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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 016 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 6 avril 2022

[Enregistrement électronique]

(1545)

[Traduction]

     Mesdames et messieurs, la séance est ouverte. Il s'agit de la 16e réunion du Comité de la défense nationale.
    Nous poursuivons notre étude sur le recrutement et le maintien des effectifs, et nous accueillons aujourd'hui le professeur Christian Leuprecht ainsi que Mme June Winger, présidente nationale de l'Union des employés de la Défense nationale.
    Avant de donner la parole à M. Leuprecht pour sa déclaration préliminaire de cinq minutes, je vous dirai, mesdames et messieurs, que nous allons continuer de surveiller l'horloge. Nous avons 16 minutes de retard. Je propose de réduire d'une minute le temps de chacun au premier tour et d'une minute le temps de chacun au deuxième tour. J'espère que cela nous rapprochera de l'heure prévue. À moins que je n'entende des objections passionnées et insurmontables, nous allons procéder ainsi.
    Sur ce, monsieur Leuprecht, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Je vais intervenir en anglais, mais je vais répondre aux questions dans les deux langues officielles.
    Je vous remercie de votre invitation.

[Traduction]

    La semaine dernière, j'ai été appelé à témoigner devant le Comité OGGO au sujet de l'approvisionnement. Aujourd'hui, on m'a demandé de faire part de mon expertise sur le recrutement et sur le maintien des effectifs des Forces armées canadiennes et de l'ensemble de l'Équipe de la Défense. Les sujets des témoignages de la semaine dernière et de cette semaine sont reliés.
    Il faut parfois jusqu'à 15 ans pour concevoir, lancer, effectuer les acquisitions et mettre en œuvre un nouveau système comme le programme de chasseurs de la prochaine génération de l'armée de l'air. Il faut autant de temps pour former des membres au fonctionnement de ces systèmes complexes, mais cela est moins évident. Pourtant, pendant des années, les Forces armées canadiennes ont dû privilégier leurs opérations. Maintenant, nous devons reconstituer les effectifs. Malheureusement, les processus de recrutement du personnel et d'acquisition de l'équipement ne sont pas synchronisés pour régénérer et maintenir les effectifs et pour les harmoniser avec la modernisation de l'équipement.
    Par conséquent, les Forces canadiennes souffrent d'une grave pénurie d'expérience, surtout au niveau des militaires du rang et des officiers. Ce « chaînon manquant » constitue le centre de gravité des Forces armées canadiennes. Son personnel s'occupe du recrutement, de la formation ainsi que de l'intégration et de la surveillance dans les unités. Cette situation pose un grave risque d'échec, car les Forces armées canadiennes ne sont pas prêtes à faire face à la demande croissante de services et à la complexité des missions actuelles.
    Pendant des années, les Forces canadiennes étaient robustes et la nature des conflits était telle, que le gouvernement pouvait choisir des ensembles de forces dans notre armée. Entretemps, les capacités fondamentales de base se sont érodées, et dans l'environnement de sécurité actuel, le gouvernement n'a plus le luxe de choisir des ensembles de forces de base ou réunis sur mesure. Cette pénurie menace dangereusement la réputation du Canada, comme l'indiquent les réprimandes que le Canada a reçues du secrétaire général de l'OTAN et de l'administration Biden.
    Ce « chaînon manquant » ne comprend pas seulement le personnel chargé de la formation et du fonctionnement de l'équipement. Il comprend également les membres auxquels le gouvernement fait appel en dernier recours, que ce soit pour gérer la distribution nationale des vaccins ou pour atténuer les retombées des établissements de soins de longue durée mal gérés pendant la pandémie. Ces membres constituent donc la capacité la plus importante et la plus sous-estimée des Forces canadiennes. Ils méritent d'être traités pour ce qu'ils sont.
    Les talents doivent être recrutés, formés et conservés. À cet effet, les deux premiers piliers du nouveau parcours des FAC ne sont pas seulement les plus urgents pour l'organisme, mais ils font également l'objet de l'étude actuelle de la Défense nationale sur le renouvellement de la génération du personnel et sur la modernisation du modèle d'emploi.
     Au 22 février dernier, les FAC comptaient 7 600 membres de moins que leur effectif minimal autorisé. Cependant, les déséquilibres du système de formation accroissent en réalité ce nombre à 10 000 membres du personnel opérationnel. Autrement dit, les Forces canadiennes fonctionnent actuellement avec seulement 85 % de l'effectif requis pour ses mandats et ses rôles actuels. Elles manquent surtout de caporaux-chefs [difficultés techniques]. Cette pénurie de personnel expérimenté causera toute une cascade de répercussions au cours des années à venir.
    La stabilisation et le rétablissement du personnel militaire sont donc des priorités absolues. Il faut générer du personnel possédant les compétences requises pour la centaine de fonctions professionnelles et de postes de commandement menacés, notamment dans la Marine ainsi que dans les domaines de la cybernétique, de l'espace et de l'information. Il faut réduire l'attrition précoce du service ainsi que l'attrition malsaine due à la discrimination, au harcèlement, aux mauvais comportements et à l'inconduite sexuelle tout en créant des conditions favorisant l'acquisition et le perfectionnement des compétences du personnel.
    À cet égard, je présente les recommandations suivantes en vue de moderniser et de régénérer les FAC et d'assurer la préparation opérationnelle de cette institution nationale vitale et vénérable et de cet instrument de politique étrangère et de pouvoir national.
    Premièrement, il faut étendre le bassin de talents du personnel des Forces canadiennes et de la fonction publique. Au lieu d'effectuer un recrutement de masse, il faut suivre une approche ciblée afin de placer les personnes qui conviennent aux postes qui leur conviennent. Le recrutement est une initiative à laquelle doivent participer l'ensemble du gouvernement et de la nation. Tous les députés doivent assumer, dans leur circonscription, le rôle clé de renforcer la confiance des gens envers les Forces armées canadiennes et de leur montrer qu'elles sont un employeur de choix. Ils devraient surtout cibler les femmes, les groupes ethnoculturels ainsi que les immigrants et les communautés autochtones.
    Deuxièmement, il faudrait rendre l'Équipe de la Défense plus agile en réduisant et en simplifiant les centaines de politiques et de processus de ressources humaines. Ces processus onéreux sont en partie responsables des pénuries de personnel qui prévalent dans l'ensemble de l'Équipe de la Défense.
(1550)
    Puisque les Forces armées canadiennes ne disposent pas de suffisamment d'argent et de personnel, elles devront moderniser les règles et les processus pour faciliter le recrutement et le maintien des effectifs, pour les rendre plus abordables et pour créer les autorités ministérielles requises pour appliquer ces règles et processus. Alors seulement pourrons-nous reconstituer les FAC, les stabiliser et récupérer les capacités de son personnel. À cette fin, les FAC doivent moderniser des centaines de politiques désuètes liées au recrutement et au maintien des effectifs. Les organismes centraux devront traiter cela en priorité.
    Le Comité devra veiller à ce que le Conseil du Trésor, notamment son président, traite en priorité absolue le renouvellement des politiques du MDN et des FAC. Les retards bureaucratiques et politiques ne feront qu'aggraver la capacité de fonctionnement des Forces armées canadiennes.
    Troisièmement, les députés ont le pouvoir de renforcer le troisième pilier du parcours des Forces canadiennes. Ils peuvent soutenir les familles des militaires en investissant davantage dans la réduction du stress qu'elles ressentent. Ils devront pour cela renforcer l'efficacité et l'efficience de la coopération, de la coordination et de la collaboration intergouvernementale entre les autorités fédérales, provinciales, territoriales et locales dans des domaines comme l'accès aux soins de santé, à l'éducation et à la garde d'enfants.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    Madame Winger, à vous la parole.
     Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui.
    L'Union des employés de la Défense nationale de l'Alliance de la Fonction publique du Canada représente les 20 000 travailleurs civils de la Défense. Nos membres veillent à ce que les opérations militaires soient prêtes en tout temps et à ce que les militaires vivent et travaillent dans des endroits sûrs. Nos membres sont des experts qui travaillent dans les bases et dans les bureaux, dans les entrepôts, dans les aéroports, dans les laboratoires et dans les garages. Ils fournissent des services cohérents et éclairés afin que les militaires puissent servir avec agilité et qu'ils soient prêts au combat.
    La privatisation, la sous-traitance, l'inconduite sexuelle, le harcèlement et la discrimination sous-tendent le travail de nos membres et nuisent à leur satisfaction professionnelle.
    Notre rapport de 2020 soulignait les dangers de la sous-traitance des services de nettoyage. Nous y avons souligné que leur manque de marge de manœuvre budgétaire oblige les commandants des bases à sous-traiter régulièrement des travaux essentiels à des coûts plus élevés pour obtenir des services de moindre qualité. Par exemple, voici une citation tirée d'une note d'information du MDN à Kingston:
On a constaté que, pour augmenter leur marge de profit, les sous-traitants utilisaient des produits nettoyants de qualité inférieure ou inadéquate, ce qui occasionnait de l'entretien supplémentaire, des problèmes environnementaux et des problèmes de santé et de sécurité.
    Le contrat signé avec le Groupe Dexterra à Kingston s'élève à un peu plus de 3 millions de dollars sur six ans. C'est moins de la moitié de ce qu'il faudrait pour payer les travailleurs au salaire minimum. Il est donc bien évident que cela entraînera de mauvais services.
    Notre rapport décrit également la situation d'une travailleuse contractuelle rémunérée au salaire minimum qui a nettoyé un centre médical du MDN. Pendant la plus grande partie de son emploi, elle n'avait reçu aucune formation sur le SIMDUT et elle ne savait pas que les produits chimiques qu'elle utilisait pouvaient lui nuire et faire du tort à d'autres personnes. On lui avait ordonné de diluer les solutions de nettoyage, et elle devait nettoyer des zones sécurisées sans posséder la cote de sécurité requise. Sans qu'elle n'en soit coupable, son travail a compromis la santé des patients et des autres travailleurs. Elle a fini par quitter cet emploi pour un travail mieux rémunéré avec avantages sociaux dans un restaurant-minute.
    Le MDN doit cesser de recourir à la sous-traitance et rapatrier les services contractuels existants. On ne devrait recourir à la sous-traitance que très rarement pour des raisons bien explicites et détaillées.
    Un harcèlement systémique est enraciné au sein du MDN, et il ne se limite pas aux militaires.
    L'une de nos membres, Kristina MacLean, a subi du harcèlement sexuel et racial continuel pour lequel elle a déposé de nombreux griefs et des plaintes. Elle a gagné, ce qui n'a fait qu'accroître le harcèlement dont elle était victime. Mme MacLean explique que les gestionnaires ont peur de reconnaître les actes d'inconduite, parce qu'ils craignent que cela bloque leurs promotions. Ils font disparaître les problèmes, et ils ont essayé de la faire disparaître elle aussi.
    La culture des casernes de pompiers est tout aussi toxique.
    Les pompiers de la base des Forces armées canadiennes de Valcartier ont déposé neuf plaintes pour violence en milieu de travail, dont huit ont donné lieu à des plaintes. Des pompiers de la base de Suffield ont accusé le chef adjoint des pompiers d'user de violence sous les yeux du chef de la caserne, qui observait, les bras croisés. Les plaintes de 2019 ne sont pas encore réglées.
    Notre syndicat travaille à l'enquête sur l'inconduite sexuelle et sur le harcèlement en milieu de travail menée par l'ancienne juge de la Cour suprême Louise Arbour. L’hon. Anita Anand a présenté des excuses pour cela, et nous l'en félicitons. Nous appuyons sa mise en œuvre de la recommandation initiale de Mme Arbour exigeant que tous ces incidents fassent l'objet d'une enquête et de poursuites dans le système de justice civile.
    Le MDN doit maintenant accélérer les enquêtes en cours. Il doit faire respecter les politiques en matière de harcèlement et veiller à ce que ceux qui commettent ces mauvais traitements en subissent les conséquences. Il doit inclure les travailleurs civils dans tous les aspects des examens qu'il mène sur les systèmes actuels.
    Quant à la satisfaction professionnelle, les écarts salariaux constituent un problème majeur, car les travailleurs opérationnels du MDN sont moins bien payés que leurs homologues du secteur privé.
     Par exemple, les pompiers du MDN gagnent environ 20 % de moins que leurs homologues municipaux. Les pompiers du MDN effectuent un éventail beaucoup plus vaste de tâches de sécurité et de sûreté, plus vaste que les tâches d'un pompier municipal de première classe. Ils ne reçoivent pas non plus la retraite anticipée qui est offerte à presque tous les pompiers des autres administrations.
(1555)
     Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Madame Findlay, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus.
    Monsieur Leuprecht, vous avez parlé d'élargir le bassin de talents des FAC et d'affecter les bonnes personnes aux bons postes. Pensez-vous que l'universalité du service devrait encore être un critère d'admission aux postes spécialisés en TI, par exemple?
    À mon avis, dans le domaine cinétique, l'universalité du service demeurera indispensable, parce que le fait de déployer certaines personnes et d'autres pas risque de nuire au moral du personnel.
    Mais il y a, par exemple... Vous avez parlé des TI. C'est un défi très particulier, parce que nous avons maintenant un cybercommerce du côté militaire, mais nous n'avons pas de cybercommerce équivalent du côté civil. Le ministère cherche d'autres solutions, mais nous avons besoin de ce côté civil, car il nous permettra d'attirer des personnes qualifiées qui ne veulent pas nécessairement se joindre à l'armée.
    Il y a certaines tâches que seuls des militaires peuvent accomplir, mais nous pourrons compenser certaines lacunes si l'on nous accorde la souplesse de créer des métiers équivalents du côté civil. Il faut aussi prévoir davantage de mutations latérales pour que les gens puissent passer d'un ministère à un autre à ces mêmes postes et qu'ils puissent venir du secteur privé au ministère avec la permission de le quitter pour aller travailler ailleurs.
    Nous ne sommes pas très agiles dans ces domaines.
    Selon vous, qu'est‑ce qui attire des recrues dans les Forces canadiennes?
    Excusez-moi, je n'ai pas entendu la première partie de la question.
    Selon vous, qu'est‑ce qui incite les gens à s'engager comme recrues dans les Forces canadiennes? Qu'est‑ce qui les incite à s'inscrire?
    À mon avis, les Forces armées canadiennes sont un employeur de choix, et les chiffres le démontrent. Chaque année, de 35 000 à 65 000 personnes se présentent, et environ 5 000 d'entre elles sont embauchées.
    Je dirais que l'organisme a une bonne réputation auprès du public et que les gens s'y joignent pour un vaste éventail de raisons. L'essentiel est de veiller à ce qu'il représente bien la société qu'il sert, particulièrement les groupes sous-représentés.
    Nous savons que les Forces armées canadiennes ont fait des progrès, en particulier face aux groupes de minorités visibles et aux peuples autochtones, mais en examinant les analyses les plus récentes, on constate que l'attrait de l'organisme chez les femmes pose encore de grands défis.
(1600)
    Il semble que pendant la guerre en Afghanistan, nous réussissions bien à recruter de jeunes Canadiens. Selon vous, qu'est‑ce qui les motivait?
    Je pense que les Forces armées canadiennes sont l'outil de politique étrangère le plus important du gouvernement. Je ne suis pas sûr que les Canadiens ou même les gens de la Colline comprennent cela.
    En Afghanistan, je crois qu'il s'agissait de l'attention que le gouvernement portait aux Forces armées canadiennes en les considérant comme un instrument de politique et de pouvoir national. Il appuyait ses Forces armées canadiennes et les considérait comme une priorité stratégique.
    Je pense que les gens veulent se joindre à un employeur soutenu par le gouvernement au pouvoir. Je pense qu'il est essentiel que la défense soit considérée comme une priorité absolue en tout temps, quelle que soit l'allégeance politique du gouvernement, du Cabinet du premier ministre et du cabinet. Je ne suis pas certain que les Canadiens remarquent toujours cela dans les politiques gouvernementales.
    Selon vous, qu'est‑ce que les FAC et la Défense nationale pourraient faire de plus pour attirer les femmes, les Autochtones, les membres de la communauté LGBTQ+ et les membres des minorités ethniques? Que peuvent-elles faire pour mieux pour les attirer?
    Il nous faut un mécanisme de recrutement et d'établissement de relations très ciblé. Malheureusement, les Forces canadiennes ne sont pas vraiment présentes dans les régions de forte croissance démographique ainsi que dans les groupes sous-représentés du bassin de recrues des Forces armées canadiennes en général. Cela est dû en partie au fait que nous n'avons pas de bases dans la plupart des grands centres urbains du Canada.
    Il nous faut une approche à long terme beaucoup plus ciblée, beaucoup plus systématique pour établir ces relations. La Réserve joue un rôle important en éduquant les Canadiens, notamment ce bassin de recrues, sur l'organisme et sur les occasions qu'il leur offre. J'ai bien l'impression que la plupart des Canadiens ne connaissent pas du tout le fonctionnement du gouvernement fédéral et encore moins celui des Forces armées canadiennes. Il est peu probable que les gens qui vivent à Toronto, à Vancouver ou à Montréal aient rencontré quelqu'un qui travaille pour le gouvernement fédéral, et encore moins pour les Forces armées canadiennes.
     Merci, madame Findlay.
    Monsieur Fisher, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos deux témoins de leur présence et de leurs témoignages d'experts.
    Professeur, je suis très heureux que vous témoigniez pour cette étude, parce que vous avez beaucoup contribué à celle que nous venons de terminer.
    J'aimerais parler de l'universalité du service. Je sais que ma collègue, Mme Findlay, en a aussi parlé. Vous avez parlé de « moderniser le modèle ». Je vais vous lire un extrait des Directives et ordonnances administratives de la défense. Je pense que la modernisation du modèle contribuerait à résoudre notre problème de recrutement.
Le principe de l'universalité du service [...] sous-entend que les militaires doivent exécuter les tâches militaires d'ordre général ainsi que les tâches communes liées à la défense et à la sécurité en plus des tâches de leur groupe professionnel militaire ou de leur description de groupe professionnel militaire. Entre autres, les militaires doivent être en bonne condition physique, aptes au travail et déployables pour aller effectuer des tâches opérationnelles générales.
    Quels défis cela pose‑t‑il pour le recrutement et le maintien des effectifs, monsieur?
    Malheureusement, l'organisme ne savait même pas exactement quelles étaient ses failles, et encore moins comment y remédier. Il a maintenant la capacité analytique de déterminer où trouver ces employés et lesquels il lui faut.
    Le recrutement et le maintien des effectifs posent des défis très particuliers. Ce sont les deux premiers piliers du nouveau parcours des FAC, parce qu'ils soutiennent tout l'organisme, et à l'heure actuelle, ils sont plus vulnérables que jamais.
    Je dirais que ce problème découle du fait que pendant 20 ans, le gouvernement s'est concentré sur les opérations et a poussé les Forces armées canadiennes à participer à des opérations sans mettre... L'organisme est trop petit pour mener en même temps d'importantes opérations, du maintien et de l'entretien ainsi que pour procéder à une régénération majeure. Voilà pourquoi le gouvernement a dû se concentrer sur les opérations. Il n'a investi ni dans la régénération, ni dans le maintien, ni dans l'entretien.
    Je supplie donc le Comité de surveiller cela, car les Forces armées manquent de personnel clé, et cela entrave gravement leur capacité de répondre aux demandes du gouvernement lorsqu'elles sont appelées à intervenir dans des opérations critiques et complexes.
(1605)
    Professeur, en écoutant votre déclaration préliminaire, je voulais vous poser une question sur la résistance au changement. Notre société résiste au changement. Vous avez parlé de problèmes qui nuisent au moral. Parliez-vous du fait que, si nous supprimions la condition physique ou différents aspects de l'universalité du service...? Pourriez-vous nous parler un peu de l'incidence que la résistance au changement pourrait avoir sur le recrutement et sur le maintien des effectifs?
    Les militaires aiment dire qu'on ne naît pas soldat, on le devient. Je pense qu'à bien des égards, cela s'applique aussi aux Forces armées canadiennes modernes, et même davantage à l'heure actuelle, parce que l'organisme doit entraîner les personnes dont il a besoin, il doit concevoir leur formation, qui est parfois très longue. La formation complète d'un officier peut exiger jusqu'à sept ans, et parfois plus suivant le métier dont il s'agit. L'officier doit acquérir cette expérience.
     Je pense que les gens ne comprennent souvent pas que l'on peut en quelque sorte appauvrir l'organisme. Il faut que son personnel, qui possède une expérience cinétique et une expérience de déploiement à l'étranger, soit par exemple en mesure de combler une très faible capacité de livraison de vaccins ou la prestation de services dans des établissements de soins de longue durée, ou de régler tout autre problème que le gouvernement pourrait confier à ses forces armées.
    Je pense que l'organisme a la capacité d'accueillir des personnes qui veulent s'y joindre, mais qui, par exemple, n'ont pas la condition physique, les aptitudes mathématiques requises, ou autre. Malheureusement, il n'a pas pu accorder suffisamment d'attention et de ressources à ces personnes, parce qu'il devait attirer tout le monde qu'il pouvait vers le côté opérationnel.
    C'est tout à fait faisable, mais il s'agit de savoir comment répartir les maigres ressources de l'organisme, surtout pour soutenir les ressources humaines et les officiers subalternes qui effectuent le gros du travail, tant du côté des opérations que de l'instruction et de la formation.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins de leur présence. Nous en sommes toujours très heureux.
    Je vais d'abord m'adresser au professeur Leuprecht.
    Je vais poursuivre dans la même veine, sur la question de l'universalité. À l'avenir, nous aurons probablement de plus en plus besoin des services des Forces pour répondre aux urgences climatiques; c'est ce que l'on a vu par le passé. Bien sûr, il y a eu la COVID‑19, mais il y a aussi eu des incendies et des inondations, entre autres.
    Serait-il pertinent, à tout le moins, d'étudier l'idée de mettre sur pied une organisation paramilitaire ou une forme de milice qui serait affectée spécifiquement à ce genre de réponse? Cela pourrait même intéresser certaines personnes, qui ne désirent pas participer aux combats, par exemple, ce qui pourrait être positif sur le plan du recrutement.
    Selon vous, devrait-on creuser cette possibilité?
    Madame Normandin, il s'agit d'une excellente question.
     Je vais faire parvenir au Comité une étude que j'ai menée à ce sujet.
     Il y a quatre options à cet égard.
    Premièrement, il y a l'option américaine. On pourrait créer un organisme comme la Federal Emergency Management Agency, la FEMA, qui est une vaste bureaucratie qui coûte très cher et qui tourne très lentement. J'imagine que c'est approprié dans le cas des États‑Unis, mais il y a de bonnes raisons pour lesquelles d'autres alliés n'ont pas adopté ce système.
    Deuxièmement, on pourrait avoir des organisations qui répondent aux urgences. Par exemple, l'Australie et une bonne partie des pays européens ont des services d'intervention d'urgence. À moyen terme, nous pourrions établir une telle organisation au Canada, mais, à court terme, cette infrastructure n'existe pas. Depuis des années, j'insiste sur le fait que ce genre d'infrastructure est indispensable.
    Présentement, lorsqu'on fait appel aux Forces armées canadiennes pour des déploiements nationaux, les ressources sont disponibles; nous avons ce luxe. Cependant, si une vaste crise internationale survenait et que nous avions besoin des forces pour protéger nos alliés, notre pays et le continent, ce genre de ressource ne serait plus disponible. Il est donc indispensable que les provinces créent des organismes qui pourront fournir des bénévoles et de la main-d'œuvre qualifiée.
    La troisième option est celle que nous avons adoptée, c'est-à-dire l'augmentation des ressources et de l'expertise de la Croix‑Rouge canadienne. Or cela a aussi ses limites. En effet, l'effectif de la Croix‑Rouge a des spécialisations limitées. La Croix‑Rouge doit avoir un effectif dont les spécialisations sont plus larges, afin de répondre aux exigences que vous avez énoncées.
    La quatrième option, que j'ai présentée dans mon étude, est celle que je préfère. Elle consiste à créer une unité d'environ 2 000 personnes au sein des Forces armées canadiennes. Cette unité serait consacrée au déploiement national et s'occuperait d'atteindre les objectifs que vous avez énumérés. Si l'on n'a pas besoin de mobiliser cette unité pour un déploiement national, elle pourrait participer au développement des communautés autochtones du Grand Nord. D'une part, une telle unité pourrait améliorer la capacité de réponse du Canada aux exigences nationales; d'autre part, elle pourrait être un complément aux efforts de développement des communautés du Grand Nord. Le Grand Nord a besoin des effectifs et des ressources dont seules les Forces armées canadiennes disposent.
(1610)
    Merci beaucoup.
    Je vais lire avec intérêt les documents que vous voudrez bien nous faire parvenir.
    Considérant que les ressources opérationnelles sont limitées, je comprends que nous avons redirigé les Forces attitrées au recrutement vers tout ce qui touche davantage à l'aspect opérationnel.
    Comme cela nous prive de recrues à long terme, est-ce que c'était une erreur?
    Le cas échéant, devrait-on corriger le tir? Les forces qui ont été redirigées vers le plan opérationnel devraient-elles être redirigées vers le recrutement?
    Je vous dirai, madame, que les forces sont maintenant concentrées de façon très forte sur la régénération des Forces armées canadiennes. C'est un effort énorme.
    Le problème, c'est que le manque d'effectif fait que d'autres aspects des Forces armées canadiennes sont négligés. Il faut toujours se concentrer sur un aspect ou un autre.
    En ce qui concerne la régénération, on est à un moment critique. En effet, on risque de casser l'organisation si l'on ne réussit pas. L'un des problèmes est certainement que l'on n'a pas assez de ressources et d'effectifs, mais je dirai aussi que les procédures sont très compliquées. Avant qu'une personne soit embauchée dans les Forces armées canadiennes, il faut en moyenne 200 jours.
    Comment peut-on être compétitif? Même si des candidats veulent présenter leur candidature, on ne peut pas s'attendre à ce qu'ils ne puissent pas payer leur loyer pendant 200 jours. Ils vont accepter un autre emploi dès qu'on leur en proposera un.
    D'une part, une bonne partie de ces procédures doivent être mises à jour; d'autre part, il y a aussi des politiques qui sont imposées à l'organisation par les gouvernements et par les organismes centraux.

[Traduction]

     Nous allons devoir nous arrêter ici, malheureusement, madame Normandin.
    Je prends note de l'étude dont vous avez parlé, monsieur Leuprecht. Si vous ne l'avez pas déjà présentée lors de vos comparutions devant le Comité, je suis sûr que nous serions reconnaissants d'en obtenir une copie. Merci.
    Vous avez cinq minutes, madame Mathyssen.
    Madame Winger, vous avez beaucoup parlé de la sous-traitance des travaux dans les bases. Vous nous avez donné quelques exemples, un sur les conditions de vie inadéquates dues à un mauvais service de nettoyage et un autre sur le nettoyage d'installations médicales.
    Pouvez-vous nous donner d'autres exemples ou nous en dire plus sur l'incidence qu'a la sous-traitance sur la santé et la sécurité des travailleurs du MDN et des FAC?
     Je vous remercie pour cette question.
    Certainement. Je peux vous donner un exemple qui remonte à l'éclosion de la pandémie. Je peux vous dire que le ministère de la Défense nationale a travaillé très fort pour assurer la sécurité de tous les employés et les militaires. Nous avons vraiment bien collaboré. Il y a eu beaucoup de consultations et nous avons mis en place tous les processus nécessaires pour traiter la sécurité en priorité absolue.
    Il n'en a pas été de même pour les employés contractuels. Je peux vous parler d'employés contractuels d'une base en particulier que l'on a obligés à continuer de travailler. On leur a confié des tâches qui ne faisaient pas partie de leurs tâches habituelles, car celles‑ci n'étaient plus nécessaires à cause de la diminution de l'effectif due à la pandémie. On ne leur a pas donné d'équipement de sécurité. Ces employés, ces entrepreneurs, mettaient leur vie en danger, et ils mettaient littéralement la vie des employés de la Défense nationale et des militaires en danger en risquant de les contaminer. Si l'un d'eux avait été infecté, le virus se serait vite propagé.
    Nous avons dû travailler très fort avec le ministère de la Défense nationale et avec les entrepreneurs pour régler ce problème. Dans la plupart des cas, nous avons réussi, mais pas partout. Nous avons eu beaucoup de chance que cette situation n'ait pas produit de répercussions catastrophiques.
(1615)
    Évidemment, cela aurait nui au moral des soldats et des travailleurs.
    Pouvez-vous nous parler de l'incidence que cela aura sur le maintien des effectifs dans le cadre de notre étude?
     Certainement.
    Nos collègues en ont été scandalisés. À la Défense nationale, nous formons une famille. Nous collaborons très étroitement. Que nous soyons entrepreneurs [difficultés techniques] ou militaires, nous faisons tous partie d'une même équipe de travail.
    Nos collègues étaient très évidemment scandalisés en voyant un groupe si mal traité par rapport aux autres. Cette situation a été très difficile pour tout le monde, pas seulement pour les entrepreneurs. Nos employés ne voulaient pas annoncer aux entrepreneurs qu'ils ne pourraient plus venir travailler. Ils ne voulaient pas porter plainte, mais leur inaction mettait leur propre santé en péril.
    Les taux de sous-traitance et de privatisation ont considérablement augmenté. Pouvez-vous nous expliquer exactement pourquoi? Je crois que vous avez parlé des changements apportés aux budgets et de la façon dont les bases sont gérées, mais pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
     La Défense nationale a des enveloppes salariales. Cet argent est imparti au ministère pour qu'il puisse conserver ses fonctionnaires. Cependant, il reçoit aussi de l'argent pour son budget de fonctionnement et d'entretien, et cette somme est souvent plus élevée. Pour répondre aux besoins, il est donc plus facile de sous-traiter le travail avec cet argent disponible plutôt que de trouver des moyens d'augmenter le nombre d'employés. On se retrouve alors — comme le témoin précédent l'a souligné — face à d'énormes lacunes en milieu de travail et l'on devient très dépendant des entrepreneurs auxquels on confie les tâches.
    Cela ne fonctionne pas toujours. En fait, cela ne fonctionne que rarement. Ce n'est certainement pas la façon la plus rentable de procéder. Nous finissons habituellement par payer plus cher et nous n'obtenons pas les services dont nous avons besoin, certainement pas quand nous en avons besoin.
     Merci, madame Mathyssen.
    Madame Mathyssen, si vous me le permettez, je siège actuellement à un comité d'embauche de professeurs au Collège militaire royal. Dans une université civile, il faut trois mois pour embaucher un prof. Au Collège militaire, le processus éclair dure 18 mois. Il est donc six fois plus long. Je tenais à le souligner.
    Merci. C'est de l'embauche éclair.
    Monsieur Motz, vous avez quatre minutes pour le deuxième tour.
    Merci, monsieur le président.
    Dans l'équipe tactique, nous appelions ces éclairs de la « munition traumatisante », et je ne veux pas rappeler les souvenirs de ces sons et lumières.
    Monsieur Leuprecht, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé du « chaînon manquant ». Vous avez expliqué que nous devons régler ce problème sans tarder. Comment régler ce problème rapidement? Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure ce chaînon manquant nuit à la capacité qu'ont nos militaires de protéger le pays?
    Il comprend les cadres subalternes et les gestionnaires qui, en fin de compte, font avancer l'organisme. Ils constituent le fondement sur lequel reposent les opérations. Ils effectuent une grande partie du maintien et de l'entretien. Ils participent activement à la régénération des Forces armées canadiennes. Cette pénurie assujettit ceux qui restent à des pressions et à une charge croissantes. Ce problème est très grave, parce qu'en plus de tous les autres défis à relever en servant la famille des FAC, les membres de ce chaînon manquant subissent une pression énorme.
    Comment protéger ce chaînon manquant? Comment faire progresser ces personnes? Comment veiller, à mesure que nous prenons du retard, à établir une stratégie systématique de remplacement des membres de ce chaînon manquant? Nous nous trouvons dans cette situation précisément parce que nous n'avions pas les ressources, le temps et les capacités nécessaires pour nous concentrer sur la régénération. Nous nous sommes servis de ce chaînon manquant pour nous concentrer de façon disproportionnée sur la réalisation des opérations du gouvernement du Canada. Cela nous a réussi pendant une brève période, mais au bout d'un certain temps, nous avons épuisé l'organisme.
    En raison de la pandémie... Ce n'est pas un manque de recrutement en tant que tel. Il y a un manque de formation, car en 2021, l'organisme n'a attiré que la moitié des candidats qui se présentent normalement — non pas par manque d'intérêt, mais parce qu'il n'avait pas la capacité de recruter et de former ces gens. La pandémie a aggravé ces difficultés.
(1620)
    Merci, professeur.
    Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il faut revoir et repenser la façon dont nous déployons le personnel des Forces canadiennes. Quand je parle à des jeunes de ma circonscription et à des gens qui s'intéressent aux Forces armées canadiennes, ce qui les attire le moins est la concentration excessive sur les urgences nationales où nous envoyons actuellement nos soldats. J'ai beaucoup aimé certaines de vos réflexions.
    Si vous étiez aux commandes, professeur, quelle serait la chose la plus importante, la chose que vous envisageriez de recommander au Comité qui aurait une incidence sur l'augmentation du recrutement et du maintien des effectifs? Que feriez-vous?
    Heureusement, monsieur Motz, je suis professeur, alors personne ne me confiera la responsabilité de quoi que ce soit. C'est la chose [inaudible] au sujet de l'organisme.
    Vous êtes un homme honnête.
     Écoutez, j'ai toute l'admiration du monde pour les nombreuses personnes qui essaient de faire fonctionner ce système, mais je pense qu'il faut beaucoup trop de temps pour y intégrer les gens et pour les former. Les commentaires de Mme Winger sont vraiment importants, parce que n'oublions pas que pour donner cette formation, il faut des installations adéquates. Bon nombre de ces installations... Prenez le cas du MDN et de ses centaines d'immeubles et de ses milliers de kilomètres de routes. Pensez aux ponceaux de Gagetown qui dataient de 50 ans et qui ont été emportés en 2015 ou en 2016 — je l'ai mentionné dans mon témoignage la semaine dernière —, ce qui a mis en péril les opérations d'entraînement à Gagetown pendant plus d'un an.
    Nous avons besoin des cuisiniers. Il nous faut justement les gens qui font partie de l'organisation de Mme Winger. Il nous faut les chauffeurs d'autobus qui transportent les gens de leurs dortoirs aux activités d'entraînement. Voilà où réside la grave pénurie de personnel dans notre système de formation.
    Merci, monsieur Motz.
    Madame Lambropoulos, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos deux témoins d'être ici aujourd'hui pour répondre à certaines de nos questions.
    Monsieur Leuprecht, vous nous avez dit que bon nombre des politiques de recrutement et de maintien des effectifs actuelles sont désuètes. Pourriez nous préciser lesquelles, selon vous, devraient être éliminées, et êtes-vous au courant de bons systèmes de recrutement et de maintien en poste en vigueur à l'étranger, systèmes que nous devrions examiner dans le cadre de cette étude?
    Il ne s'agit pas tant de savoir quelles politiques doivent être éliminées, mais plutôt si nous avons la capacité de... Si vous mettez des gens dans le système de formation, ce ne sont pas eux qui vont moderniser vos politiques. C'est en partie une question de dotation; il n'y a pas tant de monde qui puisse faire ce travail. Je me ferai un plaisir de fournir plus de détails au Comité par la suite.
    Il y a littéralement des centaines de politiques à mettre à jour. Ce n'est pas que l'organisation ne veut pas le faire, c'est qu'elle n'a pas le personnel pour le faire. Et quand on les met à jour, il faut des mois ou des années pour les faire passer à travers le système, les organismes centraux.
    C'est pourquoi je disais que vous devez exhorter le Conseil du Trésor et la présidente du Conseil du Trésor à traiter en priorité les mémoires qui leur sont présentés par le ministère de la Défense nationale. Cela ne peut pas prendre des semaines ou des mois pour passer à travers le système, parce que cela le met encore plus en danger.
    Les conditions d'emploi varient d'un pays à l'autre, alors il n'est pas si facile de faire des comparaisons. On peut s'inspirer, par exemple, d'un pays comme la Suède, qui a fait des efforts considérables récemment pour reconstituer ses effectifs. C'était déjà avant l'invasion russe en Ukraine.
    Je pense que nous devons nous tourner vers des pays qui ont des valeurs et des objectifs semblables aux nôtres. Par exemple, les Pays-Bas passent souvent inaperçus dans le tourbillon de la conversation. On peut penser aussi à l'Australie, qui a toujours dépensé 2 % de son PIB. Elle représente environ les deux tiers de notre population et les deux tiers de notre économie, mais en raison du contexte de sécurité dans lequel elle doit évoluer, avec la moitié de la population mondiale qui est concentrée à moins de 500 milles de ses côtes, elle porte une attention beaucoup plus serrée que nous à ces questions.
(1625)
    Pouvez-vous aussi nous dire un peu [difficultés techniques] s'il faudrait faire preuve d'un peu plus de souplesse à l'égard des résidents permanents? Dans certaines conditions, ils arrivent à s'enrôler dans les forces armées, mais en général, c'est réservé aux citoyens canadiens.
     Pensez-vous que si le Canada se montrait un peu plus ouvert et qu'il permettait à un plus grand nombre de résidents permanents de s'enrôler, nous aurions moins de problèmes, un peu plus d'intérêt, ou du moins plus de facilité à recruter?
    Il y a certainement des pays où le statut de résident permanent permet d'accéder plus rapidement à la citoyenneté. Tant que cela ne compromet pas la capacité d'obtenir les cotes de sécurité nécessaires et d'évaluer correctement la résilience des personnes qui se joignent à nous, je serais certainement en faveur d'accorder rapidement la citoyenneté canadienne aux gens qui se montrent fidèles à notre pays en servant dans nos forces armées.
    Je ne sais pas combien de temps il me reste, monsieur le président.
    Votre temps est écoulé.
    Merci beaucoup, monsieur Leuprecht.
    Madame Normandin, vous avez une minute.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma question, cette fois-ci, s'adresse à Mme Winger.
    Cette semaine, une des témoins a mentionné que, dans la mesure où les gens quittent les forces armées, on leur accorde souvent la priorité pour occuper des postes dans les organisations paramilitaires et dans le secteur public. Or ils amènent parfois avec eux la culture toxique que nous observons présentement au sein des forces armées.
    En premier lieu, j'aimerais savoir si vous observez le même phénomène.
    Ensuite, croyez-vous que le fait de lutter contre les milieux toxiques au sein des forces armées aura éventuellement un effet positif aussi sur le secteur de la défense, sur les organisations paramilitaires et sur la fonction publique?

[Traduction]

    C'est une question très intéressante que vous soulevez, et c'est évidemment une situation très complexe.
    Il est presque impossible d'éradiquer les comportements acquis dans un milieu de travail toxique. On ne peut pas donner de la formation à des gens qui ont ces comportements et ces idées et espérer [difficultés techniques] voir la lumière et changer leurs façons de faire. Ce sont généralement des traits innés chez les gens.
    Peu importe pour quelle raison ils quittent l'armée, s'ils présentent ces traits, ils finissent souvent par obtenir la préférence pour les postes de la fonction publique. La Défense nationale est très favorable à l'embauche d'anciens militaires, et c'est normal. Le problème, c'est que lorsqu'on adhère à ces idéologies, c'est comme si on portait un uniforme caché. Ces gens‑là arrivent avec les mêmes croyances, dans un environnement où ils sont très à l'aise, où les choses leur sont familières et où ils ont le soutien de militaires en exercice. On voit bien qu'ils se soutiennent les uns les autres lorsqu'ils sont au travail.
    Bien sûr, il y a une hiérarchie à l'intérieur de cela, mais...
     Madame Winger, nous allons devoir en rester là parce que c'est une question très complexe, comme vous l'avez si bien dit. Vous pourrez peut-être y revenir en répondant à une autre question.
    Madame Mathyssen, vous avez une minute.
    Madame Winger, je voulais vous demander en quoi la privatisation dont vous parliez tout à l'heure — la sous-traitance — influe sur la transparence et la sécurité nationale du travail de vos membres?
(1630)
    Encore une fois, c'est une question très difficile.
    En quoi est‑ce que cela influe sur la sécurité du travail? Il y a beaucoup de choses en jeu. Nous comptons bien que les sous-traitants vont respecter les règles, mais ils n'ont pas les mêmes objectifs que les employés de la Défense nationale. Les employés veulent que la Défense nationale fonctionne. Ils veulent que l'entreprise soit couronnée de succès. Ils veulent servir les Canadiens. Les sous-traitants veulent faire de l'argent. Ils veulent des bénéfices auxquels faire participer leurs actionnaires. Ils veulent augmenter les revenus des propriétaires. Voilà ce qu'ils veulent.
    Quand on a des objectifs aussi différents à concilier, cela ne fonctionne pas nécessairement. On finit par couper les coins ronds. Je vous ai parlé d'un centre médical de la Défense nationale. Il y a des employés qui diluent les produits de nettoyage, au point de les rendre inefficaces. Ils n'ont pas les connaissances que la formation devrait leur apporter. On voit cela tout le temps. Je dirais...
    Je suis désolé, madame Winger. Je semble avoir la tâche de vous interrompre. C'est parce que mes collègues posent des questions compliquées et vous demandent d'y répondre en 30 secondes. C'est entièrement de leur faute.
    Monsieur Schmale, vous avez quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur témoignage d'aujourd'hui.
    Je ne suis pas un membre régulier du Comité, alors je m'excuse si certaines questions ont déjà été posées.
    Ma première s'adresse à M. Leuprecht. Êtes-vous au courant de répercussions que la politique de vaccination obligatoire a pu avoir sur le recrutement et la rétention au sein des Forces armées canadiennes?
    Pour autant que je sache, avec les chiffres dont je dispose — il faudrait vérifier auprès du Groupe de la génération du personnel militaire —, la politique n'a pas eu d'incidence sur le recrutement. Il semble que la propension à l'intérêt soit restée la même. L'incidence sur l'attrition a été plutôt négligeable dans l'ensemble. C'était gérable pour l'organisation.
    Je pense que c'est vraiment une question de résilience de l'organisation. S'il y a de grands pans de l'organisation qui ne fonctionnent pas, on ne peut pas répondre aux besoins des Canadiens. C'est comme cela qu'il faut comprendre la question de la vaccination.
    Merci beaucoup, monsieur Leuprecht.
    Je vais changer un peu de sujet. D'après vous, y a‑t‑il moyen de changer pour le mieux la culture militaire sans éliminer l'éthos du soldat, du marin ou même du guerrier?
    Je pense qu'il y a déjà des changements appréciables. Vous verrez bientôt paraître le nouveau manuel de la profession des armes, intitulé en anglais CAF Ethos: Trusted to Serve. Vous verrez le chemin parcouru par les Forces armées canadiennes, la nouvelle stratégie en matière de santé et de bien-être.
    Je crois que la grande majorité des femmes, des hommes et des personnes issues de la diversité dans les Forces armées canadiennes veulent un changement de culture et sont déterminés à l'appuyer. L'important est de s'assurer d'avoir des politiques qui peuvent être mises en œuvre et appliquées concrètement, et qui sont élaborées en consultation avec les parties concernées et les experts, au lieu de partir d'en haut.
    Merci, monsieur Leuprecht.
    Il n'y a pas si longtemps, selon les chiffres que j'ai devant moi, 20 % ou plus des membres de la force régulière étaient recrutés dans le Canada atlantique. Le pourcentage est‑il resté à peu près le même, autour de 20 % des membres des Forces armées canadiennes?
    Je vous laisse répondre d'abord, avant de passer à ma deuxième question.
    Je pourrais vous obtenir les chiffres. Je ne les ai pas avec moi. Le Groupe de la génération du personnel militaire les a.
    Bien sûr, systématiquement, c'est un problème pour l'organisation, parce qu'il y a un déclin démographique important dans le Canada atlantique, et des enjeux démographiques aussi au Québec, ce qui amène un tout autre débat sur le maintien du bilinguisme au sein du gouvernement fédéral et des Forces armées canadiennes.
(1635)
     Combien de temps me reste‑t‑il, monsieur le président?
    Il vous reste une minute.
    Parfait.
    Monsieur Leuprecht, vous en avez parlé un peu plus tôt dans vos observations, ainsi que dans votre déclaration préliminaire. Pouvez-vous revenir sur un changement ou une recommandation, peut-être la plus importante à vos yeux, qui aurait pour effet d'augmenter le recrutement?
    Comprendre quels sont les besoins pour être en mesure de répondre aux attentes du gouvernement. Je crois qu'à l'heure actuelle, il y a une discordance entre les processus de reddition de comptes et de transparence, d'une part, et les promesses répétées des politiciens de pourvoir aux besoins de l'armée, de fournir les effectifs et tout le nécessaire. Je ne pense pas que les politiciens puissent faire de telles promesses en sachant très bien que les processus et l'appareil bureaucratique ne sont tout simplement pas en mesure d'y répondre.
    Je vais vous donner l'exemple des opérateurs de sonar. Nous construisons des navires qui coûtent extrêmement cher. Or, si nous n'avons pas les spécialistes à mettre à bord de ces navires, ils vont rester à quai. Dans le cas des F‑35, nous avons un problème de taille en ce qui concerne les pilotes. Ce sont tous des métiers très attrayants. Le problème, c'est que la plupart des Canadiens n'en ont jamais entendu parler. Ils ne savent pas ce qu'est un opérateur de sonar, encore moins ce qu'il fait et en quoi c'est essentiel à la bonne marche d'un navire.
    Je pense que nous avons tous là un rôle important à jouer pour intéresser les Canadiens à leurs forces armées et les familiariser avec un employeur de choix.
    Merci, monsieur Schmale.
    En passant, je vous souhaite la bienvenue au Comité.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Spengemann, vous avez les quatre dernières minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Leuprecht, je suis heureux de vous revoir. Merci de votre présence.
    Pour commencer, j'aurais une question en rapport avec votre nomination, qui est relativement nouvelle, je crois, au conseil d'administration de l'Institut allemand d'études stratégiques et de défense. J'en profite pour vous demander s'il y a quelque chose à tirer de l'expérience des Allemands, que ce soit bon, mauvais ou horrible. Parfois, le fait de voir les mêmes problèmes ailleurs nous donne une idée de leur importance chez nous, mais il peut aussi en ressortir de bonnes choses, et peut-être même des perspectives très actuelles en ce qui concerne la guerre en Ukraine.
    Est‑ce qu'il y a quelque chose dans l'expérience allemande qui pourrait nous éclairer en ce qui concerne le bassin de talents, comme vous dites, mais aussi le processus de recrutement?
    En tout cas, en ce qui concerne l'équipement, j'ai un ami allemand qui se plaît à dire que les Allemands ont des bateaux qui ne flottent pas, des avions qui ne volent pas et des chars qui ne roulent nulle part. Je dirais que nous avons des problèmes assez semblables du côté de l'équipement.
    Chose intéressante, nous avons des problèmes comparables du côté de la dotation en personnel, mais l'organisation qui s'en occupe en Allemagne est beaucoup plus agile que celle du Canada, notamment parce qu'une grande partie de la Bundeswehr allemande fonctionne suivant un modèle d'emploi dans un organisme de défense plutôt que dans la fonction publique. Les types de contrats sont différents. Cela veut dire que même dans une société très semblable à celle du Canada, avec une méconnaissance de l'armée et peut-être même une certaine hostilité à son égard, la Bundeswehr a pu maintenir ses effectifs. Mais elle a aussi d'importants problèmes de dotation, et je pense que nous avons tout intérêt à étudier ce qui fonctionne dans des pays comparables au nôtre.
    C'est très intéressant. Merci, monsieur Leuprecht.
    Pour ce qui est des politiques de ressources humaines, on peut se tourner vers des organisations privées ou publiques qui se débrouillent très bien à ce chapitre, qui ont des taux de rétention élevés, d'excellents processus de recrutement et qui trouvent assez rapidement les gens qu'elles veulent. Il s'agit ensuite de faire la comparaison avec les politiques des Forces canadiennes et déterminer quels sont les obstacles qui tiennent à la structure même des Forces canadiennes — en raison, comme nous l'avons dit, de l'universalité du service et d'autres politiques connexes qui ne peuvent pas être éliminées — et lesquels pourraient éventuellement disparaître.
    À votre connaissance, est‑ce cela s'est fait? Est‑ce qu'on a engagé des firmes d'experts-conseils en gestion pour étudier cela, ou est‑ce que ce serait une façon d'aborder certains des sujets que vous avez mentionnés dans votre introduction?
    Monsieur Spengemann, c'est une excellente question, mais en fait, je ne suis pas certain que les Forces armées canadiennes aient besoin que plus d'experts-conseils viennent leur dire quels sont leurs problèmes et quels sont leurs défis. Elles le savent trop bien. Ce qui leur manque actuellement, à l'interne, c'est le personnel civil et militaire pour pouvoir relever tous ces défis.
    Ce dont les Forces armées canadiennes ont désespérément besoin, bien plus que d'experts-conseils, c'est d'un engagement soutenu de 15 ans de la part de tous les partis à la Chambre pour régénérer, soutenir et faire fonctionner cette organisation. J'exhorte tous les partis à unir leurs efforts lors des votes sur des décisions clés en matière de défense et à s'engager collectivement à tracer une voie d'avenir pour les Forces armées canadiennes.
     C'est comme pour une organisation du secteur privé: si on change constamment de voie ou si on ne fait pas attention, comme certains disent que c'est le cas pour cette organisation, on risque de se retrouver dans le pétrin. Maintenant que nous sommes dans le pétrin, nous avons vraiment besoin d'une attention soutenue, parce que c'en est devenu gênant auprès de nos alliés, monsieur Spengemann.
(1640)
     Entendu.
    Je prends les 30 secondes qu'il me reste pour vous demander s'il existe un livre blanc ou un document d'orientation qui traite précisément des questions de ressources humaines que vous avez soulevées. Est‑ce qu'il existe des directives? Je ne pense pas que ce soit clair pour le Comité, que ces directives existent, et que les forces armées puissent s'y référer pour modifier leurs politiques de recrutement. Est‑ce qu'il existe un tel document? Dans l'affirmative, pourriez-vous le faire parvenir au Comité?
    Répondez très brièvement, s'il vous plaît.
    Je pourrais faire parvenir des documents au Comité. Je vous encourage à faire appel au brigadier-général Brodie, au major-général Bernard, ainsi qu'aux chefs du Groupe de la Génération du personnel militaire, parce que ce sont eux qui sont ultimement responsables de tout le système des RH. Je pense que ces gens font du bon travail et qu'ils pourraient certainement bénéficier de l'attention que vous accordez à ces politiques, puisqu'au bout du compte, ce sont eux qui sont chargés de faire en sorte que ces éléments fonctionnent pour les Forces armées canadiennes.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Spengemann.
    Cela met fin à notre première heure.
    Au nom du Comité, je tiens à remercier M. Leuprecht et Mme Winger de leur contribution à cette étude et, comme toujours, de leurs excellentes observations.
    Monsieur Leuprecht, je reviens sur la remarque que vous avez faite en réponse à la question de Mme Normandin, au sujet de l'étude. Ce serait bien de fournir cette information.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance et inviter les prochains témoins à s'installer.
    Merci encore.
(1640)

(1640)
    Nous reprenons nos travaux.
    Pour notre deuxième groupe de témoins, nous accueillons Gregory Lick, ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, et Robyn Hynes, directrice générale, Opérations. Soyez les bienvenus.
    Je vous invite à faire votre déclaration liminaire de cinq minutes.
    Je vais commencer par vous, monsieur Lick.
(1645)
    Bonjour, je veux remercier le Comité de m'avoir invité pour discuter du recrutement et de la rétention du personnel dans les Forces armées canadiennes. Je suis accompagné de Robyn Hynes, ma directrice des opérations, et nous sommes ravis d'être avec vous pour la prochaine heure pour vous parler de nos constatations concernant ces enjeux, d'après ce que nous avons constaté.
    Bien que ce soit mon premier témoignage devant ce comité depuis le début de la 44e législature, j'ai déjà eu le plaisir de rencontrer plusieurs membres individuellement, et j'espère pouvoir rencontrer les autres membres du Comité prochainement.
    Comme vous devez en avoir entendu parler, les problèmes entourant le recrutement et la rétention sont causés par de nombreux facteurs.

[Français]

     Pour ce qui est du recrutement, différentes raisons peuvent inciter des personnes à choisir ou non de s'enrôler dans les Forces armées canadiennes. Ce sont aussi différentes raisons qui peuvent expliquer pourquoi les Forces armées canadiennes n'arrivent pas à recruter certains Canadiens dans leurs rangs.
    De plus, lorsqu'ils quittent les Forces armées canadiennes pour des raisons autres que médicales ou disciplinaires, les militaires le font pour diverses raisons. Cependant, si l'on regroupe ces raisons, certaines tendances se dégagent, et l'on découvre l'existence d'enjeux systémiques. Au cours des 23 années d'existence du bureau de l'ombudsman, nous avons surveillé de près ces enjeux et avons recommandé aux Forces armées canadiennes des mesures pour les résoudre.

[Traduction]

    Je tiens à aborder quelques-uns des thèmes que nous examinons ou prévoyons examiner, et qui affectent directement le recrutement et la rétention.
    En juin dernier, j'ai donné une conférence de presse pour parler des problèmes entourant l'inconduite dans les forces armées et au ministère. Pendant cette conférence de presse, j'ai déclaré que le système de redressement de griefs des Forces armées canadiennes est défaillant. Je maintiendrai cette position tant qu'on n'aura pas trouvé une solution durable à des problèmes profondément ancrés, et aux longs délais qu'ils causent, qui reviennent après chaque tentative pour éliminer rapidement les retards.
    Comme je l'ai dit à plusieurs d'entre vous, mon organisation est dans une position unique pour en juger. On nous décrit parfois comme une ressource de dernier recours. En effet, habituellement nous demandons aux plaignants d'épuiser les mécanismes du système des griefs avant de revenir nous voir, sauf en cas de circonstances urgentes. Je peux cependant affirmer que nous intervenons de plus en plus souvent tôt dans le processus de grief, et cette tendance est troublante.
    Le système de grief est le principal mécanisme de recours vers lequel un militaire des Forces armées canadiennes peut se tourner pour rectifier une injustice ou résoudre différents problèmes. Les militaires se butent toutefois à des délais importants dans le processus de grief. Pour certains, ces délais peuvent entraîner des difficultés financières, du stress physique et émotif, des relations brisées, ou pire encore. Récemment, j'ai dû intervenir dans deux dossiers de grief, le premier ayant été ouvert il y a plus de neuf ans, l'autre il y a plus de quatre ans. Depuis, mon bureau a reçu une réponse à sa demande concernant tous les griefs en retard, pour connaître les types de griefs concernés et la durée du retard. Cela brosse un portrait clair du problème en termes de nombre, mais n'explique pas les causes du problème.
    Comme je l'ai indiqué dans deux lettres adressées au chef d'état-major de la défense à la fin de 2021, je crois fermement que la solution au problème des griefs réside à la fois dans les personnes et dans le processus. Malheureusement, beaucoup de solutions qui ont été lancées au fil des décennies n'ont fait qu'augmenter temporairement le personnel afin de réduire les dossiers en retard.
    Les problèmes sous-jacents dans le système des griefs sont intimidants, mais ne rien faire pour s'y attaquer ne ferait qu'éroder davantage la confiance des militaires. Comme l'ont déjà fait beaucoup de militaires, d'autres qui ont une brillante carrière devant eux quitteront les forces armées à cause de l'inaction. Il est décourageant pour nous de continuer de signaler à la chaîne de commandement des problèmes que soulevait le premier ombudsman, entre 1998 et 2005. Le cycle se poursuit.

[Français]

    Les simples colmatages, comme s’attaquer au fait que le chef d’état-major de la défense a des pouvoirs financiers très limités lorsqu’il s’agit de redresser un tort envers un militaire, n’ont aucun sens.
    Du point de vue de la rétention du personnel, toute personne susceptible de s’enrôler devrait savoir qu’il y a un système de redressement qui fonctionne si elle devait rencontrer un problème pendant son service militaire. À l’heure actuelle, cela ne peut être garanti. Cette situation aura une incidence sur la capacité des FAC de maintenir son personnel en poste.
(1650)

[Traduction]

    Suivant le thème de la confiance, nous devons aussi rendre l'institution plus forte en garantissant l'indépendance des organismes de surveillance. Le Centre d'intervention en matière d'inconduite sexuelle, le CIIS, le bureau de l'ombudsman et d'autres autorités militaires et civiles doivent être mieux à l'abri des influences extérieures réelles ou perçues. Si aucune mesure supplémentaire n'est prise pour consolider cette indépendance, la confiance continuera de s'éroder.
    Je souhaite maintenant aborder un second thème, celui de la crise culturelle qui frappe les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale. Les histoires d'inconduite continuent de faire les manchettes. Nous savons donc que des personnes talentueuses et compétentes ont quitté les Forces armées canadiennes à cause de ces histoires, à cause d'un lien personnel avec ces histoires ou à cause de la façon dont les Forces ont réagi. Cela est difficile à mesurer, mais on peut présumer que la situation a eu une incidence sur le recrutement. La culture générale dans les forces armées, y compris ses initiatives pour promouvoir l'inclusion et la diversité dans ses rangs, continue d'en souffrir.
    Bien que nous ayons vu des changements organisationnels prometteurs comme la création du poste de chef, Conduite professionnelle et culture, nous ne voyons rien à l'horizon qui ressemble à un changement substantiel.
    Monsieur Lick, nous avons largement dépassé les cinq minutes de votre déclaration. Je vous invite à conclure, après quoi nous pourrons passer aux questions des membres.
    Très bien.
    Merci.
    Je vais donc me limiter au dernier thème, celui de la famille.
    La politique de défense du Canada, « Protection, Sécurité, Engagement », contient d'abord et avant tout des promesses envers les gens qui composent la Défense. Malheureusement, près de cinq ans après la publication de ce document, les membres de la communauté de la Défense continuent de rencontrer d'importantes difficultés sur le front intérieur. En général, les personnes qui passent par le nouveau processus de transition vers la vie civile me font part de commentaires positifs. Cependant, mon bureau continue d'intervenir dans des dossiers où un militaire n'est clairement pas prêt à quelques jours, voire à quelques heures de sa libération.
    En conclusion, nous avons besoin d'un système où les gens aient la certitude d'être traités équitablement. Nous avons besoin d'une culture de respect pour chaque personne au sein des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale, et nous avons besoin d'un soutien pour nos familles, parce qu'elles sont l'épine dorsale des forces armées qui nous servent.
    Merci, monsieur le président.
    M. May veut intervenir.
     Je suis désolé de cette interruption, monsieur le président.
    Lors des observations liminaires, l'original et l'interprétation entraient au même volume, ce qui rendait l'écoute très difficile. J'espère que nous pourrons régler ce problème à l'avenir.
    Il semble que cela ait été dû au fait que le témoin a choisi l'autre langue dans les réglages, ce qui est maintenant, semble‑t‑il, réglé. J'espère que cela fonctionne maintenant. Merci.
    Chers collègues, puisqu'un seul exposé de cinq minutes était prévu, je pense que nous pouvons entamer un tour de six minutes chacun, en commençant par Mme Findlay.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, monsieur l'ombudsman. Je suis heureuse de vous revoir.
    Je suis évidemment préoccupée par ce que vous dites au sujet du système de griefs, quand on songe qu'il faut neuf ans pour entendre un grief. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les problèmes que pose le système de règlement des griefs?
    Le principal problème qui nous est signalé à propos du système de règlement des griefs — et l'une des raisons pour lesquelles nous intervenons plus souvent et plus tôt dans certaines plaintes pour des motifs impérieux —, ce sont ces retards. On nous dit qu'il y a un problème de ressources, qu'il manque de ressources pour appuyer le système de règlement des griefs.
    Je crois sincèrement et fermement qu'il existe des problèmes systémiques sous-jacents. Premièrement, est‑ce que les gens sont responsabilisés vis‑à‑vis de l'appui à apporter au système des griefs, que ce soit au sein de la chaîne de commandement, au niveau de la première autorité responsable ou du dernier palier? Il y a là de graves problèmes, et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons décidé, dans notre plan d'enquête systémique, d'examiner les mécanismes de recours l'année prochaine afin de déterminer quels sont ces problèmes profonds qui causent ce cycle de retards qui se répète sans cesse. Chaque fois qu'on y consacre des ressources, l'arriéré diminue, mais le problème se répète ensuite.
    Il y a des problèmes systémiques et nous devons savoir lesquels ils sont.
(1655)
    J'imagine que c'est également difficile pour la santé mentale des membres et de leur famille, car l'incertitude n'est jamais bonne quand un problème surgit.
    Le MDN s'est doté d'une stratégie globale pour les familles des militaires. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet et nous dire ce que cela signifie pour les familles des militaires?
    Nous avons appuyé sans réserve la Stratégie globale concernant les familles de militaires, quand elle a été publiée et qu'on nous en a parlé, il y a environ trois ans. Tout ce que nous pouvons faire pour soutenir nos familles de militaires — qui sont, comme je l'ai dit et comme on les désigne communément, la « colonne vertébrale » des forces armées, des militaires en service... Nous ferons tout ce qu'il faut pour mieux soutenir les familles des militaires, c'est essentiel.
    Selon nous, le problème de cette stratégie particulière réside dans le fait que, si elle est appuyée en principe, elle pèche du côté des ressources nécessaires à sa mise en œuvre. Or, elle n'est pas encore appliquée.
    Quand a‑t‑elle été présentée initialement?
    Je crois que c'était en 2018, mais je vais demander à Robyn si elle a une mise à jour à ce sujet.
    Merci. À l'origine, il s'agissait du Plan global pour les familles des militaires, qui s'est, pourrait‑on dire, transformé en une stratégie militaire globale à partir de la mise en place d'éléments constitutifs du plan d'origine. Comme l'a indiqué l'ombudsman, même si le rapport a été approuvé par la chaîne de commandement, je crois savoir que les ressources nécessaires à la mise en œuvre de la stratégie, elles, ne l'ont pas été.
    Mon mari me dit souvent, un bon...
    Un instant, madame Findlay.
    Madame Hynes, je suis sûr que le microphone cause des problèmes aux interprètes. Je pense que cela a à voir avec la position du microphone.
    Voyons allons voir si cela fonctionne.
    J'allais dire que — comme mon mari le répète souvent — un plan acceptable qui fonctionne est meilleur qu'un projet de plan parfait. Il me semble que trois ans et demi ou quatre ans suffisent amplement pour faire bouger les choses.
    Monsieur l'ombudsman, pourquoi pensez-vous que certains quittent l'armée et pourquoi certains restent-ils?
     Comme je l'ai dit dans mes propos liminaires, je pense qu'il y a une crise de confiance au sein des forces armées quant à savoir si les gens seront traités équitablement. C'est l'élément central de notre mandat. Quand les gens se tournent vers nous, c'est qu'ils veulent être traités équitablement, et nous essayons de les aider à ce que tel soit le cas.
    Cependant, il y a aussi tous les cas d'inconduite qui font régulièrement les manchettes et qui font perdre confiance aux gens. Celles et ceux qui dénoncent une situation d'inconduite — qu'il s'agisse d'une inconduite sexuelle ou d'un abus de pouvoir — veulent savoir qu'ils seront traités équitablement. Ils veulent avoir l'assurance qu'ils seront entendus. [Difficultés techniques] pour faire face à cette situation particulière.
    Par ailleurs, dans mes tournées des bases et des escadres, j'entends parler de familles et de militaires qui ont de la difficulté à payer leur logement. Comme d'autres témoins l'ont dit, certaines politiques sont désuètes et elles n'offrent pas la souplesse voulue pour évoluer au rythme des facteurs économiques qui touchent non seulement les militaires, mais bien sûr tous les Canadiens. Cela concerne le logement, l'inflation et bien d'autres choses. Certaines de ces politiques, comme l'indemnité de vie chère, n'ont pas été mises à jour. Les taux n'ont pas été actualisés depuis 2008. Or, l'économie et la situation économique dans l'ensemble du pays ont changé. Cela a créé une situation très injuste pour beaucoup de militaires et leur famille partout au pays.
    Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles les gens décident de quitter l'armée, mais je crois vraiment que tout cela se ramène à un problème de base: un manque de confiance dans le fait que le système puisse les traiter équitablement. Un changement s'impose: il faut imposer une culture du respect, et il va falloir davantage respecter la personne. Nous devons aider les familles des militaires et les aider davantage à soutenir nos militaires.
    L'initiative Canada sans faille vise à régler ce problème en collaboration avec les provinces et les territoires, mais je crois fermement que le premier ministre doit directement traiter avec les provinces et les territoires.
(1700)
    Nous allons devoir nous arrêter là. Merci.
    Madame O'Connell, vous avez six minutes.
    Merci à vous pour votre présence.
    Je souhaite également revenir sur le processus de règlement des griefs. Vous avez parlé de [difficultés techniques] dans certains de ces cas ainsi que d'arriérés, mais j'aimerais savoir si tous les griefs sont traités de la même façon. Je veux dire qu'il s'agit de savoir si, par exemple, on accorde la priorité à un grief de harcèlement sexuel par rapport à un grief de rémunération. [Difficultés techniques] très difficile pour la personne concernée, mais un grief concernant, disons, le harcèlement pourrait également représenter un danger physique imminent.
    Je m'attendrais à ce qu'en cas de danger physique imminent, le dossier ne soit pas traité dans le cadre du processus de règlement des griefs. Si la personne court un danger imminent, les divers organismes d'application de la loi ou le CIIS seraient saisis du dossier.
     Si nous recevons une plainte ou un appel d'une personne qui est en danger imminent ou si nous estimons, après en avoir discuté avec elle, qu'elle court un danger imminent, nous la dirigeons vers les services de soutien appropriés. Il pourrait s'agir de la police ou du CIIS, selon la situation. C'est ce que nous faisons dans ce genre de situation. Nous nous assurons que les gens soient [difficultés techniques].
    Mme Hynes va pouvoir vous apporter plus de précisions à ce sujet.
    Chaque fois que nous recevons une plainte pour inconduite sexuelle, comme l'ombudsman l'a mentionné, nous essayons vraiment de permettre à la personne qui porte plainte de décider elle-même de la prochaine étape. Nous lui fournissons des renseignements sur les divers mécanismes de recours et les ressources à sa disposition et nous lui permettons de faire son choix. Nous lui offrons également de la diriger vers le service compétent pour faciliter le processus à cet égard.
    Pour ce qui est de l'ordre de priorité des griefs, nous avons un processus interne qui nous permet d'acheminer les dossiers plus rapidement lorsqu'il y a des circonstances impérieuses. Cela nous permet de remonter la chaîne de commandement à un niveau plus élevé que nous le ferions normalement.
    À l'interne, au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, il existe une multitude de mécanismes de recours, de pouvoirs initiaux et de répondants, selon le type de plainte qui est déposée. Le processus suivi est légèrement différent et peut être plus rapide ou plus lent, selon la nature de la plainte.
     Merci.
    À ce sujet, une partie de la terminologie, pendant que je lisais le document d'information et que j'écoutais... Un effort est fait pour s'attaquer aux injustices [difficultés techniques]. Je comprends tout cela, et cela fait certainement partie des griefs, mais nous avons entendu parler d'un certain niveau d'inconduite sexuelle dans les FAC. Cela peut sembler insignifiant, mais quand on commence à cataloguer l'inconduite sexuelle comme une injustice en disant qu'il faut rétablir l'équité à cet égard, on minimise également le problème en classant certaines choses dans la même catégorie.
    Avez-vous réfléchi à la possibilité de dire qu'un grief...? Je sais qu'il n'existe pas de grief vraiment classique, mais étant donné la nature des cas d'inconduite sexuelle et des enjeux systémiques, ne pourrait‑on pas dire qu'il s'agit d'un problème plus vaste qu'un problème d'injustice et qu'il devrait y avoir, dans la terminologie, une définition ou une catégorisation qui reconnaisse ce qui s'est passé?
(1705)
    C'est une question à laquelle il est très difficile de répondre, mais je dois revenir au rôle du bureau de l'ombudsman. Je tiens à répéter à tout le monde, et j'ai déjà parlé à bon nombre d'entre vous, que notre rôle est de veiller à ce que les processus mis à la disposition des gens, qu'il s'agisse d'inconduite, d'inconduite sexuelle ou de tout autre type de problème, de grief ou de situation auquel ils peuvent être confrontés...
    Notre rôle est un rôle de surveillance. Il s'agit de s'assurer que, peu importe le processus qu'ils suivent, tout d'abord, les plaignants savent en quoi consiste ce processus et comment s'y prendre. Nous les aiguillons vers ce processus. Nous pouvons les aider à démarrer et nous pouvons les soutenir en supervisant le processus, mais notre rôle est de veiller à ce que le processus soit suivi équitablement. Ils peuvent toujours revenir nous voir pour dire que les choses traînent et qu'ils n'obtiennent pas de réponses, et nous pouvons alors intervenir pour les épauler.
    À vrai dire, notre rôle en tant qu'ombudsman, qui est à peu près le même partout dans le monde, est de veiller à ce que les gens aient accès aux processus et à ce qu'ils soient traités équitablement. C'est notre rôle.
    Merci, madame O'Connell.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur Lick.
    Je suis heureuse de vous revoir. Je vous remercie d'être présent à cette réunion du Comité.
     J'aimerais commencer par vous rappeler une sortie publique que vous avez faite il y a environ un an, en mars 2021, afin de demander au gouvernement de rendre votre bureau véritablement indépendant.
    Selon ce qui avait été rapporté dans les médias, vous souhaitiez que votre bureau soit indépendant et vous mentionniez que la structure de votre bureau minait la confiance dans votre capacité à vous battre pour les membres des Forces armées canadiennes.
    J'aimerais que vous nous parliez de ce qui rendait votre bureau insuffisamment indépendant, à votre avis.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit il y a près d'un an, et je continue de le dire devant divers auditoires, il y a un certain nombre de raisons pour lesquelles vous avez un bureau d'ombudsman. Tout d'abord, nous sommes censés assurer une surveillance civile — en l'occurrence sur le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes — pour veiller à ce que les membres de la communauté de la Défense soient traités équitablement, à ce que leurs plaintes soient entendues et à ce qu'elles soient traitées.
    L'un des problèmes que nous avons vus très clairement, principalement en raison des problèmes d'inconduite sexuelle...
    Encore une fois, je suis désolé, monsieur l'ombudsman. Il semble que nous ayons des difficultés du côté de l'interprétation.
    Nous allons recommencer.
    Pourriez-vous poursuivre votre réponse, s'il vous plaît? Merci.
     Dans ce cas particulier, l'une des raisons pour lesquelles j'ai fait cette déclaration était pour demander, comme tous mes prédécesseurs l'avaient fait avant moi, une plus grande indépendance, en particulier pour faire rapport au Parlement en tant que mandataire du Parlement. Comme je l'ai dit lorsque j'ai parlé du système de règlement des griefs, c'est pour faire en sorte que les gens aient davantage l'assurance qu'une organisation complètement indépendante — et perçue comme étant complètement indépendante — surveille le ministère de la Défense nationale et l'armée. C'est pour donner aux gens confiance dans le système que cet organisme est indépendant.
    Au fil des ans, nous avons vu de l'ingérence dans notre bureau. Nous avons vu nos pouvoirs changer sans consultation. Tous ces éléments d'ingérence administrative et d'ingérence directe entraînent des problèmes de confiance. Ils nous empêchent également d'exécuter [difficultés techniques].
    L'une des principales raisons pour lesquelles j'ai demandé cette indépendance, c'était pour pouvoir faire avancer un dossier particulier, quel qu'il soit, au‑delà du ministre. Le ministre — quel qu'il soit et quel que soit son parti — est toujours membre d'un certain parti, et les questions qui touchent les militaires... L'armée est une institution canadienne qui est essentielle pour tous les Canadiens et qui doit être entendue par ceux qui représentent tous les Canadiens, c'est‑à‑dire le Parlement, sans que ce soit filtré par le parti alors au pouvoir.
    Dans certains cas, je devrai peut-être aller au‑delà du Parlement et peut-être jusqu'au premier ministre — pour toute question particulière dont nous entendrons parler — parce que l'importance de l'armée en tant qu'institution canadienne pour la sécurité nationale est vitale, et ces questions, quelles qu'elles soient, doivent être entendues par le Parlement. C'est la principale raison pour laquelle j'ai demandé une plus grande indépendance.
(1710)

[Français]

     Merci beaucoup.
    Dans le même ordre d'idée, vous avez demandé de pouvoir vous rapporter au Parlement plutôt qu'au ministre de la Défense. En mars dernier, votre prédécesseur, M. Walbourne, avait fait la même demande avant vous.
    Où en est le traitement de cette demande? Avez-vous l'impression qu'on est ouvert à cette demande présentement?

[Traduction]

    Il est très difficile de spéculer sur ce que le gouvernement fera dans ce cas. J'ai fait valoir mes arguments à la ministre à ce sujet, les mêmes que ceux que j'ai donnés devant plusieurs auditoires, y compris lors de ma conférence de presse l'an dernier et dans l'énoncé de position que j'ai présenté à ce moment‑là.
    La ministre connaît très bien les questions de gouvernance, car elles reflètent la gouvernance d'entreprise. Je pense que nous avons eu une bonne conversation, mais je ne peux pas dire pour le moment ce que cela donnera. Je continuerai d'exercer des pressions en ce sens. Je pense que c'est la bonne chose à faire.
    Comme tous les ombudsmans qui m'ont précédé, je suis entré en fonction en pensant que je pourrais travailler au sein du système pour aider la communauté de la Défense à atteindre l'équité, dans la mesure du possible, mais j'ai vu très directement les problèmes que tous les autres ombudsmans qui m'ont précédé ont vus et je me suis rallié à l'opinion — très fermement ancrée maintenant — que l'indépendance qu'apportera la reddition de comptes au Parlement servira les intérêts de la communauté de la Défense.
    Merci, madame Normandin. Cela fait six minutes.
    La parole est maintenant à Mme Mathyssen.
    Merci, monsieur Lick, d'être venu aujourd'hui.
    Vous avez parlé assez souvent du système de recours déficient et du fait qu'il mine la conviction des militaires qu'ils peuvent obtenir un examen rapide et équitable de leurs plaintes. Combien de cas respectent le délai de traitement des plaintes?
    Je vais demander à Mme Hynes de répondre à cette question. Nous avons les détails, et nous pourrons également les transmettre au Comité plus tard.
    Mme Hynes pourrait peut-être répondre pour résumer cette réponse.
    Bien sûr. J'ai justement sous les yeux les délais de traitement des griefs.
     Dans les Forces armées canadiennes, il y a deux paliers de grief. Il y a l'autorité initiale et l'autorité de dernière instance. Le palier de grief de l'autorité initiale dispose d'un délai de 120 jours pour répondre. Auparavant, il était de 90 jours, mais il a ensuite été porté à 120 jours. Au dernier palier, en fait aucun délai n'est imposé à l'autorité de dernière instance pour rendre une décision.
    Selon les derniers chiffres que j'ai, pour les griefs en première instance, il y en avait 566, et 307 d'entre eux étaient en attente d'une décision depuis plus de quatre mois. Pour ce qui est du palier de l'autorité de dernière instance — encore une fois, je me ferai un plaisir de vous fournir ces chiffres après la réunion —, il y avait 687 dossiers au palier de l'autorité de dernière instance. Plus de 340 d'entre eux attendaient une décision depuis un à quatre ans, et 33 d'entre eux étaient toujours en suspens après quatre à neuf ans.
     C'est important. Bien sûr, cela doit ébranler énormément la confiance du personnel dans le système, je suppose. Les gens doivent en parler. Cela doit nuire à l'idée qu'ils se font des FAC.
    Dans le mémoire que vous avez remis au Comité, vous parlez beaucoup des familles. Vous avez parlé des services offerts — la garde d'enfants, le logement, les soins familiaux, les parents d'enfants ayant des besoins spéciaux et les parents vieillissants. C'est en grande partie ce dont nous parlons en ce qui concerne les femmes sur qui retombent ces responsabilités. Est‑ce la plainte la plus fréquente que vous entendez à votre bureau? Ou quelle est celle qui revient le plus souvent? Vous pourriez peut-être nous en donner une idée.
(1715)
    Mme Hynes a beaucoup de renseignements à ce sujet. La plainte la plus fréquente que nous recevons concerne les prestations. Je dois dire, cependant, que lorsque je visite les bases et les escadres, de toute évidence un peu plus virtuellement de nos jours, les doléances les plus vives proviennent des familles et des membres qui ont des problèmes familiaux, qu'il s'agisse de la garde d'enfants, de l'accès à des services de garde d'enfants ou à des services de garde abordables. Je dirais qu'il y a maintenant un peu plus d'optimisme en ce qui concerne les services de garde abordables pour tous, mais il y aura toujours des problèmes de capacité jusqu'à ce que tout le monde soit satisfait.
    Les doléances les plus fortes sont celles des familles avec des enfants ayant des besoins spéciaux ou des familles avec des handicaps. Lorsqu'elles sont déplacées d'une base à une autre, dans bien des cas, elles se retrouvent au bas de la liste d'attente. C'est inadmissible. J'ai dû m'asseoir dans divers auditoires avec des familles dont les conjoints étaient en larmes parce qu'ils ne pouvaient pas répondre aux besoins de leurs enfants et ne pouvaient pas trouver de médecin de famille. C'est un problème auquel sont confrontés de nombreux Canadiens, pas seulement les familles des militaires, mais surtout celles qui doivent déménager plus souvent qu'une famille canadienne traditionnelle. Habituellement, elles déménagent trois ou quatre fois et sont reléguées au bas de la liste d'attente pour les besoins vitaux de leurs enfants. À mon avis, c'est inadmissible pour les FAC, l'organisation qui nous défend et qui met leur vie en danger.
    J'aimerais changer un peu de sujet. L'an dernier, au Comité permanent de la condition féminine, dans le cadre de son étude sur l'inconduite sexuelle, nous avons entendu constamment parler de l'ingérence, bien sûr, de la chaîne de commandement et de ses répercussions sur le SNEFC et le CIIS. Avez-vous constaté un changement à cet égard? Avez-vous constaté une reconnaissance de ce problème, du rôle que la chaîne de commandement a joué dans les enquêtes sur les plaintes d'inconduite sexuelle, ou non?
    J'aimerais simplement rappeler au Comité qu'en ce qui concerne les questions et les plaintes de ce genre, qui sont de nature criminelle, nous les renvoyons à l'organisme d'application de la loi compétent. Cela ne fait pas partie de notre mandat.
    Pour ce qui est des questions qui ne sont pas de nature criminelle, il est difficile de dire pour l'instant, je crois, si nous constatons un changement important dans la chaîne de commandement. Je pense que nous verrons cela avec le temps. Nous espérons voir cela avec le temps. Avec la plus grande visibilité de ces choses que nous voyons dans les médias, je pense qu'il y a beaucoup plus de pressions sur la chaîne de commandement pour que ces questions soient bien gérées.
    Quand j'ai discuté de ce problème avec le chef d'état-major de la défense, il m'a dit qu'il tenait ces gens responsables, qu'il tenait la chaîne de commandement responsable. Nous verrons; notre travail consiste à surveiller l'évolution avec le temps et voir si cela se produit vraiment.
    Nous recevrons certainement des plaintes de temps à autre. Mme Hynes pourrait peut-être vous en donner un exemple. Au fil du temps, nous entendons des plaintes selon lesquelles il y a des retards dans le traitement d'un processus ou d'un problème d'inconduite. C'est très typique de certaines des plaintes que nous entendons.
    Mme Hynes pourrait peut-être vous donner un exemple.
(1720)
     Malheureusement, nous allons devoir nous arrêter ici. J'espère que vous aurez une autre occasion de donner votre exemple.
    Chers collègues, le problème que nous avons habituellement, c'est que nous avons 25 minutes de questions alors que nous disposons de 20 minutes seulement. Nous commencerons à recevoir nos propres griefs si nous ne respectons pas notre personnel.
    Sur ce, monsieur Motz, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur l'ombudsman, je suis heureux de vous revoir. Madame Hynes, merci d'être ici.
    Monsieur, vous avez mentionné que les griefs que vous recevez le plus souvent à votre bureau concernent des prestations et des questions liées à la famille. Quand vous parlez de « prestations », de quoi parlez-vous exactement? Est‑ce que cela concerne le système de paie Phénix?
    Je vais répondre à la dernière [difficultés techniques] sur la question des prestations. Phénix est certainement l'une des questions et des plaintes que nous recevons des employés civils du ministère.
    Je vais demander à Mme Hynes de répondre à la première partie de votre question.
    Merci.
    Pour ce qui est des prestations, cela a vraiment à voir avec la rémunération et les avantages sociaux. Nous recevons beaucoup de demandes d'information dans ce domaine. Les FAC ont un certain nombre de politiques et de programmes très complexes. Souvent, les gens ne comprennent pas bien ce à quoi ils pourraient avoir droit.
    Nous recevons également un certain nombre de plaintes liées à des retards administratifs dans la réception de ces prestations. Il y a aussi des politiques désuètes sur les prestations. L'ombudsman a parlé plus tôt de l'indemnité de vie chère. L'aide au remboursement des pertes immobilières est aussi un sujet dont nous entendons parler. Du côté des civils, le plus gros problème se rapportant aux prestations, comme l'ombudsman y a fait allusion, concerne certainement la paye et les répercussions du système de paie Phénix.
    Merci.
    C'est plus une déclaration qu'autre chose. Je dirais que j'ai toujours trouvé inquiétant, avec la présence d'une base militaire dans ma circonscription, que nous ayons des dizaines de personnes dont les problèmes liés au système de paie Phénix n'ont pas été réglés, depuis plusieurs années dans certains cas. Cela touche les pensions, l'impôt payé et perçu et tout le reste. Ces personnes ont appelé à maintes reprises pour faire régler les problèmes dans le système de paie Phénix au sein des forces armées. Pourtant, lorsque c'est le bureau du député qui appelle, ces questions sont généralement résolues dans un délai de quatre à six semaines.
    Je ne comprends pas pourquoi, lorsque les employés appellent eux-mêmes, le ministère ne prend pas cela aussi au sérieux. En fait, le ministère nous a dit qu'à moins qu'un bureau de député ne téléphone, il n'y porte pas attention, ce qui est vraiment triste.
    Monsieur Lick, vous avez dit qu'il y avait des retards, et Mme Hynes nous a fourni les échéanciers. Ces retards sont-ils liés au délai entre le dépôt d'une plainte et son règlement? Qu'est‑ce qui a pris plus de temps? Est‑ce l'enquête? Quelle est la raison de l'arriéré? Y a‑t‑il un retard dans l'obtention du soutien ministériel ou du soutien de la chaîne de commandement pour traiter une plainte, ou les retards au sein de votre bureau sont-ils attribuables à la dotation ou au financement? Que se passe‑t‑il?
    Lorsque nous parlons de retards, il s'agit des retards dans le système de griefs, qui est le mécanisme interne disponible — dans ce cas‑ci, pour les militaires — au sein du ministère. Ce n'est pas au sein de notre bureau comme tel.
    Nous voyons certaines des situations dont vous venez de parler, de sorte que si nous appelons au sujet d'un grief, nous voyons parfois une réponse plus rapide.
    Nous essayons de le faire seulement dans des circonstances impérieuses. Simplement parce que lorsqu'une personne nous appelle, notre rôle n'est pas de la placer en tête de liste, car si nous le faisions chaque fois que quelqu'un nous appelle, ce serait injuste. Lorsqu'il y a des circonstances impérieuses... et chaque situation est un peu différente. Il y a diverses raisons à cela. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous allons mener une enquête systémique sur les mécanismes de recours l'an prochain.
    Nous estimons que ce n'est pas simplement une question de ressources. Nous l'avons constaté au fil des décennies. En y consacrant des ressources, on réduit l'arriéré pendant un court moment, mais il revient. Pourquoi? C'est la réponse que nous voulons approfondir.
    J'ai quelques idées...
    Je suis désolé de vous interrompre encore une fois, mais le temps de M. Motz est écoulé.
    Monsieur May, vous avez quatre minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
(1725)
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Le rapport de 2016 du Bureau du vérificateur général sur le recrutement et le maintien de l'effectif dans les FAC indiquait que le long processus de recrutement, les retards dans la formation et la fermeture de certains dossiers alors que les candidats étaient toujours intéressés « ont incité des candidats qualifiés à retirer leur candidature ». Le rapport mentionnait également que « il a fallu en moyenne 200 jours pour enrôler une recrue... ».
    Dans le cadre de votre travail, avez-vous remarqué si [difficultés techniques] ont été apportés au processus de recrutement pour répondre aux préoccupations soulevées dans ce rapport?
    Certainement. Les FAC sont en train d'apporter des changements. La pandémie a eu une incidence sur le recrutement, comme d'autres témoins vous l'ont dit.
    L'une des raisons les plus courantes pour lesquelles nous recevons des plaintes concerne le recrutement et les retards dans le recrutement. En fait, l'autre jour, je parlais justement avec un de mes amis qui est réserviste et d'après ses discussions avec ses collègues, le problème est celui dont nous entendons constamment parler, à savoir que le processus de recrutement est tout simplement trop long. Il y a [difficultés techniques] aussi long, et il y a de nombreuses façons de faire les démarches en ligne. Mais il y a certains problèmes [difficultés techniques] que les FAC essaient de régler en ce moment, simplement pour que le processus ne soit pas trop long.
    Je dois admettre que, du côté civil de la dotation, les difficultés sont très similaires. Les processus sont tout simplement trop longs pour que le volet civil du ministère et les FAC puissent soutenir efficacement la concurrence et les gens partent pour aller dans le secteur privé.
    Savez-vous combien de temps il faut en moyenne pour s'enrôler actuellement?
    Je n'en suis pas certain. Je ne sais pas si Mme Hynes a un échéancier à ce sujet. Pour être honnête, je ne crois pas que les choses aient beaucoup changé.
    Je vais voir si Mme Hynes a le chiffre.
    Je ne sais pas si ce chiffre a changé. Je sais que les FAC ont utilisé deux outils virtuels, mais je ne sais pas quel a en été le succès. Je sais qu'ils ont la capacité de procéder à l'enrôlement virtuel et à la sélection virtuelle, qui sont maintenant utilisés par les centres de recrutement.
    Vous avez mentionné que la COVID‑19 a eu un impact sur le recrutement pendant la pandémie. Convenez-vous également que la COVID‑19 a causé certains des retards dont nous parlions plus tôt en ce qui concerne la mise en oeuvre des programmes?
    De quels programmes parlez-vous?
    Je parle précisément de ceux qui soutiennent les familles. Plus tôt aujourd'hui, nous avons parlé de certains des engagements pris par les FAC et du fait qu'ils ont été pris il y a trois ans. Selon vous, la COVID‑19 a‑t‑elle joué un rôle dans le déploiement de ces programmes?
    Je ne crois pas. Le plan global pour les familles des militaires a été approuvé en principe. Essentiellement, tout le monde était d'accord pour dire que cela devait être fait — en l'occurrence par les Forces armées canadiennes et le ministère. Tout ce qui manque, ce sont les ressources nécessaires pour la mise en oeuvre.
    Pour ce qui est des autres enjeux, ils relèvent de Canada Sans Faille et, dans bien des cas, des provinces et des territoires. J'ai vraiment l'impression que ce n'est pas vraiment un problème lié à la COVID‑19. À mon avis, c'est une question qui nécessite une forte attention politique afin de pouvoir réunir les provinces et les territoires pour régler des questions très complexes, comme les qualifications professionnelles du personnel médical partout au pays, ce qui pourrait non seulement épauler, aider et soutenir les familles qui déménagent d'un bout à l'autre du pays, mais aussi, je crois, vraiment aider et soutenir les Canadiens en général.
    Merci, monsieur May.
    Madame Normandin, vous avez 90 secondes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je n'aurai pas le temps d'entendre votre réponse à une autre question sur la transition des militaires à la vie civile et le transfert de leurs dossiers médicaux. Je vous poserai simplement la question suivante, qui est en lien avec ce que vous avez déjà mentionné.
    Le Comité permanent de la défense nationale devra faire rapport à la Chambre sur les témoignages qu'il a entendus et formuler des recommandations. Devrions-nous recommander au gouvernement que l'ombudsman se rapporte dorénavant au Parlement plutôt qu'au ministre de la Défense nationale, comme c'est le cas actuellement?
(1730)

[Traduction]

    La réponse est simplement oui. J'appuierais ce genre de recommandation. Je pense que c'est évident. Le rapport ou l'exposé de position que j'ai présenté l'an dernier fournit des arguments solides à cet égard, ainsi qu'en faveur d'un avant-projet de loi qui le permettrait.
    Oui, j'appuie entièrement cette recommandation, mais il incombe au gouvernement et au Parlement de l'appuyer.

[Français]

    Dans ce cas, pouvez-vous soumettre au Comité les documents dont vous venez de parler? Nous vous en serions très reconnaissants.
    Bien sûr, madame Normandin.
    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

     Merci.
    Vous avez 90 secondes, madame Mathyssen.
    Merci beaucoup.
    Malheureusement, notre illustre président vous a coupé la parole. Vous étiez sur le point de dire que vous aviez une idée de la raison pour laquelle les retards persistent, puis il vous a coupé la parole. J'aimerais vous accorder 90 secondes pour terminer ce que vous avez à dire à ce sujet et peut-être pour nous donner ces raisons.
    Merci beaucoup.
    Encore une fois, nous examinerons cela de plus près dans un an environ. Cependant, je pense qu'il y a deux ou trois choses à considérer. La première, dont j'ai discuté avec le chef d'état-major de la défense, il y a quelque temps, c'est de s'assurer que les gens sont tenus responsables du traitement d'un grief particulier dans le cadre du processus. Dans leurs ententes de gestion du rendement, les chaînes de commandement — du moins au niveau le plus élevé — s'engagent toutes à s'assurer que le processus se déroule dans les délais voulus. Nous verrons comment les choses se dérouleront.
    Encore une fois, il faut affecter les ressources nécessaires. Je crois qu'il s'agit notamment de voir si les chaînes de commandement obtiennent les bons conseils en ce qui concerne la politique sur les avantages et l'interprétation appropriée de la politique, afin de rendre une décision équitable en temps opportun. Cela pourrait être une chose à vérifier. De plus, est‑ce que les comités des griefs et les autorités des griefs disposent des bonnes personnes pour traiter efficacement un processus de grief?
    Je ne pense pas nécessairement que tout le monde voudrait aller travailler pour l'autorité des griefs, mais je crois important que nous ayons des personnes de qualité à long terme, pas seulement à court terme, pour pouvoir soutenir efficacement le système. Sans un système de règlement des griefs efficace, rapide et équitable, vous ne donnerez jamais à tous les membres de l'institution l'assurance qu'ils seront traités équitablement.
    Merci, monsieur Lick.
    Monsieur Schmale, vous avez quatre minutes.
     Je parie que vous ne saviez pas que vous aviez affaire à un illustre président.
    Absolument. Je n'ai que de bonnes choses à dire à votre sujet, monsieur le président, et je suis heureux d'avoir l'occasion de le faire.
    Comme je l'ai mentionné aux témoins du premier groupe, je ne suis pas un membre régulier du Comité, alors je m'excuse si certaines questions sont répétitives.
    Vous avez parlé de la durée. Combien de temps faut‑il en moyenne pour régler un problème ou un grief?
    Dans notre cas, si une plainte nous est présentée, nous dirigeons la personne vers le processus approprié pour qu'elle puisse être résolue. Comme je l'ai dit, il est difficile de répondre à cette question, car s'il y a des circonstances impérieuses... Quelqu'un pourrait s'adresser à nous, comme cela s'est produit l'été dernier, à propos d'une plainte datant d'il y a neuf ans, ou qui est depuis déjà quatre ans dans le système de règlement des griefs. Ces personnes ont fait appel à nous à ce moment‑là. Nous estimions que les circonstances étaient impérieuses. Si je me souviens bien, elles étaient aux prises avec des difficultés financières. Nous les avons aidées à régler le problème et nous avons porté ces plaintes à l'attention de l'autorité de dernière instance. Elles ont été traitées rapidement, compte tenu des circonstances impérieuses dans ces situations particulières.
    Cela dépend du moment où ces plaintes nous sont présentées dans le cadre du processus de règlement des griefs. Il est donc difficile de répondre à votre question à cet égard.
    Pour que les choses soient bien claires, dans l'exemple que vous avez donné, c'est alors qu'elles avaient passé neuf années dans le processus militaire que ces plaintes ont été portées à votre attention ou à celle de votre bureau.
(1735)
    C'est exact.
    D'accord.
    Je ne sais pas si vous pouvez nous le dire de mémoire, mais quel est le grief le plus courant que vous et votre bureau recevez?
    Comme je l'ai dit, parmi les types de plaintes que nous recevons, les plus fréquentes depuis 23 ans concernent toujours les prestations. C'est la même chose pour le processus de grief.
    D'accord.
    Lorsque vous devez communiquer avec le ministère lui-même, dans quelle mesure la chaîne de commandement, ou même le ministre, réagit‑il pour régler certains de ces problèmes, selon leur gravité, leur type, etc.?
    Comme je l'ai déjà dit à un certain nombre d'entre vous lors de nos entretiens individuels, lorsque nous enquêtons sur un cas complexe, qui peut porter sur une ou deux questions, ou un cas particulier très complexe — mais les cas complexes ne représentent certainement pas la totalité des 14 000 appels que nous recevons par année — lorsque nous faisons enquête et que nous constatons que la situation est injuste pour l'intéressé, nous faisons une recommandation au ministère. Au cours des cinq dernières années, la totalité de nos recommandations ont été acceptées et mises en oeuvre ou sont en voie de l'être.
    J'ai dit à bon nombre d'entre vous que nous le devons au respect que reçoit notre travail d'enquête, mais je crois aussi qu'il y a beaucoup de bonnes personnes qui veulent agir pour le mieux au ministère. C'est ce que je crois.
     C'est peut-être une question un peu bizarre. Je comprendrai si c'est le cas, mais je serais curieux de le savoir. Parmi les griefs qui ont pu être réglés, comme vous l'avez mentionné, vous souvenez-vous de cas qui ont entraîné des punitions dans les rangs, des rétrogradations ou quelque chose de ce genre?
    Il ne faut pas oublier qu'un grief présenté par un militaire concerne habituellement les prestations. Il croit avoir droit à une prestation. Cela ne fait pas partie du processus disciplinaire. C'est un processus entièrement distinct.
    Vous formulez un grief parce que vous avez l'impression d'avoir été traité injustement ou d'avoir droit à une prestation, et vous demandez au décideur d'examiner votre cas et de décider si vous devriez recevoir la prestation ou le service en question. Cela ne fait pas partie du processus disciplinaire.
    Merci, monsieur Schmale.
    Les quatre dernières minutes sont pour M. Fisher.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie l'ombudsman et son équipe de s'être joints à nous aujourd'hui et de leur témoignage d'experts.
    J'ai écouté les questions et votre déclaration préliminaire. Elles soulignaient que vous vous occupez surtout de problèmes qui pourraient amener quelqu'un à quitter l'armée. Je me demande si vous êtes en mesure de tirer des enseignements de ce que vous entendez dans le cadre de griefs et de les appliquer au processus afin de fournir des solutions nous permettant d'améliorer le recrutement. Je tourne un peu autour du pot. Je me demande si vous pouvez tirer quelque chose — de ce qui sont, non pas des entrevues de départ, mais peut-être des griefs qui mènent à un départ.
    Y a‑t‑il moyen de renverser la vapeur et de trouver une façon d'améliorer notre processus de recrutement?
    Certainement. Lorsque nous recevons une plainte, ou même une demande d'information, une grande partie de ces renseignements nous sert pour notre analyse des tendances. En pareil cas, nous examinons toujours les plaintes et demandes d'information ainsi que les enquêtes qui peuvent être menées à la suite de ces plaintes, et nous examinons les tendances pour voir s'il y a des problèmes systémiques que nous devons étudier plus en profondeur. Cela alimente notre plan d'enquête systémique.
    Je viens d'ailleurs d'envoyer un rapport à la ministre sur les affectations pour motifs personnels et le statut particulier. C'est un sujet dont j'ai entendu parler non seulement lorsque je me suis rendu dans diverses bases et escadres, mais aussi dans le cadre des plaintes et des demandes d'information que nous recevons par téléphone, par courriel, etc. Cela nous a révélé un problème particulier. Peut-être que la politique n'était pas interprétée correctement ou qu'elle était incohérente d'un bout à l'autre du pays et que les gens étaient traités injustement.
    La ministre est maintenant saisie de ce rapport. Il sera publié à la fin d'avril ou en mai. Vous y trouverez des recommandations sur la façon dont les gens devraient être traités.
    Nous ferons la même chose pour le recrutement si nous constatons qu'il y a des problèmes particuliers. Le principal problème que nous avons constaté, et Mme Hynes pourra vous en parler en détail, ce sont les longs délais au sujet desquels nous recevons des plaintes. Je n'ai pas pu obtenir de réponse.
    Ce sont là les problèmes typiques dont nous entendons parler, ainsi que les doléances des gens qui estiment avoir été injustement empêchés de s'enrôler. Cependant, les retards sont certainement le sujet de plainte le plus fréquent.
(1740)
    Merci. C'est bon à savoir.
    Il n'est peut-être pas juste de vous poser cette question à tous les deux, mais en ce qui concerne le maintien en poste et la décision des gens de quitter les FAC, dans quelle mesure cela serait‑il fondé sur des problèmes qui pourraient mener à des griefs? Dans quelle mesure cela pourrait‑il être parce que le secteur privé leur offre un meilleur salaire ou parce qu'ils ne veulent plus déménager la famille, ou une raison de ce genre? Quel est le pourcentage de personnes qui quittent les FAC pour des problèmes relevant du dossier des griefs plutôt que pour d'autres raisons?
     Il est très difficile pour nous de répondre à cette question. Le commandant du personnel militaire serait la personne la mieux placée pour répondre à ce genre de question.
    Il est certain que dans les types de demandes d'information que nous recevons, ou dans les plaintes, nous voyons certainement des secteurs... En général, nous recevons les plaintes de personnes qui estiment avoir été traitées injustement. En général, nous ne recevons pas de plainte concernant une personne qui démissionne parce qu'elle veut occuper un autre emploi. Nous ne recevons pas ce genre de plaintes parce qu'il ne s'agit pas vraiment de plaintes.
    Les plaintes que nous recevons portent sur diverses situations où il y a des problèmes familiaux et où les gens ne peuvent pas s'occuper efficacement de la situation familiale en continuant d'être des militaires, ou ne peuvent pas avoir accès à des soins de santé appropriés et doivent rester dans la région où leurs enfants, le conjoint ou le partenaire peut être pris en compte.
    Il y a diverses raisons pour lesquelles les gens quittent l'armée. Il appartient certainement au commandant du personnel militaire de mieux répondre aux tendances dans ce domaine.
    Nous allons devoir nous arrêter ici, monsieur Fisher.
    Monsieur Lick et madame Hynes, au nom du Comité, je tiens à vous remercier de votre contribution à cette étude. Cela a été très utile et nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous avez consacré.
    Chers collègues, la séance est levée.
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