Passer au contenu

FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 080 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 novembre 2017

[Enregistrement électronique]

(1140)

[Traduction]

    Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    Pour la gouverne de tout le monde, je signale que nous passerons à huis clos. Ceux qui ne sont pas censés être ici doivent quitter la salle car nous allons tenir une partie de la séance à huis clos.
    Vous voudrez peut-être faire d'autres plans, car nous n'aurons pas le temps de procéder à l'étude article par article. Dans 20 minutes, nous entendrons le président du Kosovo. De toute évidence, ce sera télévisé, et tout le monde pourra revenir.
    Nous avons 15 minutes pour examiner des questions à huis clos, puis nous poursuivrons.
    Allez-y, madame May, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, je tiens à souligner aux fins du compte rendu que je suis ici pour étudier la motion adoptée par le Comité. J'aurais aimé être prévenue. Deux comités procèdent à une étude article par article en même temps, et je suis censée être présente aux deux séances. Je vais maintenant me rendre en vitesse à l'édifice du Centre, mais j'aurais été extrêmement reconnaissante que l'on me prévienne au préalable que cette réunion serait à huis clos.
    Merci.
    Je précise que ce n'est pas la faute du Comité si nous devons participer à un vote. Si nous n'avions pas eu de vote, nous aurions fait ce qui était prévu, mais je n'ai aucun contrôle sur les votes de la Chambre. Cela arrive de temps à autre.
    Désolé que vous ne puissiez pas être à deux endroits en même temps.
    D'accord.
    Je demanderais à ceux qui doivent quitter la salle de bien vouloir le faire. Nous allons passer à huis clos et régler quelques questions.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
(1135)

(1155)
    [La séance publique reprend.]
    La séance est ouverte.
    Au nom de notre comité permanent des affaires étrangères, j'aimerais souhaiter la bienvenue au président Hashim Thaçi au Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.
    Le Comité est honoré que vous ayez accepté de comparaître devant nous. Nous avons hâte d'entendre votre témoignage. Au nom du Comité, j'aimerais vous souhaiter un bon retour au Canada et un séjour agréable et productif.
    Le président Thaçi a une éminente carrière en tant que dirigeant du Kosovo, ayant agi auparavant comme premier ministre et ministre des Affaires étrangères. En tant que premier ministre, il a supervisé la déclaration d'indépendance du Kosovo en 2008 et est le nouveau dirigeant du gouvernement du pays depuis 2014. Il a été élu à la présidence de l'Assemblée nationale du Kosovo en 2016.
    Le Canada et le Kosovo entretiennent d'excellentes relations. Le Canada a reconnu l'indépendance du Kosovo en 2008. Il maintient des relations diplomatiques complètes avec le Kosovo et a fourni une aide importante au Kosovo au fil des ans pour appuyer son développement et sa croissance.
    J'espère que le séjour du président renforcera la collaboration entre les deux pays et je souhaite la bienvenue au président.
    Pour la gouverne du président, c'est une situation nouvelle pour notre Comité des affaires étrangères. Nous n'avons pas eu l'occasion dans le passé d'entendre le témoignage de dirigeants étrangers. C'est une occasion télévisée pour nous d'entendre directement le témoignage du président du Kosovo. À notre avis, il est extrêmement intéressant pour les Canadiens d'entendre ce qui se passe dans votre pays et de connaître l'état de nos relations et le travail que nous effectuons.
    Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le président, et je vous cède la parole. Vous disposez du temps que vous voulez pour nous faire part de vos observations, et je suis certain que mes collègues auront d'excellentes questions à vous poser concernant nos relations avec le Kosovo.
    Monsieur le président, la parole est à vous.
(1200)
    Je vais poursuivre en albanais.
    Merci beaucoup de cette occasion extraordinaire d'être parmi vous aujourd'hui, mesdames et messieurs les membres du comité des affaires étrangères.
    C'est un honneur de faire votre connaissance aujourd'hui et de discuter du Kosovo et du Sud-Est de l'Europe, de nos réalisations et de nos défis pour établir la paix et favoriser la réconciliation, et de la coopération bilatérale entre le Kosovo et le Canada.
    Comme toujours, au nom des institutions de l'État et de la population du Kosovo, je tiens à remercier sincèrement le gouvernement et la population du Canada de l'appui constant que vous nous avez offert, que ce soit en temps de guerre, lorsque le génocide de Milosevic a été évité, lors de l'indépendance ou encore aujourd'hui, dans le cadre de nos efforts à consolider un État du Kosovo. L'histoire du Kosovo est marquée de réussites et de réalisations.
    Je me réjouis d'être ici à l'occasion du 150e anniversaire de la Confédération du Canada. Le Canada est un partenaire stratégique avec lequel nous avons en commun des aspirations, des valeurs et des principes. Le Kosovo sera toujours reconnaissant envers le Canada. Je voudrais insister plus particulièrement sur le fait que vous avez accueilli 7 000 réfugiés du Kosovo en 1999. J'ai rencontré quelques-uns de ces anciens réfugiés lors d'un séjour à Halifax pour visiter la base militaire, où la majorité d'entre eux ont été accueillis à leur arrivée au Canada. Le moment était très touchant parce que nous nous sommes remémorés les jours de guerre, mais j'ai ressenti de la joie et de la fierté en constatant à quel point ils se sont bien intégrés et contribuent à la société canadienne à l'heure actuelle.
    Ils font désormais office d'intermédiaires entre nos deux nations. J'ai rencontré de jeunes hommes et femmes qui sont arrivés ici quand ils étaient enfants, et qui font maintenant partie intégrante de la société. Ce sont des athlètes, des politiciens, des artistes — des gens qui aiment ce pays autant qu'ils aiment le Kosovo.
    L'appui du Canada a été également important après la guerre pour rebâtir le pays et rétablir la paix. Nous remercions le Canada d'avoir été l'un des premiers pays à reconnaître l'indépendance du Kosovo et de continuer d'aider le Kosovo à consolider sa souveraineté. J'en suis témoin. Notre coopération bilatérale prend de l'expansion, surtout sur le plan économique, et plus particulièrement dans le secteur minier, même si nous nous efforçons d'élargir cette expansion dans d'autres secteurs également.
    Le mois dernier, j'ai eu l'honneur de décerner une médaille en reconnaissance de ses contributions à la paix et à la démocratie à l'ancien ministre des Affaires étrangères, Lloyd Axworthy, et je suis ravi de voir à ce comité la députée Vandenbeld, qui a été décorée par le gouvernement du Canada pour sa contribution au soutien de la paix.
    J'ai très hâte à la signature d'un document entre nos deux pays sur la protection des investissements.
    De plus, j'ai déposé hier une couronne au monument de la réconciliation et du maintien de la paix pour exprimer notre gratitude envers le Canada pour sa contribution au maintien de la paix dans le monde. Je tenais à rendre hommage au Canada pour sa participation et son rôle en Croatie, en Bosnie-Herzégovine, en Macédoine, au Kosovo et partout dans le monde. Voilà qui témoigne de la grandeur du Canada, de ses représentants et de ses députés.
    Permettez-moi de dire quelques mots sur le passé et le présent du Kosovo, et plus particulièrement sur les aspirations futures du Kosovo et du Sud-Est de l'Europe.
    En décembre, le Kosovo célébrera le 10e anniversaire de son indépendance, reconnue par 114 pays. La déclaration d'indépendance est le fruit d'un long processus international en vue de trouver des solutions pour le statut politique du Kosovo.
(1205)
    Ce processus international a été amorcé dans les années 1990 avec les résolutions des Nations unies condamnant la violence et la répression exercées par le régime Milosevic. Il s'est poursuivi avec la conférence internationale qui a eu lieu au printemps 1999 à Rambouillet, en France, où la communauté internationale a de nouveau tenté de trouver une solution pour le Kosovo.
    Non seulement le régime Milosevic a-t-il refusé de coopérer avec la communauté internationale, il a poursuivi sa campagne violente et répressive qui a dégénéré en génocide. Cette situation a poussé l'OTAN à intervenir afin d'éviter qu'un autre génocide soit perpétré en Europe. Le Kosovo a donc été placé sous la tutelle des Nations unies.
    En 2005, les Nations unies ont nommé le président de la Finlande, M. Ahtisaari, lauréat du Prix Nobel de la paix, et lui ont confié le mandat de trouver une solution à la situation du Kosovo. Dans le cadre d'un processus dirigé par les Nations unies et auquel tous les membres ont participé activement, notamment les États-Unis d'Amérique, l'Union européenne et la Russie, le président Ahtisaari a conclu et recommandé que la meilleure solution pour le Kosovo serait une indépendance sous supervision. En l'espace de cinq ans, nous avons complété la mise en oeuvre de toutes les dispositions et satisfait à toutes les conditions d'indépendance soulignées dans le plan Ahtisaari. En février 2008, à la recommandation de M. Ahtisaari, le Kosovo a déclaré son indépendance. Je peux dire aujourd'hui qu'il n'y a jamais eu une déclaration d'indépendance aussi multilatérale et coordonnée sur le plan international que celle du Kosovo.
    En juillet 2010, la Cour internationale de Justice a confirmé l'indépendance du Kosovo lorsqu'elle a annoncé que la déclaration d'indépendance du Kosovo était conforme au droit international après que la Serbie ait demandé à la Cour de trancher à savoir si la déclaration d'indépendance du pays contrevenait au droit international.
    Où en est maintenant le Kosovo? Le pays a signé un Accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne, ce qui constitue la première étape vers l'obtention du statut de membre de l'Union européenne. Le Kosovo a été inclus dans le programme Société du compte du millénaire du Congrès des États-Unis et travaille à la mise en oeuvre de ces projets. Ces réalisations n'ont été possibles qu'après la reconnaissance des réformes économiques et de la primauté du droit du Kosovo et l'édification d'institutions démocratiques au pays.
    Le Kosovo est membre de bon nombre d'organisations internationales, dont la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, la Commission de Venise et autres organisations politiques, sportives ou culturelles internationales.
    Conformément au plan Ahtisaari, nous avons mis sur pied des institutions de gouvernance inclusives où toutes les communautés du Kosovo sont représentées. Le parlement du Kosovo compte 120 sièges. De ce nombre, 20 sont réservés aux communautés non majoritaires — 10 pour la communauté serbe et 10 pour les autres communautés — de façon à ce qu'elles aient une représentation politique.
    Nous avons adopté des politiques positives en matière d'éducation, d'emploi et d'utilisation des langues dans les médias afin que les citoyens puissent apprendre, travailler et s'informer dans la langue de leur choix. Nous avons adopté la communication et le dialogue comme étant les seuls outils pouvant être utilisés pour trouver une solution à tous les autres problèmes qu'il reste à régler. Nous favorisons le dialogue interconfessionnel. Cela se remarque le mieux dans la conférence interconfessionnelle que nous organisons chaque année et où se réunissent des chefs religieux, politiciens et universitaires de partout dans le monde afin de prendre part au dialogue interconfessionnel.
    Nous sommes fiers de la tolérance dont font preuve toutes les communautés du Kosovo et de la coexistence de ces communautés. J'ai amorcé la création d'un autre outil, la commission de vérité et de réconciliation, afin de promouvoir le dialogue entre les communautés ethniques du Kosovo dans le but de fermer les livres sur la guerre et d'amorcer un nouveau chapitre de paix, de dialogue, de coopération et de coexistence dans une société multiethnique, démocratique et inclusive.
(1210)
    Nous avons consolidé le statut d'État interne du Kosovo en étendant notre souveraineté à tous nos territoires, y compris la partie nord du Kosovo. Grâce au dialogue et aux mesures positives que nous avons adoptées, cette partie du pays est maintenant incluse dans nos institutions d'État.
    Nous avons procédé à des élections selon les lois du Kosovo. Les élus travaillent dans nos institutions conformément aux lois du pays. La dernière réalisation du Kosovo a été l'assermentation des juges et procureurs de la communauté serbe dans la partie nord du pays. Ceux-ci se chargent maintenant d'appliquer les lois du Kosovo dans cette région. Cela a été possible grâce au dialogue entre le Kosovo et la Serbie et à la participation et au leadership de l'Union européenne.
    Mesdames et messieurs, ceci m'amène à un autre aspect important en ce qui concerne le Kosovo, soit la promotion du dialogue afin de trouver des solutions pour l'ensemble de la région. Depuis maintenant cinq ans, le Kosovo et la Serbie entretiennent un dialogue dans le cadre duquel l'Union européenne sert de modérateur. Ce dialogue a permis la conclusion de plusieurs accords visant à améliorer la vie des citoyens et la relation entre les deux pays.
    En avril 2013, pour la première fois après 100 ans de conflits et d'hostilités, nous avons signé un accord international pour la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie. Cet accord a permis non seulement de renforcer la paix entre nos deux pays, mais aussi dans toute la région.
    Aujourd'hui, en tant que président du Kosovo, et en collaboration avec le président de la Serbie, M. Vucic, et la Haute Représentante de l'Union européenne, Mme Mogherini, je souhaite améliorer la qualité et le dynamisme du dialogue. Nous travaillons à la conclusion d'un nouvel accord pour la normalisation totale des relations, l'établissement de bonnes relations de voisinage et la réconciliation entre nos deux pays.
    Nous favorisons le dialogue et la coopération dans nos relations avec d'autres pays de la région. Nous entretenons d'excellentes relations avec la Macédoine, l'Albanie et le Monténégro. Nous respectons l'intégrité du territoire de la Macédoine et continuons à demander la mise en oeuvre totale de l'accord d'Ohrid, car il s'agit, selon nous, de la meilleure façon d'accommoder toutes les communautés de la Macédoine.
    Nous entretenons également de très bonnes relations avec l'Albanie. Nous ne tentons pas de modifier les frontières; nous cherchons plutôt à les ouvrir selon le modèle de l'Union européenne.
    Notre relation avec le Monténégro est excellente et nous sommes très heureux que le pays se soit joint à l'OTAN, car il s'agit d'une autre étape vers le renforcement de la paix et de la stabilité dans toute la région des Balkans occidentaux.
    À titre informatif, il est vrai que le Kosovo n'a pas encore ratifié un accord de démarcation des frontières avec le Monténégro. Ceci est attribuable à la concurrence politique interne au Kosovo et n'a rien à voir avec notre relation avec le Monténégro. Il s'agit d'un accord clair et juste. Le Kosovo est un membre actif de tous les forums régionaux et favorise la coopération dans la région.
    Mesdames et messieurs, j'aimerais également dire quelques mots au sujet de notre avenir, des défis qui nous attendent et de nos aspirations. Notre principale aspiration est la poursuite des réformes dans tous les secteurs de la vie et, à cet égard, l'Accord de stabilisation et d'association conclu avec l'Union européenne constitue le meilleur document d'orientation. Les gouvernements du Kosovo se sont engagés à réaliser ces réformes, y compris la conclusion d'un accord de stabilisation et d'association pour les programmes gouvernementaux.
    La communauté internationale a mené des initiatives de justice au Kosovo. Au cours des huit premières années, elles ont été menées par l'entremise des Nations unies, et, pour les neuf années suivantes, par l'entremise d'une mission de l'Union européenne pour la primauté du droit, connue sous l'acronyme EULEX. Ceci nous a permis de jouir du meilleur cadre juridique possible et de développer des capacités nationales pour assurer la mise en oeuvre de ces lois. Toutes les réalisations dans tous les secteurs, notamment la primauté du droit, font l'objet de rapports de la part des États-Unis et de l'Union européenne.
(1215)
    La consolidation du statut d'État du Kosovo à l'échelle internationale est notre principal défi. Vous ne serez pas surpris d'apprendre que certains s'opposent encore à la création d'un Kosovo indépendant, démocratique et multiethnique. Je parle notamment de la Russie qui se bat avec l'Occident pour empêcher la réalisation de projets de paix et de stabilité dans l'Europe du Sud-Est. Comme vous le savez tous, la Russie a tenté un coup d'État au Monténégro en empêchant l'adhésion du pays à l'OTAN. Elle a tenté d'empêcher la tenue d'élections démocratiques en Macédoine, encore une fois pour enrayer des réformes à l'OTAN et aux Nations unies. Elle empêche le Kosovo de se joindre à des organisations internationales, comme les Nations unies et l'UNESCO, notamment.
    J'ai été très heureux d'apprendre que, lors de sa visite à Halifax, le Secrétaire général des Nations unies a prévenu l'Occident et l'OTAN contre la menace russe. Toutefois, c'est principalement en raison des retards que la Russie a pu exercer une influence dans les Balkans. L'Union européenne et l'OTAN accusent un retard quant à l'inclusion de la région dans leur processus d'intégration. Ces délais ont ouvert la porte à la propagation d'autres idéologies, russes ou autres, dans la région.
    Des fondamentalistes et radicaux tentent d'intégrer la région des Balkans. Certains ont joint les rangs de Daech. Inutile de la nier. Nous sommes également la cible d'attaques terroristes. Nous avons réussi à déjouer des attaques terroristes sur les territoires du Kosovo et ailleurs dans la région. Le Kosovo est un membre actif de la coalition mondiale contre Daech et un leader dans la région en ce qui a trait à la lutte contre le terrorisme, le radicalisme et l'extrémisme. Toutefois, nos efforts sont rendus plus difficiles par le fait que nous ne sommes pas membres d'Interpol ou d'autres mécanismes de sécurité internationaux. C'est la raison pour laquelle il est important que le Canada soutienne notre adhésion à ces mécanismes.
    Afin de renfoncer l'infrastructure de sécurité du Kosovo, nous avons amorcé la transformation de notre force de sécurité côtière en une force armée. Cette transformation sera réalisée en consultation et en accord avec les communautés du Kosovo et en coordination avec l'OTAN et nos partenaires internationaux. Nous avons demandé au Canada d'accroître sa coopération avec la FSK — la Force de sécurité du Kosovo —, notamment dans le cadre de projets visant à inclure toutes les communautés et à assurer la parité entre les sexes. Aujourd'hui, les communautés non majoritaires forment plus de 10 % des troupes de la FSK. De ce nombre, plus de 10 % sont des femmes.
    Le Kosovo a parcouru beaucoup de chemin depuis la guerre. Le pays n'a pas été détruit par la guerre. Il aspire à devenir membre de l'OTAN et de l'Union européenne et a réussi à mettre en oeuvre des réformes économiques et judiciaires et à édifier des institutions démocratiques. Je suis conscient que de nombreux autres défis se dressent devant nous, mais je suis très fier de voir que dans tous les sondages d'opinion, les citoyens du Kosovo sont davantage en faveur de l'adhésion à l'OTAN. Ils sont majoritairement pro-OTAN et pro-européens.
    Nous croyons fermement que l'avenir du Kosovo repose sur son adhésion à l'OTAN et à l'Union européenne, ainsi que sur la paix, le dialogue et la coopération avec tous. Nous sommes sur la bonne voie pour passer d'un pays consommateur de sécurité à un exemple de la promotion de la paix, du dialogue et de la coopération.
    Merci. Je serai très heureux de poursuivre cette discussion et de répondre à toutes vos questions.
(1220)
    Merci beaucoup, président Thaçi.
    Comme d'habitude, nous passerons immédiatement aux questions des membres. Monsieur O'Toole, vous avez la parole.
     Merci beaucoup pour cet exposé, monsieur le président.
    Vous avez abordé plusieurs questions dont je souhaitais discuter avec vous. Je suis heureux que vous les ayez soulevées.
    Toutefois, j'aimerais d'abord dire que j'étais heureux de me joindre à mes collègues hier au Monument au maintien de la paix. Je suis un vétéran des Forces armées canadiennes, et certains de mes amis militaires ont pris part à la mission au Kosovo. J'ai été heureux de voir notre dernier officier de Pristina participer à la cérémonie. Je tiens à remercier ma collègue, Anita, pour cela. J'ai servi à Halifax au sein de la force aérienne de la marine, et j'ai été très heureux de vous voir inspecter notre garde d'honneur à Halifax avec le forum sur la sécurité. Je sais que les gens de la ville vous ont réservé un très bel accueil.
    Vous avez parlé de l'adhésion du Kosovo à des organisations internationales et du fait que, depuis maintenant une décennie, le Canada, les États-Unis et d'autres pays reconnaissent le Kosovo. Selon vous, où en est votre campagne d'adhésion aux Nations unies? Avez-vous soulevé la question de votre adhésion aux Nations unies lors de vos discussions avec le premier ministre Trudeau?
    Vous me posez deux ou trois questions...
    Monsieur le président, nous procédons un membre à la fois.
    D'accord.
    M. O'Toole dispose d'un certain nombre de minutes pour vous poser ses questions. Parfois, il est plus rapide que prévu.
    D'accord.
    Vous avez la parole.
S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Vous savez tous que la déclaration d'indépendance du Kosovo a été faite en collaboration avec l'Union européenne et les États-Unis, et, à la dernière minute, avec la Russie.
    En tant que leaders du Kosovo, on nous a dit de mettre en oeuvre l'ensemble du plan Ahtisaari élaboré conjointement par les États-Unis, l'Union européenne et la Russie. Puisque M. Ahtisaari était un émissaire des Nations unies, il s'agissait d'un processus onusien. C'est dans ce contexte que nous avons travaillé à trouver une solution au statut politique du Kosovo.
    J'ai moi-même pris part à ce processus qui s'est étiré sur trois ans, à Vienne, en Autriche. Je dois admettre que nous avons fait beaucoup de compromis afin de maintenir le consensus international sur l'indépendance du Kosovo et son statut politique, mais, au bout du compte, tout comme nos partenaires et les leaders qui ont participé à ce processus, nous avons aussi été déçus que la Russie oppose systématiquement son droit de veto au Conseil de sécurité des Nations unies concernant l'adoption du plan du président Ahtisaari. Cette opposition s'est poursuivie au cours de l'été et de l'automne 2007 et de l'hiver 2008. Le président Ahtisaari lui-même a participé aux discussions.
    Où en sommes-nous avec notre adhésion aux Nations unies? Honnêtement, la Russie a participé aux négociations sur notre indépendance qui ont lieu à Rambouillet et à Vienne. Elle a également participé aux forces de maintien de la paix pendant la guerre au Kosovo et elle a un bureau de liaison à Pristina, au Kosovo. Toutefois, l'attitude de la Russie et sa position demeurent malheureusement inchangées, c'est-à-dire qu'elle continue de s'opposer ouvertement à l'adhésion du Kosovo aux Nations unies.
    Cette opposition n'a rien d'accidentel et ne concerne pas uniquement le Kosovo. Nous avons examiné la question de façon plus générale et d'un point de vue stratégique et, à mon avis, à la lumière des réunions que j'ai eues sur la question, il s'agit d'une tactique de la Russie pour lutter contre l'occident et les principes, valeurs et intérêts occidentaux.
    J'aimerais croire que la Russie reconnaîtra un jour l'indépendance du Kosovo et j'espère que nous pourrons conclure très bientôt un accord de normalisation et de réconciliation avec la Serbie. Grâce à ce dialogue, nous réussirons à faire taire ceux qui s'opposent à l'indépendance du Kosovo et à donner plus d'arguments à ceux qui appuient notre indépendance.
    Encore une fois, le processus d'adhésion du Kosovo aux Nations unies se fera avec la collaboration de nos partenaires. Il ne s'agira pas d'un processus à sens unique. Personnellement, je n'aime pas le modèle palestinien pour le Kosovo. Pas du tout. Après tout, ce sont deux cas très différents.
    Une fois que nous aurons terminé le processus de dialogue avec la Serbie, je doute que les Russes soient plus Serbes que les Serbes eux-mêmes. Si nous convenons avec la Serbie d'une réconciliation, d'une coopération et de bonnes relations de voisinage, quel argument restera-t-il à la Russie pour refuser de reconnaître le Kosovo? À moins qu'elle n'utilise le Kosovo comme intermédiaire dans sa lutte contre nos partenaires.
(1225)
    Le Kosovo n'est pas un ennemi de la Russie, mais elle croit fermement que son avenir repose sur son adhésion à l'OTAN et à l'Union européenne. En aucun cas allons-nous dénier ces valeurs et aspirations.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Vandenbeld, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président, d'être venu au Canada et de comparaître devant notre Comité. Je suis particulièrement honorée de vous accueillir ici, car comme vous le savez, pendant la période cruciale de 2007 à 2008, avec l'appui du gouvernement du Canada, j'ai participé à la mission de l'OSCE au Kosovo à titre de conseillère pour l'Assemblée du Kosovo et les institutions démocratiques émergentes dans ce pays.
    Je suis très impressionnée des progrès accomplis par le Kosovo en ce qui concerne ces institutions, car le pays a veillé à ce qu'elles respectent les principes de pluralité, d'équilibre entre les sexes, de diversité ethnique et d'indépendance. Nous avons observé ces progrès et vous avez souligné certains d'entre eux aujourd'hui.
    J'étais aussi extrêmement heureuse de vous voir déposer un bouquet au Monument au maintien de la paix hier. Comme nous le savons, les Casques bleus canadiens sont partout dans le monde. Lorsque nous observons les progrès accomplis par le Kosovo, nous constatons le bien-fondé et la valeur de la présence des Casques bleus canadiens dans d'autres pays pour faire la promotion de ce type de paix. Je vous remercie donc d'avoir fait cela hier.
    Il y a 10 ans, au mois près, j'ai dirigé une visite d'études au Canada pour les représentants du Kosovo; ils ont étudié notre Parlement, notre tribunal de la fonction publique, le fonctionnement de nos institutions pluralistes et leur indépendance face à l'interférence politique. Je sais qu'un grand nombre de leçons apprises au cours de cette visite ont été mises en oeuvre au Kosovo.
    J'aimerais beaucoup que vous nous parliez de la façon dont le Kosovo a renforcé ses institutions, qu'il s'agisse du Parlement ou des institutions de surveillance et de la fonction publique. Je sais que le Kosovo a une fonction publique très professionnelle et indépendante et qu'elle est composée d'un grand nombre de jeunes talents. Pourriez-vous nous parler des progrès réalisés par ces institutions?
(1230)
S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Le Kosovo a de la chance. Depuis le premier jour — c'est-à-dire depuis la fin de la guerre, en juin 1999 —, notre pays a profité d'une présence internationale civile et militaire. À partir de ce moment-là, nous avons commencé à bâtir des institutions indépendantes en nous fondant sur les suggestions et les conseils reçus, ainsi que sur les leçons apprises auprès de la communauté internationale.
    J'aimerais insister sur le fait que notre pays a connu l'occupation et qu'il a été victime d'un génocide sous Milosevic, mais nous avons également une certaine expérience de travail avec les institutions. Notre société était émancipée. En collaboration avec la communauté internationale, nous avons rédigé des constitutions et un cadre juridique qui respectent les normes internationales les plus élevées. Nous avons bâti des institutions indépendantes pour garantir la séparation des pouvoirs entre les piliers et le fonctionnement démocratique de tous les piliers de la société.
    Un second tour de scrutin municipal a pris fin, hier, au Kosovo. Ces élections ont été justes, démocratiques, transparentes et inclusives. Tous les participants ont immédiatement accepté les résultats de ces élections et leur déroulement a fait l'objet de nombreux éloges. La Commission électorale centrale reçoit toujours des éloges dans l'exercice de ses fonctions. De plus, on félicite toujours les institutions du Kosovo de maintenir leur indépendance, qu'il s'agisse des tribunaux constitutionnels, des tribunaux, des médias ou d'autres institutions concernées. C'est la raison pour laquelle j'aimerais insister sur le fait que le Kosovo a réussi à bâtir une tradition favorisant le respect de la séparation des pouvoirs et des décisions rendues par des institutions indépendantes.
    Manifestement, on peut toujours faire mieux. Encore une fois, j'aimerais souligner, avec fierté, que nous sommes un exemple à suivre dans la région. J'aimerais également préciser que ces institutions — notamment le Bureau du protecteur du citoyen et d'autres institutions importantes — sont maintenant dirigées par des Kosovars, des citoyens de notre pays. Cela signifie que nous avons bâti notre propre capacité de transformer ces institutions en institutions nationales et crédibles pour les citoyens du Kosovo et de fournir des services qui répondent aux normes internationales.
    Bien sûr, le Canada a été l'un des premiers pays à reconnaître l'indépendance du Kosovo. Je n'oublierai jamais ce jour, le 17 février, il y a presque 10 ans. J'ai vu, dans les rues, des hommes âgés au visage ridé et aux yeux pleins de larmes. Ils tenaient la main de leurs enfants, en sachant qu'ils vivraient dans une société pluraliste, démocratique et pacifique. Je n'oublierai jamais cela.
    De nombreux Canadiens se souviennent de l'arrivée des réfugiés et ils peuvent maintenant observer les contributions que ces réfugiés apportent au Canada. Lloyd Axworthy, notre ancien ministre des Affaires étrangères, s'est récemment rendu au Kosovo. Il a déclaré que cela pouvait servir de modèle pour le maintien de la paix dans des régions du monde qui vivent actuellement les événements horribles qu'a vécus le Kosovo. Il a mentionné comment le Canada — et le Kosovo lui-même — pourrait aider le monde d'aujourd'hui en se fondant sur l'expérience du Kosovo et sur la façon dont la collaboration exercée par les membres de la communauté internationale a débouché sur l'indépendance d'un pays; il est d'avis que ces événements pourraient servir de modèle pour d'autres pays.
S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Comme je l'ai dit, l'histoire du Kosovo est l'histoire d'une réussite, mais cette réussite est attribuable à sa collaboration avec la communauté internationale. Nous sommes consolidés à l'interne et sur la scène internationale.
    J'ai également dit que nous n'avons pas seulement des partenaires et des partisans; des gens s'opposent à notre indépendance. Je crois que tout obstacle au renforcement de la consolidation internationale sera surmonté par l'entremise de la collaboration avec des partenaires internationaux, notamment le Canada.
    Le Canada a appuyé notre transition vers la démocratie et la liberté, et tout comme vous n'oublierez pas le jour où nous avons déclaré notre indépendance, je n'oublierai pas le soutien que nous avons reçu des autres pays dans ce projet, notamment du Canada. Le Canada est reconnu au Kosovo. Le rôle qu'il a joué est reconnu par tous les citoyens du Kosovo. Je crois que nous pouvons renforcer notre coopération bilatérale, que ce soit dans le domaine de l'économie, de la diplomatie, de la défense, de la sécurité ou de l'éducation, par l'entremise de valeurs et de principes communs.
    Je suis très fier du fait que de nombreux Kosovars vivent au Canada. Ils forment le lien qui rapproche nos deux nations. Ces gens et leur famille transmettent l'expérience canadienne à la société et aux institutions du Kosovo. Veuillez considérer le Kosovo comme votre partenaire stratégique dans le monde, et cela ne changera pas.
    Aujourd'hui, le Kosovo appuie davantage l'OTAN que certains membres de l'OTAN. Même si l'UE fait l'objet de nombreuses critiques en raison des retards dans l'établissement d'un dialogue avec les Balkans, plus de 90 % des Kosovars sont pour l'adhésion à l'UE — sans mentionner leurs sentiments proaméricains. En effet, ce sont des citoyens très proaméricains; ils aspirent à des valeurs et à des principes occidentaux.
    Dans le cadre de nos discussions avec tous nos partenaires, nous parlons des défis et des problèmes liés aux retards dans l'intégration. Il y a un mois, j'ai discuté de cette question avec M. Pence, à la Maison-Blanche, à Washington. Nous parlons de cet enjeu avec nos homologues de l'Union européenne.
    Permettez-moi de vous parler très ouvertement, entre amis, de ma plus grande préoccupation. Ma plus grande préoccupation — et je ne suis pas préoccupé seulement au sujet du Kosovo, mais au sujet de l'ensemble des Balkans occidentaux et de l'Europe du Sud-Est —, c'est que l'OTAN et l'UE ne devraient pas retarder l'élargissement et l'intégration des Balkans occidentaux. Nous avons tous été heureux d'apprendre l'adhésion du Monténégro à l'OTAN, car cela envoyait un message percutant à l'ensemble des Balkans occidentaux. Tout retard causé par l'OTAN et par l'UE crée un vacuum qui sera utilisé par la Russie et d'autres pays aux idéologies anti-Occident.
    La Russie exerce une grande influence aujourd'hui — certainement en Serbie. Elle influence l'économie, les médias, l'armée, les services de renseignements, la concurrence politique et tous les aspects de la vie en Serbie. Elle influence d'autres régions du monde où se trouvent des communautés serbes, particulièrement en Bosnie. Les Russes ont tenté d'influencer le Monténégro et d'empêcher la mise en oeuvre d'autres réformes. Même si les Russes perdent du terrain, ils n'ont pas abandonné leurs tentatives visant à déstabiliser le Monténégro.
    Ils ne seront pas en mesure de pénétrer le Kosovo et d'y exercer une telle influence, bien sûr, mais il y a toujours Sputnik en Russie, qui est immédiatement traduit dans les médias partout dans le monde, y compris dans les médias du Kosovo. Il y a de fausses nouvelles sur le Kosovo et ses dirigeants et sur les Balkans occidentaux. Les retards provoqués par l'OTAN et l'UE sont également utilisés par des éléments extrémistes et radicaux, qu'il s'agisse de l'islam radical, du fondamentalisme ou d'autres éléments.
    Le Kosovo est déterminé à lutter contre ces éléments et contre le terrorisme, et j'en suis très fier. Je suis très heureux que nous ayons reçu des éloges de tout le monde, même du président Obama et de son vice-président, et maintenant du président Trump et du vice-président Pence. Nous continuerons de lutter contre l'extrémisme et le terrorisme sans compromis.
(1235)
    Nous avons l'expérience nécessaire. Nous avons adopté les lois nécessaires. Maintenant, des institutions de l'État de droit luttent contre ces phénomènes.
    Nous avons identifié tous les individus qui sont allés en Syrie et en Irak pour se joindre à l'État islamique. Manifestement, nous devons être rationnels et rester déterminés à poursuivre cette lutte, surtout lorsque ces gens reviennent au Kosovo, et nous devons trouver des façons de composer avec eux et leur famille. Nous avons discuté de cet enjeu à Pristina et avec nos partenaires et nos alliés au sein de la coalition mondiale contre le terrorisme. Le Kosovo, un pays qui avait besoin de paix, a aujourd'hui la capacité d'exporter la paix et de l'appuyer à l'échelle mondiale. C'est la raison pour laquelle notre pays doit devenir membre d'organisations internationales dès que possible.
(1240)
    Merci, madame Vandenbeld.
    La parole est maintenant à Mme Laverdière.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Thaçi, de votre présence et de votre présentation d'aujourd'hui.
    Vous parlez un peu français, je pense.
    Vous avez mentionné les efforts, la tolérance et la coexistence entre les diverses communautés. J'ai cru comprendre qu'une entente récente donnerait plus d'autonomie aux régions à majorité ethnique serbe, au Kosovo.
    Pourriez-vous nous parler un peu plus longuement de ce sujet?

[Traduction]

S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Mettons les choses au clair. En 2013, nous avons conclu une entente pour la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie. C'était la première entente.
    Le premier point de cette entente consistait à demander la création d'une association de municipalités à majorité serbe. Cette proposition a été présentée au tribunal constitutionnel du Kosovo, qui l'a approuvée. Maintenant, les institutions du Kosovo ont l'obligation de créer — et ils créeront — l'association des municipalités kosovares à majorité serbe, dont le fonctionnement sera conforme à la constitution et aux lois de la République du Kosovo.
    C'est une autre étape vers l'accommodation de la communauté serbe du Kosovo, mais ce n'est pas une étape qui vise à lui donner l'autonomie et des pouvoirs législatifs ou exécutifs. Cela ressemble aux autres associations de municipalités du Kosovo. Chaque municipalité sera autorisée à se joindre à cette association si elle le souhaite. Cela correspond tout à fait aux normes européennes en matière d'autonomie gouvernementale. C'est une obligation que le Kosovo a assumée, et le Kosovo la remplira. Nous créerons une association des collectivités à majorité serbe dans le cadre des efforts visant à accommoder toutes les communautés au Kosovo.

[Français]

    Je vous remercie.
    Ce comité a fait, il y a quelques mois ou l'année dernière, une étude sur la question des femmes, de la paix et de la sécurité. On a pu constater à quel point l'implication des femmes, surtout en situation de reconstruction, était importante. Cependant, évidemment, ce n'est pas toujours facile et ce n'est pas toujours automatique. Je crois comprendre, par exemple, qu'au Kosovo le taux de chômage chez les femmes est particulièrement élevé, entre autres.
    Avez-vous pris des mesures particulières pour intégrer les femmes au dialogue social et à la reconstruction et pour faire un peu de ce qu'on appelle — je suis désolée, mais le mot fonctionne mieux en anglais — women empowerment?

[Traduction]

S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Le rôle des femmes au Kosovo ne se limite pas à la participation à la prise de décisions, car les femmes jouent également un rôle dans la gouvernance de la République du Kosovo. On peut toujours faire mieux, mais 30 % des députés du parlement du Kosovo, par exemple, sont des femmes. C'est un quota exigé par la loi.
    D'un autre côté, je suis très fier de dire que dans une période de transition démocratique, le Kosovo a été le premier pays des Balkans occidentaux à avoir une femme présidente et chef d'État. En effet, Mme Jahjaga m'a précédé à la présidence.
    Aujourd'hui, la Commission électorale centrale est dirigée par une femme. Le tribunal de première instance à Pristina est dirigé par une femme. Le tribunal constitutionnel est dirigé par une femme. Nous avons des ambassadrices aux Nations unies et aux États-Unis. Nous avons des femmes ministres, même si j'aimerais qu'il y en ait davantage. C'est une lutte entre les partis politiques et parfois, l'orgueil l'emporte sur les principes.
    Nous avons également eu des élections, et des femmes se sont présentées comme candidates à la mairie dans un grand nombre de ces élections. Je peux affirmer qu'elles sont également représentées au sein de la Force de sécurité du Kosovo, car les femmes représentent presque 10 % de ses effectifs. De plus, les effectifs des services de police du Kosovo comptent 20 % de femmes, et c'est la même chose dans toutes les autres institutions.
    Évidemment, nous ne nous arrêterons pas là, mais il faut reconnaître cette réussite. Nous tentons de créer des occasions de participer à la gestion des institutions de la société, mais également des occasions de les diriger. Les médias de la société civile représentent également un milieu dans lequel les femmes assument de plus en plus un rôle de leadership. Nous avons accompli des progrès notables à cet égard.
    J'aimerais également répéter que le Kosovo est essentiellement un pays à majorité musulmane, mais qu'il s'agit d'un islam européen traditionnel. Ce n'est pas un pays musulman, mais un pays avec un islam européen. Nous avons subi certaines perturbations au cours de notre histoire, mais le Kosovo n'a jamais perdu ses racines. Il revient à ses racines, c'est-à-dire l'adoption d'une identité européenne.
    La première condition pour y arriver consistait à gagner notre liberté. Nous avons seulement été en mesure de parler pour nous-mêmes et de prendre nos propres décisions ces 20 dernières années. Nous commençons seulement à renforcer nos capacités.
(1245)

[Français]

    Je vous remercie.
    Je vais céder la parole à mes collègues, mais j'aimerais d'abord souligner que, avec 30 % de femmes députées, vous faites mieux que le Canada.

[Traduction]

S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Merci.
    Je me doutais qu'elle répondrait cela.
    Alley-y, monsieur Wrzesnewskyj.
     Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le président. C'est un honneur de vous accueillir devant le Comité aujourd'hui. C'est un honneur spécial pour un grand nombre de résidents d'Etobicoke, car ils regardent cette réunion à la télévision.
    De nombreux résidents d'Etobicoke sont Kosovars. Ce sont de fiers Canadiens. Ils sont également très fiers de leurs racines et des progrès accomplis par le Kosovo depuis son indépendance. Toutefois, malgré tous les progrès accomplis, ils craignent que la guerre et les conflits affligent de nouveau les Kosovars.
    J'ai remarqué que le Centre kosovar des études sur la sécurité publie occasionnellement des recherches sur les menaces graves à la sécurité. Le mois dernier, ce centre a publié un document intitulé L'interférence de la Russie au Kosovo: Comment et pourquoi? J'aimerais vous lire le début du résumé de cette étude:
Le Kosovo est exposé à une véritable campagne d'interférence menée par la Russie contre son modèle de renforcement de l'État occidental et ses valeurs démocratiques, surtout depuis 2008. De nombreux instruments subversifs et non militaires... continuent d'être utilisés contre un Kosovo multiethnique en vue de créer le prétexte nécessaire pour déclarer un État défaillant et promouvoir le séparatisme local au sein de la communauté serbe du Kosovo dans les municipalités du Nord.
    J'aimerais me concentrer sur les « instruments subversifs et non militaires » que la Russie semble utiliser au Kosovo.
    Vous avez fait référence à la menace présente dans les États voisins, par exemple au Monténégro. Au XXIe siècle, il est ahurissant qu'un premier ministre d'un pays européen puisse être la victime potentielle d'une tentative d'assassinat — qui a maintenant été bien documentée — par les services spéciaux russes en raison de sa position favorable à l'égard de l'OTAN. Toutefois, dans les Balkans, et surtout au Kosovo, il semble que la Russie utilise des outils particuliers pour ses opérations spéciales. En effet, ces outils ne sont pas nécessairement bien connus en Occident, où ils sont contre-intuitifs.
    Le rapport mentionne la « construction du Centre humanitaire russe-serbe dans la ville de Nis », qui est située à « moins de 100 kilomètres de Pristina. » Malgré son nom, il semble qu'il s'agit d'un avant-poste pour l'armée et les services de renseignements russes, ce qui signifie que cet outil particulier est à leur disposition.
    Une chose que nous ne comprenons pas très bien, car nous avons une longue tradition de séparation de l'Église et de l'État, c'est qu'il semble que l'Église orthodoxe russe est souvent utilisée dans le cadre d'opérations spéciales lors de certains jeux géopolitiques. Nous pouvons constater que l'Église orthodoxe serbe est utilisée comme outil lorsque ces jeux se déroulent dans les Balkans.
    J'ai remarqué que la Russie est passée par l'UNESCO pour fournir un financement important aux monastères serbes au Kosovo, en plus d'y envoyer des moines. On soupçonne que ces gens ne sont pas réellement des moines et qu'ils ne sont pas là pour répondre à des besoins spirituels. En même temps, ils ont bloqué les tentatives du Kosovo de se joindre à l'UNESCO.
    J'aimerais que vous approfondissiez ce sujet, car c'est un enjeu auquel l'Occident n'est pas confronté. En effet, il va à l'encontre de la culture politique.
(1250)
S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Je vous remercie beaucoup pour cette question.
    J'ai mentionné plus tôt les tentatives de la Russie pour déstabiliser la région. Elles touchent tellement de niveaux et tous les pays de la région. Elles visent d'abord à ralentir les réformes dans l'Ouest des Balkans ou à les faire échouer.
    Vous avez cité le pire exemple, en fait, dans le Monténégro. La Russie a essayé d'empêcher ce pays de devenir membre de l'OTAN. Le Monténégro n'a pas été un champ de bataille entre partis politiques mais celui d'une bataille stratégique de la Russie qui essayait de l'empêcher de faire partie de cette organisation. C'est la raison pour laquelle nous sommes si heureux de son adhésion.
    Vous avez parlé du centre, à Nis. Nous savons tous que c'est un nid d'espionnage, de surveillance, qui n'a rien à voir avec les questions humanitaires. Il n'observe pas seulement le Kosovo, mais, aussi, l'Albanie, le Monténégro, la Macédoine et tous ces autres pays. Je conseille à tous nos amis de Washington, de Bruxelles et de partout ailleurs de commencer à considérer l'Ouest des Balkans d'un point de vue stratégique. Ce n'est pas seulement une question technique de mise en oeuvre d'accords.
    Malheureusement, les adversaires de l'intégration euro-atlantique ne regardent pas aux moyens. Ainsi, ils prétendent que le Kosovo est un État en déconfiture, à l'aide de nouvelles truquées qui sont immédiatement traduites dans les médias internationaux et ceux du Kosovo. Malheureusement, les gens lisent ces pires calomnies.
    D'autres parties des Balkans ne sont pas épargnées. Comme je l'ai dit, ces tentatives ne réussiront pas à changer les attitudes et les aspirations du peuple du Kosovo, mais elles déforment l'image du pays. C'est ce que la Russie fait, tous les trois mois, dans son rapport au Conseil de sécurité des Nations unies, tout comme Poutine, ou partout où elle en a la chance, que ce soit au Conseil de l'Europe, par le truchement de certains députés du Parlement européen ou par les médias proches des oligarques russes.
    C'est vraiment la dernière occasion, pour nos partenaires, de prendre au sérieux ce besoin de raffermir la position internationale du Kosovo. Après tout, c'est un projet commun. Nous sommes loyaux envers nos partenaires internationaux, en ne songeant même pas à d'autres solutions. Nous n'en avons pas. Membre de l'OTAN ou de la Russie, c'est l'un ou l'autre. Avec Bruxelles, nous n'agissons pas comme la Serbie, qui joue toujours la carte russe: « Donnez-nous quelque chose, et nous serons d'accord avec vous; sinon, nous suivrons la Russie. »
    Les tergiversations de l'Union européenne ne sauraient épuiser notre patience, mais nous sommes incapables de neutraliser l'éclairage négatif que la Russie projette sur notre pays. Notre pays a l'obligation de combattre les tentatives de la Russie. Je ne peux pas nier celles qui visent à pénétrer le Kosovo et y exercer son influence, par les médias ou les entreprises.
    Comme je l'ai dit, la Russie a un bureau de liaison et des affidés à Pristina, des complices dans le Nord du Kosovo, à Mitrovica, et, c'est un secret de polichinelle, elle a même recruté le service paramilitaire en Ukraine pour le faire combattre au côté des forces prorusses.
    Pour nous, il reste très important de coordonner nos efforts avec tous nos partenaires internationaux, pour nous comprendre mutuellement et parachever la consolidation de l'État du Kosovo sur la scène internationale.
(1255)
    Je ne crois pas que le veto de la Russie au Conseil de sécurité ne cible uniquement le Kosovo. Ça ne s'arrête pas là. Je l'ai entendu de la bouche de Lavrov et de Tchourkine: ce n'est pas nous qu'ils combattent, mais les partisans de notre indépendance, l'Ouest, donc vous aussi, le Canada. Telle est la réalité.
    Chers collègues, je tiens, au nom du Comité, à remercier le président du Kosovo Hashim Thaçi de nous avoir fait l'honneur insigne et le plaisir de nous rencontrer. Les Canadiens profiteront manifestement de ce compte rendu direct sur l'évolution de la situation et les efforts qu'elle suscite. Les membres de tout gouvernement et ceux qui en faisaient partie il n'y a pas longtemps savent que chaque jour apporte un défi et exige des qualités de chef, une main ferme et beaucoup d'amis et d'alliés. Nous croyons que le Canada est l'un de ceux du Kosovo.
    Nous tenons à vous remercier très sincèrement de nous avoir fait passer une heure de très grande qualité. Merci, monsieur le président.
S.E. M. Hashim Thaçi (interprétation):
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, cela conclut notre séance. Nous nous revoyons jeudi.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU