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Nos problèmes techniques sont maintenant résolus; la séance est ouverte.
Il s'agit de la 38e réunion du Comité permanent de la défense nationale.
Nos témoins aujourd'hui sont M. Lajeunesse de l'Université St. Francis Xavier et, en présentiel, M. David Perry, de l'Institut canadien des affaires mondiales.
Vous connaissez tous deux le mode de fonctionnement du comité de la défense. Vous aurez chacun cinq minutes pour votre exposé.
Nous allons commencer par M. Lajeunesse.
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Merci beaucoup. Je suis enchanté de pouvoir prendre part à cet important débat.
Mon champ de recherche et d'expertise est celui de la défense et de la politique arctiques, et c'est sur ce thème que porteront mes commentaires. Je pourrai toutefois répondre à vos questions sur une plus grande diversité de questions touchant la sécurité dans le Nord, y compris l'évolution du rôle de la Chine dans la région, un sujet sur lequel j'ai rédigé de nombreux articles.
Tout d'abord, l'invasion de l'Ukraine par la Fédération de Russie en février 2022 a manifestement bouleversé notre compréhension, ici au Canada, de la sécurité mondiale et de la concurrence que se livrent les grandes puissances. Cette inquiétude englobe naturellement l'Arctique, où l'océan Arctique nous sépare de la Russie. Le Canada est en train de reconsidérer sa politique de défense et, également, je le soupçonne, sa politique arctique qui n'a pas été clairement réorientée depuis plus d'une décennie.
J'aurais quelques conseils à formuler sur la façon de mieux structurer notre réflexion concernant la défense de l'Arctique dans ce nouvel environnement géopolitique.
Le Canada comme les États-Unis abordent depuis longtemps la sécurité du Nord avec un sentiment d'insécurité, comme en témoignent les recherches universitaires, les médias et, disons‑le, les propos de nombreux politiciens. Dans notre paradigme de sécurité, la Russie et même la Chine prennent de plus en plus la forme de graves menaces qui nous déclassent sur tous les plans. Les médias et les politiciens citent souvent la flotte russe de brise-glace, son chapelet de bases nordiques et son infrastructure sophistiquée de défense aérienne et maritime couvrant toute la Sibérie comme un péril qui menace le Canada, avec des actifs nordiques en comparaison desquels les nôtres et même ceux des Américains font piètre figure.
Ce narratif, qui aurait pu être écrit à Moscou et qui est en fait un des plus fréquemment véhiculés par les médias d'État russes et les organes d'information qui leur servent de relais, vise à mettre en évidence la force de la Russie et la faiblesse de l'Occident. Le problème, c'est que tout cela est de la foutaise. Nous adhérons à cette vision des choses, qui influence notre réflexion stratégique.
J'aimerais jeter un éclairage différent et, je crois, plus réaliste sur notre politique. Dans l'Arctique, la Russie n'est ni forte ni confiante. Elle est grandement vulnérable et souffre d'une énorme insécurité. La Russie doit défendre un littoral arctique qui s'étend sur plus de 24 000 kilomètres, et selon ses récentes politiques à portée nationale ou de ses forces armées, elle accorde beaucoup d'importance à cette défense.
C'est logique. L'avenir de ce pays repose dans l'Arctique russe. C'est là qu'on trouve les plus importants et les plus récents gisements de gaz naturel et de pétrole, dont l'exploitation revêt un caractère crucial pour l'avenir de l'État russe dans sa forme actuelle. L'Arctique russe abrite une grande partie de la capacité nucléaire stratégique du pays, des exploitations minières rapides et une voie maritime stratégique.
Les déploiements militaires de la Russie dans le Nord trouvent racine non pas dans une confiante vision de projection de puissance, mais plutôt dans un terrible sentiment d'insécurité envers ces ressources et industries vulnérables. Un simple coup d'oeil aux systèmes déployés par la Russie dans le Nord illustre cette mentalité défensive.
L'Arctique nord-américain n'est pas un centre de gravité stratégique. D'un point de vue militaire et économique, on n'y trouve aucune ressource où une frappe russe paralyserait ou handicaperait sérieusement le Canada ou les États-Unis, ou encore nos économies ou nos capacités militaires. Le Canada, et plus globalement l'Amérique du Nord, n'est pas vulnérable à une attaque russe dans l'Arctique. La Russie est vulnérable, et le gouvernement de Moscou le sait parfaitement.
En termes simples, la Russie est très peu en mesure de projeter sa puissance dans l'Arctique nord-américain d'une manière qui ne serait pas rapidement contrée ou contenue. Les frappes de l'OTAN contre l'Arctique russe seraient dévastatrices. En soulignant la faiblesse du Canada ou l'infériorité de l'OTAN dans la région, non seulement on fausse la réalité, mais aussi on étaye le narratif russe. La politique canadienne ne doit pas exagérer la capacité de la Russie de projeter sa puissance dans l'Arctique ni sous-estimer les forces de l'OTAN qui y sont déployées.
À l'avenir, nous pourrions également envisager sous un angle différent les déploiements russes dans l'Arctique. Le Grand Nord est une région où il est difficile et onéreux de déployer des ressources. C'est également une région en grande partie isolée. Mon argument peut sembler contre-intuitif, mais j'estime que le Canada et ses alliés devraient tacitement encourager le déploiement par la Russie de matériel militaire sophistiqué dans le Nord. Le budget de la défense russe n'est pas infini, et son stock de munitions modernes à guidage de précision s'épuise rapidement, comme on sait. L'Occident a intérêt qu'une Russie souffrant d'insécurité soit contrainte de placer ces actifs en Sibérie côtière plutôt qu'en Ukraine ou en Russie occidentale, près de nos alliés de l'OTAN.
Le message véhiculé est donc important. Le Canada doit cesser de prétendre que la Russie domine l'Arctique, et si nous pouvons faire quoi que ce soit pour exacerber les insécurités actuelles de la Russie envers sa propre sécurité, ces efforts peuvent nous rapporter des dividendes stratégiques.
Je vous remercie. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
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Je remercie le président et les membres du Comité de cette invitation à vous parler de la sécurité dans l'Arctique.
J'aimerais moi aussi placer la discussion d'aujourd'hui dans le contexte de la brutale guerre intentée à l'Ukraine par la Russie, qui illustre très concrètement les conséquences du retour à la concurrence entre grandes puissances dont faisait mention la politique de défense de 2017 « Protection, Sécurité, Engagement ». La Russie et la Chine continuent toutes deux d'investir dans la modernisation de leurs forces armées, qu'elles emploient, concurremment avec d'autres éléments du pouvoir étatique, d'une manière qui menace les intérêts occidentaux et canadiens.
Au vu de l'intérêt manifeste exprimé par ces deux pays envers l'Arctique et considérant leur capacité croissante d'agir militairement, soit via l'Arctique contre des cibles situées dans le reste du Canada ou en Amérique du Nord, soit contre des cibles situées dans l'Arctique canadien lui-même, le Canada doit avec urgence renforcer ses défenses arctiques.
Le train d'investissements annoncés cet été pour moderniser le NORAD est un bon premier pas dans le renforcement de nos défenses dans l'Arctique, mais nous devrions chercher à tabler sur ces investissements dans les infrastructures de défense et les ressources aérospatiales en y ajoutant des capacités navales sous-marines et des équipements de défense aérienne et antimissiles intégrée, pour être en mesure aussi bien de mieux comprendre ce qui se passe dans nos eaux côtières que de mieux défendre notre pays contre la menace des missiles.
Cependant, à défaut d'opérer de substantiels changements, il faudra attendre deux ou trois décennies avant que ces investissements engendrent des moyens de défense opérationnellement utilisables.
Je citerai quelques exemples assez déprimants qui illustrent le rythme glacial de nos récents investissements dans la défense de l'Arctique. Le gouvernement a annoncé en 2006 la construction de la station navale de ravitaillement en carburant de Nanisivik, mais aux dernières nouvelles elle ne sera pas inaugurée avant 2023, après des retards en cascade.
Sur les cinq projets prévus dans la stratégie de défense de 2008 « Le Canada d'abord » en vue de renouveler les principales plateformes d'équipement des Forces armées canadiennes, trois — le remplacement de nos frégates et de nos destroyers, l'acquisition de nouveaux avions de chasse et l'achat d'avions de patrouille maritime — permettraient d'améliorer significativement nos défenses dans l'Arctique. Aucun de ces trois projets n'a encore accouché d'un seul avion ou navire. Les échéanciers actuels nous amènent entre 2025 et le milieu des années 2030.
Au sujet de l'étude menée par le Comité, j'aurais deux observations à formuler sur notre capacité manifestement très lente à rehausser nos capacités de défense dans l'Arctique. Tout d'abord, nous devons consacrer au moins autant de temps et d'efforts à améliorer notre aptitude à concrétiser les politiques de défense et les investissements financés que nous avons aujourd'hui qu'à envisager les nouveaux plans et investissements futurs. Deuxièmement, quand nous prenons aujourd'hui des décisions pour l'avenir, nous devons, vu le temps nécessaire à la mise en oeuvre de ce type de décisions, prendre en compte notre capacité de réagir à la possible évolution de notre environnement de sécurité dans les décennies à venir, et pas seulement considérer notre évaluation du monde qui nous entoure actuellement.
Pour ce qui est de ma première observation, j'encourage le Comité à se concentrer, tout au long de son étude, sur ce que le gouvernement du Canada fait collectivement pour améliorer sa capacité de fournir concrètement des investissements en gestion de l'information, en infrastructure de TI et en équipements qui soient davantage axés sur l'Arctique.
Quant à ma seconde observation, j'encourage le Comité à réfléchir aux conséquences pratiques des longs délais qu'il faut attendre pour bonifier nos défenses arctiques et à l'incidence de cette situation sur notre mode d'évaluation des menaces militaires dans l'Arctique canadien. Quand les gens parlent de menaces militaires potentielles, ils évaluent généralement les capacités militaires de pays comme la Russie et la Chine, comment elles pourraient être utilisées pour menacer l'Arctique canadien et si elles seront ou non effectivement employées. Autrement dit, leur évaluation englobe les capacités militaires qui existent déjà à l'heure actuelle et la possible intention hostile de les utiliser.
Comme on le voit aujourd'hui en Ukraine, les grandes puissances autocratiques peuvent utiliser dans un but hostile les capacités militaires qu'elles développent, et elles les utilisent effectivement quand elles le jugent important. Elles le font d'une façon que beaucoup d'entre nous, en Occident, ont du mal à comprendre. Comme ces grandes puissances ont déjà développé la capacité militaire de menacer l'Arctique canadien et que leur intention de le faire pourrait changer en l'espace de quelques jours ou quelques semaines, on doit se préoccuper grandement du fait qu'il nous faudrait des décennies pour faire quoi que ce soit à ce sujet.
Nous devons commencer à agir de manière beaucoup plus urgente pour améliorer dès aujourd'hui nos défenses arctiques et commencer à planifier pour l'avenir, en prenant comme postulat que les menaces qui pèsent sur le Nord canadien sont déjà réelles et s'aggraveront au fil du temps.
Merci.
Pour en revenir à la question des fonds inutilisés, que doit‑on changer pour éviter cette situation? Ce n'est pas le seul ministère à avoir d'importants montants inutilisés. Passe encore que le gouvernement déclare qu'au nom de l'économie, il a décidé de ne pas réaliser un projet. Passe encore. Nous pourrions discuter de l'opportunité d'une telle décision dans un domaine stratégique particulier, mais lorsque le Parlement a effectivement autorisé une dépense et que le gouvernement ne peut sortir l'argent des coffres et atteindre les objectifs qu'il s'est fixés, alors cela a d'énormes répercussions sur notre propre sécurité dans ce domaine.
Pouvez-vous parler du processus d'approvisionnement? En quoi le gouvernement a‑t‑il de la difficulté à sortir des coffres les montants autorisés par le Parlement afin de combler les besoins pour lesquels cet argent a été autorisé?
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À mes yeux, le fait que cela se produise depuis la fin des années 2000 est symptomatique d'une série d'enjeux systémiques qui viennent s'ajouter à certains autres enjeux plus localisés qui émergent depuis quelques années.
J'imagine que les conséquences de la pandémie sur les chaînes d'approvisionnement et les problèmes de main-d'oeuvre ont certains effets immédiats sur les montants inutilisés durant le dernier exercice en particulier. Au‑delà de cela, notre système d'approvisionnement ne nous permet pas de déplacer aussi rapidement que nous le voudrions l'argent qui a été affecté. Il n'y a pas assez d'employés. Ils ne sont pas suffisamment et spécifiquement préparés et formés.
Compte tenu de l'inadéquation entre la capacité et l'intention, il y a un manque dans le processus de priorisation des projets. Il faudrait également que tout le gouvernement du Canada, depuis le Cabinet jusqu'aux échelons inférieurs, fasse réellement savoir qu'il s'agit vraiment d'une priorité importante pour le gouvernement fédéral.
Il y a un certain nombre d'autres enjeux, mais ce sont les trois que je privilégierais.
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Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je tiens à remercier les deux témoins présents aujourd'hui.
Je nous trouve très chanceux d'avoir entendu autant d'excellents témoins, aux opinions très divergentes comme le président l'a dit. Plusieurs des enjeux entourant le Nord ne semblent pas faire consensus.
Mes questions s'adressent à M. Perry, sur un des sujets qui pourraient faire l'objet d'opinions contraires.
Précédemment dans cette étude, le chef d'état-major de la défense a déclaré que les politiques liées à la défense antimissiles balistiques deviennent de moins en moins pertinentes, et qu'une défense aérienne et antimissiles intégrée représente le concept de l'avenir.
Monsieur Perry, j'aimerais avoir votre avis à ce sujet. Êtes-vous d'accord? Pouvez-vous en dire plus sur ces concepts et nous formuler des recommandations sur la défense antimissiles?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également les deux témoins.
Je profite de la présence du professeur Lajeunesse qui donne un point de vue qui détonne un peu par rapport à ce qu'on entend parfois au Comité.
Vous avez mentionné que la Russie considère qu'elle est à risque dans le Nord. Je suis curieuse de savoir ce qui fait que la Russie considère qu'elle est à risque.
Qui est la menace pour la Russie?
Je veux juste comprendre ce qui se passe dans la tête d'un adversaire potentiel.
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Oui, tout à fait. La Russie se considère comme menacée dans le Nord depuis les années 1960. Ce n'est rien de particulièrement nouveau.
À première vue, cela aurait très peu de sens, à mon avis, pour la plupart des Occidentaux. L'idée que l'OTAN puisse attaquer la Russie dans l'Arctique ou ailleurs semble absurde — et je dirais qu'elle est absurde —, mais cette opinion n'est pas toujours prépondérante en Russie.
Vous n'avez pas besoin de me croire sur parole, moi ou un autre chercheur. Vous n'avez qu'à regarder ce que la Russie déploie dans le Nord: des milliards de dollars de systèmes défensifs antinavigation et antiaériens hautement sophistiqués, dont la plupart ont une portée assez limitée. Ce ne sont pas des armes qui peuvent dépasser bien loin les côtes russes pour atteindre l'océan Arctique. Par définition, ce sont des armes défensives.
Il est logique que la Russie ressente une certaine insécurité au sujet de sa région arctique, d'où émane une très grosse partie de son PIB. Les revenus en devises fortes de la Russie proviennent majoritairement du pétrole et du gaz, qui sont en grande partie extraits de l'Arctique.
Dans 20 ou 30 ans, la production pétrolière et gazière russe sera principalement ancrée dans l'Arctique.
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Les relations russo-chinoises dans l'Arctique sont extrêmement complexes, comme elles le sont en général.
La réponse courte est non, la Russie ne considère pas la Chine comme une menace, ou du moins, elle ne considère pas publiquement la Chine comme une menace.
Même avant l'invasion de l'Ukraine en 2022, la Chine était l'un des grands consommateurs de pétrole et de gaz de la Russie, et depuis cette invasion, elle est le seul grand pays consommateur et l'unique acheteuse d'un grand nombre de produits russes. Cette situation évolue, bien entendu, à mesure que les sanctions occidentales continuent d'être appliquées.
Pour ce qui est de l'avenir, la Russie reconnaît qu'elle a besoin de la Chine à bien des égards, notamment en tant que source de technologie, en tant que client et en tant que source de devises fortes.
Le rôle de la Chine dans la politique étrangère russe ne fera qu'augmenter. Le rôle de la Chine dans l'Arctique russe ne peut également que s'accroître, puisque plusieurs des investissements dont nous avons parlé, qui représentent des dizaines de milliards de dollars, sont nécessaires pour réaliser les projets pétroliers et gaziers. Si ces investissements ne viennent pas de l'Occident, ils ne peuvent vraiment venir que de la Chine.
À l'avenir, la pierre angulaire des relations russo-chinoises dans l'Arctique sera l'investissement dans la réalisation de tous ces nouveaux projets d'exploitation de ressources.
La question de l'approvisionnement est un dossier que vous connaissez bien. Au Comité, on a tendance à mal comprendre ce qui se passe dans ce domaine. Ce sujet est souvent traité par un autre comité.
J'aimerais vous entendre sur le fait que le Comité devrait mieux comprendre ce qui se passe dans le domaine de l'approvisionnement, notamment ses répercussions à long terme. Récemment, le directeur parlementaire du budget a mentionné que les coûts du contrat avec la Davie allaient exploser parce que cela traîne en longueur.
J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de l'importance pour le Comité de mieux saisir cette question.
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Je pourrais dire deux ou trois choses.
Je la placerais dans le contexte d'un programme plus large d'administration publique. Le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes éprouvent actuellement de très graves problèmes de personnel, non seulement sur le plan culturel, mais aussi sur le plan quantitatif, car il y a un énorme problème en matière de recrutement et de maintien en poste qui nécessite des mesures urgentes. Je dirais que l'approvisionnement situe dans un autre cadre plus large d'administration publique et de mise en oeuvre. Essentiellement, notre système n'avance pas aussi rapidement que nous le souhaitons et que nous y avons engagé des fonds. Cela peut s'expliquer de plusieurs façons, mais je pense que systématiquement, nous n'avons pas accordé suffisamment d'attention à ce que le système soit calibré de façon à ce que les biens soient achetés aussi rapidement que nous pensons en avoir besoin. Il n'y a pas eu beaucoup d'amélioration évidente à cet égard depuis les 15 ou 20 dernières années.
J'ai commencé à observer que le ministère perdait des sommes importantes en dépenses en capital en 2007‑2008. Ce problème a disparu pendant une très brève période il y a quelques années, mais il y a maintenant un autre problème. Comme je l'ai dit tout à l'heure, les nouvelles règles comptables ont permis d'allouer plus d'argent que ce qui est prévu dans le budget des dépenses et cet argent n'est toujours pas dépensé.
Cela se manifeste de différentes manières, d'un point de vue comptable, mais en fin de compte, nous ne pouvons pas déplacer l'argent aussi rapidement que nous le devrions. Ce problème s'aggrave en raison de la situation actuelle avec l'inflation. Dans le secteur de la défense, l'inflation a toujours été de 6 à 7 % plus élevée que dans le secteur civil. L'inflation dans le secteur civil étant à son plus haut niveau depuis plusieurs décennies, je peux supposer que le ministère de la Défense nationale perd plusieurs dizaines de milliards de dollars en pouvoir d'achat en raison des divers retards dans l'approvisionnement.
Vous y parlez d'une grande partie de ce que vous avez dit aujourd'hui, à savoir que l'Arctique représente une occasion alléchante pour la Chine de feindre un intérêt stratégique afin de pousser les États arctiques à investir de manière disproportionnée ou à engager des capacités excessives dans cette région plutôt qu'ailleurs dans le monde.
Vous avez dit qu'il serait malavisé d'agir ainsi et que cela ne devrait pas être une priorité pour le Canada. Ce qui me préoccupe, bien sûr — et je l'ai déjà mentionné ici à mes collègues —, c'est que cela exacerberait les tensions dans cette région.
Pouvez-vous nous donner quelques détails à ce sujet?
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Je l'espère. C'est un problème qui a certainement été constaté. Plus la Russie est isolée politiquement et financièrement de l'Occident, plus elle est poussée vers la Chine, et nous risquons d'en arriver à un scénario dans lequel une Russie devenue très fragile devient en fait une sorte d'État satellite de la Chine.
Il est toutefois difficile de trouver comment il serait possible d'éviter ce genre de situation. L'Occident n'envisagera pas de renouer sur le plan financier avec la Russie à moins qu'il y ait un arrêt substantiel et un changement d'attitude de la Russie. L'Occident ne renouera pas avec la Russie sur le plan politique suffisamment pour que la Russie se désengage davantage de la Chine.
Nous savons que ce problème existe. C'est un problème reconnu. Nous ne voulons pas que la Russie et la Chine resserrent leurs liens, mais il n'y a pas d'approche évidente qui permettrait d'empêcher que cela se produise.
À long terme, ce qui pourrait empêcher la Russie de s'associer trop étroitement avec la Chine, c'est la méfiance persistante et constante qu'éprouve la Russie elle-même envers la Chine. La Russie ne veut pas devenir un État satellite de la Chine. Je pense que le gouvernement et le peuple russes verraient d'un très mauvais oeil une telle évolution des relations, mais ce n'est pour l'instant qu'une hypothèse.
Je n'ai malheureusement pas de réponse évidente.
Lors d'une réunion précédente, nous avons entendu le témoignage du professeur Lackenbauer qui nous a parlé tout particulièrement de la nécessité de penser aux menaces qui visent l'Arctique, qui le traversent et qui y sont présentes.
Vous avez parlé du fait que des menaces peuvent passer par l'Arctique, mais pour ce qui est des menaces présentes en l'Arctique, nos conversations ont surtout porté sur les changements climatiques et le manque d'infrastructure.
Pouvez-vous nous dire si, sur le plan des infrastructures, le Canada aurait en fait la capacité de développer cette idée d'armement plutôt que d'aller vers ce statu quo de la modernisation, et nous expliquer la différence?
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Merci, madame Mathyssen.
Chers collègues, nous trouvons à nouveau dans une situation où nous avons 25 minutes de questions et beaucoup moins de temps.
Je propose que nous fassions une série complète de questions au cours de cette heure, puisque nous accueillerons un seul témoin pendant la prochaine heure et que cela nous permettra peut-être d'être un peu plus efficaces. Si vous êtes tous d'accord, nous ferons des séries complètes de cinq minutes, ce qui nous amènera probablement au‑delà de midi.
Madame Gallant, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Merci, monsieur le président, et merci à nos deux témoins d'être avec nous ce matin pour répondre à nos questions.
J'écoutais moi aussi et j'ai entendu la divergence d'opinions entre les deux témoins. Dans le cadre de notre étude, j'ai compris que différentes personnes voient les choses différemment, et je trouve qu'il est vraiment intéressant d'en apprendre davantage sur ces différents points de vue.
Ma première question s'adresse à M. Lajeunesse.
Vous avez mentionné que l'Arctique n'est pas nécessairement menacé par la Russie et que vous ne voyez aucune menace à notre Arctique dans un avenir rapproché. Cependant, vous avez aussi dit que l'Arctique est une chose à laquelle la Russie tient beaucoup. Une grande partie de ses ressources provient de cette région, donc économiquement, c'est certainement une zone qui intéresse la Russie.
Vous avez également mentionné le fait que si nous investissons dans notre Arctique et que nous améliorons notre capacité militaire dans cette région, cela pousserait peut-être la Russie à accorder plus d'attention à son Arctique, car elle pourrait percevoir une menace.
Pouvez-vous revenir sur ce point et nous expliquer ce que vous voulez dire? Des témoins que nous avons entendus précédemment nous ont parlé de la capacité militaire de la Russie d'attaquer notre Arctique, que ce soit par voie aérienne ou sous-marine. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et nous expliquer votre raisonnement?
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J'aimerais commencer par dire que ce que j'ai préconisé n'est pas nécessairement d'augmenter la capacité militaire dans l'Arctique canadien jusqu'à ce qu'elle devienne cette menace pour la Russie. J'ai proposé que dans les futurs énoncés de politique, que dans la façon dont nous nous comportons, dont les politiciens parlent et dont nous annonçons nos intentions dans l'Arctique, nous gardions au moins à l'esprit que cette insécurité russe existe et que nous pourrions peut-être cesser d'agir comme si l'Arctique canadien était exposé à de graves dangers.
Lorsque nous parlons de ce danger — du danger que pose la Russie pour notre Arctique —, je demanderais toujours à ceux qui en parlent d'être précis et d'expliquer exactement ce qu'est ce danger.
Que ferait exactement un sous-marin russe dans l'Arctique canadien? Honnêtement, ce sous-marin russe n'aurait stratégiquement aucune raison d'attaquer.
Qu'est‑ce qu'une compagnie aéroportée russe ferait exactement dans l'Arctique canadien? Elle ne pourrait pas y faire grand-chose.
Lorsque nous parlons de la sécurité dans l'Arctique, nous devons vraiment différencier les régions arctiques. La menace russe pour l'Arctique est en Scandinavie. Elle est dans la région de la mer de Barents. C'est beaucoup plus près de la Russie. Cela a toujours été le cas.
Il n'y a pas de menace stratégique russe pour l'Arctique canadien, à moins que l'on parle d'une menace qui le traverserait, comme l'a dit M. Lackenbauer. Ces menaces traverseraient simplement l'Arctique pour atteindre le reste de l'Amérique du Nord. Dans ce cas, ce n'est pas une menace pour l'Arctique en soi; c'est une menace globale.
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Absolument. Comme je l'ai mentionné très brièvement, l'Arctique est exposé à de très graves menaces. Nous devons simplement bien comprendre ce qu'elles sont. Il n'est pas question ici de sous-marins et de parachutistes. Les menaces que nous connaîtrons probablement au cours des 10, 20 ou 30 prochaines années seront des menaces hybrides ou non conventionnelles, comme les flottes de pêche chinoises, les intrusions, la navigation illégale et le braconnage.
L'an dernier, un aventurier chinois est arrivé sur un voilier. Cet homme, qui est soutenu par les médias d'État chinois, a historiquement joui d'une grande liberté personnelle en matière de navigation. Les ramifications politiques de son passage non autorisé auraient pu être très importantes. La seule raison pour laquelle il s'est arrêté, c'est la glace.
Ces menaces hybrides à la sûreté et à la sécurité vont devenir très réelles, et elles augmenteront parce qu'il y aura plus d'activités dans le Nord et parce que les poissons se déplacent vers le nord. Nous aurons besoin de plus de capacités et d'une meilleure connaissance de la situation. Nous aurons besoin de forces constabulaires et navales comme les navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique et de nouveaux gardes côtiers pour gérer ces menaces.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Professeur Perry, j'aimerais que vous nous parliez de la politisation de l'approvisionnement. Je pense aux F‑35, entre autres: en 2015, on a dit qu'on avait besoin de tout, sauf des F‑35; par la suite, on a dit qu'on voulait avoir des F‑35.
Je pense aussi aux retombées industrielles et technologiques. Les gens sur le terrain nous ont dit que les critères appliqués sont parfois déconnectés des besoins.
De plus, dans certaines circonscriptions, des entreprises militaires reçoivent plus ou moins de contrats, au gré des élections.
Le système d'approvisionnement en matière militaire est-il trop politisé?
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Lajeunesse, à la fin de mon dernier temps de parole, vous avez parlé de l'investissement supplémentaire ou bien accueilli dans les navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique. Des témoins nous ont dit que l'augmentation du trafic, l'augmentation possible du tourisme commercial associé à l'ouverture de l'Arctique, est l'un des problèmes auxquels l'Arctique devra faire face.
Pourriez-vous nous parler de nos investissements dans notre garde côtière et nous dire si nous avons ce qu'il faut pour assurer le maintien de l'ordre? Je parle des services de police et du respect des lois internationales, et non de la militarisation.
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Ce qui est unique au sujet des navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique, c'est que ce ne sont pas des navires de guerre proprement dits. Ce ne sont pas des navires de combat de première ligne. Dès le départ, ils ont été conçus pour être des navires très polyvalents, sachant que, dans l'Arctique, la Marine ne jouera jamais le premier rôle; elle aura un rôle de soutien.
Les navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique constituent une plateforme qui peut transporter du personnel de Pêches et Océans, la GRC, de Transports Canada ou des agents des services frontaliers. Ce sont de gros navires efficaces et polyvalents qui peuvent aider d'autres ministères à faire leur travail.
Simultanément, ils nous permettent de voir et d'entendre ce qui se passe dans les eaux arctiques. Ils peuvent pratiquement se rendre partout où tous les autres types de navires, à part les gros brise-glaces, peuvent aller. Plus les activités dont vous avez parlé augmenteront, plus il sera nécessaire d'avoir une meilleure connaissance de la situation et une plus grande capacité d'intervention en cas d'urgence.
Ces navires constituent une bonne solution combinée à une surveillance aérienne accrue, à une surveillance par satellite et peut-être plus tard, à une surveillance souterraine.
J'ai plusieurs questions qui vont dans différentes directions. Je vais commencer par le M. Perry.
Pour ce qui est des sous-marins, la dissuasion et la protection de notre approche nordique, pourriez-vous nous donner des précisions sur ce que vous avez mentionné plus tôt, à savoir que si nous n'avons pas de sous-marins, nous ne savons pas qui se trouve dans nos eaux?
Pourriez-vous nous donner des détails à ce sujet?
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Certainement, et je vais profiter de l'occasion pour dire que je ne suis pas tout à fait d'accord avec le M. Lajeunesse sur ce qu'ils pourraient faire.
Dans notre Nord, nous avons une installation de renseignement électromagnétique à Alert. Nous avons des installations radars qui diffusent une alerte précoce pour l'Amérique du Nord continentale sur les menaces aériennes par l'entremise du Système d'alerte du Nord, et nous avons plusieurs emplacements d'opérations avancés pour nos chasseurs. Tous ces emplacements sont des cibles militaires possibles pour n'importe quel type de missile pouvant être lancé contre une cible terrestre.
Les Russes ont des missiles de croisière avancés qui peuvent être lancés à partir d'avions, de navires de surface ou de sous-marins, de sorte qu'un sous-marin pourrait se trouver dans nos eaux pour faire diverses manoeuvres. Il pourrait notamment tenter d'attaquer l'une de ces installations militaires.
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Nous reconnaissons que les menaces sont réelles et qu'elles s'aggravent avec le temps. Vous l'avez souligné plus tôt. En ce qui concerne la mise à niveau de notre Système d'alerte du Nord du NORAD, nous savons qu'il s'agit d'un effort conjoint entre le Canada et les États-Unis, à 60‑40.
Selon vous, quels facteurs pourraient être inclus dans la formule de financement et les négociations, et améliorent-ils la position du Canada à un moment où il est perçu comme un traînard en matière de défense et que nous avons, comme je l'ai mentionné plus tôt, des milliards de dollars de dépenses inutilisées? Nous vivons une crise du personnel et nous ne faisons pas notre part au sein de l'OTAN et du NORAD?
Pour revenir à ma question, à votre avis, quels facteurs pourraient être considérés dans la formule de financement?
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Bien, il y a beaucoup de choses là‑dedans.
D'après ce que j'ai compris, c'est un partage des coûts historique, mais ce n'est pas envisagé aujourd'hui. Je crois comprendre que l'annonce faite cet été d'un montant de plus de 80 milliards de dollars est entièrement de l'argent canadien. Je ne sais pas exactement ce qui, dans l'espace d'investissement du ministère américain de la Défense, correspond à cela, ce qui permettrait d'établir une sorte de rapport entre ce que fait le Canada et ce que font les Américains.
Je crois — comme j'essayais de l'énumérer plus tôt — qu'il y a beaucoup d'excellentes raisons, propres au Canada, d'investir davantage dans la défense de notre pays, de notre Nord, individuellement en tant que pays et dans le contexte de l'Amérique du Nord. Cependant, je pense que nos alliés s'intéressent de plus en plus à cette question, souhaitant nous voir capables de mieux défendre notre propre arrière-cour et, dans le contexte nord-américain, de le faire avec nos alliés américains.
Il est impératif que nous ne nous contentions pas d'engager cet argent, mais que nous le dépensions et que nous l'utilisions. Je pense que vous pouvez vous reporter à diverses remarques de l'ambassadeur américain au Canada, qui laissent entendre qu'ils veulent voir ce que nous pouvons réellement dépenser et acheter, et pas seulement engager.
Ma dernière question est la suivante. En ce qui concerne le F‑35, nous savons que nous avons désespérément besoin d'avions de combat modernes pour contribuer de manière significative à la défense du NORAD. Après avoir fait traîner le dossier pendant des années, le gouvernement a finalement choisi les F‑35, mais le contrat n'est toujours pas signé.
Le commandant de la force aérienne nous a dit que l'Aviation royale canadienne n'a ajouté qu'un seul pilote de chasse depuis 2020, donc les chiffres montrent que la crise du personnel s'étend aux pilotes de chasse et aux techniciens d'entretien. Par conséquent, nous manquons presque certainement de pilotes de chasse expérimentés pour piloter les F‑35, si et quand nous les obtiendrons enfin. Cela nous désavantage sérieusement, à mon avis, dans la défense du NORAD.
De votre point de vue, votre perspective, que va-t-il falloir pour reconstituer notre personnel d'avions de chasse alors que nous avons des pilotes qui partent dans le secteur privé après avoir reçu plusieurs années de formation coûteuse?
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Tout d'abord, je dirais que le fait que le commandant de l'armée de l'air ait déclaré n'avoir ajouté qu'un seul pilote au cours des deux dernières années décrit une crise existentielle. C'est une crise si vous ne pouvez recruter qu'un seul pilote à un moment où le secteur de l'aviation commerciale a connu le pire effondrement de toute son existence. Je ne vois pas comment on pourrait avoir un environnement plus propice au recrutement de nouveaux pilotes d'avions militaires.
À ce stade, la situation — pas seulement pour les pilotes, mais pour l'ensemble du personnel de la Défense nationale — est tellement critique qu'il faut tout repenser. Si j'ai bien compris, l'écart actuel entre le moment où l'on se présente à un centre de recrutement et celui où l'on obtient un emploi est de plusieurs mois, voire d'un an, ce qui est un délai insensé compte tenu du marché du travail actuel.
Il y a à mon avis tout un ensemble de composantes, tant au niveau du recrutement et de la formation initiale que de la rétention, qui doivent être fondamentalement repensées, car le système que nous avons actuellement ne convient pas.
Monsieur Lajeunesse, j'aimerais vous poser une question au sujet d'un article que vous avez corédigé, mais avant ça, j'aimerais quelques petits éclaircissements. Nous avons beaucoup parlé aujourd'hui de témoignages contradictoires, et je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche.
Vous avez mentionné que le Canada et les pays de l'OTAN ne sont pas si vulnérables dans l'Arctique, que c'est en fait la Russie qui est vulnérable, et que quiconque dit que le Canada est vulnérable dans l'Arctique joue le jeu des discours russes. Pouvez-vous préciser si c'est ce que vous avez dit et voulu dire, et peut-être décrire un peu votre pensée dans ces paroles?
Je m'excuse si je ne les ai pas reprises textuellement.
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Absolument, et c'est une autre façon de formuler la question.
Pour commencer, la vulnérabilité de la Russie découle principalement de ce qu'elle possède dans l'Arctique. Contrairement à l'Amérique du Nord, l'économie de la Russie est très étroitement liée aux actifs situés dans l'Arctique. Cela remonte à plusieurs générations, et c'est de là que vient l'insécurité russe. Le fait qu'elle possède beaucoup d'actifs très précieux et très vulnérables dans le Nord est la source de cette insécurité.
Si je dis que l'Amérique du Nord n'est pas aussi vulnérable, c'est qu'il n'y a tout simplement pas de centre de gravité stratégique dans l'Arctique nord-américain. Comme l'a mentionné M. Perry, il y a plusieurs cibles importantes dans l'Arctique, mais leur retrait ou leur destruction ne modifierait pas fondamentalement l'économie canadienne ou notre capacité de nous battre.
La force de l'OTAN dans l'Arctique est également très souvent minimisée ou sous-estimée. Les flottes de sous-marins de l'OTAN, qui sont le principal véhicule de projection de puissance dans les eaux arctiques, sont importantes. Elles sont grandes. Elles sont technologiquement avancées. Elles sont bien entraînées. Les Américains et les Britanniques n'ont jamais cessé d'aller sous la glace de l'Arctique au cours des années 1990 et 2000, cette capacité est donc bien réelle.
La projection de puissance aérospatiale de l'OTAN dans le Nord est aussi, évidemment, très importante, et lorsque la Finlande et la Suède se joindront à l'alliance, la capacité de l'OTAN dans le Nord, à mon avis, dépassera largement celle de la Russie.
Un autre élément que nous ne pouvons ignorer est le fait qu'au cours des 20 dernières années, notre évaluation de la capacité russe dans l'Arctique s'est fondée sur la force du papier: ce que les Russes disent avoir, ce que nous avons vu là‑bas. Comme nous l'avons vu en Ukraine, une grande partie de cette force sur papier n'existe tout simplement pas. L'armée russe et l'armée de l'air russe sont loin d'être aussi efficaces que nous le pensions.
Je me demande pourquoi nous accordons tant de crédibilité au discours de l'État russe, qui présente la puissance arctique de la Russie comme une force dominante considérable, alors que tous les autres éléments de son armée se sont révélés être une sorte de château de cartes. Je recommande simplement que nous gardions cela à l'esprit lorsque nous parlons de l'Arctique.
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Merci beaucoup. C'est certainement très contradictoire. Je trouve ça fascinant.
Revenons à l'article, « Why China Is Not a Peer Competitor in the Arctic », que vous avez écrit avec Ryan Dean et un témoin précédent, M. Lackenbauer. Selon cet article, les États arctiques ont repoussé ce que les commentateurs occidentaux considéraient être une poussée initiale de la Chine pour internationaliser le Nord circumpolaire à la fin des années 2000
Compte tenu de l'évolution des relations entre la Russie et la Chine à l'heure actuelle, comment pensez-vous qu'elles coopéreraient ou s'opposeraient sur les questions relatives à l'Arctique?
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Cela met fin à notre deuxième série de questions.
Au nom du Comité, je tiens à vous remercier tous les deux de votre participation, car ce va-et-vient a été très stimulant. Je pense que cela nous informe convenablement pour cette étude, à savoir qu'il n'y a pas d'opinions monolithiques sur la façon dont nous devrions traiter notre Nord.
Je vais suspendre la séance un petit moment, le temps d'inviter nos témoins actuels à partir et d'accueillir nos prochains témoins.
Sur ce, la séance est suspendue.
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Chers collègues, nous reprenons nos travaux.
Nous avons avec nous le brigadier-général Denis Boucher, directeur général de la sécurité de la défense, et j'ai un appel importun concernant le nettoyage des conduites d'air au moment où nous parlons.
Des députés: Oh, oh!
Le président: Je pense que je devrais les mettre sur...
Une voix: Dites-leur que vos « canards » sont propres, mais que votre « oie » est sale.
Le président: C'est ce que dit mon frère. Il dit « Je n'ai pas de problème avec les canards; j'ai des problèmes avec les oies ».
Quoi qu'il en soit, c'est une excellente façon de vous présenter, général Boucher.
Des députés: Oh, oh!
Le président: Sur ce, nous attendons avec impatience votre déclaration liminaire de cinq minutes, qui, je l'espère, ne portera ni sur les canards ni sur les oies.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président. Merci de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je comprends tout à fait cet appel. Je reçois régulièrement la publicité pour le nettoyage des conduits, alors vous n'êtes pas le seul, et je serais heureux de parler des oies lorsque nous parlons de la chasse la fin de semaine, mais ce n'est pas pour aujourd'hui.
Monsieur le président et membres du Comité, je suis le brigadier-général Denis Boucher. Je suis le directeur général de la Sécurité de la défense et le chef de la sécurité des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale.
J'ai plusieurs responsabilités. J'ai été nommé officier de sécurité en chef par le sous-ministre et le chef d'état-major de la Défense et, à ce titre, je suis chargé d'assurer la sécurité de l'information, des biens et des membres du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes.
En tant que directeur général de la Sécurité de la défense, j'exerce la responsabilité générale du leadership, du développement et de la gestion du Programme de sécurité de la Défense, et je suis responsable, par l'intermédiaire du vice-chef d'état-major de la Défense, devant le sous-ministre et le chef d'état-major de la Défense de la gestion intégrée du Programme de sécurité de la Défense.
[Français]
Le Programme de sécurité de la Défense nationale comprend des éléments de gestion de la sécurité, de planification, de gestion des risques liés à la sécurité, de surveillance et de conformité, de mesure et d'évaluation du rendement et d'intégration avec d'autres ministères.
Dans le cadre du Programme, nous avons des politiques et des directives, au sein du ministère de la Défense nationale, qui découlent des directives du Conseil du Trésor et qui régissent le Programme. Elles couvrent les huit contrôles obligatoires qui sont représentés dans la directive du Conseil du Trésor sur la gestion de la sécurité.
Je vous remercie encore une fois, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à ce comité. Je serai heureux de répondre aux questions.
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Encore une fois, c'est une question un peu spéculative de mon point de vue. Elle ne relève certainement pas de ma compétence. Il me faudrait présumer de l'intérêt à cet égard. Je pense que tout ancien militaire pourrait être intéressé, mais cela ne signifie pas forcément que les gens seraient recrutés.
Nous faisons confiance à nos membres, les Forces canadiennes, certainement pendant qu'ils servent, pour ce qui est de leurs obligations. On aimerait croire que lorsqu'ils prennent leur retraite, une partie de cette loyauté demeure.
En tant que membre des Forces canadiennes depuis 34 ans, je peux vous dire qu'une fois à la retraite, je ne suis pas prêt à tourner le dos au Canada pour de l'argent. J'aimerais croire que bon nombre de nos membres feraient de même.
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C'est une question assez large. Je n'essaierai pas d'entrer dans les détails de l'aspect juridique des lois qui régissent notre protection de ces renseignements.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'au fur et à mesure que nous recrutons des membres dans les Forces canadiennes, nous procédons à une vérification de fiabilité comme premier élément de leur recrutement, et cela constitue la vérification des antécédents. Nous procédons à des vérifications de solvabilité, du casier judiciaire, et ainsi de suite. Au fur et à mesure que le dossier avance, selon le type d'emploi qu'ils occuperont et les exigences en matière d'habilitation de sécurité, nous procédons également à une vérification de l'habilitation de sécurité, qui approfondit leurs antécédents et commence à examiner des éléments comme la loyauté.
C'est ainsi que nous sélectionnons nos membres. C'est ainsi que nous finissons par leur accorder des habilitations de sécurité au fil du temps, et ces habilitations de sécurité évoluent tout au long de leur carrière, en fonction des exigences de leur emploi. Cela relève de ma compétence en tant que directeur général de la Sécurité de la défense. Nous examinons toutes les questions de sécurité liées au personnel. Les membres comprennent ces lois et leurs obligations, puisqu'ils doivent signer l'entente de non-divulgation que j'ai mentionnée plus tôt.
En tant que directeur général de la Sécurité de la défense et chef de la Sécurité, je suis couramment en rapport avec les chefs de la sécurité des autres ministères. Chaque ministère du gouvernement a un chef de la sécurité désigné, et nous avons tous largement des responsabilités semblables au sein de nos propres ministères. Certains ministères, comme celui de la Défense, sont beaucoup plus grands que d'autres.
Nous échangeons des renseignements en ce qui concerne le contrôle de sécurité du personnel, car les membres de la fonction publique peuvent être transférés d'un ministère à l'autre, et les membres des Forces armées canadiennes peuvent quitter les Forces et être embauchés comme fonctionnaires ailleurs. Nous échangeons des renseignements à ce sujet. Nous sommes intégrés avec la GRC, par exemple, du point de vue de la vérification des casiers judiciaires, et nous échangeons des renseignements au besoin.
Ce seraient des domaines d'échange. Je ne sais pas si cela répond à votre question.
Les membres des Forces canadiennes relèvent de la compétence des Forces canadiennes et du ministère de la Défense nationale seulement jusqu'à ce qu'ils prennent leur retraite. Une fois qu'ils prennent leur retraite, ils sont des citoyens canadiens. Ce sont des civils, au même titre que tout autre citoyen canadien, et ils ne relèvent plus de la compétence des Forces armées canadiennes.
La seule exception qui pourrait se produire est si quelqu'un a causé une infraction ou a fait l'objet d'une enquête et a été accusé d'une infraction pendant qu'il portait l'uniforme. La responsabilité demeure aussi longtemps que la personne porte l'uniforme. Après la retraite, la personne pourrait faire l'objet d'une enquête pour toute activité qui aurait eu lieu avant sa retraite, et il y aurait de la place pour cela.
Dans ce cas, d'après ces allégations, je dirais qu'il s'agit de membres qui avaient pris leur retraite et qui ont été recrutés pour un emploi après coup. Cela n'aurait pas été quelque chose d'interne à la Défense, et nous n'aurions pas compétence.
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Je vous remercie beaucoup de votre présence au Comité, brigadier-général Boucher.
J'aimerais renchérir sur les questions de mon collègue M. May.
Vous avez mentionné que lorsque les pilotes étaient retraités de l'armée vous n'aviez plus d'autorité sur eux. Ils détenaient tout de même de l'information obtenue à l'époque où ils étaient militaires. J'ai plusieurs questions à vous poser.
Comme la responsabilité de l'enquête revient davantage au SCRS et la GRC, n'est-il pas plus difficile, en un sens, de voir les risques réels que ces pilotes aient pu transmettre de l'information aux autorités chinoises relativement à leurs connaissances militaires, par exemple?
Aurait-il été pertinent d'inclure la défense dans l'enquête pour mieux comprendre ce qu'une situation semblable entraîne comme menace, plutôt que seulement chercher des fautifs?
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Je vous remercie de votre question.
En effet, les agences qui mènent l'enquête vont profiter de nos connaissances. C'est pourquoi nous collaborons avec elles. Nous ne menons pas l'enquête comme telle. Si nos partenaires ont besoin d'information de notre part, nous allons évidemment collaborer avec eux.
Au ministère de la Défense nationale et au sein des Forces armées canadiennes, nous prenons la sécurité très au sérieux. Nous nous préoccupons, évidemment, de la sécurité de nos membres, et nous prenons nos responsabilités au sérieux en ce qui concerne la défense du Canada. Nous sommes prêts à collaborer avec nos partenaires des autres ministères fédéraux afin d'établir le risque que cela représente pour nos informations, nos membres et notre défense.
Cela dit, un pilote reçoit toutes sortes d'informations, dont certaines sont de nature plus délicate que d'autres. Je dirais que les connaissances liées au pilotage d'un avion ne sont pas nécessairement des informations délicates. Ce sont plutôt les tactiques qu'un pilote pourrait utiliser qui pourraient le devenir, par exemple.
Je ne suis pas pilote, alors je ne fais que formuler des hypothèses, mais il y a beaucoup de possibilités.
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Je ne pourrais que formuler des hypothèses.
Plusieurs des documents que vous avez mentionnés, comme les documents de type B‑GL, qui ont trait particulièrement aux tactiques et à la doctrine militaire de l'armée de terre, sont disponibles en libre accès en ligne.
Cependant, lorsque les membres quittent les Forces armées canadiennes et qu'ils font leur affirmation solennelle concernant leurs obligations en vertu de la Loi sur la protection de l'information, ils remettent aussi tout document pouvant contenir des informations de nature sensible ou secrète. Ils doivent indiquer sur le formulaire que toute information de ce genre qu'ils avaient en leur possession a été remise. Nous ne pouvons pas avoir de documents classés secrets en notre possession à domicile, évidemment. Nous pouvons seulement y avoir accès dans notre environnement de travail, pour ce qui est des documents publiés.
Le défi que nous avons dans ce domaine est que, de toute évidence, il s'agit de membres retraités des Forces armées canadiennes. Nous prenons nos obligations en matière de sécurité incroyablement au sérieux au sein de la Défense. C'est évidemment mon rôle de renforcer le programme de sécurité: formation, sensibilisation et obligations des membres au titre de la Loi sur la protection de l'information. Ce sont des choses qui sont importantes pour nous. Nous devons voir comment nous pouvons protéger au mieux nos obligations pour assurer la défense du Canada et la sécurité de nos membres.
Lorsque les membres quittent les Forces armées canadiennes, ils deviennent des civils, comme tout autre civil canadien. Ils relèvent de la compétence de ces partenaires fédéraux.
Cela étant dit, si les partenaires fédéraux décident d'enquêter sur des allégations qui existent et qu'ils s'adressent à nous pour obtenir des renseignements qui pourraient les aider dans leur enquête, nous collaborerons bien sûr avec ces partenaires fédéraux pour faire en sorte qu'ils puissent enquêter au mieux et éclairer leur enquête afin de déterminer les prochaines étapes.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier le général Boucher d'être avec nous aujourd'hui pour répondre à certaines de nos questions. Je sais que beaucoup d'entre elles sont assez répétitives. On ne peut pas dire tout ce qu'on veut et, d'après ce que je comprends, les forces armées ont une compétence limitée en ce qui concerne les soldats à la retraite.
C'est l'une de mes questions. Bien sûr, la loyauté joue un rôle très important ici, le fait que c'est la responsabilité de chaque personne, vraiment, de s'assurer qu'elle ne divulgue pas des renseignements qui étaient des renseignements protégés.
Pouvez-vous nous parler un peu du processus qui existe pour éduquer les membres des FAC quant à leurs obligations pendant et après leur service? Savent-ils que, une fois à la retraite, ce n'est pas quelque chose qu'ils sont censés faire? Bien sûr, cela devrait relever du bon sens, mais y a‑t‑il un processus précis en vigueur, et pouvez-vous en parler?
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Je peux certainement en parler. Ce que je peux vous dire, c'est que tout au long du service d'un membre, dès le début de la formation de base, nous commençons à inculquer les valeurs qui sont importantes non seulement pour la société canadienne, mais pour les forces armées, sur le plan des valeurs et de l'éthique.
Nous parlons de l'intégrité et de la sécurité de l'information en ce qui concerne ce que nous faisons, et c'est un peu l'effort de toute une vie ou de toute une carrière pour continuer à renforcer ces valeurs, renforcer nos obligations en matière de sécurité au fur et à mesure que les membres progressent dans différents domaines de responsabilité et qu'ils obtiennent des habilitations de sécurité et la possibilité de traiter et de manipuler des renseignements qui peuvent être classifiés à différents niveaux.
Les membres sont informés de leurs obligations au titre de la Loi sur la protection de l'information. On le leur rappelle lorsque nous renouvelons les habilitations de sécurité périodiquement. Une habilitation dure un certain nombre d'années en fonction de son type. Lorsque ces habilitations de sécurité sont mises à jour ou rehaussées, nous avons encore une fois l'occasion de souligner leurs obligations au titre de la Loi sur la protection de l'information et, encore une fois, comme je l'ai mentionné plus tôt, lorsque les membres quittent, nous leur faisons remplir un formulaire particulier qui leur demande de reconnaître leurs obligations au titre de la Loi sur la protection de l'information une fois qu'ils ont pris leur retraite. C'est un dernier rappel, avant qu'ils ne deviennent des citoyens canadiens ordinaires, de leur obligation de protéger cette information parce qu'elle est importante non seulement pour la sécurité de nos membres des Forces canadiennes, mais aussi pour la sécurité du Canada.
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Tout au long de notre carrière, on nous le répète. Ce qu'il y a de bien avec la formation militaire, c'est qu'on ne la reçoit jamais qu'une seule fois; on la reçoit en général plusieurs fois au cours de sa carrière. C'est le genre de choses que nous essayons d'assurer sur le plan des valeurs.
La loyauté est évidemment une valeur essentielle pour les Forces canadiennes. Nous avons régulièrement, pour tous les grades, des séances de perfectionnement professionnel et différents cours qui renforcent les valeurs qui nous sont chères. Ces valeurs sont inspirées de la société canadienne. Ce sont les valeurs auxquelles nous souscrivons en tant que membres des Forces armées canadiennes, et la sécurité de l'information est l'une de ces choses que nous prenons évidemment très au sérieux.
De mon point de vue — vous me demandez un peu mon opinion — je suis membre des Forces armées canadiennes depuis 34 ans. C'est le genre de chose que l'on m'a effectivement répété pendant ces 34 années.
Je suis fier citoyen canadien, et je ne voudrais évidemment pas faire quoi que ce soit qui puisse nuire au Canada et à ses citoyens. Nous sommes incroyablement chanceux de vivre dans ce pays. J'aimerais croire que les messages que nous continuons à transmettre à nos membres, au fur et à mesure que nous parlons de ces valeurs et de nos obligations, nourrissent ce sentiment d'appartenance, cette vocation. Nous ancrons le principe de la loyauté dans l'esprit des membres afin qu'ils ne veuillent jamais, même hors de l'uniforme, porter éventuellement atteinte au Canada.
Cela dit, nos politiques, nos procédures et notre formation sont toutes en place, et nous cherchons constamment à les mettre à jour pour nous assurer de répéter ces messages. C'est le genre de choses que, ces allégations étant ce qu'elles sont, nous allons probablement continuer à répéter, pour faire en sorte que les membres comprennent ces obligations.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie beaucoup, encore une fois, brigadier-général Boucher.
Vous avez mentionné que le ministère de la Défense collaborait bien avec les autorités qui s'occupent de l'enquête. J'aimerais savoir si cette enquête va également dans l'autre sens, dans le but de protéger nos pilotes actuels.
Je vous donne un exemple qui me vient en tête et je vais vous le présenter sous forme de question.
Les enquêteurs pourraient-ils vous communiquer des informations sur les pilotes canadiens qui donnent de la formation aux pilotes chinois? Par exemple, ils pourraient vous informer de la durée de leur service dans les Forces armées, du type d'appareil sur lequel ils ont travaillé et de leurs connaissances des faiblesses d'un certain type d'appareil, et ce, dans le but de protéger les pilotes actuels. Par exemple, on pourrait leur dire quelle information les Chinois ont en leur possession, on pourrait les inviter à corriger le tir ou on pourrait apporter certaines modifications aux stratégies pour protéger les pilotes qui sont présentement avec les Forces armées.
Est-ce le genre de collaboration que vous entretenez?
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Je vous remercie de votre question, madame Normandin.
Selon moi, ce ne sont que des allégations présentement. Je ne sais pas quelles informations l'enquête va révéler, ni si elle va vraiment nous dévoiler ce type de détails.
Ce genre d'information nous serait sûrement utile. Une fois que l'on connaîtrait le nom de ces membres ou leurs activités antérieures, on pourrait voir comment les protéger, comment vérifier si nos pilotes s'exposent à des risques.
Nous sommes toujours inquiets de la sécurité de chacun de nos membres, mais aussi de la sécurité de l'information et de l'organisation des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale.
Nous entretenons une étroite collaboration avec nos partenaires fédéraux afin de protéger la sécurité des Canadiens.
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Je vous remercie de votre question, madame Normandin.
Effectivement, on ne sait pas grand-chose des allégations et de l'enquête préliminaire.
Cela dit, la sécurité et la protection de nos membres occupent une place primordiale au sein des Forces armées.
Nos mesures sont déjà très robustes pour ce qui est de la sécurité de nos membres, de la vérification de la sécurité de l'information qu'ils possèdent, de leurs connaissances et de s'assurer leur loyauté continue envers les Forces canadiennes. Alors, je ne pense pas que l'on pourrait vouloir renforcer nos mesures présentement.
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C'est vrai. Comme j'essayais de le dire, les séances d'information qui ont lieu normalement les informent de leurs obligations de protéger leurs renseignements, s'ils sont...
La plupart du temps, lorsque nous nous rendons en Chine, même en tant que militaire en congé... Si vous y allez en tant que touriste, on a tendance à vous décourager d'apporter vos appareils électroniques, en raison du risque éventuel qu'ils représentent. J'ai même vu dans des médias de sources ouvertes que les militaires devraient faire attention lorsqu'ils apportent leur téléphone en Chine.
Cela aurait eu lieu, mais il n'y aurait pas nécessairement eu de protection particulière. Il y aurait eu des séances d'information. Les membres n'auraient probablement pas avec eux leurs appareils de communication professionnels. Il n'y aurait eu que des appareils de communication personnels, mais il y aurait eu des séances d'information sur la sécurité à cet effet.
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Merci, monsieur le président, et merci beaucoup, général.
Général, vous avez parlé de loyauté — une loyauté tissée au fil de décennies. Vous avez parlé de vos 34 ans. Je peux entendre la fierté dans votre voix, et je tiens à vous remercier pour votre service.
Je tiens également à dire que j'ai — et les Canadiens ont, je pense — une confiance absolue dans nos Forces armées canadiennes, et je soupçonne que cela se répercute également sur les vétérans canadiens.
Nous avons beaucoup utilisé le mot « spéculatif » aujourd'hui. Nous ne savons pas qui est en cause. Nous ne savons pas si cela se produit réellement. Nous l'avons vu dans un reportage, et le Comité le prend au sérieux à cause de l'existence même de ce reportage, mais nous ne savons pas vraiment ce qu'il en est. Nous n'avons pas les réponses.
Je vous suis reconnaissant de votre présence ici aujourd'hui. Vous vous trouvez en quelque sorte sous les feux des projecteurs et vous n'avez pas les réponses à un reportage qui a ou qui n'a pas été prouvé.
En ce qui concerne la question de Mme Mathyssen sur la radicalisation, je pense en fait que c'est pertinent. Pour quelle autre raison un vétéran canadien — si cela s'est produit — envisagerait‑il de former un pilote chinois au sujet des services de renseignement canadiens? Je pense réellement que c'est pertinent, et je veux savoir si les Forces armées canadiennes surveillent la radicalisation de leurs membres.
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C'est extraordinaire, monsieur le président. Je vous remercie.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'au sein de la Défense, il a toujours été question de la sécurité des membres des Forces canadiennes et de la société canadienne en général. C'est notre rôle — défendre les citoyens canadiens et le Canada —, alors tout aspect de radicalisation est préoccupant.
Il y a évidemment eu des rapports qui parlent de la possibilité que des membres aient été radicalisés à l'interne, mais vous êtes tous certainement au courant des efforts importants déployés au sein de la défense pour veiller à éliminer toute possibilité de problème dans cet espace tout en essayant de respecter autant que possible les valeurs des Forces canadiennes.
En ce qui concerne les procédures, nous avons institué un certain nombre de politiques concernant toutes les formes de sécurité, qu'il s'agisse de la sécurité industrielle, de la sécurité physique, de la sécurité du personnel ou de la sécurité des renseignements, des technologies d'information et de la gestion de l'information. Tous ces éléments entrent en ligne de compte. Selon le genre de renseignements que la personne traite, ou le type de sécurité en particulier, différentes mesures sont suivies.
La formation est primordiale ici. Il s'agit de s'assurer que les gens comprennent la nature confidentielle et sensible de l'information ou de l'équipement qu'ils manipulent et leurs obligations au titre de la Loi sur la protection de l'information, parce qu'en fin de compte, peu importe le type de sécurité dont il est question, il s'agit d'information. Lorsque les membres quittent les Forces canadiennes, ils ne partent pas avec des copies papier de l'information, alors c'est vraiment ce qui se trouve dans leur mémoire, leur banque de souvenirs, si vous voulez, en ce qui concerne la façon dont ils le font.
Nous leur donnons une formation appropriée sur la mesure dans laquelle il est important de protéger l'information, et nous leur rappelons ces obligations tout au long de leur carrière. Puis, les tout derniers jours de leur carrière, au moment où ils prennent leur retraite, ils sont tenus de remplir des formulaires de non-divulgation qui leur rappellent leurs obligations au titre de la Loi sur la protection de l'information.
Je ne sais pas si cela répond à votre question.