:
Nous allons commencer la réunion.
Je vous souhaite la bienvenue à tous.
[Traduction]
La séance est ouverte.
Bienvenue à la 104e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 21 mars 2024, nous amorçons notre étude sur l'antisémitisme.
J'ai quelques petites choses à lire avant que nous commencions.
La première concerne la rétroaction acoustique. Je tiens à rappeler à tous les députés et aux autres participants présents dans la salle les importantes mesures préventives suivantes.
Afin de prévenir les incidents de rétroaction acoustique perturbatrice et potentiellement néfaste qui peuvent causer des blessures, nous rappelons à tous les participants en personne de tenir leurs écouteurs loin de tous les microphones en tout temps. Comme il est mentionné dans le communiqué du aux députés du lundi 29 avril, les mesures suivantes ont été prises pour contribuer à prévenir les incidents de rétroaction acoustique.
Tous les écouteurs ont été remplacés par un modèle qui réduit considérablement la probabilité de rétroaction acoustique. Les nouveaux écouteurs sont noirs, tandis que les anciens sont de couleur grise. Veuillez utiliser uniquement les écouteurs noirs approuvés. Par défaut, tous les écouteurs inutilisés seront débranchés au début de la réunion. Lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, veuillez la placer face vers le bas au milieu de l'autocollant que vous trouverez sur votre table.
Veuillez consulter les fiches qui se trouvent sur la table pour obtenir des directives sur la prévention des incidents de rétroaction acoustique.
La disposition de la salle a été adaptée dans la mesure du possible, surtout pour ce matin, de manière à augmenter la distance entre les microphones et à réduire le risque de rétroaction acoustique venant d'un écouteur à proximité.
Ces mesures sont en place afin que nous puissions mener nos activités sans interruption et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, notamment les interprètes.
Je vous remercie de votre collaboration.
À l'intention des personnes qui n'ont pas besoin d'écouteurs, encore une fois, ne les branchez pas. Ainsi, ils ne causeront pas de rétroaction acoustique pour les interprètes.
La séance d'aujourd'hui se déroule de façon hybride. Je remarque que tous les témoins comparaissent en personne. Les députés se sont connectés avant la réunion.
Veuillez attendre que je vous donne la parole par votre nom avant de parler.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
Pour la gouverne de toutes les personnes présentes et en train de regarder la webdiffusion, je vous rappelle que tous les mémoires peuvent être envoyés au Comité jusqu'au 27 mai 2024 et qu'ils ne doivent pas compter plus de trois pages au total.
Pour votre gouverne, mesdames et messieurs les témoins, je veux que vous sachiez que c'est ainsi que se déroulent toutes les séances. Ce n'est rien de personnel, mais je vais vous dire tout de suite que nous avons préparé des cartes, que je soulèverai lorsqu'il vous restera 30 secondes. Je sais que, lorsqu'une personne fait ses affaires, il lui est difficile de regarder vers le haut, mais je vais continuer à soulever la carte, et, une fois que le temps sera écoulé, je vais simplement soulever la carte « Le temps est écoulé » et vous laisser quelques secondes pour conclure si vous ne l'avez pas déjà fait. Par souci d'équité, je le ferai dans le cas de tout le monde.
Tous les membres le savent — un certain nombre d'entre eux siègent au Comité depuis un bon moment, et un certain nombre sont nouveaux —, mais je tiens à rappeler à tout le monde qu'il est important que nous fassions tous preuve de compassion dans nos conversations et de respect les uns envers les autres et envers les témoins. Je m'attends à ce que cette conduite se poursuive ce matin. Merci beaucoup.
Je voudrais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins d'aujourd'hui.
Nous accueillons les étudiants Rachel Cook, Michael Eshayek et Nicole Nashen, qui comparaissent à titre personnel, l'avocat Neil G. Oberman; Nati Pressmann, fondatrice du Syndicat canadien des étudiants juifs, et Yos Tarshish, pour Hillel Ontario.
Vous disposez de cinq minutes chacun pour faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions. Encore une fois, si vos commentaires durent six, sept ou huit minutes, ne vous inquiétez pas. Vous aurez probablement la possibilité d'y revenir pendant la période de questions.
À titre de rappel, si vous voulez soulever un point que vous n'avez pas eu l'occasion d'aborder durant la séance — dans votre déclaration préliminaire ou pendant la période de questions —, n'hésitez pas à nous le soumettre par écrit, à condition que le document ne compte pas plus de trois pages.
Merci beaucoup.
Sur ce, nous allons commencer par des déclarations de cinq minutes chacune. Je vais vous donner la parole dans l'ordre où vous figurez sur le document que j'ai sous les yeux.
Nous allons commencer par Rachel Cook; vous avez la parole pour cinq minutes.
:
Merci beaucoup, mesdames et messieurs les membres du Comité, d'utiliser votre tribune pour nous permettre de nous faire entendre aujourd'hui.
Je m'appelle Rachel Cook et je suis une étudiante prometteuse de deuxième année à la faculté de droit de l'Université de l'Alberta. Je suis juive et sioniste, mais surtout, je suis une Canadienne.
Le 6 décembre dernier, j'ai demandé au département des services aux étudiants de ma faculté de droit s'il était disposé à inclure une menorah dans ses décorations annuelles des Fêtes, qui comprenaient des sapins de Noël, des guirlandes de Noël et des lumières de Noël. Au départ, la réaction à ma demande a été positive. Cependant, ce soir‑là, j'ai reçu un courriel d'un membre de l'administration disant que je n'aurais pas le droit d'ajouter ma menorah et que, de plus, en raison de mes préoccupations, les sapins allaient également être retirés.
Le raisonnement de l'administration était principalement attribuable à l'intention séculièrement festive. Toutefois, je crois qu'il y avait un autre objectif plus insidieux. Un jour, avant que j'aie demandé l'ajout d'une menorah, un administrateur s'était promené sur le campus déguisé en père Noël et avait distribué des cannes de bonbons à des professeurs et à des étudiants, à moi y compris.
Je pense toutefois que la faculté et l'Université de l'Alberta craignaient que l'exposition d'une menorah soit perçue comme un appui à Israël, ce qui est une opinion politiquement impopulaire sur les campus de partout au Canada. Un membre de l'administration de l'Université de l'Alberta a décidé de rendre la période des Fêtes moins plaisante pour éviter d'inclure des symboles juifs parmi les décorations. À mon avis, c'est particulièrement problématique, compte tenu du nombre d'églises qui ont été brûlées dans tout le pays.
Contrairement à l'affirmation de mon administration selon laquelle pratiquement personne ne remarquerait le retrait des sapins, leur retrait est devenu une nouvelle internationale. Mon histoire a fait l'objet de reportages par le National Post, diverses chaînes américaines, dont Fox News, et diverses agences de presse européennes et israéliennes. En plus des demandes des médias, j'ai eu des discussions avec des politiciens fédéraux et provinciaux et de nombreux membres de la communauté juridique qui sont préoccupés. J'ai également entendu des témoignages d'étudiants juifs de partout en Amérique du Nord qui avaient vécu des événements semblables sur leur campus et qui étaient terrifiés à l'idée d'y retourner après leur congé.
Je compatis à ces témoignages. Dans les semaines qui ont précédé la propagation de la nouvelle me concernant, il y a eu à l'époque un certain nombre de manifestations anti-Israël à l'Université de l'Alberta, dont l'une avait été annoncée comme un rassemblement pour les martyrs.
La directrice du centre d'aide aux victimes d'agression sexuelle de l'Université de l'Alberta, Samantha Pearson, a été congédiée après avoir fait les manchettes pour avoir signé une lettre ouverte dans laquelle elle qualifiait de « non vérifiée » l'agression sexuelle bien documentée qui a eu lieu le 7 octobre.
De plus, l'organisation Students for Justice in Palestine — dont le nom signifie en français « étudiants pour la justice en Palestine » — a été autorisée à agir ouvertement sur le campus, contrairement à ce que l'Université de l'Alberta avait affirmé.
Plus précisément, à la faculté de droit, des groupes d'étudiants ont annoncé dans le courriel hebdomadaire de l'association des étudiants en droit qu'ils s'étaient associés à des organisations qui avaient été interdites en Israël et dans d'autres pays en raison de leur soutien au Hamas. Une femme comptant parmi les fondateurs de ce club a été choisie pour prononcer un discours lors d'un dîner de remise de prix, où elle a déclaré que les membres avaient beaucoup à apprendre de la bravoure des Palestiniens.
Personnellement, j'ai accepté de changer de section à mi‑semestre, après qu'un professeur de droit criminel ait conclu que le système empêchait les personnes de couleur noire et autochtones de vivre sur leurs terres, et qu'il a fait ce que j'ai cru être une comparaison « farrakhanienne » en qualifiant le système de toit infesté de termites. Ce professeur enseigne toujours et a signé plus tard une lettre ouverte dans laquelle il a déclaré qu'il « rejette la notion selon laquelle il est antisémite, haineux ou illégitime de contextualiser l'attaque du 7 octobre 2023 ».
Un mois après l'interdiction des sapins, une réunion de rétroaction sur l'équité, la diversité et l'inclusion a été tenue à la faculté de droit. Aucun étudiant ou professeur juif n'était présent à cette réunion. Selon le procès-verbal, que j'ai reçu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, on a souligné que mon apparition dans les médias était l'une des plus grandes attaques contre la sécurité des étudiants et que la faculté avait la possibilité de formuler des commentaires et de tenir les gens responsables. Je n'aurais jamais pu imaginer que des gens sur les campus militeraient pour qu'on me tienne responsable d'avoir demandé à exposer une menorah ou d'avoir demandé que l'on dénonce l'antisémitisme.
Tout cela m'est revenu en mémoire au début de la semaine, lorsque j'ai traversé la bibliothèque Rutherford en me rendant à mon examen final. Il y avait une exposition d'œuvres d'art étudiantes, dont une œuvre interactive sur Gaza. Les étudiants avaient été invités à inscrire leurs sentiments sur l'histoire teintée par le colonialisme sur cet affichage interactif. Ils l'avaient fait, et l'affichage comportait une croix gammée, le soutien à une organisation terroriste reconnue par le gouvernement canadien — le Front populaire de libération de la Palestine — et un message disant « Mort aux gouvernements occupés par les sionistes », qui sous-entendait que les juifs dirigent les gouvernements occidentaux comme le Canada et les États‑Unis.
Après cette année, j'ai l'impression que l'Université de l'Alberta cherche davantage à camoufler l'antisémitisme systématique sur les campus qu'à s'y attaquer de front et à œuvrer pour un changement. Malheureusement, le fait de parler publiquement de l'antisémitisme documenté a été perçu comme un risque plus grand que le comportement sur lequel je m'affairais à attirer l'attention.
J'ai entendu le témoignage de nombreux membres du corps professoral, des camarades de classe et beaucoup d'Albertains qui ont discrètement offert leur appui à mon militantisme.
Je n'ai aucun doute quant au fait que, lorsque je retournerai sur le campus, on me détestera profondément d'avoir dénoncé la situation, mais ce ne sera qu'une minorité bruyante d'étudiants.
À l'amorce de cette étude, je vous encourage à garder ce qui suit à l'esprit.
On nous dit depuis des années que les mots sont de la violence, que les sentiments de sécurité sont primordiaux et que nous devons être conscients des actes et des interactions, ainsi que de la façon dont notre comportement peut nuire aux objectifs communs sur les campus. Il est gênant pour les institutions de partout au Canada d'admettre qu'elles ont permis l'essor d'un environnement culturel antisémite, mais la lumière, comme celle d'une menorah interdite ou d'un sapin interdit, est la meilleure façon d'attirer l'attention sur la haine.
Les Albertains, et l'ensemble des Canadiens, sont des gens qui travaillent fort, qui respectent l'éthique et qui ont un sens moral profondément enraciné…
:
Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui et de mener une conversation nationale sur la montée inquiétante et troublante de l'antisémitisme sur les campus universitaires depuis l'attaque terroriste barbare perpétrée par le Hamas contre Israël le 7 octobre.
Ma famille a fui la persécution en Irak pour s'établir en Israël, où je suis né. Lorsque j'étais adolescent, je rendais souvent visite à ma grand-tante qui avait déménagé au Canada, et je suis tombé amoureux de Montréal. Je suis arrivé à Concordia il y a deux ans pour étudier les finances, et je me sentais chez moi. Je suis devenu membre d'une communauté mondiale d'étudiants de cultures et d'origines différentes qui apportaient des perspectives uniques à leurs études de manière respectueuse et ouverte. C'était ce que l'apprentissage était censé être.
Dans cet esprit, je suis devenu l'un des fondateurs d'un groupe d'étudiants appelé la StartUp Nation — ou la nation des entreprises en démarrage —, ayant pour but d'apporter Israël sur leur campus par les affaires, l'innovation, la culture et la technologie. Nous ne savions pas que nous allions bientôt devenir des chefs de file dans la lutte contre l'antisémitisme sur les campus.
Permettez-moi de vous faire part de quelques dates importantes.
Le 8 octobre, soit le lendemain de l'horrible attaque, le groupe d'étudiants solidaires envers les droits de la personne des Palestiniens, SPHR Concordia, a publié le message suivant: « Hier soir, la résistance à Gaza a mené une attaque héroïque » — héroïque — « contre l'occupation et a pris plus de 30 otages. »
Le 25 octobre, des centaines d'élèves sont sortis des salles de classe à 13 h 30 et ont participé à une manifestation assise antisémite en solidarité avec la Palestine dans le hall principal de l'Université Concordia en scandant « Du fleuve à la mer », « L'intifada maintenant » et « La résistance est justifiée ». Ces slogans sont une menace et un appel au génocide du peuple juif.
Le 8 novembre, 30 étudiants juifs ont dressé sur le campus une table de Shabbat avec des chaises vides pour sensibiliser les gens à la crise des otages. En conséquence, environ 300 étudiants et professeurs pro-Hamas nous ont harcelés, menacés et physiquement accostés en criant « Retournez en Pologne » et « youpin », entre autres menaces et slogans. Personnellement, ma vie a été menacée, car on m'a dit: « Tu ferais mieux de quitter le campus, sinon, tu ne verras pas demain. »
Le 23 novembre, une deuxième manifestation antisémite a eu lieu. Tous les participants étaient complètement masqués et hurlaient: « Il n'y a qu'une seule solution! La révolution par l'intifada! »
Le 13 décembre, des étudiants de partout à Montréal sont venus au pavillon principal de notre campus du centre-ville et ont scandé des diatribes antisémites et brandi des pancartes et des bannières offensantes sur lesquelles figuraient des messages comme « Mondialisez l'intifada », ce qui est clairement un appel à un autre 7 octobre ou 11 septembre.
Le 4 mars, l'administration a annulé notre événement parce que nous recevions trois réservistes en mission diplomatique venus parler du cheminement d'Israël vers la stabilité et la paix. L'événement a ensuite été déplacé vers la fédération juive, la Fédération CJA, où des étudiants pro-Hamas, comme SPHR Concordia, se sont réunis pour bloquer physiquement tous les accès à l'édifice tout en scandant des slogans antisémites. Nous avons été coincés dans le centre de conférence durant quatre heures pendant que la police était sur place à tenter de nous faire sortir.
Le 12 mars, des étudiants juifs de la salle du club Hillel, qui est la seule salle de club juif sur le campus, ont été harcelés par des personnes masquées qui frappaient sur les murs et scandaient: « Tous les sionistes sont racistes. Tous les sionistes sont des terroristes. » Une fois encore, des étudiants juifs ont été enfermés et traumatisés.
Les 8 et 10 avril, l'institut israélien avait invité un universitaire israélien à parler de l'importance de la représentation arabe à la Knesset israélienne. En réaction, des manifestants ont bloqué physiquement l'accès à la salle de classe.
Notre plus grande déception tient au fait que les dirigeants de l'Université Concordia sont restés les bras croisés et ont refusé d'appliquer leurs propres politiques et d'intervenir pour assurer la sécurité et le bien-être des étudiants juifs. Ils semblent vouloir nous bâillonner et ont certainement fait preuve d'insensibilité à l'égard de nos opinions et de nos préoccupations.
Notre politique de sécurité sur les campus interdit aux manifestants de se cacher le visage en portant un masque. Pourtant, lors de tous les événements, les auteurs étaient masqués et, à ce jour, n'ont subi aucune conséquence.
L'administration n'a pas non plus intenté de poursuites contre les instigateurs des récentes manifestations antisémites. Par exemple, nous avons signalé qu'un étudiant de Concordia inscrit à temps partiel depuis 2016 enfreint notre code de conduite. Il est sur le campus et est un agitateur connu. L'étudiant s'est fait prendre sur film en train de menacer et d'attaquer des étudiants et des membres du personnel du campus, et il a été arrêté deux fois à l'extérieur du campus depuis ces incidents. Ses publications sur les médias sociaux appellent aussi à la violence contre les juifs. Il a dit…
:
« Viva viva intifada ». « Retournez en Pologne. » « Yémen, Yémen, rends-nous fiers, retourne un autre navire. » « La résistance est justifiée lorsque les gens sont occupés. »
Ce ne sont là que quelques-uns des slogans haineux qui ont retenti sur le campus et qui nous ont causé, à moi et à des milliers d'autres étudiants, une grande douleur et une immense crainte au cours des sept derniers mois.
Je m'appelle Nicole Nashen. Je viens de terminer ma deuxième année de droit à l'Université McGill. Je suis la petite-fille d'immigrants qui sont venus au Canada à la recherche d'une vie meilleure pour leurs enfants. Mes grands-parents étaient très fiers lorsque j'ai été admise à la faculté de droit de l'Université McGill, mais ils sont maintenant horrifiés par l'antisémitisme endémique que mes pairs juifs et moi-même vivons sur le campus. Les étudiants juifs de Montréal ont été intimidés par des affiches haineuses glorifiant la violence et le terrorisme et par des manifestants qui scandaient des slogans pour la destruction de leur patrie ancestrale.
Comme l'a dit M. Eshayek, le 8 octobre, des clubs financés par les universités McGill et Concordia ont publié sur Instagram un article intitulé « Hier soir, la résistance à Gaza a mené une attaque héroïque contre l'occupation et a pris plus de 30 otages ».
Ce sont les mêmes groupes qui ont organisé les manifestations sur le campus et le campement actuel de l'Université McGill. Ils n'ont pas tenté de cacher leurs intentions haineuses et antisémites. Nos universités ont choisi de fermer les yeux plutôt que de défendre leurs étudiants juifs.
[Français]
Une étudiante de l'Université de Montréal a affirmé qu'avant le 7 octobre, son identité juive lui semblait toujours naturelle et acceptée sans hésitation ni réserve. Cependant, maintenant, une ombre de doute ou un malaise plane toujours sur son sentiment d'appartenance parmi ses pairs à l'école en tant que Juive.
[Traduction]
Comme l'a dit M. Eshayek, le 8 novembre, à l'Université Concordia, mon alma mater, où j'ai siégé comme membre de l'Union des étudiants et étudiantes de Concordia et à titre de présidente de Hillel, des étudiants juifs ont été attaqués violemment lors d'un événement où ils avaient dressé une table afin de sensibiliser les gens à l'égard des otages. Ils ont été agressés par une foule antisémite, qui n'a été arrêtée que par l'intervention de la police. Adam Goren, vice-président des affaires israéliennes de la StartUp Nation de Concordia, a déclaré que les événements du 8 novembre avaient fondamentalement changé ce qu'il ressentait sur le campus, lui faisaient ressentir du danger et de la nervosité au moment d'assister à des cours et le faisaient regarder constamment par-dessus son épaule. Ce sentiment avait persisté jusqu'à ce jour.
Le droit de manifester pacifiquement est un principe fondamental de la démocratie, et critiquer les politiques et les actions du gouvernement israélien n'est pas foncièrement antisémite. Cela dit, le panneau du campement de l'Université McGill, qui fait face à la rue Sherbrooke et qui affiche le slogan suivant: « Provoquez l'agitation, favorisez l'intensification et mettez‑y fin », n'est pas une critique du gouvernement israélien, et il n'est pas non plus pacifique, et l'autre sur lequel on a inscrit « Interdit aux sionistes » est ouvertement antisémite.
Le sionisme ne devrait pas être controversé. C'est simplement la croyance en l'autodétermination des Juifs dans notre patrie autochtone, et il n'empêche pas non plus l'existence d'un État palestinien.
Les militants anti-Israël sur les campus tolèrent les aspects religieux du judaïsme, mais ils ont créé un critère décisif pour dire aux étudiants juifs qu'ils doivent dénoncer leur appartenance à leur patrie ancestrale afin d'être acceptés. Ils le font en nous distinguant en tant que sionistes. Toutefois, le judaïsme est plus qu'une simple religion. Nous sommes aussi une nation, un groupe ethnique et une communauté. Notre identité est un forfait qui ne peut être décomposé par les normes occidentales. Ainsi, les juifs en tant que groupe religieux sont jugés acceptables, tandis que les sionistes sont diabolisés parce qu'ils refusent de se conformer et d'abandonner le forfait qui est leur identité…
Les manifestants sur le campus ont simplement remplacé le mot « Juif » par « sioniste » pour rendre plus acceptables notre exclusion et l'intimidation à notre endroit. Est‑ce qu'une pancarte portant la mention « Aucun Juif n'est admis » serait tolérée sur le campus de l'Université McGill? Il est donc essentiel que le gouvernement du Canada reconnaisse que l'intimidation envers les sionistes constitue, en fait, de l'intimidation envers les Juifs.
Oui, il y a des Juifs non sionistes, et ils ont droit à leurs propres opinions. Cependant, comme le l'a déclaré lui-même à l'occasion du Yom HaShoah, la grande majorité des Juifs sont sionistes. Le sionisme est une composante essentielle de notre identité et doit être légalement reconnu comme tel afin que nos pairs ne puissent plus continuer d'utiliser cette étiquette pour nous exclure des universités dont nous méritons d'être membres à part entière.
Malheureusement, nos universités ne nous protègent pas en ce moment. Selon Elia Nissan et Julia Langleben, coprésidentes de StartUp Nation McGill, malgré son engagement à l'égard de l'inclusion et sa politique de tolérance zéro en matière de haine sur le campus, l'Université McGill n'a pas du tout tenu les promesses qu'elle avait faites à sa communauté.
Nous n'en sommes pas arrivés là du jour au lendemain. L'incapacité constante de nos universités à prendre des mesures contre la haine qui sévit sur nos campus a encouragé les militants anti-israéliens à devenir plus radicaux. Nos universités doivent prendre position, et elles doivent rendre des comptes lorsqu'elles ne protègent pas adéquatement leurs étudiants juifs.
Malgré l'intimidation qu'ils subissent sur le campus, les étudiants juifs continuent d'incarner la résilience héritée de leurs ancêtres, qui ont refusé de renoncer au judaïsme pour être acceptés dans la diaspora. Nous portons en nous la force de toutes les générations de Juifs qui ont choisi de lutter contre l'antisémitisme et qui ont persévéré, et je suis convaincue que nous le ferons aussi.
:
Bonjour. Je m'appelle Neil Oberman. Je suis avocat chez Spiegel Sohmer, à Montréal.
J'avais préparé un discours, mais j'ai écouté ces étudiants et il faut que vous compreniez tous pourquoi cela est si important. En tant qu'avocat de première ligne, j'ai eu le regrettable plaisir — dont je vais vous parler — de devoir m'adresser aux tribunaux pour demander la prise de mesures visant à protéger ces gens qui sont ici aujourd'hui. Il y a un message.
[Français]
Les valeurs canadiennes et québécoises sont attaquées. Un problème sérieux au Québec et au Canada, auquel on devrait s'attaquer aujourd'hui, sans restriction et sans poser de question. Les valeurs que nous avons comme Canadiens et comme Québécois sont en jeu.
Monsieur Fortin, vous voyez que des gens sont ici pour plaider leur cause.
[Traduction]
En tant qu'avocat, j'ai eu la possibilité de prendre en charge ces dossiers et d'essayer de faire quelque chose. Vous savez peut-être que j'ai demandé des injonctions contre l'Université McGill en vue du démantèlement du campement. Je ne vais pas commenter le jugement. Je ne vais pas vous dire s'il était bon ou mauvais. Le seul fait qu'il ait fallu faire cette demande en dit long sur ce qui se passe. Le 4 mars 2024, j'ai dû demander une injonction pour sauver notre communauté.
Cela dit, je ne suis pas un héros. Ce sont eux les héros, ces gens qui se présentent devant vous et qui s'expriment publiquement. Ce sont ces gens que nous voulons protéger. Cependant, il y a une question fondamentale, mesdames et messieurs les parlementaires.
[Français]
Je m'adresse à tous les Québécois. Nous devrions faire des changements. La loi est importante, mais il est encore plus important qu'elle soit respectée et appliquée.
[Traduction]
Vous pouvez créer toutes les lois que vous voulez. Je suis certain que vous voulez en parler, et nous allons le faire, mais si les gens ne respectent pas les lois en vigueur, cela n'a aucun intérêt. L'antisémitisme est une maladie, et il faut l'éradiquer. Cependant, ce qui est plus important, c'est l'ignorance et l'incapacité de comprendre les choses. C'est aussi une maladie. Les législateurs ne peuvent pas légiférer sur l'amour, et ils ne peuvent pas dire aux gens quoi penser, mais ils peuvent légiférer contre la haine.
C'est votre travail aujourd'hui de légiférer contre la haine. Je ne vous donnerai pas un cours de droit; vous êtes les législateurs. Je peux toutefois vous dire que tous les étudiants qui sont venus me voir m'ont dit: « Neil, pourquoi ne fait‑on pas respecter la loi? » La loi de Concordia, la loi de Dawson, la loi de Vanier, la loi du Canada et la loi du Québec. Le Canada est un État de droit. La primauté du droit n'est pas à prendre à la légère. C'est l'essence même de notre identité.
J'aimerais vous présenter la liste des 10 pires choses, outre celles dont ces jeunes ont parlé, dont j'ai dû personnellement m'occuper.
Un élève se fait déposer par sa mère à l'école le matin et, dès son arrivée, un groupe d'enfants lui demande: « Crois‑tu en la Palestine? Es‑tu contre Israël? » Il répond que non, et les enfants commencent à le battre. Que fait l'enseignant chargé de superviser les enfants? Il dit aux élèves de continuer de le battre jusqu'à ce qu'il dise « Palestine » Ce n'est pas cela, le Québec, et ce n'est pas cela, le Canada. Je suis inquiet, et vous devriez l'être.
L'avenir, ce n'est pas Neil Oberman. L'avenir, c'est Nicole, Rachel, Nati et Michael. Ils sont l'avenir, mais les priver de leur avenir, c'est priver le Canada de son avenir. C'est pourquoi je vous exhorte tous, au moment d'examiner ce qui se passe, à vous mettre au niveau des étudiants et d'observer ce qu'ils font.
Un autre problème qui m'a malheureusement été signalé dans le cadre de mes activités, c'est que les gens ne veulent pas intervenir. Ils ont peur de se faire entendre.
Ce que je dis, madame la présidente, c'est que si on ne fait rien, on n'obtient rien. Je choisis de faire quelque chose. Je suis ici. Ils sont ici. Je vous félicite. Je ne suis pas ici pour eux; je suis ici pour vous. Je vous dirai ceci. Lorsque viendra le temps pour vous de délibérer sur ce que vous devez faire, tenez compte de trois choses: ce que dit la loi, ce que disent les étudiants et ce que dit votre cœur. Qu'est‑ce que votre cœur vous dit sur ce que nous, les Canadiens, voulons faire? Voulons-nous être obligés de faire cela?
[Français]
Faut-il que les gens engagent un avocat pour aller à l'école? C'est ridicule et ce n'est pas acceptable.
Personnellement, je proteste en utilisant la loi qui existe pour nous tous. J'ai demandé des injonctions qui ont été rejetées, mais les gens m'ont écouté parce qu'ils ont écouté les étudiants et les étudiantes.
[Traduction]
Nous allons apporter ce changement parce que cette association d'étudiants et votre comité ont le pouvoir, mais le pouvoir ne réside pas dans le silence.
Je vais respecter le temps qui m'est alloué. Je vais vous montrer ce qu'est l'avenir, mesdames et messieurs. C'est une page blanche. Vous avez l'occasion, avec ces gens, de créer pour nous tous un avenir qui sera écrit non pas dans le sang ou la haine, mais dans l'amour, que vous ne pouvez pas légiférer. Cependant, avec tout le respect que je vous dois, vous devez comprendre que si nous n'agissons pas maintenant, nous ne serons pas en mesure d'endiguer la vague d'antisémitisme. C'est une maladie, et il revient au Parlement et au gouvernement d'arrêter de parler et de commencer à agir.
[Français]
Personnellement, je vais être là jusqu'au bout pour ces étudiants.
Je vous remercie.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie le Comité de cette étude cruciale sur l'antisémitisme.
Je m'appelle Nati Pressmann. Je suis une Juive canadienne de première génération en troisième année à l'Université Queen's. Je suis la première de ma famille à être née dans un pays où je jouis des mêmes droits que les autres citoyens, malgré le fait que je sois juive.
J'ai toujours été reconnaissante des possibilités et de la paix que le Canada nous a offertes, à moi et à ma famille. Cependant, cette paix a été entachée par l'antisémitisme. L'antisémitisme a toujours été présent au Canada, y compris dans les universités, et les Juifs ont toujours été la communauté la plus souvent victime de crimes haineux, mais j'ai vu la situation empirer de façon exponentielle depuis le 7 octobre.
En tant que vice-présidente de l'Union mondiale des étudiants juifs, j'ai constaté un vide au Canada. Il n'y avait aucune organisation démocratique nationale pour les étudiants juifs. Le Syndicat canadien des étudiants juifs, ou SCEJ, a été créé pour combler cette lacune par la création d'une plateforme permettant aux étudiants juifs de partout au Canada d'élire des représentants qui peuvent défendre nos intérêts auprès des administrateurs des universités, des organismes gouvernementaux et des organisations juives et non juives, et leur parler de nos préoccupations. Ce besoin n'a jamais été aussi grand.
Le 7 octobre, nos fils Instagram ont été submergés de vidéos de l'attaque meurtrière du Hamas contre des civils israéliens. Nos pairs juifs étaient horrifiés. Ils ont fait circuler des vidéos de Naama Levy, forcée de monter dans une jeep par un homme armé du Hamas alors que l'entrejambe de son pantalon de survêtement était taché de sang.
Pour leur part, de nombreux élèves non juifs ont diffusé des publications célébrant les tueries et censées justifier la barbarie du Hamas comme étant de la résistance dans un contexte de décolonisation. Un étudiant de l'Université Queen's a écrit dans un blogue que c'était un jour glorieux. Il a même reçu un prix pour l'équité.
Je rappelle au Comité que ces incidents de violence pure et simple et ces discours haineux existaient avant même qu'Israël ne réagisse à l'agression meurtrière du Hamas.
Nos universités devraient être des lieux d'apprentissage, de réflexion critique et de dialogue respectueux. Au lieu de cela, elles sont devenues le foyer de manifestations non sanctionnées où l'on tient des propos antisémites.
On entend souvent: « Il n'y a qu'une seule solution! Une révolution de type Intifada! » Pour les Juifs, l'Intifada a été une série d'attentats suicides qui ont coûté la vie à 1 400 Israéliens. Les Israéliens comme moi, et les enfants des Israéliens, ont appris tout jeune qu'il faut se tenir loin des bagages laissés sans surveillance, car il pourrait s'agir d'une bombe.
D'un bout à l'autre du pays, des étudiants juifs qui portaient auparavant des symboles juifs, comme l'étoile de David, les cachent maintenant lorsqu'ils passent près d'une manifestation, comme mes amis qui portaient la kippa et qui portent maintenant plutôt des casquettes de baseball pour se rendre en classe. Ce n'est pas parce que nous sommes moins fiers d'être Juifs, mais parce que nos universités ont laissé s'installer un climat où le fait d'être ouvertement Juifs peut constituer une menace pour notre sécurité.
Nous avons dû réprimer notre fierté d'être Juifs parce que nous avons peur de subir un préjudice physique de la part d'autres étudiants sur nos campus.
Certains membres du SCEJ ont des parents parmi les otages de Gaza. Néanmoins, ils sont exposés à des sévices puisque les personnes assassinées et les otages sont considérés comme des agresseurs, plutôt que comme les victimes qu'ils sont.
Des groupes dirigés par des étudiants de l'Université Queen's, de l'Université McMaster, de l'Université de l'Alberta, entre autres, ont diffusé des publications accusant Israël d'avoir inventé des signalements d'agressions sexuelles contre des femmes prises en otages dont auraient été témoins des parents des victimes. Mes propres amis et des membres du SCEJ ont vu ces publications alors que des membres de leur propre famille sont toujours détenus par le Hamas, et ces otages sont de jeunes femmes.
Les étudiants de première année qui vivent loin de chez eux pour la première fois ne se sentent pas en sécurité dans leur résidence. À l'Université Dalhousie, à l'occasion du Jour commémoratif de l'Holocauste, un étudiant juif de première année a apposé l'inscription « Plus jamais » sur un tableau blanc personnel dont chaque étudiant élève dispose à l'extérieur de sa résidence. À son retour, le mot « jamais » avait été effacé.
À l'Université Queen's, plus de cinq mezuzoth apposés par des étudiants de première année ont été arrachés dans le bâtiment de la résidence Leggett. Il ne s'agit là que d'un seul édifice et d'un seul des crimes haineux qu'ont dû subir à maintes reprises les étudiants juifs.
Nous avons aussi été fréquemment témoins d'actes de distorsion de l'Holocauste, ce qui est également très préoccupant, non seulement en raison de la mémoire de l'Holocauste, mais aussi à cause de la montée de la négation et de la distorsion de l'Holocauste, et du fait que de nombreux Juifs canadiens sont les descendants de survivants de l'Holocauste.
Une étudiante en soins infirmiers de l'Université du Manitoba a publié des images comparant les actes d'Israël à ceux des nazis pendant l'Holocauste. Le groupe Students for Justice in Palestine de l'Université de Regina a brandi des affiches sur lesquelles on pouvait lire qu'un holocauste n'en justifie pas un autre. Des affiches semblables ont été vues lors de nombreux autres rassemblements à Calgary, Vancouver, Montréal, Toronto, Saskatoon et Halifax.
Tous ces incidents découlent de la banalisation des propos antisémites par l'inaction des administrateurs des universités, qui n'appliquent même pas leurs propres politiques et leurs propres codes de conduite pour lutter contre l'antisémitisme sur leurs propres campus. Les administrateurs ont le droit d'agir lorsque des étudiants ou des membres du corps professoral créent un climat malsain sur un campus, mais nous constatons que pratiquement aucune mesure n'a été prise.
La montée de l'antisémitisme est profondément troublante. Les étudiants juifs éprouvent de la peur et de l'anxiété. En tant que société, nous devons les soutenir. En tant que Canadiens, nous devons les soutenir, comme les valeurs canadiennes l'exigent.
Avec plus de 300 membres provenant de plus de 20 universités, le SCEJ jouera son rôle en contribuant à la fourniture de ce soutien aux étudiants juifs exposés à l'antisémitisme sur les campus et ailleurs. C'est maintenant à votre tour de faire entendre notre voix de manière à ce que tous les étudiants juifs au Canada puissent se sentir en sécurité dans leurs lieux d'apprentissage.
Merci.
:
Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous suis reconnaissant de votre engagement à relever le défi important et croissant que représente la haine dans notre société, plus particulièrement la montée en flèche de la haine envers les Juifs sur les campus.
Je suis ici pour parler au nom de milliers d'étudiants juifs partout au pays. Je m'appelle Yos Tarshish. Je suis le directeur de Hillel Queen's, et je suis ici pour représenter les Hillels présents sur les campus de toutes les régions du pays.
J'ai été profondément immergé dans les communautés d'étudiants juifs du Canada et du monde entier pendant une quinzaine d'années, et cela m'a permis de mieux comprendre les traits caractéristiques de l'antisémitisme, en particulier dans le milieu universitaire. Cela m'a permis de constater ses fluctuations, et d'observer à quel moment il est en hausse et à quel moment il est en baisse.
L'antisémitisme n'est pas un phénomène nouveau au Canada. Dès les années 1920, les Juifs canadiens se sont heurtés à des obstacles systématiques à l'admission dans les universités canadiennes. Certaines universités, par exemple McGill, n'ont annulé leurs nombreux quotas classistes relatifs aux étudiants juifs que dans les années 1960.
En 2009, les étudiants juifs de l'Université York ont dû se barricader à l'intérieur de leur édifice Hillel pour se protéger d'une foule violente.
En 2022, le rapport historique de la Dre Ayelet Kuper sur l'antisémitisme au sein de la faculté de médecine Temerty de l'Université de Toronto a mis au jour des préjugés très profondément ancrés, et démontré comment ils s'infiltrent même dans les établissements d'enseignement les plus prestigieux.
Malheureusement, ce n'est que la pointe de l'iceberg, et les étudiants juifs sont confrontés à des choses vraiment terribles chaque jour. L'antisémitisme que nous observons sur les campus prend trois formes principales. La première est le harcèlement verbal et social. La deuxième, ce sont les actes physiques et symboliques. La troisième est la disqualification et l'exclusion.
En ce qui concerne la première forme, à savoir le harcèlement, un étudiant juif qui se promenait sur le campus de l'Université York en février s'est fait prendre en photo de dos. Cette photo a ensuite été diffusée sur TikTok, où des milliers de personnes ont publié des commentaires pour se moquer de son choix de kippa, sa calotte. Il y a eu des milliers de commentaires.
L'histoire que j'ai racontée hier lors de notre conférence de presse s'inscrit dans la lignée de celle relatée par Nati au sujet des cinq mezuzoth retirés dans des résidences. En janvier, lors de l'assemblée générale de la Residence Society — l'association étudiante démocratiquement élue qui représente 6 000 étudiants de l'Université Queen's vivant en résidence —, un étudiant juif de première année a demandé comment…
:
Lors de l'assemblée générale de la Residence Society, un étudiant juif de première année a demandé aux candidats de dire ce qu'ils allaient faire pour lutter contre l'antisémitisme dans les résidences, étant donné que, à ce moment‑là, quatre mezuzoth avaient été retirés. Aucune bonne réponse ne lui a été offerte. Le plus troublant, c'est qu'un éclat de rire s'est fait entendre dans la salle au moment où la question a été posée.
Les propos antisémites ne se limitent pas aux étudiants. Nous avons déjà entendu des professeurs tenir des propos terribles à l'intérieur et à l'extérieur de leurs salles de classe. Je pense que l'incident qui m'a vraiment choqué, c'est celui où un professeur de l'Université Concordia s'est présenté à l'Université McGill et a crié aux étudiants juifs « Retournez en Pologne, sharmuta », un terme désobligeant en arabe.
Quant aux agressions physiques, beaucoup d'exemples ont été donnés à ce sujet ce soir. À l'Université Western, des gens ont lancé des pierres à travers la fenêtre de la résidence d'une étudiante qui avait organisé un événement pour les Juifs ce soir‑là. Il s'agit d'une résidence étudiante privée. Les agressions physiques et les menaces sont devenues dangereusement courantes. Au cours des dernières semaines, j'ai vu plusieurs vidéos filmées sur des campus qui m'ont beaucoup troublé.
Enfin, il y a la disqualification. À mon avis, c'est vraiment la forme la plus pernicieuse d'antisémitisme que nous observons sur les campus. C'est la revendication centrale de ce mouvement des campements à ce moment‑ci. Le retrait des campus de toutes les représentations du sionisme est devenu… Le masque est tombé. Nous sommes passés de « Il faut un cessez‑le‑feu » à « Il faut expulser Hillel du campus, car c'est une institution culturelle sioniste. »
C'est ce que dit la section locale 3903 du Syndicat canadien de la fonction publique, qui représente les assistants à l'enseignement de l'Université York. Elle a fourni aux assistants à l'enseignement une trousse d'outils sur la façon d'amener la Palestine dans les salles de classe. L'une des recommandations était d'interdire Hillel sur le campus.
Je vous rappelle que Hillel est une organisation qui est au service des étudiants juifs canadiens depuis plus de 80 ans.
Je suis fier de vivre au Canada, et je suis peiné d'observer cette tendance dans un pays reconnu pour son inclusivité et sa diversité. L'antisémitisme est effectivement une haine ancienne, mais ce à quoi nous assistons actuellement sur les campus canadiens n'est pas qu'une simple résurgence; c'est aussi une intensification. Cela menace la sécurité et le bien-être des étudiants juifs et, par extension, l'intégrité de nos établissements d'enseignement.
Si nous restons les bras croisés pendant que les ombres de l'Histoire s'allongent dans nos établissements d'enseignement, nous laissons tomber non seulement ceux qui sont directement touchés, mais aussi les idéaux mêmes de diversité, d'inclusion et de justice que nous aspirons à défendre.
Il est urgent d'agir maintenant. Le coût de l'inaction, c'est le bien-être des générations futures de notre pays. Ne soyons pas ceux qui regarderont en arrière en regrettant de ne pas en avoir fait davantage lorsque c'était possible de le faire. Veillons à ce que tous les étudiants, peu importe leurs origines ou leurs croyances, puissent poursuivre leurs études dans un environnement exempt d'intimidation, de haine et de peur.
Merci.
:
Merci, madame la présidente.
Je tiens à vous remercier tous d'être venus ici et d'avoir partagé vos histoires. Je ne pense pas que quiconque puisse les entendre sans être horrifié. Je tiens à vous dire à quel point vous êtes tous courageux de vous être présentés et d'avoir raconté vos histoires. Je sais que cela fera une différence.
Je ne peux m'empêcher de penser que c'est une réunion historique. Nous essayons enfin de régler le problème de l'antisémitisme au Canada.
Me Oberman, vous avez parlé d'aller de l'avant et de légiférer, mais j'aimerais revenir au 7 octobre et à la période entre cette date et aujourd'hui. La réalité, c'est que les actions de notre gouvernement n'ont pas amélioré les choses. En fait, elles les ont empirées. Je vais vous exposer un certain nombre de situations.
Par exemple, tout juste après le 7 octobre, le a publiquement réprimandé Israël et les forces de défense israéliennes, ou FDI, pour avoir bombardé un hôpital à Gaza sans avoir toute l'information nécessaire. Il est ressorti par la suite que la cause de l'incident était en fait que des roquettes qui avaient été tirées depuis Gaza elle-même avaient raté leur cible, et que les FDI n'avaient rien à y voir.
Pourtant, c'était le premier ministre du Canada.
Il a demandé à son ambassadeur aux Nations unies de voter en faveur d'une motion de cessez-le-feu ouvertement anti-Israël à l'ONU, se rangeant ainsi du côté du groupe anti-Israël de l'ONU. Il a récompensé le Hamas en bloquant la vente d'armes à Israël après que le Hamas a brutalement assassiné 1 200 civils et pris 200 otages de plus. Pire encore, il n'a pas levé l'embargo sur les armes même après que l'Iran a lancé une attaque directe sur le territoire israélien au moyen de centaines de missiles et de drones.
Il a récompensé le Hamas en rétablissant le financement de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Gaza, l'UNRWA, même si des employés de l'UNRWA ont pris part aux attaques du 7 octobre.
Il n'a pas condamné sans équivoque la requête frivole relative à la Convention sur le génocide déposée par l'Afrique du Sud à la Cour internationale de justice.
Je pense que ce qui est le pire, et j'étais présent à la Chambre, c'est qu'il a voté, avec son caucus, à l'exception des députés ici présents, en faveur d'une motion au Parlement qui punissait notre allié démocratique, Israël, et récompensait les terroristes du Hamas. Mais pire encore, à la fin de ce vote, presque tous les libéraux, à l'exception des députés ici présents, se sont levés et se sont ovationnés, avec le NPD, à la Chambre des communes, parce qu'ils étaient fiers d'avoir adopté cette motion.
Par conséquent, maître Oberman, seriez-vous prêt à dire que les actions, et pas seulement l'inaction, du gouvernement libéral depuis le 7 octobre ont attisé les flammes de l'antisémitisme au Canada et ont exacerbé le problème sur les campus?
:
C'est une excellente question, mais vous avez oublié une chose importante, monsieur Morantz. Lorsque notre premier ministre invite à la Chambre des communes, un lieu de démocratie et de justice, un ancien membre du parti nazi ukrainien, il n'est pas souhaitable d'envoyer ce genre de message aux Canadiens.
Je ne suis pas politicien, monsieur. Je suis un simple avocat qui essaie de faire un travail difficile. Je suis avocat spécialisé dans le recouvrement, mais ma communauté est venue me voir le 4 mars et m'a demandé de lui rendre sa dignité; alors, ce que je vais faire, c'est rendre sa dignité à notre peuple. Ce que je peux vous dire, c'est que les gens prennent exemple sur leurs dirigeants, comme il se doit.
[Français]
Il est très important de déterminer qui est responsable, quel est le message, si celui-ci est clair et si les gens reçoivent des messages qui ne sont pas clairs. Lorsque vous envoyez des messages qui ne sont pas clairs,
[Traduction]
Lorsque vous envoyez des messages qui ne sont pas clairs, cela crée de l'ambiguïté, cela attise le feu, cela alimente TikTok et cela attise la haine en ligne. Savez-vous ce qu'est la haine? La haine est comme une maladie. La haine est comme une maladie. Lorsque vous la nourrissez avec de mauvaises paroles et de mauvaises impressions, vous créez une atmosphère, puis vous dites: « Oh, nous devons y remédier. Ça ne va pas. »
Ça ne va pas parce que vous avez créé le problème. Voulez-vous maintenant remédier à un problème que vous avez créé? Très bien, mais regardez ces pauvres étudiants. Toute leur carrière universitaire sera entachée de menaces et de violence. Qu'est‑ce que cela nous laisse pour l'avenir? Cela nous laisse une page blanche.
Cependant, monsieur, je suis d'accord avec vous. Le gouvernement doit être plus responsable, parce que la responsabilité commence à la Chambre. Faites le ménage chez vous, et les gens vous suivront.
Merci.
Je suis désolé de ces inconvénients, mais nous essayons de toujours respecter le bilinguisme sur la Colline du Parlement, ce qui nous oblige parfois à faire quelques petits compromis.
Pour la troisième fois, je voudrais d'abord vous dire que je suis heureux de voir tous les étudiants venus nous parler de la situation qu'ils vivent sur leur campus universitaire. Il est inutile de dire que nous trouvons cette situation inacceptable.
À mon avis, un campus universitaire est un lieu d'apprentissage, mais aussi un lieu d'échange, où tous devraient se sentir en sécurité et libres d'échanger des points de vue, même si c'est avec vigueur par moments. C'est correct, mais tout doit se faire dans le respect. Les situations que vous nous décrivez ne sont pas respectueuses et ne sont pas acceptables.
J'ai également dit à Me Oberman que je suis tout à fait d'accord avec lui sur à peu près tout ce qu'il a dit. Ce qui a particulièrement retenu mon attention, c'est quand il a nous dit qu'il était important de créer des lois, mais qu'il fallait aussi s'assurer qu'elles sont respectées. Cela ne peut pas être plus vrai dans le cas de l'antisémitisme.
Notre Code criminel est déjà relativement volumineux. On peut bien l'alourdir encore et y ajouter des dispositions à l'infini, mais cela ne réglera pas, à mon humble avis, les problèmes que nous vivons sur le terrain. Je pense qu'on doit mettre l'accent sur le respect.
En tant que législateurs, je suis d'avis que nous avons la responsabilité accrue de donner l'exemple en faisant preuve de respect et de dignité dans nos échanges.
Il y a des exemples de langage vulgaire, indigne d'un parlementaire et d'un citoyen respectueux; je ne les citerai pas, mais ils ont eu lieu ici, publiquement, sur la Colline du Parlement. Je les déplore chaque fois et je le réitère ici.
Cela ne devrait pas se produire et, malheureusement, ce n'est peut-être pas étranger à la montée du langage ordurier et du comportement inacceptable qu'on retrouve un peu partout sur le terrain. C'est particulièrement vrai, ces temps-ci, sur les campus universitaires.
Je vous prie de m'excuser pour ce long préambule, mais je trouve important de vous donner mon avis sur la question.
Cela dit, j'ai trouvé intéressant d'entendre Me Oberman, mais j'aimerais aussi entendre les commentaires des étudiants.
Toute la situation qui règne sur les campus est inacceptable, et vous pourrez y revenir tant que vous voudrez, mais cela ne nous avancera pas.
À votre avis, quelle est la cause de cette situation?
Évidemment, les événements du 7 octobre 2023, que nous déplorons tous, ont été une bougie d'allumage.
Pourquoi est-il difficile pour vous d'être présents sur les campus universitaires et d'y avoir des discussions sur des sujets qui vous intéressent sans être victimes de ces comportements d'exclusion, ces reproches qu'on ne s'explique pas ou qu'on s'explique mal?
Monsieur Eshayek, quelle est donc la raison à l'origine de la situation actuelle sur les campus?
:
Merci beaucoup, madame la présidente. Mon préambule sera plus court, je l'espère, que celui de M. Fortin. Ce serait la pratique normale.
D'entrée de jeu, je me joins à M. Housefather pour dire que lorsque j'ai voté en faveur de cette étude, j'ai naïvement présumé que le Comité serait capable de mettre de côté l'implacable partisanerie afin de faire la lumière sur ce problème et chercher des solutions. Je suis déçu de certaines choses qui se sont passées au début de la séance, et j'espère que nous reporterons notre attention sur le problème de l'antisémitisme et les problèmes auxquels les étudiants juifs sont exposés.
Comme tous ceux qui ont des liens avec la communauté juive, je ne suis pas surpris — j'ai des liens dans ma circonscription et j'ai des liens familiaux historiques avec les communautés juives —, mais il est quand même choquant de vous entendre tous ici, vous qui êtes issus de différents milieux et de diverses institutions, déclarer que la même chose se produit au Canada. Je vous remercie d'avoir porté cette question à l'attention du public. Je vous remercie de prendre le risque que vous prenez personnellement, car je sais que votre présence ici aujourd'hui vous expose à un risque personnel de représailles et de harcèlement, et je ne pense pas que nous devrions minimiser ce risque. Nous vous sommes donc redevables de votre présence.
Plutôt que de faire moi-même un long discours, j'aimerais surtout entendre ce que vous avez à dire sur ce problème. Je sais que certains d'entre vous n'ont pas eu le temps de terminer leurs observations au début, alors je vais vous donner l'occasion de le faire sans vous poser de question précise. Je vais d'abord donner la parole à M. Eshayek afin qu'il puisse dire tout ce qu'il n'a pas eu le temps de dire dans le temps imparti, et je ferai de même pour les autres.
:
Je vous remercie beaucoup.
On a déjà demandé pourquoi tout cela se produit. J'aimerais seulement aborder quelques autres points.
Tout d'abord, la haine contre les juifs est évidente. L'antisémitisme existe dans notre société. Il est partout. C'est un phénomène systémique qui a toujours existé. Il dure depuis 2 000 ans. Il faudra beaucoup de temps pour s'en débarrasser.
C'est la raison pour laquelle notre organisme, Hillel, parle de repousser l'antisémitisme en marge du campus, et non de s'en débarrasser, car ce n'est pas réaliste et nous devons vivre avec le fait qu'il y aura toujours des extrémistes et des gens qui ont de terribles opinions. Cependant, ce qui me préoccupe le plus, c'est la désinformation et la mésinformation généralisées qui se répandent parmi les jeunes, essentiellement parce que ces jeunes ne font pas preuve d'esprit critique.
J'ai récemment appris une expression formidable qui fait référence à la « constellation des croyances ». Si je peux mettre le doigt sur une étoile de l'une des croyances de quelqu'un, je peux automatiquement connaître vingt autres de ses croyances, car il ne pense pas par lui-même. Il se fie uniquement au dogme de la théorie des dominos, c'est‑à‑dire que s'il croit à ceci, il croit aussi à cela. J'ai vu une vidéo qui provient d'un campement américain où un étudiant disait qu'il fallait savoir que la République populaire démocratique de Corée entraîne des Palestiniens et qu'elle a toujours appuyé les Palestiniens. Il fallait en déduire que la Corée du Nord fait partie des gentils parce qu'elle soutient la Palestine et que les Palestiniens sont du bon côté.
C'est ce qui se passe. Il y a un effondrement complet de l'esprit critique chez nos jeunes. Selon moi, la responsabilité incombe aux gens qui organisent les systèmes d'éducation. Comment a‑t‑on créé cette situation où les jeunes n'ont pas besoin de connaître l'histoire? Les fondements de l'histoire, les éléments fondamentaux, me troublent considérablement…
:
Le problème, dans ce cas‑ci, c'est que lorsque les gens tiennent un double discours, ils ne donnent pas de réponse. En réalité, c'est la raison pour laquelle j'ai dû m'adresser au tribunal pour qu'un arbitre neutre prenne une décision en vue d'aider ces gens. Chaque fois que je regarde ces pauvres étudiants, je me demande comment le Canada en est arrivé là. Comment se fait‑il que lorsque j'ouvre ma porte le matin et que je regarde dehors, je ne reconnais pas ma ville? Je ne sais pas où je vis.
[Français]
je ne reconnais pas ma ville.
[Traduction]
Mais je vais vous dire une chose. Oublions la politique pour le moment. Parlons de ce que fait la police. Comment se fait‑il qu'il n'y ait aucune politique en place pour que la police puisse faire appliquer les lois en vigueur?
Comment se fait‑il qu'en 2024, des étudiants doivent comparaître devant un comité pour que vous puissiez entendre parler de cette situation?
Je vous laisse sur la réflexion suivante. Les mots sont lourds de sens. Lorsque les gens disent des choses qui ne sont pas correctes, cela a des répercussions sur nous tous. Je tiens à souligner à votre honorable comité que les mots prononcés le 4 mars signifiaient plusieurs choses, mais surtout que les bombes, les menaces, la violence et l'agression ne sont pas représentatives du Canada.
[Français]
Ce n'est pas le Québec. Ce n'est pas le Canada.
[Traduction]
Je m'élève contre la haine, mais une chose est certaine, madame Lantsman. Si ces jeunes partent, il n'y aura plus de comité à l'avenir. C'est votre avenir. C'est votre relève.
S'il vous plaît, quoi que vous fassiez, veuillez mettre fin à cette situation. McGill est un exemple de ce qui se passe quand on n'agit pas. Vous ne pouvez pas vous asseoir sur la clôture, rester neutre et manger du chocolat en espérant que les choses s'arrangent d'elles-mêmes. Ce n'est pas de la partisanerie, c'est la réalité.
:
Je tiens à ajouter que je m'exprime ici au nom du Syndicat canadien des étudiants juifs. Le Syndicat est un organisme non partisan qui représente de nombreux étudiants membres de différents partis politiques.
Au bout du compte, lorsque nous voyons sur une affiche un appel à l'intifada et lorsque nous sommes exclus de nos cours et que nous faisons face à la violence, tous les étudiants juifs se trouvent touchés, qu'ils soient néo-démocrates, libéraux, bloquistes, verts ou conservateurs. Nous sommes tous touchés de la même façon. Dans le cadre de mon rôle, je veux sensibiliser les gens au fait que nous faisons tous face à cette situation. J'ai mes propres opinions, et d'autres personnes ont leurs propres opinions, mais je parle ici au nom des étudiants juifs.
Oui, nous estimons que nous pourrions obtenir plus de soutien de la part du gouvernement. C'est vrai. Certains d'entre nous sont de cet avis, mais nous travaillons ensemble pour lutter contre cette haine parce que tout le monde dans cette salle se préoccupe de l'antisémitisme sur les campus. Je représente le Syndicat canadien des étudiants juifs et je suis ici pour travailler avec vous tous, peu importe vos allégeances politiques.
Merci.
:
Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
Je suis choqué d'entendre parler d'antisémitisme. J'ai été élevé par des parents immigrants néerlandais qui ont quitté les Pays-Bas après la Seconde Guerre mondiale. J'ai grandi en entendant des histoires de Néerlandais qui protégeaient des Juifs et les cachaient, parfois pendant des années, et des récits sur la résistance néerlandaise contre les occupants nazis. Mon grand-père est mort dans un camp de concentration nazi parce qu'il avait contribué à défendre le peuple juif. C'est le genre d'histoires que j'ai entendues en grandissant.
Je pensais que l'antisémitisme était mort, mais de toute évidence, je suis naïf à cet égard. J'ai été très choqué, comme le reste du monde, par ce qui s'est passé en Israël le 7 octobre.
Maintenant, je dois vous dire que je suis également très choqué par ce qui se passe sur les campus au Canada, ce pays que je croyais être un pays libre et démocratique, un pays où on respecte la primauté du droit, où les lois devraient être appliquées. Je suis choqué d'entendre ces histoires.
Je vous remercie de faire preuve de bravoure et de courage et de défendre tout ce qui est juste et convenable.
J'ai une question à poser. Je pense que je vais l'adresser à Mme Nashen.
J'ai trouvé très intéressant que vous assimiliez le fait d'être juif au fait d'être sioniste, et l'antisémitisme à l'antisionisme. Vous les mettez sur le même pied. Voici ma question. Dans un environnement où la liberté d'expression existe, des personnes sensées peuvent-elles critiquer l'État d'Israël moderne d'aujourd'hui et la façon dont il se comporte au Moyen-Orient, en particulier dans le conflit qui fait rage à Gaza en ce moment?
:
Je pense que c'est une excellente question. Je vous remercie de l'avoir posée.
Pour rendre quelque chose légitime, il n'est pas nécessaire de l'opposer à autre chose. Je vais vous donner un exemple.
La lune et le soleil existent tous les deux, mais pas en même temps. Lorsque l'un apparaît, l'autre disparaît. Cependant, je peux vous dire que lorsqu'on essaie de dire que l'antisémitisme doit être le pendant de quelque chose, on le délégitime. On se trouve à dire qu'il ne peut pas exister isolément; il doit y avoir autre chose pour qu'il soit légitime.
Je ne suis pas d'accord. C'est faux. C'est le discours que l'on tient. C'est exactement ce que Mme Nashen a dit.
Il y a toujours une façon de terminer une explication. C'est de l'antisémitisme, mais ce n'en est pas. C'est de l'anti-islamophobie, mais c'est...
La réalité est la suivante, monsieur. L'antisémitisme peut exister isolément. Il existe tout seul. Il existe depuis 5 784 ans. Nombreux sont les gens qui ont essayé d'anéantir la population juive. Ils ont réduit les Juifs à l'esclavage et les ont assassinés, mais il y a une chose qui ne se produira pas, et c'est le message que je veux transmettre à chacun d'entre vous. Ces gens représentent notre avenir. Nous n'accepterons pas cela. Nous ne tolérerons pas cela. Vous voulez créer de nouvelles lois, mais vous devriez commencer par appliquer les lois existantes, et peut-être que nous arriverons à quelque chose.
Je suis sans doute dans une situation différente des autres personnes assises à cette table, car je ne suis pas seulement une femme juive, je suis aussi la mère juive de deux étudiants juifs qui se trouvent actuellement sur des campus universitaires en Amérique du Nord.
Je remercie vraiment tous les étudiants d'être venus ici et de prendre la parole. J'ai vécu cette réalité indirectement, par l'entremise de mes enfants, et il est très important que vous soyez ici.
Je tiens à remercier M. Housefather d'avoir lancé cette étude, car je pense qu'il est vraiment important que nous prenions ce moment... Je tenais simplement à mentionner cela.
Si j'ai l'air émotive, c'est parce que je le suis. C'est personnel, tout comme pour vous.
Hier, j'ai entendu parler — et je pense que certains d'entre vous l'ont mentionné durant leur exposé — d'événements juifs qui n'ont pas pu se dérouler de la façon prévue ou qui ont été perturbés.
Je peux peut-être commencer par Mme Pressmann. J'allais utiliser l'exemple de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste.
À l'Université Queen's, avez-vous pu commémorer cette journée de la même façon que vous l'avez fait par le passé?
Le gouvernement fédéral a la responsabilité de gérer le Code criminel de façon à établir la loi et veiller à son application. C'est une infraction au Code criminel de préconiser ou de fomenter le génocide; d'inciter publiquement à la haine d'une manière « susceptible d'entraîner une violation de la paix »; de fomenter « volontairement la haine contre un groupe identifiable »; de « fomenter volontairement l'antisémitisme »; ou de commettre un méfait à l'égard de certains biens en étant « motivé par des préjugés ou de la haine ».
Pourtant, toutes ces infractions sont commises partout au pays. Vous nous avez parlé de ce qui se passe sur les campus. Nous pourrions ajouter à cela l'entrave d'infrastructures essentielles sur Avenue Road, qui est également illégale, et aussi l'obstruction de la route devant l'hôpital Mount Sinai, qui était aussi illégal.
Dans tous ces cas, nous ne voyons pas les universités appliquer leur code de conduite, nous ne voyons pas les policiers arrêter des gens pour avoir commis des crimes et, de plus, le gouvernement fédéral n'a pas pris de mesures pour assurer le respect de la primauté du droit.
Êtes-vous d'accord avec mon évaluation?
Je vais commencer par Mme Cook.
:
C'est le Parlement du Canada qui établit le Code criminel. L'application de la loi est provinciale, et non fédérale.
Aujourd'hui, on a beaucoup blâmé le gouvernement fédéral, alors que les établissements postsecondaires relèvent de la compétence des provinces et que les administrateurs des collèges sont en grande partie responsables de ce qui se passe. Malgré cela, un parti semble prétendre que le gouvernement fédéral est responsable de tout.
Encore une fois, je veux revenir à vos expériences sur le campus. L'une des choses que j'ai entendues à maintes reprises de la part de nombreuses sources, c'est que ces manifestations ne sont pas du tout antisémites. Il s'agit d'un tout petit groupe de personnes qui y participent et qui sont antisémites. Je pense que vous avez tous dit que vous n'étiez pas d'accord avec cela.
Nous aurons l'occasion de convoquer des présidents d'université devant le Comité, si nous le souhaitons, et je pense que nous devrions le faire. Quels présidents d'université devrions-nous inviter?
Madame Pressmann, vous avez une organisation nationale. Pourriez-vous nous donner des exemples de personnes que nous devrions convoquer?
:
Merci, madame la présidente.
Je vais essayer de faire le tour de la question en trois minutes.
J'ai compris que, selon Mme Cook, les universités devraient s'assurer de maintenir un climat qui ne permet pas ce genre de dérapage. Je suis d'accord. Quant à Me Oberman, il dit que les policiers devraient intervenir et que les autorités devraient faire respecter la loi. Je suis également d'accord avec lui. M. Eshayek, pour sa part, nous dit que le combat qu'on mène aujourd'hui pour la communauté juive n'est pas seulement pour la communauté juive, mais pour toutes les minorités. Là aussi, je suis d'accord.
La violence qu'on voit partout, particulièrement sur les campus, est un problème social. Comme je le disais au début de mon intervention, à mon avis, les campus universitaires sont des endroits merveilleux. Ils devraient être les endroits les plus accueillants au monde où on a droit à tous les débats, avec vigueur et avec autorité, mais toujours dans le respect.
Je souscris donc totalement à ce que vous dites. Ce que nous voyons inacceptable.
Madame Cook, vous dites qu'il faut maintenir un climat qui ne permet pas ce genre de dérapage. À votre avis, dans les universités, présentement, y a-t-il d'autres communautés que la communauté juive qui sont victimes de ce genre d'oppression, ou est-ce seulement la communauté juive, à votre connaissance?
:
Merci beaucoup de vos témoignages. Je vous remercie de votre courage et de votre présence aujourd'hui.
Sachez que le Comité — la présidente et les membres — est ici parce que nous le voulons. C'est une étude que nous voulons tous écouter, et nous sommes ici pour faire ce que nous pouvons en tant que parlementaires, dans le temps dont nous disposons. Merci beaucoup d'être venus.
J'ai deux choses à dire aux membres du Comité. Le greffier vous enverra des courriels lorsque vous retournerez à vos bureaux. Jetez‑y un coup d'œil. Le premier provient du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire. Le greffier demande aux membres du Comité de répondre par oui ou par non d'ici vendredi, s'il vous plaît.
Le deuxième courriel qu'il enverra provient du Comité de liaison. Nous avons un peu plus de temps, alors je vous prie de lire le courriel.
Merci beaucoup, et bonne journée à tous.