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La séance est ouverte. Il est presque 11 heures et je constate qu'il y a quorum.
Je vois que M. Bezan s'est muni de son habituel lait au chocolat.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Il a probablement puisé pour cela dans un important budget de défense, ce qui fera l'objet d'un examen par le Comité à un moment donné.
Je tiens à remercier le ministre pour sa présence, de même que le général Eyre, M. Matthews, le sous-ministre, et leurs collaborateurs qui tous sont rompus à l'exercice du témoignage devant notre comité.
Cette réunion a été décidée à la suite de la publication, la semaine dernière, d'une mise à jour de la politique de défense. Je sais que le ministre a envie de nous en parler, et que le Comité veut entendre ce qu'il a à dire.
Sur ce, je cède la parole au ministre.
C'est un plaisir de vous accueillir de nouveau au Comité. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous les membres du Comité permanent de la défense nationale. Je vous suis reconnaissant de m'avoir invité à venir vous parler aujourd'hui afin de vous faire part de certaines nouvelles récentes qui, selon moi, auront une grande incidence.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur le président, je suis accompagné de mon sous-ministre, Bill Matthews; de notre chef d'état-major de la défense, le général Wayne Eyre; de notre dirigeante principale des finances, Cheri Crosby; de notre sous-ministre adjoint aux politiques, Peter Hammerschmidt; de la sous-ministre déléguée au matériel, Nancy Tremblay; et de la cheffe du Centre de la sécurité des télécommunications, Caroline Xavier.
Il y a une semaine, le et moi avons dévoilé la nouvelle politique de défense du Canada intitulée « Notre Nord, fort et libre: une vision renouvelée pour la défense du Canada ». Nous avons élaboré cette politique en reconnaissance des bouleversements survenus dans le monde depuis la parution de notre politique de défense précédente, en 2017.
Où que ce soit dans le monde, nous constatons un retour à la concurrence stratégique entre pays. Des États autoritaires comme la Russie, la Chine et d'autres, qui se disputent le pouvoir et l'influence, nous ont montré qu'ils ne craignent pas, dans leurs ambitions, d'enfreindre les conventions ou le droit international. Les répercussions se font également sentir sur nos côtes, ici au Canada, et ces menaces, combinées aux exigences supplémentaires imposées aux membres des Forces armées canadiennes en raison des changements climatiques, montrent clairement que nous devons en faire plus pour protéger notre pays et nos citoyens face à ces adversaires géopolitiques.
En réponse à ces défis, nous avons élaboré un nouveau plan exhaustif qui s'appuie sur la politique « Protection, Sécurité, Engagement », et je sais que tous les membres du Comité la connaissent bien.
Grâce à ce plan, nos dépenses en matière de défense augmenteront de 8,1 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années et de 73 milliards de dollars dans les 20 prochaines années. Cela signifie que 1,76 % du PIB sera consacré à la défense d'ici 2029‑2030, ce qui représente une étape importante vers l'atteinte de notre engagement de 2 % envers l'OTAN. D'ici 2030, les dépenses du gouvernement en matière de défense auront presque triplé par rapport à 2014‑2015.
Nous avons élaboré cette politique à la suite de vastes consultations auprès de la population canadienne, de nos partenaires autochtones et inuits, de l'industrie, des parlementaires, des spécialistes de la défense et de nos alliés et partenaires.
Après ce que nous avons entendu, nous nous engageons à acquérir tout un éventail de matériel nouveau ou amélioré pour défendre notre pays et notre continent et pour nous assurer de pouvoir continuer à soutenir nos alliés et nos partenaires partout dans le monde. Bon nombre de ces investissements sont essentiels pour renforcer la présence de nos forces armées dans le Nord, une région qui se réchauffe quatre fois plus que la moyenne mondiale en raison des changements climatiques et qui présente un intérêt croissant tant pour nos alliés que pour nos adversaires.
Notre première tâche consiste à faire en sorte que la souveraineté du Canada soit bien protégée, particulièrement dans l'Arctique et dans les régions nordiques. Pour y parvenir, nous réalisons une série d'investissements ciblés dans l'Arctique et dans la sécurité du continent. Nous investirons 1,4 milliard de dollars dans l'acquisition de capteurs maritimes spécialisés destinés à la surveillance océanique, 370 millions de dollars dans des aéronefs de détection aérienne avancée, 18,4 milliards de dollars dans l'acquisition d'une flotte d'hélicoptères tactiques de dernière génération, et 218 millions de dollars dans des centres de soutien opérationnel dans le Nord.
Nous investirons dans des infrastructures polyvalentes aptes à soutenir les opérations de nos forces et à répondre aux besoins des gouvernements territoriaux, des Autochtones et des communautés du Nord. Nous pourrons ainsi acheminer le matériel dont nos forces ont besoin et permettre aux communautés nordiques de profiter de ces précieuses infrastructures. Nous entendons collaborer avec les Premières Nations, les Métis et les Inuits dans le cadre d'un véritable partenariat et d'une véritable consultation.
Nous nous sommes, en outre, engagés à donner forme à notre investissement de 38,6 milliards de dollars dans la modernisation du NORAD annoncée en 2022. Nous travaillons avec les États-Unis pour renforcer nos moyens de défense continentale. Afin de conserver notre agilité sur la scène internationale, nous investissons dans nos capacités. Nous devons être un allié solide de l'OTAN pour maintenir une présence soutenue dans la région indo-pacifique.
Nous serons forts chez nous pour être forts partout dans le monde.
Nous avons aussi prévu un investissement de 9,9 milliards de dollars pour améliorer notre capacité navale. Nous pourrons ainsi prolonger la durée de vie de nos frégates de la classe Halifax pendant que nous travaillons à la conception et à l'acquisition de la nouvelle flotte de navires de combat de surface.
Nous avons prévu 9,4 milliards de dollars pour augmenter la production de munitions d'artillerie au Canada. Nous investissons certes dans l'industrie — 300 millions de dollars —, mais nous apportons aussi une certitude en matière d'approvisionnement, grâce à des contrats à long terme qui totaliseront 9,4 milliards de dollars. Cela répond tout à fait aux besoins urgents exprimés par l'industrie. Nous explorons également les possibilités de moderniser nos systèmes d'artillerie et notre parc de chars et de véhicules blindés légers.
Nous continuerons d'accroître notre présence et notre influence dans des domaines non traditionnels comme l'espace et la cybersécurité, notamment grâce à la constitution d'un cybercommandement au sein des Forces armées canadiennes, les FAC, et à une meilleure intégration entre celles‑ci et le Centre de la sécurité des télécommunications, cela afin de soutenir les intérêts canadiens.
En plus de ces investissements prévus dans le matériel et les infrastructures pour nos militaires, la politique « Notre Nord, fort et libre » nous engage à appréhender différemment les questions de défense. Nous entendons améliorer et approfondir nos relations avec l'industrie de défense canadienne, parce que la politique de défense est aussi une politique industrielle. Il est essentiel d'accroître notre production, qui a un effet dissuasif et qui contribue au maintien de milliers de bons emplois partout au pays.
Nous envisageons également de soumettre nos politiques en matière de défense et de sécurité nationale à des examens tous les quatre ans, cela pour en assurer la pertinence.
Rien de tout cela ne sera possible sans nos employés, et c'est pourquoi nous poursuivrons nos efforts pour instaurer un milieu plus sécuritaire, plus favorable et plus inclusif pour nos employés et pour renforcer le recrutement et le maintien en poste. Cette politique appuie nos militaires grâce à un investissement de 100 millions de dollars destiné à améliorer l'accès aux services de garderies pour les familles de militaires, et de près de 300 millions de dollars pour améliorer les logements militaires. Nous appliquerons pour cela un programme de construction et de rénovation domiciliaire.
Pour renforcer rapidement nos effectifs militaires, nous simplifierons les procédures de recrutement et, pour attirer et retenir des gens talentueux partout au Canada, nous poursuivrons notre travail essentiel de transformation culturelle de sorte à créer une force armée qui reflète plus fidèlement le caractère inclusif du Canada.
Enfin, monsieur le président et distingués membres du Comité, cette politique vise à renforcer les FAC et leurs capacités de sorte qu'il nous soit possible de relever les défis de l'heure. Elle permettra de doter nos militaires des outils nécessaires à la protection de l'Arctique, de la défense du Canada et de la préservation des valeurs canadiennes pour lesquelles les générations précédentes se sont battues avec acharnement.
En réponse à ces menaces mondiales — des menaces qui se font de plus en plus sentir au Canada —, nous nous sommes dit que nous devions en faire plus, et c'est ce que nous allons faire. Il est indéniable que nous traversons une période difficile, mais nous serons à la hauteur.
Merci beaucoup, monsieur le président, d'avoir bien voulu m'écouter.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je suis heureux de vous voir au Comité.
Je dois dire que je suis déçu de cette mise à jour de la politique de défense. Elle ne n'exprime pas un sentiment d'urgence.
Or, la guerre fait rage en Ukraine. Hier soir, l'Iran a attaqué Israël. La guerre est partout au Moyen-Orient et dans la mer Rouge et, dans la mer de Chine méridionale et dans le détroit de Taïwan, le monde est assis sur un baril de poudre sur le point d'exploser. Pourtant, aucune de vos promesses et anticipations ne se concrétisera avant les prochaines élections. Comme d'habitude, les libéraux tergiversent, ils retardent les choses et ils laissent aller les choses.
Nous entendons parler de soldats canadiens qui se tournent vers les banques alimentaires et qui comptent sur les dons alimentaires. Vous avez déclaré vous-même que la crise du recrutement et du maintien en poste a précipité les Forces armées canadiennes dans une « spirale de la mort ».Vous avez dit qu'il nous manque actuellement 6 700 logements militaires. Nous avons des soldats qui vivent dans leur voiture. Ils vivent mal. Ils vivent dans des villages de tentes. Nous entendons constamment ce genre de récits.
Regardez ce que les médias disent de la mise à jour, comme le National Post, dont les titres dénoncent l'absence d'urgence que dégage la nouvelle politique de défense des libéraux face aux réels dangers de notre monde ou affirmant que Justin Trudeau ne s'intéresse en fait pas aux questions de défense. Le Globe and Mail nous dit qu'avec sa politique de défense dépassée, le Canada n'est pas prêt à faire face aux menaces d'aujourd'hui. Le Globe and Mail poursuit en estimant que dans sa nouvelle politique de défense, le Canada s'engage à explorer plutôt qu'à se commettre.
Les universitaires, les experts militaires et les médias dénoncent le manque de sérieux de la mise à jour de la politique de défense.
Voici ma question: En 2022, quand elle a donné le coup d'envoi de la mise à jour, la a dit que celle‑ci énoncerait des « options radicales » pour amener le Canada à 2 % du PIB afin de respecter son engagement envers l'OTAN, mais on ne trouve aucun engagement dans ce document. Pourquoi?
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Merci beaucoup, madame Lambropoulos.
Tout d'abord, j'espère que tous les intervenants que nous avons consultés verront que leur travail acharné et leurs conseils sont reflétés dans ce document. Cela s'entend bien sûr des parlementaires et du travail notoire du comité de la défense. À bien des égards, il s'agit également d'une politique industrielle, parce que nous avons écouté nos industries militaires qui nous ont parlé de leurs besoins, soit des garanties contractuelles qu'elles souhaitent et des plans clairs qu'elles réclament en termes d'objectifs, notamment sur le plan des investissements. J'espère aussi que ce document reflète bien nos consultations auprès des premiers ministres du Nord, des Inuits, des communautés autochtones et des collectivités du Nord.
Il y a une chose qui, je l'espère, est très claire dans ce document, c'est que nous reconnaissons que le monde a changé, et que nos Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale du Canada sont investis d'une grande responsabilité. Je suis le ministre de ce portefeuille. La reconnaissance de notre responsabilité de défendre notre propre pays et notre propre continent fera de nous un partenaire plus fort de nos alliés dans l'OTAN. Cela nous rendra plus efficaces dans le travail que nous devons faire dans la région indo-pacifique. Je pense que cela donnera également l'assurance à tous nos partenaires de l'OTAN, mais en particulier aux États-Unis, que le Canada est prêt à intervenir et à faire ce que doit.
S'agissant de la protection de la souveraineté du Nord, dans le Sud du Canada beaucoup se disent que cela concerne les survols occasionnels du territoire par des avions étrangers ou le franchissement de navires quand il n'y a pas de glace. Quand nous sommes allés à la rencontre des collectivités du Nord et que nous les avons écoutées, nous nous sommes fait dire que c'est en fait une question d'infrastructures, d'aéroports. Que c'est une question de routes, de communication par fibre optique. C'est une question d'usines de traitement des eaux et de centrales électriques, d'installations médicales.
Nous savons que nous devons construire cinq pôles de soutien dans le Nord pour faire voler nos nouveaux avions de chasse, nos avions multimissions, nos avions de recherche et de sauvetage et nos hélicoptères dans cette région. Nous savons que nous devrons assurer une présence militaire constante dans le Nord et que nous devrons nous entraîner sur place. Il est fort possible que ces infrastructures doivent être polyvalentes. Dans mes conversations avec les premiers ministres du Nord et avec les Inuits et les communautés autochtones, j'ai constaté chez mes interlocuteurs un véritable engagement envers la nécessaire construction d'infrastructures. Tout d'abord, ils participeront activement à la construction et à l'utilisation ultérieure des infrastructures, ce qui aidera leurs collectivités. Si une piste peut être utilisée pour accueillir des avions de chasse ou de transport, elle pourra aussi l'être pour les évacuations médicales et pour les appareils de recherche et de sauvetage.
C'est ce que nous entendons par « usages multiples ». Je pense que ce sont les avantages mutuels. On ne parle pas que d'un investissement dans la défense. C'est un investissement dans les Canadiens, surtout dans nos collectivités du Nord.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie de vous être rendu disponible pour répondre à nos questions.
J'aimerais que vous nous parliez du court terme. Le plan traite de ce qui va se passer d'ici 5 ans ou 20 ans, mais j'aimerais que vous nous donniez des détails sur ce qui va se passer d'ici la fin de la présente législature, puisqu'il y a beaucoup d'incertitude pour la suite.
J'ai envie de vous proposer un exercice de mathématiques. En septembre dernier, des compressions en matière de défense ont été annoncées. Pour l'exercice financier 2024‑2025, on parle d'une réduction de 810 millions de dollars, tandis que pour l'exercice 2025‑2026, il s'agit d'une réduction de 851 millions de dollars. Le total des compressions est donc de 1,661 milliard de dollars pour les deux prochaines années.
Dans la mise à jour de la politique, on annonce pour l'exercice 2024‑2025 un nouveau montant de 612 millions de dollars, et un autre de 1,118 milliard de dollars pour l'exercice suivant, ce qui donne au total 1,730 milliard de dollars de nouveaux fonds. La différence entre les nouveaux fonds et les compressions équivaut à une augmentation de seulement 69 millions de dollars pour deux ans, ce qui ne couvre même pas l'inflation.
J'aimerais entendre votre point de vue sur un commentaire que nous avons entendu à la suite de la mise à jour de la politique, à savoir que les réinvestissements en matière de défense étaient « pelletés dans la cour » du prochain gouvernement.
Si vous me le permettez, je pense que vous avez commis une erreur de calcul en ne comparant que le recentrage des dépenses par le Conseil du Trésor dans le plan proposé. Tout d'abord, le budget de la défense a déjà été nettement augmenté dans la politique « Protection, Sécurité, Engagement ». Tout au long de 2026, vous verrez une très forte tendance à la hausse des dépenses de défense par rapport à la politique de défense précédente. Cela n'a pas disparu. Ces investissements sont engagés et continueront d'être faits.
Quand on annonce aux contribuables canadiens que l'on va dépenser l'argent qu'ils ont durement gagné, nous devons pouvoir leur démontrer que nous le faisons de façon efficace en vue d'obtenir le meilleur retour sur investissement. Je pense qu'il est tout à fait approprié que le Conseil du Trésor nous ait demandé, à nous et à tous les autres ministères, d'examiner attentivement la façon dont nous dépensons l'argent et de nous assurer que nous contribuons à la capacité réelle des Forces armées canadiennes et au soutien que nous offrons aux hommes et aux femmes qui servent sous l'uniforme. Nous avons entrepris ce travail, et ce ne n'est pas facile. Je ne vais pas suggérer... Soit dit en passant, je suis très reconnaissant au chef d'état-major de la Défense et à notre sous-ministre pour le travail acharné qu'eux-mêmes et leurs équipes ont accompli afin de trouver la façon la plus efficace de dépenser cet argent.
Ensuite, dans vos calculs, vous devriez également tenir compte du fait que nous avons engagé 38,6 milliards de dollars pour la modernisation du NORAD. C'est un nouvel investissement énorme dans la défense de notre continent.
Enfin, dans cette nouvelle mise à jour de la politique de défense, nous avons ajouté 8,1 milliards de dollars sur cinq ans et 73 milliards de dollars... Il est aussi question d'autres choses qui devraient vous aider à affiner votre calcul. Au bout du compte, les dépenses de défense ont presque triplé. Et puis, le document traite d'autres projets que nous devons mener à terme.
Au Canada, contrairement à certains de nos alliés, nous ne publions pas simplement des documents de politique ambitieux. Nous mettons de côté l'argent nécessaire à la réalisation du travail. Quand l'argent n'est pas encore clairement identifié et autorisé... Comme nous l'avons dit dans ce document, nous avons encore du travail à faire, mais nous avons été très clairs quant à la nature de ce travail et aux autres exigences relatives à l'acquisition de capacités supplémentaires.
Vous avez parlé du sentiment d'urgence. Permettez-moi de vous rassurer en ce qui a trait à la résolution de la crise du recrutement... parce que nous ne pouvons pas continuer à perdre plus de gens que nous en accueillons. D'abord, nous devons trouver les gens dont nous avons besoin pour effectuer le travail et pour faire en sorte que nos processus d'approvisionnement soient plus efficaces. Je n'essaie pas de minimiser le soin que nous devons prendre dans l'utilisation des fonds des contribuables, mais nous devons aller plus vite et être plus efficaces dans la façon dont nous faisons notre travail, parce que les coûts d'entretien de nos flottes de navires et d'avions augmentent avec le temps. Il nous incombe de faire un meilleur travail.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
Le mois dernier, l'ensemble du caucus libéral a appuyé la motion du NPD en faveur de la paix et de la justice en Palestine. Cette dernière motion reflétait les appels que nous avons entendus de la part de la communauté canado-palestinienne pendant des années, pour que le Canada cesse d'armer Israël pour son siège de Gaza et son occupation de la Cisjordanie. En février, un tribunal néerlandais a ordonné que le pays suspende ses exportations de pièces de F‑35 parce qu'Israël les utilisait pour des avions bombardant Gaza, mais rien n'indique que votre gouvernement emboîtera le pas.
En fait, même si la mise à jour de la politique de défense, dont nous discutons aujourd'hui, dit: « Nous envisagerons différemment la manière dont nous procédons aux acquisitions avec nos alliés », cela ne revient pas à dire que nous assouplirons notre régime de contrôle d'importation d'armes, surtout dans le cadre de projets dirigés par les États-Unis, comme le programme conjoint de chasseurs à réaction.
Comme les États-Unis fournissent une importante aide militaire à Israël pour soutenir son attaque à Gaza, et que cela nous dirige très vite vers ce que nous craignons — soit une guerre à l'échelle de la région —, pensez-vous qu'il faudrait mettre à jour l'accord canado-américain en matière de partage de la production de défense afin de l'amener à mieux correspondre au Traité sur le commerce des armes et d'y adjoindre des garanties contre toute violation du droit international?
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Il y a effectivement deux ou trois choses à décortiquer à ce sujet.
Le Canada a grandement contribué à la cause ukrainienne, non seulement au chapitre des dépenses militaires — qui, comme vous l'avez dit, totalisent maintenant environ 4 milliards de dollars —, mais aussi sous la forme d'autres investissements équivalant à un soutien financier d'environ 9,5 milliards de dollars. C'est ce dont l'Ukraine nous a dit avoir besoin pour que les lumières restent allumées et pour que ses industries continuent de tourner.
Les Ukrainiens nous ont très clairement dit avoir un besoin urgent de munitions. Chaque pays du Groupe de contact pour la défense de l'Ukraine — auquel je siège, comme à l'OTAN — a reconnu l'importance d'accroître notre production. Les Russes ont considérablement augmenté leur production de munitions et nous devons suivre le rythme. Nous nous sommes adressés à notre propre industrie et, en consultation avec l'industrie de l'approvisionnement militaire ici... Les industriels nous ont expliqué avoir besoin, tout d'abord, d'un investissement dans de nouvelles chaînes de production et dans les chaînes d'approvisionnement, mais aussi de la certitude que procurent les contrats à long terme. Nous avons maintenant un plan et nous sommes en mesure d'apporter cette certitude qu'ils recherchent. Nous travaillons actuellement avec l'industrie canadienne pour accroître la production.
Toutefois, dans le cas de l'Ukraine, nous savons qu'il faudra environ deux ans et demi pour disposer de ces nouvelles chaînes de production, pour faire ces investissements et pour commencer à déployer les munitions de combat dont les Forces armées canadiennes et l'Ukraine ont besoin. Entretemps, nous travaillons avec nos alliés. Par exemple, j'ai signé un protocole d'entente avec le gouvernement tchèque qui nous a permis d'acquérir les munitions nécessaires pour l'Ukraine. Nous avons maintenant engagé 57 millions de dollars pour acheter des munitions de la République tchèque afin de les livrer à l'Ukraine, non pas dans quelques années, mais dans quelques semaines et quelques mois.
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Vous soulevez effectivement des questions très importantes.
Tout d'abord, je tiens à souligner que nous travaillons d'arrache-pied et que nous réalisons de grands progrès à l'appui de notre présence en Lettonie et de notre engagement envers l'OTAN. Nous passerons à la taille de brigade en 2026, ce qui équivaudra à un déploiement de 2 600 militaires canadiens. Et puis, nous achetons du matériel — des véhicules blindés, des armes antichars, des systèmes de défense aérienne et même des missiles air-air. Nos militaires devront rapidement disposer de beaucoup d'autres biens d'équipement, ce à quoi nous travaillons très fort.
Vous soulevez un point très important. Il y a une chose qui m'a particulièrement interpellé quand j'ai pris ce portefeuille, je veux parler du véritable défi que représente l'entretien de nos biens d'équipement pour qu'ils demeurent fonctionnels et utilisables. Cela concerne nos avions, nos navires, nos véhicules blindés et nos pièces d'artillerie. Comme le général me l'a dit — et je crois qu'il vous en fera part —, nous ne disposions pas d'une grande partie de ces renseignements. Nous avons reconnu que nous devions faire un bien meilleur travail pour entretenir cet équipement. Nous avons décidé d'investir dans ce programme 9 milliards de dollars dans les 20 prochaines années pour entretenir l'équipement et le rendre fonctionnel. Il faut de l'argent et la certitude qu'ils peuvent régler le problème.
De plus, nos frégates de la classe Halifax ont nécessité un nouvel investissement très important pour qu'elles demeurent fonctionnelles et navigables jusqu'à ce que les navires de combat de surface soient livrés.
Avec cette politique de défense, nous ne nous contentons pas d'acheter de nouveaux biens d'équipement. Nous réalisons des investissements absolument nécessaires pour maintenir nos équipements pendant que nous acquérons de nouvelles capacités.
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Merci beaucoup, monsieur Fillmore.
Le contexte de la menace est en train d'évoluer passablement.
Nous avons entre autres constaté que c'est l'application et l'utilisation de technologies de défense antimissiles à longue portée qui nous permettent de fonctionner en toute sécurité et de déployer des moyens de défendre notre pays. Les autorités aériennes ont été très claires. Nous avons fait un investissement très important et nous allons, par exemple, livrer 88 chasseurs F‑35. Il est important d'armer les forces aériennes des meilleurs missiles modernes pour qu'elles aient l'efficacité nécessaire.
Si vous le permettez, très brièvement... Le libellé est très clair. L'expression employée est « étudier les possibilités ». Je sais que certaines personnes s'y sont opposées, mais, en fait, il y a du travail à faire. Il y a beaucoup de travail à faire pour nous assurer de faire l'analyse nécessaire.
Les Forces armées canadiennes, le ministère de la Défense nationale et nos partenaires du secteur privé travaillent tous à plein régime pour circonscrire ces besoins et s'assurer de fournir à l'armée — et donc à tous les Canadiens — le meilleur équipement dont elle aura besoin pour remplir les missions importantes que nous lui confierons.
Nous faisons le travail nécessaire, mais nous prenons acte également, dans ce document, du fait que l'acquisition de cette capacité est absolument indispensable à la sécurité et à la défense du Canada. Nous faisons le maximum pour envisager ces possibilités. Quand nous aurons terminé ce travail, nous ferons le nécessaire pour obtenir les budgets nécessaires, puis nous passerons à l'action.
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J'aurais deux choses à dire à ce sujet, si vous le permettez.
Tout d'abord, nous sommes très heureux de voir que la politique parle de l'Arctique, tout comme nos alliés. Cette zone est une vulnérabilité régionale, surtout pour nos alliés américains. Le président du comité militaire de l'OTAN m'a dit la semaine dernière qu'ils s'en félicitaient également. C'est notre axe régional.
Compte tenu de la menace globale actuelle, si la guerre devait s'étendre en Europe dans les pays de l'OTAN et si une autre se déclenchait en Asie, c'est le monde qui serait embrasé. L'Arctique est aujourd'hui une zone de concurrence, voire de conflit, et c'est pourquoi nos alliés accueillent favorablement l'analyse de cet axe régional.
La deuxième partie du document porte sur la défense aérienne et antimissile intégrée, qui est, sans équivoque, la voie de l'avenir. L'exemple le plus clair et le plus frappant en est l'événement qui s'est produit il y a 48 heures en Israël, où des armes de toutes sortes ont été utilisées — plusieurs types de drones, de missiles de croisière et de missiles balistiques — et où la réponse a été de nature intégrée, avec des aéronefs, divers types de défense aérienne au sol, du matériel de défense aérienne embarqué sur des navires, et un système de commandement et de contrôle commun.
On a investi dans les capteurs nécessaires dans ce cadre et dans le cadre de la modernisation du NORAD. Mme Gallant a parlé du système de commandement et de contrôle dans tous les domaines qui devra réunir tous ces éléments.
Cette idée prend de plus en plus d'importance dans la défense continentale, non seulement ici en Amérique du Nord, mais aussi eu égard à nos engagements dans le cadre de l'OTAN et de l'Indo‑Pacifique.
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Merci pour la question.
La décision de mettre à jour la politique de défense est vraiment récente. Au moment de l'annonce du gouvernement en matière de réduction des dépenses, nous ne savions pas exactement combien d'argent allait être ajouté pour la politique de défense.
[Traduction]
Ce que je suggérerais aux membres du Comité, qui observent l'évolution des dépenses de défense... L'exercice de réduction ou de réaffectation que le gouvernement a lancé pour tous les ministères, y compris celui de la Défense, est très ciblé sur le financement opérationnel. On voit de nouveaux investissements dans la politique de défense désormais articulée. C'est un dosage de capitaux qui, franchement, est nettement pondéré en faveur des capitaux.
Pendant que vous regardez cet espace, je ferais une distinction entre le crédit 5, qui correspond à nos dépenses en capital, et le crédit 1, qui correspond à nos dépenses de fonctionnement. Évidemment, ces deux crédits doivent être complémentaires pour soutenir les différentes activités. Je surveillerais l'interaction entre eux au fil du temps.
Mais ce qui tient toujours, c'est le 1,76 % du PIB d'ici 2029‑2030. Ce chiffre couvre tout ce que nous savons.
:
Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse probablement à M. Matthews, mais si d'autres témoins veulent intervenir, c'est très bien.
À la partie III de la politique, on peut lire, en caractères gras en haut de la page 20: « Nous mettrons en place une stratégie de logement pour les Forces armées canadiennes, nous rénoverons les logements existants et nous en construirons de nouveaux. » Or, abstraction faite de la question de savoir si la mise en place de cette stratégie est une nouvelle politique — en l'occurrence, cela voudrait dire qu'il n'y avait pas de stratégie au départ, ce qui serait aberrant —, vous verrez, à l'annexe A, que la nouvelle politique ne prévoit à peu près pas d'argent, soit rien cette année et rien l'an prochain, pour les « Logements des membres des FAC ». À la rubrique « Entretien et relance de l'infrastructure de la Défense nationale », il n'y a rien cette année et 103 millions de dollars l'an prochain.
Comment peut‑on parler d'une mise à jour qui n'annonce aucun résultat mesurable et pas d'argent, aucun financement nominal, et qui se limite à annoncer qu'il y aura une stratégie du logement? Pourriez-vous nous expliquer comment cette politique permettra de loger nos troupes? Nous avons du personnel dans des tentes. Nous avons un retard de 6 000 logements. Il y a des membres qui quittent les forces à cause du logement. Nous avons une crise de recrutement et de maintien des effectifs. Nous sommes à court de 16 000 personnes.
Je ne vois rien dans cet énoncé de politique pour régler ce problème.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Tout d'abord, je tiens à saluer et à remercier les hommes et les femmes en uniforme qui servent notre pays.
La fin de semaine dernière, j'ai eu le grand plaisir d'assister à mon premier bal, qui a été un événement mémorable. Je tiens également à féliciter l'ensemble de l'organisation qui a créé ce merveilleux environnement au cours duquel nous avons reconnu quatre personnes pour leur service. Je tenais d'abord à le dire et à vous remercier tous d'être présents aujourd'hui.
Nous savons que les dépenses de la Défense sont passées sous 1 % en 2014. Je crois que le ministre en a parlé. En 2017, nous avons présenté une politique intitulée « Protection, Sécurité, Engagement », que nous appelons plus couramment PSE. Aujourd'hui, nous parlons d'une mise à jour de la politique, que nous appelons « Notre Nord, fort et libre ».
Tout à l'heure il a été question de certains termes utilisés dans la mise à jour, comme « explorer » et « envisager ». J'ai parfois l'impression — et je ne veux pas saper le travail accompli — que ce à quoi nous aspirons est presque une liste d'épicerie. Nous voulons des choses. Nous devons absolument assurer l'état de préparation de nos forces.
J'ai eu le plaisir de visiter quelques bases militaires quand j'étais secrétaire parlementaire. J'apprécie certainement les efforts déployés dans le cadre de la politique actuelle, car je pense qu'elle reflète plus qu'une aspiration, ce qui est le tour que l'opposition veut donner à cette conversation. Il s'agit en fait de mesures concrètes, dont nous verrons les avantages.
Cela étant dit, parlons des engagements qui ont été pris dans le cadre de notre politique actuelle, la PSE de 2017, et faites‑nous part de votre position, tandis que nous continuons à fournir l'équipement et les outils dont nos membres des Forces armées canadiennes ont besoin maintenant, et que nous entamons, dans le même temps, la transition vers le travail réel des nouvelles technologies qui peuvent être nécessaires.
J'aimerais beaucoup vous entendre tous nous en parler aujourd'hui.
Cette question est posée dans un certain nombre de domaines, non seulement par nos collègues syndicalistes, mais aussi par les militaires qui gèrent les budgets des bases. Nous entendons souvent dire qu'ils ont certes de l'argent réservé pour les entrepreneurs, mais qu'ils préféreraient avoir des employés. Dans certains cas, c'est l'inverse. Ils ne peuvent pas trouver d'employés, mais ils peuvent embaucher des entrepreneurs. C'est pourquoi nous insistons auprès des personnes qui gèrent les budgets dans les bases pour qu'ils trouvent des façons d'utiliser les fonds de la façon la plus efficace possible.
Nous avons pris un engagement en matière d'optimisation des ressources: chaque fois qu'il est proposé de confier un nouveau projet à contrat, ou de recourir à des entrepreneurs pour faire un travail de la fonction publique, nous exigeons une analyse de rentabilisation. Comme on ne discute pas activement de cette question à l'heure actuelle, je n'ai pas d'analyses de rentabilisation à vous communiquer, mais c'est une exigence dont nous avons fait part à notre équipe de gestion.
Dans la même logique, nous encourageons les gens à s'y intéresser, lorsqu'il existe des moyens plus efficaces d'obtenir des résultats en se détournant des entrepreneurs pour faire appel à des fonctionnaires. Comme vous le savez sans doute, nous avons vécu une expérience intéressante avec l'un d'eux récemment. Il y a des discussions actives là où la main-d'œuvre est suffisante, là où on peut passer des entrepreneurs aux fonctionnaires quand on sait que c'est du travail à long terme. En règle générale, il est plus efficace de faire appel à des fonctionnaires dans ce cas.
Selon d'autres scénarios, la fonction publique ne disposant pas des compétences nécessaires à l'interne, les entrepreneurs continueront de jouer un rôle, mais il n'y a rien d'explicite à ce sujet. L'exercice de réaffectation dont nous parlions il y a quelques instants est en fait à l'origine de nombreuses conversations sur le bon modèle de prestation de services. S'il est moins coûteux ou plus efficace de faire appel à des fonctionnaires, nous sommes tout à fait ouverts à ces discussions. Dans certains cas, la main-d'œuvre n'existe pas.
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Monsieur le président, cela fait beaucoup d'aspects à couvrir.
Tout d'abord, en ce qui concerne le document de politique lui-même, vous avez parlé de se mettre sur le pied de guerre. La caractérisation de l'environnement de sécurité au Canada comprend des changements géopolitiques, technologiques et climatiques. Cela me convient.
Par ailleurs, il est absolument nécessaire que le cadre stratégique mette l'accent sur la disponibilité opérationnelle et la dissuasion. Je pense que toutes les Canadiennes et tous les Canadiens doivent prendre conscience du lien qui existe entre notre intérêt national vital, à savoir la prospérité, et la dissuasion. En tant que pays commerçant, il est absolument nécessaire de prévenir les agressions et la déstabilisation de l'ordre international. Vous pensez que nous avons des problèmes financiers en ce moment? Si nous ne parvenons pas à dissuader collectivement les pays aux visées impérialistes et d'autres menaces, la situation empirera.
Une fois encore, je constate avec plaisir que nous avons été écoutés en ce qui concerne la disponibilité opérationnelle. Avant d'acquérir de nouvelles capacités, nous devons être prêts à utiliser celles dont nous disposons. Nous nous penchons sur les piliers de la disponibilité opérationnelle, c'est-à-dire le personnel, dont je parlerai dans un instant, l'équipement et le taux d'aptitude au service, pour lesquels nous recevons des fonds d'approvisionnement nationaux. Ce n'est pas tout ce que nous avions demandé, mais…
Je ne viens pas d'une famille de militaires, mais je suis fascinée de voir que, s'agissant de planification… Je pense que l'armée est associée à une orientation claire, un plan et un programme. Depuis que je fais partie de ce comité, notre plan a déraillé à maintes reprises alors que nous avions avec nous de précieux témoins, tout cela à cause d'un parti.
Je vais appuyer la motion de Mme Normandin. Il nous faut absolument un sous-comité. Nous l'avons réclamé. Un membre de ce comité avait refusé d'y participer, et je suis donc heureuse d'apprendre qu'il a changé d'avis et que nous allons enfin pouvoir faire du vrai travail au sein du Comité, au lieu de venir y faire des déclarations destinées à produire des vidéoclips.
[Français]
Cela dit, la motion que vient de présenter M. Bezan est assurément importante, selon moi.
Monsieur Bezan, nous sommes d'accord sur le principe de continuer l'étude sur la mise à jour de la politique de défense, mais je veux un plan, parce que sans plan, ce qui arrive, c'est que nous ne faisons rien.
Monsieur le président, j'espère aujourd'hui que notre sous-comité va pouvoir se réunir le plus rapidement possible pour établir un calendrier dédié à l'étude très importante que nous avions commencée sur la défense spatiale et sur d'autres. Nous pouvons commencer par un minimum de trois réunions, puis nous verrons en sous-comité combien d'autres réunions nous devrons avoir.