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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 076 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 18 avril 2013

[Enregistrement électronique]

(0915)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs.
    Bienvenue à la 76e réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Nous sommes le jeudi 18 avril. Cette réunion est télévisée. Nous étudions le projet de loi d'initiative parlementaire de M. Shory, le projet de loi C-425.
    Nous avons un témoin. Nous aurons une demi-heure avec lui. Il s'agit de M. David Matas, conseiller honoraire senior de B'nai Brith Canada. Il a témoigné devant ce comité au moins deux fois, si je me souviens bien. Nous accueillons aussi Marc Chétrit Rieger, qui est avocat-conseil. Bonjour à vous, messieurs.
    Monsieur Chétrit Rieger, je crois que vous allez présenter le programme. Vous avez jusqu'à huit minutes pour faire votre exposé.

[Français]

    Bonjour. Je m'appelle Marc Chetrit Rieger. Je suis avocat à Montréal en droit criminel et en droit de la personne. J'ai également une maîtrise en droit international de la Sorbonne.

[Traduction]

    B'nai Brith Canada a été fondé en 1875. Il s'agit du premier organisme de défense des droits de la personne de la communauté juive.

[Français]

    Je vais céder la parole à mon collègue, qui vous en dira plus long à propos du mémoire que nous avons déposé au nom de B'nai Brith Canada.

[Traduction]

    David Matas est un avocat de Winnipeg spécialisé en droit de l'immigration et des réfugiés. Il est conseiller senior de B'nai Brith et a reçu l'Ordre du Canada en 2010.
    David.
    J'ai préparé un document d'information de 15 pages qui, je crois, vous a été remis. Je vais commencer par passer en revue les recommandations qui sont formulées à la fin. J'ai vu les amendements proposées et ils ont été utiles.
    Dans mon document, je fais 10 recommandations. La première est que le projet de loi englobe tous les actes de guerre ou les actes de conflits armés plutôt que de ne porter que sur les attaques contre les Forces armées canadiennes. Je vois que l'amendement tient compte de cette suggestion.
    La deuxième proposition est que le projet de loi s'applique seulement aux citoyens d'un pays étranger et ne s'applique pas aux résidents autorisés d'un pays étranger lorsqu'il est question de lois sur la citoyenneté. Encore une fois, l'amendement proposé en tient compte.
    La troisième proposition est que le projet de loi ne s'applique pas aux personnes nées au Canada dont le lien principal est le Canada. Il n'en est pas question dans les amendements.
    Je ferai remarquer qu'en ce moment, le projet de loi pourrait s'appliquer à une personne qui est née au Canada, n'a jamais quitté le Canada et n'a aucun lien avec l'autre pays dont elle est citoyenne à part le fait qu'un de ses parents lui a transmis sa citoyenneté. Il est possible que ce parent ne soit jamais allé non plus dans ce pays et qu'il n'en parle pas la langue.
    Nous devons penser à ce qui arriverait si d'autres pays adoptaient la même mesure législative que nous. Je pense que nous serions consternés qu'un autre pays nous expédie quelqu'un qui ne parle ni anglais ni français, qui n'a jamais mis les pieds ici et qui a commis un acte de terrorisme à l'étranger.
    Le quatrième amendement proposé est de faire en sorte que la conséquence pour les actes visés par le projet de loi soit modifiée, pour passer de « demande réputée répudier la citoyenneté » à « révocation de la citoyenneté ». Une des anomalies du projet de loi est que cela se faisait dans une demande réputée répudier la citoyenneté. Dans une certaine mesure, l'amendement le corrige en précisant qu'il est impossible de retirer la demande. Nous avons toujours une terminologie qui ne reflète pas la réalité. Ce n'est pas une demande de répudiation de la citoyenneté. C'est une révocation, et c'est ainsi qu'on devrait l'appeler, simplement pour utiliser un terme conforme à la réalité. Une autre raison, à laquelle je reviendrai, est que nous devrions suivre les mêmes procédures pour les mêmes conséquences.
    Dans la cinquième recommandation, le manque d'uniformité terminologique fait en sorte que les procédures pour ce type de révocation ne sont pas les mêmes que pour d'autres types. Dans ce cas précis, qui se rapporte à une citoyenneté réputée répudiée, le ministre rendrait une décision et la Cour fédérale procéderait ensuite à une révision judiciaire. Pour d'autres types de révocation déjà prévus dans la loi, la question serait soumise à l'examen de la Cour fédérale au motif qu'il s'agit d'une fausse déclaration. Nous sommes d'avis que dans les deux cas, les procédures et la terminologie devraient être identiques.
    Notre sixième recommandation est que la délivrance d'une mesure de renvoi soit intégrée à la même procédure que la décision relative à la révocation de la citoyenneté ou à la citoyenneté réputée répudiée. L'on devrait consolider les procédures, recommandation que le gouvernement a faite dans le projet de loi C-37 au cours d'une législature précédente. Un autre gouvernement a aussi proposé que la révocation et le renvoi soient consolidés dans le projet de loi C-16. Si le projet de loi est adopté tel qu'il est, il y aura révocation, mais la personne sera toujours au Canada. Alors il faut examiner les procédures de renvoi.
    B'nai Brith a une vaste expérience des révocations. Nous avons déterminé qu'une révocation ne suffit pas à elle seule pour régler le problème que vise le projet de loi. Il faut envisager des mesures de renvoi, et ces mesures n'ont pas bien fonctionné en conjonction avec la révocation.
(0920)
    La septième recommandation est que le motif de révocation ou de citoyenneté réputée répudiée lié aux actes de guerre ou aux conflits armés soit limité à la participation personnelle à de tels actes et au fait d'être membre au moment de la guerre ou du conflit armé. Cet élément de la loi doit être de nature uniquement prospective, du moins pour ce qui est du fait d'être membre d'une organisation. En ce moment, nous l'avons, même avec l'amendement qui vient avant et après le projet de loi, et qui ne se limite pas au fait d'être membre au moment du conflit armé.
    C'est un problème qui survient très souvent au plan de l'immigration, lorsque le fait d'être membre avant ou après l'acte est suffisant pour permettre la perte du statut, et l'on présume que cette jurisprudence continuerait de s'appliquer ici. Si quelqu'un est membre avant ou après l'acte, mais pas au moment où l'acte est commis — et notamment si c'est le cas avant l'adoption de la présente loi — il serait inopportun de révoquer la citoyenneté ou de déterminer que la citoyenneté est réputée répudiée.
    La huitième recommandation est de prévoir, pour une déclaration de culpabilité à l'étranger portant sur un acte terroriste similaire commis à l’étranger, une exception au motif de révocation ou de citoyenneté réputée répudiée si la déclaration de culpabilité a été faite au mépris des normes internationales. Encore une fois, il s'agit d'une exception dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés s'agissant de la définition de protection des réfugiés. En ce moment, le projet de loi propose qu'il soit possible de perdre son statut pour avoir commis un acte de terrorisme à l'étranger, même si cette infraction a donné lieu à une condamnation à l'étranger, même lorsque cette condamnation a été imposée au mépris des normes internationales acceptées. En réalité, nombre de gouvernements répressifs accusent leurs opposants d'être des terroristes et les trouvent coupables d'actes terroristes, alors que leur crime réel est de s'être opposés au gouvernement répressif en place, et il faut en tenir compte.
    La neuvième recommandation est que le motif de révocation ou de citoyenneté réputée répudiée doit être élargi de façon à inclure la complicité à des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité, des actes terroristes ou des génocides. En ce moment, nous sommes limités aux conflits armés et à quelques autres points particuliers. Nous croyons que le concept s'applique, et qu'il devrait s'appliquer, à ces autres violations graves des droits universels de la personne.
    Enfin, nous recommandons que l’on autorise la révocation ou la citoyenneté réputée répudiée pour un acte visé par le projet de loi seulement lorsqu’il n'est pas pratiquement possible d'intenter des poursuites, car la révocation ou la citoyenneté réputée répudiée est un recours judiciaire, mais pour certaines personnes vivant déjà à l'étranger, elle n'a pas beaucoup d'incidence, et les poursuites, si elles sont possibles, sont préférables pour leur effet dissuasif.
(0925)
    Merci, monsieur Matas.
    Monsieur Shory.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus ce matin.
    Monsieur le président, comme tout le monde le sait, ce projet de loi s'appuie sur mes trois croyances: je crois qu'il doit y avoir plus de voies vers l'intégration; je crois que nos troupes méritent le plus grand des respects; et je crois que la citoyenneté canadienne est un privilège qui mérite la plus haute estime.
    Monsieur le président, je sais gré aux membres du comité de prendre ce projet de loi très au sérieux et d'y consacrer tout leur temps. Je sais aussi gré aux témoins de leurs commentaires, en particulier ceux qui ont perdu des êtres chers à cause de ce type d'actes. Ils ont eu à écouter tous les autres témoins, dans une certaine mesure, alors que mes collègues de l'opposition balayaient en quelque sorte leurs préoccupations du revers de la main et tentaient de défendre les contrevenants.
    Monsieur le président, à mon avis, les personnes qui s'attaquent à ceux qui donnent leur vie ou mettent leur vie en péril pour défendre les valeurs canadiennes, pour défendre les droits dont nous jouissons ici, ne devraient pas avoir droit à la citoyenneté canadienne ou aux privilèges qui en découlent.
    Monsieur Matas, comme vous le savez, plus de 80 p. 100 des Canadiens du nord au sud et d'est en ouest ont appuyé ce projet de loi, et bien entendu, votre organisme en a fait autant — je vous en remercie. De plus, pendant les relâches, etc., j'ai eu l'occasion de rencontrer de nombreux Canadiens de différentes provinces, et je n'en ai pas rencontré un seul en désaccord avec l'intention de mon projet de loi qui énonce, au fond, que ceux qui protègent nos privilèges et les droits qui découlent de la citoyenneté devraient aussi avoir droit à la citoyenneté.
    J'ai assisté à toutes les réunions du comité pendant l'étude de ce projet de loi, et j'ai été chagriné, dans une certaine mesure, lorsque certains témoins — et, en fait, certains de mes collègues — ont laissé entendre que mon projet de loi ne respectait pas la procédure établie. Je demanderais à ces membres et, s'ils nous regardent, à ces témoins, de partir du principe que l'article 18 de la Loi sur la citoyenneté énonce simplement le processus dans le cadre duquel le ministre est tenu, tout d'abord, d'aviser la personne ou l'individu touché. Ensuite, un juge prendra une décision dont il sera possible d'appeler à la Cour fédérale. En outre, le ministre aura le droit ou le pouvoir de modifier cette décision.
    Ma question, monsieur Matas, est très simple, parce que nous parlons du projet de loi et des amendements présumés, que je dois passer en revue minutieusement.
    À votre avis, une fois que quelqu'un est trouvé coupable de l'une de ces infractions — terrorisme, acte de guerre ou, comme vous le dites, conflit armé, ou quel que soit le terme que nous finirons par utiliser — quelle peine minimale conviendrait-il d'imposer à l'individu en question?
    Que devrait être la peine minimale, c'est-à dire la...
    Ce qui arrivera, monsieur Matas — et c'est ce que je crois comprendre et telle est mon intention — c'est que lorsqu'une personne participe à des actes visés par mon projet de loi, c'est-à-dire des actes terroristes ou, comme vous l'avez mentionné, des actes de guerre, elle doit être traduite en justice au Canada. De toute évidence, cette personne sera trouvée coupable. Une fois qu'elle l'est, quelle peine minimale devrait lui être imposée? Croyez-vous que la peine minimale devrait être de dix ans, de cinq ans, de deux ans ou d'une journée? Avez-vous une opinion là-dessus?
(0930)
    L'amendement parle d'une peine d'au moins cinq ans, à l'alinéa 5g), et pour une infraction équivalente, il serait aussi question de cinq ans — c'est à l'alinéa c).
    Monsieur Matas, permettez-moi de vous poser la question directement. À votre avis, devrait-il s'agir d'une peine de cinq ans, ou d'une peine plus ou moins sévère?
    B'nai Brith ne s'est pas prononcé sur la question de savoir ce que devrait être la peine minimale.
    J'ai remarqué que dans votre préambule, vous aviez fait allusion au respect de la procédure établie, et c'est un point que nous avons soulevé dans le projet de loi. Je comprends qu'il y a une procédure. Comme vous l'avez fait remarquer, il y a celle qui se trouve à l'article 18.
    Ce qui nous préoccupe, c'est qu'il s'agit d'une procédure qui diffère de la procédure de révocation actuelle pour fraude et fausse représentation. Nous devrions avoir une procédure de révocation uniforme. Ce ne devrait pas être une procédure différente en fonction du motif de la perte de citoyenneté. Cela porte trop à confusion.
    De plus, la procédure de révocation actuelle est, à mon avis, meilleure que celle qui est décrite à l'article 18. Elle va directement à la Cour fédérale plutôt que de passer par le ministre, le juge de la citoyenneté et ensuite la Cour fédérale par le truchement d'une révision judiciaire, qui est beaucoup plus limitée.
    Je serais favorable à ce qu'un amendement à ce projet de loi prévoit la même procédure pour la perte de citoyenneté que la Loi sur la citoyenneté.
    Monsieur Matas...
    Votre temps est écoulé. Désolé.
    Madame Sitsabaiesan.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux commencer par dire merci. À titre de parlementaires, nous avons, selon moi, la responsabilité fiduciaire de faire de notre mieux pour rédiger des lois raisonnées qui respectent les valeurs et principes canadiens. Cela étant dit, j'aimerais encore une fois vous remercier. Votre document d'information est très approfondi.
    Monsieur Matas, à votre avis, les personnes qui ont la double citoyenneté feront-elles l'objet d'un examen encore plus minutieux si ce projet de loi est vraiment adopté?
    Certaines personnes ayant la double citoyenneté ne seraient pas dans la même situation que les personnes qui n'en n'ont qu'une seule. Elles seraient vulnérables à ce type de révocation ou de citoyenneté réputée répudiée, ce qui ne serait pas le cas des personnes qui n'ont qu'une seule citoyenneté.
    Je suppose qu'il est maintenant vrai que les personnes qui ne sont pas nées au Canada et qui viennent ici pourraient perdre leur citoyenneté pour avoir fait de fausses déclarations, ce qui, évidemment, ne pourrait pas arriver à une personne née au Canada. Mais cela accroît la vulnérabilité potentielle des personnes qui ont plus d'une citoyenneté.
    Merci.
    Vous avez parlé assez longuement de la révocation de la citoyenneté de personnes nées au Canada, qui y ont toujours vécu, mais qui ont peut-être la double citoyenneté.
    Je vais parler des citoyens canadiens qui sont condamnés à l'extérieur du Canada pour certaines infractions qui ont leur équivalent canadien. Au cours de réunions précédentes, de nombreux témoins se sont dit préoccupés des pays qui n'ont pas le même respect que le Canada pour l'application régulière de la loi, la primauté du droit ou les droits de la personne.
    Le projet de loi contient-il des mécanismes pour protéger ces personnes?
    En un mot, la réponse est non, pas dans le projet de loi en tant que tel.
(0935)
    Y a-t-il des recommandations que vous aimeriez...
    Oui. Nous proposons qu'on ajoute une exception si la déclaration de culpabilité a été faite au mépris des normes internationales. Il s'agit de notre huitième recommandation.
    Cette phrase est tirée de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en vigueur. Elle se trouve à l'article 97. Sous le régime de la loi actuelle, il est impossible de jouir de la protection accordée aux réfugiés si vous avez été trouvé coupable d'une infraction criminelle grave à l'étranger, sauf dans le cas d'une infraction qui a été imposée au mépris des normes internationales. Il faudrait utiliser cette phrase dans ce contexte. Voilà ce que nous proposons.
    D'accord.
    Si je vous ai bien compris, vous avez dit que les termes de la huitième recommandation ont été empruntés à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés en tant que telle?
    Tout à fait.
    D'accord.
    Les témoins précédents nous ont dit que cela créait en fait deux catégories de citoyens: ceux qui sont nés canadiens et ceux qui ont été naturalisés citoyens canadiens.
    Aimeriez-vous vous prononcer un peu plus là-dessus?
    Bien entendu, on souhaiterait que la plupart des personnes qui ont la double citoyenneté ne soient pas impliquées dans ces types d'actes, alors je ne dirais pas que la plupart des personnes ayant la double citoyenneté sont visées. Mais il est question d'infractions graves et elles doivent être prises au sérieux.
    Notre premier choix, et celui qui est préférable, est que les gens soient traduits en justice. Voilà pourquoi nous avons ajouté, dans la dernière recommandation, que cette approche devrait être privilégiée lorsqu'il est « pratiquement possible » de le faire. Cela devrait être la première option.
    Mais lorsqu'il est question d'une infraction grave, je pense qu'il est important d'en traduire les auteurs en justice. Il se pourrait qu'une action en justice ne soit pas une option viable dans ces circonstances. Je ne dirais pas que nous sommes incapables d'intenter des poursuites et que nous n'allons rien faire. Je pense que nous devons utiliser tous les recours judiciaires à notre disposition pour traduire en justice les auteurs de ces crimes graves.
    Dans la même veine, je suis entièrement d'accord avec vous pour dire qu'au Canada, les gens qui ont la double nationalité et l'ensemble des Canadiens sont, en majorité, des gens respectueux des lois.
    Avec ce projet de loi, avec la révocation de la citoyenneté, le Canada perd en fait sa compétence en matière de poursuites. C'est ce qu'un avocat des droits de la personne — un professeur — nous a appris lors de la dernière réunion.
    Est-il important que le Canada conserve cette capacité d'intenter des poursuites?
    En ce qui concerne la compétence du Canada en matière de poursuites pénales, le principe de base est la territorialité et non l'individualité. Nous conserverions une capacité d'intenter des poursuites... Ce que je veux dire, c'est que nous pouvons poursuivre des étrangers qui commettent des crimes au Canada. Il n'est pas nécessaire qu'ils soient citoyens canadiens. Nous pouvons extrader des gens qui sont à l'étranger — qu'ils soient citoyens canadiens ou non — afin de les poursuivre ici, si nous avons d'autres liens en matière de compétences.
    Nous sommes d'avis qu'il faut intenter des poursuites si c'est possible, mais si ce ne l'est pas, alors... Je ne suis même pas certain qu'il est si important de se préoccuper du maintien de la capacité de poursuivre.
    Merci.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole à Sadia.
    Vous avez environ 30 secondes.

[Français]

    Je vous remercie de votre témoignage.
    J'aurais une question à vous poser sur ce que vous avez mis en avant. Je vous cite:
[...] Le droit à la citoyenneté est un droit constitutionnel.

Révoquer, pour quelque raison que ce soit, la citoyenneté d'une personne qui est née au Canada, qui y a grandi et dont il s'agit [du] lien principal est sans aucun doute une violation du droit constitutionnel à la citoyenneté.
    Pourriez-vous donner plus de détails sur cette dimension?

[Traduction]

    Certainement. La Charte canadienne des droits et libertés accorde des droits aux citoyens. Par exemple, l'article 6 prévoit que tout citoyen a le droit de demeurer au Canada.
    De plus, parce que le mot « citoyen » est inscrit dans la Constitution, il a une importance sur le plan constitutionnel. Il n'est pas nécessairement limité ou défini en fonction de la définition contenue dans la Loi sur la citoyenneté. Il y a une jurisprudence dans d'autres pays.
    Aux États-Unis, par exemple, la Cour suprême a établi la jurisprudence constitutionnelle...
(0940)
    Nous devons poursuivre.
    ... sur la signification de citoyenneté, ce qui est différent...
    Monsieur, nous devons poursuivre; je suis désolé.
    Monsieur Lamoureux.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Matas, c'est un plaisir de vous voir ici aujourd'hui.
    Lorsque M. Shory a présenté le projet de loi — et nous sommes ici pour la deuxième lecture... J'ai toujours pensé que l'enjeu principal pendant la deuxième lecture était d'essayer de reconnaître l'importance des immigrants reçus qui viennent au Canada, et que s'ils joignent les forces, l'exigence liée à la citoyenneté passerait de trois ans à deux ans.
    Peu après, les députés ont commencé à attirer l'attention et à jouer avec cela. Nous avons un ministre de l'Immigration qui a pensé qu'il pourrait tirer profit de la présence de ce projet de loi précis au Feuilleton pour promouvoir un programme complètement différent. Maintenant, il semble davantage être axé sur les terroristes et la révocation de la citoyenneté plutôt que sur la présentation de son propre projet de loi. Je suppose que ce sera un problème important, parce que cela nous empêche d'avoir une bonne discussion approfondie sur ce que pourrait essayer de faire le gouvernement plutôt que discuter de ce que cherche à faire un député précis.
    La Charte accorde des droits aux citoyens canadiens et ils ont tout à fait le droit de demeurer au Canada. Dans le cas de certaines propositions concernant les amendements que pourrait présenter le gouvernement, il pourrait y avoir un problème à cet égard, surtout lorsque la double citoyenneté entre en jeu. Comme vous l'avez indiqué, une personne pourrait être née au Canada, y avoir grandi et y avoir passé sa vie entière; ensuite, elle pourrait épouser une personne d'un autre pays. En conséquence, parce qu'elle a la double citoyenneté, cette personne pourrait perdre sa citoyenneté.
    Étant donné vos antécédents, voyez-vous là un problème possible lié à la Charte? Je serais porté à croire que j'aurais le droit à ma citoyenneté si je suis né au Canada, que j'y ai grandi et que je n'ai jamais vécu dans un autre pays. La seule raison pour laquelle je pourrais avoir accès à une autre citoyenneté, c'est en raison d'un lien matrimonial ou quelque chose du genre. Voyez-vous là la création de deux catégories de citoyens?
    J'étais intéressé par vos commentaires au sujet du processus, qui est lié à votre question. Je vais essayer d'établir un lien entre les deux.
    Pendant longtemps — plus de 10 ans —, divers gouvernements ont présenté des amendements à la Loi sur la citoyenneté pour traiter de la révocation. Par exemple, le projet de loi C-16, le projet de loi C-18 et le projet de loi C-37 comportent de bonnes propositions que nous aimons bien. Nous avons proposé que certaines d'entre elles soient incluses dans le cas présent.
    Nous sommes préoccupés par le fait que tous les amendements proposés — qui modifieraient le processus de révocation, qui ne fonctionne pas actuellement — sont mis de côté et remplacés par ce projet de loi. Il y a de bonnes choses dans le projet de loi, et nous sommes favorables à beaucoup d'éléments, mais étant donné qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire — et c'est un point soulevé par votre collègue, M. Irwin Cotler —, il ne fait pas l'objet d'un examen fondé sur la Charte par le ministère de la Justice, comme c'est le cas des projets de loi émanant du gouvernement.
    Pour vous donner une réponse précise, oui, la Charte prévoit un droit à la citoyenneté, qui n'est pas nécessairement limité à la définition contenue dans la Loi sur la citoyenneté. Quiconque perd sa citoyenneté peut dire qu'il s'agit d'une violation de son droit à la citoyenneté prévu dans la Charte, peu importe ce que prévoit la Loi sur la citoyenneté.
    Je ne peux vous dire si une telle contestation fondée sur la Charte pourrait réussir ou non, mais c'est certainement une possibilité.
    Pour ce qui est du processus concernant un projet de loi émanant du gouvernement et de l'exigence selon laquelle il devrait y avoir un examen quelconque fondé sur la Charte, diriez-vous qu'il s'agit là d'un cas où l'on devrait obtenir un avis juridique du ministère de la Justice quant à savoir si cela résisterait ou non à une contestation fondée sur la Charte? Le gouvernement devrait-il se préoccuper de savoir si ce qu'il fait est contraire à la Charte canadienne des droits et libertés?
(0945)
    Absolument. Je suppose que tous les députés devraient s'en préoccuper en tout temps.
    Je dirais qu'en général, lorsque le gouvernement appuie un projet de loi d'initiative parlementaire, il serait utile de demander au ministère de la Justice d'en faire un examen fondé sur la Charte. Bien entendu, il y a actuellement un litige à cet égard, car certains avancent que cet examen pose problème — et il pourrait être amélioré —, mais c'est manifestement mieux que de ne pas en avoir du tout.
    Le temps est écoulé; je suis désolé.
    Monsieur Chétrit Rieger, j'espère enfin avoir prononcé votre nom correctement...
    Oui.
    ... et monsieur Matas, nous vous remercions d'être venus et de nous avoir présenté vos commentaires, au nom de B'nai Brith. Merci beaucoup.
    Merci de nous avoir invités.
    Très bien.
    La séance est suspendue.
(0945)

(0945)
    Reprenons.
    Nous accueillons les représentants du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui ont tous témoigné au comité auparavant.
    De plus, nous accueillons un représentant du ministère de la Justice, M. Glenn Gilmour, qui est avocat à la Section de politique en matière de droit pénal. Je pense que vous n'êtes jamais venu ici, mais c'est possible. Soyez le bienvenu.
    Vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Je crois savoir que c'est Mme Girard qui s'en chargera.
    Vous pouvez commencer.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président et membres du comité.

[Traduction]

    Je m’appelle Nicole Girard. Je suis la directrice générale de la Direction générale de la citoyenneté et du multiculturalisme de Citoyenneté et Immigration Canada.
    Comme le président l'a indiqué, je suis accompagnée de mes collègues, Mme Mary-Ann Hubers, qui est directrice intérimaire de la Direction de la législation et de la politique de programme, M. Eric Stevens, qui est avocat à CIC, et M. Glenn Gilmour, avocat au ministère de la Justice.
    J’aimerais remercier le comité de nous offrir cette occasion de contribuer à la discussion sur ce projet de loi d'initiative parlementaire parrainé par M. Shory.
    Comme vous le savez, le projet de loi comporte deux éléments. D’abord, le projet de loi propose d’accélérer le processus d’attribution de la citoyenneté pour les membres des Forces canadiennes qui sont des résidents permanents, en réduisant d’un an l’exigence en matière de résidence pour les membres.
    Le deuxième élément du projet de loi — qui a suscité beaucoup de discussions —prévoit des dispositions qui feraient en sorte qu’une personne serait présumée avoir présenté une demande de répudiation de sa citoyenneté canadienne ou avoir retiré sa demande de citoyenneté canadienne, dans le cas des résidents permanents, si cette personne s’engage dans un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes.
    J’aimerais prendre quelques minutes pour aborder certaines préoccupations soulevées par le comité ainsi que d’autres témoins et intervenants au cours des récentes audiences. Celles-ci comprennent des préoccupations au sujet de l’expression « acte de guerre », des préoccupations au sujet de l’apatridie et des préoccupations au sujet de l’application régulière de la loi.
    Premièrement, pour ce qui est de l'acte de guerre, comme l’a entendu le comité, le terme « acte de guerre » est problématique. Cette situation est attribuable au fait qu’il n’existe pas de définition claire dans la loi du terme « acte de guerre ». Par conséquent, le terme « acte de guerre » serait difficile à appliquer et pourrait rendre inefficaces les dispositions sur la répudiation réputée et le retrait réputé inscrites dans la deuxième partie du projet de loi.
    Pour aborder cette question et veiller à ce que le projet de loi atteigne le but visé, le ministre Kenney a proposé que le comité amende le projet de loi en remplaçant la référence aux personnes qui commettent un « acte de guerre » et en précisant plutôt que l’acte s’appliquerait aux personnes suivantes: celles qui ont servi en tant que membres d’une force armée d’un pays ou de tout groupe armé organisé engagé dans un conflit armé contre le Canada; qui ont été déclarées coupables de haute trahison en vertu de l’article 47 du Code criminel; qui ont été condamnées à cinq ans ou plus d’emprisonnement pour des infractions de terrorisme en vertu de l’article 2 du Code criminel ou des infractions de terrorisme équivalentes à l’étranger; qui ont été déclarées coupables d’infractions de trahison ou de terrorisme en vertu de la Loi sur la défense nationale.
    Ces amendements seraient conformes à l’un des principaux objectifs du projet de loi, qui vise à priver de citoyenneté les personnes qui ont commis des actes de violence et de trahison contre le Canada ou à leur refuser la citoyenneté.
(0950)

[Français]

    J'aimerais souligner que des dispositions semblables existaient dans la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947.

[Traduction]

    En vertu de la loi, par exemple, un Canadien pourrait se voir retirer sa citoyenneté s’il a commis des actes de trahison, s’il a servi dans les forces armées d’un pays qui était en guerre contre le Canada, ou s’il a fourni du matériel ou des renseignements à l’ennemi ou encore s’il a communiqué avec l’ennemi en temps de guerre.
    Selon la loi actuelle, la citoyenneté peut être révoquée seulement lorsque celle-ci a été obtenue frauduleusement. D’autres pays démocratiques sont dotés de dispositions juridiques semblables afin de priver une personne de sa citoyenneté pour trahison et terrorisme. Par exemple, les citoyens des États-Unis peuvent être privés de leur citoyenneté s’ils font partie d’une force armée en guerre contre les États-Unis, ou à la suite d’une condamnation de haute trahison. L’Australie a une disposition faisant en sorte que les citoyens qui deviennent membres d’une force armée d’un pays en guerre contre l’Australie peuvent se voir privés de leur citoyenneté.
    En ce qui concerne l'apatridie, le comité a aussi entendu et exprimé des préoccupations à savoir que les dispositions du projet de loi C-425 pourraient rendre des personnes apatrides. La disposition sur la répudiation réputée, telle qu’elle est écrite dans le moment, s’appliquerait aux citoyens canadiens ayant la double nationalité ainsi qu’aux résidents autorisés d’un pays autre que le Canada. Le résultat potentiel est que les citoyens canadiens qui sont des résidents autorisés d’un autre pays, mais qui n’ont pas une autre citoyenneté, pourraient devenir apatrides. Cela serait une violation de la Convention sur la réduction des cas d’apatridie de 1961, dont le Canada est signataire.
    Pour s’assurer que le Canada respecte ses engagements internationaux, le ministre Kenney a demandé au comité d’envisager un amendement faisant en sorte que seuls les Canadiens ayant la double nationalité, qu’ils soient nés ou naturalisés au Canada, seraient réputés avoir renoncé à leur citoyenneté canadienne. Il est important de noter que des dispositions semblables visant à retirer la citoyenneté dans d’autres pays, comme le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, comprennent également des restrictions à l’application de telles dispositions seulement pour les cas où l’application des dispositions ne rendrait pas un individu apatride.
    Quant à l'application régulière de la loi, des préoccupations ont aussi été soulevées concernant l’application régulière de la loi aux termes du projet de loi ainsi que sur la nécessité de s’assurer de la mise en place de toutes les protections appropriées. Selon la loi actuelle, les juges de la citoyenneté, qui sont des décideurs autonomes, sont responsables des décisions pour les cas de répudiation. Comme le ministre l’a expliqué, pour une répudiation réputée de la citoyenneté en vertu de ce projet de loi, toutes les protections juridiques appropriées seraient en place. CIC recueillerait tous les renseignements disponibles afin de déterminer si les dispositions en matière de répudiation réputée s’appliquent. L’individu serait ensuite avisé et il aurait la possibilité de fournir de l’information supplémentaire ayant trait à la décision. Un juge de la citoyenneté déciderait alors si la personne est réputée avoir renoncé ou non à sa citoyenneté. De plus, un individu pourrait demander un contrôle judiciaire par la Cour fédérale de la décision de retirer sa citoyenneté.
    Des préoccupations ont été soulevées au sujet de la possibilité qu’une condamnation équivalente à l’étranger ait eu lieu dans un pays pour lequel il existe des craintes quant à l’indépendance de l’appareil judiciaire, ou dans un pays où la participation à une force armée était le résultat de moyens de coercition. Comme le ministre l’a expliqué, afin d’assurer que des personnes se trouvant dans ces situations ne sont pas injustement pénalisées, le ministre conserverait un pouvoir discrétionnaire de ne pas aller de l’avant dans le cas des demandes de répudiation réputée pour les personnes qui, par exemple, ont été contraintes à faire quelque chose contre leur gré. Une telle disposition serait conforme aux dispositions discrétionnaires prévues au terme de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.
    Une fois de plus, monsieur le président, je tiens à vous remercier de nous avoir invités à comparaitre aujourd’hui. J’espère que ces commentaires ont été utiles, et c’est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

[Français]

    Merci.
(0955)

[Traduction]

    Merci de votre exposé, madame Girard.
    M. Dykstra a des questions.
    Je vous remercie, par l'intermédiaire du président.
    Une des questions que l'on a posées souvent aux témoins semble peut-être être liée à ce que je considère comme une mauvaise interprétation des mots. Le premier est la répudiation et l'autre, la révocation. Je me demande si vous pourriez brièvement nous expliquer les différences entre ces deux mots.
    Merci.
    Il y a des différences clés. Le projet de loi ouvre l’article 9 de la loi qui aborde la répudiation de la citoyenneté. Voici les différences clés entre la répudiation et la révocation de la citoyenneté en vertu de l’article 10 de la loi.
    Les citoyens canadiens peuvent répudier leur citoyenneté canadienne qu’ils soient nés au Canada, qu’ils soient nés à l’étranger d’un parent qui est citoyen canadien ou qu’ils soient des citoyens naturalisés. Cette décision est prise par un décideur indépendant, à savoir un juge de la citoyenneté.
    Cela diffère de l’article 10 de la loi qui concerne les dispositions sur la répudiation. Ces dispositions s’appliquent seulement si la citoyenneté a été acquise par fraude, et elles peuvent seulement s’appliquer aux citoyens naturalisés.
    La troisième différence est que ce n’est en fait pas la Cour fédérale qui rend une décision dans les cas de répudiation. C’est le Cabinet qui la prend. L’étape concernant la Cour fédérale est une étape intermédiaire, mais les décisions portant sur la répudiation sont prises par le Cabinet.
    Merci beaucoup. C’est important d’en préciser les différences.
    La deuxième question est encore une fois une question que nous posons à pratiquement tous les témoins et porte sur la grande question du respect de la Charte. Lorsque les ministères examinent un projet de loi du gouvernement et la mesure législative dans le cadre d’un projet de loi d’initiative parlementaire, ils s’assurent que le tout respecte la Charte. J’aimerais vous entendre à cet égard.
    Vous avez tout à fait raison. Je ferai deux ou trois commentaires, puis je laisserai M. Stevens en faire à son tour, s’il le souhaite.
    Nous réalisons cet examen. Je crois que la question a déjà été soulevée au comité, à savoir si les dispositions s’appliqueraient de manière équitable à tous les Canadiens, et ce serait le cas. Certains témoins ont bien pris soin de souligner que le projet de loi s’appliquerait de manière équitable à tous les Canadiens qu’ils soient des citoyens canadiens de naissance, qu’ils soient nés à l’étranger d’un parent canadien ou qu’ils soient des citoyens canadiens naturalisés.
    Monsieur Stevens, aimeriez-vous ajouter des commentaires au sujet de la Charte?
    D’accord. Il y a peut-être un léger malentendu ici.
    Même s’il est vrai que le projet de loi d’initiative parlementaire n’est pas rédigé par le ministère de la Justice et qu’il ne suit donc pas notre processus, nous avons devant nous une situation dont l’enjeu qui suscite le plus de controverses concerne, j’imagine, les dispositions sur la perte de la citoyenneté. Le ministre a comparu devant le comité et a proposé de remplacer les dispositions du projet de loi d’initiative parlementaire par une série d’amendements. Tous ces amendements ont été rédigés et approuvés par le ministère de la Justice; nous nous sommes donc assurés qu’ils respectaient la Charte.
    Merci beaucoup.
    Dans les amendements, une disposition s’appliquerait dans le cas d’une peine minimale de cinq ans. Lors de l’examen du projet de loi C-43 sur le renvoi accéléré des criminels étrangers, nous avons en fait réduit la peine à cet égard à six mois pour les crimes graves.
    J’aimerais entendre vos commentaires sur le fait que les amendements abordent précisément la durée. Par exemple, si un juge prononce une peine de cinq ans moins un jour, selon les amendements, pourrions-nous encore dire que cette personne a en fait répudié sa citoyenneté?
(1000)
    La réponse courte est non. Les amendements proposés au projet de loi visent un seuil minimal de cinq ans. Si une peine de cinq ans et plus est imposée, les dispositions du projet de loi pourraient s’appliquer, mais ce ne serait pas possible s’il est question d’une peine de cinq ans moins un jour.
    J’aimerais savoir pourquoi les amendements proposent un seuil de cinq ans et pourquoi ce seuil a été choisi.
    Comme vous le savez peut-être, les infractions liées au terrorisme en vertu du Code criminel couvrent une vaste gamme de peines. Il y a des peines maximales pour les infractions, et elles varient. Par exemple, les infractions liées à la participation, à savoir de participer sciemment à des activités d’un groupe terroriste dans le but d’améliorer la capacité d’un groupe terroriste à perpétrer un acte de terrorisme, sont passibles d’une peine maximale de 10 ans. L’infraction qui consiste à faciliter sciemment une activité terroriste est passible d’une peine maximale de 14 ans.
    La majorité des peines liées à ces infractions dans le Code criminel sont très graves. Certaines infractions peuvent même mener à une peine d’emprisonnement à perpétuité. Cependant, d’autres cas peuvent être moins graves. Donc, en fonction des accusations déposées et des circonstances de chaque cas, une personne peut être reconnue coupable d’une infraction liée au terrorisme et se voir imposer une peine d’emprisonnement de moins de cinq ans.
    Le principal facteur à considérer est la gravité de la conséquence du retrait de la citoyenneté d’une personne, même si nous devons confirmer qu’elle en a une autre, comme le mentionnent les amendements proposés au projet de loi. Selon ce qui est proposé, cette situation se produira uniquement si à la suite d’une infraction liée au terrorisme une personne est reconnue coupable de terrorisme et qu’elle se voit imposer une peine d’au moins cinq ans, comme vous l’avez mentionné.
    Merci.
    Dans la même veine, le Canada avait une telle mesure environ jusqu’en 1976, et nous avons entendu ce point être soulevé à quelques reprises. J’aimerais que vous m’expliquiez brièvement pourquoi le gouvernement a pris la décision à l’époque de l’abroger. Il me reste seulement une minute. Je vous laisse la parole.
    Je ne suis pas certain de pouvoir vous donner une réponse catégorique à ce sujet.
    Nous n’avons pas entendu dire que les anciennes dispositions avaient déjà été utilisées. J’ai mentionné dans mon exposé que certains aspects ont une portée un peu plus limitée et concernent des circonstances particulières, dont les guerres déclarées, ce qui n’est pas très fréquent de nos jours, et l’enrôlement au sein d’une force armée étrangère qui combat le Canada, ce qui n’est pas toujours le cas, comme vous l’avez entendu au cours des derniers jours.
    Les amendements proposés par le gouvernement visent les situations réelles avec lesquelles nous sommes aux prises et avec lesquelles les Forces armées canadiennes peuvent être aux prises sur le terrain, en fonction de la gamme de situations possibles où les Forces armées canadiennes peuvent être la cible d’une attaque.
    Merci.
    Madame Sims, allez-y.
    Monsieur Gilmour, depuis lundi soir, nous avons l’occasion d’examiner les amendements proposés par le gouvernement relativement au projet de loi. Mardi, en comité, M. Dykstra nous a informés que la population pouvait maintenant les consulter.
    Répondez par oui ou non. Avez-vous eu l’occasion d’examiner les amendements proposés par le gouvernement?
    Merci.
    En lien avec les amendements proposés, j’aimerais aborder l’obligation internationale du Canada de prévenir l’apatridie.
    L’une des plus importantes réserves au sujet du projet de loi est sa capacité de rendre une personne apatride. Les amendements du gouvernement, s’ils sont adoptés, garantiraient que toute personne avec une citoyenneté ne deviendrait pas apatride par l’entremise des changements proposés à l’article 2, mais les amendements proposés à l’article 1 ne garantiraient pas qu’un résident permanent ne pourrait pas devenir apatride.
    La Bibliothèque du Parlement estime qu’environ 84 réfugiés apatrides ont été acceptés au Canada entre 2003 et 2010, soit environ 12 par année.
    Nous savons que c’est fort possible qu’il n’y ait jamais de problème lié à la présente mesure, si elle est adoptée, avec les amendements du gouvernement. Néanmoins, nos obligations internationales sont importantes. Pourriez-vous aborder le problème de l’apatridie?
(1005)
    Si cela ne vous dérange pas, j’aimerais laisser M. Stevens répondre à votre question. Il connaît beaucoup plus cette convention et nos obligations internationales à cet égard.
    Merci.
    Monsieur le président, la Convention sur la réduction des cas d'apatridie est l’obligation du Canada à l’endroit des citoyens. Si j’ai bien compris votre question, vous parlez des résidents permanents.
    Les amendements proposés empêcheraient un résident permanent de devenir un citoyen, mais cela n’influerait pas sur son statut. Je ne pense pas que cela contrevienne à la Convention sur la réduction des cas d'apatridie.
    J’aimerais voir si j’ai bien compris. S’ils sont résidents permanents, ils ne sont pas encore devenus des citoyens canadiens. Ils continueraient donc à vivre au Canada en tant que résidents permanents, et ils seraient traduits en justice et tout le reste, n’est-ce pas?
    Selon ce que j’en comprends, les amendements proposés arrêteraient tout simplement le processus de citoyenneté. La suite des choses peut dépendre du profil de la personne. Par exemple, si le résident permanent est au Canada et qu’il est accusé d’une infraction liée au terrorisme, le système de justice pénale suit son cours, et la personne peut être traduite en justice.
    Je comprends la partie relative aux poursuites judiciaires. Par contre, un résident permanent pourrait-il devenir apatride en raison du projet de loi? Autrement dit, ils sont ici et ils sont arrivés au Canada en tant qu’apatrides.
    Le projet de loi ou les amendements proposés ne rendraient pas une personne apatride qui ne l’est pas déjà. Si des gens ont le statut de résident permanent au Canada, qu’ils ont fait une demande de citoyenneté et qu’ils n’ont ensuite pas droit à la citoyenneté, ils pourraient alors se tourner vers le processus d’immigration. La possibilité d’un renvoi n’est pas nécessairement évidente si les gens n’ont aucun pays vers lequel aller. En vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, ils auraient droit à une évaluation des risques pour déterminer si leur renvoi à l’étranger contreviendrait à la Charte.
    Merci beaucoup; c’est très clair.
    Pour revenir aux articles 1 et 2, le gouvernement a proposé dans ses amendements d’inclure une surveillance ministérielle qui autoriserait le ministre à exempter certaines personnes de la loi. Pourriez-vous nous dire un mot au sujet de la surveillance ministérielle en général? Est-ce une bonne chose dans le cas du présent projet de loi?
    Vous avez tout à fait raison. L’amendement proposé vise à donner au ministre un certain pouvoir discrétionnaire en vue d’aborder un important enjeu qui a été soulevé par le comité et les témoins. Il peut s’agir du cas d’un citoyen qui serait visé par les dispositions proposées dans les amendements et qui aurait été reconnu coupable d’une infraction à l’étranger, mais l’indépendance du pouvoir judiciaire à cet égard serait peut-être remise en question, ou il a peut-être été forcé de s’enrôler contre son propre gré dans une force armée étrangère.
    Même si nous reconnaissons que les cas sont exceptionnels, que leur nombre est restreint et que les cas de cette nature sont encore plus exceptionnels, il est tout de même important d’avoir un tel pouvoir discrétionnaire. C’est similaire à ce qui existe dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Cette mesure vise à nous assurer que personne n'est injustement pénalisé dans de telles circonstances. Bref, la mesure se limite, pour le dire ainsi, à autoriser le ministre à ne pas appliquer les dispositions dans des circonstances très précises, soit celles que j’ai mentionnées.
    Merci beaucoup.
(1010)
    Votre temps est pratiquement écoulé.
    Monsieur Gilmour, est-ce que le projet de loi garantit l’application régulière prévue par la loi?
    Si cela ne vous dérange pas, je vais laisser Mme Girard vous répondre.
    Si vous me le permettez, le projet de loi et les amendements à l’étude par le comité offrent des éléments clés d’application régulière. Les voici.
    Premièrement, les dispositions du projet de loi s’appliqueraient dans des circonstances limitées selon le libellé des amendements, parce qu’il y a une liste restreinte de circonstances précises, et il s’agit des catégories qui feraient en sorte qu’une personne pourrait être assujettie aux dispositions sur la répudiation réputée, notamment une condamnation liée au terrorisme ou à la trahison. C’est le premier élément concernant l’application régulière.
    Le deuxième élément très important de l’application régulière est que l’amendement exige que le ministre avise toute personne qui pourrait être assujettie aux dispositions. Dans l’avis, on inviterait la personne à faire part de tout renseignement pertinent à leur dossier.
    Le troisième élément de l’équité procédural est que les amendements précisent que c’est un juge de la citoyenneté, à savoir un décideur administratif indépendant, qui rendra la décision en se fondant sur les preuves devant lui. Il s’agit des éléments recueillis par le ministère et des renseignements fournis par la personne concernée.
    Le quatrième élément de l’application régulière concerne une disposition qui figure déjà dans la Loi sur la citoyenneté. Toute décision rendue par un juge de la citoyenneté peut faire l’objet d’un examen de la part de la Cour fédérale.
    Il y a donc quatre éléments très importants de l’application régulière.
    Merci.
    Monsieur Lamoureux.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Premièrement, monsieur le président, étant donné que nous posons des questions sur les amendements que le ministre proposera ou nous recommandera d’adopter et qu’on nous a remis un document, est-il juste de présumer que les renseignements sont maintenant de nature publique?
    Les amendements n’ont pas encore été proposés, mais il semble que ce que vous avez dit soit exact.
    Je trouve cela intéressant.
    Madame Girard, savez-vous si le ministre de l’Immigration actuel ou l’un de ces prédécesseurs a déjà présenté de tels amendements détaillés dans le cadre d’un projet de loi d’initiative parlementaire au cours de la dernière décennie?
    Je m’excuse. Je ne sais pas vraiment si c’est déjà arrivé ou non. Je pense qu’un comité serait plus au courant de cela qu’une fonctionnaire, par exemple.
    Cependant, parmi tous les fonctionnaires présents ici aujourd’hui, y en a-t-il un qui sait si un ministre a déjà proposé dans une telle mesure des amendements dans le cadre d’un projet de loi d’initiative parlementaire?
    À mon avis, ils ont répondu à la question, monsieur Lamoureux. Poursuivons.
    Un problème se pose. Je vous lis un extrait de la Charte:
6.(1) Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir.
    Devons-nous comprendre que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a demandé un avis juridique sur ce paragraphe et que les amendements proposés par le ministre sont conformes à la Charte?
    Je vais demander à mon collègue du ministère de la Justice d'intervenir, mais je voudrais d'abord aborder ce qui a été soulevé ce matin: c'est la Loi sur la citoyenneté qui donne la définition de citoyen et précise les modalités régissant l'obtention et la perte de la citoyenneté.
    Très bien. Si je suis né et si j'ai grandi au Canada, le gouvernement peut-il m'enlever ma citoyenneté, quelles que soient les circonstances? Il me semble que non aux termes de la Charte. Le ministère de la Justice a-t-il été saisi de ce problème? Le cas échéant, le ministère est-il d'avis que le problème ne se pose pas pour quelqu'un qui est né au Canada et qui a une double citoyenneté?
    Je ne crois pas que j'irais jusqu'à dire que le problème ne se pose pas. Je le répète, les amendements ont été formulés en fonction des critères régissant la rédaction des textes législatifs, et le gouvernement estime qu'ils sont constitutionnels.
    Je voudrais apporter quelques précisions. La Charte ne précise nullement que la citoyenneté est inaliénable. La loi en vigueur autorise la révocation de la citoyenneté. En vertu de la Convention européenne sur la nationalité et d'autres conventions internationales, des États peuvent dépouiller quelqu'un de sa citoyenneté s'il a commis...
(1015)
    Je dois vous interrompre parce que mon temps de parole tire à sa fin.
    Supposons que je sois ministre et que je dise: « Je tiens à ce projet de loi, et peu m'importe qu'il soit conforme ou non à la Charte. » Le ministère est-il alors tenu de lui faire valoir que le projet de loi pourrait être contesté devant la Cour suprême du Canada? Le ministère est-il tenu de le faire?
    Le ministère de la Justice est tenu d'examiner la constitutionnalité de chaque projet de loi...
    Fait-il part de son opinion au ministre sur une telle question? L'a-t-il fait pour ce projet de loi?
    Je ne vais pas trahir le secret professionnel qui lie un avocat à son client. Comme je l'ai expliqué cependant, une fois qu'un projet de loi est rédigé, la Loi sur le ministère de la Justice exige qu'on vérifie s'il est conforme à la Charte, et c'est ce que nous avons fait.
    Supposons qu'une telle vérification révélait que le projet de loi n'est pas conforme à la Charte, le ministre serait-il tenu de respecter cet avis?
    Le ministre est-il tenu de respecter l'avis...? Pourriez-vous préciser un peu votre question?
    Si un ministère signalait au ministre que le projet de loi pouvait être contesté devant la Cour suprême parce qu'il n'est pas conforme à la Charte, le ministre serait-il tenu de respecter cet avis ou pourrait-il encore présenter son amendement?
    Si le ministère de la Justice déterminait que le projet de loi n'était pas constitutionnel, le ministre de la Justice doit alors en informer la Chambre.
    Merci.
    Monsieur Weston, c'est à vous la parole.

[Français]

    Premièrement, je veux réagir aux questions récemment posées par M. Lamoureux. Je pense que c'est parfaitement la prérogative du ministre de s'intéresser à un projet de loi présenté par un député de la Chambre, n'est-ce pas?
    C'est évident, mais j'aimerais que vous répondiez à la question, monsieur Stevens.

[Traduction]

    Vous avez effectivement raison.

[Français]

    D'accord. Merci bien.
    Il est vraiment impossible d'anticiper toutes les contestations en vertu de la Charte qui pourraient être entreprises par les Canadiens. Évidemment, des gens voudront probablement amorcer de telles contestations, mais ce n'est pas une raison pour ne pas tenir compte d'un projet de loi ou même pour ne pas l'adopter.

[Traduction]

    Je suis d'accord avec vous sur ce point. Les questions que nous abordons sont toutefois très graves.
    Un procès pourrait-il être intenté? Bien sûr. Le domaine de l'immigration comporte des aspects extrêmement litigieux, tout comme celui de la citoyenneté.

[Français]

    Je vous remercie.
    Je pense que tout le monde soutient plusieurs des principes qui ont été mis en avant par mon collègue M. Shory. Nous voulons tous décourager les terroristes et renforcer la citoyenneté canadienne dans le monde et dans l'esprit de tous les Canadiens.
    Le défi le plus grand est peut-être celui qui a été mentionné par mon collègue M. Dykstra lorsqu'il a parlé du respect de la Charte. Il vous a demandé ce que vous en pensiez. Je ne veux pas prendre l'habitude de poser les questions les plus simples afin de soutenir mon collègue; je préfère poser les questions les plus difficiles.
    Vous avez déjà dit que, selon le ministère, ce projet de loi respectait la Charte. Cependant, nous avons entendu certaines personnes dire que le projet de loi aurait des conséquences différentes pour certaines personnes, par exemple celles qui ont une double citoyenneté.
    Malgré cela, vous avez quand même trouvé que cela respectait la Charte, n'est-ce pas?
(1020)

[Traduction]

    Le traitement réservé à la personne ayant une double citoyenneté est différent de celui réservé à celle n'en ayant qu'une. La distinction saute aux yeux. Elle découle de l'article 15 de la Charte, qui porte sur les « droits à l'égalité ». D'après le gouvernement, cette distinction ne constitue pas une discrimination parce qu'elle n'est pas fondée sur des hypothèses stéréotypées ou n'entraîne pas un préjudice.
    En fait, le ministre a expliqué que le projet de loi s'appliquera à ceux qui ont une double citoyenneté, qu'ils soient nés au Canada ou à l'étranger. Le projet de loi vise à valoriser la citoyenneté. Cependant, le ministre veut le faire en respectant les obligations internationales, ce qui restreint donc les catégories de personne visées.
    Par conséquent, cette distinction est-elle justifiable en vertu de l'article 15? Le gouvernement est d'avis que oui.
    Même s'il y a une distinction et même s'il y a un problème, on pourrait faire valoir un deuxième argument pour s'opposer aux contestations en vertu de la Charte: les droits et libertés peuvent être restreints dans des limites qui sont raisonnables et dont la justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.
    Est-ce exact?
    C'est exact. Vous faites allusion à l'article 1, ce qui constitue le deuxième argument qu'on peut faire valoir en cas de contestation fondée sur la Charte.
    C'est très utile, à mon avis.
    Je le répète, la plupart des membres du comité cherchent à obtenir le consensus et, idéalement, l'unanimité. Mes amis de l'opposition ont mis en doute sérieusement le projet de loi, me semble-t-il, et j'estime que vous avez répondu à leurs questions à ce chapitre ce matin. Particulièrement après avoir entendu tous les problèmes, je peux ainsi discerner les avantages dont la mesure législative fait la promotion. Le ministre a collaboré avec le député qui a présenté le projet de loi pour s'assurer que celui-ci est des plus pertinents et peut promouvoir les principes importants que tous les Canadiens ont à coeur.
    Quelles autres mesures le comité ou le Parlement pourraient-ils prendre pour que le projet de loi soit des plus efficaces?
    Madame Girard, auriez-vous l'amabilité de répondre à cette question?
    La seule proposition que je pourrais formuler est celle déjà présentée par le ministre Kenney. Le comité est saisi d'un projet de loi qui porte sur une question sérieuse et qui fait l'objet de plusieurs amendements pour corriger certaines lacunes qui ont été mises au jour. Nous espérons que le comité examinera ces amendements sérieusement.
    Merci.
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Il vous reste 30 secondes pour poser une question et obtenir une réponse.
    Très bien.
    On a appris également que d'autres pays peuvent dépouiller quelqu'un de sa citoyenneté, des pays dont nous respectons les valeurs démocratiques: la Grande-Bretagne, l'Australie et même les États-Unis.
    Je m'adresse à vous, monsieur Stevens. Les mesures prises par ces autres pays vous ont-elles réconforté lorsque vous avez vérifié si le tout était conforme à la Charte?
    Oui. Les normes internationales se révèlent très utiles à ce chapitre.
    Merci.
    Madame Groguhé.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leurs réponses.
    L'un de nos témoins nous mentionnait, certes avec beaucoup de justesse, qu'on se servait de l'exil comme peine possible avant les temps modernes, et que le système de justice pénale qui existe maintenant prévoit aussi de punir les gens.
    D'après vous, pourquoi les dispositions inscrites dans ce projet de loi seraient-elles plus appropriées quand la personne possède une double citoyenneté, pour ce qui est de la révocation?
(1025)
    J'aimerais seulement clarifier votre question. Vous voulez savoir pourquoi on insiste pour que ces dispositions s'appliquent seulement dans les cas où les gens possèdent une autre citoyenneté?
     En ce qui concerne les actes de terrorisme dont il peut être fait mention ou d'autres actes sous d'autres appellations, est-ce que les dispositions relatives à la renonciation à la citoyenneté ou à la répudiation de la citoyenneté s'appliqueraient lorsque la personne a une double citoyenneté? Pensez-vous que cette application est justifiée du fait même que cette personne a une double citoyenneté? Qu'est-ce qui la justifie, d'après vous?

[Traduction]

    Si j'ai bien compris votre question, vous voulez en savoir davantage sur ce qui justifie l'application de ces dispositions aux personnes ayant la double citoyenneté.

[Français]

    Oui, exactement.

[Traduction]

    Cela fait référence au deuxième objectif du projet de loi qui porte sur les circonstances où un citoyen canadien ayant une autre nationalité a choisi d'afficher violemment sa déloyauté et de se livrer à des actes odieux et très graves comme le terrorisme, la haute trahison ou la participation à un conflit armé avec le Canada au sein de l'armée d'un État étranger.
    Le deuxième objectif du projet de loi porte sur les mesures à prendre contre ceux qui attaqueraient d'une façon ou d'une autre les Forces armées canadiennes ainsi que sur la notion selon laquelle nos militaires ont à coeur la défense du Canada et sacrifient souvent leurs vies pour défendre notre pays et la citoyenneté canadienne. Nous nous demandons pourquoi les personnes qui s'en prendraient à leurs concitoyens ou aux Forces armées canadiennes devraient-ils continuer à tirer profit de la citoyenneté canadienne.

[Français]

    D'accord.
    Je comprends vos explications, mais cela dit, un citoyen canadien sans une double nationalité pourrait, éventuellement, commettre ce type d'actes. Donc, il faut vraiment penser à la dimension de la comparaison entre une personne qui aurait une double nationalité et celle qui aurait une seule citoyenneté, en l'occurrence la citoyenneté canadienne. Dans ce cas, on se retrouve devant une décision plutôt arbitraire, comme l'a énoncé l'un de nos témoins. C'est dans ce sens que je posais ma question.
    J'aurais une deuxième question. L'un de nos témoins, Catherine Dauvergne, nous a parlé d'un coût de 40 millions de dollars pour traiter 13 cas de révocation de citoyenneté depuis 2002. Croyez-vous que nous allons devoir assumer des sommes similaires pour l'application du projet de loi C-425?

[Traduction]

    Nous n'avons pas encore analysé les coûts de la mise en oeuvre de ce projet de loi. Cependant, M. Kenney, ministre de CIC, est déjà au courant que, selon nous, les dispositions du projet de loi s'appliqueraient dans des circonstances très exceptionnelles, donc très rarement.
    Si je vous ai bien compris, les coûts auxquels a fait allusion l'autre témoin portent sur la révocation, un mécanisme assez complexe et lourd qui comporte plusieurs étapes et nécessite l'intervention non seulement du Cabinet, mais aussi de la Cour fédérale. Nous parlons ici de répudiation, et la décision est rendue par un juge de la citoyenneté. C'est un recours exceptionnel, et la preuve serait présentée par le ministère.
    Le mécanisme est beaucoup plus simple et comporte d'importantes garanties sur le plan de la procédure. La répudiation coûte moins cher que la révocation, et on y a recours exceptionnellement. Je crois donc que les coûts seraient loin d'être aussi élevés que ceux évoqués par le témoin, même si nous n'avons pas effectué d'étude sur la question.
    Merci.
    Monsieur Menegakis.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leur présence parmi nous.
    Avant 1976 — M. Dykstra a d'ailleurs fait allusion à cette question, je pense —, on pouvait retirer la citoyenneté canadienne à quelqu'un pour haute trahison. Le gouvernement libéral de l'époque a déterminé que la haute trahison ne devrait plus être un motif pour révoquer la citoyenneté, même si presque tous les autres pays démocratiques étaient d'avis contraire et si bon nombre d'entre eux ont augmenté le nombre de motifs justifiant la révocation ou la répudiation réputée.
    De plus, il est légal de dépouiller quelqu'un de sa citoyenneté si l'on se rend compte qu'il l'a obtenue frauduleusement. Je pense que cela tombe sous le sens. De toute évidence, il y a toujours eu et il y a encore des motifs légaux et constitutionnels justifiant la répudiation de la citoyenneté d'une personne.
    Êtes-vous d'accord que le projet de loi et les amendements proposés ne modifient en rien cette situation?
(1030)
    La loi justifie la révocation de la citoyenneté uniquement dans les cas de fraude par des citoyens naturalisés. Comme vous l'avez fait remarquer à juste titre, la loi de 1947 comportait des dispositions portant sur la révocation de la citoyenneté des personnes qui ont commis des actes odieux précis.
    Comme vous l'avez signalé, les règles énoncées dans la Loi sur la citoyenneté précisent ce qu'il est possible de faire. Le projet de loi propose de modifier la Loi sur la citoyenneté pour que les autorités aient le pouvoir de répudier la citoyenneté de quelqu'un dans certaines circonstances précises.
    J'ignore si j'ai répondu à votre question, mais je pourrais apporter des précisions si vous en avez besoin.
    Non, c'est parfait ainsi. Merci.
    Comme nous le disons, nous savons que la citoyenneté peut être retirée si elle a été obtenue frauduleusement. Vous le savez sans doute, presque tous les autres pays démocratiques peuvent prendre cette mesure en cas de trahison ou de terrorisme entre autres. Pourtant, ceux qui critiquent le projet de loi font valoir que la citoyenneté canadienne est un droit inaliénable.
    Que leur répondriez-vous?
    Je répondrais que ce n'est pas exact et j'ajouterais que d'autres témoins ont apporté un éclairage différent sur la question. La citoyenneté est aliénable en vertu de la Loi sur la citoyenneté, qui comporte des dispositions sur la révocation et sur d'autres mesures analogues.
    On croit tout simplement à tort que la citoyenneté est inaliénable.
    Les individus visés sont ceux qui ont commis des actes terroristes. Ce ne sont pas les personnes vulnérables, comme nous l'avons entendu ce matin. On vise ceux qui se rendent coupables de terrorisme ou de trahison.
    Êtes-vous d'accord que ces individus rejettent en fait des valeurs canadiennes qui sont inhérentes à la citoyenneté et que nous avons juré de prôner?
    Je suis d'accord, et j'estime que d'autres témoins ont bien fait ressortir que, si un citoyen canadien se livre à de tels crimes odieux, il n'est pas nécessairement pertinent qu'il doive continuer à profiter de la citoyenneté canadienne dont il pourrait se servir pour commettre d'autres actes similaires au Canada ou à l'étranger. Et il faudrait envisager de lui enlever sa citoyenneté.
    Croyez-vous que, si quelqu'un est dépouillé de sa citoyenneté pour haute trahison ou terrorisme, il ne devrait plus avoir le droit de présenter une nouvelle demande de citoyenneté?
    En vertu du projet de loi, quiconque perd sa citoyenneté ne pourrait plus présenter une demande pour l'obtenir de nouveau. Cependant, notre étude fait ressortir certaines lacunes éventuelles à ce chapitre. Je vous rappelle que nous parlons d'une personne qui a été reconnue coupable de terrorisme, qui a reçu une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus ou qui a commis une haute trahison. Les amendements dont vous êtes saisis proposent de renforcer cette interdiction pour veiller à ce que ni un résident permanent ni un citoyen ne puissent être en mesure de présenter une nouvelle demande de citoyenneté.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Dykstra.
    Merci, monsieur le président.
    Les questions de M. Menegakis m'amènent à en poser une à mon tour. Vous avez fait allusion aux propos de certains témoins. Mme Sheryl Saperia a comparu lors de notre dernière séance. Voici ce qu'elle nous a dit:
Pour ce qui est de la discrimination à l'endroit des personnes ayant la double citoyenneté par rapport à celles qui n'en ont qu'une, il faut d'abord préciser que toute distinction n'est pas synonyme de discrimination.
    Elle a ajouté qu'il y a une distinction qui figure dans un texte juridique. Elle entendait par là que le Canada a des obligations en vertu de la Convention sur la réduction des cas d'apatridie, et nous devons respecter ces règles.
    Elle a également fait valoir ce qui suit:
Je note que la convention stipule qu'un pays peut très bien dépouiller de sa citoyenneté une personne qui agit de façon déloyale envers l'État et qui peut lui causer du tort. Cela respecte tout à fait les limites de la convention.
    Que pensez-vous de ses propos?
(1035)
    Elle a raison.
    Très bien. Merci.
    Je vais citer un autre cas qui est survenu cette semaine au marathon de Boston auquel participaient 26 000 coureurs. Des centaines de spectateurs se trouvaient dans les rues pour y assister. Nous sommes tous au courant des conséquences tragiques qui seraient imputables à un acte terroriste. En fait, les membres du comité ont observé un moment de silence pour se rappeler tant les personnes qui ont perdu la vie que celles qui ont été blessées. Plus de 2 000 Canadiens ont participé à ce marathon, en plus des autres Canadiens qui les accompagnaient.
    Je sais que ma question est tout à fait hypothétique, mais comme nous étudions ce projet de loi, je voudrais comprendre les conséquences des gestes posés par ces individus. Si par hasard l'un de ces individus possédait la citoyenneté canadienne et celle d'un autre pays, serait-il assujetti au présent projet de loi?
    Ces événements tragiques nous attristent profondément, nous aussi.
    C'est un cas purement hypothétique. Cet individu pourrait être visé par les dispositions du projet de loi s'il avait commis un crime aux États-Unis ou dans un autre pays et s'il possédait la citoyenneté canadienne ainsi que celle d'un autre pays et s'il avait choisi délibérément de commettre des actes odieux et de se livrer à du terrorisme pour en être par la suite reconnu coupable.
    En vertu des amendements proposés, il faudrait tenir compte de deux facteurs importants: premièrement, il faudrait déterminer si l'individu possède deux citoyennetés ou plus; deuxièmement, il faudrait établir si cela correspond à une des catégories énoncées dans les amendements.
    Loin de moi l'idée de vous mettre sur la sellette — et je devrais signaler que l'un de nos collègues, un député fédéral, a participé au marathon —, mais si c'est un Américain qui est reconnu coupable, cette décision aura-t-elle des répercussions sur sa citoyenneté?
    Je ne peux vraiment pas répondre à cette question. Il faudrait consulter la loi américaine ainsi que nos homologues américains.
    Je vous ai posé la question parce que nous employons les États-Unis comme un exemple de démocratie qui, comme la nôtre, s'est dotée de lois sur la répudiation ou la perte de citoyenneté. Si vous ne pouvez y répondre, je comprendrai. Je le répète, je vous ai mis sur la sellette en vous demandant d'interpréter la loi américaine. Il existe cependant des dispositions en vertu desquelles un citoyen américain peut perdre sa citoyenneté pour ces motifs, n'est-ce pas?
    La loi américaine autorise la perte de la citoyenneté pour des motifs précis. Cela dit, nous ne sommes pas des experts en droit américain. Je ne peux donc pas vous donner une réponse détaillée.
    Merci.

[Français]

    Madame Groguhé, vous avez la parole.
     On parle du pouvoir discrétionnaire du ministre et du fait que ça va permettre d'évaluer chaque cas séparément.
     Ne risque-t-on pas de politiser le processus et, comme l'a souligné un de nos témoins mardi dernier, de confondre le politique et le judiciaire, alors qu'il s'agit d'actes aussi importants?

[Traduction]

    Je vous répondrais en vous signalant qu'il existe une liste restreinte de circonstances et de catégories précises en vertu desquelles une personne ayant la double citoyenneté pourrait être visée par les amendements proposés. Cependant, le pouvoir discrétionnaire du ministre pourrait être mis à contribution au profit du demandeur. Si quelqu'un est reconnu coupable de terrorisme à l'étranger et si l'indépendance des tribunaux de ce pays étranger est remise en question — il pourrait peut-être s'agir d'un procès politique —, on propose que le pouvoir discrétionnaire du ministre soit mis à contribution au profit du demandeur afin qu'il ne soit pas pénalisé outre mesure.
(1040)

[Français]

    Étant donné qu'aucune limite d'âge n'est précisée dans le projet de loi, croyez-vous qu'il y ait un risque que des enfants soldats soient visés par son application? Dans ce cas, que faudrait-il faire?

[Traduction]

    Je répondrai tout d'abord à la question de la députée, puis j'inviterai mes collègues à apporter des précisions s'ils le souhaitent. La députée a raison en signalant que les dispositions du projet de loi portant sur la renonciation s'appliquent uniquement aux adultes. Et les amendements proposés n'y changeraient rien.
    Cela étant dit, comme l'a souligné, je pense, l'un des témoins ce matin, un adulte pourrait également être visé par les dispositions du projet de loi pour un crime commis avant ou après l'entrée en vigueur de la mesure législative. Il faudra donc se pencher sur la question. Je le répète encore une fois, ces dispositions s'appliqueraient exceptionnellement.
    Mary-Ann ou Eric, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Non.

[Français]

    D'accord.
    Le Royaume-Uni prévoit une période de suspens de six mois pour le retrait de la citoyenneté. En d'autres mots, les autorités attendent six mois avant de retirer la citoyenneté, afin d'éviter les cas d'apatridie.
     Croyez-vous que cela pourrait constituer un rempart contre les cas d'apatridie dans le présent projet de loi?

[Traduction]

    Je vous répondrai que nous tenons beaucoup à éviter les cas d'apatridie, étant donné nos obligations en vertu de la convention de 1961 que nous avons signée et qui nous interdit de faire un apatride d'un citoyen canadien.
    Nous nous attaquerions à ce problème de deux façons aux termes du projet de loi.
    Premièrement, le comité est saisi de l'amendement en vertu duquel le projet de loi ne vise que les personnes qui ont plus d'une citoyenneté.
    Deuxièmement, le comité est saisi d'un autre amendement qui modifie la procédure de façon à éviter ce problème, le cas échéant. Effectivement, le ministre est tenu de donner un avis à la personne visée pour l'inviter à faire valoir ses arguments pour se défendre. Cette personne aurait le droit de savoir ce qui lui est reproché et de connaître les éléments de preuve recueillis par le ministère et montrant sa double nationalité ainsi que les autres éléments de preuve portant sur les actes qu'il aurait commis.
    Cette personne pourrait alors s'adresser à l'autorité pour établir que son expulsion lui fera courir des risques et qu'il n'a peut-être pas une double nationalité. Cela constituerait donc une garantie.
    Par exemple, si le gouvernement possédait la preuve que la personne a la double nationalité, mais si cette preuve était inexacte ou pas à jour, elle aurait la possibilité de faire valoir ses arguments. S'il se révélait qu'elle n'avait pas d'autre nationalité, les poursuites cesseraient.
    Merci, madame Girard.
    Monsieur Weston veut invoquer le Règlement.
    Merci, monsieur le président.
    Dans la foulée des propos de M. Dykstra sur ce qui est arrivé à Boston, je voudrais simplement signaler à mes collègues et à toutes les personnes ici présentes que, lundi prochain à 13 heures, un groupe partira à la marche du Parlement pour se rendre à l'ambassade américaine afin d'exprimer notre solidarité et nos condoléances envers les gens de Boston. Nous aurons le temps de revenir de l'ambassade américaine pour la période des questions.
    Merci.
(1045)
    Merci, monsieur Weston.
    Je remercie les fonctionnaires d'avoir assisté à la séance de notre comité. Leur présence a été des plus utiles.
    La séance est levée.
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