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Durant les cinq minutes dont je dispose, je veux me pencher sur une seule question : le gouvernement fédéral a-t-il assez d'argent pour d'autres dégrèvements d'impôt?
Après bien des années de gros excédents budgétaires, nombreux sont les Canadiens susceptibles de penser qu'Ottawa n'aura pas de problème à trouver des fonds supplémentaires. Or, à notre avis, l'époque des gros excédents budgétaires est révolue. En conséquence, si Ottawa procède à de nouveaux dégrèvements d'impôt, cela entraînera plus tard, à notre avis, de très grosses réductions des dépenses.
L'année dernière, bien sûr, le gouvernement fédéral a engrangé un excédent de 13,2 milliards de dollars. Mais, depuis, le gouvernement conservateur a mis en oeuvre 9,9 milliards de dégrèvement d'impôt, pour citer ses chiffres, ainsi que des dépenses accrues pour la défense et pour de l'argent liquide au lieu de garderies. Il a en outre mis de côté 3 milliards de dollars pour le remboursement de la dette. Ainsi, d'après les propres calculs du gouvernement, Ottawa engrangerait un excédent de 600 millions de dollars seulement lors du prochain budget, en mai.
Nous avons récemment réexaminé les finances d'Ottawa. Je crois que vous avez à présent notre rapport, intitulé : « Ottawa peut-il se permettre d'autres promesses des conservateurs? »
Nous estimons que le gouvernement fédéral aura un excédent plus élevé que celui prévu dans le budget de mai. D'après nos projections, l'excédent pour 2006-2007 se chiffrera à environ 4,2 milliards de dollars. N'oubliez pas que, outre 3 milliards de dollars mis de côté pour le remboursement de la dette, 4,2 milliards de dollars restent disponibles. Laissez-moi faire une petite mise en garde: certaines personnes comptent les 3 milliards de dollars supplémentaires mis de côté pour le remboursement de la dette dans l'excédent. Pas nous, ni le gouvernement fédéral dans le budget de mai, parce que ce qui nous intéresse c'est de savoir quelle souplesse existe pour financer de nouveaux dégrèvements d'impôt ou, bien sûr, de nouvelles dépenses.
D'après nos estimations, le gouvernement dispose de 4,2 milliards de dollars comme marge de manoeuvre cette année, de 4 milliards de dollars l'année suivante et de peut-être 5,3 milliards de dollars la troisième année. Ces chiffres tiennent compte de la révision à la baisse des prévisions pour la croissance économique, par rapport à mai dernier. Si la situation se détériore encore, il y a aura bien sûr moins d'excédent que nous ne l'avons suggéré.
Faisons le point. À supposer que le gouvernement ait entre 4 et 5 milliards de dollars d'excédent à sa disposition pendant les trois prochaines années, cela laisse-t-il assez de marge de manoeuvre pour procéder à d'autres dégrèvements fiscaux? Avant de pouvoir faire de nouvelles promesses, le gouvernement doit payer pour les promesses déjà faites, promesses dont les coûts n'étaient pas chiffrés dans le budget fédéral de 2006, ni d'ailleurs dans nos estimations de 4 ou 5 milliards de dollars d'excédent pour les trois prochaines années.
Le gouvernement a une liste de choses à faire pour lesquelles il doit trouver de l'argent.
Tout d'abord, les conservateurs ont promis de s'attaquer à la question du déséquilibre fiscal. Même s'ils ne nous ont pas dit comment ou quand ils le feraient, c'est une chose susceptible de s'avérer très coûteuse.
Deuxièmement, les conservateurs ont promis de réduire les délais d'attente pour les soins de santé, sans toutefois y affecter de fonds supplémentaires dans le cadre du dernier budget.
Troisièmement, les conservateurs se sont engagés dans leur programme électoral à consacrer à la défense plus de fonds que ceux figurant dans le budget de mai. Nous devons donc nous attendre à une augmentation de peut-être 4 milliards de dollars du budget de la défense entre maintenant et 2010-2011.
Quatrièmement, les conservateurs ont promis d'éliminer la taxe sur les gains en capital réinvestis. Cela peut s'avérer extrêmement coûteux. Un chiffre de 2 milliards par an ne me surprendrait pas, mais cela reste à voir, selon les détails de la proposition faite en bout de ligne.
Cinquièmement, les conservateurs ont promis de réduire d'un autre point de pourcentage le taux de la TPS. Là encore, c'est une mesure très coûteuse, dépassant 5 milliards de dollars par an, selon l'époque où elle est mise en oeuvre.
Nous ignorons quand précisément le gouvernement a l'intention de mettre ces mesures en oeuvre. Elles ne doivent pas nécessairement intervenir toutes dans le prochain budget. Le gouvernement ne pourrait d'ailleurs pas se permettre de tenir toutes ses promesses dans le prochain budget, même s'il le souhaitait. D'après nos calculs, la réduction du taux de TPS à elle seule le mettrait dans une situation de déficit, si elle intervenait tout de suite.
Cela étant, nous ne pensons pas que le gouvernement fédéral agisse de façon responsable s'il procède à d'autres dégrèvements d'impôt. Si oui, il va lui falloir trouver plus de fonds, soit en privatisant des avoirs, soit en réduisant les dépenses de façon plus radicale qu'il ne l'a fait jusqu'à présent.
Lors de la dernière campagne électorale, les conservateurs ont promis 22,5 milliards de dollars de réduction des dépenses sur cinq ans. Nous craignons qu'un autre dégrèvement d'impôt n'entraîne de graves réductions des dépenses à l'avenir et ne crée une camisole de force qui restreigne les actions de tout gouvernement à venir. En effet, quelle que soit son allégeance politique, il lui faudra réduire de façon radicale le gouvernement pour assumer l'hémorragie d'argent causée au Trésor dans les années à venir par ces dégrèvements d'impôt.
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Aujourd'hui, j'aimerais faire une présentation assez brève sur l'état de l'économie américaine pour l'année 2007.
Les prévisions actuelles font état d'une croissance qui avoisinerait entre 2,3 et 2,5 p. 100, mais l'économie américaine envoie des signaux très contradictoires. D'une part, le secteur des sociétés est présentement en très bonne santé et, d'autre part, le marché immobilier est en déclin rapide. La grande question est de savoir si la récession du marché immobilier va déborder sur les dépenses de consommation.
L'opinion que je voudrais exprimer aujourd'hui, c'est qu'il y a de bonnes chances que la consommation soit affectée d'une manière substantielle et que ces réductions sont présentement mal factorisées dans les prévisions économiques.
J'ai préparé ici une série de chiffres essentiellement tirés d'une publication américaine sur différents indicateurs du marché immobilier américain. J'ai obtenu la permission de les utiliser. Ce que ces chiffres indiquent globalement, c'est qu'au cours des cinq dernières années, les gains de richesse ont été d'une ampleur sans précédent. Mais le point important est que les ménages américains ont utilisé cette richesse pour soutenir la consommation au-delà de leurs revenus. Donc, les gens dépensaient plus que ce qu'ils gagnaient, le taux d'épargne des ménages était négatif et le taux auquel les gens ont utilisé cette richesse est d'un ordre de grandeur appréciable. L'ordre de grandeur suggéré ici est d'environ 300 milliards de dollars en consommation soutenue à même l'enrichissement annuel que les gens obtiennent sur leurs maisons.
Le fait que le marché immobilier soit maintenant en déclin coupe cette source de financement pour la consommation et forcera vraisemblablement les ménages américains à recommencer à épargner. Dans le ralentissement du marché immobilier, il y a deux aspects différents. Il y a l'aspect investissement de la demande finale, la construction résidentielle dans une année normale aux États-Unis représentant environ 4,5 p. 100 du PIB. C'était 6 p. 100 depuis deux ans. Donc, un retour à des niveaux de construction habituels devrait couper 1,5 p. 100 de la croissance économique. C'est un effet direct.
L'autre question, c'est l'effet indirect sur la consommation. Si on pense que la consommation est soutenue dans un ordre de grandeur de 300 milliards de dollars, c'est environ 2,5 p. 100 du PIB américain qui pourrait être touché par la réduction de la consommation.
Présentement, les prévisionnistes américains ont l'oeil tourné vers les ventes au détail. Ils sont préoccupés de voir si on a des signes que les dépenses des ménages sont en train de ralentir. Les dernières ventes d'octobre ont été un peu décevantes, mais présentement, les opinions sont partagées. Je dirais qu'il y a une incertitude énorme au sujet du comportement de l'économie américaine en 2007. Selon moi, les prévisions de 2,5 p. 100 sont plutôt généreuses. Les ménages américains se surendettent depuis plusieurs années, et il faut envisager que le ralentissement de la consommation touchera davantage la croissance du PIB que ce qu'on a tendance à projeter présentement. Donc, des prévisions de l'ordre de 2 p. 100 de croissance pour 2007 me semblent davantage être une borne maximale que raisonnable pour la croissance en 2007. Cela étant, l'économie américaine présente de gros risques à ce moment-ci. Il y a également un autre risque — je n'en parle pas dans ce document, mais la Banque du Canada connaît bien cette question —, soit celui sur l'évolution du compte courant américain.
J'ai terminé. S'il y a des questions, il me fera plaisir d'y répondre. Je pense avoir exposé le point principal. Merci.
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Merci de m'avoir invité. Bonjour.
Je vais identifier, quant à moi, certains des changements fiscaux dont vous entendrez sans doute parler cet après-midi et vous dire pourquoi ils sont susceptibles d'être inclus dans l'ensemble, ainsi que leurs éventuelles répercussions sur l'économie.
Je pense qu'il y aura plusieurs changements fiscaux spécifiques — des changements fiscaux dans la plupart des domaines, en fait. Pour les changements à l'impôt sur le revenu, j'en mettrais ma main au feu. Les conservateurs vont sans doute rétablir le plus faible taux d'imposition marginal aux niveaux qu'avaient fixés les libéraux au début de l'année; même chose pour l'exemption personnelle de base. Jamais les conservateurs ne voudront affronter une élection avec, pour ces deux éléments, des chiffres plus élevés que ceux légués par les libéraux.
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu des sociétés, les conservateurs ont déjà annoncé ce qu'ils comptaient faire. Je pense qu'ils vont annoncer comme une priorité pressante le passage de 21 à 19 p. 100 du taux d'imposition, si la situation financière le permet.
En ce qui concerne la TPS, ils nous rappelleront leur engagement politique. Mais, autrement, c'est simplement trop coûteux pour être mis en oeuvre bientôt.
En ce qui concerne le taux effectif marginal d'imposition, on en entendra sans doute parler beaucoup, parce que c'est un élément qui affecte vraiment la productivité. Il est possible qu'il y ait des amortissements accélérés pour l'équipement manufacturier.
En ce qui concerne les gains en capital, après quelques mois pour peaufiner leurs plans initiaux, il est possible que les conservateurs s'engagent à mettre en oeuvre un ensemble de mesures abordables et gérables dans le budget de 2007.
En ce qui concerne les fiducies de revenu, je ne crois pas que le problème soit spécifiquement abordé.
Les questions de politique fiscale, maintenant. Au premier rang figure l'harmonisation des taxes de vente avec les provinces. Sont en cause les quatre provinces de l'Ouest et peut-être l'Île-du-Prince-Édouard, mais c'est l'harmonisation avec la Colombie-Britannique et l'Ontario qui serait la plus avantageuse. L'harmonisation des taxes est une priorité pressante pour les conservateurs, parce qu'ils en sortent trois fois gagnants: premièrement, elle stimule la productivité; ensuite, elle peut aider l'équilibre fiscal, un taux harmonisé pouvant donner un peu de marge de manoeuvre aux provinces qui le souhaitent; enfin, elle remplit une promesse électorale.
En ce qui concerne la question de l'équilibre fiscal et de la péréquation, je crois qu'on peut s'attendre à ce que les conservateurs affirment s'être attaqués à la question, sans y avoir consacré beaucoup plus de sommes additionnelles. Nous pourrons parler plus tard des modalités envisageables.
Sur la question du partage des revenus, dont vous avez beaucoup entendu parler dernièrement, je ne serais pas surpris si les conservateurs annonçaient leur intention d'effectuer une étude qui sera publiée plus tard. Je pense que c'est une politique qui a beaucoup de mérite, mais qui est coûteuse.
Je pense que nous allons beaucoup entendre parler d'un programme de croissance économique et de productivité. Ce sera sans doute le thème de la mise à jour et je voudrais dire un ou deux mots à ce sujet.
Tout économiste vous dira combien c'est important; c'est en fait le seul moyen d'améliorer systématiquement notre niveau de vie. On établit parfois une équivalence entre la croissance économique et la productivité, d'une part, et les dégrèvements d'impôt de l'autre. C'est une notion que je m'efforce de corriger chaque fois que j'en ai l'occasion. Il existe toute une série de mesures du côté des programmes susceptibles d'être adoptées pour stimuler la productivité: l'infrastructure de la formation et de l'éducation est importante, comme le sont certains éléments de la réglementation. C'est à ne pas oublier.
La croissance économique et la productivité sont toujours affaire de degré. N'importe quel dégrèvement d'impôt aura une incidence sur la productivité. Mais c'est souvent un effet secondaire, voire parfois négatif. Même s'il va sans doute beaucoup parler d'une priorité à la croissance économique et à l'amélioration de la productivité, il faut toujours un équilibre entre cet objectif et les mesures pour les programmes d'équité.
Les gens qui s'intéressent à un programme de croissance économique et d'amélioration de la productivité devraient selon moi se poser une question clé: quel effet ce changement fiscal a-t-il sur la structure des incitatifs?
Ce dont nous avons vraiment besoin dans notre pays, ce sont des abattements fiscaux qui encourageront les gens à travailler, à épargner, à innover, à inventer et à investir.
Voilà les questions que vous devriez vous poser au sujet de cette structure des incitatifs.
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Merci, monsieur le président.
Comme vous le savez, on fait cette rencontre avant l'énoncé économique de cet après-midi. Une des choses qu'on va vouloir évaluer, c'est si le ministre des Finances fait un portrait exact de la situation financière du gouvernement fédéral. Pour y arriver, on doit avoir une idée de ce que sera la croissance pour 2007.
Je voudrais d'abord demander ceci à ceux qui voudront intervenir. À quel niveau, au plan réel et nominal, évaluez-vous la croissance pour 2007? Je sais qu'il s'agit d'ordre de grandeur. En termes réels, est-ce 1,5 p. 100, ou 3 p. 100? Quelle est l'inflation? Je vous demande de nous donner des indications à cet égard.
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Le deuxième élément très important pour nous est le déséquilibre fiscal. Évidemment, du côté des surplus, on ne s'attend pas à ce qu'ils soient à la hauteur de ceux qu'on a connus au cours des 10 dernières années, malgré qu'on s'attend à ce qu'ils soient quand même importants, puisqu'on parle déjà de 5,3 milliards de dollars pour la moitié de l'année. Toutefois, il y a aussi la question des dépenses.
Nous avons effectué une petite étude. De 1997-1998 à 2005-2006, les dépenses du gouvernement fédéral ont augmenté de 235 milliards de dollars. Les surplus étaient de 67 milliards de dollars, pour un total de 302 milliards de dollars. C'est une marge de manoeuvre qui a été utilisée en dépenses ou qui est restée en surplus.
Les dépenses ont augmenté de 58 p. 100, toujours au cours de la même période de huit ans. Trente-neuf pour cent sont attribuables aux transferts, 62 p. 100 aux dépenses de fonctionnement des ministères, alors que l'augmentation pour la population et l'inflation était de 24 p. 100 et que le PIB augmentait de 33 p. 100.
Ne pensez-vous pas que du côté des dépenses du gouvernement fédéral, il y aurait moyen d'aller chercher une marge de manoeuvre pour régler le déséquilibre fiscal? Pas en coupant, comme cela a été fait au mois de septembre, dans des groupes d'alphabétisation et des groupes de femmes, mais dans l'appareil, qui grossit manifestement plus vite que la croissance économique, la croissance de la population et l'indice des prix à la consommation.
J'aimerais donc avoir votre opinion sur ce sujet.
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Laissez-moi reprendre ce que je disais. Les spécialistes des finances reconnaissent qu'il se crée une espèce de coin naturel, parce que l'intérêt sur la dette publique tend à rester stable ou à diminuer. D'ailleurs, même si les taux d'intérêt cessent de diminuer, nous constaterons une stabilité accrue ou une diminution des taux d'intérêt sur la dette publique, du seul fait que les obligations émises à 10 p. 100 d'intérêt il y a 10 ans sont renouvelées à 4 p. 100. C'est ainsi que se créent les dividendes financiers dont vous avez parlé, ceux qui permettent d'augmenter jusqu'à un certain point les dépenses de programme. Mais il y a déjà eu de fortes augmentations.
Comme vous l'avez souligné, les dépenses de programme ont connu une augmentation marquée dans le budget de mai. Même si l'augmentation de dépenses doit ralentir dans les années à venir, elle reste considérable. Nous devons toujours partir des excédents projetés à l'époque, même si, comme je l'ai dit, ils devraient atteindre un milliard de dollars ou deux milliards de dollars de plus que prévu. Si le gouvernement respecte son engagement et consacre 3 milliards de dollars au remboursement de la dette, cela ne lui laisse pas beaucoup de marge de manoeuvre pour des initiatives supplémentaires, même s'il y a toutes sortes de suggestions, en sus du déséquilibre fiscal.
Je voudrais revenir à votre question sur le déséquilibre fiscal. Vous aviez une question sur le taux de croissance national. Or, à l'heure actuelle, c'est un chiffre qui ne rime à rien pour personne, vu qu'aucune région du pays et aucun secteur de l'économie n'enregistrent de croissance s'approchant le moins du monde de cette moyenne. Par exemple...
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Merci, monsieur le président.
Et merci à tous d'être venus aujourd'hui. Que nous soyons membres du parti du gouvernement ou de l'opposition, nous apprécions tous que les pendules soient mises à l'heure en ce qui concerne les finances de la nation. Je pense que cela nous est vraiment très utile, à tous.
Comme vous le savez, le comité s'intéresse de près à la productivité et à la place du Canada dans un monde concurrentiel. J'ai trouvé particulièrement instructif un article publié par l'un de vous, Don Drummond, dans le numéro d'automne du International Productivity Monitor. Dans le cadre de l'article, il renvoyait en fait au travail effectué par chacun d'entre vous sur la productivité et affirmait que, selon les économistes du Canada : « la faiblesse de la productivité compromet le niveau de vie des Canadiens et menace plusieurs aspects de la qualité de vie qui leur tient à coeur ». C'est donc une question particulièrement importante. L'article indique toute une série de domaines où, selon M. Drummond, les économistes s'entendent sur les mesures qu'il faut adopter pour améliorer la productivité et veiller à maintenir ou améliorer le niveau de vie et la qualité de vie des Canadiens.
J'aimerais vous donner à tour de rôle l'occasion de souligner pour le comité deux ou trois domaines où, selon vous, il est particulièrement important que le gouvernement intervienne pour stimuler la productivité, qui est bien sûr la clé du niveau de vie et de la qualité de vie des Canadiens. Si vous deviez recommander une mesure et une seule, pour maintenir la productivité du Canada, dans quels domaines voudriez-vous voir le gouvernement intervenir?
Peut-être pourrions-nous commencer par vous, monsieur Orr, puis faire le tour.
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J'aurais plus de quatre raisons à donner, mais je vais m'en tenir à quatre, comme vous l'avez demandé.
Selon moi, le problème fiscal le plus criant est celui des taux effectifs marginaux d'imposition élevés. Ils entrent en jeu pour les gens ayant jusqu'à environ 50 000 $ de revenu. Bien qu'on ait tendance à penser que les taux marginaux d'imposition nuisent aux personnes ayant des revenus importants, ces taux sont bien plus élevés, habituellement supérieurs à 60 p. 100, quand on élimine les prestations sociales des personnes à faible revenu. Conséquemment, on n'a pratiquement aucun intérêt à reprendre ses études, travailler plus, chercher un meilleur emploi ou quoi que ce soit.
Autrement, je dirais que le système d'assurance-emploi est le problème numéro un. À ma connaissance, toutes les études effectuées, ou toutes celles jouissant de la moindre crédibilité, sont parvenues à la même conclusion: cela nuit au plein emploi. L'assurance-chômage subventionne les gens qui restent là où il n'y a pas de travail et les décourage de se rendre là où il y en a.
Comme troisième point, je choisirais l'immigration. D'ici quelques années, 100 p. 100 de notre croissance démographique sera déterminée par l'immigration, si bien que le bien-être économique des immigrants déterminera en bonne partie le bien-être économique de la nation. Or, la situation est affligeante, depuis déjà une vingtaine d'années. Il y a une myriade de problèmes: la conception du système, son administration et l'intégration des immigrants.
Je conclurai avec un problème qui perdure, pas dans le domaine de compétence du gouvernement fédéral, mais dans celui des provinces, essentiellement. Quand on parle des forts taux d'imposition du capital, il ne faut pas oublier qu'ils sont essentiellement le fait des provinces. Il reste des obstacles internes au commerce entre les provinces. Nous avons des champs de compétence qui se chevauchent. J'ai particulièrement apprécié, quant à moi, la façon claire et nette dont M. Flaherty a déclaré, dans le budget du printemps que, pour augmenter notre productivité, il nous faudrait des améliorations du côté des provinces et pas seulement du côté du gouvernement fédéral.
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Merci, monsieur le président.
Et merci à nos témoins d'être venus aujourd'hui. J'espère que vous envisagerez sérieusement d'établir des liens permanents avec notre comité, vu que nous souhaitons bénéficier des conseils de prévisionnistes indépendants, tant que le mécanisme prévu par le projet de loi ne sera pas en vigueur. Nous avons d'ailleurs adopté une motion dans ce but. Avec un peu de chance, ceci est le début de comparutions régulières devant le comité.
Si nous avons besoin de vous aujourd'hui, c'est parce que le ministre présente cet après-midi sa mise à jour économique et que nous sommes en train de mettre la dernière main à notre rapport à l'issue des consultations prébudgétaires. Nous nous efforçons de nous faire une idée aussi précise que possible de la situation, à commencer par le montant des excédents disponibles.
J'aimerais que l'on revienne rapidement à cette question. Ellen suggère que nous ne devrions pas nous attendre à plus de 4,2 milliards de dollars d'excédent cette année, le chiffre étant de 5,3 milliards de dollars l'an prochain. C'est nettement inférieur à ce que nous attendions: un sérieux rappel à la réalité pour moi et, nul doute, pour d'autres.
Si je reviens aux rapports que vous nous avez tous soumis en octobre de l'an dernier, je sais que nous sommes tous près de ces chiffres. Global, par exemple, s'attendait plutôt à 8 milliards de dollars ou 9 milliards de dollars de marge de manoeuvre. Je pense qu'il en allait de même pour tout le monde. Les choses ont donc changé.
Ellen étant la seule à nous avoir fourni un chiffre spécifique, je voudrais vous demander si vous êtes tous d'accord avec ce chiffre, au moins comme ordre de grandeur? L'excédent de cette année sera-t-il d'environ 4 milliards de dollars?
Dale.
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Entendu. Mais vous nous donnez un ordre de grandeur. Nous devons donc en tenir compte pour évaluer ce qui s'est dit pendant les consultations prébudgétaires, d'une part, et ce dont parlera M. Flaherty cet après-midi, d'autre part. La marge de manoeuvre est limitée. Pour procéder à une autre réduction de la TPS, qui coûterait environ 6 milliards de dollars, déjà, nous n'avons pas assez d'argent; et c'est sans parler du partage des revenus, qui coûterait de 5 à 6 milliards de dollars, et de toutes les autres mesures mentionnées par Ellen et les autres. Il va nous falloir être très prudents quant à ce que nous nous efforcerons d'obtenir et quant à ce qui entraînera une réelle augmentation de la productivité.
Savoir si une autre réduction du taux d'imposition des sociétés atteindra cet objectif reste à prouver. C'est une mesure coûteuse. Est-ce qu'elle stimule la compétitivité et la productivité? C'est la question que nous devons nous poser.
Dans l'article publié il n'y a pas si longtemps, Don Drummond se demandait si le secteur des affaires avait fait ce qu'on attendait de lui et traduit les dégrèvements d'impôt en investissements réels au Canada, des investissements qui créent plus d'emplois, augmentent la productivité, etc.
Voici mes questions. Elles s'adressent à quiconque veut y répondre. Une réduction du taux d'imposition des sociétés de 21 à 19 p. 100 améliore-t-elle sensiblement la productivité? Avec les gains en capital, est-ce qu'on parvient véritablement à ce dont vous parlez? Le taux effectif marginal sur les investissements est-il la clé ou nous faut-il envisager d'autres mesures? Pourrait-on dire, par exemple, que l'élimination du programme national de garderies entraîne de la compétitivité? Ne serait-il pas logique d'y voir une mesure favorable à l'augmentation de la productivité? Pour parler d'autres choix du gouvernement, une augmentation des sommes affectées à la défense augmente-t-elle la productivité? La diminution de 1 p. 100 du taux de la TPS entraîne-t-elle plus de compétitivité?
Ellen, peut-être pourriez-vous commencer. Don, puis Dale, vous pourriez ensuite prendre le relais.
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Merci aux témoins présents. Je les trouve nettement plus agréables à écouter de ce bord-ci de la table que quand j'étais de l'autre.
Je voudrais revenir aux excédents prévus pour cette année et l'année prochaine, même si une bonne part des engagements pris dans le budget de 2006 a un effet sur les quatre ou cinq années qui viennent, fait important dont vous avez sans doute plus conscience que la moyenne des gens.
Mme Russell estime que l'excédent sera d'environ 4 milliards de dollars; M. Drummond, qu'il sera de 1,8 milliard de dollars à 2,8 milliards de dollars; quant à M. Orr, son chiffre doit être de cet ordre mais certainement pas en désaccord marqué. Je voudrais passer en revue ce qui reste.
S'il opte pour des changements à l'impôt sur le revenu des particuliers, si, autrement dit, il prend la mise à jour de novembre 2005, la photocopie et la recouvre de beau papier bleu, combien cela va-t-il lui coûter et que lui restera-t-il? Il s'agirait d'augmenter l'exemption personnelle de base et, je suppose, de ramener le taux marginal d'imposition à son niveau précédent, soit 15 p. 100. Combien cela va-t-il coûter?
Je m'adresse à M. Drummond ou à n'importe lequel d'entre vous.
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J'ai deux observations à faire.
D'abord, je suis d'accord avec Don. La question la plus importante, c'est celle du concept de la famille, du ménage, comme unité de dépense sur laquelle doit être axée la fiscalité. Voilà pourquoi, comme beaucoup d'autres économistes, je suis pour le fractionnement du revenu.
Je suis très frustré quand j'entends dire que cela pourrait avoir un effet secondaire sur la participation au marché du travail. Cela me porte à croire que certaines personnes ici pourraient être contre le fractionnement du revenu, pour cette raison. Mais d'après ce que je peux constater, aucun parti ici ne songe à revoir le régime d'assurance-emploi.
Si vous voulez faire quelque chose, si la participation au marché du travail vous préoccupe, il y a 300 000 personnes au Québec et plus à l'est qui ont moins de 45 ans et qui sont sans emploi. D'après nos prévisions et celles d'autres économistes, il y aura encore 300 000 chômeurs au Québec et dans l'Est en 2010. Beaucoup d'entre eux seront les mêmes personnes. La plupart pourraient se trouver un emploi en Alberta et en Colombie-Britannique, alors que le gouvernement fédéral ne songe pas à la possibilité de déplacer la main-d'oeuvre là où il y a de l'emploi. Le gouvernement consacre beaucoup d'argent à l'assurance-emploi, mais ne donne pas la priorité à la mobilité des travailleurs d'une province à l'autre, pour qu'ils aillent là où il y a de l'emploi.
D'ailleurs, comme vous savez, le régime d'assurance-emploi a des effets pervers, de cette façon. Il est plus facile d'être admissible à l'assurance-emploi si vous êtes dans une région où le taux de chômage est relativement élevé. Il faudrait que ce soit le contraire. Voilà. Si vous voulez encourager la participation au marché du travail, vous n'avez qu'à agir.
Madame Russell, vous avez parlé de manière passionnée, il me semble, en faveur de recettes élevées pour le gouvernement. C'est assez ironique. Vous êtes ici, je crois, en bonne partie parce que le gouvernement précédent avait tendance à être trop prudent dans ses budgets, créant ainsi des excédents énormes, qui privaient les Canadiens d'un débat sur l'utilisation de ces surplus, les prévisions ne correspondant pas à la réalité. Et maintenant, tous en choeur, vous parlez de la nécessité d'être conservateur, voire très conservateur dans nos prévisions, si je ne m'abuse.
Madame Russell, vous avez demandé ardemment que nous nous assurions d'avoir davantage de recettes gouvernementales, afin de faire de bonnes choses avec l'excédent. Je me demande comment cela concorde avec la thèse selon laquelle nous avons surtaxé les travailleurs canadiens, d'après certains, il s'agit d'une ponction de 40 milliards de dollars ou plus, ne serait-ce que dans le fonds de l'assurance-emploi, pour la dernière décennie. Je présume que vous n'appliquez pas cette thèse à l'idée de garder excessivement élevées les cotisations d'assurance-emploi, puisque ce serait taxer les travailleurs canadiens et les petites entreprises, n'est-ce pas?
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais poursuivre un peu sur la question du fractionnement des revenus pour les familles et me pencher un peu sur vos prévisions en termes d'impact.
Ceux qui appuient ce genre de mesures nous disent souvent que c'est à l'avantage de la classe moyenne, que c'est une mesure pour la classe moyenne. Je ne suis pas prévisionniste; c'est pour cette raison que je sollicite votre opinion. Dans ma tête, la classe moyenne, c'est une famille avec une petite maison, deux personnes qui travaillent, qui ont un revenu assez similaire, qui envoient leurs enfants à l'école, etc. Je me demande comment cette famille, qui a deux revenus probablement assez similaires, bénéficiera en transférant une partie de ses revenus à l'autre, alors que ceux-ci sont presque égaux. Il me semble, au contraire, que ce sera une mesure qui favorisera beaucoup plus démesurément les couples où une des deux personnes gagne un revenu très imposant alors que l'autre ne travaille pas ou a un revenu marginal par rapport au premier.
Est-ce que je me trompe, dans ma vision statistique de la classe moyenne, et est-ce que je me trompe quant à l'impact que cela aura sur la classe moyenne? Qui veut répondre en premier?
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Merci, monsieur le président.
J'ai beaucoup à dire alors je vais parler très rapidement.
Pour commencer, trois éléments font partie des prévisions budgétaires: les recettes, les paiements d'intérêt sur la dette et les dépenses de programme. Il semble que dans certains exposés, on n'ait pas tenu compte de tous ces aspects. Madame Russell, votre exposé a certainement été, sinon le plus partisan, certainement l'un des 10 premiers que nous ayons entendus.
En songeant aux réductions d'impôt, vos calculs sont assez simplistes. Avez-vous songé aux effets positifs que des réductions d'impôt pouvaient avoir sur l'économie?
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Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins. C'était très intéressant, comme toujours. Je vais continuer dans la même veine que M. Del Mastro, qui emboîtait le pas à .
J'aime les chiffres. C'est bien beau de parler de 3 p. 100 du PIB, mais parlons des chiffres. Comme comptable, j'aime bien voir les chiffres. Considérons les projections des derniers prévisionnistes indépendants: tout le monde se rapprochait du 5 milliards de dollars pour les dépenses de programme. Mais il y a les recettes. Tout le monde prédisait autour de 210 milliards de dollars, mais elles ont été de 222 milliards. Je sais qu'il y a eu des rajustements comptables, mais nous prédisons encore 227 milliards de dollars cette année, ou un peu plus de 230 milliards de dollars. La croissance ne viendrait-elle pas des recettes?
Monsieur Orr, regardons ce que dit La revue financière : c'est 5 milliards de dollars. Ne devrait-on pas doubler cette somme et dire que nous prévoyons de 12 à 13 milliards de dollars? C'est assez facile, mathématiquement. Les recettes devraient augmenter. Le ministère des Finances semble toujours faire des sous-estimations. Je pense que vous avez sous-estimez les recettes. Ne devrait-on pas prévoir de 13 à 14 milliards de dollars?
Ce qui est arrivé dans le dernier budget — vous aurez la parole aussi, Ellen — c'est que le gouvernement a réduit la TPS tout en augmentant l'impôt sur le revenu. L'un annulait l'autre.
Monsieur Orr, vous pouvez répondre à cette question et je donnerai aussi l'occasion de le faire à Mme Russell.
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Je vais vous expliquer pourquoi j'ai dit cela.
Tout le temps que j'ai travaillé dans l'administration gouvernementale, j'ai été très agacé lorsque j'entendais tout le monde dire qu'étant donné tout ce qui se dépense, des milliards et des milliards de dollars doivent forcément disparaître d'une manière ou d'une autre. On pouvait donc sabrer là-dedans sans que les gens ne s'en rendent compte. Or, par définition, chaque dollar dépensé par le gouvernement est affecté à quelque chose ou versé à quelqu'un, ce qui entraîne nécessairement des répercussions.
En tant qu'hommes et que femmes politiques, vous avez à faire des choix de nature politique, tout comme le Parlement. Cela étant dit, il n'existe pas de mystérieuse petite caisse quelque part dont on peut retirer des fonds sans que personne n'en subisse les conséquences.
Par conséquent, oui, les programmes auxquels nous tenons sont touchés ainsi que les sommes versées aux gens, qu'il s'agisse de fonctionnaires ou de prestataires. Telle est la dure réalité du monde. Malheureusement, lorsqu'on comprime les dépenses, il faut faire des choix.
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On peut aussi agir au moyen du supplément à la prestation fiscale pour enfants ou de nombreux autres mécanismes. Je vous remercie.
J'aimerais maintenant parler d'éducation. Monsieur Drummond, j'ai eu le plaisir d'entendre la conférence que vous avez prononcée il y a de cela un an et demi à Halifax, lors de la rencontre de l'Association des universités de l'Atlantique. Vous avez alors fait d'excellentes remarques sur la concurrence que nous livrent les économies émergentes et sur la nécessité pour le Canada d'aller de l'avant par rapport à la chaîne de valeur. Nous devons investir dans l'éducation et dans la R-D. Je rappelle que les frais de scolarité ont augmenté et que ces 15 ou 20 dernières années, le ratio des effectifs étudiants et des enseignants s'est considérablement détérioré. Nous avons besoin de plus d'argent, car le gouvernement s'est montré assez avare lorsqu'il s'est agi d'appuyer la recherche et le développement et l'éducation.
On a beaucoup insisté sur les crédits d'impôt, mais ils n'aideront nullement les Canadiens à avoir accès à l'université ou à une autre forme d'éducation postsecondaire, ni à se perfectionner; ils sont seulement favorables à ceux qui sont déjà rendus à cette étape.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de la question. Comment faire en sorte que plus de Canadiens poursuivent leurs études? Devrions-nous accorder surtout des bourses aux gens à faible revenu? Faut-il encourager davantage la recherche ou devrions-nous continuer à bricoler le régime fiscal, qui aide déjà ceux qui sont aux études universitaires ou collégiales?
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Si vous permettez, je vais commencer.
D'abord, il faut reconnaître au gouvernement actuel et à son prédécesseur ainsi qu'aux provinces le mérite d'avoir commencé à réinvestir dans l'enseignement postsecondaire. Nous avons presque réduit à néant tout soutien pendant les années 80 et au début des années 90, mais avec cela, nous pouvons parler d'un renouveau. Il demeure encore quelques lacunes dans les programmes de deuxième et de troisième cycles et dans des choses de ce genre, mais la situation est relativement bonne maintenant.
À mon avis, les frais de scolarité ne sont pas ce qui fait problème, mais on ne peut certainement pas permettre à des considérations pécuniaires d'empêcher les gens d'étudier. Je vous prie donc instamment de vous pencher de nouveau sur une proposition qui a déjà été envisagée au Canada, mais qui est restée sans suite, le régime de remboursement des prêts en fonction du revenu. Un tel mécanisme donne la somme en entier à l'étudiant dès le début de ses études et lui permet de la rembourser selon son revenu. Il allégera donc le fardeau financier des études dès leur début. Évidemment, il faudra assortir à cela des subventions aux étudiants à faible revenu, mais de toute manière, le gouvernement a déjà pris des initiatives en ce sens, comme la plupart des provinces.
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C'était vraiment très bien, ce débat était vraiment intéressant à suivre.
Je ne vais certainement pas tenter de réfuter les propos de mon bon ami d'en face; je me contenterai toutefois de souligner à quel point il était intéressant de l'entendre affirmer que la diminution de la TPS a été mesquine et stupide. Il représente pourtant un parti qui voulait supprimer cette taxe en entier. Je suppose que cela aurait alors été sept fois plus mesquin et sept fois plus stupide.
Quoi qu'il en soit, depuis le mois de janvier, quelque 260 000 emplois à plein temps ont été créés. Monsieur Orr, vous avez fait une excellente remarque au sujet de... Je crois que nous profitons tous énormément de nos voyages dans l'ensemble du pays et de la possibilité qu'ils nous donnent d'en apprendre beaucoup au sujet de chacune des provinces, et même de voir l'abondance dont jouit présentement l'Alberta.
Au sujet du transfert d'emploi, je me demande si vous pouvez m'éclairer sur deux points: premièrement, pourquoi estimez-vous que 260 000 personnes de plus sont au travail dans notre pays depuis le mois de janvier; deuxièmement, comment pourrions-nous nous y prendre pour que ces 300 000 emplois soient répartis dans l'ensemble du pays?
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Il faut d'abord se demander où se trouvent ces emplois. Ils ont été créés surtout dans l'Ouest. À cet égard, le Québec et l'Ontario ont été particulièrement faibles. On y trouve un important secteur manufacturier, or il a connu des pertes d'emploi considérables.
Je le répète, les statistiques nationales actuelles ne signifient rien, par rapport à toute une série de variables. Ainsi par exemple, le cas de l'inflation est assez bizarre. Chaque province à part l'Alberta connaît une inflation inférieure à la moyenne nationale. Pendant ce temps, en Alberta, le produit intérieur brut a augmenté cette année de quelque 7 p. 100 et la croissance du revenu nominal s'est accrue de 14 p. 100.
Si l'on ne tient compte que de l'incidence, cela dissimule quelque peu les faiblesses observées dans les secteurs manufacturiers. C'est vraiment tout le problème concernant l'adaptation à l'appréciation du dollar canadien et, maintenant, les pressions additionnelles venant d'une diminution de la demande américaine.
La principale raison pour laquelle la création d'emplois a été aussi forte, c'est en raison de la vigueur du secteur énergétique. C'est en Alberta qu'on a créé beaucoup d'emplois — de façon très disproportionnée. Il faut également tenir compte des taux d'intérêt. Même s'ils augmentaient, ils demeuraient relativement faibles par rapport au taux précédent et contribuent à aider l'industrie de la construction.
Que pouvons-nous faire pour accroître la mobilité interprovinciale? J'ai parlé de l'assurance-emploi, mais je tiens à souligner que les effets pervers de l'assurance-emploi ne représentent aucun facteur, d'ailleurs minime, qui permet d'expliquer la faiblesse de la mobilité interprovinciale.
J'aimerais entre autres que l'on mette sur pied un programme, à RHDSC, par exemple, qui met particulièrement l'accent sur la mobilité interprovinciale et que l'on considère la famille comme un tout. C'est une importante décision de trouver un emploi, d'aider la famille à déménager, d'offrir du counselling et ainsi de suite. Il s'agit d'un programme social destiné à favoriser cette mobilité. Je pense que c'est une initiative que pourrait prendre le gouvernement fédéral. Je reviens constamment sur l'assurance-emploi, parce que nous en parlons depuis quinze ans. Nous sommes en mesure d'apporter ces changements. Mais cela ne représente qu'un petit facteur.
Parallèlement, je tiens à dire que la situation dans la province de la Saskatchewan est stupéfiante. La création d'emplois a été plus faible en Saskatchewan au cours des dix dernières années que dans la plupart des provinces de l'Est, pourtant le taux de chômage demeure l'un des plus faibles. Les gens partent de la Saskatchewan lorsque les perspectives d'emploi sont rares; ils ne déménagent pas de l'Est.
On ne peut donc pas simplement en rejeter la responsabilité sur notre système d'assurance-emploi. Il est très compliqué de déterminer les raisons pour lesquelles, malgré tous les emplois qui existent, nous avons 300 000 personnes dans l'Est qui sont au chômage.