La séance est ouverte.
Soyez les bienvenus à la 99e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
Conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 15 février, le Comité se réunit en séance publique pour étudier l'objet du Budget supplémentaire des dépenses 2023‑2024, sous la rubrique Ministère de la Justice.
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride. Des députés sont présents dans la salle, et d'autres participent à distance au moyen de l'application Zoom.
Aujourd'hui, tous les témoins participent à la réunion en personne. Les députés qui y assistent par vidéoconférence ont effectué un test de son et connaissent notre façon de procéder, y compris pour l'interprétation, alors je ne me lancerai pas dans de longues explications ce matin.
Je tiens à informer les députés que nous allons étudier la question du budget supplémentaire des dépenses durant la première heure. Il n'y aura pas de votes sur les éléments.
Je souhaite la bienvenue à l'honorable Arif Virani, ministre de la Justice et solliciteur général du Canada.
En fait, on ne dit pas solliciteur général; on le disait dans les années 1980. Je le sais parce qu'au cours de mes études secondaires, j'ai participé à la première simulation du Parlement. J'ai été nommée ou élue — j'ignore s'il s'agissait d'une nomination ou d'une élection — solliciteure générale. Par la suite, ce titre a été supprimé.
Soyez le bienvenu, monsieur le procureur général.
:
Je pense qu'il n'était même pas né.
M. Virani est accompagné de fonctionnaires venus nous aider aujourd'hui.
Merci d'être avec nous.
[Français]
Nous recevons Shalene Curtis‑Micallef, sous-ministre et sous-procureure générale du Canada; Michael Sousa, sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques; Bill Kroll, dirigeant principal des finances et sous-ministre adjoint, Secteur de la gestion; et Elizabeth Hendy, directrice générale, Direction générale des programmes, Secteur des politiques.
Bienvenue à vous.
[Traduction]
Je vous remercie tous de votre présence aujourd'hui.
Nous allons faire la série de questions habituelle, et je vais donner la parole aux témoins.
Avant que nous commencions, je voudrais dire au ministre et à son ministère que nous avons reçu une lettre de la Commission d'aide juridique de la Nouvelle‑Écosse nous remerciant de notre soutien à un projet d'aide aux détenus racisés qui sont incarcérés dans les établissements correctionnels fédéraux et provinciaux de la Nouvelle‑Écosse. Je voulais le souligner.
Monsieur le ministre, si vous êtes prêt à faire une déclaration, vous avez la parole.
:
Merci à vous, madame la présidente, et aux membres du Comité.
Je vous remercie de m'avoir invité à me joindre à vous aujourd'hui.
J'aimerais commencer par reconnaître que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel non cédé de la nation anishinabe algonquine.
Comme vous l'avez sûrement vu, il y a quelques semaines, j'ai présenté le projet de loi , qui édicte la Loi sur les préjudices en ligne. Je veux à la fois expliquer l'importance vitale de cette loi proposée et dissiper les malentendus sur ce qu'elle fait et ne fait pas.
Le principe de cette mesure législative est simple: nous nous attendons tous à être en sécurité chez nous, dans nos quartiers et dans nos communautés, et nous devrions pouvoir nous attendre au même type de sécurité dans nos communautés en ligne. Nous devons nous attaquer aux préjudices en ligne qui chaque jour nous menacent, et qui posent une menace en particulier pour nos enfants.
Permettez-moi de commencer en parlant de nos enfants.
[Traduction]
À l'heure actuelle, il n'existe aucune norme de sécurité obligatoire pour les plateformes en ligne que les enfants utilisent tous les jours. Par contre, les Lego de mes enfants, dans notre sous-sol, ont été soumis à des normes de sécurité et à des tests rigoureux avant que mes deux garçons ne mettent la main dessus. Je sais que, ces temps‑ci, mes enfants passent beaucoup plus de temps en ligne qu'à jouer avec des Lego. Les jouets les plus dangereux chez moi, actuellement, et chez tous les Canadiens sont les écrans devant lesquels se trouvent nos enfants. Les médias sociaux sont partout. Ils présentent des dangers incontrôlés et un contenu horrible. Pour tout dire, cela me terrifie. Nous devons améliorer la sécurité sur Internet pour les jeunes du pays.
En tant que parents, l'une des premières choses que nous enseignons à nos enfants, c'est comment traverser la rue. Nous leur disons d'attendre le feu vert et de regarder des deux côtés. Nous faisons confiance à nos enfants, mais nous avons aussi confiance dans le code de la route et dans le respect de ce code par les conducteurs. Nous croyons que les voitures s'arrêteront au feu rouge et que les conducteurs respecteront la limite de vitesse. La sécurité dépend de ce réseau élémentaire de confiance. Voilà précisément ce qu'il nous manque désespérément dans le monde numérique. La établirait des règles de conduite pour les plateformes, afin que nous puissions apprendre à nos enfants à se protéger en ligne, tout en sachant que les plateformes fournissent aussi leur part d'efforts.
[Français]
Parlons maintenant des crimes haineux.
Le nombre total de crimes haineux signalés à la police au Canada a atteint le niveau le plus élevé jamais enregistré, soit presque le double du taux enregistré en 2019.
[Traduction]
Les policiers du pays qualifient l'augmentation de « stupéfiante ». Le chef de la police de Toronto, Myron Demkiw, a déclaré cette semaine que les appels concernant les crimes haineux dans sa ville avaient augmenté de 93 % depuis octobre dernier. Les communautés et les forces de l'ordre demandent aux gouvernements d'agir.
Le projet de loi crée une nouvelle infraction distincte pour les crimes haineux afin que ces crimes fassent l'objet de poursuites et qu'ils soient correctement définis. Dans notre système juridique actuel, la motivation haineuse d'un crime n'est considérée qu'après coup, à l'étape de la détermination de la peine. Cela ne fait pas partie de l'infraction elle-même. Le seuil auquel la haine est considérée comme criminelle est élevé. Les commentaires qui offensent, humilient ou insultent n'atteignent pas ce seuil. Comme nous le disons, ils sont horribles, mais légaux. La définition de la haine que nous intégrons dans le Code criminel vient tout droit des arrêts Keegstra et Whatcott de la Cour suprême du Canada. Nous n'avons pas inventé la définition de la haine que nous proposons.
Il est décevant, mais pas étonnant, d'entendre les affirmations extrêmement inexactes faites par certains commentateurs sur la façon dont fonctionnerait la détermination de la peine pour cette nouvelle disposition sur les crimes haineux. J'ai entendu certains dire qu'aux termes de cette disposition, une personne qui commet une infraction à la Loi sur les parcs nationaux serait maintenant passible d'une peine d'emprisonnement à perpétuité. C'est tout simplement faux.
Au Canada, les juges imposent des peines en fonction des fourchettes de peines établies par des décisions judiciaires antérieures. Les juges sont tenus par la loi — et tous les membres du Comité qui sont avocats le savent — d'imposer des peines proportionnées à l'infraction commise. Autrement dit, la peine doit toujours être proportionnelle au crime. Si les juges imposent des peines inappropriées, il y a des cours d'appel qui peuvent les annuler.
Vous vous demandez peut-être, alors, pourquoi ne pas le préciser? Pourquoi inclure une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité dans la nouvelle disposition relative à l'infraction de crime haineux?
Permettez-moi de vous expliquer.
D'abord, il importe de se rappeler qu'une peine maximale n'est pas une peine moyenne; c'est le plafond absolu.
Ensuite, la nouvelle infraction de crime haineux vise toute infraction existante si elle était motivée par la haine. Cela peut passer par toute la gamme des infractions, d'un vol motivé par la haine jusqu'à une tentative de meurtre motivée par la haine. La fourchette des peines dans le projet de loi a été conçue de manière à refléter les options existantes en matière de détermination de la peine pour toutes ces infractions sous-jacentes, des plus mineures aux plus graves, comme la tentative de meurtre, qui peuvent actuellement entraîner des peines d'emprisonnement à perpétuité.
[Français]
Cela ne signifie pas que les infractions mineures seront soudainement punissables de peines extrêmement sévères. Cela violerait tous les principes juridiques que sont tenus de suivre les juges qui prononcent les peines. Un meurtre motivé par la haine entraînera une peine d'emprisonnement à perpétuité, ce qui ne sera certainement pas le cas pour une infraction mineure.
Une autre critique que j'ai entendue est que ce projet de loi pourrait étouffer la liberté d'expression. Ce n'est tout simplement pas vrai. Au contraire, il la renforce. Il y a des gens au Canada qui ne peuvent pas s'exprimer parce qu'ils craignent légitimement pour leur sécurité. Quand ils prennent la parole, ils sont maltraités et font l'objet de menaces réellement méprisables, d'intimidation et de harcèlement.
[Traduction]
Nous avons soigneusement équilibré les choses. Nous avons consulté. Nous avons regardé ce qui se fait à l'étranger.
Nous ne supprimons pas automatiquement les contenus dans les 24 heures, sauf s'il s'agit d'agressions sexuelles commises sur des enfants ou de pornographie de vengeance. Nous ne touchons pas aux communications privées. Nous ne touchons pas aux sites Web qui n'hébergent pas de contenu généré par les utilisateurs.
[Français]
Ce projet de loi protège les enfants et donne à chacun les outils dont il a besoin pour se protéger en ligne. Nous ne tolérons pas les discours haineux sur la place publique, et nous ne devons pas non plus les tolérer en ligne.
Nous avons vu les conséquences de la haine en ligne non contrôlée et de l'exploitation sexuelle juvénile. Les familles des six personnes tuées à la mosquée de Québec par un individu radicalisé en ligne pourraient vous en parler.
[Traduction]
Demandez au jeune garçon devenu orphelin à la suite de l'horrible attaque perpétrée contre quatre membres de la famille Afzaal à London, en Ontario. Demandez aux parents des jeunes de tout le pays qui se sont suicidés après avoir été victimes de sextorsion de la part de prédateurs en ligne.
Enfin, permettez-moi de remettre les pendules à l'heure en ce qui concerne la disposition relative à l'engagement de ne pas troubler l'ordre public dans le projet de loi . L'engagement de ne pas troubler l'ordre public n'est pas la détention à domicile. Ce n'est pas une sanction. C'est un outil bien établi utilisé pour imposer des conditions adaptées à une personne lorsqu'il existe des preuves crédibles qu'elle peut faire du mal à quelqu'un ou commettre un crime. L'engagement de ne pas troubler l'ordre public qui est proposé ici fonctionnerait de façon très semblable à celui qui existe déjà.
À titre d'exemple, si quelqu'un publie en ligne son intention de dégrader ou d'attaquer une synagogue pour intimider la communauté juive, les membres de la synagogue pourraient transmettre cette information à la police et au tribunal, et demander l'imposition d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public après avoir obtenu le consentement du procureur général de la province. Des décennies de jurisprudence nous enseignent que les conditions doivent être raisonnables et liées à une menace précise. Ainsi, les conditions imposées à la personne pourraient inclure l'interdiction de s'approcher à moins de 100 mètres de la synagogue pour une période de 12 mois. Si la personne ne respecte pas cette simple condition, elle pourrait être arrêtée. Si elle respecte la condition, elle ne subirait aucune conséquence.
Je vous pose la question suivante: pourquoi les membres de cette synagogue, lorsqu'ils font face à une vraisemblable menace d'être la cible d'un crime motivé par la haine, devraient-ils attendre d'être attaqués ou de voir un graffiti représentant une croix gammée sur la porte d'entrée de la synagogue avant que nous les aidions? Si nous pouvons empêcher certaines attaques de se produire, n'est‑ce pas beaucoup mieux? Les engagements de ne pas troubler l'ordre public ne sont pas une solution parfaite, mais nous croyons qu'ils peuvent être un outil précieux pour assurer la sécurité des gens. Face à l'augmentation des crimes haineux, notre gouvernement croit qu'il serait irresponsable de ne rien faire dans un cas comme celui‑ci.
Je pense que c'est ce qui explique l'appui du Centre consultatif des relations juives et israéliennes et de l'envoyé spécial pour l'antisémitisme au projet de loi .
[Français]
Comme toujours, je suis ouvert aux suggestions faites de bonne foi pour améliorer ce projet de loi. Mon objectif est de faire les choses correctement. J'ai hâte de débattre du projet de loi sur les préjudices en ligne à la Chambre des communes et de suivre le processus du Comité lorsqu'il atteindra cette étape. Je suis convaincu que nous avons tous le même objectif ici: nous devons créer un monde en ligne sûr, en particulier pour les membres les plus vulnérables de notre société, c'est-à-dire nos enfants.
[Traduction]
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie monsieur le procureur général et tous les autres témoins d'être avec nous aujourd'hui.
Monsieur le procureur général, vous êtes le premier avocat du pays. Il est bon de vous avoir avec nous au comité de la justice.
Le Canada est un pays respectueux de la primauté du droit. Il ne fonctionne bien que si ses citoyens ont confiance en l'administration de la justice. C'est votre travail. Cela s'applique autant au système de justice pénale qu'au système de justice civile.
C'est pourquoi il est si choquant qu'une organisation crédible comme la section de la Colombie‑Britannique de l'Association du Barreau canadien, dans une lettre adressée il y a quatre ans à M. Lametti, votre prédécesseur, a déclaré ce qui suit:
La Cour suprême de la Colombie‑Britannique compte actuellement sept juges de moins que l'effectif requis. En conséquence, il est fréquent que les parties arrivent au tribunal pour des procès et des audiences [et qu'elles] sont renvoyées à cause du manque de juges pour entendre les causes. [Les] parties ont [...] consacré beaucoup de temps et d'argent à la préparation de leur comparution devant le tribunal, et les témoins subissent également des désagréments.
On évoque ensuite les coûts financiers et émotionnels.
On cite l'exemple d'un avocat. Vous comprendrez, bien sûr, puisque vous êtes vous-même avocat. Il disait: « Je me souviens d'avoir été confronté à ce problème [de retard] cinq fois au cours des 18 derniers mois. [...] Cela s'est produit deux fois à Cranbrook [Cour suprême], et le client n'a pas pu faire respecter une clause restrictive » avant qu'elle n'expire. Il est déjà difficile de faire respecter une clause restrictive, mais cette personne n'a même pas eu l'occasion d'essayer, et elle a donc le sentiment d'un déni de justice.
La question que je veux vous poser, monsieur le procureur général, est la suivante: pourquoi la justice est-elle refusée à des personnes de ma province, la Colombie‑Britannique?
:
Je tiens à dire que je suis parfaitement conscient de la nécessité de pourvoir les postes vacants au sein de la magistrature. Je précise qu'en sept mois dans ces fonctions, j'ai nommé 74 juges jusqu'à présent, et que d'autres nominations sont à venir dans les prochains jours.
Je pense qu'il est important, à des fins de comparaison, de se pencher sur le bilan du gouvernement précédent, que nous avons remplacé en 2015. Le nombre moyen de nominations annuelles par ce gouvernement était de 65. Selon cette mesure, je travaille deux fois plus vite que le gouvernement précédent.
Il est important de comprendre comment les retards se produisent dans le système de justice pénale et le système de justice civile, mais aussi qui est responsable de ces retards. L'administration de la justice dans ce pays est, pour l'essentiel, du ressort des provinces, et les retards sont également dus au manque de tribunaux et au manque de personnel dans les tribunaux des provinces de ce pays.
Vous avez parlé de « confiance dans l'administration de la justice ». Je partage votre préoccupation. C'est inscrit dans notre Charte et c'est un élément fondamental de mon travail. Ce que j'ai jugé bon de faire, c'est de veiller à ce que nos comités sur les nominations à la magistrature aient le quorum et qu'ils soient en mesure de faire le travail qu'ils sont tenus de faire relativement à la nomination des juges, de sorte qu'ils me présentent des recommandations.
Par ailleurs, ce que j'ai vu dans les gouvernements provinciaux, dans le cadre de leurs processus de nomination des juges, c'est le noyautage des comités de nomination des juges par des membres du personnel du parti au pouvoir. Cela concerne ma province, pas la vôtre, mais je pense qu'on sape ainsi la confiance des gens dans l'administration de la justice, parce qu'on injecte de la partisanerie dans le processus de nomination. Ce n'est pas ce dont nous avons besoin. Nous avons mis en place un processus non partisan qui est solide et qui nous permet de nommer des juges de la plus haute compétence pour représenter la diversité du pays. Je continuerai à nommer de telles personnes.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Bonjour, monsieur le ministre.
Je vous remercie, vous et vos collaborateurs, de vos observations préliminaires concernant cette importante mesure législative. Je pense que nous sommes tous d'accord pour souhaiter un débat approfondi sur cette question, étant donné les préjudices sociaux qui sont en jeu, en particulier en ce qui concerne les Canadiens vulnérables, les jeunes Canadiens, les femmes et d'autres personnes.
Je veux vraiment me concentrer sur la partie du projet de loi qui traite d'une commission de la sécurité numérique parce que, d'après ma première lecture de ce projet de loi, les pouvoirs qui seraient conférés à cette nouvelle commission sont étendus. Encore une fois, selon mon premier examen de ce projet de loi, il rendrait certains contenus inaccessibles. Il créerait de nouveaux pouvoirs d'enquête. Il créerait une tribune dans laquelle il pourrait y avoir des audiences auxquelles le public n'aurait pas accès en raison de certaines sensibilités qui pourraient être en jeu, ainsi que de considérations liées à la vie privée. La commission aurait le pouvoir d'élaborer des règlements et des codes de conduite et d'imposer des sanctions assez lourdes.
Compte tenu de cela, seriez-vous d'accord, monsieur le ministre, pour dire que le président de cette commission disposera d'importants pouvoirs dans ces domaines?
:
Merci, madame la présidente.
Monsieur le ministre, merci d'être parmi nous ce matin.
J'ai plusieurs questions qui me viennent en tête, mais je vais devoir leur accorder un ordre de priorité. J'aurais aimé avoir plus de temps, mais je comprends qu'il faut procéder comme ça.
J'aurais d'abord des questions au sujet du système d'aide juridique pour les immigrants et les réfugiés. Vous comprendrez que cette question préoccupe beaucoup le Bloc québécois. Au Québec, les sommes dues par le fédéral posent problème. En effet, celles-ci n'arrivent pas à Québec, qui continue de dépenser pour les nouveaux arrivants.
Il y a aussi la question des langues officielles, auxquelles des fonds de 1,2 million de dollars sont destinés. J'aurais bien aimé savoir comment vous répartissez ces sommes entre les provinces.
De plus, il y a évidemment toute la question du racisme systémique. Vous souhaitez aider les juges à imposer des peines qui en tiennent compte. Comment cela va-t-il s'articuler? Comment va-t-on définir le racisme systémique?
Par ailleurs, il y a la question de la cybersécurité, dans les palais de justice, etc.
Il y a plein de questions importantes, voire essentielles, que je ne pourrai pas nécessairement aborder ce matin, malheureusement. Je vais cependant essayer.
Il y a aussi votre projet de loi , dont vous nous avez parlé dans votre présentation d'ouverture. Je ne suis pas certain de son lien avec le budget supplémentaire des dépenses (C), mais ça demeure une question essentielle. En ce qui concerne ce projet de loi, je me demande pourquoi vous n'avez pas introduit le processus de vérification de l'âge, comme le proposait la sénatrice Julie Miville‑Dechêne. Sa proposition m'apparaissait quand même relativement sage, mais on n'en parle pas du tout dans le projet de loi C‑63.
C'est la même situation pour le Bloc québécois. Nous avons proposé d'abolir les deux exceptions religieuses prévues dans le Code criminel, ce qui me semble essentiel dans le contexte actuel. Comment se fait-il que l'on puisse encore invoquer une défense selon laquelle on a commis un crime haineux ou on a propagé la haine en se basant sur un texte religieux? Ça me semble complètement aberrant et contraire aux valeurs partagées par l'ensemble des Québécoises et des Québécois et, j'en suis convaincu, par le reste du Canada également.
Ce sont toutes des questions essentielles, mais je vais m'attarder sur deux éléments importants.
D'abord, notre comité a récemment adopté un projet de loi sur la création d'une commission d'examen des erreurs du système judiciaire. C'est évidemment quelque chose d'essentiel, et je vous en félicite. Je pense qu'on était mûr pour ce bon grand ménage. Cette commission comprendra neuf commissaires. J'ai demandé, par la voie d'un amendement, que ces neuf commissaires soient bilingues. D'ailleurs, je suis un peu étonné que ça n'ait pas été prévu dès le départ. Ça me semble quand même un objectif très modeste. Neuf commissaires bilingues dans l'ensemble du Canada, il me semble que ça ne devrait pas être un objectif trop difficile à atteindre. Or, je me suis heurté à une objection de la part de certains de mes collègues, dont un de vos collègues libéraux.
J'aimerais connaître votre avis là-dessus. Si on souhaite que le système de justice soit bilingue, ne doit-on pas nécessairement faire un effort en demandant le bilinguisme chez ces neuf commissaires? Il n'y en a pas 900, mais bien neuf.
:
Non, je ne le ferai pas.
Je tiens à remercier le ministre de son exposé très clair sur le projet de loi .
Je souhaite ajouter deux éléments à la discussion. Le premier, c'est que les personnes les plus susceptibles d'être la cible de campagnes incitant à des crimes haineux ne sont pas celles qui se font le plus entendre au sujet de ce projet de loi. Je suis impatient d'entendre divers témoins qui pourront parler des répercussions concrètes de la haine en ligne quand le Comité étudiera le projet de loi. Comme on a pu le voir à maintes reprises, les campagnes de ce genre sont souvent bien organisées.
J'ai manifesté à l'extérieur de la Chambre pour défendre les droits des enfants trans. Dans la journée qui a suivi, j'ai reçu 700 courriels contenant la même expression haineuse et diffamatoire pour me décrire. Je suis une personne privilégiée. J'ai des employés. J'ai toutes les ressources et tout le soutien dont j'ai besoin. Par contraste, les crimes haineux en ligne qui ciblent les enfants trans et leur famille ont des conséquences bien réelles.
J'ai hâte que nous puissions entendre une diversité de voix et, en particulier, celles des personnes les plus touchées. Je sais que ce que j'ai dit jusqu'à maintenant ne ressemble pas encore à une question.
Par ailleurs, le Comité accomplit aussi un travail important dans d'autres dossiers. Je pense par exemple au projet de loi , qui vient d'être renvoyé à la Chambre après l'étude du Comité. Il s'agit du projet de loi sur les comportements contrôlants et coercitifs. Le Comité se penche sur ce sujet depuis plus de trois ans. Comme nous l'avons dit clairement, l'adoption de ce projet de loi est l'un des outils pour contrer l'épidémie de violence entre partenaires intimes, mais ce n'est pas le seul outil.
Cela m'amène à poser deux questions, je crois.
Quelles sont les autres mesures que le ministère de la Justice envisage pour fournir le soutien nécessaire et connexe aux survivants de la violence entre partenaires intimes?
Comment prévoit‑il procéder pour que le travail de sensibilisation nécessaire soit fait?
D'après le projet de loi, son entrée en vigueur se fera à la date choisie par le Cabinet. Je suppose qu'il y aura un plan pour s'y préparer. J'aimerais savoir ce qu'il adviendra à cet égard. Comme ce dossier jouit d'un appui unanime, je ne crois pas qu'il soit prématuré de poser des questions à ce sujet.
:
Merci, monsieur Garrison, du leadership dont vous faites preuve à propos du premier sujet que vous avez abordé, et du courage que vous continuez de démontrer en tant que parlementaire. Merci aussi à et à vous pour votre leadership dans le dossier du contrôle coercitif.
En ce qui concerne le soutien des victimes, nous réfléchissons constamment et activement à la façon de l'améliorer, y compris dans le contexte de la violence entre partenaires intimes. Vous pouvez le voir, entre autres, dans les dispositions des projets de loi et qui portent sur l'inversion du fardeau de la preuve relativement à la mise en liberté dans les cas de violence contre un partenaire intime. Des questions relatives au soutien et au financement sont toujours sur la table.
J'ajoute que lorsque vous parlez de retirer du contenu dans les 24 heures, par exemple en cas de porno-vengeance, vous abordez un aspect du contrôle coercitif qui se trouve déjà dans le projet de loi .
Vous avez aussi mentionné, en introduction, qu'il faut écouter différentes voix. Je crois que deux des voix les plus marquantes que j'ai entendues sont celles des personnes qui étaient avec moi à la conférence de presse. Il s'agit de Jane, mère d'un enfant qui a été agressé sexuellement et qui a été exploité à maintes reprises en ligne, et de Carla Beauvais, une femme qui a été intimidée et qui a renoncé à être active dans l'espace public.
Je vous suggère également de vous inspirer des groupes qui étaient aussi à mes côtés, soit le Conseil national des musulmans canadiens et le Centre consultatif des relations juives et israéliennes. Ces deux groupes ne s'entendent pas sur plusieurs questions depuis six mois, mais ils sont sur la même longueur d'onde à propos de ce projet de loi. Ils le soutiennent tous les deux, tout comme les représentantes spéciales chargées de la lutte contre l'antisémitisme et l'islamophobie. Ce sont des voix importantes qu'il faut écouter, ce que je continuerai de faire.
:
Merci, madame la présidente.
Monsieur le ministre, nous sommes ici aujourd'hui pour parler du budget des dépenses. Vous avez consacré l'intégralité de vos remarques liminaires à la défense du projet de loi . Je me souviens du passage de votre prédécesseur, le ministre Lametti, devant notre comité. Je lui ai posé une question au sujet de l'aide médicale à mourir. Si je me souviens bien, 25 experts constitutionnels disaient que l'opinion du ministre à ce sujet était erronée. J'ai demandé au ministre qui, de lui ou de ces 25 experts, avait raison. Il m'a répondu que c'était lui.
Ce genre d'orgueil démesuré explique probablement pourquoi il n'est plus là et pourquoi vous occupez son ancien poste. Cela dit, nous commençons à constater que vous avez une attitude semblable à l'égard du projet de loi , que presque tout le monde dénonce comme une mesure qui cherche à piétiner la liberté d'expression. Margaret Atwood a qualifié le projet de loi C‑63 d'« orwellien ». David Thomas, ancien président du Tribunal canadien des droits de la personne a dit ceci:
Le projet de loi C‑63 proposé par le gouvernement libéral, la Loi sur les préjudices en ligne, est une loi épouvantable qui restreindra indûment le droit sacré des Canadiens à la liberté d'expression garanti par la Charte. Telle est l'intention des libéraux. En rédigeant une mesure législative vague qui crée un régime draconien pour lutter contre les « préjudices » en ligne, ils gagneront leurs guerres sans avoir à tirer une seule balle.
Un groupe diversifié de personnes estiment que le projet de loi constitue une atteinte scandaleuse aux droits des Canadiens. Nous constatons également que le gouvernement ne défend pas les personnes les plus vulnérables.
Monsieur le ministre, alors que vous aviez l'occasion de présenter un projet de loi qui aurait protégé les enfants, votre gouvernement, fidèle à lui-même, n'a pas pu s'empêcher de s'en prendre à ses adversaires politiques. Le projet de loi ne porte pas sur le discours haineux, mais sur le discours que les libéraux détestent et qu'ils souhaitent faire taire.
Si le projet de loi devait malheureusement être adopté, il serait invalidé par les tribunaux, lui aussi. Si vous étiez en mesure de faire appel, je ne doute pas que vous le feriez. Cela m'amène à ma question à propos du programme radical de votre gouvernement.
Vous avez décidé de porter en appel un certain nombre de décisions judiciaires récentes. Vous avez porté en appel une décision selon laquelle l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence était inconstitutionnelle. Vous avez porté en appel une décision selon laquelle l'interdiction des sacs en plastique et des pailles en plastique, que les Canadiens détestent tant, était inconstitutionnelle. Vous vous êtes empressé de faire appel de ces décisions. Toutefois, lorsque la Cour suprême a jugé que la peine minimale de six mois pour le crime de leurre d'enfant était inconstitutionnelle, vous avez choisi de ne pas interjeter appel.
Comment se fait‑il que vous vous empressiez de faire appel lorsque le programme radical de votre gouvernement est contesté devant les tribunaux, mais que vous ne le fassiez pas quand la vie de Canadiens vulnérables est en jeu?
:
Monsieur Moore, je m'inscris en faux contre pratiquement tout ce que vous avez dit et votre façon de présenter les choses. Je vous inviterais à examiner le bilan constitutionnel à l'échelle internationale.
Nous avons étudié les mesures prises en France, en Australie, en Allemagne et en Angleterre. En France, une disposition relative au retrait de tous les types de contenus, y compris les contenus haineux, a été jugée inconstitutionnelle. C'est précisément la raison pour laquelle nous ne procédons pas de cette façon. Le projet de loi prévoit une disposition de retrait dans les 24 heures pour la pornographie juvénile et la porno-vengeance. J'espère que, libéraux comme conservateurs, nous sommes d'accord sur l'importance de cette mesure. Il n'y a pas de disposition de retrait immédiat pour d'autres types de matériel. C'est le premier point que je tenais à rappeler.
Quant au deuxième point, vous avez parlé de l'autrice Margaret Atwood, pour qui j'ai un immense respect. Je l'ai invitée à discuter des nuances du projet de loi. Elle se préoccupe de la liberté d'expression, une préoccupation que je partage. J'ai le devoir de défendre la liberté d'expression. J'ai prêté serment sur la Constitution. Je suis le seul ministre à le faire. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons adopté une approche prudente afin de satisfaire à un besoin important, celui d'assurer la sécurité des Canadiens et de protéger la liberté d'expression.
Si vous aviez écouté Carla Beauvais pendant la conférence de presse, vous l'auriez entendue expliquer que ses propres possibilités d'expression sont restreintes parce qu'elle est grandement intimidée à l'idée de participer au discours public. Nous cherchons à encourager ce discours public.
Le projet de loi prévoit des mesures de protection que je vous invite à examiner, sur la façon dont Facebook prend ses décisions en veillant à ce qu'elles respectent la liberté d'expression, sur la façon dont le commissaire à la sécurité numérique doit s'assurer qu'il n'y a pas de discrimination...
:
Merci, madame la présidente.
Bonjour, monsieur le ministre. Je vous remercie, ainsi que toute votre équipe, d'être parmi nous ce matin.
Nous vivons dans un monde de plus en plus divisé. À propos de plusieurs sujets, même si chacun a droit à son opinion, il y a les gens qui sont en faveur et il y a ceux qui sont contre. On est vite porté à catégoriser les gens, à les placer dans l'un ou l'autre des camps et à les affubler d'un titre. Dans ce monde de plus en plus complexe, et peut-être du fait de mes fonctions antérieures, je pense que nous gagnerions à faire preuve de plus de bienveillance, de plus d'écoute les uns envers les autres et d'une plus grande ouverture.
Dans votre allocution d'ouverture, vous avez parlé du projet de loi , qui vise à protéger les enfants en ligne. On entend effectivement plusieurs choses sur ce projet de loi. J'aurais deux questions à vous poser.
Premièrement, croyez-vous que la définition de « discours haineux » qui est incluse dans le projet de loi va vraiment permettre d'atteindre l'objectif de protéger les enfants en ligne?
Deuxièmement, le projet de loi semble s'appliquer de façon préventive, avant même qu'une personne ait dit ou fait quelque chose. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Il y a une première chose que je voudrais souligner, puisque vous touchez au même sujet que M. Moore.
[Traduction]
La haine en ligne a des conséquences dans le monde réel. Il suffit, je le répète, de parler à la famille Afzaal et aux familles des six hommes qui ont été tués à la mosquée de Québec. Parlez-leur de ces conséquences réelles.
Deuxièmement, les conservateurs semblent évoluer dans un monde imaginaire où la haine n'est pas déjà réglementée au Canada. Nous avons déjà les articles 318 et 319 du Code criminel. Ces articles ont été confirmés au Canada comme imposant des limites raisonnables à la liberté d'expression parce que la haine n'est pas protégée dans notre pays.
Voici la proposition que nous avançons: si la haine n'est pas protégée dans le monde réel, pourquoi devrait-elle l'être dans le monde en ligne? C'est là que nous avons une divergence d'opinions, monsieur Moore. Je pense que vous devez chercher à comprendre par vous-mêmes pourquoi des groupes comme le Conseil national des musulmans canadiens et le Centre consultatif des relations juives et israéliennes soutiennent ce projet de loi. C'est parce qu'ils veulent qu'on mette un frein à la haine dont nous parlons.
Madame Brière, vous vous demandez si la définition de la haine contribuera à protéger les enfants: oui, elle le fera absolument. Encore une fois, il ne s'agit pas de ma définition. Il s'agit de la définition établie par la Cour suprême du Canada. Je ne l'ai pas inventée, le non plus. Elle a déjà été établie par les tribunaux. C'est la définition que nous utilisons, et elle permettra d'assurer la sécurité des enfants lorsqu'ils passeront à l'âge adulte, car nous devons assurer la sécurité de tous. Il ne s'agit pas seulement des enfants qui sont ciblés.
Je signale au bénéfice de M. Moore que l'Australie s'était d'abord concentrée seulement sur les enfants en 2015. Neuf ans ont passé, et elle va maintenant beaucoup plus loin. Il est important de comprendre que le monde entier, y compris les conservateurs britanniques, évolue dans cette direction. Je trouve simplement étonnant que les conservateurs d'ici aient peur d'en faire autant.
Enfin, madame Brière, vous m'avez interrogé sur l'idée d'agir de façon préventive pour prévenir la haine. C'est une question très importante. Dans certaines circonstances précises où des motifs raisonnables peuvent être invoqués, nous pouvons déjà avoir recours à un outil tel qu'un engagement de ne pas troubler l'ordre public pour prévenir les préjudices à l'endroit d'une femme confrontée à la violence familiale. Cela inclut des restrictions à la liberté d'expression qui sont préventives.
Qu'est‑ce que j'entends par là? Je pense par exemple à un homme qui est séparé de son ancienne épouse et qui, en raison d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public, ne peut pas publier de porno-vengeance à son sujet. Nous permettons des restrictions de ce genre dans certaines circonstances. Nous savons que c'est important. C'est pourquoi nous avons inclus dans le projet de loi une mesure de sauvegarde qui consiste à obtenir le consentement du procureur général local. C'est essentiel, car cela permet d'assurer que cette mesure ne sera pas utilisée d'une façon trop restrictive et qu'elle sera jugée constitutionnelle.
Merci.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie également mes collègues du Comité.
Voici le libellé de la motion que je souhaite présenter et dont nous sommes saisis:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et compte tenu de l'escalade alarmante de l'antisémitisme au Canada, le comité entreprenne une étude sur la question de l'antisémitisme et les mesures supplémentaires qui pourraient être prises pour répondre aux craintes légitimes exprimées par la communauté juive du Canada.
Que l'étude porte, sans s'y limiter, sur la question de l'antisémitisme sur les campus universitaires.
Que l'étude prenne au moins trois séances et que le comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.
Madame la présidente, je serai bref. Lundi, j'ai eu l'occasion de prononcer un discours à la Chambre qui portait essentiellement sur cette question. La communauté juive du Canada est alarmée à un niveau sans précédent. D'ailleurs, j'ai appris que certains Canadiens d'origine juive enlèvent les mezouzahs de leurs portes et ont peur d'envoyer leurs enfants à l'école. Cependant, la grande majorité des gens de la communauté juive est touchée de manière plus générale. Les cas dont j'ai fait mention sont anecdotiques et je ne pense pas qu'ils soient généralisés. Néanmoins, bon nombre des personnes m'expriment leurs craintes et se demandent si elles sont en sécurité au Canada et si elles y ont un avenir, situation que je n'aurais jamais cru possible ici auparavant.
En toute franchise, je ne vois pas cela aussi souvent lorsque je suis aux États-Unis. Il se passe quelque chose chez nous. L'antisémitisme existe dans le monde entier, mais la perception de la communauté au Canada est radicalement différente de celle que je perçois au sud de la frontière. Je pense que le Comité doit se pencher sur ce qui se passe et sur ce que nous pouvons faire.
Je vais aborder très brièvement deux problèmes qui me semblent les plus préoccupants et les plus graves.
Le premier concerne les manifestations qui ont lieu et les lacunes en termes de services policiers lors de ces événements. Les gens bloquent l'entrée d'édifices, crient des propos ostensiblement haineux et intimident les personnes qui entrent dans un édifice ou en sortent, mais la police ne fait pas reculer les manifestants pour qu'il y ait une ligne de démarcation sûre entre eux et les personnes qui essaient d'entrer ou de sortir. Voilà le premier problème. Pourquoi les édifices juifs sont-ils ciblés au Canada, et quelles répercussions cette situation a‑t‑elle sur la population? J'aimerais avoir l'occasion d'entendre des Canadiens d'origine juive et des représentants d'organisations juives nous dire comment ils se sentent et ce qu'ils pensent que nous pourrions faire en tant que législateurs fédéraux pour mieux les protéger, notamment sur les plans de la sécurité publique et de la justice.
Le deuxième problème concerne ce qui se passe sur les campus. Les campus sont les endroits où les gens se sentent le plus effrayés et intimidés. Cette situation se manifeste d'un bout à l'autre du pays, de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique. Ce sentiment est présent dans ma province, le Québec, et aussi en Ontario. C'est le cas partout. Certains collègues et moi-même avons écrit une lettre, en décembre, aux recteurs des plus grandes universités du Canada. Nous avons reçu des réponses de chacun d'entre eux, que nous pouvons déposer. Je pense que nous devons demander aux représentants d'Universités Canada et aux recteurs d'universités de nous expliquer quelles mesures sont prises pour protéger les étudiants juifs. Nous devons entendre les étudiants juifs nous parler de ce qu'ils vivent sur les campus. Nous pourrons alors nous prononcer sur les solutions que nous pourrions recommander aux universités et au ministre.
Cela dit, voici où le bât blesse le plus. La communauté juive n'a pas vu de leadership sur le plan symbolique aux niveaux fédéral, provincial et municipal — de la part d'aucun ordre de gouvernement, en fait. Je pense que si la communauté voit que notre comité s'intéresse à cette question, qu'il existe une tribune où elle peut s'exprimer, que nous prenons ses préoccupations au sérieux et que nous l'écoutons, cela lui remontera le moral parce qu'elle se dira qu'au moins certains se soucient d'elle et qu'il y a de l'espoir.
J'espère que mes collègues accepteront de mener une telle étude. Bien entendu, je me ferai un plaisir d'entendre toute proposition d'amendement et je cède la parole à mes collègues.
Merci, madame la présidente.
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Merci, madame la présidente.
J'appuie évidemment de tout cœur la motion de mon collègue, M. Housefather. Je reconnais que ses remarques sont justes à tous égards, mais j'ajouterais une précision importante: Anthony Housefather a fait preuve d'un leadership exceptionnel au nom de sa communauté face aux pires manifestations de haine qu'il m'ait été donné de voir, en tout cas au cours de ma vie. J'espère que le leadership de M. Housefather sera source d'espoir et d'inspiration pour sa communauté.
Je voudrais simplement ajouter qu'à Toronto, où je vis, le chef de police Demkiw a indiqué, il y a 48 heures, que le nombre de crimes haineux signalés sur le territoire torontois a augmenté de 93 % depuis le 7 octobre 2023. Ce triste bilan vient s'ajouter à la vague croissante d'antisémitisme, à laquelle les parlementaires, quelle que soit leur allégeance, ont l'obligation de s'attaquer de front.
Je dirais également que les cas évoqués par M. Housefather sont similaires à ceux qui me sont rapportés dans la circonscription que je représente, Eglinton—Lawrence. La peur, le fort sentiment d'anxiété et, surtout, le profond sentiment d'abandon que ressent la communauté juive, non seulement au Canada mais dans le monde entier, face à cette vague de haine, devraient être un signal d'alarme et nous interpeller tous.
Bien des avenues s'offrent à nous pour nous opposer à cette situation, mais j'estime que le fait de mener une étude pour examiner attentivement certaines des questions que M. Housefather a soulevées est une façon pour le Comité de faire sa part. Si nous ne saisissons pas cette occasion, je pense que notre démocratie prendra encore plus de recul.
J'espère sincèrement que tous les membres du Comité verront l'intérêt d'investir dans la préparation d'un rapport afin que nous puissions unir nos efforts pour freiner cette tendance, l'enrayer et faire en sorte que les Canadiens, y compris ceux d'origine juive, vivent dans une société exempte de haine.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
Merci, monsieur Housefather d'avoir eu le courage de défendre la communauté juive et de présenter cette motion. J'estime que l'étude proposée est très importante et je l'appuie.
Dans ma province, la Colombie-Britannique, il y a eu récemment un référendum ou plutôt une menace de référendum à l'Université de Colombie-Britannique, que j'ai fréquentée, pour mettre fin au bail que Hillel House a sur le campus depuis de nombreuses années. Cette maison est une présence très importante sur le campus universitaire. C'est un refuge pour les étudiants juifs. Heureusement, le référendum n'a pas eu lieu, grâce au leadership efficace de l'association étudiante. J'estime néanmoins que le simple fait qu'un référendum ait été envisagé a sérieusement ébranlé non seulement les habitants de ma province, la Colombie-Britannique, mais aussi ceux de l'ensemble du pays.
La motion aurait également inclus les sanctions préconisées par le mouvement BDS, soit le boycott, le désinvestissement et les sanctions contre Israël et tout ce qui est lié à Israël, ce qui n'est que la forme la plus récente de l'antisémitisme. Je trouve tout cela très inquiétant.
Je suis tout à fait favorable à l'étude proposée afin de mieux comprendre ce qui se passe ici au Canada en matière d'antisémitisme, un phénomène dont je n'aurais jamais cru être témoin de mon vivant. Une telle étude pourrait aussi montrer à la communauté juive que nous sommes à ses côtés et qu'elle constitue un élément important de la culture canadienne.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais commencer en remerciant M. Housefather d'avoir déposé sa motion. Je pense que celle-ci exprime une crainte que nous partageons un peu partout, au Québec comme au Canada.
Je pense que chacun de nos concitoyens et chacune de nos concitoyennes devrait être en mesure de vivre ses croyances religieuses en paix et en toute liberté. Je ne pense pas que des croyances religieuses ou morales, qu'elles soient apostoliques ou autres, devraient diviser les gens. Quelle que soit la religion, ça devrait être un ensemble de valeurs qui cimentent les membres de la société, et non pas qui les divisent.
J'ai beaucoup de respect, d'amitié et de sympathie pour les membres de la communauté juive, compte tenu de ce qu'ils vivent présentement. Je ne veux pas m'écarter du débat, mais, au Québec, nous avons la Loi sur la laïcité de l'État. J'ai eu des discussions avec bon nombre d'amis de confession juive ainsi qu'avec certains de confession musulmane. Il y a des gens extrémistes dans toutes les croyances, mais je dirais que 99 % des gens sont d'accord pour que l'État soit laïc et pour que tout le monde puisse vivre sa religion en paix, dans le respect et la solidarité.
Je n'ajoute rien au débat, mais je tiens à dire que je suis d'accord sur ce qu'ont dit M. Housefather et M. Mendicino. Ce sont des choses importantes.
Vous pouvez compter sur l'appui du Bloc québécois pour ces questions.
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Merci, madame la présidente.
Je comprends l'amendement de M. Garrison. Il va sans dire que l'islamophobie est également une forme de haine très importante, mais n'empêche que ce sont deux formes de haine très distinctes. Je veux donc m'assurer que les questions de l'antisémitisme et de l'islamophobie seront traitées séparément dans le cadre de nos réunions et dans le rapport que nous allons rédiger. J'insiste sur le fait que ce sont deux choses différentes. Les gens les relient trop souvent, et lorsqu'un acte antisémite se produit, on se sent obligé de mentionner l'islamophobie en même temps et vice versa. Le racisme envers les noirs n'est pas la même chose que le racisme envers les homosexuels. Il s'agit de deux formes différentes de racisme, alors je proposerais de modifier l'amendement de M. Garrison en y ajoutant quelques mots.
Nous pourrions ajouter, à la fin de la ligne 2, après les mots « entreprenne une étude sur la question de l'antisémitisme », les mots « et une étude sur la question de l'islamophobie ». Je propose donc d'ajouter les mots « une étude sur la question de ».
Nous pourrions remplacer, à la ligne cinq, au début du deuxième paragraphe, le mot « étude » par les mots « études indépendantes ». Ensuite, nous remplacerions, à la ligne 7, au début du troisième paragraphe, les mots « que l'étude » par « à chaque étude », puis en ce qui concerne le nombre de réunions consacrées à l'étude, nous remplacerions, à la ligne 7, les mots « au moins six réunions » par « au moins deux réunions ». Certains collègues ont dit que si le Comité consacrait six réunions à ces études, il ne pourrait pas étudier un autre sujet avant une longue période, alors au lieu de consacrer trois réunions à chaque étude, le Comité en tiendrait seulement deux, c'est‑à‑dire deux sur l'antisémitisme et deux sur l'islamophobie.
Enfin, nous ajouterions, après le mot « conclusions », les mots « sur chacune des études » afin qu'on puisse lire « que le Comité fasse rapport de ses conclusions sur chacune des études à la Chambre ».
Merci, madame la présidente et monsieur le greffier.
[Français]
Monsieur Fortin, je m'excuse de ne pas avoir rédigé ça en français, mais je peux vous donner les...