:
Bonjour, chers collègues. Je suis content de vous voir de retour.
Bonjour à nos témoins d'aujourd'hui. C'est un plaisir de vous revoir. Merci d'être des nôtres.
Nous allons poursuivre nos séances d'information sur les paradis fiscaux et l'évitement fiscal avec
[Français]
le Bureau du vérificateur général du Canada. Bienvenue.
[Traduction]
D'après ce que je comprends, vous avez des remarques liminaires. Nous serons heureux de les entendre. Nous vous écoutons.
:
Merci, monsieur le président.
Nous vous remercions de nous donner l'occasion de vous parler de nos travaux portant sur les paradis fiscaux et l'évitement de l'impôt au niveau international.
Je suis accompagnée de M. John Rossetti, vérificateur général adjoint responsable des vérifications de l'Agence du revenu du Canada, de Mme Vicki Plant, directrice principale, et de Mme Brenda Siegel, directrice, toutes deux responsables des vérifications de gestion de l'Agence du revenu du Canada.
J'aimerais pour commencer vous exposer brièvement quelques éléments de nos récentes vérifications qui présentent un lien avec les questions que le comité étudie actuellement. Ces travaux nous ont aidés à recenser un certain nombre de facteurs qui contribuent à la capacité de l'Agence du revenu du Canada de repérer et de régler les cas d'inobservation et d'évitement fiscal.
Ces facteurs sont notamment les suivants: des techniques efficaces d'évaluation des risques; des sources d'information fiables afin de faciliter l'évaluation des risques et l'orientation des travaux de vérification; des vérificateurs expérimentés et bien formés; des spécialistes qualifiés pour traiter les questions compliquées comme les prix de transfert; la mise en commun de renseignements avec d'autres administrateurs fiscaux nationaux; et un cadre législatif qui facilite l'administration de lois fiscales complexes et qui permet de traiter rapidement les cas d'abus recensés et de conséquences imprévues.
[Français]
En février 2007, nous avons déposé un rapport Le Point qui faisait suite à nos vérifications de 2001 et de 2002 de l'impôt des non-résidents et de l'imposition des opérations internationales des résidents du Canada. Dans l'ensemble, nous avons constaté que l'agence avait fait des progrès satisfaisants dans l'application de nos recommandations.
Nous avons constaté que l'agence avait lancé des initiatives efficaces en élaborant des techniques et des outils d'évaluation des risques pour la planification des vérifications concernant les questions fiscales au niveau international. Cependant, nous avons aussi recommandé que l'agence essaie d'avoir accès à de plus amples renseignements sur les opérations des contribuables lorsqu'elle peut démontrer que cela permettrait d'améliorer la détermination et l'évaluation des nouveaux risques ou l'observation.
Nous avons aussi constaté que l'agence n'avait pas conçu de nouvelles initiatives en vue de remédier au faible niveau d'expérience en vérification fiscale internationale, lequel subsiste dans certains des bureaux des services fiscaux qui traitent des dossiers présentant les plus grands risques. Un manque d'expertise pourrait entraîner un manque d'uniformité dans les plans de vérification internationale et dans l'étendue de ces vérifications dans l'ensemble du pays, de même qu'une perte de revenus fiscaux.
[Traduction]
Il importe de mentionner que l'Agence n'est pas chargée d'assurer seule l'observation des règles fiscales internationales au Canada. Par exemple, les Services du contentieux des affaires fiscales du ministère de la Justice Canada sont chargés de porter en justice les cas de violation des règles fiscales, y compris les stratagèmes abusifs d'évitement de l'impôt. Le ministère des Finances Canada a charge de proposer des changements à la législation fiscale et de négocier les conventions fiscales du Canada afin de protéger son droit d'imposer les opérations internationales. Ces trois organismes doivent se concerter afin de protéger l'assiette fiscale.
Nous avons fait rapport sur divers stratagèmes fiscaux dont nous avons pris connaissance au fil des ans. Par exemple, en 2007, nous avons fait état de progrès accomplis par l'Agence, notamment au chapitre de l'établissement de nouvelles cotisations pour 72 fiducies dont les gains en capital s'élevaient à plus de 600 millions de dollars. Ces fiducies avaient été créées pour éviter de payer de l'impôt au Canada en utilisant la convention fiscale avec la Barbade. Nous avions pris connaissance de ces cas en 2001 et de plusieurs autres stratagèmes conçus pour tirer parti de la convention fiscale entre le Canada et la Barbade.
À plusieurs occasions dans le passé, nous avons exprimé des inquiétudes au sujet d'arrangements fiscaux s'appliquant aux sociétés étrangères affiliées. Nous avions relevé des transactions où des sociétés canadiennes sous contrôle étranger avaient contracté des dettes au Canada pour financer des investissements dans des tiers pays. Nous avions également relevé une transaction dans laquelle une société étrangère affiliée d'une société canadienne sous contrôle étranger avait servi à déplacer du Canada à la Barbade, en franchise d'impôt, des gains en capital de 500 millions de dollars.
Il est important de noter que mon bureau n'avait pas recommandé que l'on élimine de façon générale la déductibilité d'intérêts. Nous avions plutôt indiqué qu'elle pouvait constituer une menace pour l'assiette fiscale et recommandé, en 2002, que le ministère des Finances Canada obtienne et analyse des renseignements à jour pour réévaluer la justification des règles suivantes et leur incidence sur les recettes fiscales: les règles qui permettent aux sociétés canadiennes sous contrôle étranger de réclamer une déduction pour les intérêts payés sur des fonds empruntés pour investir, directement ou indirectement, dans des sociétés étrangères affiliées; les règles qui permettent à des entités bénéficiant d'un régime fiscal privilégié dans les pays signataires d'une convention fiscale avec le Canada de ramener au Canada des revenus en franchise d'impôt.
[Français]
Les problèmes que nous avions soulevés nous préoccupent encore aujourd'hui et présentent de toute évidence un intérêt pour le comité. Nous croyons que l'annonce par le ministre des Finances de la création d'un comité consultatif d'experts en fiscalité pour mener une étude et des consultations constitue une étape concrète visant à donner suite aux recommandations que nous avions faites. Nous espérons que ces travaux préciseront les modifications législatives qui pourraient être requises pour protéger l'intégrité de l'assiette fiscale du Canada.
Ceci conclut, monsieur le président, ma déclaration d'ouverture. Mes collègues et moi serons heureux de répondre aux questions des membres du comité. Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Et merci à vous, madame Fraser, d'avoir bien voulu comparaître. Nous apprécions toujours ce qu'apportent vos témoignages et voulons continuer dans cette voie.
Le comité se heurte à quelques difficultés. D'après les témoignages que nous entendons, la question est hautement complexe. Devrions-nous avoir des conventions avec des pays censés être des paradis fiscaux? Est-ce bon pour le Canada en matière d'investissement, de maintien du capital au pays et de rapatriement d'une partie des capitaux parfois exportés, qui reviennent ici?
Avez-vous une opinion sur la question?
:
Il s'agit en grande partie d'une question de politique, manifestement liée à la législation fiscale.
Ce qui nous préoccupe depuis longtemps, c'est la protection de l'assiette fiscale au Canada et le travail de Revenu Canada pour veiller au maintien de cette assiette, adopter des évaluations de risque adéquates et entreprendre les activités voulues pour repérer les cas d'abus possibles — le tout avec les ressources nécessaires à cet effet. C'est essentiellement dans cette optique que nous avons travaillé dernièrement.
Nous avons signalé par le passé une série de domaines où étaient élaborés des plans ou des stratagèmes semblant aller à l'encontre des objectifs de certaines conventions, avec pour effet la réduction ou l'affaiblissement de l'assiette fiscale canadienne.
Nous recommandons depuis plusieurs années déjà la réalisation d'une bonne étude sur la question; une étude relativement large, vu les liens qui existent entre toutes les questions, dont la déductibilité des intérêts et les paradis fiscaux; une étude qui recense les risques principaux et la façon d'y remédier, probablement par des mesures législatives.
:
Excusez-moi de vous interrompre, mais nous avons peu de temps.
Nous semblons avoir des difficultés à bien saisir les stratagèmes en question. Nous avons entendu témoigner des avocats, des comptables, qui y voient une procédure normale. Quant à l'ARC, ses représentants nous ont dit que, à moins d'avoir une idée d'ensemble de la structure corporative, il était très difficile de procéder à une vérification. Sans la coopération de la société faisant l'objet d'une vérification, il est difficile de saisir la structure corporative complète.
Par où commencer? Ni les avocats ni les comptables ne sont disposés à entrer dans le détail de leurs stratagèmes. Je suppose que c'est pour cela qu'on les paie. L'ARC a des difficultés à procéder à une vérification portant sur la structure corporative complète, à moins qu'existent des conventions fiscales entre le Canada et les pays où sont installées les sociétés des multinationales.
Par où commencer? Comment procéder à une analyse d'ensemble du risque?
:
Merci, monsieur le président.
Merci, madame, d'être présente aujourd'hui.
Quand on a entrepris cette étude, une initiative du Bloc, on trouvait qu'il n'y avait pas de progrès au chapitre de la disponibilité de l'information. Vous le rappelez au point 10 de votre énoncé, qui fait référence à la recommandation 11.114 que vous aviez faite en 2002. Vous dites au point 10:
[...] que le ministère des Finances du Canada obtienne et analyse des renseignements à jour pour évaluer la justification des règles suivantes et leur incidence sur les recettes fiscales :
Et vous parlez notamment des conventions fiscales que certains pays ont signées avec le Canada. Je pense particulièrement à la Convention fiscale entre le Canada et la Barbade.
Avez-vous eu une réponse du ministère, depuis 2002, à ce sujet? À ce comité, on n'a pas été capable d'avoir d'information qui aurait correspondu à la demande que vous faisiez.
:
En effet, si on veut protéger l'assiette fiscale, il est important que l'on connaisse bien les menaces et les transactions qui se font. On ne doit pas le faire simplement sur une base individuelle, mais on doit plutôt avoir une vue d'ensemble, parce que c'est tellement interrelié.
Je veux rappeler au comité qu'une étude très sérieuse a été faite en 1997, le rapport Mintz, dont les recommandations étaient aussi considérées comme très sérieuses par tout le monde. À ce qu'on sache, il n'y a pas eu de suivi de cela. Nous considérons donc qu'il serait bien d'avoir une étude, mais il faut tenir compte de celle qui a déjà été faite. On pourrait peut-être la mettre à jour ou ajouter des événements plus récents, mais une étude très exhaustive a déjà été faite à l'époque.
:
Merci, monsieur le président. Et merci à tous d'avoir bien voulu comparaître.
Madame Fraser, nombreuses sont les personnes qui ont fait ce genre de remarques. Il y a eu de hauts cris, notamment de la part de Bay Street et du principal parti d'opposition, comme quoi il y a des raisons légitimes de permettre l'évitement fiscal et comme quoi nous devons nous garder d'être les seuls scouts à tenter de veiller à ce que les gens paient leur juste part d'impôts ou ne contournent le régime fiscal mis en place pour les sociétés.
Généralement parlant, que se passerait-il, selon vous, si toutes les nations partaient du même principe, si tous les pays de l'OCDE se refusaient à être des scouts veillant à ce que chacun paie sa juste part d'impôts? Au bout du compte, est-ce que l'on ne finirait pas, partout dans le monde, par faire retomber le fardeau fiscal sur les particuliers?
Dans votre rapport de 2002, vous évoquez les stratagèmes de cumul des déductions. Vous dites, notamment:
Ce type de mécanisme de financement incite les multinationales ayant leur siège social à l'étranger à endetter leurs filiales au Canada au lieu de celles situées dans un pays où les taux d'imposition sont plus faibles. Toutefois, pour obtenir les deux déductions des frais d'intérêt (l'une au Canada et l'autre dans un pays étranger), l'investissement doit être fait dans un pays autre que le Canada. De même, les emplois s'y rapportant doivent être exercés à l'extérieur du Canada.
J'ai deux questions liées à cette citation. Tout d'abord, pourriez-vous nous donner un exemple pratique de la façon dont cela pourrait fonctionner? Et, deuxièmement, pensez-vous que cela reste vrai, cinq ans après votre rapport? La pratique reste-t-elle répandue?
:
Entendu. J'ai trouvé encourageante, au fait, votre remarque selon laquelle l'approche adoptée par le ministre, avec la constitution d'un groupe consultatif, était un pas dans la bonne direction.
En dernier lieu, j'aimerais aborder la question de l'équité fiscale et des allègements d'impôt en général. Il y a une notion que je me suis efforcé d'aborder avec tous les témoins et avec laquelle ils sont généralement tombés d'accord: plus les taux d'imposition sont faibles, moins on est porté à essayer d'y échapper. À en juger par certains des stratagèmes dont nous avons entendu parler ou du moins par certaines rumeurs, cela nécessite beaucoup de travail. Les sociétés investissent des sommes considérables dans la planification fiscale, dans l'élaboration de façons d'échapper à l'impôt. Si nous réduisons les impôts, toutefois, il y a moins d'intérêt à essayer d'élaborer ces stratagèmes.
N'est-ce pas le cas?
:
Il y a une chose qui me frappe et que vous avez soulignée dans votre rapport de 2002: la Barbade a un taux d'imposition des sociétés de 40 p. 100, mais une fourchette allant de 1 à 2,5 p. 100 seulement pour les entreprises internationales. Elle a en fait deux registres fiscaux. La Barbade attire des sociétés qui n'auraient aucun intérêt à s'y installer sans ce faible taux d'imposition. On nous a précisé l'autre jour que l'OMC avait enlevé la Barbade de sa liste des paradis fiscaux non coopératifs, sans toutefois dire qu'il ne s'agissait pas d'un paradis fiscal.
On a souligné que ce type d'arrangement rendait les sociétés plus concurrentielles. Je peux vous garantir, quant à moi, que toutes les entreprises de Peterborough seraient plus concurrentielles si elles n'avaient pas à payer d'impôt. Ce n'est pas un aspect vraiment positif pour le Canada, dans la mesure où, en l'absence total d'arrangement de ce type, si aucune nation n'y avait recours, tout le monde serait sur un pied d'égalité et tout serait parfait. Si le phénomène est positif pour le Canada, c'est uniquement parce que d'autres nations ont recours à ces stratagèmes.
Pouvez-vous recommander des approches nous permettant, à l'avenir, de collaborer avec nos partenaires de l'OCDE, afin que l'équité fiscale devienne un sujet de préoccupation un peu plus généralisé?
:
Monsieur le président, en réponse à la question du député, je voulais juste signaler que le problème était actuellement à l'étude à l'OCDE. Tous les pays membres de l'OCDE ont en effet signé, l'automne dernier, la Déclaration de Séoul, qui identifie le respect des obligations fiscales comme étant une préoccupation majeure commune à tous. En signant cette déclaration, ces pays se sont engagés à entreprendre certaines actions visant notamment à faire respecter les règlements de l'administration fiscale de chaque pays, afin d'éviter, justement, ces situations où un pays est exploité aux dépens d'un autre.
Il y a donc des efforts de ce type déployés sur la scène internationale, ainsi qu'une reconnaissance internationale du problème, avec des efforts pour améliorer l'échange d'information, l'information des vérificateurs et la coopération entre les pays. On entreprend donc des actions positives, au sein des 30 pays membres de l'OCDE, du moins.
:
Merci, monsieur le président.
Et merci à vous, madame Fraser, ainsi qu'à vos collaborateurs, qui intervenez sur une question qui ne date pas d'aujourd'hui mais remonte, je crois, à au moins une vingtaine d'années.
Dans votre rapport de 1992, vous mentionniez l'engagement pris par le ministère des Finances, en 1987, de procéder à un examen d'ensemble des règles s'appliquant à la déductibilité des intérêts. Et nous voici rendus, 20 ans plus tard, en 2007, à nous demander où nous en sommes.
En lisant vos rapports de 1992 et de 2002, je suis parvenue à la conclusion que vous vous préoccupiez en fait de la question générale de la déductibilité des intérêts des sociétés étrangères affiliées. Vos préoccupations incluaient la double déduction, sans toutefois s'y limiter.
Vous indiquez dans votre rapport de 2002 que vos préoccupations de 1992 restaient vraies, nommément:
Quand une société canadienne exerce des activités à l'extérieur du Canada par l'intermédiaire d'une société étrangère affiliée, les frais d'intérêts exigibles sur l'emprunt contracté pour investir dans les activités de cette dernière peuvent être déduits au Canada[...].
C'était votre préoccupation à l'époque, n'est-ce pas? Et cela reste-t-il votre préoccupation aujourd'hui?
:
D'après moi, l'annonce effectuée dans le cadre du budget de 2007 était beaucoup plus large que cela. Elle portait sur la déductibilité des intérêts en général, pas seulement sur les sociétés canadiennes sous contrôle étranger. Elle était donc bien plus large.
C'est un problème qui ne date pas d'hier et qui a suscité le dépôt de nombreux projets de loi. Nous avons toujours recommandé, quant à nous, la réalisation d'une analyse et d'une étude approfondies, comme point d'appui à toute décision. Dans ce domaine, les règles suscitent beaucoup de confusion et d'incertitude. Or, il faut absolument que la loi soit claire.
:
C'est un problème qui a été signalé. Notre préoccupation essentielle, toutefois, c'étaient les sociétés canadiennes sous contrôle étranger. Leur structure corporative leur permettait d'importer la dette au Canada, ce qui comportait très peu d'avantages pour notre pays. On peut estimer différente la situation d'une société canadienne qui investit à l'étranger, vu que, au bout du compte, il peut en résulter des bénéfices pour des actionnaires canadiens.
Je crois que nous fournissions des exemples dans nos vérifications. La plupart des exemples mentionnés impliquaient des sociétés américaines, mais des sociétés américaines ayant une filiale canadienne. Si cette filiale canadienne a des dettes, même envers sa société-mère, puis investit à l'étranger et déduit des frais d'intérêts au Canada, eh bien, au bout du compte, les bénéfices ne reviennent pas au Canada.
Au nom du comité, je voulais signaler la présence dans la salle aujourd'hui d'une délégation de parlementaires pakistanais. Nous leur souhaitons la bienvenue et les remercions de leur intérêt.
Des voix: Bravo!
Le président: Nous poursuivons maintenant avec M. Thibault.
M. Thibault, pour cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président. J'espère que nos amis du Pakistan trouveront des occasions d'investissements pendant leur visite au Canada.
Des voix :Oh, oh!
L'hon. Robert Thibault: Madame Fraser, merci encore de clarifier les choses pour le comité.
Si je comprends bien vos notes, ce qui vous préoccupe n'est pas la déductibilité en général des intérêts, qui a fait l'objet d'une annonce dans le budget, mais les abus résultant du recours à des paradis de faible imposition pour l'évasion fiscale, plutôt que les avantages du commerce international.
:
Quand l'Agence a comparu devant le comité pour le Budget des dépenses, il y a quelque temps, c'est un problème qu'elle a signalé. Il faut croire que les experts en fiscalité internationale sont très en demande. Dès que l'ARC a fini de les former, ils peuvent trouver un travail mieux payé ailleurs. Le problème persiste donc.
Nous parlons beaucoup des Bahamas, qui semblent être le point chaud à l'heure actuelle. Mais une bonne part des capitaux transitent seulement par les Bahamas avant d'être investis dans d'autres marchés, pour des questions de compétitivité internationale. Du point de vue de la concurrence, cela peut avoir des aspects positifs. Il faut que nos sociétés puissent croître.
D'où la nécessité de faire preuve de prudence, même en évoquant la double déduction ou la structure étagée. Nous voulons éliminer les abus, pas l'avantage concurrentiel de nos sociétés canadiennes, qui doivent lutter contre des sociétés utilisant les mêmes véhicules financiers.
Mais vous avez abordé un autre aspect, déjà évoqué par quelques personnes devant le comité: le report de dettes au Canada, qui est un abus manifeste et constitue un risque pour notre compétitivité et notre économie en général. Avez-vous une idée de l'ampleur du problème? Avez-vous poussé votre analyse jusque-là?
:
Nous ne nous sommes pas attardés sur ce qui se faisait ailleurs. Par contre, nous avons observé les rouages de l'ARC elle-même. C'est dans la région du Grand Toronto qu'existent les problèmes les plus criants, ce qui n'a rien de surprenant, vu la concurrence existant pour ce type d'expertise; mais c'est aussi la région où existent les dossiers les plus complexes. Dans d'autres bureaux, il y a l'expertise voulue. À l'échelle du Canada, l'ARC a bien l'expertise voulue.
Nous reconnaissons sa grosse difficulté à être concurrentielle dans le marché de Toronto. Ce que nous lui avons plus ou moins suggéré, c'est de tirer parti de l'expertise qui existe ailleurs, d'avoir recours aux personnes d'expérience dans d'autres bureaux pour traiter les dossiers les plus complexes, bref, de se réorganiser différemment. L'Agence a convenu que l'idée était intéressante, mais je ne pense pas qu'elle soit tout à fait convaincue. Toutefois, la réalité est qu'elle aura du mal à disposer de cette expertise dans la région du Grand Toronto.
:
Entendu. On fera un suivi sur la question.
Quand je soulève la question ou quand les gens de ma circonscription m'en parlent — cela arrive peut-être à certains de mes collègues également —, je suis d'abord atterré par le fait que certaines sociétés canadiennes peuvent se soustraire à leurs obligations fiscales légitimement. Cela me déprime. Par contre, la réaction des gens de ma circonscription dans ce cas me déçoit un peu. Ce que j'entends le plus souvent en retour, c'est: « Où est-ce que je peux trouver quelqu'un comme cela? » ou encore « Comment est-ce que je peux faire cela? ». Rares sont ceux qui disent: « Ce n'est pas juste. » ou « Ce n'est pas correct. » ou encore « Moi je paye plus d'impôts. »
Peut-être donc n'avons-nous pas la bonne approche; peut-être même ne concevons-nous même pas la bonne approche. Au lieu de courir comme des fous en essayant d'assommer le spermophile une fois qu'il pointe le nez hors de son terrier avant de disparaître, nous devrions élargir l'accès à ce type de mécanismes, afin que plus de Canadiens, des petites et moyennes entreprises, des particuliers qui travaillent pour payer leurs impôts, puissent avoir recours au même type d'expertise que les grosses sociétés.
Que dites-vous de cette idée?
:
Oui et c'est un problème que je veux relever. J'ai une préoccupation qu'a exprimée également M. Brison, qui est parmi nous aujourd'hui et qui souhaitait mettre les sociétés sur un pied d'égalité: il est considérablement plus difficile pour une petite entreprise de respecter les contraintes réglementaires que pour une grosse entreprise. Bien des gens qui ont été aux prises avec les structures réglementaires canadiennes partagent cette préoccupation et j'y vois un parallèle.
Sachant qu'un certain nombre de petites et moyennes entreprises et de particuliers avaient tenté d'utiliser les stratagèmes de paradis fiscaux coopératifs mis en marché, j'ai été un peu affligé d'entendre l'Agence du revenu du Canada indiquer l'autre jour dans son témoignage qu'elle y voyait un véritable problème et s'efforçait activement d'y mettre fin. Mais si c'est un véritable problème pour ce fretin et si l'Agence du revenu du Canada s'attache à ce domaine, je crains que c'est parce que l'Agence a des joueurs de dames qui s'en prennent à d'autres joueurs de dames, tandis que le joueur d'échecs échappe à l'attention dont il devrait faire l'objet.
Êtes-vous, comme moi, préoccupée par les obligations disproportionnées imposées aux petites et moyennes entreprises par rapport aux grandes entreprises, en matière de fiscalité des sociétés?
:
Je voudrais juste mentionner une ou deux choses en guise de réponse.
Tout d'abord, lors de notre dernière vérification, en 2007, nous avons constaté que l'Agence du revenu du Canada évaluait beaucoup mieux les risques pour l'assiette fiscale. Plutôt que de consacrer des efforts disproportionnés aux petites entreprises par rapport aux grandes, je m'attendrais à ce que l'Agence procède selon l'évaluation des risques.
D'autre part, je voudrais ajouter un rappel: que les petites entreprises jouissent d'un taux d'imposition intéressant, du moins pour une certaine proportion de leurs revenus, par rapport aux grosses entreprises.
:
Merci, monsieur le président.
Merci, madame la vérificatrice générale, de votre présence.
Dans votre rapport de 2002, vous affirmiez que selon les données de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, les sociétés canadiennes avaient reçu 1,5 milliard de dollars en dividendes de sociétés situées à la Barbade.
Votre bureau est-il en mesure de nous fournir une mise à jour de ce montant? Avez-vous des estimations?
On a eu aussi d'autres discussions au comité à propos du concept de résidence, parce que les entreprises qui utilisent la convention fiscale pour rapatrier des dividendes exempts d'impôt doivent effectivement résider à la Barbade. C'est ce que stipule le règlement.
Par contre, des témoins qui sont venus nous rencontrer, entre autres un professeur dont j'ai oublié le nom, nous ont dit que ce n'est pas toujours évident que les entreprises ont effectivement une résidence à la Barbade où on prend véritablement des décisions.
Premièrement, vous êtes-vous penchés sur cette question? Savez-vous si l'Agence du revenu du Canada fait ce genre de vérification lorsqu'elle fait ses audits, ou si elle se base uniquement sur la bonne foi des compagnies?
:
Merci, monsieur le président, et merci à vous, madame, de votre présence.
Laissez-moi signaler, juste au passage, que vous étiez dans ma circonscription de Burlington, récemment, où vous avez fait un discours. Ma femme y a assisté; je crois qu'elle s'est entretenue avec vous et qu'elle a été très impressionnée. Qu'une vérificatrice se rende dans une ville et que l'on puisse vendre des billets à des gens pour un déjeuner-causerie, c'est extraordinaire.
Des voix: Oh, oh!
:
C'est possible, mais ma femme n'était pas du nombre.
Je suis arrivé un peu en retard, mais dans votre exposé d'aujourd'hui, vous avez mentionné vos recommandations au ministère des Finances dans votre vérification de 2002. Ma question porte en fait sur le processus. Quand vous effectuez une vérification — autant prendre l'exemple de ce qui se passe dans ce domaine —, faites-vous des recommandations sur le fonctionnement? Quand vous avez fait ceci en 2002, aviez-vous une idée de l'échéancier pour la réalisation du travail?
La documentation que vous fournissez est très appréciée; nous en prenons connaissance; mais quelles sont les attentes de votre bureau, une fois ces informations transmises?
:
Dans la plupart des cas, et surtout dernièrement, quand nous faisons des recommandations, si les ministères sont d'accord avec ces recommandations, ce qui n'est pas toujours le cas, nous nous attendons à ce que les ministères fournissent un plan d'action comportant un échéancier clair pour la résolution des problèmes.
Nous effectuons par la suite un suivi, selon le plan d'action et l'engagement à agir de la part du ministère. Le suivi s'accompagne d'un rapport, comme en février dernier.
Dans un domaine comme celui-ci, une bonne partie des problèmes que nous soulevons sont liés à des mesures législatives. Manifestement, même les ministères eux-mêmes ne peuvent pas toujours contrôler... C'est pourquoi, quand nous avons effectué le suivi sur la fiscalité internationale à l'ARC, nous avons indiqué que l'Agence avait effectué des progrès sur bien des questions de fonctionnement, mais qu'il restait des problèmes importants et complexes ayant trait à des mesures législatives sur lesquelles l'Agence elle-même avait très peu de prise.
Nous pouvons donc signaler le fait, mais devons manifestement nous contenter de faire des recommandations.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie beaucoup de votre présence ici aujourd'hui, madame Fraser.
Premièrement, j'ai des questions sur la distinction à faire — et je crois qu'il y a beaucoup de confusion — entre les paradis fiscaux et la double déductibilité. Selon la firme Ernst & Young, beaucoup de personnes, incluant le ministre des Finances, confondent les paradis fiscaux et la double déductibilité. Habituellement, la double déductibilité n'est pas reliée à... Habituellement, avec la double déductibilité, il y a des taux d'imposition plus élevés et, avec les paradis fiscaux, des taux d'imposition plus faibles.
Seriez-vous d'accord pour dire que les mesures prises pour traiter de la double déductibilité, par exemple, sont bien différentes de celles prises pour régler la question des paradis fiscaux?
:
Je vous remercie, monsieur Brison.
J'aimerais obtenir des éclaircissements concernant l'une des questions posées par M. Brison, parce que nous avons entendu un représentant de Revenu Canada ici plus tôt... Je tiens à m'assurer de bien comprendre. Vous avez mentionné qu'il s'agit de deux questions différentes. Pourtant, d'après ce que j'ai compris du témoignage des représentants de Revenu Canada, ces deux aspects sont étroitement liés. La double déductibilité et les paradis fiscaux peuvent être étroitement liés parce qu'il s'agit essentiellement d'un transfert de dettes. On emprunte de l'argent dans des pays où l'impôt est élevé et on le transfère dans des pays où l'impôt est faible.
Par exemple, Canada Co. emprunte de l'argent puis le transfère à Barbados Co., ensuite Barbados Co. prête le même argent à un autre pays où l'impôt est élevé, les États-Unis, le Royaume-Uni, par exemple. Par conséquent, le paradis fiscal ne favorise-t-il pas la double déductibilité? Ces deux aspects ne sont-ils pas étroitement liés? Lorsque le ministre parle de ces deux aspects, a-t-il tout à fait raison de partir du principe qu'ils ne s'excluent pas mutuellement?
:
Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais revenir moi aussi à un aspect soulevé par M. Brison. Il parlait du pays où les déductions d'impôt pouvaient être demandées, en indiquant que ces déductions pouvaient être demandées au Canada au lieu de l'être dans un autre pays, ce qui réduirait les recettes fiscales générales du Canada.
Mais en fait, l'une des choses que nous avons apprises de l'initiative Avantage Canada, c'est que le Canada est en train de devenir le pays du G-7 où le taux d'imposition des sociétés est le plus faible. Si c'est le cas, et si les sociétés peuvent déduire seulement une fois de leur impôt les frais d'intérêt sur un placement fait à l'étranger, elles demanderont la déduction dans le pays où l'impôt est le plus élevé et donc où la déduction d'intérêt est la plus importante. Cela ne va-t-il pas de soi?
:
Je pourrais écouter ce témoin toute la journée.
Je tiens à vous remercier, madame la vérificatrice générale, d'être ici.
Je pense que toutes les personnes ici présentes conviennent qu'il s'agit d'un domaine assez complexe. J'ai trouvé assez intéressante la réponse que vous avez donnée à M. Brison, à savoir que vous n'étiez pas au courant d'études qui avaient été faites — du moins qui avaient été mises à votre disposition au moment où vous avez rédigé vos rapports. Il me semble que vous nous avez rendu un service inestimable en préparant ce rapport, mais à certains égards, il n'examine qu'un côté de l'équation, et ce dont nous avons besoin, c'est de voir l'autre côté de l'équation.
La semaine dernière, nous avons entendu un témoin de l'Université de Toronto. Il a dit qu'il existe une opinion très répandue selon laquelle l'utilisation des centres financiers extraterritoriaux est une mauvaise chose simplement à cause des avantages fiscaux que procure leur utilisation. Puis, il a dit que lorsque l'on utilise ces centres financiers, leur utilisation se trouve à stimuler par la suite l'activité économique au Canada — de toute évidence au niveau des emplois au siège social mais souvent au niveau des services de soutien.
Les institutions financières ici au Canada en sont un exemple classique, lorsqu'elles investissent à l'étranger mais que le travail du siège social se fait ici de même que le travail administratif qui se fait souvent ici. Cela stimule l'emploi de techniciens; cela stimule le travail de bureau et des choses de ce genre.
La question que je vous pose est la suivante: lorsque vous préparez ces rapports, êtes-vous au courant des aspects macroéconomiques concernant la façon dont ces centres financiers extraterritoriaux stimulent en fait l'activité économique dans ce pays?
:
Nous n'effectuons pas le genre d'analyse dont vous parlez concernant les centres financiers extraterritoriaux. Ce que nous examinons, ce sont les mesures prises par le gouvernement pour protéger l'assiette fiscale lorsque des régimes ou des transactions visent clairement et uniquement l'évitement fiscal, lorsqu'il est clair qu'il n'existe aucune raison d'affaires de le faire.
Nous avons les exemples des fiducies, par exemple, où les actions d'une entreprise sont transférées à la Barbade ou à un autre paradis fiscal, sont vendues, et les profits ne sont pas imposés au Canada, et qu'il s'agit alors de l'unique raison d'agir ainsi — c'est le genre de transactions sur lesquelles nous mettons l'accent ici — ou lorsque des entreprises multinationales transfèrent essentiellement leurs dettes au Canada. Il faut que le gouvernement comprenne en quoi consistent ces transactions, où se produisent les abus et prenne les mesures pour les éviter, et c'est ce que nous recommandons.
De toute évidence, il peut exister des raisons très légitimes d'agir ainsi, de stimuler l'activité économique, mais il n'existe pas d'études portant sur cette question. C'est une question qui existe depuis très longtemps...
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Le taux d'imposition des dividendes provenant des sociétés privées et des sociétés publiques diffère, par conséquent je ne comprends pas pourquoi nous ne pourrions pas le faire pour les entreprises qui ont reçu des dividendes par le biais de paradis fiscaux ou dans le cadre d'une convention avec la Barbade. Je ne vois pas où se situerait la différence.
J'ai deux brèves questions, et l'une concerne la double déductibilité. Je crois comprendre que l'ARC a eu un problème lorsqu'elle a perdu une cause devant la cour de l'impôt. Je ne suis pas sûr s'il s'agissait de la division d'appel. Mais d'après ce que je crois comprendre, si vous déduisez les mêmes dépenses deux fois, cela n'est pas légal. Cela ne devrait pas être autorisé.
Je ne crois pas que les mesures que le gouvernement prendra dans un avenir rapproché pour essayer d'interdire la double déductibilité changeront la situation. Il s'agit d'essayer d'appliquer ces mesures ou d'attraper ceux qui profitent de la double déductibilité. Donc je ne vois pas comment la situation sera différente dans un an, dans cinq ans ou dans dix ans, parce qu'il est illégal de déduire deux fois les mêmes frais d'intérêt, n'est-ce pas?
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Je souhaite à nouveau la bienvenue aux membres du comité. Je salue certains nouveaux membres du comité et je les remercie d'être ici.
[Français]
Monsieur Chong et monsieur Gourde, je vous souhaite la bienvenue.
Conformément à l'ordre de renvoi du mardi 15 mai 2007, nous étudions le projet de loi .
[Traduction]
Nous sommes maintenant chargés d'étudier la loi budgétaire.
Oui, monsieur Del Mastro.
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Je vous remercie, monsieur McKay.
Je propose aux membres du comité que s'ils souhaitent proposer le nom de témoins à la greffière, qu'ils le fassent d'ici la fin de la journée aujourd'hui, au plus tard.
Je tiens à préciser à l'intention de tous les membres du comité que j'ai reçu des requêtes à divers moments depuis que vous m'avez élu président, de la part de certains d'entre vous, de voir les listes des témoins préparées par les autres membres du comité. À ce sujet, je tiens à vous dire — et j'ai toujours agi de cette façon-là dès le départ et j'ai l'intention de continuer à agir ainsi — que les listes de témoins présentées par votre parti politique ne concernent que vous et non les autres membres du comité. J'ai l'intention de continuer à agir ainsi en ce qui concerne les travaux du comité.
Cela dit, nous demanderons à recevoir la liste complète de tous les témoins proposés d'ici la fin de la journée, au plus tard, pour que l'on puisse communiquer avec les témoins que vous souhaitez entendre et prendre les dispositions pour qu'ils comparaissent ici au moment approprié.
Monsieur McKay.