:
J'ouvre maintenant la séance.
Je souhaite à tout le monde la bienvenue et un bon après-midi.
[Traduction]
Il s'agit de la 124e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes. Conformément à l'ordre de renvoi du 18 novembre 2024, le Comité se réunit aujourd'hui en public pour commencer son étude du Budget supplémentaire des dépenses (B) 2024‑2025.
Nous recevons cet après-midi le ministre de la Justice et procureur général du Canada, M. Arif Virani, ainsi que cinq membres du ministère.
Avant de vous présenter au Comité, je dirai quelques mots.
Premièrement, je rappelle aux membres de bien vouloir attendre que je les nomme avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre microphone et vous mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
Je rappelle à tout le monde de bien vouloir s'adresser à la présidence; toutes les questions et les réponses doivent passer par l'entremise de la présidence. Avant de commencer nos délibérations, je veux attirer votre attention sur le fait que le greffier a distribué le 10e rapport du Sous-comité du programme et de la procédure du Comité permanent de la justice et des droits de la personne dans les deux langues, à la suite de la réunion du Comité le lundi 25 novembre 2024.
[Français]
[Le Sous-comité a discuté] des travaux du Comité et a convenu de faire les recommandations suivantes:
1. Que les réunions du 28 novembre et 16 décembre 2024 soient annulées;
2. Que, pour les séances du 5, 9 et 12 décembre 2024, le comité entreprenne une pré-étude du projet de loi C‑63.
[Traduction]
Plaît‑il au Comité d'adopter le rapport du Sous-comité?
Je vois deux personnes lever la main.
Allez‑y, monsieur Maloney.
:
Le vote a été demandé. Nous ne pouvons pas proposer d'autre motion. C'est noir et blanc. Ce n'est pas quelque chose sur quoi je peux me prononcer; tout est déjà décidé. Apparemment, c'est la même chose à la Chambre. Je n'ai rien d'autre à ajouter.
Monsieur le greffier, veuillez passer au vote.
(La motion est adoptée par 6 voix contre 5.)
La présidente: Merci beaucoup.
Je veux vous souhaiter la bienvenue, monsieur le ministre, ainsi qu'aux représentants qui vous accompagnent: Shalene Curtis-Micallef, sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada; Laurie Sargent, sous-ministre adjointe, Portefeuille des droits et relations autochtones; Bill Kroll, dirigeant principal des finances et sous-ministre adjoint, Secteur de la gestion; Matthew Taylor, avocat général principal et directeur général, Section de la politique en matière de droit pénal; et Elizabeth Hendy, directrice générale, Direction générale des programmes, Secteur des politiques.
[Français]
Nous vous remercions de participer à cette réunion.
Monsieur le ministre, je vous cède la parole sans plus tarder. Vous disposez de dix minutes.
:
Je vous remercie, madame la présidente, ainsi que les membres de ce comité.
[Traduction]
Je vais présenter aujourd'hui les principaux postes du Budget supplémentaire des dépenses (B) 2024‑2025 pour le ministère de la Justice. Ce financement changera vraiment les choses pour les Canadiens qui interagissent avec notre système de justice, y compris les victimes. Ces postes s'inscrivent dans le plan plus large du gouvernement d'améliorer l'abordabilité, de fournir des mesures de soutien social et de créer un meilleur Canada.
L'accès à la justice est l'une de mes priorités absolues. À cette fin, j'ai consacré énormément de temps et d'effort pour pourvoir aux postes de juge vacants. Depuis mon entrée en fonction, j'ai nommé 178 juges. Au cours de ma première année seulement, j'ai nommé 137 juges. Le record annuel précédent était de 107. En ce moment, plus de 96 % des postes de juge au pays sont pourvus.
Un système d'aide juridique robuste est un autre pilier clé de l'accès à la justice. Je pense que l'aide juridique fournit une représentation équitable. Elle veille au bon fonctionnement du processus judiciaire et garantit que les cas sont entendus en temps opportun. Le budget supplémentaire des dépenses (B) de cette année prévoit 80 millions de dollars pour l'aide juridique en matière pénale aux provinces et aux territoires et 71,6 millions de dollars pour les services d'aide juridique aux immigrants et aux réfugiés. Ces fonds ouvriront la voie à un meilleur accès à la justice pour les personnes autochtones, les personnes issues de communautés noires ou d'autres communautés racisées et les personnes aux prises avec des troubles de santé mentale, qui sont toutes surreprésentées dans le système de justice pénale.
Si le budget supplémentaire des dépenses n'est pas adopté au Parlement, ce soutien essentiel sera compromis. Tous les membres du Comité doivent le comprendre. La justice ne sera pas rendue, et les gens souffriront, tout particulièrement les victimes d'actes criminels. Je sais qu'il y a des collègues à la table qui se préoccupent de ces questions, mais je sais également que certaines personnes pourraient recevoir l'instruction de s'opposer à ces mesures.
Je m'adresse à mes collègues du Bloc et du NPD: je pense que nous savons comment voteront certains députés par rapport à ces mesures, dont l'opposition officielle. Je me tourne vers vous pour m'assurer que le budget peut être mis aux voix et adopté.
[Français]
Permettez-moi de souligner d'autres domaines dans lesquels le budget supplémentaire des dépenses apporte un soutien essentiel à la population canadienne.
Il soutiendra la prestation de conseils juridiques et d'information fournie aux personnes qui ont été harcelées sexuellement sur leur lieu de travail. Le harcèlement sexuel est un fléau qui touche de manière disproportionnée les femmes. Statistique Canada nous apprend qu'une femme sur quatre et un homme sur six ont déclaré avoir été victimes de comportements sexualisés et inappropriés sur le lieu de travail.
Nous savons également que la grande majorité des incidents ne sont pas signalés, ce qui signifie que les chiffres réels sont probablement plus élevés. Le financement de 10,13 millions de dollars prévu dans ces estimations aiderait à soutenir les personnes qui traversent une période traumatisante, en particulier si elles n'ont pas les moyens de se payer une représentation juridique ou si elles ne connaissent pas leurs droits.
[Traduction]
Le programme d'aide juridique soutiendra l'accès à des renseignements et des conseils juridiques gratuits à quiconque pense avoir été victime de harcèlement sexuel en milieu de travail. Il s'agit de fonds très importants.
L'opposition officielle dit vouloir lutter contre la violence fondée sur le sexe. Elle est souvent très performative à ce sujet, mais je m'attends à ce que, encore une fois, elle suive les instructions de son et vote contre le soutien des victimes de violence fondée sur le sexe.
Ces fonds coïncident avec un effort concerté de notre gouvernement pour soutenir les femmes et réduire les agressions sexuelles et la violence fondée sur le sexe. La violence fondée sur le sexe est une épidémie dans le pays et doit cesser.
C'est pourquoi nous avons adopté des lois obligeant les juges à être formés sur les agressions sexuelles et la violence entre partenaires intimes. J'ai travaillé sur ce dossier à ce comité même. Il s'agissait du projet de loi , que nous avons appelé le projet de loi Rona Ambrose, au cours de la 43e législature.
Nous avons également renforcé le registre national des délinquants sexuels avec le projet de loi , au cours de la présente législature, et réformé les lois sur l'interdiction de publication afin de donner aux victimes les moyens de raconter leurs propres histoires. Nous avons renforcé les lois en matière de cautionnement applicables aux auteurs de violence entre partenaires intimes dans le projet de loi et le projet de loi . Nous avons financé des refuges pour femmes et des lignes téléphoniques de crise afin que les victimes reçoivent de l'aide lorsqu'elles en ont besoin. Nous continuerons de faire tout notre possible pour mettre fin au harcèlement sexuel et à la violence fondée sur le sexe au Canada. Je suis fier de dire que ce financement contribuera à cet objectif très important.
La s'attaquera concrètement à la violence sexuelle en ligne. Pour la première fois, nous exigeons que les plateformes en ligne fassent leur part pour que les Canadiens, surtout les enfants, soient en sécurité en ligne. Nous veillerons à ce que le matériel d'exploitation sexuelle des enfants et les images intimes non consensuelles, y compris les hypertrucages, fassent l'objet d'une ordonnance de retrait. Les plateformes en ligne n'obtiendront plus de passe-droit pour héberger du contenu vil. Les femmes et les filles dans l'ensemble du Canada font l'objet d'intimidation et de harcèlement en ligne. Nous avons vu des enfants se suicider à cause de la violence en ligne.
Assez, c'est assez. Dans notre monde de plus en plus connecté, nous n'avons pas de temps à perdre. Nous devons agir de manière intentionnelle. Nous devons adopter le projet de loi .
[Français]
Je souhaite maintenant aborder un autre sujet important pour la population canadienne, soit la protection des locataires. Nous savons que, à l'heure actuelle, le logement est l'une des principales pressions qui pèsent sur la population canadienne, et c'est particulièrement vrai pour les locataires.
L'augmentation du prix des loyers, les rénovictions et le manque de possibilités quant aux logements disponibles poussent les locataires à quitter leur collectivité. Les locataires sont aussi confrontés à des défis particuliers quand il s'agit de s'assurer que leur logement est convenablement entretenu et que leur propriétaire respecte les lois provinciales.
Les organisations de défense des droits des locataires et de services juridiques peuvent aider les locataires à s'y retrouver et à surmonter ces problèmes complexes. Face aux menaces qui pèsent sur la sécurité de leur logement, les locataires peuvent se sentir particulièrement impuissants et seuls.
[Traduction]
C'est pourquoi, dans le budget 2024, notre gouvernement a proposé un investissement de 50 millions de dollars sur 5 ans pour établir ce que nous appelons un nouveau Fonds de protection des locataires. Notre gouvernement a fait d'importants progrès dans le domaine du logement. Nous savons que tout le monde mérite un endroit abordable qu'il peut appeler son chez-soi. Notre Fonds pour accélérer la construction de logements contribue à changer la donne dans des collectivités d'un bout à l'autre du Canada. Il est très malheureux que les députés conservateurs se soient vu interdire par leur d'accéder à ces fonds pour leurs collectivités. C'est injuste, et cela ne constitue certainement pas du leadership. Le Fonds de protection des locataires n'est qu'un des nombreux éléments de ce budget supplémentaire des dépenses qui serviront à la construction de plus de logements.
Les autres éléments comprennent 135 millions de dollars au titre de l'Allocation canadienne pour le logement afin de permettre aux locataires à faible et à moyen revenu de joindre les deux bouts. Nous investissons 99 millions de dollars dans l'acquisition rapide de places en refuge et de logements très abordables. Nous consacrons 27 millions de dollars au développement de coopératives d'habitation, un excellent moyen d'accroître les options abordables pour les familles. Nous continuerons de venir en aide aux Canadiens en construisant rapidement les logements dont nous avons besoin.
J'aimerais parler d'un dernier point, qui est le nouveau financement de 4,9 millions de dollars du budget des dépenses destiné aux victimes et aux survivants de crimes haineux. Ce financement s'inscrit dans le Plan d'action canadien de lutte contre la haine. Le plan d'action représente un tout premier effort pangouvernemental exhaustif du Canada pour lutter contre la haine.
Le budget 2024 a annoncé 29 millions de dollars sur 6 ans, à compter de cette année, pour accroître ou établir des programmes d'indemnisation et d'aide financière pour les victimes de crime à caractère haineux. Ce financement permettrait également de sensibiliser la magistrature à la dynamique unique des crimes haineux, en plus de soutenir l'élaboration et la prestation d'une formation spécialisée pour les procureurs de la Couronne sur ce sujet. Nous avons observé une augmentation alarmante des crimes haineux au Canada. Les incidents horribles d'antisémitisme ont grimpé en flèche. La haine contre la communauté queer est en hausse. Les gens ne se sentent pas en sécurité dans leurs propres quartiers. C'est inacceptable et contraire aux valeurs canadiennes. Nous devons éradiquer la haine dans nos collectivités et nous assurer que les auteurs de crime haineux sont tenus responsables.
Le projet de loi est une partie essentielle de notre plan visant à mettre fin à la haine au Canada. J'ai été très fier de me tenir aux côtés du Conseil national des musulmans canadiens, du Centre consultatif des relations juives et israéliennes, de la Fondation canadienne des relations raciales et d'autres lorsque j'ai présenté le projet de loi C‑63, en février dernier. À l'instar de nombreux Canadiens, je suis déçu que le projet de loi ait été retardé à la Chambre des communes à cause de jeux partisans. Le projet de loi C‑63 crée des sanctions plus sévères pour les crimes haineux et garantit l'existence de mécanismes visant à tenir les gens responsables de la haine en ligne qui ne serait pas acceptable dans le monde hors ligne. Je suis fier de cette loi, et j'espère la voir progresser bientôt.
Madame la présidente et mesdames et messieurs, les crédits demandés dans le cadre du budget supplémentaire des dépenses (B) font partie de la vision de soutien plus large du gouvernement, plutôt que de coupures, à l'endroit des Canadiens. Je m'engage à créer un système de justice accessible, équitable et efficace. Je travaille chaque jour à l'atteinte de cet objectif. J'espère que tous les membres du Comité veilleront à ce que cet important financement soit versé aux Canadiens.
Merci beaucoup.
:
Monsieur Bittle, je vous remercie de la question.
Le projet de loi imposera le devoir de protéger les enfants et de retirer le contenu. Ce sont les deux premiers points.
Ensuite, le devoir de retirer le contenu s'appliquerait au matériel pédopornographique et à ce que l'on appelle la pornographie vengeresse, c'est‑à‑dire le partage non consensuel d'images privées.
J'ai discuté avec beaucoup de mères dans le pays, en particulier avec Carol, la mère d'Amanda Todd, qui m'a parlé du fait que la victimisation de son enfant se poursuit dix ans après la mort de celle‑ci. Et pour quelle raison? Parce que les photos d'Amanda Todd continuent de circuler en ligne.
Lorsque j'ai parlé aux responsables de l'exécution de la loi, comme M. Jivani m'exhortait à le faire, on m'a dit que peu importe le nombre de fois où l'on essaie d'amender le Code criminel, il est très compliqué d'intenter des poursuites dans cette situation. Il est surtout difficile de le faire lorsque l'auteur du crime se trouve à l'étranger, y compris de l'autre côté de la planète. La police m'a également dit que la seule chose qui aidera les victimes et leur famille, c'est de retirer ces photos, et ce, le plus tôt possible.
C'est donc ce que ce projet de loi vise à faire dans un délai de 24 heures. Il exigerait que l'on retire les photos. C'est pourquoi le Centre canadien de protection de l'enfance, au même titre que les parents dans tout le pays, appuie ce projet de loi. C'est au moins une chose sur quoi j'espère que nous pourrons travailler de concert, et de façon non partisane, pour la faire aboutir.
:
J'aimerais que vous soyez non seulement à l'aise de m'écouter, mais aussi à l'aise d'être d'accord avec nous. Je comprends que je n'aurai pas ce consentement aujourd'hui, mais je vous invite à y réfléchir sérieusement.
De notre côté, nous faisons le tour de la question. Comme vous le savez, au cours des dernières semaines, le Comité a tenu des réunions dans le cadre de son étude sur l'islamophobie et l'antisémitisme. Vous avez entendu parler de nos débats. Après avoir écouté tous les témoignages, cette question m'apparaît de plus en plus pertinente et de plus en plus urgente. D'ailleurs, Mme Lyons, l'envoyée spéciale pour la préservation de la mémoire de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme, a témoigné devant le Comité. Sans dire qu'elle était d'accord sur cette question, elle la trouvait intéressante et disait qu'il faudrait s'y pencher. Je me permets donc d'insister en vous disant que ce serait quelque chose de très important dans la lutte contre les discours haineux.
Je change de sujet rapidement, car il me reste à peine une minute. Ce matin, La Pressea publié un article déplorant les problèmes entourant la nomination de juges québécois à la Cour fédérale du Canada. Vous l'avez lu, j'en suis persuadé, ou, à tout le moins, on vous a breffé là-dessus. Au cours des prochains jours, j'imagine, deux nouveaux juges du Québec seront nommés à la Cour fédérale du Canada. Pouvons-nous nous attendre à ce que vous désigniez des juges québécois? Comme vous le savez, la Loi sur les Cours fédérales oblige la nomination de cinq juges québécois à la Cour d'appel fédérale et de dix juges québécois à la Cour fédérale.
Il y a présentement un déficit, comme le ministre de la Justice du Québec le soulignait. Pouvons-nous nous attendre à ce que vous corrigiez ce déficit de nominations en désignant des juges québécois à ces postes vacants au cours des prochains jours?
:
Je vous remercie de votre question.
Ce qui est intéressant dans le projet de loi , c'est qu'on a y aborde le concept d'hypertrucage, terme utilisé pour la première fois dans la loi. On y aborde non seulement les cas de pornodivulgation, c'est-à-dire de divulgation non consensuelle d'images montrant des relations intimes, mais aussi les cas de divulgation d'images de femmes conçues entièrement de façon artificielle. En effet, que ce soit vraiment la femme qui apparaît dans l'image ou une représentation truquée de celle-ci, le résultat est le même: on punit cette femme, on l'isole et on l'effraie, particulièrement sur les médias sociaux.
C'est la raison pour laquelle ce projet de loi est si important. Il ne vise pas seulement les femmes adultes, mais aussi les jeunes adolescents. À plusieurs reprises, on a vu comment ces derniers subissent les attaques de prédateurs. Je pense aux cas de Rehtaeh Parsons, d'Amanda Todd et de jeunes garçons. Ces jeunes adolescents n'ont pas la capacité ou les outils nécessaires pour se battre contre ces prédateurs, ce qui les pousse parfois à se suicider, une tragédie.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi est si fort et si nécessaire si nous voulons faire progresser le combat contre les prédateurs. Il s'agit aussi de sauver nos jeunes, nos adolescents et nos femmes.
:
D'accord, mais de toute façon, on parle juste du Canada. On ne parle pas de l'étranger.
Je veux revenir sur une autre question avant que vous quittiez la réunion. Il me reste quelques secondes.
Vous parlez beaucoup de votre bilan en matière de nominations de juges, qui serait impressionnant. J'ai beaucoup de respect pour vous, vous le savez, mais la ministre Jody Wilson‑Raybould vous battait à plate couture au chapitre des délais. Pendant son mandat, le délai de nomination des juges à la Cour d'appel fédérale était, en moyenne, de 126 jours. Depuis votre entrée en fonction, ce délai est de 283 jours, en moyenne. À la Cour fédérale, sa moyenne en matière de délais de nomination était de 476 jours, alors que la vôtre est de 786 jours. À la Cour d'appel du Québec, sa moyenne était de 163 jours. La vôtre est de 286 jours. À la Cour supérieure du Québec, sa moyenne était de 158 jours, mais la vôtre est de 185 jours.
Dans certains cas, le délai moyen de nomination a pratiquement doublé. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi il y a un aussi grand écart entre ce que faisait la ministre Jody Wilson‑Raybould et ce que vous êtes en mesure de faire?
:
Merci, madame la présidente.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé, dans vos estimations, un crédit de 3 millions de dollars pour le Fonds de protection des locataires. Puis, la Commission canadienne des droits de la personne a reçu au total 1 158 000 $, montant versé en entier au Bureau du défenseur fédéral du logement.
Vous savez que ma collègue, Mme Zarrillo, a mentionné que certaines grandes sociétés immobilières — Dream Unlimited dans ce cas‑ci — ont reconnu avoir utilisé un logiciel d'intelligence artificielle, qui, selon le gouvernement américain, est utilisé par les propriétaires pour orchestrer des hausses de loyer. C'est, et je crois que la plupart des Canadiens sont d'accord, une pratique commerciale extrêmement injuste. Elle pourrait même être illégale.
Compte tenu de la pression qu'exercent présentement les grandes sociétés immobilières sur les locataires, croyez-vous que les 3 millions de dollars du budget supplémentaire supposés protéger les locataires et que les 1,158 millions de dollars destinés au Bureau du défenseur fédéral du logement sont suffisants pour régler les problèmes et les difficultés auxquels sont exposés les locataires canadiens d'un bout à l'autre du pays?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
[Traduction]
Merci aux fonctionnaires d'être parmi nous.
Nous accueillons des fonctionnaires du bureau du ministre de la Justice, c'est‑à‑dire les personnes qui travaillent parallèlement à ce bureau. Nous venons d'entendre le témoignage du ministre et, pour être honnête avec vous, ce serait très indulgent de dire qu'il est épouvantable.
Depuis trois ans, je siège au Comité de la condition féminine et j'entends des statistiques sur des femmes qui ont été assassinées en plein jour, y compris ici, à Ottawa. Près d'ici, une femme est morte dans un parc devant ses deux enfants. Elle s'est fait trancher la gorge, et des témoins innocents ont dû la tenir dans leurs bras, alors qu'elle mourait devant ses enfants.
Le ministre a dit qu'il avait réformé la mise en liberté sous caution, et les auteurs de ces crimes sont libérés sous caution. C'était un témoignage très insultant pour les victimes de la violence.
Je crois qu'il est très pertinent que je dépose la motion suivante. L'avis de motion a été donné le 26 novembre. La motion se lit comme suit:
Que, étant donné que les députés se sont engagés à 16 jours d'action pour lutter contre la violence fondée sur le sexe, qu'une femme ou une fille est tuée chaque jour au Canada et que, depuis 2015, les agressions sexuelles ont augmenté de 74 %, les infractions sexuelles contre les enfants ont augmenté de 118 %, les enlèvements ont augmenté de 10 %, les communications harcelantes ont augmenté de 86 % et la traite de personnes a augmenté de 83 %, le Comité informe la Chambre que les politiques libérales en matière de justice pénale n'ont pas réussi à protéger les femmes, et que le Comité entreprend une étude d'au moins deux réunions au cours des 16 jours d'action pour lutter contre la violence fondée sur le sexe afin d'entendre des survivantes de la violence familiale, des spécialistes et des défenseurs des droits des victimes.
Je demande que justice soit faite, parce que le ministre a dit aujourd'hui devant le Comité qu'il avait fait de l'excellent travail pour lutter contre la violence fondée sur le sexe. Je dépose la motion dans l'espoir que tous les membres du Comité soient en faveur de l'étude. Entendons les voix des victimes.
La sergente Lisa Harris du Royal Newfoundland Constabulary est venue ici. Elle a comparu devant le Comité de la condition féminine la semaine dernière et a dit:
La mort de Courtney Lake...
C'est très important de dire le nom des victimes.
... met en évidence les conséquences tragiques qui peuvent se produire lorsque les personnes accusées de violence entre partenaires intimes sont autorisées à rester en liberté sous caution, et que le non-respect des ordonnances judiciaires entraîne peu de conséquences. Son histoire est l'une des nombreuses histoires qui démontrent l'urgence de resserrer les conditions de mise en liberté sous caution pour les personnes accusées de violence entre partenaires intimes.
Si le Comité de la justice prend réellement la chose au sérieux, je demande à tous les membres de voter en faveur de l'étude pour entendre des victimes, qui méritent d'être entendues, et mettre en œuvre des politiques, ce qui peut être fait dès aujourd'hui, pour mettre fin à ces attaques insensées contre les femmes et pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe, surtout dans les régions nordiques, où il y a une véritable épidémie.
Il y a deux ou trois semaines seulement, une adolescente de 16 ans a été brutalement attaquée en plein jour. Encore une fois, son assaillant avait été libéré sous caution. La police du nord-est de l'Ontario reçoit plus de 100 appels téléphoniques par semaine concernant la violence entre partenaires intimes.
Nous sommes le Comité de la justice. Si les membres prennent leur rôle au sérieux, ils doivent agir.
Je vais m'en tenir à cela. J'implore les membres du Comité de prendre cette motion très au sérieux parce que 187 femmes ont été violemment tuées au Canada, l'année dernière. C'est une femme tous les deux jours. Selon le service de police régional de Peel, chaque jour, au Canada, une femme est étranglée. Nous pouvons faire mieux.
:
Merci, madame la présidente.
Merci aux fonctionnaires de comparaître cet après-midi.
J'aimerais axer mes questions sur le projet de loi . Le contexte de ce projet de loi est la hausse alarmante des préjudices et des crimes en ligne qui préoccupe le gouvernement du Canada.
Je commencerai en soulignant que la prévalence des préjudices en ligne a continué d'augmenter ces dernières années. En 2022, un sondage canadien mené auprès des jeunes et portant sur Internet a révélé que 71 % des Canadiens âgés de 15 à 24 ans avaient été exposés, au cours des 12 mois précédents, à du contenu en ligne pouvant inciter à la haine ou à la violence. La même année, le Programme de déclaration uniforme de criminalité a rapporté 219 crimes haineux liés au cyberespace, ce qui représentait une hausse par rapport aux 92 incidents rapportés en 2018.
Je tiens à donner encore quelques statistiques importantes. Entre 2014 et 2022, la police a rapporté 15 630 cas d'infractions sexuelles en ligne à l'encontre d'enfants et 45 816 cas de pornographie juvénile. En 2022, la police canadienne a reçu 2 524 rapports de distribution non consensuelle d'images intimes en ligne. Une étude effectuée en 2020 par l'Institute for Strategic Dialogue, basé au Royaume-Uni, a révélé que les Canadiens partageaient du contenu radical comme du contenu suprématiste blanc ou misogyne sur plus de 6 600 canaux en ligne et que les Canadiens étaient proportionnellement plus actifs sur de tels canaux que d'autres utilisateurs à l'étranger.
J'ai pris le temps de passer en revue ces statistiques afin de mettre en évidence l'importance de ce projet de loi. Le projet de loi, entre autres, nomme et définit sept types de contenu préjudiciable, dont plusieurs reflètent directement les tendances alarmantes des préjudices, de la violence et des crimes en ligne que je viens d'exposer. Ces sept types de contenu préjudiciable comprennent les contenus qui alimentent la haine, incitent à la violence, incitent à l'extrémisme violent ou au terrorisme, les contenus intimes partagés sans consentement, les contenus qui incitent les enfants à se faire du mal, qui font d'un enfant une victime sexuelle ou qui revictimisent un survivant ou une survivante et les contenus utilisés pour intimider un enfant.
Dans le temps qu'il me reste, j'aimerais que les fonctionnaires en disent plus sur la manière dont ils croient que ces dispositions, lorsqu'elles seront mises en œuvre, pourront être déployées par les forces de l'ordre dans le but d'inverser les tendances que je viens de nommer, qui font partie des principales raisons pour lesquelles il est si important que nous étudiions ce projet de loi et qu'il soit adopté.
Je céderai la parole à quiconque souhaite répondre à cette question.
:
Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie de votre présence.
Monsieur Kroll, j'ai abordé tantôt certaines questions avec le ministre de la Justice. Comme vous étiez présent, je ne referai pas tout mon laïus.
J'aimerais revenir sur la question de la nomination des juges. Dans son discours d'intronisation en 2023, le juge en chef de la Cour d'appel fédérale, M. Yves de Montigny, disait que le financement était inadéquat. Par ailleurs, le juge Henry Brown, dans une décision qu'il a rendue en février dernier, déclarait que le nombre actuel de postes vacants à la Cour fédérale était inacceptable. Le juge en chef du Canada, le très honorable juge Wagner, a répété à deux reprises — je ne me rappelle plus des dates précises, mais c'était il y a un an ou deux — que les délais de nomination n'avaient aucun bon sens et qu'ils contribuaient à miner la confiance du public envers le système de justice.
Est-ce que quelque chose a été fait à cet égard? Le budget prévoit-il des sommes additionnelles pour créer des postes de juge et pour prévoir de nouvelles salles et du personnel?
Un meilleur financement du système judiciaire pourrait aussi permettre d'endiguer le problème des arrêts de procédure dus aux délais prévus dans l'arrêt Jordan. Ces arrêts nuisent considérablement à l'image de la justice, ce qui pourrait engendrer une crise importante de confiance de la population envers notre système de justice.
J'aimerais entendre votre point de vue là-dessus.
:
Alors pourquoi y a‑t‑il dans les termes spécifiques un déséquilibre qui a provoqué la crise qu'a connue le pays en ce qui trait aux décisions sur les libérations sous caution?
L'article 493.1 a été amendé par le gouvernement Trudeau en 2019. Il se lit ainsi:
Dans toute décision prise au titre de la présente partie, l'agent de la paix, le juge de paix ou le juge cherche en premier lieu...
C'est une disposition obligatoire.
... à mettre en liberté le prévenu à la première occasion raisonnable et aux conditions les moins sévères possible dans les circonstances...
Voilà un vocabulaire tout droit sorti de la Cour suprême.
... notamment celles qu'il peut raisonnablement respecter...
Et à la toute fin, cette formule:
tout en tenant compte des motifs visés aux paragraphes 498(1.1) ou 515(10)
Voilà les motifs primaires, secondaires et tertiaires.
Il ne s'agit pas d'un équilibre. C'est une façon de dire aux juges de paix et aux juges que le défaut est la considération première, quelle que soit l'infraction principale, quel que soit le casier judiciaire du délinquant, quels que soient ses antécédents d'atteinte à l'administration de la justice et quels que soient ses antécédents en général.
Le gouvernement actuel est‑il ouvert à renforcer le libellé du paragraphe 493.1 lorsque l'on a affaire à des gens qui sont les principales menaces, dans nos rues, et qui enfreignent constamment leurs conditions de mise en liberté sous caution? Le gouvernement est‑il ouvert à la possibilité d'amender le libellé du paragraphe 493.1 pour veiller à ce que les juges accordent une importance égale aux trois motifs énumérés au paragraphe 515(10)?
:
Merci, madame la présidente.
Madame Sargent, je comprends ce qu'on vient de dire, et mon respecté collègue M. Maloney a expliqué ce qui relève des compétences des provinces, et non du fédéral. Je suis content d'entendre cela, parce que, au Bloc québécois, nous nous battons fréquemment, sinon quotidiennement, pour le respect des compétences du Québec.
Cela dit, il y a quand même quelque chose à faire, parce que votre plan ministériel de 2024-2025 indique que seulement la moitié des Canadiens croit que le système de justice est juste pour tous, alors que le ministre s'était fixé un objectif de 70 %, sauf erreur. On ne peut pas gérer l'administration de la justice dans les tribunaux qui relèvent de la compétence fédérale. C'est le cas, j'en conviens. Toutefois, on peut quand même nommer des juges. Nous avons vu qu'il y a des délais. Quelles autres mesures peut-on prendre, à votre avis?
Comment prévoyez-vous faire augmenter la confiance des Canadiens dans le système de justice pour la faire passer à plus de 50 %, ce qui serait quand même un peu pathétique à mon avis, en tout respect?
Merci, chers collègues.
J'ai un certain nombre de questions à poser et je dois procéder à des votes.
SERVICE CANADIEN D'APPUI AUX TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS
ç
Crédit 1b—Dépenses du programme..........1 705 807 $
(Le crédit 1b est adopté avec dissidence.)
COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
ç
Crédit 1b—Dépenses du programme..........1 158 787 $
(Le crédit 1b est adopté avec dissidence.)
SERVICE ADMINISTRATIF DES TRIBUNAUX JUDICIAIRES
ç
Crédit 1b—Dépenses du programme..........5 990 525 $
(Le crédit 1b est adopté avec dissidence.)
ç
Crédit 1b—Dépenses de fonctionnement..........5 965 722 $
ç
Crédit 5b—Subventions et contributions..........187 394 935 $
(Les crédits 1b et 5b sont adoptés avec dissidence.)
COMMISSION DU DROIT DU CANADA
ç
Crédit 1b—Dépenses du programme..........735 000 $
(Le crédit 1b est adopté avec dissidence.)
La présidente: Puis‑je faire rapport à la Chambre du Budget supplémentaire des dépenses (B) 2024‑2025?
Des députés: D'accord.
Un député: Avec dissidence.
La présidente: C'est maintenant la fin de la séance. Nous avons en fait terminé quelques minutes plus tôt. Bien joué, chers collègues! Merci beaucoup de vos efforts dans cette étude du budget supplémentaire.
Bon après-midi. À la prochaine.