LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 18 avril 2024
[Enregistrement électronique]
[Français]
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 95e réunion du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(3) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 20 septembre 2023, le Comité reprend son étude portant sur le financement fédéral des établissements d'enseignement postsecondaire de la minorité de langue officielle.
J'abrège les consignes en ce qui concerne Zoom, puisque tout le monde connaît maintenant le fonctionnement de cette plateforme, depuis la pandémie. Je demanderais simplement à ceux qui participent à la réunion de façon virtuelle de se mettre en sourdine jusqu'à ce qu'ils aient la parole.
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins. Nous recevons d'abord deux représentants de la Commission nationale des parents francophones: Mme Gillian Anderson, qui est la présidente de l'organisme, donc la mère supérieure, ainsi que M. Jean‑Luc Racine, qui en est le directeur général. Par vidéoconférence, nous recevons ce jeune homme, M. Simon Thériault, qui est président de la Fédération de la jeunesse canadienne-française.
Je vous explique le déroulement de la réunion. Je pense qu'il s'agit pour vous trois d'une première visite au Comité permanent des langues officielles. Vous êtes chanceux, c'est le comité de l'heure sur la Colline du Parlement. Nous procéderons à un premier tour de questions, où chacune des formations politiques disposera de six minutes pour poser des questions et entendre vos réponses. Avant de commencer le tour de questions, nous vous donnons la parole pendant cinq minutes au maximum. Je suis fatigant et très sévère pour le temps. En fait, plus nous respectons le temps de façon serrée, plus nous pouvons faire de tours de questions.
Nous allons commencer par vous, madame Anderson. La parole est à vous pour un maximum de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, bonjour.
Je m'appelle Gillian Anderson et je suis la présidente de la Commission nationale des parents francophones, ou CNPF.
Fondé en 1988, notre réseau de 12 organismes représente les parents vivant en milieu minoritaire qui choisissent de faire une place au français dans leur vie et dans celle de leurs enfants. Ces parents se trouvent souvent dans une famille exogame ou plurilingue.
Je vous remercie d'avoir invité la CNPF à témoigner devant vous aujourd'hui pour aborder la question du financement fédéral des établissements d'enseignement postsecondaire de la minorité de langue officielle. J'aimerais m'attarder sur les nombreux besoins et inquiétudes des parents quant à la possibilité pour leurs enfants de poursuivre des études en français.
Le parent est le premier éducateur de son enfant, mais aussi sa première source de soutien émotionnel et informatif, de la petite enfance jusqu'à l'âge adulte. Une étude mentionne que le soutien informatif et émotionnel offert par les parents est la source de soutien la plus importante pour les adolescents. À cet égard, les parents arrivent même devant les enseignants et les conseillers d'orientation. Le parent est donc aux premières loges quand vient le temps de penser à l'éducation postsecondaire de son enfant.
Malheureusement, le parent se sent très mal outillé lorsque vient le temps d'accompagner son adolescent vers des études postsecondaires en français. En soi, l'orientation vers le postsecondaire n'est déjà pas simple. Il y a de nombreuses options disponibles et il s'agit d'une grande étape de vie pour le jeune et pour son parent. En outre, si l'on souhaite continuer ses études en français, tout se complexifie. En réalité, il y a un manque d'accès aux établissements postsecondaires francophones et un manque de visibilité.
De plus, plusieurs parents ont noté qu'il était difficile de trouver de l'information sur les programmes de formation et les établissements francophones existants. Parfois, la promotion de la formation postsecondaire en français faite dans une école secondaire vise uniquement celle de l'établissement postsecondaire francophone de la communauté, ce qui laisse peu de choix. Il est primordial d'avoir un accès facile et complet aux informations relatives à la formation et à tous les programmes francophones offerts.
Par ailleurs, il serait souhaitable que les conseillers d'orientation dans nos écoles francophones offrent un meilleur encadrement aux parents. Des rencontres périodiques avec les parents et leurs jeunes fourniraient le soutien nécessaire afin que les parents puissent mieux appuyer leurs adolescents lorsque vient le temps de les accompagner dans leurs choix.
Rien ne garantit qu'un adolescent ayant une forte identité culturelle et communautaire francophone poursuivra ses études postsecondaires en français. En effet, tout dépend de l'offre active de programmes de formation en français. Il existe au Canada un grand déséquilibre entre l'offre de programmes en français dans les établissements postsecondaires et celle en anglais. Nous avons besoin d'un plus grand nombre et d'une plus grande diversité de programmes en français au sein des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ces programmes doivent être répartis d'un bout à l'autre du pays.
Actuellement, plus de la moitié des programmes de formation donnés en français en contexte minoritaire sont offerts par l'Université d'Ottawa. Selon une étude, bien que la population francophone des provinces de l'Ouest représente 19,8 % de la population des communautés francophones en situation minoritaire, les programmes offerts en français dans cette région ne représentent que 7,9 % de l'offre totale.
Selon cette même enquête, 27,5 % des personnes qui ont étudié en français ont migré vers une autre province, comparativement à 10,3 % pour celles qui ont étudié seulement en anglais.
S'exiler de sa communauté pour poursuivre son parcours scolaire en français est la réalité de bien des francophones. Très souvent, les personnes qui quittent leur communauté n'y reviennent jamais. Cet exode a une incidence importante sur la vitalité et la pérennité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. C'est sans compter que se déplacer hors de sa communauté est dispendieux.
À cet égard, il est prouvé qu'étudier en français au postsecondaire en contexte minoritaire génère des coûts plus élevés et un plus grand endettement pour les étudiants. Selon une étude, les personnes qui ont étudié en français à l'université ont une dette moyenne plus élevée que celles qui ont étudié en anglais. À cela s'ajoutent pour elles les frais liés à la mobilité, engendrés par l'obligation de se déplacer hors de leur communauté. Une plus grande offre de bourses scolaires pour les francophones qui poursuivent leurs études postsecondaires en français ainsi que des bourses de mobilité pour les personnes étant obligées de s'exiler favoriseraient le choix d'étudier en français au niveau postsecondaire.
En conclusion, il y a un besoin urgent de prendre des mesures concrètes afin de mieux outiller le parent pour qu'il puisse accompagner son adolescent vers le postsecondaire en français. Plus de programmes de formation en français doivent également être offerts afin que les étudiantes et les étudiants puissent choisir le programme d'études qui les passionne sans avoir à s'exiler. Enfin, pour une meilleure équité, nous avons besoin de plus de programmes de bourses afin de réduire l'endettement des jeunes francophones faisant le choix de poursuivre leurs études postsecondaires en français.
Je vous remercie de l'attention que vous m'avez accordée aujourd'hui.
Cela nous fera plaisir de répondre à vos questions.
Merci, madame Anderson.
Avant d'aller plus loin, je voudrais souligner que les tests de son ont été concluants pour toutes les personnes qui participent à la réunion virtuellement. Tout est donc conforme.
Je cède la parole à M. Thériault pour les cinq prochaines minutes.
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous.
En tant que président de la Fédération de la jeunesse canadienne-française, ou FJCF, je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour présenter notre position sur le financement fédéral des établissements d'enseignement postsecondaire de la minorité de langue officielle.
Je tiens à préciser que les terres sur lesquelles je me trouve font partie du territoire traditionnel non cédé des peuples micmacs.
La FJCF est un organisme national géré par et pour les jeunes d'expression française au Canada. Nos membres sont des organismes jeunesse basés dans neuf provinces et trois territoires qui représentent les intérêts des jeunes d'expression française de 14 à 25 ans. Notre expertise repose donc sur le vécu des jeunes, et c'est sous cet angle que nous vous présentons nos observations aujourd'hui.
Comme vous le savez sans doute, le choix d'un établissement postsecondaire peut être complexe. Dans mon cas, en tant que jeune du nord du Nouveau‑Brunswick, j'avais des options restreintes si je voulais étudier en français au postsecondaire. Je pouvais choisir de rester à la maison et ainsi avoir accès à une offre très limitée de programmes dans un campus satellite, de déménager dans un centre urbain de ma province ou encore d'aller étudier au Québec. Mon cas n'est certainement pas unique. Les jeunes de nos communautés sont trop souvent dans l'obligation de parcourir de longues distances ou encore de déménager s'ils désirent poursuivre leurs études en français dans le domaine de leur choix, et cela se fait à un coût important.
Malgré tout, je m'adresse à vous aujourd'hui en étant dans une position privilégiée, je le reconnais. En fait, je suis chanceux. J'ai des amis qui ont dû déménager dans une autre province afin de poursuivre leurs études postsecondaires en français. Puisque les coûts associés à un déménagement loin de la maison sont beaucoup trop élevés pour certaines personnes, celles-ci sont contraintes à suivre un programme de façon virtuelle, ou elles n'ont rien du tout. Soyons honnêtes: il n'est pas facile de faire des études postsecondaires derrière un écran, et plusieurs personnes finissent par abandonner leurs études. Pour d'autres, l'insécurité linguistique, l'offre restreinte de programmes ou une simple méconnaissance des établissements francophones font qu'elles vont tout simplement choisir un établissement anglophone.
Outre les choix de programmes, les jeunes sont également soucieux des services auxquels ils peuvent accéder sur leur campus. En effet, les services en santé mentale, les services d'appui à la réussite étudiante et les services d'accommodement sont essentiels pour assurer une meilleure réussite et réduire le taux de décrochage. Malheureusement, ces services sont parfois trop peu disponibles ou méconnus dans nos établissements.
Reconnaissant les enjeux d'accès pour les jeunes qui souhaitent poursuivre leurs études postsecondaires en français, le gouvernement du Canada a créé, en 2018, un programme de bourses d'études pour les jeunes ayant le français comme langue seconde. C'est un programme qui a fait ses preuves. Toutefois, je vous assure que les embûches auxquelles se heurtent les jeunes ayant le français comme langue seconde, en ce qui a trait aux études postsecondaires en français, se dressent tout autant sur le chemin des jeunes de langue maternelle française. Il est donc complètement insensé que ce programme de bourses ne soit pas accessible aux milliers de jeunes qui fréquentent fièrement une des 760 écoles de langue française à l'extérieur du Québec.
Les espaces francophones communautaires dont nous avons besoin sur les campus pourraient aussi aider à assurer cette transition et permettre d'établir de meilleurs ponts entre la communauté, les établissements et les étudiantes et les étudiants. Ces espaces permettraient de favoriser le sentiment d'appartenance chez les jeunes d'expression française et de tisser des liens importants entre les jeunes. La vie étudiante est un facteur majeur quand vient le temps de choisir un établissement postsecondaire, et le réseau d'amis que les jeunes s'y créent contribue au succès de leurs études ainsi qu'à la rétention des jeunes dans nos établissements et dans nos communautés.
Pour plusieurs jeunes, la mobilité est un besoin. Elle est même nécessaire au succès de leurs études, car elle leur permet de vivre des expériences pédagogiques variées. La mobilité permet également à la jeunesse d'en apprendre sur toutes nos communautés francophones, d'un bout à l'autre du pays. Imaginez ce qu'il en serait si nos établissements avaient les ressources pour travailler ensemble afin d'assurer une mobilité des étudiantes et des étudiants.
Le développement des connaissances, la construction identitaire et l'engagement sont essentiels au développement et, surtout, à la pérennité de nos communautés francophones en situation minoritaire. Il ne fait aucun doute que les établissements d'enseignement postsecondaire dans nos communautés jouent un rôle essentiel dans le développement communautaire. Ces établissements nécessitent un appui fort et soutenu, que ce soit pour créer des infrastructures, pour bonifier l'offre de programmes modernes et convoités, pour se concerter, pour offrir des services spécialisés à leurs étudiantes et leurs étudiants, ou encore pour développer la vie étudiante sur les campus. Le renforcement des capacités de nos établissements d'enseignement postsecondaire en français est un investissement stratégique du gouvernement fédéral dans nos communautés.
Je vous remercie de votre écoute. Je demeure disponible pour répondre à vos questions.
Merci, monsieur Thériault.
Les deux témoins ont respecté leur temps de parole. Ils sont disciplinés. J'espère que les membres du Comité le seront tout autant.
Nous entamons le premier tour de questions, où chacune des formations politiques disposera de six minutes, à commencer par le Parti conservateur.
Monsieur Godin, vous avez la parole pour six minutes.
Merci, monsieur le président. Nous allons essayer de prêcher par l'exemple pour ce qui est de la discipline.
Madame Anderson, monsieur Racine et monsieur Thériault, merci d'être des nôtres ce matin.
Permettez-moi de souligner le dynamisme et l'enthousiasme de M. Thériault. C'est inspirant de voir un jeune être aussi impliqué et présenter des commentaires aussi pertinents. Je tenais à le dire, parce que la jeunesse est notre avenir.
Madame Anderson, dans votre allocution, vous avez dit qu'il y avait des besoins urgents pour accompagner les parents. Selon vous, quel serait le premier geste concret que nous, le législateur, devrions poser pour que les parents puissent être accompagnés de façon efficace?
J'ai des adolescents de 19, 17 et 15 ans, alors je suis en plein milieu de la situation dont on parle.
Il n'y a pas assez de soutien dans les écoles. Les jeunes n'ont pas suffisamment accès à des conseillers d'orientation. Par exemple, mon fils aimerait poursuivre ses études au postsecondaire l'année prochaine, mais il ne reçoit aucun soutien. C'est à moi de faire tout le travail de recherche. Même si je suis bien intégrée à la communauté francophone, je manque de repères pour l'aider comme il faut. À l'inverse, son meilleur ami, qui fréquente l'école anglophone de l'autre côté de la rue, a reçu un accompagnement depuis la 10e année et a déjà choisi ses cours pour l'année prochaine. Mon fils n'a pas reçu un quart de ce soutien dans son école. C'est un gros problème.
Ils vont à différentes écoles. L'école francophone est située d'un côté de la rue et l'école anglophone, de l'autre. Les services de soutien offerts de part et d'autre sont complètement différents.
Vous dites donc qu'en Alberta, dans une école francophone, il n'y a pas de conseiller d'orientation.
Une conseillère est présente une journée par semaine. Elle offre ses services dans cinq différentes écoles secondaires du conseil scolaire.
Cette situation nuit donc à l'orientation de nos jeunes qui veulent poursuivre leurs études en français.
Alors, selon vous, augmenter les services pour bien orienter nos jeunes devrait être une priorité. Les conseils offerts par un parent, c'est bien, mais parfois les conseils qui viennent de l'extérieur sont plus...
Exactement. Les jeunes ont besoin de soutien pour planifier leur parcours postsecondaire. Ils doivent choisir les bons cours en 10e année en fonction de ce qu'ils veulent faire. Ils doivent se préparer de façon à avoir tout ce qu'il leur faut, à la fin de leur 12e année, pour poursuivre leurs études au niveau postsecondaire. Ils doivent aussi avoir un plan B pour savoir quoi faire s'ils ne sont pas admis dans le programme d'études qu'ils ont choisi. Qui doit mettre en place ce plan B? Est-ce que ça incombe à moi, comme parent? Est-ce que ça incombe à l'école? Il n'y a vraiment pas de communication ni de soutien à cet égard.
Si je comprends bien, les services de conseillers d'orientation seraient une piste de solution à ces problèmes, mais il y a un manque de ressources.
Est-ce qu'un jeune qui veut poursuivre ses études en français en Alberta peut choisir un programme qu'il pourra suivre en français du début jusqu'à la maîtrise?
Merci beaucoup.
Monsieur Thériault, dans votre allocution, vous avez parlé d'un nouveau programme de bourses qui existe depuis quelques années. Vous avez dit qu'une certaine clientèle avait accès à ce programme de bourses, mais qu'une autre n'y avait pas accès. Pouvez-vous nous expliquer cette situation?
Actuellement, ces bourses sont destinées aux étudiants ayant le français comme langue seconde qui poursuivent leurs études en français. On parle donc d'élèves qui ont étudié dans des écoles ou des programmes d'immersion française. Toutefois, ce programme de bourses ne s'adresse pas aux élèves qui ont fait leurs études secondaires dans des écoles francophones et dont le français est la langue maternelle.
Ce que nous demandons, c'est un programme de bourses qui permettrait aux jeunes francophones qui étudient dans une école francophone d'avoir accès à des bourses pour poursuivre leurs études dans un établissement d'enseignement postsecondaire francophone.
Vous dites donc que les jeunes qui sont en immersion française ont accès à ce programme, mais que les jeunes francophones qui veulent poursuivre leurs études en français, et qu'on ne veut pas perdre au profit du système anglophone, n'ont pas accès aux bourses offertes dans le cadre de ce nouveau programme du gouvernement.
En quelle année ce programme a-t-il été créé?
Ce programme a été inclus dans l'ancien Plan d'action pour les langues officielles, soit celui de 2018‑2023.
Nous demandons un nouveau programme de bourses qui permettrait aux jeunes francophones de poursuivre leurs études postsecondaires en français, étant donné qu'ils font face aux mêmes défis.
À votre connaissance, ce programme ne fait pas partie du Plan d'action pour les langues officielles 2023‑2028.
Monsieur Thériault, vous avez suggéré qu'on augmente les bourses ou qu'on les rende plus accessibles aux jeunes. Si je me souviens bien, vous avez aussi mentionné que les programmes d'études n'étaient pas nécessairement accessibles ou qu'ils n'étaient pas assez nombreux, ce qui provoque l'exode des jeunes. Ils doivent quitter le milieu où ils sont nés ou leur province, ce qui fait augmenter les coûts pour eux.
Nous sommes le législateur. Nous sommes là pour trouver les moyens les plus efficaces. Comme vous le savez, l'argent ne tombe pas du ciel. Si nous devions faire un choix, ferions-nous mieux d'investir dans les bourses pour nos jeunes ou dans les établissements d'enseignement postsecondaire pour que les programmes d'études en français soient plus accessibles et plus diversifiés?
C'est une excellente question, monsieur Godin, mais les six minutes dont vous disposiez sont écoulées. On pourra y revenir plus tard.
C'est maintenant au tour des libéraux. Je donne la parole pour six minutes à M. Samson.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie mes collègues de la CNPF d'être venus témoigner. Je remercie également M. Thériault.
Madame Anderson et monsieur Racine, je dois dire que la CNPF a toujours été très près de mon cœur. Je suis donc extrêmement content que vous soyez ici. Vous avez parlé du postsecondaire et j'en reconnais l'importance, mais la petite enfance me préoccupe beaucoup, aussi. Votre organisme a des objectifs clés en matière de petite enfance également. Le rôle que vous jouez depuis longtemps a contribué à amener les écoles francophones sur le chemin du succès.
Mes questions seront très rapides.
Comment les changements apportés par l'entremise du projet de loi C‑35 pourront-ils aider votre association?
Ça va sûrement aider à la rétention des élèves dans nos écoles. Ça va inciter les parents à les inscrire dans nos programmes en premier lieu, parce qu'il y aura beaucoup plus de choix, de possibilités et de financement pour la petite enfance. Ce sont des places qui n'existaient pas par le passé. Il s'agit donc d'un très grand ajout pour la communauté. Ça s'inscrit dans le continuum.
Madame Anderson, j'aimerais vous poser des questions pointues.
Si des parents n'ont pas accès à un service de garde dans une école francophone pour leur enfant, croyez-vous qu'ils choisiront l'école francophone ou qu'ils choisiront probablement une école anglophone?
Croyez-vous que le manque de places dans les services de garde en milieu scolaire va entraîner plus d'assimilation?
On reconnaît donc que le projet de loi C‑35 améliore la situation.
Le budget de 2024 parle de la petite enfance. Pouvez-vous nous dire de quelle façon cela va vous aider?
Cela va sûrement créer plus de places pour les parents qui veulent inscrire leurs enfants à la garderie, à la prématernelle ou à des services pour la petite enfance en français. C'est le début du continuum. Comme on dit, c'est la base de la pyramide. Il faut établir une base solide si on veut que ça se poursuive jusqu'au sommet. Nous travaillons à chacune des étapes de ce continuum.
Quand j'étais directeur général d'un conseil scolaire en Nouvelle‑Écosse, nous avions presque doublé notre population étudiante en l'espace de 10 ans en établissant un programme de maternelle dès l'âge de 4 ans. Des parents de familles exogames n'étaient pas certains d'inscrire leurs enfants à l'école francophone parce qu'ils pensaient que ceux-ci ne parlaient pas assez bien français. Grâce à l'établissement du programme de maternelle pour les enfants de 4 ans, qui n'est pas officiellement un programme scolaire, il s'est bâti des liens entre les parents et l'école, et maintenant les parents hésitent moins à y inscrire leurs enfants.
Voyez-vous cela ailleurs au pays?
Oui. Nous recevons même des témoignages de parents qui, bien qu'ils soient tous les deux francophones, sont obligés d'inscrire leurs enfants dans des garderies anglophones. Nous avons vu des cas très concrets en Nouvelle‑Écosse et en Alberta, notamment. Par la suite, ils décident d'inscrire leurs enfants dans des écoles anglophones, parce qu'ils ont peur que leurs enfants ne soient pas suffisamment à l'aise en français pour réussir.
Il s'agit donc d'un problème, et il faut trouver une solution.
Vous proposez une piste de solution. C'est votre travail acharné qui permet à ce dossier très important d'avancer.
Monsieur Thériault, je ne vous ai pas oublié. Vous venez du Nouveau‑Brunswick, n'est-ce pas?
C'est très bien, c'est juste à côté de ma province. Comme vous le savez bien, je viens de la Nouvelle‑Écosse. Le Nouveau‑Brunswick et la Nouvelle‑Écosse ont beaucoup travaillé en collaboration dans ce dossier.
Vous avez mentionné que le Canada comptait aujourd'hui 760 écoles francophones à l'extérieur du Québec. Vous connaissez très bien vos dossiers, c'est impressionnant. À l'époque de ma scolarité, il n'y avait pas d'écoles francophones chez nous. Aujourd'hui, les enfants ont accès à des écoles francophones partout au Canada. Il y a donc un nombre énormément plus grand d'élèves dans les écoles francophones. Alors, pourquoi ne voit-on pas un plus grand nombre d'étudiants issus des écoles francophones dans les universités et les établissements d'enseignement postsecondaire francophones?
C'est une très bonne question. Vous posez des questions sur la petite enfance et vous mettez le doigt au bon endroit. L'important, c'est de recruter les jeunes au début du continuum, dès la petite enfance, afin qu'ils aillent ensuite à l'école en français et qu'ils poursuivent leur parcours au secondaire en français. Il est important de les garder dans nos établissements pour s'assurer qu'ils fréquenteront par la suite des établissements d'enseignement postsecondaire francophones. Si on les perd à la fin de leur parcours scolaire obligatoire, c'est une occasion ratée.
Par ailleurs, beaucoup de jeunes décident de poursuivre leurs études en anglais parce qu'ils vivent de l'insécurité linguistique, un phénomène très présent chez les jeunes, ou parce que les programmes ne sont tout simplement pas offerts en français. Les établissements d'enseignement postsecondaire francophones peuvent aussi être situés loin de chez eux. Il y a beaucoup de raisons qui incitent les jeunes à choisir un établissement postsecondaire anglophone plutôt que francophone, mais...
Monsieur Thériault, on pourrait écrire tout un chapitre sur les raisons derrière un tel choix. Je sais que vous connaissez très bien le sujet et je vous remercie de nous faire profiter de votre expérience.
J'aimerais revenir sur la suggestion que vous avez faite à mon collègue tantôt, c'est-à-dire offrir des bourses pour encourager les étudiants à choisir les universités ou établissements postsecondaires de langue française.
En Nouvelle‑Écosse, par exemple, c'est vrai que ce n'est pas facile d'étudier en français pour une personne qui habite à l'Isle Madame, cette belle petite île d'où je viens, qui est située en bordure du Cap‑Breton. Il faut faire sept heures de route pour se rendre à la seule université francophone de la province. En revanche, on peut choisir de fréquenter une des 15 universités anglophones qui sont moins loin. C'est décourageant. Dans mon cas, j'ai dû aller faire mes études au Nouveau‑Brunswick, à quatre heures de route. Entre quatre heures et sept heures de route, le choix était facile.
Pouvez-vous me parler de ça? Est-ce que les jeunes ont soulevé la question auprès des ministres? Avez-vous eu des discussions? Est-ce un sujet qu'il faut porter jusqu'à la fin, selon vous?
Monsieur le président, M. Samson souligne un bon point. Il faudrait quand même donner la possibilité au témoin de répondre rapidement à la question.
Il y aura un deuxième tour de questions, si nous nous dépêchons.
C'est maintenant au tour du Bloc québécois. Monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour six minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
Il y a très longtemps, la Commission nationale des parents francophones a fait faire une étude, intitulée « Où sont passés les milliards $? », qui a qualifié de crucial le moment à partir duquel on avait interdit l'enseignement du français dans toutes les provinces. Cela s'est poursuivi pendant plusieurs générations. Le gros du financement provenant du Programme des langues officielles dans l'enseignement, ou PLOE, a été donné aux anglophones du Québec. Je pense qu'ils ont reçu 47,7 % du financement.
Quelles ont été les conséquences de ça? On disait que l'assimilation, à ce moment, se faisait à un rythme très élevé. Est-ce que ça se poursuit toujours ou est-ce qu'il y a vraiment eu un virage important?
Je ne pourrais pas vous dire s'il y a eu un virage. À vrai dire, il est très difficile de savoir comment les provinces dépensent les fonds pour les programmes d'éducation. Il est donc très difficile de suivre le parcours du financement.
Il y a quelques années, on a signé une entente avec Patrimoine canadien au sujet des fonds stratégiques. Il s'agissait d'accroître la transparence au sein des ministères de l'Éducation de chacune des provinces pour savoir exactement comment l'argent était dépensé. À ce jour, ça demeure très difficile de savoir ce qu'il en est.
Diverses études, dont quelques-unes entreprises par ce comité, ont révélé que des fonds avaient été détournés dans certains cas, mais j'ose espérer que, si de telles situations sont signalées, elles se présenteront moins souvent.
La Fédération nationale des conseils scolaires francophones serait plus en mesure de vous donner l'heure juste là-dessus. Cela dit, il y a encore beaucoup de travail à faire pour savoir exactement comment les fonds sont dépensés.
Ma prochaine question s'adresse aux deux organismes.
J'ai vu une étude qui démontrait que l'enseignement universitaire en français hors Québec était sous-financé, compte tenu de la proportion de francophones hors Québec.
Pensez-vous que le financement de l'enseignement universitaire hors Québec a une importance majeure et qu'il devrait être augmenté?
Oui, absolument. Il n'y a pas assez d'établissements francophones ni assez de programmes dans les établissements existants. Alors, tout investissement permettant d'augmenter le nombre de programmes et de places serait bienvenu.
La réponse est la même de notre côté. Nous voyons des problèmes criants dans nos établissements d'enseignement postsecondaire en milieu minoritaire. Par exemple, le nombre de places disponibles dans les programmes y est moindre que dans les établissements postsecondaires anglophones. Il y a peu de choix, aussi. Les étudiants doivent donc se déplacer et parcourir de plus grandes distances, ce qui engendre des coûts supplémentaires. De plus, la vie étudiante est peut-être moins attrayante dans les établissements en milieu minoritaire que dans les établissements postsecondaires anglophones.
Il faut financer adéquatement les établissements postsecondaires en milieu minoritaire pour tenter de régler ces problèmes criants dans nos communautés.
L'état actuel de la situation semble quand même assez critique. On voit que les établissements universitaires souffrent d'un sous-financement chronique. Par conséquent, ne devrait-on pas rééquilibrer un peu la situation?
Au fond, la situation actuelle ressemble un peu à celle où, à l'époque, une bonne partie du financement était consacrée aux établissements anglophones au Québec. C'est encore un peu la même chose. Le financement des universités anglophones par le gouvernement du Québec correspond à plus de deux fois le poids démographique des anglophones. Aussi, entre 35 % et 40 % du financement accordé par les fonds de recherche canadiens est versé aux universités anglophones au Québec. Pendant ce temps, du côté des universités francophones hors Québec, il y a vraiment un sous-financement chronique.
Ne devrait-on pas rééquilibrer ça?
Il doit indéniablement y avoir un meilleur équilibre.
Je veux vous faire part d'une donnée importante: environ 63 % de nos jeunes viennent de familles exogames. J'ai parlé à un père qui me disait qu'en général, tout allait super bien avec son épouse, mais que, quand était venu le temps de parler de l'éducation des enfants, il y avait eu une grande chicane dans la famille. Pourquoi? C'est parce que ça pose toujours un dilemme. Selon le parent anglophone, il faut regarder du côté des universités anglophones, qui sont plus proches et qui engendrent moins de coûts. Le parent francophone insiste plutôt sur l'importance de continuer l'éducation en français. Comprenez-vous la situation? L'éducation crée un déchirement dans les familles. Pourquoi est-ce ainsi? C'est parce que le choix de programmes est insuffisant pour permettre aux jeunes d'étudier en français.
Cela étant dit, permettez-moi d'ajouter un petit commentaire. Énormément de jeunes m'ont dit que, s'ils avaient choisi d'étudier dans un établissement postsecondaire francophone, ce n'était pas en raison de leur parent francophone, mais bien de leur parent anglophone. Autrement dit, plus le parent anglophone est ouvert à l'éducation en français, plus ça encourage le jeune à s'inscrire dans un établissement postsecondaire francophone. Plein de jeunes me l'ont confirmé. J'ai été stupéfait d'apprendre ça.
Certains disent que ce n'est pas un jeu à somme nulle et que le financement versé aux universités francophones ou anglophones n'influe pas sur le fait que des personnes choisissent d'aller étudier davantage dans des établissements francophones ou anglophones. Qu'en pensez-vous?
Merci.
Chers collègues, vous avez tous comme moi un cellulaire ou un autre appareil semblable qui comporte une horloge, alors je vous prierais de respecter les temps de parole impartis, afin de maximiser les tours de questions.
Monsieur Beaulieu, je ne vous vise pas plus que les autres, soyez-en certain.
Oui, je vous ai certainement visé, monsieur Samson.
Nous poursuivons notre chemin vers l'Alberta en nous arrêtant au Manitoba, où se trouve la représentante du NPD.
Madame Ashton, vous avez la parole pour six minutes.
Merci, monsieur le président. C'est donc un arrêt au milieu du trajet.
Je souhaite la bienvenue aux témoins et les remercie beaucoup de leurs témoignages.
Madame Anderson, je vais commencer par vous. Vous nous avez fait part d'expériences très semblables à celles que vivent des familles ici, au Manitoba.
Je voulais aborder plus particulièrement un élément soulevé par presque tous les témoins entendus lors de cette étude, soit les répercussions de la pénurie de main-d'œuvre en éducation. On manque non seulement de professeurs dans les écoles francophones et les programmes d'immersion française, mais d'éducateurs en général.
Pouvez-vous nous parler un peu de la situation en Alberta? Qu'en est-il de cette pénurie de main-d'œuvre chez vous? Quelles en sont les répercussions sur l'éducation en français pour vos jeunes?
Chez nous, il y a une pénurie de professeurs, peu importe la langue. Nous manquons de professeurs, point.
Bien sûr, nous sommes ici pour parler du français en situation minoritaire. Cela dit, pour régler le problème de la pénurie de main-d'œuvre en éducation, à mon avis, il faudrait trouver une autre stratégie pour inciter les jeunes à faire carrière en éducation. En ce moment, rien ne les pousse vers cette profession, qui n'est pas bien reconnue. Comme je l'ai mentionné, j'ai trois adolescents, et aucun d'entre eux ne veut devenir professeur. Ça ne les attire pas.
Notre société a beaucoup changé. Il faudrait trouver une manière de mieux encadrer les futurs professeurs dans les universités et de gérer la nouvelle situation. Les parents sont beaucoup plus impliqués qu'avant, ce qui est une bonne chose. Par contre, ça pose un défi pour les professeurs, parce que ce n'est pas tout le monde qui a envie de gérer les parents comme moi.
Croyez-vous que cette pénurie de main-d'œuvre a une incidence sur la stabilité de l'éducation, soit en permettant d'éviter l'épuisement professionnel chez plusieurs professeurs, mais aussi en créant un environnement plus stable et en stimulant l'esprit d'équipe dans nos écoles?
Croyez-vous qu'il faudrait s'attaquer à cette pénurie de main-d'œuvre dans le domaine de l'éducation?
Cela devrait-il faire partie du travail du gouvernement fédéral?
N'importe quelle initiative serait assurément la bienvenue pour retenir les enseignants dans nos établissements scolaires.
Ce que je constate, c'est que des professeurs quittent nos écoles parce qu'il y a beaucoup de concurrence entre les différents conseils scolaires. Si nous comparons les conseils scolaires anglophones aux conseils scolaires francophones, nous voyons qu'il est presque toujours plus payant de travailler pour une école anglophone. De plus, on y offre plus de choix de carrière et d'occasions d'avancement.
Le fait de continuer à enseigner dans une école francophone, c'est une bonne chose si la survie de la communauté et de la langue vous tient à cœur, mais, au bout du compte, dans la situation économique actuelle au pays, l'argent est un argument fort. Nous perdons souvent des enseignants au profit des conseils scolaires anglophones parce qu'ils y sont mieux payés. C'est le défi auquel nous devons faire face.
Au cours de réunions antérieures du Comité, les représentants d'établissements d'enseignement postsecondaire ont souligné le fait qu'un financement stable et suffisant était essentiel à leur travail.
En tant que dirigeante de la Commission nationale des parents francophones en Alberta, êtes-vous d'accord sur cette recommandation claire des établissements francophones?
Croyez-vous que ce financement pourrait aider à résoudre les problèmes de pénurie de main-d'œuvre, notamment?
J'en suis entièrement convaincue. Plus il y aura d'argent versé à nos établissements d'enseignement postsecondaire, le mieux ce sera pour nos jeunes. Je travaille beaucoup dans la communauté. Quand je demande à des personnes francophones si elles savent qu'il y a 22 établissements d'enseignement postsecondaire francophones hors Québec au Canada, elles en sont étonnées. Elles sont d'ailleurs incapables d'en nommer plus de deux.
Il faudrait investir davantage pour faire la promotion des programmes qui existent présentement et pour qu'on puisse en ajouter d'autres. L'objectif est de rendre ces établissements plus attrayants. Les conseillers en orientation seraient mieux à même d'informer les jeunes sur les établissements existants et de les inciter à poursuivre leurs études en français.
Nous travaillons très fort pour garder nos enfants dans un programme francophone. Il faut encore que je me débatte pour que mon enfant poursuive ses études en français. Il le veut également, mais je n'ai pas d'options à lui offrir. C'est tellement triste.
Je vous remercie de votre témoignage, madame Anderson. Je pense que nous sommes tous touchés par vos propos.
Monsieur Thériault, merci beaucoup de votre témoignage. Votre organisation accomplit un travail essentiel pour faire connaître les défis auxquels doivent faire face les jeunes francophones.
Je sais aussi à quel point plusieurs programmes que vous avez offerts dans le passé étaient importants. Je pense particulièrement au programme de stages gouvernementaux pour francophones. Le fait que ce programme n'existe plus me préoccupe beaucoup.
Nous discutons ici des moyens qui nous permettraient d'inciter les jeunes à travailler et à vivre en français.
Quelles sont les répercussions du manque de stages gouvernementaux en français sur les étudiants francophones au Canada?
En quoi cette insuffisance influe-t-elle sur leur intégration professionnelle ainsi que sur la vitalité des communautés francophones partout au pays?
C'est une excellente question, madame Ashton, mais vous avez dépassé votre temps de parole de 25 secondes. Je pense que tous les membres du Comité sont indisciplinés, aujourd'hui.
Monsieur Thériault, vous aurez peut-être l'occasion de répondre à la question plus tard.
Nous entreprenons maintenant un deuxième tour de questions. Soyons rigoureux quant au respect du temps de parole. Cela permet à plus de députés de poser des questions. Je vous demande de surveiller vos chronomètres.
Monsieur Dalton, vous avez la parole pour cinq minutes.
Monsieur Thériault et madame Anderson, je vous remercie beaucoup de vos interventions. Vos témoignages sont très importants pour nous.
Nous sommes heureux d'entendre votre voix. Si vous n'exprimez pas les défis auxquels vous devez faire face, nous ne pourrons pas trouver de solutions.
Madame Anderson, je viens de la Colombie-Britannique. Pourriez-vous nous parler davantage de la Commission nationale des parents francophones, en Alberta et ailleurs?
Notre organisation compte des membres de toutes les provinces et de tous les territoires au Canada. Ces membres représentent les parents francophones de leur région. Nous avons donc un représentant de la Colombie‑Britannique, qui est le trésorier du bureau de direction de la CNPF.
Tout le monde rapporte des anecdotes et témoigne de ce qui se passe dans sa région, et je peux vous garantir qu'on fait la même chose partout au pays. La seule province qui n'est pas représentée au sein de notre organisation est le Québec, puisque nous représentons les parents francophones en milieu minoritaire.
Merci.
En consultant le Web, j'ai appris qu'il y avait quatre commissions scolaires francophones en Alberta.
Comment sont-elles subventionnées? Reçoivent-elles principalement des subventions de la province et une petite contribution du gouvernement fédéral?
Je ne sais pas exactement comment le financement est réparti entre le fédéral et le provincial, mais les quatre conseils scolaires francophones en Alberta sont financés comme les conseils scolaires anglophones.
D'accord.
Je suis enseignant de profession, et j’ai enseigné au secondaire et au primaire. Je suis un peu surpris de vous entendre dire que seulement un quart des ressources est destiné aux étudiants francophones. C'est un peu décourageant.
Parlez-vous surtout des conseils scolaires francophones, ou parlez-vous aussi des écoles publiques qui offrent des programmes d'immersion?
Je parle de notre école francophone, chez nous. Par exemple, une conseillère en orientation vient une fois par semaine. Le conseil scolaire compte cinq écoles secondaires, alors elle passe une journée par semaine dans chacune des écoles.
Comme le financement vient principalement de la province, ce sont les conseils scolaires qui ont la responsabilité de cerner les besoins et de faire les investissements nécessaires pour y répondre. Cependant, s'ils n'ont pas assez d'argent pour répondre à tous les besoins, c'est un défi pour eux.
Nous devons faire face à plusieurs défis partout où nous sommes en milieu minoritaire, surtout en Alberta et en Colombie‑Britannique. Notamment, nous n'avons pas assez d'argent pour obtenir les ressources dont nous avons besoin.
Je sais qu'en Colombie‑Britannique, par exemple, on accorde des subventions spéciales supplémentaires en fonction des besoins particuliers des étudiants.
Ce que vous dites, c'est que, de votre côté, il n'y a pas de fonds supplémentaires pour répondre aux besoins.
Est-ce cela?
Le financement fonctionne de la même manière. Cependant, on doit en faire deux fois plus avec l'argent destiné aux programmes francophones, comparativement aux programmes anglophones.
Vous représentez aussi les parents et les familles. Pouvez-vous nous en dire davantage sur les frustrations des parents francophones et francophiles qui souhaitent encore que leurs enfants soient élevés dans un environnement francophone et qui les inscrivent à des programmes d'immersion? Quels sont les défis qu'ils doivent affronter?
Je fais moi-même partie de ces parents. Mon mari est anglophone. Il ne parle pas un mot de français. Cela fait 20 ans que nous sommes ensemble, et il n'apprend pas le français rapidement.
Ainsi, toute la tâche d'élever nos enfants en français en milieu minoritaire repose sur mes épaules. Ce n'est pas toujours facile. J'ai un partenaire de vie, mais, lorsque vient le temps de faire l'éducation de nos enfants en français et de les exposer à la culture francophone, je suis toute seule.
D'accord.
Monsieur Thériault, la variété des programmes offerts dépend du nombre d'étudiants, et les établissements dépendent de ceux-ci pour financer leurs programmes. Cependant, les étudiants ne viennent pas s'il n'y a pas assez de programmes. C'est comme l'œuf et la poule.
Le programme de bourses pourrait être une solution, mais il s'agit surtout de financer adéquatement nos établissements.
Merci, monsieur Thériault. Je suis désolé, mais aujourd'hui, les membres du Comité, qui sont d'excellents parlementaires, sont indisciplinés.
Merci, monsieur le président.
Bonjour, chers collègues.
Je remercie les témoins d'être avec nous ce matin.
Madame Anderson, combien d'argent de source fédérale votre établissement reçoit-il pour la recherche en langue française?
C'est une bonne question.
Je vais laisser M. Racine, directeur général de la Commission, y répondre.
Vous voulez savoir combien d'argent nous recevons à la Commission nationale des parents francophones.
Est-ce bien cela, monsieur Iacono?
Pour ce qui est de la recherche, nous ne recevons aucun financement présentement. Les fonds qui nous sont accordés sont destinés à la programmation. Nous appuyons ainsi nos associations membres en ce qui concerne le déploiement des services et l'appui aux parents.
Nous n'avons pas de fonds dans notre budget pour la recherche à proprement parler.
Pour ce qui est de la recherche, nous aurions besoin de connaître l'évolution du nombre d'ayants droit. Les données du recensement quant aux ayants droit ont été publiées en 2021, et nous savons combien d'ayants droit nous avons actuellement.
C'est exactement cela.
Il faut aussi savoir comment cela va évoluer. Nous accueillons de plus en plus d'immigrants francophones, de plus en plus d'ayants droit. Nous avons été surpris par les données.
Il faut vraiment faire de la recherche pour savoir de quel genre d'infrastructure nous avons besoin non seulement au primaire et au secondaire, mais aussi au postsecondaire pour pouvoir répondre à la demande d'ici les prochaines années.
D'une province à l'autre, le financement varie énormément. Comme il a été mentionné tantôt, en Colombie-Britannique, la province verse un peu d'argent à la Fédération des parents francophones. En Alberta, il n'y a à peu près rien.
Merci.
Monsieur Thériault, de votre côté, savez-vous à combien s'élève le financement fédéral pour la recherche en langue française?
Notre organisme ne reçoit pas de financement pour faire de la recherche. Nous sommes un organisme communautaire.
Pour ce qui est des établissements, je ne pourrais pas vous fournir de réponse, malheureusement.
D'accord.
Quel est le portrait des étudiants qui fréquentent votre organisme? Sont-ils majoritairement de la région? Attirez-vous des étudiants francophones de partout au pays?
Quel est le profil démographique de vos étudiants?
Notre organisme compte des membres dans neuf provinces et dans les trois territoires. Ils viennent donc d'un peu partout au pays. Nous représentons des gens issus de l'école francophone et des écoles d'immersion. D'autres sont issus de l'immigration.
Nous avons un peu le pouls de personnes venant de milieux très variés au sein de notre organisme.
Merci.
Madame Anderson, je vais vous poser la même question.
Qu'en est-il du profil démographique des étudiants dans votre organisme?
Nous travaillons surtout avec les parents, et ceux-ci représentent une grande diversité de milieux. Ils viennent de divers pays et milieux professionnels. Il y a vraiment une grande diversité au sein de notre organisme.
Tout à l'heure, vous avez parlé de vos besoins. Vous avez dit plusieurs fois que votre financement était insuffisant.
Quel montant serait suffisant pour répondre à vos besoins?
Comme nous n'avons pas de données chiffrées, il nous est un peu difficile de bien saisir votre situation.
La question devrait être posée aux établissements d'enseignement postsecondaire. Ce sont eux qui pourraient nous dire de combien d'argent ils ont besoin pour bonifier les programmes, en offrir davantage et inciter les jeunes à poursuivre leurs études en français.
En ce qui a trait aux parents, j'aimerais voir plus d'investissements à cet égard. Toutefois, comme je ne fais pas partie des conseils scolaires, je ne sais pas combien il en coûterait pour doter chaque école d'un conseiller ou d'une conseillère en orientation à temps plein. Même si ce n'était qu'à temps partiel, cela représenterait un gros changement par rapport à ce que nous avons présentement.
Quels sont vos autres besoins?
Si nous voulons que ce dossier progresse, nous devons mieux comprendre quels sont les besoins et savoir combien il en coûtera pour y répondre. Ce sont deux éléments très importants. Nous devons en savoir davantage avant de nous adresser à tous les ordres de gouvernement.
Pourriez-vous fournir de l'information aux membres du Comité à cet égard?
Je poserai ensuite la même question à M. Thériault.
Merci, monsieur Iacono.
C'est une excellente question, mais nous pourrons peut-être y revenir plus tard.
Pour l'instant, je vais céder la parole à M. Beaulieu pour deux minutes et demie.
Madame Anderson, je n'ai pas eu le temps d'obtenir des réponses à ma dernière question.
Certaines personnes disent que le financement du réseau universitaire francophone n'a pas vraiment d'importance par rapport à la survie du français, parce que ce n'est pas un jeu à somme nulle.
Qu'en pensez-vous?
Je ne suis pas du tout d'accord.
Plus on finance les programmes d'études postsecondaires en français, plus les jeunes y seront attirés.
Il n'y a pas assez de choix, et cela ne les encourage pas à continuer leurs études en français. S'ils ne veulent pas devenir infirmiers ou enseignants ni aller dans l'Est du Canada pour suivre le programme qui les intéresse en français pour devenir, par exemple, avocats ou ingénieurs, ils sont obligés de poursuivre leurs études en anglais dans l'Ouest canadien.
J'ajouterais aussi que beaucoup de parents décident d'envoyer leurs enfants dans une école anglophone au secondaire pour les préparer aux études postsecondaires, car ils pensent qu'elles vont se faire en anglais.
Le réseau secondaire francophone perd beaucoup de jeunes à cause du manque d'offre au niveau postsecondaire. C'est un autre élément important dont on doit tenir compte.
Effectivement, c'est une réalité à laquelle nous devons faire face.
Il y a des étudiants qui font leurs études secondaires dans une école francophone, ou même dans une école d'immersion française, et qui n'ont pas accès à un programme d'études en français au niveau postsecondaire. Ils peuvent alors finir par perdre l'usage de la langue.
C'est une réalité que nous voyons souvent au Nouveau‑Brunswick. Des gens sortent d'une école d'immersion française, vont dans un établissement d'enseignement postsecondaire anglophone, puis ils finissent par perdre l'usage du français.
Les jeunes qui peuvent continuer leurs études dans nos établissements d'enseignement postsecondaire en français ont plus de chances de rester dans nos communautés, d'y travailler et de contribuer à leur vitalité.
Il est donc très important de financer adéquatement nos établissements d'enseignement postsecondaire.
Vous êtes donc d'accord pour dire qu'il est important de consacrer une part plus importante du financement aux universités francophones. Ce n'est pas un jeu à somme nulle.
N'est-ce pas?
Évidemment, c'est très important. On doit financer davantage les établissements d'enseignement postsecondaire en français.
D'accord.
Parmi les choses dont vous avez parlé, monsieur Thériault, je trouve que la question des bourses d'études pour les étudiants qui veulent étudier en français est vraiment intéressante. Je vous remercie de cette remarque.
Je n'aurai pas le temps de vous poser une question à ce sujet, mais je pense que ce serait important que nous en parlions dans notre rapport.
Merci.
Merci.
Monsieur Thériault, à la fin de mon dernier tour de parole, j'ai mentionné le programme fédéral de stages en français pour les jeunes, un programme que vous avez géré dans le passé.
Quelles sont les conséquences du fait que ce programme n'existe plus? Le fédéral doit-il réinvestir dans un tel programme?
L'employabilité des jeunes est évidemment un grand défi. Le coût de la vie augmente sans cesse. Il est donc très important que les jeunes aient accès à des emplois en français dans nos communautés. Or, on voit que des emplois sont accessibles, mais ils sont parfois méconnus. Ils ne sont pas mis en avant.
Il faut mettre en place un programme de stages qui permet de mettre en avant des emplois déjà existants ou de créer de nouveaux emplois pour les jeunes. Cela pourrait les aider à assumer le coût des études, qui augmente constamment. Cela a une énorme incidence, car certains étudiants abandonnent leurs études lorsqu'ils ne peuvent assumer les coûts qui y sont liés.
Croyez-vous qu'un tel programme est cohérent et qu'il reflète la vision selon laquelle il faut appuyer le secteur postsecondaire francophone et investir dans les possibilités de vivre et de travailler en français?
Ce sont évidemment des programmes qui sont très importants. Ils font partie de l'environnement postsecondaire.
Pour des étudiants francophones qui n'ont pas les moyens financiers d'étudier, il doit y avoir des emplois en français. Pensons aux étudiants étrangers qui viennent étudier dans nos établissements et qui ne peuvent pas travailler en anglais, car ils ne parlent pas cette langue. Pour eux, travailler dans un milieu majoritairement anglophone est difficile.
Nous devons donc rendre accessibles des emplois en français pour permettre à ces étudiants de travailler en français.
Je serai brève.
Monsieur Thériault, êtes-vous d'accord pour dire que les établissements d'enseignement postsecondaire devraient pouvoir compter sur un financement stable, prévisible et adéquat?
Oui, nous sommes d'accord et nous appuyons la recommandation de l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, ou ACUFC, d'augmenter le financement à 80 millions de dollars par année pour les établissements d'enseignement postsecondaire.
Merci, chers témoins.
Avant de passer aux prochains témoins, j'aimerais poser une question à Mme Anderson.
Madame Anderson, dans votre allocution d'ouverture, vous avez dit que la moitié du cursus ou des cours, je ne suis pas certain d'avoir compris, provenait de l'Université d'Ottawa.
Est-ce bien cela?
Ce que nous disons, c'est que, sur l'ensemble des programmes, la moitié de ceux qui sont disponibles en français proviennent de l'Université d'Ottawa, selon l'étude que nous avons consultée.
Vous voulez donc dire pour toutes les universités et tous les collèges hors Québec.
C'est bien cela?
Ce n'est pas très loin de chez nous.
J'ai eu la malheureuse tâche de devoir couper court à bien des questions et des réponses parce que j'ai ici d'éternels indisciplinés. Ce sont aussi des passionnés de la langue, et ils désirent parler plus longuement que le temps qui leur est imparti.
Chers témoins, c'était vraiment passionnant. Vous pouvez nous transmettre par écrit toute information supplémentaire dont vous voudriez nous faire part.
Je ne vous demanderai pas de faire une thèse de doctorat sur une intervention de M. Samson, mais il est vrai que la réflexion de M. Samson à l'égard du fait qu'on ne peut pas dissocier le postsecondaire de la petite enfance nous interpelle tous, autour de la table.
En effet, comment se fait-il qu'après tant d'années, alors qu'il y a de plus en plus d'écoles francophones hors Québec, les établissements d'enseignement postsecondaire aient de la difficulté à remplir leurs classes et à recevoir des inscriptions de la part de francophones?
C'est sûr qu'on ne peut pas répondre à cela en cinq minutes.
Chers témoins, je vous remercie encore une fois de votre participation. Veuillez faire parvenir à la greffière toute information supplémentaire. La greffière la distribuera ensuite à tous les membres du Comité. Cela fera partie de notre analyse lorsque nous pondrons notre rapport.
Nous suspendons temporairement la séance pour faire entrer nos prochains témoins.
Nous reprenons la séance.
Nous accueillons maintenant les témoins qui ont été invités pour la deuxième heure de la réunion.
Nous recevons Mme Bouffard, rectrice de l'Université de Saint‑Boniface.
Madame Bouffard, je pense que c'est votre deuxième comparution devant le Comité permanent des langues officielles. Je vous souhaite la bienvenue.
[Traduction]
Nous avons également avec nous les représentants du Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise, dont l'acronyme est RRCQEA, si je ne me trompe pas. Je pense que c'est la première fois que vous comparaissez devant notre comité, et nous sommes heureux de vous accueillir.
La première série de questions sera interactive, c'est‑à‑dire qu'il y aura des questions et des réponses, et chaque parti politique disposera de six minutes.
Un député: Vous parlez anglais?
Des voix: Ha, ha!
[Français]
Le président: C'est donc ainsi que les choses vont se dérouler. Auparavant, nous laisserons à chaque témoin la chance de nous faire une présentation qui ne dépasse pas cinq minutes.
Je suis vraiment très strict en ce qui concerne le temps de parole. Le fait de respecter le temps imparti nous permettra de faire deux tours de questions. Les députés pourront ainsi poser plus de questions.
Madame Bouffard, vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je remercie le Comité de m'accueillir et de mener cette étude importante pour la pérennité des communautés francophones en milieu minoritaire.
Je m'appelle Sophie Bouffard, et j'ai le privilège d'être la rectrice de l'Université de Saint‑Boniface, ou USB.
L'USB est la seule université de langue française dans l'Ouest canadien et le seul établissement postsecondaire de langue française au Manitoba. Il est également le plus petit et le moins coûteux des établissements manitobains. Établissement hybride, c'est-à-dire ayant le double mandat de formation collégiale et universitaire, l'USB est le dernier échelon du continuum éducatif du français langue première et du français langue seconde au Manitoba. Ce continuum éducatif est la colonne vertébrale de la francophonie manitobaine. L'USB travaille en synergie avec la communauté et son réseau d'organismes communautaires.
L'USB offre près d'une trentaine de programmes d'études, et elle accueille près de 1 450 étudiants, dont 79 % sont des Canadiens ou des résidents permanents et 21 %, des étudiants internationaux. La Division de l'éducation permanente offre des cours non crédités, pour lesquels il y a plus de 4 000 inscriptions.
Au Manitoba, l'USB est le fournisseur de professionnels bilingues dont on a besoin dans des domaines tels que l'éducation, la santé, la fonction publique, les organismes communautaires et le secteur privé. L'établissement contribue aussi à sa communauté, entre autres par ses activités de recherche, et il s'inscrit dans le grand projet d'immigration francophone.
Les États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire ont confirmé la mission additionnelle particulière que doit relever un établissement minoritaire comme l'USB, c'est-à-dire de maintenir la langue et de préserver la culture, en plus d'assurer une francophonie forte et l'avancement du bilinguisme au sein de la société canadienne.
Mon allocution vise à mettre en évidence la responsabilité du fédéral ainsi que le fait qu'il est urgent d'agir en matière de financement. À l'USB, il faut souligner le manque important d'économies d'échelle en raison de notre petite taille. Il est extrêmement difficile de maintenir un budget équilibré et de demeurer compétitif dans un environnement de haute inflation pour préserver nos programmes de qualité, pour offrir des services adaptés aux étudiants, pour se doter d'outils de travail modernes et pour pallier les défis de plus en plus coûteux liés aux infrastructures vieillissantes et désuètes.
En 2023‑2024, le financement fédéral récurrent du Programme des langues officielles dans l'enseignement, qui était gelé depuis 2008, ne représente désormais que 5 % de notre budget de fonctionnement annuel. Notre pouvoir d'achat a donc beaucoup diminué dans les 16 dernières années.
Depuis plusieurs années, le financement fédéral disponible est essentiellement sous forme de fonds ponctuels, ce qui pose des défis majeurs, car le postsecondaire s'inscrit dans le long terme. La reddition de comptes pour ces fonds est lourde et nos très petites équipes sont terriblement surchargées, sans oublier la difficulté de sécuriser une contrepartie provinciale.
Si le temps nous le permet, je pourrai vous parler davantage du continuum éducatif, dont l'équivalent n'existe pas du côté anglophone, et du fait enviable que notre bassin de recrutement augmente de façon importante d'année en année, succès qui est toutefois miné par un taux d'abandon dévastateur. Cette situation n'a rien d'inévitable ou d'irréversible. Elle met seulement en évidence le sous-financement et le fait qu'on ne peut pas laisser au hasard le développement de l'éducation en français en contexte minoritaire.
Il faut pouvoir bonifier l'offre de programmes ainsi que la gamme des services aux étudiants, avoir les moyens d'agir pour contrer l'insécurité linguistique et plus encore afin d'atteindre l'égalité réelle. Un plan de développement pour l'USB financé de façon stable et prévisible est nécessaire si on veut commencer à corriger le taux d'abandon que l'on vit au sein du continuum et si on est sérieux quant au bilinguisme canadien. Le défi est systémique, et l'USB est bien positionnée, avec ses partenaires éducatifs et communautaires, pour proposer des solutions innovantes et durables qui offriront un meilleur retour sur les investissements en éducation et dont les retombées positives seront multiples pour la francophonie manitobaine et canadienne.
Au Manitoba, vous l'aurez compris, l'USB est le seul établissement postsecondaire qui produit et qui cherche systématiquement à produire des diplômés ayant un niveau de bilinguisme professionnel. Il s'agit d'une contribution majeure. Nos programmes d'études sont donc d'une importance stratégique.
Nous appuyons les recommandations que l'ACUFC et la Fédération des communautés francophones et acadienne, ou FCFA, ont présentées au Comité. Je tiens toutefois à rappeler la recommandation de l'ACUFC, qui est à mon sens l'élément le plus pressant, c'est-à-dire que le fédéral s'engage en investissant 80 millions de dollars par année de fonds récurrents additionnels pour les établissements postsecondaires de la francophonie minoritaire.
Nous ne demandons pas la charité. Nous sommes l'outil de développement communautaire par lequel il sera possible d'assurer la pérennité de la francophonie canadienne, la clé de voûte sur laquelle repose le bilinguisme au pays.
Merci de votre attention.
Merci, madame Bouffard.
[Traduction]
Du RRCQEA, nous accueillons Lorraine O'Donnell, attachée de recherche et conseillère principale et Patrick Donovan, attaché de recherche et conseiller.
Je ne sais pas qui fera la déclaration préliminaire de cinq minutes. Est‑ce Mme O'Donnell?
Nous vous remercions de l'invitation à comparaître aujourd'hui.
La Loi sur les langues officielles du gouvernement fédéral demande au gouvernement fédéral d'appuyer l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, les CLOSM. La recherche est essentielle pour que les intervenants et les parties intéressées puissent prendre des décisions fondées sur des données probantes en vue d'assurer l'épanouissement des CLOSM.
Comme l'a déclaré le Commissariat aux langues officielles, « La vitalité d'une communauté suppose une certaine prise en charge de son développement ». Cette responsabilisation des CLOSM ne doit-elle pas s'appuyer sur l'accès à une meilleure connaissance d'elles-mêmes?
Aujourd'hui, l'anglais est la première langue officielle d'environ un million de Québécois. Cette population des CLOSM, qui apporte une contribution importante au Québec et au Canada, est largement bilingue, bien intégrée au Québec et engagée à l'égard de la dualité linguistique et du rapprochement des solitudes.
Néanmoins, les recherches révèlent que cette CLOSM fait face à d'importants défis qui nuisent à son épanouissement, notamment la pauvreté, le chômage, l'exode des jeunes, les obstacles à l'accès aux services et le fait d'être perçue comme une menace à la vitalité de la majorité francophone du Québec. Les preuves fondées sur la recherche sont nécessaires pour soutenir l'épanouissement de nos CLOSM. À cette fin, le Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise a récemment recommandé au gouvernement fédéral d'investir dans la recherche universitaire sur le Québec anglophone.
Les CLOSM francophones disposent d'un écosystème de recherche vaste et complexe qui comprend environ 13 centres de recherche, dont l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, créé en 2002 grâce à une dotation de 10 millions de dollars du gouvernement fédéral. Cet institut versait autrefois 25 000 $ en fonds annuels au RRCQEA, mais ce financement a pris fin en mars dernier.
L'écosystème des CLOSM francophones compte également environ 24 chaires de recherche. Cela dit, nous reconnaissons — comme d'autres témoins l'ont dit aujourd'hui — que l'écosystème de recherche axé sur les CLOSM francophones fait face à des défis, y compris, bien entendu, la prédominance de l'anglais dans la recherche universitaire.
L'écosystème de recherche sur le Québec anglophone, quant à lui, présente une structure et des défis différents. D'une part, comme l'indique une étude récente menée par mes collègues Patrick Donovan, ici présent, et Shannon Bell, l'ensemble du secteur universitaire québécois est sous-financé.
Ces chercheurs ont également mis en évidence une idée fausse selon laquelle les universités anglophones du Québec reçoivent plus de fonds provinciaux que les universités francophones. Cette idée fausse fait obstacle à une discussion fructueuse sur le financement.
Par ailleurs, le soutien à la recherche sur le Québec anglophone n'est pas au premier plan dans les mandats des universités anglophones du Québec. Par exemple, il n'y a aucune chaire de recherche sur le Québec anglophone, et il n'y a qu'un seul centre de recherche, soit le RRCQEA. Établi à l'Université Concordia, le RRCQEA favorise la compréhension et l'épanouissement du Québec anglophone par l'entremise de la recherche, de la mobilisation des connaissances et d'autres activités. Il est soutenu par le Secrétariat aux relations avec les Québécois d'expression anglaise du gouvernement du Québec, par Patrimoine canadien et par l'Université Concordia.
Les défis auxquels fait face le RRCQEA, qui est le seul centre de recherche sur le Québec anglophone, mettent en lumière les défis auxquels fait face l'ensemble de l'écosystème de la recherche sur le thème du Québec anglophone. Parmi nos défis, on trouve notamment le financement limité, un financement qui est également annuel plutôt que continu.
Le RRCQEA demande donc au gouvernement fédéral de fournir un financement accru et soutenu pour la recherche universitaire et l'écosystème de recherche postsecondaire axée sur nos CLOSM. Cela permettrait au gouvernement de soutenir à la fois la production de connaissances et les infrastructures, comme les universités et les collèges, qui sont des éléments essentiels à l'épanouissement des CLOSM au Québec.
[Français]
Merci.
Merci beaucoup, madame O'Donnell.
Nous allons commencer le premier tour de questions. Chacune des formations politiques disposera de six minutes pour poser des questions et obtenir des réponses. Ce sera interactif.
Je suis très strict pour ce qui est du temps de parole. On me fait signe que je devrai vous aviser lorsqu'il vous restera 30 secondes.
Nous commençons par le premier vice-président du Comité, M. Godin, du Parti conservateur.
Monsieur Godin, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être avec nous ce matin. Nous leur en sommes reconnaissants.
Mes premières questions s'adresseront davantage aux représentants du Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise. Je les poserai en rafale.
Madame O'Donnell, reconnaissez-vous que le français est en déclin partout au Canada?
C'est une question très complexe.
Si l'on parle du nombre de locuteurs dont la langue maternelle est le français, le français est effectivement en déclin.
En ce qui concerne l'utilisation du français au Québec, selon une étude récente de l'Office québécois de la langue française, ou OQLF, cela reste stable. C'est très complexe et je ne suis pas une experte en la matière.
Merci, madame O'Donnell.
On pourrait cependant affirmer que le français n'est pas en progression au Québec.
N'est-ce pas?
J'ai une bonne nouvelle sur ce point, puisque de plus en plus d'anglophones sont devenus bilingues...
Excusez-moi de vous interrompre, mais je n'ai pas beaucoup de temps de parole.
Peut-on affirmer que le français au Québec n'est pas en progression?
Merci, madame O'Donnell.
J'aimerais que l'on parle du financement fédéral, et j'insiste sur le mot « fédéral », des établissements anglophones par rapport aux établissements francophones dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Pouvez-vous m'en donner les proportions?
Je peux vous parler de notre centre. Comme je l'ai dit, je ne peux pas comparer le tout, mais ce que je peux comparer...
Je comprends, madame O'Donnell. Vous ne pouvez pas connaître la situation pancanadienne. C'est très légitime. Mon intention n'est pas de vous coincer.
Si vous avez l'information ou si votre service de recherche peut nous la fournir, je vous inviterais à la faire parvenir à notre greffière, qui nous la transmettra.
Ma prochaine question porte sur la structure de votre organisation. Qui a créé votre réseau?
Sa création découle d'un financement que le gouvernement fédéral avait consenti à l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, ou ICRML, situé à l'Université de Moncton. Au début, il y avait un partenariat entre l'Université Concordia et l'ICRML pour assurer notre financement.
Aujourd'hui, vous êtes une organisation qui est, je dirais, hébergée. Je vais le dire comme cela en premier lieu et voir les liens que vous avez avec l'Université Concordia.
Vos bureaux sont-ils physiquement à l'Université Concordia?
Je crois que j'ai eu ma réponse. Je comprends que les bureaux de votre réseau sont installés physiquement à l'Université Concordia.
Notre réseau de recherche est composé d'environ 80 chercheurs, et un tiers de ces chercheurs sont francophones. Nous avons des chercheurs qui s'intéressent aux communautés d'expression anglaise et qui viennent de plusieurs universités du Québec, du Canada et de l'international.
À Concordia, nous travaillons donc avec beaucoup d'universités, et non en vase clos.
Vous n'êtes donc pas un organisme représentant l'Université Concordia et plaidant en sa faveur.
N'est-ce pas?
Vous nous direz probablement, comme tous les autres établissements, que vous manquez de financement. Cependant, au Québec seulement, quelle est la proportion du financement fédéral attribuée aux établissements francophones par rapport aux établissements anglophones?
Êtes-vous capable de m'en dresser un portrait sommaire?
Je n'ai pas les données concernant le financement fédéral. Par contre, selon les données concernant le financement provincial, le financement par étudiant est le même, peu importe l'université, qu'elle soit anglophone ou francophone.
D'accord.
Vous comprendrez qu'ici, nous sommes au fédéral et que j'aurais aimé avoir la réponse concernant le fédéral. Si vous êtes en mesure de nous la fournir, nous vous en serions très reconnaissants.
Nous vous remercions de votre disponibilité.
Madame Bouffard, je me tourne maintenant vers vous. Vous dites que votre établissement est le plus petit et le moins coûteux. Comment pouvez-vous affirmer cela?
C'est l'établissement le plus petit et le moins coûteux au Manitoba, et non parmi tous les établissements francophones du pays.
L'USB est le seul établissement francophone au Manitoba, mais, de tous les établissements postsecondaires au Manitoba, c'est celui qui coûte le moins cher, toutes langues confondues.
Oui, l'USB est moins coûteuse parce qu'elle est moins financée. Le financement est accordé suivant une logique urbaine, d'une certaine façon, alors que sa réalité est bien différente.
Si vous regardez les établissements en milieu rural, ils sont...
Je suis désolé de vous interrompre.
Pour votre université, quel est l'effet de l'immigration francophone, des étudiants étrangers, sur le plan économique?
Les étudiants étrangers représentent 21 % de notre clientèle, ce qui est une portion assez importante. Pour ce qui est des frais de scolarité...
Monsieur Godin, merci beaucoup.
Merci, madame Bouffard.
On pourra revenir à cette question plus tard.
Le deuxième droit de parole appartient au Parti libéral et à Mme Annie Koutrakis.
Vous avez la parole pour six minutes, madame Koutrakis.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Je vais commencer par Mme O'Donnell.
[Traduction]
Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
L'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés ne garantit pas le droit à l'éducation postsecondaire dans la langue de la minorité.
À votre connaissance, les lois provinciales et territoriales offrent-elles des garanties pour l'enseignement postsecondaire dans la langue de la minorité?
Je vous remercie.
La nouvelle Loi sur les langues officielles contient des dispositions qui visent à améliorer la reddition de comptes en ce qui concerne les paiements de transfert du gouvernement du Canada aux provinces et aux territoires.
À votre connaissance, ces dispositions ont-elles permis d'améliorer les pratiques au sein des deux ordres de gouvernement?
Je suis désolée, mais je ne suis pas ici pour me prononcer sur l'ensemble du secteur universitaire. J'espère que les recteurs qui représentent les universités anglophones du Québec auront la chance de présenter ces types de renseignements à votre comité.
Si vous deviez formuler une recommandation robuste dans le cadre de notre étude, quelle serait cette recommandation?
Nous aimerions que l'écosystème de recherche, c'est‑à‑dire les réseaux d'universités, de collèges, de professeurs, d'étudiants et d'autres intervenants qui mènent des recherches sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Québec, reçoive un soutien constant et continu, afin que nous puissions répondre aux questions qui sont posées aujourd'hui et auxquelles nous ne sommes pas en mesure de répondre en raison d'un financement qui n'est pas continu et sur lequel il nous est difficile de compter d'une année à l'autre.
Je vous remercie.
[Français]
Madame Bouffard, le financement de source fédérale est important, mais il faut que les provinces s'impliquent aussi. Vous l'avez déjà mentionné dans vos commentaires.
La province vous fournit-elle moins de financement qu'aux établissements qui s'adressent à la majorité linguistique?
Connaissez-vous les proportions? Quel est l'écart entre les deux?
Il faudrait regarder nos états financiers et comparer établissement par établissement.
Nous avons remarqué que, pour nous, le financement provincial constitue tout près de 60 % de notre budget. Pour les universités en milieu urbain, c'est aux alentours de 50 %.
En milieu rural, dans le cas de l'Université de Brandon, par exemple, le pourcentage est plus élevé.
Ce qui est important, c'est d'obtenir un minimum viable quant au financement. Il y a un minimum de services que nous devons offrir. Il y a un coût de base, auquel s'ajoute le reste.
Il est difficile de faire des comparaisons, parce que nous avons d'autres défis. Il nous faut offrir des services supplémentaires, et il faut les adapter.
Merci.
Je vais vous poser la même question que celle posée à Mme O'Donnell.
D'après vous, s'il y avait une recommandation à faire et qui se révélait vraiment la plus importante pour notre étude, quelle serait-elle?
J'ai parlé de financement récurrent. Il nous faudrait quelque chose de stable pour continuer à bâtir ce système et ces établissements postsecondaires. C'est ce dont nous avons besoin.
Je sais que vous vous penchez sur la reddition de comptes. C'est une chose importante aussi. Plusieurs couches de discussions, si je peux dire, doivent avoir lieu entre les établissements, la province et le fédéral. De plus, il y a toutes sortes de dynamiques qui entrent en jeu.
Je pourrais fournir plus d'information si vous le souhaitez.
Comme tout le monde ici, comme mes collègues, je sais que tout commence par le financement, mais il y a beaucoup d'autres questions qui, d'après moi, présentent des défis.
Quels seraient ces autres défis que le gouvernement fédéral pourrait contribuer à relever pour améliorer les choses?
Cela touche encore le financement. Il faut certainement tenir compte de la recommandation au sujet des bourses pour nos étudiants qui viennent des écoles francophones de la Division scolaire franco-manitobaine.
En fait, il faut aussi être en mesure d'ajouter des programmes. Certains de nos jeunes qui souhaitent poursuivre des études en génie, en médecine ou en droit choisissent d'étudier en anglais, dans un autre établissement. Il y a plein de disciplines que nous n'avons pas les moyens d'offrir.
Je pense qu'il y a des façons de travailler en réseau. Il y a de beaux succès dans la francophonie, notamment le Consortium national de formation en santé.
Il y a des solutions et différentes façons de faire les choses. Nous sommes prêts à trouver des solutions. C'est possible.
[Traduction]
Oui. J'aimerais parler d'une perception générale.
L'une des difficultés auxquelles Patrick et moi faisons face à titre d'historiens qui travaillent sur le thème du Québec anglophone, c'est qu'il existe malheureusement une perspective répandue et largement désuète selon laquelle le Québec anglophone représente un groupe privilégié qui n'a pas besoin de soutien. En réalité, même si nous ne sommes pas inquiets au sujet de la vitalité de notre langue, nous sommes extrêmement inquiets au sujet de la vitalité de nos communautés. Comme je l'ai mentionné, la pauvreté, le chômage et l'émigration, qui ont des répercussions sur le continuum de l'éducation en langue anglaise, représentent de graves préoccupations.
Lorsque nous demandons du soutien pour la recherche sur nos CLOSM, il s'agit d'une demande tout à fait fondée, car elle découle des réalités que nous observons tous les jours dans le cadre de notre travail.
Je vous remercie.
Je vous remercie, madame O'Donnell.
[Français]
Je donne maintenant la parole au Bloc québécois, et plus précisément au deuxième vice-président du Comité permanent des langues officielles.
Monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour six minutes.
Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse aux représentants du Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise.
Êtes-vous d'accord sur le fait que, par le passé, jusque dans les années 1960, il y a eu une discrimination économique envers les francophones?
De plus, êtes-vous d'accord sur le fait que les établissements anglophones étaient nettement surfinancés?
Je ne sais pas s'ils étaient surfinancés, mais ils avaient un plus grand budget à une certaine époque.
Un instant, monsieur Beaulieu. Je vais arrêter le chronomètre.
Monsieur Donovan, pouvez-vous lever votre micro afin de faciliter le travail des interprètes?
Voilà, je redémarre le chronomètre.
Monsieur Beaulieu, vous pouvez poursuivre.
Au début des années 1960, les universités anglophones touchaient 28,5 % des subventions accordées aux universités du Québec.
En 1994‑1995, le fédéral allouait 36,7 % des subventions aux universités anglophones du Québec.
Selon les dernières données relatives aux fonds de recherche, entre 35 et 40 % du financement est aujourd'hui destiné aux universités anglophones du Québec.
Ne trouvez-vous pas cela exagéré?
Non, je ne trouve pas ça exagéré. De toute façon, je ne vois pas pourquoi vous parlez des années 1960, puisque nous sommes en 2024.
Ma question portait sur le financement accordé en 2017. Je crois que ce sont les données les plus récentes, mais les spécialistes qui vont venir témoigner vont pouvoir le confirmer.
Les universités anglophones reçoivent quatre fois plus de financement, peut-être même plus, que le poids démographique des anglophones. Selon vous, ce n'est pas assez et il devrait y en avoir plus.
Est-ce bien cela?
Nous, nous ramenons la discussion au financement de l'écosystème de recherche sur les communautés linguistiques en situation minoritaire.
D'une part, il y a 37 centres de recherche du côté francophone et il y en a 1 du côté anglophone. C'est sur cela que le mémoire que nous avons présenté aujourd'hui met l'accent.
Il faudrait que vous invitiez les recteurs des universités si vous voulez discuter de cette question.
Je comprends, mais vous représentez un réseau de recherche sur ces communautés.
Dans l'un de vos mémoires, vous dites que, dans les années 1960, « [l]es universités de langue anglaise ont reçu moins de fonds publics en raison de tensions politiques ». Toutefois, cela ne correspond pas du tout à la réalité.
C'est un peu comme ce que Mme O'Donnell disait tantôt. Selon votre collègue, il y a un discours de victimisation selon lequel les anglophones sont plus pauvres, et ainsi de suite. Cependant, vous utilisez des indicateurs — parmi ceux-ci, la médiane —, qui incluent une grande proportion des nouveaux arrivants au Québec. Cela fait baisser la moyenne.
Quand on utilise les indicateurs qui représentent la minorité historique anglophone, vous tenez encore tout à fait le haut du pavé. Les niveaux de revenus sont encore très supérieurs à ceux des universités francophones.
Je comprends les indicateurs que vous utilisez. Vous faites référence à une étude de Frédéric Lacroix qui parle du financement des universités relativement au poids de la minorité. Cette étude a été fortement critiquée par des chercheurs, comme Jean-Pierre Corbeil, comme étant une fausse équivalence. Dans les universités comme McGill, 20 ou 30 % des étudiants sont issus de la minorité anglophone et 70 % sont des francophones.
C'est pour ça qu'on dit que ça sert beaucoup à angliciser les francophones et les nouveaux arrivants au Québec. C'est la même chose pour les cégeps.
Oui, il y a des études qui démontrent que si on étudie en anglais au cégep ou à l'université, on va travailler beaucoup plus en anglais, on va aussi faire plus de transferts linguistiques vers l'anglais.
Vous parlez de la faible vitalité linguistique des anglophones. Il y a quatre à cinq fois plus de transferts linguistiques vers l'anglais que le poids démographique des anglophones. Est-ce que vous trouvez que ce n'est pas assez?
Dans les années 1960, 30 % des anglophones étaient bilingues. Aujourd'hui, c'est 70 %, et, chez les jeunes, c'est près de 80 %. C'est une communauté…
À Montréal, les jeunes francophones sont plus bilingues que les jeunes anglophones.
Vous allez chercher d'autres données. Vous parlez souvent de votre affiliation avec le QCGN, le Quebec Community Groups Network, qui fait beaucoup d'affirmations laissant entendre que défendre le français, c'est raciste. Je rappelle que son ancienne présidente Mme Jennings avait entre autres comparé le projet de loi 96 au Québec aux mesures russes en Ukraine. Êtes-vous d'accord sur ce genre d'affirmation?
Un instant, monsieur Beaulieu: tenons-nous-en à l'étude. Vous demandez à un témoin de commenter un ouï-dire.
Monsieur le président, veuillez laisser mes collègues poser leurs questions dans le sens où ils veulent aller. Je pense qu'ils sont capables de faire un lien avec l'étude. Plus tôt pendant la réunion ce matin, j'ai remarqué que d'autres collègues sont allés au-delà du sujet de l'étude. Je vous demanderais donc de laisser à mes collègues la liberté de s'exprimer comme ils le souhaitent.
En passant, monsieur Beaulieu, j'ai arrêté le chronomètre. Vous êtes à 4 minutes 54 secondes.
Monsieur Godin, je vous remercie de votre commentaire. Je sais à quelle question vous faisiez allusion; nous parlions alors du continuum de l'éducation. Cela dit, M. Beaulieu demandait à un témoin ce qu'il pense d'une étude du financement fédéral des établissements postsecondaires en faisant référence aux déclarations de quelqu'un d'autre.
Ce témoin se réfère constamment au QCGN, monsieur le président. J'ai donc le droit de m'informer s'il est d'accord sur la philosophie du QCGN. Vous n'aimez peut-être pas cela, mais…
Je viens du Nouveau-Brunswick et ce point de vue sur le postsecondaire ne me touche pas du tout.
Tenons-nous-en à l'étude et à ce que peuvent dire les témoins sans leur demander de se prononcer sur des ouï-dire ou de prêter une…
J'aimerais faire un commentaire. Nous sommes très fiers du fait que nous travaillons avec plusieurs groupes communautaires, dont le QCGN, pour comprendre les priorités de notre communauté. Cela dit, nous sommes indépendants du QCGN et de tout autre groupe communautaire.
Parfait.
Monsieur Donovan et madame O'Donnell, revenons au financement des universités. Le fait que vous avez beaucoup plus de financement en proportion du poids démographique des anglophones fait qu'à Montréal, surtout, il y a beaucoup de francophones et d'allophones qui vont fréquenter une université anglophone. Ce n'est pas vrai que ce jeu est à somme nulle. À la limite, plus il y a de financement et de places dans les universités anglophones, comparativement aux universités francophones, plus on n'a pas d'autre choix que d'aller dans les universités anglophones.
Merci, monsieur Beaulieu.
Les prochaines questions seront posées par la représentante du NPD.
Madame Ashton, vous avez la parole pour six minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins.
Madame Bouffard, en tant que rectrice de l'Université de Saint‑Boniface, vous êtes bien connue et respectée au Manitoba.
Le but de l'étude du Comité est de faire des recommandations claires au gouvernement fédéral. On sait que l'ACUFC, l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, a parlé du besoin de fonds stables, prévisibles et adéquats pour les établissements d'enseignement francophones. Elle a fait référence aux 80 millions de dollars qu'elle a demandés au gouvernement fédéral en 2021. Cependant, on n'a toujours pas vu ce type d'investissement de la part du gouvernement fédéral.
L'Université de Saint‑Boniface fait partie de l'ACUFC. Pourriez-vous nous dire l'importance qu'ont pour votre établissement ce montant de 80 millions de dollars et des investissements de base stables, prévisibles et adéquats?
Merci.
Oui, cette somme est essentielle si nous voulons être vraiment concurrentiels et répondre aux besoins des Franco-Manitobains et des personnes qui choisissent d'étudier en français en immersion.
Pour vous donner un ordre de grandeur, au cours des six dernières années, le pourcentage de jeunes inscrits dans le système scolaire a augmenté de 1,4 %, comparativement à 2,4 % pour les jeunes inscrits dans la DSFM, la Division scolaire franco-manitobaine, et à 9,8 % pour les jeunes inscrits en immersion. Cela dit, par contre, nous observons un taux de décrochage assez important des jeunes entre la maternelle et la 12e année, ainsi qu'entre la 12e année et l'Université de Saint‑Boniface.
Il faut donc bâtir ce continuum des études en français jusqu'à l'Université de Saint‑Boniface, qui doit être la destination visée. Il faut pouvoir travailler avec les divisions scolaires sur la question de la sécurité linguistique, entre autres. Nous devons travailler sur toutes sortes de dossiers.
Je sais que vous avez souvent parlé de la pénurie d'enseignants. Au Manitoba, c'est l'Université de Saint‑Boniface qui a le mandat de former les enseignants francophones. Elle a d'ailleurs augmenté sa capacité au cours des dernières années. Il y a trois ans, l'Université recevait du fédéral un financement ponctuel de 350 000 dollars pour lui permettre de maintenir des cohortes maximales de 70 étudiants, parce qu'elle en était à 35 ou 40 étudiants. Par la suite, la province a pris le relais du financement et, au cours des deux dernières années, le nombre d'étudiants est passé jusqu'à 90. L'Université a donc reçu un financement provincial récurrent pour atteindre cet objectif.
Souvent, nous utilisons les fonds fédéraux comme levier, mais il y a d'autres éléments sur lesquels nous devons travailler. Cela fait partie de ces « langues officielles ». C'est pour cette raison que nous avons besoin de ce financement fédéral.
Je vous remercie d'avoir soulevé la question de la pénurie de main-d'œuvre. Nous sommes en train de la vivre au quotidien, ici, au Manitoba. J'en fais l'expérience en tant que parent d'enfants qui fréquentent une école de la DSFM, et je l'observe dans nos écoles d'immersion, dont je suis d'ailleurs diplômée.
Nous sommes au courant du bon travail accompli par l'Université de Saint‑Boniface.
À quel point est-il important que le gouvernement fédéral s'implique dans le dossier de la pénurie de main-d'œuvre en éducation? On sait que l'éducation est un secteur de compétence provinciale, mais on ne peut pas nier ni faire fi de l'importante pénurie de main-d'œuvre en français. Pensez-vous que le gouvernement fédéral doit s'impliquer dans ce dossier, notamment en investissant dans les établissements d'enseignement postsecondaire chargés de former les professeurs?
Selon moi, les deux ordres de gouvernement doivent travailler main dans la main pour trouver les solutions et permettre de bâtir cette capacité. De notre côté, il faut aussi penser à l'éducation de la jeune enfance. Présentement, c'est la province et le fédéral qui unissent leurs efforts pour nous offrir le financement nécessaire pour augmenter notre capacité. Je pense que vous avez raison. Il faut que nous puissions en discuter avec les différents ordres de gouvernements et être à la table pour présenter l'information.
Nous perdons beaucoup de nos jeunes. Pour poursuivre sur les statistiques que je vous ai fournies tantôt, à peine 8 % des jeunes qui commencent à la maternelle en français poursuivent leurs études dans cette langue jusqu'à la fin de leurs études postsecondaires. Ce sont des pertes majeures de millions de dollars. Nous avons fait une petite étude de notre côté. Si nous examinons les pertes que représente le départ des jeunes qui quittent l'école entre la maternelle et la 12e année, tant à la DSFM qu'en immersion, elles se chiffrent à environ 97 millions de dollars par année. Entre la 12e année et l'Université de Saint‑Boniface, nous perdons environ 121 millions de dollars par année. Lorsqu'on sait que le budget annuel de l'Université est de 39 millions de dollars, on peut vite constater que quelques millions de dollars de plus permettraient de mettre en place des mécanismes structurants, qui assureraient cette pérennité, notamment en soutenant la formation des enseignants, des éducateurs et des auxiliaires d'enseignement.
Par ailleurs, il faut également voir au-delà de l'éducation, parce qu'il y a aussi des besoins dans les services de santé en français, entre autres.
Rapidement, parlons du rôle que jouent les étudiants étrangers à l'Université de Saint‑Boniface: dans quelle mesure est-il essentiel et quel message souhaitez-vous transmettre au gouvernement fédéral à ce sujet?
Nous avons vécu beaucoup de turbulences ces derniers mois.
Les étudiants étrangers représentent 21 % de notre population étudiante. C'est la proportion maximale que nous souhaitons maintenir pour différentes raisons. Ces étudiants sont importants. Ils font partie de la diversité et de l'expérience globale internationale que vivent nos étudiants du Manitoba. Le rôle des étudiants étrangers est également important du fait qu'il s'inscrit dans le projet d'immigration dans la communauté. On sait que nos diplômés d'origine étrangère sont nombreux à rester chez nous après leurs études: près de 80 % d'entre eux le font.
Merci, madame Bouffard.
Nous entamons maintenant le deuxième tour de questions.
Madame Kusie, vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
Je dois toujours commencer par souligner les liens que j'ai avec les témoins. J'aimerais donc vous informer que ma belle-mère vient de Saint‑Boniface, sa mère vient de la France et son père vient de la Belgique. Leur nom de famille est Windels. Mon mari a donc des racines à Saint‑Boniface. Il est toujours important pour moi de montrer que beaucoup de Canadiens au pays ont des racines francophones, comme moi, qui viens de l'Alberta.
Madame Bouffard, la communauté francophone a sa propre culture, et 3,7 % de la population du Manitoba a le français comme langue maternelle. L'Université de Saint‑Boniface établit-elle des liens avec cette communauté lors de la création de ses programmes en français? Quelle est la relation entre votre établissement et la communauté francophone?
Elle est caractérisée par une grande synergie. Par exemple, l'Université de Saint‑Boniface a créé un programme de travail social après que cela lui a été demandé par la communauté. Son programme de sciences infirmières est né de la même façon. Nous travaillons de près avec la communauté.
Nous avons même mis en place une table de concertation, ce qui n'existe pas ailleurs à ma connaissance. Plusieurs acteurs du système scolaire y sont représentés, dont la Division scolaire franco-manitobaine, l'Université, les écoles d'immersion, la Fédération des parents de la francophonie manitobaine, le Conseil jeunesse provincial et la Société de la francophonie manitobaine. Ensemble, nous parlons de notre vision de l'éducation et de notre continuum.
Je vais vous donner un autre exemple. L'Université a travaillé avec la Fédération et le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba pour trouver des solutions permettant d'avoir plus de garderies et former plus d'éducateurs en petite enfance, et nous avons eu du succès en travaillant ainsi, main dans la main.
Ce sont d'excellents exemples.
Je sais qu'on a déjà parlé des étudiants internationaux, mais je voudrais avoir plus d'information sur l'origine des autres étudiants de votre établissement. Combien d'étudiants sont issus de la communauté francophone du Manitoba?
Environ 33 % de nos étudiants, soit le tiers, proviennent des écoles de la Division scolaire franco-manitobaine et un autre tiers des écoles d'immersion. Par ailleurs, 10 % de nos étudiants sont inscrits à un programme de maîtrise, et 21 % viennent de l'étranger.
D'accord, merci.
Combien y a-t-il d'anglophones qui, comme moi, souhaitent améliorer leurs compétences en français?
Je dirais que c'est le cas des deux catégories d'étudiants, mais, si on considère qu'il s'agit essentiellement des jeunes qui proviennent des écoles d'immersion, on peut dire que c'est essentiellement le tiers de nos étudiants. Cependant, la grande majorité des cours offerts par la Division de l'éducation permanente, notamment aux fonctionnaires, sont liés à l'apprentissage du français. Comme je le disais, de ce côté-là, nous avons plus de 4 000 inscriptions.
C'est excellent.
Êtes-vous convaincue que ce programme continuera de prospérer et de renforcer les habiletés en français des Canadiens au Manitoba?
L'Université de Saint‑Boniface date de 1818. Nous avons donc une très longue histoire. Au cours des dernières années, nous avons vu nos programmes croître, puisqu'on nous a permis d'augmenter nos capacités en éducation et le nombre de places. Nous avons pu augmenter nos capacités dans nos deux programmes de sciences infirmières, ainsi qu'en petite enfance, et créer un programme d'auxiliaires d'enseignement. Nous avons maintenant d'autres projets. Voyons ce que l'avenir nous réserve.
Je sais qu'on a déjà beaucoup parlé du financement provincial et fédéral, mais quel type de financement est nécessaire pour élargir ces programmes afin de soutenir un plus grand nombre d'étudiants francophones?
Nous avons encore du travail à faire pour cibler tous les programmes, et nous faisons des études de faisabilité à ce sujet. Toutefois, nous devons aussi offrir des services et, surtout, nous doter d'infrastructures pour la vie étudiante sur le campus. Nous avons des équipes sportives extraordinaires, mais il faut avoir les infrastructures pour les appuyer, ainsi que toutes sortes d'activités.
Merci, madame Kusie.
Avant d'aller plus loin, je veux tout simplement expliquer la raison pour laquelle j'occupe actuellement la présidence. C'est parce que notre président est allé à la Chambre pour tenter une nouvelle fois de déposer notre rapport sur l'immigration. En tant que premier vice-président, je le remplace donc temporairement à la présidence.
La parole est maintenant à mon collègue, le secrétaire parlementaire du ministre des Langues officielles et membre du Comité, monsieur Marc Serré, pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je tiens à remercier les deux témoins du Réseau de recherche sur les communautés québécoises d’expression anglaise.
[Français]
Madame Bouffard, lors de la première heure, nous avons entendu M. Racine dire qu'il n'y a pas de transparence de la part des provinces. Vous avez dit connaître — évidemment — le financement accordé à votre établissement, mais est-ce que vous savez combien de programmes en français la province du Manitoba offre dans toute l'enveloppe de l'éducation de la province?
C'est probablement plus simple au Manitoba, puisque nous sommes l'unique établissement francophone, mais, pour ce qui est du financement en français, il faudrait regarder, dans les rapports de la province, ce qui est consacré au Bureau de l'éducation française.
Tantôt, vous avez mentionné des recommandations en lien avec ce que nous avons reçu de la table de concertation. Je vous parle de ça, parce que nous discutons des bourses, des infrastructures, de l'augmentation du nombre de cours en français, et du montant récurrent de 80 millions de dollars au sujet duquel nous travaillons avec le ministère des Finances pour nous assurer qu'il sera accordé.
Est-ce que vous avez des recommandations précises sur la façon dont cet argent devrait être dépensé, mis à part pour lutter contre la pénurie d'enseignants? Tout est nécessaire, mais où faut-il investir: est-ce dans les infrastructures ou dans la programmation des cours? Quels sont les défis auxquels vous pensez, et quel partenariat avez-vous avec la province?
C'est vraiment interrelié, n'est-ce pas? Si nous voulons ajouter des programmes, il faudrait avoir des infrastructures adaptées et qui permettent d'accueillir une plus grande population étudiante. Il faut donc trouver l'équilibre dans tout ça. Je pense qu'il faut aussi nous assurer d'avoir la capacité d'offrir les services. De notre côté, nous pensons surtout à l'insécurité linguistique, mais il y a toutes sortes d'autres services d'appui que nous devons offrir. Je dirais donc que, le gros morceau, c'est vraiment en lien avec les programmes.
D'accord, merci.
[Traduction]
Madame O'Donnell, je vous remercie de votre témoignage aujourd'hui. Vous avez mentionné que vous représentez 80 chercheurs. Vous ne vous concentrez donc pas nécessairement sur l'Université Concordia ou sur les universités, car vous vous concentrez sur ces 80 chercheurs.
Obtiennent-ils tous leur financement du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, c'est‑à‑dire des trois organismes subventionnaires? D'où vient l'argent?
Nous formons un réseau de chercheurs, et je ne peux donc pas dire d'où les différents chercheurs obtiennent leur financement. Certains d'entre eux sont établis dans des universités. D'autres sont au Japon et d'autres sont dans des universités aux Pays-Bas. Il s'agit d'un réseau.
Nous finançons parfois des projets avec des chercheurs, en fonction des fonds que nous recevons, mais la plupart d'entre eux sont financés par leur propre établissement, et certains d'entre eux sont des chercheurs retraités ou indépendants qui ne reçoivent aucun financement.
[Français]
Monsieur Donovan, vous avez mentionné certaines choses tantôt en réponse à une question de notre collègue M. Beaulieu. J'aimerais mieux comprendre.
Vous avez donné l'exemple de l'Université McGill. Nous avons plusieurs membres du Cabinet qui parlent très bien français et qui ont étudié à l'Université McGill. Nous avons des collègues députés anglophones qui parlent très bien français, comme Mme Koutrakis, qui a fait son cégep et ses cours de finance en anglais.
Vous avez parlé de données, de statistiques sur le bilinguisme. Pouvez-vous en dire davantage à ce sujet?
Par ailleurs, vous semblez avoir une perception différente de la situation. Les gens disent que les anglophones à Montréal ont peut-être plus d'avantages, mais qu'une fois sorti de l'île de Montréal, en Gaspésie, par exemple, il semble y avoir un manque flagrant de services en anglais. Qu'est-ce que le fédéral peut faire pour vous aider?
En ce qui concerne votre première question, monsieur Beaulieu parlait beaucoup du financement en comparaison du poids de la minorité. Il se base, je crois, sur une étude de Frédéric Lacroix, qui démontre que le financement des universités anglophones est plus élevé, par rapport au poids de la minorité. Mon contre-argument est que l'Université McGill ne sert pas uniquement la minorité, puisque au-delà de 70 % de ses étudiants ne sont pas anglo-québécois.
Pour répondre à votre deuxième question, effectivement, la disponibilité des services varie beaucoup dans la province. Même à Montréal, il y a des quartiers anglophones plus pauvres, notamment dans Verdun, et il y a des quartiers plus riches. Il y a donc beaucoup de variété socioéconomique.
Il y a beaucoup de réalités au Québec. Il y a un déclin important de la population en Basse‑Côte‑Nord, par exemple. Ce sont tous des cas qui méritent d'être étudiés davantage et d'être mis en valeur, parce que nous sommes tous Québécois. Il faut penser à ce qu'on peut faire par rapport à ça.
Merci, monsieur Donovan.
Merci, monsieur Serré.
Je cède maintenant la parole au deuxième vice-président du Comité, M. Mario Beaulieu, du Bloc québécois.
Monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
Merci, monsieur le président.
Madame O'Donnell et monsieur Donovan, j'aimerais revenir sur l'étude de Frédéric Lacroix dont on a parlé tantôt. Vous avez remis en question les chiffres, mais admettons qu'il soit vrai que 35 % à 40 % du financement fédéral au Québec est consacré aux universités anglophones. Trouvez-vous que c'est juste?
Si je comprends bien, monsieur Beaulieu, vous parlez du financement pour la recherche. Vous ne parlez pas du financement pour les infrastructures ou pour les dépenses de programmes.
Pour les infrastructures, ce serait du même ordre, sinon plus, selon vos propres chiffres.
Admettons que le financement octroyé par les fonds de recherche fédéraux aux universités québécoises allait aux universités anglophones dans une proportion de 35 % à 40 %, selon les années. Trouvez-vous que c'est juste?
Je suis chercheuse et non politicienne. Il est difficile de me prononcer sur le fait que ce soit juste ou non. Je crois qu'on parle des chercheurs individuels qui font des demandes de financement. Donc, c'est…
Je vais vous poser une autre question qui sera peut-être plus facile.
Le financement fédéral en matière de langues officielles pour le Québec sert à appuyer l'anglais dans une proportion de 94 %. Est-ce que c'est juste?
Parlez-vous du financement pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Québec?
Ce financement existe pour soutenir les communautés d'expression anglaise. Il est donc normal que ça soutienne l'anglais. Ça soutient plusieurs projets…
Les anglophones sont numériquement minoritaires au Québec, mais, contrairement aux minorités francophones hors Québec, ils font partie de la majorité canadienne anglaise. En effet, ils sont entourés de 350 millions d'anglophones, si on compte les États-Unis. Il me semble donc que ça n'a pas de sens que le Canada anglais vienne dire au Québec qu'il va appuyer l'anglais parce qu'il est minoritaire au Québec.
Ce n'est pas la langue qui est fragile pour les anglophones du Québec, mais la vitalité communautaire. Il faut donc soutenir nos communautés, parce qu'il y a des problèmes, comme je l'ai mentionné, y compris la pauvreté.
En ce qui concerne la vitalité communautaire, on voit à peu près partout au Québec que, là où il y a une certaine proportion d'anglophones, les transferts linguistiques favorisent l'anglais. Quand on compare ça aux francophones hors Québec, il n'y a aucun point de comparaison.
Monsieur Beaulieu, votre commentaire est très pertinent. Malheureusement, Mme O'Donnell ne pourra pas y répondre, parce que votre temps de parole est écoulé.
Notre dernière intervenante est Mme Ashton, du Nord du Manitoba. Elle représente le Nouveau Parti démocratique.
Madame Ashton, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
Merci.
Madame Bouffard, ma question concerne le programme de formation des enseignants dont vous avez parlé. En fonction de ce que vous faites actuellement, quelles recommandations pourriez-vous nous donner afin que le gouvernement puisse aider à augmenter le nombre d'enseignants francophones?
Justement, nous avons déjà préparé une troisième phase d'expansion des capacités en éducation pour permettre à l'Université de Saint‑Boniface d'accueillir plus d'étudiants en éducation.
Pour ce faire, nous avons bâti un modèle en travaillant avec les divisions scolaires, non seulement la Division scolaire franco-manitobaine, mais aussi les divisions scolaires offrant des programmes d'immersion française dans tout le Manitoba, y compris le Nord puisque nous savons qu'il y a des défis dans cette région. Nous avons cherché à voir comment identifier les jeunes qui sont actuellement dans les écoles et qui vont devenir nos enseignants de demain. Nous avons réfléchi à la manière dont nous pouvions les former, travailler avec eux dès maintenant pour contrer l'insécurité linguistique, leur offrir des ateliers et, éventuellement, les accueillir à l'Université de Saint‑Boniface pour leur premier baccalauréat, puis leur baccalauréat en éducation.
Il s'agit vraiment de les identifier et de les accompagner à partir d'un jeune âge et nous avons déjà un projet que nous sommes prêts à présenter et pour lequel nous attendons du financement. Pour le mener à bien, nous devrons aussi augmenter la capacité de recrutement de l'Université de Saint‑Boniface.
Merci. Nous souhaitons que vous obteniez le soutien des gouvernements fédéral et provincial.
Nous savons qu'il y a un lien très fort qui unit notre système d'éducation à l'Université de Saint‑Boniface, et que là n'est pas le problème. Le problème est le manque de soutien à long terme et il faut commencer par reconnaître la crise de la pénurie de main-d'œuvre, dont les prochaines générations vont payer le prix si nous n'essayons pas de trouver une solution.
J'enchaîne avec la question des étudiants internationaux. Selon vous, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et le gouvernement fédéral devraient-ils reconnaître et accommoder les besoins des établissements d'enseignement comme l'Université de Saint‑Boniface en matière de recrutement d'étudiants internationaux?
Madame Ashton, c'est une très bonne question. Malheureusement, votre temps de parole est écoulé. Votre question très pertinente va dans le même sens que celle que j'ai moi-même posée plus tôt.
Madame Bouffard, rectrice de l'Université de Saint‑Boniface, s'il vous est possible de répondre par écrit à l'excellente question de ma collègue, je vous invite à le faire. Je vous remercie.
Madame Lorraine O'Donnell et monsieur Patrick Donovan, du Réseau de recherche sur les communautés québécoises d'expression anglaise, je vous remercie également.
Je vous remercie tous les trois de votre disponibilité et de votre présence ce matin. Si vous voulez porter à l'attention des membres du Comité des éléments ou un complément d'information, je vous invite à faire parvenir le tout par écrit à la greffière. Ça nous permettra d'être encore plus efficaces et de préparer un bon rapport sur notre étude.
Chers membres du Comité, comme vous serez dans vos circonscriptions la semaine prochaine, je vous souhaite de bonnes vacances d'Ottawa. Les gens pensent que lorsque nous ne sommes pas à Ottawa, nous ne travaillons pas, mais c'est tout le contraire.
Nous nous donnons rendez-vous le lundi 29 avril prochain pour les travaux du Comité.
Le Comité souhaite-t-il mettre fin à la réunion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président (M. Joël Godin): Merci.
La séance est levée.
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