacités aussi. L'avantage de la région baltique, c'est qu'elle est petite, de sorte que les menaces auxquelles nous y sommes confrontés ne concernent pas que nous, mais aussi nos alliés dans la région. Nous n'avons pas ces capacités. Nous essayons actuellement de réinvestir dans ces capacités, mais non, nous ne les avons pas pour le moment.
    Cette question s'adresse peut-être à M. Arel.
    Il y a aussi le projet de défense aérienne basée au sol, GBAD, censé contrer les menaces posées par les munitions de roquettes, d'artillerie, de mortier, les missiles air-sol et les drones, ainsi que par les avions et hélicoptères d'attaque comme cibles secondaires.
    Pourquoi notre gouvernement ne voit‑il pas la nécessité de contrer les menaces des bombardiers à haute altitude, compte tenu de leur capacité de lancer des missiles de croisière et, plus inquiétant encore, des missiles hypersoniques? Cela s'appliquerait au Canada et à la Lettonie.
    Ce que je peux dire au sujet du Canada, pour ce qui est de l'Ukraine, c'est que je ne vois pas de volonté politique, vraiment, de s'engager ou d'apporter de grands changements à ce que le Canada peut fournir à l'étranger et produire pour lui-même, comme vous l'avez mentionné. Le Canada a promis, il y a 20 ou 21 mois, un système de la famille des Patriot, mais cette promesse ne s'est toujours pas concrétisée. Il y a eu des décisions ou des non-décisions concernant des réaffectations budgétaires à l'armée. Nous connaissons bien le problème. Le Canada est à la traîne par rapport au fameux seuil de 2 %, et ce, depuis deux ans et demi.
    Du point de vue de l'Ukraine, le Canada n'est pas le seul dans cette situation. On fait beaucoup de promesses, mais elles se concrétisent très lentement. La réalité actuelle, c'est que l'Ukraine ne peut pas se défendre contre ces attaques systématiques. C'est l'escalade. L'escalade est attribuable au fait que la Russie mène de plus en plus d'attaques contre des cibles civiles, et c'est pourquoi la stratégie de l'Ukraine doit maintenant être double: elle doit non seulement réfléchir à la façon de se défendre pendant qu'elle se fait détruire, mais aussi passer à l'offensive.
(0840)
    Merci, madame Gallant.
    Madame Lapointe, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à Mme Kepe. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de « guerre fantôme » contre l'Occident. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet et fournir au Comité d'autres exemples?
    Le premier ministre Kaja Kallas a une façon très intéressante de parler de la guerre fantôme, menée dans l'ombre, qui se compose en fait d'activités que nous situons normalement sous le seuil de la guerre, d'activités dans la zone grise ou qui présentent des risques hybrides pour la sécurité.
    Il y a un certain nombre d'enjeux. Il y a les attaques contre les infrastructures, et non seulement les attaques contre les infrastructures, mais aussi la collecte de renseignements et d'informations précieuses sur les infrastructures essentielles et les services essentiels. Grâce à l'accumulation de renseignements, l'adversaire obtient une grande partie des informations précieuses dont il a besoin pour « se préparer pour le champ de bataille », comme on le dit, tout dépendant du champ de bataille où l'on doit se battre.
    En fait, je vous déconseille de trop lire sur la préparation à la guerre au moyen de ce genre d'activités dans la région de la mer Baltique en général. Il y a beaucoup de choses qui peuvent servir à des fins détournées. L'intention ici peut aussi être de semer l'incertitude et d'intimider l'adversaire, ainsi que de multiplier les tactiques visant à miner la cohésion et à créer le sentiment que nous devons peut-être vivre avec la Russie dans notre cour arrière et que c'est ainsi que la vie est faite, si bien qu'il vaut simplement mieux travailler avec elle d'une manière qui fonctionne pour elle.
    Merci.
    Ma prochaine question comporte deux volets. Parlant de cybermenaces, nous avons indéniablement constaté une augmentation des cybermenaces de la Russie contre l'Ukraine, l'Europe et l'Amérique du Nord. Selon vous, quelles sont les principales vulnérabilités des pays de l'OTAN face aux cybermenaces de la Russie?
    La deuxième partie de la question est la suivante: quels genres de scénarios devrions-nous envisager de façon réaliste comme menaces imminentes potentielles et où devrions-nous concentrer nos efforts d'atténuation?
    Ce sont des questions très difficiles, je dois dire.
    Premièrement, en ce qui concerne les cybermenaces, le principal problème, c'est que nous voyons... Nous, de la perspective générale de l'Occident, avons déjà beaucoup d'expérience des cybermenaces, non seulement de la Russie, mais d'autres acteurs aussi, de sorte que les capacités, les compétences et la compréhension de la façon de travailler ainsi que les procédures et les processus nécessaires sont là. Cependant, les processus et les procédures peuvent toujours être améliorés, surtout en ce qui concerne l'information et l'échange de renseignements, afin que nous puissions aider nos amis et voisins de l'Occident à mieux faire face aux menaces qui se présentent. L'OTAN a créé de nouveaux canaux pour s'assurer que chacun peut recevoir de l'aide au besoin. Je crois que c'est un pays occidental des Balkans qui a été le premier à utiliser ce nouveau cadre d'aide.
    L'autre chose, c'est la capacité de répondre aux cyberattaques et aux menaces à grande échelle. À quoi servent vraiment les nouvelles technologies, l'automatisation, l'intelligence artificielle? Elles aident l'adversaire à créer beaucoup d'attaques en même temps. Ce serait probablement ma principale préoccupation. Ce n'est certainement pas la seule préoccupation à l'heure actuelle, mais je tiens à le souligner.
    Je suis désolée, mais l'autre aspect est la principale vulnérabilité en général?
    Sur quoi devrions-nous concentrer nos efforts d'atténuation pour contrer ces menaces?
    Nous évaluons les menaces hybrides dans leur ensemble. L'objectif... Je parle d'objectif parce que c'est un domaine où, si nous avons une vulnérabilité et qu'elle est exploitée, cela peut avoir beaucoup d'effets, beaucoup de conséquences. Cela signifie qu'il faut vraiment favoriser et renforcer la résilience de nos infrastructures essentielles de services vitaux — nos systèmes énergétiques et nos systèmes d'alimentation et d'approvisionnement en eau —, des choses dont les gens ont besoin pour survivre. Je mettrais beaucoup l'accent là‑dessus.
    Bien sûr, il y a bien d'autres choses pour lesquelles il faudrait renforcer notre résilience, l'échange d'information, la coopération et la mise en commun des pratiques exemplaires. Je dirais qu'il s'agit en grande partie d'information et de mise en commun des pratiques exemplaires, parce que c'est ce qui permet aux divers pays, aux administrations locales de déterminer réellement comment faire et ce qui fonctionnerait le mieux pour eux.
(0845)
    Il vous reste 45 secondes.
    Oh, mon Dieu.
    Monsieur Saideman, vous avez dit que l'OTAN n'était pas à l'épreuve de Trump. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet en 30 secondes?
    Bien sûr. Pour l'OTAN, le problème, c'est que le coeur de l'article 5 dicte essentiellement qu'une attaque contre un pays équivaut à une attaque contre tous les pays. Il a dit très clairement qu'il ne s'en soucie pas beaucoup. Il a parlé de rendre cela conditionnel au seuil de 2 %, et maintenant, son candidat à la vice-présidence dit que cela dépendrait d'autres dynamiques aussi, en matière d'immigration, et d'autres choses étranges. Il est clair qu'ils ne prennent pas l'OTAN très au sérieux.
    On a passé beaucoup de temps, la dernière fois, à essayer d'éduquer Trump au sujet de l'OTAN. Il a été assez impitoyable dans son refus d'intégrer ces leçons. Il éprouve beaucoup de ressentiment à l'égard de l'OTAN, parce qu'il se souvient de ne pas s'être senti très à l'aise à tous ces sommets, de ne pas s'être senti comme un membre du club. C'est un homme animé presque entièrement par le ressentiment, ce qui ne laisse pas présager grand-chose de bon pour l'organisation, et il a toujours été... Je veux dire, ses premiers engagements électoraux en 2015 portaient sur le fait d'être contre l'OTAN.
    Merci, madame Lapointe.
    Vous aurez peut-être besoin de l'interprétation pour les questions de notre prochaine intervenante.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Professeur Saideman, je vais revenir un peu plus tard à la question de Donald Trump et de l'OTAN.
    Monsieur Arel, vous avez parlé du risque d'une escalade si on donnait l'autorisation d'utiliser des missiles de plus longue portée, et vous avez mentionné que le risque d'un débordement au Moyen‑Orient était plus réel que la crainte d'une escalade nucléaire.
    Devrions-nous revoir notre discours pour que la population saisisse bien les enjeux réels et que la dissuasion se fasse au bon endroit par rapport à la possibilité d'autoriser ultimement l'utilisation de missiles de longue portée? Devrait-on carrément revoir notre discours de façon à donner plus facilement l'autorisation que demande l'Ukraine d'utiliser ces missiles de longue portée?
    Il s'agit d'une excellente question.
    En fait, le mieux serait de ne rien dire.

[Traduction]

On craint l'escalade.

[Français]

    Selon la partie américaine, 90 % des bombardiers qui larguent des bombes flottantes ou des missiles supersoniques sont hors de portée de toute façon des missiles ATACMS. Cela ne changerait rien. C'est un plus empirique.
    Pour le reste, dans le débat public à l'OTAN, les États-Unis manquent de transparence sur les risques d'escalade, et ce n'est pas tellement mieux en Europe. De quoi parle-t-on exactement?
    L'Europe, le Canada et les État‑Unis étant des démocraties, ces informations finissent par couler. Il faut suivre cela de près. Le public en général ayant peur du nucléaire et d'une troisième guerre mondiale, on en reste là.
    Ce qui me semble clair depuis le début, c'est qu'il y a eu des menaces à peine voilées depuis le premier jour de l'invasion, le 24 février 2022. La réalité est toujours une riposte conventionnelle et de plus en plus conventionnelle contre des civils. On s'en prend aux civils ukrainiens. C'est cela, la riposte ukrainienne. Vous parlez de dissuasion, mais d'un point de vue stratégique; or l'énorme danger, c'est de céder à la peur de l'escalade dans un contexte où, pour la première fois, une puissance nucléaire menace d'utiliser sa force nucléaire à des fins d'agression et non pas à des fins de défense.
     Si l'OTAN, dont le Canada et les États‑Unis, cède à cette peur, à mon avis, ce sera un peu la fin d'une norme fondamentale à l'échelle internationale. Cela aura des conséquences. En Europe, je pense que la perception générale est que cela ne s'arrêtera pas à l'Ukraine si celle-ci tombe, justement parce qu'on craint l'escalade. Le cas échéant, l'Ukraine ne peut pas se défendre.
(0850)
     Merci beaucoup.
    Monsieur Saideman, sur la question de la possibilité que Donald Trump remporte l'élection, j'aimerais vous entendre parler des autres pays autour de l'Ukraine, où on a des opérations, une présence avancée rehaussée et de la dissuasion. Je pense notamment à la Pologne, où il y a une forte présence américaine. Cependant, la Pologne a atteint la cible de 2 % du PIB en dépenses militaires; elle l'a même dépassée, et de beaucoup.
     À quoi peut-on s'attendre pour ces pays qui, finalement, ont respecté ce que Donald Trump avait demandé, à savoir qu'ils se débrouillent un peu eux-mêmes? Peut-on s'attendre à ce que le soutien des Américains soit maintenu?

[Traduction]

    Je dirais que même les pays dont les dépenses atteignent le seuil de 2 % ne devraient pas s'attendre à avoir l'appui de Trump. Il crée beaucoup d'incertitude à propos de tout, alors même que l'OTAN s'emploie depuis 70 ans à essayer d'apporter un degré de certitude quant à l'engagement américain envers l'Europe.
    La chose peut-être la plus controversée que je puisse dire à ce sujet, c'est que, si Trump redevient président, je m'attendrais à ce que la Pologne envisage sérieusement la prolifération nucléaire, car elle ne pourrait pas s'en remettre au parapluie nucléaire américain avec Trump à la présidence, et personne ne compte sur le déploiement des armes nucléaires françaises ou britanniques pour dissuader les attaques contre les pays baltes. Dans une certaine mesure, les Polonais seraient laissés à eux-mêmes.
    Le projet de l'Union européenne, qui visait la mise en place une importante coopération internationale pour remplacer l'OTAN, a échoué. Il est possible que le fait que les États-Unis ne soient plus un défenseur engagé de l'Europe de l'Est encourage des avancées en ce sens, mais je pense que si vous parlez aux gens de la région, ils vous diront qu'ils ne s'attendent pas vraiment à voir l'Union européenne se tenir debout si l'OTAN devenait moins efficace ou non pertinente.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Madame Kepe, il reste peu de temps, mais je voudrais vous relancer rapidement sur la question de la conscription. Je voulais poser la question avant que vous en parliez.
    Quel est l'état d'esprit dans les différents pays baltes?
    Je pense que l'Estonie n'a pas encore réinstauré la conscription. Est-ce qu'elle considère la possibilité de le faire?
    Quelle est la perception de la population quant à la conscription? Cette perception change-t-elle à mesure que dure le conflit en Ukraine?

[Traduction]

    Merci.
    Les trois pays baltes ont maintenant la conscription. L'Estonie n'y a jamais renoncé. La conscription est en place depuis le début des années 1990, lorsque ce pays a recouvré son indépendance. En fait, les États baltes et les pays nordiques ont tous une sorte de système de défense faisant intervenir l'ensemble de la société, où la contribution civile à la défense et à la sécurité nationale est primordiale. Les Lituaniens avaient essentiellement un régime de conscription hybride. Ils sont aussi retournés à une formule s'apparentant davantage à une conscription générale.
    En ce qui concerne le soutien de la population à la conscription ou au service militaire obligatoire, que la Lettonie a réintroduit il y a environ un an, on a toujours tendance à se demander si les gens sont prêts à l'accepter et s'ils se réjouiront de pouvoir servir leur pays. Ce qu'ils ont fait, et ce que nous voyons aussi dans certains autres pays qui essaient de réintroduire la conscription, c'est qu'au début, il y a en fait beaucoup d'intérêt...
    Malheureusement, le temps à la disposition de Mme Normandin est écoulé depuis un bon moment.
    Je suis désolée.
    Nous allons maintenant passer à Mme Mathyssen, qui tient beaucoup à son temps de parole.
    J'aimerais revenir à Trump. En fait, il s'agit davantage du lien avec ce que nous voyons maintenant au sein des alliés de l'OTAN dans le contexte de ce mouvement d'extrême droite étroitement lié à un sentiment très prorusse et anti-ukrainien. Nous le constatons avec les États-Unis. Nous le voyons un peu avec la Hongrie en ce moment, ce qui est bien sûr préoccupant.
    Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet en nous décrivant ce lien et en nous expliquant pourquoi il existe?
    C'est une très bonne question. Divers éléments relient l'extrême droite et le gouvernement russe. Celui‑ci a déployé de vastes efforts de désinformation qui ont servi la cause de l'extrême droite.
    Pourquoi l'extrême droite trouve-t-elle Poutine attrayant? L'extrême droite s'emploie notamment à entacher la légitimité des institutions en place. En outre, ces gens‑là sont protototalitaires et estiment donc que les efforts de Poutine sont utiles et que Poutine est un modèle à suivre. Ils veulent un régime autoritaire d'extrême droite. Ils sont antidémocratiques.
    Viktor Orbán joue un rôle de premier plan sur ce tableau. La Hongrie est à la tête du mouvement de recul de la démocratie. Orbán se plaît à parler de démocratie antilibérale. Il n'hésite pas à recourir à l'homophobie, à l'antisémitisme et à d'autres formes de haine pour mobiliser des appuis pour son régime et pour miner ses opposants tout en faisant la même chose dans les pays voisins.
    Cette stratégie a été reprise par des politiciens d'extrême droite en Europe et en Amérique du Nord. Ce n'est pas par hasard que les personnes trans sont maintenant diabolisées. Ce n'est pas un hasard non plus si l'antisémitisme est à la hausse et l'islamophobie également. Toutes ces choses vont de pair. L'idéologie de Poutine ressemble beaucoup à celle des mouvements politiques d'extrême droite aux États-Unis, au Canada et en Europe.
(0855)
    L'OTAN dispose-t-elle d'une défense quelconque à cet égard au sein de ses structures internes?
    Oui et non, en ce sens que les responsables de l'OTAN ont déjà beaucoup réfléchi à la question de la désinformation. Ils ont un centre d'excellence en communications stratégiques en Lettonie. Ils parlent de désinformation depuis un certain temps. Le problème — et je pourrais vous citer un travail de deuxième cycle à ce sujet —, c'est que pour l'ingérence étrangère dans les élections et tout ce qui l'accompagne, la contribution d'alliés nationaux est absolument cruciale. Alors, cela dépend vraiment de la politique nationale de chaque membre de l'OTAN et de la question de savoir si les partis de droite vont se battre contre l'extrême droite ou s'allier avec elle. Nous avons eu droit à diverses variations sur ce thème, et la position adoptée par les partis de droite en pareil cas est tout à fait déterminante.
    Ce n'est certainement rien de nouveau pour le Canada non plus. Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons vu apparaître sur le radar cette jeune entreprise d'extrême droite appelée Tenet Media. C'était une façade pour la propagande de Poutine. On y fait la promotion de messages très anti-ukrainiens. On en fait tout autant au sujet des vaccins, des pensionnats indiens et, comme vous l'avez dit, des attaques anti-LGBTQ+ et anti-trans. Ils font des vidéos. Ils s'allient à Rebel Media, qui fait la même chose, et à True North, qui est dans le même bateau. Cela fait partie de cette stratégie plus vaste.
    Dans quelle mesure sommes-nous tenus de lutter contre ce phénomène à l'intérieur même du Canada? Pouvez-vous nous dire brièvement comment nous pourrions nous y prendre?
    Dans les 30 secondes qu'il me reste.
    Vous en avez davantage. Je vais vous laisser le temps encore à ma disposition.
    Je sais, je plaisante.
    Je pense que c'est la question qui est au coeur de nos préoccupations actuelles. Dans un contexte politique comme le nôtre, n'importe quel parti est tenté de critiquer les autres partis pour leurs prises de position, quelles qu'elles soient. Le problème avec notre régime politique, c'est qu'il est antagoniste, si bien qu'il est très difficile d'amener tous les partis à se mettre d'accord sur le fait qu'il y a des acteurs malveillants qui essaient d'utiliser nos différends à notre détriment. Il faudrait que le gouvernement soit plus transparent au sujet de ce qui se passe, et que les partis de l'opposition posent les bonnes questions, notamment sur l'efficacité des actions du gouvernement dans ce contexte, mais aussi qu'ils ne s'en prennent pas, par exemple, aux organismes de surveillance existants. Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement sont censés renforcer la confiance à l'égard de la surveillance de notre appareil de renseignement. Il faut donc faire bien attention de ne pas mettre à mal ces organisations en nous livrant à des jeux politiques.
    Il s'agit de savoir dans quelle mesure nos politiciens peuvent se coaliser pour traiter de ces enjeux. Nous en avons eu une assez bonne idée en 2021 avec cette élection et la question de l'ingérence étrangère. Il s'agit donc de voir si nous pouvons faire en sorte que les partis s'entendent d'ici les prochaines élections sur les règles à suivre quant à la façon de composer avec les forces externes qui essaient d'influer sur le cours des choses.
    Il y a des acteurs étrangers qui appuient des candidats conservateurs; il y en a d'autres qui appuient des candidats libéraux. Ce n'est pas comme si un seul parti en profitait ou était affecté par l'ingérence étrangère dans les élections — ils en souffrent tous. Cela nuit à notre système en plus de miner la confiance envers le régime, ce qui fait que les partis d'extrême droite finissent par obtenir plus de soutien. Heureusement, cela ne s'est pas encore vraiment produit ici, mais il faut que chaque parti fasse montre de vigilance.
    Nous devons également nous attendre à de meilleurs efforts de la part des médias pour ne pas légitimer les nouvelles qui proviennent d’acteurs d'extrême droite. Nous ne pouvons pas établir une fausse équivalence entre ce que dit True North et ce que dit le New York Times en concluant que la vérité se situe quelque part entre les deux. Ce n'est pas le cas. Nous devons être plus prudents quant aux messages que nous répercutons et que nous mettons en vitrine.
    Est‑ce que les partis politiques ont des mécanismes internes adéquats...? Y a‑t‑il une façon de renforcer ces mécanismes internes au sein d'un parti ou d'un autre? De tels mécanismes existent-ils à votre connaissance?
(0900)
    Veuillez répondre très brièvement, car Mme Mathyssen n'a déjà plus de temps.
    Je ne connais pas l'appareil interne des partis, alors je ne sais pas de quels moyens ils disposent. C'est toutefois quelque chose qu'ils doivent prendre au sérieux.
    Merci.
    Chers collègues, nous passons à notre deuxième tour de questions. J'ai au moins six motions qui ont été déposées en bonne et due forme dans les délais prescrits, et nous voudrons peut-être même en débattre dès aujourd'hui. Je propose que nous ayons au moins un deuxième tour de questions sans qu'une motion soit présentée. J'espère que ce sera suffisant. Puis, vous m'indiquerez s'il y aura des motions au troisième tour de telle sorte que nous puissions gérer le temps de nos témoins en conséquence. Alors [difficultés techniques].
    [Difficultés techniques]
    [Difficultés techniques]
    [Difficultés techniques]
    [Difficultés techniques]
    [Difficultés techniques]
(0900)

(0910)
    D'accord. Nous reprenons nos travaux. Je suis désolé pour les problèmes techniques.
    Nous étions avec M. Stewart.
    Monsieur Stewart, je crois qu'il vous reste environ trois minutes.
    Merci.
    Je veux parler de l'état général de notre équipement en Lettonie. Il semble que beaucoup de choses ne fonctionnent pas au Canada. Pouvez-vous nous renseigner sur l'état général de l'équipement que nous avons en Lettonie?
    Je ne peux pas entrer dans les détails. Je pense qu'en général, nous envoyons notre meilleur équipement sur le terrain, et je dirais qu'il est ressorti de mes conversations avec les membres du groupement tactique que les différents rapports faisant état d'un manque de ressources sont un peu exagérés .
    Je crois que le principal problème pour nos forces en Lettonie vient du fait qu'elles n'ont tout simplement pas assez de munitions pour s'entraîner à l'art de la guerre. C'est ce qui leur manque en fait. Ce n'est pas vraiment que leur équipement soit de qualité inférieure.
    Dans ce cas, si notre équipement est à la hauteur, nous sommes également en mesure de le réparer nous-mêmes et de ne pas compter sur nos alliés pour cette chaîne d'approvisionnement.
    Je ne saurais vous parler des rouages de la chaîne d'approvisionnement, mais je rappelle que cette alliance est fondée sur l'interopérabilité de nos forces. Nous sommes censés pouvoir compter sur l'aide de nos alliés.
    Au sein du groupement tactique dans sa forme actuelle, nous n'avons pas des Canadiens dans tous les postes parce que nous avons des alliés qui en occupent certains. Une partie de l'entretien de cet équipement se fait peut-être par l'entremise des chaînes d'approvisionnement alliées, ce qui n'est pas une mauvaise chose.
    D'accord.
    Nous avons parlé d'environ 1 500 soldats déployés pour des périodes de six mois. Cela représente 3 000 soldats par année. Avons-nous suffisamment de membres de la Force régulière et de réservistes prêts à intervenir?
    Je pense que oui, tout au moins à court terme. Cependant, cela devient un problème de recrutement et de maintien en poste, parce que les soldats veulent avoir des expériences nouvelles et différentes. Ils en sont maintenant à leur deuxième, troisième ou quatrième déploiement. À la longue, c'est devenu stressant.
    Nous avons suffisamment d’effectifs pour cela en ce moment, mais nous devons trouver le moyen de rendre la mission plus facile, plus attrayante et plus prenante afin qu’elle devienne un outil de recrutement, plutôt qu’un obstacle au recrutement?
(0915)
    D'accord, et ne devenons-nous pas vulnérables au pays si tous nos effectifs sont déployés dans le cadre d'une seule mission expéditionnaire?
    Non, parce que l'autre adversaire que nous pouvons envisager est la Chine, et notre armée n'est pas vraiment conçue pour faire la guerre à la Chine. On ne ferait pas appel à nous pour envoyer des troupes en Chine. Comme il est préférable que notre force aérienne et notre marine soient déployées du côté du Pacifique, je pense que la répartition des tâches est logique. Notre armée se consacre à la guerre terrestre à venir — une guerre terrestre potentielle en Europe — et notre marine et notre force aérienne sont principalement concentrées ailleurs.
    Où nous situons-nous par rapport aux autres pays en ce qui concerne notre contribution dans le contexte de la guerre en Ukraine?
    Je n'ai pas les dernières statistiques à ce sujet. Je pense que nous sommes probablement en milieu de peloton.
    Il y a beaucoup de pays qui ont fait de plus grandes promesses que nous et qui ne les ont pas tenues. Nous avons pris un certain nombre d'engagements. Notre contribution est-elle proportionnelle à notre économie si l'on compare à ce que peuvent faire d'autres pays? Nous pourrions probablement en faire un peu plus, mais je rappelle que nous sommes encore en train de nous remettre de la guerre en Afghanistan au moment où nous nous préparons à une guerre opposant des forces équivalentes, de sorte que...
    C'était il y a 10 ans.
    Je comprends cela, mais le défi, c'est que l'approvisionnement prend du temps, et tout le monde se retrouve dans la même file d'attente pour se procurer des Stinger, des missiles antichars et tout le reste. Nous ne pouvons pas passer avant tous les autres pour les achats d'armes qui viennent d'autres pays, et nous n'avons pas la capacité de fabriquer des Stinger, par exemple.
    Merci.
    Madame Lambropoulos, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d'être des nôtres pour répondre à nos questions sur ce sujet important. Ma première question s'adresse à M. Arel.
    J'aimerais savoir si vous pouvez expliquer aux Canadiens, en des termes que le Canadien moyen comprendrait, pourquoi il est important que notre pays continue de contribuer à ces efforts de guerre au bénéfice de l'Ukraine.
    Merci.
    Permettez-moi de dire deux choses rapidement.
    Tout d'abord, je suis heureux de vous rencontrer parce que je viens de la circonscription de Saint-Laurent, à Montréal.
    Très bien. Vous êtes un de mes commettants.
    Deuxièmement, je n'en parlerai pas maintenant, mais j'aimerais avoir l'occasion, à un moment donné, de vous dire certaines choses au sujet de Trump, de l'OTAN et de l'extrême droite en Russie, parce que j'ai peut-être une piste de solution, disons, même en ce qui concerne les drones.
    Pour répondre à la dernière question — qui est d'ailleurs excellente —, il y a eu la guerre dans le Donbass en 2014 qui a été perçue comme mauvaise, déstabilisante, en violation du droit international, etc., mais le consensus non déclaré en Occident, et donc au Canada, aux États-Unis et au sein de l'alliance de l'OTAN, était qu'il s'agissait d'un conflit régional. On disait que la Crimée avait été annexée illégalement, mais on ne craignait pas un débordement. Il fallait contenir ce conflit. Le corollaire était que nous n'envoyions pas d'armes, par crainte d'une escalade. Ensuite, il y a eu le Protocole de Minsk. Il fallait trouver une solution diplomatique, et cela n'a pas fonctionné.
    En 2022, il était très clair que les membres de l'OTAN voyaient les choses d'un autre œil et considéraient que l'invasion massive constituait une menace à la sécurité internationale. C'est la sécurité européenne qui est menacée. Le Canada fait partie de l'alliance. Ce que cela signifie en termes simples pour le public, c'est que Poutine ne s'arrêtera pas à l'Ukraine. Comme il ne s'arrêtera pas, il nous faut trouver un moyen de faire cesser les hostilités. Mettons simplement fin à la guerre. La guerre ne s'arrêtera pas d'elle-même. Peut-être que les tirs vont s'interrompre pendant un certain temps et qu'ils vont reprendre par la suite.
    Nous pourrions dire qu'il suffit de poser la question aux Polonais. Ils étaient partie au Pacte de Varsovie. La Pologne a été occupée pendant 40 ans. On pourrait aussi poser la question aux Estoniens. Ce pays faisait partie de l'Union soviétique. C'est une conjoncture émotive pour eux. Pourquoi ne pas poser la question aux Suédois, aux Finlandais, aux Danois, aux Hollandais et aux autres? Ils se rendent bien compte de la situation. Pour leur part, la Finlande et la Suède ont essentiellement mis fin du jour au lendemain à 75 et 200 ans de neutralité, parce qu'elles craignent vraiment l'agression russe. Voilà ma réponse.
    Je vous remercie beaucoup de votre réponse.
    Aimeriez-vous intervenir également?
    Je suis d'accord avec le sentiment général exprimé ici. Cela nous a déjà touchés. Nous avons ce débat sur l'inflation depuis quelques années au Canada. D'où vient cette inflation? Elle est due, en partie, à une flambée des prix des aliments parce que les Russes ont attaqué le grenier qu'est l'Ukraine, un important producteur de céréales. Cette situation a des répercussions économiques que les Canadiens ressentent depuis quelques années. Notre politique étrangère influe non seulement sur notre sécurité nationale, mais aussi sur notre sécurité économique. Cette guerre a été mauvaise pour nous. C'est comme si la Chine attaquait Taïwan; cela perturberait le commerce international et causerait un grave problème pour notre économie. Nous sommes engagés dans cette guerre, ainsi que sur l'échiquier mondial, pour empêcher ces choses de nous toucher directement ou indirectement.
    Cette guerre, la guerre de Poutine, vise aussi en partie à mettre l'OTAN à l'épreuve. Il est un mauvais stratège, parce que cela a en fait mené à un renforcement de l'OTAN. Nous devons appuyer l'OTAN. Nous avons pris un engagement envers l'OTAN et nous devons maintenant composer avec cette menace. Cette guerre ne constitue pas une menace directe, immédiate et concrète pour le Canada, mais une menace directe, immédiate et concrète pour les pays de la région. Nous avons un engagement envers l'OTAN, puisque nous faisons partie de cette alliance, et nous devons continuer à l'appuyer.
(0920)
     Merci beaucoup.
    Monsieur Arel, vous avez également mentionné que la Russie travaille plus étroitement avec l'Iran et la Corée du Nord. Je me demandais si vous pouviez nous en dire un peu plus sur la collaboration de ces deux pays avec la Russie à l'heure actuelle.
     La Corée du Nord a envoyé énormément d'artillerie — on parle de millions d'obus — à la Russie. Il est donc évident qu'il y a des répercussions quand on parle de guerre d'usure dans le Donbass. À un moment donné, sur le plan de l'artillerie, le ratio était de 10 pour 1 en faveur des Russes par rapport aux Ukrainiens. Aujourd'hui, il n'est plus que de 5 pour 1, mais il s'agit toujours d'un avantage considérable. Elle a envoyé des missiles balistiques. Pour la première fois... La menace nord-coréenne a toujours été une menace nucléaire, et voilà que la Corée du Nord envoie des missiles balistiques en Europe pour qu'un pays européen puisse en attaquer un autre. Dans un sens, il ne s'agit pas de la Troisième Guerre mondiale, mais nous sommes soudain confrontés à une guerre qui dépasse largement le continent européen.
    Il y a aussi ce qui se passe avec l'Iran — qui a aussi envoyé des missiles balistiques, comme on l'a confirmé —, et là où il y a un grand danger, c'est qu'on se demande, bien sûr, ce que l'Iran ou la Corée du Nord obtiennent en retour. Quel rôle joue la Russie dans ces régions, au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est, pour déstabiliser la région? Dans le cas de la Corée du Nord, il peut y avoir des répercussions sur les politiques de la Corée du Sud...
    Nous devons nous arrêter ici.
    ... et ses politiques par rapport à l'Ukraine.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Vous disposez de deux minutes et demie, madame Normandin.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
     Monsieur Arel, j'avais une autre question à vous poser, mais j'ai envie de vous laisser poursuivre sur ce qui semblait vous intéresser en ce qui concerne Donald Trump et la droite.
    Évidemment, le retour de Donald Trump serait très inquiétant, à la fois pour la démocratie américaine et, donc, pour nous tous, certainement au Canada, et pour l'OTAN, soit l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord. Je ne vais pas m'étendre sur la question.
    Cependant, je veux tout de même dire qu'au débat de la semaine dernière, on lui a demandé deux fois, directement, s'il allait défendre l'Ukraine, s'il était pour la défense de l'Ukraine. Il a refusé de répondre à cette question. C'est assez clair. Autrement dit, il faut mettre fin à la guerre selon les conditions russes. C'est clair. J. D. Vance en rajoute une couche avec son plan de paix, qui est essentiellement le plan russe. Encore une fois, il s'agit d'une espèce de capitulation de l'Ukraine, qui serait démilitarisée.
    Ce que je veux dire, c'est que, actuellement, au sein du Parti républicain, Donald Trump semble avoir une espèce d'impunité sur ce qu'il peut dire, du moins, sur ce qu'il désire faire sur à peu près toutes les questions, sans aucune critique de la part des républicains eux-mêmes, sauf sur une question. Là, c'est empirique. Au cours de la dernière année, la seule question importante qui a divisé le Parti républicain est l'aide à l'Ukraine. L'aide a été suspendue pendant six mois. Il y a eu une petite révolte politique à l'intérieur du Parti républicain. Toutefois, ce qui est remarquable, c'est que ce sont les républicains qui ont finalement fait renverser la vapeur, sans que Donald Trump, publiquement, dénonce l'accord.
    Sur la question même des missiles, à savoir si les États-Unis devraient permettre l'utilisation des missiles, les républicains sont divisés, et les responsables, les présidents des comités en matière de défense, de sécurité, d'affaires étrangères à la Chambre des représentants sont tous en faveur de permettre à l'Ukraine de mener des frappes. Si Donald Trump revient au pouvoir, ce sera évidemment le chaos, et l'incertitude. Il n'est pas improbable que la politique change sur cette question. C'est là-dessus que les Ukrainiens misent. M. Zelensky va rencontrer Kamala Harris la semaine prochaine, mais il va aussi rencontrer Donald Trump pour la première fois en personne. Ils ne se sont jamais rencontrés, sinon sur un coin de table, une fois, lors d'une rencontre de l'Organisation des Nations unies, il y a quelques années.
    C'est ma vision un petit peu alternative, basée sur la dynamique politique américaine.
    Là, je manque de temps pour parler de l'extrême droite. J'en parlerai peut-être une autre fois.
(0925)

[Traduction]

    Merci, madame Normandin.
    Madame Mathyssen, vous disposez de deux minutes et demie.
     Monsieur Arel, vous avez parlé du pouvoir de dissuasion.
    Bien sûr, nous le comprenons tous. En tant que parlementaire membre d'un comité sur la non-prolifération nucléaire, je trouve que c'est préoccupant. On se demande toujours où se situe l'équilibre. Dans tous les films d'action à suspense, c'est toujours le président qui, au final, dit: « non, je vais reculer, je ne vais pas appuyer sur le bouton ». Où en sommes-nous? Qui prend la décision au bout du compte? Le Canada a la possibilité de signer le Traité sur l'interdiction des armes nucléaires. Il ne l'a pas encore fait.
    Qui prend les décisions finales?
    S'il y a des preuves que la Russie menace d'aider l'Iran et la Corée du Nord à acquérir la bombe nucléaire d'un point de vue technologique, est‑ce suffisant pour que les États-Unis se disent qu'ils ne peuvent pas « provoquer » la Russie maintenant de peur qu'elle ne le fasse? Est‑ce là votre question?
     Bien entendu, je n'ai pas accès à des renseignements classifiés et je ne sais donc pas dans quelle mesure c'est déjà le cas — sauf que nous savons qu'au printemps dernier, la Russie a opposé son veto au renouvellement du comité de surveillance dirigé par le Conseil de sécurité pour appliquer des sanctions à l'égard de la Corée du Nord. Tout peut entrer et tout peut sortir, comme le montre l'envoi par la Corée du Nord de missiles balistiques à la Russie — ce qui constitue, bien entendu, une énorme violation des sanctions. Cependant, la Russie n'est plus là.
     Si l'escalade a déjà été provoquée, une réaction telle que « nous devons reculer » peut en fait entraîner une nouvelle escalade. Tel serait le contre-argument, soit que la Russie continuera à faire ce qu'elle fait déjà et, voyant une faiblesse, elle avancera. Encore une fois, elle utilise la menace du nucléaire à des fins d'agression, tandis que, tout au long de la guerre froide, la théorie de la dissuasion reposait essentiellement sur une approche défensive — c'était considéré comme une mesure de dernier recours: « si la sécurité de l'État est en jeu, nous pouvons recourir aux armes nucléaires ».
    Bien sûr, la Russie prétend que la guerre d'agression en Ukraine est une guerre d'autodéfense, ce que personne ne croit — certainement pas l'OTAN. C'est pourtant ce qu'elle affirme en reprenant la doctrine officielle de l'époque de l'OTAN, mais en la renversant.
    Merci, madame Mathyssen.
    Allez‑y, monsieur Allison.
    Est‑ce que je dispose de cinq minutes?
     Elles sont divisées entre vous et M. Bezan.
     D'accord. C'est très bien. Merci, monsieur le président.
     Je remercie nos témoins de leur présence.
    Je vais d'abord poursuivre sur cette lancée, mais j'aimerais que Mme Kepe participe à la discussion.
    Mardi, j'ai demandé aux témoins ce qu'ils pensaient des menaces nucléaires. L'ambassadrice a dit qu'elle n'était pas inquiète. Les généraux ont dit la même chose. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, madame Kepe.
     La Russie fait beaucoup de désinformation. S'agit‑il encore simplement de montrer les dents? Devrions-nous être préoccupés à un moment donné?
    Nous avons parlé de la circulation d'armes. Nous y reviendrons dans un instant, mais j'aimerais avoir votre avis sur la question.
    Je vais essayer d'être très brève cette fois‑ci.
    En ce qui concerne la menace nucléaire, pour être honnête, je ne suis pas une spécialiste du concept de dissuasion nucléaire. J'examine la question dans une perspective plus large d'analyse de la défense.
     Je ne vois pas de risque nucléaire très important à l'heure actuelle. Je pense qu'il y a beaucoup de discussions. La Russie aime utiliser la menace nucléaire de temps en temps pour influer sur les conversations, les opinions et les décisions, et nous en sommes à nouveau là.
     Je voudrais également mettre en garde... Il faut vraiment discuter de ce que c'est... On parle parfois de l'utilisation d'une arme nucléaire tactique comme moyen de dissuasion, mais il faut en fait réfléchir à ce que signifie l'utilisation d'une arme nucléaire tactique. Où serait-elle utilisée, comment la ferait‑on exploser, quel type de répercussions cela aurait‑il et à quel endroit?
    C'est alors que l'on comprend réellement s'il s'agit de dissuader, de provoquer une escalade ou non. Je pense que l'aspect que nous perdons de vue parfois, c'est ce que cela signifie concrètement.
(0930)
    Merci.
    Monsieur Arel, je vais revenir à vous parce que nous en avons parlé. Vous avez mentionné que, lorsque les pièces se déplacent sur l'échiquier, il y a lieu de s'inquiéter. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    La question porte‑t‑elle sur la prolifération ou sur l'utilisation d'armes nucléaires dites tactiques?
    Sur l'utilisation.
    C'est sur l'utilisation d'armes tactiques? D'accord.
     Il y a ici une composante militaire et une composante qui concerne l'alliance. En ce qui a trait à l'aspect militaire, on ne voit pas très bien ce que la Russie gagnerait sur le plan militaire en utilisant une arme nucléaire tactique dans le contexte de la situation sur le champ de bataille.
    Briser le tabou pour la première fois depuis 1945 aurait d'énormes répercussions sur le plan politique. Elles seraient énormes dans la mesure où la réaction de l'OTAN... Radoslaw Sikorski a très clairement indiqué ce que l'OTAN ferait. Pour l'essentiel, elle mènerait une attaque conventionnelle massive contre toute position russe sur le territoire ukrainien. Par ailleurs, il n'y a pas beaucoup d'alliances russes. La Russie est relativement isolée.
    Depuis le début de la guerre, s'il y a une chose que la Chine a dite qui n'est pas favorable à la Russie, c'est « ne le faites pas ». Elle l'a dit publiquement et cela figure dans son plan de paix qui date de février 2023. Il s'agit de ne pas utiliser d'armes nucléaires. Bien sûr, le langage diplomatique employé est différent, mais le message était très clair.
     On peut se demander quel est le gain militaire. Le coût militaire pourrait être énorme en ce qui concerne l'OTAN. Le coût diplomatique pour cette alliance et, par conséquent, pour les chaînes d'approvisionnement — beaucoup d'éléments à double usage proviennent de Chine —, pourrait être trop élevé pour les Russes.
     C'est ce que je crois comprendre.
    Merci.
    Allez‑y.
    Je vais prendre la dernière minute de M. Allison.
    Monsieur Arel, vous avez dit que l'artillerie russe était supérieure à celle de tous les pays de l'OTAN réunis. Nous savons également que la Corée du Nord fournit des munitions à la Russie et que l'Iran lui fournit des drones et des missiles.
    À quel point les alliés de l'OTAN sont-ils en retard et comment le Canada peut‑il contribuer davantage à accroître la production d'obus d'artillerie et de roquettes?
    La différence est considérable.
    Avez-vous des chiffres? Pouvez-vous le quantifier?
     Avec tout le respect que je vous dois, je ne vois aucun changement dans la politique canadienne à cet égard — aucun.
    Il y a eu des changements en Europe, mais il faut du temps pour relancer ce type de production. C'était en quelque sorte le bénéfice de la paix de la fin de la guerre froide. L'OTAN s'est préparée à une guerre qui n'a jamais eu lieu, sauf qu'elle s'est produite 25 ans plus tard — une guerre conventionnelle de haute intensité — sans qu'on ait ce type de capacité.
     La coalition de l'OTAN n'a jamais pensé qu'une guerre qui ressemble à la Seconde Guerre mondiale dans la manière dont elle est menée sur le terrain — à l'exception de l'utilisation de drones — se reproduirait.
    Ce que nous voyons en Europe, c'est une variation dans la volonté politique de s'engager réellement à moyen et à long terme, parce qu'à court terme, il est vraiment difficile d'égaler les capacités remarquables — nous devons le dire — de la production russe.
    Nous allons devoir en rester là.
    Nous terminons la série de questions avec M. Powlowski.
    Vous avez fait une déclaration intéressante. Je ne l'ai peut-être pas bien prise en note, mais vous avez parlé du « moment où l'armée russe se rebellera » ou peut-être avez-vous dit « se rebelleront-ils? ». On touche là au cœur de la question. Qu'est‑ce qui indique qu'une telle chose pourrait se produire? La marche de Prigojine sur Moscou, qui a été une véritable surprise, était en fait une mutinerie, mais la force Wagner a été dissoute.
    Il est certain que le commandement militaire russe a fait preuve d'un mépris total pour ses troupes de première ligne en ne cessant de les jeter dans un hachoir à viande, vague après vague. Il a été question de bloquer des troupes du côté russe, en empêchant les troupes russes de se retirer. Il semble y avoir de bonnes raisons pour que les troupes russes se rebellent.
    Selon vous, dans quelle mesure est‑ce possible et quels sont les éléments qui permettent de penser qu'une telle chose pourrait se produire, en dehors de ce qui s'est passé avec le groupe Wagner?
(0935)
    Je pense que le groupe Wagner est un bon exemple. Le défi que posent les relations entre les civils et les militaires est que nous savons très rarement, juste avant qu'un événement ne se produise, qu'il va se produire. Lorsqu'il y a une tentative de coup d'État, on ne sait pas vraiment qui va gagner parce qu'on ne sait pas qui va tirer et qui ne veut pas tirer. En ce qui concerne les mutineries, le problème est que l'armée russe est consciente de la menace et qu'elle a donc mis en place toutes sortes de systèmes pour s'assurer que cela ne se produise pas.
     Encore une fois, comme vous l'avez souligné, les Russes mènent cette guerre d'une manière incroyablement brutale pour leur propre camp. Ils ne fournissent pas à leurs soldats des soins médicaux adéquats, de sorte que les ratios qu'on a l'habitude de voir entre les morts et les blessés au combat sont bien différents dans ce cas, parce que les Russes ne prennent pas soin de leurs blessés. Lorsqu'on envoie des dizaines de milliers, des centaines de milliers de personnes dans cet environnement, il arrive un moment où l'armée craque.
     Dans quelle mesure? Ce n'est pas clair. Plus la situation dure, plus c'est probable, simplement à cause des tensions qui s'accumulent. Plus les gens comprennent qu'on les induit en erreur, qu'on les mène mal au combat, que leurs risques... Pour certains, la question est de savoir s'il vaut mieux courir vers les Ukrainiens ou retourner son fusil contre ses compagnons d'armes. On a déjà rapporté bien des cas où des chars russes sont passés sur des commandants russes — des choses de cette nature — et il y a donc eu des actes de moindre envergure. Le problème, dans toute mutinerie, c'est la mobilisation collective. Comment faire pour que tout le monde agisse en même temps? Nous l'avons vu dans d'autres guerres.
    Je ne peux pas vous dire que cela va se produire le 15 mars ou que je suis tout à fait sûr que cela se produira au cours de l'année à venir. C'est juste qu'il s'agit d'une menace avec laquelle les Russes doivent composer et cela les distrait des lignes de front s'ils doivent envoyer des troupes derrière les lignes de front pour menacer de tirer sur les troupes devant. Cela complique la conduite de la guerre.
    Vous avez parlé du ratio normal entre les blessés et les morts et vous avez indiqué que les chiffres étaient différents à cet égard dans le conflit actuel du côté russe. Pouvez-vous me dire quels sont les chiffres normaux, quels sont les chiffres actuels et d'où viennent ces chiffres?
    Je ne peux pas me prononcer sur les détails exacts, mais je dirai que, généralement, pour chaque personne tuée au combat, trois sont blessées. Les Américains et nos alliés en Afghanistan ont été très bons sur le plan des soins médicaux, de sorte que le ratio est de 1 pour 10. Pour chaque personne tuée, il y a 10 blessés. Je pense qu'à un moment donné, les statistiques que nous recevions du côté russe — ce que nous déduisions de ce que nous pouvions voir — correspondaient à un ratio de 1 pour 1, c'est‑à‑dire que pour chaque blessé, un Russe était tué.
    Encore une fois, la vérité est la première victime de la guerre et nous ne savons donc pas vraiment ce qu'il en est. Cependant, paradoxalement, nous avons une meilleure idée des pertes russes que des pertes ukrainiennes.
    Je souligne une autre chose que vous avez dite, monsieur Saideman, et que j'ai trouvée un peu étonnante. Vous avez indiqué que notre déploiement de 1 600 soldats en Lettonie n'était pas viable. Notre pays compte 40 millions d'habitants. Je me dis alors « quoi? » Avec 1 600 personnes, nous n'avons pas les ressources qu'il faut? Vous avez mentionné la possibilité de faire venir les familles et le fait qu'il ne s'agit pas d'une affectation attrayante.
     Voulez-vous en dire plus sur notre état de préparation militaire si nous ne pouvons pas maintenir 1 600 militaires à l'étranger?
     C'est une très bonne question, mais, malheureusement, il vous a donné sept secondes pour y répondre. Vous pourriez peut-être l'intégrer dans une autre réponse, car je pense que la question intéresse tout le monde dans la salle.
    C'est ce qui conclut notre deuxième série de questions.
    Je sais que l'on souhaite vivement présenter des motions. Nous disposons d'environ 50 minutes. Nous pouvons faire un autre tour de 25 minutes et réserver les 25 dernières aux motions. Est‑ce une proposition intéressante?
    Nous terminons à 10 h 15, n'est‑ce pas?
    Je suis désolé, mais oui, nous terminons à 10 h 15. D'accord.
    Je suppose que l'on souhaite toujours vivement présenter des motions, alors pouvons-nous réduire la durée de la dernière série de questions avec des interventions de trois minutes?
(0940)
    Trois minutes...? Bon sang.
    Vous pouvez parler rapidement.
     Je ne veux pas imposer quoi que ce soit aux témoins. C'est pourquoi nous essayons de gérer le temps ici. Je sais que vous aimez tous entendre la démocratie s'exprimer dans le cadre des réunions de comités, mais ce n'est pas tout à fait édifiant.
    Allons‑y avec des interventions de trois minutes.
     Monsieur le président, c'est trois minutes, y compris pour le Bloc...
    Quoi donc?
    ... et le NPD? Ou bien ont-ils une minute chacun?
    Ils auront une minute chacun, oui.
    Pensez-vous pouvoir y arriver? D'accord.
     Monsieur Bezan, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Saideman, vous avez parlé de prendre ce que nous avons, comme les chars et les véhicules blindés, et de les donner à l'Ukraine. En mars 2022, après l'éclatement de la guerre ouverte et l'invasion à grande échelle, les conservateurs ont demandé au gouvernement de faire don de nos véhicules blindés légers excédentaires. Nous avons alors inscrit une question au Feuilleton. Le gouvernement a déclaré qu'il en avait 62 qui étaient réparables, et qu'il faudrait 220 jours pour les passer en revue et les expédier là‑bas. Rien de cela n'est arrivé. Maintenant, si je ne m'abuse, il annonce l'envoi de 60 véhicules blindés légers qui serviront à fournir des pièces de rechange.
    N'aurait‑il pas été préférable de les envoyer il y a deux ans, lorsqu'ils étaient encore opérationnels, plutôt que de les laisser s'étioler jusqu'à ce qu'ils soient complètement inutilisables en situation de combat? N'aurait‑il pas été préférable de faire cela que de se résigner à les envoyer seulement pour fournir des pièces de rechange pour l'équipement que les Ukrainiens ont déjà? Cela aurait sauvé des vies, non?
    Je ne peux pas parler des particularités de ces 62 véhicules blindés légers. Il est évident qu'il vaut mieux que les Ukrainiens en aient davantage entre les mains le plus tôt possible.
    Vous avez évoqué l'utilisation des vieux chars d'assaut que nous avons. Je pense qu'il n'en reste plus que 56 qui peuvent être utilisés aux fins d'entraînement. Beaucoup d'entre eux ne sont plus adaptés aux besoins. Vous dites qu'il faut les donner, les laisser s'en servir, mais vous ne voyez pas d'un bon œil que le Canada se débarrasse de ses chars — est‑ce bien ce que vous dites? Une chose que nous avons apprise au sujet de la guerre en Ukraine, c'est que c'en est une de chars.
    Je pense que certains de nos alliés ont décidé qu'il valait mieux les utiliser pour combattre les Russes maintenant que pour les affronter plus tard. L'idée de les donner aux Ukrainiens pour qu'ils gagnent la guerre avec la Russie maintenant est préférable à celle d'attendre cinq ou dix ans et d'être contraints à les utiliser en Lettonie. C'est un calcul politique difficile, mais c'est quelque chose que nous devrions prendre au sérieux.
    Je ne pense pas que cela se produira, parce que c'est une décision risquée et qu'il nous serait difficile d'entraîner nos opérateurs de chars. N'oublions pas que nos militaires ont plus d'une fois réévalué la décision d'avoir des chars d'assaut ou de ne pas en avoir. Si nos alliés ont des chars, est‑il si important que nous en ayons? Cela dépend de la confiance que nous accordons à nos alliés. Les alliés peuvent être plus ou moins fiables. J'ai écrit un livre à ce sujet. Tant que nous nous battons aux côtés des Américains, tout va bien. Si nous nous battons aux côtés des Italiens...
    Le Canada a toujours eu la capacité de déployer un ensemble complet de blindés, en même temps que son armée. C'est la même chose pour les obusiers, les M777. Ne devrions-nous pas les remplacer, envoyer le reste en Ukraine et investir dans de nouveaux obusiers pour le Canada?
    Le problème, c'est que tout le monde a compris à quel point ces armes sont utiles. Comme vous le savez assurément, il faut du temps pour se procurer des équipements. Combien de temps cela prendrait‑il pour nous rééquiper à partir du moment où nous aurons tout expédié là‑bas? Je comprends que l'armée ne veut pas tout expédier, puis attendre 10 ans pour que les nouveaux chars et les nouveaux obusiers arrivent. Le problème, ce sont les chaînes de production. Tout le monde veut la même chose. Même si nous prenons des décisions rapides, le matériel n'est pas là à attendre sur une étagère comme s'il y avait des surplus.
    Merci, monsieur Bezan.
    Monsieur Collins, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Saideman, je voudrais reprendre là où Mme Mathyssen s'est arrêtée lorsqu'elle soulevait certaines questions concernant la désinformation.
     J'ai été fasciné par vos observations au sujet de Trump, et je regarde avec une certaine fascination ce qui se passe dans le monde du côté de la désinformation.
    Lors de ses apparitions ici — assis dans le même fauteuil que vous, monsieur —, le général à la retraite Eyre a maintes fois mis notre comité en garde contre la désinformation et l'effet qu'elle a sur nos institutions. Cela touche bien sûr les Forces armées canadiennes, mais aussi nos institutions démocratiques et celles de nos alliés.
    La Russie s'est fait entendre et s'est vantée publiquement de ses activités à ce chapitre. Margarita Simonyan, du réseau de télévision RT, a parlé du succès de ces campagnes. Bien sûr, le ministère de la Justice a révélé la semaine dernière que trois personnalités de droite très influentes sur les médias sociaux avaient reçu 10 millions de dollars de la Russie.
    Cela dit, et compte tenu de tout ce que vous avez mentionné sur les propos soutenus par le vice-président désigné Vance et l'ancien président Trump, cette désinformation et ces campagnes de désinformation ont un impact. Elles ont une incidence sur l'opinion publique, et l'opinion publique pousse les personnages politiques à prendre des décisions différentes en conséquence. C'est ce que nous voyons avec MAGA. Nous le voyons avec le mouvement « Make Canada Great Again » — redonnons sa grandeur au Canada — du chef de l’opposition officielle, qui a retiré son soutien à l'Ukraine, et nous l'avons vu lors des élections européennes.
    Par conséquent, si l'ancien président Trump est élu et que l'OTAN retire son soutien à cause, en partie, de ces campagnes de désinformation, qu'allons-nous faire pour continuer à lutter contre ce que nous savons être en train de se produire?
    Nous n'avons pas beaucoup parlé de cela, même si les renseignements que le ministère de la Justice a divulgués la semaine dernière étaient très révélateurs. Comment, en tant que société et en tant que gouvernement, gérons-nous ces efforts visant à tromper, sachant qu'ils ont une incidence sur l'opinion publique et qu'ils influencent les représentants politiques et leur font prendre des décisions insensées?
(0945)
    C'est un problème très complexe. Nous le savons, non pas depuis une semaine, mais depuis huit ans, depuis l'enquête sur la campagne de Trump en 2016. Nous le savons maintenant à propos du Brexit: les Russes ont exercé une influence.
    Encore une fois, comme je l'ai dit, il faut que les médias soient plus clairs sur l'origine de l'information qu'ils diffusent et qu'ils fassent plus attention à ne pas répéter des faussetés. Je suis aussi coupable que n'importe qui lorsque je partage quelque chose que j'ai vu sur les médias sociaux sans vraiment prendre le temps de l'examiner. Nous devons faire preuve d'une meilleure discipline pour cerner la nature de ces renseignements et la manière dont nous les rapportons.
    Pour vous donner un exemple, l'histoire des immigrants haïtiens est absolument sans fondement. Pourtant, le simple fait d'en parler contribue à nourrir le mensonge. Comment pouvons-nous parler de ce qui se passe et sensibiliser le public à ce sujet afin de faire déraper ces campagnes de désinformation?
    Le Canada a investi dans des universitaires qui étudient cette question. De bons amis à moi sont des experts en matière de désinformation. Ils ont fait l'objet de poursuites judiciaires de la part de l'extrême droite, qui cherchait à les faire taire. La bonne nouvelle à propos de ce qui s'est passé la semaine dernière, c'est que ces poursuites seront plus difficiles à gagner pour les personnes qui les ont initiées, parce qu'elles peuvent dire que les personnes exactes qui ont été identifiées dans l'analyse réseau de Twitter...
    Nous devons nous arrêter là.
    Cet élément de l'actualité de la semaine dernière contribue à prouver que toutes les choses que nous avons dites jusqu'à présent sont vraies.
    Merci, monsieur Collins.
    Ne croyez rien de ce qu'on dit sur les chiens et les chats.
    Madame Normandin, vous avez une minute.

[Français]

     Monsieur Arel, quels sont encore les freins à l'accession éventuelle de l'Ukraine à l'OTAN? Vous avez déjà mentionné, entre autres, que le système judiciaire était à revoir, que l'Ukraine était une démocratie, mais pas parfaitement libérale.
    Quelles sont les choses à surveiller dans un avenir d'après-guerre?
     D'abord, l'accession de l'Ukraine à l'OTAN et à l'Union européenne se fait en parallèle. Ensuite, la faiblesse de l'État de droit est le talon d'Achille de l'Ukraine; c'est le manque d'indépendance institutionnelle de la cour de justice.
    Pour ce qui est de la question de la corruption, avant la guerre de 2022, les alliés ont travaillé très fort pour aider les Ukrainiens à mettre en place des systèmes anticorruption. On disait que comme le système judiciaire était corrompu, il fallait créer un système judiciaire parallèle anticorruption pour empêcher que tout soit couvert.
     Il y a eu des progrès. Il faut dire que le système politique est un peu en suspension depuis deux ou trois ans en Ukraine, à cause de la guerre. Or, ce qui est assez remarquable, c'est que les oligarques, ces gens très puissants qui corrodaient un peu le système, ont perdu la plupart de leurs pouvoirs. Quelque chose de fondamental a donc été transformé.
    Cela dit, ultimement, c'est une décision politique qui doit être prise. Ce n'est pas une décision où il suffit de cocher toutes les cases.

[Traduction]

    Merci, madame Normandin.
    Monsieur Boulerice, vous avez une minute.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question à la fois brève et complexe à vous poser, alors il sera peut-être compliqué d'y répondre en une minute.
    Depuis l'invasion illégale de l'Ukraine par Vladimir Poutine, beaucoup d'efforts ont été déployés sur la scène internationale, non seulement pour isoler le régime de Poutine, mais également pour l'exclure de certaines entités internationales.
    Selon vous, cela a-t-il eu des effets? Que pourrait-on faire de plus pour l'empêcher, à plus long terme, de poursuivre la guerre et d'en faire un paria sur la scène internationale?
(0950)
    Cet été, nous avons eu un symbole démontrant à quel point la Russie est un paria: elle a été exclue des Jeux olympiques, ce qui est un événement extraordinaire. Un deuxième pays, le Bélarus, qui est essentiellement un vassal de la Russie, a aussi été complètement exclu. C'était symbolique, mais cela a fait mal en Russie.
    La décision d'isoler la Russie la force à se trouver des alliés qui, eux-mêmes, sont déjà isolés. La Chine essaie de jouer un peu des deux côtés et la Turquie, membre de l'OTAN, fait de même. Ce qui est remarquable, c'est que la Russie a très peu d'alliés, mais elle en a deux qui sont évidemment très dangereux et qui ont décidé de l'aider directement.

[Traduction]

    Je vous remercie.
     Merci, monsieur Boulerice.
    Monsieur Bezan, vous avez trois minutes.
    Merci.
    Je vais juste poser une question à notre spécialiste de la RAND, Mme Kepe.
    Vous êtes une spécialiste des pays baltes, et nous voyons tous ces esprits qui s'échauffent. Nous parlons de la Russie, mais nous savons aussi que la Biélorussie a maintenant reçu des armes nucléaires de la Russie et qu'elle effectue des exercices Zapad de manière intensive avec les forces russes. De même, je crois que des forces cubaines ont participé l'année dernière à ces exercices le long des frontières lettone et polonaise.
    Quelle est, selon vous, l'ampleur de la menace que pourrait exercer la Biélorussie en tant que mandataire de la Russie afin de saper la menace à la fois dans les pays baltes et en Ukraine?
    En plus des exemples que vous avez mentionnés, un autre facteur très important est, essentiellement, la tendance que nous voyons d'une intégration de plus en plus étroite des armées biélorusse et russe, ce qui est au reste soutenu par des accords officiels. Du point de vue de la planification de la défense et de l'évaluation des menaces, je considérerais la Biélorussie et la Russie ensemble comme une seule et même menace.
    En réalité, nous considérons qu'il s'agit d'une menace du point de vue militaire conventionnel, mais aussi d'une sorte de menace coopérative similaire du point de vue des menaces hybrides. Nous voyons cela avec les exercices, avec l'intégration des capacités militaires et avec la coopération. Nous voyons cela avec les menaces hybrides et les migrations forcées qui se tiennent en territoire biélorusse.
    En ce qui concerne le drone russe qui a fini en Lettonie, je suis convaincu que les Russes affirment: « Oh, il a juste dévié de sa trajectoire ». Pensez-vous que cela a peut-être été fait accidentellement dans le but de tester la réponse des alliés de l'OTAN, et en particulier la position avancée renforcée que le Canada dirige en Lettonie?
    Je n'ai vu aucune déclaration russe sur ce qui s'est passé exactement. L'enquête est toujours en cours. Même les responsables baltes ont des interprétations différentes de ce qui est vraiment arrivé. Je pense que personne ne croit vraiment que c'était intentionnel. Selon certains points de vue, il est possible que le drone fût destiné à l'Ukraine et qu'il y a eu un très gros problème de ciblage. C'est ce qui expliquerait pourquoi il s'est écrasé en Lettonie ou pourquoi il y a atterri.
    Disons que je vais attendre les résultats de l'enquête avant de me prononcer. C'était peut-être un défaut de fonctionnement.
    Or, comme on ne peut pas laisser une bonne crise nous filer entre les doigts, la Russie en profite pour voir ce qui se passe et quelles sont les réactions sur le plan politique, mais aussi pour observer les tactiques et les procédures que les pays baltes et l'OTAN utilisent pour répondre à ces menaces.
    Merci, monsieur Bezan.
    Madame Lalonde, vous avez trois minutes.
     Merci à tous nos témoins. Je dois dire que c'est extrêmement pertinent et instructif. J'aimerais avoir vos points de vue sur quelque chose, et je ne vais pas adresser ma question à quelqu'un en particulier. Elle s'adresse peut-être à vous trois.
    L'ambassadrice de l'Ukraine était présente lors de la dernière réunion du Comité, et lorsque nous l'avons interrogée, elle a parlé d'une voie vers l'adhésion à l'OTAN. C'est ce que l'Ukraine demande à tous nos pays alliés.
    Pouvez-vous nous dire comment vous envisagez l'avenir à cet égard dans l'éventualité d'un retour de Trump à la présidence?
    J'aimerais bien vous entendre tous les trois.
(0955)
    Le problème, c'est que l'article 5 signifie qu'une attaque contre l'un équivaut à une attaque contre tous, de sorte que la position de l'OTAN a été de ne pas autoriser l'admission de pays qui sont présentement en guerre.
    Lors des processus d'adhésion des années 1990 et du début des années 2000, des pressions ont été exercées sur tous les candidats pour qu'ils règlent leurs différends frontaliers. Ce qui se passe actuellement est bien plus qu'un simple différend frontalier. La guerre doit cesser avant que l'Ukraine puisse devenir membre de l'OTAN. Lorsque cela se produira, je pense que le chemin sera très court, car nous voulons éviter une nouvelle guerre en Ukraine. Il y a toutes les autres conditions, mais, comme l'a suggéré mon collègue, les conditions elles-mêmes n'ont pas vraiment d'importance. Sur papier, tout le processus consiste à faire en sorte que l'alliance puisse parvenir à un consensus. Tant que la guerre n'est pas terminée, il n'y aura pas de consensus.
    Nous oublions que la première mise en accusation de Trump concernait la tentative de corrompre Zelensky pour obtenir des renseignements sur Biden. Je ne pense donc pas qu'un gouvernement dirigé par Trump accepterait l'adhésion de l'Ukraine. Encore une fois, nous avons besoin d'un consensus. Si les États-Unis s'y refusent, il n'y a pas de consensus.

[Français]

     D'accord.
    Puis-je répondre en français?
    Je vous en prie.
     D'accord. Merci.
    Ce n'est pas tellement différent de ce qu'a dit Stephen Saideman.
    Le défi n'est cependant pas lié à l'adhésion à l'OTAN, mais que cette dernière soit capable de défendre l'Ukraine. Il s'agit des fameuses garanties de sécurité. Il faut d'abord en arriver à une situation où la Russie ne pourra plus attaquer l'Ukraine.
    Dans les négociations, qui sont toujours dans l'air, cela achoppe toujours sur cette question. C'était la même question en mars 2022, à Istanbul.
    Quand on parle de garanties de sécurité, qu'est-ce que cela veut dire? Cela signifie qu'on ne peut plus être attaqué par la Russie. Elle ne peut plus attaquer non pas parce qu'on sera défendu par les soldats américains, mais parce qu'on sera soi-même déjà équipé par l'OTAN, entre autres, et par sa propre industrie, faisant ainsi en sorte que les conséquences d'une attaque sont trop périlleuses pour la Russie. C'est l'étape la plus difficile à franchir.
    Une fois que ce sera fait, la question qui suivra, à savoir si l'Ukraine pourra se joindre à l'OTAN, deviendra, selon moi, moins difficile à régler.

[Traduction]

    Merci, madame Lalonde. Malheureusement, cela met fin à vos trois minutes. Je veux laisser quelques minutes pour que nous puissions parler de motions. La main de M. Bezan me fait des signes dans la brise.
    Je tiens à vous remercier tous, mais avant de vous donner congé, je vais peut-être me permettre une question à M. Saideman.
    Il me semble qu'après le 11 septembre, les Américains ont invoqué l'article 5 de l'OTAN. Est‑ce le cas?
    En fait, c'est le Canada et ses alliés qui ont imposé l'article 5 aux Américains. À l'époque, l'administration américaine était ambivalente quant à l'invocation de l'article 5. Ce sont les Canadiens et les autres alliés de l'OTAN qui ont invoqué l'article 5 pour la première fois — la seule fois.
    C'est très intéressant. Il semble que ce soit un précédent historique pertinent.
    Sur ce, je tiens à nouveau à remercier chacun de vous de sa contribution. Nous avons appris beaucoup de choses. J'aimerais qu'à un moment donné, la question de M. Powlowski reçoive une réponse.
    Je vais vous donner congé afin de permettre au bras droit de ce pauvre vieux M. Bezan de se reposer un peu.
    Nous allons examiner l'une de vos motions.
    Merci, monsieur le président.
    Encore une fois, merci aux témoins d'avoir été là et de nous avoir prêté main-forte grâce à leurs analyses concernant la menace.
    J'ai donné avis de la motion suivante la semaine dernière, le vendredi 13 septembre:
Que le comité invite le ministre de la Défense nationale à comparaître devant le comité pendant au moins 2 heures, dans les 14 jours suivant l’adoption de la présente motion, relativement à ses priorités pour le retour du Parlement et à son mandat.
    Je pense que nous devrions savoir quelles sont les priorités du ministre au moment où nous revenons dans ce qui pourrait être les dernières semaines ou les derniers mois de cette législature. Nous venons d'entendre parler de l'agression en cours contre l'OTAN et l'Ukraine, et du fait que nous devons soutenir l'une et l'autre. Nous savons également que nos forces armées canadiennes sont toujours aux prises avec une crise en matière de recrutement. Nous savons que les achats continuent d'être à la traîne. C'est un échec de la part du gouvernement.
    Nous devons nous assurer que le ministre nous dise quelles sont ses priorités.
     Madame Lalonde, allez‑y.
    Je remercie mon collègue d'avoir déposé cette motion. Je pense que nous sommes d'accord sur le principe. Mon seul...
    D'après ce que j'ai entendu de vous tous, et certainement de la part du ministre Blair... Hier, notre ministre de la Défense nationale s'est montré très véhément lorsqu'il a présenté la deuxième lecture du projet de loi C‑66, affirmant qu'il s'agissait d'une priorité. Nous devons trouver des solutions qui nous permettront collectivement... et je pense que nous sommes parvenus, je l'espère, à un consensus pour amener le projet de loi C‑66 ici le plus vite possible et pour continuer à soutenir sa progression jusqu'à la sanction royale.
    De ce fait, si M. Bezan est d'accord avec un amendement favorable qui consisterait à remplacer les mots « au moins deux heures » par les mots « au moins une heure et une heure avec les fonctionnaires », je pense que nous serions disposés à le laisser passer.
(1000)
    C'est un amendement à la motion.
    Ce n'est pas favorable.
    Apparemment, ce n'est pas favorable.
    Je vais parler de l'amendement.
    Y a‑t‑il d'autres intervenants sur l'amendement ou la motion?
    Allez‑y, monsieur Bezan.
    La raison pour laquelle nous voulons que le ministre comparaisse pendant deux heures, c'est que nous parlons des priorités de son leadership en tant que ministre. Je ne crois pas que la présence des représentants du gouvernement reflète les priorités politiques du ministre et du gouvernement, alors il faut que ce soit pendant deux heures.
    Je suis certain que le ministre sera ici lorsque nous parlerons du projet de loi C‑66, mais il sera question du projet de loi. Notre comité sera saisi de ce projet de loi lorsque nous l'aurons reçu. Il sera traité en priorité conformément aux exigences du Bosc et Gagnon en matière de procédure et d'affaires de la Chambre. Nous devons nous en occuper. Nous aurons amplement le temps de parler du projet de loi C‑66 lorsque nous l'aurons reçu de la Chambre.
    Je dirais simplement que nous avons besoin de la présence du ministre pendant deux heures parce que nous avons beaucoup de questions au sujet de l'Ukraine. Nous avons beaucoup de questions au sujet de l'approvisionnement. Nous avons beaucoup de questions sur le logement. Nous avons beaucoup de questions sur le recrutement et le maintien en poste. Il a annoncé les sous-marins. Pourquoi faut‑il autant de temps pour les obtenir?
    Nous avons également entendu dire qu'un certain nombre de questions inscrites au Feuilleton ont reçu une réponse, et nous constatons maintenant que le radar transhorizon a été repoussé jusqu'en 2040. Pourtant, d'ici un an ou deux, la constellation radar que nous avons dans le Nord et le Système d'alerte du Nord sera désuète.
    Ce que nous avons besoin d'entendre de la part du ministre, c'est comment il va protéger le Canada. Comment pourra-t‑il être un allié fiable? Que fait‑il pour combler les lacunes dans les forces armées? Cela prend au moins deux heures.
    Encore une fois, je ne veux pas paraître trop partisane ou politique, mais je suis très choquée que ce député particulier demande au ministre de venir parler parce que, quand on regarde certains des bilans des conservateurs en matière de dépenses de défense, ils sont tombés sous la barre du 1 %.
    Je tiens simplement à rappeler au député qu'il a voté contre une augmentation de salaire. Il a voté contre des mesures de soutien pour...
    Nous avons voté contre la confiance envers ce gouvernement, et nous allons continuer à voter contre la confiance envers ce gouvernement.
    Pour ma part, je maintiendrais ma décision. Je pense que nous devrions faire venir le ministre. Il a toujours été extrêmement sensible à nos besoins. Bien qu'il ait un très gros travail à faire en ce moment, il est venu à chaque fois.
    Nous suggérons simplement une heure plus une heure.
    Il y a débat?
    Le premier vote porte sur l'amendement.
    (L'amendement est adopté. [Voir le Procès-verbal])
    (La motion modifiée est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Nous passons à la motion de Mme Normandin, qui est recevable et opportune.
    Madame Normandin.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    La motion a été lue mardi, après un avis de motion. Je ne la relirai pas puisqu'elle a été distribuée à l'ensemble des députés.
    Elle vise à faire témoigner, entre autres, celui qui était le ministre de la Défense nationale à l'époque de l'évacuation de Kaboul, en 2021. Nous avons appris par le Globe and Mail que le ministre aurait donné ce qu'il a appelé des directives qui ne semblaient pas coercitives, selon lui, donnant la priorité, à l'évacuation de ressortissants de la communauté afghane de confession sikhe, au détriment de Canadiens et d'alliés des militaires canadiens, notamment des interprètes, laissant ces derniers derrière puisque les ressources pour pouvoir les évacuer étaient extrêmement limitées. Cela provoque, au mieux, des questionnements, mais surtout de l'indignation.
    Nous avons suggéré une liste de témoins pour discuter de ce dossier. Elle comprend l'actuel ministre de la Défense nationale, car nous aimerions comprendre comment les directives adressées aux forces spéciales dans des situations similaires sont envoyées et comment le ministre considère qu'elles sont perçues. Nous avons aussi inclus la ministre des Affaires étrangères, puisque, à l'époque, des listes d'autres possibilités d'évacuation prioritaire avaient été rédigées et soumises. Nous aimerions savoir quels étaient les autres groupes dont l'évacuation était prioritaire et, ultimement, connaître de quelle façon l'ancien ministre les a analysées, le cas échéant.
    Nous aimerions évidemment recevoir l'ancien ministre de la Défense pendant deux heures pour qu'il puisse s'expliquer sur les considérations prises en compte pour aboutir à cette décision par rapport à d'autres considérations concernant des groupes prioritaires, mais aussi relativement aux Canadiens et aux alliés des militaires canadiens en Afghanistan. Nous aimerions savoir quelle était sa lecture de la limitation des ressources pour évacuer tout le monde.
    Le chef d'état-major au moment des faits, soit Jonathan Vance, fait aussi partie de la liste; nous voulons savoir, entre autres, de quelle façon la directive a été reçue. Évidemment, d'autres questions suivront.
    Il s'agit donc de l'ensemble des témoins jugés nécessaires pour procéder à l'étude adéquate de ce dossier. Voilà donc l'essence de la motion.
(1005)

[Traduction]

    Y a‑t‑il un débat?
    Monsieur Bezan.
    Nous avons un amendement à la motion. Je crois qu'il a été distribué.
    Pas encore, mais cela ne saurait tarder.
     Nous l'avons imprimé. Assurez-vous que tout le monde le reçoive ici.
    Ce que nous suggérons est là. Les éléments surlignés sont des ajouts. Ce qui est barré doit être supprimé. Une fois que tout le monde l'aura en main, je parlerai de cette motion, car les nouvelles qui circulent sont troublantes. Des travaux ont également été menés à ce sujet au cours de la dernière partie de cette législature.

[Français]

     Monsieur le président, je me permets d'intervenir parce que je vois que les versions française et anglaise de la motion ne sont pas identiques. En anglais, une partie de la motion est biffée, mais il n'y a pas l'équivalent en français.

[Traduction]

    D'accord. Permettez-moi d'en parler, et les interprètes la demandent également.
    Pouvons-nous en donner une copie aux interprètes?

[Français]

    Si vous regardez bien, madame Normandin, ils ont simplement retiré cette partie.

[Traduction]

    Tout le monde est à la même page?
    Allez‑y, monsieur Bezan.
    Le premier amendement consisterait à ajouter « spéciale » après « opération d'évacuation », puis à supprimer ce qui suit « août 2021 » jusqu'à la fin de « Afghans alliés ». Supprimez cela et ajoutez « que le rapport 1 du Comité spécial sur l'Afghanistan Honorer l'héritage du Canada en Afghanistan: Répondre à la crise humanitaire et amener les gens en lieu sûr a été déposé en juin 2022, suivi d'une réponse du gouvernement déposée en octobre 2022 ».
    Puis, dans le paragraphe suivant, après « les questions du comité », il faut ajouter « sur la mise en œuvre des recommandations formulées dans le rapport susmentionné et des nouvelles informations qui ont été révélées après l'étude ».
    Voilà pour les ajouts. Nous supprimerions tout ce qui se trouve entre « 21 août » et « Afghans alliés ».
    Souhaitez-vous débattre de la motion?
    Madame Normandin.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Pour ma part, le fait qu'on enlève ce qui semblait être presque le mode opératoire du ministre sur l'évacuation me rend mal à l'aise. Ce que nous comprenons de l'article du Globe and Mail, c'est qu'une communauté spécifique était visée de façon prioritaire pour l'évacuation au détriment d'autres communautés. C'est cela qui a mené au fait qu'on était sur le point d'abandonner des Canadiens et des alliés afghans. Je pense qu'on est en train d'essayer de noyer un peu le poisson. Je serais curieuse d'entendre les conservateurs sur la raison pour laquelle ils souhaitent enlever spécifiquement ce qui semblait être la motivation du ministre à l'époque des faits.
(1010)

[Traduction]

    Monsieur Bezan, la parole est à vous.
    Je dis que c'est redondant puisque vous faites référence, dans la première partie du préambule, à l'article du Globe and Mail, et qu'il s'agissait d'un ordre donné par le ministre de la Défense nationale de l'époque, Harjit Sajjan. Ce point est couvert par la motion en raison de l'article du Globe and Mail.
    Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de le répéter dans la motion, et je tiens également à préciser que nous disposons déjà d'un rapport sur cette évacuation grâce à celui du Comité spécial sur l'Afghanistan. Les nouvelles informations qui ont été révélées et qui doivent être examinées proviennent de l'article du Globe and Mail, mais nous voulons également savoir si le gouvernement a mis en œuvre ces recommandations.
    Il a répondu au rapport, mais est‑il allé de l'avant et a‑t‑il mis en œuvre toutes ces recommandations?
    Allez‑y, madame Normandin.

[Français]

     Je réitère mes commentaires avec un ajout.
    Les conservateurs, généralement, n'ont pas la réputation d'être très frileux en ce qui concerne la redondance, d'une part; d'autre part, et ils ne se gênent pas pour reprendre des pans complets d'articles de journaux dans leurs motions, et ce, d'une façon parfois assez acerbe. Je les trouve particulièrement frileux, curieusement, en ce qui concerne cette motion-ci.
    Comme je le mentionnais, le cœur du problème, c'est qu'on savait qu'on évacuait en priorité un groupe plutôt qu'un autre, qui figurait pourtant sur la liste des priorités. C'est vraiment au cœur de la question. Je crois que ce groupe doit être nommé dans la motion si on veut vraiment régler le problème et éviter qu'à l'avenir, on donne la priorité à certains groupes pour les mauvaises raisons. On savait qu'une autre liste existait déjà.
    Je ne vois pas comment on peut balayer cela du revers de la main en disant que, de toute façon, on y a fait allusion dans un article.

[Traduction]

    Souhaitez-vous en débattre davantage?
    Le premier vote porterait sur l'amendement, faute d'un meilleur terme, l'amendement Bezan ou l'amendement conservateur.
    (L'amendement est rejeté. [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Qui est en faveur de la motion originale telle que présentée?
    Voulez-vous en débattre?
    J'espère qu'il ne s'agit pas d'un débat. Je voudrais simplement proposer à nouveau une petite modification à la motion de Mme Normandin.

[Français]

    Nous proposons de supprimer le point a., qui vise à convoquer le ministre de la Défense nationale, M. Bill Blair, la ministre des Affaires étrangères, Mme Mélanie Joly, et des fonctionnaires pour un minimum de deux heures, parce que ces ministres n'étaient pas en fonction lorsque les faits énoncés par le Globe and Mail se sont produits. J'aimerais que ma collègue prenne cela en considération.

[Traduction]

    Voulez-vous en débattre?

[Français]

     Je serais partante pour accepter la proposition à titre d'amendement favorable, dans la mesure où le point d. est maintenu, soit celui qui propose d'inviter tous les autres témoins que le Comité jugera nécessaires. Nous aurons peut-être des informations supplémentaires en entendant d'autres témoins que l'on jugera plus adéquats.
    Pour ce qui est du ministre Blair, comme je le mentionnais, à titre de ministre actuel, il peut nous éclairer sur la façon dont les ordres sont transmis aux forces spéciales dans le cadre d'une opération, par exemple, ou sur la façon dont il considère qu'ils sont perçus. Toutefois, ce sont des questions que je pourrai lui poser lors d'une autre de ses comparutions devant le Comité.
     Pour ce qui est d'Affaires mondiales Canada, peut-être qu'en fin de compte, nous jugerons qu'il est plus important de recevoir des fonctionnaires de ce ministère, ou encore des fonctionnaires d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, mais nous le saurons au fur et à mesure que nous entendrons des témoignages.
    Alors, dans la mesure où le point d. demeure, afin que nous puissions convoquer d'autres témoins en cours d'étude, je suis prête à laisser tomber le point a.

[Traduction]

    Ça vous convient?
    (L'amendement est adopté. [Voir le Procès-verbal])
    (La motion modifiée est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
(1015)
    Je vois M. Boulerice. Je suppose qu'il a une motion à présenter.
    Nous disposons de neuf minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Cette motion a été déposée récemment par ma collègue Mme Mathyssen. Je pense que nous devrions avoir le temps d'en disposer, car ce n'est pas très controversé. Cette motion concerne une étude portant sur les sites contaminés actuels et anciens et leurs répercussions sur la santé des membres des forces armées et du personnel du ministère de la Défense nationale.
    Je peux la relire, au besoin. Ce sujet important préoccupe beaucoup de vétérans. Cela concerne leur santé. Il est question de produits chimiques et de produits cancérigènes trouvés dans plusieurs lieux. C'est important que ce comité se penche sur la question et qu'il fasse la lumière là-dessus.
    La motion propose six réunions pour cette étude et une liste de témoins qui pourraient être invités, notamment des vétérans qui sont atteints du cancer aujourd'hui. Cela vaut la peine d'entendre ces gens.
    Nous sommes d'accord sur cette motion.

[Traduction]

    Monsieur Bezan, êtes-vous en train de débattre de la motion, ou voulez-vous voter?
    Non, j'ai un bref commentaire à faire à ce sujet.
    Nous appuyons la motion, mais je ne sais pas si nous pouvons nous permettre six réunions dans le temps qui reste. Notre comité a une lourde charge de travail devant lui. Je dirais que, compte tenu des rapports provisoires qui doivent encore revenir et être déposés, du projet de loi C‑66 qui nous sera renvoyé, du budget des dépenses et de tout ce que nous avons à traiter, en plus de l'étude sur la mise à jour de la politique de la défense, que nous avons commencée, sans oublier l'étude sur l'espace, il faut reporter cette question jusqu'à ce que nous ayons terminé tout ce que j'ai mentionné avant d'entreprendre une autre étude.
    C'est un problème. C'est une préoccupation, surtout pour les pompiers et les anciens combattants de la Défense nationale qui ont été exposés. Nous devons nous pencher sur cette question.
    Vous laissez entendre que le gouvernement actuel tiendra le coup jusqu'à la fin de son programme? Je veux simplement...
    On ne sait jamais...
    En effet, qui sait.
    ... la façon dont vous votez autour de la table.
    Madame Normandin.

[Français]

    Mon commentaire est assez similaire.
    Nous avons déjà plusieurs motions proposant des études très intéressantes sur le fond. C'est une question de calendrier. Je l'ai mentionné hier à la Chambre: nous avons beaucoup plus de travail à faire que de temps pour l'abattre. Dans ce contexte, il serait intéressant qu'un sous-comité puisse gérer le calendrier.
    Nous sommes d'accord.

[Traduction]

    D'accord.
    Modifions-nous les six ou pas?

[Français]

[Traduction]

    Nous n'apporterons aucune modification.
    D'accord. Votons sur la motion.
    (La motion est rejetée. [Voir le Procès-verbal ])
     Le président: Voilà qui met fin à notre séance.
    Merci beaucoup d'avoir fait un trou dans notre ordre du jour.
    Il est prévu que nous fassions un examen de la mise à jour de la politique de la défense mardi, et nous accueillerons le chef d'état-major de la Défense jeudi, ainsi que le représentant Singh pour la région indo-pacifique. En supposant que le projet de loi C‑66 ne soit pas renvoyé au Comité d'ici là, à la même heure la semaine prochaine, nous devrons revoir notre calendrier et, espérons‑le, en arriver à une sorte d'entente sur la façon d'aller de l'avant. Il se peut que je réserve du temps pour une réunion du sous-comité à ce moment‑là.
    Sur ce, je vous remercie. La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU